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Demande directe (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 181) sur les agences d'emploi privées, 1997 - Nouvelle-Calédonie

Autre commentaire sur C181

Demande directe
  1. 2023
  2. 2018

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La commission prend note des observations formulées par le Conseil du Dialogue Social (CDS), accompagnant le rapport du gouvernement ainsi que des informations fournies en réponse à ses précédents commentaires au titre de l’article 3, paragraphe 2, de la convention en ce qui concerne les conditions d’exercice des agences d’emploi privées; de l’article 10, les mécanismes d’examen des allégations d’abus et de pratiques frauduleuses; ainsi que de l’article 12, alinéas a), b), d), e), g), pour ce qui concerne les responsabilités des agences d’emploi privées et des entreprises utilisatrices.
Article 1, paragraphe 1, et article 3 de la convention. Définition des agences d’emploi privées, de leurs services et de leurs activités. Consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives. Le gouvernement réitère que le Code du travail de la Nouvelle-Calédonie (CTNC) régit à ce jour les activités des entreprises de travail temporaire (ETT) (art. Lp. 124-1 et suivants du CTNC). Dans le cadre des travaux de réforme des services de placement, la possibilité de permettre à des agences d’emploi privées de: i) rapprocher les offres et demandes d’emploi sans devenir partie aux éventuelles relations de travail; et ii) d’assurer d’autres services ayant trait à la recherche d’emplois, est à l’étude. La commission demande au gouvernement de la tenir informée de toute évolution de la législation applicable qui étendrait le champ de la législation de manière à permettre à des agences d’emploi privées d’exercer les activités ci-dessus. La commission prie une nouvelle fois le gouvernement d’indiquer si les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives sont consultées sur le statut juridique des agences ci-dessus dans le cadre de la réforme en cours des services de placement.
Article 1. Champ d’application. Le CDS observe que le travail intérimaire s’est étendu aux cadres via des «sociétés de portage» établies hors du territoire national. La CDS indique que le droit de Nouvelle-Calédonie n’encadre pas l’activité de ces sociétés, sauf dans le domaine artistique. La commission note qu’en règle générale, les activités de portage salarial se distingue des activités de placement au sens large dans la mesure où le salarié porté est seul responsable du démarchage de clients potentiels alors que la convention concerne des entités qui fournissent un ou plusieurs des services se rapportant au marché du travail. Rappelant que le champ d’application de la convention est délimité par l’article 1, paragraphes 1 (a), (b) et (c), de la convention, la commission prie le gouvernement et le CDS de fournir de plus amples informations sur le statut juridique et la raison sociale de ces sociétés de portage établies à l’étranger afin d’être en mesure de déterminer si la convention est applicable à leur égard.
Article 5, paragraphe 1. Non-discrimination. Conformément à l’article Lp. 112-1 l’interdiction de discrimination s’applique à l’ensemble du CTNC, quel que soit le mode de recrutement ou le type de contrat. L’interdiction de discrimination vise toute prise en considération dans l’offre d’emploi, l’embauche et la relation de travail, de l’origine, du sexe, de l’état de grossesse, de la situation de famille, de l’appartenance ou de la non-appartenance réelle ou supposée à une ethnie, une nation ou une race, de l’opinion politique, de l’activité syndicale, du handicap ou des convictions religieuses. La commission note, avec intérêt, qu’à la suite de l’adoption de la loi du pays no 20183 du 28 mai 2018 instituant un congé pour responsabilité coutumière, l’interdiction de la discrimination fondée sur «l’exercice d’une responsabilité coutumière» a été ajoutée à l’article Lp. 112-1.
La commission note que le gouvernement n’a pas profité de cette réforme afin d’étendre la liste des motifs de discriminations interdits en Nouvelle-Calédonie dans l’emploi et la profession, en l’alignant sur celle des motifs de discriminations interdits en France métropolitaine mais indique que le Code pénal, qui s’applique en France métropole et en Nouvelle-Calédonie, couvre les mêmes motifs de discrimination que la France. Se référant à ses commentaires au titre de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, la commission prie à nouveau le gouvernement d’examiner la possibilité d’étendre la liste des motifs de discrimination interdits en Nouvelle-Calédonie dans l’emploi et la profession, afin d’éviter toute insécurité juridique reposant sur une éventuelle interprétation de dispositions législatives par les tribunaux.
Article 5, paragraphe 2. Programmes et services conçus pour aider les travailleurs défavorisés. Le gouvernement fait état de travaux de réforme du service public de placement, visant à soutenir les travailleurs les plus défavorisés dans leur recherche d’emploi. Le gouvernement souligne que ce projet est inscrit à l’agenda social partagé 2021-2022, établi en concertation avec les partenaires sociaux. Le gouvernement rapporte également qu’un projet de loi relatif à l’égalité professionnelle réelle entre les femmes et les hommes a été déposé au Congrès de Nouvelle-Calédonie. Diverses mesures sont prises pour soutenir l’insertion des plus défavorisés au travers de la prise en charge de formations professionnelles et de l’insertion de clauses relatives à l’insertion sociale dans les contrats publics. À ce titre, une nouvelle délibération no 424 du 20 mars 2019 permet, sous certaines conditions, d’attribuer des contrats publics à des structures d’insertion par le travail (SIT) agréées, sans mise en concurrence. La commission prend note de ces informations avec intérêt mais souhaiterait que le gouvernement précise si, dans quelle mesure et de quelle manière les agences d’emploi privées, y compris les ETT, participent ou collaborent aux services spéciaux ou aux programmes ciblés conçus pour aider les travailleurs défavorisés à trouver un emploi. En outre, la commission réitère sa demande au gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour encourager les agences d’emploi privées à fournir des services aux travailleurs défavorisés.
Article 6. Traitement des données personnelles. Dans son commentaire précédent, la commission demandait au gouvernement d’indiquer toute évolution relative à la mise en œuvre des nouvelles dispositions de la loi modifiée no 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Le gouvernement indique avoir adopté une circulaire du 11 décembre 2019, dont il communique une copie. La commission note que, suite à la modification de la loi no 78-17, des analyses d’impact relatives à la protection des données (AIPD) doivent dans certains cas être réalisées. La nouvelle circulaire vient préciser la forme, le contenu et les modalités de réalisation des AIPD. Le gouvernement ajoute que la protection des données est assurée par des délégués à la protection des données, présents au sein des entreprises et des collectivités. La Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) a dispensé jusqu’en septembre 2021 une formation en ligne aux délégués à la protection des données ainsi qu’à toute personne intéressée par le Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (RGPD). La commission demande au gouvernement de continuer à fournir des informations actualisées sur les mesures prises ou envisagées pour protéger les données personnelles des travailleurs, notamment dans le cadre de la mise en œuvre du Règlement (UE) no 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD).
Article 8, paragraphe 1. Protection des travailleurs migrants. En Nouvelle-Calédonie, les travailleurs, y compris les travailleurs migrants, relèvent en principe de l’application des dispositions du CTNC (article Lp. 111-1) avec une exception relative à l’activité de construction d’une infrastructure minière. La commission note l’indication du gouvernement que le CTNC régit les activités des salariés employés par une entreprise étrangère à la construction d’une infrastructure minière en Nouvelle-Calédonie, quelle que soit la loi applicable au contrat de travail (article Lp. 621-1). Sans préciser si les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives ont été consultées à cet égard, le gouvernement indique que les dispositions de ce titre garantissent des droits sociaux aux travailleurs concernés en termes de durée du travail, santé et sécurité, salaires et accessoires, représentation du personnel, médecine du travail, et que les inspecteurs du travail de Nouvelle-Calédonie doivent en contrôlent le respect (articles Lp. 622-1 à Lp. 623-1). Tout en prenant bonne note de ces informations, la commission saurait néanmoins gré au gouvernement d’indiquer si des consultations ont eu lieu avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives pour la détermination du régime juridique applicable aux sociétés étrangères précitées.
Article 8, paragraphe 2. Accords bilatéraux. Le gouvernement indique ne pas avoir conclu d’accords bilatéraux pour prévenir les abus et les pratiques frauduleuses en matière de recrutement, de placement et d’emploi des travailleurs migrants. Le gouvernement ajoute que la procédure administrative à suivre en Nouvelle-Calédonie pour le recrutement d’un salarié étranger permet de prévenir et de lutter contre toutes formes d’abus ou de pratiques frauduleuses. Tout en soulignant que la conclusion d’accord bilatéraux constitue le moyen le plus abouti afin d’améliorer la protection des travailleurs de Nouvelle-Calédonie déployés à l’étranger, la commission prend bonne note de ces informations et prie le gouvernement de tenir le Bureau informé de possibles avancées réalisées dans la conclusion de tel accords à l’avenir.
Article 11. Mesures destinées à assurer une protection adéquate aux travailleurs employés par les agences d’emploi privées. Le CDS observe que les travailleurs intérimaires souffrent d’un taux de précarité relativement plus élevé que les autres travailleurs. Ainsi, ils doivent, par exemple, avoir cotisés neuf mois pour bénéficier de droits auprès de la Caisse de compensation des prestations familiales, des accidents du travail et de prévoyance des travailleurs de Nouvelle-Calédonie (CAFAT). Les contrats de travail intérimaire ne pouvant excéder six mois, les intérimaires sont en pratique privés des prestations de la CAFAT, malgré les cotisations prélevées. Le CDS ajoute que les acteurs du secteur du travail temporaire militent depuis 25 ans pour la mise en place d’une mutuelle complémentaire dont ils pourraient bénéficier. Pour la CDS, la question de la mutualisation, permettant notamment aux salariés d’accéder aux soins, à la formation complémentaire et à la couverture sociale, doit être étudiée de manière plus approfondie dans le secteur de l’emploi de courte durée. La commission demande au gouvernement de communiquer ses commentaires sur l’observation du CDS alléguant une absence de protection effective adéquate des salariés des ETT, en particulier s’agissant des prestations de la CAFAT.
Article 14, paragraphes 2 et 3. Contrôle et mesures correctives appropriées.Application de la convention dans la pratique. La commission note que le document «Bilan emploi – Année 2018», communiqué par le gouvernement, indique qu’il existait dix ETT en Nouvelle-Calédonie en 2018, qui ont employé 18 288 intérimaires et conclus 20 106 contrats avec 4 688 entreprises utilisatrices. Le gouvernement joint à son rapport des bilans d’activités de l’inspection du travail, indiquant que ces derniers ne permettent pas d’identifier des violations des dispositions de la convention mais précise ne pas disposer de données statistiques à cet égard. Les inspecteurs du travail sont habilités à entrer dans tous les établissements où les dispositions dont ils sont chargés d’assurer la mise en œuvre sont applicables. Le gouvernement rapporte en outre que le travail temporaire suscite très peu de contentieux et que les jugements dans ce domaine sont rarissimes. Ainsi, aucune décision n’a été rendue concernant l’application de la convention depuis la soumission du premier rapport du gouvernement en 2017. Le gouvernement répète que, lorsqu’une ETT n’a pas satisfait à son obligation de déclaration ou de garantie financière et qu’il en résulte un risque sérieux de préjudice pour le salarié, l’inspecteur du travail peut saisir le juge après une mise en demeure restée infructueuse. Le juge peut alors ordonner la fermeture de l’ETT pour une durée maximum de deux mois (article Lp. 124-21 CTNC). Le gouvernement ajoute que les infractions aux dispositions du CTNC relatives au travail temporaire sont passibles d’une peine allant d’une amende de 447 500 francs CFP (ou 895 000 francs CFP en cas de récidive) à six mois d’emprisonnement (article Lp. 128-2 CTNC). La commission prend bonne note de ces informations. Elle considère néanmoins que, compte tenu de la position de vulnérabilité des travailleurs concernés, le faible nombre de cas contentieux parvenant aux organes de l’inspection du travail ou devant les tribunaux n’est pas nécessairement une mesure de l’absence de difficultés dans l’application de la législation nationale. Dans ces conditions, la réalisation d’une étude de terrain cherchant à identifier les difficultés potentielles et les défis concernant l’application de la législation à cette catégorie de travailleurs pourrait être bienvenue. La commission saurait gré au gouvernement de la tenir informée de toute mesure prise ou envisagée dans le futur à cet égard.
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