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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 334, Juin 2004

Cas no 2271 (Uruguay) - Date de la plainte: 28-MAI -03 - Clos

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  1. 797. La présente plainte figure dans une communication du Syndicat des arts graphiques à laquelle se joint le Congrès national des travailleurs (PIT-CNT) datée du 28 mai 2003. Le Syndicat des arts graphiques a transmis des informations complémentaires par une communication datée du 1er juillet 2003.
  2. 798. Le gouvernement a transmis ses observations par une communication datée du 30 décembre 2003.
  3. 799. L’Uruguay a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 800. Dans des communications datées des 28 mai et 1er juillet 2003, le Syndicat des arts graphiques et le Congrès national des travailleurs (PIT-CNT) indiquent que, depuis 1992, tous les gouvernements, y compris le gouvernement actuel, au lieu d’encourager et de promouvoir le développement et l’utilisation de procédures de négociation volontaire de conventions collectives en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi, comme le prescrit l’article 4 de la convention no 98, ont au contraire créé des obstacles, pour la plupart insurmontables, au plein exercice du droit de négociation collective. En d’autres termes, les conventions collectives réglementant les conditions d’emploi qui s’appliquaient, en 1992, à 95 pour cent de la main-d’oeuvre salariée ne concernent plus aujourd’hui que 16 pour cent de celle-ci. Le Syndicat des arts graphiques affirme que dans le secteur des arts graphiques les dernières conventions collectives signées concernant les journaux et publications, d’une part, et les oeuvres publiques, d’autre part, remontent à 1989 et 1993, respectivement, et qu’elles sont aujourd’hui caduques.
  2. 801. Les organisations plaignantes précisent que les obstacles à la négociation collective reposent notamment sur le fait que le gouvernement n’a pas convoqué de conseils des salaires depuis 1992. Ces conseils sont des organismes tripartites composés de représentants du ministère du Travail, des chambres patronales et des organisations syndicales dans toutes les branches d’activité, à l’exception de celles de la construction, de la santé et des transports, dont le barème des salaires est fixé par l’Etat. Ces conseils sont le seul organisme permettant de négocier les salaires, les catégories d’emploi et les conditions de travail, qui doivent nécessairement s’appliquer à toutes les branches d’activité économique. En 1998, le ministère du Travail a convoqué, à la demande expresse du Syndicat des arts graphiques, l’Association des industries graphiques d’Uruguay et le Syndicat des arts graphiques aux fins de négociation. Les deux parties ont demandé au gouvernement d’homologuer l’accord auquel elles étaient parvenues afin que celui-ci puisse s’appliquer à tout le secteur. Le gouvernement a refusé, faisant ainsi échouer les négociations.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 802. Dans sa communication du 30 décembre 2003, le gouvernement présente l’historique de la négociation collective en Uruguay et décrit la situation actuelle. Le gouvernement souligne que l’Uruguay a une histoire exemplaire en matière de respect et de protection de la liberté syndicale, de négociation collective et des mouvements de grève. En 1943, la loi no 10449 instituant les conseils des salaires a été adoptée. Bien que critiqué, ce texte législatif a toutefois largement amélioré la situation des travailleurs puisqu’ils ont été encouragés à s’organiser et à adhérer à un syndicat. Les relations professionnelles ont fonctionné normalement jusqu’à l’avènement de la dictature militaire en 1973. Les libertés publiques ont été rétablies en 1985, avec le retour à la démocratie.
  2. 803. A cette époque, les conseils des salaires ont été convoqués afin de normaliser les activités syndicales et de recréer une culture de négociation collective tout en permettant au pouvoir exécutif d’exercer un contrôle sur les salaires, afin d’éviter que les augmentations salariales ne se répercutent sur le prix final des produits et services commerciaux. Le gouvernement ajoute que, lorsque les activités syndicales ont effectivement repris, et suite aux demandes formulées par différents partenaires sociaux, l’Etat s’est progressivement désengagé du domaine des négociations.
  3. 804. Le gouvernement précise que trois types de négociation collective existent en Uruguay: a) le premier, que l’on peut appeler négociation collective classique, comprend les processus bilatéraux autonomes et non réglementés auxquels participent un employeur ou un groupe d’employeurs et un syndicat; b) le système de négociation instauré au sein des conseils des salaires créés en 1943 en vertu de la loi no 10449 dont les résultats sont approuvés par arbitrage et s’appliquent, une fois homologués par le pouvoir exécutif, notamment aux entreprises non représentées dans les négociations; et c) un système mixte de négociation qui diffère sensiblement des dispositions initiales de la loi no 10449 dans la mesure où les partenaires sociaux engagent librement des négociations dans des structures autres que tripartites et soumettent ensuite au Conseil des salaires, pour approbation, l’accord issu des négociations afin qu’il s’applique aux entreprises de la branche ou du secteur d’activité concerné, même si ces entreprises ne sont pas affiliées aux organisations participant directement aux négociations. Le gouvernement indique qu’à l’heure actuelle le premier type de négociation s’applique sans aucune restriction et que, dans le cadre de ses prérogatives, il n’encourage par les deux autres types de négociation énoncés ci-dessus.
  4. 805. Pour ce qui est des allégations relatives à la baisse drastique du pourcentage de travailleurs concernés par les conventions collectives, le gouvernement indique que ce phénomène est courant dans tous les pays et qu’il est principalement dû à la diminution générale du taux d’affiliation syndicale. Par ailleurs, le gouvernement fait état d’une nouvelle tendance à la négociation collective internationale.
  5. 806. Le gouvernement indique en outre que dans le présent cas l’organisation syndicale concernée et la chambre patronale mènent librement leurs activités et agissent dans le domaine privé sans ingérence ni obstacle d’aucune sorte.
  6. 807. En dernier lieu, le gouvernement indique que, même s’il n’existe pas actuellement en Uruguay de loi spécifique en matière de négociation collective, plusieurs tentatives ont été menées certes, à ce jour, de manière infructueuse pour créer un cadre normatif relatif à la négociation collective.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 808. Le comité observe que, dans le présent cas, le Syndicat des arts graphiques et le Congrès national des travailleurs (PIT-CNT) affirment que le gouvernement n’a pas encouragé ni promu le développement de la négociation collective, ce qui s’est traduit par une diminution du nombre de travailleurs couverts par les conventions collectives, taux qui est passé de 95 pour cent en 1992 à 16 pour cent aujourd’hui. Les parties plaignantes affirment que cette situation est principalement due au fait que le gouvernement n’a pas convoqué, depuis 1992, de conseils des salaires, c’est-à-dire les organismes qui, selon une tradition instaurée par les partenaires sociaux eux-mêmes, sont chargés d’homologuer les conventions collectives signées entre syndicats et employeurs en dehors du cadre tripartite établi par les conseils, afin que ces conventions s’appliquent à tout le secteur concerné. Cette situation expliquerait pourquoi il n’existe pas de convention collective s’appliquant au secteur des arts graphiques depuis 1992 car, en dépit du fait que le Syndicat des arts graphiques et l’Association des industries graphiques d’Uruguay aient été disposés à entamer des négociations collectives, le gouvernement a refusé d’homologuer l’accord auquel les deux parties étaient parvenues, faisant ainsi échouer les négociations.
  2. 809. Le comité prend note de la réponse du gouvernement dans laquelle il présente l’historique de la négociation collective dans le pays et indique qu’il existe trois types de négociation collective: la négociation classique entre un syndicat et un employeur ou un groupe d’employeurs; la négociation établie au titre de la loi no 10449 dont les résultats sont approuvés par arbitrage qui s’appliquent, une fois homologués, par le gouvernement, notamment aux entreprises non représentées dans les négociations; et, en dernier lieu, un système mixte dans lequel les syndicats et les employeurs soumettent pour approbation au gouvernement l’accord qu’ils ont conclu afin que celui-ci s’applique à tout le secteur d’activité concerné.
  3. 810. Le comité observe que, selon le gouvernement, les parties jouissent d’une liberté totale en matière de négociation des conditions de travail. Le comité observe que le conflit dans le présent cas a trait à l’impossibilité de rendre applicables les conventions collectives signées à tout le secteur d’activité concerné en raison du refus du gouvernement d’homologuer (c’est-à-dire de décider de rendre applicable une convention collective à toute une branche d’activité) lesdites conventions. Les organisations plaignantes indiquent à titre d’exemple que, en 1998, le ministère du Travail a convoqué, à la demande expresse du Syndicat des arts graphiques, l’Association des industries graphiques d’Uruguay ainsi que le Syndicat des arts graphiques, afin qu’ils négocient un accord, mais que le gouvernement a refusé d’homologuer ledit accord, comme l’avaient demandé les parties, c’est-à-dire d’appliquer l’accord à tout le secteur concerné, ce qui a provoqué l’échec des négociations. Les organisations plaignantes soutiennent que, ce faisant, le gouvernement ne respecte pas les dispositions de l’article 4 de la convention no 98 qui fixe l’obligation «d’encourager et de promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire». Le comité note que la question spécifique de l’extension du champ d’application des conventions collectives n’est pas prévue par les conventions nos 87 et 98 mais par la recommandation no 91 sur les conventions collectives, laquelle ne prévoit toutefois pas, au sens strict, l’obligation de rendre applicables les dispositions d’une convention collective à tous les travailleurs des catégories intéressées. Néanmoins, le comité souligne que le paragraphe 5 (1) de cette recommandation dispose que «lorsqu’il apparaît approprié, compte tenu du système de conventions collectives en vigueur, des mesures à déterminer par la législation nationale et adaptées aux circonstances propres à chaque pays devraient être prises pour rendre applicables toutes ou certaines dispositions d’une convention collective à tous les employeurs et travailleurs compris dans le champ d’application professionnel et territorial de la convention».
  4. 811. Le comité note toutefois que la diminution très nette du nombre de travailleurs concernés par les conventions collectives, dont la proportion est passée de 95 pour cent en 1992 à 16 pour cent aujourd’hui, ce que ne nie pas le gouvernement. Le comité observe que, dans le cadre de l’application de la convention no 98, la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations a évoqué les observations soulevées par le PIT-CNT concernant «l’impossibilité de recourir à la négociation collective dans d’importants secteurs d’activité» et a demandé au gouvernement «d’indiquer le nombre de conventions collectives conclues, par entreprise et par branche, y compris dans le secteur public et dans l’administration publique, en précisant les secteurs et le nombre de travailleurs couverts». [Voir l’observation de la commission d’experts sur l’application de la convention no 98 pour 2003.] Dans ce contexte, le comité demande au gouvernement d’examiner avec la partie plaignante et toutes les parties concernées la situation en matière de négociation collective dans le secteur des arts graphiques et de le tenir informé de toute mesure adoptée pour promouvoir la négociation collective dans ledit secteur.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 812. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de promouvoir la négociation collective conformément à l’article 4 de la convention no 98.
    • b) Le comité demande au gouvernement d’examiner avec l’organisation plaignante et toutes les parties concernées la situation en matière de négociation collective dans le secteur des arts graphiques.
    • c) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de toute mesure adoptée pour promouvoir la négociation collective dans ce secteur.
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