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Rapport définitif - Rapport No. 375, Juin 2015

Cas no 3025 (Egypte) - Date de la plainte: 17-MAI -13 - Clos

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent des violations graves et systématiques du droit à la liberté syndicale, y compris des problèmes d’ordre législatif liés à des restrictions au droit de grève et à des ingérences dans le processus électoral, ainsi qu’à des restrictions au droit d’organisation et de négociation collective

  1. 201. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de mai-juin 2014 lors de laquelle il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 372e rapport, paragr. 125 à 156, approuvé par le Conseil d’administration à sa 321e session (juin 2014).]
  2. 202. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications datées des 15 juillet 2014 et 10 mars 2015.
  3. 203. L’Egypte a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 204. Lors de son dernier examen du cas, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 372e rapport, paragr. 156]:
    • a) Le comité ne peut que regretter que, malgré la Déclaration du 12 mars 2011 consacrant le droit à la liberté syndicale, le gouvernement n’ait à ce jour pas encore adopté le cadre législatif nécessaire pour garantir la pleine reconnaissance juridique des nombreux syndicats indépendants récemment constitués, ce qui semble avoir eu des effets désastreux sur les relations professionnelles dans la pratique.
    • b) Accueillant favorablement le fait que la version définitive du projet de loi sur les syndicats et la protection du droit syndical rompe avec le système de syndicat unique et consacre le pluralisme syndical, le comité s’attend fermement à ce que le projet de loi soit adopté à titre prioritaire et à ce qu’il confère une protection juridique claire aux nombreux syndicats indépendants nouvellement créés et garantisse le plein respect des droits relatifs à la liberté syndicale (y compris le droit de ces organisations d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité et de mener des négociations collectives). Rappelant en particulier que la discrimination antisyndicale est une des violations les plus graves de la liberté syndicale puisqu’elle peut compromettre l’existence même des syndicats, le comité s’attend à ce que la loi garantisse une protection complète et efficace contre la discrimination antisyndicale à tous les dirigeants et membres des nouveaux syndicats indépendants. Il prie le gouvernement de lui transmettre une copie de cette loi lorsqu’elle aura été adoptée.
    • c) Le comité prie le gouvernement d’abroger ou de modifier les dispositions pertinentes de la partie 15 du livre troisième et de la partie 13 du livre deuxième du Code pénal de manière à garantir le plein respect des principes énoncés dans ses conclusions et à faire en sorte que leur application dans la pratique n’empêche pas l’exercice légitime des droits syndicaux. Le comité prie également le gouvernement de lui fournir une copie de la nouvelle loi sur l’organisation des manifestations, qui remplace la loi abrogée no 96/2012, ainsi que des informations détaillées à son sujet.
    • d) Rappelant l’importance qu’il attache au droit des travailleurs d’élire librement leurs représentants sans intervention des autorités publiques, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger le décret no 97/2012.
    • e) Le comité s’attend de manière générale à ce que les dispositions de la nouvelle Constitution, telle que modifiée par le référendum qui s’est tenu les 14 et 15 janvier 2014, ne soient pas appliquées de façon à restreindre l’exercice légitime de la liberté d’expression, de réunion ou d’association.
    • f) De plus, en ce qui concerne les allégations spécifiques des organisations plaignantes concernant l’entreprise Kraft/Mondelez, le comité prie le gouvernement, au vu des actes de discrimination antisyndicale qui semblent être systématiquement commis dans cette entreprise et du nombre de travailleurs qui en auraient été victimes, de diligenter également une enquête indépendante sur les allégations d’actes de discrimination antisyndicale commis en 2011 (mise à la retraite obligatoire de 38 travailleurs pour avoir tenté de constituer un syndicat indépendant), en 2012 (licenciement de cinq dirigeants du syndicat indépendant à la suite d’un arrêt du travail et d’une manifestation) et en 2013 (mutation de 35 sympathisants notoires du syndicat, dont des travailleurs ayant témoigné dans le cadre de la procédure judiciaire concernant les licenciements antisyndicaux), et de tenir le comité informé des résultats de cette enquête. Le comité demande également à être tenu informé de l’issue de la procédure judiciaire en cours mentionnée par le gouvernement concernant le licenciement présumé des cinq dirigeants syndicaux en 2012 ainsi que de toutes les mesures de réparation qui auront été prises. S’il s’avère (au cours de l’enquête ou de la procédure judiciaire) que les dirigeants et membres concernés du syndicat ont été licenciés ou ont subi d’autres formes de préjudice pour avoir mené des activités syndicales légitimes (y compris la constitution d’un nouveau syndicat ou l’appel à une action de revendication) ou en raison de leur affiliation syndicale, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’ils soient pleinement réintégrés sans perte de salaire ou à ce qu’ils soient retransférés dans leur lieu d’affectation initial. Dans le cas où la réintégration ou le transfert serait impossible pour des raisons objectives et impérieuses, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que soit versée au travailleur concerné une indemnisation adéquate qui constituerait une sanction suffisamment dissuasive contre la discrimination antisyndicale.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 205. Dans des communications datées des 15 juillet 2014 et 10 mars 2015, le gouvernement fournit des informations concernant les départs à la retraite, les licenciements et les transferts forcés présumés dans l’entreprise Kraft/Mondelez. En particulier, le gouvernement indique que la plainte a été soumise à l’examen indépendant de la Direction de la main-d’œuvre, qui a formulé les conclusions suivantes:
    • a) Il n’y a pas eu de discrimination à l’encontre des membres des comités directeurs des syndicats. L’entreprise a des syndicats indépendants dans l’ensemble de ses succursales, et ceux-ci sont traités conformément aux lois et règlements.
    • b) Le départ à la retraite de 38 travailleurs a eu lieu conformément à la loi. Les travailleurs ont présenté des demandes de départ à la retraite qui ont été acceptées par la direction. Cette dernière leur a versé toutes leurs prestations financières (deux mois et demi de salaire par année de service, le solde des congés, trois mois de salaires aux travailleurs ayant plus de dix ans de service, et deux mois à ceux ayant moins de dix ans de service).
    • c) Les cinq travailleurs licenciés ont tous été réintégrés (quatre travailleurs à la suite de procédures de conciliation et un travailleur par suite d’une décision judiciaire). Ils sont désormais de retour au travail et jouissent de la sécurité de l’emploi.
    • d) En ce qui concerne l’allégation selon laquelle l’entreprise aurait transféré arbitrairement 35 travailleurs, il ressort que l’entreprise avait établi une nouvelle usine à Borg el-Arab. Les travailleurs expérimentés ont été choisis pour être transférés et ont reçu de meilleures prestations en échange. Ces transferts se sont déroulés conformément aux contrats de travail des intéressés et à la législation en vigueur.
  2. 206. Dans une communication en date du 27 mai 2015, le gouvernement a fourni une copie de la loi no 107 de 2013 relative au droit de réunion publique, de manifestation et de protestation pacifique.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 207. Le comité rappelle que, dans le présent cas, les organisations plaignantes ont allégué que le gouvernement ne prenait pas les mesures nécessaires, ni en droit ni en pratique, pour autoriser la constitution d’un mouvement syndical libre et démocratique et a en outre permis aux employeurs d’enfreindre le droit à la liberté syndicale des travailleurs dans une quasi-impunité, évoquant notamment les actes de discrimination antisyndicale commis dans l’entreprise Kraft/Mondelez.
  2. 208. Le comité note que, dans des communications datées des 15 juillet 2014 et 10 mars 2015, le gouvernement fournit des informations concernant les départs à la retraite, les licenciements et les transferts forcés présumés dans l’entreprise susmentionnée. En particulier, le gouvernement indique que la plainte a été soumise à l’examen indépendant de la Direction de la main-d’œuvre qui a conclu que: 1) le départ à la retraite des 38 travailleurs a eu lieu conformément à la loi, sur la base des demandes écrites présentées par les travailleurs, et tous les travailleurs ont reçu les compensations financières auxquelles ils avaient droit; 2) les cinq travailleurs licenciés ont été réintégrés (à la suite soit d’une conciliation soit d’une décision judiciaire); enfin, 3) les transferts des 35 travailleurs se sont déroulés conformément aux contrats de travail des intéressés et à la législation en vigueur. Le comité espère fermement que les organisations syndicales pourront exercer pleinement leurs droits syndicaux sans intimidations ni ingérences.
  3. 209. Le comité regrette qu’aucune information n’ait été communiquée sur les questions législatives en suspens ci-après: 1) l’adoption de la loi sur les syndicats et la protection du droit syndical consacrant le pluralisme syndical et garantissant une protection complète et efficace contre la discrimination antisyndicale; 2) l’abrogation ou la modification des dispositions pertinentes de la partie 15 du livre troisième et de la partie 13 du livre deuxième du Code pénal de manière à faire en sorte que leur application dans la pratique n’empêche pas l’exercice légitime des droits syndicaux; 3) enfin, l’abrogation du décret no 97/2012 pour garantir aux travailleurs le droit d’élire librement leurs représentants sans intervention des autorités publiques. Le comité réitère donc ses précédentes recommandations et s’attend à ce que le gouvernement transmette sa réponse en la matière à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations en vertu de sa ratification des conventions nos 87 et 98.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 210. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité ne peut que regretter que, malgré la déclaration du 12 mars 2011 consacrant le droit à la liberté syndicale, le gouvernement n’ait à ce jour pas encore adopté le cadre législatif nécessaire pour garantir la pleine reconnaissance juridique des nombreux syndicats indépendants récemment constitués, ce qui semble avoir eu des effets désastreux sur les relations professionnelles dans la pratique.
    • b) Notant que la version définitive du projet de loi sur les syndicats et la protection du droit syndical auquel a participé le comité rompt avec le système de syndicat unique et consacre le pluralisme syndical, le comité s’attend fermement à ce que le projet de loi soit adopté à titre prioritaire et à ce qu’il confère une protection juridique claire aux nombreux syndicats indépendants nouvellement créés et garantisse le plein respect des droits relatifs à la liberté syndicale (y compris le droit de ces organisations d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leurs activités et de mener des négociations collectives). Rappelant en particulier que la discrimination antisyndicale est une des violations les plus graves de la liberté syndicale puisqu’elle peut compromettre l’existence même des syndicats, le comité s’attend à ce que la loi garantisse une protection complète et efficace contre la discrimination antisyndicale à tous les dirigeants et membres des nouveaux syndicats indépendants.
    • c) Le comité prie le gouvernement d’abroger ou de modifier les dispositions pertinentes de la partie 15 du livre troisième et de la partie 13 du livre deuxième du Code pénal de manière à faire en sorte que leur application dans la pratique n’empêche pas l’exercice légitime des droits syndicaux.
    • d) Rappelant l’importance qu’il attache au droit des travailleurs d’élire librement leurs représentants sans intervention des autorités publiques, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger le décret no 97/2012.
    • e) Le comité s’attend de manière générale à ce que les dispositions de la nouvelle Constitution, telle que modifiée par le référendum qui s’est tenu les 14 et 15 janvier 2014, ne soient pas appliquées de façon à restreindre l’exercice légitime de la liberté d’expression, de réunion ou d’association.
    • f) Dans la mesure où l’Egypte a ratifié les conventions nos 87 et 98, le comité s’attend à ce que le gouvernement fasse parvenir des informations détaillées et fournisse copie de la loi sur les syndicats et la protection du droit syndical et de la loi sur l’organisation des manifestations à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations.
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