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Rapport définitif - Rapport No. 292, Mars 1994

Cas no 1596 (Uruguay) - Date de la plainte: 31-JUIL.-91 - Clos

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  1. 46. Le comité a examiné ce cas à sa session de mai 1992, lors de laquelle il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 283e rapport du comité, paragr. 356 à 374, approuvé par le Conseil d'administration à sa 253e session (mai-juin 1992).) Le gouvernement a envoyé de nouvelles observations dans des communications datées du 28 septembre 1992 et des 12 mai et 28 septembre 1993.
  2. 47. L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 48. Les allégations restées en instance en mai 1992 concernaient le licenciement, en 1990, de nombreux grévistes et dirigeants syndicaux de la Fabrique nationale de papier (FNP), immédiatement après la signature par l'organisation plaignante (le CUOPYC) et la FNP d'un accord mettant fin à la grève et au conflit les opposant, cet accord prévoyant que l'entreprise ne prendrait pas de représailles à l'encontre des travailleurs grévistes. Le comité avait noté qu'une enquête administrative était en cours à ce sujet et qu'elle devait aboutir à un arrêté ministériel qui devait décider du bien-fondé des plaintes et des mesures à prendre.
  2. 49. Le comité avait formulé la recommandation suivante à l'intention du Conseil d'administration au sujet des allégations en instance (voir 283e rapport du comité, paragr. 374):
  3. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue de l'enquête administrative diligentée à la suite du licenciement de syndicalistes et de dirigeants syndicaux, et si, comme les indices semblent le prouver, cette enquête confirme que les licenciements ont eu des motifs antisyndicaux, de prendre des mesures d'urgence en vue de la réintégration des travailleurs licenciés et de l'imposition rigoureuse des sanctions prévues par la loi.
  4. B. Réponse du gouvernement
  5. 50. Dans sa communication du 28 septembre 1992, le gouvernement, se référant aux conclusions du comité à sa session de mai 1992 qui soulignaient que les licenciements allégués avaient eu lieu à la suite de mouvements de grève légaux (283e rapport, paragr. 370), déclare que, s'il est exact qu'après le conflit opposant la Fabrique nationale de papier et son personnel l'entreprise - alléguant une restructuration qui impliquait obligatoirement des réductions d'effectifs - a entrepris de licencier plus de 100 travailleurs parmi lesquels figuraient certains représentants du syndicat, il n'est pas évident que l'interruption du travail pendant plus de trois mois puisse être qualifiée de "grève légale", car cette paralysie menaçait sérieusement la capacité productive de l'entreprise, décourageait les nouveaux investissements, aiguisait la confrontation et compromettait le climat de saine relation professionnelle dans lequel les parties devaient négocier pour parvenir à des solutions consensuelles.
  6. 51. Le gouvernement ajoute que, après que l'enquête administrative susmentionnée a été effectuée à la Fabrique nationale de papier, en respectant toutes les garanties de la procédure légale, les fonctionnaires compétents de l'Inspection du travail du ministère du Travail ont recommandé de sévères sanctions contre l'entreprise, ayant relevé entre autres choses de solides indices d'entrave à l'activité syndicale à la faveur de la restructuration de l'entreprise. Le gouvernement communique le rapport de l'enquête administrative menée par les agents de l'Inspection générale du travail qui constate "le licenciement d'environ 50 pour cent des membres de la Commission de direction et de contrôle" et "de 50 pour cent des représentants du syndicat qui négociaient au sein du Conseil des salaires et de la Direction nationale du travail", "en raison de leur activité syndicale" et "avec l'intention de démembrer l'organisation syndicale". En conséquence, l'Inspecteur général du travail et de la sécurité sociale a adopté le 20 août 1992 une résolution - conforme aux dispositions en vigueur - imposant une grave sanction financière (l'équivalent de 22.000 dollars des Etats-Unis) à la Fabrique nationale de papier. Le gouvernement ajoute que les mesures administratives adoptées sont indépendantes des actions engagées par les travailleurs devant les tribunaux pour obtenir réparation.
  7. 52. En ce qui concerne les mesures que le comité a demandées afin que les enquêtes portant sur des situations comme celle qui fait l'objet du présent cas soient menées à bien promptement, le gouvernement signale que, s'il est vrai que le CUOPYC a déposé sa plainte auprès du secrétariat d'Etat le 22 janvier 1991, date à laquelle la procédure a été engagée, la gravité de la plainte et les circonstances concrètes dans lesquelles se sont produits les licenciements - alors que l'entreprise était en pleine restructuration - exigeaient une analyse plus approfondie, si bien que la procédure s'est prolongée plus qu'il n'était souhaitable.
  8. 53. Dans ses communications des 12 mai et 28 septembre 1993, le gouvernement déclare que la Fabrique nationale de papier a demandé la révision de la procédure administrative ayant abouti à une sanction financière pour violation de la liberté syndicale et que, en conséquence, il a été conclu ce qui suit: il y a des années que l'entreprise étudie et met en oeuvre un programme de restructuration de ses effectifs et de reconversion industrielle, lequel a provoqué un conflit qui a abouti à la signature d'une convention collective en 1991; au mois de décembre 1990, l'entreprise a licencié 117 travailleurs; la nécessité de la restructuration a été mise en évidence par une analyse longue et approfondie; le Syndicat des ouvriers du papier et de la cellulose (CUOPYC) a contesté les licenciements au motif qu'ils étaient contraires aux dispositions des conventions nos 87 et 98 de l'OIT car, selon le syndicat, les licenciements de dirigeants et de militants syndicaux constituaient une mesure de persécution syndicale; l'administration a jugé qu'il avait été porté atteinte aux droits syndicaux et a imposé une lourde amende à l'entreprise.
  9. 54. Par ailleurs, le gouvernement déclare que, après avoir longuement analysé les faits, on relève que: la grande majorité des personnes licenciées n'avait pas la qualité de syndicalistes; les licenciements ont touché tous les secteurs de l'entreprise, c'est-à-dire les cadres comme le personnel subalterne; les licenciements ont été décidés en fonction de critères raisonnablement rationnels; la continuité du syndicat est manifeste; le développement des relations professionnelles s'est poursuivi de façon normale et satisfaisante; l'entreprise n'a pas engagé de personnel nouveau depuis l'époque où les licenciements ont eu lieu; la productivité a sensiblement augmenté; cinq des dirigeants syndicaux licenciés, qui avaient engagé des actions en justice contre l'entreprise, sont parvenus à un accord qui a été agréé par l'autorité judiciaire, accord en vertu duquel ils ont reçu une somme supérieure de 150 pour cent à l'indemnité pour licenciement ordinaire. En vertu de cet accord, il a été mis fin définitivement aux licenciements, sans qu'il ait été aucunement question de persécution syndicale. Enfin, le gouvernement déclare que les dirigeants syndicaux licenciés, qui avaient engagé une action en justice, ont été déboutés en première et deuxième instance et que les autres travailleurs congédiés ont accepté les indemnités qui leur étaient offertes.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 55. Le comité note que, conformément aux conclusions qu'il a formulées à sa session de mai 1992, l'Inspecteur général du travail et de la sécurité sociale a imposé une lourde amende (l'équivalent de 22.000 dollars des Etats-Unis) à la Fabrique nationale de papier après qu'une enquête administrative eut constaté le licenciement de dirigeants syndicaux en raison de leur activité syndicale. Le comité note aussi que, selon le gouvernement, cinq dirigeants syndicaux, qui avaient engagé une action en justice à la suite de leur licenciement, sont parvenus à un accord avec l'entreprise et ont touché des indemnités, que d'autres dirigeants syndicaux qui avaient engagé des actions en justice ont été déboutés, et que les dirigeants et travailleurs restants ont accepté les indemnités versées par l'entreprise.
  2. 56. A cet égard, le comité souhaite attirer l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel il n'apparaît pas qu'une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 soit accordée par une législation permettant en pratique aux employeurs, à condition de verser l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur, si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale.
  3. 57. Dans le cas présent, le comité observe que: 1) bien que les licenciements aient eu lieu dans le cadre d'un différend collectif, ils se sont produits également lors d'un processus de restructuration de l'entreprise pour des raisons économiques; 2) par la suite, l'entreprise n'a pas engagé de travailleurs nouveaux; 3) l'entreprise a été sanctionnée d'une lourde amende; 4) l'entreprise est parvenue à un accord avec tous les travailleurs congédiés, sauf avec deux d'entre eux dont les actions en justice ont été déboutées par l'autorité judiciaire. Tenant compte de tous les éléments qui précèdent, le comité considère qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 58. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel il n'apparaît pas qu'une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 soit accordée par une législation permettant en pratique aux employeurs, à condition de verser l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur, si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale.
    • b) Tenant compte des circonstances particulières qui se sont produites dans le cas présent et de la façon dont a évolué la question des licenciements, le comité ne poursuivra pas l'examen des allégations.
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