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Demande directe (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Congo (Ratification: 1999)

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La commission note avec une profonde préoccupationque le rapport du gouvernement, attendu depuis 2018, n’a pas été reçu. Compte tenu de l’appel urgent qu’elle a lancé au gouvernement en 2021, la commission procède à l’examen de l’application de la convention sur la base des informations à sa disposition.
Article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Peuples autochtones. Dans ses précédents commentaires, la commission avait souligné que, dans son rapport de 2011, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones indiquait que la vulnérabilité de ces peuples était «inextricablement liée à des formes de discrimination historiques qui perdurent» et que «cette discrimination a été renforcée par des stéréotypes […] qui ont solidement établi des attitudes discriminatoires et conduit à des rapports sociaux qui perpétuent l’exclusion et la marginalisation flagrante de ces populations». Elle avait également demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises en application de la loi no 5-2011 du 25 février 2011 portant promotion et protection des droits des populations autochtones, qui interdit, sous peine de sanctions pénales, toute forme de discrimination à l’égard des populations autochtones dans l’accès à l’emploi, les conditions de travail, la formation professionnelle, la rémunération et la sécurité sociale. La commission accueille favorablement l’inclusion de dispositions dans la Constitution de 2015 qui prévoient expressément que «la loi garantit et assure la promotion et la protection des droits des peuples autochtones» (art. 16). Elle note également que le gouvernement indique, dans son rapport national au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies dans le cadre de l’Examen périodique universel, qu’une direction générale de la promotion des peuples autochtones a été créée en 2017 au sein du ministère de la justice, des droits humains et de la promotion des peuples autochtones et que deux plans d’action nationaux sur l’amélioration de la qualité de vie des populations autochtones (PAN/AQVPA) pour la période 2009-2013, puis 2014-2017 ont été formulés (A/HRC/WG.6/31/COG/1, 14 septembre 2018, paragr. 24 et 102). La commission note qu’un nouveau Plan d’action pour l’amélioration de la qualité de vie des populations autochtones, comprenant notamment les droits à l’éducation et les droits économiques et sociaux comme domaines de priorité, a été adopté pour la période 2018-2022 et qu’il reconnaît que «les peuples autochtones souffrent de discriminations séculaires, d’exploitation économique, d’extrême pauvreté et d’un accès difficile aux services sociaux de base, à la terre et aux ressources». Ce plan a entre autres pour objectif de «veiller à ce que les membres des populations autochtones soient libres, égaux en dignité, en droit et ne fassent l’objet d’une quelconque discrimination fondée sur l’origine ou l’identité autochtones». Il prévoit aussi un appui aux initiatives de formation professionnelle et de promotion de l’emploi et du recrutement des populations autochtones dans les sociétés ou les activités génératrices de revenus. La commission prend également note du rapport de 2020 de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones qui constate, entre autres, que: 1) les peuples autochtones, «qu’ils vivent dans un cadre plus urbain ou en marge de la forêt, continuent de subir des niveaux élevés de discrimination » et « ne sont pas systématiquement consultés pour obtenir leur consentement dans les décisions qui les concernent» et; 2) ils «restent prisonniers d’une situation de marginalisation et d’exclusion qui ne peut être inversée que par des engagements financiers et politiques visant à mettre pleinement en œuvre la loi no 5-2011 et ses décrets d’application». Dans son rapport, la Rapporteuse spéciale reprend les recommandations formulées par son prédécesseur en 2010, notamment «l’élaboration d’une campagne nationale contre la discrimination, le développement économique dans le respect de la culture et de l’identité, les droits sur les terres et les ressources, le renforcement de la participation à la prise de décisions […]». Elle recommande aussi que: 1) l’accès des femmes autochtones à un salaire et à des conditions de travail décents fasse l’objet d’une attention particulière dans les projets d’activités génératrices de revenus afin de favoriser leur autonomisation sociale et économique; 2) les populations autochtones soient «associées à l’élaboration de programmes particuliers de formation et d’éducation professionnelles pour améliorer leur accès à l’emploi dans les secteurs privé et public»; et 3) «les employeurs [soient], en consultation avec les communautés et avec le soutien des pouvoirs publics, encouragés à adapter l’environnement et les conditions de travail aux particularités sociales, culturelles et économiques des populations autochtones locales» (A/HRC/45/34/Add.1, 10 juillet 2020, paragr. 59, 62, 105 et 106). À la lumière de ce qui précède, et compte tenu de l’absence d’évolution de la situation socio-économique des peuples autochtones, la commission demande au gouvernement de prendre des mesures efficaces pour: i) mettre en œuvre effectivement la loi no 5-2011 et le Plan d’action pour l’amélioration de la qualité de vie des populations autochtones; ii) faire connaître leurs droits en vertu de la loi no 5-2011, y compris en matière d’accès à la justice, aux communautés concernées et aux instances et/ou personnes chargées de l’application de la loi; et iii) lutter contre la discrimination, les stéréotypes et les préjugés dont ils sont victimes et promouvoir un climat de respect et de tolérance entre toutes les composantes de la population.
Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise en ce sens et sur les suites données aux recommandations de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies dans son rapport de 2020, notamment la réalisation d’une campagne nationale contre la discrimination.
Article 2. Égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission rappelle que, dans ses précédents commentaires, elle avait souligné les difficultés d’accès des filles et des femmes à l’éducation dans les zones rurales, les taux élevés d’abandon scolaire des filles à tous les niveaux de l’enseignement, les taux d’alphabétisation des femmes inférieurs à ceux des hommes, la ségrégation professionnelle subie par les femmes et leur surreprésentation dans l’économie informelle (sans sécurité sociale ni autres avantages) ainsi que leurs difficultés en matière d’accès au crédit. Elle avait également demandé au gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre de la Politique sur le genre de 2017. La commission prend note des observations finales du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), dans lesquelles il a souligné les initiatives prises par le gouvernement pour former les mères adolescentes à l’exercice d’une activité indépendante et pour veiller à ce que les femmes qui travaillent dans le secteur non structuré aient accès à la Caisse nationale de sécurité sociale. Elle observe aussi que le CEDAW s’est déclaré préoccupé par le faible taux d’emploi des femmes, dont 70 pour cent travaillent dans le secteur non structuré (CEDAW/C/COG/CO/7, 14 novembre 2018, paragr. 42). La commission prend également note des informations détaillées contenues dans le rapport national de mai 2019 relatif à la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, 1995 (Rapport national Beijing+25) concernant les réalisations (essentiellement au niveau institutionnel et en matière foncière), les priorités (activités génératrices de revenus, entreprenariat, enseignement technique, etc.) ainsi que les difficultés et les échecs (persistance de l’analphabétisme des femmes et des filles et des discriminations et violences à leur encontre, absence de protection sociale et de données fiables, etc.) en matière d’égalité des genres. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes mesures prises afin de: i) diversifier l’offre de formation professionnelle faite aux femmes afin de leur permettre d’accéder à des emplois mieux rémunérés et ayant des perspectives de carrière dans des secteurs traditionnellement masculins; ii) lutter activement contre la ségrégation professionnelle verticale et horizontale entre hommes et femmes; iii) améliorer l’accès des femmes aux emplois formels et aux ressources productives telles que le crédit et la terre, notamment dans le cadre de la mise en œuvre de la loi no 21-2018 du 13 juin 2018 fixant les règles d’occupation et d’acquisition des terres et des terrains; iv) faire connaître aux femmes et aux filles leurs droits, notamment lorsque de nouvelles lois sont adoptées, et les possibilités offertes par les programmes de développement et autres; et v) sensibiliser les employeurs, les travailleurs ainsi que leurs organisations au principe de l’égalité entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession.
La commission prie également d’indiquer si les résultats de la Politique nationale de genre (2017-2021) concernant la formation et l’emploi des femmes ont été évalués et de fournir des informations sur les résultats obtenus le cas échéant ainsi que sur l’adoption éventuelle d’une nouvelle politique de genre et son contenu en matière de promotion de l’égalité des genres dans l’emploi et la profession.
Article 5. Mesures spéciales de protection. Restrictions à l’emploi des femmes. La commission rappelle que, selon l’article 112 du Code du travail, le gouvernement est habilité à interdire par voie de décret l’accès des femmes à certains emplois, sur avis de la Commission consultative nationale de l’emploi, et qu’elle avait demandé au gouvernement d’indiquer comment cette question était traitée dans le cadre de la révision du Code du travail. Elle note que l’avant-projet de Code du travail transmit au BIT en février 2022 contient des dispositions identiques. La commission rappelle que l’on est passé progressivement d’une approche purement protectrice en matière d’emploi des femmes à une stratégie qui tend à assurer une réelle égalité entre hommes et femmes et à éliminer toutes les lois et les pratiques discriminatoires. Les mesures de protection adoptées en faveur des femmes peuvent être globalement classées en deux catégories: d’une part, celles qui visent à protéger la maternité au sens strict et qui relèvent à ce titre de l’article 5 et, d’autre part, celles qui ont pour finalité d’assurer de manière générale la protection des femmes en tant que telles et reposent quant à elles sur des représentations stéréotypées de leurs capacités et de leur rôle social. Ce type de mesures est contraire à la convention et constitue autant d’obstacles au recrutement et à l’emploi des femmes (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 839). La commission rappelle en outre qu’elle considère que les dispositions relatives à la protection des personnes travaillant dans des conditions dangereuses ou difficiles doivent viser à protéger la santé et la sécurité des hommes comme des femmes tout en tenant compte des différences qui font que chacun d’eux est exposé, en matière de santé, à des risques spécifiques. Les restrictions à l’emploi des femmes (qui ne sont pas enceintes et qui n’allaitent pas) sont contraires au principe de l’égalité de chances et de traitement entre les hommes et les femmes, sauf s’il s’agit de véritables mesures de protection mises en place pour protéger leur santé. Cette protection doit être déterminée sur la base des résultats d’une évaluation des risques montrant qu’il existe des risques spécifiques pour la santé et/ou la sécurité des femmes. Par conséquent, ces restrictions, le cas échéant, doivent être justifiées et fondées sur des preuves scientifiques et, lorsqu’elles existent, doivent être réexaminées périodiquement à la lumière de l’évolution technologique et du progrès scientifique, afin de déterminer si elles sont toujours nécessaires. La commission rappelle en outre qu’il y aurait sans doute lieu d’examiner quelles autres mesures – meilleure protection de la santé des hommes et des femmes, sécurité et transports adéquats, ou services sociaux – seraient nécessaires pour permettre aux femmes d’avoir les mêmes chances que les hommes d’accéder à ce type d’emplois (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 840). La commission souligne également la nécessité d’adopter des mesures et de mettre en place des services permettant aux travailleurs ayant des responsabilités familiales, en particulier les femmes car ce sont elles qui continuent à supporter de façon inéquitable la charge de ces responsabilités, de concilier vie professionnelle et familiale. La commission demande par conséquent au gouvernement de faire en sorte que toutes les dispositions de l’avant-projet de Code du travail qui prévoiraient des restrictions ou des limitations à l’emploi des femmes (en général) tiennent compte des éléments qui précèdent, en particulier de s’assurer que toute éventuelle restriction concernant l’accès des femmes à certains emplois sera strictement limitée à la protection de la maternité et/ou basée sur les résultats d’une évaluation des risques démontrant qu’il existe des risques spécifiques pour la santé et/ou la sécurité des femmes. Elle demande une nouvelle fois au gouvernement d’indiquer les types de travaux interdits aux femmes, en vertu de l’article 112 du Code du travail actuellement en vigueur, et, le cas échéant, de fournir copie des textes réglementaires applicables.
Statistiques. La commission note que, parmi les difficultés soulignées par le gouvernement dans son rapport national Beijing+25, figurent l’absence de données fiables ventilées par sexe et d’informations fiables sur les disparités de genre et l’insuffisance de données actualisées sur l’économie informelle – dans laquelle travaillent de nombreuses femmes. La commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour collecter et compiler les données relatives à l’emploi des hommes et des femmes, si possible selon les secteurs de l’économie, y compris le secteur public, et de communiquer ces données. La commission rappelle que le gouvernement peut se prévaloir, s’il le souhaite, de l’assistance technique du BIT à cet égard.
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