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Demande directe (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 - République de Corée (Ratification: 2021)

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La commission prend note du premier rapport du gouvernement. Elle prend note des observations de la Fédération des entreprises de Corée (KEF), communiquées avec le rapport du gouvernement, et de la réponse du gouvernement à celles-ci. La commission prend également note des observations de la Fédération coréenne des syndicats (KCTU) et de la Fédération des syndicats coréens (FKTU) reçues les 2 et 8 septembre 2023, ainsi que des observations de l’Internationale de l’éducation (IE), d’IndustriALL Global Union et de la Confédération syndicale internationale et la Fédération internationale des ouvriers du transport (CSI et ITF), reçues le 31 août et les 1er et 27 septembre 2023 respectivement, portant sur les matières examinées dans le présent commentaire et sur les réponses apportées par le gouvernement. La commission note en outre que le Comité de la liberté syndicale lui a renvoyé les aspects législatifs du cas no 1865 concernant la République de Corée [voir 404e rapport, paragr. 76], qui sont examinés dans le présent commentaire ainsi que dans celui concernant l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
Articles 1 à 6. Les personnes visées par la convention. La commission note que l’article 2, paragraphe 4 d) de la Loi sur les syndicats et l’adaptation des relations du travail (TULRAA), révisée en 2021, dispose qu’une organisation qui permet l’adhésion d’autres personnes que des travailleurs n’est pas considérée comme un syndicat. La commission note que, suivant les observations de la KCTU et la FKTU reproduites en détail dans son commentaire sur l’application de la Convention no 87, les travailleurs pour compte propre économiquement dépendants sont considérés comme des travailleurs ayant le droit de s’organiser, tandis que les personnes travaillant pour compte propre indépendantes, les «free-lance», les travailleurs agricoles et les travailleurs atypiques tels que les travailleurs du transport et les travailleurs des plateformes ayant une forme non conventionnelle d’emploi ne sont pas explicitement couvertes par la définition du travailleur que donne la TULRAA en son article 2 (1). La commission prend note de la réponse du gouvernement disant que l’amendement de la TULRAA de juillet 2021 autorise la catégorie en compte propre à se syndiquer et que l’amendement à l’article 2 (1) visant à englober les travailleurs des types spéciaux d’emplois et les travailleurs des plateformes dans la définition des «travailleurs» actuellement à l’examen devant l’Assemblée nationale. Le gouvernement ajoute que tant la Cour suprême que les autorités administratives tendent à accorder le statut de travailleur à ceux ayant un type spécial d’emploi. Rappelant que les travailleurs indépendants autonomes et les travailleurs agricoles, de même que les «freelancers», les travailleurs ayant des formes atypiques d’emploi et les travailleurs des plateformes et leurs organisations doivent bénéficier d’une protection adéquate contre la discrimination antisyndicale et les actes d’ingérence, ainsi que du droit de négocier collectivement, la commission s’attend à ce que le processus de réforme législative relatif à l’extension de la couverture de la définition du terme «travailleur» que donne l’article 2 (1) de la TULRAA reconnaîtra et garantira à toutes ces catégories de travailleurs et à leurs organisations les droits inscrits dans la convention. Elle prie le gouvernement de l’informer de tout progrès accompli à cet égard.
Articles 1, 2 et 3. Protection adéquate contre la discrimination antisyndicale et les actes d’ingérence. La commission note que la TULRAA interdit la discrimination antisyndicale et les actes d’ingérence et qu’elle prévoit des voies de recours et des sanctions pénales contre de tels actes. La commission note que son article 84 prévoit qu’au terme d’une enquête, la Commission des relations du travail (LRC) délivre une ordonnance de réparation ou déboute le plaignant, mais la loi n’indique toutefois pas la nature des réparations que la LRC peut ordonner. En outre, la commission note que l’article 89 de la TULRAA prévoit des peines de prison assorties de l’obligation de travailler de maximum 3 ans ou une amende de 30 millions de KRW pour non-respect d’une ordonnance de réparation. La commission note que la sanction pénale prévue à l’article 90 de la TULRAA pour discrimination antisyndicale et actes d’ingérence est une peine d’emprisonnement assortie de travail de maximum 2 ans ou une amende ne dépassant pas 20 millions de KRW. La commission prend note de l’observation de la KCTU indiquant que la Cour suprême a confirmé que la charge de la preuve d’une pratique déloyale du travail – y compris la discrimination antisyndicale – incombe au travailleur ou à l’organisation syndicale. Elle note également que le gouvernement confirme ce point en précisant que le fait de transférer la charge de la preuve de pratiques déloyales du travail sur l’employeur serait contraire au principe de la présomption d’innocence. La commission note que tant le gouvernement que la KCTU semblent parler de la charge de la preuve en matière pénale, où le renversement de la charge de la preuve peut aller à l’encontre du principe de la présomption d’innocence. Or, la commission rappelle que l’argument de présomption d’innocence n’est plus recevable lorsqu’il s’agit de qualifier au plan civil l’acte antisyndical et de le sanctionner par une réparation juste et dissuasive. Au vu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement d’indiquer: i) les réparations pour discrimination antisyndicale et actes d’ingérence pouvant être prescrites par la LRC; et ii) quelle partie supporte la charge de la preuve dans les recours devant la Commission des relations du travail.
Discrimination antisyndicale lors du recrutement. Constitution de listes noires. La commission prend note des observations de la KCTU indiquant que des travailleurs en sous-traitance qui avaient participé, en 2019, à une grève pour réclamer des hausses de salaires pour les peintres sous-traitants travaillant aux chantiers navals Okpo de Daewoo Shipbuilding and Marine Engineering (DSME) sont maintenant sur une liste noire et se heurtent aux refus des employeurs de les embaucher. La KCTU se réfère aussi à une «Enquête sur les listes noires de travailleurs en sous-traitance dans les chantiers navals» publiée en 2017 par le Syndicat coréen des travailleurs de la métallurgie, dans laquelle 45 pour cent des personnes interrogées ont répondu «licenciement et liste noire» comme motif numéro un pour lequel elles pensent ne pas pouvoir se syndiquer ni créer un syndicat. D’après la KCTU, cette enquête de 2017 montre que 26,5 pour cent des travailleurs sous-traitants des chantiers navals interrogés ont été confrontés de manière directe ou indirecte à des listes noires. Rappelant que la pratique consistant à utiliser ce qu’on appelle des «listes noires» de membres, d’activistes ou de responsables de syndicats dans le cadre des procédures d’embauche est particulièrement incompatible avec les principes de la convention, la commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à ce propos.
Article 4. Promotion de la négociation collective. Travailleurs couverts et niveau de la négociation. La commission note que l’article 30 (3) de la TULRAA dispose que l’État et les administrations locales doivent aider les parties aux relations du travail à choisir librement entre les différentes méthodes de négociation et s’efforcer de promouvoir la négociation collective en conséquence. La commission prend également note de l’observation de la KCTU disant que, comme la loi favorise clairement la négociation d’entreprise par rapport à la négociation au niveau de l’industrie ou de la région, le système fait que les travailleurs des plus petites entreprises et ceux des formes non conventionnelles d’emploi, qui travaillent souvent avec plusieurs employeurs, ont beaucoup de mal à aborder les disparités dans l’emploi ou les mauvaises conditions de travail dans le cadre de la négociation collective. La KCTU ajoute que malgré l’adoption de l’article 30 (3) en 2021, le gouvernement n’a toujours pas proposé ni mis en œuvre la moindre politique concrète en vue de son application. La commission prend note de la réponse du gouvernement pour lequel existe une dissension profonde entre les travailleurs et les employeurs sur la question de la négociation collective et de son ouverture à une palette plus large d’employeurs, ce qui explique qu’il est essentiel de bâtir un consensus social avant toute mesure. Le gouvernement indique en outre que quoi qu’il en soit, même actuellement, plusieurs employeurs peuvent entamer une négociation collective en se coordonnant volontairement et conclure une convention entre travailleurs et direction; qu’en pratique, la négociation ne se tient pas au niveau de l’entreprise et qu’une négociation centralisée (unifiée) pour une industrie existe aussi dans certains secteurs (métallurgie, santé, finance), mais aussi au niveau d’une région ou d’une profession (autobus, taxis). S’agissant des travailleurs en sous-traitance, la commission prend note de l’observation de la KCTU suivant laquelle, même si le contractant principal a une influence significative sur les conditions de travail des travailleurs en sous-traitance, il peut refuser d’entrer en négociation en raison de l’absence de relation directe d’emploi avec les travailleurs en sous-traitance. La KCTU déclare que le ministère de l’Emploi et du Travail (MOEL) refuse toujours qu’on autorise les travailleurs en sous-traitance à négocier collectivement avec l’employeur principal et que la Commission nationale des relations du travail (NLRC) a statué que, si la négociation collective avec un contractant principal peut être reconnue, cela ne peut être que dans le cadre de la négociation entre le sous-traitant et le contractant principal, à l’exclusion de toute action collective contre le contractant principal. La KCTU ajoute qu’un projet de loi proposant d’élargir la définition du terme «employeur» figurant à l’article 2 de la TULRAA est actuellement à l’étude devant l’Assemblée nationale. Son texte dispose qu’une personne exerçant de facto et spécifiquement une fonction d’autorité déterminante pour les conditions de travail du travailleur doit être considérée comme un employeur, même si elle n’est pas partie à un contrat d’emploi conclu. La commission note avec intérêt qu’en date du 9 novembre 2023 l’Assemblée nationale coréenne a adopté l’amendement de l’article 2 (2) de la TULRAA concernant la définition de l’employeur. La commission rappelle que, à l’exception des organisations des catégories de travailleurs qui peuvent être exclus du champ d’application de la convention – forces armées, police et fonctionnaires commis à l’administration de l’État – la reconnaissance du droit à la négociation collective a une portée générale, et toutes les autres organisations de travailleurs des secteurs publics et privés doivent pouvoir en bénéficier (voir l’Étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 209). En conséquence, la commission considère que l’obligation du gouvernement de promouvoir la négociation collective conformément à l’article 4 de la convention s’étend aux travailleurs des plus petites entreprises et aux travailleurs ayant des formes non conventionnelles d’emploi, à ceux qui travaillent pour des employeurs multiples et aux travailleurs en sous-traitance. Au vu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de prendre, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, des mesures appropriées à la situation nationale pour encourager et promouvoir le plein développement et l’utilisation de mécanismes de négociation volontaire entre les employeurs et leurs organisations et les organisations représentant les travailleurs qui sont en pratique exclus du système de la négociation collective centrée sur l’entreprise qui prévaut actuellement, dans le but de réguler les termes et conditions de leur emploi par le biais de négociations collectives. La commission prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur: i) toute mesure prise ou toute politique adoptée afin d’appliquer l’article 30 (3) de la TULRAA; ii) tout exemple de négociation collective entre plusieurs employeurs et des organisations de travailleurs moyennant une coordination et un accord volontaires; et iii) la mise en œuvre de l’article 2 (2) de la TULRAA tel que modifié et son impact sur la garantie du droit à la négociation collective des travailleurs en sous-traitance.
Matières exclues de la négociation collective. La commission note que la législation coréenne désigne une série de thèmes en tant que matières ne pouvant faire l’objet d’une négociation collective ou d’une convention collective. L’article 24 (4) de la TULRAA précise qu’une convention collective ou un accord d’un employeur qui permet le versement à un responsable syndical à plein temps d’un salaire dépassant la limite maximum du congé syndical est nulle et non avenue à cet effet. La commission note que dans son examen du cas no 1865 concernant la République de Corée, le Comité de la liberté syndicale (CLS) a rappelé à plusieurs reprises que la réglementation des relations entre les employeurs et les organisations de travailleurs et les moyens fournis aux représentants des travailleurs entrent intégralement dans l’éventail de sujets couverts par la négociation collective et que la question de la rémunération des permanents syndicaux à temps plein devrait faire l’objet de négociations libres et volontaires entre les travailleurs et les employeurs ou leurs organisations respectives. Le CLS a demandé au gouvernement de lever l’interdiction de ces dispositions dans les conventions collectives, de veiller à ce que personne ne soit sanctionné pour avoir conclu un tel accord et de s’abstenir d’exiger des parties signataires de conventions collectives prévoyant la rémunération des permanents syndicaux à temps plein de modifier leur accord (voir le 382e rapport, paragr. 47). La commission note que, bien que la loi ait été modifiée depuis pour permettre le versement d’un salaire dans les limites du système de congé syndical, elle n’autorise toujours pas des accords sur des paiements dépassant ces limites et rappelle que, dans son observation de 2021 sur l’applications de la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, elle avait invité le gouvernement à continuer de consulter les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives sur les façons d’améliorer le système de plafond du congé de telle sorte que la possibilité pour les partenaires sociaux de fixer librement par voie de négociation collective les facilités accordées aux représentants des travailleurs soit pleinement reconnue. La commission prend également note de l’observation de la KCTU indiquant que le MOEL considère que les dispositions des conventions collectives autorisant les grèves causées par le non-respect de conventions collectives sont illégales et a ordonné qu’elles soient corrigées. La commission note encore que l’éventail des matières exclues est très large et pas très clairement défini dans les textes de lois applicables aux enseignants et aux fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’État: l’article 8(1) de la loi sur les syndicats de fonctionnaires (POTUA) exclut la négociation collective sur les matières concernant des décisions d’ordre politique susceptibles d’être prescrites par la loi et les matières relatives à la direction et au fonctionnement de l’organisation, mais sans lien direct avec les conditions de travail; et les articles 10 (1) de la POTUA et 7 (1) de la loi sur les syndicats d’enseignants (TTUA) disposent que les dispositions de conventions collectives portant sur ces matières seront sans effet. La commission note que le gouvernement indique à cet égard que: i) l’article 8 de la POTUA ne cite que les matières non négociables qui ne sont pas directement liées aux conditions de travail et que la négociation collective est possible pour les matières qui ne sont pas spécifiées ou déléguées par voie de statut et sont directement liées aux conditions de travail; ii) dans le cas des fonctionnaires et des enseignants, les principales conditions de travail sont déterminées par le biais de lois et de budgets, et si l’accord devait avoir préséance sur les lois et les budgets, les conventions passées entre travailleurs et direction entameraient les prérogatives législatives et budgétaires de l’Assemblée nationale; iii) les conventions collectives conclues par une négociation volontaire entre les travailleurs et la direction doivent être respectées dans des limites légitimes, mais elles doivent aussi rester dans les limites de la législation nationale. Notant les indications données par le gouvernement, la commission rappelle que les mesures prises unilatéralement par les autorités en vue de restreindre l’étendue des sujets négociables sont généralement incompatibles avec la convention et que les discussions tripartites visant à élaborer sur une base volontaire des lignes directrices en la matière constituent une méthode particulièrement appropriée pour y remédier et elle considère que les autorités devraient privilégier, dans toute la mesure possible, la négociation collective pour fixer les conditions de travail des fonctionnaires (voir l’Étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 215 et 220). La commission note que le libellé de l’article 8 (1) portant sur les matières concernant des décisions de politique pouvant être prescrites par la loi est très large et vague et peut donner lieu à l’imposition de restrictions substantielles aux droits à la négociation collective de fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’État et des enseignants. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de prendre, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, les dispositions nécessaires afin de supprimer les restrictions concernant les thèmes de la négociation collective énoncés aux articles 24 (4) de la TULRAA et 8 (1) et 10 (1) de la POTUA et 7 (1) de la TTUA, et de fournir des informations sur les dispositions prises à cet égard.
Vérification de la légalité des conventions collectives. Ordonnances de correction. La commission note que l’article 31 (2) de la TULRAA impose aux parties à une convention collective de la signaler à l’administration dans les 15 jours de la date de sa conclusion et que son article 31 (3) dispose que, si une convention collective renferme des éléments illicites, les organes administratifs peuvent, sur résolution de la LRC, ordonner de les corriger. La commission note que le gouvernement confirme qu’aux termes de la TULRAA, les organes administratifs sont habilités à ordonner la modification de l’accord survenu entre les parties si la convention collective s’avère illégitime, et que l’ordonnance de correction est une mesure minimum visant à empêcher de porter préjudice à des victimes innocentes et à éviter la confusion ou les conflits pendant le processus ultérieur à la correction en rectifiant promptement un passage illégitime de la convention collective. Elle est promulguée sur résolution de la LRC afin de minimiser le risque de décisions arbitraires de la part d’organes administratifs et à titre de confirmation du principe de l’autonomie collective. S’agissant de l’application de ces dispositions dans la pratique, la commission prend note de l’observation de la KCTU indiquant qu’en mai 2023, le MOEL a publié un communiqué de presse déclarant qu’après avoir passé en revue les conventions collectives et les règlements de syndicats du secteur public – notamment chez les fonctionnaires, les enseignants et dans des institutions publiques – il a identifié de nombreuses conventions jugées soit illégales soit déraisonnables sous l’angle public et pour lesquelles elle prévoit d’édicter des ordonnances de correction pouvant être assorties de sanctions pénales en cas de refus d’obtempérer. La KCTU explique que, pour la plupart, ces conventions collectives «illégales» ont été épinglées essentiellement parce qu’elles contrevenaient à l’interdiction prescrite à l’article 8 (1) de la POTUA et à l’article 10 (1) de la même loi. De ce fait, 137 des 165 conventions collectives de syndicats de fonctionnaires ont été déclarées illégales et invalides et la Commission des relations du travail s’attache à formuler un processus de règlement pour émettre des ordonnances de correction. D’après la KCTU, parmi les exemples de dispositions invalidées figurent des clauses imposant une consultation préalable du syndicat pour entreprendre une action qui pourrait avoir une influence sur le syndicat ou sur les conditions de travail, les salaires et les prestations de ses adhérents parce que, suivant le MOEL, cela pourrait toucher, plus tard, à des questions d’élaboration des politiques. Un autre exemple est celui des clauses déclarant la primauté de la convention sur les règlements de travail et du personnel internes à l’organisation. Le ministère, considérant que cela pourrait concerner les statuts futurs, y a vu une contradiction avec l’article 10 (1) de la POTUA. La commission note que, bien que le système figurant à l’article 31 (2) et (3) de la TULRAA ne soit pas un système d’approbation préalable des conventions collectives au sens strict, il produit un effet similaire. La commission note en particulier que, suivant les observations de la KCTU, l’application des articles 8 (1) et 10 (1) de la POTUA dans ce contexte confère aux décideurs un large pouvoir discrétionnaire leur permettant d’éliminer des dispositions de conventions collectives en vertu d’une incompatibilité virtuelle avec de futures politiques, lois et réglementations et constitue de la sorte une ingérence grave dans l’autonomie des parties. En conséquence, la commission prie le gouvernement de prendre, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, les mesures nécessaires pour réviser la loi afin de limiter la possibilité d’ingérence discrétionnaire des autorités dans la détermination du contenu de conventions collectives conclues librement et de manière autonome. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les dispositions prises à cet égard. Elle le prie en outre de fournir des informations sur le nombre d’ordonnances de correction délivrées sur base de l’article 31 (3) de la TULRAA et sur les types de dispositions de conventions collectives jugées illégales.
Négociation collective dans le secteur public. Impact des directives gouvernementales sur la négociation collective dans les institutions publiques. La commission prend note des informations de la KCTU indiquant que le système de négociation collective du secteur public ne permet pas aux travailleurs de négocier avec le gouvernement et que les salaires, les conditions de travail et d’emploi sont fixés de manière unilatérale par les décisions et les directives du Comité directeur des parties prenantes (OSC) instauré par la Loi de gestion des institutions publiques. Dans ce contexte sont adoptées des «Orientations budgétaires», des «Directives de gestion» et des «Directives pour l’innovation» qui sont en rapport étroit avec les conditions de travail, au nombre desquelles les salaires et l’emploi des agents du secteur public. Elles régissent, entre autres matières, les coûts de main-d’œuvre (salaires), le budget et la gestion des fonds, et la rationalisation des systèmes de protection sociale des employés. Ces directives constituent le fondement des évaluations de chaque institution publique que réalise chaque année le ministère de l’Économie et des Finances (MOEF), et qui détermine les mesures d’incitation à la performance propres à chaque institution publique individuellement. Pour la KCTU, cela veut dire que les différentes organisations syndicales des institutions publiques sont dans l’impossibilité de conclure des conventions collectives ou des accords entre personnel et direction qui s’écarteraient des orientations données dans les directives et que, dans la pratique, les salaires et conditions de travail des agents des institutions publiques sont en majorité déterminés unilatéralement par le gouvernement. Alors que ces directives ont une forte influence et un effet contraignant sur la négociation collective et les conventions collectives conclues entre les personnels et les directions des différentes institutions publiques, le gouvernement ne réagit pas aux demandes incessantes des syndicats du secteur public qui réclament une négociation collective, en affirmant que ces directives ne sont rien de plus que des recommandations et que c’est aux travailleurs et à la direction de chaque institution publique de négocier et conclure indépendamment des conventions collectives sur les salaires et autres conditions de travail. De ce fait, les syndicats du secteur public n’ont aucun moyen de négocier collectivement avec le gouvernement, l’employeur de facto, voire d’apporter une contribution minimale. La KCTU indique que des débats sont en cours à l’Assemblée nationale en vue de modifier la Loi sur la gestion des institutions publiques (AMPI) pour que les syndicats soient représentés à l’OSC et pour institutionnaliser la création d’un organe dans lequel les organisations syndicales peuvent participer aux discussions avec le gouvernement avant qu’il adopte diverses directives, comme l’a recommandé le CLS, et qu’un projet de loi pour modifier l’AMPI sera déposé prochainement. La commission note que la FKTU transmet les observations de son affilié, le Conseil syndical du secteur public (FKTU PSTUC), qui soulève les mêmes questions. La commission prend note de la réponse du gouvernement qui indique que les directives visent à assurer une gestion autonome et responsable et à promouvoir la transparence. Les Orientations budgétaires ont une fonction de contrôle interne et ne doivent pas être considérées comme une réglementation légale arrêtant des droits et obligations spécifiques pour le public. En conséquence, il ne faut pas y voir un empiètement sur les droits des organisations syndicales à la négociation collective. Par ailleurs, il importe de noter que les négociations salariales et la négociation collective peuvent toujours avoir lieu, même si les Orientations budgétaires sont édictées et communiquées. Cela s’explique par le fait que la fixation des salaires est une décision qui relève des prérogatives de l’institution publique, et qui nécessite le consentement du syndicat. La commission note que la question de l’impact des directives gouvernementales sur la négociation collective dans les institutions publiques de la République de Corée a fait l’objet de plusieurs cas étudiés par le Comité de la liberté syndicale, les plus récents étant les cas no 3430 et 3433 [voir le 403e rapport, paragr. 438 à 495 et le 404e rapport, paragr. 585 à 609]. La commission note que dans ces cas, le CLS a demandé au gouvernement de mettre en place un mécanisme de consultation régulière qui permette aux organisations représentant les travailleurs des institutions publiques de participer pleinement et utilement à la formulation des directives relatives aux conditions de travail, de manière à garantir que les directives émises au niveau central n’interfèrent pas dans les faits avec la négociation sur les conditions d’emploi dans les institutions publiques. La commission accueille favorablement les indications de la KCTU concernant l’imminence du dépôt d’un projet de loi modifiant l’AMPI en vue d’assurer la participation des organisations de travailleurs aux discussions avec le gouvernement avant l’approbation des directives. S’attendant à ce quedes mesures adéquates soient prises pour permettre aux organisations représentant les travailleurs des institutions publiques et participer de manière utile et régulière au processus d’élaboration des directives, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’état d’avancement du débat législatif en cours et de la réforme portant sur la question, et de communiquer une copie des amendements lorsqu’ils auront été adoptés.
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