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Rapport intérimaire - Rapport No. 259, Novembre 1988

Cas no 1441 (El Salvador) - Date de la plainte: 07-MARS -88 - Clos

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  1. 332. La plainte figure dans des communications présentées par la Confédération internationale des syndicats libres le 7 mars, le 27 avril, le 4 mai et le 17 juin 1988. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des lettres datées du 28 juin et du 7 septembre 1988.
  2. 333. El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 334. Dans sa communication du 7 mars 1988, la CISL dénonce avec préoccupation les violations continuelles des droits syndicaux qui seraient commises pratiquement chaque jour en El Salvador. Selon la communication, El Salvador, en dépit d'importants efforts de démocratisation entrepris ces huit dernières années, du progrès social et des élections tenues en 1984, continue d'être un pays où sévit la guerre civile, un pays caractérisé par la violence, la misère et par la marginalisation sociale. Les anciennes oligarchies et les forces d'extrême droite - toujours selon la communication -, alliées aux militaires, continuent d'exercer une influence excessive sur la vie politique et économique. Même le gouvernement élu en 1984 n'est pas parvenu à soumettre les forces armées au pouvoir civil. Dans le domaine économique, la situation est dramatique; le chômage atteint 70 pour cent de la population économiquement active et risque encore de s'aggraver avec la législation récente régissant la présence d'immigrants salvadoriens illégaux aux Etats-Unis. Au cours des sept dernières années, l'inflation a dépassé 300 pour cent, les denrées alimentaires de base manquent et le nombre de logements disponibles est gravement déficitaire puisque la moitié de la population, ou peu s'en faut, vit dans des habitations en carton ou dans des bidonvilles. 11 faut ajouter à tout cela l'indice d'analphabétisme qui est de 60 pour cent. La réaction du gouvernement devant la grave crise économique qui sévit a consisté - selon la communication - à adopter une série de mesures d'austérité et à lancer une campagne répressive et orientée, destinée à saper le moral et la capacité de lutte des travailleurs.
  2. 335. Il est ajouté dans la communication de la CISL que, d'autre part, faute d'accord mettant fin à la guerre civile, celle-ci se poursuit avec des bombardements, de coûteuses opérations militaires qui détruisent la faune et la flore, l'infrastructure, les installations minières, etc., et qui aggravent encore une situation économique déjà désastreuse. S'agissant des droits de la personne humaine et des droits syndicaux, on assiste à des violations délibérées du fait des forces de sécurité et à une réapparition des escadrons de la mort. La communication ajoute que les assassinats et les disparitions pour raisons politico-syndicales se poursuivent. A ce jour, aucun membre des forces de sécurité n'a été traduit en justice pour violation des droits de l'homme. Les travailleurs salvadoriens jouissent, de par la Constitution, du droit d'organisation. Cependant, certains droits syndicaux, comme celui de constituer des syndicats, le droit de négociation collective et le droit de grève sont limités au secteur privé; les travailleurs des administrations publiques non autonomes n'en bénéficient pas. En dépit de ces garanties constitutionnelles, le gouvernement d'un côté et les forces extrémistes de droite et de gauche de l'autre s'efforcent, par divers moyens de pression, de manipuler les travailleurs et leurs organisations à des fins politiques, compromettant ainsi le renforcement d'un mouvement syndical autonome, capable de défendre et de promouvoir les intérêts des travailleurs.
  3. 336. La communication de la CISL ajoute que l'on a constaté une recrudescence des violations des droits de l'homme et des droits syndicaux au cours de l'année 1987, et elle présente un rapport sur les actes de répression commis par les forces militaires et de police et par les escadrons de la mort entre août et décembre 1987 (voir en annexe à la fin de l'exposé du présent cas).
  4. 337. D'autre part, la communication ajoute que les mouvements insurrectionnels contrôlés par le FMLN et engagés dans une campagne de paralysie des transports terrestres et de sabotage des opérations électorales ont mitraillé un autobus qui transportait des travailleurs de l'entreprise de textile IUSA, assassinant trois syndicalistes et faisant quatre blessés graves. Selon la communication, ces faits se sont produits le vendredi 19 février 1988 à 20 heures, dans la localité de San Martin, à 20 kilomètres de San Salvador. Les syndicalistes assassinés étaient: Custodia de Jesûs Rivas, Xenia Marisol Lapez Molina et Rosa Cândida Martinez Marroquin; les blessés graves sont: Maria Angélica Mejias, Marta Romero Guillén, Elias Segura Cerôn et Hernân Eduardo Contreras (conducteur de l'autobus). Tous étaient membres de ce syndicat. La communication conclut en rappelant que c'est au gouvernement d'El Salvador qu'incombe la responsabilité de garantir le respect total des droits de l'homme et des droits syndicaux, d'identifier les responsables des violations de ces droits et de les juger afin de garantir la sécurité des citoyens.
  5. 338. Dans sa communication du 27 avril 1988, la CISL dénonce la disparition de Fredy Torres, syndicaliste et secrétaire culturel du Syndicat des travailleurs de l'assurance sociale (STISS), qui avait été appréhendé le 22 avril 1988 par des individus en civil fortement armés. Il a complètement disparu depuis; antérieurement, il avait reçu des menaces qui lui auraient été adressées par la police nationale. Peu de temps auparavant, il avait été dénoncé par le directeur de l'Institut de l'assurance sociale comme étant responsable de la grève déclenchée au début de 1988 par son syndicat et, dans le contexte salvadorien, une telle accusation peut entraîner de graves conséquences.
  6. 339. Dans sa communication du 4 mai 1988, la CISL dénonce l'assassinat, le 29 avril 1988 à San Salvador, par des inconnus, d'Adriân Chavarria Girôn, syndicaliste et secrétaire aux relations internationales de la Confédération générale des travailleurs (CGT). A la même date, le siège de l'Union nationale des travailleurs salvadoriens (UNTS) a été la cible d'un attentat à l'explosif qui a causé de graves dégâts matériels.
  7. 340. Dans une autre communication en date du 17 juin 1988, la CISL affirme que, le 8 juin 1988, Domingo Lépez Morales, syndicaliste et premier secrétaire aux conflits du travail de la sous-section syndicale de l'entreprise de construction "José Nuila Fuentes", syndicat affilié à la FENASXRAS, a été criblé de balles et est mort devant sa famille. Selon le témoignage de ses proches, cet incident s'est produit dans la propriété Nacuilafa, relevant de la juridiction de Nejapa (à 18 kilomètres de San Salvador); quelque 25 personnes en uniforme y étaient impliquées.
  8. 341. La communication ajoute que, le 6 juin 1988, le coopérateur José Parada a été arrêté par des militaires du bataillon Jucuarân, à San Francisco Xavier, dans le département d'Usulatân. Lors de son arrestation, il transportait la somme de 40.000 colons appartenant à la coopérative, et les militaires se sont servis de ce fait pour l'accuser de servir de contact à la guérilla dans cette zone à forte implantation militaire. La communication poursuit en alléguant que, le 29 mai 1988, des militaires de la troisième brigade de l'armée ont procédé à une sévère perquisition à la coopérative "Guayojo" district de Matapân, département de Santa Ana, à 70 kilomètres à l'est de San Salvador. Trois coopérateurs ont alors été arrêtés: Rolando Aguirre Areola, président; Eugenio Galdanés et Orlando Areola Lôpez, membres. Ces personnes ont été détenues pendant cinq jours sans qu'aucune accusation ne soit retenue contre elles; cette perquisition avait été effectuée sous prétexte de chercher des armes, mais rien ne fut trouvé.
  9. 342. La communication de la CISL signale en outre que, depuis le 12 mars 1988, un mandat d'arrêt a été lancé contre quatre dirigeants de la FENASTRAS: Gerardo Diaz, secrétaire de l'organisation, Antonio Guatemala, secrétaire général du Syndicat de l'industrie bancaire (SIGEBAN), Antonio Inglés et Juan Huezo, pour de prétendues agressions contre M. Tadeo Bernai Lizama, ministre du Travail. La communication ajoute qu'il est évident que, quel que soit le bien-fondé de l'accusation, le mandat d'arrêt lancé contre ces personnes a pour objet de les intimider et de limiter leurs activités syndicales. De même, l'UNTS a signalé que le haut commandement des forces armées avait lancé des mandats d'arrêt contre neuf dirigeants de l'Association nationale des travailleurs de l'Institut du ravitaillement (ASTIRA), dans le département de Santa Ana. Il s'agit des personnes suivantes: Celestino Nûnez, Francisco Aguilar, Manuel Pérez Avila, Gilberto Fuentes, Antonio Rivora, Rogelio Guevara, Pedro Benitez, Milton Retana et Oscar Retana.
  10. 343. Dans une autre communication en date du 12 octobre 1988, la CISL dénonce les faits suivants: le 11 septembre 1988, les coopérateurs suivants ont été arrêtés à Usulutan: Alberto Olmedo, Bartolo Cornejo, Remberto Hernândez Flores, Leonor Pena Sânchez, Antonio Pérez, Sébastian Espinoza, Edwin Andrade et N. Henriquez. On ignore le lieu où ils sont détenus. Le 13 septembre 1988, les locaux de l'Union nationale des travailleurs salvadoriens (UNTS) et la garderie du Syndicat FENASTRAS-San Miguelito ont été perquisitionnes sans mandat. Tous les membres du comité exécutif de l'UNTS furent détenus dans les locaux de cette organisation. Dans la garderie furent appréhendés illégalement Roberto Campos, Laura Mira et son conjoint, ainsi que l'étudiant Otoniel Guevara. Ce jour-là, à l'occasion de manifestations, des étudiants, des enseignants, des travailleurs universitaires et des agriculteurs de San Salvador, Santa Ana et San Miguel furent agressés par les forces de police. Le 14 septembre 1988, le local de l'Association nationale des travailleurs agricoles (ANTA) a été perquisitionné et, à cette occasion, 15 personnes ont été appréhendées sans mandat d'arrêt et elles ont disparu.
  11. 344. La communication de la CISL ajoute que le 21 septembre 1988, dans la zone du canton de San Francisco, département de San Vincente, juridiction de San Sebatiân, dix paysans ont été assassinés et que la responsabilité de ces assassinats est imputée aux forces armées. On a essayé de dissimuler ce fait en invoquant un prétendu affrontement entre paysans et guérilleros. Plusieurs témoins des faits confirment que ce sont des membres de la cinquième brigade de l'armée qui sont responsables de ces assassinats. L'Union nationale ouvrière paysanne (UNOC) a tenu une conférence de presse pour dénoncer ces faits, exigeant en outre que le commandant des forces armées enquête sur ces faits tragiques et que les auteurs de ces crimes soient punis. Voici les noms des paysans assassinés: José Atilio Rivas, Zoila Rivas, Jesûs Cepeda (père), Jesûs Cepeda (fille), Francisco Alfaro, José Alfaro, Nicolas Flores, José Maria Flores, Teresa Argueta et Ulises Gibriân.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 345. Dans une communication en date du 28 juin 1988, le gouvernement, se référant à la communication de la CISL datée du 7 mars 1988, indique que les dénonciations qui y sont contenues sont entachées de partialité, étant donné qu'elles ne mentionnent que de prétendus cas de violation de la liberté syndicale et des droits de l'homme imputés aux forces armées, au ministère du Travail et au centre judiciaire Isidro Menéndez; d'ailleurs, la CISL s'abstient de dénoncer les cas dans lesquels ont été impliqués les groupes du FMLN qui, par leurs actes de violence et de terrorisme, menacent les droits humains des travailleurs, par exemple le mitraillage, en février dernier, d'un autobus qui transportait des ouvriers de l'usine de textile Industrias Unidas SA (IUSA), lors d'un arrêt du véhicule et sur l'ordre du FMLN; il en va de même pour les droits économiques et sociaux, lorsque sont détruits des locaux de travail, ce qui prive les travailleurs de leurs emplois et aggrave la pauvreté de leurs foyers. On peut également signaler que de nombreuses dénonciations formulées par la CISL s'inspirent des divers organes de presse, lesquels ne font que divulguer les informations reçues lors de constantes conférences de presse des organisations ou de quelques particuliers qui se considèrent comme des victimes de la répression, et cela sans vérifier si les informations ainsi communiquées sont exactes ou erronées. Cette situation fait partie d'une campagne de désinformation au niveau international, dirigée contre le pays par les plaignants qui inondent les organismes internationaux et les gouvernements de dénonciations et de plaintes pour obtenir que le gouvernement d'El Salvador soit condamné dans les différentes enceintes internationales, en l'occurrence les réunions de l'OIT. On s'efforce, par la même occasion, de cacher la réalité des problèmes qu'affrontent le pays et la population et des efforts que déploie le gouvernement pour les résoudre; on s'efforce surtout de couvrir les auteurs matériels et intellectuels des actes criminels et terroristes commis par le FMLN-FDR avec l'aide d'autres gouvernements et d'organisations internationales.
  2. 346. La communication du gouvernement poursuit en affirmant que, s'agissant des accusations de répression gouvernementale contre les syndicats et les organisations de base, il convient de préciser qu'El Salvador respecte le droit de tous les travailleurs à la liberté syndicale, ce droit étant garanti par le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, par la Direction générale.du travail et par la loi organique pertinente qui prévoit, en son article 12, paragraphe 4, qu'il importe "d'encourager la formation d'associations professionnelles de travailleurs et d'auxiliaires ainsi que la conclusion de contrats et de conventions collectives de travail". Il est de même illogique d'accuser le centre judiciaire Isidro Menéndez d'être un instrument de répression gouvernementale puisque, en l'occurrence, ce centre est le lieu même où se trouvent les édifices des tribunaux ou instances judiciaires de la capitale. De même, on ne saurait considérer les juges qui sont à la tête de ces tribunaux comme étant les auteurs de la répression, puisqu'il s'agit seulement de fonctionnaires civils qui, en application de la Constitution, ont compétence pour juger et faire exécuter les jugements dans le cadre de la loi. Enfin, en ce qui concerne les accusations de répression lancées contre les forces armées, il importe de préciser que, ces dernières années, les organisations syndicales ont déclenché des conflits du travail non seulement pour obtenir des augmentations de salaires, mais aussi pour déstabiliser le gouvernement par une attitude d'intransigeance politique, en présentant des exigences qui ne pouvaient être acceptées étant donné la situation de crise socio-économique et politique que traverse le pays. De même, certaines organisations se sont alliées à des groupes du FMLN, ce qui fait qu'on les a considérées comme des groupes de façade, et leurs actions font partie des plans de déstabilisation du FMLN-FDR, plans qui ont été connus à la suite de la saisie de documents secrets appartenant tant auxdites organisations qu'aux groupes du FMLN. Il convient également de signaler que les organisations qui prétendent être victimes d'une répression et qui tirent partie du droit constitutionnel de libre expression ont eu recours à des manifestations de rues, lesquelles sont accompagnées d'actes de violence terroriste: inscriptions à la peinture sur les murs et les véhicules, agressions contre la propriété publique et privée, provocations contre les corps de sécurité, etc. Devant ces actes, le rôle des forces armées est d'être vigilantes et de garantir la sécurité de la propriété privée et publique et de tous les citoyens en général. Avec de tels actes, ces organisations ont menacé non seulement la vie de leurs propres adhérents mais également celle des citoyens en général qui exprimaient leur total désaccord avec ces méthodes violentes et irrationnelles de lutte syndicale.
  3. 347. La communication du gouvernement conclut que ces actes de provocation ont pour objectif délibéré de provoquer les forces armées, afin de créer des martyrs et de pouvoir ensuite lancer des campagnes de désinformation dans le cadre desquelles le gouvernement et les forces armées seront dénoncés comme ayant violé les droits de l'homme en El Salvador, et en particulier ceux de la classe laborieuse. La communication est accompagnée de photocopies d'observations formulées par le ministère du Travail sur les diverses dénonciations présentées par la CISL.
  4. 348. Dans une autre communication, également datée du 28 juin 1988, le gouvernement se réfère à la communication de la CISL relative à la détention de Fredy Torres, secrétaire culturel du Syndicat des travailleurs de l'Institut salvadorien de l'assurance sociale (STISS), et signale à cet égard que, selon un journal local, M. Torres, également connu sous le pseudonyme de "Carlos", a été arrêté le 22 avril de cette année par des membres de la police des finances sous suspicion d'avoir commis des actes de caractère terroriste, d'avoir incendié un autobus de la ligne 29 à San Salvador le 8 avril, après quoi il a été interné au pénitencier de La Esperanza, puis libéré le 26 avril par la sixième Chambre pénale de San Salvador, aucune charge n'ayant été retenue à son encontre. La communication du gouvernement est accompagnée d'une copie du journal local donnant cette nouvelle.
  5. 349. Dans une autre communication en date du 7 septembre 1988, le gouvernement fournit des informations sur l'assassinat de M. Adrian Chavarria Giron, dirigeant syndical et secrétaire aux relations internationales de la Confédération générale des travailleurs (CGT), et il indique à cet égard que, étant donné le caractère délicat de cette affaire, celle-ci fait actuellement l'objet d'investigations par l'unité executive de la Commission d'enquête sur les faits délictueux. Le gouvernement déclare qu'il fournira, en temps voulu, des renseignements sur les résultats de ladite enquête.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 350. Le comité observe que l'organisation plaignante brosse un tableau général de la situation économique, politique et sociale du pays et communique en annexe une liste des actes allégués de répression qui se seraient produits entre août et décembre 1987.
  2. 351. Le comité note également les informations générales fournies par le gouvernement, et en particulier le fait que de nombreuses allégations présentées par la CISL s'inspirent d'articles de presse qui reproduisent des informations fournies par des personnes ou des organisations considérées comme victimes de la répression, sans vérifier la véracité de ces informations, ce qui, selon le gouvernement, s'insère dans le cadre d'une campagne de désinformation internationale dirigée contre le pays par les plaignants, campagne qui cherche à couvrir les auteurs des actes criminels et terroristes commis par le FMLN-FDR avec l'appui d'autres gouvernements et organisations internationales.
  3. 352. De même, le comité prend note des déclarations du gouvernement au sujet des accusations d'actes de répression que lui-même et les forces armées auraient commis contre des syndicats et des organisations de base. Selon le gouvernement, ces dernières années, les organisations syndicales auraient provoqué des conflits du travail non pas pour obtenir des augmentations de salaires, mais dans le dessein de déstabiliser le gouvernement par des actions politiques intransigeantes, étant donné que certaines organisations se sont alliées au FMLN et lui servent de façade et que leurs actions s'inscrivent dans les plans de déstabilisation de cette organisation. En ce qui concerne ces commentaires du gouvernement, le comité souligne qu'un climat de violence donnant lieu à l'assassinat ou à la disparition de dirigeants syndicaux constitue un grave obstacle à l'exercice des droits syndicaux et que de tels actes exigent des mesures sévères de la part des autorités.
  4. 353. S'agissant de l'allégation relative à l'arrestation, le 22 avril 1988, du syndicaliste Fredy Torres accusé d'avoir commis des actes terroristes, le comité observe que, selon le gouvernement, l'intéressé a été libéré par la sixième Chambre criminelle, aucune charge n'ayant été retenue contre lui; à cet égard, le comité rappelle le principe selon lequel, lorsque les autorités arrêtent des syndicalistes contre lesquels aucun motif d'inculpation n'est ultérieurement retenu, cela risque d'impliquer des restrictions à l'exercice des droits syndicaux. Les gouvernements devraient prendre des mesures pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées afin d'éliminer le risque que les mesures de détention impliquent pour les activités syndicales.
  5. 354. Le comité prend note des observations du gouvernement au sujet de l'assassinat du dirigeant syndical Adriân Chavarria Girôn, et notamment du fait que l'affaire a été confiée à l'unité executive de la Commission d'enquête sur les délits et qu'il sera informé du résultat de l'enquête en cours.
  6. 355. En ce qui concerne le mitraillage, le 19 février 1988, d'un autobus de l'entreprise "IUSA", qui a entraîné la mort des syndicalistes Jésus Rivas, Xenia Marisol Lôpez Molina et Rosa Cândida Martinez Marroquin et provoqué de graves blessures à Maria Angélica Mejias, Marta Romero Guillén, Elias Segura Cerôn et Hernân Contreras, le comité rappelle le principe selon lequel un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut exister dans un climat de violence et d'incertitude. Il incombe aux gouvernements de garantir le respect des droits fondamentaux de la personne humaine.
  7. 356. En ce qui concerne les dénonciations présentées par la CISL dans une liste annexée à sa communication du 7 mars 1988 portant sur la répression gouvernementale alléguée contre des syndicats et des organisations de base entre août et décembre 1987, le comité prend note des observations du gouvernement sur certains des faits allégués dans ladite liste (voir les annexes I et II à la fin de l'examen du présent cas).
  8. 357. S'agissant des allégations formulées par la CISL et relatives à l'assassinat le 8 juin 1988 du syndicaliste Domingo Lôpez Morales et des agriculteurs José Atilio Rivas, Zoila Rivas, Jesûs Cepeda (père), Jesûs Cepeda (fille), Francisco Alfaro, José Alfaro, Nicolas Flores, José Maria Flores, Teresa Argueta et Ulises Gibriân le 21 septembre 1988, le comité, tout en déplorant que le gouvernement n'ait pas communiqué ses observations sur ces allégations, rappelle le principe selon lequel les droits syndicaux ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toute nature contre les syndicalistes; il incombe aux gouvernements de garantir le respect de ce principe; il rappelle en outre qu'un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut exister que dans le respect des droits fondamentaux de la personne humaine.
  9. 358. Le comité observe enfin que le gouvernement n'a pas communiqué ses informations et observations sur les allégations suivantes: arrestation, le 6 juin 1988, du coopérateur José Parada par des militaires du bataillon Jucuaran à San Francisco Xavier, alors qu'il avait été trouvé en possession de 400.000 colons appartenant à la coopérative; perquisition, pour recherche d'armes, de la coopérative "Guayojo", située dans le ressort juridictionnel de Matapan, département de Santa Ana, et arrestation subséquente des coopérateurs Rolando Aguirre Areola, Eugenio Galdanés et Orlando Areola Lapez; mandat d'arrêt lancé le 12 mars 1988 contre quatre dirigeants du FENASTRAS: Gerardo Diaz, Antonio Guatemala, Antonio Inglés et Juan Huezo pour de prétendues agressions contre le ministre du Travail, et mandat d'arrêt lancé par les forces armées contre neuf dirigeants de l'Association nationale des travailleurs de l'Institut de réglementation du ravitaillement (ASTIRA): Celestino Nûnez, Francisco Aguilar, Manuel Pérez Avila, Gilberto Fuentes, Antonio Rivora, Rogelio Guevara, Pedro Benitez, Milton Retana et Oscar Retana; communication de la CISL en date du 12 octobre relative à l'arrestation à Usulutan, le 11 septembre 1988, des coopérateurs Alberto Olmedo, Bartolo Cornejo, Remberto Hernândez Flores, Leonor Pena Sânchez, Antonio Pérez, Sébastian Espinoza, Edwin Andrade et N. Henriquez; perquisition sans mandat judiciaire, le 13 septembre 1988, des locaux de l'Union nationale des travailleurs salvadoriens (UNTS) et de la garderie du Syndicat FENASTRAS-San Miguelito; et détention, dans les locaux de l'UNTS, de tous les membres du comité exécutif de cette organisation et, dans la garderie, de Roberto Campos, Laura Mira et de l'époux de celle-ci, ainsi que de l'étudiant Otoniel Guevara; perquisition, le 14 septembre 1988, des locaux de l'Association nationale des travailleurs agricoles (ANTA) et arrestation sans mandat d'arrêt de 15 personnes dont on ignore où elles se trouvent.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 359. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes :
    • a) Le comité exprime une fois de plus sa profonde préoccupation devant la gravité et la persistance des allégations présentées au sujet de la disparition, de l'assassinat, de l'arrestation et de l'intimidation de nombreux syndicalistes en El Salvador.
    • b) S'agissant de l'arrestation du syndicaliste Fredy Torres et de sa libération ultérieure, aucune charge n'ayant été retenue contre lui, le comité signale que les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées afin d'éliminer le risque que les mesures de détention impliquent pour les activités syndicales.
    • c) S'agissant de l'assassinat du dirigeant syndical Adriân Chavarria Girôn, le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de l'enquête officielle en cours et de son évolution ultérieure.
    • d)S'agissant de l'assassinat des syndicalistes Jesûs Rivas, Xenia Marisol Lapez Molina et Rosa Cândida Martinez Marroquin et des graves blessures causées à Maria Angélica Mejias, Marta Romero Guillén, Elias Segura Cerén et Hernân Contreras, à la suite du mitraillage de l'autobus dans lequel ils se déplaçaient, le comité exprime sa préoccupation devant la gravité de ces faits et il demande au gouvernement de prendre les mesures appropriées pour prévenir la répétition de tels actes.
    • e) S'agissant de l'assassinat du syndicaliste Domingo Lôpez Morales, le 8 juin 1988, et des agriculteurs José Atilio Rivas, Zoila Rivas, Jesûs Cepeda (père), Jesûs Cepeda (fille), Francisco Âlfaro, José Alfaro, Nicolas Flores, José Maria Flores, Teresa Argueta et Ulises Gibriân, le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête judiciaire indépendante afin de définir les responsabilités, de punir les coupables et de prévenir le renouvellement de tels actes, et également de tenir le comité informé de toute mesure qui serait prise en liaison avec l'ouverture d'une enquête judiciaire.
    • f) Enfin, le comité demande au gouvernement de lui communiquer ses informations et observations sur les allégations suivantes: arrestation, le 6 juin 1988, du coopérateur José Parada par des militaires du bataillon Jucuaran à San Francisco Xavier, l'intéressé ayant été trouvé en possession de 400.000 colons appartenant à la coopérative; perquisition, pour recherche d'armes, de la coopérative "Guayojo" dans le ressort juridictionnel de Matapan, département de Santa Ana, et détention ultérieure pendant cinq jours des coopérateurs Rolando Aguirre Areola, Eugenio Galdanés et Orlando Areola Lôpez; mandat d'arrêt lancé depuis le 12 mars 1988 contre quatre dirigeants du FENASTRAS: Gerardo Diaz, Antonio Guatemala, Antonio Inglés et Juan Huezo pour de prétendues agressions contre le ministre du Travail; mandat d'arrêt.lancé par les forces armées contre neuf dirigeants de l'Association nationale des travailleurs de l'Institut du ravitaillement (ASTIRA): Celestino Nûnez, Francisco Aguilar, Manuel Pérez Avila, Gilberto Fuentes, Antonio Rivora, Rogelio Guevara, Pedro Benitez, Milton Retana et Oscar Retana; communication de la CISL, en date du 12 octobre, relative à l'arrestation à Usulutan, le 11 septembre 1988, des coopérateurs Alberto Olmedo, Bartolo Cornejo, Remberto Hernândez Flores, Leonor Pena Sânchez, Antonio Pérez, Sébastian Espinoza, Edwin Andrade et N. Henriquez, et perquisition sans mandat judiciaire, le 13 septembre 1988, des locaux de l'Union nationale des travailleurs salvadoriens (UNIS) et de la garderie du Syndicat FENASTRAS-San Miguelito, et arrestation dans les locaux de l'UNTS de tous les membres du comité exécutif de cette organisation et, dans la garderie, de Roberto Campos, Laura Mira et de l'époux de celle-ci, ainsi que de l'étudiant Otoniel Guevara; perquisition, le 14 septembre 1988, des locaux de l'Association nationale des travailleurs agricoles (ANTA) et arrestation sans mandat d'arrêt de 15 personnes dont on ignore où elles se trouvent. En outre, le comité demande au gouvernement de lui communiquer ses observations sur les allégations qui n'ont pas reçu de réponse et qui figurent à l'annexe I du présent cas.

Z. ANNEXE I

Z. ANNEXE I
  • Annexe non incluse
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