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Rapport intérimaire - Rapport No. 76, 1964

Cas no 364 (Equateur) - Date de la plainte: 16-OCT. -63 - Clos

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  1. 334. La plainte de la Fédération syndicale mondiale est contenue dans une communication en date du 16 octobre 1963 adressée directement à l'O.I.T. Celle-ci ayant été transmise au gouvernement de l'Equateur, celui-ci a présenté ses observations dans une communication en date du 28 février 1964.
  2. 335. L'Equateur n'a pas ratifié la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il a, par contre, ratifié la convention (no 98) sur le droit d'association et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Allégations relatives au retrait de la personnalité juridique de la Confédération des travailleurs de l'Equateur
    1. 336 Les plaignants allèguent dans leur communication que, après le coup d'Etat du 11 juillet 1963, la Junte militaire du gouvernement n'a cessé de s'attaquer à la Confédération des travailleurs de l'Equateur (C.T.E.), qui serait l'organisation centrale nationale la plus représentative.
    2. 337 Le gouvernement déclare dans sa réponse que cette affirmation est inexacte et que, bien qu'il soit certain que cette organisation centrale de travailleurs ait engagé une campagne politique ouverte, en s'identifiant avec le Parti communiste de l'Equateur, déviant de ses buts syndicaux, le gouvernement a respecté la personnalité juridique de la Confédération. A l'appui de cette affirmation, le gouvernement envoie un certificat du ministère de la Prévoyance sociale et du Travail d'où il résulte que les statuts de la Confédération des travailleurs de l'Equateur ont été approuvés par décret exécutif no 646 en date du 3 mars 1945 et sont pleinement en vigueur.
    3. 338 Dans ces conditions, le Comité estime que les plaignants n'ont pas apporté de preuves suffisantes de la violation des droits syndicaux à cet égard et, en conséquence, recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
  • Allégation relative à la détention de dirigeants syndicaux
    1. 339 Les plaignants allèguent aussi dans leur communication que les principaux dirigeants de la C.T.E et des fédérations provinciales ont été détenus arbitrairement sans aucune accusation. Parmi ces dirigeants syndicaux figurent: Victor Manuel Zúñiga, Mario Valencia, Hugo Novoa, Ecuador Romero, José Vázquez Merlo, Tránsito Amaguaña, Amadeo Alba, Luis Castro Villamar, Bolivar Sandoval (expulsé plus tard du pays), Bolivar Bolaños, Jorge Calero, Fausto Moreno, Luis Vidal Monje, Efrain Obregán, José Jaramillo et Raúl Guzmán.
    2. 340 Selon les plaignants, d'autres dirigeants syndicaux ouvriers et paysans auraient été arrêtés, ainsi que de nombreux avocats du mouvement syndical. Au total, le nombre de personnes arrêtées pour motifs syndicaux s'élève à près de deux cents.
    3. 341 Le gouvernement explique dans sa réponse qu'en raison de la situation chaotique qui régnait dans le pays, causée par l'agitation politique soulevée par des éléments communistes qui ont déclenché une vague de terrorisme et de subversion ouverte contre l'ordre intérieur et la sécurité de l'Etat, les forces armées nationales ont dû intervenir pour défendre les intérêts du pays. Toutes les personnes arrêtées, citées par la Fédération syndicale mondiale, ont été identifiées comme éléments terroristes ayant commis des attentats contre la sécurité de l'Etat. Ils ont commis des délits prévus par la législation pénale équatorienne et leurs procès sont actuellement en cours.
    4. 342 Le Comité observe que, si les plaignants parlent du total approximatif de deux cents dirigeants et avocats arrêtés pour leur action syndicale, ils indiquent les noms d'un certain nombre d'entre eux. Le gouvernement reconnaît qu'ils ont été arrêtés, mais déclare qu'ils l'ont été pour leur action subversive. A ce sujet, le Comité rappelle que, dans le passé , quand des gouvernements ont répondu aux allégations selon lesquelles des dirigeants ou des travailleurs avaient été détenus pour activités syndicales en déclarant que ces personnes avaient été détenues en réalité pour activités subversives, pour raisons de sécurité intérieure ou pour crimes de droit commun, le Comité a toujours suivi la règle qui consiste à demander aux gouvernements intéressés de fournir des informations complémentaires aussi précises que possible au sujet de ces détentions et de leurs motifs exacts, et a ajouté que si, dans certains cas il a décidé que les allégations relatives à l'arrestation ou à la détention de militants syndicalistes n'exigeaient pas un examen plus approfondi, cela était dû au fait qu'il avait reçu des gouvernements certaines informations prouvant d'une manière suffisamment évidente et précise que ces arrestations ou détentions n'avaient rien à voir avec les activités syndicales, mais résultaient uniquement d'activités dépassant le cadre syndical, nuisibles à l'ordre public ou de caractère politique .
    5. 343 Dans le présent cas, le gouvernement indique que les détenus sont jugés pour avoir enfreint des dispositions du Code pénal. Dans le passé, le Comité a toujours suivi la pratique de surseoir à l'examen d'affaires qui avaient été soumises à une instance judiciaire nationale lorsque ces procédures pouvaient lui fournir des éléments d'information utiles pour en apprécier le bien-fondé.
    6. 344 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration d'inviter le gouvernement à bien vouloir communiquer le résultat des procès intentés devant les tribunaux nationaux contre les personnes mentionnées et, en particulier, le texte des sentences qui seront prononcées et celui de leurs considérants, et entre-temps de surseoir à l'examen de cet aspect du cas.
  • Allégations relatives au congédiement de travailleurs et de syndicalistes
    1. 345 Les plaignants allèguent que le Junte militaire a permis aux employeurs de congédier les ouvriers et que l'accusation d'être communiste suffit pour qu'un dirigeant syndicaliste ou un travailleur soit congédié en violation des règles sur la stabilité de l'emploi qui figurent au Code du travail et dans les conventions collectives. A ce sujet, les plaignants précisent qu'il a été congédié cent quatre-vingts travailleurs de l'entreprise d'électricité, cinquante de la municipalité de Quito, cent vingt de la fabrique de textiles San Antonio de Guayaquil et cent de la municipalité de Guayaquil. De même, il a été congédié un grand nombre de travailleurs des téléphones, du télégraphe, de la poste, des banques, etc., et l'on annonçait le congédiement de près de mille employés des chemins de fer.
    2. 346 Le gouvernement conteste cette allégation, indiquant qu'il a agi contre le congédiement massif de travailleurs, puisque, le jour même où la Junte militaire a pris le pouvoir, il a déclaré dans un communiqué que ces congédiements étaient interdits, ce qui fut confirmé par le décret no 564, du 27 septembre 1963, joint en annexe à la réponse du gouvernement. Le gouvernement déclare également qu'il a épuré certains services publics en en chassant des agents extrémistes n'ayant jamais eu la qualité de travailleur, qui se livraient à des actes de prosélytisme et de sabotage dans différents centres de travail et qui obéissaient à des consignes politiques. Quant aux congédiements qui ont eu lieu dans la fabrique de textiles San Antonio, le différend qui était en cours a été réglé par la signature d'un procès-verbal de conciliation établi par le gouvernement.
    3. 347 Le Comité observe qu'il s'agit dans ce cas, d'une part, de congédiements en masse décidés par les employeurs, contre lesquels le gouvernement a réagi en prenant les mesures mentionnées et, d'autre part, du congédiement d'un certain nombre de personnes occupées dans des services publics. Les plaignants ne font aucune distinction entre ces deux catégories de congédiements, mais se contentent d'indiquer qu'on y a procédé en accusant les travailleurs d'être communistes. De son côté, le gouvernement déclare que les congédiements dans les services publics étaient dus aux activités politiques et même subversives des personnes congédiées.
    4. 348 Le Comité rappelle qu'il a toujours attribué une grande importance au principe qui figure à l'article 1 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, en vertu duquel les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi, cette protection devant notamment s'appliquer en ce qui concerne les actes ayant pour but de congédier un travailleur ou de lui porter préjudice par tout autre moyen, en raison de son affiliation syndicale ou de sa participation à des activités syndicales.
    5. 349 Dans le présent cas, bien que le gouvernement soutienne que, quant aux services publics - y compris les entreprises de l'Etat -, les congédiements qui ont affecté aussi des syndicalistes étaient dus à leurs activités politiques et subversives, les plaignants allèguent qu'en général, on a utilisé le prétexte que les travailleurs (parmi lesquels les syndicalistes) étaient communistes pour les congédier. Cela veut dire qu'il pourrait y avoir eu discrimination contre certains syndicalistes en raison de cette qualité, même si des raisons d'un autre ordre sont invoquées comme causes apparentes. Cette question est d'une importance particulière dans le cas des travailleurs d'entreprises privées ou de l'Etat, auxquels s'applique la protection contre les actes de discrimination en raison de l'affiliation ou des activités syndicales, prévue dans la convention no 98, ratifiée par l'Equateur. Il s'agit, dans ces circonstances, de savoir dans quelle mesure la législation intérieure applique les principes de cette convention et accorde aux travailleurs une protection contre les actes de discrimination antisyndicale.
    6. 350 En conséquence, le Comité recommande au Conseil d'administration d'inviter le gouvernement à bien vouloir faire connaître comment est appliquée dans l'ordre intérieur la règle de la convention no 98 selon laquelle les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes tendant à les congédier en raison de leur affiliation ou de leurs activités syndicales et quels sont les moyens de procédure dont disposent les travailleurs afin de faire valoir leurs droits en cette matière, et de surseoir, entre-temps, à l'examen de cet aspect du cas.
  • Allégations relatives à la violation d'autres droits syndicaux
    1. 351 Les plaignants allèguent que, dès les premiers jours après son arrivée au pouvoir, la Junte militaire a aboli le droit de réunion et le droit de grève. Le gouvernement ne traite pas dans sa réponse de ces deux allégations.
    2. 352 Le Comité considère que, même si les plaignants n'apportent aucun détail à l'appui de leur plainte sur ce point, l'importance qu'il a toujours attribuée tant au droit de réunion qu'au droit de grève dans la mesure où ils sont en relation avec l'exercice des libertés syndicales, de même que le fait que le gouvernement n'ait pas présenté d'observations à ce sujet, justifie la demande d'informations complémentaires. Pour ces raisons, le Comité recommande au Conseil d'administration d'inviter le gouvernement à bien vouloir donner des informations sur la situation de droit et de fait en matière de réunions syndicales et de grève, et de surseoir entre-temps à l'examen de cet aspect du cas.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 353. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) en ce qui concerne les allégations relatives au retrait de la personnalité juridique de la Confédération des travailleurs de l'Equateur, de décider que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi;
    • b) en ce qui concerne les allégations relatives à la détention de syndicalistes, au congédiement de travailleurs et de syndicalistes et à la violation d'autres droits syndicaux, de demander au gouvernement de bien vouloir fournir les informations dont la nature est précisée aux paragraphes 344, 350 et 352, respectivement, et de décider de surseoir entre-temps à l'examen de ces aspects du cas.
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