Afficher en : Anglais - Espagnol
- 210. Le comité a déjà examiné ces plaintes à deux reprises en novembre 1984 (voir 236e rapport, paragr. 603 à 622) et en novembre 1985 (voir 241e rapport, paragr. 688 à 707). Depuis lors, le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication du 16 avril 1986.
- 211. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 212. Les plaintes avaient pour origine un conflit du travail et des grèves qui s'étaient développés en 1983-84 au sein d'une entreprise métallurgique de l'Etat du Minas Gerais, la Belgo Mineira. Ce conflit et ces grèves avaient entraîné des licenciements de travailleurs et de dirigeants syndicaux, des mesures de réquisition de grévistes et le recrutement de travailleurs étrangers à l'entreprise, sous-payés et interdits de syndicalisation. Les plaintes se référaient essentiellement au refus de la direction de procéder au renouvellement de la convention collective et à une tentative de cette même direction de négocier avec les travailleurs non syndiqués.
- 213. D'après les plaignants: - en mai 1983, l 'entreprise avait licencié 192 travailleurs à la suite du refus opposé par le syndicat, en février 1983, d'accepter une réduction des salaires;
- - en juin de la même année, elle avait supprimé le droit d'absence rémunérée des dirigeants syndicaux, droit obtenu plus de vingt ans auparavant;
- - elle avait aussi signifié à l 'Association de bienfaisance du personnel de la Belgo-Mineira la cessation du paiement des cotisations et elle avait supprimé les facilités, notamment administratives, accordées au syndicat depuis 1974 pour assurer la protection sociale du personnel, alors que cette protection est obligatoire puisque l 'entreprise l 'exige des membres de son personnel au moment de l'embauche;
- - elle avait aussi refusé de prélever les cotisations syndicales, prélèvement qu'elle effectuait depuis 1951, au prétexte que le coût d'exploitation en aurait été trop élevé;
- - elle avait enfin refusé, en octobre 1983, de reconduire la convention collective, et le syndicat avait dû déclencher une grève. Après qu'un jugement eut été rendu sur le différend et sur les indemnités de grève, l 'entreprise avait mis à pied des contremaîtres et des ouvriers grévistes;
- - elle avait suspendu divers avantages conquis par le personnel et contraint le syndicat à intenter de nombreuses actions en justice dans le but d'épuiser ses ressources financières;
- - ainsi, la prime de travail nocturne avait été diminuée et le paiement de la prime annuelle de 2 pour cent avait été suspendu;
- - en outre, elle avait intenté des actions contre les dirigeants du syndicat sur la base d'informations divulguées dans les bulletins syndicaux et, sous des prétextes absurdes, elle avait pris des sanctions contre les dirigeants;
- - 246 contremaîtres avaient dû quitter le syndicat après avoir subi des pressions directes;
- - les dirigeants syndicaux Wilson Bastiere et Alipio Inacio Ferreira avaient été démis de leurs fonctions;
- - les dirigeants syndicaux Wics Luiz Gonzaga et Gilberto Augusto Gomes avaient été suspendus pour une durée indéterminée, sans traitement;
- - l 'assistance médicale ambulatoire, dentaire, hospitalière et pharmaceutique, qui était assurée normalement par l'Association de bienfaisance du personnel de Belgo Mineira, avait été suspendue;
- - l'entreprise avait fermé certains secteurs et recruté de la main-d'oeuvre par l'intermédiaire de sous-traitants pour remplacer son propre personnel;
- - enfin, les prix du restaurant d'entreprise avaient été modifiés unilatéralement par une augmentation de 1.250 pour cent.
- 214. D'après les réponses du gouvernement, dont la dernière était parvenue le 5 décembre 1984, les autorités du travail de l 'Etat de Minas Gerais avaient fourni leur médiation dans le conflit. Le gouvernement avait affirmé que le droit de se syndiquer ainsi que l'obligation faite aux employeurs de négocier avec le syndicat qui leur correspond étaient garantis par la loi brésilienne. Il avait précisé que pas moins de sept réunions de conciliation avaient eu lieu en vain et que devant ces échecs une procédure judiciaire avait été déclenchée devant le tribunal du Travail. En outre, en 1984, le syndicat avait intenté trois actions en justice contre l'entreprise, et le gouvernement avait rappelé qu'en droit brésilien les dirigeants syndicaux bénéficient d'une protection d'inamovibilité absolue.
- 215. Les plaignants avaient ultérieurement allégué, par une communication du 6 décembre 1984, des pressions exercées contre les travailleurs convoqués individuellement par la direction pour signer des lettres de renonciation à toute affiliation syndicale, le refus de cette direction de déduire des feuilles de salaires les cotisations syndicales, le licenciement d'un surintendant de la police fédérale, par le ministre de la Justice, pour avoir osé imposer des sanctions aux entreprises et la circulation de "listes noires" désignant les travailleurs qui refusaient de céder aux pressions de la Belgo Mineira. Ces travailleurs auraient été licenciés et empêchés de retrouver un nouvel emploi. Les plaignants avaient également expliqué que l 'employeur, qui depuis plus de 30 ans, négociait avec le syndicat plaignant, avait délégué ses pouvoirs de négociation aux syndicats patronaux de l 'industrie du fer et de la fonderie afin qu'ils négocient en son nom, dans le cadre d'une négociation globale, y compris avec les syndicats de travailleurs des petites entreprises, dans lesquelles les travailleurs négociaient pour la première fois. L'employeur souhaitait provoquer un conflit entre les travailleurs des petites entreprises et ceux de la Belgo Mineira.
- 216. Les plaignants avaient relevé également que le ministre du Travail, alors qu'il en avait fait la promesse lors de l'audience de médiation du 12 juillet 1984, avait refusé de fournir les copies des rapports des inspecteurs du travail qui avaient visité l'entreprise. Le ministre n'avait pas appliqué les sanctions prévues par le décret-loi no 368/68. L'entreprise continuait de refuser de procéder aux déductions de cotisations syndicales alors qu'elle en avait été requise par injonction judiciaire et la police fédérale n'avait pas élucidé les actes criminels commis contre le syndicat par la direction de la Belgo Mineira, bien que ce dernier eût déposé une plainte en 1983, à ce sujet.
- 217. En novembre 1985, le Comité de la liberté syndicale avait regretté que, malgré le temps écoulé depuis la présentation des dernières allégations, aucune information écrite n'eût été reçue du gouvernement depuis décembre 1984. Il avait demandé au gouvernement de communiquer le texte de toute décision judiciaire qui serait intervenue dans ce conflit du travail et de fournir des informations détaillées sur l 'évolution du conflit.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 218. Dans sa réponse du 16 avril 1986, le gouvernement indique que, le 4 octobre 1985, il a contacté M. Leonardo Diniz Dias, le président du syndicat plaignant, qui a fait savoir que la situation s'était améliorée mais qu'elle n'était pas encore entièrement satisfaisante. Les différends de 1983-84 et de 1984-85 n'ont pas encore fait l 'objet d'un jugement définitif. Toutefois, en ce qui concerne les questions soulevées dans la dernière communication des plaignants, le président du syndicat a souligné que les salaires sont désormais ponctuellement payés et que les déductions syndicales, après deux mois d'interruption, sont à nouveau prélevées. Ce n'est pas le cas des déductions pour frais pharmaceutiques, d'utilisation d'ambulance, funéraires et autres dépenses d'assistance. En ce qui concerne les actes criminels commis contre le syndicat, selon le président du syndicat plaignant, la situation est inchangée, la police fédérale n'ayant toujours pas été saisie d'un dossier.
- 219. Le gouvernement estime, en fonction des informations et documents fournis, qu'une copie du rapport des inspecteurs du travail devrait être remise au syndicat afin qu'il puisse, le cas échéant, prendre des mesures appropriées dans l'intérêt de ses affiliés ou de personnes non affiliées. Il affirme, par contre, que le décret-loi no 368 du 19 décembre 1968 n'est pas applicable puisqu'il n'existe aucun retard dans le paiement des salaires justifiant l'application de ce texte. En effet, selon le gouvernement, ce qui s'est produit, c'est que l'entreprise a réduit la journée de travail, de façon unilatérale, et qu'elle a réduit la rémunération correspondant aux heures supplémentaires, laquelle est tombée de 40 à 37,5 pour cent. Elle a également cessé de payer la prime de travail de nuit. En tout état de cause, ce procédé ne constitue pas un retard dans le paiement du salaire contractuel. Celui-ci continue d'être payé ponctuellement, d'où l'inapplicabilité du décret-loi susmentionné, considère le gouvernement.
- 220. Par ailleurs, indique-t-il, les cotisations syndicales continuent d'être déduites régulièrement, après deux mois d'interruption. Les déductions que l'entreprise refuse d'opérer sont celles qui correspondent à des dépenses relatives à des prestations que le syndicat assure directement ou met à la disposition des affiliés. Le président du syndicat, rappelle le gouvernement, a précisé qu'il a intenté une action devant la justice au sujet de ces déductions. Pour le gouvernement, ce point est réglé dans la mesure où la décision incombe maintenant au pouvoir judiciaire. Pour ce qui concerne les actes criminels qui auraient été commis contre le syndicat par les dirigeants de la Belgo Mineira, le gouvernement communique copie de la lettre d'octobre 1983 adressée par le délégué régional du Travail de Minas Gerais au tribunal régional du travail du même Etat et au Procureur régional de la République de Minas Gerais à la suite de la dénonciation, par le syndicat, d'actes criminels. Il ne fournit toutefois pas de commentaire sur ce point.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 221. Le comité observe que le gouvernement s'est efforcé d'obtenir, auprès du président du syndicat, des informations sur l'évolution de ce conflit du travail. En revanche, il ne semble pas que le gouvernement se soit adressé directement à l'employeur pour faciliter une solution définitive de ce conflit.
- 222. Le comité relève néanmoins que, désormais, les salaires sont dûment payés aux travailleurs et que les cotisations syndicales, après deux mois d'interruption, ont pu à nouveau être prélevées.
- 223. Le comité observe également que des recours en justice sont encore en instance dans cette affaire.
- 224. Le comité appelle l'attention du gouvernement sur la nécessité d'assurer une protection adéquate des travailleurs et des dirigeants syndicaux contre les actes de discrimination antisyndicale et en particulier sur la nécessité de s'assurer qu'aucun travailleur ou contremaître ait dû quitter le syndicat après avoir subi des pressions directes.
- 225. Le comité rappelle notamment la très grande importance qu'il attache au recours à la grève comme moyen légitime de défense des intérêts des travailleurs.
- 226. Par ailleurs, le comité demande au gouvernement de s'assurer qu'il n'y ait pas de violations des droits syndicaux à l'occasion du conflit du travail au sein de l'entreprise Belgo Mineira.
- 227. Le comité demande au gouvernement de continuer à le tenir informé de l'issue des recours judiciaires en instance et de l'évolution de ce conflit du travail.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 228. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur la nécessité d'assurer une protection adéquate des travailleurs et des dirigeants syndicaux contre tous actes de discrimination antisyndicale.
- b) Le comité rappelle en particulier la très grande importance qu'il attache au recours à la grève comme moyen légitime de défense des intérêts des travailleurs.
- c) Le comité demande au gouvernement de s'assurer qu'il n'y ait pas de violations des droits syndicaux à l'occasion du conflit du travail au sein de l'entreprise Belgo Mineira.
- d) Le comité demande au gouvernement de continuer à le tenir informé de l'issue des recours judiciaires en instance et de l'évolution du conflit du travail qui s'est développé dans cette entreprise depuis 1983.