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- 872. La plainte figure dans une communication de la Fédération des travailleurs du bâtiment, du secteur informel et du secteur général (FKUI) du 18 juillet 2007.
- 873. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications en date des 21 septembre 2007 et 31 janvier 2008.
- 874. L’Indonésie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 875. Dans une communication du 18 juillet 2007, la FKUI – une organisation affiliée à la Confédération syndicale pour la prospérité en Indonésie (KSBSI) et à l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB) – donne la chronologie des événements suivante. Le 1er mai 2007, vers 9 h 30, Sarta bin Sarim, dirigeant syndical dans la société Tambun Kusuma, s’est joint à huit personnes qui passaient devant sa société, afin d’organiser une manifestation pacifique pour célébrer la Journée internationale du travail à Tangerang City. L’organisation plaignante explique que, en Indonésie, depuis la réforme politique de 1998 et la ratification de la convention no 87, tous les syndicats demandent que le 1er mai soit reconnu comme étant la Journée nationale du travail et un jour férié. Ce jour-là, des manifestations ont été organisées non seulement à Tangerang City, mais dans toutes les provinces d’Indonésie et elles ont été suivies par des milliers de travailleurs.
- 876. A 10 heures, le groupe est passé devant la société Sinar Makmu Integra (SMI). Après avoir garé sa motocyclette à l’extérieur de la société, Sarta bin Sarim est entré seul par la grille ouverte, en demandant à la sécurité si les travailleurs avaient ou non la permission de quitter le travail le 1er mai. Après que la question a été posée au chef de l’entrepôt et au responsable des ressources humaines de la société, permission a été donnée aux travailleurs de cesser le travail ce jour-là. A 10 h 30, tous les travailleurs de SMI ont cessé le travail et au moins dix d’entre eux se sont joints à la manifestation. Sarta bin Sarim a quitté la manifestation et est retourné dans sa société une dizaine de minutes avant de rentrer ensuite chez lui. Pendant ce temps, le groupe a poursuivi sa manifestation pacifique à travers Tangerang. Au bout de quelque temps, la police est intervenue pour disperser la manifestation, arrêtant cinq travailleurs de la société SMI, à savoir Didit Fulmarizai, Arsudin bin Anwar, Rahmadi Tugimo et deux autres.
- 877. A 17 heures le même jour, Sarta bin Sarim a été arrêté à son domicile par la police de Kabupaten Tangerang sans aucun mandat d’arrêt. La police l’a emmené à la prison de la police de Tiga Raksa à Kabupaten Tangerang. Là, Sarta bin Sarim a été battu au point de vomir du sang.
- 878. Le 2 mai à 11 heures, la police a arrêté chez eux cinq autres travailleurs de la société SMI qui s’étaient joints à la manifestation, à savoir MM. Parsono bin Seto Yuwono, Suwarno bin Sunarso, Asep Saefudin bin Masturodin, Sandi Gibran bin Martana et Heri Puranto bin Dwijo Santoso. Après avoir fait des dépositions à la police, ces cinq travailleurs ont été relâchés quelques jours plus tard et ils ne sont pas retournés travailler à la société SMI.
- 879. Le 4 mai, Sarta bin Sarim a été transféré de la prison de Tiga Raksa à la police de zone de la prison de Tangerang. Le 7 mai, sa famille a envoyé une lettre demandant sa libération conditionnelle. La police de zone de Tangerang a rejeté cette demande. Le vendredi 11 mai 2007, la FKUI-SBSI s’est rendue à la police de zone de Tangerang pour tenter d’obtenir de son chef des éclaircissements sur les raisons de la détention de Sarta bin Sarim et pour demander sa libération conditionnelle. Le chef de la police de zone de Tangerang a refusé d’expliquer les raisons exactes de la détention de Sarta bin Sarim, informant seulement le syndicat qu’il encourait six ans de prison aux termes de l’article 160 du Code pénal pour «incitation» contre l’autorité et un an de prison aux termes de l’article 335 du Code pénal sur les «actes déplaisants». L’organisation plaignante ajoute que ledit article 160 sur l’«incitation» a été adopté au XIXe siècle à l’époque coloniale pour arrêter ceux qui luttaient pour l’indépendance de l’Indonésie, y compris le père fondateur et premier Président indonésien, M. Soekarno, en 1945 et, en 1996, le premier président du SBSI, M. Muchtar Pakpahan. Cet article a servi à de nombreuses reprises à emprisonner des militants syndicaux et des droits de l’homme. Quant à l’article 335 sur les «actes déplaisants», connu pour sa «flexibilité», il a été dernièrement utilisé par le gouvernement pour mettre en prison pour une brève période des militants syndicaux et des droits de l’homme, de manière à les intimider. Si un(e) dirigeant(e) syndical(e) est déclaré(e) coupable aux termes de ces articles, l’employeur peut le/la licencier sans indemnité de licenciement ou sans suivre la procédure normale, sur la base des articles 158 et 160 de la loi sur la main-d’œuvre no 13 de 2003. Ainsi, selon l’organisation plaignante, le gouvernement utilise fréquemment ces dispositions pour s’assurer que les dirigeants syndicaux auront des difficultés à trouver un autre emploi et seront effectivement exclus du monde du travail et de la société. L’organisation plaignante ajoute que, contrairement au droit dont dispose toute personne en état d’arrestation, la police de zone de Tangerang n’a pas remis son rapport d’enquête à Sarta bin Sarim ou à son avocat.
- 880. Le lundi 14 mai 2007, environ 200 membres de la FKUI-SBSI ont organisé une manifestation devant la police de zone de Tangerang. Le lundi après-midi, sans préavis, la police a envoyé Sarta bin Sarim à la prison pour mineurs de Tangerang pour des raisons de sécurité. Là, Sarta bin Sarim a une fois encore été victime de sévices et de mauvais traitements. Le chef de la prison a reconnu que, bien que la prison ait une capacité d’accueil de 800 prisonniers, elle en abritait 3 700. Sarta bin Sarim était détenu dans une salle où se trouvaient 300 prisonniers, qui ne pouvaient même pas s’allonger pour dormir faute de place. On lui a rasé la tête et il devait verser de l’argent aux gardiens et à d’autres prisonniers chaque fois qu’il recevait une visite – il devait franchir six grilles et payer autour de 2 à 3 euros à chaque grille. Chaque personne souhaitant lui rendre visite devait lui donner au moins 14 euros, faute de quoi il aurait été battu à chaque grille à franchir pour retourner dans sa cellule. Le 16 mai 2007, environ 800 personnes de la FKUI et de la KSBSI se sont regroupées pour manifester devant la police de zone de Tangerang en exigeant la libération de Sarta bin Sarim.
- 881. Le 21 mai 2007, la police de Tangerang a demandé au tribunal de prolonger la détention de Sarta bin Sarim du 22 mai au 30 juin 2007. Selon les organisations plaignantes, cela signifiait que la police ne disposait pas encore de preuves suffisantes pour porter le cas de Sarta bin Sarim devant le tribunal. Entre-temps, le 23 mai 2007, le conseil de la FKUI s’est réuni avec la Commission nationale indonésienne des droits de l’homme qui a expliqué qu’elle allait alerter la police de zone et la prison pour mineurs de Tangerang au sujet des sévices infligés à Sarta bin Sarim. Le jeudi 24 mai 2007, quelque 800 membres de la FKUI-SBSI de Djakarta et de Tangerang ont pris part à une manifestation devant la police régionale de Djakarta.
- 882. Le 11 juin 2007, la première audience sur le cas de Sarta bin Sarim s’est tenue au tribunal de Tangerang. Sarta bin Sarim n’a obtenu du procureur une copie du rapport de l’enquête de police que le matin du 10 juin 2007, et il s’agissait seulement d’une partie du rapport portant sur les accusations relevant uniquement de l’article 335 et non sur celles relevant de l’article 160. Le reste du document a été remis une fois l’audience du tribunal levée, sur l’insistance de la partie de Sarta bin Sarim.
- 883. Selon l’organisation plaignante, le gouvernement n’a rien fait pour régler ce problème, en dépit des lettres de protestation et de l’intervention en urgence de l’OIT sur cette question.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 884. Dans une communication en date du 21 septembre 2007, le gouvernement indique que M. Sarta bin Sarim a été libéré le 1er août 2007 sur la base de la décision prise par le tribunal d’instance. La KSBSI a toutefois interjeté appel auprès de la Haute Cour au niveau provincial de Banten. Le gouvernement ajoute qu’il transmettra en temps opportun les pièces relatives à sa libération.
- 885. Dans sa communication en date du 31 janvier 2008, le gouvernement indique que M. Sarta bin Sarim est agent de la sécurité à la société Tambun Kusuma (PT Tambun Kusuma). Cette société est située dans la zone industrielle de Jatake, Tangerang City, Indonésie. Ce dernier est aussi le dirigeant de la Fédération des travailleurs du bâtiment, du secteur informel et du secteur général du Syndicat pour la prospérité en Indonésie (FKUI-SBSI).
- 886. Le gouvernement ajoute que le 1er mai 2007, aux environs de 10 h 30, M. Sarta bin Sarim s’est rendu en motocyclette avec son groupe (environ 50 personnes) à la société Tambun Kusuma (PT Tambun Kusuma), située dans la zone industrielle de Jatake de Tangerang City. Il avait l’intention de convaincre les travailleurs d’arrêter de travailler pour rejoindre la célébration de la Journée internationale du travail, conformément à la cinquième résolution de la Confédération syndicale pour la prospérité en Indonésie (KSBSI) et aux instructions du bureau exécutif du Syndicat pour la prospérité en Indonésie (DPP DEN-KSBSI). Dans le même temps, certains membres du groupe demeurés derrière la barrière de la PT SMI faisaient continuellement du bruit avec leurs motocyclettes. Après avoir ordonné aux travailleurs de la PT SMI d’arrêter le travail, M. Sarta bin Sarim, suivi de travailleurs de la PT SMI (Sugito bin Kawi Harjo, Parsono, Suwarno, Asep Saefudin et Sandi Gibran), a quitté les locaux de la PT SMI.
- 887. Le gouvernement indique que, compte tenu de ses actes qui ont dérangé l’environnement de travail et causé des grosses pertes à la société, le bureau de police du secteur de Curug, Tangerang City, a maintenu M. Sarta bin Sarim et son groupe en détention. Après la procédure d’examen, le cas a été transmis au bureau de police de Tangerang le 3 mai 2007. A cause de ses actes, M. Sarta bin Sarim est passible d’une peine d’emprisonnement d’une année maximum aux termes de l’article 335(1) du Code pénal. Ce dernier a été arrêté par la police le 2 mai 2007. Le 10 mai 2007, un responsable du DPP DEN-KSBSI, Muchtar Pakpahan, est arrivé et a demandé la libération de M. Sarta bin Sarim. Le 24 mai 2007, Rekson Silabin et des membres de la KSBSI ont manifesté en faveur de la libération de M. Sarta bin Sarim. Ce dernier était accompagné de son avocat lors du procès.
- 888. Enfin, le gouvernement indique que, le 30 juillet 2007, la Cour du district de Tangerang a jugé que M. Sarta bin Sarim était coupable de «conduite déplaisante» et l’a condamné à trois mois d’emprisonnement. La cour a ordonné que les trois mois de détention préventive soient pris en compte dans l’exécution de la sentence. En conséquence, le défendeur a été relâché. La cour a également ordonné qu’une pièce à conviction (une motocyclette) soit rendue à la PT Tambun Kusuma et condamné le défendeur à supporter les frais de justice de 1 000 roupies. Le gouvernement joint copie de la décision no 978/PID.B/2007/PN de la Cour du district de Tangerang.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 889. Le comité rappelle que le présent cas concerne de graves allégations de violations de droits de l’homme fondamentaux pendant l’arrestation et la détention d’un dirigeant syndical, Sarta bin Sarim (arrestation sans mandat judiciaire pour des activités syndicales normales; détention préventive prolongée par la police dans des conditions indignes; sévices infligés pendant la détention; refus de l’informer des chefs d’accusation; obstacles aux communications avec son avocat et sa famille; refus de libération conditionnelle par la police et non par une cour de justice) et par la suite d’éventuelles conséquences négatives (licenciement) dans le cas où il serait déclaré coupable des accusations qui pèsent contre lui («incitation» et «actes déplaisants» aux termes respectivement des articles 160 et 335 du Code pénal).
- 890. Le comité note que, dans sa réponse, le gouvernement indique que M. Sarta bin Sarim a été condamné à une peine de trois mois d’emprisonnement pour «actes déplaisants» (ou «conduite déplaisante» selon le gouvernement) car, le 1er mai 2007 à 10 h 30, ce dernier a rejoint la société PT SMI avec l’intention de persuader les travailleurs de cette société de cesser le travail pour rejoindre la célébration de la Journée internationale du travail. Cet acte fait suite à la cinquième résolution de la Confédération syndicale pour la prospérité en Indonésie (KSBSI) et aux instructions du bureau exécutif du Syndicat pour la prospérité en Indonésie (DPP DEN-KSBSI). Le comité note que, selon le gouvernement, M. Sarta bin Sarim et environ 50 autres personnes ont manifesté bruyamment avec leurs motocyclettes à l’extérieur des locaux de la société et, après avoir ordonné aux travailleurs de cesser le travail, il a quitté les locaux de la société accompagné de cinq travailleurs de la société (Sugito bin Kawi Harjo, Parsono, Suwarno, Asep Saefudin et Sandi Gibran). Enfin, le gouvernement indique que le 30 juillet 2007 la Cour du district de Tangerang a jugé M. Sarta bin Sarim coupable d’«actes déplaisants» (ou «conduite déplaisante») et l’a condamné à trois mois d’emprisonnement. La cour a ordonné la prise en compte de la détention préventive effectuée dans l’exécution de la sentence. En conséquence de quoi, le défendeur a été relâché le 1er août 2007.
- 891. Compte tenu des allégations et de la réponse du gouvernement, le comité note avec regret que M. Sarta bin Sarim a été arrêté et maintenu en détention préventive pendant trois mois en raison de sa participation à une manifestation pacifique à l’occasion de la Journée internationale du travail. A cet égard, le comité rappelle que les mesures privatives de liberté prises à l’encontre de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes impliquent un grave risque d’ingérence dans les activités syndicales et, lorsqu’elles obéissent à des motifs syndicaux, constituent une violation des principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 65.] Le droit d’organiser des réunions publiques et des cortèges à l’occasion du 1er mai constitue un aspect important des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 136.] Le comité observe par ailleurs, avec regret, que le gouvernement ne fournit aucune réponse aux allégations selon lesquelles M. Sarta bin Sarim a été arrêté sans mandat judiciaire. Le comité souligne que l’arrestation et la détention de syndicalistes, sans que leur soit imputé un délit, ou sans qu’il existe un mandat judiciaire, constituent une grave violation des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 69.] Les gouvernements devraient prendre des dispositions afin que des instructions appropriées soient données pour prévenir les risques que comportent, pour les activités syndicales, de telles arrestations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 70.] Le comité prie instamment le gouvernement de donner les instructions appropriées pour empêcher le risque que des syndicalistes soient arrêtés par la police pour des activités syndicales normales telles que, par exemple, des cortèges pacifiques du 1er mai et, qui plus est, en l’absence de tout mandat judiciaire. Le comité demande à être tenu informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- 892. Le comité note par ailleurs que le gouvernement n’a fourni aucune réponse aux allégations selon lesquelles M. Sarta bin Sarim a été placé en détention préventive pendant trois mois (du 1er mai au 1er août 2007) dans des conditions indignes, a subi des sévices pendant sa détention, est demeuré quarante jours sans être informé des accusations qui pesaient contre lui (du 1er mai au 10 juin 2007, soit la veille de l’audience du tribunal, et encore n’a-t-il été informé de l’intégralité des chefs d’accusation qu’après cette audience), a rencontré des obstacles pour communiquer avec son avocat et avec sa famille, et s’est vu à deux reprises refuser sa libération conditionnelle par la police (et non par une cour de justice). Le comité rappelle que les mesures de détention préventive doivent être limitées dans le temps à de très brèves périodes et uniquement destinées à faciliter le déroulement d’une enquête judiciaire. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 78.] Qui plus est, la détention préventive doit être entourée d’un ensemble de garanties et de limites: 1) qui assurent en particulier que la détention ne soit pas prolongée au-delà de ce qui est strictement nécessaire et ne s’accompagne pas de mesures d’intimidation; 2) qui évitent qu’elle soit détournée de ses fins et qui excluent en particulier les tortures et les mauvais traitements, et qui assurent que la détention ne comporte pas de situation déficiente en matière d’hygiène, de représailles inutiles ou d’insuffisance dans les relations des détenus avec leurs défenseurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 80.] Le comité insiste une nouvelle fois sur l’importance des principes selon lesquels tout individu arrêté devra être informé, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation et recevra notification, dans le plus court délai, de l’accusation portée contre lui. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 99.] Les syndicalistes détenus doivent, à l’instar des autres personnes, bénéficier d’une procédure judiciaire régulière et avoir le droit à une bonne administration de la justice, à savoir notamment être informés des accusations qui pèsent contre eux, disposer du temps nécessaire à la préparation de leur défense, communiquer sans entrave avec le conseil de leur choix et être jugés sans retard par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 102.]
- 893. Tout en se félicitant de la libération de M. Sarta bin Sarim, le comité considère que cette décision ne résout en rien les dommages qu’il a pu subir ni les raisons de sa détention préventive, qui devront être clarifiés de manière à empêcher tout recours à ces mesures à l’avenir. Le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de graves violations des droits de l’homme commises à l’encontre de M. Sarta bin Sarim (arrestation sans mandat judiciaire pour des activités syndicales normales; détention préventive prolongée par la police dans des conditions indignes; sévices pendant la détention; refus de l’informer des chefs d’accusation; obstacles aux communications avec son avocat et sa famille; refus de libération conditionnelle par la police et non par une cour de justice) et, si les allégations s’avèrent exactes, de prendre les mesures nécessaires pour dédommager M. Sarta bin Sarim de tout préjudice subi et de punir les responsables de manière à empêcher la répétition de tels actes. Le comité demande à être tenu informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- 894. Le comité note que, selon les allégations, M. Sarta bin Sarim encourt six ans d’emprisonnement aux termes de l’article 160 du Code pénal sur l’«incitation» et un an d’emprisonnement aux termes de l’article 335 sur les «actes déplaisants» (le gouvernement ne se réfère qu’à ce dernier point). Le comité note avec un profond regret que le gouvernement ne fournit pas de réponse aux allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles ces dispositions «flexibles», notamment celles de l’article 335, ont été utilisées ces derniers temps à de nombreuses reprises pour emprisonner des militants syndicaux et des militants des droits de l’homme. Dès qu’ils sont déclarés coupables, les dirigeants syndicaux risquent des conséquences négatives et, en particulier, celle de perdre leur emploi, sur la base des articles 158 et 160 de la loi sur la main-d’œuvre no 13 de 2003. Selon l’organisation plaignante, ces dispositions sont utilisées pour s’assurer que les dirigeants syndicaux courent un risque de marginalisation et d’exclusion sociale qui, ajouté au traitement brutal dont ils sont menacés pendant leur détention, peut les intimider et leur faire abandonner leurs activités syndicales.
- 895. A cet égard, le comité rappelle que, si des personnes menant des activités syndicales ou exerçant des fonctions syndicales ne peuvent prétendre à l’immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire, les activités syndicales ne devraient pas en elles-mêmes servir de prétexte aux pouvoirs publics pour arrêter ou détenir arbitrairement des syndicalistes. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 72.] Qui plus est, l’un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d’une protection adéquate contre tous les actes de discrimination antisyndicale se rapportant à leur emploi. Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour abroger ou modifier les articles 160 et 335 du Code pénal relatifs à l’«incitation» et aux «actes déplaisants», de manière à garantir que ces dispositions ne puissent pas servir abusivement de prétexte à l’arrestation et à la détention arbitraires de syndicalistes. Le comité demande à être tenu informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- 896. Enfin, le comité note que la libération de M. Sarta bin Sarim était due au fait qu’il ait purgé la peine imposée par le tribunal qui l’a jugé coupable d’«actes déplaisants». Ceci a fait l’objet d’un appel interjeté par la KSBSI. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’appel interjeté par la KSBSI à l’encontre de cette décision et de lui communiquer le texte de la décision rendue en appel.
- 897. Le comité demande également au gouvernement de fournir des informations sur la situation professionnelle et syndicale actuelle de M. Sarta bin Sarim.
- 898. Le comité rappelle au gouvernement que l’assistance technique du Bureau est à sa disposition s’il le souhaite.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 899. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité demande au Conseil d’administration d’approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de graves violations des droits de l’homme commises à l’encontre de M. Sarta bin Sarim (arrestation sans mandat judiciaire pour des activités syndicales normales; détention préventive prolongée par la police dans des conditions indignes; sévices pendant la détention; refus de l’informer des chefs d’accusation; obstacles aux communications avec son avocat et sa famille; refus de libération conditionnelle par la police et non par une cour de justice) et, si les allégations s’avèrent exactes, de prendre les mesures nécessaires pour dédommager M. Sarta bin Sarim de tout préjudice subi et de punir les responsables de manière à empêcher la répétition de tels actes. Le comité demande à être tenu informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- b) Le comité, rappelant que si des personnes menant des activités syndicales ou exerçant des fonctions syndicales ne peuvent prétendre à l’immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire, les activités syndicales ne devraient pas en elles-mêmes servir de prétexte aux pouvoirs publics pour arrêter ou détenir arbitrairement des syndicalistes, prie ainsi instamment le gouvernement de:
- i) donner les instructions appropriées pour empêcher le risque que des syndicalistes soient arrêtés par la police pour des activités syndicales normales telles que, par exemple, des cortèges pacifiques du 1er mai et, qui plus est, en l’absence de tout mandat judiciaire;
- ii) abroger ou modifier les articles 160 et 335 du Code pénal relatifs à l’«incitation» et aux «actes déplaisants», de manière à garantir que ces dispositions ne puissent pas servir abusivement de prétexte à l’arrestation et à la détention arbitraires de syndicalistes;
- iii) prendre toutes les mesures nécessaires pour former la police en ce qui concerne son action dans le contexte des relations professionnelles.
- Le comité demande à être tenu informé de l’évolution de la situation à cet égard.
- c) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’appel interjeté par la KSBSI contre la décision de la Cour du district de Tangerang qui a jugé M. Sarta bin Sarim coupable d’«actes déplaisants», et de lui communiquer le texte de la décision rendue en appel.
- d) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur la situation professionnelle et syndicale actuelle de M. Sarta bin Sarim.
- e) Le comité rappelle au gouvernement que l’assistance technique du Bureau est à sa disposition s’il le souhaite.