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Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Japon (Ratification: 1965)

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La commission prend note des observations ci-après concernant des questions abordées dans le présent commentaire, ainsi que des réponses du gouvernement à leur sujet: les observations de la Confédération japonaise des syndicats (JTUC-RENGO) et de la Fédération japonaise des entreprises (Nippon Keidanren), transmises avec le rapport du gouvernement, ainsi que les observations du Conseil national des sapeurs-pompiers et des travailleurs ambulanciers japonais (ZENSHOKYO), reçues les 10 août 2023.
Article 2 de la convention. Droit du personnel de lutte contre l’incendie de se syndiquer. La commission rappelle ses commentaires de longue date sur la nécessité de reconnaître le droit de se syndiquer au personnel de lutte contre l’incendie. Depuis plusieurs années, le gouvernement fait référence au fonctionnement du système de comités du personnel des services de lutte contre l’incendie (FDPC) présenté comme une solution de substitution. Le rôle de ces comités est d’examiner les propositions faites par le personnel sur les conditions de travail et de soumettre ses conclusions au chef de la brigade des sapeurs-pompiers. Des études sont régulièrement menées auprès des directions des services d’incendie pour recueillir des informations sur les délibérations des FDPC et leurs résultats. Dans son dernier rapport, le gouvernement fait référence à des enquêtes précises menées en 2018 et 2022, dont le but était d’évaluer le fonctionnement du système de FDPC en vue de l’améliorer. Il signale aussi que de janvier 2022 à mars 2023, le ministère de l’Intérieur et des Communications a organisé de la 7e à la 10e consultations avec les représentants des travailleurs où il a notamment été question de l’avis du gouvernement selon lequel le personnel de lutte contre l’incendie est assimilé à la police en ce qui concerne l’application de la convention. Ces sessions de consultation ont aussi été l’occasion d’aborder d’autres thèmes comme le réemploi des sapeurs-pompiers, le harcèlement sur le lieu de travail, l’emploi et la promotion des femmes dans les services de lutte contre l’incendie, la situation du service d’ambulance et le temps de travail.
À cet égard, la commission prend note de l’indication du ZENSHOKYO selon laquelle, depuis 1977, il s’occupe de problèmes comme l’amélioration de l’équipement et des installations pour les sapeurs-pompiers et les ambulanciers, ou leurs conditions de travail sans pouvoir négocier avec la direction ni la consulter puisqu’ils ne peuvent jouir du droit syndical. La crise sanitaire pendant la pandémie de COVID-19 a empiré les conditions de travail du personnel des services d’urgence et en particulier du service d’ambulance. Malgré des propositions claires émanant des sapeurs-pompiers de première intervention, en l’absence d’un système permettant au personnel et à la direction de coopérer, le ZENSHOKYO n’est pas parvenu à s’accorder avec la direction sur l’adoption de mesures urgentes de correction. Compte tenu de cette expérience et en prévision de possibles futures crises, le ZENSHOKYO réclame la reconnaissance du droit de s’organiser du personnel des services de lutte contre l’incendie. La commission note que le gouvernement rappelle les mesures d’urgence qui ont été adoptées en coopération avec les organisations concernées pour réduire la charge de travail des sapeurs-pompiers et des ambulanciers pendant la crise sanitaire, ainsi que les initiatives prises pour augmenter les effectifs et le budget. Il rappelle également que, même pendant la crise sanitaire, le système des FDPC a permis l’examen d’environ 5 000 observations par an, dont 40 pour cent ont été jugées appropriées pour être mises en œuvre. Étant donné que les autorités ont réussi à faire face à la situation difficile des transports en ambulance pendant et après la pandémie de COVID-19, et compte tenu des préoccupations exprimées par l’Association des chefs de brigade des sapeurs-pompiers du Japon et d’autres organisations, estimant que la reconnaissance du droit syndical au personnel des services d’incendie pourrait perturber la structure hiérarchique et organisationnelle du service et donc gêner son fonctionnement lors de catastrophes de grande ampleur, le gouvernement ne partage pas le point de vue du ZENSHOKYO et ne considère pas que la reconnaissance du droit d’organisation des sapeurs-pompiers est essentielle pour se préparer à de futures crises. La commission note aussi que la JTUC–RENGO répète que la solution proposée par l’Agence de gestion des services de lutte contre les incendies et les catastrophes de mettre en place des systèmes de suivi, des services de conseils ou des comités d’équité, ne fonctionne pas et ces propositions ne sont rien de plus que des mesures de fortune. Le refus du gouvernement d’accorder le droit syndical perturbe les services de lutte contre l’incendie et les services d’urgence en sapant le moral de leur personnel, gêne le fonctionnement de ces services et, en fin de compte, met en danger la vie et les biens des citoyens et des résidents. La commission note que la Nippon Keidanren partage le point de vue du gouvernement.
La commission se voit obligée de rappeler que la politique de fonctionnement des FDPC demeure distincte de la reconnaissance du droit syndical énoncé à l’article 2 de la convention. Elle prend note des points de vue divergents sur l’utilité des consultations tenues dans le cadre du système des FDPC et note avec regret qu’aucun progrès n’a été réalisé pour rapprocher les positions sur le droit syndical du personnel des services de lutte contre l’incendie. Une nouvelle fois, la commission s’attend fermement à ce que la poursuite des consultations contribue à de nouveaux progrès vers le respect du droit du personnel des services de lutte contre l’incendie de constituer une organisation de son choix et de s’y affilier pour défendre ses intérêts professionnels. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute évolution à cet égard.
Article 2. Droit du personnel pénitentiaire de se syndiquer. La commission rappelle ses commentaires de longue date concernant la nécessité de reconnaître au personnel pénitentiaire le droit de se syndiquer. Elle note que le gouvernement réaffirme sa position selon laquelle les agents pénitentiaires font partie intégrante de la police – un point de vue que le Comité de la liberté syndicale a accepté dans ses 12e et 54e rapports – et la reconnaissance du droit syndical au personnel des établissements pénitentiaires soulèverait des difficultés en ce qui concerne l’exercice de ses tâches et le maintien de la discipline et de l’ordre dans les établissements pénitentiaires. En outre, il répète qu’en cas d’urgence dans un établissement pénitentiaire, le personnel doit reprendre le contrôle de la situation, y compris par la force si nécessaire. Par conséquent, reconnaître le droit de se syndiquer au personnel des établissements pénitentiaires pourrait être problématique pour l’exercice de ses tâches et le maintien de la discipline et de l’ordre. Depuis 2019, le gouvernement a accordé davantage de possibilités au personnel des établissements pénitentiaires d’exprimer son opinion dans les huit sièges correctionnels régionaux du pays. En 2022, ces sessions se sont déroulées en partie en ligne et 222 membres du personnel (provenant de 75 établissements pénitentiaires) y ont participé. Les participants ont échangé leurs points de vue sur l’amélioration de l’environnement de travail, la formation du personnel et la réduction de la charge de travail. La commission prend note que dans ses observations, la Nippon Keidanren soutient le point de vue du gouvernement selon lequel les agents pénitentiaires devraient être considérés comme faisant partie intégrante de la police.
La commission note que, selon la JTUC-RENGO: i) les différentes mesures décrites par le gouvernement pour que le personnel des établissements pénitentiaires ait la possibilité d’exprimer ses opinions sur ses conditions de travail sont sans rapport avec les droits syndicaux, dont celui de se syndiquer. Ce processus n’est qu’un simple échange de vues avec des salariés individuels et ne peut être considéré comme une négociation; et ii) les mesures décrites par le gouvernement tentent de remplacer la tenue d’une véritable discussion sur la reconnaissance du droit syndical au personnel des établissements pénitentiaires.
Tout en prenant note des informations sur les initiatives du gouvernement visant à donner au personnel des établissements pénitentiaires la possibilité de donner son avis sur différents éléments, dont les conditions de travail, la commission doit répéter que, de son point de vue, ces initiatives demeurent distinctes de la reconnaissance du droit syndical énoncé à l’article 2 de la convention. La commission note avec regret que, malgré ses appels répétés et ceux de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail (ci-après la «Commission de la Conférence»), le gouvernement n’a toujours pas entamé de consultation avec les partenaires sociaux pour déterminer les catégories d’agents pénitentiaires qui peuvent constituer une organisation de leur choix et s’y affilier pour défendre leurs intérêts professionnels. À cet égard, la commission rappelle que dans de précédents rapports, le gouvernement avait fait référence à différentes catégories de personnel des établissements pénitentiaires, à savoir: i) les gardiens de prison, qui ont un devoir d’intervention sans réserve dans les établissements pénitentiaires, y compris celui d’assurer des services de sécurité en recourant à la force physique, et qui sont habilités à faire usage d’armes de poing et d’armes légères; ii) le personnel de l’institution pénitentiaire autre que les gardiens de prison, qui participe directement à la gestion des établissements ou au traitement des détenus; et iii) le personnel de l’institution pénitentiaire chargé, conformément au Code de procédure pénale, de remplir des missions de police judiciaire dans les cas de crimes commis à l’intérieur des institutions, et qui est habilité à procéder à des arrestations, des fouilles et des saisies. Par conséquent, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement d’entamer sans autre délai des consultations avec les partenaires sociaux et les autres parties prenantes concernées pour déterminer les mesures nécessaires pour que les agents pénitentiaires autres que ceux investis de fonctions de police judiciaire aient le droit de constituer une organisation de leur choix et de s’y affilier pour défendre leurs intérêts professionnels, et de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard.
Article 3. Non-reconnaissance de droits fondamentaux au travail à des salariés du secteur public. La commission rappelle ses commentaires de longue date sur la nécessité de reconnaître aux salariés des services publics leurs droits fondamentaux au travail, en particulier celui de recourir à l’action revendicative sans s’exposer à des sanctions, à la seule exception des fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’État et des travailleurs employés dans des services essentiels au sens strict du terme. La commission prend note des informations de caractère général que le gouvernement fournit à nouveau sur son approche globale qui consiste à entendre les avis des organisations de salariés. Il fait une nouvelle fois référence aux procédures de l’Autorité nationale du personnel (NPA), présentée comme une garantie compensatoire pour les salariés des services publics dont les droits fondamentaux au travail sont limités. Selon le gouvernement, la NPA a tenu 180 réunions officielles avec des organisations de salariés en 2021 et 190 en 2022, à l’occasion desquelles des recommandations ont été formulées pour aligner les conditions de travail des salariés du service public sur les conditions générales de la société. Il cite l’exemple de l’utilisation du système de recommandations de la NPA par le biais d’enquêtes menées à l’échelle nationale pour revoir de la rémunération des salariés du service public, mis en œuvre depuis 1960. Le gouvernement affirme donc à nouveau que ces mesures compensatoires préservent comme il se doit les conditions de travail des salariés du service public. La commission prend note des observations de la Nippon Keidanren dans lesquelles elle soutient l’intention du gouvernement de continuer à suivre de près cet examen des mesures en faveur d’un système autonome de relations entre travailleurs et employeurs, en tenant compte des points de vue des organisations de salariés.
Par ailleurs, la commission prend note des observations de la JTUC-RENGO qui regrette que la position du gouvernement sur le système autonome de relations entre travailleurs et employeurs n’ait pas évolué et que ce dernier n’ait pas entamé de consultations avec les organisations concernées. En outre, la JTUC-RENGO rappelle que les recommandations de la NPA dépendent d’une décision politique, ce qui montre bien que ce mécanisme est défaillant en tant que mesure compensatoire. L’organisation regrette que systématiquement, le gouvernement se contente de répéter invariablement sa déclaration faite en 2013 devant la Chambre des représentants, à savoir qu’«un système autonome de relations professionnelles devrait aborder un large éventail de questions et, l’approbation des citoyens n’ayant pas encore été obtenue, il sera nécessaire de continuer à examiner attentivement cette question». La JTUC-RENGO déplore le manque évident d’intention de la part du gouvernement de revoir le système juridique concernant les droits fondamentaux des salariés du service public.
Notant avec un profond regret que le rapport ne contient aucun signe de progrès en la matière, la commission se voit obligée de prier instamment le gouvernement d’engager sans plus tarder des consultations avec les partenaires sociaux et les autres parties prenantes concernées pour déterminer les mesures nécessaires afin de garantir que les salariés du service public qui n’exercent pas des fonctions d’autorité au nom de l’État jouissent pleinement de leurs droits fondamentaux au travail, en particulier celui de mener des actions collectives. En outre, elle le prie instamment de reprendre les consultations avec les partenaires sociaux concernés pour revoir le système actuel et garantir des procédures de conciliation et d’arbitrage efficaces, impartiales et rapides, dans lesquelles les parties ont confiance et peuvent participer à toutes les étapes, et dont les sentences, une fois rendues, sont pleinement et rapidement mises en application. La commission s’attend à ce que le gouvernement fournisse des informations sur des mesures significatives prises à cet égard.
Salariés de la fonction publique locale. La commission rappelle que dans ses commentaires précédents, elle avait pris note que des organisations représentatives de salariés de la fonction publique locale avaient fait référence aux effets néfastes sur le droit de se syndiquer de l’entrée en vigueur en avril 2020 de la loi révisée sur la fonction publique locale: i) les salariés non réguliers de la fonction publique locale et leurs syndicats ne sont pas couverts par la loi générale du travail qui établit les droits fondamentaux au travail et fixe les conditions dans lesquelles ce personnel peut saisir la commission des relations du travail en cas d’allégations de pratique de travail déloyale; ii) le nouveau système, qui vise à limiter le recours à du personnel engagé à temps partiel sur des missions permanentes – par le biais de postes relevant du service spécial, définis par année fiscale comme dans le cas des employés des services réguliers – a pour effet d’accroître le nombre de travailleurs dépourvus de droits fondamentaux au travail; iii) le système d’emploi annuel conditionnel en place suscite des angoisses liées à l’emploi et affaiblit l’action syndicale; et iv) ces situations appellent en outre le rétablissement de toute urgence des droits fondamentaux au travail pour tous les salariés de la fonction publique.
La commission note que le gouvernement se contente de répéter que les amendements législatifs garantissent une nomination appropriée du personnel en service spécial et des salariés nommés à titre temporaire, et clarifient le cadre de nomination du personnel à temps partiel des services réguliers. De son point de vue, les amendements garantissent le statut de ces personnels et salariés, ainsi que l’introduction de certaines indemnités qui leur sont dues. La modification de la condition de jouissance des droits fondamentaux au travail est donc la conséquence d’une garantie de la forme de nomination initialement prévue pour ces personnes. En outre, le gouvernement déclare qu’il examinera attentivement ce que devraient être les droits au travail fondamentaux des salariés du service public local «d’une manière cohérente avec les mesures pour le système de relations entre travailleurs et employeurs pour les salariés du service public national», comme le prévoit la disposition supplémentaire de la loi sur la réforme de la fonction publique. La commission constate que la Nippon Keidanren appuie la position du gouvernement en faveur d’un examen approfondi des droits fondamentaux au travail des salariés de la fonction publique locale. Par ailleurs, elle note l’indication de la JTUC-RENGO selon laquelle, bien que les amendements de la législation constituent une étape vers la garantie d’une nomination correcte du personnel en service spécial et des salariés nommés à titre temporaire, il n’est toujours pas question des droits fondamentaux au travail des salariés des services publics locaux et ceux-ci devraient être examinés dans le cadre général du rétablissement des droits fondamentaux au travail de tous les fonctionnaires.
La commission doit une fois de plus noter que les modifications à la loi sur la fonction publique locale, entrées en vigueur en avril 2020 pour les salariés de la fonction publique locale, ont eu pour effet d’élargir la catégorie des travailleurs du secteur public dont les droits garantis dans la convention ne sont pas pleinement garantis. Par conséquent, la commission se voit à nouveau obligée de prier instamment le gouvernement d’accélérer sans plus tarder l’examen du système autonome de relations entre travailleurs et employeurs, en consultation avec les partenaires sociaux concernés, pour veiller à ce que les syndicats municipaux ne soient pas privés de leurs droits syndicaux acquis de longue date par l’adoption de ces modifications. Elle s’attend à ce que le gouvernement fournisse des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées à cet égard.
Articles 2 et 3. Consultations sur un plan d’action assorti d’un calendrier de mesures pour le système autonome de relations entre travailleurs et employeurs. La commission note avec regret que le gouvernement se contente de répéter qu’il examine attentivement la manière de répondre aux conclusions et recommandations formulées par la Commission de la Conférence en 2018 et qu’il échange des avis avec la JTUC-RENGO à cet égard. Toutefois, elle note que la JTUC-RENGO nie qu’un tel échange d’avis ait lieu et déplore que, malgré les cinq années écoulées depuis la demande de la Commission de la Conférence concernant l’élaboration d’un plan d’action assorti d’un calendrier avec les partenaires sociaux pour mettre en œuvre ses recommandations, le gouvernement n’ait pris aucune mesure pour concrétiser un tel plan. La commission observe avec préoccupation que le gouvernement n’a fait aucun progrès tangible dans la consultation des partenaires sociaux pour élaborer le plan d’action demandé par la Commission de la Conférence depuis 2018. Par conséquent, la commission se voit obligée de prier instamment le gouvernement de prendre sans autre délai les mesures nécessaires pour établir, en consultation avec les partenaires sociaux concernés, un plan d’action assorti d’un calendrier pour donner effet aux recommandations de la Commission de la Conférence. La commission s’attend à ce que le gouvernement communique des informations sur des mesures concrètes à cet égard.
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