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Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Convention (n° 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989 - Guatemala (Ratification: 1996)

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La commission prend note des informations supplémentaires fournies par le gouvernement à la lumière de la décision adoptée par le Conseil d’administration à sa 338e session (juin 2020). La commission a procédé à l’examen de l’application de la convention sur la base des informations supplémentaires reçues du gouvernement cette année, ainsi que sur la base des informations dont elle disposait en 2019.
La commission prend note des observations du Comité de coordination des associations de l’agriculture, du commerce, de l’industrie et de la finance (CACIF) reçues le 30 août 2019, et des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 2 septembre 2019, qui contiennent des commentaires d’ordre général sur l’application de la convention. La commission prend également note des observations conjointes du Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et des Syndicats globaux du Guatemala reçues le 30 septembre 2019, qui ont été élaborées avec la Coordination et la Convergence nationale Maya Waquib’ kej, l’Association des avocats et des notaires mayas du Guatemala (NIM AJPU), l’Association pour la survie culturelle (Cultural Survival), le Comité de l’unité paysanne (CUC), l’Alliance politique du secteur des femmes (APSM), le Collectif écologiste Madre Selva et les autorités ancestrales mayas, garifunas et xincas. La commission prend note des réponses du gouvernement aux observations de l’OIE et du CACIF, ainsi qu’à celles du Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et des Syndicats globaux du Guatemala, reçues le 30 octobre 2019.
La commission prend également note des observations supplémentaires du CACIF et de l’OIE, reçues le 1er octobre 2020. Enfin, la commission prend note des observations du Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et des Syndicats globaux du Guatemala, reçues le 16 octobre 2020. La commission prie le gouvernement de communiquer ses observations à leur égard.
La commission note que certaines informations transmises par le gouvernement ont trait à des mesures prises dans le contexte de la crise sanitaire et économique due à la pandémie de COVID-19 pour conseiller les travailleurs indigènes sur leurs droits au travail et leur fournir un soutien économique. Le gouvernement indique que, ayant été identifiés comme l’un des groupes vulnérables touchés par la situation, les peuples indigènes ont bénéficié d’actions urgentes pour répondre à leurs besoins économiques.
La commission observe que, dans ses observations supplémentaires, le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala allèguent que certaines mesures que les autorités ont adoptées dans le contexte de la pandémie, comme les restrictions de la liberté de mouvement, ont eu des effets disproportionnés sur la situation économique des communautés indigènes paysannes. Les organisations syndicales déclarent également que certaines communautés indigènes n’ont pas bénéficié des protocoles sanitaires pour combattre le COVID-19 ni de mesures éducatives, comme des cours diffusés par la télévision à laquelle elles n’avaient pas accès. La commission veut croire que dans le cadre des mesures que le gouvernement indique prendre, une protection appropriée sera assurée aux peuples indigènes contre la pandémie de COVID-19 et ses répercussions.
Articles 2 et 33 de la convention. Action coordonnée et systématique. Cadre institutionnel et politique nationale sur les peuples indigènes. Dans ses commentaires précédents, la commission a pris note de la création du Cabinet des peuples indigènes et de l’interculturalité, ainsi que de l’action menée en vue de l’élaboration de la Politique sur les peuples indigènes et l’interculturalité. Elle a également pris note des informations faisant état de l’instabilité institutionnelle et de l’absence d’un cadre juridique solide et de ressources budgétaires et humaines pour répondre aux demandes des peuples indigènes. À ce sujet, la commission a prié le gouvernement d’assurer la coordination et la systématisation efficaces des actions menées par les différentes institutions chargées de mettre en œuvre les droits des peuples indigènes prévus dans la convention, en définissant leur cadre juridique et en leur garantissant les ressources nécessaires.
La commission note que le gouvernement fait état dans son rapport de la création, en janvier 2020, du Cabinet chargé spécifiquement du développement social pour remplacer le Cabinet des peuples indigènes et de l’interculturalité. L’une des responsabilités du nouveau cabinet, auquel participe le Vice-président de la République, est de fournir des orientations techniques afin d’élaborer des politiques de développement destinées aux peuples indigènes, de coordonner la conception et la gestion d’un plan d’action pour les peuples indigènes et l’interculturalité, et de soutenir la création d’institutions indigènes. La commission note que le cabinet a créé six tables rondes thématiques relatives aux populations les plus exposées à l’exclusion et à la vulnérabilité, dont la Table ronde thématique sur les peuples indigènes. Les activités de cette dernière visent notamment à améliorer les mécanismes de contrôle des services fournis par les institutions de l’État aux peuples indigènes, et à favoriser des initiatives pour développer des processus de consultation, ainsi qu’un ordre du jour législatif sur les peuples indigènes. La commission note que, dans ses informations supplémentaires transmises en 2020, le gouvernement indique que la direction de la Table ronde thématique sur les peuples indigènes a été transférée au ministère du Travail et de la Sécurité sociale. Elle prend également note des informations relatives aux activités et aux réunions que la table ronde mène pour traiter les questions liées aux droits des peuples indigènes (droits au travail; coordination et formation linguistique du personnel des entités de l’État qui fournissent des services publics aux communautés indigènes; et suivi de la mise en œuvre des décisions de justice). De plus, la commission note également que, conformément à sa mission de coordination et d’articulation interinstitutionnelles, la Table ronde thématique sur les peuples indigènes a mené un exercice d’orientation avec ses membres pour identifier les domaines d’intervention en fonction des priorités nationales et des indicateurs axés sur les peuples indigènes.
La commission note que, dans leurs observations, le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala soulignent qu’il existe un grand nombre d’institutions et de services administratifs pour les peuples indigènes qui sont dispersés, faibles et instables et qui manquent de ressources, ce qui nuit à la mise en place de politiques publiques efficaces en faveur des peuples indigènes. Ces organisations ajoutent qu’aucun mécanisme efficace de participation des peuples indigènes n’a été créé dans aucun des domaines qui les intéressent.
La commission prend note des changements apportés aux institutions chargées de traiter les questions relatives aux peuples visés par la convention et en particulier, la création de la Table ronde thématique sur les peuples indigènes au sein du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. La commission veut croire que la création de la Table ronde thématique sur les peuples indigènes permettra la mise en place d’un cadre institutionnel solide et stable pour les peuples indigènes. À ce sujet, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures que la table ronde a adoptées pour s’assurer que les multiples entités responsables des questions couvertes par la convention développent une action systématique et coordonnée, en coopération avec les peuples indigènes. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations précises sur les moyens et les ressources dont disposent la Table ronde thématique sur les peuples indigènes et les autres institutions responsables des questions indigènes pour mener à bien leur mandat, ainsi que des informations sur les évaluations des résultats obtenus à travers leurs actions.
En ce qui concerne l’élaboration de la politique nationale sur les peuples indigènes, le gouvernement indique que ce processus a été mené par le Cabinet des peuples indigènes et que la Table ronde thématique sur les peuples indigènes est actuellement chargée de le poursuivre. Dans leurs observations, le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala indiquent que ni les peuples indigènes ni les syndicats n’ont été consultés sur la politique qui a été proposée. En réponse à ces observations, le gouvernement indique que les peuples indigènes participent depuis 2014 à la formulation de cette politique, au cours de journées de consultation communautaire dans différents lieux dont l’objectif est de faciliter l’accès et la participation des dirigeants locaux. Il ajoute qu’à cette fin le soutien d’institutions et d’organisations présentes dans les communautés a été recherché, comme par exemple l’Académie des langues mayas du Guatemala (ALMG), le Bureau pour la défense des femmes indigènes, les autorités municipales indigènes et les organisations indigènes locales. Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique que le projet de Politique sur les peuples indigènes et l’interculturalité 2019-2032 reste à l’ordre du jour de la Table ronde thématique sur les peuples indigènes qui a mis en place un comité de suivi interinstitutionnel avec des membres du Secrétariat général de la planification et de la programmation de la présidence (SEGEPLAN). Toutefois, l’arrivée de la pandémie de COVID-19 et la déclaration de l’état d’urgence subséquente ont suspendu toute activité.
La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations actualisées sur l’état d’avancement du processus d’adoption de la politique sur les peuples indigènes et l’interculturalité, en indiquant en particulier comment les peuples indigènes ont participé à l’élaboration de la politique sur l’ensemble du territoire national, quelles ont été leurs contributions au contenu du projet de politique, et quand ce projet devrait être finalisé.
Mise en œuvre des accords de paix. Dans des commentaires précédents, la commission a mentionné un certain nombre d’engagements inscrits dans l’Accord sur l’identité et les droits de l’homme des peuples indigènes, qui fait partie des Accords de paix de 1996, engagements qui n’ont toujours pas été respectés. La commission a prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour les mettre en œuvre. Le gouvernement rappelle que le Secrétariat pour la paix a pour mission de suivre et de coordonner les mesures destinées à faire respecter l’Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes, et que le secrétariat apporte aussi un soutien technique, professionnel et logistique. La commission note que, dans ses observations finales de 2019 concernant le Guatemala, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale des Nations Unies (CERD) a réitéré sa préoccupation face aux progrès limités qui ont été accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord sur l’identité et les droits des peuples autochtones, et face à l’absence de prise en compte des droits de l’homme et des questions de genre dans l’application du Programme national de réparation (document CERD/C/GTM/CO/16-17). Dans ses informations présentées par écrit en 2019 à la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail, le gouvernement a réaffirmé son intérêt pour les engagements de l’accord qui sont en suspens ou partiellement remplis, et a manifesté sa détermination sans réserve à y donner suite. La commission prie le gouvernement de redoubler d’efforts pour mettre en œuvre l’Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes, avec la participation des peuples indigènes, et de fournir des informations sur les progrès réalisés dans ce sens, en soulignant, le cas échéant, les obstacles empêchant sa pleine application. La commission prie également le gouvernement de communiquer des informations sur les activités du Programme national de réparation relatives aux victimes du conflit armé qui appartiennent à des peuples indigènes.
Article 3. Droits de l’homme. Dans des commentaires précédents, la commission a exprimé sa profonde inquiétude face à l’augmentation considérable du nombre d’actes de violence et face à la répression de la protestation sociale des peuples indigènes. La commission a prié instamment le gouvernement de prendre des mesures pour enquêter sur ces actes de violence et pour engager des procédures judiciaires afin d’identifier les coupables et de les sanctionner. La commission prend note des informations du gouvernement sur l’état d’avancement des enquêtes menées par le ministère public et des procédures pénales liées à quatre cas de meurtres et d’atteintes à l’intégrité physique de dirigeants et de défenseurs des peuples indigènes. Elle prend également note des informations du vice-ministre de la Sécurité du ministère de l’Intérieur relatives aux analyses des risques que la Division de la protection des personnes et de la sécurité a menées et aux mesures de sécurité adoptées pour assurer la sécurité des parents et des proches des dirigeants assassinés. Le gouvernement indique que, depuis 2015, il n’y a pas eu d’enquêtes spécifiques sur la répression de la protestation sociale des peuples indigènes. La commission prend également note des informations du ministère public concernant 11 dossiers ouverts qui portent sur des cas d’assassinats et de menaces contre des défenseurs et/ou des dirigeants de peuples indigènes, et qui en sont actuellement au stade de l’enquête. En ce qui concerne les enquêtes sur le décès d’indigènes lors des manifestations sociales ayant eu lieu à Totonicapán en octobre 2012, auxquels la commission s’était référée dans des commentaires précédents, le gouvernement signale que sept personnes accusées de ces crimes bénéficient de mesures de substitution à la détention provisoire qu’a ordonnées le juge pénal de première instance, mesures qui ont fait l’objet d’un recours du ministère public et de l’Association des quarante-huit cantons de Totonicapán.
La commission note que, dans leurs observations, le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala font état de l’assassinat de deux maires élus d’origine maya, ainsi que de la persécution de communicants indigènes. Elle note également que, dans ses observations finales de 2019 concernant le Guatemala, le CERD a indiqué qu’il continue d’être gravement préoccupé par les actes de violence, les menaces et les atteintes à la vie dont sont victimes des responsables et des défenseurs des droits de peuples autochtones et de personnes d’ascendance africaine, et par le fait que la procédure pénale est utilisée indûment pour incriminer ces défenseurs (document CERD/C/GTM/CO/16-17). Par ailleurs, le Comité contre la torture des Nations Unies, dans ses observations finales de 2018 sur le Guatemala, indique que les entreprises de sécurité privée usurpent parfois certaines fonctions de la police nationale civile, ce qui crée un climat d’intimidation au sein des communautés autochtones (document CAT/C/GTM/CO/7). La commission note que, dans ses informations présentées par écrit en 2019 à la Commission de l’application des normes, le gouvernement mentionne l’élaboration d’une politique publique de protection des défenseurs des droits de l’homme au Guatemala, ainsi qu’un processus visant à faire connaître à l’échelle nationale le dispositif de suivi des recommandations formulées pour le Guatemala, dans le cadre des systèmes de protection internationale des droits de l’homme.
La commission prend note de toutes ces informations et réitère sa profonde préoccupation face à la persistance des informations faisant état de meurtres et d’agressions contre les défenseurs des peuples indigènes et des communicants indigènes, et face au manque d’informations sur les décisions judiciaires établissant les responsabilités et sanctionnant les auteurs de ces actes. La commission rappelle que les droits consacrés dans la convention ne peuvent être exercés que dans un environnement où les droits fondamentaux de l’homme, notamment ceux qui concernent la vie et les personnes, sont pleinement respectés et garantis. Par conséquent, la commission prie instamment et fermement une fois de plus le gouvernement à redoubler d’efforts pour faire avancer les enquêtes et les processus visant à identifier et à sanctionner les auteurs matériels et intellectuels des actes de violence et de persécution commis contre les défenseurs des peuples indigènes et des communicants indigènes. La commission prie également le gouvernement d’indiquer les progrès réalisés dans le processus d’adoption de la politique publique de protection des défenseurs des droits de l’homme, et les actions prévues dans le cadre de cette politique pour protéger les droits des peuples indigènes.
Article 6. Consultation. Mécanisme approprié de consultation. La commission rappelle que la question de l’adoption d’un mécanisme approprié de consultation fait l’objet de ses commentaires depuis plusieurs années. Dans sa dernière observation, tout en notant que deux projets de loi sur la consultation des peuples indigènes avaient été soumis au Congrès de la République, la commission a constaté que le gouvernement n’avait pas communiqué d’informations sur la manière dont les peuples indigènes avaient été consultés sur ces projets de loi. Elle a également pris note des arrêts rendus à ce sujet par la Cour constitutionnelle qui a considéré que le Congrès de la République devait adopter une législation pour mettre en œuvre la consultation des peuples indigènes. La commission a aussi noté les préoccupations exprimées par les partenaires sociaux face à l’absence d’un cadre réglementaire de consultation élaboré en concertation avec les peuples indigènes. Le gouvernement indique que, depuis 2007, le Congrès a été saisi de cinq initiatives législatives sur la consultation. La commission note que le gouvernement n’a pas transmis d’informations sur l’état d’avancement de ces initiatives ni sur les processus qui ont été menés pour consulter les peuples indigènes au sujet du contenu de ces initiatives. La commission note que le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala indiquent que les projets de loi sur la consultation présentés ont été rejetés par les organisations indigènes, et soulignent qu’on a voulu considérer que la simple présence des peuples indigènes dans des réunions organisées par le ministère du Travail et de la Protection sociale démontrait que les peuples indigènes appuyaient ces projets de loi. La commission note également que, dans ses observations, le CACIF reconnaît les efforts du pouvoir exécutif pour établir une procédure qui apportera une sécurité juridique au processus de consultation préalable. Néanmoins, le CACIF se dit à nouveau préoccupé par l’absence d’une procédure précise aux fins du droit à la consultation, si bien que des décisions judiciaires contradictoires continuent d’être prises en la matière. En réponse, le gouvernement indique qu’en octobre 2019 la commission de travail du Congrès a convoqué les organisations représentatives des peuples indigènes et les entités intéressées à une audience publique pour faire connaître et discuter le contenu d’une initiative législative sur la consultation. La commission observe, à la lecture de la réponse du gouvernement aux observations des syndicats, que cette convocation portait sur une audience d’une journée, qu’elle était rédigée uniquement en espagnol et qu’elle limitait la participation des peuples indigènes à deux personnes par organisation. Dans ses informations supplémentaires de 2020, le gouvernement fournit une copie de l’initiative législative susmentionnée, présentée à la Commission législative du Congrès le 22 octobre 2019. Pour sa part, dans ses observations de 2020, le CACIF se réfère à l’avis consultatif de la Cour constitutionnelle de juillet 2020 dans lequel la Cour rappelle que le Congrès de la République doit réglementer le processus de consultation par l’intermédiaire d’une disposition légale. Le CACIF insiste sur l’importance d’adopter une loi contenant les normes nécessaires pour doter le pays d’une procédure relative à la consultation.
La commission rappelle qu’il est important que les gouvernements, avec la participation des peuples indigènes et tribaux, établissent, de façon prioritaire, des mécanismes de consultation appropriés avec les institutions représentatives de ces peuples. À cet égard, elle réitère l’importance de consulter préalablement les peuples indigènes avant d’établir des mécanismes de consultation (voir les observations générales de 2010 et de 2018). La commission rappelle également que les consultations doivent être formelles et sans réserve, et viser à instaurer un dialogue authentique entre les gouvernements et les peuples indigènes, ce qui suppose de laisser suffisamment de temps aux peuples indigènes pour qu’ils puissent organiser leurs propres processus internes de prise de décisions et participer efficacement aux décisions adoptées. Sur la base de ces critères et des informations fournies par le gouvernement et les partenaires sociaux, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement d’engager un processus de consultation avec les peuples indigènes en vue de la discussion puis de l’adoption d’un mécanisme approprié de consultation des peuples indigènes, et prie le gouvernement de fournir des informations à ce sujet. La commission encourage l’ensemble des parties concernées à mettre tout en œuvre pour participer de bonne foi au processus susmentionné, afin de mener un dialogue constructif qui permette d’obtenir des résultats positifs. La commission renouvelle sa demande d’informations sur les consultations menées avec les peuples indigènes, leurs modalités, l’entité chargée de ces consultations et le cadre dans lequel elles se déroulent.
Article 14. Terres. Dans ses commentaires précédents, la commission a observé que les informations transmises par le gouvernement sur la mise en œuvre du Programme de régularisation et d’attribution des terres de l’État ne montraient pas de progrès dans l’identification et l’enregistrement de terres communales des peuples visés par la convention. La commission a prié le gouvernement d’adopter sans retard les mesures nécessaires pour protéger les droits à la terre des peuples indigènes, et de fournir des informations sur les zones de terres titularisées, ainsi que sur l’application dans la pratique de la réglementation nationale sur les terres communales. Le gouvernement indique que, dans le cadre du Règlement spécifique de 2009 pour la reconnaissance et la déclaration de terres communales, des fonctionnaires du Registre des informations cadastrales (RIC) se sont rendus dans les communautés pour faire connaître ce règlement et ont élaboré des diagnostics préalables des terres communales. La commission note que ce règlement établit l’obligation de consulter les communautés indigènes avant de procéder au relevé cadastral des terres dont ces communautés sont propriétaires, qu’elles possèdent ou qu’elles détiennent. De 2005 à 2019, le RIC a établi 36 diagnostics dans 36 communautés dont les terres étaient susceptibles d’être déclarées terres communales, et 11 communautés ont obtenu la reconnaissance de leurs terres. Dans ses informations présentées par écrit en 2019 à la Commission de l’application des normes, le gouvernement indique que, étant donné les caractéristiques socioculturelles du pays, le processus de reconnaissance et de déclaration des terres communales est lent. La commission prie instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts et de prendre les mesures nécessaires pour accélérer les processus d’identification, de titularisation et d’enregistrement des terres traditionnellement occupées par les peuples indigènes. À cet égard, la commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les progrès réalisés et les difficultés rencontrées dans ces processus, et sur les modalités de la participation des peuples indigènes à leur mise en œuvre.
Dans ses commentaires précédents, la commission a noté que le Secrétariat de la Présidence aux questions agricoles avait pris des mesures pour faciliter le règlement de conflits agraires et avait prié le gouvernement d’indiquer les conflits résolus et ceux en suspens. À cet égard, le gouvernement indique que, entre 2015 et 2019, le Secrétariat aux questions agricoles a traité en tout 1 484 cas, qui concernaient 2 149 personnes appartenant à différentes communautés ethniques. Il indique également que, dans le cadre de la commission de la Présidence pour le dialogue, où interviennent diverses entités gouvernementales ainsi que des groupes de la société civile, dix cas au total, liés à des conflits concernant des terres et des ressources naturelles, ont été examinés. La commission note que le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala indiquent que le manque de protection de la propriété collective des peuples indigènes persiste. Elle note également que, dans ses observations finales de 2019 concernant le Guatemala, le CERD mentionne des allégations d’expulsions forcées de peuples indigènes de leurs territoires sans protection juridique adéquate et, dans certains cas, au moyen d’un recours excessif à la force (document CERD/C/GTM/CO/16-17). La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour enquêter sur les cas d’expulsion visant des communautés indigènes, et pour s’assurer que ces communautés disposent des moyens adéquats pour défendre leurs droits. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le nombre de conflits fonciers qui ont été traités et résolus grâce à l’intervention du Secrétariat aux questions agricoles et de la commission de la Présidence pour le dialogue, en donnant des exemples d’accords conclus.
Articles 6 et 15. Consultation. Ressources naturelles. Cimenterie à Sacatepéquez. Depuis 2011, la commission prend note des conflits qui ont eu lieu à San Juan Sacatepéquez en raison du projet d’installation d’une cimenterie, et des efforts du gouvernement pour promouvoir le dialogue entre les communautés indigènes et l’entreprise chargée du projet. Dans sa dernière observation, la commission a prié le gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre de l’accord-cadre de paix et de développement conclu par la municipalité de San Juan Sacatepéquez, le gouvernement et 12 communautés indigènes, en vertu duquel il a été convenu de favoriser un climat de confiance, de déjudiciariser des procédures pénales en cours et de porter une attention particulière aux victimes, dans le contexte de la mise en place d’une cimenterie. À ce sujet, le gouvernement indique que, en 2017 et 2018, la commission de la Présidence pour le dialogue a pris contact avec les acteurs désireux de surmonter le conflit, et que des lettres d’entente ont été signées pour réaffirmer la coopération entre les communautés, l’entreprise Cementos Progreso, qui est chargée du projet de cimenterie, et la municipalité de San Juan Sacatepéquez. Le gouvernement indique que l’entreprise, en coordination avec la municipalité, poursuit la mise en œuvre de projets au profit des communautés suivantes: Asunción Chivoc et Cruz Blanca, Las Trojes 1, Santa Fe Ocaña, Pajoques et Pilar 1. La commission note dûment que, selon le gouvernement, le dialogue a été entravé par des manifestations de maires et de dirigeants de communauté qui ont rejeté le projet qu’a l’entreprise de la cimenterie d’ouvrir une route régionale de contournement à San Antonio Las Trojes. Elle note que, dans leurs observations, le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala indiquent que les conflits et la violence persistent entre les partisans des projets menés par l’entreprise Cementos Progreso et les opposants, et que les droits fondamentaux de communautés de San Juan Sacatepéquez, qui se sont déclarées en résistance pacifique, ont été enfreints. Tout en prenant dûment note du fait que le gouvernement réaffirme qu’il est déterminé à mettre en œuvre un plan d’action immédiat pour répondre aux demandes des communautés, dans lequel les communautés et leurs représentants prendront toute leur place en y participant et en s’y engageant, la commission note que les conflits persistent entre des communautés indigènes et les autorités locales au sujet de la mise en œuvre du projet de cimenterie de San Juan Sacatepéquez. À cet égard, la commission encourage le gouvernement à continuer de prendre toutes les mesures nécessaires pour rétablir un climat de confiance et de dialogue entre les autorités locales, l’entreprise et l’ensemble des communautés affectées par le projet. La commission prie le gouvernement de fournir des informations spécifiques sur les progrès réalisés dans le respect de l’accord-cadre pour la paix et le développement, et d’indiquer comment les communautés indigènes concernées ont été associées à sa mise en œuvre. Elle prie également le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises pour enquêter sur les allégations des syndicats concernant les violations des droits des membres des communautés indigènes.
Révision de la législation minière. Dans ses commentaires précédents, la commission a rappelé au gouvernement la nécessité de prendre les mesures nécessaires pour mettre la législation minière en conformité avec les exigences de la convention en matière de consultation et de participation. La commission note que le ministère de l’Énergie et des Mines a institué une commission de révision chargée d’élaborer une proposition de réforme de la loi minière, qui vise à intégrer le contenu des articles 6 et 15 de la convention. Elle note que, à ce jour, six initiatives de réforme de cette loi ont été soumises au Congrès de la République, et que la Cour constitutionnelle a rendu plusieurs arrêts ordonnant la réalisation de consultations avec les communautés affectées par les projets miniers. Dans ses observations, le CACIF souligne les énormes pertes économiques, y compris les pertes d’emplois, qu’a entraînées la suspension de projets miniers, faute d’une procédure claire de consultation. Pour leur part, le Mouvement syndical et populaire autonome du Guatemala et les Syndicats globaux du Guatemala soulignent que le gouvernement n’a pas procédé aux consultations ordonnées par la Cour constitutionnelle au sujet de plusieurs projets miniers, et que les territoires où habitent les peuples indigènes continuent d’être cédés aux fins de projets d’extraction, sans aucune participation des communautés affectées. À cet égard, le gouvernement répond que, en l’absence de législation sur la consultation dans le pays, les orientations de la Cour constitutionnelle ont été suivies. Il ajoute que le ministère de l’Énergie et des Mines a veillé à ce que des espaces d’inclusion et de participation des représentants indigènes soient établis dans les zones d’impact des projets.
La commission note avec préoccupation l’absence persistante d’un mécanisme permettant de réaliser de manière systématique et sûre des processus de consultation des peuples indigènes dans les cas de projets d’extraction de ressources naturelles sur des territoires des peuples indigènes, ce qui a donné lieu à plusieurs décisions judiciaires ayant constaté le non-respect de l’obligation de consultation. À cet égard, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre la législation minière en vigueur en conformité avec les articles 6 et 15 de la convention, et pour que des mécanismes appropriés de consultation des peuples indigènes, élaborés en consultation avec les peuples intéressés, soient mis en œuvre en coordination avec toutes les institutions concernées, dans le but d’instaurer un climat de confiance et assurer la sécurité juridique. La commission souligne que la mise en place de mécanismes de consultation efficaces contribue à prévenir et à résoudre des conflits par le dialogue et à apaiser les tensions sociales.
La commission exprime l’espoir que l’assistance technique que le Bureau a fournie au gouvernement pour l’application de la convention contribuera à résoudre les problèmes soulevés dans ses commentaires, et à promouvoir la pleine application de la convention, en particulier les droits des peuples indigènes qui sont consacrés dans la convention.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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