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Rapport intérimaire - Rapport No. 291, Novembre 1993

Cas no 1713 (Kenya) - Date de la plainte: 05-MAI -93 - Clos

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  1. 552. Dans une communication datée du 5 mai 1993, l'Organisation de l'unité syndicale africaine (OUSA) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Kenya. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a soumis des allégations concernant ce cas dans des communications datées des 15 juillet et 13 août 1993.
  2. 553. Le gouvernement a transmis ses observations sur ce cas dans une communication du 27 mai 1993.
  3. 554. Le Kenya n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 555. Dans sa plainte du 5 mai 1993, l'OUSA allègue que le gouvernement a commis des violations flagrantes des droits de l'homme et des droits syndicaux. Dans le dessein de briser une grève licite programmée à partir du 3 mai 1993 par le Congrès des syndicats du Kenya (COTU-K) en vue d'obtenir une augmentation de salaire pour les travailleurs kényens, le gouvernement a arbitrairement arrêté, le 1er mai 1993, Joseph J. Mugalla, secrétaire général du COTU-K, vice-président de l'OUSA et membre du Conseil d'administration du BIT, ainsi que plusieurs de ses proches collaborateurs. En outre, pour faire avorter la grève déclenchée par le COTU-K le 3 mai, le gouvernement l'a déclarée illégale et a entrepris une vaste campagne de dissuasion à l'encontre des travailleurs kényens en usant de divers types de menaces et d'intimidations.
  2. 556. Dans ses communications des 15 juillet et 13 août 1993, la CISL précise que M. Mugalla a été arrêté le 1er mai 1993 et libéré sous caution deux jours plus tard sur ordre de la Haute Cour, mais qu'il est toujours inculpé d'incitation à la grève. Les trois autres dirigeants syndicaux mis en cause étaient M. Joseph Bolo, directeur de la recherche au COTU-K, qui a été arrêté le 1er mai et libéré par la police le 5 mai, M. Boniface Munyao, secrétaire général adjoint du COTU-K, qui a été arrêté le 2 mai et libéré le 5, et M. Jackson Mukolwe, délégué syndical du Syndicat kényen des travailleurs du commerce, de l'alimentation et assimilés, qui a été arrêté le 3 mai et libéré le 5. Aucune accusation n'a été portée contre ces dirigeants syndicaux. D'après la CISL, ces arrestations ont eu lieu à la suite d'un grand rassemblement organisé avec succès par le COTU-K le 1er mai pour célébrer la fête du travail; au cours de ce rassemblement M. Mugalla avait sévèrement - mais à bon droit - critiqué le gouvernement parce qu'il feignait d'ignorer les appels lancés par le COTU-K en faveur, entre autres choses, de l'amélioration des conditions de travail.
  3. 557. La CISL souligne que, depuis l'instauration en 1993 du pluralisme politique au Kenya, le COTU-K affirme de plus en plus son autonomie et son indépendance, et que ses dirigeants ont exposé publiquement la position de leur organisation sur les principales questions économiques et sociales nationales. Au cours des mois qui ont précédé ce grave incident, les dirigeants du COTU-K avaient formulé des critiques à propos de la manière dont le gouvernement gérait l'économie, en lui reprochant notamment son incapacité de faire face au chômage et à l'inflation accélérée. Ils l'avaient engagé à mettre immédiatement fin à la corruption des milieux officiels. Les dirigeants du COTU-K avaient en outre demandé au gouvernement d'entamer sans délai des négociations en vue d'un ajustement général des salaires, afin de rétablir le pouvoir d'achat des travailleurs. Par la suite, le gouvernement ayant refusé d'engager des pourparlers sérieux à ce sujet, les dirigeants du COTU-K se sont vu contraints de s'adresser à un public plus large afin de sensibiliser l'opinion à leurs revendications.
  4. 558. D'après la CISL, le traitement infligé par le gouvernement aux dirigeants du COTU-K au début du mois de mai 1993 montre à l'évidence que les autorités ne se sont pas adaptées au nouveau climat politique caractérisé par le pluralisme ni à l'indépendance du mouvement syndical. La CISL affirme que le gouvernement a mis en oeuvre une politique agressive consistant à obliger les dirigeants syndicaux à suivre la ligne qu'il dicte sous peine d'être écartés. De plus, le gouvernement a fait intervenir la police, M. Mugalla ayant été brutalement arrêté par des agents des forces de sécurité vêtus en civil et détenu en un lieu inconnu. On a craint pour sa vie, la police s'étant refusée à dévoiler même à ses proches l'endroit où il se trouvait. De surcroît, deux jours seulement après l'arrestation de M. Mugalla, le gouvernement a donné l'ordre à la police d'arrêter le délégué syndical, M. Jackson Mukolwe, alors qu'il s'apprêtait à prendre la parole à une réunion de délégués syndicaux qui devait se tenir près du siège du COTU-K. C'était là une nouvelle attaque inquiétante contre des syndicalistes s'acquittant normalement de leurs fonctions syndicales.
  5. 559. La CISL soutient que ces actes blâmables du gouvernement constituent des violations flagrantes du droit des syndicalistes d'organiser librement leurs activités syndicales, et notamment de leur droit de réunion; de leur droit d'exprimer librement, au nom du mouvement syndical, leurs opinions sur les questions nationales qui intéressent directement les travailleurs; enfin, de leur droit de négocier librement et d'entamer d'authentiques négociations collectives pour le compte des travailleurs.
  6. 560. La CISL prétend qu'ultérieurement le gouvernement a commis une série d'actes d'ingérence dans les affaires internes du COTU-K. Le 2 juillet 1993, le gouvernement a donné ordre à la police d'occuper le siège du COTU-K: c'était là une manoeuvre délibérée visant à empêcher l'organisation de tenir la réunion de son Conseil exécutif national (CEN), à l'ordre du jour de laquelle figurait la question du maintien de la revendication du COTU-K portant sur un ajustement général des salaires. Le gouvernement a accordé son appui à un groupe minoritaire de membres du CEN dirigé par M. Johnson Ogendo, secrétaire général du Syndicat des travailleurs du textile, pour l'organisation d'une réunion non statutaire au Centre international de conférences Kenyatta à Nairobi. Les trois hauts fonctionnaires ci-après ont également participé à la réunion: le secrétaire permanent du ministère du Travail, qui a pris la parole pendant la réunion; le fonctionnaire principal chargé de l'industrie; enfin, le fonctionnaire chargé de l'administration du travail dans la province de Nairobi. La CISL affirme que la présence de hauts fonctionnaires à des réunions syndicales et dans les circonstances décrites constitue une ingérence flagrante, fort inquiétante, du gouvernement dans les affaires syndicales.
  7. 561. Au surplus, ce groupe minoritaire a procédé, au cours de la réunion, à un simulacre d'élections pour remplacer les dirigeants élus conformément aux statuts. Il a pu se faire enregistrer dans les heures qui ont suivi la pseudo-réunion, ce qui porte à suspecter, là encore, une intervention du gouvernement dans la décision d'enregistrement, en vue de déstabiliser la direction légitime du COTU-K. En outre, avec l'aide de la police, le groupe minoritaire dirigé par M. Johnson Ogendo a occupé les bureaux du COTU-K et évincé par la force les dirigeants légitimes du COTU-K. En même temps, ce groupe minoritaire a refusé aux dirigeants légitimes l'accès aux bureaux pour mener leurs activités syndicales. La CISL fait remarquer que tous ces actes manifestent la volonté du gouvernement de contribuer activement à diviser les travailleurs.
  8. 562. Un autre événement troublant, d'après la CISL, est l'élection, le samedi 10 juillet, par les dirigeants du Syndicat des travailleurs du commerce, de l'alimentation et assimilés - dont M. Mugalla était secrétaire général - de M. Daniel Ngirimari en remplacement de M. Mugalla. La CISL affirme que cela s'est fait sous la pression du gouvernement puisque 163 délégués sur les 219 qui participent aux réunions du CEN du COTU-K avaient déclaré par écrit soutenir la direction légitime du COTU-K conduite par M. Mugalla. En outre, le greffier des syndicats a consigné ce changement dans son registre dès le lundi matin 12 juillet. Or, normalement, les changements intervenus dans la direction des syndicats doivent être notifiés au greffier qui dispose d'une semaine pour en vérifier le bien-fondé avant de l'inscrire au registre. Il s'avère qu'en l'occurrence le greffier n'a mis que quelques heures pour inscrire ce changement alors que les avocats de M. Mugalla y aient fait objection.
  9. 563. La CISL déclare que l'indépendance du pouvoir judiciaire a également été sérieusement mise à mal dans cette affaire le 2 août 1993, lorsque le juge de la Haute Cour, S.E. O. Bosire, a rejeté la demande d'injonction qui lui était adressée pour empêcher le clan d'Ogendo de s'imposer à la tête du COTU-K. Pour les avocats de M. Mugalla, cette décision de justice était tout à fait illogique. Le juge a prétendu que le greffier avait déjà inscrit au registre les changements intervenus dans la direction du syndicat et qu'il ne pouvait modifier cette situation. La CISL affirme que le juge a fait fi des dispositions de la loi sur les syndicats relatives à l'enregistrement des changements dans la direction des syndicats. Elle dénonce l'empiètement par le gouvernement sur l'indépendance du pouvoir judiciaire et déclare que M. Mugalla a interjeté appel auprès de la Cour d'appel. La CISL conclut en affirmant que l'indépendance du mouvement syndical au Kenya est sérieusement menacée puisque le gouvernement est en mesure d'inciter un groupe minoritaire au sein d'un syndicat à convoquer une réunion non statutaire, à élire de faux dirigeants et à faire inscrire en quelques heures ces changements par le greffier des syndicats afin qu'ils soient légalisés, au détriment de la direction légitime. Toutes ces interventions constituent des violations flagrantes des conventions nos 87 et 98 et de toutes les normes du travail ainsi que des usages reconnus sur le plan international.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 564. Dans sa communication du 27 mai 1993, le gouvernement commence par réfuter énergiquement les allégations de l'OUSA faisant état de violations des droits syndicaux au Kenya. Il indique d'une manière générale que la liberté syndicale, y compris le droit d'organisation et de négociation collective, est pleinement garantie par l'article 80 de la Constitution du Kenya, ainsi que par la loi sur les syndicats, la loi sur les différends professionnels et la Charte de 1962 sur les relations professionnelles. En outre, le recours à la grève par une catégorie de travailleurs quelle qu'elle soit est autorisé à condition que toutes les procédures établies par la loi sur les différends professionnels aient été épuisées. Un préavis de vingt et un jours doit, par exemple, être adressé au ministre du Travail par tout groupe de travailleurs prévoyant de se mettre en grève, ce préavis étant allongé de sept jours en cas de grève dans des services essentiels. Par ailleurs, en vertu de l'article 30 de la loi sur les différends professionnels, le ministère du Travail est habilité à déclarer illégale toute grève potentielle ou effective s'il acquiert la certitude, entre autres choses, que cette grève a (aussi) d'autres fins que celle de faciliter le règlement de conflits du travail au sein d'une profession ou d'une branche d'activité.
  2. 565. S'agissant des allégations relatives aux événements survenus à partir du 1er mai 1993, le gouvernement rétorque que le COTU-K, sous la direction de M. J.J. Mugalla, a profité de l'occasion pour lancer un appel à une grève générale à compter du 3 mai, à moins que le gouvernement n'annonce une augmentation générale et immédiate des salaires de 100 pour cent et le renvoi du Vice-président de la République du Kenya (qui est également ministre de la Planification et du Développement national). Dans le discours qu'il a prononcé le jour de la fête du travail, M. Mugalla, s'adressant à l'assemblée, a assuré que les deux revendications étaient inséparables et non négociables.
  3. 566. Le gouvernement fait remarquer que la nomination du vice-président constitue une prérogative exclusive du président. En deuxième lieu, la loi a prévu des mécanismes pour l'obtention d'augmentations de salaires - soit dans le secteur structuré, par le biais de négociations libres, soit dans le secteur non structuré, à travers le système de fixation du salaire minimum. Enfin, il n'est possible de lancer un mot d'ordre de grève qu'après l'épuisement de la procédure de négociation prévue par la loi (et après le dépôt des préavis de grève réglementaires). Bien que M. Mugalla n'ignore rien de ces prescriptions légales, il a ouvertement incité les travailleurs kényens à participer à une grève (et à passer un pneu enflammé au cou des récalcitrants) à partir du lundi 3 mai si les deux revendications susmentionnées n'étaient pas satisfaites par le gouvernement.
  4. 567. Le gouvernement explique que le ministre du Travail avait déjà déclaré cette grève illégale, car chacun savait qu'il s'agissait d'une grève politique n'ayant aucun rapport avec un conflit du travail. Elle visait plutôt à contraindre les employeurs et les travailleurs à y participer, afin de susciter la crainte chez les travailleurs, d'infliger des épreuves aux simples Kényens et d'exposer les biens au risque de destruction.
  5. 568. Cette grève nationale, déclenchée à l'appel de M. Mugalla, a perturbé l'ensemble de l'économie kényenne, paralysant en particulier le secteur bancaire, celui des transports et plusieurs autres entreprises commerciales. Elle a également donné lieu à des incidents qui se sont soldés par la destruction de biens, des dommages corporels et une crise générale dans le secteur productif.
  6. 569. En conséquence, M. Mugalla a été arrêté le 1er mai et formellement accusé le 3 mai par une cour de justice d'avoir incité les travailleurs à participer à une grève illégale en violation de la loi. Il a été libéré par la suite, de même que ses deux proches collaborateurs qui avaient également été arrêtés. Soixante-dix-huit autres personnes ont par ailleurs été accusées le 4 mai d'avoir commis des actes de violence à l'occasion de la grève, notamment d'avoir détruit des biens, blessé des personnes par des jets de pierres, mis le feu à des véhicules automobiles, etc.
  7. 570. Le gouvernement souligne que, dans un communiqué de presse publié le 2 mai, le ministre du Travail avait tenu à signifier qu'il comprenait les difficultés des travailleurs, dues à la crise économique que traversait le pays. Il avait également rassuré les travailleurs sur sa détermination d'élever leur niveau de vie par l'adoption d'un certain nombre de dispositions devant être négociées entre partenaires sociaux. Bien que le gouvernement ait ouvert la porte aux négociations, le COTU-K a pris la position que l'on sait. Le gouvernement indique toutefois que, depuis lors, la situation est redevenue normale, la plupart des travailleurs n'ayant pas suivi l'appel à la grève du COTU-K et ayant repris le travail. Plusieurs autres dirigeants syndicaux y avaient d'ailleurs contribué en invitant leurs affiliés à ne pas suivre le mouvement de grève: ce fut le cas, par exemple, du Syndicat des agents des postes et télécommunications, du Syndicat des dockers et du Syndicat des travailleurs de l'électricité. Parmi les autres secteurs qui n'avaient pas suivi la grève figuraient le corps enseignant, les fonctionnaires et les travailleurs agricoles.
  8. 571. Le gouvernement conclut en déclarant qu'il continuera de respecter strictement les droits syndicaux et d'encourager un dialogue constructif entre les partenaires sociaux au Kenya, notamment en ce qui concerne le bien-être des travailleurs kényens. En revanche, il ne saurait tolérer de la part de quiconque une action de nature à compromettre la paix et la stabilité au Kenya.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 572. Le comité observe que les allégations formulées dans le présent cas ont trait à l'arrestation et à la détention de hauts dirigeants syndicaux appartenant à l'Organisation centrale des syndicats du Kenya (COTU-K), en particulier de M. J.J. Mugalla, secrétaire général du COTU-K, à la suite de l'appel à une grève générale lancé lors d'un rassemblement organisé par le COTU-K le 1er mai 1993. Les allégations portent également sur de graves actes d'ingérence du gouvernement dans les affaires internes du COTU-K ayant porté atteinte à l'indépendance du mouvement syndical au Kenya. Le gouvernement soutient pour sa part que la grève générale déclenchée par le COTU-K sous l'égide de M. Mugalla était illégale parce qu'elle était politique et n'avait aucun rapport avec un conflit du travail.
  2. 573. Le comité note avec une profonde inquiétude que M. Mugalla et trois autres responsables du COTU-K ont été arrêtés et détenus pour avoir lancé un appel à une grève générale dans le dessein d'obtenir une augmentation de salaire pour les travailleurs kényens. A cet égard, le comité tient à rappeler au gouvernement que l'arrestation et la détention (même pour une courte période) de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour leurs activités syndicales légitimes constituent une violation des principes de la liberté syndicale. (Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 87 et 88.) Il invite donc instamment le gouvernement à s'abstenir à l'avenir de recourir à de telles mesures.
  3. 574. Le comité note que, selon le gouvernement, la grève déclenchée par le COTU-K était de nature politique puisqu'elle revendiquait notamment le renvoi du Vice-président de la République. Des mouvements de grève purement politiques n'entrent pas dans le champ d'application des principes de la liberté syndicale. Toutefois, dans le cas présent, le comité doit constater qu'une grande partie des revendications mises en avant par le COTU-K étaient de nature économique et sociale. Le gouvernement le reconnaît lui-même en indiquant que le COTU-K avait appelé les travailleurs à entreprendre une grève générale à moins que le gouvernement n'annonce, entre autres choses, une augmentation générale et immédiate des salaires de 100 pour cent. Le comité doit donc attirer l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel les organisations syndicale devraient avoir la possibilité de recourir à des grèves de protestation, notamment en vue d'exercer une critique à l'égard de la politique économique et sociale du gouvernement. (Voir à cet égard l'Etude d'ensemble de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1983, paragr. 216.) En conséquence, le droit de grève ne devrait pas être restreint aux seuls différends du travail susceptibles de déboucher sur une convention collective particulière: les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir manifester, le cas échéant, dans un cadre plus large leur mécontentement éventuel sur des questions économiques et sociales touchant aux intérêts de leurs membres. (Op. cit., paragr. 372 et 388.) En même temps, notant la déclaration du gouvernement selon laquelle la grève a donné lieu à des incidents qui se sont soldés par des infractions à la loi, notamment la destruction de biens et des dommages corporels, le comité tient à appeler l'attention des organisations plaignantes sur le principe selon lequel les travailleurs et leurs organisations respectives sont tenus de respecter la légalité qui ne devrait pas porter atteinte aux principes de la liberté syndicale.
  4. 575. Le comité observe que, bien que M. Mugalla ait été libéré, il a été accusé par une cour de justice d'avoir incité des travailleurs à entreprendre une grève illégale en violation de la loi. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue de la procédure intentée contre M. Mugalla.
  5. 576. Le comité note que le gouvernement n'a pas encore fourni ses observations sur les autres allégations, qui concernent des actes graves d'ingérence du gouvernement dans les affaires internes du COTU-K: occupation du siège du COTU-K par la police le 2 juillet 1993 afin d'empêcher l'organisation de tenir la réunion de son Conseil exécutif national (CEN); appui actif du gouvernement à un groupe minoritaire au sein du COTU-K pour la tenue d'une réunion non statutaire au Centre international de conférences Kenyatta, avec la participation du secrétaire permanent du ministère du Travail, du fonctionnaire principal chargé de l'industrie et du fonctionnaire chargé de l'administration du travail dans la province de Nairobi; élection, durant cette réunion, de représentants du groupe minoritaire pour remplacer la direction légitime du COTU-K et enregistrement de ce groupe minoritaire dans les heures qui ont suivi la réunion; occupation des bureaux du COTU-K par le groupe minoritaire avec l'appui de la police; enfin, éviction de M. Mugalla de son poste de secrétaire général du Syndicat des travailleurs du commerce, de l'alimentation et assimilés à l'instigation du gouvernement, et enregistrement de ce changement de direction par le greffier des syndicats, sans égard pour les dispositions pertinentes de la loi sur les syndicats relatives à l'enregistrement de ce type de changement. Le comité demande au gouvernement de répondre sans délai à ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 577. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité rappelle que l'arrestation et la détention (même pour une courte période) de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour leurs activités syndicales légitimes constituent une violation des principes de la libertésyndicale. Il invite instamment le gouvernement à s'abstenir à l'avenir de recourir à de telles mesures.
    • b) Le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel les organisations syndicales devraient avoir la possibilité de recourir à des grèves de protestation, notamment en vue d'exercer une critique à l'égard de la politique économique et sociale du gouvernement. En conséquence, le droit de grève ne devrait pas être restreint aux seuls différends du travail susceptibles de déboucher sur une convention collective particulière: les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir manifester, le cas échéant, dans un cadre plus large leur mécontentement éventuel sur des questions économiques et sociales touchant aux intérêts de leurs membres. Le comité rappelle cependant que les grèves de nature purement politique n'entrent pas dans le champ d'application des principes de la liberté syndicale.
    • c) Le comité appelle l'attention des organisations plaignantes sur le principe selon lequel les travailleurs et leurs organisations respectives sont tenus, à l'instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité qui ne devrait pas porter atteinte aux principes de la liberté syndicale.
    • d) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue de la procédure intentée contre M. Mugalla.
    • e) Le comité demande au gouvernement de répondre sans délai aux autres allégations, qui concernent des actes graves d'ingérence du gouvernement dans les affaires internes du COTU-K.
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