ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Rapport intérimaire - Rapport No. 58, 1962

Cas no 262 (Cameroun) - Date de la plainte: 28-AVR. -61 - Clos

Afficher en : Anglais - Espagnol

  1. 654. La plainte de la C.C.S.C est contenue dans un télégramme du 28 avril 1961 et une communication du 3 juin 1961. Le texte de ces documents a été transmis au gouvernement pour observations le 29 juin 1961. Le gouvernement a fait parvenir sa réponse par une lettre du 8 septembre 1961.
  2. 655. En devenant Membre de l'Organisation internationale du Travail le 7 juin 1960, le gouvernement du Cameroun a indiqué qu'il reconnaissait que le Cameroun demeure lié par les obligations découlant de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, dont les dispositions avaient été déclarées antérieurement applicables par la France au Cameroun, et qu'il s'engageait à appliquer, en outre, les dispositions de la convention (no 84) sur le droit d'association (territoires non métropolitains), 1947, jusqu'à ce qu'il puisse procéder à la ratification de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Allégations relatives à l'arrestation de trente-deux « moniteurs syndicalistes »
    1. 656 Les plaignants allèguent, en des termes d'ailleurs assez imprécis, que trente-deux « moniteurs syndicalistes » auraient été arrêtés à l'occasion d'un mouvement de revendications professionnelles. Dans sa réponse, le gouvernement déclare que la sous-préfecture de Saa (département du Nyong-et-Sanaga) a été avisée en avril 1961 que les moniteurs d'enseignement de la mission catholique « subissent l'influence de certains politiciens qui préconisaient une action violente en vue de l'éviction des missionnaires européens », avaient l'intention de présenter aux autorités de la mission d'Emana des revendications touchant le statut des moniteurs de l'enseignement libre et, en cas de refus de satisfaire immédiatement ces revendications, de passer à l'action directe contre les autorités de la mission. Ayant exercé une surveillance locale, les autorités administratives ont surpris une trentaine de moniteurs qui tenaient une réunion de préparation de cette action directe, réunion convoquée sans que l'autorisation en eût été sollicitée du sous-préfet. Conformément à la législation en vigueur dans les départements où s'applique la législation sur l'état d'urgence (ordonnance no 60/52, du 7 mai 1960), les intéressés - déclare le gouvernement - ont été arrêtés et déférés au Parquet. A la suite de leur comparution devant le juge d'instruction, ils ont été écroués à la prison de Yaoundé où ils attendent leur jugement par le tribunal militaire compétent sous l'inculpation de tenue de réunion sans autorisation préalable.
    2. 657 Dans tous les cas où une affaire faisait l'objet d'une action devant une instance judiciaire nationale, pourvu que la procédure suivie soit assortie des garanties d'une procédure judiciaire régulière, le Comité, estimant que la décision à intervenir était susceptible de lui fournir d'utiles éléments d'information dans son appréciation des allégations formulées, a décidé d'ajourner l'examen du cas en attendant d'être en possession du résultat des procédures engagées. Pour le cas no 235 relatif au Cameroun, dans lequel le gouvernement expliquait la procédure de ces tribunaux militaires, le Comité a suivi la même pratique.
    3. 658 En l'espèce, le Comité juge opportun de suivre la même pratique en recommandant au Conseil d'administration de demander au gouvernement de bien vouloir lui communiquer le résultat de la procédure engagée devant le tribunal militaire et, en particulier, le texte du jugement rendu, ainsi que celui de ses considérants et, en attendant, d'ajourner l'examen de cet aspect du cas.
  • Allégations relatives au refus de négocier un projet de convention collective
    1. 659 Les plaignants allèguent que la C.C.S.C aurait préparé et soumis à la direction des écoles libres un projet de convention collective destiné à régler les rapports de travail et les conditions de rémunération des maîtres de l'enseignement libre et que ce projet n'aurait jamais été discuté.
    2. 660 Dans sa réponse, le gouvernement déclare que, conformément aux dispositions du Code du travail, le gouvernement, à la demande de l'une des organisations syndicales d'employeurs ou de travailleurs intéressées, provoque la réunion d'une commission mixte en vue de la conclusion d'une convention collective du travail ayant pour objet de régler les rapports entre employeurs et travailleurs d'une branche d'activité sur le plan territorial, régional ou local. « Mais - ajoute le gouvernement - une convention collective est un contrat, librement débattu, et la loi n'a donné au gouvernement aucun pouvoir de coercition en vertu duquel un employeur ou un syndicat d'employeurs puisse être contraint à signer une convention collective. »
    3. 661 Dans un cas précédent, relatif à une plainte présentée par l'Union syndicale de la Guyane britannique contre le gouvernement du Royaume-Uni au sujet de la Guyane britannique, le Comité avait noté que le gouvernement avait enregistré l'organisation plaignante conformément à la législation en vigueur, l'habilitant ainsi à conclure librement des conventions collectives, mais que dans le cas en question, la loi n'obligeait pas le gouvernement à donner effet au principe des négociations collectives en recourant à des mesures de contrainte et que le gouvernement avait laissé aux parties intéressées le soin de régler la question sur une base volontaire; dans ces conditions, le Comité avait estimé que le plaignant n'avait pas apporté les preuves nécessaires pour lui permettre de conclure qu'une atteinte aurait été portée au libre exercice des droits syndicaux et il avait, par conséquent, recommandé au Conseil d'administration de décider que le cas n'appelait pas un examen plus approfondi. Le Comité a suivi le même raisonnement et abouti à la même conclusion dans deux autres cas où les allégations formulées étaient du même ordre.
    4. 662 En l'espèce, les allégations formulées étant fondées sur des faits sensiblement analogues, le Comité, estimant que les plaignants n'ont pas établi qu'il y aurait eu, en l'occurrence, atteinte à la liberté syndicale, recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
  • Allégations relatives à la mise du local de la C.C.S.C à la disposition d'une association d'étudiants pour la tenue d'une réunion
    1. 663 Il est allégué que le ministre du Travail et des Lois sociales aurait demandé à la C.C.S.C de céder son local à une association d'étudiants des départements du Ntem Kribi et Dja-et-Lobo pour y tenir sa réunion annuelle. Aux yeux des plaignants, cette demande, à laquelle ils ont accédé, constitue une mesure vexatoire et une entrave à la liberté syndicale. A l'appui de leurs assertions, les plaignants fournissent copie de la lettre officielle où cette demande est formulée.
    2. 664 Dans sa réponse, le gouvernement confirme qu'une telle demande a été faite et déclare que la copie de la lettre officielle fournie par la C.C.S.C est conforme à l'original. Il précise toutefois que c'est à la suite d'une requête de l'association d'étudiants, désireuse de tenir sa réunion annuelle à Yaoundé, qu'il a été fait appel au local de la C.C.S.C. Ce local, précise le gouvernement, est très rarement utilisé pour la C.C.S.C et c'est la raison pour laquelle on a songé à en disposer à titre tout à fait exceptionnel. Le gouvernement déclare en outre que ledit local est et demeure la propriété du gouvernement et il ajoute qu'étant donné que le local en question n'a été mis à la disposition d'une association d'étudiants que pour la seule matinée du dimanche 4 juin 1961, il est difficile de prétendre qu'il y ait eu là entrave à l'exercice des droits syndicaux.
    3. 665 Il ressort des explication fournies par le gouvernement que la mise à disposition du local en question - lequel semble être propriété gouvernementale - a revêtu un caractère tout à fait exceptionnel et, de surcroît, extrêmement limité puisqu'il n'impliquait que la matinée d'un dimanche.
    4. 666 Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de classer cet aspect de la plainte en raison de son caractère futile.
  • Allégations relatives au licenciement abusif d'un travailleur
    1. 667 Les plaignants allèguent qu'un délégué confédéral étant intervenu auprès d'un employeur en vue d'obtenir la réintégration d'un travailleur que la C.C.S.C estime avoir été abusivement licencié, se serait heurté à une fin de non-recevoir de la part de l'employeur, qui, d'après la copie de sa lettre fournie par les plaignants eux-mêmes, encourage les intéressés à « saisir toutes les juridictions du Cameroun » de l'affaire en question.
    2. 668 « Il arrive malheureusement trop souvent - déclare le gouvernement dans sa réponse - que des responsables syndicaux croient disposer à l'égard des employeurs d'un droit d'intervention directe et qu'ils en usent, souvent même, avec une désinvolture inadmissible; le plus étrange, dans ces conditions, est qu'ils s'étonnent de se heurter parfois à des fins de non-recevoir aussi peu nuancées que leurs propres interventions. » Il est incontestable - poursuit le gouvernement - qu'il n'appartient nullement à un syndicaliste, fût-il délégué confédéral, d'intervenir, s'il n'est point délégué du personnel d'une entreprise, auprès du responsable de cette dernière en vue d'obtenir le redressement de la situation d'un travailleur; une telle intervention eût dû être effectuée par ledit délégué confédéral auprès de l'inspecteur du travail et des lois sociales compétent, qui dispose, lui, de tous pouvoirs d'investigation et de coercition à cet effet.
    3. 669 Il paraît ressortir tant de la réponse du gouvernement que des pièces fournies par les plaignants eux-mêmes que les personnes intéressées n'ont pas fait usage des voies de recours qui leur étaient ouvertes (tribunaux, inspecteur du travail). De plus, rien dans les allégations formulées ne permet de conclure que le licenciement dont il est question aurait eu pour origine la qualité ou les activités syndicales de la personne qui en a été l'objet. La plainte reste en effet complètement muette à cet égard.
    4. 670 Dans ces conditions, le Comité estime que les plaignants n'ont pas apporté la preuve qu'il y ait eu, en l'occurrence, atteinte à la liberté syndicale et, en conséquence, il recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 671. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider, pour les raisons indiquées aux paragraphes 659 à 670 ci-dessus, que les allégations relatives au refus de négocier un projet de convention collective, à la mise du local de la Confédération camerounaise des syndicats croyants à la disposition d'une association d'étudiants pour la tenue d'une réunion, et au licenciement abusif d'un travailleur n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi;
    • b) de décider, pour les raisons indiquées aux paragraphes 656 à 658 ci-dessus, de demander au gouvernement, au sujet de l'allégation relative à l'arrestation de trente-deux moniteurs syndicalistes, de bien vouloir communiquer au Conseil d'administration le résultat de la procédure engagée devant le tribunal militaire en ce qui concerne ces personnes et, en particulier, le texte du jugement rendu ainsi que celai de ses considérants;
    • c) de prendre note du présent rapport intérimaire en ce qui concerne cette dernière allégation, étant entendu que le Comité fera de nouveau rapport lorsque les informations complémentaires sollicitées à l'alinéa b) ci-dessus auront été reçues.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer