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Rapport intérimaire - Rapport No. 397, Mars 2022

Cas no 3203 (Bangladesh) - Date de la plainte: 24-AVR. -16 - Actif

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Allégations: L’organisation plaignante dénonce la violation systématique par le gouvernement des droits de liberté syndicale, notamment par de nombreux actes de violence antisyndicale et d’autres formes de représailles, le rejet arbitraire des demandes d’enregistrement des syndicats les plus actifs et indépendants, et des pratiques antisyndicales de la part de la direction des usines. L’organisation plaignante dénonce également des manquements à l’application de la loi et l’hostilité manifestée par le gouvernement vis-à-vis des syndicats

  1. 79. Le comité a examiné le présent cas (présenté en avril 2016) pour la dernière fois à sa réunion d’octobre 2020 et, à cette occasion, il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 392e rapport, paragr. 252-265 approuvé par le Conseil d’administration à sa 340e session.] 
  2. 80. Le gouvernement présente ses observations dans des communications en date des 24 mai et 31 janvier 2022.
  3. 81. Le Bangladesh a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 82. À sa réunion d’octobre 2020, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 392e rapport, paragr. 265]:
    • Le comité s’attend fermement à ce que le cas concernant les allégations de licenciements antisyndicaux dans l’entreprise b) soit réglé sans délai supplémentaire et veut croire que les allégations de violences physiques subies par les travailleurs seront traitées comme il se doit dans le cadre de cette procédure judiciaire. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de la décision qui sera rendue.
    • Le comité prie à nouveau le gouvernement et l’organisation plaignante de fournir des informations détaillées sur tout développement substantiel lié à l’action civile en instance engagée par la direction de l’entreprise h) contre le président et le secrétaire général du syndicat dans l’entreprise et le bureau du codirecteur du travail à Dhaka, afin de permettre au comité de poursuivre l’examen de cet aspect du cas.
    • Le comité prie instamment le gouvernement de fournir des informations sur toutes les mesures prises, en dehors de la procédure pénale à l’encontre de l’accusé, pour enquêter sur les allégations spécifiques et graves d’implication des forces de sécurité dans les mauvais traitements et le meurtre de M. Islam en 2012.
    • Le comité prie le gouvernement d’indiquer si les allégations spécifiques et graves de menaces et de violences contre des dirigeants et membres de syndicats dénoncées dans la plainte, y compris celles qui auraient été perpétrées par la police, ont fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme et, dans l’affirmative, d’en indiquer le résultat. Le comité s’attend fermement à ce que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour que toute allégation future de ce type fasse l’objet d’une enquête rapide par une entité indépendante.
    • Le comité s’attend fermement à ce qu’une décision soit prise sans délai en lien avec la procédure judiciaire d’annulation de l’enregistrement de deux syndicats dans l’entreprise l) et prie le gouvernement de fournir des informations sur l’issue de cette procédure.
    • Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 83. Dans ses communications en date des 24 mai et 31 janvier 2022, le gouvernement indique, en ce qui concerne les allégations de licenciements antisyndicaux dans l’entreprise b)  , que l’action pénale engagée contre la direction de l’entreprise en juin 2014 en est presque à sa phase finale; bien que l’audience prévue le 7 avril 2021 n’ait pas eu lieu en raison de la pandémie de COVID-19, la dernière audience concernant le cas a été fixée au 13 janvier 2022. En ce qui concerne l’entreprise h)  , le gouvernement déclare que l’action civile intentée par la direction de l’entreprise contre le président et le secrétaire général du syndicat dans l’entreprise et le codirecteur du bureau du travail à Dhaka est toujours en instance devant le premier tribunal du travail, une audience étant prévue le 10 février 2022.
  2. 84. Concernant les allégations selon lesquelles des membres des forces de sécurité seraient impliqués dans le meurtre de M. Aminul Islam en 2012, le gouvernement réitère que le processus judiciaire qui a abouti à la condamnation de l’accusé par le tribunal judiciaire spécial en avril 2018 n’a pas permis de prouver l’implication des forces de sécurité dans l’incident. Le gouvernement ajoute que le pouvoir judiciaire du pays est entièrement indépendant et se demande pourquoi le comité continue d’examiner cette allégation.
  3. 85. En ce qui concerne les allégations de menaces et de violences contre des dirigeants et membres de syndicats dans un certain nombre d’entreprises, y compris celles qui auraient été perpétrées par la police, le gouvernement réitère les informations fournies précédemment selon lesquelles les dix cas spécifiques de discrimination antisyndicale ont fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme de la part du Département du travail et que seuls les deux cas susmentionnés concernant les entreprises b) et h) sont encore en instance.
  4. 86. En ce qui concerne la procédure judiciaire d’annulation de l’enregistrement de deux syndicats dans l’entreprise l)  , le gouvernement réitère que la procédure concernant les deux syndicats est en instance devant la division de la Haute Cour: dans un cas, il a été demandé aux parties de maintenir le statu quo jusqu’à ce que l’affaire soit jugée; et, dans l’autre cas, la demande de l’entreprise d’annuler l’enregistrement du syndicat est suspendue par la Haute Cour. Le gouvernement réitère également qu’un nouveau syndicat a été enregistré dans l’entreprise en mars 2019.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 87. Le comité note que le présent cas porte sur des allégations de violation systématique de la liberté syndicale, notamment par des actes de violence, de discrimination antisyndicale et d’autres actes de représailles contre des dirigeants et membres des syndicats dans de nombreuses entreprises, de rejet arbitraire de demandes d’enregistrement de syndicats, de pratiques antisyndicales et de détournement des procédures disponibles pour contester l’enregistrement des syndicats, de manquements à l’application de la loi et d’hostilité manifestée par le gouvernement à l’égard des syndicats.
  2. 88. Le comité rappelle qu’il a examiné ce cas à quatre reprises et regrette de constater que, malgré la gravité des allégations formulées, la dernière réponse du gouvernement se limite à réitérer des informations précédemment soumises et à fournir des mises à jour procédurales mineures, sans apporter de précisions sur un certain nombre de points substantiels sur lesquels le comité a demandé des informations de manière répétée.
  3. 89. En ce qui concerne les allégations de licenciements antisyndicaux dans l’entreprise b) [recommandation a)], le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle bien qu’une audience dans l’action pénale engagée contre la direction de l’entreprise en juin 2014 prévue pour avril 2021 n’ait pas eu lieu en raison de la pandémie de COVID-19, le cas en est presque à sa phase finale, une dernière audience étant prévue le 13 janvier 2022. Tout en reconnaissant les défis importants engendrés par la pandémie, y compris sur le système judiciaire du pays, le comité regrette de constater que, plus de sept ans après que le différend a été porté pour la première fois à l’attention des autorités, le cas est toujours en instance et rappelle une nouvelle fois que les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces et qu’une lenteur excessive dans le traitement de tels cas constitue une violation grave des droits syndicaux des intéressés. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1139.] Le comité s’attend donc fermement à ce que le cas concernant les allégations de licenciements antisyndicaux dans l’entreprise b) soit réglé sans délai supplémentaire et prie le gouvernement de le tenir informé de la décision qui sera rendue.
  4. 90. En ce qui concerne l’action civile intentée par la direction de l’entreprise h) contre le président et le secrétaire général du syndicat dans l’entreprise et le codirecteur du bureau du travail à Dhaka, malgré le règlement à l’amiable conclu au sujet du licenciement de 40 travailleurs [recommandation b)], le comité observe que ni l’organisation plaignante ni le gouvernement ne fournissent d’informations détaillées sur l’évolution de ce cas et que le gouvernement se contente d’indiquer qu’une audience est prévue en février 2022, sans fournir d’autres détails à cet égard. Dans ce contexte et compte tenu du temps écoulé depuis les incidents qui ont donné lieu à l’action civile intentée, le comité veut croire que ce cas sera traité par les autorités judiciaires compétentes sans plus tarder et que cela permettra de résoudre les problèmes qui subsistent entre les parties. En l’absence de développements substantiels signalés par le gouvernement ou l’organisation plaignante, le comité ne poursuivra pas l’examen de cet aspect du cas.
  5. 91. En ce qui concerne l’implication alléguée des forces de sécurité dans les mauvais traitements et le meurtre de M. Aminul Islam en 2012 [recommandation c)], le comité note que le gouvernement réitère les informations fournies précédemment selon lesquelles, à l’issue de la procédure judiciaire qui a abouti à la condamnation de l’accusé, aucune preuve de l’implication des forces de sécurité n’a été trouvée. Le comité note également que le gouvernement souligne l’indépendance du pouvoir judiciaire et s’interroge sur l’importance que le comité continue d’accorder à ces questions. Tout en ayant dûment pris note des informations du gouvernement sur la procédure judiciaire à l’encontre d’un accusé, le comité doit préciser que le cas présent ne remet pas en question l’indépendance du système judiciaire du pays mais attire plutôt l’attention du gouvernement sur l’importance qu’une entité indépendante mène une enquête approfondie sur les allégations concrètes et graves selon lesquelles le corps de M. Islam présentait des signes de torture et des membres des forces de sécurité du gouvernement figuraient parmi les auteurs de ce meurtre [voir 382e rapport, paragr. 157-159], allégations qui, pour des raisons de procédure ou autres, n’ont peut-être pas été entièrement couvertes par la procédure judiciaire à l’encontre de l’accusé (le comité n’a pas reçu le jugement proprement dit auquel le gouvernement fait référence). Le comité rappelle à cet égard que l’instruction ne devrait pas se limiter au seul auteur du crime, mais s’étendre aux instigateurs en vue de faire prévaloir la vraie justice et d’empêcher de manière significative toute violence future à l’égard des syndicalistes. Il est d’une importance cruciale que la responsabilité dans la chaîne de commandement soit également dûment déterminée lorsque les crimes sont commis par des membres de l’armée ou de la police et que les instructions adéquates puissent être données à tous les niveaux, et que ceux qui détiennent le contrôle engagent leur responsabilité afin d’empêcher, de manière effective, que de tels actes se reproduisent. [Voir Compilation, paragr. 99.] Au vu de ce qui précède, le comité prie instamment le gouvernement de fournir copie du jugement mentionné dans lequel il indique qu’aucune preuve d’une faute de la police n’a été trouvée et d’indiquer clairement la manière dont les graves allégations d’implication des forces de sécurité dans les mauvais traitements et le meurtre de M. Aminul Islam ont été pleinement prises en compte et ont fait l’objet d’une enquête dans le cadre de la procédure judiciaire menée. Il s’attend également à ce que le gouvernement veille à ce que toute allégation de ce type fasse rapidement l’objet d’une enquête en bonne et due forme par le biais de mécanismes indépendants et veut croire que des mesures concrètes seront prises pour donner des instructions claires à tous les fonctionnaires de l’État afin de garantir efficacement la prévention de tout acte de ce type.
  6. 92. En ce qui concerne les allégations de nombreux cas d’atteinte à l’intégrité physique et morale des travailleurs dans un certain nombre d’entreprises [recommandation d)], le comité note que le gouvernement réitère les informations communiquées précédemment, selon lesquelles les dix cas spécifiques de discrimination antisyndicale ont fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme du Département du travail et que seuls les deux cas susmentionnés concernant les entreprises b) et h) sont encore en instance. Le comité souhaite préciser à cet égard qu’il avait précédemment pris dûment note des enquêtes signalées sur les allégations de discrimination antisyndicale mais a noté qu’il n’était toujours pas possible de déterminer si les allégations spécifiques de violence antisyndicale, distinctes de la discrimination antisyndicale alléguée, ont fait également l’objet d’une enquête dans ce cadre. Le comité a aussi précédemment regretté que le gouvernement ait semblé avoir failli à sa responsabilité d’enquêter sur les allégations de violence dans les entreprises b) et d) à g)  . Dans ce contexte, le comité tient à souligner que l’exercice des droits syndicaux est incompatible avec tout type de violence ou de menace, et il appartient aux autorités de diligenter une enquête dans les plus brefs délais et, le cas échéant, de sanctionner tout acte de cette nature. Lorsque se sont produites des atteintes à l’intégrité physique ou morale, le comité a considéré qu’une enquête judiciaire indépendante devrait être effectuée sans retard, car cette méthode est particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. [Voir Compilation, paragr. 88 et 105.] Compte tenu de ce qui précède, le comité prie à nouveau instamment le gouvernement d’indiquer clairement si les allégations spécifiques et graves de menaces et de violences contre des dirigeants et membres de syndicats dans un certain nombre d’entreprises dénoncées dans la plainte, y compris celles qui auraient été perpétrées par la police, ont fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme et, dans l’affirmative, d’en indiquer le résultat. Le comité s’attend aussi fermement à ce que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour que toute allégation de ce type fasse l’objet d’une enquête rapide par une entité indépendante.
  7. 93. Enfin, le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la procédure d’annulation de l’enregistrement de deux syndicats dans l’entreprise l) [recommandation e)] est toujours en instance et un nouveau syndicat a été enregistré dans l’entreprise en mars 2019. Le comité regrette le retard persistant dans la finalisation de la procédure judiciaire et rappelle que, lors de son précédent examen du cas, il a fait remarquer avec préoccupation que la lenteur des procédures judiciaires et l’ordonnance persistante de suspension des activités des syndicats dans l’attente de la décision finale ont, dans la pratique, privé les deux syndicats dans l’entreprise l) du droit d’exister et de défendre les intérêts de leurs membres, alors qu’ils ont été légalement enregistrés en 2014. Soulignant à nouveau les graves conséquences de ces longues procédures judiciaires sur le fonctionnement des syndicats, le comité s’attend fermement à ce qu’une décision soit prise sans délai dans ces cas et prie le gouvernement de fournir des informations sur l’issue de la procédure.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 94. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a)Le comité s’attend fermement à ce que le cas concernant les allégations de licenciements antisyndicaux dans l’entreprise b) soit réglé sans délai supplémentaire et prie le gouvernement de le tenir informé de la décision qui sera rendue.
    • b) Le comité prie instamment le gouvernement de fournir copie du jugement dans lequel il indique qu’aucune preuve d’une faute de la police n’a été trouvée en relation avec les mauvais traitements et le meurtre de M. Aminul Islam et d’indiquer clairement la manière dont les graves allégations d’implication des forces de sécurité dans cet incident ont été pleinement prises en compte et ont fait l’objet d’une enquête dans le cadre de la procédure judiciaire menée. Il s’attend également à ce que le gouvernement veille à ce que toute allégation de ce type fasse rapidement l’objet d’une enquête en bonne et due forme par le biais de mécanismes indépendants et veut croire que des mesures concrètes seront prises pour donner des instructions claires à tous les fonctionnaires de l’État afin de garantir efficacement la prévention de tout acte de ce type.
    • c) Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement d’indiquer clairement si les allégations spécifiques et graves de menaces et de violences contre des dirigeants et membres de syndicats dans un certain nombre d’entreprises dénoncées dans la plainte, y compris celles qui auraient été perpétrées par la police, ont fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme et, dans l’affirmative, d’en indiquer le résultat. Le comité s’attend aussi fermement à ce que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour que toute allégation de ce type fasse l’objet d’une enquête rapide par une entité indépendante.
    • d) Soulignant à nouveau les graves conséquences des longues procédures judiciaires sur le fonctionnement des syndicats, le comité s’attend fermement à ce qu’une décision soit prise sans délai en lien avec la procédure judiciaire d’annulation de l’enregistrement de deux syndicats dans l’entreprise l) et prie le gouvernement de fournir des informations sur l’issue de la procédure.
    • e) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.
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