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Observation (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

Convention (n° 97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949 - Tadjikistan (Ratification: 2007)

Autre commentaire sur C097

Observation
  1. 2021

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La commission note avec une profonde préoccupation que le rapport du gouvernement, attendu depuis 2018, n’a pas été reçu. Compte tenu de l’appel d’urgent qu’elle a lancé au gouvernement en 2020, la commission procède à l’examen de l’application de la convention sur la base des informations à sa disposition.
Articles 2, 4 et 7. Services appropriés et gratuits pour aider les migrants à trouver un emploi. Mesures visant à faciliter le départ, le voyage et l’arrivée des travailleurs migrants. Service public de l’emploi. La commission a précédemment prié le gouvernement: 1) de fournir des informations sur les activités spécifiques de l’Agence pour l’emploi à l’étranger (créée en 2014) pour fournir des services et une assistance aux travailleurs tadjiks qui vont à l’étranger et aux travailleurs étrangers employés au Tadjikistan; 2) d’indiquer si ces services sont gratuits; et 3) de fournir des informations détaillées sur les mesures et les dispositions prises pour faciliter le départ, l’arrivée et la réinsertion des travailleurs migrants. Selon le site web de l’Agence pour l’emploi à l’étranger, celle-ci fournit des services qualifiés de conseil et de médiation pour l’emploi aux citoyens tadjiks qui ont trouvé un emploi à l’étranger. Cette agence s’occupe également du recrutement organisé de citoyens tadjiks qui iront travailler en Fédération de Russie et dans d’autres pays; des centres de recrutement existent dans quatre villes (Douchanbe, Khujan, Khorog et Bokhtar). La commission note que ce site web fournit de nombreuses informations aux candidats à l’immigration, en anglais, en tadjik et en russe. Selon ce site, l’Agence travaille en étroite collaboration avec toutes les agences gouvernementales et non gouvernementales (Service des migrations du ministère du Travail, des Migrations et de l’Emploi de la Population, ministère de l’Éducation et des Sciences; ministère de la Santé et de la Protection sociale, ambassade du Tadjikistan en Fédération de Russie, etc.) qui fournissent des informations aux citoyens tadjiks qui souhaitent partir à l’étranger, qui rencontrent des difficultés dans un autre pays ou qui veulent rentrer chez eux. Le site web oriente les migrants vers l’agence gouvernementale ou non gouvernementale appropriée qui peut les aider avant, pendant et après leur voyage vers un autre pays. L’Agence organise des ateliers présentant les informations nécessaires pour préparer le départ, en partenariat avec le Centre de préparation au départ du service des migrations ou le Centre de ressources pour les migrants de Douchanbé. La commission observe que le gouvernement a mis au point une application mobile pour faciliter l’accès des migrants aux services et informations disponibles, et qu’il a publié un manuel sur la migration de main-d’œuvre dans des conditions sûres en Fédération de Russie. Elle note en outre que le site web indique clairement que toutes les informations et les services fournis par l’Agence sont entièrement gratuits. La commission note que, dans ses observations finales, le Comité des Nations Unies pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (CMW) a fait part de sa préoccupation concernant: 1) le manque de coordination, exacerbé par le manque de clarté et le chevauchement des mandats des différentes agences du ministère, telles que le Service national des migrations, les centres de préparation au départ, l’Agence pour l’emploi à l’étranger, la représentation du ministère en Fédération de Russie et l’Office du marché du travail et de l’emploi; 2) l’insuffisance des ressources humaines, techniques et financières dont dispose le ministère pour s’acquitter efficacement de sa mission, notamment l’absence de personnel compétent sur les questions touchant aux migrations; et 3) l’absence de mécanismes de suivi et d’évaluation suffisants pour mesurer les effets des politiques et programmes migratoires sur les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille (CMW/C/TJK/CO/2, 9 mai 2019, paragr. 16). En outre, la commission observe que, selon l’étude de 2020 de la Banque asiatique de développement (BAD) intitulée Strengthening support for labour migration in Tajikistan – Assessment and recommendations, dans la pratique, la plupart des migrants partent sans avoir d’information précise sur le pays de leur destination et se fient presque entièrement à des informations provenant de sources informelles. L’étude de la BAD ajoute que le personnel des services des migrations du Tadjikistan consacre l’essentiel de ses efforts à l’interdiction de réadmission en Fédération de Russie imposée aux ressortissants tadjiks en cas de violation de la législation russe. L’étude indique aussi que, selon la législation russe, l’interdiction de réadmission peut être imposée à un citoyen étranger pour deux raisons: lorsqu’un ressortissant étranger enfreint les règlements administratifs sur le territoire de la Fédération de Russie deux fois ou plus au cours d’une période de trois ans (par exemple, pour défaut d’enregistrement), et lorsqu’un migrant n’a pas quitté le pays dans les trente jours suivant l’expiration de son droit de séjour sur le territoire russe. Sans le savoir, les migrants peuvent se voir imposer une interdiction de réadmission pour une période de trois à cinq ans en raison de l’absence de documents ou du non-paiement du stationnement. Par conséquent, étant donné qu’il n’y a pas de système permettant de les avertir d’une interdiction de réadmission, les migrants quittent la Fédération de Russie pour retourner dans leur pays d’origine et rendre visite à leurs proches, sans savoir qu’ils ne seront pas autorisés à y entrer de nouveau. Ce n’est que lorsqu’ils veulent retourner en Fédération de Russie que le système électronique à la frontière leur interdit d’entrer sur le territoire, et ils sont alors refoulés. À cet égard, la commission relève que l’étude indique qu’en 2019, environ 240 000 migrants d’origine tadjike ont été enregistrés sur la liste de la Fédération de Russie interdisant la réadmission sur le territoire. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie instamment le gouvernement de:
  • i) fournir sans délai des informations précises et gratuites aux travailleurs migrants, afin de faciliter leur départ, leur voyage et leur accueil dans les pays de destination, en particulier en Fédération de Russie;
  • ii) fournir des informations sur les mesures spécifiques prises ou envisagées pour s’assurer que les citoyens tadjiks se rendant à l’étranger connaissent la politique de restriction concernant la réadmission en Fédération de Russie, ainsi que des informations sur toute négociation menée sur cette question avec la Fédération de Russie (par exemple pour faire retirer leur nom de la liste d’interdiction de réadmission);
  • iii) renforcer la coordination sur les questions relatives aux migrations et à l’emploi entre les différentes agences rattachées au ministère du Travail, des Migrations et de l’Emploi de la Population afin de veiller à ce que leurs activités ne se chevauchent pas; et
  • iv) veiller à ce que le ministère et ses agences disposent des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à leur bon fonctionnement.
La commission prie aussi le gouvernement de fournir des informations sur tout service d’assistance et d’information destiné spécifiquement aux travailleuses migrantes tadjiks qui vont travailler à l’étranger.
Assistance aux travailleurs migrants souhaitant retourner au pays. Dans ses observations finales, le CMW a pris note de l’adoption du Programme national pour l’emploi pour la période 2018-2019, qui a permis à 222 personnes de trouver un emploi permanent. Il a aussi noté que la Stratégie nationale de développement pour la période 2016-2030 comporte des mesures en faveur de la réinsertion des migrants qui reviennent au pays, mais que l’appui accordé à ces personnes est insuffisant, s’agissant en particulier de possibilités d’éducation et de formation de qualité en vue d’une évolution professionnelle, ainsi que de l’aide à l’exercice d’une activité indépendante ou à la création d’entreprise (CMW/C/TJK/CO/2, paragr. 50). À cet égard, l’étude de la BAD indique aussi que: 1) le manque de données fiables sur les migrants de retour au pays pose des difficultés majeures pour l’efficacité des services des migrations, et il y a peu de données statistiques sur les migrants de retour au pays puisque les centres de services des migrations n’ont pas de système d’enregistrement des «clients» dont ils s’occupent; et 2) les défis auxquels sont exposés les migrants de retour pays sont, entre autres, les difficultés de réinsertion économique, sociale et psychologique. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’impact de ses programmes d’assistance aux travailleurs migrants de retour au pays et sur les mesures prises ou envisagées pour élargir sa politique de retour de manière à répondre efficacement à tous les besoins des travailleurs migrants de retour au pays, en vue de leur réinsertion appropriée dans leur pays d’origine. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations statistiques ventilées par sexe sur les travailleurs migrants de retour au pays.
Article 3. Propagande trompeuse. La commission tient à souligner que l’existence de services officiels d’information ne suffit pas à garantir que les travailleurs migrants sont efficacement et objectivement informés, ni à les protéger contre les manœuvres de certains intermédiaires qui ont intérêt à encourager la migration par tous les moyens, y compris en diffusant de fausses informations sur les possibilités et les conditions d’émigration. La convention ne définit pas les mesures que les gouvernements devraient prendre pour lutter contre la propagande trompeuse, il leur appartient donc de décider de la nature de ces mesures. La commission note que, dans la pratique, les mesures prises par les gouvernements pour lutter contre la propagande trompeuse sont préventives ou bien répressives. En l’absence d’informations récentes sur les mesures prises pour lutter efficacement contre la propagande trompeuse, la commission prie à nouveau le gouvernement: i) de fournir des informations sur les activités spécifiques de l’Office des migrations et de l’Agence pour l’emploi à l’étranger à cet égard; et plus généralement ii) d’indiquer si le cadre juridique réglemente et prévoit un contrôle et des sanctions en cas de diffusion d’informations trompeuses visant à encourager l’émigration ou l’immigration.
Article 9. Transfert de fonds. La commission note, selon l’étude de la BAD et les observations finales du CMW, que la migration à des fins d’emploi est une possibilité importante pour de nombreux ménages au Tadjikistan d’assurer leurs moyens de subsistance (un tiers du produit intérieur brut du pays), étant donné le peu de possibilités d’emploi dans le pays, que la crise économique et la fermeture des pays du monde entier en raison de la pandémie de COVID-19 ont fait baisser les flux migratoires internationaux, et que les transferts de fonds devraient baisser de manière significative (environ de 7 pour cent). La commission note que le gouvernement a indiqué dans son rapport au CMW que: 1) des modifications ont été apportées en mars 2018 à l’instruction no 204 relative aux procédures de transferts de fonds en vue de faciliter la réception de fonds envoyés par des particuliers sans avoir besoin d’un compte bancaire; et 2) la Banque nationale du Tadjikistan a recommandé aux organismes de crédit d’ouvrir des succursales dans les régions montagneuses reculées, afin de faciliter l’accès aux fonds envoyés depuis l’étranger. La commission note toutefois que le CMW s’est dit préoccupé par le fait qu’en février 2016, la Banque nationale du Tadjikistan a ordonné que tous les transferts d’argent en roubles russes faits par des personnes ne disposant pas compte bancaire soient effectués uniquement dans la monnaie nationale de l’État partie, et qu’en raison du taux de change officiel défavorable, les bénéficiaires de l’envoi de fonds depuis la Fédération de Russie continuent de perdre de l’argent (CMW/C/TJK/CO/2, paragr. 42). La commission prie le gouvernement d’indiquer: i) de quelle manière les modifications apportées en 2018 à l’instruction no 204 ont facilité concrètement la réception des fonds envoyés par les travailleurs migrants ne disposant pas de compte bancaire officiel; et ii) si l’ordonnance de 2016 publiée par la Banque nationale du Tadjikistan est toujours en vigueur ou a également été modifiée pour faciliter le transfert des gains et des économies des travailleurs migrants en Fédération de Russie à un taux préférentiel.
Contrôle de l’application. Pour pouvoir procéder à une analyse approfondie de la manière dont la convention est appliquée dans la pratique, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de communiquer des informations aussi complètes que possible, conformément aux Points III à V du formulaire de rapport approuvé par le Conseil d’administration. Ces informations devraient notamment: i) indiquer quelles sont les autorités compétentes pour l’application des lois, politiques, règlements et décisions administratives, en précisant l’organisation et le rôle de l’inspection du travail; ii) présenter un résumé de toute décision de justice traitant des questions de principe relatives à l’application de la convention; et iii) indiquer toute difficulté pratique rencontrée dans l’application de la convention.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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