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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 383, Octobre 2017

Cas no 3167 (El Salvador) - Date de la plainte: 03-AOÛT -15 - En suivi

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Allégations: L’organisation plaignante allègue des actes d’intimidation et d’ingérence, la création d’un syndicat parallèle, l’abrogation d’une convention collective dont elle était partie contractante, le refus d’accorder des congés syndicaux et le licenciement d’un syndicaliste

  1. 302. La plainte figure dans une communication du 3 août 2015 envoyée par le Syndicat des travailleuses et travailleurs du secteur électrique (STSEL).
  2. 303. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 1er novembre 2016.
  3. 304. El Salvador a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 305. Dans sa communication du 3 août 2015, l’organisation plaignante allègue qu’elle a fait l’objet d’actes d’ingérence de la part du président de la Commission exécutive hydroélectrique de río Lempa (ci-après «la Commission»), entité publique regroupant plusieurs entreprises du secteur. Elle indique s’être publiquement opposée à la nomination du fonctionnaire en question, dont le mandat a débuté en juin 2013. Elle ajoute que ladite personne avait essayé de se faire élire secrétaire général du STSEL, mais qu’elle n’y était pas parvenue, car elle ne remplissait pas les conditions juridiques requises et occupait des fonctions de représentant de l’employeur et de salarié de confiance (empleado de confianza), en tant que coordonnateur de projets, dans une des entreprises de la Commission (l’entreprise La Geo, ci-après «l’entreprise A»). Selon l’organisation plaignante, après s’être vu refuser l’accès au poste de secrétaire général du syndicat par la majorité des affiliés réunis en assemblée générale, ladite personne a proféré des menaces envers l’organisation syndicale et s’est dite déterminée à tout mettre en œuvre pour que celle-ci cesse d’exister.
  2. 306. L’organisation plaignante allègue que le président de la Commission a patronné un groupe d’affiliés du STSEL et tous les membres d’un comité exécutif de section du STSEL afin qu’ils le rejoignent dans son offensive contre le syndicat. Elle indique avoir réagi à cette agression en expulsant tous les affiliés concernés, lesquels ont alors bénéficié d’un appui supplémentaire du président de la Commission grâce auquel ils ont pu fonder un syndicat parallèle, créé au sein de l’entreprise A et dénommé «Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’industrie électrique d’El Salvador et des activités similaires et connexes (STESEC)». L’organisation plaignante signale que les affiliations au STESEC ont été obtenues au moyen de pressions sur les membres du STSEL, poussés à quitter leur organisation pour rejoindre le nouveau syndicat. Ainsi, en cas d’adhésion au STESEC, des augmentations de salaire étaient proposées aux dirigeants du STSEL, et le reste des membres se voyaient proposer des emplois pour leurs enfants. Selon l’organisation plaignante, le président de la Commission a personnellement encouragé les cadres intermédiaires, les chefs et les dirigeants de l’entreprise A et de la Commission à s’affilier au STESEC, ce que ceux ci ont fait. Evoquant l’affiliation à ce syndicat, le président de la Commission a publiquement indiqué que «ceux qui n’étaient pas avec lui étaient contre lui», suscitant ainsi la crainte des salariés et des chefs, qui ont alors rejoint le syndicat en question. Compte tenu de ce qui précède, l’organisation plaignante indique qu’elle a lancé, le 21 octobre 2014, une action en protection (amparo) auprès de la chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice, mais qu’aucun résultat n’a été obtenu dix mois plus tard. Elle signale en outre que, le 14 novembre 2014, elle a saisi la deuxième juridiction du travail de San Salvador afin que, conformément à la législation en vigueur, le STESEC soit dissout du fait des actes d’intimidation dont il s’était rendu coupable à l’encontre des salariés de l’entreprise A membres du STSEL, en collaboration avec la direction de cette entreprise, mais qu’aucune décision définitive n’avait été prononcée à cet égard. Elle ajoute que, pour le même motif, elle a également saisi la quatrième juridiction du travail, mais que celle-ci non plus n’a pas encore rendu de jugement définitif sur cette affaire.
  3. 307. Par ailleurs, l’organisation plaignante affirme que l’entreprise A refuse à plusieurs dirigeants de diverses sections du STSEL des congés syndicaux leur permettant d’exercer leurs fonctions, alors qu’elle accorde ce type de congés aux dirigeants du STESEC pour une durée illimitée et prend en charge leurs frais de bouche et de transport. Elle signale que les fonctionnaires de la Commission adoptent la même conduite: ils favorisent les actions syndicales du STESEC et restreignent les congés syndicaux du STSEL.
  4. 308. L’organisation plaignante indique en outre que, le 15 mai 2015, l’entreprise A a procédé au licenciement de Julio Cesar Avilés Oliva, secrétaire général de la section du STSEL au sein de ladite entreprise, au motif que celui-ci avait eu recours à des congés syndicaux, ce qu’il était en droit de faire en vertu de la décision du 31 octobre 2014 de la Direction générale du travail du ministère du Travail, selon laquelle les dirigeants du STSEL peuvent prendre ce type de congés, compte tenu des dispositions de la convention collective applicable. De plus, le STSEL considère que, conformément à la législation du travail, un dirigeant syndical ne peut pas être licencié ou faire l’objet d’une sanction disciplinaire si l’autorité compétente n’a pas retenu de motif valable pour cela. Or cette condition n’a pas été remplie dans le cas de M. Avilés, licencié de manière arbitraire par son employeur.
  5. 309. L’organisation plaignante dénonce en outre le fait que le président de la Commission ait autorisé des juristes du service juridique de ladite commission à contester la légitimité du STSEL à être partie contractante de plusieurs conventions collectives conclues avec plusieurs entités de la Commission. Ainsi, le chef du Département national des organisations sociales a communiqué au STSEL qu’il n’était plus partie contractante de la convention collective établie avec l’entreprise A, au profit du STESEC (par décision du 6 octobre 2014), ainsi que de la convention collective conclue avec une autre entreprise (entreprise B) et avec la Commission en tant que telle (par décision du 4 mai 2015 dans les deux cas). L’organisation plaignante indique que ni son droit d’être entendu ni le respect d’une procédure régulière n’ont été garantis et que, bien qu’il ait été tenu informé du patronage par le président de la Commission des affiliations au STESEC dans les entreprises en question et de l’action en justice lancée à cet égard, le chef du département susmentionné s’est prononcé en faveur du STESEC, proche de l’employeur.
  6. 310. L’organisation plaignante indique qu’elle a signalé les faits à la ministre du Travail et que, malgré la tenue d’une réunion entre cette dernière et le président de la Commission, celui-ci a poursuivi son offensive et est parvenu à faire en sorte que le STSEL ne soit plus partie contractante des conventions collectives qu’il avait conclues. Elle affirme que la ministre n’est pas intervenue auprès du chef du Département national des organisations sociales pour lancer une enquête sur la manière dont le STESEC avait obtenu la majorité de ses affiliations. Selon l’organisation plaignante, la passivité de la ministre du Travail a favorisé les atteintes à la liberté syndicale dont a été victime le STSEL.
  7. 311. Enfin, l’organisation plaignante indique avoir demandé à la direction générale de l’inspection du travail de procéder à des inspections, lesquelles ont permis de confirmer les actes d’intimidation susmentionnés.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 312. Dans sa communication du 1er novembre 2016, le gouvernement répond aux allégations de l’organisation plaignante, en s’appuyant notamment sur les informations communiquées par l’entreprise A (annexées à la réponse). En ce qui concerne l’allégation concernant l’ingérence supposée du président de la Commission et son rôle dans la création d’un syndicat parallèle (le STESEC), le gouvernement indique que le président de la Commission a été nommé à cette fonction en juin 2014 pour une période de quatre ans. S’appuyant sur les registres du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, le gouvernement signale que seuls deux syndicats exercent leurs activités au sein de la Commission, à savoir le STSEL et le STESEC. Le premier a été créé le 24 août 1996 et le second le 1er mai 2012, donc bien avant la nomination du président. Le gouvernement indique en outre que le STSEL avait déjà fait part de son mécontentement face à la nomination du fonctionnaire en question.
  2. 313. Le gouvernement précise que la Commission est une institution officielle publique et autonome, que l’entreprise A est une entité publique relevant de la Commission et que la secrétaire générale du STSEL, conformément à son contrat de travail individuel, est une travailleuse de l’entreprise A. Il souligne que les faits allégués dans la plainte du STSEL ont eu lieu au sein de l’entreprise A, dont le représentant légal, depuis le 13 juin 2014, n’est pas le président de la Commission mais une autre personne. Ainsi, bien que la Commission ait examiné les informations disponibles pour se faire une idée précise des faits concernant la représentante du STSEL, il est à noter que la majorité des faits allégués ont eu lieu dans l’entreprise A.
  3. 314. En ce qui concerne la procédure de changement de partie contractante à la convention collective conclue entre le STSEL et la Commission, au profit du STESEC, le gouvernement indique que, conformément aux dispositions de l’article 270 du Code du travail, le Département national des organisations sociales du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a estimé, en comparant la liste actualisée des membres du STESEC et les états de paie présentés par la Commission, que le syndicat en question représentait le pourcentage minimum de salariés défini à l’article 270 du Code du travail. Ainsi, le gouvernement indique que le Département national des organisations sociales a décidé, le 6 octobre 2014, que le STESEC serait la nouvelle partie contractante de la convention collective en vigueur dans l’entreprise A.
  4. 315. Le gouvernement présente en outre des statistiques sur le nombre de membres des deux syndicats du secteur (STSEL et STESEC) pour justifier le fait que le STSEL ne soit plus partie contractante de la convention collective, étant donné qu’il compte moins d’affiliés que le STESEC, et insiste sur l’obligation pour l’employeur, l’entreprise A, de conclure une convention collective avec le syndicat qui représente la majorité des travailleurs. Compte tenu de ce qui précède, ladite entreprise et le STESEC ont conclu, le 1er novembre 2015, une nouvelle convention collective qui a abrogé la précédente, en faisant tous deux preuve, selon le gouvernement, d’une ouverture au dialogue au cours de l’établissement de cette convention.
  5. 316. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles des congés syndicaux auraient été refusés à des dirigeants de plusieurs sections du STSEL, le gouvernement indique que la nouvelle convention collective reconnaît (dans son article 24) le droit des dirigeants syndicaux à des congés syndicaux, mais que ceux-ci doivent être partiels et non permanents:
    • Un membre du comité exécutif de la section du syndicat au sein de l’entreprise [A] et un membre de la direction générale du syndicat bénéficient chacun de dix (10) jours de congé payés par mois calendaire pour mener les activités nécessaires et indispensables à l’exercice de leurs fonctions, étant entendu qu’ils doivent se présenter tous les jours dans les locaux de l’entreprise pour veiller et contribuer à ce que leurs activités soient menées de manière efficace et harmonieuse, dans le cadre d’un respect et d’une considération mutuels entre les coordonnateurs et les salariés de rang inférieur. Le reste des membres du comité exécutif de la section du syndicat au sein de l’entreprise [A] et de la direction générale du syndicat bénéficient de six (6) jours de congé payés par mois, étant entendu qu’ils doivent eux aussi se présenter sur leur lieu de travail et que ces jours de congé ne sont pas cumulables d’un mois à l’autre.
  6. 317. Le gouvernement indique ensuite que le syndicat minoritaire aussi a le droit à des congés syndicaux, mais uniquement de manière partielle et non à temps plein. Il estime que le fait que la secrétaire générale du STSEL considère qu’elle peut, en vertu des libertés syndicales, consacrer 100 pour cent de son temps de travail à ses activités syndicales relève uniquement d’une décision personnelle consistant à s’accorder le privilège de ne pas travailler, ce qui est contraire aux dispositions de la nouvelle convention collective en vigueur. Il fournit à cet égard une liste de 30 notes envoyées par l’unité administrative du service des ressources humaines de l’entreprise, dans lesquelles la secrétaire générale du STSEL est priée de reprendre son travail, ce qu’elle n’a pas encore fait à ce jour.
  7. 318. S’agissant du licenciement de Julio Cesar Avilés Oliva, secrétaire général de la section du STSEL au sein de l’entreprise A, pour avoir supposément eu recours à des congés syndicaux, le gouvernement signale que la procédure judiciaire correspondante est provisoirement suspendue.
  8. 319. En ce qui concerne le dépôt d’une plainte devant la deuxième juridiction du travail de San Salvador, le 14 novembre 2014, dans laquelle est demandée la dissolution du STESEC pour de supposés actes d’intimidation à l’encontre de travailleurs de l’entreprise A membres du STSEL, commis en collaboration avec la direction de l’entreprise, le gouvernement indique que, le 22 juillet 2015, l’autorité judiciaire a jugé la demande de dissolution «mal fondée» (affaire no NUE 11755-14-LBJC-2LB1-(3), traitée par la deuxième juridiction du travail; la décision est annexée à la réponse du gouvernement). Faisant observer que le dossier de cette affaire compte 23 déclarations sous serment de témoins, le gouvernement estime que la plainte est infondée et qu’il peut être clairement établi que le président de la Commission ne s’est rendu coupable d’aucun acte d’intimidation envers quelque travailleur ou syndicaliste que ce soit.
  9. 320. S’agissant de la plainte déposée auprès de la quatrième juridiction du travail pour de supposés actes d’intimidation commis par le STESEC, le gouvernement indique que ladite juridiction a estimé, par un jugement rendu le 17 juillet 2017, que l’exception de litispendance invoquée par la partie défenderesse s’appliquait.
  10. 321. En ce qui concerne la réunion entre la ministre du Travail et le président de la Commission mentionnée par l’organisation plaignante, le gouvernement signale qu’une audience a été convoquée le 13 avril 2016 afin d’établir un dialogue entre les parties concernées, mais que celle-ci n’a pas eu d’issue favorable en raison de l’entêtement de la secrétaire générale du STSEL à ne pas se rendre sur son lieu de travail.
  11. 322. S’agissant de l’allégation concernant la demande d’inspection adressée à la direction générale de l’inspection du travail, le gouvernement indique que le STSEL a sollicité la réalisation d’une inspection afin de mettre en évidence des actes de discrimination antisyndicale dans l’entreprise A, qu’une infraction à l’article 30, alinéa 5, du Code du travail n’ayant fait l’objet d’aucune réparation a été constatée à l’issue de cette inspection et qu’une procédure de sanction a été lancée à cet égard. Le gouvernement indique que le dossier a été transmis à la section d’appel de la direction générale de l’inspection du travail après l’imposition d’une amende de 342,84 dollars des Etats-Unis pour infraction à l’article 248 du Code du travail, lié à l’article 30, alinéa 5, de ce même code.
  12. 323. Enfin, le gouvernement indique que, compte tenu de tout ce qui précède, l’entreprise A a demandé la réalisation d’une inspection spéciale ou inopinée, comme en atteste le document daté du 31 mai 2016, afin de faire constater que la secrétaire générale du STSEL ne s’acquitte pas de l’obligation d’exécuter les tâches prévues dans son contrat de travail.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 324. Le comité observe que, dans le présent cas, l’organisation plaignante (le STSEL) dénonce: i) des actes d’ingérence de la part du président de la Commission exécutive hydroélectrique (la Commission), en particulier son rôle dans la création d’un syndicat parallèle (le STESEC); ii) le changement de partie contractante à la convention collective en faveur dudit syndicat; iii) le refus d’accorder des congés syndicaux à des dirigeants de diverses sections du STSEL au sein de l’entreprise A; iv) le licenciement de Julio Cesar Avilés Oliva, secrétaire général de la section du STSEL au sein de l’entreprise A, au motif supposé qu’il a eu recours à des congés syndicaux.
  2. 325. En ce qui concerne les allégations concernant l’ingérence du président de la Commission et son rôle dans la création d’un syndicat parallèle (le STESEC), le comité prend note de la rivalité entre la direction du STSEL et le président de la Commission, mentionnée par l’organisation plaignante et le gouvernement. Selon la représentante du STSEL, cette rivalité daterait de l’époque où l’actuel président de la Commission avait essayé de se faire élire secrétaire général du STSEL, mais n’y était pas parvenu car la majorité des affiliés s’y était opposée au motif qu’il exerçait des fonctions de représentant de l’employeur et de salarié de confiance dans l’une des entreprises de la Commission (l’entreprise A). Le comité note que, selon l’organisation plaignante, le président aurait eu à partir de ce moment-là un certain ressentiment personnel envers l’organisation plaignante et la volonté de créer un syndicat parallèle (le STESEC). Le comité prend également note des informations fournies par le gouvernement, faisant état de la création du STESEC bien avant la nomination du président (deux ans) et du mécontentement du STSEL face à la nomination du fonctionnaire susmentionné à la présidence de la Commission.
  3. 326. Pour ce qui est de la demande de dissolution du STESEC, datée du 14 novembre 2014, déposée par l’organisation plaignante auprès de la deuxième juridiction du travail de San Salvador pour de supposés actes d’intimidation à l’encontre de salariés de l’entreprise A membres du STSEL, commis en collaboration avec la direction de l’entreprise, le comité prend note des informations fournies par le gouvernement, selon lesquelles le juge, dans sa décision du 22 juillet 2015, a estimé que la demande de dissolution était «mal fondée» (affaire no NUE 11755-14-LBJC-2LB1-(3)). Le comité observe que, dans cette décision, le juge met en évidence le manque de précision des motifs invoqués et des éléments de preuve apportés. Il y est notamment énoncé que la demande «ne comporte pas de témoignage des victimes des actes d’intimidation, n’établit pas quels membres du syndicat défendeur auraient été les auteurs de ces actes et n’indique pas par quels moyens les actes en question ont été constatés. Au contraire, les documents présentés font état du passage d’un syndicat à un autre sans violence, usage de la force ou acte d’intimidation. En outre, dans le présent cas, le syndicat, en tant que personne morale, n’a enfreint ni la loi ni ses propres statuts, étant donné qu’il s’agit d’actes dont les auteurs seraient les membres dudit syndicat, en tant que personnes naturelles et individus. Ainsi, annuler l’enregistrement d’une organisation syndicale ou la dissoudre pour de supposées activités illégales menées par certains de ses membres aurait des conséquences importantes et graves pour la défense des intérêts de centaines de travailleurs.» Estimant que, au moment de la présentation de sa plainte, l’organisation plaignante n’avait pas connaissance de ladite décision, le comité prie le STSEL de lui faire savoir s’il a interjeté appel de la décision rendue par la deuxième juridiction du travail le 22 juillet 2015.
  4. 327. S’agissant du changement de partie contractante à la convention collective en faveur du STESEC, le comité prend note de la procédure décrite par le gouvernement, concernant le travail du Département national des organisations sociales du ministère du Travail, ainsi que des statistiques relatives au nombre d’affiliés des deux syndicats en question, à partir desquelles il est démontré que le STSEL, du fait d’un nombre inférieur de membres, n’est plus le syndicat majoritaire ni au sein de la Commission ni dans l’entreprise A. Il note également que, le 1er novembre 2015, une nouvelle convention collective a été conclue entre l’entreprise A et le STESEC, nouveau syndicat majoritaire.
  5. 328. En ce qui concerne la question des congés syndicaux, le comité observe que les nouvelles conditions applicables découlent de la nouvelle convention collective susmentionnée et restreignent l’attribution de congés, bien que, selon les informations fournies par le gouvernement, les deux syndicats puissent en bénéficier. Le comité observe aussi que, pour le gouvernement, lesdites conditions découlent logiquement de la convention collective négociée par le nouveau syndicat majoritaire, le STESEC, alors que la représentante du STSEL semble se prévaloir de l’ancien système, qui lui était favorable.
  6. 329. De manière plus générale, même si les allégations concernant des actes d’ingérence et d’intimidation commis par l’entreprise pour promouvoir un syndicat parallèle n’ont pas été vérifiées, et malgré les conséquences du changement de partie contractante à la convention collective, le comité ne peut manquer de constater que, dans la décision rendue par la deuxième juridiction du travail le 22 juillet 2015, il est admis que le syndicat défendeur (le STESEC) compte parmi ses membres, y compris au sein de son comité exécutif, des personnes qui exercent des fonctions d’encadrement et sont par conséquent des salariés de confiance et des représentants de la direction de l’entreprise A: «ne disposant pas d’éléments de preuve contraires permettant de contester le fait que les travailleurs en question, occupant les postes indiqués, ont exercé ou exercent les fonctions de dirigeants syndicaux au sein de la direction générale ou du comité exécutif de section du syndicat défendeur, il est établi que, étant à la fois représentants de leur employeur et dirigeants du syndicat défendeur, ils ont enfreint les dispositions de l’article 225, alinéa 5, du Code du travail […]. Cela confirme que les intérêts professionnels des autres travailleurs, affiliés ou non au syndicat en question, ont été bafoués, car le fait que ces salariés soient à la fois dirigeants de ladite organisation syndicale et représentants de leur employeur révèle une ingérence de l’employeur dans les activités du syndicat et porte atteinte aux droits d’une collectivité de travailleurs […].» Dans ces circonstances, le comité ne peut exclure, à la lumière des éléments dont il dispose, que l’employeur affiche des motivations le poussant à isoler le STSEL et à favoriser un autre syndicat (le STESEC), qui serait plus convenable et partagerait davantage ses intérêts, allant jusqu’à faire en sorte que celui-ci devienne partie contractante de la convention collective. Le comité estime à cet égard que le fait que des dirigeants de l’entreprise soient également membres du syndicat et de son comité exécutif constitue une pratique irrégulière donnant lieu à des actes d’ingérence qui ne sont conformes ni à l’article 2 de la convention no 98 ni à la législation nationale et qui peuvent avoir des répercussions sur la négociation collective. A cet égard, le comité rappelle que «eu égard à l’importance de l’autonomie des parties à la négociation collective, les négociations ne devraient pas être menées au nom des travailleurs ou de leurs organisations par des agents négociateurs nommés ou dominés par les employeurs ou leurs organisations». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 868.]
  7. 330. Le comité constate en outre que des enquêtes ont été menées par l’Inspection générale du travail à la demande du STSEL. Il note à cet égard que, selon l’organisation plaignante, les services d’inspection ont confirmé les actes d’intimidation dénoncés – bien que l’organisation plaignante ne fournisse pas plus de précisions – et que le gouvernement indique que les services en question ont constaté dans l’entreprise A une infraction à l’article 30, alinéa 5, du Code du travail (portant sur les pratiques antisyndicales et discriminatoires, directes ou indirectes), qui n’a fait l’objet d’aucune réparation, et qu’une procédure de sanction a été lancée à cet égard. Le comité observe en outre que le dossier de cette affaire a été transmis à la section d’appel de la direction générale de l’inspection du travail après l’imposition d’une amende de 342,84 dollars des Etats-Unis pour infraction à l’article 248 du Code du travail, relatif au respect de l’immunité syndicale et lié à l’article 30, alinéa 5, de ce même code.
  8. 331. Le comité prie le gouvernement de lui fournir des informations détaillées sur les pratiques antisyndicales constatées par l’Inspection générale du travail dans l’entreprise A. Il le prie également de le tenir informé du résultat de la procédure de sanction correspondante et de veiller à ce que les sanctions prononcées aient un caractère suffisamment dissuasif pour garantir la liberté syndicale de tous les travailleurs de l’entreprise.
  9. 332. En ce qui concerne le licenciement de Julio Cesar Avilés Oliva, secrétaire général de la section du STSEL au sein de l’entreprise A, le comité note que, selon l’organisation plaignante, l’entreprise A a procédé à son licenciement le 15 mai 2015 pour avoir eu recours à des congés syndicaux, alors qu’il était en droit de le faire en vertu de la décision du 31 octobre 2014 de la Direction générale du travail du ministère du Travail, selon laquelle les dirigeants du STSEL peuvent prendre ce type de congés, compte tenu des dispositions de la convention collective applicable. Le comité note également que, selon le gouvernement, la procédure judiciaire correspondante est provisoirement suspendue. Attirant l’attention sur les dispositions de la convention no 135 et de la recommandation (no 143) concernant les représentants des travailleurs, 1971, où il est expressément déclaré que les représentants des travailleurs dans l’entreprise doivent bénéficier d’une protection efficace contre toutes mesures qui pourraient leur porter préjudice, y compris le licenciement, et qui seraient motivées par leur qualité ou leur activité de représentants des travailleurs, leur affiliation syndicale, ou leur participation à des activités syndicales, pour autant qu’ils agissent conformément aux lois, conventions ou autres arrangements conventionnels en vigueur [voir Recueil, op. cit., paragr. 800], le comité prie instamment le gouvernement de l’informer de l’issue de la procédure judiciaire en cours.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 333. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité invite l’organisation plaignante à lui indiquer si elle a interjeté appel de la décision rendue par la deuxième juridiction du travail le 22 juillet 2015.
    • b) Le comité prie le gouvernement de lui fournir des informations détaillées sur les pratiques antisyndicales constatées par l’Inspection générale du travail dans l’entreprise A, de le tenir informé du résultat de la procédure de sanction correspondante et de veiller à ce que les sanctions prononcées aient un caractère suffisamment dissuasif pour garantir la liberté syndicale de tous les travailleurs de l’entreprise en question.
    • c) En ce qui concerne le licenciement de Julio Cesar Avilés Oliva, secrétaire général de la section du STSEL au sein de l’entreprise A, le comité prie instamment le gouvernement de l’informer de l’issue de la procédure judiciaire en cours.
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