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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 259, Novembre 1988

Cas no 1459 (Guatemala) - Date de la plainte: 20-JUIN -88 - Clos

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  1. 275. Une plainte en violation de la liberté syndicale contre le
    • gouvernement
    • du Guatemala a été présentée par la Confédération de l'unité
    • syndicale du
    • Guatemala (CUSG) dans une communication datée du 20 juin
  2. 1988. Le gouvernement
    • a envoyé ses informations et observations sur ce cas dans
    • une communication
    • datée du 7 septembre 1988.
  3. 276. Le Guatemala a ratifé la convention (no 87) sur la liberté
    • syndicale et
    • la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention
  4. (no 98) sur le
    • droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de la confédération plaignante

A. Allégations de la confédération plaignante
  1. 277. La CUSG allègue dans sa plainte des actes arbitraires
    • du gouvernement
    • en matière de droits de l'homme et de liberté syndicale, en
    • particulier des
    • lenteurs dans l'inscription des syndicats, des licenciements de
    • travailleurs
    • regroupés dans des comités d'entreprise qui tentent de fonder
    • des syndicats,
    • des refus d'aider les travailleurs à obtenir la mise en oeuvre
    • des accords
    • conclus et le développement du "solidarisme".
  2. 278. S'agissant des lenteurs dans l'inscription des syndicats,
    • la CUSG
    • explique que la documentation exigée pour l'obtenir dort dans
    • les bureaux du
    • ministère du Travail, qu'elle ne suit pas son cours et qu'il est
    • curieux qu'il
    • en soit ainsi pour les organisations syndicales, puisque pour les
    • autres
    • organisations l'inscription se fait rapidement. En conséquence,
    • d'après la
    • confédération plaignante, le ministère viole le droit
    • d'association en rendant
    • la loi inopérante.
  3. 279. S'agissant de licenciements de travailleurs, la CUSG
    • indique que, dans
    • la municipalité de San Antonio Suchitepéquez, le maire a
    • commis des actes
    • arbitraires à l'encontre des travailleurs. Il a licencié un groupe
    • d'ouvriers,
    • y compris le comité exécutif du syndicat qui était en train de se
    • constituer.
    • Selon la confédération plaignante, les événements se sont
    • déroulés de la
    • manière suivante: en premier lieu, le maire a tenté de
    • provoquer un
    • affrontement qui aurait pu causer des pertes de vies humaines,
    • en faisant
    • croire à la population et aux employés de confiance que les
    • syndicalistes
    • allaient attenter à la sécurité des habitants de San Antonio car
    • ils étaient
    • communistes. En second lieu, les travailleurs, pour éviter
    • l'affrontement,
    • n'ont pas tenu l'assemblée qu'ils avaient convoquée, et ils se
    • sont cachés
    • dans le cimetière de cette localité pour se réunir en assemblée
    • générale. Par
    • la suite, les travailleurs ont introduit des recours auprès des
    • tribunaux
    • contre leurs licenciements illégaux, prononcés par le maire. Le
    • Tribunal du
    • travail a ordonné la réintégration des travailleurs licenciés il y a
    • dix mois,
    • mais les intéressés n'ont toujours pas été réintégrés. De
    • surcroît, sur les
    • instances du maire, un nouveau syndicat d'employés de
    • confiance, dont le
    • secrétaire général n'est autre que le chef de la police, s'est
    • créé. Or, selon
    • le ministère du Travail, il n'est pas permis aux membres de la
    • police de se
    • constituer en syndicat. C'est la raison pour laquelle la CUSG se
    • demande
    • comment on peut permettre au chef de la police de cette
    • municipalité de
    • devenir secrétaire général d'un syndicat. La dernière affaire en
    • date, cette
    • année, est celle du Syndicat des travailleurs des services
    • téléphoniques
    • (GUATEL). Outre l'intérêt soutenu de l'employeur à diviser
    • l'organisation par
    • une dualité de syndicats, le syndicat dont fait état la
    • confédération
    • plaignante n'a pas été enregistré alors qu'il présentait toutes
    • les conditions
    • requises par la Direction générale du travail, allègue la CUSG.
  4. 280. Par ailleurs, dans une autre affaire datant de 1987, les
    • travailleurs
    • de l'usine LUNAFIL n'ont pas eu d'autre alternative que de
    • déclencher une
    • grève. Depuis septembre 1987, ils n'avaient pas reçu l'appui
    • du ministère du
    • Travail pour la mise en oeuvre des sentences les concernant,
    • ce qui a permis
    • les manoeuvres de l'entreprise. Les responsables l'ont en effet
    • vendue à
    • d'autres personnes, lesquelles ont obtenu que l'usine soit
    • évacuée par la
    • force. La confédération plaignante joint, à cet égard, une
    • coupure de presse
    • du journal Campo Pagado, datée du 27 mai 1988, qui contient
    • des précisions sur
    • cette allégation. Le syndicat des travailleurs de l'usine
    • LUNAFIL SA y
    • condamne l'action de 500 éléments anti-émeute qui ont
    • pénétré à 6 heures du
    • matin, le 26 mai, à l'intérieur de l'usine pour faire évacuer les
  5. 39
    • travailleurs qui s'y trouvaient pacifiquement pour défendre leur
    • travail et
    • leur liberté syndicale. La police a procédé à cette évacuation
    • au prétexte
    • qu'il s'agissait de l'exécution d'un mandat judicaire, mais elle
    • n'a présenté
    • à aucun moment le mandat en question. Au cours de cette
    • action, des personnes
    • du voisinage sont arrivées sur les lieux; il s'en est suivi une
    • réelle
    • confusion qui a résulté de la violence des forces de sécurité:
    • les policiers
    • ont tiré des coups de feu, un membre du comité exécutif du
    • syndicat, Julio
    • Coj, a été blessé, et deux ouvriers d'une usine voisine ont été
    • appréhendés
    • par la police, puis relâchés par la suite. D'après la coupure de
    • presse, le
    • syndicat estime qu'en usant de tels moyens le gouvernement a
    • cherché à
    • réprimer et à faire taire les travailleurs, étant donné que les
    • forces de
    • sécurité de l'Etat n'ont agi que pour obtenir l'exécution des
    • décisions de
    • justice favorables aux employeurs et que, lorsqu'il s'est agi des
    • décisions
    • favorables aux travailleurs, les forces de sécurité ne sont pas
    • intervenues.
  6. 281. La CUSG explique aussi que l'Unité d'action syndicale
    • et populaire, qui
    • est la plus haute expression des travailleurs guatémaltèques, a
    • signé des
    • accords avec le gouvernement, le 8 mars 1988, en matière de
    • politiques
    • économique, agraire, sociale, de droits de l'homme, de
    • corruption
    • administrative et de politique énergétique. Dans le domaine
    • social, l'accord
    • portait sur une augmentation de 50 quetzales par mois au
    • moins pour les
    • travailleurs du secteur privé, augmentation qui devait entrer en
    • application
    • dans les 45 jours. Or, d'après la confédération plaignante, 90
    • jours plus
    • tard, l'augmentation n'avait toujours pas été accordée, violant
    • ainsi les
    • accords du 8 mars, sans tenir compte des besoins
    • économiques et sociaux des
    • travailleurs et de leurs familles. En outre, l'accord prévoyait
    • également, en
    • matière d'octroi de la personnalité juridique au syndicat,
    • l'inscription
    • immédiate de tous les syndicats par la Direction générale du
    • travail et un
    • délai de 30 jours pour contrôler les dossiers et régulariser les
    • inscriptions
    • définitives. Là aussi 90 jours ont passé sans que les
    • inscriptions aient été
    • faites.
  7. 282. Au sujet du mouvement dit du "solidarisme" dont le
    • siège est au Costa
    • Rica, la CUSG explique qu'il s'agit d'un mouvement
    • d'employeurs, antisyndical,
    • qui grandit à pas de géant, car il dispose d'argent, ce qui
    • manque aux
    • travailleurs. Aussi envoie-t-on régulièrement au Costa Rica, en
    • stage
    • d'endoctrinement, des travailleurs. A titre d'exemple, la
    • confédération
    • plaignante cite les plantations de bananes d'Izabal, dont le
    • syndicat est en
    • train d'être miné par les "solidaristes" qui mystifient les
    • travailleurs afin
    • d'éliminer l'organisation syndicale.
    • B. Réponse du gouvernement
  8. 283. Dans sa réponse du 7 septembre 1988, le
    • gouvernement communique des
    • observations et informations détaillées sur chacune des
    • allégations de la
    • confédération plaignante.
  9. 284. Sur le grief relatif à l'intervention du ministère du Travail
    • et de la
    • Prévoyance sociale dans l'inscription des syndicats, les
    • informations
    • statistiques du ministère démontrent que les allégations de la
    • confédération
    • plaignante sont inexactes. Au début du processus
    • démocratique qui se développe
    • actuellement, 456 syndicats étaient inscrits. De 1979 à 1985,
    • étape historique
    • des gouvernements autoritaires, 39 syndicats seulement l'ont
    • été, soit une
    • moyenne de 5,5 par an, sans compter l'année 1983 au cours
    • de laquelle aucun
    • syndicat n'a été inscrit. Dans les deux premières années de la
    • gestion du
    • présent gouvernement, 62 syndicats ont été inscrits et, au
    • cours des six
    • premiers mois de 1988, 32 l'ont été. D'après le gouvernement,
    • le délai
    • d'inscription d'un syndicat a considérablement diminué,
    • puisqu'en 1984 il
    • fallait compter 121 jours; en 1986, ce n'était plus que 24; en
  10. 1987, 7; et, au
    • cours des six premiers mois de cette année, 6.
  11. 285. Le gouvernement reconnaît cependant que les
    • dispositions du Code du
    • travail actuellement en vigueur, à savoir les articles 212, 216,
  12. 218, 219 et
  13. 233, ne facilitent pas la procédure d'inscription des syndicats,
    • et il annonce
    • que le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a pris
    • l'initiative de
    • proposer une réforme du cadre juridique en la matière, réforme
    • que l'organe
    • législatif devrait examiner dans les jours prochains. Cette
    • réforme devrait
    • permettre de faciliter, de manière substantielle, l'inscription des
    • syndicats.
    • En conséquence, le gouvernement réfute les allégations de la
    • confédération
    • plaignante et affirme qu'il ne viole pas la liberté d'association et
    • qu'il ne
    • rend pas la loi inopérante, mais qu'au contraire il s'efforce de
    • faciliter la
    • procédure en réformant le Code du travail.
  14. 286. Sur le grief relatif à de prétendus actes arbitraires qui
    • auraient été
    • commis par le maire de la municipalité de San Antonio
    • Suchitepéquez, la
    • confédération plaignante elle-même, remarque le
    • gouvernement, indique que
    • l'affaire a été portée devant les tribunaux du travail et de la
    • prévoyance
    • sociale. Le gouvernement souligne qu'au Guatemala,
    • conformément à l'article
  15. 141 de la Constitution, il n'y a pas subordination entre les
    • organes
    • législatifs, exécutifs et judiciaires. Un des piliers essentiels du
    • processus
    • démocratique repose sur l'indépendance de ces organes. En
    • conséquence,
    • l'exécutif, et en l'occurrence le ministère du Travail, est
    • totalement
    • étranger à la procédure qui se déroule devant le Tribunal du
    • travail.
    • Indépendamment de ce qui précède et dans la mesure où les
    • allégations de la
    • CUSG s'avéreraient exactes, le Code pénal actuellement en
    • vigueur punit la
    • désobéissance en ses articles 414 et 420, de sorte que tous
    • les travailleurs
    • ont le droit d'engager des actions pénales dans cette affaire.
    • Le ministère du
    • Travail n'a pas compétence en la matière, conclut le
    • gouvernement.
  16. 287. S'agissant du cas du Syndicat des travailleurs des
    • services
    • téléphoniques (GUATEL), le gouvernement indique que la
    • Direction générale du
    • travail, qui est l'organe administratif chargé de l'inscription des
    • syndicats,
    • n'a pas eu connaissance d'une demande de reconnaissance
    • de la personnalité
    • juridique et d'approbation des statuts d'un syndicat des
    • travailleurs des
    • services téléphoniques qui serait appelé GUATEL. En
    • conséquence, l'assertion
    • de la CUSG n'est pas exacte, étant donné que le syndicat en
    • question n'existe
    • pas. Selon le gouvernement, un seul dossier concernant les
    • travailleurs des
    • télécommunications se trouve à la Direction générale du
    • travail. Le Syndicat
    • des travailleurs de la Tropical Radio Telegraph Company s'est
    • constitué le 28
    • avril 1957, et l'approbation de ses statuts et la reconnaissance
    • de sa
    • personnalité juridique datent de cette époque. En 1966, ce
    • syndicat a changé
    • de nom. Il s'est appelé Syndicat des travailleurs des
    • télécommunications
    • internationales du Guatemala et, en 1983, il a encore changé
    • de nom et
    • s'appelle maintenant le Syndicat des travailleurs de l'entreprise
    • des
    • télécommunications du Guatemala. En d'autres termes, au sein
    • de l'entreprise
    • des télécommunications il n'y a eu, et il n'y a, qu'un seul
    • syndicat.
  17. 288. S'agissant du cas des travailleurs de l'usine LUNAFIL, le
    • gouvernement
    • affirme que, depuis que l'administration actuelle chargée du
    • ministère du
    • Travail a pris ses fonctions, elle s'est intéressée à l'affaire des
    • travailleurs de cette usine. Le problème a été soumis aux
    • tribunaux du
    • travail; en conséquence, le ministère ne pouvait pas intervenir.
    • Il ne pouvait
    • qu'entreprendre une action de médiation entre les employeurs
    • et les
    • travailleurs afin de rechercher une solution qui convienne aux
    • deux parties.
    • Comme il ressort du dossier du cas, c'est ce qu'il a fait. Les
    • dirigeants
    • syndicaux ont demandé la médiation du ministre du Travail, et,
  18. le 23 juillet
  19. 1988, en présence du ministre du Travail du Costa Rica, le
    • ministre du Travail
    • du Guatemala a participé à la réouverture de l'usine et à la
    • solution
    • définitive de ce conflit. Le gouvernement annexe à cet égard
    • la copie de
    • l'acte de médiation, signé devant le ministre des Affaires
    • spéciales par
    • plusieurs dirigeants du Syndicat des travailleurs de l'entreprise
    • LUNAFIL SA
    • et par plusieurs représentants de l'employeur, où les intéressés
    • manifestent
    • leur souhait de parvenir à un accord pour résoudre de manière
    • définitive le
    • conflit qui affecte l'entreprise depuis le 9 juin 1987. Après
    • discussion, les
    • travailleurs ont accepté de quitter les zones appartenant à
    • l'entreprise le 22
    • juillet. Il a été décidé que des mesures devaient être prises
    • pour que
    • l'entreprise fonctionne à nouveau à partir du 23 août.
    • L'entreprise a accepté
    • de réintégrer 24 des personnes qu'elle occupait auparavant,
    • dont les noms ont
    • été proposés par le comité exécutif du syndicat. Il a également
    • été décidé que
    • les parties s'engageaient à discuter un projet de pacte collectif
    • et à se
    • dessaisir de toute action judiciaire.
  20. 289. Au sujet des accords signés entre le gouvernement et
    • l'Unité d'action
    • syndicale et populaire, et plus particulièrement de la question
    • des
    • augmentations de salaires, le gouvernement explique que
    • l'organe exécutif a
    • soumis, conformément à ses engagements, un projet de loi en
    • ce sens devant
    • l'organe législatif. Cependant, rappelle-t-il, compte tenu de
    • l'indépendance
    • des pouvoirs dont il a déjà fait état, l'exécutif ne peut pas
    • contraindre le
    • législatif à approuver un projet de loi.
  21. 290. Quant à la question du "solidarisme", le gouvernement
    • déclare que le
    • ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a décidé de
    • ne pas inscrire
    • les groupes de travailleurs qui s'associent dans le but de
    • constituer un
    • groupement "solidariste". Il explique cependant que les
    • dispositions
    • constitutionnelles (article 34) régissent le droit d'association de
    • telle
    • manière que ce droit ne peut être dénié. Aussi, le ministère du
    • Travail estime
    • que ceux qui souhaitent exercer ce droit pour constituer une
    • association
    • "solidariste" doivent adresser leur demande d'autorisation
    • auprès du ministère
    • de l'Intérieur, qui est seul compétent en la matière aux termes
    • de la loi.
    • Indépendamment de ce qui est indiqué ci-dessus, le
    • gouvernement ajoute que le
    • ministère du Travail est d'avis qu'il appartient aux travailleurs
      • eux-mêmes de
    • dénoncer les objectifs du "solidarisme" et les contradictions
    • qu'ils
    • entraînent avec les objectifs des syndicats. Aussi, le ministère
    • du Travail
    • n'a aucune compétence en la matière. Les allégations de la
    • confédération
    • plaignante sur ce point manquent donc de fondement.
  22. 291. En conclusion, le ministre du Travail explique que,
    • depuis qu'il a pris
    • ses fonctions le 17 octobre 1987, 59 syndicats ont été inscrits
    • et que 9
    • autres sont en passe de l'être. La communication du
    • gouvernement contient, à
    • cet égard, les statistiques de la Direction générale du travail en
    • matière
    • d'inscription des syndicats, statistiques qui confirment les
    • informations
    • fournies par le gouvernement.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 292. En premier lieu, le comité note avec intérêt que,
    • contrairement à ce
    • qui est arrivé dans le passé, le gouvernement, dans le présent
    • cas, a
    • collaboré à la procédure en envoyant dès le mois de
    • septembre 1988 des
    • réponses détaillées aux allégations présentées par la
    • confédération plaignante
    • en juin 1988. Il prend d'autant plus bonne note de ce fait que,
    • pendant de
    • nombreuses années, il avait été conduit à regretter le manque
    • de coopération
    • du gouvernement à la procédure et l'obligation dans laquelle il
    • s'était
    • maintes fois trouvé d'examiner de nombreuses plaintes quant
    • au fond sans
    • pouvoir tenir compte des informations et observations du
    • gouvernement.
  2. 293. En second lieu, sur le fond, le comité observe que les
    • réponses du
    • gouvernement aux différentes allégations présentées dans le
    • présent cas
    • démontrent que sur certains points celui-ci s'est efforcé, au
    • moins
    • partiellement, à faire droit aux griefs de la CUSG. Il n'en
    • demeure pas moins,
    • cependant, que les versions du gouvernement et de la
    • confédération plaignante
    • sont souvent contradictoires et que les mesures prises par le
    • gouvernement
    • pour rétablir les atteintes à la liberté syndicale ne semblent pas
    • toujours
    • être suffisantes.
  3. 294. Pour la CUSG, en effet, les autorités publiques
    • commettent des actes
    • arbitraires contraires aux droits de l'homme et à la liberté
    • syndicale en
    • n'inscrivant pas les syndicats, en laissant licencier les
    • travailleurs des
    • comités d'entreprise qui cherchent à créer de nouveaux
    • syndicats, en
    • n'apportant pas son appui aux travailleurs afin qu'ils obtiennent
    • la mise en
    • oeuvre des accords conclus et en favorisant le
    • développement du "solidarisme".
  4. 295. En revanche, sur le premier grief relatif aux lenteurs
    • d'inscription
    • des syndicats par le ministère du Travail et de la Prévoyance
    • sociale, le
    • gouvernement déclare que, s'il était vrai que de 1979 à 1985
    • les gouvernements
    • autoritaires successifs inscrivaient très lentement les syndicats,
    • puisque 39
    • syndicats seulement avaient été inscrits au cours desdites
    • années depuis le
    • retour à la démocratie en 1985, 94 syndicats ont été inscrits
    • dont 59 depuis
    • le mois d'octobre 1987. Le gouvernement affirme également
    • que les délais
    • d'inscription des syndicats ont considérablement diminué, mais
    • il reconnaît
    • que les dispositions du Code du travail actuellement en
    • vigueur ne facilitent
    • pas la procédure d'inscription des syndicats, et il annonce des
    • modifications
    • législatives pour remédier à ce problème.
  5. 296. Le comité veut croire à cet égard que, conformément
    • aux assurances
    • données par le gouvernement dans sa réponse, la refonte de
    • la législation en
    • cours permettra d'adopter des dispositions conformes aux
    • articles 2, 3 et 7 de
    • la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du
    • droit
    • syndical, ratifiée par le Guatemala. Le comité insiste en
    • particulier sur
    • l'importance qu'il attache au principe selon lequel l'acquisition
    • de la
    • personnalité juridique par les organisations de travailleurs ne
    • doit pas être
    • subordonnée à des conditions de nature à mettre en cause
    • l'application des
    • garanties prévues par la convention, et notamment le droit des
    • travailleurs
    • sans autorisation préalable de constituer les organisations de
    • leur choix sans
    • entrave des autorités publiques.
  6. 297. Sur le grief concernant les licenciements de membres de
    • comités
    • d'entreprise qui tentent de fonder des syndicats, le comité note
    • que les
    • allégations de la CUSG relatives aux agissements de la
    • municipalité de San
    • Antonio Suchitepéquez ne sont pas très claires, mais qu'il
    • semble ressortir de
    • la plainte que des travailleurs qui tentaient de créer un
    • syndicat d'employés
    • municipaux ont été licenciés et qu'ils ont introduit des recours
    • devant les
    • tribunaux contre l'illégalité de leur licenciement. Le
    • gouvernement ne réfute
    • pas cette allégation. Il reconnaît même que les intéressés ont
    • engagé des
    • poursuites devant les tribunaux du travail, mais il se retranche
    • derrière la
    • séparation des pouvoirs exécutifs et judiciaires pour prétendre
    • ne pas avoir
    • compétence en la matière.
  7. 298. Le comité, chaque fois qu'il a eu à connaître de
    • mesures de
    • discrimination antisyndicale qui frappaient les travailleurs qui
    • tentaient de
    • créer un syndicat, a toujours rappelé qu'un des principes
    • fondamentaux de la
    • liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier
    • d'une protection
    • adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter
    • atteinte à la
    • liberté syndicale en matière d'emploi - licenciement, transfert,
    • rétrogradation et autres actes préjudiciables -, et que cette
    • protection est
    • particulièrement nécessaire en ce qui concerne les fondateurs
    • de syndicats
    • étant donné que, pour pouvoir remplir de telles fonctions en
    • toute
    • indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne
    • subiront pas de
    • préjudice en raison du mandat syndical qu'ils briguent ou qu'ils
    • détiennent.
    • Le comité estime que la garantie de semblable protection dans
    • le cas de
    • fondateurs de syndicats est nécessaire pour assurer le respect
    • du principe
    • fondamental selon lequel les travailleurs, sans distinction
    • d'aucune sorte,
    • doivent avoir le droit de constituer les organisations de leur
    • choix. (Voir
  8. 254e rapport, cas no 1396, Haïti, paragr. 389.)
  9. 299. Dans le cas d'espèce, le comité souligne que le
    • gouvernement, en
    • ratifiant la convention no 87, s'est librement engagé à garantir
    • à tous les
    • travailleurs, y compris les employés municipaux, le droit de
    • constituer les
    • organisations de leur choix pour promouvoir et défendre leurs
    • intérêts
    • professionnels, économiques et sociaux. En conséquence, le
    • comité demande au
    • gouvernement d'indiquer: 1) si les travailleurs licenciés de la
    • municipalité
    • de San Antonio Suchitepéquez, pour avoir voulu fonder un
    • syndicat, ont été
    • réintégrés dans leur poste de travail, et 2) si ces travailleurs
    • plaignants
    • ont pu constituer le syndicat de leur choix comme ils en
    • exprimaient le désir.
  10. 300. Sur le grief relatif au fait que le gouvernement
    • n'apporterait pas son
    • appui aux travailleurs pour obtenir la mise en oeuvre des
    • accords conclus, et
    • en particulier, dans le cas de l'usine LUNAFIL SA, sur les
    • atteintes au droit
    • de grève qui auraient résulté du conflit du travail qui s'y est
    • déroulé, le
    • comité observe avec regret que, d'après la coupure de presse
    • envoyée par la
    • CUSG, coupure de presse que le gouvernement n'a pas
    • démentie, dans un premier
    • temps des violences ont été perpétrées à l'encontre de 39
    • travailleurs réunis
    • à l'intérieur de l'usine pour défendre pacifiquement leur travail
    • et leur
    • liberté syndicale par des éléments anti-émeute qui ont fait
    • évacuer l'usine
    • par la violence, blessant un syndicaliste et en arrêtant deux
    • autres.
  11. 301. Lorsqu'il a été saisi par le passé de cas de cette nature,
    • le comité a
    • estimé, d'une manière générale, que l'emploi des forces de
    • sécurité, lorsque
    • les faits prouvent que l'intervention de celles-ci a été limitée au
    • maintien
    • de l'ordre public et n'a pas porté atteinte à l'exercice légitime
    • du droit de
    • grève, n'est pas contraire au respect de la liberté syndicale. En
    • revanche, le
    • comité a toujours considéré comme une atteinte aux droits
    • syndicaux l'emploi
    • de la police pour briser une grève. (Voir notamment 230e
    • rapport, cas no 1187,
    • paragr. 674 (République islamique d'Iran), et 234e rapport (cas
  12. no 1227),
    • paragr. 312 (Inde).) Le comité considère aussi que les
    • gouvernements devraient
    • donner des instructions sévères et entamer des procédures
    • disciplinaires
    • efficaces dans les cas où la dispersion de travailleurs par la
    • police a
    • entraîné des blessures graves, et il est d'avis que les
    • arrestations de
    • grévistes comportent des risques de sérieux dangers pour la
    • liberté syndicale.
  13. 302. En outre, le comité note avec intérêt que le
    • gouvernement a offert sa
    • médiation dans le conflit qui se déroulait à l'usine LUNAFIL SA,
    • et qu'à la
    • suite d'un accord intervenu sous les auspices du ministère des
    • Affaires
    • spéciales l'entreprise a accepté de réintégrer 24 des
    • personnes qu'elle
    • occupait auparavant dont les noms ont été proposés par le
    • comité exécutif du
    • syndicat, et que les parties se sont engagées à discuter d'un
    • projet de pacte
    • collectif et à se dessaisir de toute action judiciaire. Dans ces
    • conditions,
    • tout en insistant sur l'importance qu'il attache aux principes
    • qu'il a énoncés
    • dans le paragraphe précédent, le comité estime qu'il n'a pas
    • lieu de
    • poursuivre l'examen de la question.
  14. 303. Sur le grief relatif au développement du "solidarisme"
    • qui, selon la
    • confédération plaignante, serait favorisé par le gouvernement,
    • le comité prend
    • note des dénégations du gouvernement sur ce point ainsi que
    • des indications
    • qu'il fournit selon lesquelles le ministère du Travail et de la
    • Prévoyance
    • sociale a décidé de ne pas inscrire les groupes de travailleurs
    • qui
    • s'associent dans le but de constituer un groupement
    • "solidariste". Le
    • gouvernement explique cependant que le droit d'association
    • est garanti par la
    • Constitution, et que ceux qui souhaitent constituer de tels
    • groupements
    • doivent en adresser la demande au ministère de l'Intérieur.
  15. 304. Le comité estime opportun d'indiquer qu'en matière de
    • développement du
    • "solidarisme" il a déjà souligné en 1985, à propos d'un projet
    • de loi visant à
    • renforcer les associations de "solidarité" (du mouvement
    • "solidariste") qui,
    • selon les plaignants, sont des associations appuyées par les
    • employeurs et
    • parallèles au mouvement syndical, que la réglementation
    • relative aux
    • associations "solidaristes" devrait respecter les activités des
    • syndicats
    • garanties par la convention no 98. (Voir cas no 1304 dans le
  16. 240e rapport,
    • paragr. 94 (Costa Rica).)
  17. 305. Dans le présent cas, le comité attire l'attention du
    • gouvernement sur
    • l'article 2 de la convention no 98 sur le droit d'organisation et
    • de
    • négociation collective, ratifiée par le Guatemala, qui dispose
    • que les
    • organisations de travailleurs doivent bénéficier d'une
    • protection adéquate
    • contre les actes d'ingérence des employeurs et des
    • organisations d'employeurs,
    • et que sont notamment assimilées à des actes d'ingérence les
    • mesures tendant à
    • provoquer la création d'organisations de travailleurs dominés
    • par un employeur
    • ou une organisation d'employeurs ou à soutenir des
    • organisations de
    • travailleurs par des moyens financiers ou autrement, dans le
    • dessein de placer
    • ces organisations sous le contrôle d'un employeur ou d'une
    • organisation
    • d'employeurs. De plus, les conventions (no 135) concernant
    • les représentants
    • des travailleurs, 1971, et (no 154) sur la négociation collective,
  18. 1981,
    • contiennent elles aussi des dispositions expresses pour
    • garantir que,
    • lorsqu'une entreprise compte des représentants syndicaux et
    • des représentants
    • élus, des mesures appropriées soient prises pour assurer que
    • la présence de
    • représentants élus des travailleurs dans les entreprises ne
    • puisse servir à
    • affaiblir la situation des syndicats intéressés.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 306. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le
    • Conseil
    • d'administration à approuver les recommandations suivantes:
      • a) Le comité note avec intérêt que, contrairement à ce qui
    • est arrivé dans
    • le passé, dans le présent cas le gouvernement a coopéré à la
    • procédure en
    • adressant rapidement ses observations et informations en
    • réponse aux
    • allégations présentées par la confédération plaignante en juin
  2. 1988.
    • b) Au sujet des allégations de lenteur critiquées par la
      • confédération
      • plaignante dans l'inscription des syndicats, le comité note que,
      • dans les
      • faits, d'après le gouvernement, depuis le retour à la démocratie
      • nombre de
      • syndicats ont été inscrits et que les délais d'inscription ont
      • diminué. Le
      • comité invite néanmoins le gouvernement, comme il en a
      • d'ailleurs manifesté
        • lui-même l'intention, à assouplir sa législation pour lever les
      • entraves à
      • l'acquisition de la personnalité juridique des syndicats.
    • c) Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour
      • l'application des conventions et recommandations sur cet
      • aspect du cas, par
      • rapport à l'application de la convention no 87.
    • d) Au sujet des mesures de discrimination antisyndicale qui
      • frappent des
      • travailleurs qui tentent de créer un syndicat d'employés
      • municipaux, le comité
      • rappelle qu'en application de l'article 2 de la convention no 87,
      • ratifiée par
      • le Guatemala, tous les travailleurs, y compris les travailleurs
      • municipaux,
      • doivent avoir le droit de constituer les organisations de leur
      • choix pour la
      • défense de leurs intérêts professionnels. Le comité prie donc le
      • gouvernement
      • d'indiquer si les travailleurs de la municipalité de San Antonio
      • Suchitepéquez
      • licenciés pour avoir voulu fonder un syndicat ont été
      • réintégrés à leur poste
      • de travail à la suite des recours judiciaires qu'ils ont engagés,
      • et si le
      • syndicat des travailleurs de cette municipalité a obtenu la
      • personnalité
      • juridique.
    • e) Au sujet du conflit qui s'est déroulé à l'usine LUNAFIL SA
      • et qui a
      • conduit aux blessures d'un travailleur gréviste et à l'arrestation
      • de deux
      • autres grévistes, le comité rappelle l'importance qu'il attache
      • au principe
      • selon lequel la grève pacifique est un des moyens essentiels
      • dont doivent
      • pouvoir disposer les travailleurs pour la défense de leurs
      • intérêts
      • économiques et sociaux.
    • f) En conséquence, au sujet des blessures infligées à un
      • travailleur
      • gréviste par les forces de sécurité qui faisaient évacuer l'usine
      • dans
      • laquelle se trouvaient 39 grévistes qui, selon les plaignants,
      • défendaient
      • pacifiquement leur travail et leur liberté syndicale, le comité
      • rappelle que
      • les gouvernements devraient donner des instructions sévères
      • et entamer des
      • procédures disciplinaires efficaces dans les cas où la
      • dispersion des
      • travailleurs par la police a entraîné des blessures graves.
    • g) Au sujet de l'arrestation des deux grévistes au cours de ce
      • conflit du
      • travail, le comité souligne les risques sérieux d'abus pour la
      • liberté
      • syndicale qui peuvent résulter de telles arrestations.
    • h) Cependant, le comité note avec intérêt que le conflit du
      • travail à
      • l'usine LUNAFIL SA a été résolu grâce à la médiation des
      • autorités publiques,
      • et il estime, tout en insistant sur l'importance des principes
      • énoncés dans
      • les alinéas précédents, qu'il n'y a pas lieu de poursuivre
      • l'examen de cet
      • aspect du cas.
    • i) Au sujet des allégations concernant le "solidarisme", le
      • comité rappelle
      • l'importance qu'il attache à ce que, conformément à l'article 2
      • de la
      • convention no 98, soit garantie la protection contre les actes
      • d'ingérence des
      • employeurs tendant à provoquer la création d'organisations de
      • travailleurs
      • dominées par un employeur.
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