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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration - Rapport No. 357, Juin 2010

Cas no 2382 (Cameroun) - Date de la plainte: 10-AOÛT -04 - Clos

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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration

Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
  1. 17. Lors de son dernier examen du cas à sa réunion de juin 2009 [voir 354e rapport, paragr. 1934], le comité avait réitéré la nécessité, pour le gouvernement, de diligenter sans délai une enquête sur les conditions entourant la garde à vue de M. Joseph Ze, secrétaire général du Syndicat national unitaire des instituteurs et des professeurs des écoles normales (SNUIPEN), le 16 avril 2004, compte tenu des allégations graves d’actes de torture et d’extorsion de fonds dont aurait été victime M. Ze durant sa détention. Le comité avait aussi invité le gouvernement ou l’organisation plaignante à le tenir informé de tout recours éventuel devant un tribunal compétent concernant la régularité de la convocation du deuxième congrès du SNUIPEN le 4 août 2004, ainsi que des jugements éventuellement prononcés sur cette affaire.
  2. 18. Dans une communication en date du 2 septembre 2009, l’organisation plaignante dénonce le fait que le gouvernement continue d’ignorer les recommandations du comité et rappelle que le salaire de M. Ze demeure suspendu pour le huitième mois consécutif et que cette situation à des conséquences fâcheuses dans sa vie privée, en particulier en veille de rentrée scolaire.
  3. 19. Dans une communication en date du 12 octobre 2009, le gouvernement a fourni quelques remarques. En premier lieu, le gouvernement considère qu’il ne lui appartient pas de diligenter une enquête entourant l’interpellation et la garde à vue de M. Ze, car les faits relèvent du droit commun. Le gouvernement rappelle que M. Ze faisait l’objet d’une plainte pour malversation financière et que son interpellation se déroulait dans le cadre d’une enquête sous l’empire du Code d’instruction criminelle (depuis abrogé par le nouveau Code de procédure pénale). Le gouvernement signale que, s’il y a eu effectivement abus d’autorité et de torture, la victime a la possibilité de former un recours en justice. Enfin, rappelant qu’en l’état actuel de la législation pénale nul ne peut faire l’objet d’une garde à vue sans être entendu sur procès-verbal, le gouvernement indique qu’il existerait bien un dossier d’enquête préliminaire que M. Ze semble ignorer pour les besoins de la cause.
  4. 20. S’agissant de la suspension du salaire de M. Ze, le gouvernement indique qu’elle sera interrompue sur action de l’intéressé lorsque celui-ci rejoindra son poste de service en faisant attester par l’autorité compétente sa présence effective, engagera la procédure de reprise en solde, et sollicitera formellement et régulièrement une décharge de service dans la mesure où son mandat syndical électif n’entraîne pas ipso facto ladite décharge.
  5. 21. Par ailleurs, le gouvernement réitère qu’il s’est toujours abstenu de toute ingérence dans les activités syndicales et considère que les griefs qui lui sont reprochés relèvent de la mauvaise foi de dirigeants en mal de légitimité interne. Enfin, le gouvernement indique qu’il fera parvenir au comité toute décision de justice concernant le cas.
  6. 22. Dans une communication en date du 24 février 2010, le gouvernement indique ne disposer d’aucun fait nouveau concernant le cas.
  7. 23. Le comité prend note des informations communiquées par l’organisation plaignante et des éléments de réponse du gouvernement. Le comité rappelle que le présent cas – qu’il examine depuis 2005 – concerne l’arrestation, la détention et l’interrogatoire du secrétaire général du Syndicat national unitaire des instituteurs et des professeurs des écoles normales (SNUIPEN), M. Joseph Ze, ainsi que l’ingérence des autorités dans un conflit interne à un syndicat.
  8. 24. S’agissant des recommandations qu’il formule depuis 2005 relatives à une enquête diligentée par le secrétariat d’Etat à la Défense sur les faits entourant l’interpellation et la garde à vue de M. Ze à partir du 16 avril 2004, le comité regrette une nouvelle fois l’absence d’information de la part du gouvernement à cet égard. Le comité relève avec préoccupation que le gouvernement indique dorénavant qu’il ne lui appartient pas de diligenter une telle enquête car les faits relèvent du droit commun, que, s’il y a eu effectivement abus d’autorité et de torture, la victime a la possibilité de former un recours en justice, et qu’en l’état actuel de la législation pénale il existerait bien un dossier d’enquête préliminaire que l’organisation plaignante semble ignorer pour les besoins de la cause. Le comité souhaite rappeler à cet égard que, lors d’un examen précédent du cas, il avait constaté que M. Ze a été interpellé par la gendarmerie, placé en garde à vue et soumis à un interrogatoire sommaire et musclé, sans que la justice ait eu l’occasion de se prononcer sur la véracité des accusations portées contre lui. Le gouvernement avait d’ailleurs admis que ce qu’il qualifiait de «procédure de recouvrement» des fonds avait entraîné des gardes à vue abusives de M. Ze. Le comité avait aussi noté que l’un des officiers concernés par la garde à vue (nommément le capitaine Mengnfo Faï) avait été suspendu dans l’attente des conclusions d’une enquête menée par le secrétariat d’Etat à la Défense sur les conditions entourant la garde à vue de M. Ze. Enfin, le comité, observant que certains officiers de gendarmerie avaient pris fait et cause pour la faction dissidente du SNUIPEN et, suite aux pressions exercées lors de l’interrogatoire et de la détention, avaient forcé M. Ze à libérer des fonds appartenant au syndicat pour les remettre aux dissidents, avait indiqué que cela s’apparentait à une saisie sans jugement et à une confiscation sans droit de fonds syndicaux au profit d’une tierce partie. [Voir 338e rapport, paragr. 528, 530 et 531.]
  9. 25. Le comité rappelle qu’il demande depuis lors les résultats de l’enquête menée par le secrétariat d’Etat à la Défense car, compte tenu des allégations graves d’actes de torture et d’extorsion de fonds dont aurait été victime M. Ze, cette enquête permettrait de déterminer véritablement les faits et les responsabilités, de sanctionner les coupables, et surtout de prévenir la répétition de tels actes. Or le comité s’étonne de la dernière réponse laconique du gouvernement à cet égard, et rappelle qu’il a lui-même précédemment reconnu que des abus avaient été commis. A cet égard, le comité souligne que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. Lorsque se sont produites des atteintes à l’intégrité physique ou morale, le comité a considéré qu’une enquête judiciaire indépendante devrait être effectuée sans retard, car cette méthode est particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. L’absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d’insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 44, 50 et 52.] En conséquence, le comité réitère une nouvelle fois sa demande de recevoir les résultats de toute enquête menée par le secrétariat d’Etat à la Défense sur les conditions entourant la garde à vue de M. Ze en avril 2004 et, dans la mesure où une telle enquête n’aurait pas été menée, le comité s’attend à ce que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour qu’une enquête soit diligentée sur les allégations de l’organisation plaignante à cet égard, notamment partant de pièces qu’il mentionne comme le dossier d’enquête préliminaire entourant la garde à vue.
  10. 26. Le comité note avec regret que le gouvernement ne fournit aucune information sur les allégations de l’organisation plaignante relatives aux interpellations de M. Ze par la police judiciaire du Centre en mars 2007 et mars 2008 et à sa détention du 17 au 24 mars 2008 sans qu’il ait été entendu. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir ses observations à cet égard.
  11. 27. S’agissant des allégations concernant la suspension de salaire de M. Ze au motif d’une absence irrégulière de son poste de travail, le comité rappelle qu’il avait demandé au gouvernement de prendre l’initiative d’examiner sans délai, en fonction des faits présentés, la possibilité d’octroi d’une décharge de service à M. Ze pour exercice d’un mandat syndical, au besoin en explicitant à l’intéressé les modalités d’obtention d’une telle décharge. Le comité note que dans sa réponse le gouvernement se borne à indiquer que la suspension de salaire sera interrompue sur action de l’intéressé lorsque celui-ci rejoindra son poste de service en faisant attester par l’autorité compétente sa présence effective, engagera la procédure de reprise en solde, et sollicitera formellement et régulièrement une décharge de service dans la mesure où son mandat syndical électif n’entraîne pas ipso facto ladite décharge. Le comité demande au gouvernement et à l’organisation plaignante d’indiquer si M. Ze a rejoint son poste de travail et satisfait aux modalités d’obtention de la décharge syndicale et, le cas échéant, si la suspension de salaire a été levée et si la décharge syndicale lui a été accordée.
  12. 28. Le comité a pris note de la déclaration du gouvernement selon laquelle il s’est toujours abstenu de toute ingérence dans les activités syndicales et les griefs qui lui sont reprochés relèvent de la mauvaise foi de dirigeants en mal de légitimité interne. Rappelant l’historique du présent cas dans lequel il a eu à noter que certains officiers de gendarmerie avaient pris fait et cause pour une faction du SNUIPEN, de même que des allégations d’un parti pris manifeste du gouvernement en faveur d’une faction du SNUIPEN devant les médias, le comité veut croire que le gouvernement observera, comme il l’affirme, une attitude de totale neutralité dans les différends au sein du mouvement syndical, et notamment au sein du SNUIPEN.
  13. 29. Enfin, le comité invite une nouvelle fois le gouvernement et l’organisation plaignante à le tenir informé de tout recours devant les juridictions compétentes qui permettrait de clarifier la situation en ce qui concerne la représentation légitime du SNUIPEN, de toute décision de justice définitive à cet égard ou de tout autre moyen engagé par les parties concernées pour régler le conflit.
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