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Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Bangladesh (Ratification: 1972)

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La commission prend note des observations de la Commission syndicale des normes internationales du travail (Commission TU-ILS) du Bangladesh, reçues le 1er septembre 2022.
Article 1 de la convention. Protection contre la discrimination. Définition et interdiction de la discrimination dans l’emploi et la profession. Législation. Tout en prenant note de la situation humanitaire que connaît actuellement le pays, la commission se doit de constater que, depuis un certain nombre d’années, elle attire l’attention du gouvernement sur l’absence de dispositions législatives assurant une protection contre la discrimination fondée sur tous les motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention, en ce qui concerne tous les aspects de l’emploi et de la profession tels que définis à l’article 1, paragraphe 3, de la convention et couvrant tous les travailleurs. La commission prend note de l’affirmation de la Commission TUILS selon laquelle la discrimination dans l’emploi existe tant dans le secteur privé que dans le secteur public. Tout en prenant note de l’affirmation répétée du gouvernement selon laquelle la Constitution assure une protection contre la discrimination en matière d’emploi et de profession, la commission rappelle que la principale disposition de la Constitution en matière de non-discrimination (article 28) prévoit la non-discrimination par l’État, mais ne traite pas de la situation du secteur privé et n’interdit pas tous les motifs de discrimination énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a). La commission a attiré à plusieurs reprises l’attention du gouvernement sur le fait: 1) que les dispositions constitutionnelles prévoyant l’égalité de chances et de traitement, bien qu’importantes, se révèlent généralement insuffisantes pour traiter certains cas de discrimination dans l’emploi et la profession; et 2) qu’il est nécessaire de mettre en place un cadre juridique plus détaillé traitant spécifiquement de la discrimination dans l’emploi et la profession. Ce cadre juridique pourrait comprendre les éléments suivants: la couverture de tous les travailleurs; une définition claire de la discrimination directe et indirecte et du harcèlement sexuel; l’interdiction de la discrimination à tous les stades de l’emploi; l’attribution explicite des responsabilités de contrôle aux autorités nationales compétentes; la mise en place de procédures accessibles de règlement des différends; l’établissement de sanctions dissuasives et de réparations appropriées; le transfert ou le renversement de la charge de la preuve; la mise en place d’une protection contre les représailles; des mesures d’action positive; et des dispositions pour l’adoption et la mise en œuvre de politiques ou de plans d’égalité sur le lieu de travail, ainsi que la collecte de données pertinentes à différents niveaux (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 850 à 855). À cet égard, la commission note qu’un projet de loi contre la discrimination a été soumis au Parlement en avril 2022. Compte tenu de la situation difficile que connaît le pays et rappelant que l’absence d’un cadre législatif clair et complet peut empêcher les travailleurs de faire valoir leurs droits à l’égalité de chances et de traitement et à la non-discrimination, la commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour que, dans le cadre de la réforme actuelle de la législation du travail, la loi de 2006 sur le travail soit modifiée ou que le projet de loi de 2022 contre la discrimination soit adopté en vue: i) d’interdire la discrimination directe et indirecte fondée au minimum sur tous les motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention, à tous les stades de l’emploi et de la profession, y compris le recrutement; et ii) de protéger toutes les catégories de travailleurs, dans l’économie tant formelle qu’informelle, y compris les travailleuses et travailleurs domestiques. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard, ainsi qu’une copie de tout nouveau texte législatif, notamment le texte de l’amendement de 2022 apporté au règlement de 2015 sur le travail. Elle prie en outre le gouvernement d’assurer la protection des travailleurs, hommes et femmes, contre la discrimination dans l’emploi et la profession dans la pratique et, en particulier, des catégories de travailleurs exclues du champ d’application de la loi sur le travail.
Article 1, paragraphe 1 a). Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle l’article 332 de la loi sur le travail interdit toute conduite à l’égard des travailleuses qui serait «indécente» ou «porterait atteinte à leur pudeur ou à leur honneur», quel que soit son rang ou son statut. La commission note, d’après le Rapport national d’évaluation pour Beijing+25 (2019), qu’avec la participation accrue des femmes aux activités économiques, il est devenu évident qu’il existe du harcèlement sexuel sur le lieu de travail dans de nombreux endroits, d’où la nécessité de prendre d’urgence des mesures de prévention. À cet égard, elle note avec intérêt que le Plan d’action national pour la prévention de la violence à l’égard des femmes et des enfants (20182025) donne une définition large du harcèlement sexuel qui inclut à la fois le harcèlement qui s’apparente à un chantage sexuel (quid pro quo) et le harcèlement résultant d’un environnement de travail hostile. La commission note toutefois que l’article 332 de la loi sur le travail et la Politique de protection et de bien-être des travailleurs domestiques (2015) ne contiennent pas une définition aussi complète de toutes les formes de harcèlement sexuel. La commission considère qu’en l’absence d’une définition et d’une interdiction claires du harcèlement qui s’apparente à un chantage sexuel (quid pro quo) et du harcèlement résultant d’un environnement de travail hostile, on peut douter que la législation s’attaque effectivement à toutes les formes de harcèlement sexuel et que le champ d’application de la protection contre le harcèlement sexuel couvre tous les travailleurs, hommes et femmes, en ce qui concerne non seulement l’emploi et la profession, mais aussi la formation professionnelle, l’accès à l’emploi et les conditions d’emploi (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 789, 791 et 793). La commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour faire en sorte: i) qu’une définition complète et une interdiction claire de toutes les formes de harcèlement sexuel, y compris le harcèlement s’apparentant à un chantage sexuel (quid pro quo) et le harcèlement résultant d’un environnement de travail hostile, dans l’emploi et la profession, soient incluses dans la loi sur le travail et/ou le projet de loi contre la discrimination, et couvrent tous les travailleurs, hommes et femmes; ii) que des mesures de prévention soient prises, notamment des initiatives de sensibilisation à la stigmatisation sociale associée au harcèlement sexuel, en collaboration avec les organisations de travailleurs et d’employeurs; et iii) que des procédures de recours et de réparation soient établies. La commission demande également au gouvernement de fournir des informations sur le nombre, la nature et l’issue des plaintes ou des cas de harcèlement sexuel dans l’éducation, la formation, l’emploi et la profession traités par les inspecteurs du travail, les tribunaux ou toute autre autorité compétente.
Articles 2 et 3. Égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. En ce qui concerne la promotion de domaines d’études et de professions non traditionnels pour les femmes et les filles et la réduction du nombre de filles qui abandonnent l’école prématurément, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle: 1) l’enseignement primaire et secondaire est gratuit pour les filles et elles bénéficient d’une bourse pour les études supérieures; 2) dans l’enseignement technique et professionnel, des instituts ont été créés exclusivement à l’intention des femmes; 3) le pourcentage de places réservées aux femmes dans les instituts techniques et professionnels est passé de 10 à 20 pour cent au cours de la période de rapport; et 4) des services élargis en vue la formation, de la création d’emplois, de la promotion de la participation au marché de l’emploi et du soutien aux petites et moyennes entreprises ont été mis en place en faveur des femmes. La commission note également que le Département de l’inspection des usines et établissements (DIFE) a lancé le Projet sur l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes sur le lieu de travail, qui comprend des formations, des programmes de sensibilisation et une politique à mettre en œuvre. Le gouvernement indique également qu’il maintient des quotas dans les emplois du secteur public, mais la commission note qu’il n’a pas fait rapport sur les résultats obtenus ni sur la manière dont ces quotas sont appliqués. La commission note que la Commission UT-ILS a indiqué que les femmes sont victimes de discrimination et a communiqué des exemples d’offres d’emploi discriminatoires n’autorisant que les candidats masculins. Elle note en outre que la Commission UT-ILS indique: 1) que la société est patriarcale par nature et les femmes ne se sentent pas suffisamment en sécurité pour exercer certains emplois à l’extérieur; 2) qu’il existe un problème d’égalité en matière d’emploi des femmes et des obstacles subsistent lorsqu’il s’agit pour une femme d’obtenir un emploi dans certains secteurs et à certains niveaux (notamment les postes de direction et de cadre moyen). La Commission UT-ILS ajoute que, bien que les activités du gouvernement visant à promouvoir l’emploi des femmes soient appréciables: 1) le domaine et la portée de cette promotion devraient être élargis; 2) les quotas dans le secteur public sont appliqués et ont des effets sociaux positifs; et 3) le gouvernement doit s’assurer que la politique d’action positive qu’il a élaborée est également applicable au secteur privé. La commission demande au gouvernement de redoubler d’efforts pour: i) s’attaquer aux obstacles juridiques et pratiques à l’emploi des femmes, notamment les attitudes patriarcales et les stéréotypes de genre en ce qui concerne leurs aspirations et leurs capacités, ainsi qu’à leur manque d’accès aux ressources productives; ii) accroître l’autonomisation économique des femmes et promouvoir leur accès à l’égalité des chances dans l’emploi formel et aux postes de décision; iii) et encourager les filles et les femmes à choisir des domaines d’études et des professions non traditionnels, tout en réduisant le nombre de filles qui abandonnent l’école prématurément. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur: i) la teneur et la mise en œuvre du Projet du DIFE sur l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes sur le lieu de travail, et son impact sur l’emploi des femmes; ii) la mise en œuvre et les résultats de l’application des quotas dans l’emploi public (15 pour cent) et l’enseignement en primaire (60 pour cent); et iii) la participation des hommes et des femmes à l’éducation, à la formation, à l’emploi et aux différentes professions, ventilée si possible par catégorie professionnelle, dans les secteurs public et privé, ainsi que dans l’économie informelle.
Travailleurs domestiques. La commission rappelle que la loi de 2006 sur le travail exclut les travailleurs domestiques de son champ d’application. Elle prend note des indications de la Commission TU-ILS selon lesquelles: 1) la question de l’inclusion des travailleurs domestiques dans le champ d’application de la loi est actuellement en cours d’examen; 2) le gouvernement a mis en place un comité appelé «Cellule de surveillance centrale de la politique de protection et de bien-être des travailleurs domestiques» qui se compose de représentants du ministère du Travail, des organisations de travailleurs et d’employeurs et de la société civile; et 3) les formations destinées aux travailleurs domestiques sont limitées dans le pays et il existe trop peu d’organisations et de possibilités de développement des qualifications des travailleurs domestiques. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la Politique de protection et de bien-être des travailleurs domestiques (2015) met en œuvre le principe de l’égalité des droits et des droits fondamentaux de tous les citoyens, tel qu’il est inscrit dans la Constitution. Elle note toutefois que les dispositions de cette politique n’offrent pas aux travailleurs domestiques les mêmes protections que celles prévues par la loi de 2006 sur le travail, et que la Haute Cour, dans un jugement rendu en août 2022, a estimé que cette politique n’avait pas réussi jusqu’à présent à mettre en place des «directives appropriées et complètes» aptes à protéger les travailleurs domestiques. La commission note en outre que la politique n’interdit pas la discrimination directe et indirecte fondée, au minimum, sur tous les motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention et qu’elle ne couvre pas l’économie formelle et informelle. La commission rappelle une nouvelle fois que toutes les catégories de travailleurs, y compris les travailleurs domestiques, devraient bénéficier de l’égalité de chances et de traitement sans distinction de race, de couleur, de sexe, de religion, d’opinion politique, d’ascendance nationale ou d’origine sociale, dans tous les aspects de l’emploi (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 778). En outre, la commission relève que, d’après le rapport soumis au titre de l’examen de Beijing+25, environ 90 pour cent des travailleurs domestiques sont des femmes et que les travailleurs domestiques sont une catégorie de travailleurs exposés à la violence fondée sur le genre. La commission rappelle les observations finales de 2016 du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), dans lesquelles il soulignait la situation difficile des travailleuses domestiques dans le pays et s’inquiétait du fait que ces dernières sont victimes de violence, de mauvais traitements, de privation de nourriture et de meurtre, que ces crimes ne sont pas signalés et que les victimes ont un accès limité à la justice et à la réparation (CEDAW/C/BGD/CO/8, 25 novembre 2016, paragr. 32). La commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour transposer dans la loi la Politique de protection et de bien-être des travailleurs domestiques (2015), et d’y inclure des dispositions définissant et interdisant la discrimination directe et indirecte fondée, au minimum, sur tous les motifs énumérés dans la convention dans tous les aspects de l’emploi et de la profession. En attendant, elle demande au gouvernement de faire en sorte: i) que la politique susvisée soit effectivement mise en œuvre; ii) que les travailleurs domestiques soient protégés, dans la pratique, contre toute forme de discrimination dans l’emploi et la profession, y compris toute forme de harcèlement sexuel; iii) qu’ils bénéficient d’une égalité totale de chances et de traitement avec les autres catégories de travailleurs couvertes par la loi sur le travail; et iv) qu’ils aient effectivement accès aux procédures de recours et de réparation. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur: i) les activités de la «Cellule de surveillance centrale de la politique de protection et de bien-être des travailleurs domestiques» en ce qui concerne la nondiscrimination et l’égalité, y compris les stéréotypes et les préjugés; et ii) le nombre, la nature et l’issue des plaintes pour discrimination déposées par les travailleurs domestiques, ventilés par sexe, race, ascendance nationale et origine sociale.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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