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Rapport définitif - Rapport No. 89, 1966

Cas no 407 (Pakistan) - Date de la plainte: 07-JUIL.-64 - Clos

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  1. 21. La plainte du Syndicat des salariés de la Société pour le développement industriel du Pakistan occidental (West Pakistan Industrial Development Corporation) a fait l'objet d'une communication en date du 7 juillet 1964. Le gouvernement a fourni ses observations à son sujet dans une communication en date du 12 septembre 1964.
  2. 22. Le Pakistan a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

23. Dans leur communication, les plaignants déclaraient parler au nom d'une organisation qui comptait environ cinq cents membres. Selon leurs allégations, la direction de la Société pour le développement industriel du Pakistan occidental, entreprise dont les travailleurs avaient constitué le syndicat en question, usait de pratiques déloyales et violait la législation du travail par son attitude hostile à l'égard du Syndicat. Les plaignants déclaraient que divers travailleurs avaient déjà subi un préjudice du fait de la Société.

23. Dans leur communication, les plaignants déclaraient parler au nom d'une organisation qui comptait environ cinq cents membres. Selon leurs allégations, la direction de la Société pour le développement industriel du Pakistan occidental, entreprise dont les travailleurs avaient constitué le syndicat en question, usait de pratiques déloyales et violait la législation du travail par son attitude hostile à l'égard du Syndicat. Les plaignants déclaraient que divers travailleurs avaient déjà subi un préjudice du fait de la Société.
  1. 24. Dans sa réponse, en date du 12 septembre 1964, le gouvernement indiquait qu'à son avis la direction avait pris des mesures conformes aux dispositions légales en vigueur. Les travailleurs mentionnés par les plaignants ont été suspendus par l'entreprise, le Tribunal du travail étant alors saisi de la question de leur congédiement éventuel. Le gouvernement communiquait, ensuite, toute une série d'informations plus détaillées au sujet des faits mentionnés dans la plainte.
  2. 25. L'article 3 de l'ordonnance de 1959 sur les différends du travail dispose qu'un comité d'entreprise, composé de représentants d'employeurs et de travailleurs, doit être constitué dans tous les établissements industriels occupant cinquante travailleurs ou plus. Le règlement d'application de l'ordonnance définit la procédure à suivre pour l'élection des représentants des travailleurs. Aux termes de l'article 40 dudit règlement, l'employeur est tenu de demander au syndicat enregistré des informations quant au nombre des travailleurs affiliés au syndicat et à la répartition de ses membres dans les sections, départements, etc., - de l'entreprise. En conséquence, la direction de la Société a demandé au Syndicat des salariés les informations nécessaires en vue de la constitution du comité d'entreprise.
  3. 26. A l'époque, le Syndicat avait demandé au Tribunal du travail d'ordonner la formation d'un conseil consultatif mixte dans la Société. De l'avis du Syndicat, la requête des travailleurs étant en instance devant le Tribunal du travail, le comité d'entreprise ne pouvait être constitué sans l'autorisation de ce dernier. La direction ne s'est pas rendue à cet argument et a constitué le comité d'entreprise, conformément aux dispositions de l'ordonnance sur les différends du travail, et elle a organisé les élections des représentants des travailleurs.
  4. 27. Devant ces faits, le Syndicat des salariés a distribué des exemplaires d'une circulaire dans laquelle il protestait contre l'attitude adoptée par la direction. Il en ressortait que le Syndicat incitait les travailleurs à ne pas se porter candidats au comité d'entreprise. Néanmoins, quinze ou seize personnes ayant fait acte de candidature, la direction a écarté tous les candidats qui avaient quelque attache avec le Syndicat et en a choisi cinq comme membres du comité. La circulaire poursuit en précisant que c'est ainsi que la direction a complété la composition du comité d'entreprise, qui se compose donc de personnes désignées par elle. Les travailleurs n'ont aucun lien avec le comité d'entreprise et le Syndicat ne se sent pas lié par ses décisions. La circulaire indique, ensuite, que les travailleurs pourront continuer à présenter leurs plaintes au Syndicat, qui prendra toutes mesures qui s'imposent. La direction a décidé d'agir au mépris de la loi, de la justice et de tous les principes. Le Syndicat, pour sa part, a décidé de montrer à la direction, à l'aide du droit et du gouvernement, et grâce à la coopération des travailleurs, la voie de l'équité. Après avoir indiqué les noms des hommes qui font partie du comité d'entreprise « illicitement constitué », la circulaire indique qu'ils sont exclus de la protection du Syndicat et ajoute que, s'ils abandonnent dans certains délais le prétendu comité d'entreprise, le Syndicat les reprendra sous sa protection.
  5. 28. Le gouvernement indiquait, dans sa réponse, que, du fait que la circulaire contenait des allégations malveillantes à l'égard de la direction et susceptibles de lui être préjudiciables, la direction de la Société a fait une enquête, à la suite de laquelle elle a suspendu sept des onze dirigeants du Syndicat qui, à son avis, s'étaient rendus coupables de manquement à la discipline. La direction de l'entreprise a demandé au Tribunal du travail l'autorisation de congédier ces travailleurs. Ce faisant, elle a agi en conformité de l'article 30 de l'ordonnance sur les différends du travail qui dispose qu'aucun dirigeant syndical ne peut être renvoyé pour une faute non relative à un différend du travail, sauf autorisation préalable du Tribunal du travail, mais qu'il peut toutefois être suspendu en attendant le résultat de la requête présentée au Tribunal pour l'obtention d'une telle autorisation. Le gouvernement précise que, si le Tribunal du travail estime que la décision de la direction est fondée, il est habilité à approuver le licenciement des travailleurs en question; dans le cas contraire, ces derniers seront réintégrés dans leurs fonctions.
  6. 29. Lorsqu'il a été saisi de ce cas à sa session de novembre 1964, le Comité a constaté que les dirigeants syndicaux dont il est question dans la plainte avaient été suspendus de leurs fonctions à la suite de la publication d'une circulaire, la direction de l'entreprise les ayant tenus pour coupables de manquements à la discipline du fait que ladite circulaire contenait des allégations malveillantes et susceptibles de lui être préjudiciables. En d'autres termes, la suspension a été décidée à la suite de certains actes que quelques travailleurs de l'entreprise avaient commis en leur qualité de dirigeants du syndicat de l'entreprise.
  7. 30. Le Comité a rappelé que, lors de l'examen de plusieurs cas antérieurs-, il avait estimé que l'un des principes fondamentaux de la liberté syndicale veut que les travailleurs soient assurés d'une protection adéquate contre tout acte de discrimination qui tend à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi - congédiement, transfert et autres mesures préjudiciables - et que cette protection revêt une importance toute particulière pour les délégués syndicaux du fait que ces derniers, pour pouvoir s'acquitter de leurs fonctions syndicales en toute indépendance, doivent avoir la certitude qu'ils ne subiront aucun préjudice du fait du mandat syndical qui leur a été confié. Le Comité a indiqué que l'un des moyens qui permet de garantir cette protection consiste à interdire le congédiement desdits délégués pendant la durée de leur mandat, sauf, évidemment, en cas de faute grave. Le Comité a estimé, en outre, que dans le cas des dirigeants syndicaux, cette protection doit être garantie pour assurer le respect du principe fondamental selon lequel les organisations des travailleurs ont le droit d'élire librement leurs représentants.
  8. 31. Le Comité a constaté que l'ordonnance no XIV, de 1960, institue certaines mesures tendant à protéger les syndicats et les dirigeants syndicaux et impose, à titre de sanction, des amendes aux employeurs qui ont recouru à certaines pratiques déloyales. Est notamment réputé agir de manière déloyale tout employeur:
  9. 28 I.
  10. ......................................................................................................................................................
  11. a) qui contrecarre, gêne ou contraint les membres de son personnel dans l'exercice de leur droit de s'organiser, de former un syndicat de leur choix, d'y adhérer ou de lui prêter leur concours et d'entreprendre une action collective à des fins d'assistance ou de protection mutuelles;
  12. b) qui contrecarre la formation ou la gestion d'un syndicat ou qui soutient un syndicat, financièrement ou autrement;
  13. c) qui licencie ou exerce une discrimination quelconque à l'égard d'un membre dirigeant d'un syndicat reconnu, en raison du poste qu'il occupe;
  14. d) qui licencie ou exerce une discrimination quelconque à l'égard d'un salarié, en raison d'allégations qu'il aurait exprimées ou d'un témoignage qu'il aurait apporté lors de toute enquête ou procédure ayant pour objet l'une des questions visées à l'article 28 D, I);
  15. ......................................................................................................................................................
  16. De même, est réputé agir de manière déloyale l'employeur qui interdit au syndicat d'afficher des avis le concernant dans tous les locaux où ses adhérents travaillent, l'employeur devant lui accorder toute facilité raisonnable à cet effet.
  17. 32. Vu la protection que la loi accorde aux syndicats, à leurs dirigeants et aux travailleurs et eu égard au principe énoncé au paragraphe 30 ci-dessus, le Comité a estimé que, dans le présent cas, il s'agissait de savoir si l'attitude adoptée par les travailleurs de l'entreprise, en leur qualité de dirigeants du Syndicat, constituait une faute, et s'il s'agissait d'une faute grave au point qu'elle autorise l'employeur à prendre, à l'encontre de ces derniers, des sanctions sans qu'il y ait, de ce fait, violation des normes et principes régissant le droit d'association.
  18. 33. A cet égard, le Comité a relevé que l'ordonnance condamnait également certains actes des syndicats ou de leurs comités exécutifs, en ce qu'elle dispose ce qui suit: « Est réputé agir de manière déloyale tout Syndicat reconnu:
  19. 28 H.
  20. ......................................................................................................................................................
  21. a) qui participe à une grève irrégulière ou illégale;
  22. b) dont le comité exécutif ou les membres préconisent, soutiennent activement ou suscitent une grève irrégulière ou illégale;
  23. c) dont le comité exécutif omet de prendre les mesures nécessaires contre ceux des membres du Syndicat qui participent à une grève illégale;
  24. d) dont un membre dirigeant fournit une fausse déclaration dans l'une des pièces requises aux termes ou en application de la présente loi;
  25. e) dont le comité exécutif ou les membres contraignent un travailleur à adhérer contre sa volonté au Syndicat.
  26. 34. Le Comité a estimé également que les dispositions légales relatives aux comités d'entreprise et à leurs liens avec le Syndicat n'étaient pas sans intérêt aux fins de l'examen du présent cas. Conformément à l'ordonnance no 56, de 1959, mentionnée plus haut et au règlement d'application de ladite ordonnance, c'est l'employeur qui, après consultation du syndicat, nomme les représentants des travailleurs au sein du comité d'entreprise. En d'autres termes, la nomination des membres du comité n'est pas subordonnée à l'accord du Syndicat. Dans le cas présent, le Syndicat a refusé d'apporter son concours à la direction pour la nomination des membres du comité, ce, en raison du conflit qui l'opposait à la direction.
  27. 35. Par ailleurs, aux termes de ladite ordonnance, le comité d'entreprise a pour mandat d'adopter les mesures propres à faire régner et à préserver les relations cordiales entre la direction et les travailleurs et, à cet effet, d'examiner les questions ou les problèmes d'intérêt commun et de s'efforcer de concilier toute divergence de vues en la matière. Au vu de ces dispositions, il n'a pas semblé au Comité que les comités d'entreprise puissent prendre des décisions qui lient le Syndicat, ni que les travailleurs doivent obligatoirement soumettre leurs plaintes aux comités. Il lui a semblé que ces derniers devaient plutôt faire oeuvre de conciliation pour établir et faire régner des bonnes relations entre l'employeur et les travailleurs. Il ne lui a pas semblé, de même, résulter de ces dispositions qu'il existe entre le syndicat et le comité d'entreprise après constitution de ce dernier, des liens qui permettraient de dicter aux dirigeants syndicaux la conduite à suivre à l'égard du comité d'entreprise.
  28. 36. Le Comité a pris acte également, aux fins de l'examen du cas, des indications que le Syndicat donnait dans la circulaire au sujet de l'attitude de la direction lors de la création du comité d'entreprise, du caractère « illégal » de cet organisme, des mesures prises par le Syndicat à l'encontre des travailleurs qui ont accepté de faire partie du comité et de la conduite que les travailleurs de l'entreprise doivent adopter face au Comité.
  29. 37. Par ailleurs, le Comité a constaté que les mesures prises à l'encontre des dirigeants syndicaux n'étaient pas définitives et que la question avait été portée devant le Tribunal du travail, qui statuerait sur le point de savoir si le congédiement était ou non conforme à la loi et, dans cette dernière hypothèse, ordonnerait la réintégration des travailleurs dans leurs fonctions.
  30. 38. Le Comité a rappelé que dans tous les cas où une instance judiciaire nationale était saisie d'une affaire, il a, estimant que le jugement qui devait être rendu était susceptible de lui fournir les éléments d'information nécessaires pour qu'il puisse se prononcer sur les allégations qui lui étaient soumises, décidé d'ajourner l'examen du cas jusqu'au moment où il serait en possession du résultat des procédures engagées.
  31. 39. Dans ces conditions, le Comité a décidé de demander au gouvernement de bien vouloir lui faire connaître le résultat de l'action intentée devant le Tribunal du travail, contre les dirigeants syndicaux en question, et, en particulier, de lui fournir le texte du jugement qui aura été rendu ainsi que celui des considérants y afférents. Il a ajourné l'examen du cas en attendant d'être en possession de ces informations.
  32. 40. Par une communication en date du 28 octobre 1965, le gouvernement déclare avoir été informé que le différend a été réglé à l'amiable et que les responsables syndicaux qui avaient été accusés d'avoir émis une publication diffamatoire ont été réintégrés.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 41. En conséquence, le Comité recommande au Conseil d'administration de prendre note de l'information fournie par le gouvernement selon laquelle le différend, objet de la plainte, a été réglé à l'amiable et, en particulier, du fait que les responsables syndicaux, qui s'étaient vu suspendre de leur emploi en attendant le règlement de l'action en instance devant le Tribunal du travail visant à statuer sur leur congédiement, ont été depuis réintégrés, et de décider, dans ces conditions, qu'il serait pour lui sans objet de poursuivre l'examen du cas.
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