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Rapport définitif - Rapport No. 120, 1971

Cas no 611 (Costa Rica) - Date de la plainte: 13-OCT. -69 - Clos

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  1. 153. La présente affaire a déjà été examinée par le comité à sa session du mois de mai 1970, à l'occasion de laquelle il a présenté au Conseil d'administration un rapport intérimaire contenu aux paragraphes 77 à 121 de son 119e rapport. Ce rapport a été adopté par le Conseil d'administration à sa 180e session (mai juin 1970).
  2. 154. Le cas comportait les allégations suivantes: allégations relatives à des bagarres entre service d'ordre et grévistes à Puerto Limón, allégations relatives au licenciement des travailleurs de la fabrique de lingerie Luxform, allégations relatives aux menaces de répression qui pèseraient sur le mouvement ouvrier et paysan, allégations relatives à des mesures prises à l'encontre de M. Juan Rafael Solis Barboza, secrétaire à la presse de l'organisation plaignante, à l'instigation des autorités costariciennes, allégations relatives à l'expulsion de dirigeants syndicaux de la zone bananière occupée par l'entreprise Ticaban, allégations relatives au licenciement des travailleurs syndiqués des plantations et allégations relatives à l'attaque par les forces gouvernementales de travailleurs syndiqués dans le Valle de la Estrella.
  3. 155. Parmi ces allégations, seules les trois dernières restent encore en suspens, le comité ayant présenté sur toutes les autres ses recommandations définitives au Conseil d'administration, qui les a approuvées.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Allégations relatives à l'expulsion de dirigeants syndicaux de la zone bananière occupée par l'entreprise Ticaban
    1. 156 Les plaignants alléguaient que des dirigeants syndicaux avaient été chassés par les forces de police de la zone qu'occupe l'entreprise bananière étrangère de Ticaban.
    2. 157 Dans sa réponse, le gouvernement indiquait que les activités syndicales, à l'instar de toute activité sans rapport avec le travail, ne pouvaient être déployées pendant les heures de travail et ne pouvaient l'être sur les lieux de travail ou dans les propriétés de l'employeur qu'avec le consentement exprès ou tacite de celui-ci. Il en résultait qu'à défaut de ce consentement ces activités pouvaient être considérées comme une violation des interdictions et des obligations prévues pour les travailleurs par les articles 71 et 72 du Code du travail. Par ailleurs, poursuivait le gouvernement, l'exercice d'activités syndicales par des personnes étrangères à l'entreprise dans les propriétés de l'entreprise pouvait être considéré comme une violation du principe de l'inaliénabilité de la propriété prévue par l'article 45 de la Constitution. En conséquence, déclarait le gouvernement, toute personne, qu'elle soit ou non dirigeant syndical, qui pénètre dans les propriétés d'une entreprise pourra en être expulsée par les forces de l'ordre à la demande de l'employeur.
    3. 158 Ayant, à sa session du mois de mai 1970, constaté que c'était ce qui paraissait s'être produit dans le cas présent, le comité, après avoir rappelé l'importance qu'il convient d'attacher aux principes énoncés par la Commission [de l'OIT] du travail dans les plantations à sa première session (Bandung, décembre 1950) a, a, comme il l'avait déjà fait dans des cas antérieurs mettant en cause Costa Rica, recommandé au Conseil d'administration de rappeler au gouvernement l'importance qu'il attache aux possibilités d'accès des représentants syndicaux aux plantations pour l'exercice d'activités syndicales licites et au droit des travailleurs des plantations de tenir sur place des réunions syndicales, d'exprimer la préoccupation que lui cause le fait que les recommandations formulées antérieurement à l'adresse du gouvernement au sujet de divers cas analogues ne semblent pas avoir abouti à l'adoption de mesures concrètes visant à rendre ce droit effectif et de prier le gouvernement de le tenir informé des mesures qu'il aura adoptées ou qu'il envisagera d'adopter à cet effet.
    4. 159 Dans les observations qu'il a présentées le 22 septembre 1970 sur cet aspect de l'affaire, le gouvernement déclare que l'avis juridique no 1772 du 5 septembre 1967 du ministère du Travail maintient et garantit aux dirigeants syndicaux une liberté illimitée afin qu'ils puissent exercer leurs activités au domicile des travailleurs, dans les parcs, sur les places et les chemins appartenant à l'employeur, pourvu que ces activités ne s'exercent pas pendant les heures de travail et ne risquent pas d'interrompre la continuité du travail. « Pour autoriser l'exercice des activités syndicales à n'importe quel moment - poursuit le gouvernement - il serait nécessaire de procéder à une réforme complète de notre ordre juridique, ce qui toucherait la Constitution politique, le Code du travail et toute la législation du travail connexe et complémentaire en vigueur. »
    5. 160 L'avis juridique no 1772 semble donner la possibilité aux dirigeants syndicaux de pénétrer dans les plantations pour y exercer, dans les conditions mentionnées par ledit avis, leurs activités syndicales.
    6. 161 Il apparaît toutefois au comité que l'avis juridique dont il est question est rendu inopérant dans la pratique par la manière dont sont appliquées les dispositions rappelées au paragraphe 157 ci-dessus et dont le comité, à sa session de mai 1970, a eu l'occasion de constater les effets.
    7. 162 Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'insister auprès du gouvernement pour que celui-ci prenne toutes mesures, législatives et autres, visant à consacrer et rendre effectif le droit d'accès des dirigeants syndicaux aux plantations pour l'exercice d'activités syndicales licites, dans le sens de l'avis juridique no 1772 précité.
  • Allégations relatives au licenciement des travailleurs syndiqués des plantations
    1. 163 Il était allégué que de nombreux travailleurs se voyaient licenciés par leurs employeurs du seul fait qu'ils étaient syndicalistes. Les plaignants citaient plusieurs exemples à l'appui de leurs allégations.
    2. 164 A sa session de mai 1970, le comité a constaté que, prises en conjonction, certaines des dispositions du Code du travail permettaient, en pratique, que les employeurs, à condition qu'ils paient l'indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciement injustifié, puissent licencier un travailleur, même si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale.
    3. 165 Dans ces conditions, le comité a recommandé au Conseil d'administration d'inviter le gouvernement à envisager toutes mesures utiles pour accorder une protection adéquate à tous les travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale ainsi que le prévoit la convention no 98 ratifiée par Costa Rica et de le prier de tenir le Conseil d'administration au courant de ce qui aura été fait ou envisagé dans ce sens.
    4. 166 En réponse à cette dernière demande, le gouvernement, dans sa communication du 22 septembre 1970, indique que l'Assemblée législative a récemment été saisie d'un projet de garantie syndicale « qui vise à empêcher au moins le licenciement des dirigeants syndicaux, bien qu'il soit souhaitable que la protection s'étende à toutes les personnes affiliées aux organisations syndicales du pays ».
    5. 167 Le comité recommande au Conseil d'administration de prendre note des informations fournies par le gouvernement sur cet aspect de la question et de prier ce dernier de le tenir au courant de toute évolution de la situation en la matière.
  • Allégations relatives à l'attaque par les forces gouvernementales de travailleurs syndiqués dans le Valle de la Estrella
    1. 168 Les plaignants alléguaient qu'en mai 1969, dans le Valle de la Estrella, un groupe de travailleurs syndiqués qui se dirigeait vers les bureaux de la direction pour exposer une revendication aurait été attaqué avec des grenades lacrymogènes par les forces gouvernementales.
    2. 169 Dans ses observations, le gouvernement ne niait pas être intervenu dans le conflit de Valle de la Estrella; il déclarait toutefois que le mouvement de grève déclenché était illégal à deux titres différents: d'une part, en raison d'une contrainte exercée par la force par les grévistes sur les travailleurs désireux de se rendre au travail pour les empêcher de le faire, ce qui, aux yeux du gouvernement, a justifié son intervention; d'autre part, en raison du fait que les participants au mouvement étant des travailleurs s'occupant de denrées périssables, ils étaient considérés comme assurant un service public et, comme tels, n'étaient pas habilités à recourir à la grève.
    3. 170 A sa session du mois de mai 1970, ayant noté, au vu des explications fournies par le gouvernement, qu'en vertu de l'article 368 du Code du travail les différends susceptibles de survenir entre employeurs et travailleurs dans les services publics doivent obligatoirement être portés pour règlement devant les tribunaux du travail, le comité, avant de formuler ses recommandations définitives sur cet aspect du cas, a recommandé au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir indiquer si les procédures prévues par la loi avaient été suivies avant que ne soit déclenchée la grève et, dans la négative, les raisons pour lesquelles lesdites procédures n'ont pas été mises en oeuvre.
    4. 171 Dans sa communication du 22 septembre 1970, le gouvernement indique que la raison pour laquelle la procédure prévue par l'article 368 du Code du travail n'a pas été suivie réside dans le fait que les parties ont choisi la voie de la négociation collective. Les revendications des travailleurs ayant été repoussées par l'employeur - déclare le gouvernement - et le juge compétent ayant déclaré illégale la grève qui allait se déclencher, c'est alors que s'est instauré le climat de violence dont le ministère a rendu compte à l'OIT. « C'est donc au syndicat plaignant - poursuit le gouvernement - qu'il appartient d'expliquer pourquoi la procédure recommandée à l'article 368 précité n'a pas été mise en oeuvre, puisque, à aucun moment, on ne l'a empêché de suivre cette voie, qui lui a toujours été ouverte. »
    5. 172 Se fondant sur le principe selon lequel les allégations relatives au droit de grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure où elles affectent l'exercice des droits syndicaux, le comité, dans des cas analogues, a estimé que si l'on peut admettre que, dans la fonction publique et les services essentiels, le droit de grève souffre des restrictions, il doit, dans ce cas, exister des garanties adéquates destinées à sauvegarder les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de promouvoir leurs intérêts professionnels, et que de telles restrictions doivent s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer.
    6. 173 Dans le cas d'espèce, il semble que de telles procédures aient existé et que ce soient les plaignants qui se soient abstenus d'y avoir recours.
    7. 174 Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect de l'affaire n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
    8. 175 La communication du gouvernement en date du 22 septembre 1970, outre les réponses aux points précis soulevés par le comité et par le Conseil d'administration dont il a été question dans les paragraphes précédents, contient un certain nombre de renseignements de portée plus générale.
    9. 176 Le gouvernement signale tout d'abord que les dispositions constitutionnelles et celles de la législation du travail qui garantissent le libre exercice des droits syndicaux sont assorties de dispositions pénales - qu'il cite - qui assurent l'application effective des droits consentis en prévoyant des sanctions contre ceux qui y portent atteinte.
    10. 177 Le gouvernement déclare ensuite qu'il a sollicité l'assistance technique de l'OIT, d'une part, en vue de renforcer l'action de la Commission tripartite de la liberté syndicale qui existe à Costa Rica, d'autre part, à l'occasion de l'élaboration d'un nouveau Code du travail, en vue d'incorporer dans ce code des dispositions propres à garantir de façon efficace la liberté syndicale et de prévoir des sanctions adéquates en cas d'atteinte à cette liberté.
    11. 178 Le comité recommande au Conseil d'administration de prendre note des informations d'ordre général fournies par le gouvernement et de prier ce dernier de bien vouloir tenir le Conseil au courant du résultat des efforts qu'il déploie, notamment en ce qui concerne la refonte du Code du travail en matière de liberté syndicale.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 179. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider, pour les raisons indiquées au paragraphe 173 ci-dessus, que les allégations relatives à l'attaque par les forces gouvernementales de travailleurs syndiqués dans le Valle de la Estrella au cours d'une grève illégale n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi;
    • b) en ce qui concerne les allégations relatives à l'expulsion de dirigeants syndicaux de la zone bananière occupée par l'entreprise Ticaban, d'insister auprès du gouvernement pour que celui-ci prenne toutes mesures législatives et autres visant à consacrer et rendre effectif le droit d'accès des dirigeants syndicaux aux plantations pour l'exercice d'activités syndicales licites, dans le sens de l'avis juridique no 1772, de 1967;
    • c) en ce qui concerne les allégations relatives au licenciement des travailleurs syndiqués des plantations, de prendre note des informations fournies par le gouvernement au sujet d'un projet de loi de garantie syndicale et de prier ce dernier de le tenir au courant de toute évolution de la situation en la matière;
    • d) de prendre note des informations d'ordre général fournies par le gouvernement et de prier ce dernier de bien vouloir tenir le Conseil d'administration au courant du résultat des efforts qu'il déploie, notamment en ce qui concerne la refonte du Code du travail en matière de liberté syndicale.
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