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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 334, Juin 2004

Cas no 2316 (Fidji) - Date de la plainte: 08-JANV.-04 - Clos

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  1. 491. Dans une communication datée du 8 janvier 2004, l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) a présenté une plainte au nom de son organisation affiliée, le Syndicat national des salariés des industries de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme (NUHCTIE).
  2. 492. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications datées du 12 février et du 7 avril 2004.
  3. 493. Fidji a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 494. Dans sa communication datée du 8 janvier 2004, l’UITA a déclaré, au nom de son organisation affiliée, le NUHCTIE, que ce syndicat avait déposé une demande de reconnaissance volontaire à la direction du site touristique Turtle Island, le 7 novembre 2002. Compte tenu de l’absence de réaction de la direction, le syndicat a présenté un mois plus tard une demande de reconnaissance obligatoire au ministère du Travail, des Relations professionnelles et de la Productivité. Le 22 janvier 2003, le gouvernement a pris une ordonnance de reconnaissance obligatoire à l’encontre du site touristique Turtle Island avec effet rétroactif au 7 novembre 2002. La direction a refusé à plusieurs reprises d’appliquer cette ordonnance, et le site touristique Turtle Island a été accusé le 28 mai 2003 de non-respect de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire, et de violation des articles 12(1) et 12(3) de la loi sur les syndicats (reconnaissance), 1998.
  2. 495. L’organisation plaignante allègue qu’en dépit du refus persistant de la direction de reconnaître effectivement le NUHCTIE le ministère a décidé de mettre un terme à ces poursuites en novembre 2003 (cas no 56/03, ministère du Travail, des Relations professionnelles contre site touristique Turtle Island).
  3. 496. L’organisation plaignante ajoute que la situation actuelle doit être examinée en tenant compte des tentatives réitérées de l’employeur d’empêcher les travailleurs de s’affilier au syndicat, des cas de licenciements injustifiés des membres du syndicat, et de la création d’une association du personnel. Selon l’organisation plaignante, l’employeur a fait usage à plusieurs reprises de manoeuvres dilatoires pour éviter de devoir rencontrer les dirigeants syndicaux et de reconnaître le NUHCTIE, tandis que le ministère du Travail, des Relations professionnelles et de la Productivité n’a pas su contrer ces mesures antisyndicales en violation de la convention no 98. L’organisation plaignante allègue en outre que l’employeur a licencié à plusieurs reprises un certain nombre de travailleurs qui ont refusé de renoncer à leur affiliation au syndicat, et qu’en dépit des efforts du NUHCTIE les autorités compétentes ne sont pas intervenues pour s’opposer à cet état de fait. Enfin, l’organisation plaignante allègue que l’employeur a encouragé publiquement et à plusieurs reprises la création d’une association du personnel. En particulier, il est allégué que, par une lettre datée du 10 décembre 2002 et signée par le directeur général de Turtle Island, la direction a encouragé la création d’une association du personnel et exprimé le voeu que d’autres employeurs «suivent l’exemple et créent des associations de personnel dont nous estimons qu’elles sont beaucoup plus efficaces...». Là encore, selon l’organisation plaignante, le gouvernement n’est pas intervenu, en violation de l’article 2 de la convention no 98.
  4. 497. Le plaignant demande que cette plainte soit examinée dans le but de faire appliquer l’ordonnance de reconnaissance obligatoire.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 498. Dans ses communications datées du 12 février et du 7 avril 2004, le gouvernement fournit la chronologie des faits survenus dans ce cas. Le 7 novembre 2002, le Syndicat national des salariés des industries de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme (NUHCTIE) a déposé une demande de reconnaissance volontaire. Le 7 décembre 2002, n’ayant pas obtenu satisfaction, le syndicat a demandé qu’une ordonnance de reconnaissance obligatoire soit prise. Le 21 janvier 2003, les données de l’employeur et celles du syndicat ont été vérifiées pour établir le pourcentage des affiliations. Le 22 janvier 2003, l’ordonnance de reconnaissance obligatoire a été prise avec effet à compter du 7 novembre 2002.
  2. 499. Le gouvernement ajoute que, le 28 mars 2003, le NUHCTIE a présenté une plainte au motif que la direction avait refusé de lui permettre de rencontrer des travailleurs sur l’île. L’employeur a été mis en accusation le 20 mai 2003. Cette plainte (et les chefs d’accusation) portait sur le refus de la direction d’autoriser le NUHCTIE à rencontrer les membres du syndicat sur l’île. Cependant, ce refus ne constituait pas une violation de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire ou de l’article 12 de la loi sur les syndicats (reconnaissance), 1998. De plus, il n’était pas démontré que l’employeur avait refusé de discuter du cahier de revendications avec le NUHCTIE.
  3. 500. Le gouvernement ajoute que l’audience avait d’abord été fixée au 20 juin 2003 et que des ajournements successifs ont eu lieu jusqu’à ce que la plainte soit officiellement retirée le 7 novembre 2003, au motif que le NUHCTIE avait fait de fausses allégations. Le 11 novembre 2003, le syndicat a exprimé sa préoccupation concernant le retrait de l’affaire. Le 20 novembre 2003, le syndicat a envoyé un rappel au ministère du Travail, des Relations professionnelles et de la Productivité par lequel il mentionnait également qu’il recommandait à l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA), section Asie et Pacifique, de soumettre ce cas à l’UITA Genève. Le 24 novembre 2003, le ministère a écrit au syndicat pour l’informer des circonstances dans lesquelles il avait retiré les chefs d’accusation portés à l’encontre du site touristique Turtle Island.
  4. 501. Le gouvernement ajoute que, dans le pays, la protection des travailleurs est garantie par la Constitution de 1997 et la législation du travail, et que toute atteinte à cette législation, ou sa non-application par l’une des parties, est dûment examinée par le ministère du Travail, des Relations professionnelles et de la Productivité. Le gouvernement ajoute qu’en dépit de cette situation le NUHCTIE n’a pas encore soumis de plainte formelle au ministère, concernant la non-application, par l’employeur, de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire. Le gouvernement suggère de conseiller au syndicat de faire rapport sur tout défaut d’application au ministère, qui prendra les mesures correctives appropriées.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 502. Le comité note que ce cas porte sur des allégations selon lesquelles le gouvernement n’a pas fait appliquer une ordonnance de reconnaissance obligatoire du Syndicat national des salariés des industries de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme (NUHCTIE) en qualité de syndicat majoritaire dans le site touristique Turtle Island, et qu’il n’a pas contré les tentatives de l’employeur d’éviter de reconnaître le NUHCTIE par des manoeuvres dilatoires, et les efforts visant à empêcher les travailleurs de s’affilier au syndicat, par des actes d’ingérence et des licenciements antisyndicaux.
  2. 503. Le comité note que le 7 novembre 2002 le NUHCTIE a demandé à la direction du site touristique Turtle Island de le reconnaître volontairement. Compte tenu de l’absence de réaction de la direction, le syndicat s’est adressé au ministère du Travail, des Relations professionnelles et de la Productivité pour obtenir une reconnaissance obligatoire. Après avoir fait les vérifications nécessaires, le ministère a pris, le 22 janvier 2003, une ordonnance de reconnaissance obligatoire à l’encontre du site touristique Turtle Island avec effet rétroactif au 7 novembre 2002. Le 28 mars 2003, face au refus persistant de la direction de reconnaître le syndicat, le NUHCTIE a porté plainte, pour non-application de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire en violation des articles 12 (1) et 12 (3) de la loi sur les syndicats (reconnaissance) de 1998 (qui prévoient que, lorsqu’un employeur ne respecte pas les dispositions d’une ordonnance de reconnaissance obligatoire, il commet un délit passible d’une amende). L’employeur a été inculpé le 28 mai 2003. Cependant, la plainte a été formellement retirée le 7 novembre 2003 au motif que le NUHCTIE avait fait de fausses allégations. En particulier, selon le gouvernement, la plainte déposée par le NUHCTIE et les chefs d’accusation portaient sur le refus de la direction de permettre aux représentants du syndicat de pénétrer dans le site et de rencontrer les membres du syndicat. Toutefois, ce refus ne constituait pas une violation de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire ou de l’article 12 de la loi sur les syndicats (reconnaissance) de 1998. De plus, il n’était pas démontré que l’employeur avait refusé de discuter du cahier de revendications avec le NUHCTIE. Selon le gouvernement, le NUHCTIE n’a toujours pas déposé de plainte formelle concernant la non-application, par l’employeur, de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire.
  3. 504. Le comité observe que la demande de reconnaissance du NUHCTIE en qualité de syndicat majoritaire du site touristique Turtle Island remonte à novembre 2002 et qu’une ordonnance de reconnaissance obligatoire a été prise à cet égard. Le comité rappelle que les autorités compétentes devraient, dans tous les cas, être habilitées à procéder à une vérification objective de toute demande d’un syndicat prétendant représenter la majorité des travailleurs d’une entreprise, pour autant qu’une telle demande semble plausible. Si le syndicat intéressé se révèle grouper la majorité des travailleurs, les autorités devraient prendre des mesures de conciliation appropriées en vue d’obtenir la reconnaissance, par l’employeur, de ce syndicat aux fins de la négociation collective. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 824.] Par conséquent, le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires en matière d’inspection, de conciliation et d’exécution, conformément à la législation nationale, pour assurer l’application de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire, et de le tenir informé à cet égard.
  4. 505. Le comité note également que, selon le gouvernement, le refus par la direction d’accorder aux représentants du syndicat un accès au lieu de travail pour rencontrer les membres du syndicat ne constitue pas une violation de l’ordonnance de reconnaissance obligatoire, ni une violation de l’article 12 de la loi sur les syndicats (reconnaissance) de 1998. Le comité rappelle que, conformément aux paragraphes 9 (3), 12, 13 et 17 (1) de la recommandation (nº 143) concernant les représentants des travailleurs, 1971, il est recommandé que les facilités devant être accordées aux représentants des travailleurs comprennent l’accès aux lieux de travail ainsi qu’à la direction de l’entreprise lorsque cela est nécessaire pour le bon exercice de leurs fonctions. Les représentants syndicaux qui ne sont pas employés eux-mêmes dans une entreprise, mais dont le syndicat compte des membres dans le personnel de celle-ci, devraient avoir accès à celle-ci. L’octroi de telles facilités ne devrait pas entraver le fonctionnement efficace de l’entreprise intéressée. Dans un cas où s’est posée la question du droit des dirigeants syndicaux de pénétrer dans une zone industrielle de libre-échange, le comité a attiré l’attention du gouvernement sur le principe selon lequel les représentants des travailleurs devraient disposer des facilités nécessaires à l’exercice de leurs fonctions, y compris le droit de pénétrer dans les lieux de travail. Le gouvernement doit garantir aux représentants syndicaux l’accès aux lieux de travail en respectant pleinement les droits de propriété et les droits de la direction, afin que les syndicats puissent communiquer avec les travailleurs dans le but de les informer des avantages que la syndicalisation peut présenter pour eux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 957 et 954.] Le comité demande donc au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer que le NUHCTIE dispose des facilités nécessaires au bon exercice de ses fonctions, y compris l’accès au site touristique Turtle Island et la possibilité de rencontrer la direction et les membres du syndicat, sans entraver le fonctionnement efficace de l’entreprise. Le comité demande d’être tenu informé à cet égard.
  5. 506. Le comité note que le gouvernement n’a pas répondu aux allégations selon lesquelles il n’a pas contré les tentatives répétées de l’employeur d’empêcher les travailleurs de s’affilier au syndicat, telles que des licenciements, des actes d’ingérence antisyndicaux et la promotion d’une association du personnel. Le comité insiste sur le fait que nul ne devrait subir de préjudice dans son emploi en raison de son affiliation syndicale, même si le syndicat dont il s’agit n’est pas reconnu par l’employeur comme représentant la majorité des travailleurs intéressés, et qu’il importe que tous les actes de discrimination en matière d’emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 693 et 696.] Le comité rappelle également que l’article 2 de la convention no 98 établit l’indépendance totale des organisations de travailleurs vis-à-vis des employeurs dans l’exercice de leurs activités. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 759.] Il prend note des commentaires de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations ainsi que de la discussion qui a eu lieu au sein de la Commission de la Conférence sur l’application des normes en 2002, sur la base desquelles il a été à plusieurs reprises demandé au gouvernement d’adopter les mesures nécessaires, y compris des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives, pour garantir une protection adéquate des organisations de travailleurs contre les actes d’ingérence des employeurs ou de leurs organisations. [Voir rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations à la Conférence internationale du Travail, 92e session, 2004, et rapport de la Commission de l’application des normes, Compte rendu provisoire no 28, deuxième partie, Conférence internationale du Travail, 90e session, 2002.] Le comité déplore que le gouvernement n’ait entrepris aucune action à ce jour malgré ses demandes répétées et exhorte le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires, incluant des mesures législatives, afin d’ouvrir une enquête et de mettre un terme à tout acte de discrimination et d’ingérence antisyndicales dans ce cas. Le comité demande à être tenu informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 507. A la lumière des conclusions qui précèdent, le comité demande au Conseil d’administration d’approuver les recommandations suivantes:
    • a) Notant que la demande de reconnaissance du Syndicat national des salariés des industries de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme (NUHCTIE) en qualité de syndicat majoritaire du site touristique Turtle Island remonte à novembre 2002, et qu’une ordonnance de reconnaissance obligatoire a été prise à cet égard, le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires en matière d’inspection, de conciliation et d’application, conformément à la législation nationale, en vue d’assurer la mise en oeuvre de l’ordonnance de reconnaissance volontaire, et de le tenir informé à cet égard.
    • b) Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que le NUHCTIE dispose des facilités nécessaires au bon exercice de ses fonctions, y compris l’accès au site touristique Turtle Island et la possibilité de rencontrer la direction et les membres du syndicat, sans entraver le fonctionnement efficace de l’entreprise. Le comité demande également à être tenu informé à cet égard.
    • c) Le comité déplore que le gouvernement n’ait entrepris aucune action à ce jour afin d’assurer la protection contre les actes d’ingérence malgré des demandes répétées et exhorte le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires, incluant des mesures législatives, pour ouvrir une enquête et mettre un terme à tout acte de discrimination et d’ingérence antisyndicales dans ce cas. Le comité demande à être tenu informé à cet égard.
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