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Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Lettonie (Ratification: 1992)

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Article 1, paragraphe 2, de la convention. Discrimination fondée sur l’ascendance nationale. Conditions exigées pour un emploi déterminé. La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle fait part de ses préoccupations en ce qui concerne les effets discriminatoires que les exigences linguistiques de la loi de 1999 sur la langue officielle peuvent avoir sur les opportunités d’emploi ou d’activité professionnelle des groupes minoritaires, en particulier de l’importante minorité russophone. L’article 6 (2) de la loi prévoit que les employés des institutions, organisations et entreprises privées et les travailleurs indépendants doivent utiliser la langue officielle si leurs activités ont des effets sur les «intérêts légitimes du public». La commission a observé que cette exigence touche un grand nombre de postes et de professions (sécurité publique, santé, moralité, soins de santé, protection des droits des consommateurs et des droits à l’emploi, sécurité sur le lieu de travail, supervision de l’administration publique). En conséquence, la commission a prié le gouvernement d’envisager de dresser une liste des professions pour lesquelles l’utilisation de la langue officielle est requise en vertu de l’article 6 (2) de la loi sur la langue officielle, de manière à la limiter aux cas où la langue est une condition exigée pour des emplois déterminés. Elle note avec regret l’absence d’informations dans le rapport du gouvernement sur des mesures prises pour limiter la lise des professions pour lesquelles l’utilisation de la langue officielle est requise par la loi. La commission note que, dans l’enquête de 2020 publiée par le Médiateur sous le titre «De la prévalence de la discrimination dans l’emploi; rapport comparatif entre 2011 et 2020», il est écrit que les personnes russophones qui ont participé à l’étude ont cité l’origine ethnique et la pratique de la langue plus fréquemment que les autres en tant que motif le plus répandu de discrimination dans l’emploi. Elle prend note également: 1) des jugements rendus par la cour constitutionnelle en 2019 et 2020 qui déclaraient la loi sur la langue officielle constitutionnelle; 2) des informations détaillées fournies par le gouvernement à propos des divers programmes et cours d’apprentissage du letton dispensés aux enfants et aux adultes par certaines municipalités, l’Agence publique de l’emploi et l’Agence de la langue lettonne; et 3) les projets du gouvernement pour offrir aux écoles affectées par la réforme une large palette de mesures de soutien destinées à améliorer les compétences linguistiques en letton, notamment par une formation complémentaire de 4 040 agents pédagogiques entre 2022 et 2026, des cours de perfectionnement professionnel et de master pour les enseignants sur l’inclusion réussie, des matériels d’accompagnement conçus spécialement pour des étudiants issus des minorités, et une numérisation des matériels pour l’enseignement du letton en tant que seconde langue. La commission note encore que l’Agence de la langue lettonne continuera à fournir gratuitement des matériels méthodologiques pour l’enseignement du letton en tant que seconde langue ou que langue étrangère et met en pratique diverses mesures d’accompagnement à l’intention d’instituts d’enseignement, et qu’une page de ressources pour l’apprentissage et l’enseignement du letton est désormais disponible en ligne. Enfin, elle note que des cours d’acquisition du langage pour différents publics et des cours de méthodologie pour enseignants sont organisés chaque année. La commission tient à souligner de nouveau que la discrimination fondée sur l’ascendance nationale peut avoir lieu lorsque la législation qui impose la langue d’un État pour pouvoir travailler dans le secteur public ou dans le secteur privé est interprétée et mise en œuvre de façon trop large et, de cette manière, affecte de façon disproportionnée les possibilités d’emploi des groupes linguistiques minoritaires. Elle tient à rappeler à nouveau que, afin de rester dans le champ d’application de l’exception prévue à l’article 1, paragraphe 2, de la convention, toute restriction concernant l’accès à un emploi doit être requise par les caractéristiques de cet emploi et avoir un caractère proportionnel aux conditions qu’il exige (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 764 et 827-831). Une fois encore, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour éviter toute restriction injustifiée des opportunités d’emploi et d’activité professionnelle pour tout groupe en limitant le nombre de professions où la maîtrise de la langue lettone est considérée comme une condition exigée pour un emploi déterminé. Elle prie en outre le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les activités menées pour garantir que sa législation nationale relative à la langue d’instruction ne crée pas dans la pratique une discrimination directe ou indirecte dans l’accès à l’éducation et à l’emploi pour les groupes minoritaires, en particulier l’importante minorité russophone.
Article 1, paragraphe 2, et article 4. Discrimination fondée sur l’opinion politique. Conditions exigées pour un emploi déterminé. Activités préjudiciables à la sécurité de l’État. Depuis de nombreuses années, la commission se réfère aux dispositions contraignantes de la loi de 2000 sur la fonction publique de l’État, qui prévoit que pour faire acte de candidature à un poste dans la fonction publique, la personne concernée ne doit ni occuper ni avoir occupé «un poste permanent dans le service de sécurité de l’État, du renseignement ou du contre-espionnage de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS), de la République socialiste soviétique de Lettonie (RSS) ou d’un pays étranger» (article 7 (8)), ou ne doit ni être ni avoir été «membre d’une organisation qui a été interdite par la loi ou par décision judiciaire» (article 7 (9)). La commission avait attiré l’attention du gouvernement sur le fait que la loi s’applique à tout poste de fonctionnaire de l’État et concerne aussi l’emploi dans certains services en particulier, quel que soit le niveau de responsabilité, et avait prié le gouvernement de modifier l’article 7 (8) et (9) de la loi ou de prendre des mesures pour préciser et définir clairement les fonctions auxquelles s’appliquent cet article. La commission rappelle la déclaration réitérée du gouvernement selon laquelle l’objectif de ces restrictions est d’empêcher l’entrée dans la fonction publique de personnes qui ne sont pas loyales envers l’État et qui pourraient constituer une menace pour la sécurité nationale. Elle rappelle le rapport du ministère de la Justice d’avril 2019 sur la nécessité et l’opportunité des restrictions imposées par la loi sur la fonction publique de l’État aux anciens employés du Comité de sécurité nationale de la RSS de Lettonie qui concluait que, si ces restrictions devaient être maintenues afin de «garantir une fonction publique de l’État loyale, professionnelle et politiquement neutre», il serait plus approprié pour un pays démocratique d’évaluer les circonstances individuelles de chaque cas et d’adopter une décision fondée sur cette évaluation du degré de coopération passée, de la nature du travail, etc. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère de la Justice publiera un autre rapport d’évaluation l’an prochain et qu’il n’existe actuellement aucun projet de modification de cet article du fait de la situation actuelle en matière de sécurité nationale. S’agissant de l’application de l’article 7 (8) et (9) de la loi sur la fonction publique de l’État, la commission note que le gouvernement répète que ces données ne sont pas disponibles, non plus que sur des cas d’espèce dans lesquels une candidature aurait été rejetée en application de cet article. La commission prend note des préoccupations quant à la sécurité nationale, qui sont compréhensibles, et voudrait à nouveau attirer son attention sur le fait que la loi sur la fonction publique s’applique à tout fonctionnaire de l’État, quel que soit son niveau de responsabilité. Elle rappelle à nouveau qu’afin de rester dans le champ de l’exception prévue à l’article 1, paragraphe 2, de la convention, toute restriction concernant l’accès à un emploi doit être interprétée de manière restrictive afin d’éviter toute restriction injustifiée de la protection que la convention vise à assurer. Elle ajoute que des critères tels que l’opinion politique ne peuvent être pris en compte comme conditions exigées en vertu de l’article 1, paragraphe 2, que pour certains postes impliquant des responsabilités particulières directement liées à l’élaboration de la politique gouvernementale. En outre, pour que les mesures ne soient pas discriminatoires au sens de l’article 4 de la convention, elles doivent: 1) viser une personne en raison des activités pour lesquelles elle est mise en cause sur la base d’une suspicion légitime ou de preuves, ces mesures devenant discriminatoires lorsqu’elles sont prises uniquement en raison de l’appartenance à un groupe ou à une communauté déterminés; 2) s’appliquer à des activités pouvant être qualifiées de préjudiciables à la sécurité de l’État; et 3) être suffisamment bien définies et délimitées, de sorte qu’elles ne puissent pas devenir un moyen de discrimination fondé sur l’opinion politique. Outre ces conditions de fond, l’application légitime de cette exception doit respecter le droit de la personne visée par les mesures de recourir à une instance compétente établie suivant la pratique nationale (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 832-835). La commission réitère une nouvelle fois sa demande au gouvernement pour qu’il prenne les mesures nécessaires pour modifier l’article 7 (8) et (9) de la loi sur la fonction publique de l’État afin de limiter son champ d’application à des fonctions et des postes bien déterminés de la fonction publique de l’État, conformément aux dispositions de la convention. Elle le prie en outre: i) de fournir des informations sur les progrès accomplis à cet égard et sur les conclusions du prochain rapport du ministère de la Justice sur la nécessité et l’opportunité des restrictions imposées par la loi sur la fonction publique de l’État aux anciens employés du Comité de sécurité nationale de la RSS de Lettonie; et entretemps; ii) d’envisager de prendre des mesures pour rassembler des données sur l’application de l’article 7 (8) et (9) dans la pratique, y compris sur le nombre de personnes dont la candidature a été rejetée en vertu de cet article, les raisons de ces décisions et les fonctions concernées, ainsi que tout recours formé contre ces décisions.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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