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Demande directe (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Burkina Faso (Ratification: 1962)

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Législation. La commission note qu’un avant-projet de loi portant sur le nouveau Code du travail a été adopté en conseil des ministres le 7 septembre 2022 et qu’il devait être présenté au parlement pour adoption. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’adoption du nouveau Code du travail et de fournir une copie (électronique ou physique) s’il a été adopté.
Article 1 de la convention. Protection contre la discrimination des travailleurs exclus du champ d’application du Code du travail. La commission rappelle que l’article 4 du Code du travail de 2008, actuellement en vigueur, interdit toute discrimination en matière d’emploi et de profession et contient une définition de la discrimination directe et de la discrimination indirecte fondées, notamment, sur les sept critères énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Pour les agents de la fonction publique, qui sont exclus du champ d’application du Code du travail (article 3), les dispositions relatives à la protection contre la discrimination, auxquelles le gouvernement s’est référé dans ses précédents rapports, concernent seulement l’accès à l’emploi (le recrutement) des agents de la fonction publique d’État, de la fonction publique territoriale, des établissements publics et de la fonction publique parlementaire. En outre, ces textes ne mentionnent expressément aucun des motifs de discrimination énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur: i) les mesures prises ou envisagées afin d’étendre la protection contre la discrimination consacrée par la convention aux catégories de travailleurs exclues du champ d’application du Code du travail, notamment les agents de la fonction publique (à cet effet, elle suggère que soient adoptées des dispositions définissant et interdisant expressément toute discrimination directe et indirecte, à tous les stades de l’emploi, et couvrant, au minimum, l’ensemble des sept motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention, à savoir la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale et l’origine sociale); ii) la protection contre la discrimination dont bénéficient en pratique les catégories de travailleurs exclues du champ d’application du Code du travail en indiquant la procédure leur permettant de faire valoir leurs droits lorsqu’ils s’estiment victimes de discrimination; et iii) les mesures prises ou envisagées pour s’assurer que les travailleurs de l’économie informelle bénéficient également de la protection de la convention.
Harcèlement sexuel. Dans son commentaire adopté en 2012, la commission avait noté l’engagement du gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que le harcèlement sexuel dû à un environnement de travail hostile soit couvert par la législation du travail lors de la prochaine révision du Code du travail. L’étude sur la mise en conformité du Code du travail avec les conventions fondamentales et de gouvernance, réalisée avec l’appui du Bureau en 2014, soulignait également la nécessité de réviser l’article 37 du Code du travail pour prendre en compte les commentaires de la commission, à savoir que le harcèlement sexuel dû à un environnement de travail hostile soit couvert par la législation du travail, et pas uniquement le harcèlement qui s’apparente à un chantage sexuel (quid pro quo). Cette demande a été réitérée dans les «commentaires techniques sur le projet de loi portant Code du travail» fourni en 2017 à la demande du gouvernement dans lesquels le Bureau rappelait que la définition du harcèlement sexuel à l’article 41, alinéa 3, du projet de loi (ancien article 37, alinéa 3)) ne couvrait toujours pas les conduites de nature sexuelle qui ont pour effet de créer un environnement de travail intimidant, hostile ou humiliant pour une personne, que ce soit ou non aux fins d’obtenir une faveur sexuelle; et que cette disposition portant sur le harcèlement sexuel n’avait donc pas une couverture suffisamment large. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées afin que la législation du travail couvre non seulement le harcèlement qui s’apparente à un chantage sexuel (quid pro quo) mais également le harcèlement sexuel dû à un environnement de travail hostile.
Article 2. Égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission note l’affirmation du gouvernement selon laquelle les diverses réalisations en matière de formation professionnelle ont permis l’accroissement des effectifs (passant de 30 030 en 2015/2016 à 32 475 en 2018/2019) mais relève que cela traduit en revanche une diminution en proportion du nombre de filles (de 43,2 à 37,5 pour cent pendant la même période). Elle note également que, dans le cadre du «Plan Action Stabilisation Développement» (PA-SD) de janvier 2023, et plus particulièrement du «Pilier 3: Refonder L’État et améliorer la gouvernance», une des actions prévues sous l’objectif stratégique 3.4 «Promouvoir l’emploi décent et la protection sociale pour tous, particulièrement pour les jeunes et les femmes» est le «renforcement du cadre juridique du marché du travail» qui vise à atteindre la cible 8.8 des objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies, c’est-à-dire, notamment, la défense des droits des travailleurs et la protection de tous les travailleurs, y compris les migrants, en particulier les femmes et ceux qui ont un emploi précaire. De même, l’objectif stratégique 3.5 du PA-SD intitulé «Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles» vise les cibles 5.1 et 5.5 des ODD (respectivement «Mettre fin, partout dans le monde, à toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles» et «Veiller à ce que les femmes participent pleinement et effectivement aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique, et y accèdent sur un pied d’égalité»). La commission relève également que, au travers du Programme Pays de Promotion du Travail Décent (PPTD) 2020-2022, signé entre l’OIT et ses mandants tripartites Burkinabè, ceux-ci se sont engagés à renforcer l’employabilité des jeunes, des femmes et des personnes vivant avec un handicap à l’horizon 2022 (résultat 2 du PPTD). Le gouvernement cite également dans son rapport, parmi les mesures prises au niveau national pour la mise en œuvre de la convention, une «Stratégie nationale genre (SNG) 2020-2024», accompagnée d’un plan d’action opérationnel (2020-2022), ainsi qu’une «Stratégie nationale de promotion de l’entrepreneuriat féminin 2016-2025». Cette dernière relève que les femmes occupent plus de 60 pour cent des activités de production dans le secteur informel mais rencontrent des difficultés d’accès, d’utilisation et de contrôle des ressources et des bénéfices de leurs activités socioéconomiques. Elle ajoute qu’en dépit des efforts consentis par le gouvernement, l’autonomisation économique des femmes demeure l’un des grands défis à relever. Quant à la SNG 2020-2024 – dont un des cinq axes stratégiques concerne également «l’autonomisation économique des femmes et des filles» - elle tire un bilan mitigé de la Politique nationale de promotion de la femme (PNPF 2004-2010) en ce que: 1) la justice est restée pour une grande part inaccessible aux femmes; 2) les inégalités liées au genre et les disparités dans la division sexuée du travail ont persistées (on constate que les stéréotypes de genre jouent encore un rôle significatif dans le choix des domaines d’études, avec une tendance à reproduire la division traditionnelle du travail selon le genre, y compris dans l’accès à l’enseignement et à la formation technique et professionnelle); 3) les «pratiques traditionnelles néfastes à la femme» n’ont pas été éradiquées; 4) les femmes et les filles ont continué d’être victimes de violences sexuelles; et 5) malgré les acquis observés dans le domaine de l’éducation, les inégalités d’accès aux facteurs de production et aux ressources économiques demeurent. Il est indiqué dans cette stratégie qu’il existe «plusieurs discriminations sociales au détriment des femmes et des filles et des pratiques traditionnelles néfastes qui hypothèquent la jouissance de leurs droits humains fondamentaux» et que l’«amélioration significative de la situation de la femme burkinabè et l’instauration de l’égalité de droit entre les hommes et les femmes restent encore des objectifs à atteindre.» La SNG 2020-2024 note encore qu’entre 2010 et 2019, la proportion des femmes dans le secteur public est passée de 25 à 33,5 pour cent, ce qui reste peu. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour: i) lutter de manière effective contre les stéréotypes et préjugés relatifs aux rôles des hommes et des femmes dans la société; et ii) améliorer l’accès des femmes à des postes à responsabilité dans les secteurs privé et public. Prière de fournir des informations détaillées, y compris des données statistiques, sur l’impact des mesures prises pour promouvoir l’égalité d’accès à l’emploi entre les hommes et les femmes sans discrimination fondée sur le sexe, y compris dans le cadredu Programme Pays de Promotion du Travail Décent, de laStratégie nationale genre 2020-2024 et de la Stratégie nationale de promotion de l’entrepreneuriat féminin (2016-2025).
Politique nationale d’égalité sans distinction de race, de couleur, de religion, d’opinion politique, d’ascendance nationale ou d’origine sociale. La commission note avec regret la déclaration du gouvernement, dans son rapport, selon laquelle «il n’existe pas de politique nationale spécifique visant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession, afin d’éliminer toute discrimination». La commission se voit donc dans l’obligation de rappeler, une fois encore, l’obligation primordiale incombant aux États qui ont ratifié la convention, découlant de son article 2 et consistant à formuler et appliquer une politique nationale sur l’égalité visant à éliminer toute discrimination en matière d’emploi et de profession basée au minimum sur les sept critères formellement prohibés par la convention. Celle-ci suppose la mise en œuvre de programmes volontaristes, l’abrogation ou la modification de toutes les lois et pratiques administratives discriminatoires, l’élimination des comportements stéréotypés et des préjugés, la promotion d’un climat de tolérance et la mise en place d’un système de suivi (voir Étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 844). La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur les mesures spécifiques adoptées pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession pour tous, quelles que soient la race, la couleur, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, en précisant notamment si des mécanismes de contrôle ou des organismes spécialisés en la matière ont été mis en place.
Article 5. Mesures spéciales de protection. La commission note l’information du gouvernement selon laquelle les décrets no 2009-530/PRES/PM/MTSS/MASSN/MS du 17 juillet 2009 et no 2012-829/PRES/PM/MASSN/MEF/MJFPE/MTPEN du 22 octobre 2012 prévoient que les entreprises d’au moins 50 salariés d’une part, et la fonction publique (y compris les établissements publics de l’État) d’autre part, sont tenues de réserver, respectivement, au moins 5 et 10 pour cent des postes à pourvoir aux personnes en situation de handicap. Par ailleurs, la commission rappelle que, dans son commentaire précédent, elle avait demandé au gouvernement de veiller à ce que, dans le cadre de la réforme du Code du travail en cours, toute restriction concernant les travaux pouvant être accomplis par des femmes soit strictement limitée à la protection de la maternité (article 142 du Code du travail avant sa révision et décret no 2010-356/PRES/PM/MTSS du 25 juin 2010 portant détermination de la nature des travaux dangereux interdits aux femmes et aux femmes enceintes, que le gouvernement cite de nouveau dans son rapport). Espérant que cette demande aura été prise en compte, la commission prie le gouvernement de fournir toute information pertinente au sujet desrestrictions concernant les travaux pouvant être accomplis par des femmes. Prière de fournir également des données, y compris statistiques, sur l’application en pratique des décrets des 17 juillet 2009 et 22 octobre 2012 et le taux d’emplois occupés par des personnes en situation de handicap dans les secteurs publics et privés.
Contrôle de l’application. Inspection du travail et tribunaux. La commission relève que les décisions administratives ou judiciaires concernant la discrimination dans l’emploi et la profession citées par le gouvernement dans son rapport datent d’il y a plus de 10 voire 20 ans. Elle se voit donc dans l’obligation de rappeler qu’aucune société n’est exempte de discrimination et que l’absence de cas de discrimination ou de plaintes recensés peut être due, entre autres, à un cadre juridique inapproprié, à une méconnaissance des travailleurs de leurs droits en la matière, à un manque de confiance dans les voies de recours offertes ou à la difficulté d’y accéder dans la pratique ou la crainte de représailles (voir Étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 731 et 870). Elle note à cet égard que la SNG 2020-2024 cite, parmi les faiblesses de mise en œuvre de la politique nationale de genre qui l’avait précédée: la non-application systématique et suffisante des textes et lois favorables; l’insuffisance des ressources financières pour faire fonctionner les organes et mettre en œuvre les plans d’action annuels; et l’insuffisance de données désagrégées pour documenter et suivre l’évolution des inégalités, rendant difficile le suivi et l’évaluation des programmes et projets. La commission invite donc le gouvernement à fournir des informations sur toutes mesures prises pour améliorer la capacité des autorités compétentes, notamment des magistrats et autres fonctionnaires publics, à identifier et traiter les cas de discrimination, à faciliter l’accès aux voies de recours, ainsi qu’à recueillir des données désagrégées par catégorie. Prière également de fournir des informations sur les activités de sensibilisation organisées par les inspecteurs du travail en ce qui concerne l’égalité et la lutte contre la discrimination, ainsi que sur toute plainte examinée à cet égard.
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