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Demande directe (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - République de Corée (Ratification: 2021)

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La commission prend note du premier rapport du gouvernement. La commission prend note des observations de la Fédération des employeurs de Corée (KEF) communiquées avec le rapport du gouvernement, ainsi que de la réponse du gouvernement à ce sujet. La commission prend également note des observations de la Confédération coréenne des syndicats (KCTU) et de la Fédération des syndicats coréens (FKTU), reçues les 2 et 8 septembre 2023, ainsi que des observations de l’Internationale de l’éducation (IE), d’IndustriALL Global Union et de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF), reçues respectivement les 31 août, 1er et 27 septembre 2023, qui portent sur des questions examinées dans le présent commentaire, et les réponses du gouvernement à ce sujet. La commission note en outre que le Comité de la liberté syndicale lui a renvoyé les aspects législatifs du cas no 1865 concernant la République de Corée [voir 404e rapport, paragr. 76], qui sont examinés dans le présent commentaire.
Libertés civiles. La commission prend note des observations conjointes de la CSI et de l’ITF concernant l’arrestation, la détention, les poursuites pénales et la condamnation de dirigeants et de membres de la KCTU, mentionnés ci-après, en raison de leurs activités syndicales: M. Kim Myung-hwan et trois membres du personnel ont été arrêtés et placés en détention provisoire pour entrave aux obligations publiques, à la circulation publique, entrée sans autorisation dans des biens publics et destruction de biens publics, lors des mobilisations syndicales qui ont eu lieu en mars et avril 2019 pour protester contre certains amendements à la législation du travail. M. Kim a été condamné à une peine de deux ans de prison avec quatre ans de mise à l’épreuve. Pendant la pandémie de Covid-19, M. Yang Kyeungsoo et M. Youn Taeg-gun ont été arrêtés et inculpés pour violation de la loi sur le contrôle et la prévention des maladies infectieuses, de la loi sur les rassemblements et les manifestations et du Code pénal, lors des rassemblements syndicaux qui ont eu lieu en juin et juillet 2021 et d’une grève générale convoquée par le syndicat le 20 octobre 2021 pour réclamer des emplois et de meilleures conditions de travail, dans le contexte des effets de la pandémie. M. Yang a été condamné à un an d’emprisonnement (avec sursis) et à une amende de 3 millions de KRW. M. Youn a été libéré après 94 jours de détention, un tribunal ayant statué que son maintien en détention n’était pas justifié. Beaucoup d’autres syndicalistes ont été convoqués pour avoir participé aux rassemblements de 2021, desquels 19 ont été inculpés et jugés, 21 autres ayant fait l’objet d’une ordonnance sommaire. La commission prend également note des observations de l’IE, dénonçant d’importantes restrictions des libertés politiques et civiles des enseignants coréens dans les écoles publiques, et des fonctionnaires de l’administration publique de l’éducation, indiquant aussi que parfois, les enseignants font face à des répercussions judiciaires pour avoir manifesté un engament politique minime, comme le fait de «liker» un message politique sur les réseaux sociaux. L’IE déclare en outre que lors de l’élection de dix-sept directeurs régionaux de l’éducation, le 1er juin 2022, les enseignants de l’éducation primaire et secondaire et les syndicats d’enseignants ont été privés, par la législation, de la possibilité d’exprimer leurs opinions. La commission note que l’article 3 de la loi sur les syndicats d’enseignants (TTUA) interdit aux syndicats d’enseignants de participer à des activités politiques, et que l’article 4 de la loi sur les syndicats de fonctionnaires (POTUA) interdit aussi aux syndicats et à leurs membres de participer à des activités politiques. En outre, en vertu de l’article 66(1) de la loi sur les fonctionnaires d’État (SPOA) et de l’article 58(1) de la loi sur la fonction publique territoriale (LPOA), «aucun fonctionnaire ne doit participer à des activités collectives dans le cadre d’un mouvement syndical, ou à des activités autres que celles liées aux services publics». La commission note, d’après l’indication du gouvernement, que ces règles visent à garantir l’impartialité politique du secteur de l’éducation et à protéger ce secteur contre toute influence ou ingérence indue de forces politiques. Le gouvernement indique aussi que plusieurs amendements à la SPOA sont actuellement en cours d’examen à l’Assemblée nationale. La commission rappelle l’importance fondamentale des libertés civiles, en particulier le droit à la liberté et à la sécurité de la personne et le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement, la liberté d’opinion et d’expression et la liberté de réunion, pour permettre le plein exercice de la liberté syndicale. La commission rappelle en outre que le Comité de la liberté syndicale a prié le gouvernement de veiller à ce que les syndicats de fonctionnaires aient la possibilité d’exprimer publiquement leurs vues sur les questions relatives à la politique économique et sociale qui ont un impact direct sur les intérêts de leurs membres, et de ne plus prendre de mesures disciplinaires à l’encontre de fonctionnaires pour leur soutien personnel à un parti politique ou pour l’expression de leur opinion à propos de la politique économique et sociale [voir cas no 1865, 404erapport, paragr. 69 e)]. La commission s’attend à ce que ces principes soient pris en compte dans le processus de révision de la SPOA en cours, et prie le gouvernement de fournir des informations sur ce processus et ses résultats. La commission prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur toute charge retenue contre des membres de la KCTU qui ont été inculpés en raison des rassemblements et de la grève générale de 2021, ainsi que sur l’état d’avancement et l’issue des procédures judiciaires relatives à leurs cas.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission note qu’en vertu de l’article 2 (4) (d) de la loi d’amendement sur les syndicats et l’harmonisation des relations de travail (TULRAA), telle que révisée en 2021, une organisation qui compte parmi ses membres des personnes autres que des travailleurs n’est pas considérée comme un syndicat; et que l’article 2 (1) de cette même loi définit le terme «travailleur» comme «toute personne qui vit d’un salaire, d’une rémunération ou de tout autre revenu équivalent, quelle que soit sa profession». La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la révision législative de 2021 a supprimé l’exclusion des travailleurs licenciés et des chômeurs du champ d’application de la TULRAA, et que la Cour suprême de Corée a statué que les travailleurs non-salariés dépendants doivent également jouir du droit d’organisation. La commission prend note également de l’observation de la KCTU selon laquelle les critères sur lesquels se fonde la Cour suprême mettent l’accent sur la «dépendance économique» et que, par conséquent, il est difficile pour les travailleurs indépendants, les freelances et les travailleurs agricoles de se faire reconnaître en tant que travailleurs au titre de la TULRAA. La FKTU fait la même observation et ajoute que les travailleurs atypiques comme les travailleurs des transports et les travailleurs des plateformes engagés dans des formes atypiques d’emploi, de plus en plus répandues, ne sont pas non plus clairement couverts par la définition de travailleur de la TULRAA. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle les personnes exerçant des professions libérales et les travailleurs totalement indépendants peuvent jouir de la liberté syndicale par l’intermédiaire d’associations à caractère générale; que l’amendement de juillet 2021 à la TULRAA permet aux travailleurs indépendants de s’affilier à des syndicats et que l’amendement à l’article 2 (1) visant à inclure les travailleurs engagés dans des types d’emploi particuliers et les travailleurs des plateformes dans la définition des «travailleurs» est actuellement devant l’Assemblée nationale pour examen. Le gouvernement ajoute que la Cour suprême ainsi que les autorités administratives tendent à reconnaître le statut de travailleur aux personnes engagées dans des types d’emploi particuliers. Rappelant que les travailleurs indépendants et les travailleurs agricoles, ainsi que les travailleurs freelances, les travailleurs engagés dans des formes d’emploi atypiques et les travailleurs des plateformes doivent pouvoir jouir des droits consacrés par la convention, la commission s’attend à ce que le processus de réforme législative concernant l’extension de la couverture de la définition du terme «travailleur» à l’article 2 (1) de la TULRAA reconnaisse et garantisse effectivement à toutes ces catégories de travailleurs le droit de former des organisations et de s’y affilier, et prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
Fonctionnaires. La commission note qu’en vertu de l’article 6 (1) de la POTUA, lue conjointement avec l’article 2 de la SPOA et les articles 2 (1) et 2-2 de la loi sur les agents du service extérieur, les catégories suivantes d’agents publics sont exclues du champ d’application de la POTUA: i) les fonctionnaires du service extérieur occupant les mêmes postes ou des postes de rang supérieur au grade de conseiller prévu par décret présidentiel et ceux relevant du service des hauts fonctionnaires; ii) les fonctionnaires du service de la politique, y compris ceux qui sont chargés des affaires relatives au processus décisionnel des politiques complexes ou de l’assistance à ces affaires; et iii) les fonctionnaires en «service extraordinaire», à savoir ceux qui, en vertu de la législation ou du statut, sont affectés au service civil extraordinaire pour exercer des fonctions d’assistance en tant que secrétaire, ou pour exercer des fonctions spécifiques. La commission note en outre que, conformément à l’article 6 (2) de la loi POTUA, les catégories suivantes sont également exclues du champ d’application: i) les fonctionnaires qui ont le droit de diriger et de superviser d’autres fonctionnaires dont les fonctions principales sont différentes ou qui s’occupent de manière générale de la gestion des affaires d’autres fonctionnaires; ii) les fonctionnaires dont les fonctions principales, telles que la gestion du personnel et des rémunérations ou la médiation et la supervision des relations de travail, sont jugées incompatibles avec le statut de membre d’un syndicat; et iii) les fonctionnaires qui sont occupés dans un service correctionnel, chargé d’enquêtes, du bien-être public et de la sécurité nationale. La commission prend note de l’indication du gouvernement en réponse aux observations de la KCTU, selon laquelle les restrictions à l’affiliation syndicale des fonctionnaires qui ont, de fait, un statut d’employeur, agissent au nom d’employeurs, ou sont occupés dans un service correctionnel, chargé d’enquêtes et exercent d’autres fonctions liées à la sûreté publique et à la sécurité nationale, visent à prévenir le risque d’ingérence dans l’autonomie et l’indépendance des syndicats. En ce qui concerne les hauts fonctionnaires, la commission rappelle qu’interdire à ces agents le droit de s’affilier à des organisations syndicales représentant les autres travailleurs du secteur public n’est pas nécessairement incompatible avec la liberté syndicale, à deux conditions: i) les hauts fonctionnaires doivent avoir le droit de créer leurs propres organisations pour la défense de leurs intérêts; et ii) la législation doit limiter cette catégorie aux personnes exerçant de hautes responsabilités de direction ou de formulation de politiques. En outre, la commission a toujours considéré que, bien que l’exclusion des membres des forces armées et de la police du droit de se syndiquer ne soit pas contraire aux dispositions de la convention, il n’en va pas de même dans le cas du personnel pénitentiaire [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 66 et 69]. Rappelant que le champ d’application de la convention couvre tous les fonctionnaires, à la seule exception de la police et des forces armées, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, pour revoir la législation et la mettre en conformité avec les principes susmentionnés, en vue de reconnaître le droit des catégories de fonctionnaires exclues de former des organisations et de s’y affilier.La commission prie le gouvernement de la tenir informée de toute mesure prise à cet égard.
Droit de former des organisations et de s’y affilier sans autorisation préalable. La commission note qu’en vertu de l’article 12 (3) 1) de la TULRAA, lu conjointement avec l’article 2 (4) d) de la même loi, une organisation qui autorise l’affiliation de personnes autres que des «travailleurs» ne pourra pas obtenir l’attestation d’enregistrement, en d’autres termes, sa demande d’enregistrement sera rejetée. La commission prend note des observations de la KCTU à cet égard, indiquant que dans la pratique, il faut beaucoup de temps aux organismes administratifs (allant de plusieurs mois à plus d’un an) pour évaluer les critères d’admissibilité de l’organisation candidate, en particulier pour ce qui est de déterminer si les membres peuvent être considérés comme des travailleurs. La KCTU donne les exemples suivants: le Syndicat national des vendeurs d’assurance (un an et quatre mois), le Syndicat national des chauffeurs par intermédiaire (un an et deux mois), et le Syndicat des chauffeurs-livreurs (trois mois). La KCTU observe aussi que la demande d’enregistrement du Syndicat des travailleurs indépendants coréens, formé par les marchands ambulants sur les marchés traditionnels et dans les rues, a été rejetée. La commission prend également note de la réponse du gouvernement selon laquelle, étant donné que la Cour suprême et la Cour constitutionnelle ont statué que les autorités administratives ne disposent d’aucun pouvoir discrétionnaire pour traiter les avis de formation de syndicats, le système lié à ces avis ne permet pas d’accorder des autorisations. Le gouvernement indique aussi qu’à réception d’un avis de formation d’un syndicat, un certificat de formation doit être émis dans les trois jours et que, s’il se peut que des retards exceptionnels se produisent, par exemple, lorsqu’un avis de formation d’un syndicat doit être complété parce qu’il présente des omissions ou des erreurs, le certificat prendra effet rétroactivement à compter de la date de la soumission, une fois qu’il aura été émis. Compte tenu de ce qui précède, la commission note que, bien qu’en règle générale la loi n’exige pas d’autorisation préalable pour la formation d’organisations et que les formalités d’enregistrement ne soient pas trop compliquées, dans la pratique, dans certains cas liés à des travailleurs indépendants ou des travailleurs exerçant des formes d’emploi atypiques, les autorités ont mis beaucoup de temps à déterminer si les demandeurs pouvaient être qualifiés de «travailleurs» au titre de la TULRAA et, dans un cas au moins, la demande d’enregistrement a été rejetée. La commission note que dans de tels cas, il pourrait être considéré que les conditions d’obtention de l’enregistrement reviennent de fait à une autorisation préalablement requise, en l’absence de laquelle les activités syndicales légitimes ne peuvent s’exercer. La commission note que cette question est due aux limites de la définition du terme «travailleur» prévue à l’article 2 (1) de la TULRAA et s’attend à ce que le processus de révision législative concernant cette définition règlera efficacement cette question. Dans l’intervalle, la commission prie le gouvernement de veiller à ce que les autorités administratives chargées de l’enregistrement des syndicats traitent toutes les demandes rapidement et conformément au principe selon lequel les formalités d’enregistrement ne doivent pas revenir à une obligation d’autorisation préalable. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tous les cas dans lesquels la question de la qualification de «travailleur» des membres de l’organisation requérante a été soulevée lors de la procédure d’enregistrement, et d’indiquer la durée et l’issue de ces procédures.
Article 3.Droit des organisations d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs. La commission note qu’en vertu de l’article 21 (1) et (2) de la TULRAA, s’ils est considéré que les statuts du syndicat, des résolutions ou des mesures prises par lui sont en conflit avec toute loi relative au travail ou tout statut connexe, les organismes administratifs peuvent, sur décision de la Commission des relations professionnelles, émettre une ordonnance corrective. L’ordonnance doit être exécutée dans un délai de 30 jours à compter de sa réception, délai qui peut être prolongé pour une raison justifiée. La commission note aussi que l’article 93 (2) de la TULRAA prévoit que toute personne qui ne respecte pas une ordonnance corrective est passible d’une amende de 5 millions de KRW au maximum. La commission prend note de la réponse du gouvernement à l’observation de la KCTU à cet égard, indiquant qu’il s’agit là d’une intervention minimale pour éviter que quelques membres ne compromettent le fonctionnement démocratique et autonome des syndicats; le gouvernement a émis des ordonnances correctives lorsque des pratiques déloyales ont été relevées, comme le recours aux statuts pour interdire le retrait collectif d’organisations supérieures ou pour faire obstacle à des changements dans la structure organisationnelle des branches et des bureaux locaux, en violation des dispositions légales garantissant la liberté de changer les statuts. Le gouvernement indique en outre que les syndicats peuvent contester l’ordonnance corrective émise par des organismes administratifs via un recours administratif ou une procédure administrative. Prenant note des informations fournies sur l’application de l’article 21 de la TULRAA, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’ordonnances correctives émises en vertu de l’article 21 (1) et (2), en indiquant les syndicats concernés, les motifs sur lesquels ces ordonnances se fondent, le nombre d’infractions relevées et le montant des amendes imposées pour ces infractions.
Droit d’élire librement des représentants. La commission note qu’en vertu des articles 17 (3) et 23 (1) de la TULRAA, telle qu’amendée en 2021, les représentants et les dirigeants d’un syndicat formé au sein d’une entreprise, ou d’un lieu de travail, sont élus parmi les membres occupés dans l’entreprise ou sur le lieu de travail en question. La commission prend note de l’observation de la KCTU à cet égard, selon laquelle cette disposition interdit les non-membres, les demandeurs d’emploi, les chômeurs, les anciens salariés et les travailleurs licenciés (à l’exception de ceux qui attendent l’examen d’une plainte déposée auprès de la Commission nationale des relations professionnelles pour pratiques déloyales) d’exercer la fonction de dirigeants de syndicats d’entreprise. La commission prend note de la réponse du gouvernement indiquant que, compte tenu du rôle des responsables syndicaux au niveau de l’entreprise dans le processus décisionnel relatif aux conditions de travail dans celle-ci, si des personnes externes, ayant peu de connaissance du fonctionnement interne de l’entreprise, sont autorisées à exercer les fonctions de dirigeant syndical, cela pourrait entraver l’efficacité de leurs négociations en tant que représentants des travailleurs ou compromettre leur capacité à représenter pleinement les intérêts des travailleurs salariés. Le gouvernement ajoute que les syndicats de branche ne sont pas soumis aux restrictions prévues par les articles 17 (3) et 23 (1), et que même si un syndicat a été initialement créé en tant que syndicat d’entreprise, il peut être transformé en syndicat de branche si les membres souhaitent élire des travailleurs licenciés ou des chômeurs en tant que dirigeants syndicaux. La commission rappelle que les dispositions telles que celles prévues aux articles 17 (3) et 23 (1) de la TULRAA entravent le droit des organisations d’élaborer librement leurs statuts et d’élire librement leurs représentants en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées (telles que des permanents syndicaux ou des retraités) ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. Il existe en outre un risque réel d’ingérence de l’employeur, par le biais du licenciement des dirigeants syndicaux qui perdent, de ce fait, leur qualité de responsables syndicaux. [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 102]. Par conséquent, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, pour réviser les articles 17 (3) et 23 (1) de la TULRAA afin de veiller à ce que la liberté des syndicats d’entreprise d’élire leurs représentants soit dûment garantie, en exemptant de l’exigence d’être salarié de l’entreprise une proportion raisonnable de dirigeants de ces organisations.La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Gestion financière. La commission note qu’en vertu de l’article 27 de la TULRAA, les syndicats doivent présenter, à la demande des organismes administratifs, un rapport sur les états financiers et l’état de fonctionnement du syndicat. La commission note que cette disposition ne précise pas les intervalles auxquels ces rapports peuvent être demandés, ni les motifs qui justifieraient une telle demande, et que cette disposition donne donc toute latitude aux autorités administratives à cet égard. L’article 12 du décret d’application de la TULRAA prévoit uniquement que les organismes administratifs demandent les états financiers du syndicat par écrit 10 jours à l’avance, en spécifiant les motifs et les autres éléments nécessaires. Enfin, la commission note que l’article 96 (1) 2) de la TULRAA sanctionne par une amende administrative le non-respect d’une demande formulée en vertu de l’article 27. La commission note, d’après les observations de la KCTU, que si par le passé l’article 27 a rarement été appliqué, la pratique a récemment changé: le 1er février 2023, le ministère de l’Emploi et du Travail, a demandé au titre de l’article 27 à 319 organisations syndicales unitaires et fédérations et confédérations – comptant plus de 1 000 adhérents (dont 240 syndicats du secteur privé et 79 syndicats de fonctionnaires et d’enseignants) – de présenter les résultats de l’auto-inspection et les documents justificatifs aux organismes administratifs relevant de leur juridiction, avant le 15 février 2023. La KCTU et la FKTU font valoir que les organismes administratifs exigent désormais des syndicats unitaires et des organisations associées comptant plus de 1 000 membres de présenter les résultats des inspections et les documents connexes, sans tenir compte des demandes internes du syndicat. La KCTU indique qu’elle-même et la FKTU ont été condamnées à une amende pour ne pas avoir répondu à la demande du ministère de l’Emploi et du Travail. La commission note, d’après la réponse du gouvernement à ces observations, que ce récent contrôle visait à évaluer le respect par les syndicats de l’obligation de tenir et de conserver les documents énoncés à l’article 14 de la TULRAA. Dans ce contexte, le gouvernement a demandé aux syndicats de présenter un document minimal (une page de couverture, une page principale), au lieu d’exiger de pouvoir accéder à tous les documents conservés dans leur bureau. Cette mesure vise à garantir que les documents nécessaires sont conservés sans qu’il soit nécessaire de se rendre physiquement au bureau. Le gouvernement indique aussi que dans le cas des 39 syndicats ayant refusé de présenter les documents demandés, des enquêtes administratives ont été menées pour vérifier l’existence de dossiers et de documents relatifs aux finances, sans toutefois divulguer les détails des documents ou en faire des copies. La commission rappelle que l’exercice d’un contrôle sur les finances d’un syndicat est compatible avec la convention s’il se limite à une obligation de présenter des rapports financiers annuels, s’il intervient parce qu’il existe des raisons graves et concordantes de croire que les actions d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi, s’il est limité aux cas dans lesquels un nombre appréciable de travailleurs demande une enquête sur des faits présumés de malversation ou présente une plainte [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 109-110]. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, de réexaminer l’article 27 de la TULRAA et de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que l’application de cet article ne serve pas à s’ingérer dans le fonctionnement des syndicats comme indiqué ci-dessus, conformément aux principes rappelés ci-dessus.
Obligation de divulguer des informations financières. Modifications du décret d’application de la TULRAA et du décret d’application de la loi sur l’impôt sur le revenu. La commission prend note des observations de la KCTU, portant sur des amendements aux décrets susmentionnés qui faciliteraient la publication des résultats des états financiers des syndicats via un système d’information publique géré par le ministère de l’Emploi et du Travail, et imposeraient la publication de ces informations aux syndicats comptant plus de 1 000 adhérents. La commission prend note de la réponse du gouvernement indiquant que l’article 11-9 du décret d’application modifié de la TULRAA n’impose pas aux syndicats l’obligation de divulguer à l’extérieur les résultats de leurs états financiers. En outre, conformément à l’article 80 du décret d’application modifié de la loi sur l’impôt sur le revenu, lorsque les syndicats communiquent volontairement leurs états financiers via le système d’informations, ils bénéficient d’un crédit d’impôt sur les cotisations syndicales. La commission prie le gouvernement de répondre à l’observation de la KCTU concernant l’obligation imposée aux syndicats comptant plus de 1 000 adhérents de divulguer leurs états financiers et de fournir des copies des deux décrets d’application modifiés.
Inviolabilité des locaux des syndicats. La commission prend note des observations de la CSI et de l’ITF, concernant les raids opérés par l’Agence coréenne du renseignement (NIS) et l’Agence nationale de police (NPA), les 18 et 19 janvier 2023, dans les bureaux de plusieurs syndicats de différentes villes. Les syndicats visés étaient le KCTU et le Syndicat coréen des travailleurs médicaux et de la santé (KHMU), le Syndicat des travailleurs de Kia Motors, les syndicats de la construction affiliés au KCTU ainsi que la FKTU. Selon ces observations, les bureaux de la KHMU ont été perquisitionnés par 20 fonctionnaires de la NIS et de la NPA. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle les enquêtes ont été menées dans le contexte de poursuites pénales aux motifs de menaces, contrainte, rassemblement illégal et violation de la «loi sur la sécurité nationale», et que les perquisitions et saisies dans les bureaux des syndicats ont été réalisées, dans toute la mesure du possible, sur la base de mandats délivrés par les tribunaux. La commission rappelle que les organisations devraient jouir de leur droit à l’inviolabilité de leurs locaux, de leur correspondance et de leurs communications et que les perquisitions ne devraient être possibles que sur délivrance d’un mandat par l’autorité judiciaire compétente lorsque celle-ci est convaincue qu’il existe de bonnes raisons de supposer qu’on trouvera les preuves nécessaires à la poursuite d’un délit de droit commun, et à la condition que la perquisition soit limitée aux objets qui ont motivé la délivrance du mandat [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 114]. La commission prie le gouvernement de veiller à ce que toute perquisition dans les locaux des syndicats soit réalisée conformément aux principes susmentionnés et de fournir des informations sur les résultats de l’enquête menée contre les syndicats susmentionnés et de communiquer une copie de toute décision judiciaire rendue.
Droit de grève. Interdiction des grèves. Fonctionnaires et enseignants. La commission note que l’article 11 de la loi sur les syndicats de fonctionnaires (POTUA), interdit aux syndicats de fonctionnaires et à leurs membres d’entreprendre toute action, y compris les grèves, les grèves du zèle ou toute autre activité mettant à mal fonctionnement normal des entreprises. En outre, l’article 8 de la loi sur les syndicats d’enseignants (TTUA) interdit aux syndicats d’enseignants et à leurs membres de faire grève, d’entreprendre toute action de sabotage ou autres actions collectives visant à entraver le fonctionnement normal de l’entreprise. La commission note que, conformément à l’article 2 de la TTUA, les enseignants recouvrent le personnel des jardins d’enfants, les directeurs, les directeurs adjoints et les enseignants des écoles primaires, des collèges et des lycées, ainsi que des écoles civiques, techniques et spécialisées, et les doyens des facultés, les directeurs et le corps enseignant des établissements d’enseignement supérieur des secteurs privé et public. La commission note en outre qu’en vertu de l’article 18 de la POTUA et de l’article 15 (1) de la TTUA, le non-respect des dispositions susmentionnées est passible d’une peine d’emprisonnement comportant le travail pénitentiaire pouvant aller jusqu’à cinq ans ou d’une amende de 50 millions KRW (38 000 dollars des États-Unis) au maximum. La commission rappelle à cet égard que, de l’avis de la commission, le maintien de services minima en cas de grève ne devrait être possible que dans certaines situations, à savoir: i) dans les services dont l’interruption risquerait de mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans l’ensemble de la population (soit les services essentiels «au sens strict du terme»); ii) dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme, mais où les grèves d’une certaine ampleur et durée pourraient provoquer une crise aiguë menaçant les conditions normales d’existence de la population; ou iii) dans les services publics d’importance primordiale [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 136]. Dans de tels cas, des garanties compensatoires devraient être prévues pour les travailleurs privés du droit de grève. La commission note que le gouvernement justifie l’interdiction des grèves des fonctionnaires par la nature des postes et des obligations des fonctionnaires et par l’impact qu’aurait la suspension ou la fermeture des services publics sur l’ensemble de la population, et indique également que les conditions de travail des fonctionnaires doivent être déterminées via un processus démocratique exempt de toute pression indument exercée par des actions syndicales. En ce qui concerne les enseignants, le gouvernement indique que le refus collectif de dispenser des cours peut porter atteinte au droit à l’éducation des élèves, qui est garanti par la Constitution. La commission rappelle que, pour garantir la satisfaction des besoins de base des usagers de services publics importants, il pourrait être envisagé d’introduire un service minimum négocié en tant qu’alternative à l’interdiction totale des grèves. En étendant l’interdiction des grèves à tous les fonctionnaires relevant du champ d’application de la POTUA, qu’ils exercent ou non une autorité au nom de l’État, et aux travailleurs de l’éducation dans les secteurs public et privé, l’article 11 de la POTUA et l’article 8 de la TTUA portent atteinte aux droits de ces travailleurs et de leurs organisations, prévus par la convention. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 11 de la loi POTUA en vue de garantir que seuls les fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’État soient exclus du droit de grève, et abroger l’article 18 de la POTUA, ainsi que les articles 8 et 15 (1) de la TTUA en vue de mettre la législation en conformité avec les principes susmentionnés. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise à cet égard.
Travailleurs des principales entreprises de l’industrie de la défense nationale et autres travailleurs exclus du droit de grève. La commission note que l’article 41 (2) de la TULRAA interdit aux travailleurs engagés dans l’une des principales entreprises de l’industrie de la défense nationale œuvrant à la production d’électricité, d’eau ou à des activités consistant principalement à produire des biens pour la défense nationale, de mener des actions syndicales, et qu’en vertu de l’article 20 du décret d’application de la TULRAA, ces travailleurs sont ceux occupés à des activités de fabrication, de traitement, d’assemblage, de maintenance, de reproduction, d’amélioration, de test de performance, de traitement thermique, de peinture et de manipulation de gaz, etc., nécessaires à la finition des produits de l’industrie de la défense. L’article 88 de la TULRAA sanctionne la violation de cette interdiction par une peine d’emprisonnement comportant le travail pénitentiaire pouvant aller jusqu’à cinq ans ou par une amende de 50 millions de KRW au maximum. La commission prend note des observations de la KCTU à cet égard, indiquant que les autorités ont toujours justifié l’interdiction prévue à l’article 41 (2) en invoquant les affrontements qui ont lieu dans la péninsule coréenne, ainsi que des considérations liées à la sécurité nationale. Cependant, une part importante de la production des principales entreprises de la défense est actuellement exportée et les travailleurs peuvent être occupés à d’autres types de production en parallèle ou être transférés dans d’autres domaines. Selon la KCTU, certains employeurs profitent de cette interdiction de faire grève pour ne pas répondre aux demandes de bonne foi de négociation collective, et pour transférer par exemple tous les membres syndicaux à des chaînes de production liées à la défense et tous les travailleurs non syndiqués à des chaînes de production commerciales. La commission note en outre que, selon la KCTU, les agents de sécurité agréés, les agents de sécurité spéciaux chargés de la sécurité des principaux établissements nationaux et certains marins n’ont pas le droit de mener des actions syndicales en vertu des lois spéciales définissant leur statut, et que les violations commises par l’un ou l’autre de ces groupes sont passibles de sanctions pénales. Rappelant que l’exception concernant la police et les forces armées ne devrait pas être étendue au personnel civil (à l’exception de ceux qui sont employés dans les services essentiels au sens strict du terme), la commission prie le gouvernement de faire part de ses commentaires concernant les observations de la KCTU.
Restrictions des objectifs légitimes de la grève. La commission note que le Comité de la liberté syndicale l’a saisie de la question de l’interprétation restrictive des objectifs légitimes de la grève qui se limite aux conflits sociaux [voir le 404e rapport, paragr. 69 (f) et 76]. La commission prend note de l’observation de la KCTU à cet égard, qui se réfère à un arrêt de 2011 de la Cour suprême prévoyant que seuls: i) les questions dont l’employeur a connaissance; et ii) les thèmes faisant l’objet de négociation collective (tels que la détermination des salaires et des heures de travail) peuvent être considérés comme pouvant motiver une grève. La KCTU indique aussi que dans ce contexte, non seulement les grèves contre les politiques économiques et sociales du gouvernement touchant les travailleurs et les grèves de solidarité sont exclues, mais que, comme les thèmes faisant l’objet de négociation collective sont définis de façon restrictive afin d’exclure le thème de la restructuration d’entreprises (licenciements ou fusions) des décisions de la direction, il y a peu de thèmes prévus par la loi pour au motif desquels les syndicats sont autorisés à recourir à la grève. La KCTU ajoute que la Commission nationale des droits de l’homme a adressé une recommandation au président de l’Assemblée nationale, proposant d’élargir la définition des conflits du travail prévue à l’article 2 (5) de la TULRAA afin de couvrir «les questions de gestion comme les restructurations qui ont des répercussions négatives sur les conditions de travail, et l’amélioration du statut socio-économique des travailleurs». La commission note avec intérêt que le 9 novembre 2023, l’Assemblée nationale coréenne a adopté un amendement à la définition des «conflits du travail» à l’article 2(5) de la TULRAA. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle il ne remet pas en question les observations de la KCTU mais fait état des conséquences qu’aurait l’élargissement de la portée des actions syndicales sur les travailleurs qui ne participent pas à ces actions, sur l’employeur et sur le public, et indique qu’il est possible de légiférer sur la question dans le cadre d’un dialogue social approfondi. Le gouvernement indique également dans sa réponse à l’observation de la CSI-ITF que selon lui, les questions liées à la proposition d’amendement visant à élargir la portée des grèves devraient être réglées par des décisions des tribunaux ou de la Commission des relations professionnelles. Compte tenu de ce qui précède, la commission note que l’interprétation restrictive des objectifs légitimes des grèves a pour effet de considérer comme illégales, en République de Corée, les grèves relatives aux politiques économiques et sociales du gouvernement, les grèves de solidarité, les grèves pour revendiquer la reconnaissance et l’exercice des libertés fondamentales, et les grèves contre les mesures de restructuration des entreprises. La commission rappelle que, pour elle, les organisations syndicales et les organisations d’employeurs, ayant vocation à défendre des intérêts socio-économiques et professionnels, doivent pouvoir utiliser respectivement la grève ou des actions de protestation pour appuyer leur position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique économique et sociale qui ont des répercussions immédiates pour leurs membres. De plus, notant que le système démocratique est fondamental pour le libre exercice des droits syndicaux, la commission estime que, dans une situation où ils estimeraient ne pas jouir des libertés essentielles pour mener à bien leur mission, les syndicats et les organisations d’employeurs seraient fondés à demander la reconnaissance et l’exercice de ces libertés et que de telles revendications pacifiques devraient être considérées comme entrant dans le cadre d’activités syndicales légitimes, y compris lorsque ces organisations ont recours à la grève. En ce qui concerne les grèves dites «de solidarité», la commission considère qu’une interdiction générale de cette forme de grève risquerait d’être abusive – en particulier dans le contexte de la mondialisation marquée par une interdépendance croissante et par l’internationalisation de la production – et que les travailleurs devraient pouvoir exercer de telles actions pour autant que la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légale [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 124-125]. La commission note que la situation en République de Corée, qui prive les travailleurs et leurs organisations d’un moyen d’action essentiel pour protéger leurs intérêts légitimes, n’est pas conforme à la convention. Par conséquent, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, pour modifier la législation à cet égard et et prie le gouvernement de fournir une copie de l’article 2(5) modifié de la TULRAA. Travailleurs en sous-traitance. La commission prend note, d’après les observations de la KCTU, qu’en vertu de la loi actuelle, les travailleurs en sous-traitance rencontrent d’importants obstacles à l’exercice légal de leur droit de grève, étant donné que l’on considère que seuls les conflits liés à la négociation collective sont des motifs valables justifiant une grève, et que les entrepreneurs principaux peuvent entraver, de ce fait, les tentatives des organisations représentant les travailleurs en sous-traitance d’engager des négociations, en faisant valoir qu’ils n’ont pas d’obligation de négocier puisqu’il n’y a pas de relation de travail directe. Rappelant que, comme les autres travailleurs, les travailleurs en sous-traitance devraient pouvoir promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux en recourant, entre autres, à l’action syndicale, la commission prie le gouvernement, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, de prendre les mesures nécessaires pour identifier et éliminer les obstacles juridiques et pratiques à l’exercice effectif de ce droit. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Services essentiels dans le secteur public. La commission note qu’en vertu de l’article 42-2 (1) de la TULRAA, l’expression «activité essentielle» est définie comme une activité dont la suspension ou l’interruption peut mettre gravement en danger la sécurité de la vie, de la santé ou du physique du public et la vie quotidienne du public. La commission note que la liste des entreprises essentielles (Tableau 1 du décret d’application de la TULRAA) comprend les services des chemins de fer et le réseau ferroviaire urbain, les compagnies aériennes, les services de distribution d’eau, d’électricité et de gaz, les raffineries et l’approvisionnement de pétrole, les hôpitaux et l’approvisionnement en sang, la Banque de Corée et les entreprises de télécommunications. La commission note en outre que les grèves ne sont pas interdites dans les entreprises essentielles, mais que «l’action syndicale est menée tout en maintenant le fonctionnement justifié des activités essentielles de l’entreprise» (425 de la TULRAA). Le «niveau minimum nécessaire au maintien du fonctionnement» est défini par un accord entre les parties (42-3 de la TULRAA), ou, en l’absence d’un tel accord, par une décision de la Commission des relations professionnelles (42 4 de la TULRAA). Enfin, la commission note que le fait d’arrêter, d’interrompre ou d’entraver le «maintien du fonctionnement justifié» des activités des entreprises essentielles est interdit (article 422 (2) de la TULRAA) et sanctionné d’une peine d’emprisonnement comportant le travail pénitentiaire pouvant aller jusqu’à trois ans, ou d’une amende de 50 millions KRW au maximum (89.1 de la TULRAA), et que la loi autorise l’employeur à remplacer jusqu’à 50 pour cent des travailleurs en grève (43 (4) de la TULRAA). La commission prend note l’observation de la KCTU selon laquelle, dans la pratique, les niveaux excessivement élevés définis pour le maintien des services essentiels – de 70 à 80 pour cent en moyenne et parfois près de 100 pour cent – réduit à néant l’effet des grèves et conduisent souvent à des grèves prolongées dans le secteur public; en outre, les niveaux définis ne sont pas déterminés dans le temps et il n’existe pas de procédure pour les réviser. La commission note enfin que l’autorisation d’embaucher des travailleurs pendant une grève dans les «entreprises de services publics essentiels» et la longueur de la liste de ces dernières font partie des aspects législatifs soumis par le Comité de la liberté syndicale à la suite du dernier examen du cas n° 1865 [voir 404e Rapport, paragr. 75-76]. La commission rappelle que seuls peuvent être considérés essentiels – aux fins de la restriction ou de l’interdiction du droit de grève – les services «dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne». Cette notion ne revêt pas un caractère absolu dans la mesure où un service non essentiel peut devenir essentiel si la grève dépasse une certaine durée ou une certaine étendue ou en fonction des caractéristiques spécifiques d’un pays (par exemple un État insulaire) [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 131]. La commission note que la loi coréenne n’interdit pas totalement les grèves dans ces services, mais exige cependant un niveau de maintien et de fonctionnement continu de l’entreprise qui limite considérablement l’efficacité des grèves. En outre, la commission note que la loi limite encore davantage l’effet des grèves dans ces services en autorisant les employeurs à remplacer jusqu’à la moitié des travailleurs en grève. La commission estime que les travailleurs devraient pouvoir organiser des actions syndicales dans le secteur bancaire, les services des chemins de fer, les services de transport et de transport public, les services de transport aérien ou aviation civile, les services de distribution de combustibles et le secteur des hydrocarbures, gaz naturel ou le secteur pétrochimique [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 134]. La commission rappelle toutefois que pour les services qui ne sont pas considérés comme essentiels au sens strict du terme mais pour lesquels des grèves d’une certaine ampleur et d’une certaine durée pourraient provoquer une crise aiguë menaçant les conditions normales d’existence de la population ou dans les services publics d’importance fondamentale où il est important de répondre aux besoins fondamentaux des usagers, un service minimum peut être négocié avec la participation des parties. Ce service minimum: i) devrait effectivement et exclusivement s’agir d’un service minimum, c’est-à-dire limité aux opérations strictement nécessaires pour que la satisfaction des besoins de base de la population ou des exigences minima du service soit assurée, tout en maintenant l’efficacité des moyens de pression; et ii) étant donné que ce système limite l’un des moyens de pression essentiels dont disposent les travailleurs pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux, leurs organisations devraient pouvoir, si elles le souhaitent, participer à la définition de ce service tout comme les employeurs et les pouvoirs publics [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 136-137]. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le niveau du service minimum dans les services publics essentiels soit déterminé avec la participation des partenaires sociaux et qu’il s’agisse effectivement d’un service minimum conforme aux principes énoncés ci-dessus. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Quorum et majorité requis pour déclencher une grève. La commission note qu’en vertu de l’article 41 (1) de la TULRAA, les actions collectives doivent être décidées par décision prise à la majorité des votes exprimés par les membres du syndicat, lesquels doivent être des travailleurs salariés. L’article 91 de la TULRAA sanctionne la violation de cette règle par une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an ou par une amende de 10 millions de KRW au maximum. Notant que l’article 41 (1) exige la majorité des votes exprimés par les membres du syndicat, lesquels doivent être des travailleurs salariés, la commission rappelle qu’imposer de recueillir l’adhésion de plus de la moitié des travailleurs concernés pour pouvoir déclarer la grève est une condition trop rigoureuse, qui pourrait affecter indûment la possibilité de faire grève, notamment dans les grandes entreprises. A son sens, si un pays juge opportun d’exiger un vote des travailleurs avant qu’une grève puisse être déclenchée, il devrait faire en sorte que seuls soient pris en compte les votes exprimés [voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 147]. Par conséquent, la commission prie le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux, de prendre les mesures nécessaires pour réviser l’article 41 (1) de la TULRAA conformément aux principes énoncés ci-dessus et de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Responsabilité civile et sanctions pénales. La commission note que l’article 3 de la TULRAA dispose que l’employeur qui a subi des dommages en raison d’une action syndicale «au titre de la présente loi» ne peut pas réclamer de dommages-intérêts à un syndicat, et qu’en vertu de l’article 4, les activités telles que les actions syndicales menées pour réaliser l’objectif de la TULRAA sont considérées comme justifiées du point de vue du droit pénal, à moins qu’elles n’impliquent des actes de violence ou des destructions. Néanmoins, la commission note, d’après l’observation de la KCTU, que l’efficacité de l’article 3 est limitée par l’interprétation stricte de ce qui constitue une grève légitime; la KCTU indique en outre que les employeurs ont demandé des indemnisations à hauteur de milliards voire de dizaines de milliards de KRW contre les syndicats et les travailleurs pour avoir mené des grèves et occupé les locaux pour empêcher des licenciements, occupé des usines suite à la fermeture de lieux de travail, et pour avoir mené des grèves et occupé les locaux pour exiger la régularisation de détachements illégaux ou contester la mise en place d’un système de rémunération se fondant sur les performances. La commission note, d’après la déclaration de la KCTU, qu’un amendement de l’article 3 est en instance devant l’Assemblée nationale, qui vise à limiter la capacité des entreprises à réclamer des dommages-intérêts excessifs aux travailleurs en grève, en mettant l’accent sur le principe de la responsabilité individuelle et en dégageant les garants de toute responsabilité pour les dommages résultant d’activités syndicales. La commission note avec intérêt que, le 9 novembre 2023, l’Assemblée nationale coréenne a adopté l’amendement à l’article 3 de la TULRAA. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle la Cour constitutionnelle et la Cour suprême ont précisé qu’il existe une limitation inhérente selon laquelle seules les actions industrielles justifiables découlant de la garantie constitutionnelle de l’action collective peuvent bénéficier d’une exemption. La commission note que, outre l’article 4 de la TULRAA, les dispositions pénales figurant à la fin de cette loi prévoient des sanctions pénales pour plusieurs types de mouvement de grève, qu’ils soient pacifiques ou non, et que ces sanctions comprennent une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 5 ans comportant le travail pénitentiaire et des amendes de 50 millions de KRW au maximum. La commission note en outre que lors de l’examen du cas n° 1865, le Comité de la liberté syndicale s’est référé à la question de l’application de l’article 314 (1) du Code pénal qui applique depuis 25 ans le délit d’«entrave à l’activité économique» aux mouvements de grève. La commission note, d’après l’indication du gouvernement, qu’il applique l’article 314 du Code pénal avec prudence et conformément aux limites fixées par la jurisprudence de la Cour suprême, à savoir dans les cas où des grèves ont lieu soudainement à un moment que l’employeur n’aurait pas pu prévoir, entraînant une confusion importante ou des dommages considérables pour l’activité de l’entreprise. Le gouvernement indique également que depuis 2018, il n’y a eu aucun cas dans lesquels des personnes ont été inculpées pour délit d’entrave à l’activité économique, simplement pour avoir refusé de travailler. La commission rappelle que l’exercice légitime du droit de grève ne peut entraîner de sanctions d’aucune sort et en particulier, qu’aucune sanction pénale ne doit être imposée à un travailleur ayant participé à une grève pacifique et qui n’a donc fait qu’exercer un droit essentiel, et que, en aucun cas, des mesures d’emprisonnement ne doivent être imposées (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 122 et 158). La commission s’attend à ce que, puisque la convention est désormais intégrée dans l’ordre juridique de la République de Corée, le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, pour veiller à ce que les travailleurs et leurs organisations ne fassent pas l’objet de sanctions pénales pour leur participation à des actions syndicales pacifiques, et à ce qu’il fournisse des informations sur les mesures prises à cet égard. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tous les cas dans lesquels des travailleurs et des syndicats ont été tenus pour responsables des dommages découlant d’une grève ou ont été condamnés à une peine d’emprisonnement pour avoir participé à une grève, et de communiquer une copie des décisions judiciaires pertinentes. La commission prie enfin le gouvernement d’envoyer une copie du texte modifié de l’article 3 de la TULRAA.
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