De Bismarck à Beveridge: la sécurité sociale pour tous

Il y a cent vingt ans, l’Allemagne est devenue la première nation au monde à adopter un régime d’assurance invalidité vieillesse, conçu par Otto von Bismarck...

Il y a cent vingt ans, l’Allemagne est devenue la première nation au monde à adopter un régime d’assurance invalidité vieillesse, conçu par Otto von Bismarck. Les motivations du chancelier allemand pour l’introduction de l’assurance sociale en Allemagne relevaient à la fois de la promotion du bien-être des travailleurs, afin de permettre à l’économie allemande de fonctionner avec le maximum d’efficacité, et de la volonté d’écarter les appels en faveur d’alternatives socialistes plus radicales.

Associé au programme d’indemnisation des travailleurs accidentés établi en 1884 et à l’assurance «maladie» créée l’année précédente, ce régime a doté les Allemands d’un système complet de sécurité des revenus fondée sur les principes de l’assurance sociale.

Malgré ses références conservatrices, Bismarck sera qualifié de «socialiste» pour avoir introduit ces programmes, comme le sera soixante-dix ans plus tard le Président Roosevelt. En 1935, le président américain a fait entrer en vigueur la loi sur la sécurité sociale, introduisant ainsi un nouveau terme qui combinait «sécurité économique» et «assurance sociale».

Après la première guerre mondiale, les mécanismes d’assurance sociale se sont rapidement développés dans plusieurs régions et la protection sociale fut inscrite à l’ordre du jour des organisations internationales nouvellement créées, notamment l’OIT.

La Conférence internationale des unions nationales des sociétés de secours mutuel et de caisses d’assurance maladie fut lancée à Bruxelles en octobre 1927; elle devint ensuite l’Association internationale de la sécurité sociale (AISS).

En 1941, avec la Charte de l’Atlantique, le Président Roosevelt et le Premier ministre britannique Winston Churchill se sont engagés en faveur de meilleures normes du travail, du progrès économique et de la sécurité sociale pour tous. Au paroxysme de la seconde guerre mondiale, en 1942, le gouvernement du Royaume-Uni a publié le Plan Beveridge du nom de son auteur principal, Lord Beveridge, qui s’est traduit par la mise en place du premier système unifié de sécurité sociale. En France, les efforts menés par le gouvernement, sous la houlette de Pierre Laroque, pour étendre la protection sociale à la population tout entière ont débouché sur la création d’un système national de sécurité sociale en 1946.

En 1944, au tournant de la guerre, la Déclaration historique de Philadelphie plaidait pour l’extension des mesures de sécurité sociale et pour la promotion à l’échelle régionale et internationale d’une coopération systématique et directe entre les organismes de sécurité sociale, par des échanges réguliers d’information et l’étude des problèmes communs liés à l’administration de la sécurité sociale.

Un an plus tard, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté la Déclaration universelle des droits de l’homme, dont l’article 22 stipule que «Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale». En 1952, l’OIT a approuvé la Convention (n° 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum) et, en 2001, elle a lancé une Campagne mondiale sur la sécurité sociale et la couverture pour tous.