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Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Chine - Région administrative spéciale de Hong-kong (Ratification: 1997)

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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2022, et de la réponse du gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong-kong (RASHK) de la République populaire de Chine à celles-ci, ainsi que des observations de l’Internationale de l’éducation (IE), reçues le 31 août 2023, et des observations conjointes de la CSI et de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF), reçues le 27 septembre 2023, qui portent sur des matières examinées par la commission dans le présent commentaire. Elle prend note également de la réponse du gouvernement aux observations formulées par la CSI en 2021.
Droits syndicaux et libertés publiques. La commission note que dans leurs observations de 2022 et 2023, la CSI, l’ITF et l’IE continuent à dénoncer un recul prononcé du respect des libertés publiques et de la liberté syndicale, des syndicalistes indépendants étant la cible d’arrestations arbitraires, de surveillance et de poursuites judiciaires. Elles allèguent en particulier: i) la condamnation de M. Lee Cheuk Yan en 2022 pour dix délits en rapport avec des protestations publiques en sa qualité de secrétaire général de la Confédération des syndicats de Hong-kong (HKCTU) maintenant dissoute, et son procès en cours pour des actions menées en sa qualité de président de l’Alliance hongkongaise de soutien au mouvement démocratique patriotique de Pékin (HK Alliance); ii) la condamnation, en septembre 2022, à 19 mois de prison de cinq dirigeants de l’Union générale des orthophonistes de Hong-kong (GUHKST) pour une publication par le syndicat de livres pour enfants contenant des histoires inspirées des manifestations pro-démocratiques des travailleurs de la santé en 2019 et 2020; iii) la poursuite de la détention, depuis février 2021, et le refus d’une libération sous caution de Mme Carol Ng, ex-présidente de la HKCTU, et la nouvelle arrestation de Mme Winnie Yu, ex présidente de l’Alliance du personnel de l’autorité des hôpitaux (HAEA), prétendument pour non-respect des conditions de sa libération sous caution; iv) le prochain procès, en novembre 2023, de 47 activistes pro-démocratiques, dont Mmes Ng et Yu, arrêtés dans le cadre des primaires d’un parti politique en 2020; v) l’arrestation de Mme Elizabeth Tang, secrétaire générale de la Fédération internationale des travailleurs domestiques et ancienne directrice exécutive de la HKCTU (elle avait été libérée sous caution en mars 2023); vi) l’interrogatoire par les forces de sécurité de 13 activistes syndicaux en mars 2023; et vii) les mandats d’arrêt délivrés contre huit activistes à l’étranger, dont l’ancien directeur exécutif de la HKCTU, M. Mung Siu Tat Christopher (pour lequel le gouvernement a lancé un avis de recherche avec une prime d’un million de dollars de Hong-kong (128 260 dollars É.-U.)) pour descrimes allégués relevant de la loi sur la sécurité nationale (NSL). La CSI et l’ITF allèguent en outre que les arrestations de responsables syndicaux sont souvent suivies d’arrestations d’autres activistes de leurs organisations et que leur libération sous caution est assortie de conditions rigoureuses, notamment l’obligation de se présenter régulièrement à la police, les perquisitions de leurs domiciles et leurs bureaux et la saisie de leurs avoirs personnels, y compris leurs documents de voyage, ce qui limite fortement l’exercice de leurs fonctions syndicales. La commission rappelle à cet égard que les arrestations de M. Lee Cheuk Yan, Mme Carol Ng et Mme Winnie Yu, ainsi que des cinq dirigeants de la GUHKST sont examinées par le Comité de la liberté syndicale (CLS) (cas no 3406) qui a prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures appropriées pour s’assurer que M. Lee Cheuk Yan n’est pas emprisonné pour avoir exercé des activités syndicales légitimes et pour lui garantir, en droit et dans la pratique, la pleine jouissance des droits syndicaux (voir 401e rapport, mars 2023, paragr. 322).
La commission note que, dans son rapport et sa réponse aux observations de la CSI de 2022, le gouvernement répète que les arrestations des responsables syndicaux précités sont sans rapport avec leurs fonctions de dirigeants de syndicats et que les pourvois en appel de certains responsables du GUHKST ont été abandonnés par la suite. Il répète que les délits menaçant la sécurité nationale sont traités conformément aux procédures établies et dans le respect total des droits de la défense et que toutes les mesures d’application de la loi sont fondées sur des moyens de preuve, dans le strict respect de la loi, indépendamment du fait que les personnes concernées soient des syndicalistes. Ensuite, le gouvernement réitère des informations qu’il avait déjà fournies à propos de dispositions législatives qui reconnaissent le droit à la liberté syndicale et le droit des organisations syndicales d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes, cela incluant le droit de grève, mais il souligne aussi l’importance du respect du droit du pays lors de l’exercice des droits inscrits dans la convention. Il s’agit en particulier de tout acte de protestation ou de manifestation que la police n’a pas expressément autorisé, ou qui recourt à la violence ou menace de recourir à la violence pour exprimer des opinions, ou qui franchit la frontière de l’exercice pacifique des droits et pénètre dans le territoire des activités illicites, et contre lequel la police est tenue d’agir. Tout en prenant dûment note des informations fournies par le gouvernement à propos des garanties législatives et procédurales se rapportant au droit de s’organiser et aux libertés publiques qui vont de pair, la commission observe avec une vive préoccupation les signes d’un recul constant des libertés publiques et de la liberté syndicale qui ont pour conséquence, selon la CSI et l’ITF, que le mouvement syndical indépendant est inexistant à Hong-kong. La commission rappelle que la résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail de 1970 concernant les droits syndicaux et leur lien avec les libertés publiques insiste sur le fait que les droits conférés aux organisations de travailleurs et d’employeurs doivent se fonder sur le respect des libertés publiques, dont l’absence enlève toute signification au concept de droits syndicaux. Rappelant encore l’interdépendance entre les libertés publiques et les droits syndicaux et insistant sur le fait qu’un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut prospérer que dans un climat exempt de violence, de pression et de menaces de quelque sorte que ce soit, la commission attend fermement du gouvernement qu’il garantisse le respect intégral de ce qui précède et l’invite instamment à exprimer ses commentaires sur les observations de 2023 de la CSI, l’ITF et l’IE, et à fournir des informations complètes et détaillées sur l’issue de toutes les procédures, accompagnées de copies des décisions de justice correspondantes.
Articles 2, 3, 5 et 8 de la convention. Application de la loi sur la sécurité nationale. Dans son précédent commentaire, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations spécifiques sur l’application dans les faits de la Loi sur la sécurité nationale (NSL) et sur les consultations publiques qui, aux dires du gouvernement, apporteraient des éclaircissements sur les principes législatifs applicables. La commission note que le gouvernement réitère des informations qu’il avait déjà fournies sur les avantages de la NSL, garante de sécurité et de stabilité, et sur la place importante qu’elle accorde à la protection et au respect des droits de l’homme ainsi que son attachement à l’état de droit. Le gouvernement affirme aussi que tout un chacun est tenu d’observer les prescriptions légales et ne peut compromettre la sécurité nationale ni la sûreté publique, l’ordre public ou les droits et libertés d’autrui. Tout en prenant note également des actions de sensibilisation menées par le gouvernement dans le but de renforcer la compréhension par les responsables syndicaux, les enseignants et les fonctionnaires de la mise en application de la NSL, la commission note avec regret qu’en dépit de sa requête ainsi que de celle de la Commission de l’application des normes de la Conférence et du CLS, aucune consultation concrète ne semble avoir eu lieu avec les partenaires sociaux à propos de l’incidence négative que l’application de la NSL serait censée avoir sur les droits inscrits dans la convention.
Ensuite, la commission prend note avec préoccupation des observations de la CSI, l’ITF et l’IE de 2022 et 2023 selon lesquelles l’application de la NSL continue à entraîner la radiation ou le démantèlement d’organisations syndicales ainsi que la suppression de libertés fondamentales et est utilisée pour intimider, harceler, arrêter, poursuivre et condamner des syndicalistes pour de prétendus délits mettant en danger la sécurité nationale. Ces allégations portent en particulier sur: i) une surveillance et un harcèlement accrus des syndicats indépendants, notamment par l’envoi de lettres de demande de renseignements, de lettres d’avertissement et de citations à fournir des informations (au syndicat Connect des cols-blancs (administration et employés de bureau) de Hong-kong et au Syndicat général du personnel de l’industrie de la finance de Hong-kong en décembre 2021, à l’Association des journalistes de Hong-kong (HKJA) en janvier 2022; en février et mars 2022, à la HKCTU dont les membres du bureau ont été arrêté par les forces de sécurité pour ne pas avoir donné des informations détaillées en application de l’Ordonnance sur les sociétés, leurs avoirs personnels ayant été saisis et les locaux du syndicat perquisitionnés; au Syndicat des travailleurs de l’éducation à l’environnement et la préservation de l’écologie et au Syndicat de l’industrie musicale de Hong-kong en mars 2022; et au Syndicat Bros’ Sis des travailleurs de la comptabilité et au Syndicat général des travailleurs des chantiers de construction, au Syndicat de la solidarité des travailleurs de l’industrie du cintrage, au Syndicat général des salariés des industries de l’hôtellerie et de la restauration, au syndicat du personnel de la New World First Bus Company et au syndicat du personnel de la Citybus Limited, tout cela entre janvier et août 2022); ii) l’ingérence dans l’enregistrement des syndicats par l’exigence d’un engagement à «ne pas mettre en danger la sécurité nationale» ou à s’engager dans des activités «contraires aux intérêts de la sécurité nationale», ainsi que par l’insertion de clauses relatives à la mise en danger de la sécurité nationale dans l’Ordonnance sur l’enregistrement des travailleurs sociaux (SWRO) et des initiatives similaires pour l’Ordonnance sur les syndicats (TUO); iii) la radiation et la dissolution forcée d’organisations syndicales faisant suite à des campagnes antisyndicales dans les médias officiels qui suscitent des inquiétudes pour la sécurité de syndicalistes (le Syndicat professionnel des enseignants de Hong-kong en août 2020, la HKCTU en octobre 2022, la Fondation pour l’éducation de la HKCTU en mai 2022, l’Association des journalistes de Hong-kong (HKJA) ainsi que certains médias apparentés, et le Syndicat général des travailleuses et travailleurs des institutions de traitement et de soins collectifs et la Confédération syndicale du personnel des instituts tertiaires); iv) l’invocation de l’article 10 de la TUO par le service de l’enregistrement des syndicats qui peut conduire à l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat (le syndicat Connect des cols-blancs (administration et employés de bureau) de Hong-kong et le Syndicat général du personnel de l’industrie de la finance de Hong-kong en décembre 2021 et la HKJA en janvier 2022); v) une surveillance et une répression particulièrement féroce de la communauté enseignante, avec l’obligation de prêter serment de loyauté envers le gouvernement, des enquêtes pour manquement professionnel et des sanctions disciplinaires, ce qui débouche sur un environnement dans lequel les enseignants ne peuvent plus se livrer à des activités syndicales sans subir des violences et de l’intimidation; et vi) d’autres restrictions et violations des libertés publiques (arrestations de 260 personnes et poursuites contre 161 d’entre elles, dont 3 syndicalistes, pour des délits mettant en danger la sécurité nationale; des pressions demandant l’annulation de manifestations (l’Association des travailleuses de Hong-kong); les interrogatoires de cadres de la HKCTU; le gel des comptes en banque et des avoirs; des initiatives visant à réglementer drastiquement les activités de financement participatif et à adopter d’autres textes de loi sur la sécurité nationale).
La commission note que, dans sa réponse aux observations de la CSI de 2022, le gouvernement exprime ses commentaires sur certaines des allégations qui précèdent. Il les accuse d’être foncièrement inexactes et soutient que les incidents isolés cités par la CSI sont liés à des activités potentiellement illicites, sans rapport avec l’exercice des droits syndicaux ou qui résultent de décisions volontaires des organisations syndicales concernées d’entamer leur dissolution. La commission note à ce sujet que, sur base des statistiques communiquées par le gouvernement, à la date du 31 mai 2023, le pays comptait 1 460 organisations et fédérations syndicales enregistrées, soit un recul par rapport aux 1 541 d’octobre 2021. S’agissant des allégations d’arrestations de syndicalistes et de saisie de leurs avoirs, le gouvernement indique que des sanctions légales ne sont imposées que quand l’intéressé ne se soumet pas à une ordonnance de fournir des informations à un tribunal sans explication valable. Concernant l’ajout d’une disposition relative à la sécurité nationale dans la TUO et la SWRO, le gouvernement indique que cela correspond à la gravité du délit et assure qu’une personne jugée coupable d’un tel délit perd temporairement ses droits au titre de la TUO ou est radiée comme travailleur social. Il explique que ces délits sont, entre autres, la «sécession», la «subversion», les «activités terroristes» et la «collusion avec un pays étranger ou avec des éléments extérieurs pour mettre en danger la sécurité nationale», tels qu’énoncés dans la NSL, et les délits de «trahison» et «sédition» cités dans l’ordonnance sur les crimes. La commission observe à ce propos que la formulation non exhaustive et le large champ d’application de cette disposition peuvent conduire à une interprétation arbitraire. Enfin, le gouvernement dit avoir mené des travaux pertinents sur la question de sa responsabilité constitutionnelle de promulguer une législation fondée sur l’article 23 de la loi organique, en ayant aussi procédé à des recherches juridiques en rapport avec la sécurité nationale, et qu’il prendra des mesures concrètes pour expliquer clairement les principes législatifs afin d’éviter les malentendus.
La commission déduit de ce qui précède que, malgré les assurances du gouvernement disant que la NSL maintient la protection des libertés publiques fondamentales et des droits syndicaux, de nombreux cas de violations graves sont signalés par la CSI et l’ITF à propos de l’application de cette loi, ce qui entraînerait un recul des libertés publiques et des droits syndicaux contraire à la convention. La commission rappelle une fois encore que le but premier de la convention est de préserver l’autonomie et l’indépendance des organisations de travailleurs et d’employeurs face aux pouvoirs publics, tant au moment de leur création que pendant leur fonctionnement et à leur dissolution, et d’empêcher toute ingérence des autorités qui entraverait la liberté syndicale et la liberté de réunion ou empêcherait l’exercice licite de ces droits, pour autant que celui-ci ne cause pas de menace grave et imminente pour l’ordre public. En fonction de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’application de la NSL dans la pratique et de contrôler, de concert avec les partenaires sociaux, les répercussions négatives qu’elle peut avoir sur l’exercice des droits inscrits dans la convention. Elle compte que celles-ci seront évaluées et traitées de manière adéquate, notamment dans le cadre de consultations publiques et de publications de la part du gouvernement, et elle prie le gouvernement de fournir des détails à ce sujet. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations spécifiques sur les amendements qui sont proposés en vue d’ajouter des dispositions à la TUO et la SWRO et sur leur application dans la pratique. La commission prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur le nombre des organisations syndicales dissoutes ou radiées, volontairement ou non, au cours des sept dernières années ainsi qu’une liste détaillée des syndicalistes ayant fait l’objet de poursuites, d’arrestations ou de condamnations de la part des autorités au cours de la même période, en précisant les chefs d’accusation retenus contre eux. La commission prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir, en droit comme dans les faits, la pleine jouissance des droits inscrits dans la convention.
Notant l’indication donnée par la CSI et l’ITF suivant laquelle la législation locale relevant de l’article 23 de la loi organique arrive à expiration à la fin 2024 et que d’autres textes de loi seront promulgués afin d’assurer la protection de la sécurité nationale, la commission prie le gouvernement de fournir des informations à ce sujet.
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