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Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Togo (Ratification: 1999)

Autre commentaire sur C105

Observation
  1. 2023
  2. 2019

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Article 1 a) de la convention. Imposition de peines de prison comportant une obligation de travailler en tant que sanction de l’expression d’opinions politiques ou de la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. 1. Code pénal et charte des partis politiques. La commission rappelle que plusieurs dispositions de la législation nationale peuvent donner lieu à l’application de peines de prison qui impliquent un travail obligatoire en vertu de l’article 68 du Code pénal, pour des infractions qui peuvent être liées à des activités à travers lesquelles les personnes expriment des opinons politiques ou manifestent une opposition à l’ordre politique, social ou économique établi, à savoir plus particulièrement:
  • Code pénal: articles 290 à 292 (diffamation), 301 et 302 (offense au Président, aux membres du gouvernement et autres autorités publiques), 491 et 492 (outrage envers les représentants de l’autorité publique, ou outrage au drapeau ou à l’hymne), 540 (organisation de manifestations sur la voie publique non conformes aux prescriptions légales), 552 (cris et chants séditieux proférés dans des lieux ou réunions publics) et 665 (publication, diffusion ou reproduction, par quelconque moyen, de nouvelles fausses); et
  • loi n° 91-4 du 12 avril 1991 portant Charte des partis politiques: article 25 (personnes qui dirigent ou administrent un parti politique en violation des dispositions de la Charte).
La commission note avec regret l’absence d’informations de la part du gouvernement sur l’application de ces dispositions dans la pratique, ainsi que sur toute mesure envisagée pour s’assurer qu’aucune sanction impliquant un travail obligatoire ne puisse être imposée pour l’expression d’opinions politiques ou la manifestation pacifique d’une opposition à l’ordre établi sur la base des dispositions susvisées.
La commission note en outre, que, dans ses observations finales de 2021, le Comité des droits de l’homme des Nations s’est dit préoccupé par: 1) l’existence d’un certain nombre de dispositions législatives vagues fixant des limites excessives au contenu des discours, notamment dans le Code de la presse et de la communication; 2) un certain nombre d’articles du Code pénal qui criminalisent des activités liées à l’exercice de la liberté d’expression, telles que les cris et chants séditieux dans les lieux ou réunions publics, la publication de fausses nouvelles ou la diffamation; 3) les allégations faisant état de l’utilisation de ces dispositions pénales dans le but d’entraver les activités de journalistes, de syndicalistes, de leaders d’opinion ou de défenseurs et défenseuses des droits de l’homme, et de restreindre leur liberté d’expression; et 4) les informations relatives aux nombreux actes de menaces, d’intimidation, de harcèlement et d’arrestations arbitraires de défenseurs et défenseuses des droits de l’homme (CCPR/C/TGO/CO/5, 24 août 2021).
La commission prend note de ces informations et exprime sa préoccupation face à la persistance de dispositions dans la législation qui peuvent être utilisées pour limiter l’exercice de la liberté d’exprimer des opinions politiques ou idéologiques (oralement, par voie de presse ou par d’autres moyens de communication) et donner lieu à l’imposition de sanctions comportant du travail pénitentiaire obligatoire. 
La commission rappelle à nouveau que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail obligatoire en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique ou en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Parmi les activités qui, en vertu de cette disposition, ne doivent pas faire l’objet d’une sanction comportant du travail obligatoire figurent celles qui s’exercent dans le cadre de la liberté d’exprimer des opinions politiques ou idéologiques (oralement, par voie de presse ou par d’autres moyens de communication, ou par l’exercice du droit d’association, y compris par la création de partis ou de sociétés politiques). La loi peut toutefois apporter certaines limites à l’exercice de ces droits et libertés, qui doivent être acceptées comme étant un moyen normal de prévenir les abus, comme les lois réprimant l’incitation à la violence, aux troubles civils ou à la haine raciale (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 302 et 303).
La commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures, tant en droit que dans la pratique, pour s’assurer que quiconque exprime des opinions politiques ou manifeste pacifiquement son opposition à l’ordre politique, social ou économique établi, ne puisse être condamné à des sanctions impliquant une obligation de travailler. Elle prie le gouvernement de modifier les articles susmentionnés du Code pénal et de la Charte des partis politiques, en limitant clairement le champ d’application de ces dispositions aux situations où il y a recours à la violence ou incitation à la violence, ou en abrogeant les sanctions pénales impliquant de travail obligatoire. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé en la matière et de préciser le nombre de poursuites initiées sur la base de ces dispositions, la nature des sanctions imposées, et les faits ayant donné lieux aux poursuites judiciaires ou aux condamnations.
2. Loi no 40-484 du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. La commission rappelle que plusieurs dispositions de la loi no 40-484 du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association prévoient la possibilité d’imposer une peine de prison, impliquant une obligation de travailler, pour des infractions en lien avec l’exercice de la liberté d’expression et, pouvant de ce fait relever du champ d’application de la convention, à savoir:
  • l’article 8, alinéa 1, qui prévoit une peine d’amende, pouvant être en cas de non-paiement substituée par une peine d’emprisonnement en application de l’article 76 du Code pénal, en cas de non-respect des formalités relatives à la déclaration préalable, de non-communication de changements survenus dans l’administration ou la direction d’une association, ainsi que de toutes les modifications apportées aux statuts;
  • l’article 8, alinéa 2, qui prévoit une peine d’amende et une peine d’emprisonnement de six jours à un an pour les fondateurs, directeurs ou administrateurs d’une association qui se serait maintenue ou reconstituée illégalement après un jugement de dissolution, et alinéa 3, qui prévoit que «seront punies de la même peine toutes les personnes qui auront favorisé la réunion des membres de l’association dissoute, en consentant l’usage d’un local dont elles disposent»; et
  • l’article 15, qui prévoit les mêmes peines que celles de l’article 8, alinéa 2, pour les représentants ou directeurs d’une congrégation religieuse qui ne se seront pas conformés aux dispositions relatives à la tenue d’une liste des membres de la congrégation et à la présentation de cette liste sur réquisition du préfet.
La commission note avec regret l’absence répétée d’informations dans le rapport du gouvernement sur l’application pratique de ces dispositions. La commission relève par ailleurs qu’un avant-projet de loi relatif à la liberté d’association en vue de remplacer la loi de 1901 a été lancé en 2020 et que celui-ci prévoit des peines de prison. Elle note en outre que plusieurs rapporteurs spéciaux des Nations Unies ont exprimé leurs inquiétudes au regard de cet avant-projet, notamment concernant les sanctions imposées (OL TGO 3/2021, 13 août 2021).
La commission veut croire que dans le cadre de la révision de la loi no 40-484 du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, le gouvernement tiendra compte des obligations découlant de la convention et veillera à ce qu’aucune peine comportant du travail obligatoire ne puisse être imposée aux personnes qui exercent des droits à travers lesquels ils expriment des opinions ou s’opposent à l’ordre politique, économique et social établi. Elle prie le gouvernement de fournir des informations actualisées sur ce processus de révision législatif et de communiquer copie de toute nouvelle loi adoptée en la matière. Dans cette attente, la commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur l’application des dispositions susvisées dans la pratique et de communiquer toute décision de justice prononcée sur la base de ces dispositions.
3. Code de la presse et de la communication. La commission note que le gouvernement indique que des progrès ont été réalisés et aboutis à l’adoption d’un nouveau Code de la presse et de la communication (loi n° 2020‐001 du 7 janvier 2020). Le gouvernement précise que l’article 157 du code (qui a remplacé l’article 86 de l’ancien code) ne prévoit désormais plus de peine de prison pour les journalistes, techniciens ou auxiliaires des médias ayant appelé la population à enfreindre les lois de la République mais prévoit que ce délit sera «puni conformément aux dispositions du droit commun». La commission prie le gouvernement d’indiquer les dispositions du droit commun qui seraient applicables en la matière.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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