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- 110. Le Comité a déjà examiné ce cas à sa réunion de mai 1984 et a présenté, à cette occasion, un rapport intérimaire au Conseil d'administration. (Voir 234e rapport, paragr. 544 à 554, approuvé par le Conseil d'administration à sa 226e session (mai-juin 1984)).
- 111. Depuis lors, le gouvernement a envoyé certaines observations dans une communication du 1er novembre 1984. Toutefois, considérant que ces informations n'étaient que partielles, le comité a prié à nouveau le gouvernement, à sa réunion de novembre 1984, de fournir des observations détaillées sur les allégations contenues dans la plainte. (Voir 236e rapport, paragr. 6, approuvé par le Conseil d'administration à sa 228e session (novembre 1984)). Le gouvernement a envoyé une autre communication le 30 mai 1985.
- 112. Le Maroc n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 113. A sa réunion de mai 1984, le comité avait dû examiner le cas, en l'absence de réponse du gouvernement qui, malgré un appel pressant lancé par le comité, n'avait toujours pas fourni ses observations.
- 114. Dans sa plainte du 13 mai 1983, la Fédération nationale des travailleurs du rail (UMT) avait déclaré qu'à la suite du refus de la direction générale de l'Office national des chemins de fer (ONCF) d'ouvrir des négociations avec elle, une grève générale avait été organisée du 3 au 21 mai 1983, afin de faire aboutir un cahier de revendications. L'organisation syndicale protestait contre la réaction des autorités à l'occasion de cette grève, laquelle avait consisté en l'emploi de la force armée pour briser la grève et en l'arrestation à Taza, pour faits de grève, de neuf cheminots, le 5 mai 1983. Il s'agissait de Benjilali Abdeslam, Layachi Fouad (délégué du personnel), Meftah Mohamed, Saber Yahia, Ridal Abdellah, Ben Melih Assedine, Zfizef Mohamed, Chahid Mohamed et Khaldi Mohamed. L'organisation plaignante précisait en outre qu'elle avait donné des consignes d'ordre et de discipline aux syndicalistes appelés à la grève. Elle envoyait à l'appui de cette assertion le texte de l'appel à la grève à tous les cheminots publié par elle le 30 avril 1983.
- 115. Dans sa communication complémentaire du 30 mai 1983, l'organisation plaignante alléguait que des réquisitions au travail avaient été remises à tous les cheminots grévistes à leur domicile par les autorités, et elle déclarait que les neuf syndicalistes mentionnés ci-dessus avaient été arrêtés et détenus à la prison civile du 4 au 19 mai 1983, mais qu'ils avaient été jugés par le tribunal de Taza pour refus d'obtempérer aux réquisitions. Elle précisait également que trois d'entre eux, à savoir Ridal Abdellah, Chahid Mohamed et Saber Yahia, avaient été suspendus de leur travail sur décision du directeur de l'exploitation de l'ONCF. En outre, à la suite de la grève, d'autres syndicalistes avaient été appréhendés à Marrakech par la police pour constitution du dossier au tribunal pour faits de grève. L'organisation plaignante ajoutait que les revendications des travailleurs du rail dataient de février 1982 et que, depuis lors, elle s'était adressée de nombreuses fois tant à la direction générale de l'ONCF qu'aux autorités ministérielles compétentes pour leur faire part de ses revendications, mais qu'elle n'avait jamais reçu de réponse ni à celles-ci ni à ses demandes d'audience. En conséquence, le 17 février 1983, une grève générale de 24 heures avait déjà été organisée à la direction d'exploitation; c'est à la suite du mutisme total des responsables de la direction de l'ONCF et du gouvernement qu'une grève générale avait été organisée du 3 au 21 mai 1983.
- 116. A sa session de mai-juin 1984, le Conseil d'administration avait approuvé les conclusions suivantes du comité:
- "a) Le comité réprouve le fait que, malgré le temps écoulé depuis la soumission de la plainte et les demandes nombreuses qui lui ont été adressées, le gouvernement n'ait pas communiqué ses observations sur ce cas.
- b) Au sujet des mesures prises pour briser la grève générale des cheminots de mai 1983, le comité rappelle au gouvernement que tant l'usage de la force armée que les réquisitions à domicile pour obliger les grévistes à reprendre le travail sont des actions inadmissibles à l'égard de travailleurs défendant leurs intérêts professionnels, quand elles ne visent pas le fonctionnement des services essentiels dans des circonstances de la plus haute gravité. Le comité souligne qu'en l'occurrence les transports ferroviaires ne sont pas considérés comme services essentiels au sens strict du terme.
- c) En ce qui concerne le refus maintes fois réitéré de l'Office national des chemins de fer (ONCF) de négocier avec les travailleurs du rail leur cahier de revendications, ce qui a mené ceux-ci à déclencher des grèves, le comité tient à souligner qu'en vertu de l'article 4 de la convention no 98 il appartient à l'Etat Membre qui a ratifié cet instrument d'encourager et de promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire entre les employeurs et les travailleurs. En conséquence, le comité attire l'attention du gouvernement sur la nécessité de permettre aux cheminots de négocier leurs conditions d'emploi et de salaire.
- d) Le comité exprime sa vive préoccupation pour l'arrestation pour fait de grève de neuf syndicalistes jugés pour n'avoir pas obtempéré aux réquisitions au travail. Tout en déplorant vivement que des sanctions d'emprisonnement soient prises à l'égard de syndicalistes en grève, le comité reste très préoccupé par les mesures de suspension de leur travail qui ont frappé trois d'entre eux. Le comité considère qu'il s'agit là d'une discrimination en matière d'emploi pour exercice d'activités syndicales licites, contraire à l'article 1 de la convention no 98 et portant atteinte à la liberté syndicale; en conséquence, il demande au gouvernement de faire en sorte que ces trois travailleurs soient au plus tôt réintégrés dans leur emploi et de lui transmettre des informations à ce sujet.
- e) Le gouvernement est instamment prié de transmettre ses commentaires sur les allégations de l'organisation plaignante."
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 117. Dans sa communication du 1er novembre 1984, le gouvernement déclare qu'au terme d'une série de réunions groupant les représentants du ministère des Transports et ceux de l'Union marocaine du travail, il a été décidé d'accorder aux travailleurs du rail une prime spéciale de 89,00 dirhams par mois, à compter du 1er mai 1983. Selon le gouvernement, l'affaire en cause a été ainsi définitivement réglée. Dans une communication ultérieure du 30 mai 1985, le gouvernement a indiqué que tous les travailleurs mentionnés dans la plainte ont réintégré leur emploi.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 118. Dans cette affaire de grève dans les chemins de fer organisée du 3 au 21 mai 1983 pour obtenir la satisfaction de revendications professionnelles, le comité observe avec un profond regret que, bien que la plainte ait été présentée le 13 mai 1983, le gouvernement n'a fourni qu'une communication extrêmement brève qu'il a envoyée le 1er novembre 1984 après avoir reçu plusieurs appels pressants du comité et des informations ultérieures pendant qu'il siégeait.
- 119. Dans le présent cas, le gouvernement, tout en reconnaissant qu'un conflit du travail a eu lieu dans le secteur des chemins de fer en mai 1983, s'est borné à affirmer qu'après une série de réunions regroupant les représentants du ministère des Transports et ceux de l'Union marocaine du travail une prime a été accordée aux travailleurs du rail à compter du 1er mai 1983.
- 120. Dans ces conditions, le comité se doit de rappeler les conclusions auxquelles il est parvenu antérieurement, à savoir que l'usage de la force armée et les réquisitions de grévistes pour briser une grève de revendications professionnelles, en dehors des services essentiels ou dans des circonstances de la plus haute gravité, constituent une violation grave de la liberté syndicale.
- 121. Le comité estime que les arrestations qui ont frappé neuf grévistes nommément désignés le 5 mai 1983, les peines de prison que leur aurait infligé un tribunal pour refus d'obtempérer aux ordres de réquisition et le licenciement de trois d'entre eux constituent une grave discrimination en matière d'emploi contraire à la convention no 98 ratifiée par le Maroc.
- 122. Le comité observe que le gouvernement n'a pas nié ces allégations; il observe cependant que le gouvernement affirme maintenant que tous les travailleurs concernés ont été réintégrés dans leur emploi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 123. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité observe avec un profond regret que ce n'est qu'après plusieurs appels pressants que le gouvernement a indiqué qu'après plusieurs réunions une prime a été accordée aux travailleurs du rail en mai 1983, mettant fin à ce conflit du travail et que les travailleurs licenciés pour avoir pris part à la grève ont été réintégrés.
- b) Le comité rappelle avec fermeté que l'usage de la force armée et des réquisitions pour briser une grève de revendications professionnelles constitue une violation grave de la liberté syndicale.