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Rapport intérimaire - Rapport No. 157, Juin 1976

Cas no 801 (Uruguay) - Date de la plainte: 01-SEPT.-74 - Clos

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  1. 118. Le comité a examiné ces cas pour la dernière fois à sa session de novembre 1975 et a présenté à cette occasion un rapport à leur sujet qui figure aux paragraphes 157 à 253 de son 153e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 198e session (novembre 1975).
  2. 119. Ayant analysé les informations disponibles à la suite de l'application de la procédure de contacts directs, le comité avait jugé approprié et convenable, étant donné la nature de l'affaire, de poursuivre l'examen de l'évolution de la situation syndicale en Uruguay et de la suite donnée à ses recommandations, conformément aux dispositions de la procédure en vigueur. C'est pourquoi le comité avait recommandé au Conseil d'administration d'inviter le gouvernement à lui communiquer, avant la session de février 1976 du comité, des informations complètes sur les mesures prises ou envisagées pour donner suite aux recommandations formulées, ainsi que ses observations sur les questions et allégations encore en suspens.
  3. 120. Le gouvernement a communiqué, en date du 27 janvier 1976, deux communications en réponse à cette demande et à diverses nouvelles plaintes présentées par différentes organisations.
  4. 121. L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations relatives aux restrictions des droits syndicaux

A. Allégations relatives aux restrictions des droits syndicaux
  1. 122. En ce qui concerne ces allégations, le comité avait recommandé au Conseil d'administration de signaler au gouvernement l'importance qu'il attache à l'adoption et à l'application rapides d'une législation syndicale conforme aux normes de la convention no 87, en tenant particulièrement compte à ce sujet des observations formulées par le comité et par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations en rapport avec le décret no 622 réglementant les activités syndicales.
  2. 123. Le gouvernement déclare dans sa communication que, comme l'avait exposé le ministre du Travail et de la sécurité sociale au représentant du Directeur général au cours de la mission de contacts directs, le gouvernement étudie actuellement les mesures pratiques et réglementaires qui permettront une rapide reprise de l'activité syndicale, en l'entourant des plus grandes garanties pour assurer une liberté réelle et empêcher que ne se reproduisent les écarts qui avaient rendu nécessaires les mesures extraordinaires que l'on sait.
  3. 124. Cependant, poursuit le gouvernement, les causes qui avaient motivé ces mesures extraordinaires persistent sous bien des formes, c'est-à-dire agissements séditieux concertés, avec agression idéologique et armée. C'est ce que démontrent les résultats des récentes opérations des forces chargées de préserver l'ordre public, qui ont permis de démanteler un puissant dispositif militaire. Le gouvernement donne dans sa communication des précisions sur l'armement saisi. L'agitation intérieure, ajoute-t-il, la propagande mensongère, l'incitation à la violence constituent les buts immédiats de groupes qui visent à plus longue échéance à l'usurpation du pouvoir.
  4. 125. Le gouvernement réitère son souci constant de préserver les libertés syndicales, mais souligne énergiquement que ces libertés ne pourront ni ne devront jamais permettre à des minorités habiles, détachées de la communauté nationale, de s'en couvrir pour les dénaturer et les retourner contre les institutions nationales, au mépris de la volonté des travailleurs. Le gouvernement déclare que l'un des principes fondamentaux qui doivent présider à l'exercice des libertés syndicales est d'éviter, par des moyens légaux, que les organisations syndicales ne mènent des activités étrangères à leur nature et qu'elles ne se compromettent dans des idéologies, des philosophies et des politiques qui restreignent leur propre liberté.
    • Allégations relatives à la dissolution d'organisations syndicales
  5. 126. En ce qui concerne les allégations relatives à la dissolution de la Convention nationale des travailleurs, du Syndicat unique national de la construction et des activités annexes et de la Fédération des professeurs de l'enseignement secondaire, le comité avait recommandé au Conseil d'administration de signaler au gouvernement qu'en procédant à ladite dissolution par voie de décret ou de résolution, il n'avait pas observé les dispositions de l'article 4 de la convention no 87, ratifiée par l'Uruguay, et d'appeler son attention sur l'importance que le comité attache au respect de cette règle.
  6. 127. Dans sa communication, le gouvernement reconnaît l'importance du principe énoncé à l'article 4 de la convention no 87, pour autant qu'il vise à protéger contre les fluctuations politiques les organisations syndicales proprement dites. Cependant, continue le gouvernement, le principe ne s'applique pas à des organisations qui, bien qu'elles aient pu à l'origine être considérées comme syndicales, ont cessé de l'être et sont passées à des activités d'un tout autre caractère qui menacent gravement la sécurité et l'ordre publics dans les pays où elles agissent. Les documents saisis, qui sont encore à l'étude, ont permis d'établir de prime abord le rapport existant entre certaines des organisations syndicales dissoutes par le pouvoir exécutif et certains groupes politiques séditieux et, de plus, clandestins.
    • Allégations relatives à la détention et aux mandats d'arrêt des dirigeants et militants syndicaux
  7. 128. En ce qui concerne ces allégations, le comité avait d'abord traité du cas de MM. Enrique Pastorino et José d'Elia, dirigeants de la convention nationale des travailleurs. Etant donné le temps écoulé depuis les événements qui avaient motivé le mandat d'arrêt décerné contre eux et compte tenu du fait que les autres dirigeants de la CNT qui avaient été arrêtés en vertu de la même disposition avaient tous été libérés, le comité avait recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement de bien vouloir examiner la possibilité d'annuler cette mesure, contribuant ainsi à régler les problèmes existant en matière de liberté syndicale.
  8. 129. Le comité s'était ensuite référé au cas d'un autre dirigeant de la CNT, M. Vladimir Turiansky, qui se trouvait en état d'arrestation, et avait recommandé au Conseil d'administration de demander au gouvernement de bien vouloir fournir des informations sur la situation légale de cette personne et les mesures prises à son égard.
  9. 130. Dans sa communication, le gouvernement indique à nouveau que, en ce qui concerne les mandats d'arrêt décernés contre certains dirigeants de la CNT, il s'agissait d'amener les intéressés à régulariser leur situation. Dans certains cas, les personnes recherchées ne se sont pas présentées aux autorités compétentes, d'où le maintien des mandats. Il convient, poursuit le gouvernement, d'ajouter à ces circonstances les preuves de collusion évoquées plus haut, ce qui non seulement conserve toute leur justification aux mandats d'arrêt, mais exige qu'il leur soit donné effet.
  10. 131. En ce qui concerne M. Vladimir Turiansky, le gouvernement fait savoir qu'il se trouve mis à la disposition de la justice militaire pour appartenance active à l'organisation politico-militaire récemment démantelée, évoquée plus haut.
  11. 132. Le comité avait dressé une liste de syndicalistes recherchés, arrêtés ou tenus à la disposition de la justice militaire et avait recommandé au Conseil d'administration de rappeler le principe selon lequel, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étrangers à leurs fonctions ou à leurs activités syndicales, les personnes en question devraient être jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. Le comité avait également recommandé que le Conseil d'administration demande au gouvernement de bien vouloir donner des informations sur la décision qui serait adoptée ou de transmettre, avec leurs attendus, les textes des jugements qui seraient prononcés contre les syndicalistes déférés devant la justice militaire, et de fournir des informations sur la situation de divers syndicalistes détenus.
  12. 133. Le gouvernement se réfère, dans sa communication, à l'article 8 de la Constitution de l'Uruguay, qui pose en principe l'égalité de toutes les personnes se trouvant sur le territoire du pays. La rapidité ou la lenteur des procédures auxquelles sont soumis les syndicalistes ne relèvent d'aucune discrimination à leur égard. En ce qui concerne le jugement des syndicalistes par une autorité judiciaire impartiale et indépendante, le gouvernement indique que les délits de droit commun relèvent de la justice ordinaire, c'est-à-dire du pouvoir judiciaire, dont l'indépendance et l'impartialité sont bien connues. Quant à la justice militaire, s'il est vrai qu'ils dépendent administrativement du pouvoir exécutif, ses juges et tribunaux sont juridiquement indépendants, et leurs arrêts sont considérés comme une émanation de la justice nationale. De plus, en temps de paix, la Cour suprême de justice fait office de cour d'appel et de cassation.
  13. 134. A l'égard des syndicalistes mentionnés par le comité, le gouvernement fait savoir qu'il a demandé les informations requises, qu'il communiquera au BIT sitôt qu'il les aura lui-même reçues. Dans sa seconde communication, du 27 janvier 1976, le gouvernement se réfère à l'un des syndicalistes en question, Jacinto Galloso, poursuivi par la justice militaire pour les délits visés à l'article 58, alinéas 2 et 3, du Code militaire.
  14. 135. Le comité s'était également référé aux allégations concernant les mauvais traitements, et avait recommandé au conseil d'administration, même si ces traitements pouvaient avoir eu un caractère exceptionnel, de signaler au gouvernement l'importance qu'il y a à prendre les mesures qui s'avèrent nécessaires, notamment à donner des instructions spécifiques et à prendre des sanctions efficaces, pour s'assurer qu'aucun détenu ne soit soumis à de mauvais traitements.
  15. 136. Le gouvernement déclare à cet égard, dans sa communication, que le pouvoir exécutif a ordonné chaque fois une enquête détaillée sur les cas signalés par les plaignants et que, lorsque a été établie une quelconque irrégularité de ce genre, les mesures administratives propres à punir les responsables ont été prises.
    • Allégations relatives à la perquisition des locaux syndicaux
  16. 137. Le comité avait recommandé au Conseil d'administration de signaler à l'attention du gouvernement certains principes et considérations concernant la perquisition des locaux syndicaux, afin qu'il prenne les mesures nécessaires pour éviter l'éventualité de perquisitions abusives des locaux syndicaux, pour restituer les biens syndicaux saisis et pour rouvrir les locaux fermés.
  17. 138. Le gouvernement indique, dans sa communication, que la perquisition des locaux syndicaux a toujours été décidée conformément à la législation en vigueur. Le matériel saisi est immédiatement restitué s'il n'en ressort aucune preuve d'activités autres que syndicales. Dans le cas contraire, ils sont remis à l'autorité judiciaire compétente. Le gouvernement ajoute que les locaux syndicaux non rouverts sont uniquement ceux d'organisations qui avaient été interdites en raison de leurs activités extra-syndicales.
    • Allégations relatives à des actes de discrimination antisyndicale
  18. 139. Le comité avait recommandé au Conseil d'administration d'appeler l'attention du gouvernement sur les principes et les considérations formulés à cet égard, et de l'inviter à prendre les mesures nécessaires, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, pour que ne se produisent pas d'actes de discrimination antisyndicale et, en particulier, pour donner une pleine application aux dispositions pertinentes de la convention no 98, ratifiée par l'Uruguay.
  19. 140. Dans sa communication, le gouvernement fait savoir que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale est doté des structures administratives qui lui permettent de traiter et de résoudre d'urgence les problèmes qui se posent à cet égard. Il existe dans ce cadre un service chargé de l'assistance judiciaire gratuite aux travailleurs et de la conciliation en première instance; faute d'accord à ce niveau, les différends sont soumis aux tribunaux du travail, conformément aux dispositions de la loi no 14.188 du 5 avril 1974. Ces procédures, indique le gouvernement, assurent la protection des travailleurs contre tout traitement abusif ou illégal.
    • Observations générales du gouvernement
  20. 141. Le gouvernement déclare d'une façon générale qu'il n'a mené aucune activité antisyndicale, mais que les mesures adoptées sont dues à des circonstances exceptionnelles et motivées par des activités extra-syndicales que les intéressés eux-mêmes reconnaissent et qui menacent gravement la sécurité nationale en s'attaquant à ses institutions légitimes. Le gouvernement a été obligé d'adopter des mesures extraordinaires pour défendre les principes de liberté, ainsi que sa souveraineté et sa sécurité intérieure, contre une agression concertée qui ne recule devant aucun moyen.
    • Nouvelles allégations
  21. 142. Dans son 153e rapport (paragraphe 246), le comité avait résumé les allégations reçues depuis la mission de contacts directs, allégations principalement relatives à la perquisition de deux locaux syndicaux et à l'arrestation de dirigeants et militants syndicaux. Au moment de la dernière session du comité, le gouvernement n'avait pas encore envoyé ses observations sur ces points.
  22. 143. Le BIT a par la suite reçu et communiqué au gouvernement d'autres communications alléguant de nouvelles violations de la liberté syndicale et émanant de la Fédération internationale syndicale de l'enseignement (25 septembre, 20 et 21 novembre 1975 et 15 janvier 1976), de l'Union internationale des syndicats des industries métallurgiques (5 et 19 novembre 1975), de l'Organisation internationale des journalistes (6 novembre 1975), de la Fédération syndicale mondiale (6, 14 et 20 novembre 1975 et 15 et 16 janvier 1976), de l'Union internationale des travailleurs du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (21 novembre 1975) et de l'Union internationale des syndicats des travailleurs des transports (27 novembre 1975 et 15 janvier 1976). Ces allégations concernent l'arrestation de nombreux dirigeants et militants syndicaux; la mort, par suite de mauvais traitements reçus en cours de détention, d'Alvaro Balbi, fils d'un dirigeant en vue de la Fédération uruguayenne des instituteurs, et de J. Argenta, membre du Syndicat unique de l'administration nationale des ports (SUANP); l'occupation par la police des locaux de l'Union nationale des travailleurs des métaux et branches connexes (UNDUMRA), maintenant utilisés comme prison, de l'Association des employés de banque d'Uruguay (AEBU), maintenant occupés par la police féminine, du groupement du personnel des services de l'électricité et des télécommunications de l'Etat (AUTE), de l'Association des travailleurs des eaux de l'Etat (OSE) et du Syndicat ouvrier de l'industrie du bois et branches connexes; la perquisition des locaux du Syndicat unique de l'administration nationale des ports (SUANP); et la mise en tutelle du Syndicat des médecins.
  23. 144. Le comité rappelle que, pendant la dernière session du Conseil d'administration, en novembre 1975, le groupe des travailleurs a lui aussi fait état de l'arrestation de divers syndicalistes, dont les noms sont donnés dans les communications mentionnées au paragraphe précédent.
  24. 145. La Fédération syndicale mondiale déclare, dans sa communication du 14 novembre 1975, que le gouvernement, chaque fois que l'on dénonce des violations de la liberté syndicale, s'efforce de dissimuler, de minimiser et de travestir les motifs réels de l'arrestation des travailleurs et des syndicalistes, et argue du prétexte que ces arrestations seraient dues à des activités politiques, et non syndicales. C'est pour couper court à de tels arguments, précise la FSM, que les organisations qui lui ont transmis leurs plaintes ont tenu à expliquer le climat dans lequel se sont déroulées les arrestations. En septembre et octobre 1975, les travailleurs et les syndicats ont lancé une grande campagne destinée à obtenir l'augmentation des salaires, gravement dépréciés par l'inflation. Au cours de cette campagne ont été tenues des réunions et ont été recueillies des signatures à l'appui des revendications; les pétitions ont été présentées aux autorités par des délégations nombreuses de travailleurs. Devant ces faits, le gouvernement a déclenché une vague de répressions destinées à intimider les travailleurs et à empêcher que ne s'étende l'exemple de la lutte pour les droits et de la revendication salariale.
  25. 146. Dans sa seconde communication envoyée le 27 janvier 1976, le gouvernement a communiqué des informations concernant principalement les allégations relatives à l'arrestation de dirigeants et de militants syndicaux.
  26. 147. En ce qui concerne les syndicalistes évoqués au paragraphe 246 du 153e rapport du comité, les informations du gouvernement ne portent que sur Pedro Toledo, dirigeant syndical des chemins de fer, tenu à la disposition de la justice militaire; Henderson Cardozo, secrétaire de la COVISUNCA (qui n'est pas en fait un syndicat mais une coopérative de logement des ouvriers de la construction), qui avait appelé à la lutte armée contre le gouvernement lors de diverses assemblées de la coopérative et qui est poursuivi pour délit de conspiration attentatoire à la Constitution; Humberto Rodriguez, dirigeant syndical portuaire, poursuivi pour le même délit; et Juan Gómez, à propos duquel se pose un problème d'identification puisque plusieurs personnes de ce nom se trouvent soit en jugement, soit recherchées, soit en liberté.
  27. 148. Le gouvernement donne des renseignements sur la plupart des syndicalistes cités dans les allégations les plus récemment parvenues au BIT ont été remis en liberté: Miriam Brayer, institutrice; Atilio Vargas, du Syndicat de la construction (SUNCA); et Sol Logullo, Heber Scarone, Alba Bonilla Villagrán, Jorge Guido Bouve, Washingtón Tirelli, Atanasio Merelles, Francisco Cañete González, Rafael Rodamina Natale, Walter Stanely, Oscar Simonelli Fiori et Marta Maya Barrangue de Scarone, arrêtés lors de la perquisition effectuée dans les locaux des syndicats de l'Union nationale des travailleurs de la métallurgie; cette perquisition avait été ordonnée du fait que l'on avait trouvé dans les locaux des matériaux de propagande se rapportant à des organisations politiques clandestines.
  28. 149. Sont l'objet de poursuites: Juan González (enregistré sous le nom de Juan Antonio González García), de l'Organisation ouvrière de l'omnibus, en liberté, inculpé le 29 octobre 1975 en vertu de l'article 62 du Code pénal ordinaire combiné avec l'article 60 (VI) du Code pénal militaire; Didasko Pérez, dirigeant de la Fédération des instituteurs, déféré à la justice militaire, pour délit d'assistance à association subversive; Ariel Mederos et Felipe Diaz, du Syndicat de la construction, déférés à la juridiction militaire d'instruction, pour délits visés par l'article. 58, alinéas 2 et 3, du Code pénal militaire; Nelson López, de l'Organisation ouvrière de l'omnibus, pour complicité d'assistance à association subversive; Héctor Saxlund, travailleur, déféré à la juridiction militaire d'instruction; et Mario Elirio Alvarez Pons, Gustavo Gravina, José Vicente Estévez, Rubén Alberto Banquero, Jorge Rial Gutiérrez, Pedro Betancur, Raquel Oggiani Poggi, Amilcar Raúl da Costa, José Francisco Bebeacua et Hugo Leoncio Rey (le gouvernement précise qu'il ne s'agit pas toujours d'ouvriers, car certains d'entre eux sont des étudiants ou des retraités), déférés à la justice militaire pour délit de complicité d'assistance à association subversive.
  29. 150. Sont à la disposition de la justice militaire: Alicia Rezzano, dirigeante de l'AUTE, Federico Martinez, de la Fédération des employés de commerce, Juan Carlos Urruzola, de l'Association de la presse, et Alberto Altesor, ancien dirigeant syndical des chemins de fer.
  30. 151. Le dirigeant syndical Elbio Quinteros, de l'Association des employés municipaux de Montevideo, est recherché depuis le 4 juillet 1973.
  31. 152. Le gouvernement fait également état du sort d'Alvaro Balbi, dont les plaignants allèguent qu'il est mort des suites de mauvais traitements. Selon le gouvernement, Balbi est décédé alors qu'il se trouvait en détention dans un local de la police. "Il y a eu intervention immédiate du juge d'instruction militaire en service, qui s'est rendu sur les lieux avec le médecin-légiste. Le magistrat a pris les mesures de rigueur en pareil cas, ordonnant l'autopsie et ouvrant l'instruction. Une fois les résultats de ces mesures connus, ils seront communiqués au BIT. Contrairement au dire des plaignants, le défunt était membre actif de groupements séditieux et avait été arrêté à l'occasion d'une réunion clandestine." Le gouvernement n'a pas encore présenté d'observations sur les allégations relatives à la mort de J. Argenta, membre du SUANP.
  32. 153. Enfin, en ce qui concerne l'allégation relative à la mise en tutelle du Syndicat des médecins, le gouvernement indique que la mesure vise la caisse de secours de ce syndicat, et seulement en ce qui concerne les aspects administratifs et financiers des activités sociales de cette caisse. La caisse de secours compte en effet un grand nombre d'affiliés, et la situation financière alarmante dans laquelle elle se trouvait laissait craindre pour le maintien des prestations. La mise en tutelle a permis d'améliorer substantiellement divers aspects des activités d'assistance.
  33. 154. Le gouvernement n'a pas encore communiqué ses observations sur les nouvelles allégations relatives à l'occupation et à la perquisition de divers locaux syndicaux.
  34. 155. Peu de temps avant la session du comité, deux communications, en date des 29 janvier et 2 février 1976, ont été reçues. Elles émanent de l'Union internationale des syndicats des travailleurs des services publics et assimilés et contiennent des allégations relatives à la détention et aux mauvais traitements dont ont fait l'objet les dirigeants suivants des travailleurs de l'Etat: Rubén Villaverde, Dr Hugo Sacchi, Eugenio Bentaberry, Vladimir Turiansky, Antonio Bacchi, Roberto Casanova, Luis Santos, A. Meneses, Ismael Peña et Honorio Lindner; certains d'entre eux ont déjà été mentionnés dans des plaintes antérieures. De son côté, la FSM a envoyé une communication en date du 17 février 1976, où elle déclare que M. Turiansky a dû être opéré à la suite de mauvais traitements reçus et que son état reste grave. Rosario Pietrarroia, secrétaire général de l'Union nationale des travailleurs du métal, et Gerardo Cuesta, dirigeant de la CNT, ont été également arrêtés, selon la FSM. Conformément à la procédure en vigueur, les communications ont été transmises au gouvernement afin qu'il puisse formuler ses observations.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  • Conclusions du comité
    1. 156 Le comité prend note des diverses informations et observations communiquées par le gouvernement. Le comité tient d'abord à exprimer sa grave préoccupation pour le fait que, malgré le temps écoulé et en dépit des déclarations faites par le ministre du Travail au représentant du Directeur général en juin 1975 - déclarations selon lesquelles le gouvernement espérait être en mesure de proposer une nouvelle législation syndicale vers la fin de ladite année ou le début de 1976 - la situation à cet égard n'a pas encore changé. Le comité avait déjà recommandé au Conseil d'administration de signaler au gouvernement l'importance qu'il attache à l'adoption et à l'application rapides d'une législation syndicale conforme aux dispositions de la convention no 87. Le gouvernement déclare maintenant qu'il étudie les mesures qui permettront une rapide reprise des activités syndicales, mais ajoute que les principales raisons qui avaient motivé les dispositions exceptionnelles qui avaient été prises existent encore. A cet égard, le comité doit insister sur les considérations qu'il a formulées à sa dernière session, lors de laquelle il avait signalé combien il importe de distinguer entre, d'une part, les questions relatives à l'exercice des droits syndicaux et, d'autre part, celles qui touchent à la poursuite, par certains syndicalistes, d'activités politiques actuellement interdites, qui sont étrangères au domaine syndical ou vont au-delà des activités syndicales normales. Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas encore pris des mesures concrètes pour normaliser la situation syndicale, prolongeant ainsi une situation dans laquelle la législation et les pratiques restrictives limitent sérieusement les activités propres à toute organisation professionnelle, en violation des principes fondamentaux de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ratifiée par l'Uruguay.
    2. 157 En ce qui concerne la question de la dissolution d'organisations syndicales par décision du pouvoir exécutif, le comité répète ce qu'il a déclaré antérieurement, à savoir qu'il incombe normalement aux juges de décider si certains faits reprochés à un syndicat doivent donner lieu à sa dissolution conformément aux dispositions de la législation. L'article 4 de la convention no 87 dispose expressément que les organisations de travailleurs et d'employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou suspension par voie administrative.
    3. 158 Le comité observe que plusieurs travailleurs et syndicalistes, après avoir été arrêtés par la police, ont été libérés. Le comité a déjà signalé le risque qu'implique pour les droits syndicaux la détention de syndicalistes contre lesquels aucun chef d'inculpation n'est finalement retenu; c'est pourquoi le gouvernement devrait prendre des dispositions afin que les autorités intéressées reçoivent des instructions appropriées pour prévenir le danger d'arrestations injustifiées.
    4. 159 En ce qui concerne la liste de syndicalistes qui, selon la dernière communication du gouvernement, sont l'objet de poursuites ou sont tenus à la disposition de la justice militaire, le comité souhaiterait que le gouvernement fournisse des informations sur la décision prise à leur égard et, le cas échéant, communique le texte des jugements prononcés avec leurs attendus. De même, le comité attend encore les informations du gouvernement sur les autres syndicalistes arrêtés, mentionnés au 153e rapport et dans les nouvelles allégations.
    5. 160 Le comité note en particulier les déclarations du gouvernement à propos des allégations de mauvais traitements, et notamment que le pouvoir exécutif a ordonné dans chaque cas une enquête détaillée sur les cas signalés par les plaignants. A cet égard, le comité attend encore les résultats des mesures en cours concernant la mort de M. Alvaro Balbi, dont le gouvernement a promis communication, ainsi que les informations concernant la mort du travailleur J. Argenta et les allégations formulées au sujet de M.Vladimir Turiansky. Le comité tient à répéter ici l'importance qu'il attache à ce que soient données des instructions spécifiques en la matière, visant essentiellement à empêcher toute pratique éventuelle de cette nature.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 161. Etant donné toutes ces circonstances, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de regretter qu'en dépit des déclarations faites par le ministre du Travail en juin 1975, le gouvernement n'a pas encore pris de mesures concrètes pour normaliser la situation syndicale, de telle manière que les organisations professionnelles de travailleurs et leurs membres puissent jouir largement des garanties et exercer pleinement les droits prévus dans les conventions sur la liberté syndicale ratifiées par l'Uruguay.
    • b) de réitérer le principe énoncé à l'article 4 de la convention no 87, selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou suspension par voie administrative;
    • c) en prenant note de la libération de divers travailleurs et syndicalistes qui avaient été arrêtés, d'appeler l'attention du gouvernement sur les considérations qui figurent au paragraphe 158, et en particulier sur les dangers qu'impliquent pour les droits syndicaux les détentions de syndicalistes contre - lesquels aucun chef d'inculpation n'est finalement retenu;
    • d) de prendre note des informations communiquées par le gouvernement sur certains des syndicalistes arrêtés et de demander au gouvernement de lui communiquer les informations encore attendues, et spécialement les décisions prises à l'égard de ces personnes ainsi que le texte, avec leurs attendus, des jugements prononcés à leur égard;
    • e) de prendre note de la déclaration du gouvernement relative aux allégations de mauvais traitements, de répéter l'importance qu'il attache à ce que soient données des instructions spécifiques en la matière, visant essentiellement à prévenir de toute pratique éventuelle de cette nature, et de prier le gouvernement de lui envoyer les informations dont il est question au paragraphe 160;
    • f) de prier le gouvernement de communiquer des observations détaillées sur l'occupation et la perquisition des locaux syndicaux auxquelles se réfère le paragraphe 143;
    • g) de prendre note de ce rapport intérimaire, étant entendu que le comité soumettra un nouveau rapport quand il aura reçu les informations demandées.
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