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Demande directe (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Burkina Faso (Ratification: 1997)

Autre commentaire sur C105

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Article 1 a) de la convention. Imposition de peines de prison impliquant un travail obligatoire en tant que punition pour avoir exprimé des opinions politiques ou manifesté une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Depuis plusieurs années, la commission attire l’attention du gouvernement sur certaines dispositions aux termes desquelles des sanctions pénales comportant un travail pénitentiaire obligatoire (en vertu de l’article 181 de l’arrêté n° 10-2017/AN du 10 avril 2017, sur le système pénitentiaire, et de l’article 86 de l’arrêté N° 641 APAS du 4 décembre 1950 portant règlement pénitentiaire) peuvent être prononcées dans les situations couvertes par l’article 1 a) de la convention. La commission s’est référé et en particulier aux dispositions suivantes:
  • – atteinte à l’honneur ou à la sensibilité de certaines personnes exerçant l’autorité publique (articles 178 et 180 du Code pénal), ou à l’autorité de la justice ou à son indépendance (article 179 du Code pénal), qui constitue une insulte;
  • – répression des atteintes à l’honneur et à la dignité des personnes, des injures, des calomnies et de la diffamation (articles 361–364 du Code pénal);
  • – dispositions similaires contenues aux articles 114 à 123 de la loi N° 56/93/ADP du 30 décembre 1993 portant Code de l’information.
Dans son rapport, le gouvernement indique que les personnes qui expriment des opinions politiques ou s’opposent pacifiquement au système politique, social ou économique établi, en vertu de la législation nationale en vigueur, ne commettent pas d’infraction et ne peuvent faire l’objet de sanctions pénales. À cet égard, la commission note avec intérêt que la loi n° 057-2015/CNT, du 4 septembre 2015, portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso, qui abroge le Code de l’information, a supprimé les peines d’emprisonnement pour les infractions relatives à l’atteinte à l’honneur, aux injures et aux diffamations (articles 114 et suivants).
La commission prend également note de l’adoption d’un nouveau Code pénal (loi n° 025-2018/AN du 31 mai 2018). Elle observe que les dispositions du Code pénal auxquelles elle se référait précédemment (relatives aux atteintes à l’honneur, aux injures, aux calomnies et aux diffamations) ont été intégralement reproduites dans les articles 352-1 à 352-4 et 524-1 à 524-4 du nouveau Code pénal. la commission note toutefois que l’article 524-13 du Code pénal prévoit que les articles 524 et suivants ne s’appliquent pas aux personnes physiques ou morales relevant du régime juridique régissant la presse écrite, la presse en ligne et les médias audiovisuels.
La commission salue les progrès accomplis dans la révision de la législation. Elle regrette toutefois que le gouvernement n’ait pas saisi l’occasion de la révision du Code pénal pour traiter les questions qu’elle soulève depuis longtemps au sujet des dispositions prévoyant des peines d’emprisonnement dans les situations couvertes par l’article 1a) de la convention, et qui peuvent toujours s’appliquer aux citoyens non couverts par le régime juridique régissant la presse écrite, la presse en ligne et les médias audiovisuels. La commission note en outre que l’article 354-7 du Code pénal prévoit que les participants ou les organisateurs d’une «manifestation illicite», définie par l’article 354-6 comme une manifestation non déclarée, une manifestation dont la déclaration est incomplète ou inexacte ou une manifestation interdite, sont désormais passibles d’une peine d’emprisonnement comportant un travail pénitentiaire obligatoire.
La commission rappelle que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail obligatoire, y compris le travail pénitentiaire obligatoire, en tant que punition pour avoir tenu ou exprimé des opinions politiques ou des opinions idéologiquement opposées au système politique, social ou économique établi. La commission souligne que l’éventail des activités qui doivent être protégées, en vertu de l’article 1 a) de la convention, des peines impliquant le travail obligatoire, comprend la liberté d’exprimer des opinions politiques ou idéologiques (qui peut être exercée oralement ou par le biais de la presse et d’autres moyens de communication), ainsi que divers autres droits généralement reconnus, tels que le droit d’association et de réunion, par lesquels les citoyens cherchent à assurer la diffusion et l’acceptation de leurs opinions (voir Étude générale de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphe 302). La commission prie donc le gouvernement de poursuivre ses efforts pour réviser les dispositions susmentionnées du Code pénal, afin qu’aucune peine d’emprisonnement entraînant un travail obligatoire ne puisse être imposée aux personnes qui expriment des opinions politiques ou s’opposent pacifiquement au système politique, social ou économique établi. Dans l’attente de cette révision, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application pratique des articles 352-1 à 352-4; 354-7; 524-1 à 524-4 du Code pénal, en particulier sur le nombre de personnes condamnées sur la base de ces dispositions, la nature des accusations portées et les sanctions imposées.
Article 1b). Mobilisation et utilisation de la main-d’œuvre à des fins de développement économique. Service national pour le développement. La commission a précédemment noté que, conformément aux décrets no 98-291/PRES/PM/DEF et no 99-446/PRES/PM portant organisation et fonctionnement du service national pour le développement (SND), tout citoyen burkinabè âgé de 18 à 30 ans peut être appelé à participer au service national pour le développement (SND). Ce service s’accomplit en deux phases: une phase de formation, au cours de laquelle les appelés reçoivent une formation essentiellement civique et patriotique et acquièrent les rudiments d’une formation professionnelle dans les secteurs prioritaires pour le développement; et une phase de production, dans laquelle ils apportent leur contribution au développement socio-économique du pays dans différents secteurs. Le temps passé au service national pour le développement est considéré comme du temps passé au service militaire, libérant ainsi le citoyen de toute autre obligation militaire. La commission a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation établisse explicitement le caractère volontaire de la participation au service national pour le développement.
Le gouvernement rappelle que le service national pour le développement est un service civique découlant de l’article 10 de la Constitution. Il ajoute que les jeunes qui remplissent les conditions d’âge, sont titulaires d’un diplôme d’enseignement général ou technique ainsi que d’un permis de conduire ou qui ont quitté l’école peuvent l’effectuer volontairement. Ils sont alors mis à la disposition des structures administratives ou des centres de formation. La commission prend note de ces informations. Elle souligne toutefois à nouveau que la législation établissant et réglementant le SND ne contient aucune disposition selon laquelle les personnes qui ont été appelées participent sur une base volontaire à ce service. La commission note en outre que, le 29 janvier 2021, le Conseil des ministres a adopté trois nouveaux décrets établissant les statuts et le fonctionnement du SND et que, selon le procès-verbal dudit Conseil, cette nouvelle règlementation fixe une période obligatoire de 90 jours de SND pour tous les citoyens âgés de 18 à 30 ans. La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que la législation établisse explicitement le caractère volontaire de la participation au service national pour le développement et de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard. Elle prie en outre le gouvernement de fournir copie des décrets nos 2021-0196/PRES/PM/MDNAC/MINEFID, 2021-0197/PRES/PM/MINEFID et 2021-0198/PRES/PM/MDNAC/MINEFID portant statut et fonctionnement du service national pour le développement.
Article 1d). Sanctions pénales pour la participation à une grève. Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à l’article 386 du Code du travail selon lequel le droit de grève ne doit en aucun cas entraîner l’occupation des lieux de travail ou de leur voisinage immédiat, faute de quoi les sanctions pénales prévues par la législation en vigueur s’appliqueront. Elle a demandé au gouvernement de modifier le Code du travail de manière à garantir que les personnes qui participent pacifiquement à une grève ne peuvent encourir de sanctions pénales qui entraîneraient un travail pénitentiaire obligatoire.
La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle la révision du Code du travail est toujours en cours et des propositions de reformulation ont été faites afin de tenir compte des recommandations qu’elle a formulées. Le gouvernement indique également que, conformément à l’article 213-4 du Code pénal, les travaux d’intérêt général ne peuvent être imposés aux personnes condamnées sans leur consentement. La commission observe que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur la nature des sanctions pénales qui peuvent être appliquées aux personnes qui font grève, en vertu de l’article 386 du Code du travail, ni sur les dispositions légales pertinentes qui seraient appliquées. Elle note que, selon le libellé de l’article 386 du Code du travail, des peines de prison pourraient être appliquées «à titre de sanctions pénales» et rappelle à cet égard que les peines de prison impliquent une obligation de travailler conformément à l’article 181 de la loi sur le système pénitentiaire. Se référant à son observation de 2019 au titre de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires, dans le cadre du processus de révision du Code du travail pour modifier l’article 386, de manière à assurer que, conformément à l’article 1d) de la convention, les personnes qui participent pacifiquement à une grève ne sont pas passibles de sanctions pénales pouvant entraîner un travail obligatoire. Dans cette attente, la commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur les dispositions légales établissant la nature des sanctions pénales pouvant être appliquées aux personnes qui font grève, en vertu de l’article 386 du Code du travail.
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