ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Gambie (Ratification: 2001)

Autre commentaire sur C182

Observation
  1. 2023
  2. 2019

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

Articles 3 et 7, paragraphe 1, de la convention. Pires formes de travail des enfants et sanctions. Alinéa a). Vente et traite d’enfants et tourisme sexuel impliquant des enfants. La commission avait noté précédemment que l’article 39 de la loi de 2005 sur l’enfance interdit la traite des enfants et que cette infraction est passible d’une peine d’emprisonnement à perpétuité. La commission note aussi que la loi de 2007 sur la traite des personnes interdit toutes les formes de traite et prévoit des peines d’emprisonnement allant de quinze ans à la perpétuité.
La commission prend note du rapport, en date du 22 janvier 2021, de la Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants, y compris la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et autres contenus montrant des violences sexuelles sur enfant (A/HRC/46/31/Add.1), qui indique que la Gambie reste un pays d’origine et de destination des enfants soumis à la traite à des fins d’exploitation sexuelle. La rapporteuse spéciale a eu connaissance d’allégations de traite d’enfants, en particulier d’enfants sénégalais vers la Gambie et d’enfants gambiens en provenance de la Gambie, à des fins d’exploitation au travail, à l’échelle internationale et nationale, dans le cadre de diverses activités (servitude domestique, prostitution, apprentissage et secteur de la pêche); d’autres enfants mendient ou sont cireurs de chaussures. La rapporteuse spéciale a également été informée du cas de filles gambiennes victimes de traite vers le Moyen-Orient à des fins d’exploitation au travail et de servitude domestique (paragr. 9-10).
La rapporteuse spéciale expose également en détail les informations qu’elle a reçues au sujet de l’exploitation sexuelle d’enfants à des fins commerciales dans le contexte de voyages et du tourisme (paragr. 15-18). Elle indique que la Gambie est répertoriée comme étant une destination majeure pour les auteurs, hommes et femmes, de délits sexuels sur des enfants. Il est fait état de cas d’exploitation sexuelle d’enfants à des fins commerciales dans les zones de développement touristique (alentours de grands hôtels, plages, restaurants, boîtes de nuit), où des enfants issues de communautés pauvres y sont conduits pour rencontrer des touristes. Des auteurs de ces faits entrent en contact avec des enfants et tissent des liens avec eux par l’intermédiaire d’organisations enregistrées en tant qu’organisations philanthropiques ou caritatives; d’autres approchent des enfants sous le prétexte de les aider à poursuivre leurs études, ou par le biais d’intermédiaires connus sous le nom de «bumsters», qui peuvent être des guides touristiques, des chauffeurs de taxi ou des employés d’hôtel. Il y aurait aussi des réseaux organisés de traite à des fins d’exploitation sexuelle, qui seraient gérés par des agences de voyage étrangères ou gambiennes, lesquelles font la promotion de la Gambie en tant que destination pour le tourisme sexuel impliquant des enfants.
La commission note que, selon la rapporteuse spéciale, les auteurs de traite d’enfants, en particulier d’exploitation sexuelle à des fins commerciales, sont rarement traduits en justice et punis. Plusieurs facteurs entravent l’application de la loi, notamment la méconnaissance des lois et des sanctions applicables, l’insuffisance des moyens humains, techniques, financiers et administratifs pour contrôler les cas signalés et réagir rapidement, et des carences importantes dans les capacités et l’expertise qui sont nécessaires pour fournir aux enfants victimes des services et une assistance adaptés, y compris dès les premiers contacts avec ces enfants (paragr. 33). De plus, la rapporteuse spéciale a entendu dire que, souvent, les informations faisant état d’abus sexuels ne sont pas prises en compte par les autorités en vue d’une action ultérieure. Dans les rares cas où des plaintes sont déposées auprès de la police, elles ne sont pas dûment suivies, la collecte de preuves probantes est retardée, et les enquêtes et les poursuites bloquées, de sorte que les victimes ou les témoins retirent leur plainte. Des cas auraient été classés au motif que les déclarations des enfants victimes étaient inconsistantes. Parfois, la police, voire la justice, encouragent les parties à régler le cas au sein de leur communauté dans le souci de préserver l’honneur de la famille, cela au détriment de l’enfant. Au moment de la visite de la rapporteuse spéciale en 2019, le gouvernement a signalé quinze nouvelles enquêtes, dont six portaient sur des allégations de cas de traite sexuelle, et neuf de travail forcé, dans le cadre du travail domestique au Moyen-Orient. Trois procédures sont toujours en cours. Aucune condamnation pour traite de personnes n’a été obtenue (paragr. 59-60).
La commission note avec préoccupation que, selon la rapporteuse spéciale (paragr. 9) et le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, dans ses observations finales du 1er novembre 2022 (CEDAW/C/GMB/CO/6, paragr. 23 (b)), la traite des enfants est très peu signalée, notamment en raison du manque de confiance dans l’administration de la justice, de la longueur des enquêtes et des procédures judiciaires, et de l’absence de poursuites et de condamnations. Rappelant que les sanctions prévues ne sont efficaces que si elles sont effectivement appliquées, la commission prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour que des enquêtes approfondies soient menées et des poursuites engagées contre les personnes qui violent les dispositions relatives à la vente et à la traite d’enfants, et pour que des sanctions efficaces et dissuasives leur soient imposées en application de la loi de 2005 sur l’enfance et de la loi de 2007 sur la traite des personnes. À cet égard, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour renforcer les capacités des organes chargés de faire appliquer la loi pour mieux combattre la vente et la traite des enfants de moins de 18 ans, notamment au moyen de formations et de ressources adéquates. La commission prie le gouvernement de communiquer des statistiques sur le nombre de condamnations prononcées et de sanctions pénales imposées.
Article 6. Programmes d’action. Traite des enfants et exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. La commission note, d’après le rapport de la rapporteuse spéciale, que le gouvernement a pris des mesures pour prévenir la vente et la traite des enfants, ainsi que leur exploitation sexuelle à des fins commerciales, par exemple la création de tribunaux pour enfants et l’élaboration d’un manuel de formation aux fins de l’éradication du travail des enfants et de l’exploitation sexuelle dans l’industrie du tourisme, ainsi que d’un code de bonne conduite, en ce qui concerne le tourisme, dans les hôtels, les motels et les restaurants (paragr. 18 et 32). Toutefois, la commission prend note de l’observation de la rapporteuse spéciale selon laquelle les mesures du gouvernement ont eu un effet limité sur la prévention de la vente et de l’exploitation sexuelle des enfants et sur la protection des enfants victimes, notamment faute d’une stratégie globale pour lutter efficacement contre la vente et l’exploitation sexuelle des enfants, y compris contre leurs causes profondes (paragr. 34). Pour n’en citer que quelques-unes, ces causes sont les suivantes: pauvreté endémique; accès limité des filles dans les zones rurales à l’éducation et aux possibilités économiques; méconnaissance des lois applicables; barrières sociétales; stigmatisation et honte liées à l’exploitation et aux abus sexuels; culture du silence profondément ancrée et aggravée par la faible application de la loi et mesures inadéquates de protection de l’enfance; et, selon certaines informations, le fait que beaucoup d’enfants ne sont pas immédiatement déclarés à leur naissance, en particulier en zone rurale (paragr. 21 à 23). La commission prie le gouvernement de prendre des mesures pour élaborer et adopter un plan d’action global visant à combattre et à éliminer la traite des enfants à des fins d’exploitation au travail et d’exploitation sexuelle, qui prenne en considération et adresse les causes profondes et les facteurs qui amènent des enfants à devenir victimes de la traite. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés à cet égard dans son prochain rapport.
Article 7, paragraphe 2 b). Prévoir l’aide directe nécessaire et appropriée pour soustraire les enfants des pires formes de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Enfants victimes de traite et d’exploitation sexuelle à des fins commerciales. La commission prend note de l’indication du gouvernement, en réponse à ses commentaires précédents, selon laquelle la Direction pour l’enfance du ministère du Genre, de l’Enfance et de la Protection sociale participe à tout le soutien possible qui est apporté aux enfants victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales. De plus, l’Agence nationale de lutte contre la traite des personnes a institué un mécanisme national d’orientation pour les victimes de la traite des êtres humains, et l’Autorité gambienne du tourisme pour la protection de l’enfance a formé le personnel d’hôtels à la question de l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Est également en place un système de gestion des cas destiné à faciliter l’identification, l’orientation et la prise en charge des enfants victimes de tous ces abus.
La commission note toutefois que, dans ses observations finales du 1er novembre 2022, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes s’est dit préoccupé par l’inexistence d’un mécanisme national d’orientation efficace des victimes de la traite à des fins de travail forcé et d’exploitation sexuelle, y compris le tourisme sexuel, vers les services d’aide appropriés (CEDAW/C/GMB/CO/6, paragr. 23 (b)). La rapporteuse spéciale a également souligné la nécessité d’un système d’orientation fonctionnel et d’une gestion effective des cas pour assurer une prestation efficace des services et mettre les victimes en contact avec les services d’aide, ainsi que le besoin urgent d’ouvrir pour les enfants victimes d’exploitation sexuelle des centres d’accueil supplémentaires, suffisamment financés et dotés d’un personnel bien formé pour assurer des services intégrés psychologiques, juridiques, médicaux et autres (paragr. 66). La commission prie donc à nouveau instamment le gouvernement de redoubler d’efforts pour faire en sorte que les enfants victimes de la traite à des fins d’exploitation au travail ou d’exploitation sexuelle, et les enfants victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales, soient soustraits à ces pires formes de travail des enfants, et bénéficient de mesures de réadaptation et d’intégration sociale, notamment en ouvrant des centres d’accueil supplémentaires pour les enfants victimes. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur le nombre d’enfants soustraits à ces pires formes de travail des enfants qui ont reçu un soutien.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer