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Rapport définitif - Rapport No. 382, Juin 2017

Cas no 3189 (Bolivie (Etat plurinational de)) - Date de la plainte: 20-NOV. -15 - Clos

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Allégations: L’organisation plaignante dénonce des mesures de restriction au fonctionnement des organisations syndicales dans le cadre d’un processus de restructuration prévu dans un avant-projet de loi de restructuration d’une caisse publique de santé

  1. 177. La plainte figure dans une communication de la Fédération des syndicats du secteur médical et activités connexes de la Caisse nationale de santé (FESIMRAS) en date du 20 novembre 2015.
  2. 178. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date du 7 avril 2017.
  3. 179. L’Etat plurinational de Bolivie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 180. Dans sa communication en date du 20 novembre 2015, la FESIMRAS indique que, en septembre 2015, le ministère de la Santé a approuvé un avant-projet de loi déclarant que la mise en œuvre du plan de restructuration de la Caisse nationale de santé (ci-après «la Caisse») est une mesure prioritaire relevant de l’intérêt national. Ce plan de restructuration a été approuvé par voie du décret suprême no 1403 du 9 novembre 2012. La FESIMRAS allègue que l’avant-projet de loi sur la restructuration de la Caisse introduit des restrictions au fonctionnement des organisations syndicales et collégiales des professionnels de santé, et que, s’il était adopté, cet avant-projet de loi porterait atteinte à ses droits de nature syndicale, de représentation de ses membres affiliés et de négociation collective.
  2. 181. Tout d’abord, la FESIMRAS mentionne le premier paragraphe de l’article 10 de l’avant projet de loi, qui dispose que les postes de base pour les professionnels et les travailleurs du secteur de la santé sont pourvus par le biais de concours de recrutement, organisés selon des modalités fixées par une réglementation spécifique émise par le ministère de la Santé (procédures d’institutionnalisation) sans la participation des associations ni des ordres professionnels. De même, le paragraphe IV de ce même article établit une commission d’institutionnalisation excluant la participation des associations et des ordres professionnels et formée par le ministère de la Santé, l’autorité exécutive suprême de la Caisse ou son représentant, et la Centrale ouvrière bolivienne (COB).
  3. 182. La FESIMRAS mentionne également la clause abrogatoire et dérogatoire unique de l’avant-projet de loi, qui déclare sans effets les articles 5 et 6 de la loi no 3131, lesquels reconnaissent le Collège médical de Bolivie comme étant la plus haute entité organisationnelle, scientifique, syndicale et de perfectionnement professionnel du corps médical. En outre, la FESIMRAS indique que la disposition transitoire unique de l’avant-projet de loi introduit de nouveaux motifs de licenciement du personnel de la Caisse qui diffèrent de ceux énoncés dans l’article 16 de la loi générale du travail, au détriment de la stabilité de l’emploi établie et garantie par la Constitution de la République. Dans les faits, la disposition transitoire unique de l’avant-projet de loi dispose que: «sont considérés comme motifs justifiant la rupture du contrat de travail ou de la convention ou le licenciement selon les procédures prévues de l’article 16 de la loi générale du travail les éléments suivants: incompatibilité due aux liens de parenté; népotisme; trafic d’influence; falsification de documents officiels ou d’autres documents présentés dans le cadre du processus de recrutement ou d’institutionnalisation; trafic et/ou orientation de patients vers des cabinets de consultation privés au détriment de l’institution; usage indu des biens institutionnels à des fins personnelles et actes de maltraitance avérés envers les patients.»

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 183. Dans une communication en date du 7 avril 2017, le gouvernement transmet un rapport du Département juridique de la Caisse daté du 14 mars 2017 ainsi qu’un rapport du Département juridique du ministère de la Santé daté du 15 mars 2017.
  2. 184. Le rapport du Département juridique de la Caisse indique que l’avant-projet de loi ne porte atteinte à aucune disposition en vigueur, dans la mesure où il s’agit d’un avant-projet qui n’a pas encore été adopté. Le rapport indique également que, conformément aux dispositions des articles 162, 163 et 164 de la Constitution politique de l’Etat et des articles 112, paragr. 2, 113, 114 et 115 du Code de procédure constitutionnelle, les consultations, amendements et modifications doivent être présentés devant l’Assemblée législative ou, s’il y a lieu, devant la Chambre des sénateurs.
  3. 185. Le rapport du Département juridique du ministère de la Santé, pour sa part, indique que, conformément à la Constitution politique de l’Etat, l’initiative législative est un droit conféré au gouvernement, aux sénateurs et aux députés, et qui leur permet de soumettre aux chambres parlementaires un texte qui, s’il est approuvé par celles-ci, prend ensuite la forme d’une loi. Le rapport souligne que l’avant-projet de loi en question a été rédigé dans des termes clairs, précis et cohérents, qu’il est fondé et qu’il n’a pas encore été examiné par l’Assemblée législative plurinationale de Bolivie, raison pour laquelle la loi n’a pas été promulguée. Le rapport conclut que la plainte déposée par la FESIMRAS n’est pas fondée, puisqu’elle concerne un avant-projet de loi qui ne constitue pas encore une loi de l’Etat plurinational de Bolivie, ce qui exclut une quelconque atteinte à ses droits syndicaux.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 186. Le comité note que, dans le présent cas, la FESIMRAS allègue que, au mois de septembre 2015, le ministère de la Santé a approuvé un avant-projet de loi sur la restructuration de la Caisse qui introduit des restrictions au fonctionnement des organisations syndicales et collégiales des professionnels de la santé et que, s’il était adopté, cet avant-projet de loi porterait atteinte à ses droits de nature syndicale, de représentation de ses membres affiliés et de négociation collective. Le comité note que, dans sa réponse, le gouvernement se borne à indiquer que l’avant-projet de loi de restructuration de la Caisse n’a pas encore été examiné par l’Assemblée législative et que, par conséquent, il ne porte pas atteinte aux droits syndicaux.
  2. 187. Le comité note que, tout en déclarant sans effets les dispositions de la loi no 3131 qui reconnaissent le Collège médical de Bolivie comme étant la plus haute entité syndicale des professionnels de santé et en excluant expressément la participation des associations et des ordres professionnels aux processus d’institutionnalisation des postes par voie de concours ainsi qu’à la commission constituée à cette fin, l’avant-projet de loi reconnaît expressément la participation de la Centrale ouvrière bolivienne (COB) à cette commission, aux côtés du ministère de la Santé et de l’autorité exécutive suprême de la Caisse. Le comité observe également que, comme il est indiqué dans l’avant-projet de loi, la COB a participé à l’élaboration technique du plan de restructuration de la Caisse et que, selon les dispositions de l’article 7 du décrêt suprême no 28719 relatif au processus d’institutionnalisation de la Caisse, la COB représente les travailleurs auprès de la direction de la Caisse. A cet égard, bien qu’il ignore le niveau de représentativité des différentes organisations syndicales constituées dans le secteur, le comité rappelle que le fait qu’une organisation syndicale ne soit pas admise à siéger dans des commissions paritaires n’implique pas nécessairement qu’il y ait atteinte aux droits syndicaux de cette organisation. Toutefois, pour qu’il n’y ait pas une telle atteinte, deux conditions devraient être remplies: il faudrait d’abord que la raison pour laquelle un syndicat est écarté de la participation à une commission paritaire réside dans son manque de représentativité déterminé objectivement; il faudrait ensuite que – malgré cette non-participation – les autres droits dont il jouit et les activités qu’il peut déployer par ailleurs lui permettent effectivement de promouvoir et de défendre les intérêts de ses membres au sens où l’entend l’article 10 de la convention no 87. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 1091.]
  3. 188. D’autre part, le comité rappelle qu’il est essentiel que l’introduction d’un projet de loi affectant la négociation collective ou les conditions d’emploi soit précédée de consultations complètes et détaillées avec les organisations intéressées de travailleurs et d’employeurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1075.] Dans un précédent cas présenté par la FESIMRAS et portant sur le plan de restructuration de la Caisse, le comité a souligné l’importance qu’il attache à la promotion du dialogue et des consultations sur les questions d’intérêt commun entre les autorités publiques et les organisations professionnelles les plus représentatives du secteur en question. [A ce sujet, voir le 373e rapport du comité, cas no 3002, paragr. 75.] Compte tenu de ce qui précède, le comité attend que le gouvernement veille à ce que, avant sa présentation au Parlement, l’avant-projet de loi de restructuration de la Caisse fasse l’objet de consultations avec les organisations de travailleurs et d’employeurs représentatives du secteur, et à ce que cet avant-projet de loi soit pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 189. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité attend que le gouvernement veille à ce que, avant sa présentation au Parlement, l’avant-projet de loi de restructuration de la Caisse fasse l’objet de consultations avec les organisations de travailleurs et d’employeurs représentatives du secteur, et à ce que cet avant-projet de loi soit pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale.
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