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Rapport définitif - Rapport No. 332, Novembre 2003

Cas no 2235 (Pérou) - Date de la plainte: 14-OCT. -02 - Clos

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  1. 829. La plainte figure dans une communication datée du 14 octobre 2002 envoyée par la Fédération des travailleurs du pétrole du Pérou (FETRAPEP) et le Syndicat unique des travailleurs de la raffinerie de Talara de Petróleos del Perú (SUTRETPPSA). Le gouvernement a transmis ses observations par communication du 19 mars 2003.
  2. 830. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 831. Dans leur communication conjointe du 14 octobre 2002, la Fédération des travailleurs du pétrole du Pérou (FETRAPEP) et le Syndicat unique des travailleurs de la raffinerie de Talara de Petróleos del Perú (SUTRETPPSA) allèguent que, le 14 mai 2002, les travailleurs du pétrole de la raffinerie de Talara, qui appartient à l’entreprise semi-publique Petróleos del Perú, ont organisé une paralysie des activités et fait usage du droit de grève pour protester contre le processus de privatisation que le gouvernement entend poursuivre. En raison de cette grève de vingt-quatre heures, suivie par la majorité des travailleurs affiliés aux syndicats, l’administration de l’entreprise Petróleos del Perú a retenu des salaires des travailleurs, en plus de l’équivalent d’un jour d’absence du travail le 14 mai, un montant correspondant au sixième de la gratification des «fiestas patrias», c’est-à-dire un sixième de la rémunération. Selon les plaignants, il s’agit d’un abus car le montant retenu est arbitraire et disproportionné pour un jour de grève puisqu’il représente une double pénalité pour un même fait.
  2. 832. Les plaignants ajoutent qu’aux termes de la convention collective en vigueur depuis plus de vingt ans les travailleurs du pétrole de cette entreprise pétrolière ont droit à une gratification de «fiestas patrias» dans le cours de l’année et à une autre gratification de «fin d’année»; ces gratifications correspondent à une rémunération mensuelle qui doit être versée aux mois de juillet et de décembre.
  3. 833. Selon les plaignants, le 28 mai 2002, le gouvernement a promulgué la loi no 27735 au moyen de laquelle il veut réguler l’octroi des gratifications aux travailleurs du régime de l’activité privée pour les «fiestas patrias» et Noël; en date du 4 juillet 2002, il a promulgué le règlement (décret suprême no 005-2002-TR). Il s’agit des normes dont l’entreprise Petróleos del Perú s’est servie comme justification pour la retenue double et illégale de la gratification de «fiestas patrias». En effet, elle a appliqué l’article 3, alinéa 3.4, dudit règlement qui établit que la durée de service servant au calcul du montant de la gratification sera déterminée pour chaque mois civil complet effectivement travaillé de la période considérée, disposition que les plaignants remettent en question car ils estiment qu’elle est une violation flagrante des droits du travail.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 834. Dans sa communication du 19 mars 2003, le gouvernement déclare que l’octroi des gratifications de «fiestas patrias» et de Noël aux travailleurs dépendant du régime du travail du secteur privé est régi par la loi no 27735 et par le règlement de cette loi, approuvée par le décret suprême no 005-2002-TR. L’article 3.4 dudit décret no 005?2002?TR, amendé par le décret suprême no 017-2002-TR, dispose que la durée de service servant au calcul est déterminée pour chaque mois civil complet de travail effectif de la période considérée. Les jours qui ne seront pas considérés comme des jours de travail effectif seront déduits à raison d’un trentième de la fraction correspondante.
  2. 835. Au sujet des conséquences de la grève qui a été déclarée, le gouvernement indique que, conformément à l’article 77 b) de la loi no 25593, loi sur les relations collectives de travail, la grève déclarée suspend tous les effets des contrats individuels de travail, y compris l’obligation de verser la rémunération, sans porter atteinte à l’existence du lien de travail. Il s’ensuit, comme il s’agit d’une grève déclarée, c’est-à-dire d’une grève qui répond aux dispositions de l’article 73 de l’ensemble de la loi susmentionnée, qu’il y a eu une suspension totale du travail et, par conséquent, les travailleurs ne perçoivent pas de rémunération tant que la grève se poursuit.
  3. 836. Dans le cas de la paralysie des activités qui a eu lieu le 14 mai 2002 dans l’entreprise semi?publique Petróleos del Perú, les travailleurs ont organisé une suspension totale des activités, ce qui a pour conséquence la déduction de ce jour d’absence du travail ainsi que la déduction correspondante du montant des gratifications devant être versé à ces travailleurs. Quant à la déduction du montant correspondant aux gratifications de «fiestas patrias», la paralysie produite correspond à une absence injustifiée du lieu de travail et il était donc correct de procéder à cette déduction.
  4. 837. A cet égard, il convient de préciser qu’au moment où il y a eu une paralysie des activités durant vingt-quatre heures dans l’entreprise Petróleos del Perú, c’est-à-dire le 14 mai 2002, le règlement de la loi no 27735 n’avait pas encore été modifié, et l’on n’envisageait donc pas le fait que les jours non considérés comme temps de travail effectif devraient être déduits à raison d’un trentième de la fraction correspondante (comme il convient de le faire actuellement); on partait seulement du principe que la durée de service servant au calcul était déterminée par chaque mois civil complet de travail effectif durant la période correspondante.
  5. 838. C’est ainsi que, si la rémunération totale d’un travailleur était de S/. 1 500 et que si un jour ce travailleur ne se présentait pas à son lieu de travail pour une raison injustifiée, on estimait que durant ce mois le travailleur n’avait pas effectué son travail de manière intégrale et que, par conséquent, il perdait son droit de percevoir le sixième de sa gratification correspondant à ce mois. C’est pourquoi on a retenu des rémunérations des travailleurs, en plus de l’équivalent d’un jour d’absence du travail le 14 mai, le montant correspondant au sixième de la gratification de «fiestas patrias», soit un sixième de la rémunération.
  6. 839. Au jour d’aujourd’hui, une telle situation ne peut plus se présenter, étant donné que la norme la plus favorable aux travailleurs a été modifiée. L’article 3.4 du décret suprême no 005-2002-TR amendé stipule que le temps de service servant au calcul est déterminé par chaque mois civil complet de travail effectif durant la période correspondante, et que les jours qui ne sont pas considérés comme durée de travail effectif seront déduits à raison d’un trentième de la faction correspondante.
  7. 840. Quant aux jours qui ne sont pas calculés comme temps de travail effectif au sens du paragraphe précédent, il convient de préciser que l’article 2 du décret suprême no 005?2002-TR définit les situations, lorsque le lien de travail est suspendu au moment du paiement (quinzaine de juillet ou de décembre), que la loi considère exceptionnellement comme des périodes de travail effectif. Ces exceptions correspondent exclusivement aux vacances, aux congés rémunérés, aux congés ou autres autorisations établis par les normes de la sécurité sociale et qui donnent droit au versement de subsides, au congé pour accident du travail rémunéré et subventionné par la sécurité sociale, et aux circonstances qui sont considérées expressément par la loi comme temps de travail effectif.
  8. 841. A cet égard, il convient de relever que, même si la loi et son règlement ne le disent pas expressément, il faut comprendre et interpréter la norme de manière logique, à savoir que ces circonstances exceptionnelles prévues pas la loi et son règlement ne servent pas seulement à déterminer si le travailleur devra être considéré comme ayant effectivement trouvé du travail pendant les quinzaines de juillet ou de décembre (en tenant compte que durant la période en question son lien de travail peut avoir été suspendu pour une des raisons mentionnées à l’article 2 du décret suprême 005-2002-TR); ces circonstances exceptionnelles prévues servent également à déterminer le montant de la gratification, car ces circonstances sont utiles pour déterminer si le travailleur a effectivement travaillé durant tout le semestre, en tenant compte que durant le semestre en question le lien de travail de l’intéressé peut avoir été suspendu pour les raisons prévues à l’article 2 du décret suprême no 005-2002-TR.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 842. Le comité observe que dans le présent cas les organisations plaignantes se déclarent en désaccord avec l’entreprise d’Etat Petróleos del Perú parce que cette dernière a retenu aux travailleurs, en plus de la partie du salaire équivalant au jour de grève du 14 mai 2002 (point qu’elles ne disputent pas), le montant équivalant à un sixième de la gratification (semestrielle) de «fiestas patrias». Les plaignants expliquent que l’entreprise a appliqué une nouvelle législation au lieu de respecter la convention collective (clause 28) qui est plus favorable aux travailleurs.
  2. 843. Le gouvernement, pour sa part, déclare que la retenue d’un sixième de la gratification (semestrielle) en question est conforme au règlement de la loi no 27735 alors en vigueur. Aux termes de ce règlement, la durée de service aux fins du calcul de chaque gratification semestrielle était déterminée pour chaque mois civil de travail effectif de la période correspondante; si un travailleur ne se présentait pas un jour à son lieu de travail, il perdait le montant de la gratification correspondant à ce mois (c’est-à-dire un sixième de la gratification semestrielle). Le gouvernement explique néanmoins qu’après la grève dont il est fait mention, en vertu de l’article 3.4 du nouveau décret suprême no 005-2002-TR – qui promulgue la loi no 27735 du 9 mai 2002 –, la gratification de «fiestas patrias» ne peut être réduite qu’à raison d’un trentième par jour d’absence du travail.
  3. 844. Le comité observe que, comme le déclarent les organisations plaignantes, la clause 28 de la convention collective (transmise par les plaignants) régit l’octroi de la gratification de «fiestas patrias» et ne mentionne aucune exception. Le texte de la clause précitée est le suivant:
  4. Gratification de «fiestas patrias» et de fin d’année
  5. L’entreprise accordera à ses travailleurs une gratification de «fiestas patrias» correspondant au 100 pour cent du salaire mensuel de base ou à une période de 30 jours de travail, plus le montant mensuel de «bonification de quinquennat» qui leur revient.
  6. […]
  7. 845. Le comité observe par ailleurs que l’article 8 de la loi no 27735 du 9 mai 2002, relative aux gratifications de «fiestas patrias», dispose que la «perception desdites gratifications est incompatible avec le versement de tout autre avantage pécuniaire similaire … en application de … conventions collectives; dans un tel cas, il conviendra d’accorder l’avantage qui est le plus favorable».
  8. 846. Dans ces conditions, le comité estime que la convention collective étant plus favorable que la disposition légale, c’est-à-dire le décret suprême no 005-2002-TR portant amendement du décret suprême no 017-2002-TR, le montant de la gratification de «fiestas patrias» devant être versé aux travailleurs n’aurait pas dû être réduit après la grève organisée le 14 mai 2002. Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures pour veiller au respect de la clause 28 de la convention collective.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 847. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
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