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Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Pérou (Ratification: 1960)

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La commission prend note des observations de l’Organisation internationale des employeurs reçues le 1er septembre 2023, qui réitèrent les commentaires formulés durant la Commission de l’application des normes de la Conférence (ci-après la Commission de la Conférence) en juin 2023 au sujet de l’application de la convention par le Pérou. La commission prend également note des observations de la Confédération syndicale internationale reçues le 27 septembre 2023 qui portent sur des questions abordées dans le présent commentaire.

Suivi des conclusions de la Commission de l ’ application des normes (Conférence internationale du Travail, 111 e   session, juin 2023)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu lors de la 111e session de la Commission de la Conférence en juin 2023 et note que, tout en se félicitant de certaines évolutions législatives, la commission s’est déclarée préoccupée par les limitations qui existent encore en droit et dans la pratique en ce qui concerne le droit à la liberté syndicale et le droit d’organisation et a demandé au gouvernement d’adopter, en consultation avec les partenaires sociaux, des mesures dans un délai donné pour:
  • garantir que la législation actuelle et future soit conforme à la convention;
  • garantir que les fonctionnaires, notamment les juges, les procureurs et les employés qui occupent un poste de confiance et de direction dans l’administration publique, sans aucune distinction, aient le droit de constituer des organisations de travailleurs de leur choix et de s’y affilier;
  • garantir le bon fonctionnement du Conseil national du travail et de la promotion de l’emploi (CNTPE) en vue de faciliter le dialogue social et la consultation avec les partenaires sociaux sur la réforme du droit du travail; et
  • garantir, en droit et dans la pratique, le droit des organisations de travailleurs et d’employeurs d’organiser leurs activités et d’élaborer leurs programmes en toute liberté.
La Commission de la Conférence a également demandé au gouvernement de fournir des informations pour le 1er septembre 2023, en consultation avec les partenaires sociaux, sur l’application de la convention en droit et en pratique et a invité le gouvernement à accepter une mission de contacts directs pour mettre pleinement en œuvre ces recommandations.
La commission prend note du rapport du gouvernement indiquant que, dans le but de promouvoir résolument le dialogue social tripartite comme axe central de la gestion du ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi, la 129e session ordinaire de la CNTPE s’est tenue le 13 juillet 2023, avec la participation du ministre du Travail et de la Promotion de l’emploi et des principaux représentants des associations d’entreprises et des centrales syndicales, et qu’après près d’un an, les acteurs sociaux étaient disposés à la réactiver. Le gouvernement indique qu’il a été convenu de reprendre le dialogue au sein de la CNTPE et de réactiver ses commissions techniques, et qu’il a également été convenu que les accords adoptés lors des 127e et 128e sessions ordinaires (mai et juillet 2022) et les demandes formulées par les parties lors de la session de juillet 2023 seraient traités conformément au règlement intérieur sur l’organisation et les fonctions de la CNTPE. Le gouvernement indique également qu’avec la reprise des sessions de la CNTPE, il réitère sa volonté et son engagement les plus fermes de donner la priorité au dialogue social en tant que moteur, outil et instrument de gouvernance pour parvenir à un développement durable du travail dans le pays. Le gouvernement souligne que les employeurs et les travailleurs ont exprimé leur volonté de poursuivre le dialogue et qu’il est convaincu de pouvoir continuer à compter sur la volonté et l’engagement des partenaires sociaux, sans lesquels le dialogue social tripartite est impossible. Le gouvernement indique également que le 21 juillet 2023 s’est tenue une réunion de haut niveau au cours de laquelle des fonctionnaires de différents ministères et organes de l’État ont exprimé leur volonté de réaliser conjointement une analyse technique afin de répondre aux exigences de la Commission de la Conférence et de la présente commission, en mettant l’accent sur le dialogue social. Le gouvernement a également exprimé sa volonté de coordonner la future visite de la mission de contacts directs demandée par la Commission de la Conférence.
La commission prend bonne note de ces informations. La commission se félicite également de la réactivation du CNTPE et de ses commissions techniques, ainsi que de la tenue de la réunion de haut niveau et de la réaffirmation de l’engagement des différentes institutions en faveur du dialogue social. La commission se félicite également de la disponibilité du gouvernement à coordonner la future visite de la mission de contacts directs demandée par la Commission de la Conférence. La commission encourage le gouvernement, et toutes les parties concernées, à tout mettre en œuvre pour que le CNTPE continue à fonctionner et à jouer un rôle fondamental en tant qu’organe tripartite de dialogue social. La commission réaffirme l’importance de la consultation dans la préparation et l’élaboration de la législation relative aux relations collectives de travail et espère que toute préoccupation à cet égard sera dûment prise en compte au sein du CNTPE. La commission réitère également son espoir que l’application du décret suprême no 014-2022-TR, dont le gouvernement a indiqué qu’il avait été motivé par la situation préoccupante de la liberté syndicale dans le pays, contribuera à garantir la pleine jouissance et l’exercice des droits consacrés par la convention. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur l’impact de son application. En outre, à la lumière des préoccupations exprimées par la Commission de la Conférence concernant les limitations qui existent encore en droit et en pratique en ce qui concerne le droit à la liberté syndicale et le droit d’organisation, la commission espère vivement que, grâce à un dialogue social renforcé, des progrès pourront être réalisés dans un proche avenir sur toutes les questions mises en évidence par la Commission de la Conférence et par la commission dans ses commentaires précédents. La commission rappelle au gouvernement que l’assistance technique du Bureau reste à sa disposition et espère que la mission de contacts directs pourra être effectuée dès que possible et qu’elle sera en mesure d’aider à la pleine application de la convention.
La commission réitère ci-dessous les points qu’elle a soulignés dans ses commentaires précédents et qui exigent que des mesures concrètes soient prises pour mettre la législation en pleine conformité avec la convention.
Article 2 de la convention. Droit de tous les travailleurs, sans distinction aucune, de constituer des organisations et de s’y affilier. Depuis plusieurs années, la commission attire l’attention du gouvernement sur la nécessité de réviser la loi no 28518, son règlement d’application et la loi générale sur l’éducation afin de reconnaître expressément la liberté syndicale dans le cadre de la formation professionnelle. Le gouvernement a indiqué que: i) le 13 avril 2022, par la résolution ministérielle no 0922022-TR, il a ordonné la prépublication de l’avant-projet de code du travail préparé par le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi, qui définit dans son article 75 la formation professionnelle comme un type particulier de contrat de travail, reconnaissant ainsi son caractère de travail; et ii) des commentaires et des suggestions ont été reçus du public jusqu’en juin 2022 concernant l’avant-projet et ont été communiqués aux représentants des travailleurs et des employeurs participant à la CNTPE. Pour leur part, les confédérations syndicales ont indiqué que: i) à ce jour, il n’y a pas d’initiative de modification de la loi no 28518; ii) la reconnaissance générique dans la Constitution des droits syndicaux ne permet pas en soi aux personnes en formation d’exercer ces droits; et iii) l’article 76 de l’avant-projet de loi stipule que le travail en formation n’est pas soumis au régime général du travail, c’est-à-dire que l’avant-projet de loi maintiendrait l’orientation de la législation actuelle, qui ne reconnaît pas expressément les droits syndicaux des personnes en formation. La commission s’attend à ce que l’avant-projet de code du travail fasse l’objet de consultations tripartites approfondies et que, dans le cadre de ce processus de dialogue, il soit également envisagé de prendre des mesures concrètes pour réviser la législation de manière à reconnaître expressément la liberté d’association des travailleurs dans le cadre de la formation professionnelle. La commission prie le gouvernement de faire rapport sur tout progrès réalisé à cet égard.
Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de revoir les dispositions pertinentes de son système juridique afin de garantir l’exercice du droit d’organisation, en droit et en pratique, des juges et des procureurs, ainsi que des cadres et du personnel de confiance de l’administration publique. La commission a demandé au gouvernement de faire rapport sur tout progrès réalisé à cet égard. La commission a regretté de constater que le gouvernement avait pris note de la demande d’information et qu’il la fournirait dès que possible. La commission rappelle que l’article 2 de la convention accorde le droit fondamental de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier à tous les travailleurs sans distinction, y compris tous les fonctionnaires, quelle que soit la nature de leurs fonctions, les seules exceptions autorisées par la convention concernant les membres des forces armées et de la police. Toutefois, la commission a affirmé que les hauts fonctionnaires peuvent être privés du droit de s’affilier à des syndicats à condition qu’ils aient le droit de créer leurs propres organisations pour défendre leurs intérêts (Étude d’ensemble de 2013 relative aux relations de travail et à la négociation collective dans la fonction publique, paragr. 43 et suivants, et Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 66). La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour revoir les dispositions pertinentes de son système juridique afin de garantir l’exercice du droit syndical, en droit et en pratique, des juges et des procureurs, ainsi que des cadres et du personnel de confiance de la fonction publique. La commission prie le gouvernement de faire rapport sur tout progrès réalisé à cet égard.
Article 3. Droit des organisations d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. Qualification de l’illégalité de la grève. Ayant noté que la commission d’appui à la fonction publique était compétente pour statuer sur l’irrecevabilité et l’illégalité de la grève et étant donné qu’elle n’avait pas encore été mise en place, la commission a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la qualification de la grève, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, ne relève pas de la responsabilité du gouvernement mais d’un organe indépendant des parties et auquel il fait confiance. À cet égard, le gouvernement a indiqué que, alors que l’organe chargé de statuer sur la validité d’une grève dans le secteur privé est l’Autorité administrative du travail, qui rend une décision indépendante, impartiale et légale, l’avant-projet de Code du travail propose que, à la demande de l’employeur ou des employeurs touchés par la mesure, l’Autorité judiciaire se prononce sur la légalité ou l’illégalité de la grève. En ce qui concerne le secteur public, le gouvernement a rappelé qu’en vertu des dispositions de la dixième disposition complémentaire transitoire de la loi sur le service civil (LSC), l’Autorité administrative du travail assume les fonctions de la commission d’appui à la fonction publique jusqu’à ce qu’elle soit mise en place. La commission a noté que les centrales syndicales considèrent que le fait que l’Autorité administrative du travail continue d’exercer un contrôle sur la légalité des grèves dans le secteur privé comme dans le secteur public (compte tenu de l’absence persistante de mise en place de la commission d’appui à la fonction publique pour garantir sa réelle impartialité) témoigne de la réticence de l’État à mettre sa législation en conformité avec les dispositions de la convention et rappelle qu’en 2020, 100 pour cent des grèves ont été déclarées illégales par l’Autorité administrative du travail. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la qualification de l’illégalité des grèves dans le secteur privé ne relève pas de l’administration du travail mais d’un organe véritablement impartial et indépendant des parties et jouissant de leur confiance. La commission s’attend à ce que l’amendement proposé dans l’avant-projet de code du travail fasse l’objet de consultations tripartites complètes et demande d’être informé de tout progrès à cet égard. Notant avec préoccupation les indications des centrales syndicales, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que la commission d’appui à la fonction publique soit mise en place sans délai et exprime son ferme espoir qu’elle soit constituée en tant qu’organe véritablement indépendant. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
Définition des services minimums dans les services publics essentiels. Ayant noté que le Règlement du Texte unique ordonné de la loi sur les relations collectives de travail (TUO de la LRCT) prévoit que la commission de soutien à la fonction publique est l’organe compétent pour déterminer le service minimum en cas de grève affectant un service essentiel, la commission s’est déclarée convaincue que ce service minimum sera établi dès que possible. Le gouvernement a indiqué que la section 435 de l’avant-projet de code du travail prévoit qu’en cas de divergence, un organe technique indépendant sera appelé à établir le service minimum et que la décision sera contraignante. La commission a noté qu’en plus de rappeler que la commission d’appui à la fonction publique n’a pas encore été constituée, les centrales syndicales ont indiqué que l’article 68 du Règlement du LRCT tel qu’amendé par le décret suprême no 014-2022-TR prévoit que, si l’Autorité d’administration du travail peut s’appuyer sur un organisme indépendant pour résoudre les divergences sur les services minimums dans les services publics essentiels, c’est l’Autorité d’administration du travail qui prend la décision sur la base du rapport de l’organisme indépendant. Tout en prenant bonne note des modifications introduites par le décret suprême no 014-2022-TR, la commission rappelle que les divergences entre les parties sur le nombre et la profession des travailleurs devraient non seulement être examinées mais aussi résolues par un organe indépendant. La commission réitère la nécessité d’établir sans plus tarder la commission de soutien à la fonction publique et demande au gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
Droit des organisations syndicales de tenir des réunions et d’avoir accès aux lieux de travail. La commission a demandé au gouvernement de revoir les dispositions finales du décret suprême no 017-2007-ED, qui définit comme une faute grave de la part des directeurs d’école et des directeurs adjoints le fait de mettre à disposition des locaux scolaires pour des réunions à caractère syndical et d’autoriser le prosélytisme politique et/ou syndical dans les établissements d’enseignement, afin que les directeurs d’école puissent convenir avec les organisations syndicales de modalités d’accès aux lieux de travail qui ne portent pas préjudice au bon fonctionnement de ces établissements. À cet égard, le gouvernement a indiqué que le ministère de l’éducation évaluait le cadre réglementaire sur cette question afin de soutenir la nécessité de modifier ou d’abroger certains articles du règlement de la loi no 28988, loi déclarant l’éducation de base régulière comme un service public essentiel, approuvée par le décret suprême no 0172007ED. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé en ce qui concerne la révision des dispositions finales du décret suprême susmentionné afin de permettre aux chefs d’établissement de convenir avec les organisations syndicales concernées de modalités d’accès aux lieux de travail qui ne portent pas préjudice au bon fonctionnement des établissements scolaires.
Enfin, la commission note que le Comité de la liberté syndicale lui a renvoyé les aspects législatifs du cas no 3245 concernant la détermination par voie réglementaire de l’autorité syndicale qui désigne les représentants régionaux des syndicats d’enseignants en congé payé. Le comité a invité le gouvernement, en consultation avec les organisations syndicales représentatives du secteur, à examiner comment réviser la réglementation en vigueur afin que ce soient les organisations de travailleurs de l’éducation elles-mêmes qui déterminent les mécanismes internes de désignation de leurs représentants qui bénéficieront des congés syndicaux (voir 403e rapport, juin 2023). La commission prie le gouvernement de l’informer de toute mesure prise à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande adressée directement au gouvernement.
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