776. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de juin 2010. [Voir 357e rapport, paragr. 591-628.] Par une communication datée du 11 mars 2011, l’Internationale de l’éducation (IE) a fourni des renseignements supplémentaires sur ce cas.
- 776. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de juin 2010. [Voir 357e rapport, paragr. 591-628.] Par une communication datée du 11 mars 2011, l’Internationale de l’éducation (IE) a fourni des renseignements supplémentaires sur ce cas.
- 777. Le comité a été contraint d’ajourner l’examen du cas à deux reprises. [Voir 358e et 359e rapports, paragr. 7 et 5, respectivement.] A sa réunion de mai-juin 2011, le comité a lancé un appel pressant au gouvernement, indiquant que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d’administration (1972), il pourrait présenter un rapport sur le fond de l’affaire à sa prochaine réunion, même si les informations ou observations demandées n’étaient pas reçues à temps. [Voir 360e rapport, paragr. 5.] A ce jour, le gouvernement n’a envoyé aucune information.
- 778. L’Ethiopie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 779. A sa réunion de juin 2010, le comité a jugé nécessaire d’attirer l’attention du Conseil d’administration sur ce cas en raison de l’extrême gravité et de l’urgence des problèmes posés et a formulé les recommandations suivantes [voir 357e rapport, paragr. 4 et 628]:
- a) Le comité prie le gouvernement de fournir toutes les informations pertinentes concernant l’application, dans la pratique, de la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance.
- b) Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les autorités compétentes enregistrent la NTA immédiatement, afin que les enseignants puissent exercer pleinement, et sans plus tarder, leur droit de constituer des organisations pour le renforcement et la défense de leurs intérêts professionnels. Il prie instamment le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
- c) Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les droits de liberté syndicale des fonctionnaires, y compris les enseignants du secteur public, sont pleinement garantis. Il prie le gouvernement de le tenir informé de tout progrès réalisé à cet égard.
- d) Le comité prie instamment le gouvernement de diligenter rapidement une enquête indépendante, menée par une personne recueillant la confiance de toutes les parties concernées, sur les allégations de torture et de mauvais traitements subis par les personnes détenues et, s’il est constaté que les personnes en question ont subi des mauvais traitements, de prendre les mesures voulues pour punir les responsables et assurer une indemnisation appropriée pour tout dommage subi. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard et de lui communiquer les résultats de l’enquête, ainsi que ceux de toute autre investigation menée sur ces allégations.
- e) Le comité prie instamment au gouvernement de diligenter une enquête, indépendante et approfondie, sur les allégations de harcèlement, en septembre-novembre 2007, contre Mmes Berhanework Zewdie, Aregash Abu, Elfinesh Demissie et M. Wasihun Melese, tous membres du Conseil exécutif national de l’organisation plaignante, et contre plus de 50 de ses militants syndicaux les plus actifs, afin de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et de prévenir la répétition d’actes similaires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- f) Le comité prie le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour garantir le paiement du salaire échu de Mme Demissie, ainsi que le versement d’indemnités appropriées ou l’adoption de pénalités suffisamment dissuasives, pour sanctionner tout nouvel acte de discrimination antisyndicale. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- g) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations sur les allégations de refus de réintégration de MM. Woldie Dana et Berhanu Aby-Debissa et de répondre sur le fond aux allégations concernant le licenciement des deux dirigeants syndicaux Nikodimos Aramdie et Wondewosen Beyene.
- h) Le comité prie le gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de harcèlement de sept syndicalistes et de fournir une réponse détaillée quant à son résultat.
- i) Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
- j) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.
B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes
B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes
- 780. Dans sa communication datée du 11 mars 2011, l’IE fournit des renseignements supplémentaires concernant l’obstruction au processus d’enregistrement de l’Association nationale des enseignants (NTA) en tant qu’association professionnelle, l’absence d’enquêtes indépendantes et approfondies sur les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires et la torture, les pressions exercées pour fermer les bureaux régionaux du syndicat et l’adoption de nouvelles lois et réglementations privant les enseignants du secteur public de leurs droits syndicaux.
- 781. L’IE rappelle en particulier qu’après le refus du ministère de la Justice d’enregistrer la NTA, l’organisation a saisi la Cour fédérale de première instance d’Addis-Abeba. La cour a classé l’affaire, estimant que le ministère de la Justice ne devrait pas être poursuivi parce qu’il n’était plus chargé des enregistrements et que la NTA devait soumettre sa demande à une agence étatique qui devait être établie en vertu de la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance, récemment promulguée. Le 19 avril 2010, la Haute Cour fédérale a entériné cette décision.
- 782. L’IE indique que le 2 février 2010, les représentants de la NTA ont présenté une nouvelle demande d’enregistrement auprès de la nouvelle agence étatique, l’Agence des sociétés caritatives et de bienfaisance (CSA). Toutefois, la demande d’enregistrement a été verbalement refusée par la CSA. L’agence a invoqué des motifs similaires à ceux fournis par le ministère de la Justice en décembre 2008, à savoir un manque de soutien du ministère de l’Education et de l’Association des enseignants éthiopiens (ETA) et une ressemblance entre les noms ETA et NTA.
- 783. Les représentants de la NTA ont demandé à la CSA de fournir sa réponse par écrit afin qu’ils puissent faire un compte-rendu aux membres fondateurs de la NTA et déposer une demande auprès du conseil de la CSA. La CSA a refusé la demande de la NTA, violant ainsi l’article 3.3 du Règlement no 168/2009 sur les sociétés caritatives et de bienfaisance, selon lequel «Lorsque l’agence refuse la demande d’enregistrement, elle doit en informer le demandeur par écrit en exposant les motifs du refus.» En outre, selon l’IE, au moment d’accuser réception de la demande de la NTA de recevoir une réponse officielle, un agent de la CSA chargé du dossier a demandé aux représentants de la NTA de lui donner plus de temps pour que l’affaire soit réglée par voie de négociation plutôt que par correspondance écrite, ce qui pourrait prendre plus de temps et causer des désagréments aux deux parties. Il a également retardé l’audience, se plaignant d’être trop occupé pour consacrer du temps à la NTA.
- 784. Le 16 mars 2010, la NTA a déposé une requête auprès du directeur général de la CSA, mais ce dernier n’a fait que renvoyer le dossier au même agent, qui à son tour a indiqué qu’il était en train de consulter les fonctionnaires du ministère de l’Education, les dirigeants de la nouvelle ETA et les directeurs et enseignants d’école afin de savoir s’ils soutiendraient la création d’une deuxième association nationale d’enseignants. Il a indiqué de manière verbale que la réponse était négative.
- 785. Le 7 mai 2010, les représentants de la NTA ont demandé par écrit au directeur général de la CSA de prendre les mesures suivantes: 1) ordonner l’enregistrement de la NTA et émettre un certificat d’enregistrement sans autre délai; ou 2) informer la NTA par écrit du refus de l’enregistrer; et 3) fournir à la NTA l’adresse du Conseil de la CSA afin que la NTA puisse présenter des recours. A cet égard, l’IE explique que, selon l’article 68.2 de la Proclamation no 621/2009, «Lorsque l’agence n’émet pas de certificat de personnalité juridique ou ne fait pas savoir qu’elle ne l’émettra pas, le demandeur peut présenter une demande auprès du conseil dans un délai de 15 jours à compter de la date indiquée à l’alinéa.» Sans une réponse écrite de l’agence, la NTA ne pouvait exercer ses droits au titre de cette disposition.
- 786. L’IE indique par ailleurs que, le 28 août 2010, les membres fondateurs de la NTA et 15 délégués des enseignants régionaux ont convenu de suspendre provisoirement les tentatives d’enregistrement jusqu’à ce qu’un nouveau gouvernement soit formé. Toutefois, les élections n’ont rien changé à la composition de la CSA. Par conséquent, le 12 octobre 2010, la NTA a repris ses démarches et, après avoir obtenu l’adresse du conseil de la CSA, s’est rendue le 20 octobre 2010 au conseil afin de présenter une lettre de recours. L’organisation plaignante allègue que lorsque les représentants de la NTA ont demandé à la secrétaire adjointe du directeur général, qui a accepté la lettre de recours, de signer une copie de la lettre et d’y apposer le cachet du conseil afin que le document puisse servir de récépissé de dépôt, la secrétaire adjointe a répondu favorablement. Mais au moment où elle était en train de signer et de viser la lettre, elle a reçu un appel qui serait provenu de l’intérieur de l’agence, à la suite duquel elle a effacé le cachet apposé et a remis aux représentants de la NTA la lettre avec le cachet annulé, sans aucune explication. La NTA croit que la secrétaire adjointe a été intimidée.
- 787. L’IE indique qu’après des tentatives infructueuses de rencontrer les membres de la CSA les représentants de la NTA ont été informés, le 24 décembre 2010, que l’affaire de la NTA faisait l’objet d’une enquête menée par le bureau de l’ombudsman et qu’ils devaient en attendre les résultats. Les agents de la CSA ont informé les représentants de la NTA qu’ils n’étaient pas habilités à traiter les affaires faisant l’objet d’une enquête de l’ombudsman ou de la Commission des droits de l’homme, et que la NTA pourrait obtenir une réponse écrite de la CSA conforme aux résultats de l’enquête et aux recommandations que formulerait le bureau de l’ombudsman. Les agents de la CSA ont averti les représentants de la NTA de ne pas se rendre au bureau de la CSA à moins d’y avoir été invité par un appel téléphonique ou une lettre officielle. La NTA est cependant convaincue qu’il s’agit d’une nouvelle manœuvre dilatoire visant à empêcher la NTA de porter l’affaire en justice, étant donné que tous les recours prévus par la loi n’ont pas encore été épuisés. Les représentants de la NTA sont persuadés que cette manœuvre vise à épuiser la NTA et à pousser les enseignants à abandonner progressivement leur lutte en vue de l’établissement d’un syndicat indépendant.
- 788. L’IE indique également que, conformément à l’une des exigences en matière d’enregistrement, la NTA avait ouvert des bureaux temporaires dans certaines régions sélectionnées, en tenant compte du fait qu’il devrait y avoir au moins un bureau dans chacune des régions dont étaient originaires les membres fondateurs de la NTA. Les bureaux sont par conséquent situés dans les régions suivantes: Addis-Abeba, qui tient lieu de siège, Hawassa, Arba-Minch, Ambo, Harar, Dire-Dewa, Baher-Dar, Gonder, Korem et Alemata. Certains bureaux sont situés dans des propriétés privées louées ou au domicile de syndicalistes très engagés.
- 789. L’IE allègue que les représentants de la NTA font face à deux principaux problèmes dans ce domaine. Premièrement, ils sont sous la surveillance des agents de sécurité du gouvernement. L’IE affirme que le harcèlement des agents de sécurité et des autorités gouvernementales est en partie accentué en raison de la demande présentée par les nouveaux dirigeants de l’ETA. Leur objectif est d’intimider les enseignants de manière à ce qu’ils mettent fin à leurs relations avec la NTA et, par la suite, de les forcer à renoncer à leur revendication de longue date, à savoir la création d’un syndicat indépendant. Deuxièmement, les propriétaires demandent qu’une avance d’au moins six mois de loyer soit versée et augmentent de temps en temps le loyer, des conditions que la NTA n’a pas les moyens de remplir, tant qu’elle n’a pas été enregistrée comme syndicat d’enseignants. De plus, certains propriétaires ont été indirectement forcés par des agents de sécurité à demander à la NTA de présenter une licence indiquant à quelle fin elle utilise les locaux. La NTA est par conséquent souvent obligée de déménager ou même de fermer certains de ses bureaux. Elle est aussi obligée de le faire parce qu’il a été conseillé à ses représentants d’être vigilants car, sous prétexte de fouiller les bureaux ne détenant pas de licence, les agents de sécurité et la police pourraient se servir de la Proclamation no 621/2009 – Enregistrement et réglementation des sociétés caritatives et de bienfaisance et de la Proclamation no 652/2009 relative à la lutte contre le terrorisme comme base légale pour accuser les représentants de la NTA de violer la législation en vigueur; ils pourraient également faire irruption dans les bureaux de la NTA pour chercher des preuves leur permettant de justifier leur action et confisquer des documents et du matériel de bureau, comme ils l’ont fait à plusieurs reprises à l’égard de l’ancienne ETA. Par ailleurs, les enseignants membres de la NTA, en particulier ses membres fondateurs et ses militants les plus actifs, craignent que les agents de sécurité, en collaboration avec la police, ne les accusent de crime organisé, comme cela est déjà arrivé à plusieurs collègues membres de l’ancienne ETA.
- 790. L’IE allègue en outre que, malgré des demandes réitérées du Comité de la liberté syndicale, aucune enquête indépendante sur les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires et la torture pendant la détention n’a été menée par le gouvernement. L’IE mentionne particulièrement le meurtre, le 8 mai 1997, de M. Assefa Maru, secrétaire général adjoint de l’ancienne ETA et membre du comité exécutif de Conseil éthiopien des droits de l’homme (cas no 1888), ainsi que la torture et les mauvais traitements infligés pendant leur détention aux syndicalistes suivants: Meqcha Mengistu, Anteneh Getnet, Tilahun Ayalew, Bernahu Aba-Debissa, Woldie Dana et Kassahun Kebede. L’IE fournit les renseignements suivants au sujet de ces syndicalistes:
- – Meqcha Mengistu, président de l’ancienne branche de l’ETA et coordonnateur du Programme conjoint IE/ETA Education pour tous et VIH/sida EFAIDS, n’avait pas encore été réintégré à son poste depuis sa libération;
- – Anteneh Getnet, Tilahun Ayalew et Berhanu Aba-Debissa sont tous portés disparus. Leurs familles respectives n’ont jamais obtenu d’indemnisation pour manque de moyens de survie pendant leur détention;
- – Woldie Dana avait été réintégré à son poste; et
- – Kassahun Kebede s’est enfui du pays peu de temps après sa libération en juillet 2007.
- 791. L’IE allègue également que Kinfe Abate, Wondewosen Beyene et Nikodimos Aramdie, membres de l’ancienne ETA et licenciés en raison de leurs activités syndicales, ainsi que Elfinesh Demissie, suspendu pendant 36 jours, n’avaient pas encore été payés ni reçu d’indemnisation, en dépit de la recommandation du comité à cet égard.
- 792. L’IE indique que le gouvernement n’a pas encore entamé la modification de la Proclamation no 377/2004 du 26 février 2004 sur la fonction publique et de la Proclamation sur le travail, comme cela lui a été demandé par la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations afin de garantir le droit des fonctionnaires, y compris des enseignants des écoles publiques, de constituer des syndicats et d’y adhérer.
- 793. L’IE indique également qu’en plus de la Proclamation no 621/2009 sur l’enregistrement et la réglementation des sociétés caritatives et de bienfaisance, d’autres textes législatifs ont été votés, qui violent encore un peu plus les droits prévus par les conventions de l’OIT ratifiées par l’Ethiopie. Il s’agit du Règlement du Conseil des ministres no 168/2009 sur les sociétés caritatives et de bienfaisance visant à renforcer la Proclamation no 621/2009; de la Proclamation no 652/2009 relative à la lutte contre le terrorisme, qui a donné un pouvoir absolu à la police et aux agents de sécurité, leur permettant de prendre n’importe quelle mesure à l’encontre d’une personne ou d’une organisation soupçonnée de terrorisme. En conséquence, beaucoup d’enseignants s’étaient distanciés des activités syndicales, craignant que celles-ci ne soient perçues comme étant politiques ou touchant aux affaires gouvernementales. Enfin, l’IE allègue que, selon la Publication pour cadres supérieurs du parti au pouvoir, un «livre d’orientation politique publié par le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (FDRPE)», aucun syndicat ni aucune organisation civile indépendants ne sont autorisés à exercer des activités en Ethiopie.
- 794. L’IE conclut en alléguant que le gouvernement éthiopien n’a pris aucune mesure pour garantir le droit des fonctionnaires, y compris des enseignants du secteur public, de défendre leurs intérêts professionnels au moyen de négociations collectives neutres.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 795. Le comité regrette profondément que, malgré le temps écoulé depuis le dernier examen de ce cas par le comité, le gouvernement n’ait fourni aucune nouvelle information ni envoyé ses observations concernant les allégations, bien qu’il ait été invité à plusieurs reprises, y compris au moyen d’un appel pressant, à présenter ses commentaires et observations sur ce cas. Le comité prie donc instamment le gouvernement de faire preuve de plus de coopération à l’avenir.
- 796. Dans ces conditions, et conformément à la règle de procédure applicable [voir 127e rapport, paragr. 17, approuvé par le Conseil d’administration à sa 184e session (1972)], le comité se voit dans l’obligation de présenter un rapport sur le fond du cas sans pouvoir tenir compte des informations qu’il espérait recevoir du gouvernement.
- 797. Le comité rappelle au gouvernement que l’ensemble de la procédure instituée par l’Organisation internationale du Travail pour l’examen des allégations de violation de la liberté syndicale vise à assurer le respect de cette liberté en droit comme en fait. Le comité demeure convaincu que, si la procédure protège les gouvernements contre les accusations déraisonnables, ceux-ci doivent à leur tour reconnaître l’importance de présenter, en vue d’un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre. [Voir premier rapport du comité, paragr. 31.]
- 798. Le comité rappelle d’abord que le présent cas fait référence aux allégations d’exclusion des enseignants du secteur public, en vertu de la législation nationale, du droit de s’affilier à un syndicat; de refus d’enregistrement de la NTA (précédemment ETA) et d’ingérence dans son administration et ses activités; et de harcèlement, d’arrestation, de détention et de mauvais traitement d’enseignants en raison de leur affiliation d’abord à l’ETA, et maintenant à la NTA. Le comité rappelle en outre qu’il a examiné depuis novembre 1997 des allégations très graves de violations de la liberté syndicale, parmi lesquelles l’ingérence du gouvernement dans l’administration et le fonctionnement de l’ETA, le meurtre, l’arrestation, la détention, le harcèlement, le licenciement et la mutation de membres et de dirigeants de l’ETA. [Voir cas no 1888.]
- 799. Le comité prend note des renseignements fournis par l’IE. S’agissant de l’enregistrement de la NTA (recommandation b)), le comité rappelle que le gouvernement a déjà évoqué la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance récemment promulguée qui établit la CSA, une autorité d’enregistrement, et a indiqué à cet égard que la NTA pouvait soumettre sa demande d’enregistrement à la CSA, et qu’en cas de refus la NTA avait le droit de se pourvoir devant les tribunaux. Le comité note avec une profonde préoccupation l’information fournie par l’IE selon laquelle, malgré de nombreuses tentatives dans ce sens auprès de la CSA et de son conseil, la NTA n’est toujours pas enregistrée. Le comité note que, en l’absence d’un document officiel déclarant que l’enregistrement est refusé et indiquant les motifs du refus, la NTA ne peut se pourvoir devant les tribunaux. Le comité déplore profondément que, trois ans après en avoir fait la demande, la NTA n’est toujours pas enregistrée. Il rappelle que le droit à une reconnaissance par un enregistrement officiel est un aspect essentiel du droit syndical, en ce sens que c’est la première mesure que les organisations de travailleurs ou d’employeurs doivent prendre pour pouvoir fonctionner efficacement et représenter leurs membres convenablement. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 295.] Le comité attire de nouveau l’attention du gouvernement sur sa responsabilité à cet égard, à savoir d’assurer que ce droit est respecté en droit comme en pratique. Tout en notant que la question est actuellement examinée par l’ombudsman, le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les autorités compétentes enregistrent la NTA immédiatement, afin que les enseignants puissent exercer pleinement, et sans plus tarder, leur droit de constituer des organisations pour le renforcement et la défense de leurs intérêts professionnels. Il prie instamment le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- 800. Concernant la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance (recommandation a)), le comité note que, dans son rapport à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, le gouvernement a indiqué que la loi a été promulguée après une vaste consultation publique de toutes les parties prenantes et est entrée en vigueur après l’expiration du délai accordé aux divers organismes, sociétés et associations de bienfaisance pour se conformer à ses exigences. Selon le gouvernement, la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance vise à renforcer la participation des organisations de la société civile au développement du pays; elle définit et réglemente clairement les organismes et sociétés de bienfaisance et établit les garanties nécessaires et une procédure régulière dans le cadre des efforts de démocratisation; et aucun syndicat ou association ne s’est plaint d’être lésé ou entravé dans ses activités par cette nouvelle loi. Le comité note que, dans ses commentaires de 2010, la commission d’experts a noté avec préoccupation que la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance instaure une surveillance continuelle et étroite des organisations établies sur sa base et donne aux autorités gouvernementales de vastes pouvoirs discrétionnaires qui lui permettent d’intervenir dans l’enregistrement, l’administration interne et la dissolution des organisations concernées qui relèvent de sa compétence, lesquelles semblent inclure les fonctionnaires, y compris les enseignants, et que certaines dispositions de la Proclamation posent des problèmes de compatibilité avec la convention. Le comité prie donc instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour garantir que la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance ne s’applique pas aux organisations de travailleurs et d’employeurs et que ces organisations bénéficient d’une reconnaissance efficace au moyen d’une législation qui soit entièrement conforme à la convention. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes les mesures prises à cet effet.
- 801. Le comité note également que l’IE indique que le Règlement du Conseil des ministres no 168/2009 sur les sociétés caritatives et de bienfaisance visant à renforcer la Proclamation no 621/2009; la Proclamation no 652/2009 relative à la lutte contre le terrorisme; ainsi que la Publication pour cadres supérieurs du parti au pouvoir, selon laquelle aucun syndicat ni aucune organisation civile indépendants ne sont autorisés à exercer des activités en Ethiopie, violent encore un peu plus les droits prévus par les conventions de l’OIT ratifiées par l’Ethiopie. Le comité se dit préoccupé par l’allégation selon laquelle la Proclamation relative à la lutte contre le terrorisme a donné un pouvoir absolu à la police et aux agents de sécurité, leur permettant de prendre n’importe quelle mesure à l’encontre d’une personne ou d’une organisation soupçonnée de terrorisme. Le comité note par ailleurs que l’IE allègue que le gouvernement n’a pas encore entamé la modification de la Proclamation no 377/2004 du 26 février 2004 sur la fonction publique et de la Proclamation sur le travail, comme cela lui a été demandé par la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations afin de garantir le droit des fonctionnaires, y compris des enseignants des écoles publiques, de constituer des syndicats et d’y adhérer. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir tous les renseignements pertinents sur l’application dans la pratique du Règlement du Conseil des ministres visant à renforcer la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance, ainsi que sur la Proclamation no 652/2009 relative à la lutte contre le terrorisme. Il prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que la législation existante en général et la Proclamation relative à la lutte contre le terrorisme en particulier ne sont pas utilisées dans la pratique pour intimider et harceler les syndicalistes. Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les droits de liberté syndicale des fonctionnaires, y compris les enseignants du secteur public, sont pleinement garantis. Il prie instamment le gouvernement de le tenir informé sans délai de toutes les mesures prises à cet effet.
- 802. Le comité note avec un profond regret l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle aucune enquête indépendante sur les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires et la torture subie par les personnes détenues n’a été menée par le gouvernement (recommandation e)). Par conséquent, le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de diligenter sans délai une enquête indépendante, menée par une personne recueillant la confiance de toutes les parties concernées, sur les allégations de torture et de mauvais traitements subis par les personnes détenues et, s’il est constaté que les personnes en question ont subi des mauvais traitements, de prendre les mesures voulues pour punir les responsables et assurer une indemnisation appropriée pour tout dommage subi. Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé sans délai des mesures prises à cet égard et de communiquer les résultats de l’enquête, ainsi que ceux de toute autre enquête menée sur ces allégations.
- 803. En ce qui concerne les cas de licenciement et de suspension (recommandations f) et g)), le comité note avec préoccupation l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle, à l’exception de Woldie Dana, qui a été réintégré à son poste, d’autres syndicalistes ne l’ont pas été. L’IE allègue en particulier que Kinfe Abate, Wonderwosen Beyene et Nikodimos Aramdie n’ont pas été réintégrés et n’ont reçu aucune indemnisation. A cet égard, le comité rappelle que, en ce qui concerne le licenciement en 1995 de Kinfe Abate, il avait déjà demandé à l’organisation plaignante de fournir des informations pertinentes et détaillées sur le sujet. [Voir 353e rapport, paragr. 1010.] Le comité invite à nouveau l’organisation plaignante à fournir des informations supplémentaires à ce propos. Le comité note par ailleurs que, selon l’IE, Berhanu Aby-Debissa est porté disparu. Dans ces circonstances, le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de fournir des informations sans délai sur l’allégation relative au refus de réintégration de Nikodimos Aramdie et Wondewosen Beyene.
- 804. Notant avec regret que, selon l’IE, les salaires non perçus par Elfinesh Demissie pendant les 36 jours de sa suspension illégale ne lui ont pas encore été versés, le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour garantir le paiement du salaire échu de Mme Demissie, ainsi que le versement d’indemnités appropriées ou l’adoption de pénalités suffisamment dissuasives, pour sanctionner tout nouvel acte de discrimination antisyndicale. Le comité prie instamment le gouvernement de le tenir informé sans délai à cet égard.
- 805. Le comité note avec regret les nouvelles allégations de harcèlement présentées par l’IE, à savoir la surveillance des activités de la NTA et l’intimidation de ses membres. Le comité prie à nouveau le gouvernement de lui faire part de ses observations à ce sujet. Le comité prie aussi à nouveau instamment le gouvernement de diligenter une enquête, indépendante et approfondie, sur les allégations de harcèlement, en septembre-novembre 2007, contre Mmes Berhanework Zewdie, Aregash Abu, Elfinesh Demissie et M. Wasihun Melese, tous membres du Conseil exécutif national de l’organisation plaignante, et contre plus de 50 de ses militants syndicaux les plus actifs, afin de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et de prévenir la répétition d’actes similaires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- 806. Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de harcèlement de sept syndicalistes survenu entre février et août 2008 et de fournir une réponse détaillée quant à son résultat.
- 807. Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 808. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité regrette profondément que, malgré le temps écoulé depuis le dernier examen de ce cas par le comité, le gouvernement n’ait fourni aucune nouvelle information ni envoyé ses observations concernant les allégations, bien qu’il ait été invité à plusieurs reprises, y compris au moyen d’un appel pressant, à présenter ses commentaires et observations sur ce cas. Le comité prie donc instamment le gouvernement de faire preuve de plus de coopération à l’avenir.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les autorités compétentes enregistrent la NTA immédiatement, afin que les enseignants puissent exercer pleinement, et sans plus tarder, leur droit de constituer des organisations pour le renforcement et la défense de leurs intérêts professionnels. Il prie instamment le gouvernement de le tenir informé des progrès réalisés à cet égard.
- c) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour garantir que la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance ne s’applique pas aux organisations de travailleurs et d’employeurs et que ces organisations bénéficient d’une reconnaissance réelle au moyen d’une législation qui soit entièrement conforme à la convention. Il prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes les mesures prises à cet effet.
- d) Le comité prie instamment le gouvernement de fournir tous les renseignements pertinents sur l’application dans la pratique du Règlement du Conseil des ministres visant à renforcer la Proclamation sur les sociétés caritatives et de bienfaisance, ainsi que sur la Proclamation no 652/2009 relative à la lutte contre le terrorisme. Il prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que la législation existante en général et la Proclamation relative à la lutte contre le terrorisme en particulier ne sont pas utilisées dans la pratique pour intimider et harceler les syndicalistes et de le tenir informé de toutes les mesures prises à cet effet.
- e) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les droits de liberté syndicale des fonctionnaires, y compris les enseignants du secteur public, sont pleinement garantis et de le tenir informé de tout progrès réalisé à cet égard.
- f) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de diligenter rapidement une enquête indépendante, menée par une personne recueillant la confiance de toutes les parties concernées, sur les allégations de torture et de mauvais traitements subis par les personnes détenues et, s’il est constaté que les personnes en question ont subi des mauvais traitements, de prendre les mesures voulues pour punir les responsables et assurer une indemnisation appropriée pour tout dommage subi. Il prie instamment le gouvernement de le tenir informé sans délai des mesures prises à cet égard et de communiquer les résultats de l’enquête, ainsi que ceux de toute autre enquête menée sur ces allégations.
- g) Le comité invite à nouveau l’organisation plaignante à lui fournir des informations sur le licenciement de Kinfe Abate en 1995.
- h) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de fournir sans délai des informations concernant l’allégation relative au refus de réintégration de Nikodimos Aramdie et Wondewosen Beyene.
- i) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour garantir le paiement du salaire échu de Mme Demissie, ainsi que le versement d’indemnités appropriées ou l’adoption de pénalités suffisamment dissuasives, pour sanctionner tout nouvel acte de discrimination antisyndicale. Il prie instamment le gouvernement de le tenir informé sans délai à cet égard.
- j) Le comité prie le gouvernement de faire part de ses observations concernant les nouvelles allégations de harcèlement des militants de la NTA présentées par l’IE.
- k) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de diligenter une enquête, indépendante et approfondie, sur les allégations de harcèlement, en septembre-novembre 2007, contre Mmes Berhanework Zewdie, Aregash Abu, Elfinesh Demissie et M. Wasihun Melese, tous membres du Conseil exécutif national de l’organisation plaignante, et contre plus de 50 de ses militants syndicaux les plus actifs, afin de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et de prévenir la répétition d’actes similaires. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- l) Le comité prie de nouveau instamment le gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de harcèlement de sept syndicalistes survenu entre février et août 2008 et de fournir une réponse détaillée quant à son résultat.
- m) Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
- n) Le comité attire l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.