Allégations: Exclusion du secrétaire général de la fédération syndicale du
secteur pétrolier de la table des négociations collectives, répression d’une manifestation
syndicale, licenciement d’un dirigeant syndical sans respect des garanties d’une procédure
régulière
- 631. La plainte figure dans deux communications en date du 10 février
2014 présentées conjointement par les organisations syndicales suivantes: l’Union
nationale des travailleurs du Venezuela (UNETE), la Confédération des travailleurs du
Venezuela (CTV), la Confédération générale des travailleurs (CGT), la Confédération des
syndicats autonomes (CODESA), l’Alliance syndicale indépendante (ASI), le Front autonome
de défense de l’emploi, des salaires et des syndicats (FADESS), le Mouvement syndical de
base (MOSBASE) et le Mouvement ouvrier uni, révolutionnaire et autonome (C-CURA).
- 632. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des
communications datées du 15 mai et des 17 et 29 octobre 2014.
- 633. La République bolivarienne du Venezuela a ratifié la convention
(nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la
convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 634. Dans leurs communications en date du 10 février 2014, l’Union
nationale des travailleurs du Venezuela (UNETE), la Confédération des travailleurs du
Venezuela (CTV), la Confédération générale des travailleurs (CGT), la Confédération des
syndicats autonomes (CODESA), l’Alliance syndicale indépendante (ASI), le Front autonome
de défense de l’emploi, des salaires et des syndicats (FADESS), le Mouvement syndical de
base (MOSBASE) et le Mouvement ouvrier uni, révolutionnaire et autonome (C-CURA)
affirment que, le 3 février 2014, une manifestation syndicale pacifique conduite par les
travailleurs de l’entreprise PDVSA dans la ville de Puerto la Cruz de l’Etat
d’Anzoátegui a été réprimée par la Garde nationale bolivarienne, qui a arrêté des
dirigeants et engagé des poursuites pénales à leur encontre.
- 635. Selon les allégations, les motifs de la manifestation syndicale
étaient le retard pris dans la conclusion de la nouvelle convention collective de
travail et l’exclusion de M. José Bodas, secrétaire général de la Fédération unitaire
des travailleurs du secteur pétrolier du Venezuela (FUTPV), de la table des
négociations. Les neuf travailleurs et dirigeants arrêtés étaient M. Endy Alexander
Torres Guarema, M. Moisés Neptali Parica Pinto, M. Leonardo Rafael Ugarte Rincón,
M. Emiro José Millán Gómez, M. Bladimir Carvajal, M. Omar David Parica Pinto, M. Jesús
Rafael Giraldo Rodríguez, M. Gustavo José Pereira La Rosa et M. William Eleazar Parica
Pinto. Ils ont tous été transférés au commandement régional no 75 de la Garde nationale
bolivarienne (commandement régional no 7), où il leur a été interdit d’utiliser leur
téléphone mobile et où ils sont restés en détention jusqu’au lendemain, jour où ils ont
été remis en liberté après que le bureau du Procureur général de la République, par
l’intermédiaire du premier parquet pénal de la circonscription judiciaire, les a
inculpés des délits présumés de résistance à l’autorité et d’exercice de la contrainte
aux fins de la cessation de travail, conformément aux articles 218, 192 et 193 du Code
pénal.
- 636. Les organisations plaignantes ajoutent que l’organe judiciaire qui
connaît du cas est le tribunal pénal de contrôle no 5 de la circonscription judiciaire
de l’Etat d’Anzoátegui, présidé par la juge Ydanie Almeida Guevara qui, faisant suite à
la demande du bureau du procureur, a adopté les mesures suivantes: présentation au
tribunal tous les trente jours et interdiction des manifestations, conformément aux
dispositions de l’article 242 du Code pénal.
- 637. Les organisations plaignantes appellent l’attention sur le problème
de la criminalisation des manifestations relatives au travail en République bolivarienne
du Venezuela et signalent que les organes de contrôle de l’OIT ont à plusieurs reprises
demandé la suspension des procédures engagées à l’encontre de dirigeants syndicaux et
l’abrogation des règles restreignant la grève.
- 638. Dans une autre communication en date du 10 février 2014, les
organisations plaignantes affirment que, le 21 novembre 2013, M. Iván Freites, président
du Syndicat unique des travailleurs des secteurs du pétrole, de la pétrochimie, du gaz
et d’autres secteurs connexes de l’Etat de Falcón (SUTPGEF), qui avait, en 2012, déposé
plainte auprès du Comité de la liberté syndicale de l’OIT contre l’entreprise PDVSA pour
violation des conventions no 87 et no 98 et auprès de différentes instances nationales
pour non-respect des conditions et du milieu de travail, a été informé de son
licenciement. Le SUTPGEF est principalement présent au sein du complexe de raffinage de
Paraguaná (il s’agit de la «raffinerie d’Amuay», qui est la plus grande raffinerie au
monde). Plus d’un an plus tard, M. Iván Freites, syndicaliste qui avait dénoncé le
non-respect par l’Etat des engagements qui étaient les siens en matière de travail et
que l’entreprise PDVSA avait exclu des discussions contractuelles relatives aux
conditions de travail collectives, a été licencié alors qu’il était membre du comité de
direction de la Fédération unitaire des travailleurs du secteur pétrolier du Venezuela
(FUTPV).
- 639. Les organisations plaignantes indiquent que M. Iván Freites a pris
connaissance de son licenciement en consultant un article publié le 21 décembre 2013 par
l’entreprise PDVSA dans la presse locale de l’Etat de Falcón et qu’il n’en avait pas été
informé auparavant par l’autorité administrative du travail, ce qui signifie que les
garanties d’une procédure régulière n’ont pas été respectées et qu’il n’a pas eu accès
aux recours administratifs et judiciaires qui lui étaient ouverts conformément à la
législation nationale. Au contraire, l’entreprise PDVSA a joué le rôle qui était celui
de l’autorité du travail en se chargeant de de la notification du licenciement, ce que
la législation vénézuélienne interdit formellement. D’autre part, l’autorité du travail,
qui a de toute évidence avantagé l’entreprise PDVSA en l’informant de la teneur de sa
décision, a montré qu’elle n’était pas indépendante de cette puissante entreprise
pétrolière de l’Etat.
- 640. En outre, dans la notification susmentionnée, l’entreprise PDVSA a
expressément indiqué qu’elle accordait au syndicaliste un délai de douze heures pour se
rendre dans les locaux du complexe de raffinage de Paraguaná aux fins de son retrait
officiel de la liste des membres du personnel de l’entreprise PDVSA. Il convient de
signaler que M. Iván Freites, qui travaillait pour cette entreprise depuis près de
trente ans, a été informé de son licenciement pendant la période de Noël, durant
laquelle la population vénézuélienne, y compris le personnel de l’entreprise PDVSA,
dispose de jours de repos et d’une réduction du temps de travail. Dans ces conditions,
il aurait été difficile de convoquer les travailleurs pour les informer de l’injustice
perpétrée.
- 641. Enfin, les organisations plaignantes signalent que les faits
rapportés dans la présente plainte constituent une violation des conventions nos 87 et
98 de l’OIT.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 642. Dans sa communication en date du 15 mai 2014, le gouvernement
déclare que, en ce qui concerne le licenciement du dirigeant syndical Iván Freites, aux
fins de la protection de l’activité syndicale en République bolivarienne du Venezuela,
aucun dirigeant syndical ne peut être licencié ou transféré sans que les raisons qui
justifient son licenciement ou son transfert n’aient été examinées. Le gouvernement
indique que l’inspection du travail «Ali Primera» de Punto Fijo a engagé, à la demande
de l’entreprise PDVSA, une procédure de qualification de fautes et de licenciement à
l’encontre d’Iván Freites. Après avoir mené la procédure prévue par la loi, examiné les
motifs invoqués et respecté les délais probatoires, dans le strict respect du droit à la
défense consacré par la Constitution, l’inspection, se fondant sur l’article 79 de la
loi organique sur le travail et les travailleurs (qui énonce les motifs légitimes de
licenciement, notamment à l’alinéa a): «manque de probité ou conduite immorale au
travail», à l’alinéa c): «injure ou manquement grave au respect et à la considération
dus à l’employeur, à ses représentants ou aux membres de sa famille qui vivraient avec
lui» et à l’alinéa i): «grave manquement aux obligations imposées par la relation de
travail»), a adopté la décision administrative no 075-01-2013 du 20 décembre 2013 par
laquelle elle a déclaré la demande recevable et autorisé l’entreprise PDVSA à licencier
l’intéressé.
- 643. Le gouvernement ajoute que, dans cette décision, il a été demandé à
l’inspection de Coro d’informer M. Iván Freites de son licenciement, ce que celle-ci a
fait le 23 décembre 2013, comme il ressort du dossier. En outre, le dossier contient une
demande de copies certifiées de la décision administrative et d’autres documents datée
du 27 décembre 2013. M. Iván Freites a reçu les documents demandés le 6 janvier
2014.
- 644. Le gouvernement précise que les décisions des organes administratifs
prennent effet pour les parties dès qu’elles sont publiées dans leur dossier. En
l’espèce, le dossier indique que l’entreprise a pris acte de la décision et l’a
appliquée conformément aux droits qui lui sont reconnus par la législation en
vigueur.
- 645. En outre, la voie de recours administrative étant épuisée, la
décision administrative indique que M. Iván Freites peut former un recours en nullité à
l’encontre de cette décision auprès des tribunaux du travail de première instance dans
les six mois suivant l’expiration du délai prévu dans la présente procédure.
- 646. Les informations susmentionnées montrent qu’il n’a pas été porté
atteinte au droit à la liberté syndicale ni aux garanties d’une procédure régulière,
étant donné que la procédure prévue par la loi a été suivie et que l’intéressé a, à ce
jour, le droit de former les recours qu’il souhaite.
- 647. Dans sa communication en date du 17 octobre 2014, le gouvernement a
transmis ses observations concernant l’allégation relative à l’exclusion du dirigeant
syndical José Bodas de la nouvelle convention collective conclue avec l’entreprise
PDVSA. Le gouvernement déclare que les négociations concernant la convention collective
qui couvre plus de 90 000 travailleurs de la principale industrie du pays ont débuté en
novembre 2013 et se sont achevées en mars 2014. Ces négociations se sont déroulées de
manière parfaitement normale et ont abouti à la signature de la convention collective.
Les employeurs étaient représentés par l’entreprise PDVSA et par la Chambre
vénézuélienne du pétrole et les travailleurs étaient représentés par la Fédération
unitaire des travailleurs du secteur pétrolier du Venezuela (FUTPV), seule organisation
syndicale représentative des travailleurs du secteur pétrolier du pays. Au début des
négociations, la FUTPV a désigné une commission de négociation composée de 11 personnes
qui a mené les négociations en son nom et au nom des travailleurs du secteur
pétrolier.
- 648. Le gouvernement précise que la composition de la commission de
négociation dans le cadre d’une négociation collective relève, conformément à la
législation du travail, de la décision autonome des organisations syndicales.
L’autonomie syndicale est protégée par l’Etat du Venezuela de toutes les ingérences
extérieures, y compris de celle de l’Etat.
- 649. La plainte rend compte de la réclamation d’un membre de la FUTPV qui
n’a pas été nommé membre de la commission de négociation de la convention collective de
l’industrie pétrolière. Le gouvernement déclare qu’il ignore pour quelles raisons la
FUTPV a décidé, en pleine jouissance de son autonomie syndicale, d’exclure cette
personne de sa commission de négociation.
- 650. Le gouvernement ajoute que, si elles sont justifiées, les plaintes
doivent être adressées à la FUTPV et non aux autorités vénézuéliennes, qui n’ont aucun
pouvoir sur les décisions prises par la FUTPV et par les autres organisations syndicales
en matière de représentation dans les négociations collectives.
- 651. Le gouvernement affirme de nouveau qu’il n’y a eu aucun retard,
conflit ou interruption pendant les négociations relatives à la convention collective de
l’industrie pétrolière.
- 652. Cependant, le 3 février 2014, en marge de la négociation collective,
un groupe de travailleurs du secteur pétrolier et d’acteurs politiques locaux a conduit
une «manifestation» supposée sur l’autoroute Antonio José de Sucre qui relie les villes
de Barcelona et de Puerto Piritu dans l’Etat d’Anzoátegui, à l’est du pays, et à
proximité de laquelle se trouve le complexe de raffinage de José, l’un des plus grands
du pays.
- 653. Le gouvernement ajoute que la supposée manifestation a eu lieu sur
la voie de droite de l’autoroute, devant l’entrée du complexe de raffinage, et qu’aucun
incident ne s’est produit jusqu’à la fin de la journée de travail des travailleurs du
complexe. A ce moment, un groupe de manifestants a tenté d’accéder à l’autoroute pour
entraver la libre circulation des véhicules, y compris des autobus qui transportaient
des travailleurs devant assurer la relève des travailleurs du complexe de raffinage.
Cette interruption de la libre circulation sur l’une des principales routes de l’est du
pays n’était absolument pas justifiée et n’était ni organisée ni soutenue par les
organisations syndicales du secteur pétrolier ou par les travailleurs qui, à ce moment,
travaillaient normalement ou circulaient sur l’autoroute pour remplacer leurs
collègues.
- 654. Compte tenu des circonstances, la Garde nationale bolivarienne
chargée de la protection des voies de circulation de la République bolivarienne du
Venezuela a pris des mesures rapides pour rétablir la libre circulation des véhicules;
elle a dû arrêter les personnes qui persistaient à bloquer l’axe routier principal. Les
personnes arrêtées ont été éloignées du site et transférées au poste de la garde
nationale le plus proche. Elles ont été remises en liberté le jour suivant. Selon le
gouvernement, l’allégation écrite selon laquelle la manifestation était due au retard
pris dans la conclusion de la convention collective et à l’exclusion de José Bodas de la
commission de négociation est absurde.
- 655. Le gouvernement déclare qu’aucun retard n’a été pris dans les
négociations collectives (qui se sont achevées avec succès en seulement quelques
semaines) et que l’exclusion de M. José Bodas de la commission de négociation, qui a eu
lieu près de trois mois avant ces négociations, est une question qui ne concerne que le
syndicat. En outre, la fermeture violente et unilatérale d’une autoroute empruntée par
des centaines de personnes ne peut en aucun cas être qualifiée de «pacifique», étant
donné qu’elle constitue une infraction au regard de la législation du Venezuela et de
nombreux autres pays.
- 656. Pour finir, le gouvernement affirme que, étant donné qu’il ne s’agit
pas d’une question d’ordre syndical, il convient de ne pas tenir compte de ces
allégations qui sont infondées.
- 657. Dans sa communication en date du 29 octobre 2014, le gouvernement
indique que, selon les informations communiquées dans une note du ministère public en
date du 28 octobre 2014, dans le cas relatif aux faits survenus le 3 février 2014 au
siège de la raffinerie de l’entreprise PDVSA, dans la ville de Puerto La Cruz de l’Etat
d’Anzoátegui concernant les dirigeants syndicaux Endy Alexander Torres Guarema, Moisés
Neptali Parica Pinto, Leonardo Rafael Ugarte Rincón, Emiro José Millán Gómez, Bladimir
Carvajal, Omar David Parica Pinto, Jesús Rafael Giraldo Rodríguez, Gustavo José Pereira
La Rosa et William Eleazar Parica Pinto, les conclusions ont été rendues et l’affaire a
été classée; en outre, il a été décidé de lever la mesure de sûreté en ce qui concerne
le paragraphe 3 de l’article 242 du Code organique de procédure pénale.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comitéAllégations relatives à la répression d’une manifestation syndicale et à l’arrestation de syndicalistes
- 658. Le comité observe que, dans la présente plainte, les organisations
syndicales affirment que la Garde nationale bolivarienne a réprimé une manifestation
syndicale pacifique conduite le 3 février 2014 dans la ville de Puerto La Cruz par les
travailleurs de la raffinerie de l’entreprise pétrolière PDVSA en raison du retard pris
dans la conclusion de la nouvelle convention collective et de l’exclusion de M. José
Bodas, secrétaire général de la Fédération unitaire des travailleurs du secteur
pétrolier du Venezuela (FUTPV), de la table des négociations. Cette répression a abouti
à l’arrestation de neuf dirigeants syndicaux et syndicalistes qui ont été privés de
liberté jusqu’au lendemain et contre lesquels le bureau du Procureur général de la
République a engagé des poursuites pénales pour résistance à l’autorité et exercice de
la contrainte aux fins de la cessation de travail; selon les allégations, l’autorité
judiciaire pénale a ordonné aux intéressés de se présenter devant le tribunal tous les
trente jours et a interdit la manifestation.
- 659. Le comité prend note des déclarations du gouvernement qui remettent
en cause: 1) le retard allégué des négociations (le gouvernement affirme que les
négociations collectives ont commencé en novembre 2013, qu’elles se sont déroulées sans
aucun retard, conflit ou interruption, et qu’elles se sont achevées en mars 2014 par la
signature d’une convention collective entre l’entreprise et la FUTPV); 2) la plainte
contre le gouvernement présentée par les organisations plaignantes concernant
l’exclusion du secrétaire général de la FUTPV, M. José Bodas, de la table des
négociations (le gouvernement affirme que toute plainte relative à l’exclusion de ce
dirigeant de la commission de négociation doit être adressée à la FUTPV, étant donné que
cette question relève de la compétence de cette fédération et non de l’Etat du
Venezuela, qui respecte l’autonomie de cette organisation et n’intervient pas dans ses
décisions); 3) le supposé caractère pacifique de la manifestation (le gouvernement
affirme que la fermeture violente et unilatérale d’une autoroute empruntée par des
centaines de personnes ne peut en aucun cas être qualifiée de «pacifique», étant donné
qu’elle constitue une infraction au regard de la législation du Venezuela et de nombreux
autres pays). Le comité note que le gouvernement déclare que la supposée manifestation,
conduite par un groupe de travailleurs de l’industrie pétrolière et d’acteurs politiques
locaux sur l’autoroute Antonio José de Sucre à proximité de l’entrée du complexe de
raffinage de José, s’est déroulée sans incident jusqu’à la fin de la journée de travail
des travailleurs du complexe de raffinage; un groupe de manifestants a alors tenté
d’accéder à l’autoroute pour entraver la libre circulation des véhicules (y compris des
autobus qui transportaient des travailleurs devant assurer la relève des travailleurs du
complexe de raffinage); cette manifestation et cette interruption de la circulation
n’étaient ni organisées ni soutenues par les organisations syndicales du secteur
pétrolier. Le comité note que, selon le gouvernement, lorsque la libre circulation des
véhicules a été entravée sur cette autoroute (qui est l’une des principales voies de
circulation de l’est du pays), la Garde nationale bolivarienne a pris des mesures
rapides pour rétablir la libre circulation des véhicules et a arrêté les personnes qui
persistaient à bloquer la circulation sur l’autoroute. Ces personnes ont été remises en
liberté le jour suivant (4 février 2014).
- 660. Le comité note que, dans sa dernière communication, le gouvernement
indique que, par une note du 28 octobre 2014, le ministère public a décidé de lever les
mesures de sûreté et de classer l’affaire relative à ces 11 personnes.
- 661. Compte tenu de ce qui précède, l’existence d’une infraction commise
par les neuf syndicalistes qui exerçaient leur droit de manifester n’ayant pas été
établie, le comité regrette que ces personnes aient été arrêtées et qu’elles aient fait
l’objet de mesures de sûreté qui restreignent les droits syndicaux (présentation
périodique devant l’autorité judiciaire et interdiction de manifestations) et souligne
l’effet d’intimidation que produit ce type de mesure sur l’exercice des droits
syndicaux. Dans ces circonstances, rappelant que les travailleurs doivent pouvoir jouir
du droit de manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels [voir
Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième
édition, 2006, paragr. 133], le comité prie le gouvernement de s’assurer qu’il ne sera
pas recouru à l’avenir à des mesures privatives de liberté et à des mesures de sûreté
imposant une présentation périodique devant une autorité judiciaire ou interdisant une
manifestation lorsqu’il n’existe pas de raison fondée d’engager des poursuites pénales à
l’encontre de syndicalistes exerçant leur droit de manifester.
Allégations relatives au licenciement de M. Iván Freites, président du SUTPGEF
- 662. Le comité note que, selon les allégations, ce dirigeant syndical a
été licencié après trente années de service au sein de la raffinerie d’Amuay en raison
de ses activités syndicales, notamment pour avoir présenté, en 2012, une plainte contre
l’entreprise auprès du Comité de la liberté syndicale, ou des plaintes auprès des
autorités nationales contre l’entreprise PDVSA pour non-respect de la législation
relative au travail et pour avoir dénoncé le non-respect par l’Etat des engagements pris
en matière de travail, ainsi que la décision prise par l’entreprise de l’exclure de la
commission de négociation de la convention collective (alors même qu’il était membre du
comité de direction de la fédération pétrolière qui la négociait). En outre, selon la
plainte, l’absence de garanties d’une procédure régulière dans le cadre de la procédure
de licenciement et le manque d’indépendance de l’autorité administrative du travail ont
empêché l’intéressé de former les recours administratifs et judiciaires qui lui étaient
ouverts.
- 663. Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon
lesquelles: 1) l’entreprise a engagé une procédure de qualification de fautes et de
licenciement à l’encontre de M. Iván Freites devant l’inspection du travail, laquelle,
après avoir suivi la procédure prévue par la loi (y compris en ce qui concerne les
notifications), examiné les motifs invoqués et respecté les délais prévus conformément
au droit à la défense consacré par la Constitution, a autorisé l’entreprise à licencier
M. Iván Freites sur la base des motifs légaux suivants: a) manque de probité ou conduite
immorale au travail; b) injure ou manquement grave au respect et à la considération dus
à l’employeur, à ses représentants ou aux membres de sa famille qui vivraient avec lui
et grave manquement aux obligations imposées par la relation de travail; et 2) M. Iván
Freites a le droit de former un recours devant l’autorité judiciaire dans un délai de
six mois s’il considère que ses droits ont été violés.
- 664. Le comité note que les versions des organisations plaignantes et du
gouvernement (qui nie le non-respect des garanties d’une procédure régulière et le
caractère antisyndical du licenciement) sur les faits allégués sont contradictoires. Il
regrette que le gouvernement n’ait fait référence qu’aux motifs génériques de
licenciement invoqués par l’entreprise, sans préciser quels faits concrets étaient
reprochés à ce dirigeant syndical. Rappelant que dans un cas où les dirigeants syndicaux
pourraient être licenciés sans indication du motif, le comité a demandé au gouvernement
de prendre des mesures en vue de sanctionner les actes de discrimination antisyndicale
et d’offrir des voies de recours à ceux qui en sont victimes [voir Recueil, op. cit.,
paragr. 807], le comité, afin de disposer d’éléments suffisants pour examiner ces
allégations, prie le gouvernement: 1) de communiquer la décision administrative
no 075-01-2013 par laquelle l’inspection du travail a autorisé le licenciement de
M. Iván Freites et de préciser quels faits concrets sont reprochés à ce dirigeant;
2) d’indiquer si ce dirigeant syndical a formé un recours en justice contre son
licenciement et, dans l’affirmative, de communiquer la décision.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 665. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le
comité prie le gouvernement de s’assurer qu’il ne sera pas recouru à l’avenir à des
mesures privatives de liberté et à des mesures de sûreté imposant une présentation
périodique devant l’autorité judiciaire et interdisant une manifestation lorsqu’il
n’existe pas de raison fondée d’engager des poursuites pénales à l’encontre de
syndicalistes exerçant leur droit de manifester.
- b) Le comité prie le
gouvernement: 1) de communiquer la décision administrative no 075-01-2013 par
laquelle l’inspection du travail a autorisé le licenciement de M. Iván Freites et de
préciser les faits concrets reprochés à ce dirigeant; 2) d’indiquer si ce dirigeant
syndical a formé un recours en justice contre son licenciement et, dans
l’affirmative, de communiquer la décision.