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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2022, Publication : 110ème session CIT (2022)

2022-MMR-087-Fr

Informations écrites communiquées par le gouvernement

Les informations contenues dans ce document sont fournies par les autorités militaires. Leur publication n’implique pas une reconnaissance explicite ou implicite de ces autorités en tant que gouvernement légitime du Myanmar.

Libertés civiles: S’agissant du cas d’une personne du nom de Chan Myae Kyaw et des informations contenues dans le rapport de la CEACR, il apparaît qu’il n’existe pas au Myanmar d’organisation enregistrée sous le nom de Fédération des travailleurs des mines du Myanmar (MWFM). Il n’y a pas d’organisation minière de niveau d’une fédération du travail, et le nom de Chan Myae Kyaw ne figure pas non plus dans la liste des organisations de travailleurs de base. Par conséquent, le Myanmar n’est pas en mesure d’identifier cette personne faute de plus de précisions sur elle.

Le 27 mars 2021 à Monywa, des actions de protestation ont eu lieu, regroupant une cinquantaine de personnes dans la zone industrielle, une centaine à Thanlar Ward, 400 environ le matin et dans la soirée au croisement de Tharsi Road et de Payshisae Road, et une vingtaine de personnes respectivement au sommet de Kyaukkar Road et dans Aung Tha Pyay Road à Myawaddy Ward. Ces actions de protestation ont dégénéré et des émeutiers ont attaqué les membres des forces de sécurité avec des armes létales. Ces incidents n’ont fait aucune victime.

L’observation fait mention d’une personne du nom de Nay Lin Zaw qui aurait été tuée. Après vérification, il n’existe aucune organisation enregistrée comme association des travailleurs d’AD Furniture tandis que la Fédération des syndicats de l’industrie et de l’artisanat (MICS-TUsF) n’enregistre pas ses membres. De ce fait, le Myanmar ne peut pas vérifier l’identité de cette personne pour laquelle plus de détails sont nécessaires. Aucun cas n’a été enregistré au poste de police ni aux bureaux administratifs des Wards nos 23 et 63 du Dagon Township (South) où se trouve la zone industrielle. AD Furniture Industry n’a déposé aucune plainte non plus. Aucune intervention antiémeute n’a été menée par les membres des forces de sécurité à Dagon Township (South) les 28 et 29 mars 2021.

S’agissant du cas de Zaw Zaw Htwe, il n’existe pas d’organisation enregistrée sous le nom de Solidarity Trade Union of Myanmar (STUM). Le 14 mars 2021 au Shwepyithar Township, le bureau de l’administration générale a été attaqué et saccagé par quelque 200 émeutiers armés de bâtons, d’épées, de frondes et de cocktails Molotov. Les membres des forces de sécurité ont appliqué les procédures antiémeute et, dans la foule, Zaw Zaw Htwe, résidant au Ward no 10 du Shwepyithar Township est décédé des suites de ses blessures, et un dossier a été ouvert au poste de police du Shwepyithar Township sous le numéro 15/2021.

S’agissant des 28 personnes inculpées pour activités illégales, il s’avère qu’elles ont ciblé le Hlaing Tharyar Township peuplé en grand nombre de travailleurs d’usines et ont incité la population en diffusant des nouvelles fabriquées de toutes pièces. En conséquence, elles ont été inculpées au titre de l’article 505A du Code pénal au poste de police de Yankin City, le 22 avril 2021, et au titre de l’article 124-A du Code pénal au poste de police de Dagon Myothit (East) City, le 14 mai 2021. S’agissant de la directrice du Solidarity Trade Union of Myanmar (STUM), qui n’est pas une organisation enregistrée, son dossier a été ouvert au poste de police du Shwepyithar Township en application de l’article 505A du Code pénal, le 10 mars 2021, et elle a été incarcérée le 15 avril 2021. Le 18 octobre 2021, le conseil de l’administration de l’État l’a amnistiée par l’ordonnance no 187/2021.

État d’avancement de la réforme de la législation du travail: La loi sur l’organisation du travail est en cours de modification en tenant compte des désirs et des requêtes des travailleurs et des employeurs afin de correspondre à la situation réelle du pays Elle a donné lieu à cinq réunions du Groupe de travail technique sur la réforme de la législation du travail (TWG-LLR) et à cinq Forums de dialogue tripartite national (NTDF). À l’issue de ces discussions, le projet de loi a été rédigé puis communiqué au préalable à l’OIT et aux fédérations d’employeurs et de travailleurs. Il a été discuté par les représentants tripartites aux dixième, onzième, douzième et treizième réunions du TWG-LLR. Le processus d’amendement de la loi doit encore se poursuivre: 2 886 organisations du travail de base, 162 organisations du travail de Township, 26 organisations du travail régionales ou d’État, 9 fédérations du travail, une confédération du travail, 27 organisations d’employeurs de base, une organisation d’employeurs de Township et une fédération d’employeurs sont enregistrées à ce jour, conformément à la loi sur l’organisation du travail de 2011, soit au total 3 113 organisations de travailleurs et d’employeurs.

S’agissant du refus d’enregistrement évoqué dans le rapport, l’article 14(a) de la loi sur l’organisation du travail dispose que «Le greffier en chef analyse en détail le contenu de la demande d’enregistrement en tant qu’organisation du travail soumise par le greffier de Township, ainsi que les documents qui l’accompagnent, afin de juger de leur authenticité et de leur conformité avant d’accepter ou de refuser de l’enregistrer, en motivant sa décision dans les trente jours de la date de réception de ladite demande», et son article 14(b) dispose que «Le greffier en chef examine les mentions contenues dans la demande d’enregistrement en tant que fédération du travail ou que confédération du travail du Myanmar, ainsi que les documents qui l’accompagnent, afin de juger de leur authenticité et de leur conformité avant d’accepter ou de refuser de l’enregistrer, en motivant sa décision dans les soixante jours de la date de réception de ladite demande». Si, lors de l’examen de la demande de certificat de reconnaissance en tant qu’organisation du travail, le greffier de Township constate que le nombre de membres est insuffisant et que le nombre de responsables élus est inadéquat, l’organisation est alors réputée non conforme à toute autre loi en vigueur et ne rentre pas dans les critères de la loi. En conséquence, le greffier en chef a le droit de refuser pour ces motifs. Cependant, si le nombre de membres et de dirigeants est insuffisant, des éléments factuels doivent être produits et les certificats sont délivrés sans refus. Bien que le deuxième amendement à la loi sur le règlement des conflits du travail ait été promulgué le 3 juin 2019, la mise en application de quelques dispositions de la loi pose des difficultés. À cet égard, la contribution et l’avis des instances d’arbitrage et du conseil de l’arbitrage, qui mettent la loi en pratique, seront sollicités. Le projet de règles pour le règlement des conflits du travail a été discuté avec les représentants tripartites en vue de leur promulgation en tant que nouveau règlement, en application du deuxième amendement de la loi sur le règlement des conflits du travail. Il a aussi été discuté avec les fonctionnaires en charge de la mise en application de la loi dans la pratique afin d’obtenir leur contribution et leur avis sur les difficultés et les problèmes qui se posent dans les faits. En outre, un examen de cette discussion et une étude du système de règlement des conflits du travail des pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) ont été réalisés, et la contribution et l’avis des organismes concernés seront également sollicités.

S’agissant de la demande de la commission pour que soient garantis pleinement les droits des travailleurs des zones économiques spéciales (ZES), les conflits survenant entre employeurs, travailleurs, techniciens ou agents de la fonction publique font l’objet d’une négociation et d’une consultation régies par la loi sur les zones économiques spéciales du Myanmar (2014), en coordination avec la Comité de gestion de la zone économique spéciale. Si la négociation et la conciliation par le Comité de gestion de la zone économique spéciale concerné s’avèrent impossibles, le litige est réglé conformément à la loi sur le règlement des conflits du travail. Il est évident qu’aucune personne n’a été ciblée parce qu’elle était syndiquée. Les membres d’organisations syndicales faisant l’objet de chefs d’accusation le doivent à leurs activités illicites, mais pas à l’exercice pacifique des droits syndicaux.

Des informations actualisées ont été publiées en temps utile par le biais des médias, de conférences de presse mensuelles et de communications diplomatiques. Quoi qu’il en soit, il est regrettable de voir que des éléments contenus dans ce rapport de la commission d’experts s’appuient sur des informations partiales émanant de médias antigouvernementaux et d’organisations de l’opposition et que la conclusion du rapport a été rédigée sans tenir dûment compte des informations fournies par les autorités militaires du Myanmar. Par conséquent, les autorités militaires du Myanmar invitent à prendre en considération les informations correctes et confirmées qu’elles ont communiquées pour que le rapport soit le reflet des conditions réelles des travailleurs et de la population du Myanmar, de sorte qu’il puisse contribuer à leur mieux-être.

Discussion par la commission

Le président – Avant d’entamer la discussion de ce cas individuel, je désire attirer l’attention de la commission sur l’absence de délégués du Myanmar, conséquence de la décision prise par la Commission de vérification des pouvoirs lors de la 109e session de la conférence. Cette décision reste d’application étant donné que la question de la représentation du Myanmar à l’OIT n’a toujours pas été réglée à ce jour. Elle a été soumise une nouvelle fois à la Commission de vérification des pouvoirs pendant cette session de la Conférence, et il est à espérer que celle-ci présentera son rapport en séance plénière la semaine prochaine. Ainsi donc, la commission se retrouve dans une situation sans précédent, dans laquelle un gouvernement ne participe pas à la discussion de son cas du fait d’une décision adoptée par l’Organisation.

Étant donné que ce genre de situation n’est pas prévue dans les méthodes de travail qui ont été adoptées par notre commission et régissent actuellement la participation à ses travaux, j’ai consulté avec le bureau les dispositions spéciales que doit adopter la commission pour l’examen du cas du Myanmar, et je voudrais vous soumettre la proposition suivante.

L’absence d’une délégation accréditée du Myanmar ne devrait pas empêcher le fonctionnement du mécanisme de contrôle de l’OIT et en particulier la vérification des conventions fondamentales ratifiées; par conséquent, l’examen du cas individuel devrait se faire, dans la mesure du possible, de la même manière que pour les autres cas individuels. À ce propos, je voudrais vous signaler que le complément d’information communiqué par écrit par les autorités militaires en réponse aux commentaires de la commission d’experts a été publié sur la page Web de la Commission de l’application des normes, accompagné d’une mention indiquant clairement que cette publication n’implique pas une reconnaissance explicite ou implicite de ces autorités en tant que gouvernement légitime du Myanmar. Quoi qu’il en soit, le Myanmar ne fournira pas d’informations verbalement à la Commission de l’application des normes puisque aucun délégué du Myanmar n’est accrédité pour participer à la Conférence. Par conséquent, aucun représentant ne pourra prendre la parole ni faire de déclaration après l’adoption des conclusions.

La proposition est adoptée.

Membres employeurs – Le Myanmar a ratifié la convention en 1955. Or, plus d’un demi-siècle plus tard, cet État Membre est très loin de se conformer à la convention, que ce soit en droit ou dans la pratique. Les membres employeurs comprennent que, au vu de l’urgence et de la gravité des problèmes évoqués, ainsi que de la probabilité de dégâts irréversibles et d’éventuelles morts d’hommes, la commission d’experts a assorti ce cas d’une double note de bas de page pour souligner son extrême gravité. Pour commencer, les membres employeurs se disent vivement préoccupés par les interventions toujours plus violentes de la junte militaire au Myanmar, avec toujours plus de victimes, plus d’oppression et plus de dégâts pour la société, en ce compris les travailleurs, les employeurs et leurs organisations.

Il y a un an, la Conférence internationale du Travail a adopté sur la situation au Myanmar une résolution qui appelait au retour du gouvernement démocratiquement élu et demandait aussi au Myanmar de remplir immédiatement les obligations découlant de la convention et de faire en sorte que les organisations d’employeurs et de travailleurs soient en mesure d’exercer leurs droits dans un climat de liberté et de sécurité, exempt de violence, d’arrestations arbitraires et de détentions. À sa session de mars 2022, le Conseil d’administration a déploré le manque de progrès pour ce qui est du respect de la volonté de la population, des institutions et du processus démocratique et a réitéré son appel au Myanmar pour qu’il remplisse immédiatement ses obligations au titre de la convention.

Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil d’administration a décidé d’instituer une commission d’enquête sur le non-respect de cette convention et de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930.

Pour ce qui est des observations de la commission d’experts, les membres employeurs notent ce qui suit. Premièrement, s’agissant des libertés civiles, la commission d’experts a noté que les autorités militaires continuent d’avoir largement recours à la violence meurtrière et de soumettre les syndicalistes à des actes de harcèlement, des intimidations, des arrestations et des détentions. Nous soulignons que la garantie de la liberté syndicale imposée par la convention requiert comme condition première la primauté du droit et le respect fondamental des droits de l’homme et des libertés civiles, en particulier le droit à la sécurité individuelle, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de manifester et de se réunir et le droit à la protection de la propriété. Nous notons les allégations portant sur de nombreux autres cas d’arrestations, agressions et assassinats de dirigeants syndicaux et de membres de syndicats, et nous avons aussi pris note d’éventuelles poursuites pénales pour l’exercice de la liberté d’expression, de manifester et de se réunir en application de la loi sur les transactions électroniques de 2021 et de la loi sur le droit de se réunir et de défiler pacifiquement de 2016.

Au vu de la gravité de la situation, les membres employeurs appellent le Myanmar à prendre d’urgence les dispositions nécessaires pour rétablir l’état de droit. Les membres employeurs appellent en urgence le Myanmar à respecter pleinement les droits humains fondamentaux et les libertés civiles nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale. Les organisations de travailleurs et d’employeurs du Myanmar doivent à nouveau pouvoir exercer leurs activités et leurs fonctions sans craindre l’intimidation, de subir un préjudice ou d’être emprisonné, et sans aucune autre restriction abusive. Les membres employeurs tiennent à insister sur la nécessité d’un climat dans lequel les entreprises durables, l’investissement, la création d’emplois et l’instauration et le maintien de la prospérité et de la paix ne sont possibles que dans un contexte de liberté qui respecte la liberté syndicale. S’agissant maintenant de la réforme de la législation du travail, les employeurs notent que les critères d’effectifs imposés pour qu’un syndicat puisse être enregistré et les restrictions apportées aux conditions d’éligibilité aux fonctions syndicales découlant de la loi sur l’organisation du travail soulèvent des problèmes de conformité avec les articles 2 et 3 de la convention. Nous attendons du Myanmar qu’il réexamine ces matières en étroite concertation avec les partenaires sociaux à l’échelon national, afin d’assurer le respect total des critères de la convention, y compris de ses articles 2 et 3, et qu’il apporte, dans son prochain rapport, des éclaircissements au besoin ainsi que des informations sur les actions menées à cet égard.

Pour conclure, les membres employeurs expriment leurs vives préoccupations quant à la situation qui perdure au Myanmar et ils exhortent cet État Membre à restaurer la démocratie, rétablir l’état de droit et restaurer les libertés civiles qui sont la condition fondamentale et préalable pour l’exercice de la liberté syndicale au sens de la convention. Plus particulièrement, les membres employeurs lancent un appel d’urgence au Myanmar pour qu’il prenne tout d’abord les mesures nécessaires pour que soient pleinement respectées, en droit et dans les faits, les libertés civiles de base pour l’exercice de la liberté syndicale, à savoir la liberté de la sécurité individuelle, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de manifester et de se réunir, la liberté de déplacement, la liberté de ne pas être arrêté et détenu de façon arbitraire, et le droit à un procès équitable devant un pouvoir judiciaire indépendant et impartial, de telle sorte que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités et remplir leurs fonctions sans menace d’intimidation ou de préjudice, ou sans la crainte d’être emprisonné, et sans aucune autre restriction abusive.

Les membres employeurs appellent aussi le Myanmar à procéder d’urgence, dès que les conditions le permettent, à une révision de la loi sur l’organisation du travail dans le cadre du processus de réforme législative, en totale concertation avec les partenaires sociaux nationaux afin de s’assurer que les droits des travailleurs et des employeurs sont pleinement respectés au sens de la présente convention.

Membres travailleurs – À sa 344e session, en mars 2022, le Conseil d’administration a décidé à l’unanimité d’instituer une commission d’enquête sur le Myanmar à propos des violations graves de la présente convention et de la convention no 29. Nous attendons de cette discussion ainsi que de celle qui a eu lieu au Conseil d’administration qu’elles donnent des orientations concrètes à la commission pour la poursuite de ses travaux, et nous attendons fermement du régime militaire du Myanmar qu’il laisse la commission entrer dans le pays pour y remplir sa mission sans entrave.

Les membres travailleurs prennent note des observations détaillées que la commission d’experts a faites sur ce cas. Le pays est dans une situation épouvantable. Les droits fondamentaux des travailleurs et des employeurs sont menacés, ainsi que leur intégrité physique et leur liberté. Dans de nombreux cas, des préjudices irréparables ont été subis et le sont encore. La décision de la commission d’experts de faire du Myanmar un cas de double note de bas de page semble fort appropriée.

Et en fait, depuis la décision prise il y a deux mois d’instituer une commission d’enquête, le régime militaire a commis de nouvelles violations du droit à la liberté syndicale. À titre d’exemple, dans l’après-midi du 20 avril de cette année, des membres de l’Alliance du travail du Myanmar, de la Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM) et de la Fédération des travailleurs de l’industrie du Myanmar (IWFM) ont participé à une manifestation de protestation contre le régime. À la fin de cette courte manifestation, deux militantes syndicales des noms de Khaing Thinzar Aye et Ei Phyu Phyu Myint ont hélé un taxi pour rentrer chez elles. Un véhicule militaire a percuté leur taxi, six soldats en sont sortis, les ont frappées et arrêtées. Cette agression choquante de deux camarades syndicalistes souligne la gravité de la situation qui perdure.

Des travailleurs sont enlevés et parfois assassinés. Le 25 mai de cette année, juste avant le début de cette conférence, deux membres d’un syndicat ont été enlevés par des militaires dans la région de Yangon Sud; ils ont été tués et leurs villages réduits en cendres.

Les membres travailleurs se joignent à la commission d’experts pour déplorer les violations graves et systématiques commises par la junte militaire. Nous apprécions les importantes mesures qui ont été prises par certains États Membres de l’OIT ainsi que certains partenaires sociaux pour faire pression sur la junte pour qu’elle renonce à la voie qu’elle suit actuellement, mais ils constatent que ces actions se sont avérées insuffisantes jusqu’à présent. À l’évidence, il faut en faire plus.

Nous souhaitons formuler quelques observations pour souligner le caractère systématique des violations de la convention et de la situation déplorable qui prévaut dans le pays. Les membres travailleurs rappellent à la commission que, depuis le coup d’État de février 2021, plus de 1 500 personnes, dont plusieurs syndicalistes, ont été assassinées par les militaires et la police dans le cadre de manifestations qui réclamaient un retour à la démocratie, et dans celui de conflits du travail. Un sentiment de perte nous afflige à la lecture de la longue liste de syndicalistes assassinés que dresse le 397e rapport du Comité de la liberté syndicale sur le cas no 3405.

Nous sommes encore sous le choc que nous a causé le massacre perpétré dans la zone industrielle Hlaing Tharyar en mars 2021, lorsque les militaires ont ouvert le feu sur des manifestants pacifiques et désarmés, dont plusieurs syndiqués qui travaillaient dans la zone et y habitaient. Le régime prétend que les militaires n’ont fait que riposter en faisant usage de la force à des attaques terroristes, ce qui est totalement infondé et déplacé.

Nous déplorons aussi la délivrance de mandats d’arrestation ainsi que les arrestations de nombreux dirigeants et activistes syndicaux pour avoir simplement exercé leurs droits fondamentaux à la liberté d’expression, de réunion et d’association. En outre, la menace constante de violences et/ou d’arrestations a forcé de nombreux dirigeants syndicaux à fuir le pays, tandis que beaucoup continuent de soutenir leurs syndicats depuis leur lieu d’exil.

En outre, cet exode forcé de membres et de dirigeants de syndicats vers la frontière avec la Thaïlande accentue encore la crise humanitaire, aucun effort systématique n’étant fait pour régulariser leur situation en Thaïlande. Par sécurité, la plupart ne peuvent rentrer au Myanmar et ces syndicalistes viennent de toutes les organisations syndicales et de tous les secteurs. Pour encore aggraver les choses, les passeports de nombreux hauts dirigeants de la Confédération des syndicats du Myanmar ont été révoqués, laissant quelques-uns bloqués à l’extérieur de leur pays, comme c’est le cas pour les délégués des travailleurs qui s’adresseront à la commission plus tard dans la journée.

Le régime prétend que ces passeports ont été révoqués en application de l’article 505 du Code pénal pour crime de trahison parce que ces dirigeants auraient répandu des nouvelles destinées à discréditer l’armée et le conseil de l’administration de l’État. Une fois encore, ces chefs d’accusation manquent de tout fondement et sont totalement absurdes. Les syndicats ont dénoncé le groupe militaire et réclamé le rétablissement de la démocratie, ce qui est l’exact contraire d’une trahison puisqu’ils n’ont pas trahi leur pays, mais le défendent, en réalité, ainsi que son gouvernement légalement élu.

Il est aussi plus que flagrant que, si les dirigeants étaient restés dans le pays, il est très peu probable qu’ils aient été traités normalement et aient bénéficié d’un procès équitable. Nous savons aussi que, cette année, les militaires ont déchu de leur citoyenneté 11 activistes de premier plan, en faisant d’eux ainsi des apatrides, en violation du droit international.

Le régime a déclaré au moins 16 syndicats illégaux et a menacé d’intenter des actions en justice contre eux s’ils poursuivent leurs activités. La police et l’armée ont perquisitionné les bureaux de syndicats et les domiciles de responsables syndicaux; elles ont saisi des documents et du matériel en réponse à leur participation à des grèves et des manifestations réclamant le rétablissement de la démocratie au Myanmar.

Des syndicats accusent des propriétaires d’usines de tous les secteurs de s’en prendre aux syndicats intentionnellement et systématiquement, et en toute illégalité, empêchant ainsi les syndicats de poursuivre leurs activités et de remplir leurs fonctions sur leurs lieux de travail respectifs. Dans les faits, tous les canaux de relations du travail et de règlement des litiges ont été fermés. Le mécanisme d’arbitrage et les juridictions du travail ne sont plus sollicités parce que les parties ont perdu toute confiance dans ces institutions qu’elles jugent incapables de fonctionner normalement dans le contexte actuel de répression par l’État.

Les syndicats signalent que l’industrie, celle de l’habillement par exemple, profite de cette absence de légalité pour diminuer les salaires et baisser les conditions de travail garanties par la loi ou les conventions collectives. Le nombre des licenciements abusifs a fortement augmenté et des directions licencient des travailleurs mensualisés pour les remplacer par des gens payés à la journée. Les attaques contre les travailleurs et les équipements de la santé sont chose courante dans tout le pays. De même, des agents de la fonction publique, du secteur public et des enseignants font quotidiennement l’objet de menaces s’ils participent à des protestations réclamant un retour à la démocratie.

En résumé, la liberté syndicale est impossible à exercer dans ce pays à moins de courir un risque élevé et réel d’être arrêté, voire pire. En plus de ces problèmes très préoccupants, nous notons aussi les nombreuses embuches législatives qui sont elles aussi l’objet de vives préoccupations s’agissant du respect de l’exercice du droit à la liberté syndicale. Les membres travailleurs portent ces questions à l’attention de la commission alors qu’aucune réforme législative n’est prévue avant le retour à la démocratie et qu’une législature élue dans les formes puisse déposer et adopter les textes de lois nécessaires. Il s’agit notamment de la loi sur les transactions électroniques adoptée le 15 février 2021, de la loi sur le droit de se réunir et de défiler pacifiquement adoptée en 2016, la loi sur les organisations de travailleurs et la loi sur le règlement des conflits du travail, et la loi sur les ZES qui pose des problèmes parce qu’elle est en contradiction avec l’application de la loi sur les organisations de travailleurs et la loi sur le règlement des conflits du travail dans les ZES.

Nous assistons aujourd’hui à une terrible tragédie au Myanmar. Nous avions tous beaucoup espéré, au terme de décennies de régime militaire et après la dissolution officielle de la junte en 2011, que les élections de 2016 ouvriraient la voie à un processus démocratique. Hélas, ces espoirs ont été anéantis et, en 2021, le coup d’État militaire a brutalement interrompu ce processus. Nous nous réjouissons donc de pouvoir discuter officiellement et en profondeur de ce cas au sein de la commission dans l’objectif d’un retour de la situation sur de bons rails.

Membre gouvernementale, France – J’ai l’honneur de m’exprimer au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres. La Macédoine du Nord et l’Albanie, pays candidats, l’Islande et la Norvège, pays de l’Association européenne de libre-échange, membres de l’Espace économique européen, ainsi que la Géorgie et la Türkiye s’alignent sur la présente déclaration.

Depuis le coup d’État militaire, la situation au Myanmar s’est continuellement et gravement détériorée. Cet acte a stoppé la transition démocratique du pays avec des conséquences désastreuses sur le plan humanitaire, social, sécuritaire, économique et des droits de l’homme et du travail. Nous sommes profondément préoccupés par l’escalade continue de la violence et l’évolution vers un conflit prolongé ayant des implications régionales. Plus de 1 723 personnes ont été tuées, dont plus de 100 enfants. Plus de 10 800 personnes sont actuellement en détention et 80 personnes ont été condamnées à mort.

L’Union européenne et ses États membres sont aux côtés du peuple du Myanmar et de tous ceux qui militent et œuvrent en faveur d’une démocratie ouverte à tous et du respect des droits de l’homme, notamment des droits du travail, des libertés civiles et des libertés fondamentales. Conformément à la Résolution pour un retour à la démocratie et au respect des droits fondamentaux au Myanmar, adoptée en juin dernier, nous pensons qu’il est essentiel que les mandants tripartites continuent de montrer leur engagement commun en faveur de la protection des droits de l’homme, y compris les droits du travail, au Myanmar.

L’Union européenne et ses États membres condamnent avec la plus grande fermeté les violations et abus persistants et généralisés des droits de l’homme et du travail perpétrés par l’armée et les forces de sécurité du Myanmar dans tout le pays, notamment la persécution illégale des organisations de la société civile et de leurs militants, les violences à l’encontre des manifestants pacifiques, les arrestations et détentions arbitraires, l’intimidation et le harcèlement, les licenciements injustifiés, les menaces et les actes de violence graves et de torture, y compris les meurtres, à l’encontre des syndicalistes et des défenseurs des droits de l’homme et les actes de violence sexuelle et sexistes.

Nous partageons pleinement les appels du comité pour que toutes les mesures soient prises afin de rétablir et d’assurer le plein respect des libertés civiles fondamentales nécessaires à l’exercice de la liberté d’association, y compris la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion, de mouvement, le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement et le droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial.

Nous continuons d’exhorter le Myanmar à respecter pleinement et sans délai les obligations qui lui incombent en vertu de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et à veiller à ce que les travailleurs et les employeurs, ainsi que leurs organisations, puissent exercer leurs droits sans être menacés d’intimidations ou de préjudices et dans un climat de sécurité totale.

Nos appels sont d’autant plus attristants que, même s’il restait de nombreux défis à relever en matière de travail décent avant le coup d’État et de graves préoccupations concernant la liberté d’association ou le travail forcé, nous avions noté quelques avancées. Cependant, depuis le coup d’État de 2021, ces progrès ont été détruits par les militaires et nous avons dû reprogrammer nos activités.

Afin de soutenir les travailleurs du secteur de l’habillement, nos projets de conduite responsable des affaires, en cours et prévus, continuent de viser à améliorer les conditions de travail, à promouvoir les normes de travail et environnementales et à réduire les violations des droits du travail dans l’industrie de l’habillement.

L’Union européenne et ses États membres réitèrent leurs appels à la cessation immédiate de toutes les hostilités, à la fin de l’usage disproportionné de la force par les forces armées et de sécurité du Myanmar, ainsi qu’à la fin de l’état d’urgence et à la restauration du gouvernement civil légitime.

Nous continuons à soutenir les efforts de l’ASEAN pour trouver une solution pacifique à la crise. Nous réitérons également notre soutien à la décision du 344e Conseil d’administration du BIT d’établir une commission d’enquête sur le non-respect de la convention no 87 en question, ainsi que la convention no 29.

Membre gouvernemental, Canada – Je m’exprime aujourd’hui au nom du Canada et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.

Il y a plus d’un an maintenant, le coup d’État militaire avait lieu au Myanmar. L’Organisation internationale du Travail et d’autres organes des droits humains des Nations Unies ont depuis présenté des rapports crédibles et cohérents sur les violations généralisées des droits humains dans le pays, faisant état notamment de violences à l’égard des travailleurs, des syndicalistes, des dirigeants syndicaux et de la population civile en général. La communauté internationale a clairement demandé aux autorités militaires du Myanmar de mettre fin à cette violence; le Canada et le Royaume-Uni déplorent l’absence de progrès à cet égard.

Le Canada et le Royaume-Uni prient à nouveau instamment les militaires de cesser immédiatement de violer les obligations internationales relatives aux droits humains et de mettre fin à toute violence à l’égard des civils, notamment de cibler spécifiquement les syndicalistes, les militants pour les droits humains, les manifestants pacifiques et les ressortissants étrangers. Nous prions également instamment le Myanmar de respecter ses obligations découlant de la convention, et de mettre immédiatement et intégralement en œuvre les recommandations de la commission d’experts.

Plus précisément, nous appelons le Myanmar à:

- conduire des enquêtes complètes et indépendantes sur les circonstances entourant les meurtres de Chan Myae Kyaw, Nay Lin Zaw et Zaw Htwe, et à rendre compte à l’OIT des conclusions de ces enquêtes;

- libérer tous les syndicalistes encore détenus pour avoir exercé pacifiquement leurs droits syndicaux protégés par la convention, notamment pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile;

- assurer le plein respect, tant en droit que dans la pratique, des libertés civiles fondamentales nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, y compris la liberté d’opinion et d’expression et la liberté de réunion;

- enfin, veiller à ce que les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives puissent exercer les droits que leur confère la convention dans un climat de liberté et de sécurité, exempt de menace d’intimidation, de violence, d’arrestation arbitraire ou d’emprisonnement.

Nous demandons également à la communauté internationale de protéger les civils au Myanmar en arrêtant la vente et le transfert d’armes, d’équipements militaires, de matériel, d’équipements à double usage et d’assistance technique aux forces armées et de sécurité du Myanmar, moyennant des accords entre États ou par d’autres moyens. Il est essentiel d’empêcher l’armée d’avoir accès aux armes et aux équipements utilisés actuellement pour commettre de telles violences.

Enfin, nous demandons à l’armée de coopérer avec la prochaine commission d’enquête de l’OIT, et de lui permettre de mener une enquête complète et indépendante dans le cadre de la plainte.

Membre travailleur, Pays-Bas – Je m’exprime au nom de la délégation des travailleurs suisses et allemands et de l’IBB (Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois).

Un an après le coup d’État militaire, le mouvement de désobéissance civile au Myanmar n’a cessé de se développer pour devenir un grand mouvement de résistance à la junte militaire. C’est la violence systématique qui empêche les syndicats et leurs dirigeants d’exercer leurs droits fondamentaux au travail. Je vais maintenant mentionner quelques exemples de la répression la plus grave.

L’armée invoque l’article 505A du Code pénal pour inculper de nombreux travailleurs pour avoir soutenu le mouvement de désobéissance civile, soit au moins 71 travailleurs de l’éducation et 864 travailleurs de la santé. À ce jour, au moins 301 dirigeants et membres syndicaux de divers secteurs ont été arrêtés par l’armée pour avoir pris part à ce mouvement. Certains ont été condamnés par des tribunaux militaires, dont un professeur de l’Université de Yangon, également président de l’Association des professeurs d’université.

400 000 fonctionnaires, enseignants, travailleurs de la santé soutenant le mouvement de désobéissance civile ont été contraints de reprendre le travail, et des dizaines de milliers d’entre eux ont été licenciés. Les cheminots et leurs familles ont été expulsés de force de leurs dortoirs, et leurs logements ont été détruits par l’armée. De même, l’armée a tué 55 syndicalistes lors des manifestations pacifiques du mouvement de désobéissance civile. Certains sont morts du COVID-19 alors qu’ils se cachaient pour échapper aux arrestations militaires.

Nous sommes profondément préoccupés par le bien-être de Thet Hnin Aung, Secrétaire général de la Fédération des syndicats de l’industrie et de l’artisanat du Myanmar et membre du Comité du mouvement de désobéissance civile de Mandalay. Il a été arrêté le 18 juin 2021 et torturé en prison. Nous demandons sa libération.

Le conseil de l’administration de l’État, dirigé par les militaires, a tué des syndicalistes, radié 16 organisations syndicales, invalidé les passeports de syndicalistes et déchu des dissidents de leur citoyenneté, dont le président de la CTUM, U Maung Maung. Les violations sont trop nombreuses pour être citées ici. Il n’y a pas assez de temps pour cela.

Nous condamnons fermement la junte militaire du conseil de l’administration de l’État pour avoir réprimé sévèrement l’exercice pacifique des droits des syndicats du Myanmar à restaurer la démocratie et les libertés, condition préalable à la justice sociale.

Nous exigeons la libération inconditionnelle de tous les syndicalistes, manifestants, civils et dirigeants politiques emprisonnés lors du coup d’État. Nous demandons le respect des droits des travailleurs et de leurs libertés civiles de s’associer librement et de faire grève, de même que le rétablissement des organisations syndicales et des droits de citoyenneté des syndicalistes.

Membre gouvernemental, Suisse – La Suisse reste gravement préoccupée par la situation actuelle au Myanmar. La Suisse continue à condamner avec fermeté la prise de pouvoir par les militaires et demande la reprise immédiate du dialogue et du processus démocratique œuvrant à une paix durable et au développement du pays.

Nous restons profondément préoccupés par les violations graves du droit international commises depuis le 1er février 2021, qui pourraient constituer des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. La cessation immédiate de toute violence et le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme sont essentiels pour une paix durable. Cela implique bien-entendu le droit fondamental à la liberté syndicale et la protection du droit syndical comme le stipule la convention. Employeurs et travailleurs doivent pouvoir exercer leur droit à la liberté d’association dans un climat de liberté et de sécurité.

La Suisse est extrêmement préoccupée par les actes d’intimidation, les menaces, les actes de violence graves, y compris des meurtres, contre des syndicalistes qui ont exercé leurs droits. Des enquêtes complètes et indépendantes seront nécessaires pour rétablir la justice.

La Suisse est également préoccupée par l’interprétation large et potentiellement arbitraire de textes de loi, tels que la loi sur les transactions électroniques, les articles 505(a) et 124(a) du Code pénal, ainsi que la loi de 2016 sur les droits de se réunir et défiler pacifiquement. En vertu de ces lois, un nombre important de syndicalistes ont été détenus alors qu’ils exerçaient leurs droits protégés par la convention.

Pour conclure, la Suisse soutient le peuple du Myanmar, ses travailleurs et employeurs, dans la quête de démocratie, de liberté, de paix et de prospérité. Nous sommes convaincus que la coopération internationale est primordiale pour cela. Le respect des normes internationales fondamentales du travail en est la base. Nous exhortons les autorités militaires à garantir ces droits, et à reprendre immédiatement le dialogue et le processus démocratique.

Membre travailleuse, France – Le pouvoir illégitime au Myanmar a procédé à la modification d’un certain nombre de lois dans le but d’étendre les pouvoirs des militaires et de restreindre encore davantage les droits fondamentaux et les libertés civiles de la population.

Les articles de la loi garantissant la protection de la vie privée et la sécurité des citoyens ont été supprimés, ce qui permet aux forces de sécurité d’arrêter et de détenir des travailleurs, des syndicalistes et des citoyens.

La loi sur l’administration des quartiers a rétabli l’enregistrement obligatoire des nuitées des non locaux, des invités et des visiteurs. La CTUM a signalé que les chasses nocturnes aux responsables syndicaux par des militaires et des policiers se sont intensifiées. Les militaires recherchent les dirigeants syndicaux dans les quartiers et les villages sur la base d’une liste de noms et des entreprises dans lesquelles ils travaillent.

L’accusation de trahison, en vertu de la section 505 du Code pénal, a été amendée et inclut désormais les tentatives d’incitation à la résistance et à la restauration d’un gouvernement civil. L’interdiction des rassemblements publics de cinq personnes ou plus et le couvre-feu entre 22 heures et 4 heures du matin pour une période illimitée ont été étendus en application de la section 144 du Code de procédure pénale.

Un projet de loi alibi sur la cybersécurité aboutira à l’interdiction d’utilisation des réseaux privés virtuels (VPN). L’interdiction de facto de l’utilisation sans restriction des VPN entravera davantage la liberté d’expression et la communication accessible des syndicalistes avec leurs membres et les organisations internationales, sans craindre d’être identifiés, surveillés et criminalisés.

Depuis début 2022, une nouvelle ordonnance oblige les citoyens du Myanmar à porter et à présenter leur carte nationale d’enregistrement lors de déplacements. Ce nouvel ordre restreint encore davantage la liberté de mouvement et les activités des syndicalistes dans le but précis de les traquer.

Le 31 janvier 2022, le Conseil national de défense et de sécurité de l’armée a prolongé l’état d’urgence de six mois supplémentaires. En prévision de manifestations à l’occasion de l’anniversaire du coup d’État le 1er février, le conseil de l’administration de l’État a menacé de sanctions pouvant aller jusqu’à la prison à vie les manifestations publiques, les grèves et l’expression de soutien. C’est une grève silencieuse qui a été organisée avec succès dans tout le pays. Revendiquer un environnement le plus propice à l’exercice de la liberté d’association et des libertés civiles est devenu un crime au Myanmar.

Au regard de telles outrances, la commission ne peut rester silencieuse et les condamne fermement.

Membre gouvernementale, États-Unis d’Amérique – Les États-Unis partagent la profonde préoccupation de la commission d’experts au sujet de la violence systémique à l’égard des travailleurs et de la suppression brutale des libertés civiles par les autorités militaires du Myanmar.

Depuis le coup d’État militaire, le régime militaire a tué plus de 1 800 personnes et détenu arbitrairement près de 14 000 personnes. Au moins 290 personnes sont décédées en détention et plus de 600 000 ont été déplacées à l’intérieur du pays; 36 100 autres ont quitté le pays. Des syndicalistes ont été délibérément ciblés. Au début de cette année, le régime a déchu de sa nationalité le président de la CTUM, U Maung Maung, ancien membre du Conseil d’administration du BIT qui prend depuis longtemps une part active à la lutte pour la démocratie et les droits des travailleurs au Myanmar.

Le régime continue à exploiter des dispositions vagues et larges du Code pénal pour porter des accusations de trahison contre les syndicalistes qui exercent leurs droits fondamentaux au travail. Les militaires ont également interdit 16 grandes organisations syndicales de premier plan, contraignant nombre de leurs dirigeants à se cacher. Les employeurs, eux aussi, font état d’un environnement qui n’est pas propice à des entreprises durables ni à l’exercice de la liberté syndicale.

Dans leur soumission écrite à la commission, les autorités militaires refusent de reconnaître les victimes nommées et l’existence d’organisations que le régime a privées d’enregistrement légal. Cela est inacceptable.

Les États-Unis apportent tout leur soutien à la décision que le Conseil d’administration a prise par consensus s’agissant de l’établissement d’une commission d’enquête chargée d’enquêter sur le non-respect des conventions nos 87 et 29 de l’OIT. Comme la commission d’experts, nous estimons que l’assassinat, la disparition ou les blessures graves de syndicalistes exigent que des enquêtes judiciaires indépendantes soient ouvertes pour garantir que les parties responsables répondront de leurs actes. La commission d’enquête devrait enquêter sur les violations actuelles des droits au travail visés par les deux conventions et fournir des recommandations visant à combler les lacunes du cadre juridique national en matière de liberté syndicale et d’application.

Nous avons hâte de voir un gouvernement démocratiquement élu au Myanmar reconstituer ses mécanismes tripartites en vue de garantir la pleine protection et promotion de la liberté syndicale en droit national, conformément aux recommandations de la commission d’experts.

Membre travailleur, Australie – Je m’exprime au nom du Conseil australien des syndicats (ACTU), du Congrès irlandais des syndicats (ICTU) et de la Confédération syndicale indonésienne pour la prospérité (KSBSI) (Indonésie). Comme le note la commission d’experts, «la liberté d’association ne peut être exercée que dans des conditions où les droits fondamentaux de l’homme sont pleinement respectés et garantis». Il est clair que, depuis le coup d’État militaire au Myanmar en février 2021, les droits fondamentaux et les libertés civiles sont attaqués.

À ce jour, la junte a tué 1 876 personnes. Elle a arrêté, inculpé ou condamné 10 847 personnes pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile, qui dure depuis plus d’un an, malgré la répression, et au moins 1 979 travailleurs, syndicalistes, militants et manifestants inculpés sont contraints de se cacher depuis le début du coup d’État. Les crimes contre l’humanité commis par les militaires comprennent des meurtres, des persécutions, des emprisonnements, des violences sexuelles, des disparitions forcées et des actes de torture. Ils sont systématiques et peuvent être qualifiés de crimes de guerre.

Depuis novembre 2021, l’armée a intensifié les frappes aériennes et les attaques au sol dans les régions où les manifestants du mouvement de désobéissance civile, les travailleurs et les militants syndicaux se sont réfugiés pour éviter d’être arrêtés. Les institutions de l’ONU ont confirmé que les forces armées déploient de l’artillerie lourde, des chars, des hélicoptères, des avions de combat et des drones de surveillance lors d’attaques au sol et de frappes aériennes pour tuer des civils aléatoirement, ainsi que pour bombarder et détruire des villages civils, des églises et des camps de réfugiés.

Les militaires ont occupé des hôpitaux publics, attaqué le personnel de santé, endommagé, dévalisé et confisqué des équipements médicaux, des médicaments et des bouteilles d’oxygène. De plus en plus de membres des services de santé passent dans la clandestinité car les militaires ont révoqué les permis d’exercer des médecins et des travailleurs de la santé qui ont rejoint le mouvement de désobéissance civile, et annulé les permis d’exploitation de cliniques et d’hôpitaux dans lesquels ils travaillent.

Les militaires se sont attaqués à la liberté d’expression et ont tenté de restreindre l’accès à l’information en coupant l’accès aux données mobiles la nuit et en ordonnant aux fournisseurs d’accès Internet de suspendre les services sans fil à haut débit, seul un raccordement fixe intermittent permettant d’accéder à Internet. La liberté de la presse est inexistante, l’armée ayant annulé le 8 mars 2021 cinq licences délivrées aux médias indépendants, et déclaré illégales les organisations documentant les atrocités commises par l’armée, comme l’Association d’aide aux prisonniers politiques de Birmanie, pour avoir prétendument incité à la panique publique, aux émeutes et porté atteinte à la stabilité de l’État. La junte a tué au moins trois journalistes et en a emprisonné 26 depuis le coup d’État.

Ce ne sont là que quelques exemples des violations des libertés civiles perpétrées par les autorités militaires, qui montrent le mépris total du conseil de l’administration de l’État pour les droits de l’homme et du travail. Les attaques contre les travailleurs et les civils et les violations des droits de l’homme doivent cesser immédiatement. La communauté internationale doit tenir le conseil de l’administration de l’État pour responsable des violations flagrantes des droits de l’homme, notamment du droit à la liberté d’association, adopter des sanctions et cesser les livraisons d’armes au Myanmar pour mettre fin aux atrocités, et reconnaître le gouvernement d’unité nationale comme le gouvernement officiel et légitime du Myanmar.

Membre travailleur, Japon – Je m’exprime au nom de la Confédération japonaise des syndicats et d’IndustriALL Global Union. Depuis le coup d’État des militaires au Myanmar, la répression des travailleurs est implacable. La junte militaire commet des violations flagrantes des droits de l’homme et des droits syndicaux, notamment des violences, des arrestations et des détentions arbitraires. Des centaines de milliers de travailleurs ont perdu leur emploi dans différents secteurs industriels. Dans le seul secteur de l’habillement, plus de 250 000 travailleurs ont perdu leur emploi. De nombreuses usines de confection ont fermé sans payer leurs travailleurs, et les employeurs ne tiennent pas compte des conventions collectives. Chaque fois que les travailleurs organisent des manifestations, les employeurs font venir des soldats pour les réprimer.

La liberté syndicale et le droit de s’organiser sont attaqués. Nous souhaitons donner des exemples propres au secteur de l’habillement dont nous avons connaissance: les congés de maternité sont refusés, et les femmes, de crainte de perdre leur emploi, renoncent à prendre le congé auquel elles ont droit légalement; un travailleur a perdu trois doigts sur son lieu de travail faute de mesures de sécurité et de santé au travail, il a été licencié et n’a reçu que 20 000 kyats en guise de compensation pour sa blessure; une usine a embauché des enfants en payant un salaire inférieur au salaire minimum, et les enfants travailleurs sont cachés lorsque des inspections sont effectuées dans l’usine. Dans une usine de vêtements, les objectifs de production sont fixés à un niveau élevé, et, s’ils ne sont pas atteints, les travailleurs sont frappés à la poitrine, à l’oreille et à la tête par les superviseurs et les directeurs. Les superviseurs crient des obscénités aux jeunes ouvrières dans les ateliers de production. Les travailleurs sont traités comme des esclaves pour atteindre les objectifs fixés. Les jeunes travailleuses s’entendent dire «vous êtes nées d’un être humain ou d’un chien?». Pour les travailleuses, le lieu de travail est un enfer.

Un lieu de travail où les gens peuvent travailler comme des êtres humains et protéger leurs moyens de subsistance est un lieu où règne la liberté syndicale et où les droits au travail sont protégés. Les militaires du Myanmar ont brutalement retiré ces droits aux travailleurs et aux syndicats. Les entreprises impliquées sont complices de la violation des droits prévus par la convention. Les entreprises devraient se désengager du Myanmar, où règne un environnement aussi hostile et où la liberté syndicale ne peut être respectée.

Membre gouvernemental, Australie – L’Australie condamne avec la plus grande fermeté l’actuelle mise en péril des droits de l’homme et des travailleurs au Myanmar. Le coup d’État militaire du 1er février 2021 a intensifié et aggravé la situation déjà préoccupante des droits de l’homme dans le pays.

Nous demandons aux militaires de cesser toute violence et de libérer toutes les personnes détenues arbitrairement, y compris le professeur australien Sean Turnell. Nous demandons également à l’armée d’octroyer un accès libre et immédiat à l’aide humanitaire pour toutes les personnes en détresse et d’engager un dialogue inclusif en vue d’un retour pacifique à la démocratie.

Les allégations et les questions contenues dans le rapport de la commission d’experts sont extrêmement graves et l’Australie déplore l’absence de tout progrès pour y répondre. En tant que membre de l’Organisation internationale du Travail, nous exhortons le Myanmar à respecter ses obligations en vertu de la convention protégeant la liberté syndicale et le droit d’organisation et à mettre immédiatement en application les recommandations de la commission d’experts.

Nous affirmons notre soutien au travail des envoyés spéciaux de l’ASEAN et de l’ONU et appelons à la mise en œuvre complète et rapide par le Myanmar du consensus en cinq points de l’ASEAN, notamment pour mettre fin à la violence, faciliter l’accès humanitaire et engager un dialogue constructif avec toutes les parties.

Nous demandons instamment au régime militaire de cesser d’entraver les activités de l’OIT et d’autres agences internationales et organisations de la société civile dans leurs efforts pour sauvegarder les droits des travailleurs au Myanmar et de coopérer pleinement avec la prochaine commission d’enquête de l’OIT.

Membre travailleur, Italie – Je m’exprime au nom de la Confédération syndicale des commissions ouvrières (CCOO). Malgré les pressions internationales et la condamnation générale de la brutalité de la dictature militaire au Myanmar, la junte continue à perpétrer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Le monde entier observe mais nous avons le sentiment de ne pas en faire assez et de ne pas agir suffisamment vite et suffisamment fort pour vaincre la junte et ramener le Myanmar sous l’égide d’un gouvernement fédéral civil et démocratique qui respecte les droits fondamentaux des travailleurs.

Les syndicats birmans – nous en avons déjà entendu beaucoup – sont parmi les fers de lance de l’opposition démocratique et constituent une cible majeure. Nous déplorons la décision de la junte de suspendre les passeports de leurs dirigeants et de les déchoir de leur citoyenneté. Cette décision viole le droit humain le plus élémentaire. C’est pourquoi nous exhortons aujourd’hui l’OIT à œuvrer à la libération immédiate du dirigeant de la MICS-TUF et de tous les autres syndicalistes encore détenus pour avoir exercé leurs droits syndicaux tels qu’ils sont inscrits dans la convention no 87, et pour avoir participé au mouvement de désobéissance civile. Tout comme le Comité de la liberté syndicale, nous demandons l’abrogation de l’article 505A du Code pénal et la modification de son article 124A.

Les sanctions économiques contre les conglomérats militaires décidées par l’Union européenne et les États-Unis avec d’autres gouvernements sont importantes, mais elles ne suffisent pas. Il n’y a plus de temps à perdre. Des sanctions fortes, multiples et cohésives touchant les intérêts politiques, financiers et économiques de la junte doivent être adoptées par les Nations unies et les gouvernements, y compris une suspension des codes SWIFT. Les syndicats italiens ont adressé une demande en ce sens à l’Union européenne ainsi qu’à l’ONU.

Le Myanmar est le théâtre de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité dans tout le pays, mais aussi de violations flagrantes des conventions de l’ONU et de l’OIT de la part d’entreprises et d’enseignes multinationales, parmi lesquelles 61 grandes marques de la mode européennes et italiennes. Le respect des normes des Nations unies et des conventions du travail sont les conditions du maintien des règles de l’ABE par l’Union européenne.

À titre de conclusion, les syndicats italiens et la CSI appuient vigoureusement les conclusions du porte-parole des travailleurs et réitèrent l’appel à une action déterminée et immédiate en vue de rétablir le respect des droits de l’homme et l’état de droit au Myanmar.

Observateur, Confédération syndicale internationale (CSI) – Je suis le membre du comité exécutif de la CSI représentant le Myanmar. Je veux parler des atrocités commises par le régime militaire depuis le coup d’État. Depuis le 1er février 2021, la CSI et ses affiliés accompagnent les visites en prison à plus d’une trentaine de membres de la CTUM et ont été confrontés à quatre funérailles de membres de la Fédération des travailleurs des mines du Myanmar, une affiliée de la CTUM. Parmi les personnes visitées en prison figurent le camarade Thet Hnin Aung, le secrétaire général de la MICS, un conseiller travailleur à la CIT de 2019.

Le 27 mars 2021, le camarade Chan Myae Kyaw, membre de la CTUM, a été le premier syndiqué tué par balles. Il était conducteur de camion dans une mine de cuivre. Le 7 décembre 2021, les camarades Tint Naing et Hein Thu, d’une autre mine de cuivre, et les camarades Zin Min Tun, Win Kaw et San Ko, d’un projet de mine de cuivre de Letpadaung, sont morts de leurs brûlures dans le village de Done Daw.

Le 20 avril 2022, la camarade Khaing Thinzar Aye, la camarade Ei Ei Phyu et le camarade Nyan Sein ont été arrêtés à Yangon. Le 23 mai, le camarade Moe Gyi, un responsable de la Fédération de l’agriculture et des fermiers du Myanmar, a été arrêté à Khamti, dans la région de Sagaing. Le 27 mai, les camarades Chit Thein Zaw et Kyaw Nyein, d’une autre mine de cuivre gérée en coentreprise par l’armée et les Chinois, ont été arrêtés au village de Done Daw. Ils ont été abattus sur la route en direction du poste de police.

Le 7 décembre, des militaires ont brûlé vives 11 personnes près du village de Done Daw. Cinq d’entre elles étaient membres du syndicat MWFM.

Le régime militaire a montré qu’il ne se soucie pas des droits des travailleurs, des droits de l’homme ou de la liberté syndicale. Les deux exécutions extrajudiciaires et l’arrestation du camarade Moe Gyi ont eu lieu après l’annonce de la constitution d’une commission d’enquête de l’OIT faite à la réunion du Conseil d’administration de mars 2022.

Les assassinats par balles ou par le feu de nos adhérents constitue la partie émergée de l’iceberg en comparaison avec ce qui se passe dans tout le pays. Le régime militaire attaque tous les types de travailleurs, dans tout le pays. Il est incontestable que toutes les sources de revenu du régime, qu’elles proviennent d’investisseurs, de marques de la mode ou d’industries extractives et toutes les redevances que versent les entreprises, favorisent les assassinats de travailleurs dans d’autres industries.

La CTUM est réconfortée par le fait qu’une commission d’enquête est désignée. Nous ferons de notre mieux pour collaborer avec cette commission.

Nous avons pris note des exécutions extrajudiciaires de nos camarades dans une mine de cuivre en coentreprise. Les sociétés de holding seront tenues responsables, au même titre que la junte, de la mort de membres du syndicat MWFM brûlés vifs. Elles seront poursuivies sur la scène internationale, même avant le rétablissement de la démocratie au Myanmar.

Observateur, Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) – Je m’exprime au nom de l’ITF et de la Confédération coréenne des syndicats. Comme l’a dit notre camarade Khaing-Zar, les violations graves de la convention commises par la junte militaire au cours des 16 derniers mois font qu’il est de plus en plus dangereux, voire impossible, pour les syndicalistes d’opérer en toute liberté.

Non seulement la commission d’experts en a fait un cas de double note de bas de page, mais le Myanmar est désormais, dans l’histoire de l’Organisation, le seul État soumis à deux commissions d’enquête. En outre, c’est le seul pays à avoir reçu des sanctions au titre de l’article 33. Avec des violations si odieuses de la convention et d’autres droits de l’homme internationalement reconnus, il est impératif que le monde des affaires monte au créneau.

À ce propos, nous tenons à rappeler la responsabilité des entreprises s’agissant du respect des droits de l’homme et du devoir de diligence en matière de droits de l’homme en vertu du pilier II des Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Le devoir de diligence en matière de droits de l’homme est désormais reflété dans les principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales et dans la Déclaration de l’OIT sur les entreprises multinationales, celle-ci affirmant que ce devoir de diligence doit tenir compte du rôle essentiel de la liberté syndicale. Le devoir de diligence en matière de droits de l’homme est également fermement ancré dans le droit de plusieurs juridictions.

Les Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme demandent aux entreprises de mieux exercer leur devoir de diligence pour repérer, prévenir et atténuer ces risques et les traiter en tant que question de respect de la légalité en raison des risques accrus de violations massives des droits associées aux opérations dans des zones de conflit, comme cela est le cas au Myanmar.

Les entreprises doivent donc recenser les principaux risques qui accompagnent tout vide juridique ou toute lacune dans la pratique de l’État d’accueil, par exemple l’abus de pouvoirs d’exception après un coup d’État militaire, s’agissant de la protection.

C’est pourquoi, au début de ce mois, l’Ethical Trading Initiative a conseillé aux entreprises non seulement de réévaluer de toute urgence leur présence au Myanmar, mais également de s’abstenir de procéder à des investissements supplémentaires et de continuer à collaborer sérieusement avec les syndicats au sujet de leur présence dans le pays.

L’Alliance des travailleurs du Myanmar, avec l’appui de syndicats mondiaux, demande aux entreprises de ne plus passer de commandes et de désinvestir. Cette demande s’inscrit dans le cadre de l’appel plus large lancé par le mouvement des travailleurs du Myanmar en faveur de sanctions économiques complètes.

Pour les sociétés qui s’approvisionnent ou qui opèrent au Myanmar, la véritable question est de savoir si même un devoir de diligence en matière de droits de l’homme renforcé suffit lorsque l’absence de protection des droits de l’homme est si extrême. D’ailleurs, plusieurs grandes marques se sont déjà retirées du pays.

Nous implorons donc les marques et les investisseurs à suivre l’appel du mouvement des travailleurs du Myanmar et à procéder, maintenant, à un départ responsable. L’heure est venue, pour tous les acteurs de la chaîne d’approvisionnement, de passer à la vitesse supérieure.

Membres employeurs – Nous avons écouté attentivement les interventions des orateurs d’aujourd’hui et nous remercions les représentants des gouvernements et des travailleurs d’avoir pris la parole.

Nous partageons le point de vue général sur la gravité de la situation qu’ont exprimé la plupart d’entre nous dans cette salle. Pour nous, il importe au plus haut point de rétablir immédiatement les libertés civiles fondamentales au Myanmar car, à défaut, la liberté syndicale et donc le respect de la convention no 87 n’existent tout simplement pas. Pour respecter ces libertés, le Myanmar doit adopter l’approche centrée sur l’humain de l’OIT et s’attacher aux intérêts, à l’emploi et aux moyens de subsistance de la population du Myanmar.

Dans ce contexte, les membres employeurs prient encore une fois le Myanmar d’œuvrer rapidement pour restaurer la démocratie et respecter ses obligations découlant de la convention. Ainsi, il est particulièrement important de prendre les mesures suivantes. Premièrement, prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir le plein respect des libertés fondamentales nécessaires à l’exercice des droits syndicaux, notamment le droit à la sécurité personnelle, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de manifestation et de réunion, la liberté de mouvement, le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement et le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial, de sorte que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités et leurs fonctions sans être menacées d’intimidation, de préjudice ou d’emprisonnement ou de toute autre restriction indue et inadmissible.

Nous faisons également observer l’importance, lorsque les conditions le permettent, de réviser la loi sur l’organisation du travail dans le cadre d’un processus global de réforme législative, en pleine consultation avec les partenaires sociaux nationaux, afin de garantir pleinement le respect des droits des travailleurs et des employeurs prévus par la convention.

Membres travailleurs – Nous remercions nous aussi tous les participants pour les interventions qui ont fait écho à l’unanimité dans cette salle. Depuis le coup d’État militaire de 2021, la Conférence internationale du Travail et le Conseil d’administration se sont exprimés clairement et globalement sur la situation au Myanmar, et ont notamment appelé à rétablir immédiatement la démocratie et le respect des droits fondamentaux. Malheureusement, nos appels sont restés lettre morte et la situation au Myanmar n’a cessé d’empirer. Le Conseil d’administration a pris des mesures décisives en mars 2022 et a décidé de créer une commission d’enquête, faisant du Myanmar le premier pays de l’histoire de l’OIT à faire l’objet de deux commissions d’enquête; il est toujours le seul pays à avoir fait l’objet de mesures prises au titre de l’article 33.

Nous avons entendu la représentante des travailleurs du Myanmar, elle-même en exil étant donné que le régime lui a retiré son passeport, décrire en détail les horreurs auxquelles les travailleurs sont confrontés dans le pays. Nous lui exprimons toute notre solidarité, ainsi qu’à tous les autres travailleurs et syndicalistes du pays qui, au cours des dix dernières années, ont mené une lutte acharnée pour faire renaître le mouvement syndical et bâtir une institution et une pratique démocratiques fortes. Nous compatissons à leur peine face aux pertes et saluons leur détermination à rétablir la démocratie dans le pays.

À la lumière des observations de la commission d’experts et de la discussion tenue au sein de cette commission, les membres travailleurs déplorent la situation actuelle dans le pays et prient instamment le régime de:

1) mettre immédiatement fin aux actes de violence à l’égard des travailleurs et des syndicalistes qui exercent leur droit à la liberté d’expression, de réunion pacifique et de liberté syndicale, de tenir pour responsables de ces actes les membres de la police et de l’armée, et de verser des réparations aux victimes et à leurs familles;

2) libérer immédiatement tous les travailleurs et syndicalistes qui ont été arrêtés et détenus pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression, de réunion pacifique et à la liberté syndicale, et d’annuler tous les mandats d’arrêt en cours pour ces mêmes personnes;

3) rendre immédiatement les passeports et rétablir la citoyenneté des syndicalistes qui ont perdu celle-ci;

4) rétablir immédiatement les syndicats dont l’enregistrement a été annulé, et permettre aux syndicats de mener leurs activités sans ingérence et sans crainte de représailles;

5) cesser immédiatement tous les actes limitant le plein exercice du droit à la liberté syndicale.

Compte tenu de la gravité des violations constatées dans le présent cas, nous demandons que les conclusions relatives à ce cas fassent l’objet d’un paragraphe spécial dans le rapport de la commission.

Conclusions de la commission

La commission a déploré la destitution du gouvernement civil par le coup d’État militaire du 1er février 2021 au Myanmar et la proclamation de l’état d’urgence qui l’a suivi, privant les citoyens de leurs libertés publiques.

La commission a déploré le mépris total pour les droits de l’homme, les libertés publiques et l’état de droit au Myanmar.

La commission a exprimé sa vive préoccupation devant l’absence de progrès s’agissant du rétablissement du pouvoir civil et la carence des autorités militaires à mettre en application:

- la Résolution pour le rétablissement de la démocratie et le respect des droits fondamentaux au Myanmar adoptée par la Conférence internationale du travail à sa 109e session (2021); et

- la décision instituant une commission d’enquête adoptée par le Conseil d’administration à sa 344e session (mars 2022).

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission exhorte les autorités militaires à:

- appliquer intégralement la Résolution de la Conférence internationale du Travail et la décision du Conseil d’administration adoptées en 2021 et 2022 respectivement;

- s’abstenir de procéder à des arrestations, des détentions ou de se livrer à des actes de violence, d’intimidation ou de harcèlement à l’encontre de travailleurs et de syndicalistes qui exercent leurs droits à la liberté d’expression, la liberté syndicale et la liberté de se réunir pacifiquement, et de diligenter immédiatement et de manière efficace des enquêtes indépendantes sur ces crimes afin d’établir les faits, de déterminer les culpabilités et de sanctionner leurs auteurs, qu’il s’agisse de membres de la police ou des forces armées, et d’accorder des réparations aux victimes et à leurs familles;

- libérer sans conditions tous les travailleurs et syndicalistes qui ont été arrêtés et sont détenus pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression, à la liberté syndicale et de se réunir pacifiquement, et d’annuler tous les mandats d’arrêt délivrés contre ceux-ci;

- restituer immédiatement leurs passeports et rendre leur citoyenneté aux syndicalistes qui en ont été déchus;

- rétablir immédiatement l’enregistrement des organisations syndicales dont l’enregistrement est supprimé depuis le coup d’État militaire;

- faire en sorte que les travailleurs puissent exercer leurs activités syndicales sans ingérence et sans la menace de violence ou d’autres violations de leurs libertés publiques;

- abroger tous les décrets et textes de loi promulgués par les autorités militaires à la suite du coup d’État du 1er février 2021; et

- veiller à ce que la commission d’enquête de l’OIT instituée par le Conseil d’administration en mars 2022 soit autorisée à entrer dans le pays et à exercer son mandat librement et sans ingérence.

La commission décide d’inclure ses conclusions dans un paragraphe spécial du rapport.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2018, Publication : 107ème session CIT (2018)

 2018-MMR-C087-Fr

Un représentant gouvernemental a indiqué que le gouvernement a fixé les priorités suivantes pour le pays et la population: l’état de droit, l’amélioration de la vie socio-économique de la population, la réconciliation et la paix à l’échelle nationale, et la modification de la Constitution en vue de l’édification d’une république fédérale démocratique. Sans aucun doute, la tâche n’est pas facile si l’on considère les défis internes et externes. Pour les relever, le gouvernement a choisi une démarche qui tient compte des besoins et de la situation du pays, tout en respectant les vues et les opinions de la communauté internationale et en gardant à l’esprit la responsabilité internationale du Myanmar. L’amélioration de la vie socio-économique de la population, notamment des travailleurs, a toujours été l’une des priorités de l’ordre du jour. La réforme de la législation du travail est bien engagée, et une culture de dialogue tripartite a été introduite et développée avec succès. Les progrès réalisés sont entre autres le perfectionnement des compétences, la création de l ’Autorité nationale chargée des normes de compétences, l’ouverture de centres de ressources pour les migrants et, pour la première fois dans l’histoire, la fixation de salaires minima. En étroite coopération avec l’OIT, il y a eu des avancées considérables dans l’élimination de la pratique du travail forcé. Un nouveau chapitre s’ouvre pour les travailleurs en ce qui concerne leur droit syndical et d’organisation. Depuis l’adoption de la loi de 2011 sur les organisations syndicales, de nombreuses organisations de travailleurs et d’employeurs ainsi que trois fédérations et une confédération sont en place et fonctionnent. En réponse à la demande d’informations de la commission d’experts concernant le chapitre sur les règles et le chapitre correspondant sur les infractions et les sanctions, l’orateur a indiqué que la loi de 2016 sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques élargit l’espace démocratique pour tous les citoyens du Myanmar, dont les travailleurs, dans l’exercice de la liberté syndicale. Elle leur permet aussi de se réunir et de manifester sans autorisation préalable en donnant à l’autorité compétente un préavis de 48 heures. Les peines prévues en cas d’infraction ont également été considérablement réduites, par exemple en cas de manifestation sans préavis. Des directives et règles et règlements sont en cours d’élaboration pour mettre en œuvre la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques, dans sa lettre et son esprit. Son article 26 dispose que les règles, notifications, ordonnances, directives et procédures prévues dans la version précédente de la loi peuvent continuer à s’appliquer dans la mesure où elles ne sont pas contraires à la version de 2016. La loi sur les organisations syndicales et la loi sur le règlement des conflits du travail de 2012 sont en cours de réexamen et leur modification est envisagée, en étroite consultation et coopération avec toutes les parties prenantes (entre autres, travailleurs, employeurs, députés et spécialistes du BIT). De fait, l’OIT a participé à l’élaboration du projet de texte dès le début du processus, et le gouvernement continuera d’informer la commission des progrès réalisés dans la réforme de la législation du travail. En ce qui concerne la loi sur les organisations syndicales, le gouvernement recherche constamment des résultats lors des discussions entre les partenaires sociaux, ainsi que les commentaires, vues et suggestions des fédérations syndicales, des organisations d’employeurs, de l’Union des fédérations des chambres du commerce et de l’industrie du Myanmar, ainsi que de l’OIT, et les a pris en compte dans le processus de réexamen. La question du pourcentage minimum requis (10 pour cent des travailleurs de la branche ou du secteur) pour pouvoir constituer une simple organisation de base et l’impact qu’a la structure pyramidale font partie des questions que le gouvernement examine dans le cadre du processus de révision. Les conditions d’éligibilité à des responsabilités syndicales énoncées dans la réglementation d’application de la loi sur les organisations syndicales visent à préserver la maîtrise de l’action à l’échelle locale et à assurer une représentation adéquate et réelle des travailleurs dans l’organisme qui sera chargé de promouvoir et de protéger les intérêts des travailleurs. Les différends dans les zones économiques spéciales (ZES) sont réglés par les comités de gestion respectifs, conformément à la section 16 «Questions relatives au travail» de la loi de 2014 sur les zones économiques spéciales (loi sur les ZES). Un fonctionnaire du ministère du Travail, de l’Immigration et de la Population (MOLIP) a été détaché dans ces comités et a fourni des conseils et des orientations dans le processus de règlement des conflits. Si un conflit n’aboutit pas à un règlement au sein du comité de gestion, le conflit est réglé conformément à la loi sur le règlement des conflits du travail (Settlement of Labour Disputes Law), même si la loi sur les ZES se réfère actuellement à la loi sur les conflits professionnels (Trade Disputes Act) qui a été abrogée. Le droit de liberté syndicale au Myanmar continue d’être renforcé. L’orateur est convaincu que, avec la volonté politique du gouvernement, une coopération tripartite étroite, l’assistance technique du BIT et le soutien des partenaires internationaux, les travailleurs et les employeurs seront de plus en plus en mesure de jouir de leurs droits fondamentaux et que ce progrès finira par aboutir au travail décent et au développement durable.

Les membres travailleurs ont rappelé les circonstances dans lesquelles le cas du Myanmar a été discuté pour la dernière fois à la commission, en 2011, et estimé que beaucoup de choses ont changé depuis: la loi sur les organisations syndicales et sa réglementation d’application ont été adoptées; les syndicats indépendants ont été autorisés et peuvent mener leurs activités pour la première fois depuis des décennies; la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) est revenue de l’exil, a commencé à organiser des milliers de travailleurs et a obtenu son enregistrement en tant que Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM); et des syndicalistes qui étaient incarcérés ont été libérés et ont repris leurs activités syndicales. Cependant, en dépit de ces mesures importantes, la situation des syndicalistes se détériore, et de nombreux problèmes graves subsistent. Les syndicats ont accueilli favorablement la décision du gouvernement de modifier la loi sur les organisations syndicales et la loi sur le règlement des conflits du travail, mais un projet de loi sur les organisations syndicales préparé par le MOLIP ne répond pas à la plupart des préoccupations exprimées par la commission d’experts et la Confédération syndicale internationale (CSI) et est pire à bien des égards que les lois existantes. En outre, des demandes d’enregistrement syndical dûment remplies ont été refusées pour des raisons arbitraires ou sur la base de directives gouvernementales qui n’avaient pas été rendues publiques. Dans certains cas, la police a enfreint les libertés civiles de travailleurs (harcèlement physique, détentions, etc.) en réponse à l’exercice des droits syndicaux, dont des grèves. Les travailleurs qui tentent de s’organiser sont systématiquement licenciés, en toute impunité, à cause d’un système de règlement des différends qui est déficient, et les listes noires sont monnaie courante dans les zones industrielles. En ce qui concerne la législation, l’orateur a déclaré que, le gouvernement n’ayant pas tenu compte de la plupart des conseils techniques du BIT, la loi sur les organisations syndicales restreint les droits fondamentaux des organisations de travailleurs et d’employeurs, comme l’a confirmé à plusieurs reprises la commission d’experts. Les préoccupations suivantes ont été exprimées: le nombre minimal requis de 30 travailleurs pour constituer une organisation syndicale de base, avec le soutien supplémentaire de 10 pour cent des effectifs sur le lieu de travail, est trop élevé, en particulier sur les grands lieux de travail; l’exigence que les organisations syndicales à tous les niveaux soient constituées uniquement de travailleurs de la branche ou du secteur concernés a limité la capacité des syndicats de déterminer leur propre composition, et une interprétation étroite des termes «branche» et «secteur» a conduit à la formation de syndicats étroitement définis; la structure syndicale, qui est strictement organisée et reflète les structures administratives du gouvernement, ce qui empêche les travailleurs de former des syndicats répondant à leurs besoins; de lourdes exigences pour la formation d’organisations de niveau supérieur; des conditions restrictives pour devenir membre de la direction d’un syndicat (être citoyen du Myanmar ou, pour les étrangers, résider légalement dans le pays depuis au moins cinq ans, être âgé d’au moins 21 ans, et travailler dans la branche ou le secteur concerné depuis au moins six mois); l’interdiction de faire grève si les travailleurs ne sont pas passés d’abord par les mécanismes de règlement des conflits, ce qui limite les motifs légaux de grève aux conflits du travail et interdit les grèves de solidarité et les grèves menées en raison de la politique économique et sociale; et une liste inscrite dans la loi des lieux de travail autour desquels un périmètre de 500 yards doit être respecté autour de certains types de lieux de travail, ce qui peut rendre inefficace la grève si elle ne peut être menée que loin du lieu où se trouve l’employeur. Alors que le gouvernement a entamé un processus de réforme de la loi sur les organisations syndicales et de la loi sur le règlement des conflits du travail, les nombreuses réunions tripartites qui se sont tenues depuis un an et demi sont superficielles et n’ont pas permis de progrès significatifs. Il ressort clairement des déclarations du gouvernement et de ses projets de propositions qu’il n’a pas l’intention de répondre aux préoccupations des travailleurs ou de se conformer à la convention. Bien qu’une version ultérieure de la loi sur les organisations syndicales ait retiré la disposition fixant un nombre minimum de membres pour former un syndicat, elle ne répond pas à beaucoup d’autres préoccupations et crée plusieurs nouveaux problèmes. En particulier, ce projet: exclut les travailleurs de l’économie informelle, ce qui conduira à la dissolution de la majorité des syndicats dans le pays (les syndicats de travailleurs agricoles indépendants); dispose qu’il ne peut pas y avoir plus de trois syndicats de base dans une branche; maintient la structure syndicale rigide et établit des nombres minimums de travailleurs trop élevés pour former des syndicats de niveau supérieur; prévoit au lieu de leur enregistrement la «reconnaissance» des syndicats, laquelle ne durera que deux ans et devra être renouvelée; crée de nouveaux motifs illicites qui permettent au greffier en chef d’annuler l’enregistrement de syndicats; et inclut une disposition nouvelle et large sur les interférences ou les entraves exercées sur les travailleurs lorsqu’ils se rendent sur le lieu de travail, disposition qui peut être facilement utilisée pour empêcher des grèves. Le gouvernement doit donc s’engager dans un processus significatif de consultations avec les travailleurs et les employeurs et demander à l’OIT de fournir des commentaires détaillés sur les projets susmentionnés afin que l’OIT l’aide à élaborer des amendements permettant de rendre la législation conforme à la convention.

En ce qui concerne l’enregistrement, il a été déclaré que, en dépit de règles claires concernant les conditions d’enregistrement, des fonctionnaires de bureaux d’enregistrement ont refusé des formulaires de demande dûment remplis pour des raisons arbitraires, en se référant dans certains cas à des «directives» du ministère qui n’étaient pas publiées. Selon des syndicalistes, ces directives exigent, par exemple, ce qui suit: tous les membres du comité exécutif d’un syndicat doivent soumettre leur curriculum vitæ; tous les membres du syndicat doivent fournir une photocopie de leur carte d’identité (or de nombreux travailleurs n’ont pas pu obtenir de carte d’identité, laquelle est délivrée par le gouvernement); et le syndicat doit obtenir de l’employeur une lettre indiquant que le syndicat a informé la direction de l’entreprise de son intention de se faire enregistrer, ce qui donne la possibilité à l’employeur de s’opposer à l’enregistrement du syndicat en refusant de remettre la lettre en question. Plus récemment, des syndicats ont signalé l’obligation supposée d’obtenir la signature et la photocopie de la carte d’identité d’au moins 10 pour cent des travailleurs non syndiqués pour qu’ils puissent démontrer leur soutien à la formation d’un syndicat, ce qui dénature l’article 4 de la loi sur les organisations syndicales (elle-même contraire à la convention) et donne une possibilité de veto aux travailleurs non syndiqués. De telles exigences nouvelles et secrètes vont manifestement à l’encontre de ce que devrait être une procédure administrative simple. Le gouvernement doit interdire aux greffiers d’exiger ce qui n’est pas dans le cadre de la loi sur les organisations syndicales et sa réglementation et, si les directives mentionnées plus haut existent réellement, elles doivent être retirées immédiatement. S’agissant de la question des grèves, les membres travailleurs ont noté que, en plus des lacunes évidentes du cadre législatif qui régit les grèves, les travailleurs ne peuvent pas exercer librement leur droit de grève et font souvent l’objet de licenciements, de harcèlement et de poursuites judiciaires au motif qu’ils soulèvent des problèmes sur le lieu de travail. Par exemple, une grève a été organisée en janvier 2018 par des syndicalistes dans une usine de chaussettes de la zone industrielle 3, après le refus de l’employeur de conclure une convention collective qui répondait aux demandes du syndicat. Alors que l’instance d’arbitrage à laquelle le conflit avait été soumis avait ordonné à l’employeur de signer la convention et de négocier sur les questions restantes, l’employeur a licencié les 48 travailleurs impliqués dans la grève, poursuivi en justice 13 des meneurs de la grève puis licencié 25 autres travailleurs. Dans d’autres cas, des travailleurs ont été arrêtés ou menacés de poursuites judiciaires pour leur rôle dans des grèves, et d’autres ont signalé des menaces de la part de la police, d’agents de sécurité ou de voyous à la solde de l’employeur, faits qui se sont parfois soldés par des blessés graves. Dans la plupart des cas, les forces de l’ordre n’ont rien fait face à ces agressions, les plaintes portées devant la police, souvent, ne sont pas reçues et cette méthode est devenue la manière normale de traiter les syndicats. Concernant les cas d’annulation de l’enregistrement d’un syndicat, les membres travailleurs ont appris que les fonctionnaires de certaines régions chargés des questions du travail ont ordonné à des dirigeants syndicaux de se présenter à leurs bureaux tous les dimanches, sous peine de radiation du syndicat. Une telle exigence constitue une ingérence grave dans l’activité syndicale et porte atteinte à la capacité des travailleurs de mener des activités syndicales. L’annulation de l’enregistrement de syndicats, dans ces circonstances, constituerait une violation extrêmement grave de la liberté syndicale.

Les membres employeurs ont rappelé que cette convention fondamentale a été ratifiée par le Myanmar en 1955 et que son application a déjà fait l’objet de 18 discussions devant la Commission de la Conférence et de 26 observations de la commission d’experts. Le Myanmar s’emploie actuellement à rétablir un système gouvernemental démocratique, après de nombreuses années de régime militaire. Dans le cadre de ce processus, une législation a été adoptée sur une série de questions liées à l’application de la convention, entre autres la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques. Ces progrès étant relativement nouveaux, il est encore difficile d’évaluer leur efficacité et leur conformité avec la convention, comme l’indique aussi le rapport de la commission d’experts. Néanmoins, les membres employeurs ont indiqué que la commission d’experts a soulevé les questions susceptibles de constituer des violations: i) la possibilité que le chapitre sur les règles et le chapitre correspondant sur les infractions et les sanctions de la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques puisse encore donner lieu à de graves restrictions au droit des organisations de mener leurs activités sans ingérence, comme prévu à l’article 3 de la convention; ii) le manque d’information sur le processus de réforme de la législation du travail visant à prendre en considération les exigences potentiellement complexes et non conformes à la convention pour établir des syndicats, les critères d’éligibilité restrictifs pour les dirigeants syndicaux, et la condition de résidence dans le pays imposée aux travailleurs étrangers pour pouvoir s’affilier à un syndicat; et iii) l’exclusion de la convention des travailleurs dans les ZES. A cet égard, les membres employeurs ont fait observer que le gouvernement a assuré à la commission d’experts que la nouvelle loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques est pleinement conforme à la convention, puisqu’elle impose un préavis de 24 heures seulement et porte abrogation des dispositions prévoyant des sanctions. Cependant, ils ont indiqué que la commission d’experts est toujours préoccupée par le fait que la loi pourrait encore permettre de graves restrictions au droit des organisations de conduire leurs activités sans ingérence. En ce qui concerne le processus de réforme de la législation du travail, un projet de loi visant à modifier la loi sur le règlement des conflits du travail a été examiné par les partenaires tripartites au sein du groupe de travail technique sur la réforme de la législation du travail, qui s’est réuni en juillet 2017. Tout en notant l’indication du gouvernement selon laquelle il examine actuellement les sanctions dans le cadre du projet de loi et d’amendements, les membres employeurs ont également pris note des préoccupations des partenaires sociaux concernant le manque d’information de la part du gouvernement sur ce processus et de la résistance opposée à ces amendements, ce qui peut faire craindre que les résultats n’aggravent la situation actuelle, en particulier face à la réticence du gouvernement à accorder aux travailleurs de l’économie informelle le droit d’organisation, alors que des milliers de travailleurs ont déjà constitué des syndicats, en application de la loi sur les organisations syndicales.

En outre, la commission d’experts s’est dite préoccupée par le nombre minimum de 30 membres et l’obligation d’affilier 10 pour cent des travailleurs de la branche ou du secteur considérés pour pouvoir constituer une simple organisation de base, ainsi que par l’obligation d’avoir travaillé dans la branche ou le secteur d’activité considérés depuis au moins six mois et l’obligation faite aux travailleurs étrangers de résider dans le pays depuis au moins cinq ans pour pouvoir s’affilier à un syndicat. Sous réserve de l’adéquation de certains critères concernant les seuils imposés, par exemple le nombre minimum de membres pour pouvoir établir une organisation intégrée, les membres employeurs ont approuvé la dernière demande formulée par la commission d’experts à cet égard, dans la mesure où un double critère ou des critères trop restrictifs pourraient avoir pour effet d’entraver la liberté de constituer des organisations et de s’y affiler, et d’élire leurs représentants, comme prévu à l’article 3 de la convention. Soulignant en outre que la convention s’applique de la même manière aux organisations de travailleurs et aux organisations d’employeurs, ils ont proposé que les syndicats ne soient pas traités différemment des organisations d’employeurs en ce qui concerne la liberté de constituer des organisations. Les membres employeurs ont en outre rappelé la déclaration faite par le gouvernement en 2015, qui reconnaissait que le droit de grève doit relever de la réglementation nationale. S’agissant des ZES, les préoccupations exprimées concernent les procédures de règlement des conflits qui sont plus complexes pour les travailleurs des ZES que pour les autres travailleurs et les pouvoirs de l’inspection du travail qui ont été délégués aux organismes gestionnaires des ZES. Dans sa réponse, le gouvernement a indiqué que l’inspection du travail peut agir en coordination et coopérer avec les comités de gestion des ZES afin d’exercer ses compétences et que la législation du travail est appliquée dans les ZES. Les membres employeurs ont repris à leur compte la demande formulée par la commission d’experts qui prie le gouvernement de prendre des mesures pour veiller à ce que les travailleurs des ZES soient traités de la même manière que les autres travailleurs, et de fournir des informations sur la manière dont les conflits sont réglés actuellement, ainsi que les résultats des activités de l’inspection du travail dans les ZES. Les membres employeurs ont estimé que la situation actuelle au Myanmar peut être décrite comme une source d’inquiétude quant au fait que les choses pourraient mal tourner plutôt que comme la certitude que les choses ont mal tourné. Dans bien des aspects, le Myanmar prend un nouveau départ, ce qui rend d’autant plus ample la tâche d’établir une législation du travail conforme aux normes internationales. Il est temps de se pencher sur la conception de l’avenir en matière de relations de travail et d’y réfléchir, en adoptant une approche pleinement consultative qui implique la participation de tous les partenaires sociaux, avec les conseils d’experts indépendants de l’OIT, si nécessaire. Ils ont indiqué qu’en février 2018 l’OIT a organisé des sessions d’information pour le Parlement et les mandants tripartites sur l’application des normes internationales du travail au Myanmar, afin d’obtenir un appui à l’élaboration d’une approche stratégique de la promotion des normes internationales du travail, en vue du futur programme par pays de promotion du travail décent du Myanmar. Les propositions qui ont été élaborées à cette occasion sont en cours d’examen. Pour conclure, les membres employeurs sont d’avis qu’à ce stade il n’est pas trop tard. C’est le bon moment pour le gouvernement de tenir compte des préoccupations exprimées par la commission d’experts et la Commission de la Conférence et de collaborer avec les partenaires sociaux pour mettre en place un socle solide en matière de relations de travail. Les membres employeurs ont donc prié instamment le gouvernement: i) de continuer à solliciter l’expertise et l’assistance technique du BIT en vue d’achever l’élaboration et la mise en place d’une législation du travail, conformément aux normes et garanties explicitement énoncées dans la convention; ii) de consulter les partenaires sociaux en vue de veiller à ce que les travailleurs puissent élire librement leurs dirigeants comme prévu à l’article 3 de la convention; iii) d’appliquer la convention de la même manière aux organisations de travailleurs et aux organisations d’employeurs; et iv) de communiquer des informations sur les mesures prises pour garantir que les travailleurs dans les ZES sont traités de la même manière que les autres travailleurs, et sur la situation actuelle concernant le règlement des conflits et les résultats des activités de l’inspection du travail dans les ZES.

La membre travailleuse du Myanmar a exprimé l’espoir qu’avec les changements importants survenus récemment, y compris l’adoption de la loi sur les organisations syndicales, le Myanmar entrera dans une nouvelle ère où les travailleurs jouiront pleinement et en toute liberté de leurs droits syndicaux et seront inclus dans le développement social et économique du pays. Les travailleurs continuent de lutter pour le développement d’un mouvement de travailleurs indépendant et fort, et la syndicalisation dans le pays reste sévèrement entravée par des lacunes législatives majeures et par l’absence d’un environnement favorable. La loi sur les organisations syndicales contient de nombreuses dispositions qui entravent la formation et l’enregistrement des syndicats en imposant des exigences et des seuils excessifs. Elle porte également atteinte au droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs dirigeants et de formuler leurs programmes et activités. Dans la pratique, le taux de syndicalisation reste extrêmement faible et les travailleurs sont privés de leur droit fondamental de s’organiser et de défendre leurs intérêts. En l’absence de protection contre la discrimination antisyndicale, de nombreux travailleurs qui avaient formé des syndicats ou s’y étaient affiliés ont par la suite été licenciés ou soumis par leurs employeurs à d’autres formes de représailles. De plus, il est interdit aux travailleurs et aux syndicats d’entreprendre des actions collectives. La loi sur les organisations syndicales exige que la majorité des travailleurs votent en faveur d’une grève pour qu’elle soit menée, seuil qui en limite excessivement l’exercice. En outre, l’autorisation de la fédération concernée pour faire grève est nécessaire, ce qui constitue une atteinte grave au droit des syndicats d’organiser librement leurs activités. Même si une grève est déclenchée, son impact est fortement restreint par la disposition qui interdit de manifester à moins de 500 yards des hôpitaux, écoles, édifices religieux, aéroports, chemins de fer, gares routières, ports ou missions diplomatiques ou militaires et installations de police.

La série 2018 d’amendements à la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques, adoptée par la Chambre haute, a été dénoncée par des organisations syndicales et des droits de l’homme. Parmi ses nombreuses dispositions litigieuses, une nouvelle section dispose que quiconque soutient une manifestation financièrement, matériellement ou par d’autres moyens est considéré comme l’auteur d’une atteinte à la sécurité nationale, à la primauté du droit, à l’ordre public ou à la morale publique et est passible de trois ans d’emprisonnement et d’une amende. Une formulation aussi vague peut être utilisée par les autorités pour freiner l’action syndicale et supprimer les syndicats. La loi précédente avait déjà été utilisée pour arrêter et incarcérer des étudiants, des agriculteurs, des journalistes et d’autres activistes. La commission d’experts a souligné à plusieurs reprises la nécessité de rendre la législation nationale pleinement conforme aux principes et aux droits consacrés dans la convention, mais le gouvernement n’a pas pris en compte les préoccupations exprimées. En fait, les amendements proposés par le gouvernement à la loi sur les organisations syndicales et à la loi sur le règlement des conflits du travail restreindront davantage la liberté syndicale et les droits syndicaux. Le dernier projet de proposition maintient un contrôle strict sur la formation des syndicats, qui seront seulement «reconnus» et pas enregistrés, et accroît également la faculté du greffier en chef d’annuler l’enregistrement de syndicats. Le Myanmar a connu une transformation politique majeure, et le pays s’est ouvert à des investissements propices au développement économique. Il est crucial de faire en sorte que les travailleurs participent dès le début au processus de structuration du changement économique dans le pays, et un mouvement de travailleurs solide dirigé par des syndicats indépendants et forts est donc nécessaire. De tels changements ne peuvent être réalisés que dans des conditions favorables à l’exercice du droit de liberté syndicale. Le cadre législatif actuel restreint fortement les droits syndicaux et il semble que les projets d’amendements proposés par le gouvernement n’amélioreront pas la situation. Pour mettre en œuvre la décision du Conseil d’administration du BIT qui a prié instamment le gouvernement de s’engager dans le processus de réforme de la législation du travail en vue de promouvoir la liberté syndicale par le dialogue tripartite, il est important que l’OIT renouvelle le projet et apporte son soutien à tous les partenaires tripartites. En conclusion, l’oratrice a demandé instamment au gouvernement d’entamer un processus véritable et constructif de consultations avec les travailleurs et les employeurs et de modifier la législation actuelle du travail de manière à garantir à tous les travailleurs le droit de liberté syndicale et le droit de s’organiser librement.

La membre employeuse du Myanmar a souligné la croissance significative du secteur privé au cours des cinq dernières années. Le secteur privé du Myanmar contribue largement au produit intérieur brut (PIB) du pays. Ces dernières années, le pays connaît une croissance régulière du PIB (5,9 pour cent en 2016; 6,4 pour cent en 2017; et 6,8 pour cent en 2018). Elle constitue une preuve de création d’emplois, de productivité et de coopération harmonieuse entre employeurs et travailleurs. Pendant ces dernières années, le secteur privé a créé des centaines de milliers d’emplois. Dans le seul secteur manufacturier à forte intensité de main-d’œuvre, le nombre d’emplois créés a doublé entre 2013 (environ 200 000) et aujourd’hui (plus de 400 000). En outre, selon l’Enquête annuelle de 2017 sur la population active, la participation du travail des enfants dans la main-d’œuvre a considérablement diminué, grâce aux partenaires tripartites. Récemment, le gouvernement a élaboré le Plan de développement durable du Myanmar, conformément à la politique économique nationale et aux Objectifs de développement durable (ODD), qui vise à assurer une croissance inclusive et soutenue du pays et de sa population. Dans ce contexte, il a été signalé que le secteur privé contribue beaucoup au développement du pays. L’oratrice a estimé que la loi sur les organisations syndicales, qui prévoit la formation d’organisations syndicales ainsi que leurs droits et responsabilités, est conforme à la convention. De son point de vue, le pays est l’entité qui connaît le mieux les besoins de la société en fonction de la culture et des coutumes du pays, et la Commission de la Conférence ne devrait pas faire de la microgestion de la législation nationale. Après tout, l’article 8 de la convention dispose clairement que, dans l’exercice des droits qui leur sont reconnus par la convention, les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives sont tenus, à l’instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la loi du pays. L’oratrice a indiqué que les employeurs, les travailleurs et le gouvernement se sont réunis pour la dixième fois depuis 2015 lors du Forum national de dialogue tripartite et dialoguent ouvertement sur les réformes nécessaires de la législation, en se fondant sur la réalité et la pratique. La proposition de révision par le gouvernement de la loi sur les organisations syndicales comporte un nouveau chapitre sur la constitution d’organisations d’employeurs, ce qui représente un pas en avant. A ce jour, il n’y a qu’une organisation d’employeurs au niveau des municipalités et une fédération d’employeurs dans tout le pays.

En ce qui concerne les observations de la commission d’experts sur les sanctions, l’oratrice a noté que la question ne devrait pas se limiter aux niveaux des sanctions et aux sanctions infligées aux employeurs. L’absence de sanctions significatives pour dissuader les activités illicites des syndicats a un impact négatif considérable sur la paix sociale au Myanmar. Tout en notant le droit des travailleurs, en vertu de la législation nationale, de mener des actions collectives licites, l’oratrice a déclaré que des membres de syndicats ont mené des grèves à maintes reprises en recourant à des tactiques contraires au droit, comme le blocage complet de l’accès à des fabriques, en violation de la législation nationale et des meilleures pratiques à l’échelle internationale. Ces actions débouchent inévitablement sur des confrontations physiques, y compris sur des cas dans lesquels des syndicalistes ont agressé des dirigeants de fabriques et d’autres travailleurs non syndiqués. Des violations de la loi sur les organisations syndicales et de la réglementation applicable aux grèves sont également observées. L’oratrice a demandé au gouvernement de définir, par le biais du dialogue tripartite, des moyens et des solutions pour décourager de telles actions, sans quoi les relations professionnelles et l’état de droit seront compromis. L’anarchie qui caractérise actuellement l’action collective n’est pas conforme à la législation nationale et ne favorise pas des relations professionnelles positives. Les actions collectives illicites sont préjudiciables à l’investissement étranger, actuel ou potentiel et peuvent nuire à la création d’emplois. En outre, l’oratrice a dénoncé le fait que des syndicats nationaux, lors des réunions portant sur la réforme de la législation du travail, ont demandé à plusieurs reprises que des peines d’emprisonnement soient prononcées contre des employeurs au motif d’infractions administratives mineures à la législation du travail, contrairement aux recommandations des organes de contrôle de l’OIT. Un système punitif de relations professionnelles ne sera d’aucune utilité à la promotion de relations professionnelles harmonieuses. En outre, l’oratrice a souligné le manque de confiance des employeurs dans le système d’arbitrage. Bien que ce système ait été créé pour les conflits collectifs, et même si la loi dispose clairement que les cas individuels relèvent des tribunaux compétents, le gouvernement persiste à renvoyer des cas individuels au système d’arbitrage (actuellement, plus de 80 pour cent de leur nombre total). Un dialogue tripartite sur l’établissement d’un système approprié de règlement des conflits a eu lieu, mais les résultats restent incertains. Les arbitres ne sont pas tenus d’avoir une formation juridique et, au stade de la conciliation et de l’arbitrage, les membres des syndicats et des organisations d’employeurs peuvent eux-mêmes jouer le rôle de conciliateur ou d’arbitre. Le manque de connaissances et les conflits d’intérêts aboutissent souvent à des décisions manifestement contraires à la loi et minent la confiance des employeurs dans le système d’arbitrage. Enfin, l’oratrice a indiqué que, en vertu de la loi sur les fabriques, seuls deux types d’activité sont réglementés: le travail continu – dans ce cas, la loi permet 48 heures de travail par semaine (huit secteurs) et le travail non continu – la loi permet alors 44 heures de travail par semaine (tous les autres secteurs). Cette norme rigide en matière de durée du travail n’est pas adaptée aux besoins de flexibilité des secteurs qui se sont récemment développés (services de sécurité, industrie pétrolière et gazière, industrie de l’habillement, industrie alimentaire, etc.) et les rend non compétitifs. En conclusion, l’oratrice a souligné que, pour une jeune démocratie comme le Myanmar, la route est longue et qu’il faudra sans doute du temps pour arriver là où toutes les parties prenantes veulent arriver. Les partenaires sociaux doivent travailler ensemble de manière constructive.

La membre gouvernementale de la Bulgarie, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres, ainsi que de l’Albanie, de la Bosnie-Herzégovine, de l’ex-République yougoslave de Macédoine, du Monténégro, de la Norvège et de la Serbie, a attaché une grande importance au respect, à la protection et à la réalisation des droits de l’homme, y compris la liberté syndicale des travailleurs et des employeurs et le droit d’organisation, tout en reconnaissant le rôle important que joue l’OIT dans l’élaboration, la promotion et le contrôle des normes internationales du travail. L’UE et ses Etats membres s’efforcent de promouvoir la ratification universelle et la mise en œuvre des huit conventions fondamentales. L’oratrice se félicite des avancées positives faites par le gouvernement en vue d’améliorer les droits du travail dans bon nombre de domaines. Il convient de se féliciter également de l’engagement du BIT, en particulier dans l’élaboration récente des grandes lignes du PPTD, qui accorde la priorité à la liberté syndicale et devrait être mis en œuvre rapidement. De pair avec les gouvernement du Danemark, des Etats-Unis et du Japon, ainsi qu’avec l’OIT, l’UE a apporté un soutien actif à l’Initiative sur les droits du travail du Myanmar visant à promouvoir les droits et pratiques fondamentaux du travail, par le financement, notamment, du dernier Forum des parties prenantes qui s’est tenu le 17 janvier 2018 à Nay Pyi Taw pour discuter des progrès accomplis et des problèmes rencontrés dans les réformes du marché du travail, y compris celle de la législation du travail. Compte tenu du dialogue constructif sur les voies à suivre qui s’est déroulé au cours de ce forum, l’oratrice a affirmé à nouveau combien il est nécessaire pour le gouvernement de poursuivre ses efforts visant à aligner le droit national sur les normes internationales du travail, dans le but de favoriser le dialogue tripartite et d’assurer la liberté syndicale. Notant avec intérêt que le dialogue tripartite est renforcé par le Forum national de dialogue tripartite, elle encourage le gouvernement à apporter les derniers changements nécessaires à la loi sur les organisations syndicales, en consultation avec les partenaires sociaux. Observant que le premier projet d’amendement de la loi sur le règlement des conflits du travail a été discuté en juillet 2017 sur la base de consultations tripartites, l’oratrice a encouragé le gouvernement à avancer dans le processus de réforme, en consultation étroite avec les partenaires sociaux. Pour ce qui est des préoccupations exprimées au sujet de certaines dispositions de la réglementation de la loi sur les organisations syndicales, qui contient des restrictions d’éligibilité à la direction d’un syndicat et exige que 10 pour cent des travailleurs soient affiliés pour pouvoir constituer une simple organisation de base, l’oratrice a demandé au gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour amender la réglementation afin que les travailleurs puissent élire librement leurs cadres, former les organisations de leur choix et y adhérer. Enfin, le gouvernement est prié de veiller à ce que les droits prévus par la convention soient aussi garantis dans les ZES, où s’appliquent peut-être certaines lois spécifiques. L’UE continuera à s’engager dans un partenariat constructif avec le gouvernement.

Le membre gouvernemental de la Thaïlande, s’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a reconnu l’évolution positive de la situation dans le pays, y compris le processus de réforme démocratique, et a pris note avec satisfaction des informations fournies par le gouvernement. Le BIT a fourni une assistance technique relative à la promotion et à la protection des droits au travail, et des résultats tangibles ont été enregistrés. De plus, l’instance nationale tripartite a approuvé les grandes lignes du PPTD qui sera mis en place. L’OIT est invitée à reconnaître ces éléments positifs.

Une observatrice représentant IndustriALL Global Union a insisté sur le fait que la loi sur les organisations syndicales prive les travailleurs de leur droit de constituer des syndicats de leur choix et de s’y affilier. L’article 4 de la loi sur les organisations syndicales impose des restrictions quant à la structure des syndicats, exige que les travailleurs soient occupés dans la même branche ou le même secteur pour constituer un syndicat et que des prescriptions strictes soient imposées pour constituer des organisations de niveau supérieur. En ce qui concerne les restrictions relatives à la structure des syndicats, l’article 4 de la loi sur les organisations syndicales prescrit aux syndicats de suivre strictement la structure administrative du pays. En particulier, les syndicats ne peuvent être constitués que s’il s’agit de: i) syndicats de base couvrant un seul lieu de travail; ii) syndicats au niveau municipal regroupant les syndicats d’une même municipalité; iii) syndicats d’Etat/régionaux, composés de syndicats au niveau municipal; iv) fédérations formées de syndicats d’Etat; ou v) confédérations. Dans le cadre de ce système, il est impossible, par exemple, de créer un syndicat au niveau de l’entreprise si l’employeur est situé dans plus d’une municipalité, et chaque lieu de travail de l’employeur doit avoir son propre syndicat. Il est également impossible de former un syndicat au niveau d’une industrie ou d’une profession à l’échelle nationale sans avoir créé des structures intermédiaires composées, par exemple, de syndicats au niveau municipal ou de syndicats d’Etat. Cette structure pyramidale ne favorise pas les intérêts des travailleurs ni ceux des employeurs. La prescription selon laquelle les travailleurs doivent être dans «la même branche ou le même secteur» pour constituer un syndicat crée à tous les niveaux un système de vases clos, de sorte qu’il est impossible de constituer des syndicats regroupant des travailleurs occupés dans des branches ou des secteurs d’activité similaires, encore moins dans des secteurs n’ayant pas de liens entre eux. En outre, certains greffiers ont appliqué la législation de façon restrictive. Par exemple, des travailleurs du secteur du transport ont été obligés de constituer des syndicats distincts pour les chauffeurs de camion, les conducteurs de train, les mariniers, les chauffeurs de taxi, etc. Ceci a conduit à la création au niveau municipal de syndicats de base regroupant des travailleurs de la même municipalité et effectuant les mêmes tâches. Quant aux organisations de niveau supérieur, les syndicats au niveau d’une municipalité ne peuvent constituer qu’un seul syndicat d’Etat regroupant des travailleurs dont les activités sont identiques. De même, les fédérations sont composées de syndicats d’Etat de travailleurs effectuant les mêmes activités. Il ne peut exister de structures représentant des travailleurs de différentes branches ou différents secteurs d’activité. Selon le Comité de la liberté syndicale, toute restriction, qu’elle soit directe ou indirecte, du droit des syndicats de constituer une association de syndicats appartenant à la même branche ou à des branches différentes et d’y adhérer, et ce dans la même région, ne serait pas conforme aux principes de la liberté syndicale. Enfin, l’oratrice prie instamment le gouvernement de repenser le système, conjointement avec les syndicats, de manière à veiller au respect de la liberté syndicale des travailleurs.

Le membre gouvernemental de la Suisse a soutenu la déclaration faite par l’Union européenne. En ce qui concerne la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques, il a souhaité encourager le gouvernement à poursuivre des amendements qui réduisent les restrictions au droit de réunion, et a salué les consultations avec les partenaires sociaux menées par le gouvernement quant au processus de réforme de la loi sur le règlement des conflits du travail. Des relations de travail basées sur le bon fonctionnement du partenariat social et la confiance dans le cadre du dialogue social constituent des facteurs clés pour le développement durable d’une économie. La liberté syndicale et la protection du droit syndical et du droit d’organisation et de négociation collective font partie des fondements d’une démocratie et constituent la base des négociations entre partenaires sociaux dans d’autres domaines. Pour cette raison, l’orateur appelle le gouvernement à envisager la ratification d’autres conventions fondamentales. Il l’encourage à prendre les mesures nécessaires afin de garantir que la nouvelle loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques corresponde pleinement aux dispositions de la convention, ainsi que les mesures nécessaires pour que le processus de réforme de la législation du travail se fasse en concertation avec les partenaires sociaux et soit en conformité avec les normes internationales. Mettant à disposition l’expertise de son gouvernement en matière d’implication des partenaires sociaux dans les réformes importantes, l’orateur soutient les projets de coopération du BIT au Myanmar visant une amélioration du dialogue social en entreprise.

La membre travailleuse du Japon a attiré l’attention sur la hausse de la discrimination au Myanmar à l’encontre des dirigeants syndicaux, ce qui entrave l’organisation ou la conduite d’activités par les syndicats et va à l’encontre des principes fondamentaux de la liberté syndicale et du droit d’organisation tels que définis par l’OIT. Elle rappelle au gouvernement la décision prise par le Conseil d’administration du BIT en mars 2018, sur le suivi de la résolution concernant les autres mesures sur la question du Myanmar, aux termes de laquelle le gouvernement est prié de s’engager dans le processus de réforme visant à promouvoir la liberté syndicale à travers un dialogue tripartite authentique et efficace, en conformité avec les normes internationales du travail. La réalité de la situation syndicale est sombre. Bien que la création de syndicats ait progressé rapidement depuis l’adoption de la loi sur les organisations syndicales, des cas de violation des droits syndicaux et de discrimination à l’encontre des dirigeants syndicaux ont été constatés, en violation flagrante de la convention. Depuis 2017, la Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM) a signalé 29 cas de licenciement collectifs injustifiés suite à des activités d’organisation syndicale, entraînant le licenciement de 3 424 dirigeants et membres syndicaux. Dans de nombreux cas, le conseil d’arbitrage a ordonné leur réintégration, mais la décision est restée sans effet. De plus, de nombreux problèmes entourent le processus de règlement des conflits: le processus d’arbitrage prend beaucoup de temps; les amendes prévues par la loi sur les organisations syndicales pour non-respect des décisions du conseil d’arbitrage sont si dérisoires (750 dollars des Etats-Unis) que les employeurs choisissent souvent de ne pas en tenir compte; les manquements des employeurs à l’application des accords conclus avec les syndicats demeurent impunis et, par conséquent, de nombreux cas de licenciements abusif sont portés devant les tribunaux en tant que cas individuels. Dans un environnement où l’application de la loi est défaillante et la négociation collective inexistante, les travailleurs sont passibles de sanctions pénales pour activités syndicales. L’oratrice a demandé au gouvernement de prendre des mesures concrètes pour garantir la liberté syndicale, notamment par la modification de la loi sur les organisations syndicales et de la loi sur le règlement des conflits au travail, afin de protéger les militants syndicaux des discriminations et des licenciements de la part des employeurs.

Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela a accueilli avec satisfaction le fait que le gouvernement tient à continuer de garantir les droits au travail dans le contexte des changements politiques et économiques intervenus dans le pays. Des syndicats et des fédérations ont été constitués dans les conditions prévues par la loi sur les organisations syndicales. Le nombre d’enregistrements d’organisations syndicales est à la hausse, tendance qui devrait se poursuivre, compte tenu de l’engagement du gouvernement sur ce point. Un processus de réforme de la législation du travail est également en cours, sur la base de consultations tripartites. A cet égard, l’orateur a encouragé le gouvernement à renforcer ses relations avec les partenaires sociaux. Par conséquent, la commission devrait prendre note de tous les éléments positifs qui ressortent des explications fournies, ainsi que de la bonne disposition du gouvernement, et adopter des conclusions objectives et équilibrées, ce qui permettra au gouvernement d’étudier les conclusions et d’y donner suite, dans le cadre de l’application de la convention.

Un observateur représentant l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois, s’exprimant au nom de la Fédération des travailleurs du bâtiment et du bois du Myanmar, a souligné que les syndicats du secteur de la construction subissent des discriminations, et a fait référence à la situation de deux syndicats. Dans le premier cas, un syndicat établi dans une ZES s’est vu refuser sa demande d’enregistrement à cause d’un ordre spécial du ministère du Travail, de l’Immigration et de la Population exigeant de refuser tout enregistrement de syndicats du secteur de la construction. Selon les fonctionnaires du ministère, le pays n’est pas prêt pour l’enregistrement des syndicats de l’économie informelle. Le second cas concerne le refus d’enregistrer un syndicat parce que les demandeurs n’étaient pas occupés par l’entreprise depuis plus de six mois. Cette exigence est impossible à satisfaire dans le secteur de la construction, où les activités sont irrégulières et informelles. Pour conclure, le gouvernement est instamment prié d’en finir avec la discrimination dont sont victimes les syndicats du secteur de la construction et de cesser de se servir d’arguments comme l’informalité et l’irrégularité des activités pour refuser des enregistrements. Plus spécifiquement, l’obligation légale de six mois de service doit être supprimée.

Le membre gouvernemental des Etats-Unis a indiqué que, même si le taux de syndicalisation reste faible, depuis la promulgation de la loi sur les organisations syndicales, en 2011, plus de 2 400 organisations syndicales générales ont été enregistrées aux différents niveaux prévus par la loi. Toutefois, d’après le chargé de liaison de l’OIT, des restrictions à la liberté syndicale continuent d’être imposées en droit et dans la pratique. Le gouvernement et les partenaires sociaux se sont engagés à réformer la loi sur les organisations sociales et la loi sur le règlement des conflits du travail de 2012, et un groupe de travail technique sur la réforme de la législation du travail a été créé et chargé de tenir des consultations tripartites sur d’éventuelles modifications. Cependant, si elles lèvent certaines restrictions imposées à la formation d’organisations de travailleurs et d’employeurs, les modifications annoncées par le gouvernement en septembre 2017 ne règleront pas la question du nombre minimum de membres nécessaire pour constituer une organisation syndicale générale ni celle de la suppression des conditions fixées pour être membre d’un comité exécutif. De plus, les points suivants ont été soulevés: le ralentissement du taux d’enregistrement des syndicats; l’imposition, par certains bureaux locaux du travail, de conditions à l’enregistrement autres que celles énoncées dans la loi, ce qui fait obstacle à l’enregistrement de syndicats; les représailles visant les travailleurs pendant et après la formation d’un syndicat, ainsi que le manque de sanctions imposées aux employeurs contrevenants; le faible nombre d’organisations d’employeurs enregistrées (27 organisations d’employeurs générales, une organisation communale et une fédération d’employeurs); le faible taux de syndicalisation des employeurs, en particulier dû aux restrictions structurelles imposées par la loi, qui empêchent le développement de solides relations de travail dans le pays. Le gouvernement est donc instamment prié de tirer pleinement parti du processus de consultation tripartite sur la réforme de la législation du travail afin de la mettre en conformité avec la convention, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, en particulier afin de réduire le nombre minimum de membres que doit compter une organisation syndicale, de supprimer les conditions fixées pour être membre de la direction d’un syndicat, de protéger les syndicats contre les pratiques de travail déloyales lors de la formation d’un syndicat, y compris en interdisant toute forme de représailles, de revoir les impératifs structurels prévus à différents niveaux afin que tant les organisations de travailleurs que les organisations d’employeurs puissent également former des syndicats et constituer des fédérations plus librement, et de veiller à ce que les sanctions imposées en cas de non-respect de la loi soient suffisamment dissuasives, y compris en obligeant expressément à respecter les décisions du conseil d’arbitrage. Pour conclure, l’orateur a instamment prié le gouvernement d’adopter des réformes législatives au moyen de consultations tripartites et invité les partenaires tripartites à se prévaloir de l’assistance technique du BIT à cet égard.

La membre travailleuse de la République de Corée, s’exprimant également au nom du Conseil australien des syndicats et du Congrès du travail du Canada, a précisé que les procédures de règlement des conflits dans les ZES sont plus complexes, car, même si la loi relative à ces zones l’exige, aucune procédure n’a été mise en place pour que l’une des parties à un conflit prévienne le comité de gestion afin qu’il puisse remplir son rôle de médiateur. L’objectif de ces ZES est d’attirer les investissements étrangers, et la législation prévoit des incitations pour les entreprises orientées sur l’exportation. Bon nombre d’entreprises coréennes sont présentes dans ces zones et, bien qu’aucune information concrète ne soit disponible sur les conditions de travail puisque les syndicalistes n’ont pas le droit de s’y rendre, il convient d’apporter une attention particulière aux ZES compte tenu des nombreux cas de violation de la législation du travail et de la liberté syndicale de la part d’entreprises coréennes. Par exemple, en novembre 2017, des travailleurs syndiqués d’une usine de chaussettes de Yangon ont mené une grève pendant vingt et un jours pour obtenir que leur employeur respecte la législation du travail. Ce dernier a non seulement méprisé la décision de l’instance régionale d’arbitrage, mais il a aussi licencié 73 travailleurs et entamé des poursuites en justice contre 13 dirigeants syndicaux pour avoir mené la grève. Dans un autre cas, dans une usine de perruques, l’instance d’arbitrage a ordonné la réintégration du président du syndicat et d’un membre de la direction centrale du syndicat, qui avaient été tous deux licenciés mais, plutôt que de se conformer à cette décision, l’employeur a renvoyé 60 membres du syndicat et menacé de poursuivre les travailleurs en justice pour diffamation et grève illégale. Le gouvernement de la République de Corée a récemment annoncé que, en vertu de sa nouvelle législation, il resserrait ses liens économiques avec les pays de l’ASEAN, dont le Myanmar. Il est préoccupant qu’une hausse des investissements coréens puisse fortement nuire aux travailleurs du Myanmar et affaiblir les droits fondamentaux au travail. Les principes de l’OIT sont clairs: tous les travailleurs doivent bénéficier des droits fondamentaux au travail, y compris dans les ZES. Le gouvernement est instamment prié d’adopter toutes les mesures nécessaires pour garantir pleinement les droits consacrés dans la convention aux travailleurs des ZES et de veiller à ce que la loi sur les ZES n’entrave pas l’application d’autres lois.

Le membre travailleur de la Turquie a déclaré qu’en mars 2018 la Chambre haute a approuvé des amendements à la loi régissant le droit de réunion et de manifestations pacifiques qui prévoient: la possibilité de sanctionner par une peine de prison de trois ans toute personne supposée avoir soutenu, financièrement ou autre, une manifestation dont l’intention est de «porter atteinte à la sécurité nationale, à l’état de droit, à l’ordre public ou à la morale publique»; et une nouvelle obligation, pour les personnes souhaitant obtenir l’autorisation, d’organiser un rassemblement d’informer les autorités locales compétentes de la somme dépensée pour la réunion et des sources de financement. Des milliers de personnes ont protesté contre ces propositions d’amendements et plusieurs parlementaires ont estimé qu’ils réduiraient la protection des droits des travailleurs, des agriculteurs, des groupes ethniques, au même titre que les droits des citoyens de protester contre la corruption. S’ils étaient adoptés, ces amendements étoufferaient la liberté d’expression et de réunion pacifique et réduiraient fortement l’espace démocratique dans le pays. Il convient que le gouvernement annule ou amende la loi. Le droit à la liberté de réunion et le droit de grève sont des droits inaliénables des travailleurs et de leur famille, y compris des personnes déplacées. Pourtant, dans la pratique, la loi sur les organisations syndicales a affaibli le mouvement syndical, et il faut soutenir l’appel des membres travailleurs et de la CTUM pour qu’elle soit modifiée afin de garantir sa conformité avec la convention en ce qui concerne le droit de grève. L’orateur a également fait part de sa solidarité envers le membre travailleur du Myanmar dans sa lutte pour veiller à l’entière protection du droit d’organisation.

Le représentant gouvernemental a indiqué avoir écouté attentivement toutes les préoccupations, vues et suggestions exprimées au cours de la discussion, et a dit qu’il les transmettra à son retour dans la capitale pour qu’il en soit tenu dûment compte et pour assurer un meilleur respect de la convention. La convention a été ratifiée en 1955 mais la loi sur les organisations syndicales a été adoptée en 2011. Depuis, plus de 20 000 organisations d’employeurs et de travailleurs ont été créées. Plus d’organisations signifiera plus de négociation collective. Alors que le Myanmar continue d’améliorer la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques, il est encourageant de constater que l’esprit tripartite, qui est la marque de la commission, s’enracine et se développe au Myanmar. Cela devrait être considéré comme un progrès. Dans un esprit tripartite, trois groupes de travail technique s’occupant respectivement d’un PPTD, de la réforme de la législation du travail et d’une communication ont été créés. Toutes les suggestions reçues lors de la commission seront examinées par le groupe de travail technique sur la réforme de la législation du travail. Trois forums des parties prenantes sur la réforme de la législation du travail se sont également tenus en 2015, 2016 et 2018, grâce aux gouvernements du Danemark, du Japon et des Etats-Unis, ainsi qu’à l’OIT. Des partenaires locaux et internationaux y ont participé pour échanger des vues et des données d’expérience, et les forums ont eu les résultats escomptés. Le groupe de travail technique sur la réforme de la législation du travail et les participants tripartites interagissent constamment. Les résultats obtenus jusqu’ici peuvent être considérés comme un verre à moitié vide ou à moitié plein. Beaucoup a été fait si l’on considère la situation passée de la législation du travail, mais il reste encore à faire pour progresser dans le sens de la conformité à la convention. A cette fin, l’assistance des partenaires internationaux et la coopération technique du BIT seront nécessaires pour parvenir au respect de la convention.

Les membres employeurs ont indiqué que le fait de fixer un seuil ne constitue pas en tant que tel une violation du droit de constituer des organisations. De nombreux pays fixent des seuils pour la constitution d’organisations, certains d’entre eux allant même jusqu’à aligner ces seuils sur ceux qui s’appliquent à la création d’entreprises. Cependant, de nombreuses interventions ont fait remarquer combien il est difficile de constituer des organisations au Myanmar, à cause des seuils supplémentaires et inutiles qui leur sont imposés. Dans ce contexte, les membres employeurs attirent également l’attention sur la nécessité de garantir l’égalité entre les organisations de travailleurs et les organisations d’employeurs en ce qui concerne les conditions de création d’organisations. Par ailleurs, le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur propre choix entraîne aussi le risque de créer une multitude de syndicats éparpillés, ce qui peut donner lieu à de sérieux problèmes et rendre nécessaire une meilleure organisation du mouvement syndical. A cet égard, le gouvernement doit veiller à tirer les leçons d’autres pays. De plus, de nombreuses interventions ont été signalées comme étant des activités répressives en lien avec les grèves, alors que ces rassemblements n’étaient autres, d’après les orateurs, que des manifestations publiques. Il convient d’insister sur le fait que la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques s’inscrit dans le droit civil général qui s’applique à tous et pas seulement aux syndicats, alors que la loi sur les organisations syndicales et celle sur le règlement des conflits du travail sont de nature différente et relèvent réellement du domaine de la législation du travail. Les membres employeurs prient instamment le gouvernement de tenir compte de toutes les demandes concernant la législation du travail et les ZES. A leur avis, le Myanmar débute tout juste son processus de mise en œuvre. Des problèmes se posent mais, pour l’heure, il n’y a pas de rupture assez grave qui ne puisse être réparée. Le dialogue social est la voie à suivre, et le Myanmar a les éléments de base requis pour y parvenir.

Les membres travailleurs ont déclaré, en réponse à certains commentaires, que la question du pluralisme syndical constitue un défi pour les travailleurs de nombreux pays, car il existe différents modèles et différentes solutions, mais il revient aux travailleurs de décider de leur forme d’organisation. La question de la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques est une question de démocratie, d’espace démocratique et de mouvement social, et les syndicats organisés en font partie. Les membres travailleurs ont ajouté qu’à partir de 2012 l’intérêt pour les investissements au Myanmar a considérablement augmenté, en grande partie parce que le pays est (et continue d’être) le prochain centre de fabrication à bas coût dans le monde, avec des salaires parmi les plus bas d’Asie. A l’époque, les travailleurs avaient averti du fait que, en l’absence d’un engagement déclaré en faveur de l’état de droit et de la cohérence de la politique économique et sociale, rien ne garantissait que les emplois créés constitueraient du travail décent. De fait, l’intérêt pour l’investissement étranger est sur le déclin, en partie à cause de l’insuffisance des conditions juridiques du dialogue social et de l’absence de politiques cohérentes en matière de relations professionnelles et de l’absence de l’état de droit, en particulier pour les travailleurs. Les employeurs et les travailleurs ont convenu que le système de règlement des différends est rompu; il faut donc davantage de dialogue social tripartite à l’heure où la loi est en cours de reformulation. En mars 2018, des associations commerciales représentant les principales firmes de vêtements et de chaussures des Etats-Unis ont envoyé une lettre pressante à la conseillère d’Etat dans laquelle elles expliquent que le potentiel d’engagement, de maintien et d’expansion des relations commerciales au Myanmar serait grandement amélioré si l’on pouvait œuvrer avec des travailleurs bénéficiant de la liberté syndicale et de la négociation collective et traiter toutes les réclamations par des moyens prévisibles et transparents, qui soient mis en œuvre par le gouvernement et qui aient la confiance de toutes les parties prenantes. Ces entreprises ont toutefois noté que la législation du travail existante n’est pas adaptée à cette fin et que le gouvernement, jusqu’ici, n’a pas appliqué cette législation, qui contient pourtant des lacunes. Elles ont également constaté que des directeurs de fabrique intimidaient régulièrement les travailleurs, les exhortaient à ne pas constituer de syndicats et appelaient la police pendant des arrêts de travail, dans ce qui constitue une tactique d’intimidation qui vise à briser des grèves. Plutôt que de suivre une stratégie de développement à un niveau élevé, il semble que le Myanmar va vers le bas. Les membres travailleurs attendent beaucoup plus du gouvernement. Cependant, si le gouvernement poursuit un dialogue social véritablement authentique dont les résultats seront visibles, met en place la législation appropriée et investit dans l’élaboration d’une stratégie de relations professionnelles aboutie, le Myanmar pourra encore se distinguer et attirer de plus en plus d’entreprises responsables. En conséquence, il est demandé au gouvernement: d’engager un dialogue constructif avec les représentants des travailleurs et des employeurs pour faire en sorte que la loi sur les organisations syndicales et la loi sur le règlement des conflits du travail soient conformes à la convention; de veiller à ce que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent obtenir leur enregistrement au moyen d’une procédure administrative simple – toutes les directives prévoyant des exigences supplémentaires en sus de celles contenues dans la loi sur les organisations syndicales et sa réglementation devraient être retirées immédiatement, et tous les fonctionnaires des services de l’enregistrement devraient avoir pour instruction de ne pas demander ces documents supplémentaires; de veiller à ce que les travailleurs puissent mener leurs activités syndicales sans être l’objet de menaces de violence ou d’autres violations de leurs libertés civiles par la police ou des services de sécurité privés; de remédier aux lacunes de la législation et de la pratique en matière de droits au travail dans les ZES; d’accepter dès que possible une mission technique pour élaborer un système de relations professionnelles basé sur la liberté syndicale et la négociation collective, notamment pour réviser tous les projets de textes relatifs à la loi sur les organisations syndicales et la loi sur le règlement des conflits du travail; de recommander des amendements compatibles avec la convention; et d’informer la commission d’experts, à sa prochaine session, sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la convention en droit et dans la pratique.

Conclusions

La commission a pris note des déclarations orales faites par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

La commission a regretté l’absence de progrès en ce qui concerne le cadre législatif tant attendu dans lequel les travailleurs et les employeurs pourront exercer librement leurs droits en vertu de la convention.

Prenant en compte la déclaration du gouvernement et la discussion qui a suivi, la commission a prié instamment le gouvernement de:

  • veiller à ce que la loi sur les organisations syndicales et la loi sur le règlement des différends du travail soient pleinement conformes à la convention no 87, en se prévalant de l’assistance technique du BIT pendant le processus de réforme législative;
  • veiller à ce que les travailleurs puissent mener leurs activités syndicales sans menace de violence ou d’autres violations de leurs libertés civiles par la police ou les services de sécurité privés;
  • veiller à ce que l’enregistrement des organisations de travailleurs et d’employeurs ne soit pas soumis à des exigences déraisonnables, afin de garantir que leur droit de constituer des organisations de leur choix ou de s’y affilier ne soit pas entravé dans la pratique;
  • veiller à ce que les demandes d’enregistrement de syndicats soient traitées rapidement et ne soient pas repoussées, sauf si elles ne satisfont pas à des critères clairs et objectifs énoncés dans la loi; et
  • rendre la législation du travail dans les zones économiques spéciales (ZES) conforme à la convention no 87, en pleine consultation avec les partenaires sociaux.
  • La commission a prié instamment le gouvernement d’accepter une mission de contacts directs avant la prochaine session de la Conférence internationale du Travail, et de faire rapport sur les progrès réalisés en ce qui concerne les recommandations susmentionnées à la commission d’experts pour sa session de novembre 2018.

    Le représentant gouvernemental a profité de l’occasion pour remercier les partenaires internationaux de son pays qui ont pris part aux discussions et a exprimé sa gratitude pour leur disponibilité à aider le Myanmar dans les efforts qu’il déploie pour assurer le respect de la convention. Il a également indiqué que son gouvernement a l’intention d’œuvrer en étroite collaboration avec l’OIT afin de faire progresser la mise en œuvre de la convention aussi pleinement et aussi rapidement que possible.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 2011, Publication : 100ème session CIT (2011)

    Un représentant gouvernemental a déclaré qu’une réforme législative est actuellement en cours afin de mettre la législation nationale en conformité avec les instruments juridiques internationaux auxquels le Myanmar est partie. Le projet de loi sur les organisations de travailleurs est d’ailleurs une des nouvelles lois en cours d’examen par le Parlement. Le Procureur général et l’Union des fédérations des chambres de commerce et d’industrie du Myanmar (UMFCCI) ont été associés au processus de rédaction. Une assistance technique du BIT a été sollicitée à plusieurs reprises. Grâce à ce processus, tout a été fait pour mettre le texte en conformité avec la convention. Il a indiqué que, une fois le processus de rédaction achevé, le texte sera communiqué au BIT de manière confidentielle puis sera rapidement soumis au Parlement. L’orateur a indiqué que, au Myanmar, il y a de nombreuses organisations sociales qui exercent le droit d’association, le droit de rassemblement, le droit d’organiser des défilés et de faire des conférences publiques. Par exemple, les travailleurs de Weng Hong Hunt, les fabriques de vêtements d’Opal et l’usine de chaussures de Taiyi avaient organisé des grèves en février 2010. Les revendications des travailleurs ont été entendues par le biais de réunions tripartites. Le gouvernement n’avait rien interdit ni pris aucune mesure punitive contre quiconque. Cela démontre que les droits aux libertés civiles et le droit à la liberté syndicale n’ont pas été entravés ou violés.

    En ce qui concerne Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Min et Myo Min, l’orateur a déclaré qu’ils n’avaient jamais travaillé dans une usine ou dans d’autres établissements et ne sont ni des travailleurs ni des syndicalistes. Des mesures ont été prises à leur encontre pour avoir enfreint les lois en vigueur. Ils ont été jugés de manière équitable, ont été assistés par un avocat, ont pu appeler à la barre des témoins à décharge et ont obtenu des contre-interrogatoires par leurs avocats. Des informations détaillées les concernant seront fournies à la commission d’experts. Il a également mentionné que, depuis 1988, le gouvernement avait accordé une amnistie à cinq reprises, notamment celle accordée en vertu de l’article 204, paragraphe b), de la Constitution. Le gouvernement a par ailleurs suspendu l’exécution de peines à 11 occasions, conformément à l’article 40, paragraphe 1, du Code de procédure pénale. En conséquence, 114 950 personnes avaient été libérées, et aucune peine capitale n’a été prononcée à ce jour. Les détenus se sont vu suspendre leur peine pour bonne conduite et ils seront libérés dans les meilleurs délais.

    L’article 354 de la Constitution de 2008 garantit les droits des citoyens, y compris la liberté d’expression, le droit de réunion et d’association. On estime que cet article est conforme à la convention. Le Président U Thein Sein a indiqué dans son discours d’investiture du 30 mars 2011 que le gouvernement était résolu à améliorer les conditions de vie des travailleurs. Il a également indiqué que les lois sur les possibilités d’emploi et de sauvegarde des droits des travailleurs seront réexaminées en vue de les mettre en conformité avec les circonstances, les engagements et les besoins d’aujourd’hui. Il a conclu en déclarant que beaucoup reste à faire, mais les efforts se poursuivront immédiatement pour mettre pleinement en oeuvre la convention.

    Les membres employeurs ont rappelé que cela fait cinquante-six ans que le Myanmar a ratifié la convention, que la Commission de l’application des normes de la Conférence a discuté ce cas 14 fois depuis 1992 et que 21 observations ont été formulées par la commission d’experts sur l’application de cette convention par le Myanmar. L’an dernier, le représentant gouvernemental reconnaissait qu’aucun syndicat n’existait au Myanmar. La Commission de l’application des normes de la Conférence a insisté dans ses conclusions sur la gravité des allégations présentées. Il existe des divergences fondamentales entre les prescriptions de la convention et le droit et la pratique du pays: celui-ci ne compte pas encore de syndicats libres et indépendants. La déclaration du représentant gouvernemental contient bien un élément nouveau, à savoir le projet de loi sur les organisations de travailleurs, mais les membres employeurs ont déploré le fait qu’aucune indication n’est fournie quant à son contenu. Pour ce qui est de la plainte que les délégués travailleurs ont déposée en juin 2010 conformément à l’article 26 de la Constitution de l’OIT et de l’examen par le Conseil d’administration de la possibilité de créer une commission d’enquête sur le non-respect par le Myanmar de la convention, les membres employeurs ont rappelé la position du groupe des employeurs au Conseil selon laquelle il est préférable de commencer par demander au gouvernement de fournir des informations complémentaires sur les allégations contenues dans la plainte. Les membres employeurs ont regretté que le gouvernement ne saisisse pas aujourd’hui cette occasion de fournir les informations requises.

    Notant les nombreux exemples donnés dans le rapport de la commission d’experts concernant des syndicalistes et des sympathisants condamnés à de longues peines de prison, les membres employeurs ont rappelé la déclaration qu’ils ont faite il y a deux ans selon laquelle le respect du droit à la vie et d’autres libertés publiques est un préalable indispensable à l’exercice des droits tels qu’ils sont contenus dans la convention. En outre, les observations de la commission d’experts mettent l’accent sur plusieurs dispositions législatives qui restreignent ou interdisent la liberté syndicale. La liberté de réunion et la liberté de parole ne sont pas autorisées. Se référant à la discussion de cette année sur l’application par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, les membres employeurs ont conclu que le gouvernement est encore très loin d’une rédaction et d’une adoption d’une législation conforme à la convention, et encore plus loin de son application en droit et dans la pratique. Faute de mesures prises par le gouvernement, ce cas constitue un cas de manquement continu dans l’application de la convention.

    Les membres travailleurs ont indiqué que, depuis vingt ans, la même séance se reproduit. La commission d’experts réitère avec regret la même observation, le gouvernement réitère sans regrets des réponses hors sujet et la Commission de la Conférence continue de regretter les meurtres et arrestations de syndicalistes ainsi que de multiples autres violations de la liberté syndicale. Le rapport de la commission d’experts contient une nouvelle fois une liste extensive mais non exhaustive de personnes assassinées, détenues ou torturées pour des activités syndicales absolument ordinaires telles que des allocutions sur des questions économiques et sociales ou la simple communication d’informations au mouvement syndical. Pour chaque personne citée, les droits fondamentaux et libertés publiques essentielles prévus par la convention ont été bafoués par les autorités. Pour de tels cas, il n’existe pas de mécanisme spécial de plainte comme pour le travail forcé. C’est alors que le régime montre son vrai visage. A chaque fois, les mêmes prétextes sont invoqués, tels que la commission d’actes illégaux, l’existence d’organisations terroristes ou l’ingérence dans les affaires internes du pays. Si, en vertu de l’article 8 de la convention, les syndicats sont tenus de respecter la légalité, le même article prévoit que la législation nationale ne doit pas porter atteinte aux garanties prévues par la convention. Ces dernières années, la Commission de la Conférence a souligné les liens intrinsèques entre liberté syndicale et démocratie. Cependant, le gouvernement a procédé à des élections sans établir les conditions de base nécessaires à des élections fiables, à savoir la liberté d’association, y compris la liberté syndicale. De fait, la liberté syndicale ne dispose toujours d’aucun fondement légal en Birmanie/Myanmar. La nouvelle Constitution subordonne le droit d’association «aux lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté du droit et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société ou de l’ordre public et la moralité». En outre, plusieurs dispositions législatives contiennent d’importantes restrictions à la liberté syndicale. L’ordonnance 6/88 requiert une autorisation pour la constitution de toute organisation. L’ordonnance 2/88 interdit de se réunir ou de marcher en cortège par groupe de cinq ou plus. La loi de 1908 sur les associations illégales est assortie de peines de prison. La loi de 1926 sur les syndicats subordonne leur reconnaissance à l’affiliation de plus de 50 pour cent des travailleurs concernés. Enfin, la loi de 1964 instaure un système obligatoire de représentation des travailleurs imposant le régime de syndicat unique. L’an passé, le gouvernement a déclaré que les ordonnances et la loi sur les associations illégales seraient abrogées après les élections de 2010 et qu’une nouvelle législation sur les organisations de travailleurs était en préparation. Le gouvernement vient de réitérer cette déclaration. Toutefois, aucune des mesures annoncées n’a été prise. La déclaration 1/2006 qualifiant la FTUB d’organisation terroriste n’a pas non plus été retirée et la répression contre les gens de mer pour exercice de leurs droits syndicaux se poursuit, y compris à l’étranger. Il n’y a toujours aucun élément concret sur une nouvelle loi relative aux syndicats qui soit conforme aux principes de la convention. En bref, il n’existe toujours aucune liberté syndicale en Birmanie/Myanmar.

    La membre gouvernementale de la Hongrie, s’exprimant au nom des gouvernements des Etats membres de l’Union européenne (UE) présents à la Conférence, ainsi que des pays candidats (la Croatie, l’ex-République yougoslave de Macédoine, le Monténégro et l’Islande), des pays candidats potentiels (l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine et la Serbie), de la Norvège, de la République de Moldova, de l’Arménie et de l’Ukraine, a pris note de l’engagement du gouvernement de la Birmanie/Myanmar de respecter la convention et de coopérer avec l’OIT. Elle a noté avec un profond regret les allégations graves présentées dans le rapport de la commission d’experts concernant les graves violations des droits de l’homme, les meurtres, les arrestations arbitraires et les emprisonnements de longue durée de syndicalistes pour avoir exercé des activités syndicales ordinaires. Notant que l’on estime qu’il y a encore plus de 2 000 prisonniers politiques dans le pays, l’oratrice a de nouveau appelé le gouvernement à relâcher sans délai toutes les personnes détenues pour avoir exercé leurs droits fondamentaux, y compris la liberté d’expression et la liberté syndicale. Se félicitant de la visite dans le pays de la mission de haut-niveau de l’OIT en février 2011, l’oratrice a noté qu’un projet de loi sur les organisations de travailleurs a été présenté, et a encouragé le gouvernement à en communiquer copie et à entreprendre des consultations approfondies en vue de son application effective. La révision de la législation nationale afin de la mettre en conformité avec la convention devrait être une priorité. Prenant note des informations récentes fournies par le gouvernement de la Birmanie/Myanmar et la mission de haut niveau de l’OIT, l’oratrice s’est déclarée en faveur du report de la décision de créer une commission d’enquête compte tenu des nouveaux développements, notamment de la poursuite de la coopération entre le gouvernement et l’OIT.

    La membre gouvernementale des Etats-Unis a rappelé que les organes de contrôle de l’OIT ont utilisé, à de nombreuses occasions, le langage le plus virulent dont ils disposent pour déplorer le manquement continu du gouvernement birman à garantir le droit fondamental et inaliénable à la liberté syndicale. Des syndicats libres et indépendants n’existent toujours pas en Birmanie. Rappelant la déclaration du représentant gouvernemental pendant la séance spéciale sur l’application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, selon laquelle de nombreux changements ont récemment eu lieu en Birmanie, ainsi que l’expression par le gouvernement de sa volonté politique renouvelée et de son ferme engagement à coopérer avec l’OIT, l’oratrice a appelé le gouvernement birman à utiliser ces changements et ces nouveaux comportements pour jeter enfin les fondements juridiques nécessaires pour établir le respect de la liberté d’association et le droit syndical et faire en sorte qu’il soit respecté. Elle a exprimé l’espoir que le gouvernement adoptera dans un proche avenir la législation sur les syndicats conformément à la convention et la mettra en oeuvre de sorte qu’à l’avenir les travailleurs pourront sans crainte, sans intimidation et sans menace de violence, exercer leur droit à la liberté syndicale. Eu égard à la décision reportée de créer une commission d’enquête pour examiner l’application par la Birmanie de la convention, la réaction du gouvernement, en réponse à la demande du Conseil d’administration de soumettre au Bureau le projet de loi sur les organisations de travailleurs, constituerait pour la Commission de la Conférence et le Conseil d’administration un élément important à prendre en compte en novembre 2011. L’oratrice a également rappelé que la présence de l’OIT en Birmanie a été prolongée de sorte qu’elle puisse fournir conseils et assistance pour les questions relatives à l’exercice de la liberté syndicale.

    La membre travailleuse de l’Italie a partagé le point de vue des membres employeurs selon lequel le gouvernement birman n’a pas profité de l’occasion pour fournir à la Commission de la Conférence des informations adéquates sur les changements mis en oeuvre dans le pays. Elle a regretté que, en dépit du fait que la Birmanie ait ratifié la convention il y a cinquante-six ans, celle-ci n’est toujours pas mise en oeuvre. Le 17 août 2010, le gouvernement a déclaré que «le processus d’élaboration de la législation sur les organisations de travailleurs se fondera sur trois piliers, à savoir la nouvelle Constitution, une assistance et des conseils continus de la part du Département des normes de l’OIT et la convention no 87 elle-même». Or, trois jours plus tard, un décret permettait le licenciement et l’inscription sur une liste noire de travailleurs ayant lancé des actions revendicatives pour réclamer de meilleures conditions de travail ou y ayant participé. Ce décret permettait ainsi aux autorités birmanes d’empêcher les actions collectives. En outre, le gouvernement a donné des instructions en vue de la création de comités de surveillance des travailleurs, afin de réduire le nombre des protestations et manifestations et d’empêcher la création de syndicats. L’oratrice a ensuite évoqué la discussion, par le Conseil des droits de l’homme, des résultats de l’Examen périodique universel de janvier 2011 pour la Birmanie. Le gouvernement gagne du temps en répétant la vieille histoire selon laquelle la Birmanie est un pays en transition qui met en place les changements demandés. La base du système juridique birman reste une Constitution aux multiples carences qui ne permet pas de créer des syndicats indépendants. Il faut que le Conseil d’administration du BIT crée une commission d’enquête sur les violations du droit à la liberté syndicale et sur les crimes commis par la junte militaire et le nouveau gouvernement. La Commission de la Conférence doit inviter le gouvernement du Myanmar à modifier la Constitution, à adopter, par le biais d’une consultation ouverte, une nouvelle loi qui autorise la création d’organisations syndicales libres et prévoit que personne ne doit être sanctionné pour exercer le droit à la liberté syndicale, à la liberté d’opinion et d’expression, et à donner d’urgence des signes tangibles d’un changement, comme la libération de tous les prisonniers d’opinion, y compris les militants syndicaux. Un premier signe de changement serait d’abandonner les accusations de terrorisme portées contre la FTUB et son secrétaire général et de permettre à cette organisation d’exercer librement ses activités en Birmanie. Il faut que l’OIT renforce son action et évite de tomber dans le piège de l’attentisme derrière lequel le régime s’est réfugié pendant des années pour éviter que les institutions internationales prennent des décisions. Il faut se féliciter de la prolongation de la présence de l’OIT qui traitera, en totale coopération avec les travailleurs et les employeurs, les questions se rapportant à la mise en oeuvre de la convention.

    La membre travailleuse de la Suède a regretté que le gouvernement birman ne se conforme pas à la convention. Elle a également déploré le nombre très élevé d’emprisonnements, de longues peines de prison, d’assassinats, de disparitions, d’arrestations et de cas de torture de syndicalistes et de travailleurs, tout cela témoignant de la brutalité de la politique et des agissements du gouvernement. Le Comité de la liberté syndicale et la Commission de la Conférence ont rappelé à maintes reprises les cas graves de violation de la convention par la Birmanie. Aujourd’hui, 54 représentants de travailleurs et militants syndicaux sont en prison. Les travailleurs birmans connaissent les risques associés aux activités syndicales mais ils savent également qu’il est fondamental d’échanger des informations et d’informer la communauté internationale des violations commises. L’oratrice a appelé le régime militaire birman à reconnaître, premièrement, la légitimité de la FTUB en tant que syndicat légitime et à garantir le libre exercice de ses activités sans aucune ingérence et, deuxièmement, à modifier la Constitution de manière à garantir pleinement la liberté syndicale.

    Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a déclaré que son pays reconnaît qu’il est important que les Membres de l’OIT se conforment aux obligations internationales auxquelles ils ont souscrit. Le Myanmar a entrepris des réformes constitutionnelles de grande ampleur. Des élections générales ont eu lieu et le nouveau Parlement fonctionne. Ces réformes ont notamment pour but de donner des droits fondamentaux aux syndicats. Ces droits sont inscrits dans la nouvelle Constitution et une nouvelle loi sur les organisations de travailleurs va être adoptée, afin de mettre la législation en conformité avec la convention. Dans ce contexte, il est essentiel que la coopération entre le gouvernement et l’OIT soit renforcée afin de garantir le succès des réformes entreprises dans l’ensemble du pays.

    Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI), citant un cas de grève à l’usine Tailor Garment dans la zone industrielle de Hlaingharyar ainsi que la recommandation que l’Union de la Fédération du Myanmar des chambres de commerce et d’industrie (UMFCCI) a faite à ses membres de ne pas recruter de travailleurs à des salaires plus élevés pour ne pas encourager des revendications du même ordre dans d’autres usines pouvant déboucher sur des manifestations, a fait observer que ces faits, ce comportement et cette pratique sont les mêmes que ceux dont il faisait état dans son intervention en 2009, à la différence près, et non des moindres, que le prix des produits de base a considérablement augmenté depuis lors, alors que les travailleurs ne bénéficient pas du droit d’organisation et de négociation collective pour obtenir un travail décent. Les ordonnances 2/88 et 6/88, la loi sur les associations illégales et la déclaration 1/2006 sont toujours appliquées et 54 membres de la FTUB et des défenseurs des droits des travailleurs sont toujours en détention. Le fait qu’aucune des six personnes dont la libération immédiate a été demandée par la Commission de la Conférence dans ses conclusions de 2010 n’ait été incluse dans la soi-disant «amnistie», accordée par le nouveau gouvernement, fait douter de sa bonne disposition envers l’OIT. La Birmanie doit procéder à une réforme en profondeur de sa Constitution et de sa législation afin d’assurer la protection des travailleurs. Qui plus est, les travailleurs doivent être informés de leurs droits. Cela étant, élaborer un projet de loi sur les organisations de travailleurs alors que 54 militants sont en prison serait totalement inacceptable. L’orateur a invité le BIT, en consultation avec les membres travailleurs, à formuler des recommandations claires sur les mesures, assorties de délais, que le gouvernement doit prendre pour s’acquitter de ses obligations. Des mesures d’application doivent être préparées par le BIT pour éviter de nouveaux retards de la part du gouvernement. La FTUB doit être reconnue comme un syndicat légitime. Il est temps qu’une commission d’enquête soit créée pour vérifier les allégations de violation des droits fondamentaux en Birmanie, de façon à apporter sa contribution aux changements qui s’imposent dans le pays.

    La membre gouvernementale de Cuba a réaffirmé son adhésion aux principes de la convention, et a fait observer que l’exposé du gouvernement démontre les efforts déployés dernièrement par ce pays pour mettre en oeuvre la convention. L’examen de ce cas doit prendre en compte et reconnaître les résultats obtenus à ce jour par le gouvernement, grâce à la coopération technique et au dialogue bilatéral entretenus avec l’OIT. Les parties concernées doivent être encouragées à poursuivre la coopération technique, à maintenir un dialogue ouvert et sans réserve, et à effectuer une analyse appropriée de la situation économique du pays et des facteurs qui lui sont propres, en vue de faciliter la réalisation des objectifs prévus par la convention.

    La membre gouvernementale du Canada a indiqué que son pays demeure extrêmement déçu et découragé par le peu d’empressement dont fait preuve le gouvernement pour prendre les mesures nécessaires pour remédier aux graves allégations qui sont faites contre lui. Une transition vers une véritable démocratie s’impose, comme le réclame la communauté internationale et, à cet égard, la liberté syndicale est primordiale. Aucun pays ne peut prétendre aspirer aux objectifs que fixe l’OIT, ou s’acquitter de ses obligations envers cette organisation, si ses travailleurs et ses employeurs ne peuvent pas librement constituer des organisations et s’y affilier et discuter de leurs droits. Les autorités du pays doivent immédiatement libérer toutes les personnes qui sont emprisonnées pour avoir exercé des activités syndicales. A cet égard, les mesures appliquées par le régime à l’encontre de personnes qui exercent ce droit fondamental qu’est la liberté syndicale sont contraires à l’engagement envers la démocratie et la garantie des droits associés à la liberté syndicale qu’il revendique. L’oratrice a déclaré que le Canada attend avec impatience que la législation soit élaborée pour que la législation syndicale soit mise en conformité avec la convention. Les autorités doivent tirer parti de l’assistance technique du BIT en lui donnant la possibilité de faire des observations sur le texte du projet de loi afin qu’il soit pleinement conforme à la convention. De plus, l’application de toute nouvelle législation doit s’accompagner de mesures actives si l’on veut qu’elle ait une portée réelle. En dernier lieu, souhaitant être informée à l’avenir de la réponse positive des autorités à la présence du BIT dans le pays afin de traiter des questions liées à la convention, l’oratrice a noté que la décision concernant la création d’une commission d’enquête était reportée à novembre 2011 afin d’évaluer les progrès accomplis et la mesure dans laquelle les autorités ont tenu la promesse qu’elles avaient faite d’appliquer sans tarder la nouvelle législation, ainsi que la remise d’une copie du projet de loi au BIT et que le Canada s’attendait à ce que le rapport de la commission de novembre 2011 fasse état de sérieux progrès.

    La membre travailleuse du Japon a rappelé que, malgré les discussions sérieuses qui ont eu lieu à maintes reprises au sein de la Commission de la Conférence sur ce cas, aucune mesure concrète n’a été prise pour adopter des lois garantissant à tous les travailleurs le droit de constituer des organisations de leur choix ou de s’y affilier ni pour abroger les ordonnances 2/88 et 6/88 ainsi que la loi sur les associations illégales. Ces textes sont ceux qui affectent le plus gravement le droit de constituer des syndicats et de s’y affilier, il n’y a pas d’autre choix que de les abroger. La Constitution sur laquelle le gouvernement s’appuie pour donner effet aux dispositions de la convention contient de vastes clauses d’exclusion dans son article 354 contesté et devrait être modifiée afin d’être mise en conformité avec la convention. Une nouvelle loi sur la liberté syndicale permettant la création de syndicats dans tous les secteurs sans autorisation préalable et le droit de s’affilier à des fédérations, confédérations et organisations internationales devrait être adoptée, et le projet de cette loi devrait être examiné par le BIT, y compris par le Bureau pour les activités des employeurs (ACT/EMP) et le Bureau des activités des travailleurs (ACTRAV). Le Comité de la liberté syndicale a déclaré que la FTUB est un syndicat légitime, alors que le gouvernement a qualifié ce syndicat ainsi que son secrétaire général de terroristes. Le gouvernement devrait comprendre qu’une société n’est pas viable sans syndicats libres et démocratiques et qu’il ne peut y avoir de liberté syndicale sans libertés publiques et sans respect de la société civile, ainsi, les prisonniers politiques doivent être immédiatement libérés. Compte tenu de l’absence de progrès sur ces questions depuis plus de vingt ans, l’oratrice a demandé l’adoption de mesures supplémentaires plus fermes, notamment la création d’une commission d’enquête sur la question de la liberté syndicale, ainsi qu’une prolongation de la présence de l’OIT dans le pays pour traiter des questions relatives à la convention.

    Le représentant gouvernemental a exprimé sa reconnaissance à l’égard des orateurs qui ont fait des remarques objectives et constructives sur la mise en oeuvre de la convention par le Myanmar. Il a réitéré sa demande tendant à ce que, dans le cadre des futures délibérations de la commission, tous les délégués se réfèrent à ce pays par son nom correct – la République de l’Union du Myanmar –, désignation reconnue dans l’ensemble du système des Nations Unies. Les allégations selon lesquelles des personnes ayant été associées au Protocole d’entente complémentaire auraient fait l’objet de représailles et des militants syndicaux seraient placés en détention en raison même de leurs activités syndicales sont totalement infondées. Les arrestations en question ont leur origine uniquement dans des infractions aux lois en vigueur. Bien qu’il n’existe pas encore de loi spécifique concernant les organisations syndicales, les droits des travailleurs du Myanmar ne sont pas méconnus, comme en attestent de récentes grèves, dans le cadre desquelles des réunions tripartites ont eu lieu pour dégager des solutions acceptables, sans qu’aucun travailleur n’ait été arrêté. Enfin, le représentant gouvernemental a exprimé l’engagement de son pays à maintenir sa coopération avec l’OIT sous tous ses aspects et a appelé la communauté internationale à mieux comprendre les contraintes pratiques qui pèsent sur le gouvernement et à reconnaître ses efforts ainsi que son engagement constructif vis-à-vis de l’OIT. Toute initiative qui pourrait déboucher sur des mesures coercitives serait contre-productive.

    Les membres travailleurs ont dénoncé une fois de plus les meurtres, tortures et détentions de syndicalistes pour des activités syndicales ordinaires. Le gouvernement a mentionné des libérations de prisonniers mais ceux-ci ne l’ont été qu’à la fin de leur peine. De plus, aucun syndicaliste détenu n’a été libéré. Sans le rétablissement et le respect des libertés publiques fondamentales, ces violations continuelles de la liberté d’association, en droit et dans la pratique, se perpétueront encore longtemps. Dans cette optique, les membres travailleurs ont réitéré leurs demandes de révision de la Constitution, en particulier de son article 354, d’abrogation des ordonnances et des lois sur les associations dites illégales, et de retrait de l’accusation de terrorisme à l’encontre de la FTUB et de son secrétaire général. De plus, les membres travailleurs ont à nouveau demandé l’émission d’instructions aux autorités de cesser toute discrimination antisyndicale contre les gens de mer et de réviser l’accord type concernant les gens de mer du Myanmar, la libération de Myo Aung Thant et de tous les militants syndicaux et prisonniers politiques ayant exercé leur droit à la liberté d’expression et d’association, avec, entre-temps, l’accès pour eux à une assistance juridique et médicale. Enfin, l’impunité pour les actes de violence commis contre des syndicalistes et pour les cas de travail forcé doit cesser. Une nouvelle législation sur les syndicats, aussi concise que simple, doit être adoptée. Cette loi doit reconnaître aux travailleurs et aux employeurs le droit de constituer librement des organisations de leur choix et de s’y affilier. Elle doit donner aux organisations, y compris à celles en exil, la liberté de fonctionner et de défendre les intérêts de leurs membres. En vertu des principes de la convention, cette loi ne devrait pas poser de conditions particulières à l’exercice de la liberté syndicale, en ne prévoyant qu’un simple acte d’enregistrement, et ne pas permettre d’ingérence dans les affaires internes des organisations. Le gouvernement a indiqué qu’il est disposé à travailler de manière confidentielle sur un projet de loi avec l’appui du Bureau. L’élaboration de ce projet doit au contraire être réalisée ouvertement, dans le respect des principes du dialogue social qui découlent de la convention et de la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Pour avancer vers ces objectifs, les membres travailleurs ont proposé que soient examinés et mis en oeuvre tous les instruments et mécanismes, tant juridiques que pratiques, disponibles au sein de l’OIT. Un chargé de liaison spécifique devrait ainsi être nommé pour recevoir des plaintes liées à l’exercice des droits contenus dans la convention, des informations régulières sur le programme de travail du chargé de liaison devant être fournies. Par ailleurs, une nouvelle commission d’enquête relative à l’application de la convention devrait être créée en vertu de la procédure prévue par l’article 26 de la Constitution de l’OIT.

    Les membres employeurs ont estimé que, étant donné qu’aucune information susceptible de modifier la base sur laquelle reposent les conclusions de 2010 de la Commission de la Conférence sur ce cas n’a été fournie, le point de départ des conclusions de cette année devrait être les conclusions de 2010. Deux nouveaux éléments doivent être ajoutés: i) le gouvernement doit être prié de répondre, dès que possible et à temps pour la prochaine session du Conseil d’administration (novembre 2011), aux allégations qui figurent dans la plainte déposée en 2006 par les délégués des travailleurs en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT; et ii) le gouvernement doit être prié de collaborer étroitement avec le BIT sur le projet de loi sur les organisations de travailleurs et d’établir un calendrier pour son adoption, une fois que le BIT aura vérifié que la législation est en conformité avec la convention. A cet égard, il convient d’observer que l’adoption d’une loi n’est pas une fin en soi mais un commencement. Une fois adoptée, la loi en question devra être appliquée en droit et dans la pratique, une autorité judiciaire indépendante devra être en mesure de la faire appliquer. Les membres employeurs ont déclaré être sceptiques quant à ce cas, et ce en dépit du changement de gouvernement et du nouveau système quasi parlementaire. Il n’y a aucun signe apparent de changement: il n’y a pas de démocratie ni de tripartisme ni de libertés publiques, ni de liberté syndicale, mais un climat de peur, de violence et d’intimidation. Les membres employeurs ont réitéré leur demande visant à inclure les conclusions de ce cas dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

    Les membres travailleurs ont soutenu la proposition des membres employeurs d’inclure les conclusions de ce cas dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

    Conclusions

    La commission a pris note de la déclaration faite par le représentant gouvernemental et de la discussion détaillée qui a suivi. La commission a également rappelé qu’elle avait examiné ce cas grave à de nombreuses reprises au cours des deux dernières décennies et que ses conclusions figuraient dans un paragraphe spécial pour défaut continu d’application de la convention depuis 1996.

    La commission a pris note de l’engagement pris par le représentant gouvernemental que le gouvernement fournirait le projet de loi sur les organisations de travailleurs sur une base confidentielle à l’OIT lorsqu’il serait finalisé. En ce qui concerne l’application pratique de la convention, le gouvernement a répété ses déclarations précédentes à l’effet que les gens étaient libres de manifester sans crainte et que les personnes détenues nommées dans les commentaires de la commission d’experts n’étaient pas des travailleurs et leur condamnation n’avait aucun lien avec la liberté syndicale.

    La commission a observé qu’elle devait de nouveau discuter de commentaires graves de la commission d’experts qui a été obligée de déplorer l’absence de progrès concernant les sujets couverts par la convention, ni qu’aucune véritable réponse n’ait été fournie quant aux graves allégations d’arrestation, de détention, de longues peines de prison, de torture et du déni des libertés publiques fondamentales des travailleurs.

    La commission a déploré l’absence de longue date d’un cadre législatif pour la mise en place d’organisations syndicales libres et indépendantes et a pris note de la plainte déposée en vertu de l’article 26 contre le gouvernement en juin 2010 pour non-respect de cette convention.

    La commission a regretté de ne pas disposer d’information détaillée sur le projet de loi mentionné par le gouvernement, malgré les garanties données l’an dernier que des progrès seraient réalisés dans ce domaine suite aux élections de novembre 2010. A la lumière des informations dont elle disposait, la commission n’a pu que conclure que le gouvernement demeurait très loin de la rédaction et de la promulgation de la législation en conformité avec la convention, et encore plus sa mise en oeuvre. En outre, la commission a regretté qu’il n’y ait pas de mécanismes disponibles dans le pays autorisant les plaintes de violations graves des droits syndicaux tels que ceux mentionnés ci-dessus.

    La commission a de nouveau prié instamment le gouvernement, dans les termes les plus forts, d’adopter immédiatement les mesures et mécanismes nécessaires pour s’assurer que tous les travailleurs et les employeurs bénéficient des droits prévus par la convention. A cet égard, elle a de nouveau prié instamment le gouvernement d’abroger les ordonnances nos 2/88 et 6/88, ainsi que la loi sur les associations illégales, et d’assurer un cadre constitutionnel et législatif efficace qui permette pleinement et effectivement l’exercice des droits syndicaux.

    La commission a de nouveau souligné le lien intrinsèque entre la liberté syndicale et la démocratie et a observé avec regret que le gouvernement n’avait toujours pas mis en place les conditions nécessaires à la liberté syndicale qui donnerait de la crédibilité à la transition déclarée vers la démocratie. Elle a donc de nouveau exhorté le gouvernement à prendre des mesures concrètes pour assurer la participation pleine et véritable de tous les secteurs de la société, sans considération de leurs opinions politiques, à l’examen du cadre législatif et de la pratique, de manière à les mettre pleinement en conformité avec la convention sans délai. Elle a en outre rappelé l’importance, pour l’application effective de la convention, de l’accès à un système judiciaire indépendant qui permette l’application de la législation.

    La commission a souligné qu’il était crucial que le gouvernement prenne immédiatement toutes les mesures nécessaires pour assurer un climat dans lequel travailleurs et employeurs puissent exercer leurs droits à la liberté syndicale sans crainte, intimidation, menace ou violence. La commission a continué d’observer avec une extrême préoccupation que les nombreuses personnes détenues visées par de précédents commentaires étaient toujours en prison, malgré les appels à leur libération et sans même bénéficier de la récente amnistie d’envergure accordée par le gouvernement. La commission se trouve donc de nouveau dans l’obligation d’exhorter le gouvernement de veiller à la libération immédiate de: Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min, ainsi que toutes les autres personnes détenues pour avoir exercé leurs libertés publiques fondamentales et leur droit à la liberté syndicale. La commission a de nouveau rappelé les recommandations faites par la commission d’experts et par le Comité de la liberté syndicale pour la reconnaissance des organisations syndicales, y compris la Fédération des syndicats de Birmanie et le Syndicat des gens de mer de Birmanie, et a prié instamment le gouvernement de mettre immédiatement un terme à la pratique consistant à persécuter les travailleurs ou d’autres personnes pour avoir des contacts avec des organisations de travailleurs, y compris celles qui opèrent en exil.

    La commission a également rappelé que la liberté syndicale et le travail forcé ne sauraient être dissociés et elle a réitéré sa précédente demande au gouvernement d’accepter une extension de la présence de l’OIT pour couvrir les questions touchant à la convention et d’établir un mécanisme de plaintes pour les violations des droits syndicaux.

    La commission a prié instamment le gouvernement de transmettre au BIT le projet de loi mentionné ainsi qu’une réponse complète à toutes les questions soulevées dans la plainte sous l’article 26. Elle s’attend à ce que le gouvernement fournisse également cette information et un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises et sur l’adoption d’un calendrier pour l’adoption de la législation requise, pour examen par la commission d’experts à sa réunion de cette année. La commission a considéré qu’elle avait discuté de ce cas grave depuis trop longtemps et ce, sans progrès visibles, concrets et significatifs. Compte tenu de la frustration à laquelle elle est confrontée de manière continuelle, la commission a exhorté le gouvernement à prendre des mesures qui permettraient au Conseil d’administration d’être en mesure d’observer des progrès significatifs sur toutes les questions mentionnées ci-dessus à sa session de novembre.

    La commission a décidé de faire figurer ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport. Elle a également décidé de mentionner ce cas comme un cas de défaut continu d’application de la convention.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 2010, Publication : 99ème session CIT (2010)

    Pas disponible en espagnol.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 2009, Publication : 98ème session CIT (2009)

    Le gouvernement a communiqué les informations écrites suivantes.

    Le membre travailleur délégué à la Conférence internationale du Travail en 2007 avait été élu par la Basic Worker Association (Association de base des travailleurs) qui couvre 11 secteurs. Par le passé, une organisation de premier niveau n’avait jamais encore été constituée. Malgré le fait que le délégué travailleur envoyé représentait la majorité des travailleurs et avait été élu par le secteur d’activité occupant le plus de travailleurs actifs, l’OIT avait élevé une objection à l’encontre du délégué travailleur du Myanmar. Cette fois, suivant les conseils de l’OIT, le délégué des travailleurs vient du secteur de l’industrie textile occupant la majorité des travailleurs et où la plupart des travailleurs sont bien organisés.

    Le référendum sur l’approbation de la Constitution de la République de l’Union du Myanmar a été organisé avec succès dans l’ensemble du pays et approuvé massivement (92,48 pour cent). Les dispositions relatives à l’organisation des syndicats sont prévues au paragraphe 96 du chapitre IV, aux paragraphes 353, 354 et 355 du chapitre VIII et à l’annexe I «Liste de la législation de l’Union du Myanmar» du chapitre XV de la Constitution. Une fois la Constitution entrée en vigueur, les organisations syndicales verront le jour conformément à ces dispositions et pourront mener leurs activités dans l’intérêt des travailleurs.

    En ce qui concerne la reconnaissance de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) en tant qu’organisation légitime, comme il est mentionné dans le paragraphes 1093 b) et e) du 349e rapport du Comité de la liberté syndicale ainsi que dans le rapport de la commission d’expert de 2008, aucun commentaire ne sera fait concernant l’affiliation ou l’association de la FTUB à la Confédération syndicale internationale (CSI), mais il existe de fortes et solides preuves d’activités terroristes et d’attentats à la bombe commis par la FTUB au Myanmar. La FTUB supporte financièrement, participe à ces activités et fournit le matériel explosif dans le but de causer des situations d’instabilité dans le pays. Ces actes terroristes étant interdits par la Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif et la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, le ministère de l’Intérieur a déclaré que la FTUB était un groupe terroriste dans la déclaration no 1/2006 du 12 avril 2006. Par conséquent, il est impossible d’accepter la FTUB comme organisation syndicale légitime.

    Concernant les cinq personnes arrêtées, y compris Mme Ma Shwe Yee Nyunt, après étude des éléments contenus dans les lettres de M. Guy Ryder, secrétaire général de la CSI, et du BIT, il apparaît qu’elles ont admis d’elles-mêmes ne pas être travailleurs ou représenter des travailleurs du Myanmar. Malgré le fait qu’elles soient entrées puis revenues illégalement dans le pays, en violation de l’article 13 (1) de la loi de 1974 sur l’immigration, le gouvernement n’a pris aucune mesure à leur encontre puisqu’elles ont honnêtement admis leur faute en disant la vérité et déclarant ouvertement qu’il n’existait aucun syndicat dans le pays. Elles ont également déclaré avoir accepté l’assistance financière en prétendant être membres d’un syndicat. Ces cinq personnes, y compris Shwe Yee Nyunt, sont entrées et retournées illégalement dans le pays, ont pris contact avec Ei Shwe Zin Nyunt, l’assistant personnel de Maung Maung, et accepté 42 lakhs en monnaie birmane kyats pour prétendre être des syndicalistes. En fait, il a été découvert qu’elles ne représentaient ni les travailleurs du Myanmar et n’étaient pas non plus des travailleurs sinon un groupe de familiers provoquant ce type d’incident avec l’intention d’obtenir l’assistance financière internationale sur la base de fausses informations.

    En ce qui concerne la situation des travailleurs du Myanmar jouissant des droits des travailleurs existant en vertu du droit du travail, la Constitution de la République de l’Union du Myanmar, pour être en accord avec la convention no 87, incorpore la législation sur les syndicats, la négociation collective et les consultations tripartites. En vertu des lois sur le travail existantes, les travailleurs du Myanmar connaissent la négociation collective et la pratiquent. Les conflits entre employeurs et travailleurs sont résolus à travers le procédé de conciliation et de négociation; 411 cas en 2007 et 365 cas en 2008, impliquant plus de 2 000 à 3 000 travailleurs, et dans lesquels et les employeurs et les travailleurs ont participé et le Comité local de surveillance pour les travailleurs a exercé le rôle de représentant gouvernemental, ont été résolus en vertu des principes tripartites.

    En ce qui concerne les allégations de meurtre, arrestation, détention, torture, condamnation à de nombreuses années de prison de syndicalistes pour l’exercice ordinaire de leurs activités syndicales, des mesures ont été prises non pas en raison de l’exercice d’activités syndicales mais en raison de la violation des lois en vigueur dans le pays et des tentatives d’incitation à la haine et le mépris envers le gouvernement. Une fois la Constitution entrée en vigueur, les organisations syndicales verront le jour conformément à ces dispositions, et les commentaires effectués par la CSI et les observations de la commission d’experts se résoudront d’eux-mêmes en temps voulu.

    En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré que le Myanmar est en voie de devenir une société démocratique et qu’il a fait des progrès considérables dans la mise en oeuvre d’une feuille de route en sept étapes en direction de la démocratie. La nouvelle Constitution, qui constitue la quatrième étape de ce processus, a été approuvée par 92,48 pour cent des électeurs, ce qui témoigne du soutien manifeste de la population envers cette Constitution. La cinquième étape de la feuille de route qui en compte sept sera la tenue d’élections libres et équitables prévues pour l’année 2010 conformément à la Constitution.

    Les droits des citoyens, dont le droit à exprimer librement leurs convictions et leurs opinions, le droit à se réunir pacifiquement et le droit de former des associations et des syndicats, sont prévus explicitement à l’article 254, alinéas (a), (b) et (c), de la nouvelle Constitution. L’article 96 de la nouvelle Constitution stipule que l’organe délibérant adoptera des lois sur les organisations syndicales dont la Liste de la législation de l’Union du Myanmar, annexe 1, alinéa (r). La nouvelle loi promulguée devra être conforme à la convention no 87, de même qu’à la Constitution. Le représentant est convaincu que les travailleurs du Myanmar seront en mesure de constituer leurs propres associations et de jouir des droits fondamentaux prévus au chapitre VIII, article 354, de la Constitution, lorsque ce nouvel instrument sera entré en vigueur après les élections de 2010. Il ne serait même pas juridiquement fondé de demander que la Constitution soit modifiée.

    Le représentant gouvernemental a ajouté que le Myanmar coopère avec l’OIT dans le but de s’acquitter de ses obligations au titre des diverses conventions qu’il a ratifiées. Cela ressort clairement des informations détaillées qu’il communique régulièrement en réponse aux questions ou demandes d’éclaircissements de l’OIT.

    Pour compléter les informations données par écrit par son gouvernement, le représentant a tenu à souligner que les six travailleurs qui ont été arrêtés le 1er mai 2007 ne l’ont pas été pour avoir commémorer cette journée, mais pour avoir enfreint la loi, s’être livrés à des activités illégales et avoir tenté de commettre des actes terroristes dans le pays. Des preuves solides démontrent que ces personnes recevaient des instructions, une formation et une aide financière de ce qu’il est convenu d’appeler la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), association illégale et groupe terroriste en exil qui fomente des attentats à la bombe et des actes terroristes pour provoquer des troubles dans le pays. Demander que l’on les libère immédiatement serait un acte d’ingérence et constituerait une atteinte à l’ordre juridique interne d’un Etat souverain. Ce serait contraire aux principes fondamentaux du droit international public de même qu’à l’article 8 de la convention no 87, qui prévoit que la législation du pays doit être respectée.

    S’agissant d’U Tin Hla, le représentant gouvernemental a déclaré que ce serait une pure perte de temps et de moyens que de se pencher sur une affaire qui n’est qu’un tissu de faits ou incidents fictifs. U Tin Hla n’est ni un dirigeant syndical ni même un simple syndicaliste. Il a travaillé comme superviseur dans les chemins de fer, où il n’y a pas de syndicat. Il a été interpellé par la police au moment de commettre un crime, en possession d’explosifs, et il a été poursuivi de ce chef et condamné en conséquence.

    Récemment, il y a eu une prétendue conférence organisée par Maung Maung à Mae Sok, en Thaïlande. Plus précisément, quatre personnes, dont Ma Shwe Yi Nyunt, y ont participé. En fait, aucune de ces personnes n’est un travailleur ni ne représente des travailleurs. Il s’agit de membres d’une même parentèle ayant finalement noué des liens avec Maung Maung. Pour ce groupe de personnes, leur association avec Maung Maung était punissable de par les lois en vigueur au Myanmar et au regard des lois de n’importe quel pays qui combat le terrorisme. Lors de l’enquête menée à leur retour, ces personnes ont révélé qu’elles n’étaient ni des travailleurs ni des représentants de travailleurs du Myanmar quels qu’ils soient, qu’on leur avait demandé de se rendre à Mae Sok pour une toute autre raison et qu’elles avaient accepté 4,2 millions de kyats en devises du Myanmar. Le but de leur franchissement de la frontière n’était autre qu’une réunion entre parents et amis financée par Maung Maung. Ces faits ont également été révélés par ces personnes lors de leur entretien avec le chargé de liaison du BIT, le 25 avril 2009. Le gouvernement déclare avoir documenté intégralement ces faits. Ces personnes ayant été victimes d’une prétendue conférence fabriquée de toutes pièces par Maung Maung et ayant admis qu’elles avaient ainsi agi sans être conscientes de la portée de leurs actes, le gouvernement a stoppé l’enquête et leur a pardonné, dans le meilleur esprit de coopération qui soit avec l’OIT.

    S’agissant de la FTUB, de l’avis du représentant gouvernemental, il est regrettable que Maung Maung, recherché par la justice dans son pays et en fuite dans un pays voisin où il a rejoint des organisations agissant contre le gouvernement, puisse prendre part aux procédures de l’OIT. Cet individu a été secrétaire général de ce qu’il est convenu d’appeler la FTUB ainsi que du Conseil national de l’Union de Birmanie (NCUB), organisme sympathisant avec l’Alliance démocratique de Birmanie et le Front démocratique national (NDF), composés de terroristes en exil, prompts à recourir à des actes de violence, comme de faire exploser des bombes dans des lieux publics. Leurs agissements étant néfastes pour la population, ainsi que pour la paix, la stabilité et la primauté du droit dans le pays, ils ont été déclarés hors-la-loi. Les agissements terroristes de cette nature sont condamnés par la Convention des Nations Unies pour la répression du financement du terrorisme, à laquelle le Myanmar est partie. Le ministère de l’Intérieur a publié par une déclaration no 1/2006 du 12 avril 2006 que la FTUB est un organisme terroriste et que Maung Maung est un terroriste.

    En conclusion, le représentant gouvernemental a déclaré que le Myanmar est pleinement conscient de ses obligations au titre de la convention n° 87 et que des mesures sont prises pour revoir la législation existante en vue d’en contrôler la conformité par rapport aux instruments internationaux touchant aux droits de l’homme et par rapport à la Constitution, notamment à son chapitre VIII. Considérant la nature et l’ampleur de la tâche, il ne faut pas s’attendre à ce que cet exercice soit mené à bien du jour au lendemain. Le Myanmar prend des dispositions et fait tout ce qui est en son pouvoir pour se conformer aux obligations découlant de la convention no 87 et ce n’est qu’une question de temps avant qu’il ne parvienne à cet objectif.

    Les membres travailleurs ont déclaré que la présente commission a jusqu’à présent rarement eu l’occasion de dresser un bilan aussi accablant d’arrestations, d’emprisonnements, voire d’assassinats, de personnes à raison du simple exercice d’activités syndicales ou politiques. Aujourd’hui, 91 personnes sont toujours en prison suite à la répression du mouvement de protestation de septembre 2007. Six travailleurs – Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min – ont été condamnés pour avoir participé aux manifestations du 1er mai 2007 et pour avoir des liens avec la FTUB. Le Comité de la liberté syndicale a demandé leur libération immédiate. Un membre du syndicat de l’industrie pétrochimique, Myo Aung Thant, est emprisonné depuis près de douze ans pour avoir eu des contacts avec la FTUB. Le Comité de la liberté syndicale a demandé sa libération immédiate. Un membre de la FTUB, dirigeant du syndicat de l’enseignement, M. Saw Mya Than, a été tué par l’armée en représailles d’actes présentés par celle-ci comme des actes d’insurrection. Le Comité de la liberté syndicale a demandé une enquête indépendante. M. U Tin Hla, électricien dans les chemins de fer, a été arrêté avec toute sa famille le 20 novembre 2007 puis condamné à sept ans de prison sur le chef de possession d’explosifs, explosifs qui n’étaient qu’une inoffensive boîte à outils, mais en vérité pour avoir incité les cheminots à soutenir le mouvement de septembre 2007. Mme Su Su Nway, qui avait saisi l’OIT d’une plainte pour travail forcé ayant abouti à la condamnation des quatre coupables, a été arrêtée en novembre 2007 et maintenue en détention en raison de son soutien au mouvement de septembre 2007. Deux militantes syndicales, Lay Mon et Myint Soe, sont portées disparues depuis fin septembre 2007 après avoir participé activement au mouvement de protestation. En outre, en 2006, Thein Win, militant de la FTUB, a été arrêté avec sept membres de sa famille. Trois de ses enfants ont été condamnés à dix-huit ans de prison. Un de ses enfants a été torturé et se trouve maintenant atteint de troubles mentaux. Cinq militants syndicaux ou politiques, U Aung Thein, Khin Maung Win, Ma Khin Mar Soe, Ma Thein Thein Aye et U Aung Moe, ont été arrêtés en mars 2006 puis condamnés à de longues peines de prison pour avoir communiqué des informations à la FTUB et d’autres organisations pacifiques considérées comme illégales par le régime. Sur les 934 ouvriers de l’usine Hae Wae Garment qui avaient fait grève le 2 mai 2006 pour obtenir de meilleures conditions de travail, 48 ont été convoqués devant les autorités et enjoints de signer une déclaration reniant leurs revendications. Mme Naw Bey Bey, du syndicat des travailleurs de la santé de l’Etat de Karen, a été condamnée à quatre ans de travaux forcés. M. Saw Thoo Di, militant du syndicat des travailleurs de l’agriculture de l’Etat de Karen, a été arrêté, torturé et assassiné le 28 avril 2006 par le bataillon d’infanterie 83. Le 30 avril 2006, le village de Pha a été bombardé au mortier et à la grenade parce que les autorités pensaient qu’il s’y tenait une manifestation de la FTUB et de la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK). En juin 2005, dix militants de la FTUB ont été arrêtés puis torturés et condamnés par un tribunal spécial siégeant à l’intérieur de la prison à des peines de trois à vingt-cinq ans de prison pour avoir transmis par téléphone cellulaire des informations à l’OIT et au mouvement syndical international par l’intermédiaire de la FTUB.

    Les membres travailleurs ont déclaré qu’il appartient à la présente commission de dénoncer tous ces faits graves d’arrestations, de condamnations à de longues peines de prison ou encore de meurtres réprimant le simple exercice d’activités syndicales ordinaires et normales, comme le fait de parler en public de la situation économique et sociale, de commémorer le 1er mai ou encore de communiquer des informations au mouvement syndical. Les autorités du Myanmar nient systématiquement qu’il s’agit là de violations de la convention no 87. Elles se complaisent à invoquer les dispositions de l’article 8 de la convention no 87 exprimant l’obligation, pour les syndicats, de respecter la légalité, mais elles ignorent, ce faisant, que ce même article proclame que la législation nationale ne devra pas porter atteinte aux garanties prévues par cette convention. Tout Etat Membre de l’OIT a l’obligation de respecter les conventions qu’il a librement ratifiées. La vérité est qu’il n’existe aujourd’hui au Myanmar aucune base légale qui fonderait la liberté syndicale. La nouvelle Constitution subordonne le droit d’association «aux lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté du droit et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société, l’ordre public et la moralité». Plusieurs dispositions législatives restreignent directement ou indirectement la liberté syndicale: l’ordonnance no 6/88 imposant une autorisation préalable pour la constitution d’une organisation; l’ordonnance no 2/88 interdisant les réunions, cortèges ou rassemblements de cinq personnes ou plus; la loi de 1908 sur les associations illégales; la loi de 1926 sur les syndicats; la loi de 1964 instaurant un système obligatoire d’organisation et de représentation des travailleurs. Les membres travailleurs ont conclu qu’il n’existe en substance aucune liberté syndicale au Myanmar.

    Les membres employeurs ont rappelé que le gouvernement a ratifié la convention il y a plus de cinquante ans. Le cas présent est examiné depuis 1991 (la dernière fois en 2005) et a fait l’objet, pendant de nombreuses années, d’un paragraphe spécial étant donné le refus persistant du gouvernement d’appliquer la convention.

    L’observation détaillée de cette année comporte une double note de bas de page et mentionne la répression violente du soulèvement de 2007; l’arrestation et l’interrogatoire musclé et les lourdes peines de prison infligées à six travailleurs qui ont participé aux événements de mai 2007; les actes de harcèlement contre leurs avocats qui les ont poussés à se dessaisir de l’affaire, et plusieurs autres peines de prison pour association avec la FTUB et pour avoir traversé illégalement la frontière. Concernant l’affaire en question, le Comité de la liberté syndicale a conclu dans son 349e rapport qu’il est «indéniable que les six personnes ont été punies pour avoir exercé leurs droits fondamentaux que sont la liberté d’association et la liberté d’expression». La commission d’experts a noté en outre la détention et l’incarcération d’une longue liste d’autres militants syndicalistes qui figure dans les observations soumises par la CSI.

    Au vu de ce qui précède, les membres employeurs estiment avec la commission d’experts qu’il y a un manque de libertés civiles au Myanmar, en particulier la liberté de circulation, la liberté d’expression, la liberté de réunion, la liberté d’association et le droit à un procès équitable. Toutes ces libertés civiles sont fondamentales si l’on veut que la convention no 87 devienne une réalité. Les membres employeurs ont exprimé leur conviction qu’il n’y a pas de syndicats libres et indépendants au Myanmar, étant donné que toutes les activités des syndicats constituent des délits sanctionnés par la loi, ce que ne nie pas le gouvernement.

    Les membres employeurs ont exprimé des doutes quant à la déclaration du gouvernement selon laquelle l’amendement constitutionnel concernant la liberté d’association donnera effet à la convention. En l’absence d’une législation portant application des droits contenus dans la convention, toute liberté civile accordée sera dénuée d’une quelconque protection. Ils ont par conséquent demandé instamment au gouvernement de communiquer pour examen à la commission d’experts, dès que possible, les textes préliminaires de règlements et de lois d’application ainsi que de la Constitution qui auraient dus être soumis depuis longtemps.

    A propos des plaintes relatives aux pouvoirs du représentant actuel des travailleurs de la délégation du Myanmar, les membres employeurs ont rappelé que, l’année dernière, le membre travailleur s’est avéré être un fonctionnaire du régime. De plus, les membres employeurs pensent que l’écart entre la délégation gouvernementale et les représentations de travailleurs et d’employeurs comptant chacune un seul délégué témoigne de l’absence de véritable tripartisme, essentiel à la liberté syndicale.

    La membre gouvernementale des Etats-Unis a rappelé que la commission d’experts avait usé du langage le plus énergique pour déplorer la défaillance persistante des autorités birmanes à garantir la liberté syndicale en droit et en pratique. Il est indéniable et profondément inquiétant que le peuple birman soit puni pour l’exercice de ses droits fondamentaux à la liberté syndicale et à la liberté d’expression, et que les activités syndicales les plus ordinaires soient considérées comme des infractions pénales sévèrement punissables. La commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale ont condamné bien des cas dans lesquels les libertés civiles fondamentales des membres de syndicats, dirigeants et sympathisants, avaient été violées, y compris le recours à l’intimidation, la torture, l’emprisonnement et le meurtre. Les organes de contrôle ont insisté de manière répétée qu’un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que si les droits de l’homme sont respectés.

    Elle s’est référée aux nombreuses restrictions légales persistantes au droit des travailleurs de constituer, de s’affilier et de participer aux organisations de leur choix. Alors que les autorités birmanes soutiennent que le cadre législatif a été établi par la nouvelle Constitution et que les mesures ont été prises pour l’établissement des syndicats de base, la commission d’experts note avec un profond regret que les nouvelles dispositions de la Constitution permettent la continuité des violations faites à la liberté syndicale en droit et en pratique. Elle note également avec regret l’absence de toute consultation sérieuse avec les partenaires sociaux et la société civile, qui viserait à créer un cadre garantissant le respect de la liberté syndicale ainsi que l’exercice de celle-ci.

    L’oratrice regrette la défaillance des autorités birmanes à considérer sérieusement les points de vue des organes de contrôle de l’OIT en ce qui concerne le refus continu et sans fondement des autorités de reconnaitre la FTUB comme une organisation syndicale légitime. Elle regrette également la défaillance persistante des autorités birmanes à respecter leurs obligations internationales légales acceptées volontairement il y a plus de cinquante ans. Il est donc difficile de conclure qu’il y a eu de réels progrès pour remédier à la situation sérieuse et urgente que la commission d’experts examine depuis tant d’années.

    En 2005, la Commission de la Conférence avait conclu que la persistance du travail forcé en Birmanie ne pouvait pas être dissociée de l’absence de liberté syndicale qui prévaut. Si les autorités birmanes sont sérieusement engagées dans l’élimination du travail forcé, elles devraient reconnaître qu’une forte indépendance des organisations de travailleurs joue un rôle significatif dans l’accomplissement de cet objectif. L’orateur a exprimé l’espoir que les autorités birmanes acceptent d’elles-mêmes l’assistance et le conseil du BIT et qu’elles prennent les mesures nécessaires pour mettre la législation et la pratique en conformité avec la convention no 87.

    Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a déclaré que, en 2008, un marin birman est mort et un autre a été grièvement blessé dans un accident. La division du contrôle de l’embauche des marins (SECD), section de la branche administrative de la junte pour les gens de mer de la Birmanie, a fait pression sur les familles de ces gens de mer pour qu’ils ne communiquent pas avec la Fédération internationale du transport (FIT), qui protège les gens de mer dans le monde, et ne demandent pas une indemnisation directement auprès de l’entreprise, mais qu’ils attendent l’indemnisation devant être attribuée en application des normes mises en oeuvre par le Conseil d’Etat pour la paix et le développement (SPDC). Ce n’est pas un cas isolé. Il s’agit d’un exemple des méthodes utilisées par le SPDC pour contrôler systématiquement les travailleurs birmans et les priver de leurs droits.

    Les marins de la Birmanie travaillent en vertu de contrats qui procurent moins de 50 pour cent de la norme salariale établie par la FIT. Si les gens de mer reçoivent un salaire plus élevé que ce qui est prévu dans le contrat, les marins sont requis par la SECD de retourner la rémunération supplémentaire aux entreprises, sinon elle les exclut pour une période pouvant aller jusqu’à trois ans.

    Le membre de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) qui a travaillé sur le navire de formation «Global Mariner» de la FIT est désormais devenu inspecteur de la FIT à Houston, au Texas, et il traite de ces cas au nom de l’UES/FIT et de leurs familles. Son plus grand défi en venant en aide aux marins et à leurs familles ne provient pas des entreprises pour lesquelles ils travaillent, mais plutôt de la SECD ou du SPDC, qui contrôle la SECD.

    En Birmanie, la liberté syndicale et la liberté d’expression sont strictement interdites. Les organisations de toutes sortes, que ce soit parmi les travailleurs ou parmi les citoyens, ouvertement ou derrière des portes closes, sont rapidement réprimées grâce au vaste réseau d’informateurs du SPDC, à l’utilisation régulière de la force brutale et à la manipulation manifeste du système judiciaire via l’utilisation de fausses inculpations.

    Les travailleurs d’usine dans les zones industrielles du textile et de l’industrie du vêtement travaillent huit heures par jour, cinq jours par semaine, pour l’équivalent de 50 cents par jour. Ce n’est qu’avec des heures supplémentaires obligatoires et du travail le week-end qu’ils arrivent à gagner jusqu’à 1 dollar par jour. Même si les travailleurs sont en mesure de gagner 1 dollar par jour, la rémunération est souvent payée avec du retard. Si les travailleurs tentent de s’organiser pour demander collectivement le paiement de leur salaire, une fois le conflit terminé, les travailleurs qui ont pris l’initiative de l’organisation sont congédiés sur la base d’un autre motif qui est utilisé dans le but de justifier leur renvoi.

    Les travailleurs de l’agriculture sont souvent obligés de développer des cultures faisant partie de projets du gouvernement, par exemple celles destinées aux biocarburants et la canne à sucre, ce qui n’est pas dans leur intérêt. Dans ce processus, de nombreuses personnes ont été expulsées de leurs terres sans aucune possibilité de s’y opposer, en violation de la convention (nº 11) sur le droit d’association (agriculture), 1921, ratifiée.

    En 1988, lorsque la FTUB a commencé à former des syndicats et à participer aux efforts visant à mettre en évidence les problèmes sociaux et économiques en Birmanie, les travailleurs ont été licenciés, ont été attaqués par le régime militaire et ont été forcés de quitter le pays ou s’exposaient à une arrestation. Les membres du syndicat ont été arrêtés et persécutés par le régime, leurs familles ont subi des pressions et ont été isolées par le SPDC et ses malfrats. A l’heure actuelle, il y a 38 activistes pour les droits des travailleurs en détention – tous grâce à de fausses inculpations qui ont été qualifiées après leur arrestation.

    Les pressions exercées par le SPDC ont rendu tout à fait impossible la syndicalisation en Birmanie. La FTUB a dû travailler dix-huit ans afin de tenir son premier congrès en mars 2009. Le retard est dû au fait que le SPDC a continué d’exécuter les ordonnances nos 2/88 et 6/88 qui, respectivement, interdisent les réunions de cinq personnes ou plus et exigent l’autorisation du SPDC pour former n’importe quel type d’organisation. Les arrestations des délégués de la FTUB après le congrès en sont la preuve. Ces ordonnances constituent des violations manifestes par le SPDC de ses obligations découlant des conventions de l’OIT ratifiées.

    La Birmanie doit procéder à une réforme globale de sa Constitution et de sa législation afin que les droits des travailleurs soient protégés. Les travailleurs doivent non seulement bénéficier de droits garantis, tels que la liberté syndicale et d’expression, mais ils doivent également être informés de leurs droits. La junte a orchestré un vote pour élire un représentant des travailleurs. Faire voter les travailleurs pour un représentant, sans qu’ils sachent pourquoi ils votent, et avoir un représentant qui ne comprend pas ses responsabilités n’est pas le meilleur moyen d’introduire la liberté syndicale ou de développer des syndicats indépendants. Cela ne devrait pas non plus constituer un moyen d’éviter la mise en oeuvre des recommandations de l’OIT, comme l’a fait le SPDC.

    Tel qu’indiqué par la commission d’experts, l’article 354 de la nouvelle Constitution de la junte, imposée sous la contrainte, donnerait lieu à des violations de la liberté syndicale, en droit et dans la pratique. L’article 354 est l’une des raisons pour lesquelles la FTUB a rejeté la Constitution du SPDC.

    L’orateur a demandé que le BIT, en consultation avec les membres travailleurs, émette des recommandations claires au SPDC sur les mesures qu’il doit prendre afin de répondre à ses obligations conventionnelles, de manière à ce que sa législation reconnaisse la liberté syndicale et soit mise en conformité avec les normes internationales, et ces mesures devraient être prises dans un certain délai. Les mesures d’exécution devraient être préparées par le BIT afin d’éviter de nouveaux retards de la part de la junte. L’orateur a lancé un appel à la pleine reconnaissance de la FTUB comme syndicat légitime, travaillant de manière pacifique et non violente en Birmanie. L’orateur a demandé à l’OIT et à l’ensemble de ses Membres de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour collaborer avec le BIT, particulièrement en ce qui concerne la révision nécessaire de la Constitution de la junte avant qu’elle ne soit imposée au peuple en 2010.

    Le membre gouvernemental de l’Inde a écouté attentivement la déclaration du représentant gouvernemental et a exprimé sa satisfaction concernant les progrès tangibles qui ont été faits et la coopération renforcée entre le gouvernement et le BIT. Il est satisfaisant de constater que les mécanismes mutuellement approuvés par le gouvernement du Myanmar et le BIT fonctionnent avec efficacité.

    Le gouvernement a réaffirmé que la nouvelle Constitution garantit les droits des citoyens, y compris le droit d’exprimer librement ses convictions et opinions, le droit de rassemblement pacifique et le droit d’association et de constituer des syndicats. Le gouvernement a également affirmé que les nouvelles lois qui doivent être adoptées sur les organisations du travail seraient conformes aux dispositions de la convention no 87 et que des centaines de lois nationales sont actuellement en cours de révision pour assurer leur conformité aux dispositions de la nouvelle Constitution et aux normes internationales en matière de droits de l’homme. Dans ces circonstances, l’Inde a encouragé une fois encore à poursuivre le dialogue et la coopération entre le Myanmar et le BIT.

    Le membre travailleur de l’Indonésie a exprimé son soutien total à la recommandation faite par certains Membres que la FTUB soit reconnue comme un syndicat légitime. Ayant participé au premier congrès de la FTUB qui a eu lieu entre le 22 et le 24 mars 2009 et réuni des représentants de 20 syndicats d’Etats membres de l’ANASE, le secrétaire général de la CSI pour l’Asie-Pacifique, et au niveau européen des représentants de la CISL et du FNV, a déclaré qu’il avait été impressionné par le déroulement et les résultats de ce congrès. Il a réfuté l’allégation du gouvernement selon laquelle la FTUB n’est représentée nulle part auprès de la main-d’oeuvre du pays. Le congrès de la FTUB a réuni 150 délégués, dont la majorité travaillent à l’intérieur du pays dans des secteurs tels que les transports, l’éducation, le textile, l’industrie vestimentaire, les services publics, l’agriculture, la santé et l’exploitation minière. Il ressort des discussions menées avec ces personnes qu’un véritable syndicat comme la FTUB est nécessaire pour protéger les droits des travailleurs et promouvoir le travail décent en Birmanie. Malgré les nombreuses restrictions auxquelles elle est confrontée, le nombre de membres de la FTUB continue d’augmenter du fait que davantage de travailleurs veulent s’y inscrire. En outre, un nombre plus important de travailleurs écoutent la radio FTUB, qui est retransmise à l’intérieur du pays. Comme la CSI pour l’Asie-Pacifique et l’ASEAN Trade Union Council (ATUC) ont exprimé leur engagement à accepter la FTUB comme membre, l’orateur a exprimé l’espoir que le gouvernement serait à même de reconnaître ce syndicat.

    Il a rappelé que plusieurs déclarations ont été adoptées lors du congrès de la FTUB, y compris des appels à la libération immédiate de Daw Aung San Suu Kyi et de tous les prisonniers politiques, y compris des dirigeants d’ethnies et de syndicats, ainsi que la reconnaissance du rôle fondamental du BIT dans la lutte contre le travail forcé et la promotion de la liberté syndicale. Enfin, il a souligné qu’il n’y a pas de preuve à l’appui de l’allégation selon laquelle la FTUB est une organisation terroriste. Une organisation qui lutte contre la dictature et pour la protection des droits des travailleurs par la voie démocratique et par des moyens non violents ne peut pas être considérée comme une organisation terroriste.

    Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a reconnu qu’il est important pour les Etats Membres de l’OIT de respecter les obligations qu’ils ont contractées en ce qui concerne l’application des conventions internationales du travail. Après avoir écouté attentivement le représentant gouvernemental, il a relevé que le pays s’est engagé dans une réforme constitutionnelle de grande ampleur. La nouvelle Constitution consacre la liberté syndicale et la liberté d’association. En outre, une nouvelle loi sur les syndicats va être adoptée. Il est indispensable de renforcer la coopération entre le BIT et le gouvernement pour assurer la réussite des réformes entreprises sur le plan législatif. L’orateur a exprimé le vif espoir que cette coopération soit couronnée de succès.

    La membre travailleuse de la Suède, s’exprimant au nom des organisations syndicales des pays nordiques, a déclaré que les pays qui ne permettent pas les syndicats libres et démocratiques n’atteindront jamais une croissance durable ou la justice sociale. La Birmanie est l’un de ces pays; l’absence de liberté syndicale a conduit à la généralisation de la pauvreté, à l’exclusion sociale, et à une croissance négative en général. Déplorant l’absence de progrès dans la situation nationale, bien que la commission traite ce cas, année après année, elle a exhorté le gouvernement à assurer le respect de la liberté syndicale et à mettre un terme à la période de répression qui perdure depuis plus de cinquante ans. Elle a en outre exprimé son soutien aux appels lancés par la CSI et la FTUB en faveur de l’adoption de mesures plus efficaces contre le gouvernement en vue de conduire à des changements.

    L’étiquetage de la FTUB comme étant une organisation terroriste illégale est totalement inacceptable. La FTUB est un syndicat démocratique représentant les travailleurs qui a, il y a quelques mois seulement, organisé avec succès son premier congrès, et il y a lieu de la féliciter pour cette réalisation. Les élections nationales qui auront lieu l’an prochain, lesquelles seront fondées sur la nouvelle Constitution, n’apporteront pas d’amélioration à la situation du pays. Les groupes ethniques seront exclus de ces élections, les militaires conserveront 25 pour cent des sièges au parlement, et les gens de nationalité birmane qui vivent en dehors de la Birmanie depuis plus de cinq ans ne seront pas autorisés à voter. L’élection ne sera pas une élection libre. L’oratrice a prié instamment le gouvernement de modifier la Constitution pour permettre à toutes les personnes et parties de participer au processus ainsi que d’autoriser des syndicats libres et indépendants, en accord avec les commentaires de la commission d’experts.

    Elle a déclaré que, après plus de cinq décennies de dictature, la population du pays est désormais majoritairement pauvre. L’armée et ses dirigeants sont les seuls qui se sont enrichis alors que, pour les travailleurs, la situation est extrêmement grave; le coût de la nourriture est si honteusement élevé que les familles seraient souvent affamées, si les deux parents ne travaillaient pas tous les jours. Le fait d’autoriser les syndicats démocratiques tels que la FTUB à exercer les droits consacrés dans la convention no 87 est la seule façon de changer cette situation déplorable et de s’engager plutôt sur la voie de la prospérité et de la justice sociale pour l’ensemble de la nation.

    Le membre gouvernemental de la Chine a indiqué qu’il faut tenir compte des défis auxquels le Myanmar est confronté. Des progrès ont été enregistrés sur la voie de la démocratisation. Le gouvernement étudie les mesures à prendre sur le plan interne pour se conformer aux conventions qu’il a ratifiées, et de nouvelles lois ont été adoptées dans le domaine du travail. Ces éléments reflètent la volonté du gouvernement de promouvoir les droits de l’homme et de protéger les travailleurs. L’orateur a exprimé l’espoir que le BIT poursuive le dialogue avec le gouvernement. L’assistance technique du Bureau est indispensable pour le peuple du Myanmar.

    Le membre gouvernemental du Cambodge a exprimé sa satisfaction pour les progrès réalisés par le Myanmar s’agissant de l’adoption de la nouvelle Constitution qui comprend un chapitre sur les droits et obligations fondamentaux des citoyens, et garantit le droit à la liberté d’expression, le droit de rassemblement pacifique et le droit de former des associations et des syndicats. Beaucoup de lois et règlements nationaux sont actuellement en cours de révision, en vue de déterminer la conformité de la nouvelle Constitution du Myanmar aux normes internationales relatives aux droits de l’homme. Ces progrès récents démontrent clairement l’engagement du gouvernement à se conformer aux dispositions de la convention no 87. Malgré la nécessité d’un réel changement à cet égard, l’orateur s’est dit convaincu que, avec une excellente coopération entre le gouvernement et le BIT, la volonté d’appliquer la convention no 87 se développera progressivement dans tout le pays. Dans ce contexte, le Cambodge encourage vivement la coopération entre le gouvernement et le BIT, en particulier dans le processus de révision des lois et règlements concernés.

    Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que peut-être aucun autre pays que la Birmanie n’est plus coupable de violations des droits humains fondamentaux inscrits dans la Charte de l’Organisation des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et les conventions de l’OIT. En septembre 2007, le peuple birman a organisé son plus grand soulèvement social et politique depuis 1988, lorsque les militaires ont massacré 3 000 personnes. La répression de 2007 a provoqué au moins 110 morts et des milliers de blessés. Etant donné qu’il est bien établi que la Birmanie persécute ses citoyens lorsqu’ils tentent d’exercer leurs droits fondamentaux, et que cela suscite des condamnations dans le monde entier, année après année, il est triste de réaliser que les violations des droits de l’homme – y compris les droits énoncés dans la convention no 87 – continuent de se produire à un rythme acharné et impénitent. La convention no 87 garantit aux travailleurs des droits en matière de liberté syndicale, sans crainte de discrimination, de harcèlement, d’emprisonnement ou de torture, et l’article 3 de la convention interdit expressément aux autorités publiques de s’ingérer dans ce droit ou d’entraver son exercice légal. De telles ingérences, toutefois, sont précisément le genre de conduite que le gouvernement continue d’afficher à l’égard de l’exercice de la liberté syndicale.

    Le rapport de la commission d’experts contient des renseignements tels que l’arrestation et l’interrogatoire de six travailleurs pour avoir participé à la cérémonie du 1er mai 2007 à l’«American Center» de Rangoon. De plus, de graves ingérences dans la représentation juridique des parties ont eu lieu, et celles-ci se sont vu imposer des peines d’emprisonnement de vingt ans pour sédition, tandis que quatre autres ont été condamnées à des peines de cinq ans de prison pour association avec la FTUB. Ces actions constituent une profonde atteinte aux droits de l’homme. Elles servent également à intimider tous ceux qui veulent exercer leurs droits en vertu de la convention no 87 et à envoyer un message clair aux travailleurs que toute tentative d’exercer le droit fondamental à la liberté syndicale entraîne des sanctions sévères, y compris d’être qualifié de terroriste. L’orateur a demandé la libération immédiate et l’indemnisation intégrale de tous les prisonniers politiques, y compris tous les défenseurs des droits de l’homme et les militants syndicaux. Le gouvernement doit envoyer un message clair et sans équivoque à l’effet qu’il n’aura pas recours à l’emprisonnement ou au travail forcé dans le but de s’ingérer dans le droit à la liberté syndicale.

    L’orateur a déploré le fait que la Constitution de 2008 permet au gouvernement de continuer à porter atteinte aux garanties prévues par la convention no 87. Les dispositions de la nouvelle Constitution sur la liberté syndicale sont lamentablement insuffisantes, vagues et manquent de procédures permettant leur mise en oeuvre ou leur exécution. En outre, les vagues droits qui sont mentionnés dans la nouvelle Constitution sont affaiblis par de grossières exceptions, telles que la limitation de ces droits par des «lois promulguées pour la sûreté de l’Etat, la prévalence de la loi et de l’ordre, la paix et la tranquillité publiques ou l’ordre public et les bonnes mœurs». Ces dérogations rendent le principe de la liberté syndicale pratiquement dénué de sens. En outre, les antécédents de violations soutenues des droits de l’homme en Birmanie soulèvent un sérieux doute quant à savoir si ces exceptions relatives à «la loi et l’ordre» seront appliquées de manière légitime et restrictive; les exceptions n’ont guère pour effet de susciter la confiance dans un régime qui a démontré maintes et maintes fois, en rhétorique et dans les faits, qu’il doit encore reconnaître les droits consacrés dans la convention no 87. Rappelant que, l’an dernier, les conclusions de la commission avaient exprimé de sérieuses préoccupations sur les dispositions restrictives de la Constitution et observant, d’autre part, que le gouvernement n’a pas réussi à agir sur cette question, l’orateur a insisté sur la nécessité de demander à nouveau dans les conclusions que des amendements soient apportés à la Constitution. Il a conclu en priant instamment le Bureau de surveiller et de signaler toutes les violations de la convention no 87 en Birmanie.

    La membre gouvernementale de Cuba a déclaré que, compte tenu de la déclaration du représentant gouvernemental du Myanmar, il est important de souligner, dans le présent cas, que l’article 8 de la convention no 87 prévoit que les syndicats doivent respecter la légalité et que la législation nationale n’affaiblit pas les garanties de la convention sur la liberté syndicale. La représentante gouvernementale a fait état de l’adoption d’une nouvelle Constitution, qui autorise l’activité syndicale, et il conviendrait d’encourager la volonté du gouvernement du Myanmar de déployer des efforts pour établir une nation pacifique, ainsi que la coopération et le dialogue entre le gouvernement et le BIT, en vue de donner effet à la convention no 87 sur la liberté syndicale. Pour terminer, l’oratrice a appuyé la demande de la commission d’experts visant à ce que le gouvernement fasse rapport sur les nouveaux progrès dans l’application de la convention, à la lumière des nouvelles dispositions constitutionnelles.

    La membre travailleuse du Japon, soutenant les déclarations faites par les membres travailleurs, a noté qu’il s’agit de l’un des cas les plus graves parmi ceux devant être examinés, un cas qui a été discuté à maintes et maintes reprises et qui a de nombreuses fois fait l’objet d’un paragraphe spécial. Aucune mesure concrète n’a encore été prise pour édicter une législation permettant de garantir à tous les travailleurs le droit de constituer et de s’affilier à des organisations de leur choix. Au contraire, le gouvernement a indiqué qu’il maintiendrait pour quelque temps encore les ordonnances nos 2/88 et 6/88 que la commission d’experts et la Commission de la Conférence ont exhorté à de maintes reprises le gouvernement d’abroger immédiatement. Ces deux ordonnances portent gravement atteinte à la liberté syndicale et doivent être abrogées immédiatement, par tous les moyens.

    Le gouvernement a indiqué que la nouvelle Constitution proclame la liberté syndicale. Toutefois, elle a profondément regretté qu’une clause dérogatoire de caractère très général ait été ajoutée, comme cela a été souligné par la commission d’experts, subordonnant l’exercice de la liberté syndicale aux lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté du droit et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société et l’ordre public et la moralité. Il est étrange de se trouver en présence d’une si longue liste d’exclusions et il est par conséquent probable que, avec la nouvelle Constitution, les violations de la liberté syndicale se poursuivront en droit et dans la pratique.

    Le Comité de la liberté syndicale a conclu que la FTUB est un syndicat légitime qui a pour but de défendre et de promouvoir les droits et les intérêts des travailleurs birmans. Cependant, elle s’est vue contrainte d’agir clandestinement à cause d’une répression féroce de la part du gouvernement, qui l’empêche d’exister librement et de mener ses activités à bien comme un syndicat à part entière.

    Le gouvernement doit aussi comprendre qu’il est impossible de parvenir à une véritable liberté syndicale sans libertés publiques et sans respect pour la société civile. A cet égard, la première mesure doit être la libération de Daw Aung San Suu Kyi et des plus de 2 100 prisonniers politiques, dont un certain nombre de militants syndicaux. Elle a exhorté la commission à adresser le message le plus fort aux autorités birmanes aux fins de voir immédiatement reconnues, garanties et promues la liberté syndicale et la protection du droit syndical.

    Le représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré avoir écouté attentivement les intervenants et a remercié les orateurs qui se sont exprimés de manière constructive et objective. Son Excellence U Wunna Maung Lwin a exposé clairement la situation politique au Myanmar et ce que le Myanmar fait et va faire s’agissant de l’application de la convention no 87. Les vues divergent quant à l’action menée par le Myanmar pour honorer ses obligations au titre de la convention no 87. Certains orateurs vivent dans une tour d’ivoire d’où ils jettent des pierres sur les autres. D’autres ne peuvent offrir que des discours aux travailleurs du Myanmar, certains devant, pour leur survie, se poser en champions de la cause de ces travailleurs.

    La crise économique touchant maintenant tous les pays, le défi consistant à assurer l’emploi partout dans le monde est un problème d’une actualité brûlante auquel il faut s’attaquer. Pour ce qui est de la recherche de solutions globales, l’orateur a conjuré ceux qui souhaitent réellement améliorer le niveau de vie de nombreux travailleurs du Myanmar de le faire de la manière la plus efficace, en œuvrant pour que soient levées les sanctions économiques imposées au Myanmar. Ce serait une des meilleures façons d’aider ceux qui ont perdu leur emploi à la suite de ces sanctions à en retrouver un parce que les sanctions ont un effet préjudiciable sur l’emploi des travailleurs.

    La nouvelle Constitution a été adoptée par plus de 90 pour cent des électeurs et le gouvernement a clairement annoncé que des élections libres et impartiales seraient organisées en 2010, comme le veut la nouvelle Constitution. Les droits des citoyens sont garantis par le chapitre VIII de la nouvelle Constitution, intitulé «Citoyenneté, droits fondamentaux et devoirs des citoyens». Les citoyens ont notamment le droit d’exprimer librement leurs convictions et leurs opinions, de se réunir pacifiquement et de créer des associations et des syndicats. Il ne fait aucun doute que, lorsque la nouvelle Constitution sera totalement en application, des associations de travailleurs verront rapidement le jour.

    Le procès intenté à Daw Aung San Suu Kyi est une affaire intérieure dans laquelle le Myanmar a intenté une procédure par l’intermédiaire de son appareil judiciaire en application du droit national. L’orateur a rappelé à ce propos le principe juridique universel suivant lequel personne n’est au-dessus des lois. Ce n’est que lorsque ce principe juridique est défendu, mis en pratique et encouragé que règne l’Etat de droit. Son seul commentaire à propos de ce qui s’est dit concernant le procès de Daw Aung San Suu Kyi est que tout a été fait et sera fait conformément à la loi, dans le respect des principes de justice communément admis.

    Il est regrettable que M. Maung Maung, connu pour ses activités criminelles et terroristes, ait été autorisé à prendre la parole devant la commission. Ses activités passées et présentes n’ont en rien contribué à améliorer la situation des travailleurs du Myanmar et son but est d’ébranler la paix et la stabilité du pays. Un examen approfondi de son passé et de ses titres montrerait qu’il a peu d’un authentique militant des droits des travailleurs. On peut difficilement imaginer qu’un fugitif ou un groupe de fugitifs réfugiés à l’étranger puissent représenter les travailleurs d’un pays distant de milliers de kilomètres. Ils n’ont pas mis le pied au Myanmar depuis des dizaines d’années et on peut raisonnablement se demander comment ils pourraient partager la vie de ces travailleurs et promouvoir leur cause. M. Maung Maung est un hors-la-loi et ce qu’on appelle la FTUB n’a jamais existé, sous aucune forme ni à aucune époque que ce soit au Myanmar. Le gouvernement n’a cessé de répéter qu’il existe des preuves solides que M. Maung Maung et la FTUB sont les instigateurs de plusieurs attentats à la bombe commis au Myanmar. En résumé, le Myanmar ne reconnaîtra jamais la FTUB, un groupe terroriste en exil dirigé par un hors-la-loi. Le gouvernement continuera donc à s’opposer à sa présence aux Conférences de l’OIT.

    Certains orateurs ont cité le nom de son pays de manière incorrecte. Les correspondances officielles des Nations Unies et de ses institutions utilisent son nom exact, le Myanmar, tout comme l’ANASE, la BIMSTEC et le FEALAC. Même la lettre adressée au Directeur général du BIT par la CSI, et signée par Raquel Gonzalez en date du 4 juin 2009, respectait l’usage correct. Seule une poignée de groupements et de pays nient la réalité de la situation et, intentionnellement et par manque de respect, attribuent un autre nom à son pays. Une telle attitude témoigne de mépris envers le Président et devrait être considérée comme un fait grave.

    Les membres employeurs ont noté dès le début le profond changement de ton dans la discussion, en particulier dans la déclaration finale du représentant gouvernemental, en comparaison avec l’atmosphère constructive qui prévalait pendant la séance spéciale consacrée à l’application de la convention no 29 par le Myanmar. Tous les participants à la discussion devant la commission sont venus avec de bonnes intentions et ont exprimé différents points de vue, ce qui s’explique par leurs backgrounds et leurs origines diverses. L’expérience a montré que, lorsqu’ils sont confrontés à des points de vue différents, les gouvernements ne parviennent pas à résoudre les problèmes en adoptant une approche désobligeante. Les problèmes soulevés dans ce cas touchent aux fondements mêmes de la démocratie et des libertés publiques. L’historique de ce cas est clair et conséquent, ce qui, malgré la perspective de l’adoption d’une nouvelle Constitution, ne peut que susciter le scepticisme quant à la portée que pourrait avoir l’adoption d’une nouvelle loi fondamentale. La question est de savoir ce qui pourrait donner du poids à cette Constitution face aux manquements persistants dans l’application de la convention, lesquels devraient une nouvelle fois faire l’objet d’un paragraphe spécial dans le rapport de la commission. Si le gouvernement voulait montrer sa bonne volonté, il permettrait au chargé de liaison au Myanmar de conduire des formations en matière de liberté syndicale. Les membres employeurs ont demandé au gouvernement s’il serait d’accord pour permettre la conduite de ces activités, ce qui constituerait un premier pas important. Pour conclure, ils ont noté qu’il s’agissait d’un cas grave qui méritait d’être traité sérieusement.

    Les membres travailleurs ont déclaré qu’ils sont amenés une fois de plus à dénoncer les meurtres, tortures, détentions et arrestations de syndicalistes pour des activités syndicales considérées comme étant tout à fait normales dans d’autres pays, et que ces violations, ainsi que les termes employés par le représentant gouvernemental pour désigner un honnête syndicaliste, mériteraient l’institution d’une commission d’enquête. Ces violations continuelles, en droit et dans la pratique, de la liberté d’association vont se perpétuer encore longtemps si le respect des libertés civiles fondamentales n’est pas rétabli. C’est pourquoi les membres travailleurs ont formulé les demandes suivantes: la révision de la Constitution, en particulier les articles sur la liberté d’association et le travail forcé; l’abrogation des ordonnances et des lois sur les associations illégales; la légalisation et la reconnaissance de la FTUB, la Fédération des syndicats de la Birmanie, dont plusieurs orateurs ont démontré la représentativité; la libération immédiate de Daw Aung San Suu Kyi et de tous les militants syndicaux et prisonniers politiques ayant exercé leur droit à la liberté d’expression et d’association; et la cessation de l’impunité pour les actes de violence contre les syndicalistes et pour l’imposition du travail forcé. A cette fin, ils ont demandé au Bureau de désigner un chargé de liaison dans le pays qui serait chargé du traitement des plaintes relatives à l’exercice des droits mentionnés dans la convention no 87. Ils ont également demandé que les conclusions de la commission soient incluses dans un paragraphe spécial pour défaut continu d’application.

    Conclusions

    La commission a pris note des informations orales et écrites fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion détaillée qui a suivi. La commission a également rappelé qu’elle avait discuté de ce cas sérieux à de nombreuses reprises au cours des deux dernières décennies et que ses conclusions avaient été inscrites dans un paragraphe spécial pour défaut continu d’appliquer la convention depuis 1996.

    La commission a déploré la gravité des informations fournies à la commission d’experts par la Confédération syndicale internationale (CSI) concernant non seulement le défaut continu d’un cadre législatif concernant l’établissement d’organisations syndicales libres et indépendantes, mais également les graves allégations d’arrestations, de détentions et de dénis aux travailleurs de leurs libertés civiles fondamentales, dont certaines ont été examinées par le Comité de la liberté syndicale.

    La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle le Myanmar est engagé dans un processus de transformation vers une société démocratique et que les droits relatifs à la liberté d’association ainsi que les libertés civiles fondamentales sont garantis par la nouvelle Constitution. Une fois que la Constitution sera entrée en vigueur, les organisations syndicales se constitueront conformément à ses dispositions et seront en mesure de mener des activités dans l’intérêt des travailleurs. Concernant la question de la reconnaissance de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), le gouvernement a réitéré sa déclaration antérieure selon laquelle le ministère de l’Intérieur avait déclaré en 2006 que la FTUB était une organisation terroriste et qu’il n’était donc pas possible de la reconnaître comme une organisation légitime. En ce qui concerne les allégations concernant les assassinats, les arrestations, les détentions, les tortures et les condamnations de syndicalistes, le gouvernement a expliqué que ces mesures n’étaient pas prises en raison de l’exercice de l’activité syndicale mais en raison de la violation de lois existantes, d’incitation à la haine et d’outrage à l’égard du gouvernement. Le gouvernement a également fourni des informations sur le rôle joué par le Comité de surveillance des travailleurs du district dans la résolution des conflits.

    Rappelant les divergences fondamentales qui existent entre la législation et pratique nationales et la convention depuis que celle-ci a été ratifiée il y a plus de cinquante ans, la commission a une nouvelle fois demandé au gouvernement, de la manière la plus ferme qui soit, d’adopter immédiatement les mesures et les mécanismes nécessaires afin d’assurer pleinement aux travailleurs et employeurs les droits garantis par la convention. En outre, la commission a une nouvelle fois prié instamment le gouvernement d’abroger les ordonnances nos 2/88 et 6/88 ainsi que la loi sur les associations illégales afin qu’elles ne puissent être appliquées de manière à enfreindre les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs.

    Tout en prenant note de la déclaration du gouvernement selon laquelle sa Constitution avait été largement approuvée par plus de 90 pour cent de la population et garantit le respect de la liberté d’association et les libertés civiles, la commission a souhaité souligner le lien intrinsèque existant entre la liberté d’association et la démocratie et a observé avec regret que le gouvernement avait entamé des démarches relatives à la liberté d’association sans toutefois assurer les conditions minimales nécessaires à la démocratie. La commission s’est vue une nouvelle fois dans l’obligation de souligner que le respect des libertés civiles était essentiel à l’exercice de la liberté d’association et a invité le gouvernement à entreprendre de façon urgente des mesures concrètes avec la participation pleine et entière de tous les secteurs de la société indépendamment de leur opinion politique, afin de rendre la Constitution, la législation et la pratique pleinement conformes à la convention. La commission a prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures pour assurer que les travailleurs et les employeurs puissent exercer leurs droits syndicaux dans un climat de pleine liberté et sécurité, exempt de violences et de menaces.

    La commission a observé une nouvelle fois avec une extrême préoccupation que plusieurs personnes demeurent en prison pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression et d’association, en dépit de ses appels en faveur de leur libération immédiate. La commission a donc demandé une nouvelle fois au gouvernement d’assurer la libération immédiate de Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min ainsi que des autres personnes détenues pour avoir exercé leurs droits civils fondamentaux et leurs droits relatifs à la liberté syndicale. La commission a une nouvelle fois rappelé les recommandations réitérées par la commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale aux fins de la reconnaissance des organisations syndicales, incluant la FTUB, et a prié instamment le gouvernement de mettre fin à la persécution de travailleurs et d’autres personnes pour avoir eu des contacts avec des organisations de travailleurs, y compris celles qui exercent leurs activités en exil.

    La commission a rappelé ses conclusions antérieures selon lesquelles la persistance du travail forcé ne peut être dissociée de la situation qui prévaut, caractérisée par une absence complète de liberté syndicale et la persécution systématique de ceux qui tentent de s’organiser, et a appelé le gouvernement à accepter une prolongation de la présence de l’OIT pour traiter des questions relatives à la convention no 87.

    La commission a prié instamment le gouvernement de transmettre pour examen par la commission d’experts, lors de sa prochaine session, tous les projets de lois pertinents ainsi qu’un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises pour assurer des améliorations significatives dans l’application de la convention, y compris en ce qui concerne les questions graves soulevées par la CSI. La commission a exprimé le ferme espoir qu’elle sera en position d’observer un progrès notable en la matière lors de sa prochaine session.

    La commission a décidé de faire figurer les présentes conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport. Elle a également décidé de signaler ce cas comme défaut continu d’application de la convention.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 2005, Publication : 93ème session CIT (2005)

    Un représentant gouvernemental a déclaré qu'au Myanmar les travailleurs sont toujours considérés comme l'une des forces motrices du développement. Leur rôle central a toujours été reconnu, leur bien-être social a toujours été objet d'attention et leurs droits ont toujours été protégés par les gouvernements successifs du Myanmar, en conformité avec la loi. Tant la Constitution de 1947 que celle de 1974 contiennent des dispositions pertinentes en ce qui concerne le rôle et les droits des travailleurs au Myanmar. Il a rappelé l'existence de syndicats, sous la démocratie parlementaire ayant duré de 1948 à 1962, ainsi que d'organisations de travailleurs sous le système économique socialiste entre 1962 et 1988. Il est notoire que la seconde Constitution de 1974 a cessé de s'appliquer en 1988 conformément aux souhaits exprimés par le peuple.

    Le gouvernement actuel du Myanmar s'efforce d'établir un État moderne, développé et démocratique répondant aux aspirations de la population. Le Myanmar a adopté à cet effet une feuille de route en sept points, dont le premier consiste à convoquer de nouveau la Convention nationale. Ce processus a débuté en 1993 et s'est interrompu en 1996. Il avait pour but d'énoncer les principes de base devant servir à l'élaboration d'une nouvelle Constitution. Au cours de ses sessions tenues de 1993 à 1996, la Convention nationale a posé des principes de base, y compris en ce qui concerne les travailleurs. La session de la Convention nationale, qui a repris le 20 mai 2004, a effectué des clarifications et donné lieu à des délibérations sur les principes sociaux fondamentaux, y compris les droits des travailleurs et leur droit à une protection sociale. Les délibérations ont également abordé le principe fondamental de la constitution d'organisations de travailleurs. Dans le processus d'élaboration d'une nouvelle Constitution, ces principes fondamentaux serviront de cadre à la rédaction de textes détaillés en la matière. Lors de sa dernière session, ayant débuté le 17 février 2005, la Convention nationale a adopté certains principes fondamentaux détaillés dans le domaine social qui doivent figurer dans la liste législative de l'Union. Ces principes fondamentaux portent, entre autres, sur des sujets relatifs aux droits des travailleurs, tels la durée du travail, les périodes de repos, les congés, la sécurité au travail, les conflits du travail, la sécurité sociale et les organisations professionnelles. La Convention nationale a en outre décidé que des lois protégeant les droits des travailleurs et celles relatives à la création d'emplois devraient également être adoptées. Les délégués participant à la Convention nationale ont également été d'avis qu'une loi sur la sécurité au travail ainsi qu'une loi sur les risques professionnels devraient être incluses dans la liste législative. Il a conclu en déclarant que des organisations de travailleurs appropriées émergeront au Myanmar une fois que la nouvelle Constitution aura été adoptée.

    Les membres travailleurs ont déclaré qu'il était plus que gênant de constater que la commission était, cette année encore, saisie de ce cas. L'année dernière, la commission avait décidé de faire une nouvelle fois figurer ses conclusions dans un paragraphe spécial pour défaut continu d'application de la convention. Il ressort du rapport de la commission d'experts que le gouvernement du Myanmar ne veut apporter aucun des changements demandés et qu'il n'a pas fourni les informations requises, en ce qui concerne plus particulièrement les moyens concrets d'assurer une plus grande conformité avec la convention.

    La législation et les décrets militaires examinés par la présente commission depuis des années sont toujours en vigueur. Ils interdisent la constitution de syndicats et prévoient des sanctions à l'encontre des personnes qui tenteraient de créer une forme quelconque d'organisation démocratique. Il s'agit notamment de l'ordonnance no 2/88, adoptée par le SLORC le 18 septembre 1988, jour du coup d'état militaire, qui interdit toute activité de cinq personnes ou plus, telle que "se rassembler, marcher ou défiler, scander des slogans, faire des discours, que ces actes soient ou non commis pour créer des troubles ou avec une intention criminelle". La législation répressive comprend également la loi de 1908 sur les associations illicites, qui prévoit des peines d'emprisonnement d'au moins deux ans pour quiconque est membre d'une association illicite ou prend part à des réunions illégales. En outre, en vertu de l'ordonnance no 6/88, connue sous le nom de "loi sur la formation des associations et des organisations", les organisations doivent solliciter une autorisation pour fonctionner et "les organisations n'ayant pas cette autorisation ne peuvent pas se former ou continuer à exister, ni à poursuivre leurs activités". Cette ordonnance prévoit également une peine de cinq ans d'emprisonnement pour toute personne enfreignant ses dispositions et dispose qu'est passible d'une peine d'emprisonnement maximale de trois ans "quiconque est reconnu coupable des infractions suivantes: être membre d'une des nombreuses organisations qui n'ont pas été autorisées ou aider, encourager ou utiliser ces organisations".

    Les membres travailleurs ont relevé que le gouvernement avait une fois de plus avancé que plusieurs associations de travailleurs existaient dans le pays. Ils ont rappelé les conclusions du Comité de la liberté syndicale, selon lesquelles de telles associations ne constituent pas des substituts à des syndicats libres et indépendants et ne présentent aucune des caractéristiques des organisations de travailleurs libres et indépendantes. L'organisation syndicale légitime - la Fédération indépendante des syndicats - Birmanie (FTUB) - est empêchée de fonctionner librement, et les travailleurs n'ont pas le droit de constituer les syndicats de leur choix et de s'y affilier. Au contraire, ils sont persécutés ou arrêtés arbitrairement. De plus, le Secrétaire général de la FTUB, Maung Maung, a été à maintes reprises accusé de terrorisme devant cette commission, et ce encore récemment. Compte tenu de la législation actuelle, la FTUB est contrainte d'agir dans la clandestinité. Malgré cet obstacle, elle a réussi à organiser les travailleurs sur une large échelle dans le pays, tant dans l'agriculture que dans les secteurs de l'industrie et des services.

    Les membres travailleurs ont rappelé le cas de Myo Aung Thant, qui a été condamné à une peine d'emprisonnement à vie pour ses activités syndicales. Son épouse, Aye Ma, après avoir passé sept ans dans la terrible prison de Insein pour des motifs similaires, n'est même pas autorisée à lui écrire. Le 21 mai, les membres travailleurs ont été informés par le syndicat des gens de mer de Birmanie (SUB) que, le 19 mai, l'un de ses dirigeants, Koe Moe Naung, avait été arrêté par deux hommes non identifiés à sa résidence de Ranong, à la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar. Ils l'ont emmené à la base du 431e régiment d'infanterie légère et torturé à mort au cours de son interrogatoire. Koe Moe syndiquait les pêcheurs birmans et les travailleurs migrants du Myanmar dans la province de Ranong.

    En outre, les rassemblements à l'occasion du 1er mai, ainsi que d'autres rassemblements visant à protester contre les conditions de travail, ont été réprimés. Pour ceux qui ne sont pas contraints d'effectuer du travail forcé, le salaire moyen au Myanmar est de 4 à 5 dollars américains par mois. La durée hebdomadaire du travail est de 48 heures, à laquelle s'ajoutent entre 12 et 15 heures supplémentaires qui seraient payées 0,02 dollar de l'heure si seulement les entreprises étaient en mesure de payer. En réalité, suite aux réglementations bancaires sévères adoptées après la crise bancaire de 2003, les entreprises ne peuvent retirer plus de 200 000 kyats (environ 200 dollars) par semaine. Dans ces conditions, la plupart du temps, les salaires et la rémunération des heures supplémentaires ne peuvent être payés.

    La junte prétend que cette situation est due aux sanctions économiques. Ce n'est pas vrai. L'économie est aux mains de la junte qui en tire tous les profits. L'armée reçoit 49 pour cent du budget national et 30 pour cent du PIB.

    Le gouvernement ne cesse de déclarer que le Myanmar est un pays en transition et que la question de la liberté syndicale sera examinée par la Convention nationale, chargée d'élaborer la nouvelle Constitution. Cela fait maintenant plus de 16 ans que le gouvernement militaire du Myanmar promet l'adoption d'une nouvelle constitution dans laquelle serait traitée la question de la liberté syndicale, mais rien ne s'est produit. La nouvelle Convention nationale a été très critiquée comme n'étant ni représentative ni démocratique, non seulement par les organisations démocratiques birmanes et la Ligue nationale pour la démocratie, mais aussi par les gouvernements et les parlements à travers le monde, y compris de nombreux États de la région et des membres de l'ASEAN.

    En conclusion et compte tenu de ce qui précède, les membres travailleurs ont demandé un paragraphe spécial pour défaut continu d'application de la convention. Ils ont exhorté le gouvernement du Myanmar à mettre en œuvre immédiatement et sans plus tarder les conclusions du Comité de la liberté syndicale et de la commission d'experts.

    Les membres employeurs ont déclaré que le gouvernement du Myanmar a perdu sa crédibilité devant la commission. Voilà plus de dix ans qu'il promet de résoudre les problèmes liés au cas présent en adoptant une nouvelle Constitution. La commission d'experts a demandé des informations détaillées, mais n'en a reçu aucune. Ce cas est discuté depuis 1991 et il a fait l'objet à de nombreuses reprises d'un paragraphe spécial pour défaut continu d'application de la convention. Ce qui est clair, c'est qu'il n'existe aucun syndicat libre et indépendant au Myanmar. Le gouvernement ne l'a d'ailleurs pas nié. Aux termes de la législation en vigueur, toutes les activités syndicales constituent des délits passibles de sanctions. La commission d'experts et le Comité de la liberté syndicale n'ont cessé de répéter que les associations pour le bien-être des travailleurs ne sauraient remplacer des syndicats libres et indépendants. Les membres employeurs ne sont aucunement opposés à de telles associations, mais ils considèrent qu'elles ne satisfont pas aux obligations découlant de la convention no 87. Ils ont instamment recommandé au gouvernement de prendre des mesures positives dans le cas présent et d'élaborer une constitution et une législation permettant aux travailleurs et aux employeurs d'exercer leur droit à la liberté d'association. Enfin, ils ont exprimé leur accord avec les membres travailleurs d'inclure ce cas dans un paragraphe spécial du rapport.

    Un représentant de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) (secrétaire général de la Fédération des syndicats de Birmanie) a déclaré que le régime du Myanmar présentait la libération physique de M. Shwe Mahn comme un pas en avant, mais cette personne, tout comme M. Nai Min Kyi, M. Aye Myint et M. Myo Aung Thant, n'aurait jamais dû être arrêtée.

    Alors que l'OIT et la communauté internationale réclament des changements démocratiques, le régime du Myanmar s'est référé à la soi-disant convention nationale comme représentant un pas en avant, alors que le peuple du Myanmar la considère comme étant non représentative et non démocratique.

    L'orateur a rappelé que plus de 150 travailleurs du chantier de constructions navales de Simmaliek ont été tués en 1974 lors d'une grève générale organisée pour protester contre la mauvaise situation économique, et contre la création des "conseils de travailleurs". En outre, lors d'une réunion tenue en juillet 2004 dans la zone industrielle de Shwe Pyi Tha, le régime actuel a établi les "comités de supervision des travailleurs", au mépris de la liberté syndicale, devant s'exercer sans aucune ingérence du gouvernement ou des employeurs. Cette réunion a été organisée après la 92e session de la CIT, qui avait adopté un paragraphe spécial sur la situation de déni de la liberté syndicale au Myanmar. L'orateur a estimé que cela est une preuve qu'il n'existe pas de volonté politique de se conformer à la convention. Il a également avancé un certain nombre d'exemples concrets dans lesquels les autorités militaires ont fait déplacer par la force dans d'autres lieux les rassemblements du 1er mai, ont arrêté des dirigeants syndicaux et sont intervenues dans les conflits du travail, ce qui a semé le désordre, tant pour les travailleurs que pour les employeurs.

    L'orateur a fait observer que, bien que le directeur général du Département du travail ait répondu dans une certaine mesure aux besoins des travailleurs dans certains cas, il a en même temps été très injurieux à l'égard de l'OIT et de la CISL durant une conférence de presse du 15 mars 2005, lors de laquelle il a accusé l'OIT de "faire pression sur le Myanmar de manière arbitraire".

    L'orateur a considéré que, par rapport à dix ans en arrière, les travailleurs du Myanmar sont beaucoup plus informés sur leurs droits fondamentaux, grâce à l'OIT et à la CISL. Ils ont commencé à exercer leurs droits, en allant soit devant les tribunaux civils, soit au ministère du Travail ou en contactant le bureau de liaison du BIT. Ceci doit être encouragé.

    L'orateur a conclu en disant que la liberté syndicale et le droit des travailleurs de créer des syndicats indépendants sont niés par le régime du Myanmar, et il a appelé l'OIT et les membres de la commission à utiliser tous les moyens à leur disposition afin d'aider les travailleurs du Myanmar à conquérir le droit de s'associer librement et de façon indépendante, conformément aux normes de l'OIT.

    La membre gouvernementale du Luxembourg, s'exprimant au nom des gouvernements des États membres de l'Union européenne ainsi que de la Bosnie-Herzégovine, de la Bulgarie, de la Croatie, de l'ex-République yougoslave de Macédoine, de la Norvège, de la Roumanie, de la Serbie-et-Monténégro, de la Suisse, de la Turquie et de l'Ukraine, a déclaré que ce comité a discuté ce cas à plusieurs reprises et qu'il figure depuis plusieurs années dans un paragraphe spécial de ce rapport puisqu'il est inscrit sur la liste des cas de défaut continu d'application de la convention.

    L'oratrice a souligné qu'aucun progrès n'est intervenu concernant l'adoption d'un cadre juridique permettant la création d'organisations libres et indépendantes.

    L'Union européenne a déploré que, malgré les demandes renouvelées de la commission l'année passée, les autorités du Myanmar n'ont pas fourni les informations demandées sur les mesures concrètes qu'elles ont adoptées. Outre l'absence totale d'une législation garantissant le droit de s'organiser, certaines lois contiennent des restrictions à la liberté syndicale ou des dispositions qui pourraient être appliquées de manière à porter gravement atteinte au droit de s'organiser.

    L'Union européenne a instamment prié les autorités du Myanmar de prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que les travailleurs et les employeurs puissent pleinement exercer les droits qui leur sont attribués en vertu de la convention, et ce dans un climat de pleine sécurité. Ces derniers ne devraient pas faire non plus l'objet de menaces ou de sanctions pour avoir été en contact avec des organisations de travailleurs et d'employeurs ou avec l'OIT. L'Union européenne a également demandé aux autorités du Myanmar de fournir une réponse détaillée aux graves questions soulevées dans le rapport de la commission d'experts et aux allégations de la CISL.

    La membre gouvernementale de Cuba a observé que, compte tenu de la situation interne du Myanmar qui a été débattue de manière extensive au sein de cette commission, les actions de coopération, le dialogue constructif et l'assistance technique constituent les moyens les plus appropriés pour trouver une solution aux problèmes complexes liés à la convention no 87.

    Dans un esprit de collaboration, l'oratrice a demandé au gouvernement du Myanmar de fournir des informations détaillées à la commission d'experts sur l'application de la convention, de manière à ce qu'une analyse des problèmes auxquels le gouvernement est confronté puisse être faite et des solutions proposées.

    La membre gouvernementale des États-Unis a déclaré que la commission d'experts avait, une fois de plus cette année, constaté une absence totale de progrès dans l'établissement d'un cadre législatif dans lequel des organisations de travailleurs libres et indépendantes pourraient être constituées au Myanmar. L'oratrice s'est référée à la déclaration faite l'an passé devant cette commission par le gouvernement selon laquelle la Convention nationale avait tenu des délibérations sur des principes de base pour le secteur social, y compris les droits des travailleurs, afin d'établir un tel cadre. Toutefois, ladite Convention nationale n'inclut pas en son sein de représentants de l'opposition démocratique et des groupes ethniques minoritaires. A cet égard, toute constitution, référendum ou élection émanant de cet organisme non représentatif serait foncièrement vicié et ne saurait constituer des pas significatifs en faveur d'une réconciliation nationale et l'établissement de la démocratie. L'oratrice a observé que, comme c'était le cas pour la convention no 29, le gouvernement avait fait preuve d'indifférence par rapport à des obligations qu'il avait librement assumées il y a quelque cinquante années de cela. Ce n'est dès lors pas une surprise que des citoyens de ce pays croyant dans les droits de l'homme et défendant les droits des travailleurs soient confrontés à d'énormes risques, y compris l'arrestation ou l'emprisonnement. Tel est le cas du prix Nobel pour la paix, me Aung San Suu Kyi, qui a passé la plus grande partie des dix-sept dernières années en détention et demeure assignée à résidence et virtuellement privée de tout moyen de communication. Les autorités du Myanmar sont appelées à relâcher immédiatement et sans poser de conditions Mme Aung San Suu Kyi ainsi que l'ensemble des autres prisonniers politiques.

    L'oratrice a souligné que des organisations de travailleurs fortes et indépendantes sont en mesure de fournir une aide considérable aux autorités afin d'éliminer le travail forcé, pour autant que le gouvernement soit véritablement engagé dans cette voie. Toutefois, les tentatives de l'OIT en la matière ont été repoussées par le gouvernement, et l'éradication du travail forcé tout comme la liberté syndicale continuent d'être systématiquement violées, tant dans la législation que dans la pratique. Le gouvernement devrait démontrer que, dans cette affaire comme dans celle du travail forcé, il est prêt à agir afin de respecter ses obligations par rapport à l'OIT. L'oratrice s'est déclarée persuadée que l'OIT était disposée à fournir son assistance dès que le gouvernement s'engagera dans cette voie.

    Une autre représentante gouvernementale a déclaré que la Convention nationale réunit l'ensemble des partis politiques et groupes ethniques du pays, y compris les 17 groupes nationaux qui ont cessé la lutte armée et se sont joints au processus de paix. Sur 1 086 délégués, 633 sont issus de groupes ethniques nationaux. Les ouvriers, les paysans et les travailleurs de tous les autres secteurs économiques sont également représentés. En ce qui concerne les allégations portées contre le ministère du Travail, l'oratrice a affirmé que les droits et le bien-être des travailleurs seraient protégés par le ministère jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution. Son gouvernement n'a pas d'informations sur les allégations concernant certains travailleurs qui ne résident plus sur le territoire du Myanmar.

    Les membres travailleurs ont remercié les membres employeurs et les gouvernements qui ont fait savoir qu'ils partageaient leur point de vue sur ce cas. Il ressort clairement du rapport de la commission d'experts ainsi que des informations fournies par les membres travailleurs, le secrétaire général de la Fédération des syndicats de Birmanie et les membres employeurs que la situation au Myanmar s'aggrave et que la convention no 87 a fait l'objet de graves violations. Les membres travailleurs ont noté que le 29 juin la lauréate du prix Nobel Aung San Suu Kyi allait célébrer son 60e anniversaire en assignation à résidence. Ils ont demandé à la commission d'inclure une fois de plus ce cas dans le paragraphe spécial sur le défaut continu d'appliquer la convention no 87 et ont instamment recommandé au gouvernement de se conformer à la convention et aux demandes de la commission d'experts et du Comité de la liberté syndicale.

    Les membres employeurs ont remercié le membre gouvernemental de Cuba d'avoir suggéré que le BIT fournisse une assistance technique dans ce cas. Cela pourrait être un bon moyen de progresser. Ils ont souhaité à cet égard que deux paragraphes de la conclusion de la séance spéciale concernant l'application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, par le Myanmar soient inclus dans les conclusions sur ce cas. Le premier paragraphe pourrait être adapté comme suit: La présence de l'OIT au Myanmar devrait être renforcée afin de consolider sa capacité à remplir toutes ses fonctions, et le gouvernement devrait émettre tous les visas nécessaires sans délai. Ces fonctions devraient inclure une assistance au gouvernement afin qu'il s'acquitte entièrement des obligations lui incombant sous la convention no 87. L'autre paragraphe à inclure se lirait comme suit: La liberté de mouvement reconnue en vertu de l'accord pertinent au chargé de liaison par intérim, et qui est nécessaire à la bonne exécution de ses fonctions, devrait être pleinement respectée.

    Les membres travailleurs ont estimé que, si les tâches du chargé de liaison devaient également inclure un soutien au gouvernement du Myanmar pour la mise en œuvre de la convention no 87, des ressources additionnelles devraient être octroyées au bureau de liaison. Ceci serait nécessaire afin de ne pas affaiblir le chargé de liaison dont le travail est déjà extrêmement difficile. Pour cette raison, les membres travailleurs auraient préféré l'inclusion dans les conclusions de deux paragraphes des conclusions de la séance spéciale sur la convention no 29 relative à la nécessité de ce bureau de liaison. Les membres employeurs se sont associés à la déclaration faite par les membres travailleurs.

    La commission a pris note de la déclaration du gouvernement et de la discussion qui a suivi. La commission a rappelé que ce cas a été discuté à plusieurs reprises depuis plus de vingt ans et que, depuis 1996, ses conclusions figurent dans un paragraphe spécial pour manquement continu à la mise en œuvre de la convention. La commission a déploré l'absence totale de progrès dans l'adoption d'un cadre législatif permettant la création de syndicats libres et indépendants, et ce malgré les efforts continus de dialogue entre cette commission et le gouvernement. En outre, la commission s'est montrée profondément préoccupée par les commentaires de la commission d'experts selon lesquels le rapport fourni par le gouvernement ne répondait à aucune des demandes formulées par la présente commission. Les projets de loi demandés n'ont pas été communiqués et le gouvernement n'a pas répondu aux commentaires de la CISL. La commission ne peut que condamner l'absence de réel dialogue avec le gouvernement et veut croire que toutes les informations demandées seront fournies dans les prochains rapports du gouvernement.

    La commission a pris note de la déclaration du gouvernement selon laquelle la mise en place d'un cadre législatif prévoyant la liberté syndicale suppose l'adoption d'une Constitution. Le gouvernement a aussi indiqué que la convention nationale a approuvé que les lois relatives à la protection des droits des travailleurs et à la création d'emplois doivent être également promulguées.

    Rappelant l'existence depuis plus de cinquante ans d'importantes contradictions entre la législation nationale, la pratique et la convention, la commission a une fois de plus prié instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires et de mettre en place les mécanismes appropriés pour garantir le droit qu'a chaque travailleur et employeur de créer et de s'affilier à une organisation de son choix, de s'organiser pour exercer ses activités et de formuler son programme, ainsi que de s'affilier à des fédérations, des confédérations et des organisations internationales, sans ingérence des autorités publiques. En outre, il prie instamment le gouvernement d'abroger les ordonnances nos 2/88 et 6/88, ainsi que la loi sur les associations illicites, de sorte qu'elles ne puissent pas contrevenir aux droits des organisations de travailleurs et d'employeurs.

    La commission est une fois encore obligée de souligner que le respect des libertés publiques est essentiel dans le cadre de l'exercice de la liberté syndicale et prie fermement le gouvernement de prendre, de toute urgence, des mesures pour mettre sa législation et sa Constitution en conformité avec la convention, avec la participation réelle de tous les secteurs de la société, indépendamment de leur opinion politique. Il a également demandé au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les travailleurs et les employeurs puissent librement exercer leur droit à la liberté syndicale dans un climat de pleine liberté et sécurité, exempt de toutes violences et menaces. La commission a instamment prié le gouvernement de s'assurer que les travailleurs emprisonnés pour avoir tenté de prendre part à des activités syndicales soient libérés, et qu'aucun travailleur ne puisse être sanctionné pour avoir été en contact avec une organisation de travailleurs. La commission prie instamment le gouvernement de communiquer les projets de loi relatifs à la mise en œuvre de la convention, ainsi qu'un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises pour améliorer l'application de la convention. Une réponse devra être également fournie sur les points soulevés par la CISL. Ces informations seront examinées par la commission d'experts cette année.

    La commission a rappelé toutes ses conclusions formulées à l'occasion de l'examen de l'application de la convention no 29 par le Myanmar et concernant la présence de l'OIT dans le pays. La commission a estimé que la persistance du travail forcé ne pouvant être dissociée de l'absence de liberté syndicale dans le pays, le chargé de liaison devrait assister le gouvernement dans la mise en œuvre des obligations découlant de la convention no 87.

    La commission a exprimé le ferme espoir que, lors de sa prochaine session, elle pourra noter des progrès significatifs sur tous les points susmentionnés.

    La commission a décidé de faire figurer ses conclusions dans un paragraphe spécial du rapport. Elle a également décidé que ce cas figurera parmi les cas de défaut continu d'application de la convention.

    Les membres travailleurs ont estimé que, si les tâches du chargé de liaison devaient également inclure un soutien au gouvernement du Myanmar pour la mise en œuvre de la convention no 87, des ressources additionnelles devraient être octroyées au bureau de liaison. Ceci serait nécessaire afin de ne pas affaiblir le chargé de liaison dont le travail est déjà extrêmement difficile. Pour cette raison, les membres travailleurs auraient préféré l'inclusion dans les conclusions de deux paragraphes des conclusions de la séance spéciale sur la convention no 29 relative à la nécessité de ce bureau de liaison. Les membres employeurs se sont associés à la déclaration faite par les membres travailleurs.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 2004, Publication : 92ème session CIT (2004)

    Un représentant gouvernemental a exprimé son soutien au Groupe des pays du Mouvement des non alignés au regard de la proposition qu'ils ont avancée, de revoir les méthodes de travail de la commission. Ce groupe constate qu'il a été demandé à certains pays de comparaître devant la commission pendant deux ou trois années consécutives, ce qui prouve que des critères objectifs de sélection des cas devraient être adoptés. Le représentant a tenu à préciser que son soutien à cette proposition ne devait en rien être interprété comme une volonté de son gouvernement de ne pas répondre à la question du respect de la convention. Il a rappelé que certains membres de la commission avaient demandé à quel moment une nouvelle Constitution serait adoptée. A cet égard, il a tenu à souligner que le Myanmar est un pays en transition. C'est dans cette optique que le Premier ministre, le Général Kin Nyunt, a proclamé une feuille de route en sept étapes, le 30 août 2003. La feuille de route a été bien accueillie par les Etats de la région et même au-delà. Le neuvième Sommet ASEAN et le septième Sommet ASEAN+3, qui s'est tenu à Bali en octobre 2003, ont considéré que cette feuille de route présentait une approche à la fois pragmatique et substantielle. Le premier échelon de cette feuille de route est de convoquer l'Assemblée nationale afin qu'elle fixe les grands principes de base pour élaborer la nouvelle Constitution. Le représentant gouvernemental s'est dit heureux de pouvoir informer la commission que l'Assemblée nationale était actuellement réunie en session. Ceci montre bien que la mise en oeuvre de la première phase de la feuille de route est en cours. Le 20 mai 2004, les débats de l'Assemblée nationale ont porté sur les principes de base dans le domaine social, y compris les droits des travailleurs. Ces débats ont également abordé la question des principes de base concernant la création d'organisations de travailleurs. Ces principes constitueront le cadre de référence pour l'élaboration de dispositions plus détaillées, qui seront reprises dans la nouvelle Constitution.

    L'orateur a rappelé qu'il existe déjà des organisations de travailleurs dont le statut est assez proche des principes de base de la convention no 87. Il a mentionné à titre d'exemple l'Association des écrivains et journalistes du Myanmar. Son président, un écrivain connu, n'a pas été désigné par le gouvernement, mais librement élu par ses membres. Il en a été de même de son secrétaire et d'autres membres de son comité exécutif central. Sur un plan historique, les écrivains du Myanmar ont constitué une association le 8 mars 1944, sous le régime colonial britannique. Cette association a rassemblé librement des écrivains qui cherchaient à défendre leurs intérêts dans une conjoncture assez difficile à l'époque, sur le plan financier et à d'autres égards. En 1993, cette association est devenue la "Myanmar writers and journalists association" (MWJA). Elle a conservé les mêmes principes essentiels d'indépendance, d'autonomie et de libre affiliation, si bien que les autorités centrales se sont toujours abstenues jusqu'à présent d'intervenir dans son fonctionnement. La MWJA est une association de travailleurs intellectuels, constituée librement par des écrivains et des journalistes. Elle est constituée en confédération au niveau central, avec des ramifications au niveau des agglomérations et localités dans tout le pays. Ses instances exécutives sont librement élues à tous les niveaux par les membres. La MWJA exerce librement, et de sa propre initiative, des activités très diverses. L'une de celles-ci, particulièrement significative au Myanmar, est la Journée nationale des écrivains. A cette occasion, les membres de la MWJA organisent des conférences, des causeries et des assemblées traditionnelles où les jeunes écrivains rendent hommage et offrent des dons en nature et en espèces aux anciens. Enfin, la MWJA a des liens et entretient une coopération avec des associations homologues d'autres pays. L'orateur a déclaré que la MWJA est l'une des organisations de travailleurs intellectuels qui se rapproche le plus des principes de base de la convention. Les organisations existantes de travailleurs, telles que la MWJA, sont assurément les précurseurs d'un mouvement syndical puisqu'elles contribuent à préserver et promouvoir de leur mieux les intérêts des travailleurs dans les conditions actuelles. Il reste possible de développer des organisations de travailleurs présentant des caractéristiques analogues et de continuer de s'engager dans des mesures transitoires. Il s'agit là d'un travail préparatoire, qui aboutira à la constitution d'organisations de travailleurs conformément à la nouvelle Constitution et à la nouvelle législation pertinente du pays. A ce titre, la MWJA pourrait bien faire figure de projet pilote et servir d'instrument exploratoire des futures voies et modalités dans ce domaine.

    A propos de la coopération du Myanmar avec l'OIT, le représentant gouvernemental a évoqué l'assistance technique que l'OIT a fournie en 1995 et 1996 pour cette convention. En outre, le gouvernement coopère pleinement avec l'OIT pour la mise en oeuvre de la convention no 29. Cette coopération progresse remarquablement, notamment à travers la signature d'un accord entre le gouvernement et l'OIT portant sur un Plan d'action conjointe pour l'éradication du travail forcé dans le pays. Une coopération similaire pourrait ou devrait s'engager à propos de la convention no 87. Si l'OIT en manifestait le désir, cela ouvrirait de nouvelles perspectives de coopération. Entre-temps, le gouvernement poursuivra ses consultations fréquentes auprès des fonctionnaires du BIT, notamment du Département des normes internationales du travail et du Programme focal pour la promotion de la Déclaration. Il a conclu que son gouvernement croit au dialogue et à la coopération. L'invective, la critique et la censure à l'égard d'un Etat Membre qui fait tout ce qui est dans son pouvoir pour faire avancer la cause des travailleurs dans le contexte actuel ne peuvent être d'aucun secours. Il en sera de même de toute tentative d'isolement du pays ou de pressions sur cet Etat Membre. L'orateur a exprimé l'espoir que la commission comprendra les contraintes que le Myanmar doit affronter, qu'elle sera consciente de la bonne volonté et des intentions sincères du gouvernement et, enfin, qu'elle appréciera les avancées décrites ainsi que les mesures significatives qui ont été prises à cette fin.

    Les membres travailleurs ont rappelé que ce cas avait été discuté à 16 reprises au cours des vingt-trois dernières années. Aux commentaires de la commission d'experts s'ajoutent les informations du cas no 2268 du Comité de la liberté syndicale, dont il ressort l'image exhaustive et préoccupante d'une totale absence de liberté syndicale en Birmanie.

    Ils ont noté que la commission d'experts s'est vue obligée de "rappeler qu'elle émet des commentaires constatant le défaut d'application de cette convention par le gouvernement, tant en droit qu'en pratique, depuis la ratification de cet instrument, voici cinquante ans". Le caractère des violations en Birmanie est exceptionnel et le gouvernement persiste dans ses manquements à l'application de la convention en dépit de l'effort concerté du système de contrôle de l'application des normes de l'OIT pour l'encourager à l'appliquer. Une fois de plus, la commission d'experts a eu "le profond regret de constater qu'il n'y a absolument aucun progrès à signaler sur le plan de l'élaboration d'un cadre législatif dans lequel des organisations de travailleurs libres et indépendantes pourraient être constituées". En outre, la commission d'experts a pris note de l'assertion du gouvernement selon laquelle le pays est en transition vers la démocratie - une transition dont on a peine à trouver le moindre indice - et qu'il fait tout ce qui est en son pouvoir pour promouvoir les droits, les intérêts et le bien-être des travailleurs ainsi que pour trouver les moyens de prendre des mesures transitoires appropriées avant l'élaboration de la Constitution. Dans ce contexte, le gouvernement évoque des associations pour le bien-être des travailleurs, pouvant être considérées comme des précurseurs de syndicats. Le Comité de la liberté syndicale s'est penché, aux paragraphes 739-742 de son 333e rapport (document GB.289/9, mars 2004), sur l'affirmation selon laquelle ces associations auraient vocation à devenir des organisations de travailleurs, pour estimer qu'à tout le moins ces associations devraient jouir de garanties d'indépendance pour qu'il en soit ainsi. De l'examen des informations fournies, il a conclu que ces associations "ne sauraient être des substituts à des syndicats libres et indépendants" (paragraphe 742). De même, la commission d'experts a répété que "ces associations n'ont aucun des attributs caractéristiques des organisations de travailleurs libres et indépendantes" et qu'elle craignait "que la persistance du gouvernement à arguer de la conformité du rôle de ces associations à vocation sociale par rapport à la convention ne soit que l'expression pure et simple de l'insignifiance qu'il attribue aux questions fondamentales qu'elle soulève depuis de nombreuses années".

    La présente commission a été assurée par le représentant gouvernemental, comme elle l'avait déjà été au cours de la séance spéciale, sur l'effet donné à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, que l'inclusion des principes de la liberté syndicale dans la nouvelle Constitution avait été discutée le 20 mai 2004 par la Convention nationale, et qu'une nouvelle législation pourrait être élaborée sur la base de ces principes. On ne connaît toutefois pas la teneur exacte de cette discussion de la Convention nationale. Comme il ressort des discussions de la séance spéciale, la communauté internationale, notamment les Nations Unies, a condamné dans des termes identiques le processus de la Convention nationale. Madame Aung San Suu Kyi est toujours en résidence surveillée et le régime est si préoccupé par son influence qu'il lui a interdit toute déclaration à la Convention nationale. Ni la Ligue nationale pour la démocratie, le parti politique qui a remporté 82 pour cent des sièges au parlement lors des élections nationales de 1990, ni aucun des partis politiques ethniques ayant également obtenu des sièges lors de ces élections, ne participent réellement à la convention nationale. Aucun représentant crédible des travailleurs ne figure parmi les quelque 1 000 participants désignés. En outre, le fait qu'on n'ait pas demandé de conseils au BIT pour la préparation de dispositions constitutionnelles protégeant la liberté syndicale jette un sérieux doute sur la volonté réelle du régime d'inclure, comme il le prétend, la liberté syndicale, dans la nouvelle Constitution. Il existe pourtant de nombreux cas où le BIT a joué ce rôle à la demande du gouvernement, comme au Brésil ou à Timor-Leste.

    L'absence de Constitution n'a pas empêché la promulgation de multiples décrets législatifs au cours de ces dernières années. Ne pas abroger les textes législatifs non conformes et ne pas promulguer de nouveaux décrets protégeant la liberté syndicale est une décision délibérée du régime. Même sans prendre ces mesures, le gouvernement pourrait démontrer sa bonne volonté en n'appliquant pas l'ancienne législation coloniale et les décrets militaires contraires à la liberté syndicale. Il pourrait également accepter de reconnaître le droit des travailleurs birmans de constituer et de s'affilier aux organisations de leur choix, telles que la Fédération indépendante des syndicats - Birmanie (FTUB), pour la promotion et la défense de leurs intérêts dans le pays. Mais la présente commission sait ce que le gouvernement pense du secrétaire général de la FTUB, qu'il a ici même calomnié à maintes reprises, comme il va probablement le faire à nouveau. Le gouvernement ne peut pourtant prétendre que tout travailleur affilié à la FTUB est un terroriste. Le Comité de la liberté syndicale a fait une demande analogue au paragraphe 743 de son 333e rapport (cas no 2268), après être parvenu à la conclusion que toute organisation librement choisie par les travailleurs était considérée illégale par le gouvernement. En l'absence de législation protégeant la liberté syndicale, le Comité de la liberté syndicale a demandé au gouvernement de s'abstenir de tout acte entravant le libre fonctionnement de toute forme de représentation collective et organisée de travailleurs, choisie librement par ces derniers pour défendre et promouvoir leurs intérêts sociaux et économiques. Cette demande "concerne également les organisations de travailleurs opérant en exil puisqu'elles ne peuvent pas être reconnues dans le contexte législatif actuel". Le Comité de la liberté syndicale se réfère évidemment là à la FTUB, qui est contrainte à la clandestinité depuis sa création en 1991. Disposant de structures tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays, elle est la voix efficace de plus d'un million et demi d'émigrés birmans qui travaillent en Thaïlande mais organise aussi des syndicats clandestins dans les principaux secteurs d'activité en Birmanie même, où elle est active dans les principales villes du pays. Elle s'y emploie à rassembler les preuves des violations des droits des travailleurs, de la violation du droit de négociation collective dans les secteurs industriels, ainsi que les preuves de l'existence de travail forcé qu'elle communique à l'OIT et au mouvement syndical international. Les membres de la FTUB surpris dans de telles activités risquent la peine de mort. L'appareil de propagande du gouvernement attaque régulièrement avec virulence la FTUB qu'il décrit comme une bande de terroristes expatriés. Même la CISL est accusée d'encourager et d'aider la FTUB à commettre des actes terroristes.

    Le secrétaire général de la FTUB, M. Maung Maung, a dû quitter le pays lors du coup d'Etat militaire de 1988 en raison de son engagement dans le mouvement syndical démocratique. Le gouvernement n'a jamais nié qu'il était engagé dans des activités syndicales à son travail au cours de ces années. Il est victime d'attaques constantes de la part du régime qui l'accuse de diriger une organisation terroriste et il a été condamné par contumace pour crime de haute trahison (cas no 2268). Au paragraphe 751 de son rapport, le Comité de la liberté syndicale s'est dit préoccupé par le lien établi entre les prétendues activités criminelles de M. Maung Maung et son activité syndicale. Il a demandé au gouvernement d'apporter la preuve, sous forme notamment de la copie de la décision du tribunal, que ses activités syndicales ne sont pas la raison des poursuites pénales engagées contre lui. Le gouvernement doit également soumettre cette information à l'examen de la commission d'experts. Il importe de connaître l'appréciation de la commission d'experts concernant les éléments de preuve qui seront fournis et si, comme c'est probable, elle confirme l'année prochaine que M. Maung Maung est bien victime de son activité syndicale. Le gouvernement doit, une fois pour toutes, mettre fin à ses accusations et à ses menaces contre les dirigeants de la FTUB. D'autres militants syndicaux sont emprisonnés en Birmanie en raison de leur activité syndicale légitime, en particulier pour avoir transmis des informations à l'OIT sur le travail forcé. Trois travailleurs ont été condamnés pour haute trahison parce qu'ils étaient entrés en contact avec le BIT et la FTUB. Dans sa lettre du 2 juin 2004, le Directeur général du BIT a fait part au ministre du Travail de sa profonde préoccupation quant aux implications évidentes pour la liberté syndicale de l'arrêt de la Cour suprême contre Shwe Mahn, Min kyi et Aye Myint. Le jugement contre Shwe Mahn établit clairement que son crime principal est d'être lié à la FTUB. Il rappelle bien qu'il a déjà été condamné à deux ans de prison en 1990 pour ce motif. Outre qu'il soulève la question préoccupante de la double condamnation, ce cas met en lumière l'absurdité du système judiciaire birman. Tant que les autorités ne reconnaîtront pas les activités syndicales légitimes, les syndicalistes resteront sous la menace des condamnations pénales les plus lourdes, en violation flagrante de la liberté syndicale. Le raisonnement des juges ne s'en tient pas là, puisque la qualification criminelle s'étend à tous les complices présumés, et pèse sur tous les travailleurs birmans ayant des contacts avec la FTUB. Le cas de ces trois syndicalistes confirme l'importance vitale qui s'attache à ce que la présente commission insiste auprès de tous les organes de l'Etat, et notamment de l'autorité judiciaire, pour qu'il soit donné effet à la recommandation du Comité de la liberté syndicale, au paragraphe 743 de son rapport, de s'abstenir de tout acte entravant le libre exercice des activités de la FTUB. Enfin, il est évident que les accusés n'ont pas jusqu'à présent bénéficié de l'assistance d'un avocat de leur choix, ni d'une audience publique. Ce double manquement caractéristique de tous les cas d'emprisonnement de travailleurs depuis 1997 va à l'encontre de tous les principes consacrés par le droit international et la liberté syndicale. La deuxième révision par la Cour suprême de la condamnation de Shwe Mahn et des huit autres personnes condamnées pour haute trahison, que le représentant gouvernemental mentionnait la semaine dernière, devra respecter les garanties judiciaires minimales, et notamment que les accusés soient informés des accusations portées à leur encontre, qu'ils disposent du temps suffisant pour préparer leur défense et qu'ils bénéficient de l'assistance de l'avocat de leur choix. La présente commission doit insister avec la plus grande fermeté pour que le gouvernement assure de toute urgence ces garanties.

    Les membres employeurs ont rappelé que la commission a traité ce cas de manière répétée depuis 1993. Ils ont également rappelé que ce cas a été cité de manière répétée dans un paragraphe spécial du rapport de la commission d'experts, pour défaut continu d'application de la convention. Les membres employeurs ont indiqué que, en résumé, ce cas se rapporte à une absence de syndicats libres et indépendants dans le pays, réalité qui n'est pas contestée par le gouvernement. Une fois de plus le gouvernement a fait référence à la future Constitution en indiquant que la situation actuelle n'est que provisoire. Les membres employeurs ont rappelé que, en fait, le gouvernement n'a pas appliqué la convention depuis sa ratification, il y a plus de cinquante ans. C'est pourquoi la commission d'experts a pris note du total manque de progrès dans la mise en place d'un cadre législatif qui permettrait la création de syndicats libres et indépendants. A cet égard, les membres employeurs ont indiqué que toutes les activités syndicales constituent des infractions punissables étant donné qu'aux termes de la loi, les syndicats sont des organisations illégales. Les informations fournies par le représentant du gouvernement n'indiquent pas de changements à cet égard. La commission d'experts a déclaré à plusieurs reprises que les associations à vocation sociale, que le gouvernement considère comme des précurseurs des syndicats, ne peuvent remplacer les syndicats au sens de la convention. Les membres employeurs ne sont pas opposés aux activités de ces associations, mais sont d'accord avec la commission d'experts pour dire qu'elles ne remplissent pas les conditions de la convention. Après cet énoncé clair des faits, la commission devrait recommander avec insistance au gouvernement d'appliquer la convention et d'assurer que les travailleurs et les employeurs puissent librement exercer leur liberté d'association. En substance, les conclusions de la commission devraient rester inchangées, mais la résolution de ce cas devient de plus en plus urgente.

    La membre gouvernementale des Etats-Unis a indiqué que ce cas est un sujet de profonde inquiétude depuis très longtemps et que son gouvernement reste préoccupé par l'absence totale de progrès de la part des autorités du Myanmar sur le plan de l'élaboration d'un cadre légal dans lequel des organisations de travailleurs libres et indépendantes pourraient être constituées. Le gouvernement des Etats-Unis a déploré le peu de sérieux que les autorités du Myanmar attribuent à des droits fondamentaux qui devraient être garantis depuis cinquante ans, date de la ratification par le Myanmar de cette convention. De récents événements dans le pays ainsi que la discussion menée au sein de la commission illustrent de manière dramatique le prix fort que doivent payer les travailleurs pour tenter d'exercer des droits syndicaux ou même d'entrer en contact avec des organisations syndicales indépendantes. Malgré les promesses, la réalité montre que la législation et la pratique sont en contraste sévère avec les exigences de la convention. Les libertés civiles sont bafouées et le principe de jugement équitable est ignoré. L'oratrice a déclaré que, comme son gouvernement l'a déjà indiqué, des organisations de travailleurs fortes et indépendantes peuvent fournir une aide significative dans l'éradication du travail forcé et contribuer de manière efficace à une transition vers la démocratie. Mais la vraie liberté syndicale n'existe pas au Myanmar. La membre gouvernementale a demandé à l'OIT d'envoyer le message le plus fort possible aux autorités pour qu'il reconnaisse, garantisse et encourage la liberté syndicale et le droit syndical.

    La membre travailleuse de l'Italie a indiqué que la législation de 1964 ainsi que les autres lois et arrêtés qui font l'objet de commentaires de la commission d'experts depuis de nombreuses années, de même que les décrets et les arrêtés militaires, étouffent toute forme d'organisation démocratique et de négociation collective au Myanmar. Le 18 septembre 1988, date de la prise du pouvoir par l'armée qui a aboli tous les organes d'Etat, le SLORC a émis le décret no 2/88 qui interdit toute activité de cinq personnes ou plus, telles que se rassembler, marcher ou défiler, scander des slogans, faire des discours, sans considérer la nature criminelle ou non de ces actes. Le décret no 2/88 a été renforcé en 1988 par la loi sur les associations illégales, qui punit d'une peine d'emprisonnement d'au moins deux ans le membre d'une association qualifiée comme telle. Le 30 septembre 1988, l'arrêté 6/88, connu sous le nom de loi sur la formation des associations et des organisations, a été émis. Il est pris en considération par la commission d'experts depuis de nombreuses années. Cet arrêté déclare que toutes les organisations doivent solliciter une autorisation du ministère de l'Intérieur et des Affaires religieuses et que les organisations n'ayant pas cette autorisation ne peuvent pas se former ou continuer à exister, ni à poursuivre leurs activités. Cet arrêté s'applique aux organisations d'employeurs et de travailleurs. Les raisons de refuser une autorisation à une organisation sont extrêmement variées et il n'existe aucun mécanisme d'appel contre une décision de refus. Les violations à cet arrêté sont punies d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à cinq ans, cette peine pouvant aller jusqu'à trois ans pour les membres d'une organisation illégale. En 1989 le gouvernement a indiqué que les principaux changements politiques étaient en cours en Birmanie et que l'ancien système de parti unique était en train d'être transformé en un système multipartite. En 1991, après les élections démocratiques de mars 1990 remportées par le NDL, le gouvernement a indiqué à la commission que malgré l'absence de modification ou d'abrogation formelle de la loi no 6 de 1964 et du règlement no 5 de 1976, ils étaient automatiquement tombés en déchéance.

    Le représentant gouvernemental a également déclaré que les élections générales avaient été considérées comme les plus libres et justes et a reconnu que les dispositions de la loi relative à la formation des organisations de travailleurs limitent la création des syndicats à une structure de syndicat unique, ce qui est contraire aux dispositions des articles 2, 5 et 6 de la convention. En 1992, le gouvernement a indiqué que la loi sur les organisations syndicales aurait été de nouveau rédigée pour répondre aux nouvelles tendances prévalant dans le pays et pour que les droits syndicaux soient reconnus. Le gouvernement a déclaré que, en conformité avec la déclaration no 11/92 du 24 avril 1992, après la convocation d'une Convention nationale, la nouvelle Constitution prévoirait les droits de tous les travailleurs de constituer leurs propres syndicats indépendants, en accord avec un système démocratique. En 1993, le gouvernement a déclaré qu'après l'émergence de la nouvelle Constitution, plusieurs lois devront être revues afin d'être mises en conformité avec la Constitution, mais que durant la période de transition, les droits des travailleurs seraient garantis par la législation toujours en vigueur. Plus d'une décennie s'est écoulée depuis les élections démocratiques sans que rien n'ait changé. La nouvelle Convention nationale débute en mai 2004 avec une démocratie absente tant au niveau des conditions des participants qu'à celui des procédures. Le nombre de travailleurs emprisonnés condamnés à un travail pénible (autre manière de définir le travail forcé pénitentiaire) devrait obliger le gouvernement de la Birmanie à mettre en oeuvre, immédiatement et sans plus attendre, les conclusions du Comité de la liberté syndicale, en utilisant l'expertise du service de la liberté syndicale du Bureau. L'oratrice a demandé au gouvernement de mettre en pratique sans délai les recommandations du Comité de la liberté syndicale.

    Un observateur de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a indiqué que la commission d'experts, le Comité de la liberté syndicale et les précédents orateurs ont décrit l'absence totale, d'un point de vue juridique, de liberté syndicale au Myanmar. En tant que secrétaire général de la Fédération indépendante des syndicats - Birmanie (FTUB), il a indiqué qu'il est impossible pour son organisation de fonctionner librement ou d'être inscrite sur les registres officiels et que leurs activités sont devenues clandestines. Travailler, coopérer ou simplement entrer en contact avec son organisation peut être puni de la peine la plus lourde qui soit, la peine de mort. La FTUB maintient ses structures à la fois à l'intérieur et à l'extérieur du pays, ainsi que ses activités à l'intérieur de la Birmanie, comme l'organisation et la formation, la collecte de preuve des droits des travailleurs, l'engagement dans les conflits du travail, et la surveillance de la dénégation des droits à la négociation collective. Les organisations syndicales ont également rassemblé des preuves du travail forcé, qui ont été communiquées au Bureau et au mouvement syndical international. Pour preuve de la dénégation de la liberté syndicale, il a souligné quatre cas décrits dans le cas no 2268 du Comité de la liberté syndicale, relatifs aux entreprises Motorocar Tyre, Unique Garmet, Myanmar Texcamp et Myanmar Yes Garment, les trois dernières étant localisées dans la zone industrielle de Hlaing That Ya. Le schéma des cas est identique: après revendication de leurs droits, les travailleurs ont été menacés, renvoyés ou arrêtés, l'intervention de la police ou de l'armée étant monnaie courante. Dans tous ces cas la FTUB a également envoyé des lettres officielles à la fois aux employeurs concernés, y compris, quand nécessaire, aux propriétaires étrangers des compagnies, par exemple aux Etats-Unis, et au ministère du Travail. Malgré ces actions, les membres de la FTUB ont été accusés de haute trahison pour être simplement entrés en contact avec l'OIT. Shwe Man, Min Kyi et Aye Myint sont en prison depuis juillet 2003. L'orateur a remercié l'OIT pour les efforts déployés, tels que les visites dans les prisons où sont détenus ses trois collègues, et il a demandé à la commission de prier instamment les autorités de les libérer. Il a attiré l'attention de la commission sur un autre cas d'importance concernant trois membres et dirigeants de la FTUB, similaire à celui des trois autres membres détenus depuis 1997 et condamnés à perpétuité: U Myo Aung Thant, Khin Kyaw et Thet Naing. Il a souligné la similitude frappante des cas de deux d'entre eux, U Myo Aung Thant et Khin Kyaw, et de celui de leurs trois collègues condamnés à mort en novembre 2003, bien connu par la commission. Comme dans les trois nouveaux cas, les collègues détenus depuis 1997 n'ont pas eu droit à un procès équitable et ont été condamnés pour possession d'équipements terroristes, alors qu'en fait c'est leur contact avec la FTUB qui a été sanctionné. La condamnation de U Myo Aung repose sur une confession obtenue sous la torture. L'orateur a demandé à la commission de demander leur libération immédiate. Thet Naing est emprisonné pour avoir fait la grève alors même que la condamnation exacte n'a jamais été prononcée. L'orateur a exprimé l'espoir que la commission demande la libération de tous les membres, activistes et dirigeants syndicaux actuellement détenus, et que le gouvernement respecte entièrement les dispositions de la convention à la fois dans la législation et dans la pratique.

    Le membre gouvernemental de la Norvège, s'exprimant également au nom des gouvernements du Danemark, de la Finlande, de l'Islande et de la Suède, s'est déclaré profondément préoccupé par la situation des syndicats au Myanmar et a rappelé que la commission formule des commentaires sur la non-application de cette convention par le gouvernement depuis plusieurs années. Il a eu le profond regret de constater qu'il n'y a absolument aucun progrès à signaler sur le plan de l'élaboration d'un cadre législatif dans lequel des organisations de travailleurs et d'employeurs libres et indépendantes pourraient être constituées, ce qui reflète le peu de signification reconnue par le gouvernement aux problèmes fondamentaux. Il a accueilli favorablement l'information contenue dans la lettre du représentant gouvernemental du 3 juin, dans laquelle il est indiqué que le 20 mai 2004 la convention nationale a discuté des principes de base relatifs aux droits des travailleurs, y compris ceux sur les organisations du travail. Il a néanmoins rappelé au représentant gouvernemental que ces principes comprennent les droits de base des travailleurs et des employeurs de constituer les organisations de leur choix et de s'y affilier, sans autorisation préalable, et le droit pour ces organisations d'organiser librement leurs activités et de s'affilier sans aucun obstacle à des organisations internationales. Il a prié instamment, une nouvelle fois, le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer librement les droits qui leur sont garantis par la convention, dans un climat de sécurité et exempt de toute menace. Enfin, il a demandé au gouvernement de fournir les informations nécessaires en réponse aux problèmes majeurs soulevés par la CISL.

    Le membre travailleur de la Thaïlande a déclaré que près de 2 millions de travailleurs migrants du Myanmar vivent en Thaïlande. La FTUB a organisé ces travailleurs en coopération avec des organisations thaïlandaises et a assisté les travailleurs déportés au Myanmar qui couraient le risque d'être arrêtés. La FTUB et son syndicat sont en train d'envisager de reconnaître aux travailleurs migrants la possibilité de s'affilier à des organisations syndicales thaïlandaises afin de défendre leurs droits. Les organisations syndicales thaïlandaises ont également aidé les marins du Myanmar à s'organiser.

    Le membre travailleur du Japon a déclaré que ce cas à l'examen depuis de nombreuses années est l'un des pires jamais connu. La déclaration des représentants gouvernementaux n'apporte pas le moindre indice d'une amélioration. La principale raison qu'il n'ait pas tenu compte des recommandations de la commission d'experts réside dans le soutien politique de pays appartenant principalement à la région asienne, encore qu'il soit heureux de constater que la Malaisie ait déclaré qu'elle pourrait ne plus défendre le Myanmar contre les critiques internationales si Aung San Suu Kyi n'était pas remise en liberté. Une deuxième raison réside dans la persistance du soutien économique de l'étranger, qui s'élevait à 7,4 milliards de dollars E.-U. à la fin de mars 2001. Les dix principaux investisseurs étrangers au Myanmar sont, par ordre d'importance: Singapour, le Royaume-Uni, la Thaïlande, la Malaisie, les Etats-Unis, la France, l'Indonésie, les Pays-Bas, le Japon et la République de Corée. Il convient de noter que la Chine soutient, elle aussi, le gouvernement du Myanmar. L'intervenant a mis en relief les graves atteintes aux principes de l'OIT dans les zones franches d'exportation, où les travailleurs ne peuvent pas s'affilier à un syndicat ni en constituer un et se trouvent totalement démunis sur le plan de la protection de leurs intérêts et de leurs droits. L'un des objectifs essentiels de la politique antisyndicale des autorités est d'attirer les investissements directs étrangers dans les zones franches d'exportation.

    La membre gouvernementale de Cuba a indiqué que son gouvernement accorde une grande importance à la résolution des difficultés auxquelles fait face le Myanmar dans l'application des dispositions de la convention. Le gouvernement du Myanmar a déjà fait preuve de sa volonté de coopération au cours de l'examen sur l'application de la convention no 29. La représentante gouvernementale a exprimé sa confiance dans les progrès sur l'application de la convention no 87 que réalisera le Myanmar grâce au dialogue et à la coopération. Elle a indiqué la nécessité pour le gouvernement d'adopter un cadre législatif favorable à l'application de la convention, pour lequel l'assistance du BIT serait très utile.

    Le représentant gouvernemental a souhaité répondre aux commentaires formulés au cours des discussions à propos des trois personnes ayant eu des rapports avec l'OIT, qui ont été condamnées pour haute trahison. Le représentant a déclaré avoir déjà informé la commission à l'occasion de la séance spéciale sur le Myanmar de l'issue favorable du premier appel interjeté par ces personnes devant la Cour suprême, laquelle a revu leurs condamnations et les a commuées en peines plus légères. Il a fait valoir que c'est la première fois que les instances judiciaires prennent en considération les avis et préoccupations exprimés par une organisation internationale. Non seulement ces trois personnes mais aussi les six autres qui ont été condamnées pour haute trahison ont vu leur peine commuée. L'orateur a ajouté qu'une lettre qu'il avait adressée au Directeur général le 3 juin 2004 aborde le noeud du problème. Les éléments suivants sont développés dans cette lettre: 1) Min Kyi (a) Naing Min Kyi, Aye Myint (a) Myint Aye Maung et Shwe Mann (a) Zeyar Oo ont le droit de se pourvoir une deuxième fois en appel devant la Cour suprême pour une nouvelle révision de leur cas. 2) Le 28 novembre 2003, le juge de la Cour du district nord de Yangoon, en prononçant sa sentence à l'égard de Min Kyi (a) Naing Min Kyi et Aye Myint (a) Myint Aye Maung, a par inadvertance fait référence de manière inappropriée à l'OIT. C'est l'une des raisons pour lesquelles il a fallu réviser les procès de neuf personnes, dont Min Kyi (a) Naing Min Kyi, Aye Myint (a) Myint Aye Maung et Shwe Mann (a) Zeyar Oo. 3) Le représentant gouvernemental a donné à nouveau l'assurance qu'en aucune circonstance le contact et la coopération d'un citoyen du Myanmar avec l'OIT ne constituent un délit au regard de la législation en vigueur au Myanmar. 4) Il a exprimé l'espoir que ces éléments, notamment les points 2) et 3), seront dûment reflétés dans le jugement en deuxième instance de la Cour suprême. Dans cette lettre, il a également signalé que, tel que prévu par l'accord formel sur le facilitateur désigné par le BIT, celui-ci a déjà obtenu "le libre accès à ces personnes et autres témoins, à tous les stades de la procédure" et qu'il a pu bénéficier de la pleine coopération des autorités du Myanmar dans l'accomplissement de ses fonctions, comme en atteste le rôle qu'il a pu jouer dans le cas de ces trois individus. Le représentant gouvernemental a assuré la commission que le facilitateur continuera de bénéficier du même libre accès et de la même coopération dans l'avenir.

    S'agissant de la Convention nationale, le représentant gouvernemental a fait valoir que la responsabilité du gouvernement actuel, par nature transitoire, est de tracer le chemin en vue de l'adoption d'une nouvelle Constitution et de l'instauration d'un gouvernement conformément à la Constitution. C'est pourquoi il fait tout ce qui est en son pouvoir pour la réussite de la mise en oeuvre de la feuille de route. La convention nationale est le reflet de toutes les couches de la société, elle réunit des représentants des partis politiques et des races nationales, des personnalités représentatives de divers milieux. Depuis l'annonce de la date de la convocation de la convention, le gouvernement, à travers divers contacts, a démontré qu'il était prêt à admettre la participation de la Ligue nationale pour la démocratie (LND). Les délégués de la LND ont quitté la convention nationale de leur propre initiative en 1996 et se sont trouvés dans l'interdiction d'y participer par l'effet de son règlement et de ses statuts. Le gouvernement a manifesté sa bonne volonté en envoyant des invitations aux délégations de la LND avant même que celles-ci ne fassent officiellement recours. Ce geste démontre la sincérité du gouvernement. Le gouvernement a non seulement autorisé la réouverture du siège de la LND mais encore, par marque de magnanimité, levé les restrictions frappant cinq hauts dirigeants du parti. De plus, à travers des contacts personnels, il a prié instamment Daw Aung San Suu Kyi à plusieurs reprises de permettre aux délégués de la LND de participer à la convention nationale. A la demande de la LND, des dispositions ont également été prises pour permettre aux membres du comité exécutif central de rencontrer Daw Aung San Suu Kyi et de discuter librement. Le représentant gouvernemental a souligné l'importance cruciale de la réussite de la convocation de la convention nationale. Le maintien de la paix et de la stabilité revêt une importance déterminante pour le succès de la convention. Mille quatre-vingt-huit délégués participent actuellement à la convention nationale, dont 54 seulement de la LND. La LND de Shan et un petit parti Kokang ont décidé de rester à l'écart. De l'avis du représentant, il est évident que la LND et ses partenaires placent les intérêts du parti et des individus au-dessus de ceux de la nation. En dernier lieu, le représentant gouvernemental a protesté contre l'affront que constitue pour la commission la présence en son sein de M. Maung Maung, individu fuyant la justice, et il a rappelé avoir déjà remis une lettre, à ce sujet, à la présidente de cette commission le 10 juin.

    Les membres travailleurs ont pris note du fait que le représentant gouvernemental a présenté peu de faits nouveaux. Mis à part des demandes de coopération avec l'OIT, il n'y a pas de progrès, alors qu'il y a urgence. S'agissant de la révision devant la Cour suprême du cas de trois personnes accusées de haute trahison dont il était question dans la lettre, les membres travailleurs ont demandé au gouvernement de garantir le droit de choisir sa défense librement et le droit à un jugement public. La commission doit aussi demander au gouvernement de mettre en oeuvre les recommandations du Comité de la liberté syndicale.

    Les membres employeurs ont déclaré que la commission a déjà étudié les problèmes du système judiciaire dans le cadre de la convention no 29. Enfin, ils ont rappelé que la violation de la convention dans les faits est évidente et nullement contestée par le gouvernement.

    Le représentant gouvernemental a déclaré qu'une certaine confusion quant au nombre exact de personnes concernées a été entretenue tout au long des discussions. D'autre part, il a fait valoir que son pays considérerait l'inscription de ce cas dans un paragraphe spécial comme un reniement des principes fondamentaux de l'OIT et que, si cette décision se confirmait, son gouvernement en tirerait les conclusions qui s'imposent.

    La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion approfondie qui a suivi. La commission a rappelé qu'elle a discuté de ce grave cas à de nombreuses reprises en un peu plus de vingt ans, et que depuis 1996 ces conclusions font l'objet d'un paragraphe spécial en raison du défaut continu d'application de la convention. La commission est conduite à signaler à nouveau malgré cela que, bien que ce cas ait été examiné de manière répétée, aucun progrès n'a été constaté quant à l'établissement d'un cadre législatif qui permettrait la constitution d'organisations de travailleurs libres et indépendantes. La commission a pris note avec une profonde préoccupation des informations communiquées concernant neuf personnes, dont trois condamnées pour haute trahison, au motif d'avoir eu des contacts avec l'OIT et de s'être affiliées à la Fédération des syndicats de Birmanie. La commission a pris note du fait que le Comité de la liberté syndicale a été saisi d'un cas urgent et grave ayant trait à la condamnation de trois personnes dont deux subissent des peines d'emprisonnement, pour exercice d'activités syndicales. La commission a prié instamment le gouvernement de libérer celles de ces personnes encore en prison et de communiquer la teneur du jugement par lequel un dirigeant syndical a été condamné par contumace. La commission a pris dûment note des informations fournies par le gouvernement selon lesquelles la convention nationale procède à l'élaboration d'une Constitution et, une fois que cette Constitution aura été promulguée, il s'efforcera de mettre en place un cadre législatif pour la reconnaissance de la liberté syndicale. Rappelant que, depuis la ratification de la convention par le gouvernement voici cinquante ans, la législation et la pratique nationales accusent des divergences fondamentales par rapport à la convention, la commission a prié le gouvernement dans les termes les plus fermes d'adopter de toute urgence les mesures et mécanismes nécessaires pour garantir en droit et dans la pratique, à tous les travailleurs et aux employeurs, le droit de constituer les organisations de leur choix sans autorisation préalable et de s'y affilier ainsi que le droit, pour ces organisations, de s'affilier à des fédérations, confédérations et organisations internationales, sans ingérence des autorités publiques. De même, la commission a souligné que le respect des libertés publiques est essentiel pour l'exercice de la liberté syndicale, et elle a appelé instamment le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que travailleurs et employeurs puissent exercer les droits garantis par la convention dans un climat de pleine liberté et de sécurité, exempt de violence et de menaces. La commission a prié instamment le gouvernement de communiquer tout projet de loi pertinent, ainsi qu'un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises pour assurer une plus grande conformité à la convention, incluant une réponse aux commentaires formulés par la CISL, de sorte que ce rapport puisse être examiné par la commission d'experts cette année. La commission a exprimé l'espoir d'être en mesure de constater l'an prochain des progrès significatifs en la matière.

    La commission a décidé de faire figurer les présentes conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport. Elle a également décidé de mentionner ce cas comme un cas de défaut continu d'application de la convention.

    Le représentant gouvernemental a déclaré qu'une certaine confusion quant au nombre exact de personnes concernées a été entretenue tout au long des discussions. D'autre part, il a fait valoir que son pays considérerait l'inscription de ce cas dans un paragraphe spécial comme un reniement des principes fondamentaux de l'OIT et que, si cette décision se confirmait, son gouvernement en tirerait les conclusions qui s'imposent.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 2003, Publication : 91ème session CIT (2003)

    Un représentant gouvernemental a souligné que le Myanmar, pays en transition, fait tout ce qui est en son pouvoir pour promouvoir les droits, les intérêts et le bien-être de ses travailleurs et, dans le même temps, prendre les mesures qui s'imposent en vue de l'adoption d'une constitution de l'Etat solide et durable. Il a réfuté l'idée selon laquelle le gouvernement n'aurait rien fait pour mettre en uvre la convention no 87 et recourrait à des man uvres dilatoires depuis quarante ans. Le Conseil révolutionnaire a pris le pouvoir en 1962 et un Etat socialiste a été mis en place par référendum en 1974, les travailleurs ayant alors obtenu l'autorisation de constituer des organisations conformément à la Constitution de l'Etat, organisations qui ont fonctionné jusqu'en 1988. Les transformations politiques fondamentales, et la transition d'un système politique à un autre, ont nécessairement des répercussions dans tous les secteurs, y compris dans celui des affaires sociales. Pendant l'ère socialiste, la première des priorités du peuple du Myanmar a été l'émergence d'une constitution d'Etat, la création d'organisations de travailleurs ne pouvant venir qu'après cela. Le gouvernement s'efforce de mettre en place une démocratie moderne, pacifique et avancée, conformément aux aspirations du peuple du Myanmar. Après avoir restauré la paix et la stabilité, le Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC) a axé ses efforts sur le développement politique, économique et social, de manière à poser les fondements nécessaires à la mise en place d'une constitution forte et durable. Rappelant à la commission que toutes les lois d'un pays découlent de sa Constitution, le représentant gouvernemental a souligné que ce principe s'applique inclusivement aux lois devant permettre la constitution de syndicats véritablement dignes de ce nom. C'est pourquoi tout ce que le gouvernement peut faire pendant la période de transition, c'est de prendre des mesures transitoires et de tirer parti des mécanismes existants de ces associations pour assurer la protection des droits et des intérêts des travailleurs dans la mesure autorisée par les circonstances. Pour illustrer les mesures prises par le gouvernement dans ce sens, l'intervenant a mentionné les associations pour le bien-être des travailleurs constituées dans les établissements suivants: usine de vêtements Guston Molinel, usine de vêtements Textcamp, usine de vêtements Yes, usine de vêtements Tarshin. Il a également mentionné un certain nombre d'associations professionnelles: l'Association des gens de mer naviguant au long cours, l'Association des femmes entrepreneurs, l'Association des chirurgiens dentistes, l'Association des ingénieurs, l'Association d'amitié entre les femmes de l'ANASE, l'Association des journalistes et écrivains et l'Association des entreprises de construction. Ces organismes sont autant de précurseurs de futurs syndicats. Elles servent les intérêts des travailleurs au mieux de leurs possibilités dans les conditions actuelles. Par exemple, l'Association des gens de mer naviguant au long cours a été constituée par des travailleurs de cette catégorie, qui ont librement élu leurs dirigeants au sein d'un comité exécutif, et cette association exerce librement ses activités dans l'intérêt de ses membres. Cette association présente beaucoup d'affinités avec un syndicat; le gouvernement a d'ailleurs déposé un exemplaire de ses statuts au BIT. Ces éléments constituent une avancée majeure dans le sens de l'application de la convention no 87.

    Le représentant gouvernemental a déclaré que les mécanismes existants de protection des droits des travailleurs fonctionnent bien au Myanmar, et que les plaintes et les conflits sont réglés de manière efficace et pacifique par la conciliation et la négociation. En 2002, le Département du travail a ainsi examiné 92 plaintes portant sur des conflits concernant 60 lieux de travail et impliquant au total 29 054 travailleurs, dont 14 202 directement concernés. Tous les cas ont été réglés par voie de négociation et de conciliation.

    Le gouvernement fait tout ce qui est en son pouvoir pour progresser dans le sens de l'application de la convention. Il a bénéficié de l'assistance technique du BIT pour cela, notamment à travers des déplacements d'experts du Département des normes. Le gouvernement coopère avec l'OIT à propos de la mise en uvre de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Il a largement progressé dans ce domaine, comme en atteste l'accord récemment conclu avec l'OIT sur le plan d'action conjoint pour l'élimination du travail forcé. Cet accord constitue un modèle en matière de droits de l'homme, modèle qu'il conviendrait de suivre avec la convention no 87. L'assistance technique de l'OIT dans ce domaine permettrait de poursuivre une coopération fructueuse entre l'OIT et le Myanmar.

    Le gouvernement est en consultation avec l'OIT sur les modalités devant permettre de renforcer les associations de bien-être des travailleurs et sur les autres mesures pour progresser dans ce domaine. Le 20 mai 2002, la délégation du Myanmar a discuté de la convention no 87 avec le Directeur général et avec d'autres hauts fonctionnaires, et elle reste en contact régulier avec le Département des normes.

    Pour conclure, le représentant gouvernemental a souligné l'importance du rôle que l'OIT est appelé à jouer en aidant les Etats Membres à mettre en uvre les conventions fondamentales de l'OIT. Il estime que l'OIT devrait s'abstenir de censurer les Etats qui font des efforts sincères pour appliquer les conventions. Il a exprimé l'espoir que la commission comprendrait la position du gouvernement, et que les discussions et la coopération avec l'OIT se traduiront par des résultats fructueux sur le plan de l'application des obligations du pays.

    Les membres travailleurs ont fait valoir que, bien que l'observation de la commission d'experts soit brève, le cas du Myanmar n'est pas nouveau. Il a été débattu à 15 reprises par la Conférence au cours des vingt-deux dernières années, et ce avant même que la commission d'enquête portant sur la violation par le Myanmar de la convention no 29 sur le travail forcé, 1930, ne soit créée. En ce qui concerne la convention no 87, on a fait figurer un paragraphe spécial sur ce cas à huit reprises dont cinq pour défaut continu d'application de la convention. Parmi les nombreux cas examinés au titre de l'application de la convention no 87, il s'agit du seul cas faisant état d'une absence totale de liberté d'association sur une aussi longue période. Ces violations relatives à la liberté d'association interviennent dans un climat de répression brutale des droits de l'homme et des libertés fondamentales par le régime militaire, comme l'ont démontré les événements tragiques de ces deux dernières semaines. De nombreuses violations ont été portées à la connaissance des organes et institutions des Nations Unies, y compris l'OIT. La situation est observée de très près par la Commission des droits de l'homme, le Secrétaire général de l'ONU, l'Assemblée générale ainsi que le Comité des droits de l'enfant qui ont déploré: "les violations persistantes, flagrantes et systématiques des droits de l'homme au Myanmar, notamment les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, la disparition forcée, les viols, les tortures, les traitements inhumains, le déni de la liberté de réunion, d'association, d'expression, de religion et de mouvement" (résolution 2002/67 de la commission, paragraphe 5 a), résolution A/RES/56/231 de l'Assemblée générale, paragraphe 4). En février 2003, l'Assemblée générale s'est déclarée de nouveau gravement préoccupée par "les violations systématiques des droits de l'homme, y compris les droits civils, politiques, économiques, socioculturels, dont continue à souffrir le peuple du Myanmar; les exécutions extra-judiciaires, les nouveaux cas d'arrestations politiques et le maintien en détention de prisonniers, dont certains ont purgé leur peine, le déni de liberté de réunion, d'association, d'expression et de mouvement, le mépris généralisé de la légalité" (résolution A/RES/57/231, paragraphe 3 a) et b) de l'Assemblée générale).

    En date du 28 mai 2003, la CISL a soumis à l'OIT une plainte de 33 pages avec plus de 150 pages d'annexes pour violation de la liberté d'association par le régime. La plainte porte essentiellement, d'une part, sur le cadre législatif qui permet au régime de supprimer toute liberté d'association et, d'autre part, dénonce de nouveaux cas de violation qui démontrent que le régime militaire maintient un système répressif s'opposant systématiquement à toute manifestation de la liberté d'association. Les membres travailleurs ont prié la commission d'experts d'examiner les informations détaillées fournies par la CISL et d'en tenir compte dans son prochain rapport ainsi que des réponses que le gouvernement pourrait fournir. Ils ont indiqué que pour des raisons arbitraires et le prétexte fallacieux de manque de temps, certains délégués ne pourront intervenir. Les organisations concernées adresseront en temps utile leurs observations à la commission d'experts et espèrent que le gouvernement saura répondre à leurs préoccupations.

    Les membres travailleurs ont prié la commission d'experts de porter une attention toute particulière à l'article de la CISL dont les commentaires apportent un complément d'information relatif au cadre législatif supprimant toute liberté d'association, et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un examen complet. Ils ont réitéré que, en dépit des nombreuses déclarations de bonne volonté du gouvernement excipant de l'existence de projets législatifs tendant à autoriser la création d'organisations de travailleurs libres et indépendantes, aucun progrès n'a été enregistré à ce jour.

    Les membres travailleurs ont rappelé que M. Maung Maung, secrétaire général de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), ainsi que d'autres travailleurs qui, à la fin des années quatre-vingt, avaient tenté d'organiser un syndicat indépendant dans une compagnie minière d'Etat ont été licenciés, ont fait l'objet de menaces et finalement été contraints à l'exil après la campagne de répression militaire en août 1988. La FTUB est considérée par le régime militaire comme une organisation clandestine et tout travailleur la soutenant le fait au péril de sa vie. Néanmoins, la FTUB poursuit ses activités clandestines dans le pays de manière clandestine en aidant à la mise en place et au développement de réseaux avec de nouveaux syndicats indépendants, dans un certain nombre de communautés ethniques, ferment de nouvelles structures démocratiques. La reconnaissance dans le monde de la FTUB en tant que syndicat légitime, alors que le régime n'y voit qu'une organisation subversive, ne fait que souligner l'absence de liberté d'association au Myanmar. Bien que le représentant gouvernemental présente les associations de bien-être des travailleurs et les commissions de contrôle des travailleurs comme autant de preuves de la liberté d'association, la commission d'experts, en accord avec les travailleurs, estime qu'elles ne pourraient constituer un substitut à la liberté fondamentale d'association prévue par la convention.

    Les membres travailleurs ont rappelé que les deux représentants de la FTUB qui ont été arrêtés en 1997 puis jugés coupables de haute trahison par des tribunaux spéciaux n'ont, depuis, jamais été revus. En conséquence, ils ont demandé au représentant gouvernemental de fournir un rapport permettant de savoir ce qu'il est advenu de ces personnes. Par ailleurs, les membres travailleurs ont déclaré être toujours dans l'attente d'une réponse concernant Saw Mya Than, autre membre de la FTUB, dont l'assassinat le 4 août 2002 a été porté à la connaissance de l'OIT et évoqué le 9 novembre 2002 par la chargée de liaison de l'OIT devant la Commission gouvernementale d'application des normes.

    Les membres travailleurs ont souligné qu'ils considéreraient toute nouvelle attaque à l'encontre de M. Maung Maung dans le contexte de la vague de répression des deux dernières semaines comme une menace à son bien-être et ont demandé à la commission de souligner dans ses conclusions que de telles attaques seraient inacceptables. Enfin, les travailleurs ont informé la commission qu'en réponse aux mesures coercitives dont Mme Aung San Suu Kyi a été victime le 30 mai 2003 et à la vague de répression qui a frappé la Ligue nationale pour la démocratie le Sénat des Etats-Unis a approuvé un projet de loi sur la liberté et la démocratie au Myanmar. Ce texte aura bientôt force de loi et les membres travailleurs ont souhaité que, suivant cet exemple, d'autres nations adoptent des mesures de cet ordre jusqu'à ce que le régime militaire du Myanmar libère tous les prisonniers politiques, qu'il s'explique sur les événements du 30 mai 2003 et qu'il relance le processus national de réconciliation. C'est seulement à ces conditions que l'on pourra considérer qu'il existe un climat garantissant la liberté d'association des travailleurs et des employeurs en vertu de la convention no 87.

    Les membres employeurs ont rappelé que la commission a discuté de ce cas à huit reprises au cours des dix dernières années et que le gouvernement a déclaré pendant huit ans qu'il procédait à l'élaboration d'une nouvelle constitution et de nouvelles lois, y compris une loi sur les syndicats. Toutefois, aucun développement ne peut être constaté dans les faits jusqu'à maintenant, et le gouvernement n'a pas non plus fourni de telles informations lors de la présente session de la commission. Le représentant gouvernemental s'est une fois de plus référé à un certain nombre d'organisations existantes, lesquelles, comme il l'a admis, ne sont que des substituts des véritables syndicats prévus dans la convention. Il n'existe pas de liberté d'adhérer et de constituer des organisations sans ingérence et sans autorisation préalable. Considérant qu'aucune information n'a été communiquée sur la manière selon laquelle les mesures législatives ont été entreprises, le gouvernement a été prié de communiquer les projets de lois existants à la commission d'experts. Si la commission considère que la déclaration du représentant gouvernemental reflète la volonté de prendre de nouvelles mesures, ceci devrait être noté. Comme le représentant gouvernemental a évoqué l'application de la convention no 29, pour laquelle l'OIT a dû aller jusqu'à faire jouer l'article 33 de la Constitution, les membres employeurs espèrent qu'il ne sera pas nécessaire de suivre un chemin aussi difficile en ce qui concerne la convention no 87. Les modifications législatives et pratiques nécessaires pour assurer le respect de la convention n'ont toutefois pas encore été réalisées, et les restrictions et l'ingérence de l'Etat se poursuivent. La commission devrait par conséquent exhorter une fois de plus le gouvernement à prendre les mesures nécessaires.

    L'observateur de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a relaté à la commission qu'en 1988 il avait été élu président du Syndicat des entreprises de pierres précieuses du Myanmar et du Syndicat minier de Birmanie. Il a participé au congrès du Syndicat des travailleurs de Birmanie qui s'est tenu au collège Htan Ta Bin de Rangoon le 30 août 1988. Le 18 septembre 1988, les militaires ont mené une campagne de répression, enjoint tous les travailleurs en grève de reprendre le travail, et promulgué l'arrêté no 6/88 qui interdit la liberté syndicale sous peine de cinq ans d'emprisonnement. Il était retourné au travail avec les autres quand, le 24 octobre 1988, la direction de l'entreprise convoqua six dirigeants du syndicat, dont lui-même, pour les informer qu'ils ne devaient pas se rendre au travail le lendemain. L'orateur quitta le pays pour éviter d'être arrêté, emprisonné et torturé car les renseignements militaires étaient à sa recherche. Bien que des syndicats indépendants se constituent en Birmanie, leurs membres sont contraints à l'exil. Les syndicats n'ont pas le droit d'être enregistrés et ne peuvent pas opérer au grand jour. Les membres des syndicats risquent des représailles, d'être arrêtés et détenus par les autorités si leurs activités sont découvertes. En octobre 1990, U Maung Ko, le secrétaire général du Syndicat du secteur portuaire, a été arrêté et emprisonné à la prison d'Insein. Le 9 novembre 1990, sa famille a été informée de sa mort par les travailleurs de l'Hôpital général de Rangoon. Les autorités ont prétendu qu'il s'était suicidé après avoir avoué ses activités, mais ni ses aveux, ni les circonstances dans lesquelles ils ont été extorqués n'ont été révélés. Un témoin oculaire, membre de la FTUB, qui avait vu le corps d'U Maung Ko avant l'enterrement a certifié que les nombreuses marques dont il était couvert montraient qu'il avait été torturé. Les cas concernant Myo Aung Thant, Khin Kyaw, Thet Naing et Myint Maung Maung, qui ont été évoqués devant la Commission de la Conférence en 1999 et 2001, n'ont toujours pas été résolus, et ces personnes sont toujours en prison après avoir été arrêtées pour leurs activités syndicales. Aye Aye Swe a été arrêté en 1998 pour ses activités syndicales et condamné à sept ans de prison.

    L'orateur a souligné qu'au Myanmar toute forme d'organisation syndicale est immédiatement réprimée, et les conflits de travail sont réglés par l'intervention immédiate de la police et des militaires qui recourent à des méthodes brutales et criminelles en invoquant la sécurité nationale. Les travailleurs sont l'objet d'intimidations, de menaces ou de répressions violentes. Les travailleurs sont accusés d'être des instruments communistes aux mains des impérialistes ou des terroristes. Les interventions des militaires et de la police s'accompagnent généralement d'agissements constituant des violations des droits de l'homme fondamentaux: violences physiques, arrestations, détentions sans garantie d'un procès équitable et tortures. Dans un tel climat de violence et de répression et en l'absence de toute forme d'organisation, le travail forcé ne peut pas être éliminé. Il faudrait que le BIT aide à constituer des syndicats représentatifs indépendants pour contribuer au bien-être de la population birmane.

    Le membre gouvernemental de la Chine a encouragé le gouvernement du Myanmar à coopérer avec le BIT en vue du respect de la convention no 87.

    Le membre gouvernemental de la Norvège, intervenant au nom des membres gouvernementaux des pays nordiques ainsi que du Canada et des Pays-Bas, a exprimé sa profonde préoccupation devant la situation des syndicats au Myanmar et a rappelé que la Commission de la Conférence a fait depuis plusieurs années des commentaires sur l'inexécution par ce pays de la convention no 87. Aucun progrès réel n'a été accompli dans l'élaboration d'un cadre législatif dans lequel des organisations de travailleurs libres et indépendantes pourraient se constituer. L'orateur a exhorté le gouvernement à adopter les mesures nécessaires pour assurer l'application du droit fondamental de se syndiquer et à communiquer copie, dans son prochain rapport, de toutes propositions de révision de la loi des syndicats.

    La membre gouvernementale des Etats-Unis a déclaré que le droit fondamental à la liberté syndicale et la question du travail forcé, qui a été discutée au cours d'une séance spéciale à la commission, sont intimement liés. L'équipe de haut niveau qui s'est rendue au Myanmar en septembre 2001 à propos de la convention no 29 considère que, si des organisations de travailleurs solides et indépendantes, tel que prévu par la convention no 87, existaient au Myanmar, elles pourraient fournir aux personnes victimes du travail forcé le cadre et le soutien collectif nécessaires pour les aider à tirer le meilleur parti des recours disponibles et à défendre leurs droits. Il est donc essentiel que la communauté internationale demeure concentrée sur le manquement du Myanmar à appliquer la convention no 87. Le représentant gouvernemental a noté qu'en réponse aux multiples appels lancés au gouvernement pour qu'il prenne les mesures nécessaires la commission n'a une fois de plus entendu que des promesses relatives à des révisions législatives et à une nouvelle Constitution, ainsi que des explications concernant les associations de travailleurs qui se substituent aux syndicats. Il n'en reste pas moins qu'aucun progrès réel n'a été accompli. Son gouvernement a déploré l'absence de volonté persistante à respecter des obligations librement consenties, et les événements récents au Myanmar démontrent également l'absence de volonté du gouvernement de respecter la liberté syndicale. Le gouvernement des Etats-Unis a appelé à la libération immédiate de Mme Aung San Suu Kyi et des autres membres de la LND, qui sont détenus, et à la réouverture des bureaux de la LND sans délai.

    Le représentant gouvernemental a tenu à apporter des précisions sur les circonstances du décès de M. Saw Mya Than. Les autorités du Myanmar ont mené une enquête méticuleuse dans ce cas. Cette enquête a permis de découvrir que Saw Mya Than était du village de Kalaikatoat dans le district de Township. Il n'appartenait à aucune association légale de travailleurs de l'éducation. Le syndicat des travailleurs de l'éducation de Kawthoolei est une organisation clandestine affiliée à l'association nationale Karen (KNU) qui est l'unique groupe rebelle du pays. Il n'était pas un chef élu du village comme l'a affirmé le FTUB. En réalité, il était employé par l'armée comme guide et non comme porteur. Le 4 août 2002, Saw Mya Than accompagnait une colonne armée en qualité de guide et à l'arrivée dans une localité à environ cinq miles du village, un petit groupe du KNU a fait sauter une mine Claymore. Saw Mya Than a été tué sur le coup par cette explosion. La colonne armée a récupéré son corps et l'a remis à sa famille. Elle a également organisé ses funérailles auxquelles elle a assisté. Elle a, en outre, dûment indemnisé les membres de sa famille. En fait, ces derniers ont été plutôt satisfaits de l'aide en nature et de la manifestation de sympathie de l'armée. Il est par conséquent clair comme de l'eau de roche que les allégations de la FTUB sont sans fondement, fabriquées de toutes pièces en vue d'une récupération politique.

    Quant à M. Maung Maung, le représentant gouvernemental a affirmé qu'il abusait une nouvelle fois la commission. Il s'est passé la même chose à la séance de la commission le 7 juin dernier. Au moment où l'orateur apprenait à la commission que M. Maung Maung était un criminel, un fugitif et un terroriste. L'orateur a souhaité qu'il soit donné acte de la protestation énergique de sa délégation quant à la manipulation de cette commission par cette personne.

    En ce qui concerne les récents événements, il a déclaré que, depuis la levée des restrictions à son encontre le 6 mai 2002, Daw Aung San Suu Kyi a été autoriséee à voyager librement en long et en large à travers le pays. Entre juin 2002 et avril 2003, Daw Aung San Suu Kyi a visité 95 districts. Le 30 mai 2003, elle a organisé avec ses sympathisants un cortège de plus de 100 motos roulant à grande vitesse au milieu de la foule dans une localité aux abords du district de Depeyin, occasionnant des blessures à un grand nombre de personnes. Cela a entraîné des échauffourées entre la population locale et les sympathisants, quatre personnes ayant trouvé la mort et 48 ayant été blessées. Après avoir effectué un second voyage dans la région de Shwebo, après la visite à Mandalay, des troubles sont survenus le 30 mai dans une localité proche de Depeyin. L'orateur a maintenu qu'il y avait eu là préméditation de la part de Daw Aung San Suu Kyi et non de la part du gouvernement.

    Il a rappelé que durant la présente session de la commission, il a été précisé que Daw Aung Suu Kyi était indemne et qu'elle n'avait même pas eu un seul bleu. M. Razali Ismail, envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, a déclaré à la presse pouvoir attester qu'elle avait bon moral, qu'elle ne présentait pas de blessure sur le visage ni d'égratignure, ni rien d'autre. L'orateur a souhaité souligner que les autorités devaient prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de DawAung Suu Kyi et d'autres membres de la NLD. Ces mesures ont un caractère temporaire. Le gouvernement continuera sa politique de réconciliation nationale et sa politique de transition vers la démocratie de manière graduelle et systématique.

    En conclusion, le représentant gouvernemental a déclaré que le bilan du Myanmar concernant l'élimination du travail forcé témoigne de progrès constants et significatifs. Le rôle de l'Organisation internationale du Travail devrait être d'assister les Etats Membres à mettre en uvre les conventions fondamentales de l'OIT et non de se poser en censeur négatif vis-à-vis d'un Etat Membre qui a sincèrement l'intention de mettre en uvre les conventions fondamentales de l'OIT, mais qui se heurte à certaines contraintes et difficultés.

    Les membres travailleurs ont demandé que le gouvernement communique à la commission d'experts tous les textes législatifs ayant trait à la liberté syndicale. Par ailleurs, suite aux récents événements survenus dans le pays, ils ont à nouveau appelé le gouvernement à libérer Mme Aung San Suu Kyi et à permettre la réouverture de tous les bureaux de la Ligue nationale pour la démocratie afin que le dialogue en vue de la réconciliation nationale puisse reprendre. Ils ont demandé que les nouvelles conclusions de ce cas comportent les mêmes éléments que celles qui ont été adoptées en 2001. Devant l'argumentation du représentant gouvernemental, selon laquelle l'évolution prend du temps et tout ne peut pas changer en un jour, ils ont rappelé que cela fait plus de quarante ans que la commission d'experts formule les mêmes commentaires sur le défaut d'application de la convention no 87 dans la législation et dans la pratique. Sur ces considérants, ils demandent que les conclusions de ce cas figurent dans un paragraphe spécial du rapport et qu'en outre elles signalent le défaut continu d'application de la convention.

    Les membres employeurs ont déclaré que, si l'on décèle quelques signes d'amorce d'une amélioration en ce qui concerne l'application de la convention no 29 par le Myanmar, question qui a été à nouveau discutée dans le cadre d'une séance spéciale de la commission, on ne peut pas en dire autant en ce qui concerne la convention no 87. Le gouvernement ne donne à nouveau que des informations générales, ne se référant aucunement à des mesures spécifiques qui auraient été prises. Les membres employeurs sont donc en accord avec les membres travailleurs pour demander que le rapport de la commission consacre à ce cas un paragraphe spécial, faisant état d'un défaut continu d'application de la convention.

    Le représentant gouvernemental a déclaré que, devant la pleine coopération et la bonne volonté authentique manifestée par le gouvernement du Myanmar, la commission n'aurait pas dû décider de faire figurer ce cas dans un paragraphe spécial. Le représentant gouvernemental a réservé la position de sa délégation quant aux conclusions adoptées, notamment en ce qui concerne les éléments touchant à la situation politique dans le pays.

    La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a fait suite. Elle a rappelé que la commission a examiné ce cas particulièrement grave à de nombreuses reprises au cours des dix dernières années et que, plus récemment, ses conclusions ont été reprises dans un paragraphe spécial pour défaut continu d'application de la convention.

    La commission s'est déclarée obligée, malgré cela, à constater une nouvelle fois l'absence de progrès réels dans le sens de l'adoption d'un cadre législatif autorisant la création d'organisations libres et indépendantes. Elle s'est déclarée obligée une fois encore à déplorer profondément la persistance de graves divergences entre la législation nationale et les dispositions de la convention, ratifiée il y a pourtant près de cinquante ans. Elle a constaté avec regret que les informations relatives à l'existence d'associations de travailleurs que le gouvernement a présentées ne permettent pas de considérer qu'une solution a été apportée aux problèmes de l'application de la convention soulevés par la commission d'experts.

    Préoccupée par l'absence totale de progrès quant à l'application de cette convention, la commission a exhorté une fois encore et dans les termes les plus énergiques le gouvernement à adopter de toute urgence les mesures et mécanismes nécessaires pour garantir en droit et dans la pratique, à tous les travailleurs et employeurs, le droit d'adhérer aux organisations de leur choix sans autorisation préalable, et à ces organisations le droit de s'affilier à des fédérations, des confédérations et des organisations internationales, sans ingérence des autorités publiques. La commission a souligné que le respect des libertés civiles est essentiel à l'exercice des droits syndicaux. C'est pourquoi elle a prié instamment le gouvernement de prendre des mesures pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer sans crainte les droits garantis par la convention dans un climat de pleine sécurité, à l'abri de toute menace ou crainte. La commission a prié instamment le gouvernement de communiquer pour examen à la commission d'experts, l'année prochaine, tout projet de législation et toute législation pertinente, ainsi qu'un rapport détaillé sur les mesures prises concrètement pour garantir une plus grande conformité avec la convention. La commission exprime le ferme espoir qu'il lui sera donné de prendre note dans un an de progrès significatifs.

    La commission a décidé de faire figurer ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport. Elle a décidé également de signaler ce cas comme un défaut continu d'application de la convention.

    Le représentant gouvernemental a déclaré que, devant la pleine coopération et la bonne volonté authentique manifestée par le gouvernement du Myanmar, la commission n'aurait pas dû décider de faire figurer ce cas dans un paragraphe spécial. Le représentant gouvernemental a réservé la position de sa délégation quant aux conclusions adoptées, notamment en ce qui concerne les éléments touchant à la situation politique dans le pays.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 2001, Publication : 89ème session CIT (2001)

    Un représentant gouvernemental a indiqué que, son pays étant partie à la convention, le gouvernement a fait rapport dans la mesure de ses moyens sur les progrès accomplis dans l'application de la convention, et que les rapports de la commission d'experts ont dûment fait état des informations qu'il a fournies. Toutefois, il a été parfois impossible, pour des raisons inévitables, de soumettre des rapports. L'orateur a rappelé que, à la suite de l'adoption de la résolution de l'OIT à l'encontre de son gouvernement à propos de la convention no 29, son gouvernement a manifesté son désaccord avec cette résolution qu'il a considérée comme partiale et injuste. Ce faisant, il a également décidé de se délier de la convention no 87, étant donné les allégations infondées qui avaient été faites à propos de son application. Voilà qui explique l'absence ces dernières années de rapport sur la convention. Grâce à la volonté politique du gouvernement et à la bonne collaboration entre le Myanmar et l'OIT, attitude que de nombreux Etats Membres bien intentionnés de l'OIT ont appuyée, il a été possible d'enregistrer des progrès sensibles dans l'application de la convention no 29. Pour démontrer ses bonnes intentions, le gouvernement a donc décidé, malgré les difficultés pratiques auxquelles il se heurte, d'apporter oralement des informations à la commission, plutôt que de soumettre une réponse écrite, à propos de l'application de la convention no 87 dont le Myanmar s'est délié. Dans des rapports précédents sur l'application de la convention, il avait été fait mention des réels efforts que le gouvernement avait fournis, ainsi que des difficultés rencontrées. La principale raison de ces difficultés est que le Myanmar est en train de passer d'une société socialiste à une société démocratique moderne et pacifique. L'orateur a ajouté que, lorsque la nouvelle Constitution, en cours d'élaboration, aura été adoptée, elle garantira dûment les droits des travailleurs, y compris les droits qui font l'objet de la convention. En attendant la nouvelle Constitution, le gouvernement s'efforce de protéger les droits des travailleurs en faisant appliquer la législation en vigueur. De plus, il avait été indiqué, dans ces précédents rapports, que la législation du travail était revue systématiquement. A titre d'exemple, la loi de 1926 sur les syndicats a été modifiée et adaptée au nouveau système politique et économique. De fait, une mission du BIT s'est rendue en 1994 dans le pays pour participer à un échange de vues sur des questions ayant trait à la convention. En 1995, une autre mission du BIT s'est rendue dans le pays. Ces visites n'ont pas permis de concrétiser l'application de la convention mais elles ont été très utiles et ont amplement démontré la volonté politique du pays. L'orateur a souligné que son pays prend des mesures concrètes pour instaurer des institutions démocratiques qui, entre autres, feront respecter le droit des travailleurs de constituer leurs propres organisations, et que les mécanismes en place permettent de protéger les droits des travailleurs. Le droit d'association a été accordé par le gouvernement et, dans plusieurs secteurs et entreprises, des associations de protection des travailleurs ont été instituées. Il existe également plusieurs organisations professionnelles et syndicales qui fonctionnent bien. De fait, on compte aujourd'hui plus de 2 000 associations de protection sociale qui garantissent la promotion et la protection des droits et des acquis des travailleurs. Ces organisations peuvent être considérées comme des précurseurs des syndicats, lesquels sont prévus dans la nouvelle Constitution. L'orateur a réitéré que, en attendant d'être pleinement en mesure d'appliquer la convention, le gouvernement garantira autant que possible la protection des droits et acquis des travailleurs. L'orateur a regretté l'impossibilité de soumettre le texte du projet de réforme de la loi sur les syndicats mais il a espéré pouvoir le faire dès que possible.

    Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental de s'être présenté devant la commission et d'avoir exposé ses commentaires. Ils ont fait remarquer qu'ils ont été surpris et troublés par ces commentaires qui traduisent tout sauf une attitude de coopération. Les informations du représentant gouvernemental qui font état de la répudiation des obligations de son pays en vertu de la convention no 87 sont particulièrement préoccupantes. Si les membres travailleurs ont interprété correctement sa déclaration, il s'agit d'un développement très grave qui assombrit sérieusement les débats de la commission. Il n'y a guère de choses à ajouter à ce qui a été dit à de nombreuses reprises au cours des vingt dernières années. Cependant, avec toute l'attention qui est accordée à la question du travail forcé, la commission ne devrait pas oublier le fait que la violation de la convention no 87 par le gouvernement de la Birmanie est un des cas les plus graves à avoir été examinés par la commission au cours de la dernière décennie. C'est la quatorzième fois que la commission discute de ce cas au cours des vingt dernières années, dont dix fois au cours des onze dernières années. A sept reprises, récemment, ses conclusions ont été reprises dans un paragraphe spécial de son rapport, les quatre dernières sous le titre "cas de défaut continu d'application de la convention". Les membres travailleurs ont regretté que ce cas continue à constituer un triste record, qui empire au vu de ce que le gouvernement déclare devant la commission aujourd'hui. Les membres travailleurs ont également rappelé à la commission que ce dossier est celui d'un gouvernement qui a continuellement répété son désir "sincère" de coopérer avec l'OIT, comme il l'a déclaré à la commission lors de sa séance spéciale sur l'application par la Birmanie de la convention no 29 au début de la semaine, mais n'est pas ce qu'indiquent les informations dont la commission a pris connaissance aujourd'hui. Le langage utilisé par les experts au sujet de la nature de la coopération du gouvernement est ferme et clair. La commission d'experts a rappelé "que depuis plus de quarante ans elle formule des commentaires sur le défaut d'application de cette convention, tant en droit qu'en pratique". Pour ce qui est de l'envoi de rapports, la commission d'experts "regrette profondément le manque de coopération manifesté par le gouvernement, notamment l'absence totale de rapports au titre de la présente convention depuis plusieurs années, malgré le grave défaut d'application de ses dispositions". Elle a également rappelé qu'une mission de contacts directs a été brusquement annulée en 1996 sans aucune explication. Le représentant gouvernemental s'est complu à ignorer ce point dans ses commentaires. Ainsi, cinq ans plus tard, l'engagement de permettre l'organisation d'une mission de contacts directs semble être oublié. En présentant la position des travailleurs, l'orateur a souhaité indiquer clairement qu'il n'y a pas de liberté syndicale en Birmanie, que ce soit dans la loi ou dans la pratique. Cette situation existe depuis de nombreuses années; toute tentative de s'organiser librement est étouffée rapidement et de la façon la plus sévère. Pour ce qui est de la législation, comme la commission l'a déclaré à de nombreuses reprises par le passé, il n'existe pas de loi sur les syndicats en vigueur en Birmanie, ni de structure juridique protégeant la liberté syndicale. La commission a discuté du décret no 6/88 publié après le coup d'Etat militaire de 1988. Les membres travailleurs n'ont pas souhaité répéter ce qui s'est dit au cours des années précédentes. Il suffit de dire qu'il s'agit d'un décret très large qui dispose que toutes les associations et organisations de Birmanie doivent obtenir l'autorisation du ministère des Affaires intérieures et religieuses avant de pouvoir être constituées. Cela constitue manifestement une violation de l'article 2 de la convention qui dispose que "les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières". Une fois de plus, la commission a fait état de projets pour une nouvelle Constitution. Il est fait mention de ces projets depuis des années. La commission a également relevé qu'un processus d'élaboration d'une nouvelle Constitution accepté par le peuple n'a jamais été lancé. Comme à de nombreuses reprises au cours des années précédentes, on parle à la commission a de projets d'élaboration d'une nouvelle législation du travail. Une fois de plus, il semble qu'absolument aucun progrès n'ait été accompli. Le gouvernement a été prié de manière répétée de communiquer ses projets au BIT et d'accepter son assistance, par exemple sous la forme d'une mission de contacts directs, pour assurer son respect total de la convention no 87. Les demandes des experts et de la présente commission n'ont jamais été prises en compte et la commission a été informée ce jour que cela continuerait d'être le cas. En ce qui concerne la pratique réelle dans le pays, les membres travailleurs ont informé la commission qu'un collègue travailleur, le Frère Maung Maung, participe à la Conférence cette année et est présent à la réunion. Il y a treize ans, le Frère Maung Maung était un dirigeant du Syndicat national des travailleurs miniers de Birmanie. Il a été licencié avec six collègues en application du décret no 6/88 pour avoir participé aux manifestations en faveur de la démocratie en 1988. Peu de temps après, il a été contraint à l'exil et a participé à la création de la Fédération des syndicats birmans (FTUB) dont il est actuellement le secrétaire général. La FTUB dispose de bureaux dans plusieurs pays et a soutenu la constitution de syndicats indépendants dans plusieurs zones ethniques. Contre toute attente, la FTUB a même été en mesure de constituer des organisations sur plusieurs lieux de travail dans le pays. Ces unités sont bien entendu considérées comme illégales et dangereuses par le régime, car la FTUB est bannie de Birmanie en tant qu'organisation terroriste. Toute personne prise en flagrant délit d'appartenance à l'une de ces unités est sévèrement punie. Les membres travailleurs ont de nouveau attiré l'attention de la commission sur deux dirigeants de la FTUB, Khin Kyaw et Myo Aung Thant, arrêtés en 1997. Khin Kyaw était un dirigeant du Syndicat des marins de Birmanie; il purge une peine de dix-sept ans de prison pour ses activités syndicales. Myo Aung Thant est membre du Syndicat national des entreprises pétrochimiques; il purge une peine de prison à vie pour avoir transmis des informations à des syndicats et à des organisations prodémocratiques en exil. Sa femme a également été arrêtée et condamnée à dix ans de prison. Le gouvernement a manifesté son mécontentement à propos de la participation de la Conférence du Frère Maung Maung. Il semble, à la lecture de la presse officielle, que le gouvernement l'accuse notamment d'avoir fabriqué de toutes pièces les milliers de pages de documentation qui ont été transmises à l'OIT et qui confirment l'existence du travail forcé. Il a souvent été la cible de violentes attaques personnelles dans les médias officiels. Le gouvernement a essayé d'empêcher sa participation à la Conférence de cette année en contestant les pouvoirs établis pour lui par la CISL. Le gouvernement prétendait notamment que son organisation n'est pas enregistrée légalement en Birmanie, probablement au regard du décret no 6/88. Cette contestation a été rejetée immédiatement par la Commission de vérification des pouvoirs. De tels cas de non-application constante d'une convention pendant de nombreuses années sont extrêmement préoccupants et ils risquent malheureusement de montrer les limites des résultats auxquels la commission peut parvenir. Cependant, comme le membre travailleur des Pays-Bas et d'autres intervenants l'ont déclaré en deux occasions cette année, les membres de la commission sont patients et continueront à faire tout ce qui sera nécessaire, aussi longtemps qu'il le faudra, pour obliger le gouvernement à faire ce qu'il n'a manifestement pas l'intention de faire, à savoir de respecter pleinement ses obligations en vertu de la convention no 87. A en juger par les commentaires du représentant gouvernemental, la patience de la commission continuera à être mise à rude épreuve. En conclusion, les membres travailleurs ont rappelé les commentaires formulés par les membres employeurs au cours de la discussion du cas du Swaziland, selon lesquels la commission n'est pas compétente pour traiter de questions politiques plus vastes. Bien entendu, la commission organise ses discussions autour des commentaires de la commission d'experts sur la violation d'une convention donnée par un pays. Cependant, la commission n'est souvent pas en mesure de séparer complètement ses discussions du contexte politique prévalant dans le pays. Les membres employeurs en sont certainement très conscients. S'agissant de la Birmanie, la commission d'enquête a indiqué très clairement au paragraphe 542 de son rapport que le problème du travail forcé ne serait pas réglé tant que n'interviendra pas un processus de normalisation politique. Il va sans dire que cela vaut également pour la liberté syndicale. Compte tenu de l'absence totale de progrès au cours des deux dernières décennies dans la mise en conformité de la législation et de la pratique avec la convention no 87, un changement fondamental dans la nature du régime, sinon un changement de régime lui-même, sera nécessaire avant que la commission puisse constater de réels progrès. Comme on l'a noté au cours de la séance spéciale sur l'application de la convention no 29 par la Birmanie, le groupe des travailleurs a exprimé son sincère espoir de voir les négociations en cours entre le régime et Aung San Suu Kyi aboutir à une normalisation politique, à un transfert du pouvoir à des dirigeants civils élus et à un retour au respect des principes de droit. Ils ont estimé que la libération de quelques dirigeants de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD) ces derniers jours constitue un bon signe. Ils ont également formé l'espoir de voir ces libérations conduire à la réouverture des bureaux de la NLD dans le pays afin que les négociations secrètes en cours puissent se transformer en véritable dialogue. On ignore cependant quels seront les résultats de ces négociations. A ce stade, il ne peut s'agir que d'espoirs. Les espoirs des travailleurs ont été refroidis par les commentaires du représentant gouvernemental qui a répudié la liberté syndicale. Si ces négociations échouent, l'histoire a démontré que ce n'est qu'une question de temps avant que les travailleurs ne lâchent leurs outils, ne quittent leurs lieux de travail et leurs exploitations agricoles et n'exercent leur droit de grève pour défendre leurs droits les plus fondamentaux. C'est précisément ce qui s'est passé en 1988 et qui n'a été écrasé que par une répression militaire massive. En conclusion, les membres travailleurs ont souhaité faire savoir à la commission que, si jamais cela se reproduit, ils seraient solidaires de leurs frères et s urs en Birmanie, comme ils l'ont été en 1988 et comme ils l'avaient été avec les travailleurs de Pologne, d'Afrique du Sud, du Chili et d'ailleurs. Etant donné le contexte des discussions qui ont lieu cette année, ils ont exprimé qu'ils espéraient et s'attendaient à ce que les membres employeurs se rallient également au soutien du peuple birman à un moment où il en a le plus besoin.

    Les membres employeurs ont rappelé que la commission d'experts commente ce cas depuis quarante ans et que la Commission de la Conférence a également discuté de cette affaire à plusieurs reprises. De fait, la Commission de la Conférence a mis ses conclusions relatives au Myanmar dans un paragraphe spécial au moins à sept occasions. Le principal problème est le déni du droit des travailleurs de constituer une organisation syndicale sans autorisation préalable. Au regard de la convention, cela est une violation du droit à la liberté syndicale. Par le passé, le gouvernement avait indiqué qu'il procédait à l'élaboration d'une nouvelle Constitution ainsi qu'à la révision et à la refonte de ses lois du travail. Aujourd'hui, le représentant gouvernemental a indiqué l'intention du Myanmar de se délier de la convention puisqu'il considère qu'il a été injustement traité par la Commission de la Conférence. C'est la raison que le gouvernement a donnée, pour expliquer qu'il n'a pas soumis de rapport à la commission d'experts. Si cette déclaration a pour but de dénoncer la convention, elle est donc en contradiction avec les déclarations du représentant gouvernemental relatives à la coopération entre son gouvernement et l'OIT. Le représentant gouvernemental a fait référence à plus de 2 000 organisations de protection sociale qui sont, selon lui, les précurseurs des syndicats. Il est manifeste que ces organisations ne sont pas des syndicats. Cette déclaration laisse à penser que le gouvernement craint les habitants de son propre pays puisqu'il les prive de la liberté de créer librement des organisations leur permettant de servir et de défendre leurs intérêts. Il est évident que le droit à la liberté syndicale n'existe pas au Myanmar, en droit ou en pratique. De plus, le représentant gouvernemental a clairement manifesté qu'il n'est pas disposé à coopérer avec la commission. Dans ces circonstances, les membres employeurs ne peuvent que constater cette situation. Le gouvernement a pris une nouvelle position politique dans cette affaire. Toutefois, l'OIT et la Commission de la Conférence n'ont pas d'influence sur cette décision politique. Leur mandat est de résoudre les conséquences de cette décision politique, à savoir la manière dont le gouvernement remplit ses obligations découlant de sa ratification de la convention. Cependant, ce gouvernement a clairement montré son manque de volonté pour prendre des mesures pour garantir pleinement le respect de la liberté syndicale. Par conséquent, cette situation regrettable, à savoir le fait que le gouvernement continue de ne pas appliquer la convention, devrait être reflétée dans les conclusions de la commission.

    Le membre travailleur du Pakistan s'est rallié sans réserve aux déclarations des membres employeurs et travailleurs à propos de ce cas. Il a rappelé que le Myanmar a affirmé à plusieurs reprises devant la commission son intention de réviser sa législation du travail. En fait, la commission entend les mêmes promesses depuis 1980. Pour ce qui est des déclarations du représentant gouvernemental concernant les associations de protection sociale, l'orateur a estimé devoir rappeler qu'il existe une nette différence entre les syndicats et ces organisations. Il a également souligné que, indépendamment des caractéristiques de son cadre constitutionnel, un Etat Membre qui ratifie une convention s'engage à rendre sa législation conforme à cet instrument en vertu des principes fondamentaux du droit international. Par conséquent, les excuses invoquées par le gouvernement pour prétendre que sa législation sera modifiée à l'avenir sont inacceptables. Qui plus est, le gouvernement invoque le même prétexte depuis vingt ans sans jamais rien faire dans ce domaine. L'orateur a rappelé que la Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement à de nombreuses reprises de modifier sa législation afin de garantir la liberté syndicale. La commission, constatant la gravité de la situation au Myanmar, a mentionné ce cas dans un paragraphe spécial à plusieurs reprises en 1995, 1996, 1997 et 1998. La Commission de la Conférence déplore une fois de plus l'absence de coopération de la part du gouvernement, qui se traduit par sa non-réponse à la commission d'experts. Il a souligné que le principe de la liberté syndicale est littéralement le sang dans les veines de l'OIT et que c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il est énoncé dans le Préambule de la Constitution de l'OIT de 1919 ainsi que dans la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail de 1998. Déplorant et condamnant la situation au Myanmar, l'orateur a appelé instamment le gouvernement à prendre des mesures spécifiques pour rendre la législation conforme aux dispositions des conventions nos 29 et 87. Il a exprimé l'espoir que la situation des travailleurs et des travailleuses au Myanmar puisse un jour s'améliorer.

    Le membre travailleur du Sénégal a déclaré que l'indifférence du gouvernement birman vis-à-vis de la commission est manifeste. Il a rappelé que la commission d'experts a pour mandat de contrôler l'application par les Etats Membres des conventions qu'ils ont ratifiées. Le cas de l'application de la convention no 87 par le Myanmar est une question récurrente, régulièrement inscrite à l'ordre du jour de la commission. L'orateur a pris note de l'annonce faite par le représentant gouvernemental selon laquelle une nouvelle Constitution ainsi qu'une nouvelle législation du travail sont à l'étude, mais a rappelé que ce n'est pas la première fois que le gouvernement fait des effets d'annonce qui ne sont pas suivis d'application. Selon les informations dont dispose la commission d'experts, les manquements à la convention continuent de plus belle et le droit des travailleurs birmans à constituer des organisations syndicales sans autorisation préalable, lequel est l'un des principes élémentaires énoncés par la convention, reste un objectif à atteindre. Les obstacles qu'ils rencontrent sont en effet nombreux et constituent un tour de vis supplémentaire dans la mise en uvre de ce qui constitue l'âme même des conventions fondamentales de l'OIT. La préservation de l'ordre public social ne peut pas s'accommoder de tels manquements. Il convient de réaffirmer avec force la place de la convention no 87 dans l'arsenal juridique du Myanmar. Le non-respect par ce pays des dispositions de la convention no 87 boucle un long catalogue de violations. L'orateur a estimé que les nombreuses années de saisine de la commission, sans aucune suite positive donnée par le gouvernement, portent un coup à ses relations avec la commission. Un Etat qui ratifie une convention prend l'engagement d'en appliquer les dispositions, y compris d'amender sa législation pertinente si nécessaire pour supprimer ou modifier les dispositions contraires à la convention ratifiée. En l'espèce, le gouvernement a promis d'adopter une législation qui n'a toujours pas vu le jour. L'orateur a conclu ses propos en affirmant que, si le clignotant essentiel qu'est l'inscription régulière des conclusions de la commission sur ce cas dans un paragraphe spécial n'a pas fonctionné jusqu'ici, c'est tout simplement parce que le gouvernement a délibérément choisi de se mettre en marge du système. Il a donc estimé qu'il faut condamner le gouvernement de ce pays avec fermeté. Enfin, il a souhaité exprimer toute sa considération pour ces "chevaliers d'une cause juste" que sont les syndicalistes birmans qui participent aux travaux de cette commission, en dépit des difficultés rencontrées.

    Le membre gouvernemental de la Norvège, s'exprimant au nom des gouvernements du Danemark, de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège et de la Suède, a exprimé le profond regret des pays nordiques devant le fait que le gouvernement n'a pas soumis les rapports demandés à la commission d'experts. A cet égard, il a rappelé que la commission d'experts dénonce depuis plus de quarante ans le défaut continu d'application de la convention no 87, en droit et en pratique. Les gouvernements des pays nordiques ont instamment prié le Myanmar de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les travailleurs puissent constituer, sans autorisation préalable, les organisations syndicales, fédérations et confédérations de leur choix et s'y affilier pour la défense de leurs intérêts. Ils ont demandé au Myanmar de prendre les mesures nécessaires pour garantir pleinement le droit d'organisation et lui ont demandé de communiquer, avec son prochain rapport, un exemplaire du récent projet de révision de la loi sur les syndicats afin que le BIT puisse en apprécier la conformité avec les dispositions de la convention.

    Le membre gouvernemental des Etats-Unis a noté que les membres travailleurs et employeurs avaient fait une présentation correcte de ce cas et qu'il partageait leur avis. Il a souligné qu'il s'agissait d'un cas grave qui était depuis longtemps à l'examen. L'intervention du représentant gouvernemental a été très décevante. Il est regrettable que, depuis quarante ans, le gouvernement n'ait pris aucune mesure pour garantir à ses travailleurs le droit de constituer des syndicats et de s'y affilier. Le gouvernement a maintes fois affirmé qu'il était en train d'élaborer une nouvelle législation et une nouvelle Constitution, mais la Commission de la Conférence n'en a jamais eu la preuve. Le comportement du gouvernement témoigne d'un mépris total non seulement de ses obligations internationales découlant de la ratification de la convention no 87, mais aussi des droits des travailleurs. La situation du Myanmar constitue une violation flagrante d'une convention fondamentale de l'OIT. L'orateur a déclaré qu'à l'instar de la commission d'experts son gouvernement considérait que cette situation était totalement inacceptable.

    Le représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré que sa délégation avait écouté attentivement les allocutions des membres employeur et travailleur ainsi que celles des autres orateurs. Sa délégation a expliqué à la commission les mesures prises par son gouvernement et les difficultés concrètes auxquelles celui-ci se heurte dans l'application de la convention. Il n'a rien de plus à ajouter à ce stade étant donné qu'il a déjà mentionné la révision de la Constitution du Myanmar et le rôle des associations de protection sociale dans la protection des travailleurs. Ce sont les mesures prises par le gouvernement pour respecter la convention. L'orateur a souligné que sa délégation s'était présentée devant la Commission de la Conférence pour démontrer que son gouvernement avait la volonté politique de coopérer avec l'OIT et pour prendre connaissance des préoccupations de la Commission. Il considère que la discussion a été utile. Il a écouté attentivement les observations formulées et son gouvernement les prendra en considération. Toutefois, il a tenu à signaler la très ferme objection de son gouvernement à la référence faite par les membres travailleurs à la Fédération des Syndicats libres de Birmanie (FTUB).

    Les membres travailleurs ont protesté contre la déclaration du représentant gouvernemental concernant la Fédération des Syndicats libres de Birmanie (FTUB), organisation avec laquelle le groupe des travailleurs entretient des relations de longue date. Ils défendent l'intégrité et la crédibilité de ce syndicat et souhaitent que vienne bientôt le jour où la FTUB sera autorisé en Birmanie et représentera les travailleurs qui l'ont choisie. Les membres travailleurs disent partager la tristesse des membres employeurs face au non-respect de la convention par la Birmanie et ont exprimé l'espoir que leur tristesse et leur colère seront reflétées dans les conclusions de la commission. Ils ont assuré le gouvernement que la commission continuerait à examiner ce cas jusqu'à ce que le gouvernement ait procédé aux changements requis.

    Les membres employeurs ont fait observer que les travaux de la commission ont débuté avec le cas du travail forcé au Myanmar et se sont achevés avec le cas du défaut d'application des dispositions de la convention no 87 par ce même pays. Les membres employeurs n'ont rien entendu de nouveau dans l'allocution de conclusion du représentant gouvernemental. Ils ont rappelé que le gouvernement avait affirmé qu'il examinerait plus tard la question de la liberté syndicale et ont considéré que cela démontrait de la part de celui-ci un manque de volonté politique pour adopter les mesures nécessaires pour garantir le droit à la liberté syndicale au Myanmar, où ce droit est toujours inexistant en droit et en pratique. Les membres employeurs ont indiqué que la déplorable situation du Myanmar constitue un défaut permanent d'application de la convention, ce qui devrait être clairement reflété dans les conclusions de la commission de la Conférence.

    La commission a pris note de la déclaration faite par le représentant gouvernemental et des débats approfondis qui ont suivi. Elle a rappelé qu'elle a examiné ce cas à plusieurs reprises au cours des dix dernières années. La commission a partagé la préoccupation exprimée par la commission d'experts selon laquelle le gouvernement n'a pas envoyé de rapport. La commission s'est ainsi trouvée une fois de plus dans l'obligation de déplorer profondément l'absence totale de coopération de la part du gouvernement. Dans ces circonstances, la commission n'a pu que continuer à déplorer le fait qu'aucun élément de progrès n'a été enregistré dans l'application de cette convention fondamentale alors que de très graves violations sont constatées depuis plus de quarante ans. La commission a été une fois de plus obligée d'exprimer son profond regret face aux graves divergences qui persistent entre la législation et la pratique nationales et les dispositions de la convention. Ces divergences portent sur les principes fondamentaux de la convention. Extrêmement préoccupée par l'absence totale de progrès dans l'application de cette convention, la commission a une fois de plus fermement exigé du gouvernement qu'il adopte de toute urgence les mesures et les mécanismes nécessaires, afin de garantir à tous les travailleurs et employeurs, tant en droit qu'en pratique, le droit de s'affilier sans aucune autorisation préalable aux organisations de leur choix, et le droit de ces organisations de s'affilier aux fédérations, confédérations et organisations internationales sans l'ingérence des autorités publiques. La commission a aussi prié instamment le gouvernement de fournir cette année à la commission d'experts, pour que celle-ci l'examine, tout projet de loi pertinent ainsi qu'un rapport détaillé sur les mesures concrètes qui sont prises pour assurer une plus grande conformité avec la convention. La commission a décidé de faire figurer ses conclusions sur ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport. Elle a également décidé de souligner qu'il s'agit d'un cas caractérisé d'inobservation constante de la convention.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1999, Publication : 87ème session CIT (1999)

    Un représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré que, depuis la discussion qui s'est tenue sur cette question au sein de la présente commission en 1998, le ministre du Travail a présenté à l'organe central d'examen un projet de loi sur les syndicats. Après avoir été revu par cet organe, le projet de loi a été renvoyé au ministre du Travail pour être examiné par son Comité de révision des lois et pour que des discussions interdépartementales soient menées en tenant compte des commentaires de l'organe central susvisé. Il a souligné que, pour que le projet de loi sur les syndicats soit correctement rédigé, il doit être discuté avec les organisations d'employeurs et de travailleurs.

    Durant l'année 1998-99:

    -- du côté des employeurs la Fédération des syndicats du commerce et de l'industrie du Myanmar;

    -- du côté des travailleurs l'Association de bien-être des travailleurs no 2242; l'Association culturelle du Myanmar; le Syndicat du film et de la musique du Myanmar; l'Association des auteurs littéraires du Myanmar; l'Association centrale des travailleurs de la construction du Myanmar; l'Association des producteurs vidéo du Myanmar; l'Association des femmes entrepreneurs du Myanmar; l'Association de la protection maternelle et infantile du Myanmar; l'Association médicale du Myanmar; l'Association de la médecine indigène du Myanmar; l'Association des artistes et des sculpteurs; l'Association des infirmières du Myanmar; l'Association des travailleurs des transports.

    L'orateur a cité un certain nombre d'organisations avec lesquelles des discussions sont menées. Parmi elles, des associations d'employeurs (entités indépendantes des employeurs), la Fédération des employeurs du commerce et de l'industrie et plusieurs autres organisations de travailleurs à différents niveaux. Ces discussions sont menées au profit de ces organisations et de différentes structures de travailleurs. Pour l'élaboration du projet de loi sur les syndicats, le ministre du Travail doit tenir compte de l'avis de ces organisations, mais également de l'impact de la crise financière dans la région sur les investisseurs étrangers. En outre, il est également important de considérer les modifications intervenues suite à la décision du pays en 1998 de se tourner vers un système d'économie de marché ainsi que l'élaboration d'une nouvelle Constitution. Le projet sera d'autant mieux rédigé que les discussions auront été nombreuses. Le représentant gouvernemental a souligné qu'on ne doit pas avoir une vision mécanique en matière d'élaboration d'une nouvelle législation, chaque pays se caractérisant par ses propres situation et circonstances, une approche efficace pour un pays pouvant se révéler inappropriée pour un autre. A cet égard, l'orateur a cité les commentaires du Directeur général à la séance plénière du 1er juin 1999 de la Conférence internationale du Travail: "Il faut comprendre les spécificités régionales et sous-régionales, comme celles des pays en transition d'Europe centrale et orientale, ou des pays qui traversent une crise en raison des effets du système monétaire international ou à cause d'une catastrophe naturelle. Il faut soutenir la capacité d'une OIT dotée de sensibilité, capable de comprendre les différences et de saisir les nuances des diverses formes que peut revêtir un même problème dans des sociétés distinctes. Il me paraît absolument indispensable de développer cette capacité institutionnelle, car je crois qu'il est important de "sentir" la culture du développement. Ceux d'entre nous qui ont une véritable expérience de ces problèmes savent que l'on ne peut comprendre les problèmes de développement avec une vision mécanique. On ne peut proposer des solutions tout simplement parce qu'elles ont fonctionné ailleurs. Nous avons besoin d'une richesse de perception, d'une capacité de différenciation, d'une compréhension des difficultés pour répondre à des problèmes réels, et non proposer des solutions toutes faites." Le représentant gouvernemental a souligné une nouvelle fois qu'on ne peut trouver deux pays semblables, chacun devant être considéré en fonction de ses propres situation et pratique. Il a estimé que la commission devrait en conséquence tenir compte des différents niveaux de culture et de développement des Etats Membres. En conclusion, il a déclaré que, depuis l'examen de cette question par la commission en 1998, des progrès ont effectivement été réalisés en vue de l'élaboration des projets de textes de la nouvelle Constitution et de la loi sur les syndicats ainsi que des discussions élargies sur le contenu de celle-ci, et que la commission devrait tenir compte de ces progrès.

    Les membres travailleurs ont fait observer que, même si, cette année, les commentaires de la commission d'experts sont relativement brefs, il n'en reste pas moins que la répression de la liberté syndicale au Myanmar est l'un des cas les plus tenaces et graves de non-respect de la convention. Etant donné l'absence absolue de progrès à cet égard au cours des années, la commission d'experts, de fait, ne peut pas en dire beaucoup plus. Toutefois, la gravité du cas est mise en évidence par le fait que, pour la treizième fois en dix-huit ans, et pour la neuvième année de suite, la commission l'examine. A six reprises, la commission a formulé ses conclusions dans un paragraphe spécial du rapport et, depuis trois ans, elle a indiqué que le Myanmar constitue un cas de défaut flagrant d'application de la convention. Voilà un bilan assez douteux pour un gouvernement qui ne cesse d'affirmer, comme il le fait encore aujourd'hui, qu'il coopère avec l'OIT. Par ailleurs, les membres travailleurs rappellent qu'une mission de contacts directs a été brusquement annulée en 1996, sans que le gouvernement n'apporte d'explication. Depuis trois ans, il ne semble pas y avoir eu une volonté de reprogrammer cette mission. Les membres travailleurs ont demandé au représentant gouvernemental de prier son gouvernement de s'engager à prévoir une mission de contacts directs cette année. Cet engagement aura plus de sens que la simple formulation d'une ordonnance relative à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, avant l'ouverture de la Conférence de l'OIT.

    L'orateur a déclaré que, depuis de nombreuses années, le gouvernement ne soumet même pas de rapport, comme la commission d'experts l'a déploré profondément l'an passé. Cette année, le gouvernement a enfin présenté un rapport dans lequel il indique à la commission d'experts qu'une nouvelle Constitution est en cours d'élaboration, ainsi qu'un Code du travail révisé. Le gouvernement semble affirmer que ce n'est que lorsque cette procédure sera achevée et qu'un nouveau Code du travail sera adopté qu'il pourra démontrer dans les faits son respect de la liberté syndicale. La commission d'experts a rappelé que l'élaboration d'une nouvelle législation du travail et d'une nouvelle constitution est en cours depuis de nombreuses années, mais qu'aucun progrès réel n'a été communiqué à ce sujet. Dans ses déclarations, le représentant gouvernemental n'a fait mention d'aucun calendrier. Les membres travailleurs lui ont demandé si son gouvernement est disposé à indiquer à la commission quand cette procédure arrivera à son terme. Egalement, il serait très utile que le gouvernement communique, avant la fin de l'année, à la commission d'experts des projets de textes sur ce point.

    Les membres travailleurs estiment qu'il n'existe pas au Myanmar de législation en vigueur sur les syndicats, pas plus qu'il n'y a un cadre juridique pour la protection de la liberté syndicale. Comme cela a été indiqué l'an dernier, il existe un décret, émis en 1988 par les militaires, à savoir la loi (no 6/88) sur la formation des associations et organisations, en vertu duquel ces associations et organisations, pour être créées, doivent obtenir une autorisation du ministère de l'Intérieur et des Affaires religieuses. Cette loi indique que les associations et autres organisations seront dissoutes si elles tentent de porter atteinte à la loi, à l'ordre public, à la sécurité publique ou au bon fonctionnement des transports et des communications, si elles incitent à commettre ces infractions ou si elles y participent. Les membres travailleurs se sont demandés si cette loi fait partie de celles en cours de révision et, dans l'affirmative, ils ont demandé au gouvernement de fournir des renseignements sur sa révision.

    Les membres travailleurs ont souligné la présence de M. Maung Maung, secrétaire général de la Fédération des syndicats libres de Birmanie (FTUB), à la réunion de la commission. C'est le Conseil pour la loi et le rétablissement de l'ordre (SLORC) qui a invoqué, il y a onze ans, la loi no 6/88 pour écarter M. Maung Maung et six autres personnes du Syndicat birman des mines. Les membres travailleurs ont fait observer que le représentant gouvernemental persiste à déclarer à la commission que l'adoption de la nouvelle législation pourrait prendre un certain temps. Sur ce point, les membres travailleurs ont noté que la législature qui a été élue il y a dix ans n'a jamais été autorisée à se réunir. De fait, de nombreux membres élus du Parlement ont été arrêtés plusieurs fois depuis lors. Les membres travailleurs ont rappelé que le représentant gouvernemental a indiqué que le Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC), qui a succédé au SLORC et est en fait la junte militaire au pouvoir, est un organe législatif. Comment une junte militaire peut-elle se transformer en organe législatif? Bien plus, de combien de temps son gouvernement aura-t-il besoin pour réviser ses lois de façon à les mettre en conformité avec la convention?

    Les membres travailleurs estiment qu'une modification de la législation si cela devait jamais se produire, sans parler de la conformité de cette législation avec la convention n'est qu'une première mesure en vue de la protection de la liberté syndicale, en droit et dans la pratique. Il n'existe pas aujourd'hui de syndicat indépendant au Myanmar et toute tentative visant à en constituer est impitoyablement traitée. Les quelques personnes qui essaient courageusement de faire valoir leurs droits au regard de la convention le font à leurs risques et périls. Des représentants de la FTUB sont encore incarcérés et purgent de longues peines. Le régime les considère comme des terroristes. Ils ont noté que le délégué travailleur du Myanmar figure dans la liste des délégations en tant que superviseur des exploitations de pétrole et des sites de production de l'entreprise du pétrole et du gaz du Myanmar. Or il ne figure pas en tant que membre d'une association ou organisation de travailleurs. En fait, c'est précisément cette entreprise publique qui, depuis des années, aurait recours au travail forcé pour construire le gazoduc de Yadanar de mauvaise réputation.

    En conclusion, les membres travailleurs ont noté que, de nouveau, la commission demande que l'on croie l'affirmation du gouvernement selon laquelle la situation est en train d'évoluer. La commission ne devrait pas baisser les bras face à l'absence, cette année encore, de véritables progrès. Au contraire, la persistance avec laquelle le gouvernement fait fi des observations de la commission devrait l'encourager à insister, une fois de plus, dans les termes les plus énergiques qui soient, sur le fait que le Myanmar doit s'en tenir à ses obligations au titre de la commission. Il ne s'agit pas de mettre le Myanmar à l'index, comme l'a déclaré bien des fois le gouvernement. Le gouvernement doit être convaincu que la commission supprimera ce cas de sa liste dès que le Myanmar satisfera à ses obligations. Mais, aussi longtemps qu'il persistera dans son attitude, la commission examinera le cas, pendant quarante années encore s'il le faut.

    Les membres employeurs ont exprimé au gouvernement des remerciements pour les informations communiquées à cette commission. Le contexte de ce cas particulier est important. Le gouvernement a ratifié la convention il y a quarante-quatre ans et son manquement à adopter une législation sur la liberté syndicale est une violation fondamentale de ses obligations internationales. Le droit d'organisation n'existe tout simplement pas au Myanmar, et depuis longtemps le gouvernement témoigne au système de contrôle de l'OIT ainsi qu'à cette commission un mépris manifeste. Depuis 1980, ce cas a été discuté une douzaine de fois et a donné lieu à de nombreux paragraphes spéciaux sans qu'il ait été mis fin au défaut continu d'application de la convention.

    Ce cas présente un lien avec celui relatif à la convention no 29 sur le travail forcé, 1930. En fait, si la liberté syndicale était assurée dans le pays, le mouvement syndical entreprendrait la lutte pour l'élimination du travail forcé. Or il y a une absence totale de législation efficace sur le droit d'organisation et il n'existe aucun moyen d'appréhender la véritable nature des organisations. La question qui se pose est celle des délais dans lesquels le gouvernement se propose de remédier à ces problèmes. Au regard des quarante-quatre ans de défaut continu d'application de la convention, les employeurs ont fait part de leur scepticisme en ce qui concerne l'engagement du gouvernement, ce scepticisme étant d'ailleurs conforté par l'abstention du gouvernement lors de l'adoption de la Déclaration.

    Le membre travailleur du Japon s'est rangé à l'avis des membres travailleurs, et a réitéré que ce cas est l'un des pires qu'ait examiné la commission d'experts. Depuis quarante ans, la commission formule des observations sur les violations par le Myanmar, en droit et dans la pratique, de la convention. A propos des violations de la convention dans la pratique, l'orateur a demandé au gouvernement de fournir des informations sur la situation de deux dirigeants syndicaux, MM. Myo Aung Thant et U Khin Kyan. Il a demandé s'ils ont été libérés de prison et s'ils sont en mesure de participer à des activités syndicales. Par ailleurs, selon des informations d'Amnesty International, M. Than Niang a été arrêté en 1977 à la suite d'une manifestation, puis condamné à cinq ans d'emprisonnement. Après sa libération en 1982, il n'a pas été réintégré dans son poste de la fonction publique et est devenu libraire et écrivain. A la suite de troubles sociaux en 1988, M. Than Niang a été de nouveau arrêté et, sans qu'il n'y ait eu de procès en bonne et due forme, condamné à la prison à vie. Le gouvernement du Myanmar est prié d'indiquer si M. Than Niang a été relâché en 1998, conformément à la loi de 1992 en vertu de laquelle toutes les peines d'emprisonnement à vie ont été commuées en des peines de dix ans d'emprisonnement. De plus, l'orateur a demandé au gouvernement d'expliquer pour quel motif aucun délégué syndical n'a été autorisé à se rendre à la Conférence cette année. La personne désignée délégué travailleur ne semble pas être affiliée à un syndicat. Enfin, l'orateur demande au gouvernement de fournir une liste de syndicats qui sont autorisés à fonctionner librement au Myanmar et d'expliquer les raisons pour lesquelles la Fédération des syndicats libres de la Birmanie (FTUB) est obligée de mener ses activités en dehors du pays.

    Le membre travailleur de l'Afrique du Sud a appuyé les déclarations faites par les membres travailleurs. Il a souligné que, depuis dix ans, le représentant gouvernemental déclare que son pays a entamé le processus de révision de la législation, mais qu'aucun progrès n'a été accompli à cet égard. Le représentant gouvernemental a fait les mêmes déclarations il y a dix ans. Lesdites déclarations ne sont que des répétitions et aucun changement substantiel ne peut être noté. Il souligne qu'il n'existe aucun syndicat au Myanmar et qu'aucune structure juridique n'est prévue afin de protéger les syndicats. De plus, il n'existe aucun mécanisme garantissant la négociation collective ou protégeant les travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale. La Fédération des syndicats libres de Birmanie (FTUB) est contrainte d'exercer ses activités depuis l'extérieur du pays. L'orateur a rappelé que la FTUB a été créée en 1991 par des syndicalistes qui ont été par la suite licenciés de leur emploi par le régime militaire. La FTUB coordonne ses activités avec la Ligue nationale pour la démocratie. Cette dernière avait remporté les élections de 1990, mais a été empêchée d'exercer le pouvoir par le régime militaire qui a annulé les résultats des élections. La FTUB demeure sous surveillance permanente de la police gouvernementale ainsi que des services de renseignement militaires. L'orateur attire l'attention de la commission sur le fait que le cas du Myanmar est discuté année après année, mais qu'aucun progrès n'a été encore réalisé. Au contraire, le gouvernement continue de faire des promesses et de nier qu'il viole les dispositions de la convention. Se référant aux discussions antérieures de la commission sur le travail forcé au Myanmar, il estime que ce problème a un lien direct avec l'application de la convention.

    Il cite un rapport de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) qui se réfère à l'arrestation et à la détention de certains syndicalistes qui sont toujours emprisonnés. Au vu des violations systématiques des dispositions de la convention, la commission devrait imposer au Myanmar les sanctions les plus sévères prévues en vertu de la Constitution de l'OIT.

    Le membre travailleur de l'Inde a indiqué que la description que le représentant gouvernemental fait de la situation de ce pays n'est pas confirmée par les informations émanant des personnes qui voyagent de l'Inde au Myanmar. Son organisation a essayé à maintes reprises de prendre contact avec des syndicats au Myanmar, en vain. S'il existe des syndicats libres au Myanmar, pourquoi est-il impossible de les rencontrer? Par ailleurs, aucun des syndicats de son pays n'a pu prendre contact avec des syndicats birmans. Le gouvernement doit apporter des éclaircissements sur cette situation. Il a également souligné que, même si le Myanmar élabore une nouvelle législation, il restera à savoir si cette législation garantira véritablement le droit des travailleurs de s'organiser et la liberté syndicale. Il a souligné la nécessité de garantir que les syndicats puissent fonctionner ouvertement dans ce pays. Il a demandé au représentant gouvernemental de fournir une liste de syndicats en place, afin que l'Inde puisse prendre contact avec eux. Le gouvernement du Myanmar devrait adopter des lois consacrant le droit de s'organiser et le droit de s'associer avec des organisations internationales. L'orateur a exhorté le gouvernement du Myanmar à restaurer et à respecter la longue tradition démocratique du Myanmar, et à tenir compte des recommandations de la commission sur l'application de la convention.

    Le membre gouvernemental du Royaume-Uni a déclaré qu'il a été plus déçu que surpris que la commission ait encore à débattre du défaut d'application continu d'application de cette convention fondamentale par la Birmanie. Une nouvelle fois, cela reflète le mépris manifesté par le régime à l'égard de l'OIT ainsi qu'à l'égard du peuple de la Birmanie. Il a pleinement appuyé l'appel adressé par la commission d'experts aux autorités de la Birmanie pour que des mesures immédiates soient prises tendant à assurer une liberté syndicale effective. Eu égard au paragraphe spécial et à la discussion au sujet de la convention no 29, il a estimé que la commission devrait adresser à la délégation de la Birmanie un signal des plus vigoureux l'avertissant qu'elle ne tolérerait plus le refus du gouvernement d'honorer ses obligations internationales en matière de droits de la personne.

    Le représentant gouvernemental a expliqué que les associations qu'il a mentionnées sont des quasi-syndicats. Elles sont enregistrées au ministère de l'Intérieur et indépendantes des structures gouvernementales et agissent de manière indépendante. En réponse à la demande du gouvernement, formulée par les membres travailleurs, au sujet des délais dans lesquels la révision de la législation du Myanmar sera achevée, il est nécessaire de tenir compte des conditions nationales ainsi que des discussions relatives à ces révisions. Ainsi qu'il l'a indiqué dans son dernier rapport à la commission d'experts, la capacité du gouvernement de faire rapport des progrès réalisés dans le cadre de la modification de sa Constitution et de ses lois dépend de ces conditions. La commission devrait accorder au gouvernement le temps nécessaire, et le projet de législation sera adopté en temps utile. La copie du projet de loi ne peut être soumise en raison de ce que tous les projets de loi sont couverts par la loi sur les secrets officiels de l'Etat (loi indienne no XIX du 2 avril 1923), remplacée par l'arrêté de 1948 de l'Union de la Birmanie sur l'adaptation des lois reconduite par le Myanmar lorsqu'il a acquis son indépendance. Elle a force de loi. Par ailleurs, en réponse aux commentaires formulés par le membre travailleur du Japon au sujet des mesures prises par le gouvernement contre certaines personnes, y compris celles qui n'ont pas été autorisées à réintégrer la fonction publique, celles-ci sont motivées par la violation de lois pénales par ces personnes, notamment par des actes terroristes. Aucun système juridique, pas même celui du Japon, n'est indulgent avec les terroristes. Le Myanmar n'a pas non plus d'indulgence pour de tels actes. Dans tous les pays, la fonction publique a également sa réglementation propre. Au Myanmar, comme dans bien d'autres pays, lorsqu'un fonctionnaire commet une infraction et qu'il est condamné, il ne peut réintégrer la fonction publique. Le projet de loi est en cours d'élaboration, mais son contenu ne peut être porté à la connaissance de la commission d'experts avant sa soumission aux autorités législatives du Myanmar, car les projets de loi relèvent du secret d'Etat, conformément à la loi précédemment expliquée. Toutefois, le gouvernement sera heureux de fournir copie de la nouvelle législation en temps utile. En réponse aux commentaires du membre travailleur de l'Inde, l'orateur a indiqué que son gouvernement détient des informations complètes concernant les personnes détenues et qu'il est disposé à les communiquer. Il a évoqué les bonnes relations qui règnent entre le Myanmar et l'Inde. Il y a notamment des hommes d'affaires qui investissent au Myanmar. Des relations d'affaires se développent. Le membre travailleur de l'Inde devrait prendre contact avec les différentes organisations d'employeurs et de travailleurs susmentionnées. En ce qui concerne la représentativité du représentant des travailleurs du Myanmar, une correspondance a déjà été adressée à la commission d'accréditation par lettre no 223/3-20/26 du 7 juin 1999. Rappelant que le BIT mène actuellement une campagne visant à amener les pays à ratifier un grand nombre de conventions fondamentales, il a estimé qu'il serait malencontreux, dans ce contexte, qu'un pays tel que le Myanmar soit injustement isolé. L'orateur a appelé l'attention sur le risque d'une telle attitude qui pourrait avoir pour effet de dissuader d'autres pays de ratifier de nouvelles conventions.

    Les membres travailleurs et les membres employeurs ont demandé que ce cas soit mentionné dans un paragraphe spécial.

    La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion détaillée qui a eu lieu par la suite. Elle a rappelé que ce cas a été discuté de manière constante depuis une décennie. La commission n'a pu que déplorer à nouveau qu'aucun progrès n'ait été fait dans le sens de l'application de cette convention fondamentale, malgré les appels répétés adressés au gouvernement tant par la présente commission que par la commission d'experts. La commission a également été obligée d'exprimer à nouveau son profond regret sur le fait que de graves divergences persistent entre, d'une part, la législation et la pratique nationales et, d'autre part, les dispositions de la convention. Elle n'a pu que déplorer à nouveau l'absence de coopération réelle de la part du gouvernement à cet égard. Extrêmement préoccupée de l'absence totale de progrès dans l'application de la convention, la commission a prié instamment le gouvernement d'adopter, en toute urgence, les mesures et mécanismes nécessaires en vue de garantir, dans la législation et la pratique, à tous les travailleurs et employeurs, sans distinction d'aucune sorte et sans autorisation préalable, le droit de s'affilier aux organisations de leur choix en vue de protéger leurs intérêts et le droit de s'affilier aux fédérations, confédérations et organisations internationales, sans ingérence de la part des autorités publiques. La commission a prié instamment le gouvernement de faire, sans délai, des progrès substantiels dans l'application de la convention, dans la loi et la pratique, et a prié le gouvernement de fournir un rapport détaillé à la commission d'experts.

    La commission a décidé que ces conclusions devaient figurer dans un paragraphe spécial de son rapport. Elle a également décidé de mentionner ce cas parmi les cas de défaut continu d'application de la convention.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1998, Publication : 86ème session CIT (1998)

    Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

    Ce rapport est destiné à remplir l'obligation de rapport concernant la présente convention pour les périodes antérieures se terminant au 1er septembre 1997. S'agissant de la présente convention, le gouvernement informe la commission d'experts que les projets de lois sur les syndicats ont été examinés au cours de plusieurs sessions de l'Organe central d'examen des lois. D'autres mesures seront prises une fois que le projet de législation sera renvoyé au ministère du travail avec les avis et recommandations de l'organe central. Le processus actuel de révision des lois doit être totalement dissocié de celui de l'ère socialiste de 1962 à 1988.

    En outre, un représentant gouvernemental a appelé l'attention de la commission sur le rapport d'étape présenté par sa délégation à la 85e session de la Conférence. Il a indiqué que, conformément aux remarques et recommandations formulées par l'Organe central d'examen des lois à propos du projet de loi sur les syndicats dont le Département du travail l'avait saisi, la Commission d'examen de la législation du ministère du Travail a procédé, dans le courant de l'an dernier, aux modifications et à la nouvelle rédaction nécessaires. En outre, comme recommandé par l'Organe central d'examen des lois, le Département du travail a largement sollicité, sur la nouvelle rédaction de la loi sur les syndicats, les avis et commentaires des parties concernées, y compris des associations de protection des intérêts des travailleurs et des organisations des employeurs, telles que l'Union des chambres de commerce et d'industrie de Myanmar et plusieurs représentants des entreprises publiques et privées. Les nombreux points techniques de la version révisée de la loi sur les syndicats exigent naturellement un examen approfondi de la part des parties concernées. Les réponses qui ont été reçues de certaines de ces organisations ont été compilées et collationnées. Lorsque les réponses de toutes les organisations seront parvenues, un projet révisé sera soumis par la Commission d'examen de la législation à l'Organe central d'examen des lois. Le processus de révision et de refonte rédactionnelle a été entrepris en attendant l'apparition d'une nouvelle Constitution de l'Etat qui garantira la protection des travailleurs par l'adoption de la législation du travail nécessaire. Toutefois, le processus d'adoption de la législation prend du temps, spécialement dans le cas de la législation du travail, qui nécessite des consultations tripartites. A cet égard, les travailleurs du pays sont à l'heure actuelle bien protégés par la législation en vigueur, qui a été adoptée voici plusieurs décennies et reflète toujours les dispositions des conventions de l'OIT ratifiées par le pays. Même si, comme le souligne la commission d'experts, il existe quelques divergences entre la convention et la législation nationale, celles-ci pourront être rectifiées avec la nouvelle législation. En ce qui concerne le droit syndical, il existe plus de 2.000 associations de protection des intérêts des travailleurs dans le pays, qui sont des entités de base s'occupant des intérêts généraux des travailleurs. Pour conclure, l'intervenant a déclaré que les travaux de révision et de refonte rédactionnelle de la législation du travail existante sont axés sur la conformité de ces textes aux dispositions des conventions ratifiées par le pays.

    Les membres travailleurs ont constaté avec regret que le nouvel examen de ce cas, coïncidant avec le cinquantenaire de la convention, illustre dramatiquement le chemin qu'il reste à parcourir dans de nombreux pays du monde avant que la liberté syndicale ne soit véritablement respectée, en droit comme en pratique. Il est difficile de croire que la commission a jugé nécessaire de réexaminer douze fois au cours des dix-sept dernières années et aujourd'hui pour la huitième année consécutive le cas du non-respect, par le Myanmar, de cette convention. A cinq reprises, la commission a dû inscrire ses conclusions dans un paragraphe spécial du rapport. En outre, en 1996 et 1997, elle a cité le cas du Myanmar dans un paragraphe spécial pour défaut continu d'application de la convention. Il convient de rappeler que le Myanmar a également justifié trois autres paragraphes spéciaux depuis 1982 pour non-respect d'autres conventions ratifiées, qu'en 1993 le Conseil d'administration a jugé recevable une réclamation pour travail forcé au Myanmar sur le fondement de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, et qu'une commission d'enquête a été constituée en 1997 pour examiner sur le fondement de l'article 26 une plainte concernant le recours généralisé au travail forcé au Myanmar. Ce triste record fait du Myanmar l'un des plus remarquables et des plus anciens contempteurs des droits fondamentaux des travailleurs et des normes internationales du travail dans l'histoire de l'OIT. De plus, le gouvernement persiste à afficher son mépris pour le mécanisme d'application des normes en refusant de soumettre des rapports à la commission d'experts malgré des demandes réitérées. La commission d'experts a exprimé "son profond regret" de n'avoir pas reçu un seul rapport du gouvernement depuis plus de trois ans. En outre, une mission de contacts directs qui devait avoir lieu en mai 1996 a été annulée en dernière minute par le gouvernement sans réelle explication. Le gouvernement ne s'est nullement empressé pour reporter cette mission. Il a fait montre du même manque de coopération au début de cette année en refusant à la commission d'enquête l'accès à son territoire pour enquêter sur les allégations de travail forcé. Enfin, le mépris persistant du Myanmar pour la procédure des organes de contrôle apparaît à nouveau aujourd'hui, à travers l'absence totale de sincérité comme de substance dans les remarques du représentant gouvernemental, lesquelles se bornent à une simple répétition de ce qui a été dit par le passé.

    La commission d'experts a noté que, depuis quarante ans, elle presse le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir le droit des travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, les syndicats de premier niveau, fédérations et confédérations de leur choix et de s'y affilier pour défendre leurs intérêts, et de garantir que ces structures syndicales aient le droit de s'affilier à des organisations internationales. Mais tout ceci reste vain. La réalité est que, nonobstant les déclarations du représentant gouvernemental, il n'existe au Myanmar ni loi sur les syndicats ni structure juridique protégeant le droit de se syndiquer. Même si l'adoption de la législation nécessaire demande naturellement du temps, comme le déclare le représentant gouvernemental, aucun progrès n'a été constaté à cet égard au cours des quarante dernières années. En 1988, la junte militaire, peu après avoir massacré plusieurs milliers de nationaux, a pris un décret appelé loi sur la formation des associations et des organisations, en vertu duquel les syndicats doivent obtenir l'autorisation du ministère des Affaires intérieures et religieuses pour pouvoir être constitués. Cette loi prévoit que les associations et autres organisations auxquelles elle s'applique seront dissoutes si elles tentent, incitent, encouragent ou aident à saper la prééminence de la loi et de l'ordre, de la paix et de la sécurité locale ainsi que le fonctionnement harmonieux et sûr des transports et des communications. Il en est résulté, pour les travailleurs du pays, une absence totale de toute protection juridique concernant la liberté syndicale. Le fait est qu'en juin 1997, à quelques jours de l'examen de ce cas par la commission, deux membres du comité exécutif de la Fédération des syndicats pour la Birmanie -- Myo Aung Thant et Khin Kyaw -- ont été arrêtés dans le pays. L'un et l'autre sont considérés par Amnesty International comme prisonniers politiques. Le premier, membre de la All Burma Petro-Chemical Corporation Union, constituée en 1988 par le mouvement prodémocratique, a été arrêté à l'aéroport de Rangoon avec sa femme et ses enfants. Amnesty International déclare ne pas savoir s'ils sont toujours incarcérés. Myo Aung Thant est accusé de haute trahison, entre autres. Au terme d'un procès secret organisé en août dernier, il a été condamné à la déportation à vie, plus dix ans dont trois pour infraction à la loi sur la formation des associations et des organisations. Un autre syndicaliste, Khin Kyaw, du Syndicat clandestin des gens de mer de Birmanie, n'a pas été vu depuis son arrestation, voici un an, par sa famille ou son avocat, et l'on ne sait pas où il est. Amnesty International déclare craindre pour sa sécurité, compte tenu de la rigueur des conditions de détention dans le pays et de la fréquence de la torture. Les membres travailleurs demandent au représentant gouvernemental de donner à la commission des précisions sur la situation de Khin Kyaw. Depuis des années, ils soulèvent la question des gens de mer au Myanmar et demandent au gouvernement de confirmer que ceux-ci ne sont désormais plus contraints de signer des contrats les obligeant à ne pas contacter des organisations internationales de travailleurs et qu'ils ne seront plus persécutés ou intimidés lorsqu'ils exercent leurs droits, conformément à la convention. La réponse du gouvernement est illustrée par l'arrestation de Khin Kyaw.

    Selon certaines sources, le pays connaîtrait une agitation sociale croissante en raison de la détérioration continuelle de l'économie et du refus persistant du gouvernement de permettre aux travailleurs de constituer des syndicats plutôt que des associations de défense de leurs intérêts, comme évoqué par le représentant gouvernemental. Des tentatives de constitution de syndicats ont été faites sur un certain nombre de lieux de travail, et les membres travailleurs ont vu une liste de travailleurs qui ont été licenciés pour cette raison. Cependant, ces informations ne peuvent être portées à la connaissance de la commission pour des raisons de sécurité concernant ces courageux travailleurs. En conclusion, les membres travailleurs tiennent à faire savoir au gouvernement que ce n'est pas en baptisant la junte militaire dirigeant le pays Conseil national pour la paix et le développement au lieu de Conseil national de rétablissement du droit et de l'ordre, en stipendiant de coûteuses sociétés de relations publiques pour améliorer leur image à l'extérieur ou attirer l'attention de personnalités influentes bien connues à Washington ou ailleurs que le pays se défera de son statut de paria et cessera d'être désigné comme l'un des pays affichant le plus profond mépris pour les droits de l'homme et des travailleurs. Ce que l'on attend désormais, c'est un changement radical, sans atermoiements, qui reconnaisse la volonté du peuple birman, telle qu'elle s'est exprimée dans les élections parlementaires de 1990, et qui respecte une fois pour toutes le droit, pour les travailleurs, de constituer les syndicats de leur choix, conformément à la convention. Toute proposition en retrait serait purement et simplement inacceptable et les membres travailleurs invitent la commission, comme par le passé, à exprimer cette opinion dans les termes les plus vifs possibles.

    Les membres employeurs se sont dits d'accord avec les membres travailleurs pour constater l'absence de tout progrès sur un cas déjà discuté à de nombreuses reprises, qui a plusieurs fois fait l'objet d'un paragraphe spécial du rapport de la commission et qu'elle a cité l'année dernière parmi les cas de défaut continu d'application. Les faits sont toujours les mêmes et le rapport du gouvernement se fait de plus en plus laconique, à supposer qu'un rapport soit fourni, ce qui n'est plus le cas depuis trois ans. Le gouvernement manifeste ainsi clairement son refus de coopérer avec les organes de contrôle; il a d'ailleurs mis en échec la mission de contacts directs qui était prévue. La situation reste inchangée en droit et en pratique: les cas cités par les membres travailleurs démontrent amplement que le gouvernement n'est pas disposé à permettre aux travailleurs de s'affilier à l'organisation de leur choix, ni à celle-ci de s'organiser en fédérations nationales ou internationales. Et, lorsqu'on lui rappelle ses obligations aux termes de la convention, le gouvernement répond par le mépris. Le représentant gouvernemental se réfère à un projet de loi qui aurait été transmis à toutes sortes d'instances pour recueillir leurs commentaires. Il prétendait déjà les années précédentes qu'un projet de loi devait modifier la situation; il est devenu bien difficile d'y croire. La commission doit donc une nouvelle fois constater que la situation reste très éloignée des obligations en vertu de la convention et regretter de ne pouvoir constater aucun progrès. Elle doit à nouveau exiger que des mesures soient enfin prises pour que le gouvernement honore ses engagements.

    Le membre gouvernemental du Royaume-Uni, s'exprimant également au nom des gouvernements de l'Allemagne, de l'Autriche, du Canada, du Danemark, de la Finlande, de l'Islande, de l'Italie, de la Norvège, des Pays-Bas, du Portugal et de la Suède, a déclaré que les informations sur l'application de la convention, récemment transmises par le gouvernement, n'étaient pas du tout satisfaisantes. La transmission aussi tardive d'informations de la sorte ne peut être considérée que comme une tentative d'entraver les travaux de la commission d'experts et de la Commission de la Conférence et de retarder l'échéance d'un examen complet et précis de la situation actuelle. Ce comportement reflète le manque de respect total du gouvernement envers ses engagements internationaux et constitue une preuve supplémentaire de l'absence de réforme démocratique et de respect pour les droits de l'homme dans le pays. A cet égard, la Commission des droits de l'homme des Nations Unies a récemment adopté une résolution (no 1998/63) soulignant l'étendue de l'utilisation du travail forcé et du travail des enfants à travers le pays. Par conséquent, il convient de prier instamment le Conseil national de la paix et du développement de pleinement coopérer et de permettre à l'OIT de se rendre dans le pays pour y évaluer la situation en matière de travail et apporter son assistance. L'orateur appuie fermement les conclusions de la commission d'experts selon lesquelles les autorités nationales doivent prendre les mesures nécessaires pour garantir l'existence d'une véritable liberté syndicale. Compte tenu du paragraphe spécial dont ce cas a fait l'objet dans le rapport de l'année dernière de la présente commission, l'orateur prie le représentant gouvernemental d'expliquer pour quelles raisons le gouvernement persiste à ne pas appliquer cette convention fondamentale.

    Le membre travailleur de la France a estimé qu'il était permis d'être bref sur le thème de la liberté syndicale au Myanmar puisqu'elle est inexistante, comme toutes les autres libertés. Le régime militaire organise une répression extrêmement préoccupante des travailleurs. Il organise le pillage du pays et l'exploitation systématique des personnes. Ses méthodes sont le travail forcé, l'emprisonnement, la torture, les disparitions. Dans pareil contexte, le représentant gouvernemental peut bien évoquer la consultation par le gouvernement, depuis un an et demi, de personnes qu'il a lui même désignées pour l'élaboration d'une nouvelle constitution. Les élus des élections de 1990 sont les seuls représentants légitimes en droit d'adopter une constitution, et l'argument des militaires au pouvoir selon lequel un processus législatif serait en cours pour respecter les conventions ratifiées ne trompera personne. La déclaration du représentant gouvernemental est vague et ne contient aucun élément concret. Au regard des pratiques du pouvoir telles qu'elles ressortent du rapport de la commission d'experts, elle n'est pas sincère. Face aux violations massives et systématiques des droits de l'homme et à l'autisme du gouvernement, il faut sans doute quitter le registre du droit pour exprimer sa solidarité avec un peuple courageux et pacifique, l'aider à recouvrer la liberté qui lui a été confisquée et à mettre fin à son martyre.

    Le membre travailleur de l'Italie a souligné qu'aucun changement, aussi minime qu'il soit, n'est intervenu dans le pays mis à part le changement de nom du Conseil. Les syndicats nationaux et internationaux sont préoccupés par les constantes violations des droits des travailleurs. Il est inadmissible qu'un membre de l'OIT refuse d'envoyer des rapports sur l'application des conventions fondamentales sur la liberté syndicale. Les persécutions, arrestations et tortures de travailleurs sont autant de violations d'autres droits fondamentaux de l'homme. Les autorités nationales devraient prendre des mesures immédiates pour corriger cette situation inacceptable. Les syndicats européens et internationaux qui font pression pour que des mesures pratiques soient adoptées ont obtenu le retrait du bénéfice du système préférentiel européen applicable au pays. Les gouvernements et les employeurs du monde entier devraient adopter une position semblable à celle de la présente commission et interrompre leurs échanges commerciaux et autres relations avec le pays. La Communauté européenne devrait maintenir la suspension du bénéfice du système préférentiel.

    Le membre gouvernemental des Etats-Unis s'est ralliée sans réserve à la déclaration du membre gouvernemental du Royaume-Uni, réaffirmant les préoccupations de longue date de son gouvernement devant la situation de la liberté syndicale au Myanmar. Dire que ce cas est grave est une litote. Depuis des années, les membres de la commission entendent le gouvernement birman s'engager à défendre les principes de l'OIT, à réviser sa législation du travail pour la rendre conforme à la convention ou, en d'autres occasions, demander l'assistance de l'OIT. Malheureusement, ces engagements ne se concrétisent pas, les déclarations d'intention ne sont jamais traduites dans la réalité et ce gouvernement se soustrait essentiellement au contrôle et à l'assistance de l'OIT. Une fois de plus, comme à de nombreuses reprises par le passé, force est de constater avec regret qu'il n'existe aucune réelle liberté syndicale dans le pays. Ceux qui s'aventurent à exercer des activités syndicales indépendantes s'exposent à la surveillance constante de la police et de l'armée et vivent en permanence dans la crainte d'une arrestation et de la torture. Il est déplorable de constater que le pays témoigne d'une absence fondamentale de tout respect des droits de l'homme, allant bien au-delà des droits syndicaux. Dans ces circonstances, la conclusion inévitable est que les autorités birmanes foulent aux pieds leurs obligations internationales au titre de la convention et n'ont aucun égard non plus pour les recommandations de l'OIT, de l'Assemblée générale des Nations Unies ni de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et, le plus grave, affichent un mépris absolu pour les droits de leurs citoyens. Il est difficile de concevoir une conclusion qui puisse inciter le gouvernement à prendre sincèrement des mesures concrètes qui sont recommandées depuis plus de quarante ans. L'intervenante veut donc croire que la commission ne manquera pas de relever dans les termes les plus vifs possibles ses profondes préoccupations devant la regrettable persistance du gouvernement à ne pas respecter, en droit comme en pratique, le droit fondamental de la liberté syndicale.

    Le membre travailleur du Japon a noté que le représentant gouvernemental n'a, comme de coutume, fourni aucune nouvelle information ni aucun exemple démontrant qu'une action était engagée. Ses déclarations illustrent un mépris du système de contrôle de l'OIT. Les mouvements syndicaux ne peuvent exercer librement leurs activités dans le pays et la Fédération des syndicats du Myanmar, constituée en 1991, se trouve dans l'obligation d'exercer ses activités hors du pays. Amnesty International et la Confédération internationale des syndicats libres confirment que les délégués syndicaux sont constamment surveillés par la police et les services secrets de l'armée, et qu'ils vivent sous la menace d'arrestation et de torture. Lors des discussions sur l'adoption de la convention, il y a de cela cinquante ans, le gouvernement était membre de la Commission de préparation de la convention et a joué un rôle dont il devrait être fier. Au contraire, le gouvernement est actuellement un des contrevenants les plus sérieux aux normes internationales. Il a besoin de retrouver sa fierté d'antan et, à cet égard, de nombreux changements devront être apportés à la situation, le plus rapidement possible.

    Le membre travailleur du Pakistan a rappelé que le Myanmar est un magnifique pays dont le peuple travaille dur. Malheureusement, son développement est entravé par le refus du gouvernement de respecter les droits syndicaux et les droits de l'homme fondamentaux. Au cours des nombreuses fois où la commission a examiné ce cas, le représentant gouvernemental a déclaré que des mesures spécifiques étaient en voie d'adoption pour donner effet aux conventions. Toutefois, ces déclarations sont à replacer dans le contexte de ce pays où persistent par ailleurs de graves violations d'autres conventions fondamentales, comme la convention no 29 sur le travail forcé, et dont le gouvernement ne fournit même pas les rapports nécessaires. Par ailleurs, l'année dernière, le représentant gouvernemental a exprimé l'espoir que la législation concernée serait modifiée, mais des syndicalistes sont toujours emprisonnés et leurs droits bafoués. Il n'est plus possible qu'à la fin du XXe siècle des Etats se moquent de l'opinion publique et refusent d'instaurer la démocratie. Par conséquent, il convient de prier instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre en place un système démocratique qui permettrait au peuple de ce pays de participer à son développement social et économique.

    Le représentant gouvernemental a déclaré avoir écouté avec une grande patience les opinions qui ont été exprimées. Il prie les membres de la commission de faire preuve de compréhension. L'adoption de la législation adéquate nécessite du temps, en particulier lorsque des consultations tripartites sont nécessaires, comme c'est le cas ici. Les lois adoptées dans la précipitation ne résistent pas à l'épreuve du temps ou à l'évolution des circonstances. Ainsi que l'orateur l'a déjà mentionné, le projet de loi sur les syndicats a été soumis à l'Organe central d'examen des lois. Le processus législatif normal suit donc son cours, comme dans n'importe quel autre pays. Une fois adoptée, la nouvelle loi tiendra compte des dispositions de la convention et des principes énoncés par la future constitution actuellement en cours d'élaboration. Si le gouvernement n'avait pas eu l'intention de se conformer aux dispositions de la convention, il n'aurait pas entrepris l'élaboration d'une telle loi, en consultation avec les parties concernées. S'agissant des cas particuliers dont ont fait état les membres de la présente commission, comme dans n'importe quel autre pays, lorsque la loi n'est pas respectée, les mesures nécessaires doivent être prises en application du Code pénal, texte qui a été adopté au XIXe siècle, soit avant l'indépendance. Par ailleurs, les questions relatives aux marins ont été résolues en 1996. Il faut par conséquent bien comprendre que le gouvernement fait de son mieux, dans les limites fixées par les procédures nationales, pour suivre les recommandations formulées et devrait donc se voir accorder le bénéfice du doute. Il met actuellement en oeuvre de grands chantiers, comme l'élaboration d'une nouvelle constitution, en consultation avec les représentants de toutes les couches de la société. Enfin, l'orateur rappelle que le nom officiel de son pays, ainsi que l'a reconnu les Nations Unies, est l'Union du Myanmar.

    La commission a pris note des informations écrites communiquées par le gouvernement, de la déclaration faite par le représentant gouvernemental et de la discussion qui s'en est suivie. Elle rappelle que ce cas est discuté de manière continue depuis plus d'une décennie et a ainsi été examiné en 1987, 1989, 1993, 1994, 1995, 1996 et 1997. Elle ne peut que déplorer que la commission d'experts n'ait reçu, depuis plus de trois ans, aucun rapport du gouvernement sur l'application de cette convention fondamentale, malgré les appels répétés qu'elle lui a adressés et malgré la mention, ces deux dernières années, de ce cas dans un paragraphe spécial pour défaut persistant d'application de cet instrument. La commission se voit à nouveau dans l'obligation d'exprimer le profond regret de voir persister de graves divergences entre, d'une part, la législation et la pratique nationales, et, d'autre part, les dispositions de la convention, de même que de déplorer l'absence de toute coopération à cet égard de la part du gouvernement. Extrêmement préoccupée par l'absence totale de tout progrès quant à l'application de la convention, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre d'urgence les mesures nécessaires pour garantir, en droit comme en pratique, que tous les travailleurs et employeurs, sans distinction aucune, aient le droit de s'affilier, sans autorisation préalable, aux organisations de leur choix pour la défense de leurs intérêts et que ces organisations aient elles-mêmes le droit de s'affilier à des fédérations, confédérations et organisations internationales, sans intervention des autorités publiques. En outre, la commission prie instamment le gouvernement de démontrer dans un très proche avenir que de substantiels progrès ont été accomplis dans le sens de l'application de la convention et de communiquer cette année un rapport détaillé à la commission d'experts. En accord avec les membres employeurs et travailleurs, la commission décide à nouveau que ses conclusions seront inscrites dans un paragraphe spécial de son rapport et que ce cas sera mentionné parmi les cas de défaut persistant d'application de la convention no 87.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1997, Publication : 85ème session CIT (1997)

    Un représentant gouvernemental a rappelé qu'au cours des précédentes sessions de la Conférence internationale du Travail des informations concernant l'application de la convention no 87 ont été présentées à la commission, certains membres de cette commission ayant pris acte des efforts poursuivis par son gouvernement en vue d'adopter une nouvelle législation sur les syndicats. Il a réaffirmé l'attachement de son gouvernement à la promotion et à la protection des droits légitimes de tous les travailleurs. Au total, non moins de 17 lois sur le travail sont encore en vigueur. Pour la moitié, elles ont été adoptées sous l'ère coloniale britannique et, pour l'autre moitié, elles ont été adoptées après l'accession à l'indépendance, voici près de cinquante ans. Le Département du travail et le ministère du Travail sont essentiellement responsables de la révision de toutes les lois pour assurer leur conformité avec une réalité toujours changeante. Dans le cadre de la révision de la législation, la priorité a été accordée à la loi sur les syndicats, à la loi sur la compensation des travailleurs, à la loi sur les usines, à la loi sur les congés et jours fériés, à la loi sur le salaire minimum et à la loi sur l'emploi et la formation. D'autres instruments devraient également subir le même traitement.

    Quant au projet de loi sur les syndicats, le représentant gouvernemental a déclaré que le Département du travail et le bureau du Procureur général ont approuvé ce texte et l'ont soumis à l'organe central d'étude de la législation. Après avoir étudié ce projet, cet organe l'a renvoyé devant le ministère du Travail, assorti de ses remarques et recommandations en vue de modifications. L'une de ces recommandations tend à ce que, une fois que sa rédaction aura été revue, ce texte soit soumis à une vaste consultation auprès de toutes les parties concernées, à savoir les organisations d'employeurs, comme l'Union des chambres de commerce et d'industrie de Myanmar, des représentants des entreprises publiques et privées et des associations à but social de travailleurs. Compte tenu des recommandations formulées par l'organe central d'étude de la législation, lesquelles devraient être mises en oeuvre cette année, le projet révisé devrait pouvoir être soumis à l'organe de contrôle compétent en temps utile.

    Les membres travailleurs ont rappelé que le Myanmar, qui viole avec persistance la convention, a été fréquemment entendu par cette commission. Le cas a été abordé en 1987, 1989, 1993, 1994, 1995 et 1996. Depuis plus de quarante ans, l'OIT presse le gouvernement de respecter les principes fondamentaux de la liberté syndicale. La commission lui a demandé de garantir le droit, pour les travailleurs, de constituer, sans autorisation préalable, des organisations de premier niveau, des fédérations et des confédérations, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières, et le droit, pour ces organisations, de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs, conformément aux articles 2, 5 et 6 de la convention.

    Au fil des ans, le gouvernement a catégoriquement refusé de coopérer avec la commission. Cette année, elle n'a toujours pas soumis de rapport, bien que ce cas ait fait l'objet l'an dernier d'une mention dans un paragraphe spécial. Le cas a fait l'objet d'un paragraphe spécial du Comité de la liberté syndicale en 1993, 1995 et 1996, et mériterait d'être mentionné encore une fois dans un paragraphe spécial cette année. Ce que le gouvernement de Myanmar veut faire comprendre, c'est qu'à l'évidence il considère comme plus important de priver les travailleurs des libertés syndicales que de respecter les obligations résultant de la convention. Cette attitude est injurieuse à l'égard de tous les mandants de l'OIT et le gouvernement mérite assurément une condamnation internationale pour sa conduite.

    En 1996, le représentant gouvernemental réaffirmait le ferme attachement de son gouvernement aux principes de la liberté syndicale et à un système démocratique pluripartite, à la libre économie de marché, à la justice et aux droits de l'homme pour tous. Cependant, ce que ces déclarations impliquent se révèle très différent pour le gouvernement et pour les membres travailleurs. La poursuite de la répression et de la violation des droits de l'homme, notamment de la liberté syndicale et de la démocratie, par le régime militaire prouve que ce gouvernement n'a aucunement l'intention de respecter ses obligations ou de faire droit aux demandes de la commission. Les membres travailleurs ont rappelé qu'une commission d'enquête a été constituée pour examiner une plainte soumise en vertu de l'article 26 de la Constitution pour non-respect de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. De plus, alors que le représentant gouvernemental a demandé l'assistance technique du BIT en ce qui concerne l'application de la convention no 87, le représentant de l'Organisation a été empêché d'accomplir sa mission par les autorités.

    Depuis plusieurs années, les membres travailleurs soulèvent la question des gens de mer de Myanmar et demandent au gouvernement de confirmer que ces travailleurs ne sont plus contraints de signer des contrats par lesquels ils s'obligent à ne pas contacter des organisations syndicales internationales et de faire en sorte qu'ils ne fassent plus l'objet d'intimidations lorsqu'ils exercent les droits que leur reconnaît la convention. Malheureusement, cette question doit être réitérée cette année encore.

    Les membres travailleurs se sont déclarés surpris que le Myanmar ait été récemment admis comme futur membre de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE). Cette admission, qui constitue un camouflet pour les forces démocratiques de Myanmar, a d'ailleurs été critiquée par le Prix Nobel de la paix, Mme Aung San Suu Kyi. Les membres travailleurs se sont déclarés inquiets d'une diminution éventuelle des exigences relatives au respect des libertés syndicales dans ces pays et d'une mise à l'écart de la Constitution de l'OIT. La Déclaration de Philadelphie dispose que tous les programmes d'action et mesures prises sur le plan national et international, notamment dans le domaine économique et financier, doivent être appréciés de ce point de vue et acceptés seulement dans la mesure où ils apparaissent de nature à favoriser, et non à entraver, le respect des principes fondamentaux de l'OIT, notamment la liberté d'expression et la liberté syndicale. Les membres travailleurs se sont demandé si l'admission de Myanmar comme futur membre de l'ANASE ne pourrait pas constituer un exemple de l'application des principes d'objectivité, d'impartialité et de transparence de l'OIT au niveau régional comme ayant été ardemment défendus tant par l'Organisation que par quelques-uns des gouvernements concernés.

    Pour conclure, les membres travailleurs ont appelé instamment le gouvernement à reconnaître immédiatement le droit, pour les travailleurs, de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix et de s'y affilier et le droit, pour ces organisations, de s'affilier à des organisations syndicales internationales. Le gouvernement n'ayant pris aucune mesure, les membres travailleurs ont souhaité que la commission exprime son mécontentement dans les termes les plus vifs possibles et qu'elle mentionne ce cas dans un paragraphe spécial en raison du défaut continu d'application de la convention.

    Les membres employeurs ont observé que les commentaires de la commission d'experts concernant le cas de Myanmar sont de plus en plus courts puisqu'il n'y a presque plus rien de nouveau à dire à force d'examiner le cas. Les organes de contrôles de l'OIT observent, depuis des décennies, l'absence de liberté syndicale dans le pays. Compte tenu des violations continues de la convention, les conclusions de la commission font l'objet d'un paragraphe spécial de son rapport depuis le début des années quatre-vingt. Lors de l'examen de ce cas par la commission l'année passée, le représentant gouvernemental n'avait fourni aucune nouvelle information et s'était borné à répéter ses déclarations antérieures. L'invitation d'une mission du BIT avait fait naître le faible espoir qu'elle serait en mesure d'aider le gouvernement à aborder les problèmes soulevés par l'application de la convention. Bien que la mission ait été invitée, les autorités de Myanmar ne l'ont pas reçue et elle n'a donc pas eu la possibilité de fournir l'assistance nécessaire. Depuis quarante ans, il est impossible de constituer un syndicat ou une organisation d'employeurs sans l'autorisation préalable des autorités nationales. De même, aucune fédération n'existe à un niveau supérieur. En un mot, il n'y a pas de liberté syndicale dans le pays. Bien que le gouvernement ait mentionné dans des termes très généraux des projets de lois sur un certain nombre de questions concernant la législation du travail, rien n'indique qu'ils permettront le développement de la liberté syndicale. De plus, encore une fois, le gouvernement n'a pas présenté le rapport demandé par la commission d'experts. Tous ces éléments montrent un manque de coopération de la part du gouvernement. Dans ces conditions, les membres employeurs ont considéré que la commission devrait répéter ses commentaires de l'année dernière et constater, avec encore plus de regret, qu'aucun progrès n'a été réalisé malgré ses observations. Les conclusions de la commission devraient une fois de plus figurer dans un paragraphe spécial de son rapport.

    Le membre travailleur du Japon a souligné qu'il s'agit d'un des cas de violation de la convention no 87 les plus anciens et les plus graves soumis à la commission. Le gouvernement avait accepté d'accueillir une mission de contacts directs. Le fait qu'il se soit rétracté montre son manque total de respect pour le système de contrôle ainsi que pour les dispositions de la convention. Il convient de souligner que la liberté syndicale ne peut exister sans liberté de parole, d'expression et de réunion. Aucune de ces libertés n'existe au Myanmar. Les personnes participant aux manifestations pacifiques sont régulièrement arrêtées et emprisonnées. En 1996, plus de 2 000 personnes ont été arrêtées. Les étudiants et les travailleurs qui ont pris part à ces manifestations ont été forcés de demander asile. Il convient d'insister pour que le gouvernement mette, sans délai, sa législation en conformité avec les dispositions de la convention et annonce l'établissement d'un calendrier à cette fin. La commission devrait mentionner le Myanmar dans un paragraphe spécial.

    Le membre travailleur du Pakistan a regretté que le représentant gouvernemental ne se soit même pas donné la peine de répondre à l'observation de la commission d'experts sur le déni persistant de liberté syndicale. Sans respect des droits de l'homme fondamentaux tels qu'ils sont consacrés par les conventions fondamentales de l'OIT, y compris la liberté syndicale, il ne peut y avoir de justice sociale. En accord avec les membres travailleurs, l'orateur a demandé que les principes de la liberté syndicale soient immédiatement respectés au Myanmar.

    Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que la négation de la liberté syndicale s'inscrit dans le contexte du déni absolu de tous les droits de l'homme et des libertés fondamentales par le régime militaire. Si la liberté syndicale préoccupe autant les dirigeants du régime militaire, c'est parce qu'ils ont très bien compris que la liberté syndicale - le droit de se réunir et de s'organiser - est le préalable nécessaire à la protection des droits fondamentaux. Ce cas a été soumis à la commission quelques semaines seulement après l'arrestation de 316 sympathisants du Prix Nobel de la Paix, Mme Aung San Suu Kyi, dans le but de les empêcher de se rencontrer le 27 mai à l'occasion de la célébration du 7e anniversaire de la victoire de leur parti, la Ligue nationale pour la Démocratie, aux élections nationales. Il a souligné que ce cas avait été examiné par la commission d'experts et la présente commission à maintes reprises et pour de nombreuses raisons. La plus évidente est que l'on espère que, malgré une absence persistante de progrès, la pression constante de l'OIT pour que le gouvernement respecte ses obligations ainsi que la campagne internationale qui vise à forcer le gouvernement militaire à démissionner pour qu'il soit remplacé par un gouvernement civil finiront un jour par porter leurs fruits. De plus, bien que le représentant gouvernemental n'ait donné aucune information sur le fond du problème, il s'agit là d'une nouvelle opportunité de faire directement part aux représentants du régime militaire de la condamnation de la communauté internationale. Enfin, cela offre l'occasion de porter à la connaissance de la commission d'experts de nouvelles violations des principes de la liberté syndicale par le régime militaire.

    Compte tenu des déclarations vagues que vient de faire le représentant gouvernemental, il conviendrait de lui demander pourquoi le Syndicat libre de Birmanie (FTUB) n'est pas autorisé à fonctionner dans son pays. De plus, il importe de connaître les raisons pour lesquelles les travailleurs qui ont été identifiés comme appartenant au FTUB sont en permanence sous surveillance de la police et des services secrets militaires et vivent dans la peur constante d'être arrêtés et torturés. L'orateur a fermement appuyé les déclarations des membres employeurs et des membres travailleurs selon lesquelles cette commission devrait trouver un moyen d'exprimer son profond mécontentement sur le manque de progrès et de coopération du régime militaire dans des termes plus forts que l'année passée. Les conclusions de la commission devraient être mentionnées, une fois de plus, dans un paragraphe spécial du rapport, car ce cas constitue un manquement continu aux dispositions de la convention.

    Le représentant gouvernemental du Danemark, s'exprimant au nom des gouvernements de l'Allemagne, de l'Autriche, de la Belgique, du Canada, du Danemark, de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de la Suède et de la Suisse, a exprimé son profond regret sur le fait que la commission doive une fois de plus examiner les violations de la convention commises par le Myanmar. Outre le fait que le gouvernement n'ait pas envoyé de rapport à la commission d'experts, il est regrettable qu'il n'ait pas été possible à la mission du BIT de se rendre dans le pays, en raison du manque de coopération du gouvernement. Bien que le représentant gouvernemental ait déclaré à la commission, l'an passé, que le gouvernement avait l'intention d'appliquer la convention, rien ne s'est produit quant au droit des travailleurs du Myanmar de constituer des syndicats et de s'y affilier. Il convient également de se référer à la résolution 1997/64 de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies qui a été adoptée par consensus. Il avait été demandé au gouvernement de remplir ses obligations en tant qu'Etat ayant ratifié la convention no 87 sur la liberté syndicale et de coopérer plus étroitement avec l'OIT. L'orateur a exprimé le ferme espoir qu'il sera possible de convenir d'une date pour l'envoi d'une mission au Myanmar, que cette mission aurait lieu avant la prochaine Conférence et que le gouvernement prendrait les mesures nécessaires pour assurer pleinement le droit de constituer des organisations et de s'y affilier.

    Le représentant gouvernemental des Etats-Unis a déclaré que la situation des droits des travailleurs au Myanmar était, tout simplement et fort malheureusement, déplorable. Les syndicats ne fonctionnent pas et les travailleurs continuent d'être privés du droit d'association. Les efforts entrepris par le BIT pour offrir une assistance technique se sont révélés vains et sont actuellement au point mort. En outre, les marins du Myanmar qui ont tenté d'obtenir un traitement et un salaire équitables pour le travail effectué à bord de navires internationaux ont fait l'objet de menaces et de harcèlement lorsqu'ils sont rentrés chez eux. Ceux qui parlent de liberté syndicale n'osent pas revenir dans leur pays de peur d'être emprisonnés par le gouvernement et sont obligés de vivre en exil. Bien que le Myanmar ait librement ratifié la convention en 1955, la commission d'experts et la présente commission sont obligées de conclure qu'elle n'est pas appliquée et que la liberté syndicale n'existe pas au Myanmar. Aucune information pertinente n'a été donnée sur cette terrible situation. La seule réponse appropriée est une action rapide et concrète en vue de rétablir les droits syndicaux dans ce pays. En attendant que cela se produise, l'orateur s'est joint à l'appel général lancé au sein de la commission pour que les conclusions les plus fermes soient adoptées sur ce cas.

    Le membre travailleur de la Grèce a invité les membres de la commission qui seraient peu au fait de ce cas à se reporter aux rapports adoptés par la présente commission lors des sessions de 1994, 1995 et 1996. Elle y prenait acte de l'engagement du gouvernement à rendre la législation et la pratique conformes à la convention. Le représentant gouvernemental vient de faire la même déclaration cette année encore. C'est à juste titre que les membres employeurs estiment que tout a déjà été dit sur ce cas et qu'il n'y a plus matière à discussion. La commission d'experts constate elle aussi l'absence de tout élément nouveau. La liste des délégués à la Conférence contient un indice intéressant de la situation syndicale: le délégué des travailleurs y apparaît en sa qualité de contrôleur des puits et des chantiers de l'entreprise pétrolière. Le Myanmar est un pays du tiers monde, mais qui dispose de richesses. En interdisant aux travailleurs et aux citoyens de s'organiser, une minorité cherche seulement à empêcher la majorité de s'organiser pour défendre ses intérêts. Les moyens disponibles pour inciter le gouvernement à changer d'attitude sont malheureusement limités à l'adoption d'un paragraphe spécial. Il faudrait réfléchir à d'autres moyens pour stigmatiser ce cas d'une particulière gravité et faire savoir qu'à l'orée du XXIe siècle ce régime ne respecte aucun des droits de l'homme fondamentaux.

    Le représentant gouvernemental a indiqué qu'un intéressant dialogue avait eu lieu au sein de la commission concernant l'amélioration de l'application de la convention tant dans la législation que dans la pratique. Le gouvernement actuel s'efforce de construire un pays pacifique, moderne et développé, après avoir défini des objectifs politiques, économiques et sociaux clairs et précis qui reflètent les aspirations des citoyens et la situation objective du pays. Dans ce contexte et grâce à la bonne volonté du gouvernement, les efforts entrepris en vue de la reconstruction nationale et de l'élaboration d'une nouvelle Constitution d'Etat qui puisse résister à l'épreuve du temps sont couronnés de succès. Il convient de rappeler que le Myanmar est composé de plus de 100 groupes ethniques et que, grâce à sa bonne volonté, le gouvernement a réussi à remettre dans le droit chemin 15 des 16 groupes armés. Actuellement, la paix règne dans le pays, après presque un demi-siècle de conflits internes qui ont freiné le développement.

    L'établissement d'un véritable système démocratique pluripartite reposant sur les principes de justice, de liberté et d'égalité est une des tâches importantes que le gouvernement s'est engagé à accomplir. A cet égard, bien qu'il n'existe pas de syndicat au sens propre du terme dans les divers établissements et entreprises, des associations pour le bien-être des travailleurs fonctionnent sur une base tripartite. Il existe plus de 2 000 associations de ce genre. Les comités de contrôle des travailleurs au niveau des municipalités s'occupent également des questions liées au travail. Cela montre que le gouvernement n'a jamais négligé le bien-être des travailleurs. En ce qui concerne la protection des droits des travailleurs, le système d'administration du travail est plus efficace qu'il ne l'a jamais été. Il ne fait aucun doute que les droits syndicaux seront respectés dans le cadre de la nouvelle Constitution. La stabilité et la reconstruction nationales sont les conditions indispensables pour atteindre le plus rapidement possible les objectifs recherchés. Le gouvernement a appris, au regard des événements douloureux qui se sont produits dans d'autres pays, que les changements hâtifs conduisent au désordre et à l'instabilité qui provoquent la souffrance des citoyens. Par conséquent, il s'emploie à réaliser des progrès graduels et stables pour mettre en place une véritable société démocratique.

    La commission a pris note des déclarations communiquées par le représentant gouvernemental et du débat prolongé qui s'est tenu en son sein. La commission a rappelé qu'elle avait discuté de ce cas à de nombreuses reprises en 1987, 1989, 1993, 1994, 1995 et 1996. En 1995, la commission a mentionné ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport général et, en 1996, elle a été amenée à le mentionner dans la partie de son rapport général relative au défaut continu d'application de la convention eu égard au fait que, depuis de nombreuses années et en dépit d'invitations répétées, il persistait de graves divergences en droit et en pratique par rapport à la convention. La commission n'a pu que déplorer que la commission d'experts n'ait pas reçu le rapport du gouvernement et elle a profondément regretté la persistance de graves divergences entre la législation nationale et la convention. La commission a également déploré l'absence de coopération de la part du gouvernement. Constatant à grand regret l'absence de tout progrès dans l'application de la convention, la commission a insisté une fois de plus auprès du gouvernement pour qu'il adopte d'urgence les mesures et les mécanismes nécessaires pour garantir, en droit et en pratique, à tous les travailleurs et employeurs sans distinction aucune et sans autorisation préalable, le droit de s'affilier au syndicat de leur choix afin de défendre leurs intérêts. La commission a également insisté sur la nécessité que ces organisations aient le droit de s'affilier à des fédérations et à des confédérations ainsi qu'à des organisations internationales sans que les autorités publiques y fassent obstacle. La commission a exprimé son ferme espoir d'être à même de constater des progrès substantiels dans l'application de la convention dans un très proche avenir, et elle a prié instamment le gouvernement de fournir à cet effet un rapport détaillé à la commission d'experts. La commission a décidé de faire figurer ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport et de mentionner ce cas comme un cas de défaut continu d'application de la convention no 87.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1996, Publication : 83ème session CIT (1996)

    Un représentant gouvernemental du Myanmar a réaffirmé le ferme attachement de son gouvernement aux principes de la liberté d'association. Son gouvernement est attaché à un système démocratique multipartite, à une économie de libre marché et à un Etat moderne et développé dans lequel toutes les composantes de la société jouissent de la justice et des droits de l'homme. A cette fin, les représentants du peuple examinent et définissent les principes fondamentaux qui devront être incorporés dans la nouvelle Constitution. Les représentants des travailleurs sont associés à ce processus. L'organe central de contrôle de la législation examine un projet de loi sur les syndicats tendant à protéger les droits des travailleurs. Dans un avenir assez rapproché, le corps de lois relatif à la liberté d'association au Myanmar sera conforme à la convention no 87. La période actuelle est un test pour le pays et le gouvernement ne ménage aucun effort devant la complexité de la situation. L'orateur rappelle une fois de plus que son gouvernement a demandé formellement l'assistance technique de l'OIT pour l'élaboration de la loi sur les syndicats. Une mission de l'OIT serait la bienvenue au Myanmar, à une date agréant les deux parties, pour apporter sa contribution à l'élaboration de la nouvelle législation.

    Les membres travailleurs ont souligné que cette convention no 87 a fait l'objet de discussions au sein de cette commission à neuf reprises depuis 1981. La commission d'experts a formulé ses commentaires sur l'application de cet instrument au Myanmar dans douze de ses quinze derniers rapports. Cependant, l'OIT n'a reçu du gouvernement aucun rapport demandé par la commission dans le paragraphe spécial de son rapport de 1995, en dépit des assurances données par celui-ci l'an dernier, lors de la Conférence, de sa volonté de solliciter l'avis du Bureau sur les projets de lois sur les syndicats. A ce jour, le Bureau n'a connaissance d'aucune avancée quelle qu'elle soit, en droit comme en pratique. Cette situation démontre à l'évidence que le gouvernement n'est pas animé de la volonté politique de respecter la convention no 87.

    Les événements survenus ces derniers jours permettent de penser que la liberté d'association n'est pas une priorité élevée pour un régime militaire capable de menacer une assemblée pacifique de personnes ne faisant rien d'autre qu'écouter un lauréat du prix Nobel. Dans un tel contexte, ce serait franchir une étape décisive vers l'harmonie sociale que de permettre, conformément à la convention, la création de syndicats constitués par des travailleurs pour la défense de leurs intérêts économiques et sociaux. Or, cette année, plutôt que de mandater un représentant des travailleurs à la Conférence de l'OIT, le gouvernement y a dépêché un administrateur des chemins de fer, preuve élémentaire et inconstestable qu'il n'existe pas de syndicats au Myanmar à l'heure actuelle. La commission entend parler, année après année, de congrès nationaux, de nouvelle constitution et de nouvelle législation du travail, mais n'a jamais obtenu le moindre élément attestant de la liberté d'association.

    Les membres travailleurs sont intimement convaincus que le gouvernement devrait joindre l'acte à la parole qu'il professait en 1995. Il devrait, de toute urgence, accepter le droit, pour les syndicats, de se constituer sans autorisation préalable et de s'affilier librement à des organisations internationales. Dans l'attente d'une telle évolution, la commission devrait prendre les mesures les plus fermes possible dans cette affaire, notamment adopter un paragraphe spécial mentionnant le défaut continu du gouvernement dans l'application de la convention.

    Les membres employeurs n'ont pu que dresser un bilan tout à fait négatif, du fait que le Myanmar ne respecte pas les obligations découlant de la convention no 87, qu'il a ratifiée. La création d'associations de travailleurs ou d'employeurs dans ce pays nécessite en effet une autorisation préalable de l'Etat à chaque étape de la procédure. En dépit des longs débats que cette situation a suscités, le gouvernement se borne à une déclaration générale selon laquelle ce pays serait en voie de transition et des changements se feraient jour à l'avenir, sans donner aucune précision sur des réformes législatives. Comme aucun élément autorisant l'optimisme ne ressort de cette déclaration, les membres employeurs jugent opportun de demander des mesures spéciales devant une situation qui n'évolue pas depuis de nombreuses années. Le gouvernement se déclarant disposé à recevoir l'assistance technique du BIT, les membres employeurs saisissent cette occasion pour demander au Bureau des éclaircissements sur sa position dans cette affaire et réitèrent les profondes préoccupations que leur inspire cette situation.

    Le représentant du Secrétaire général a rappelé que les conclusions de la commission de l'année dernière évoquaient la possibilité d'une mission d'assistance technique du Bureau. Le 4 avril de cette année, le Bureau a reçu une lettre du gouvernement du Myanmar demandant une telle coopération technique. Le Bureau a répondu qu'il était prêt à effectuer une mission au Myanmar, indiquant les personnes désignées pour s'y rendre, ainsi que les dates auxquelles ces personnes seraient présentes au Myanmar. Un fonctionnaire de haut rang du Département des normes internationales du travail est en effet parti pour le Myanmar mais, au cours d'une escale à Bangkok, il a reçu une télécopie du gouvernement du Myanmar l'informant du report de la mission en raison de circonstances inopinées. Naturellement, le Bureau a immédiatement accusé réception de ce message et regretté que la mission ne puisse avoir lieu.

    Le membre travailleur de la Suède a déclaré que, n'ayant reçu aucune confirmation de mesures effectives adoptées par le Myanmar, il était forcé de conclure qu'en réalité le gouvernement n'avait pas l'intention de respecter la convention. L'année dernière, au cours de la discussion au sein de la commission, le représentant gouvernemental a fait état de certains changements relatifs à la liberté d'association pour les marins du Myanmar, suite aux recommandations du Comité de la liberté syndicale. Malheureusement, il n'existe aucune preuve que des changements réels aient eu lieu. L'orateur a par conséquent exprimé l'espoir que le représentant gouvernemental puisse confirmer par exemple que les marins du Myanmar ne sont plus obligés de signer un contrat leur interdisant de prendre contact avec des organisations syndicales internationales, et qu'aucune intimidation ni sanction, de quelque nature que ce soit, n'est exercée contre les marins qui exercent leurs droits conformément à la convention no 87. Cette année, le représentant gouvernemental s'est référé au travail de la Convention nationale sur la révision de la loi sur les syndicats. L'orateur a cependant douté de son succès, du fait que les représentants des travailleurs à cette Convention sont sélectionnés et contrôlés par le gouvernement. En raison des graves violations répétées de la liberté d'association au Myanmar, la commission devrait exprimer dans un paragraphe spécial son profond mécontentement face à la situation actuelle.

    Le membre travailleur du Togo a déclaré que l'année dernière le cas du Myanmar figurait déjà au rapport des experts au titre de la convention no 87, fondamentale s'il en est. En outre, il y a cette année une aggravation, puisque la commission d'experts n'a pas reçu le rapport du gouvernement demandé par la présente commission. Depuis que le Myanmar a ratifié la convention no 87, en 1955, il a fait régulièrement l'objet de commentaires de la commission d'experts. Le Myanmar affiche depuis quarante ans une incapacité à aligner sa législation et sa pratique sur la convention no 87. Les mesures nécessaires ne sont pas prises pour, d'une part, assurer aux travailleurs le droit de constituer, sans autorisation préalable, des organisations de leur choix afin de défendre de manière effective leurs intérêts et, d'autre part, garantir le droit des organisations de travailleurs et d'employeurs de s'affilier à des organisations internationales du même type, conformément aux articles 2, 5 et 6 de la convention.

    Les violations des droits de l'homme - dont font d'ailleurs partie les droits syndicaux - sont légion au Myanmar. Depuis quarante ans, il n'existe pas de syndicat digne de ce nom. Dans ces conditions, il faut ignorer toute demande de mission du BIT formulée par le Myanmar, qui relève de la manipulation pure et simple; l'on a d'ailleurs reçu une information à ce sujet. L'orateur a estimé qu'il s'agit d'un cas n'évoluant pas et a appuyé la demande d'insertion d'un paragraphe spécial pour rappeler au Myanmar son engagement de mettre son droit et sa pratique en harmonie avec la convention no 87.

    Le membre travailleur de la Grèce s'est associé aux propos tenus par les autres membres travailleurs; il a souligné que le cas du Myanmar était malheureusement trop simple: aucun progrès n'a été accompli. Il est à peine croyable que le programme d'assistance du BIT au Myanmar n'ait finalement pas eu lieu. En écoutant les propos du représentant gouvernemental, l'orateur avait cru que le BIT n'avait pas pu fournir l'assistance technique demandée en raison des restrictions budgétaires.

    L'orateur a évoqué la déclaration écrite sous serment que les marins doivent signer. Cette dernière dispose notamment: "Je déclare être pleinement conscient des dangers que présente toute intervention de la Fédération internationale des ouvriers du transport." Il n'existe pas de syndicat au Myanmar, et les travailleurs n'ont même pas la possibilité de recourir à une organisation syndicale internationale afin que les employeurs paient correctement leurs salaires. La déclaration stipule également: "Je déclare par la présente que les renseignements ci-après sont exacts: les numéros de compte, les biens que je possède." Cela revient à réduire les gens à l'esclavage. Ce cas est horrible et il faudrait écrire dans les conclusions "la profonde indignation devant cette situation qui se perpétue", plutôt que "la profonde préoccupation".

    Le représentant du Secrétaire général a fourni des informations complémentaires à propos de la mission du Bureau au Myanmar, en déclarant qu'il n'y avait absolument aucune restriction budgétaire affectant les missions susceptibles d'être organisées par le Département des normes internationales du travail sur des questions ayant trait à l'application de conventions ratifiées. Les restrictions qui affectent le Département des normes internationales du travail s'appliquent à d'autres domaines, mais en aucun cas au mécanisme de contrôle pour l'application des conventions.

    Le membre travailleur de l'Inde a rappelé que le Myanmar connaît un régime militaire depuis longtemps. A l'heure actuelle, ce sont non seulement les droits syndicaux, mais également les droits politiques et sociaux qui sont supprimés. Le gouvernement devrait avoir honte d'être accusé de maintenir une telle oppression. La déclaration faite par le représentant gouvernemental n'emporte pas la conviction, et l'orateur a demandé au représentant gouvernemental de transmettre ces appréciations à son gouvernement, afin que ce dernier restaure la liberté syndicale dans le pays.

    Le membre travailleur du Japon a déclaré qu'il s'agissait d'un cas très grave et clair de violation d'une convention fondamentale en matière de droits de l'homme, ayant déjà fait l'objet d'un paragraphe spécial l'année dernière. Cependant, aucun progrès ne peut être relevé. Au contraire, les informations provenant du pays en dépit de l'abolition par le gouvernement des libertés de presse et d'expression indiquent que la suppression de la liberté d'association s'est non seulement poursuivie mais également aggravée récemment, par des arrestations massives et arbitraires de personnes qui souhaitent simplement une certaine liberté de réunion et d'expression. Cela s'est passé il y a quelques mois et des centaines de personnes sont toujours en prison. Le gouvernement a continuellement promis de mettre le droit et la pratique en harmonie avec la convention no 87, mais ces promesses restent des paroles en l'air, sauf sur un point. Le gouvernement a promis d'abolir le système de syndicat unique et a tenu sa promesse en le remplaçant par l'absence de tout système syndical. Le refus persistant du gouvernement de faire quoi que ce soit au sujet des observations faites par la commission d'experts mérite à nouveau un paragraphe spécial et un rapport de la présente commission dans les termes les plus forts possible et exprimant sa profonde préoccupation et sa condamnation de la situation.

    Le membre gouvernemental de Norvège a parlé au nom des cinq pays nordiques membres de la commission. Ces pays ont fait une déclaration similaire sur ce cas, en 1994 et 1995, exprimant leur profonde préoccupation face à l'absence de tout progrès dans l'application de la convention au Myanmar. Les pays nordiques ne peuvent que répéter leur profonde préoccupation envers la situation en question dans le pays. Ils appellent à nouveau instamment le gouvernement à adopter d'urgence les mesures démocratiques nécessaires en vue d'assurer pleinement le droit de s'organiser et de s'affilier à des organisations internationales sans contrainte.

    Le membre gouvernemental des Pays-Bas a appuyé les observations faites par l'orateur précédent. Il est clair qu'il s'agit là d'une question extrêmement grave: l'on peut se demander combien d'interventions il faudra pour que la situation s'améliore au Myanmar. Il paraît presque incroyable qu'un pays puisse rester aussi insensible à l'opinion de la commission. Certains voudraient probablement que des mesures commerciales soient adoptées, mais ce ne serait pas une solution appropriée. Il faut plutôt que le gouvernement du Myanmar réalise qu'il ne peut plus faire abstraction de l'opinion publique mondiale et que les déclarations de bonnes intentions ne suffisent pas. L'orateur a une nouvelle fois appelé le gouvernement du Myanmar à déployer des efforts concrets afin de mettre sa législation en conformité avec la convention no 87.

    Le membre gouvernemental des Etats-Unis a déclaré que ce cas est une violation fondamentale, flagrante et continue d'une convention ratifiée. Il n'existe pas de syndicat ni de liberté d'association en Birmanie. Comme pour la convention no 29, l'opinion des gouvernements en faveur de l'application de la convention no 87 a été exprimée non seulement par les divers organes de contrôle de l'OIT, mais également par l'Assemblée générale et la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. Le gouvernement a dit une chose et fait une autre chose. L'année dernière, il a exprimé "un désir sincère" de coopérer avec l'OIT et de recevoir une assistance technique du Bureau. Il voulait inviter une mission du Bureau dans le pays; cette mission n'a jamais eu lieu, et cette année le gouvernement n'a même pas envoyé un rapport sur la convention. La commission d'experts exprime les mêmes préoccupations sur cette convention depuis quarante ans et, au cours des quinze dernières années, c'est la dixième fois que la présente commission examine ce cas, des paragraphes spéciaux ayant été adoptés à trois reprises. Le gouvernement tente-t-il de tromper la commission? Telle est la conclusion inévitable qu'elle doit tirer face à des promesses répétées et un défaut persistant de transformer ces mots en actions. L'oratrice a déploré la campagne délibérée du gouvernement en vue d'éliminer la démocratie et la primauté du droit en Birmanie. Par conséquent, comme pour la convention no 29, elle a estimé que ce cas méritait les conclusions les plus fermes de la commission pour attirer l'attention de la Conférence sur le défaut continu du gouvernement de la Birmanie d'appliquer la convention no 87.

    Le membre travailleur du Panama a estimé qu'il s'agissait d'un cas de plus de manipulation très claire par le gouvernement du Myanmar. Le fait même d'avoir suspendu une mission du BIT, qui avait été programmée et adéquatement coordonnée et qui, selon le fonctionnaire responsable de la mission, avait déjà quitté Genève, démontre clairement une manipulation délibérée. Le gouvernement n'a aucune intention de faire cesser les violations des droits syndicaux dans le pays. La nouvelle demande d'assistance formulée par le représentant gouvernemental n'est qu'une tentative de tromper à nouveau la commission. La Conférence devrait adopter une position très ferme vis-à-vis du gouvernement du Myanmar qui a fait preuve d'un manque total de respect pour l'OIT, notamment en s'abstenant de soumettre les rapports demandés.

    La commission a pris note avec une profonde préoccupation de la déclaration du représentant gouvernemental qui ne fait que réitérer, comme lors des années précédentes, son intention d'appliquer la convention sans faire état d'aucune évolution positive ni en droit ni en pratique. La commission a déploré que le gouvernement n'ait encore pris aucune mesure concrète pour donner suite aux observations que la commission d'experts formule depuis de très nombreuses années. La commission a regretté profondément que les violations très graves et permanentes des principes fondamentaux de la convention se perpétuent au Myanmar. Elle n'a pu que constater qu'il n'existe pas, dans le pays, de syndicats ayant pour objectif la défense et la promotion des intérêts des travailleurs au sens de la convention. La commission a demandé instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir aux travailleurs et aux employeurs le droit de constituer les organisations de leur choix, sans autorisation préalable, ainsi que le droit des organisations de s'affilier aux organisations internationales de travailleurs et d'employeurs.

    La commission a regretté que la mission du BIT programmée d'un commun accord pour mai 1996 n'ait pu finalement être reçue au Myanmar. Elle exprime le ferme espoir que le gouvernement coopérera maintenant de manière approfondie avec le BIT afin que les très graves divergences entre la loi et la pratique, d'une part, et la convention, d'autre part, soient levées dans un très proche avenir.

    La commission a décidé de mentionner ce cas dans son rapport comme un cas de défaut continu d'application de la convention no 87, étant donné que, depuis de très nombreuses années et malgré de nombreuses incitations, il existe des divergences très sérieuses et continues en fait comme en droit.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1995, Publication : 82ème session CIT (1995)

    Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

    Dans le cadre de l'évolution récente concernant l'application de la convention, il faut noter une mission du spécialiste pour les normes du BIT pour la région Asie en mai 1994. En vue de faciliter les discussions entre les autorités gouvernementales et les experts du Bureau, le ministère du Travail a décidé de prendre des mesures pour assurer la traduction en anglais du projet de loi sur les syndicats, qui était rédigé en langue nationale. Le gouvernement a demandé une assistance complémentaire du BIT pour obtenir des conseils techniques dans ses efforts dans l'application de la convention. Une mission supplémentaire du BIT a été réalisée en janvier 1995 par le directeur régional du Bureau de l'OIT pour la région Asie et un spécialiste du Département des normes internationales du travail. Au cours de cette mission, des réunions ont été organisées entre le ministre du Travail et le directeur général du département du Travail. Le gouvernement regrette l'annulation d'une mission supplémentaire consultative du BIT, ayant pour objet la modification de la loi sur les syndicats de 1926 en vue de l'adapter au nouveau système politique et économique, et a formulé l'espoir de la voir agencée à une date ultérieure.

    En outre, un représentant gouvernemental a souligné le désir sincère de son gouvernement de coopérer avec l'OIT, dont l'assistance technique serait bienvenue pour l'élaboration d'une nouvelle législation sur les syndicats. Après la mission accomplie en mai 1994 par le conseiller technique de l'OIT pour la région asienne sur les questions touchant à la convention no 87, le ministère du Travail a décidé de faire traduire les projets de loi sur les syndicats en anglais pour faciliter les discussions entre les autorités du pays et les experts du BIT. Une visite de suivi a été accomplie à Yangon en janvier 1995 par des fonctionnaires du Bureau de l'OIT à Bangkok. Pendant les discussions avec la mission du BIT, les autorités du Myanmar furent informées qu'une autre mission du Service de la liberté syndicale arriverait à Yangon en avril ou mai 1995. Le ministre du Travail espérait accueillir cette mission. Malheureusement, elle n'a pu avoir lieu comme prévu. Le gouvernement estime que les contacts doivent être maintenus afin d'obtenir l'assistance technique qui débouchera sur l'application des principes de la liberté syndicale. Les autorités souhaitent que les discussions sur ce point s'engagent à la date la plus opportune. L'orateur a fait valoir que des progrès appréciables ont été accomplis par la Convention nationale, dont la mission consiste à formuler les principes qui doivent être consacrés par la nouvelle Constitution. Actuellement, le contenu des titres relatifs à la structure de l'Etat, au chef de l'Etat et aux régions autonomes a été arrêté. Les titres concernant le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire doivent être discutés en octobre 1995, lors de la prochaine session. La procédure suivant son cours, les principes fondamentaux des droits du citoyen et des droits des travailleurs seront examinés en détail. Au nombre des principes devant être consacrés par la nouvelle Constitution, il existe des dispositions concernant les travailleurs des différents secteurs. L'Etat aura pour mission de prendre les lois nécessaires à la protection des droits des travailleurs agricoles, des droits des paysans et des droits des intellectuels. Il appartiendra à l'Etat de promouvoir les intérêts de ces catégories ainsi que des fonctionnaires. Il est prévu que les employés de l'Etat devront être libres de tout engagement à l'égard d'un parti politique tout en conservant le droit de voter pour le parti de leur choix. L'Etat adoptera la législation nécessaire pour garantir que son personnel bénéficie d'une sécurité suffisante dans l'emploi et de conditions d'alimentation, de logement et de subsistance satisfaisantes.

    Les membres travailleurs ont rappelé que ce cas se pose depuis près de 40 ans, qu'il a fait l'objet de 11 observations de la commission d'experts, de sept longues discussions de la Commission de la Conférence et de deux paragraphes spéciaux, en 1982 et 1993. Année après année ont été entendues des promesses de nouvelle Constitution ou d'une nouvelle législation du travail. Cette année, la commission d'experts a, en plus, signalé le cas no 1752 (novembre 1994) du Comité de la liberté syndicale au sujet des gens de mer de ce pays. Sans qu'il soit nécessaire de rentrer dans le détail des innombrables violations en cause, le fait est qu'il n'y a pas de syndicat à l'heure actuelle au Myanmar. Il s'agit d'organismes fantoches, entièrement manipulés par le gouvernement, dans des conditions qui les rendent tout à fait étrangers au syndicalisme.

    Quant au fait que la Convention nationale s'emploie actuellement à l'élaboration d'une nouvelle Constitution, force est de reconnaître que le groupe des travailleurs au sein de cette institution, comme cette institution elle-même, est entièrement désigné et contrôlé par le gouvernement. En entendant le représentant gouvernemental demander une mission technique de l'OIT dans son pays, les membres travailleurs invitent le Bureau à la plus grande prudence avant d'envoyer une nouvelle mission au Myanmar. Tant qu'il n'y aura pas eu de changement concret, une telle requête doit être ignorée puisqu'il n'existe pas de syndicat et que les conditions minimales ne sont pas réunies. Une mission de l'OIT serait utilisée par le gouvernement pour essayer de donner une meilleure image de lui-même. Les fonctionnaires de l'OIT ne doivent pas se prêter à de telles manoeuvres et s'exposer, par exemple, à des citations hors contexte de leurs propos. Les membres travailleurs ont estimé qu'il est inutile de discuter davantage de ce cas puisque le gouvernement ne peut être convaincu par des paroles. Son refus persistant, au fil des ans, de prendre des mesures en réponse aux observations de la commission d'experts en ce qui concerne l'application de cette convention justifie la mention d'un paragraphe spécial.

    Les membres employeurs ont considéré que les graves divergences entre la législation et la pratique suivies par le Myanmar et les prescriptions de la convention no 87 sont un sujet de préoccupation constant de la commission depuis 1981. Celle-ci est saisie de ce cas pour la neuvième fois. Si l'appel à l'assistance technique de l'OIT n'est pas une tactique dilatoire, mais un effort sincère de corriger la situation, cette possibilité doit alors être étudiée. Il reste bien entendu à savoir si un texte législatif a effectivement été élaboré et si l'appareil législatif en a effectivement été saisi. Les membres employeurs souhaiteraient que les bases légales de la liberté d'association, actuellement inexistantes, soient mises en place. Il est fondamental que les travailleurs et les employeurs aient le droit de constituer les organisations de leur choix et soient en mesure de s'affilier à des fédérations et confédérations.

    Un membre travailleur du Japon a estimé que le problème tient essentiellement à un manque total de respect pour les droits de l'homme. Comme l'organisation Amnesty International l'a abondamment documenté, les violations des droits de l'homme au Myanmar sont un outrage à la dignité humaine. Cette situation est clairement illustrée par l'assignation à domicile de Mme Aung San Suu Kyi. Se référant à la liste de la délégation de ce pays à la Conférence, l'orateur a fait observer que le délégué travailleur n'est membre d'aucun syndicat, ce qui est assez représentatif de la situation du pays sur ce plan. Il a appelé le gouvernement à changer d'orientation politique et à s'engager à garantir la liberté d'association, élément essentiel de toute démocratie.

    Un membre gouvernemental de la Norvège, s'exprimant au nom des membres gouvernementaux des cinq pays nordiques et des Pays-Bas, a noté avec intérêt la déclaration du gouvernement du Myanmar selon laquelle des discussions sur les questions de travail, y compris le droit d'association des travailleurs, doivent s'ouvrir. Il a donc exprimé le ferme espoir qu'avec l'assistance de l'OIT les mesures nécessaires seront prises, dès que possible, pour rendre la législation et la pratique du pays conformes à la convention.

    Un membre travailleur de la Suède a considéré qu'en raison de l'absence totale de liberté syndicale au Myanmar et des violations continuelles des droits fondamentaux de l'homme dans ce pays la commission doit se demander si le gouvernement a réellement la volonté politique de remédier à la situation et de se conformer à la convention no 87. La commission d'experts a noté avec préoccupation les conclusions du Comité de la liberté syndicale, approuvées par le Conseil d'administration en novembre 1994, dans le cas no 1752. Dans cette affaire, le droit pour les marins de constituer des syndicats indépendants ou de s'affilier à une fédération internationale constitue un nouvel exemple de la manière dont la liberté d'association est bafouée dans ce pays. Les marins birmans embarqués sur des navires battant pavillon de complaisance restent sous le contrôle étroit de l'Etat et doivent signer une déclaration par laquelle ils s'interdisent de contacter des organisations syndicales internationales. En outre, lorsque les salaires de ces marins sont relevés à un niveau plus décent, leurs contrats stipulent que ces augmentations doivent être rétrocédées à l'Etat, dès leur retour, sous peine de sanction. Compte tenu de ce qui précède et de la longue tradition du déni du droit syndical dans ce pays, cette commission doit exprimer son vif mécontentement devant la situation actuelle par un paragraphe spécial.

    Un représentant des travailleurs de la Grèce a relevé les divergences entre les déclarations du gouvernement, qui prétend que des progrès sensibles ont été enregistrés, et le constat de la réalité. Dans ce pays, il n'existe même pas de syndicats et le gouvernement cherche manifestement à gagner du temps par des discours sans consistance réelle. Comme tous les pouvoirs militaires, il s'octroie la liberté de supprimer celle des autres. S'il convient que la commission n'exclut pas toute alternative en refusant toute nouvelle mission de l'OIT, il ne conviendrait pas non plus de laisser la porte grande ouverte en accordant un crédit excessif à un gouvernement qui persiste à bafouer les libertés et les droits les plus élémentaires.

    Le membre gouvernemental, se référant au cas no 1752 du Comité de la liberté syndicale, a indiqué que de nouveaux développements sont intervenus récemment, comme précisé dans une lettre du Directeur général du Département du travail du Myanmar au directeur du Département des normes internationales du travail de l'OIT. Il s'agit des points suivants. Le gouvernement ayant été profondément préoccupé par les recommandations du Comité de la liberté syndicale, le ministère des Transports a pris les mesures détaillées ci-après en ce qui concerne les gens de mer, avec effet à compter du 9 février 1995. Le Département du contrôle des marins, qui relève du ministère des Transports, a rapidement abrogé l'obligation, pour les marins birmans, de signer une déclaration sur l'honneur avant de quitter le pays. En outre, la retenue de 25 pour cent sur le salaire, que les marins du Myanmar devraient remettre à leurs familles en monnaie nationale, a été abrogée, avec effet à compter du 1er décembre 1994. De plus, avec effet à compter de la même date, aux termes de la notification no 146/94 du ministère des Finances et des Impôts, promulguée le 16 novembre 1994, les marins et autres travailleurs du Myanmar à l'étranger ne sont plus assujettis qu'à un impôt sur le revenu de 10 pour cent sur l'ensemble des gains en devises déclarés.

    Les membres employeurs sont convenus avec les membres travailleurs que ce cas devrait faire l'objet d'un paragraphe spécial puisqu'il répond clairement aux critères habituels de cette commission pour définir les cas graves et persistants qui ne semblent pas devoir connaître de solution sans qu'une attention plus soutenue leur soit accordée. Ils estiment toutefois que l'OIT pourrait apporter son assistance technique, pourvu que cette assistance se traduise rapidement par une action tangible et concrète du gouvernement du Myanmar dans le domaine législatif.

    Les membres travailleurs ont déclaré que les informations concernant les développements intervenus récemment au regard du cas no 1752 soient communiquées au Bureau pour examen par le Comité de la liberté syndicale. Ils ont estimé que, si le gouvernement adresse au Bureau une demande de mission d'assistance technique, il appartiendra à celui-ci d'apprécier l'opportunité d'une telle démarche.

    La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental exprimant l'engagement de son gouvernement à rendre la législation et la pratique conformes à la convention no 87. Elle est toutefois gravement préoccupée par le fait que le gouvernement n'ait pas donné suite aux observations formulées par la commission d'experts depuis de nombreuses années, malgré une mention répétée de ce cas dans un paragraphe spécial, et par le fait qu'il n'existe pas de syndicats au vrai sens du terme. La commission appelle le gouvernement à prendre d'urgence les mesures nécessaires pour garantir que, dans la législation comme dans la pratique, les travailleurs et les employeurs aient le droit, sans autorisation préalable, de s'affilier aux organisations de leur choix, hors de la structure existante, et que de telles organisations aient le droit de rejoindre sans obstacle des fédérations et confédérations et de s'affilier à des organisations internationales. La commission a exprimé le ferme espoir qu'elle sera en mesure de constater, dans un proche avenir, des progrès substantiels quant à l'application de la convention dans la législation et la pratique, compte tenu de l'assistance accordée antérieurement par l'OIT, et elle prie le gouvernement de fournir un rapport détaillé à la commission d'experts sur tout nouveau développement en la matière. Elle a noté qu'une nouvelle demande d'assistance technique pourrait être adressée par le gouvernement du Myanmar à l'OIT, mais elle laisse au Bureau le soin d'apprécier l'opportunité et, éventuellement, le choix de la date d'une telle mission. La commission a décidé de faire figurer ces conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport général.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1994, Publication : 81ème session CIT (1994)

    Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

    Dans une observation sur le droit du travail de l'Union de Myanmar, la commission d'experts a fait état de son inquiétude qu'aucun progrès réel n'ait été accompli ni sur le plan législatif ni dans la pratique, et a instamment appelé le gouvernement à prendre les mesures nécessaires. Le gouvernement de Myanmar prend des mesures positives et concrètes en vue de mettre en place des institutions pour établir, promouvoir et développer des principes et des pratiques démocratiques. A cette fin se tient une large convention nationale composée de quelque 700 délégués représentant l'ensemble des couches de la société de Myanmar. Cette convention a adopté par consensus 104 principes fondamentaux qui serviront de base à la nouvelle constitution de l'Etat. Parmi ces principes, la convention nationale a établi que l'Etat devait adopter des lois protégeant les droits des travailleurs dans le pays. En mai 1994, les services techniques compétents du Bureau international du Travail ont eu une courte discussion préalable portant sur certains aspects d'un projet de nouvelle législation autorisant les travailleurs à créer les syndicats et les fédérations de leur propre choix. Ces discussions ont eu lieu entre le conseiller technique du BIT en poste à New Delhi et les autorités du ministère du Travail du gouvernement de l'Union de Myanmar. De l'avis du gouvernement de Myanmar, de nouveaux contacts devraient être poursuivis entre lui-même et le Bureau international du Travail, dont les conseils techniques contribueraient considérablement à ses efforts pour appliquer la convention no 87 et les principes de la liberté syndicale. Le gouvernement de Myanmar attend avec impatience ces contacts avec le Bureau international du Travail et, sous réserve de convenir de leur date, des préparations sont en cours afin de recevoir une mission d'assistance technique du Bureau international du Travail à Myanmar avant la prochaine session de la commission d'experts. Le gouvernement de Myanmar consacre tous ses efforts à prendre de nouvelles mesures avec l'assistance technique du Bureau international du Travail.

    En outre, un représentant gouvernemental a évoqué les transformations en cours du système politique et économique qui comprennent des mesures pour l'élaboration d'une nouvelle Constitution. L'orateur a ensuite cité l'un des principes constitutionnels fondamentaux établis par la convention nationale selon lequel l'Etat devra promulguer la législation nécessaire pour la protection des droits des travailleurs . Parallèlement aux mesures pour mettre en place des institutions démocratiques qui garantissent, entre autres, les droits des travailleurs de constituer des syndicats de leur choix, le mécanisme protégeant les droits des travailleurs n'a jamais été aussi solide et effectif, ainsi des associations de bien-être des travailleurs et plusieurs autres organisations professionnelles et artisanales jouant un rôle de précurseurs dans la constitution de syndicats dans le pays. Il a ajouté qu'un organe connu, comme l'organe central de vérification de la législation, avait été mis en place en 1990 afin d'examiner la législation nationale en vigueur, y compris en matière de travail. En outre, une commission de révision de la législation, présidée par le ministre du Travail, a été créée. La législation du travail pertinente, dont la loi de 1926 sur les syndicats, a été révisée et rédigée dans la langue nationale depuis l'avènement du Conseil d'Etat pour la Restauration de l'Ordre et de la Loi (le SLOC). Les projets de loi, y compris celui sur les syndicats, ont été communiqués au bureau du Procureur général pour un examen préliminaire et devraient être soumis plus tard à l'organe susmentionné. Le représentant gouvernemental a également rappelé la visite effectuée en mai 1994 par un conseiller technique du BIT chargé des normes pour des discussions préliminaires sur certains aspects du projet de loi. Il a souligné que des contacts devraient se poursuivre afin d'assister le gouvernement dans ses efforts pour assurer l'application de la convention. Il a conclu en réaffirmant que les droits fondamentaux des travailleurs continueront à constituer la préoccupation principale de son gouvernement, qui devra s'efforcer de prendre des mesures avec l'assistance du Bureau international du Travail.

    Les membres travailleurs ont décrit ce cas comme l'un des plus désespérant, puisque la convention a été ratifiée il y a quarante ans. Depuis, la commission d'experts a formulé des observations concernant l'absence complète de progrès quant aux obligations fixées par la convention; six longues discussions sur ce cas ont eu lieu au sein de la Commission de la Conférence et il y a absence de progrès; le rapport de la commission d'experts n'a fait état d'aucun progrès, et ce cas a été mentionné dans un paragraphe spécial du rapport de la présente commission en 1982 et 1993. Bien qu'il y ait eu des promesses d'élaboration d'une nouvelle Constitution respectant les droits fondamentaux, y compris la liberté syndicale, et d'une nouvelle législation du travail remplaçant l'actuelle, il n'y a eu ni action concrète ni réel progrès. La convention constitue une clé de voûte des droits de l'homme, mais elle n'est ni complexe ni difficile à appliquer si le gouvernement souhaite réellement respecter ses obligations. En ce qui concerne la situation actuelle au Myanmar, ils ont appris d'une source sûre que les syndicats sont réprimés, qu'il règne un climat de terreur et que de graves violations des droits de l'homme se perpétuent. De plus, l'existence de syndicats indépendants est encore illégale, et ceux qui promeuvent ces syndicats sont punis. Afin de démontrer de réels progrès, le gouvernement devrait fournir des données plus concrètes, telles que de nouveaux textes de loi en la matière et le calendrier de leur mise en oeuvre. Ils ont reconnu que l'intervention du Bureau en 1994 sous la forme d'assistance technique représente une opportunité d'amélioration et que les discussions futures entre les fonctionnaires du BIT et l'administration gouvernementale pourraient faire avancer les choses. Le gouvernement doit adopter des lois qui permettent la création de syndicats de base, de fédérations, de même que de confédérations de travailleurs auxquels ils pourront librement s'affilier sans autorisation gouvernementale préalable. Puisque ce cas est si déplorable et qu'il révèle un manque total de progrès réel, il est nécessaire que la commission exprime la nécessité d'agir en la matière de façon urgente et le besoin de progrès tangibles.

    Les membres employeurs se sont associés à la plupart des déclarations des membres travailleurs. Ils ont noté que ce cas avait été discuté sept fois depuis 1987 et chaque année depuis 1991, et qu'en 1982 et 1993 il a fait l'objet de paragraphes spéciaux. Ce cas est traité depuis longtemps et très peu de choses ont été faites. Ils se sont inquiétés du fait que la loi consacre le monopole d'un syndicat et que la liberté syndicale n'est pas garantie. Se référant au projet de législation en préparation qui, s'il était édicté, constituerait un changement substantiel, et aux informations fournies par le gouvernement concernant l'assistance technique accordée par le Bureau en mai 1994, ils ont déclaré qu'habituellement on se félicite lorsque des demandes d'assistance technique sont formulées par les pays, puisqu'elles sont souvent le signe d'une volonté de mettre la législation en conformité avec la convention. Cependant, ils ont le sentiment que dans ce cas il s'agit uniquement d'une tactique dilatoire et que, bien que le gouvernement se réfère aux 104 principes fondamentaux qui ont été adoptés par consensus, pour la réforme constitutionnelle, cette réforme en est encore en fait à un stade très précoce. Les membres employeurs sont plus intéressés par la reconnaissance de la liberté syndicale de base que par des questions de détail. Alors que le gouvernement se réfère seulement à ses projets d'octroi aux travailleurs de la liberté de constituer des syndicats, les membres employeurs ont instamment demandé que tous, y compris les employeurs, aient la possibilité de constituer des organisations de leur choix comme cela est prévu par la convention. Ils sont d'accord avec les membres travailleurs sur le fait que la commission a déjà attendu longtemps des progrès et ils ont instamment demandé au gouvernement de légiférer rapidement puisqu'il y a urgence dans l'accomplissement de changements.

    Le membre gouvernemental des Etats-Unis a déclaré qu'en examinant l'historique de ce cas elle a noté que depuis 1989 le gouvernement avait répété qu'il y avait des changements politiques dans ce pays, une période de transition, qu'il y aurait une nouvelle Constitution, et que la nouvelle législation serait conforme à la convention. Toutefois, ce sont des promesses répétées qui sonnent faux. Bien que le problème de base dans ce cas soit un problème de monopole syndical, elle considère en fait qu'il y a un manque total de liberté syndicale. Alors que la législation n'est pas en conformité avec la convention, la pratique est pire encore puisque les travailleurs ne sont pas libres de s'affilier aux organisations de leur choix, et que d'après leurs informations il y aurait des violations des libertés publiques. Au cours des dernières années, non seulement l'OIT mais également la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et l'Assemblée générale ont exprimé leur inquiétude pressante quant à l'absence de liberté syndicale dans le pays. Il est encourageant que le gouvernement ait entamé des discussions avec le Bureau sur ce problème et ait demandé l'assistance technique du BIT. Elle appuie toute mesure que le Bureau et la présente commission estimeraient appropriée pour assurer que, dans un proche avenir, le gouvernement honorera ses promesses par ses actions.

    Le membre travailleur du Pakistan a rappelé la grande préoccupation qui avait été exprimée dans les paragraphes spéciaux antérieurs concernant la situation, dans lesquels le gouvernement avait été instamment prié de mettre sa législation en conformité avec la convention. Il a fait remarquer, par exemple, que le règlement no 5 de 1976 ne permet pas la constitution de syndicats indépendants librement choisis par les travailleurs. Le gouvernement a fait des promesses similaires depuis plusieurs années mais il n'y a pas de réel progrès, ni dans la législation, ni dans la pratique. L'orateur espère que le gouvernement ne se confinera pas simplement à recevoir les avis du Bureau, mais qu'il aura la volonté politique de protéger la liberté syndicale, puisqu'il ne peut y avoir de justice sociale sans elle.

    Le membre gouvernemental des Pays-Bas a appuyé la déclaration du membre gouvernemental des Etats-Unis. Il a indiqué que le gouvernement avait promis l'adoption d'une nouvelle législation du travail pour remplacer l'ancienne depuis très longtemps, mais qu'aucun progrès réel n'a encore été constaté. Bien que l'un des objectifs de la convention soit de mettre les partenaires sur un pied d'égalité, ce but est loin d'être atteint au Myanmar. Il a instamment demandé au gouvernement de mettre sa législation en conformité avec la convention afin qu'existe un réel tripartisme oì employeurs et travailleurs jouent le rôle qui leur revient.

    Le membre travailleur des Pays-Bas a demandé au représentant gouvernemental de fournir des informations sur la pratique existante au Myanmar en ce qui concerne l'exercice des droits syndicaux en l'absence de législation conforme à la convention.

    Le membre travailleur du Japon a indiqué que le gouvernement avait répété les mêmes promesses année après année quant à son intention d'adopter une législation conforme à la convention. Cependant, il a souligné que les promesses vides ne remplacent pas les progrès réels. D'après lui, le cas examiné révèle l'absence totale de liberté syndicale. Bien que la déclaration du gouvernement mentionne qu'il y a des organisations de travailleurs fonctionnant dans son pays, il a fait remarquer que le délégué des travailleurs à la Conférence pour le Myanmar est une personne qui ne représente en fait aucune organisation de travailleurs.

    Le membre gouvernemental de la Norvège, s'exprimant au nom des gouvernements des pays nordiques, a pris note avec grand intérêt des projets de loi proposés en vue d'appliquer la convention. Cependant, il a fait remarquer qu'aucun progrès réel n'avait été constaté dans ce domaine, ni dans la législation, ni dans la pratique. Il espère qu'il y aura bientôt une législation en vigueur qui permettra la constitution de syndicats indépendants, et conclut en exprimant l'espoir que des droits démocratiques seront octroyés au Myanmar.

    Le représentant gouvernemental a indiqué qu'il avait écouté avec une grande attention les observations faites par les membres de la commission quant aux conséquences dues à l'absence de progrès et à la répression des travailleurs dans son pays. Cependant, il a souligné que des mesures concrètes et positives ont été prises et qu'il existe une nette amélioration de la situation. D'après lui, les membres travailleurs n'ont pas pris en considération la seconde partie de la lettre du 9 juin 1994 envoyée au Bureau par le Directeur général du ministère du Travail demandant une assistance technique, dans laquelle son gouvernement a indiqué que des contacts devaient se poursuivre entre le gouvernement de Myanmar et l'OIT pour obtenir les conseils techniques qui contribueront grandement aux efforts du gouvernement en vue d'appliquer la convention no 87 et les principes de la liberté syndicale. Il a souligné qu'il était plus productif de parler du futur que du passé et que cette lettre et son contenu sont la preuve de l'attitude de son gouvernement pour l'avenir. Il a assuré que son gouvernement consulte activement le Bureau sur certains aspects de la législation syndicale. Il y a une confusion selon laquelle le monopole syndical existerait au Myanmar, or le système du parti unique et, en conséquence, le monopole syndical ont été abolis en 1988. En outre, la Chambre du commerce et de l'industrie, dont le président est le délégué employeur à cette Conférence, existe dans son pays et fonctionne de façon efficace. Son gouvernement s'efforce d'instaurer des institutions démocratiques, y compris des syndicats, et la loi sur les syndicats fait l'objet d'un processus de révision en tenant compte du nouveau système économique et politique. Cela témoigne des efforts qui sont faits par son gouvernement de bonne foi et avec sincérité afin de prendre les mesures supplémentaires nécessaires, avec l'assistance de l'OIT.

    Le membre travailleur des Pays-Bas a regretté que le représentant gouvernemental n'ait pas répondu à sa demande d'information sur la situation actuelle au Myanmar et en particulier sur le fonctionnement des syndicats et des organisations d'employeurs et leur capacité à se constituer librement, à élire leurs dirigeants et à s'engager dans des négociations collectives.

    Les membres employeurs ont constaté qu'aucun progrès n'avait été accompli dans le passé récent. Bien qu'il soit exact qu'ils soient préoccupés par l'avenir, les attentes quant à l'avenir se basent sur l'expérience passée, qui est en l'espèce très négative. Comme il a été précédemment indiqué, ils ont déclaré que la mission préliminaire était positive et que davantage d'assistance technique était demandée. Cependant, il semble que le gouvernement ait eu recours à des pratiques dilatoires pour retarder l'adoption de mesures. Au regard des quarante années qui se sont écoulées depuis la ratification de la convention, ils ont demandé que des mesures rapides soient prises et insisté pour que des changements substantiels soient accomplis.

    Les membres travailleurs considèrent qu'il n'y aucune raison de changer ce qui a été dit dans leur déclaration précédente et ont réitéré à l'unanimité ce qu'ils avaient dit sur la pratique véritable au Myanmar, ce qui est nettement à l'opposé des promesses de réforme. Ils sont entièrement d'accord avec la demande des membres employeurs concernant leur droit d'association.

    La commission a pris note des informations écrites fournies par le gouvernement ainsi que de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a eu lieu en son sein. La commission regrette que, malgré les assurances réitérées à plusieurs reprises par le gouvernement, selon lesquelles il était engagé dans un processus de changement de la législation afin de garantir les droits syndicaux, aucun signe tangible d'amélioration n'ait été noté par la commission d'experts. La commission relève toutefois que depuis la réunion de la commission d'experts une discussion préliminaire avec le BIT a eu lieu sur place au sujet de certains aspects d'un projet de législation. En outre, la commission note que le gouvernement a demandé qu'une mission d'assistance technique se rende sur place avant la prochaine session de la commission d'experts. Tout en réitérant sa profonde préoccupation face à la situation, la commission prie instamment le gouvernement d'adopter à très brève échéance toutes les mesures nécessaires et urgentes pour garantir, dans la législation et dans la pratique, tant aux employeurs qu'à tous les travailleurs sans distinction d'aucune sorte et sans autorisation préalable, le droit de s'associer et, pour les travailleurs, le droit de s'associer dans les syndicats de leur choix en dehors de la structure syndicale existante, ainsi qu'aux syndicats, le droit de créer des fédérations et des confédérations sans entrave. La commission exprime le ferme espoir qu'elle sera à même de constater dans un très proche avenir des progrès réels et substantiels dans l'application, tant en droit qu'en pratique, de la convention, et elle demande au gouvernement de communiquer un rapport détaillé à la commission d'experts afin de lui permettre d'évaluer les progrès effectivement accomplis d'ici à l'année prochaine.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1993, Publication : 80ème session CIT (1993)

    Un représentant gouvernemental s'est tout d'abord référé aux communications orales et écrites que le gouvernement a fournies à la commission en 1992 et a déclaré que la Convention nationale était composée d'environ 700 délégués, comprenant les représentants élus ainsi que les représentants des partis politiques, ethnies nationales, fonctionnaires publics, travailleurs, paysans, l'élite intellectuelle et d'autres personnes invitées, et dont les travaux ont débuté le 9 janvier 1993. La Convention nationale avait pour tâche d'établir les principes de base d'une nouvelle Constitution qui devrait garantir les droits fondamentaux, y compris ceux des travailleurs. Après l'adoption de la nouvelle Constitution, plusieurs lois devront être révisées afin de les harmoniser avec son texte. Cependant, pendant la période de transition, les droits des travailleurs sont assurés par la législation encore en vigueur. En même temps ont été élaborées des lois sociales qui reflètent les principes démocratiques appartenant aux travailleurs. L'orateur a déclaré que ces nouvelles lois reflètent les principes de la convention, auxquelles le gouvernement s'est référé dans son rapport de l'année dernière et qui remplacent les lois anciennes sur la création des syndicats, ont été soumises aux autorités compétentes et sont actuellement examinées. Son gouvernement tiendra le BIT au courant des progrès dans l'élaboration de la nouvelle Constitution et des nouvelles lois sociales.

    Les membres travailleurs ont souligné, après avoir exprimé leur souhait de pouvoir débattre de la convention à propos de Myanmar l'année prochaine, qu'il s'agissait d'un cas de longue date et rappelé que le représentant gouvernemental avait mentionné deux ans auparavant qu'un changement draconien du socialisme vers la démocratie multipartite avait eu lieu en 1988. A leur avis, le peuple de Myanmar avait été "libéré" du système du parti unique pour tomber dans un système basé sur la loi martiale dans lequel les violations des droits de l'homme, tels le meurtre, la torture, l'emprisonnement, le travail forcé, étaient tolérées et peut-être même cautionnées. Ils ont noté que la déclaration du représentant gouvernemental ne différait pas de la déclaration faite à la commission en 1992 sur l'élaboration de la Constitution et la révision de la loi sur les syndicats. Ils considèrent qu'il n'existe pas de liberté syndicale dans le pays et que, difficilement, il existe un mouvement syndical. Les syndicalistes qui critiquent le gouvernement sont emprisonnés, les membres du parlement élus en mai 1990 n'ont pas été autorisés à se réunir et plusieurs d'entre eux sont en prison, déchus de leur mandat ou exilés. Etant donné la gravité du cas, le fait qu'aucun progrès n'a été réalisé depuis 1989 et qu'aucun engagement pour les changements nécessaires n'a été pris, les membres travailleurs proposent que le cas soit mentionné dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

    Les membres employeurs ont fait remarquer que le sujet dont il s'agit ici est la législation de 1976 qui prévoit le monopole syndical et la pratique correspondante qui, toutes les deux, représentent une violation manifeste de la convention. Ils ont également rappelé que le cas avait été discuté pendant une longue période et que le représentant gouvernemental avait répété que le pays était engagé dans un processus de transition et de révision législative. A leur avis, ce commentaire était trop imprécis et vague à la lumière de la gravité de la situation. Il est donc nécessaire qu'il y ait un engagement plus spécifique pour changer non seulement la législation mais également la pratique. Etant donné le peu de progrès réalisés depuis longtemps, les membres employeurs appuient la proposition de recourir à un paragraphe spécial.

    Le membre travailleur des Etats-Unis a souligné l'urgence du cas tout en se référant à la violation des droits de l'homme et des droits syndicaux dans le pays, y compris l'emprisonnement des syndicalistes. Il a exprimé sa préoccupation concernant les idées de certains pays asiatiques selon lesquels le développement économique doit précéder le développement humain et les droits syndicaux. Il a noté que, malgré les circonstances difficiles, un syndicat libre oeuvrait dans les régions où les contrôles gouvernementaux étaient faibles et de façon clandestine dans d'autres. L'orateur a appuyé le recours à un paragraphe spécial au vu de la gravité de la situation.

    Le membre travailleur du Japon a souligné que le membre travailleur de Myanmar à la présente Conférence était un "surveillant" et non pas un représentant syndical. Il a fait remarquer qu'aucun progrès n'avait été réalisé malgré les assurances répétées, données par le gouvernement, et a appuyé l'inclusion du cas dans un paragraphe spécial.

    Le membre travailleur du Pakistan s'est joint aux orateurs précédents pour noter le peu de progrès et demander un paragraphe spécial. Il a demandé instamment que le gouvernement informe le Bureau de tout développement en la matière.

    Le représentant gouvernemental a nié que des travailleurs aient été arrêtés ou torturés en raison de leurs activités syndicales. Il a déclaré que le soi-disant syndicat opérant dans la zone limitrophe était une création des groupes terroristes agissant à l'extérieur du territoire de Myanmar et ne représentant aucun travailleur de son pays. Il a réitéré que le processus de transition vers un système multipartite démocratique et l'abolition du monopole syndical prend du temps et nécessite une préparation. Il a nié les allégations d'emprisonnement des représentants élus et souligné que l'élaboration d'une nouvelle Constitution était en cours. Il a réitéré le fait qu'il n'y avait plus de syndicat unique et que des mesures avaient été prises pour élaborer des législations qui tiennent compte des principes de la liberté syndicale.

    La commission a pris note des informations réitérées par le représentant gouvernemental selon lesquelles son gouvernement était engagé dans un processus de changements de sa législation afin de garantir les droits syndicaux. La commission, nonobstant, a rappelé que la commission d'experts et la Commission de la Conférence signalaient au gouvernement, depuis de nombreuses années, les dispositions de la législation qui nécessitaient des modifications sans que les mêmes aient été réalisées jusqu'à maintenant. Par conséquent, la commission a exprimé sa profonde préoccupation et demandé instamment et fermement au gouvernement d'adopter dans un très proche avenir des mesures nécessaires, dans la législation et dans la pratique, pour garantir à tous les travailleurs et à tous les employeurs sans aucune distinction et sans autorisation préalable la possibilité de se syndicaliser, même en dehors de la structure syndicale existante, s'ils le souhaitent. La commission s'est dite convaincue qu'elle pourra prendre note de progrès substantiels dans l'application de cette convention et demande au gouvernement de communiquer des informations détaillées à ce propos dans son prochain rapport. La commission décide d'inscrire ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport général.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1992, Publication : 79ème session CIT (1992)

    En réponse à l'observation de la commission, le gouvernement souhaite indiquer que la loi sur les syndicats fait partie des lois du travail existantes qui ont maintenant été revues afin de les adapter aux nouvelles tendances prévalant dans le pays. Avec l'adoption de ces nouvelles lois du travail, les droits syndicaux seront assurés dans un nouveau cadre.

    En outre, un représentant gouvernemental a déclaré que son gouvernement avait constitué en juillet de l'année dernière un organe composé de neuf membres appelé Conseil central d'études législatives. Ce conseil examinera les lois qui nécessitent d'être abrogées ou amendées, y compris les lois sur le travail. Cela donnera comme résultat la promulgation d'une nouvelle législation sur le travail qui reflétera les changements en cours dans le pays. Celle-ci devra être en conformité avec la convention. De plus, il a déclaré que, en conformité avec la déclaration no 11/92 du 24 avril 1992, son gouvernement rencontrera les représentants élus du Parlement pour décider ensemble de la convocation d'une convention nationale, laquelle devra établir les principes de base pour la rédaction d'une Constitution qui établisse un système démocratique caractérisé par le multipartisme. Enfin, la nouvelle Constitution incorporera les droits de tous les travailleurs de constituer leurs propres syndicats indépendants en conformité avec le système démocratique.

    Les membres travailleurs ont déclaré comprendre que, selon les informations fournies par le représentant gouvernemental, le Parlement devait traiter bientôt des problèmes évoqués par la commission d'experts et corriger la situation de monopole syndical. Par ailleurs, ils ont rappelé que la commission traite de ce problème depuis 1989. Ils ont souligné que, bien que la commission d'experts n'ait pas reçu de rapport, elle avait pris note de la communication écrite fournie par le gouvernement, ainsi que de la longue discussion qui s'en était suivie à la commission en 1991. A ce moment-là, les groupes étaient unanimes quant à la nécessité pour le gouvernement de prendre des mesures pour éliminer le monopole syndical et établir la possibilité, par le libre choix des travailleurs, d'adopter le pluralisme syndical. Cela ne signifie pas nécessairement que les travailleurs doivent constituer plusieurs syndicats. Toutefois, tant le pluralisme que l'unicité syndicaux ne peuvent pas être imposés légalement, mais plutôt choisis librement.

    Les membres employeurs ont déclaré qu'ils se ralliaient encore une fois à l'opinion maintenue par les membres travailleurs. Ils ont rappelé que le gouvernement avait déjà indiqué, lors de discussions précédentes, que le monopole syndical, prévu dans la loi, ne s'appliquait plus dans la pratique. Cependant, ce que les membres travailleurs souhaitent, c'est la suppression officielle de cette obligation légale, comme l'a justement demandée la commission. Le gouvernement a indiqué qu'à la lumière des changements politiques intervenus dans son pays le système de parti unique sera supprimé et, en conséquence, sera introduit le libre choix du système syndical. Il s'agit maintenant, relèvent les membres travailleurs, d'insister sur la modification de la législation nationale. Ils ont déclaré que l'information contenue dans le document D.6 constituait un bref commentaire de la convention no 87, lequel indique que le texte de loi pertinent est en train d'être préparé. La mise en oeuvre de cette nouvelle législation rétablira les droits syndicaux. Néanmoins, il est indispensable, à leur avis, que le gouvernement fournisse à la commission plus de détails à ce sujet et, surtout, le texte de cette nouvelle loi. Toutefois demeure la question de la date d'entrée en vigueur de celle-ci.

    Un membre travailleur du Japon a déclaré que le cas de Myanmar était très grave. Il a rappelé les longues discussions qui ont eu lieu au sujet de Myanmar l'année dernière dans cette commission. Depuis lors, aucun progrès n'a été réalisé, malgré l'assurance donnée par le représentant gouvernemental. Entre-temps, l'information que l'on a pu avoir à ce sujet se réfère au degré extrême des atrocités et à l'escalade sans précédent dans la violation des droits de l'homme commises par le régime militaire. Il a déclaré que, selon la déclaration du représentant gouvernemental, l'abolition du système de parti unique avait entraîné la fin du syndicat unique. Cependant, d'après les informations disponibles, il ne constatait aucun progrès, mais plutôt le passage d'un Etat avec un parti unique à un Etat sans parti du tout. De la même manière, Myanmar est passé d'un système d'unicité syndicale à un système caractérisé par l'absence de syndicat. Il a attiré l'attention de la commission sur le fait que le délégué des travailleurs de Myanmar ne représentait aucune organisation de travailleurs, ce qui, en lui-même, illustre clairement l'absence de syndicat dans le pays, ainsi que la totale et complète absence de liberté syndicale. Par conséquent, le cas de Myanmar mérite de figurer dans un paragraphe spécial du rapport pour que l'attention de toute la Conférence, ainsi que du monde, soit attirée sur lui.

    Le membre travailleur de la Grèce a fait observer à la commission que le représentant gouvernemental était passé d'un discours de négation des faits, quant à la convention no 29, à un discours au futur indiquant les mesures qui seront prises, quant à la convention no 87. Cependant, il réitère la question déjà posée par les membres employeurs, à savoir quand les actions évoquées seront entreprises effectivement.

    Le représentant gouvernemental a rappelé sa précédente intervention où il indiquait que le gouvernement se concertait avec les représentants élus de tous les partis politiques. Il a déclaré que celui-ci s'engageait activement pour une démocratie caractérisée par le multipartisme et l'économie de marché. Des mesures sont prises pour atteindre ce but, parmi lesquelles la garantie de la liberté syndicale. La démocratisation du pays est un processus long qui nécessite des préparations et du temps. Le gouvernement veut revenir à un système de démocratie caractérisée par le multipartisme, car il veut la collaboration des travailleurs et des employeurs, auxquels est octroyé le droit de s'organiser librement. Le représentant gouvernemental a rappelé que son pays vit une période de transition vers la démocratie et sollicité plus de temps pour que le gouvernement obtienne des résultats.

    Les membres travailleurs ont précisé que le pluralisme syndical est une obligation découlant de la convention, indépendamment de la situation politique. Ils ont déclaré qu'ils considéraient que, en tenant compte du rapport de la commission d'experts et de la présence discussion, il fallait demander au gouvernement une action prompte pour corriger cette situation au niveau législatif.

    La commission a pris dûment note de l'information fournie par le gouvernement. Elle croit comprendre que le gouvernement vit un processus de modification de sa législation afin de supprimer les restrictions légales à la liberté des travailleurs de s'affilier aux syndicats de leur choix. Toutefois, il n'est pas clair dans quelle mesure les intentions du gouvernement se sont matérialisées à cet égard. Par conséquent, elle prie instamment le gouvernement de soumettre le projet de loi au Parlement le plus tôt possible et d'en envoyer une copie au BIT en même temps.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1991, Publication : 78ème session CIT (1991)

    Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

    En 1988, des changements sociaux économiques et politiques d'importance historique ont eu lieu à Myanmar. Le mode de vie socialiste issu du système de parti unique a été totalement remplacé par un système démocratique pluraliste. Avec l'abolition du parti unique, l'organisation unitaire de travailleurs qui avait existé pendant plus de vingt ans a également été disssoute. Bien qu'il n'y ait pas eu d'amendement formel ou d'abrogation de la loi no 6 de 1964 et du règlement d'application no 5 de 1976, ces textes sont automatiquement tombés en désuétude. Quatre-vingt-cinq sur plus de 200 partis politiques enregistrés par la Commission des élections ont participé aux élections générales qui ont été reconnues comme faisant partie de celles qui ont été les plus libres et les plus équitables. La plupart de ces partis politiques ont des organisations de travailleurs qui leurs sont propres. Il existe également des organisations de travailleurs regroupées par commerces et par professions telles que les associations des musiciens et d'artistes, les conseils de peintres et de sculpteurs, les organisations d'artistes de cinéma, les associations d'écrivains et de journalistes, les associations de médecins et d'infirmières.

    En outre un représentant gouvernemental a réitéré les informations écrites transmises par son gouvernement. Il a également indiqué que la commission d'experts avait à juste titre observé que les dispositions relatives à la formation des organisations de travailleurs dans son pays limitaient la création de syndicats à une structure d'unicité syndicale, en contravention aux dispositions des articles 2, 5 et 6 de la convention. La loi et le règlement en question ont été adoptés à l'époque où Myanmar pratiquait un système politique de parti unique. Depuis les troubles de la fin de 1988, de nombreux changements ont eu lieu, comportant l'abolition du système politique de parti unique et son remplacement par un système démocratique de multipartisme et le remplacement du système écopnomique à planification centralisée par une économie de marché. Avec l'abolition du système de parti unique, la structure de syndicat unique a automatiquement disparu et la loi et le règlement organisant l'unicité syndicale sont automatiquement devenus caduques. Son pays traverse actuellement une prériode de transition qui implique des transformations majeures. Il procède à l'élaboration d'une nouvelle Constitution qui comprendra des dispositions assurant la liberté syndicale et la protection du droit d'organisation, en conformité avec la convention. Son gouvernement a déjà soumis un rapport détaillé et il tiendra informé le BIT de tous les développements pertinents.

    Les membres travailleurs ont observé que, depuis des années, la commission d'experts formulait des commentaires sur le système d'unicité syndicale établi par la loi, en contradiction avec les principes de la convention. Le représentant gouvernemental n'a fait que répéter ce qui avait été dit à la présente commission en 1989, à savoir que des changements politiques avaient eu lieu avec des conséquences pour les organisations syndicales. Il y aurait une nouvelle Constitution, mais ni les informations écrites transmises par le gouvernment, ni la déclaration orale du représentant gouvernemental, n'ont mentionné d'autres textes ou de nouvelle législation. La présente commission doit donc insister sur le fait que des changements n'ont pas été réalisés ni de textes adoptés qui seraient en pleine conformité avec les principes de la convention.

    Les membres employeurs ont rappelé que le représentant gouvernemental avait lui-même indiqué que le monopole syndical existait toujours aux termes de la loi et constituait une violation de la convention. Il a aussi dit que, depuis les changements politiques de 1988, la pratique était différente. Toutefois, les membres employeurs ont estimé que la présente commission devrait insister, comme elle l'a fait en 1989, pour que la loi soit également modifiée. S'il existe une volonté politique en ce sens, il ne devrait pas y avoir d'obstacles à la suppression de ce système légal d'unicité syndicale.

    Le membre travailleur de Sri Lanka a estimé que le représentant gouvernement n'avait rien ajouté à ce qui avait déjà été dit en 1989. Puisque le représentant gouvernemental espérait que la Constitution apporterait le changement requis pour mettre la législation en conformité avec la convention, il devrait indiquer dans quels délais ces changements législatifs auront lieu.

    Le représentant gouvernemental a expliqué que certaines démarches étaient entreprises en vue d'amender, d'abroger ou d'apporter certains changements nécessaires à la loi de 1964. La commission sera tenue informée des progrès accomplis à cet égard.

    La commission a pris note des informations écrites et orales fournies par le gouvernment et du débat qui a eu lieu en son sein. La commission a néanmoins exprimé sa préoccupation de ce que, malgré les fermes assurances qu'il avaient données à la présente commission ainsi qu'à la commission d'experts et qu'il vient de renouveler, le gouvernement n'a toujours pas adopté de mesures spécifiques pour mettre sa législation en conformité avec les exigences des articles 2, 5 et 6 de la convention. La commission a dû insister à nouveau pour que le gouvernment adopte de manière urgente des mesures législatives afin de lever les restrictions à la liberté des travailleurs et des employeurs de créer les organisations professionnelles de leur choix et permettre la possibilité du pluralisme syndical. Elle a exprimé l'espoir que le gouvernement fera état des mesures prises pour mettre sa législation en pleine conformité avec les exigences de la convention, comme il en a donné l'assurance à plusieurs reprises, et qu'elle sera en mesure de constater dans un proche avenir de réels progrès à cet égard.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1989, Publication : 76ème session CIT (1989)

    Un représentant gouvernemental a indiqué que son pays a connu récemment des modifications considérables dans les domaines politique, économique et administratif. Le système de parti unique a été abandonné conformément à la volonté populaire. Les changements concomitants, réformes et restructurations, sont opérés actuellement dans toutes les sphères politique, économique ou sociale de la vie en Birmanie. Des plans ont déjà été adoptés et un calendrier a été prévu pour la tenue, dans quelques mois, d'élections générales libres et équitables sur le multipartisme. En fait, plus de 200 partis politiques ont été constitués et dûment enregistrés par la Commission des élections générales et ils sont censés participer aux prochaines élections.

    Ainsi, la situation au sujet de laquelle la commission a exprimé certaines inquiétudes eu égard à la présente convention n'existe plus. Dans l'intervalle, pendant cette période de transition extrêmement délicate, marquée par des réformes et des restructurations radicales, la législation du travail en vigueur offre aux travailleurs une protection appropriée de leurs droits fondamentaux. Le ministère du Travail et ses organes administratifs suivent de très près toutes les questions relatives à l'intérêt et au bien-être des travailleurs. Il convient également de souligner qu'aucune disposition législative n'empêche les travailleurs de constituer des associations pour défendre leurs intérêts communs légitimes

    Les perspectives qui s'ouvrent en matière d'organisation syndicale et de mouvement syndical en Birmanie ne peuvent être autres qu'en harmonie avec un système démocratique pluraliste et donc en conformité avec la convention no 87.

    Les membres travailleurs ont déclaré qu'une longue discussion ne s'imposait pas puisque la Birmanie avait envoyé des rapports. Par ailleurs, les changements politiques, économiques et sociaux intervenus permettent d'espérer que la convention pourra être pleinement appliquée. Les déclarations du représentant gouvernemental, au sujet de la constitution de plusieurs partis politiques et de la possibilité pour les travailleurs de constituer une ou plusieurs organisations syndicales, permettent d'espérer que la loi no 6 de 1964, et notamment son article 9 qui impose le monopole syndical, seront modifiés. Il conviendrait de préciser la date à laquelle devraient intervenir ces modifications puis de s'assurer qu'elles aboutissent à une application correcte de la convention.

    Les membres employeurs ont déclaré que le monopole syndical imposé par la législation était un obstacle à la liberté syndicale et, par conséquent, à l'application de la présente convention. Comme dans de nombreux autres cas, le gouvernement de la Birmanie soutient que l'unicité syndicale est voulue par les travailleurs eux-mêmes. Les membres employeurs ont estimé que l'on ne peut arguer de la volonté des travailleurs pour imposer, par le biais de la législation, un monopole syndical. Les déclarations du représentant gouvernemental sont assez vagues, en ce sens qu'elles semblent conditionner l'adoption d'une nouvelle législation à l'expression d'une volonté différente en la matière. En tout état de cause, le monopole syndical devrait disparaître de la législation.

    S'agissant des changements politiques qui devraient conduire au pluripartisme, il n'appartient pas à la présente commission d'examiner ces questions politiques, mais il est vrai que le système du parti unique va souvent de pair avec le monopole syndical. Compte tenu de la corrélation entre les deux systèmes, il faut espérer que la suppression du système du parti unique entraînera la suppression du monopole syndical. Les membres employeurs se féliciteraient que des progrès en ce sens interviennent prochainement dans la pratique comme dans la législation.

    Le représentant gouvernemental a précisé les changements politiques qui étaient intervenus dans son pays. Le système du parti unique et le monopole syndical n'existent plus. Sur le plan économique, le système d'économie mixte a remplacé le système socialiste. Sur le plan social, le système d'économie mixte est entré en pratique. Le fait que deux grands partis politiques ont été autorisés à constituer des syndicats prouve que les travailleurs jouissent maintenant de la liberté d'association.

    Les membres travailleurs ont fait observer que ce n'était pas aux partis politiques qu'il fallait donner l'autorisation de constituer des organisations syndicales; il s'agit là d'un droit des travailleurs et il est d'ailleurs préférable qu'un syndicat ne soit pas rattaché à un parti politique, ni créé au sein d'un tel parti. A cet égard, le Bureau pourrait éclairer le gouvernement sur la signification qu'il convient d'attribuer à la constitution d'organisations syndicales libres.

    La commission a pris note des informations communiquées par le représentant gouvernemental.

    La commission a noté la volonté exprimée par le gouvernement de respecter ses obligations découlant de la convention.

    La commission a noté également que certaines mesures concrètes avaient été prises pour remédier aux divergences existantes entre la législation et la pratique nationales, d'une part, et la convention, d'autre part, mais que cette législation n'avait pas encore été adoptée.

    Rappelant les commentaires formulés par la commission d'experts depuis de nombreuses années, la commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement adopterait dans un bref délai, et si nécessaire avec l'assistance du BIT, une législation conforme aux exigences de la convention et qui mettra un terme au système d'unicité syndicale obligatoire.

    Cas individuel (CAS) - Discussion : 1987, Publication : 73ème session CIT (1987)

    Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

    Dans ses rapports précédents, le gouvernement s'est efforcé de préciser sa position concernant l'existence d'une structure composée d'un syndicat unique.

    Cette structure a été instituée non pas parce qu'elle avait été imposée par la loi, mais uniquement par la volonté des travailleurs qui, en raison de l'amère expérience qu'ils en avaient faite dans le passé, considèrent l'existence de syndicats multiples ou de syndicats fragmentés comme un signe de désunion ou de désordre. Cette structure syndicale multiple est loin de promouvoir la sauvegarde des droits des travailleurs mais, par la désunion qu'elle favorise chez eux, les expose aux manipulations et à l'exploitation.

    Les dispositions législatives visées par la commission d'experts dans son observation n'empêchent pas les travailleurs de constituer d'autres associations. Il en existe effectivement, telles que les associations de travailleurs intellectuels, d'artistes et de musiciens ou de médecins et de membres du personnel infirmier.

    Le gouvernement se déclare prêt à coopérer avec la commission d'experts et d'autres organes compétents pour éliminer les divergences de vues en ce qui concerne l'application de la convention. Le gouvernement est tout disposé à entamer le dialogue et à le poursuivre car celui-ci représente, à son avis, un moyen de clarifier les positions des parties en présence et permet de mieux comprendre leurs vues.

    En outre, une représentante gouvernementale a déclaré que, comme cela a été communiqué dans des rapports antérieurs, la structure syndicale birmane est le fait des travailleurs eux-mêmes. Elle ne peut donc être modifiée qu'en consultation avec ces derniers. Les observations de la commission d'experts ont été transmises aux organisations des travailleurs et jusqu'à présent aucune proposition de modification n'a été formulée, implicitement ou explicitement. Les dispositions législatives mentionnées dans les observations n'empêchent pas les travailleurs de créer leurs propres organisations et il existe des organisations telles que les associations d'infirmières et les associations d'écrivains. Respectueux de ses obligations, le gouvernement n'épargnera aucun effort pour collaborer avec la commission d'experts en vue de parvenir à un accord au moyen d'un dialogue constructif continu pour clarifier les positions mutuelles et promouvoir une meilleure compréhension entre les parties.

    Les membres employeurs ont déclaré que cette situation était très claire. Il s'agit d'un cas de monopole syndical légalisé qui n'est pas conforme aux dispositions de la convention. Cette situation a été notée maintes fois mais demeure inchangée. La représentante gouvernementale a déclaré que la structure existante a été créée à la demande des travailleurs et qu'elle ne pouvait être changée que si les travailleurs eux-mêmes en faisaient la demande. A cet égard, il importe de nouveau de souligner que les travailleurs ont bien entendu le droit de ne constituer qu'une seule structure syndicale, étant donné que la convention ne précise pas que les structures syndicales doivent être uniques ou pluralistes. Cependant, le gouvernement, lui, a le devoir de permettre les deux possibilités. S'il impose une structure unique, il ne respecte pas la convention. Les observations faites par la représentante gouvernementale ne sont, par conséquent, pas satisfaisantes. La législation birmane n'est pas conforme à la convention et devrait être modifiée pour le devenir. La commission devrait exprimer clairement, une fois encore, que toute structure de monopole syndical imposée par la loi constitue une violation de la convention qui prévoit que les travailleurs doivent avoir la liberté de choisir. D'après la déclaration de la représentante gouvernementale, il semblerait que le gouvernement ne soit pas disposé à se plier aux voeux exprimés par la commission d'experts et la commission de la Conférence.

    Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que les membres employeurs avaient très clairement exposé la situation. Il s'agit du même problème que celui dont la commission a discuté dans le cas de la Mauritanie, à savoir que la législation interne n'est pas conforme aux dispositions de la convention qui demande qu'une structure syndicale pluraliste soit autorisée. Les travailleurs ont le droit de décider s'il doit y avoir un syndicat ou plus, et la législation interne doit leur permettre de faire ce choix.

    Les membres travailleurs ont partagé sans réserve le point de vue exprimé par les membres employeurs. Il a été mis fins aux discussions de la commission concernant l'application de la convention no 52 par la Birmanie, parce que le gouvernement a transmis une réponse écrite dans laquelle il déclare qu'il soumet des propositions d'amendement des dispositions pertinentes de sa législation du travail à une commission juridique. De ce fait, la commission peut s'attendre à des résultats en 1988. Pour ce qui est de la convention no 87 cependant, il est clair que la législation nationale n'est pas conforme à la convention. Des changements sont nécessaires. Dans son rapport, la commission d'experts a noté que le gouvernement avait l'intention de poursuivre des consultations à ce sujet, et il faut espérer que ces consultations aboutiront à des résultats.

    La commission a pris note des informations communiquées par la représentante gouvernementale. Elle regrette qu'en dépit des nombreuses observations formulées les années antérieures le gouvernement avait pas encore pris de mesures pour mettre la législation en conformité avec la convention en ce qui concerne les dispositions législatives instaurant un monopole syndical. La commission a noté que des consultations avec les organisations de travailleurs et avec la commission juridique seraient poursuivies dans ce domaine. Elle exprime l'espoir que les consultations en question aboutiront à une solution rapide et que la législation sera modifiée afin d'assurer la pleine conformité avec la convention.

    Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

    Suivi des recommandations de la Commission d’enquête (plainte déposée en vertu de l’article   26 de la Constitution de l’OIT)

    La commission rappelle que, l’an dernier, elle avait pris note de la formation d’une Commission d’enquête pour étudier la question du non-respect par le Myanmar de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. La commission avait indiqué qu’elle reprendrait son examen de l’application de la convention dès que la commission d’enquête aurait achevé sa mission. La commission prend note du rapport détaillé que la commission d’enquête a présenté le 4 août 2023, dont le Conseil d’administration a pris note à sa 349e session (novembre 2023).
    La commission note que la Commission d’enquête avait souligné l’interdépendance et la complémentarité de la convention et de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et l’importance d’en tenir compte dans la mise en œuvre de ses recommandations. La commission partage les vues de la Commission d’enquête selon lesquelles la liberté syndicale est au cœur de la démocratie et de l’état de droit, et constitue une condition préalable au dialogue social, à la négociation collective et à la coopération tripartite.
    La commission note que, dans son rapport, la Commission d’enquête a conclu que les diverses mesures imposées par les autorités militaires, y compris par les autorités compétentes en matière de travail placées sous leur contrôle, conjuguées au climat d’insécurité totale et aux menaces permanentes dont font l’objet les dirigeants et membres syndicaux, ont eu pour effet de restreindre considérablement les droits syndicaux expressément énoncés dans la convention no 87 (paragr. 520 à 594). En particulier, la Commission d’enquête a conclu ce qui suit:
    • les actions multiples et généralisées des autorités militaires constituent de graves entraves à l’exercice des libertés publiques suivantes, qui sont une condition sine qua non de l’exercice de la liberté syndicale: le droit à la vie, à la sécurité et à l’intégrité physique et morale de la personne; le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement; le droit de ne pas subir de traitements cruels et inhumains; le droit à un procès équitable; la liberté de circulation; la liberté de réunion; la liberté d’opinion et d’expression; et la protection des biens privés des dirigeants et des membres des syndicats;
    • il existe d’importants obstacles matériels à la constitution d’organisations de travailleurs sans autorisation préalable, parmi lesquels une procédure d’enregistrement longue, des pots-de-vin versés pour décourager l’enregistrement ou en échange de celui-ci, des pressions exercées par les autorités compétentes en matière de travail pour se voir remettre les certificats d’enregistrement, l’antisyndicalisme ambiant dans le secteur privé et l’absence de voies de recours permettant de contester les restrictions imposées en matière d’enregistrement auprès d’autorités indépendantes, ce qui va à l’encontre de l’article 2 de la convention;
    • les autorités militaires ont porté atteinte à la liberté qu’ont les syndicats d’élire leur dirigeants, notamment dans le cas particulier de la Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM); le droit de grève, qui est un moyen essentiel pour les travailleurs de défendre leurs intérêts, est sévèrement limité depuis le coup militaire, en raison à la fois des ordonnances militaires imposant des restrictions aux rassemblements de plus de cinq personnes dans l’espace public, et des risques et répercussions considérables auxquels s’exposent les participants à une grève; cette situation est contraire à l’article 3 de la convention no 87; et le climat de violence et d’intimidation envers les dirigeants et les membres des syndicats, qui résulte de leur stigmatisation et de leur mise en accusation permanentes, restreint encore davantage le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leur gestion et leur activité et de formuler librement leur programme d’action;
    • les autorités militaires ont déclaré 16 syndicats et organisations de la société civile comme non enregistrés légalement au sens de la loi sur l’organisation du travail (LOL), ce qui est contraire à l’article 4 de la convention.
    La commission note également que, sur la base des constatations susmentionnées, la Commission d’enquête a exhorté les autorités militaires à (paragr. 643):
    • a) faire cesser sur-le-champ toute forme de violence, notamment la violence fondée sur le genre, la torture et autres traitements inhumains infligés à des dirigeants syndicaux, des membres syndicaux ou d’autres personnes en relation avec l’exercice d’activités légitimes par des travailleurs ou des employeurs, y compris à l’encontre de minorités ethniques, religieuses ou autres, en particulier les violences commises dans le cadre de la répression de protestations et de manifestations publiques pacifiques, lors d’arrestations ou pendant la détention, ainsi que les attaques militaires contre des infrastructures civiles, qui, par leur effet conjugué, créent un climat de violence et de terreur qui compromet l’exercice effectif de la liberté syndicale;
    • b) libérer sans condition et sans délai tous les syndicalistes arrêtés, condamnés et détenus en raison de l’exercice de leurs libertés publiques ou d’activités syndicales légitimes, y compris ceux ayant été arrêtés, condamnés et détenus pour avoir exprimé des opinions critiques à l’égard des autorités militaires, pour avoir participé à des manifestations pacifiques ou les avoir organisées, ou pour avoir manifesté pacifiquement de toute autre manière leur opposition aux autorités militaires à la suite du coup d’État;
    • c) abandonner toutes les poursuites pénales engagées contre des syndicalistes et d’autres personnes ayant exercé pacifiquement leurs libertés publiques dans le cadre d’activités syndicales légitimes; et mettre fin immédiatement à toute forme d’intimidation, de menace, de stigmatisation, de harcèlement et de surveillance vis-à-vis des syndicalistes et de leur famille, ainsi qu’aux attaques et actes de destruction visant les locaux et les biens des syndicats;
    • d) annuler toutes les ordonnances militaires ou autres dispositions, y compris de nature législative, décrétées depuis février 2021 et considérées comme attentatoires à la liberté syndicale et aux libertés publiques fondamentales des syndicalistes; et rétablir pleinement les libertés publiques fondamentales nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale qui ont été suspendues ou restreintes, notamment le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement, le droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial, la liberté de réunion, d’opinion et d’expression, et la protection de la propriété privée;
    • e) mettre fin à toutes les mesures punitives arbitraires ou disproportionnées à l’encontre des personnes qui exercent pacifiquement leurs libertés publiques en appelant au rétablissement d’un régime démocratique dans lequel elles pourraient exercer pleinement leur droit de liberté syndicale;
    • f) révoquer les retraits de citoyenneté frappant des dirigeants et des membres syndicaux et restituer sans délai leurs documents de voyage aux dirigeants et membres syndicaux concernés;
    • g) cesser toute forme d’ingérence dans l’établissement, l’administration et le fonctionnement des syndicats à tous les niveaux, notamment en ce qui concerne l’élection de dirigeants syndicaux, le règlement des différends du travail, la conduite d’actions collectives et la dissolution ou la suspension administrative de syndicats; et
    • h) s’abstenir de cautionner, de faciliter ou d’encourager, par tous actes ou déclarations, les pratiques antisyndicales, l’ingérence et autres atteintes aux droits syndicaux par des employeurs publics ou privés.
    La commission prend note de la recommandation de la Commission d’enquête selon laquelle les militaires et les autorités sous leur contrôle devraient immédiatement faire cesser ou annuler toute mesure ou activité contraire aux obligations du Myanmar en vertu de la convention.
    La commission note en outre que la Commission d’enquête, observant qu’une véritable mise en œuvre de la convention nécessitera le rétablissement d’un gouvernement civil, d’institutions pleinement démocratiques et de l’état de droit, a formulé d’autres recommandations à l’intention du Myanmar,à mettre en œuvre dès qu’un régime démocratique aura été rétabli (paragr. 645 à 647 et 649).
    La commission note que, dans une communication en date du 29 septembre 2023, les autorités militaires ont indiqué au Conseil d’administration que la position du Myanmar à propos des recommandations de la Commission d’enquête serait communiquée dans un délai de trois mois.
    La commission déplore profondément les informations selon lesquelles les graves violations, par les autorités militaires, des libertés publiques fondamentales des travailleurs et des employeurs se poursuivent. La commission note avec une profonde préoccupation que la Commission d’enquête n’a fait que confirmer les plus profondes préoccupations qu’elle avait déjà exprimées, et qu’elle n’a pu observer aucune mesure positive afin d’assurer l’application de la convention. La commission prie instamment et fermement les autorités militaires de mettre en œuvre immédiatement les recommandations de la Commission d’enquête, et de communiquer un rapport détaillé sur les mesures prises dans ce sens, et de répondre à toutes les demandes détaillées qu’elle a formulées dans son commentaire de 2021.

    Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

    La commission prend note de la décision qu’a prise le Conseil d’administration, à sa 344e session en mars 2022, d’établir une commission d’enquête chargée d’étudier la question du non-respect de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, au Myanmar. Dans de telles circonstances, et en accord avec la pratique habituelle qui consiste à suspendre le fonctionnement des autres mécanismes de contrôle pendant la période de travail de la commission d’enquête, la commission reprendra son examen de l’application de la convention par le Myanmar dès que la commission d’enquête aura achevé sa mission.

    Observation (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

    La commission prend note avec la plus profonde préoccupation des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue le 1er septembre 2021, faisant état de la violence systémique subie par les travailleurs et de la répression brutale des libertés civiles exercée par la junte militaire après sa prise de pouvoir le 1er février, celle-ci réprimant sans relâche les foules de manifestants qui réclamaient le retour à la démocratie. Alors que, si l’on en croit la réponse fournie le 19 novembre 2021, les manifestations pacifiques se sont transformées en émeutes, pour finalement atteindre le stade de l’insurrection et du terrorisme, avec des ripostes contre les membres des forces de sécurité avec le recours à toutes les armes disponibles, rendant la réaction des forces de sécurité inévitables, la commission ne peut que déplorer les allégations selon lesquelles, depuis la prise du pouvoir par la junte, les manifestations journalières ont fait l’objet d’une brutalité croissante, avec des centaines de morts, de nombreux blessés et plus de 2 700 arrestations et inculpations, certaines ayant déjà fait l’objet d’une condamnation.
    Libertés civiles. La commission regrette profondément d’avoir à prendre note des informations fournies par la CSI, selon lesquelles les syndicalistes ont été spécifiquement visés dans de nombreux cas d’arrestations et d’assassinats de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, et faisant état de la violation généralisée de leurs libertés civiles. La CSI fait référence, en particulier, à: l’assassinat de Chan Myae Kyaw, chauffeur de camion dans une mine de cuivre et membre de la Fédération des travailleurs des mines du Myanmar (MWFM), affiliée à IndustriALL, qui a été tué par des soldats le 27 mars 2021 lors d’une manifestation qui se déroulait à Monywa; une embuscade tendue par l’armée à des manifestants les 28 et 29 mars dans la zone industrielle de South Dagon, dans laquelle Nay Lin Zaw, dirigeant syndical dans le secteur de la transformation du bois et membre de la Fédération des syndicats de l’industrie et de l’artisanat du Myanmar (MICS-TUF) a été tué; et la balle dans la tête qu’a reçue Zaw Zaw Htwe, 21 ans, ouvrier dans l’industrie du vêtement et membre du Syndicat de solidarité du Myanmar (STUM).
    La commission prend note de la réponse aux commentaires de la CSI, selon laquelle tout décès dû à l’intervention des forces de sécurité n’était qu’une faible réponse à des actes terroristes. La police concernée a classé ces cas de décès, conformément aux procédures légales, et a systématiquement enregistré les dossiers de tous les décès, de même qu’elle a porté son assistance pour les funérailles des victimes. D’après les listes des forces de police du Myanmar, 361 civils ont été tués au cours de la période examinée, parmi lesquels seuls 193 ont été tués par des membres des forces de sécurité, accompagnés d’agents anti-émeute (RCA), au moment où ceux-ci nettoyaient des barricades et se défendaient contre les actes terroristes dont ils faisaient l’objet. Les 168 autres ont été tués pour d’autres raisons – par exemple, ils ont été assassinés par d’autres personnes armées, sont tombés d’un bâtiment ou ont été victimes de maladies – sans que les membres des forces de sécurité ne soient impliqués. De plus, il est précisé que les rapports exagérés et erronés établis à cet égard visent à discréditer le gouvernement et l’armée. En ce qui concerne les cas de décès soulevés spécifiquement par la CSI, il est indiqué qu’aucune victime n’a été retrouvée après la manifestation à la mine de cuivre où Chan Myae Kyaw aurait été abattu, qu’il n’y a eu aucun cas de répression commise par les gardes de sécurité dans le canton de Dagon où Nay Lin Zaw aurait trouvé la mort, et qu’une enquête a été ouverte au poste de police du canton de Shwepyithar concernant la mort de Zaw Htwe.
    La commission se doit de rappeler que la mobilisation du mouvement de désobéissance civile doit son origine en premier lieu à la prise de pouvoir par les militaires et à la destitution du gouvernement civil. Dans ces conditions, elle doit se référer à l’examen par le Comité de la liberté syndicale des graves allégations faisant état de nombreuses attaques des autorités militaires après le coup d’État du 1er février 2021, dans le cas no 3405 (voir 395e rapport, juin 2021, paragr. 284 à 358). La commission observe en outre que le Conseil d’administration de l’OIT avait inscrit à l’ordre du jour de ses 341e, 342e et 343e sessions (mars, juin et novembre 2021) une mise à jour de la situation au Myanmar et des mesures supplémentaires pour promouvoir le rétablissement des droits des travailleurs. Au cours de ces sessions, il a, notamment: exprimé sa profonde préoccupation au sujet de l’évolution de la situation, en particulier depuis le 1er février, et a appelé les autorités militaires à respecter la volonté du peuple et les institutions et processus démocratiques et à rétablir le gouvernement démocratiquement élu (GB.341/INS/17(Add.1) (mars)); exprimé sa profonde préoccupation quant à la détérioration de la situation et à l’absence de progrès à cet égard (GB.342/INS/5 (juin)); et s’est déclaré profondément préoccupé par le fait que les autorités militaires continuaient d’avoir largement recours à la violence meurtrière et de soumettre les syndicalistes à des actes de harcèlement, des intimidations, des arrestations et des détentions (GB.343/INS/8 (novembre)). Enfin, la commission prend note de la résolution pour un retour à la démocratie et au respect des droits fondamentaux au Myanmar, adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 109e session (2021), qui appelle le Myanmar à mettre fin à toutes les attaques, menaces et intimidations de la part des militaires à l’encontre des travailleurs, des employeurs et de leurs organisations respectives, de même que de la population en général, notamment en ce qui concerne leur participation pacifique à des activités de protestation (ILC.109/Résolution II).
    La commission rappelle que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans des conditions où les droits humains fondamentaux sont pleinement respectés et garantis, et en particulier les droits relatifs à la vie humaine et à la sécurité personnelle, à une procédure régulière et à la protection des locaux et des biens appartenant aux organisations de travailleurs et d’employeurs. L’assassinat, la disparition ou des blessures graves de dirigeants syndicaux et de syndicalistes nécessitent l’ouverture d’enquêtes judiciaires indépendantes afin de faire toute la lumière, dans les meilleurs délais, sur les faits et les circonstances dans lesquelles ces actes se sont produits pour déterminer, dans la mesure du possible, les responsabilités, punir les coupables et empêcher la répétition de tels événements. Tout en prenant note des informations succinctes fournies concernant les décès susmentionnés, la commission demande qu’une enquête complète et indépendante soit menée sur les circonstances des meurtres de Chan Myae Kyaw, Nay Lin Zaw et Zaw Htwe et que lui soit envoyé un rapport complet sur les résultats de cette enquête et sur les mesures prises pour poursuivre et punir les coupables.
    La CSI se réfère également à l’arrestation, le 18 février 2021, d’un dirigeant syndical de la MICS-TUF, qui a été incarcéré (à la prison d’Insein), ainsi qu’à l’arrestation, le 15 avril 2021, de la directrice du STUM, qui a été inculpée en vertu de l’article 505-A du Code pénal, ce qui signifie qu’elle ne peut bénéficier d’une libération sous caution et qu’elle risque jusqu’à 3 ans de prison. De plus, en mai, des forces ont été déployées pour arrêter 22 autres syndicalistes, dont sept membres de la Fédération des transports du Myanmar, sans compter 11 autres mandats d’arrêt lancés contre des dirigeants nationaux de la Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM) et d’autres syndicats. Le 4 juin 2021, 28 membres de la CTUM ont vu leurs passeports annulés. Enfin, la CSI rappelle un certain nombre d’arrestations, de détentions et d’attaques contre des syndicalistes exerçant leur droit à l’action revendicative pacifique en 2019 et 2020.
    En guise de réponse, il est indiqué que des dizaines de milliers de prisonniers ont été graciés, respectivement, le 12 février et le 17 avril, tandis que les cas en suspens concernant 4 320 accusés ont été classés le 18 octobre et qu’une amnistie a été accordée à 1 316 détenus. En ce qui concerne l’annulation des passeports de 28 membres de la CTUM, il s’agit, d’après le gouvernement, de fausses informations diffusées par les dirigeants de l’organisation pour discréditer le Conseil d’administration de l’État et l’armée, à la suite de quoi des accusations ont été portées contre le président de la CTUM pour violation de l’article 505 du Code pénal, et lui-même ainsi que 28 membres de la CTUM ont de plus été accusés en vertu de l’article 124-A. Le gouvernement a annulé les passeports de ces membres car ils fuyaient les mandats d’arrêt qui devaient être émis à leur encontre. En ce qui concerne les graves allégations faisant état d’un certain nombre d’arrestations, de détentions et d’agressions contre des syndicalistes pour avoir exercé leur droit à l’action syndicale pacifique et participé au mouvement de désobéissance civile pour le rétablissement de la démocratie, ainsi que de l’annulation de leurs passeports, la commission demande que toutes les mesures soient prises pour garantir le plein respect des libertés civiles fondamentales nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, notamment la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion, la liberté de circulation, le droit de ne pas faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire et le droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial, afin que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités et leurs fonctions sans risquer de faire l’objet d’intimidation ou de subir un préjudice et dans un climat de sécurité totale.
    À cet égard, la commission note en outre l’indication de la CSI selon laquelle certains des syndicalistes arrêtés ont été inculpés en vertu de l’article 505-A du Code pénal, qui donne une définition large et vague du terme «trahison», en y incluant les tentatives «d’entraver, de perturber la motivation, la discipline, la santé et la conduite du personnel militaire et des fonctionnaires gouvernementaux ou d’y porter atteinte, et de provoquer la haine, la désobéissance ou la déloyauté envers l’armée et le gouvernement». La commission note en outre que l’article 124-A du Code pénal a été modifié en février par les autorités militaires pour qu’il érige en infraction pénale, en des termes généraux similaires, le fait de «saboter ou d’entraver le succès de l’action des services de défense et des organisations chargées de faire respecter la loi», entraînant une peine pouvant aller jusqu’à 20 ans d’emprisonnement. Bien qu’informée du fait que le dirigeant du STUM a été libéré, la commission fait observer que, vu l’ampleur de la portée de cet article tel que libellé, il peut pousser à considérer comme une trahison tout acte de dissidence, au risque de compromettre l’exercice des libertés civiles fondamentales nécessaires au plein exercice des droits syndicaux. La commission demande donc expressément la libération immédiate du dirigeant syndical du MICS-TUF et de tout autre syndicaliste encore détenu ou emprisonné pour avoir exercé les droits syndicaux protégés par la convention, y compris son engagement dans le mouvement de désobéissance civile. Tout comme le Comité de la liberté syndicale, la commission demande en outre l’abrogation de l’article 505-A du Code pénal, et appelle également à la modification de l’article 124-A, du fait de sa similarité avec l’article 505-A.
    Pour ce qui est des commentaires de la CSI concernant l’annonce d’une nouvelle loi sur la cybersécurité qui criminalise toute déclaration à l’encontre d’une loi quelle qu’elle soit, qui impose des sanctions d’emprisonnement et de lourdes amendes, la commission prend note de la réponse fournie selon laquelle cette loi n’a pas encore été promulguée. Elle observe cependant que des éléments de ce projet de loi ont été introduits dans la loi sur les transactions électroniques (ETA), adoptée le 15 février 2021, qui prévoit, à l’article 38(c), que toute personne reconnue coupable d’avoir diffusé des fake news ou des fausses nouvelles (termes non définis dans la loi) dans un cyberespace ayant pour but d’alarmer le public, de faire perdre la foi à quelqu’un, de manquer de respect à quelqu’un ou de diviser l’unité, sera emprisonné d’un an minimum à trois ans maximum ou d’une amende ne dépassant pas 5 millions de kyat ou les deux. La commission observe avec une profonde préoccupation que cette disposition est formulée en termes vagues et qu’elle pourrait porter atteinte à la liberté d’expression et à d’autres libertés civiles fondamentales sous la menace de lourdes sanctions, dont l’emprisonnement. La commission demande donc instamment que l’article 38(c) soit révisé en vue d’assurer le plein respect des libertés civiles fondamentales nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale, afin que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent exercer leurs activités et leurs fonctions sans menace d’intimidation ou de préjudice et dans un climat de sécurité totale.
    En outre, la commission rappelle que, dans ses précédents commentaires, elle avait pris note de la nouvelle loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques, qui a été adoptée le 4 octobre 2016. Elle avait cependant noté que le chapitre sur les règles et le chapitre correspondant sur les infractions et les sanctions pourraient encore donner lieu à de graves restrictions au droit des organisations de mener leurs activités sans ingérence. La commission avait prié le gouvernement de veiller à ce que les travailleurs et les employeurs puissent mener et appuyer leurs activités sans menace d’emprisonnement, de violence ou d’autres violations de leurs libertés publiques par la police ou les services de sécurité privés, et de signaler toute sanction imposée aux organisations de travailleurs ou d’employeurs en vertu de la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques. La commission observe à cet égard que la CSI fait référence à un certain nombre d’incidents survenus en 2019 et 2020, au cours desquels des travailleurs et des dirigeants syndicaux prenant part à des manifestations pacifiques avaient été poursuivis et condamnés en vertu de cette loi, mais qui ont depuis lors été libérés. La commission regrette profondément que le rapport du Myanmar de cette année se limite à spécifier que la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques de 2016 a été promulguée de façon à garantir à chaque citoyen le droit de mener des activités conformes à la loi, sans pour autant fournir d’information en réponse aux exemples détaillés de poursuites et de condamnations communiqués par la CSI. C’est pourquoi la commission se doit de demander instamment que toutes les mesures soient prises pour que les travailleurs et les employeurs puissent mener et soutenir leurs activités sans être menacés d’emprisonnement, de violence ou d’autres violations de leurs libertés civiles par la police ou la sécurité privée, et que la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques ne soit en aucun cas utilisée pour restreindre ces droits.
    Processus de réforme de la législation du travail. Malgré la détérioration profondément préoccupante de la situation dans le pays et la ferme conviction de la commission que la priorité doit être accordée au rétablissement de l’ordre démocratique et d’un gouvernement civil, celle-ci souhaite rappeler ses commentaires précédents à propos du processus de réforme de la législation du travail dans le pays en vue de toute action ultérieure, une fois que les institutions et les processus démocratiques, de même qu’un gouvernement démocratiquement élu auront été rétablis.
    Article 2 de la convention. En ce qui concerne les prescriptions relatives au nombre de membres et à la structure pyramidale prévues par la loi sur l’organisation du travail, la commission rappelle qu’elle avait encouragé le gouvernement à poursuivre les consultations dans le cadre du Forum national de dialogue tripartite pour s’assurer que tous les travailleurs et employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont la possibilité, en droit comme dans la pratique, d’exercer pleinement les droits prévus dans la convention, tout en gardant à l’esprit les principales difficultés que rencontrent des parties de la population, comme celles qui habitent des régions éloignées.
    La commission note que, d’après les informations communiquées dans le rapport de cette année, depuis l’entrée en vigueur de la loi, 2  887 organisations syndicales de base, 161 organisations syndicales municipales, 25 organisations syndicales de région ou d’État, 9 fédérations syndicales et 1 confédération syndicale, ainsi que 27 organisations d’employeurs de base, 1 organisation d’employeurs municipale et 1 fédération d’employeurs ont été enregistrées en application de la loi.
    Concernant les possibles refus d’enregistrement, la commission demande de nouveau des informations sur tout refus d’enregistrement, y compris sur les raisons de ces décisions, ainsi que sur les procédures de révision et d’appel concernant ces refus.
    Article 3. La commission avait pris note des restrictions à l’éligibilité à une fonction syndicale énoncées dans le règlement de la loi sur l’organisation du travail, notamment l’obligation d’avoir exercé le même métier ou la même activité pendant au moins six mois (aucune période initiale ne devrait être exigée), et l’obligation pour les travailleurs étrangers de satisfaire à une condition de résidence de cinq ans (cette période devrait être réduite à un niveau raisonnable, tel que trois ans), ainsi que de l’obligation d’obtenir l’autorisation de la fédération syndicale compétente pour déclencher une grève, conformément à l’article 40(b) de la loi sur l’organisation du travail.
    La commission exprime de nouveau l’espoir que, dès que les conditions le permettront, tous les points susmentionnés seront réexaminés dans le cadre du processus de réforme législative, en consultation avec les partenaires sociaux, afin de garantir pleinement les droits que la convention confère aux travailleurs et aux employeurs.
    La commission note également que, d’après le rapport, la loi sur le règlement des conflits du travail a été modifiée en 2019. Elle demande qu’une copie du texte final adopté, ainsi que du règlement d’application de ladite loi, lui soit transmise pour examen.
    Zones économiques spéciales (ZES). La commission prend note des informations fournies en ce qui concerne le règlement des conflits du travail dans les ZES et la mise en place de comités de coordination, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des zones. En outre, elle note que des conflits du travail survenus dans les ZES ont été résolus par le Comité de gestion des zones économiques spéciales et que, jusqu’à présent, tous les conflits ont été réglés par le biais d’un accord. Si aucun accord ne peut être conclu, ces conflits sont traités en vertu de la loi sur le règlement des conflits du travail. La commission s’attend à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour garantir pleinement les droits reconnus par la convention aux travailleurs des zones économiques spéciales, notamment en veillant à ce que la loi sur les zones économiques spéciales n’aille pas à l’encontre de l’application de la loi sur l’organisation du travail et de la loi sur le règlement des conflits du travail dans ces zones. La commission suggère que cette question soit suivie dans le cadre du Forum national de dialogue tripartite dès que les conditions le permettront.
    Les allégations et les questions soulevées dans ce commentaire concernant les nombreux décès, les détentions et arrestations massives de syndicalistes et une attaque majeure contre les libertés publiques fondamentales ont suscité la plus vive inquiétude de la commission. La commission regrette profondément que, en dépit de plusieurs décisions du Conseil d’administration du BIT en mars, juin et novembre de cette année et des recommandations du Comité de la liberté syndicale et de la résolution de la Conférence internationale du Travail en juin, aucune mesure n’ait été prise pour répondre à ces graves préoccupations ou pour rectifier les graves atteintes aux droits fondamentaux introduites cette année dans le Code pénal et la loi sur les transactions électroniques, ainsi qu’aux préoccupations persistantes concernant la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques de 2016.
    Dans ces circonstances, et compte tenu de l’urgence qu’il y a à traiter ces questions touchant aux droits fondamentaux des travailleurs et des employeurs, à leur intégrité physique et à leur liberté, et de la probabilité d’un préjudice irréversible, la commission estime que ce cas répond aux critères qu’elle a élaborés pour être prié de se présenter devant la Conférence.
    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 110e session et de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2022.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

    La commission prend note des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue le 1er septembre 2018.

    Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 107e session, mai-juin 2018)

    La commission prend note de la discussion qui a eu lieu en juin 2018 à la Commission de l’application des normes de la Conférence sur l’application de la convention. Elle note que la Commission de la Conférence a regretté l’absence de progrès en ce qui concerne le cadre juridique attendu de longue date dans lequel les travailleurs et les employeurs peuvent exercer librement leurs droits en vertu de la convention et a prié instamment le gouvernement de: i) veiller à ce que la loi sur l’organisation du travail et la loi sur le règlement des conflits du travail soient placées en pleine conformité avec la convention et, pour ce faire, se prévaloir de l’assistance technique du BIT pendant le processus de réforme législative; ii) veiller à ce que les travailleurs puissent mener leurs activités syndicales sans menace de violence ou d’autres violations de leurs libertés publiques par la police ou la sécurité privée; iii) veiller à ce que l’enregistrement des organisations de travailleurs et d’employeurs ne soit pas soumis à des conditions déraisonnables, et ce afin de garantir que le droit des travailleurs et des employeurs de se syndiquer ou de créer les organisations de leur choix ne soit pas entravé dans la pratique; iv) veiller à ce que les demandes d’enregistrement des syndicats soient traitées rapidement et ne soient rejetées que si elles ne répondent pas à des critères clairs et objectifs énoncés dans la loi; et v) mettre la législation du travail des zones économiques spéciales (ZES) en conformité avec la convention, en pleine consultation avec les partenaires sociaux. La Commission de la Conférence a en outre demandé au gouvernement d’accepter une mission de contacts directs et de faire rapport à la commission d’experts, à sa réunion de novembre 2018, sur l’état d’avancement de l’application de ses recommandations.
    La commission note que la mission de contacts directs s’est déroulée du 1er au 4 octobre 2018 et se félicite de la manière dont le gouvernement et les organisations de travailleurs et d’employeurs du Myanmar ont collaboré de manière constructive avec la mission. En particulier, la commission note avec intérêt les conclusions du rapport de la mission selon lesquelles toutes les parties ont fait preuve d’un engagement important en faveur de l’instauration d’un climat propice au plein respect de la liberté d’association dans le court laps de temps écoulé depuis l’entrée en vigueur de la loi-cadre sur la liberté d’association. La commission encourage la poursuite de l’instauration d’un environnement propice à la pleine application de la convention.
    Processus de réforme du droit du travail. La commission rappelle que, dans ses précédents commentaires, elle avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés en ce qui concerne la réforme du droit du travail.
    Article 2 de la convention. S’agissant de la loi sur l’organisation du travail, la commission note que le gouvernement a indiqué qu’il avait engagé le processus de réforme du droit du travail dans le cadre du Forum national de dialogue tripartite (NTDF) qui s’est réuni à de nombreuses reprises avec l’assistance technique du Bureau. Bien que le projet de loi modificative fasse encore l’objet d’un examen interne, le gouvernement fait référence à un certain nombre de changements proposés, notamment l’élimination de l’exigence supplémentaire de 10 pour cent pour constituer une organisation syndicale de base, comme l’avait précédemment demandé la commission. La commission prend note en outre de l’indication du gouvernement selon laquelle, depuis l’entrée en vigueur de la loi, il a enregistré 2 761 organisations syndicales de base, 146 organisations syndicales municipales, 22 organisations syndicales de régions ou nationales, 8 fédérations du travail et 1 confédération du travail. Le gouvernement fait également référence à 26 organisations d’employeurs de base, 1 organisation d’employeurs municipale et une fédération d’employeurs constituées en vertu de la loi. La commission note que les fonctionnaires du ministère du Travail, de l’Immigration et de la Population ont tenu des consultations nationales avec un certain nombre d’organisations de base et d’organisations cantonales afin de mieux comprendre les obstacles rencontrés par les travailleurs souhaitant constituer des organisations. La commission observe, à l’instar du gouvernement, qu’une grande partie de la population est répartie dans des cantons et des districts éloignés de l’autorité centrale et a ainsi une connaissance limitée de la loi nationale et des conventions internationales ratifiées. La commission encourage le gouvernement à poursuivre ces consultations sur l’ensemble du territoire de manière à s’assurer que tous les travailleurs et employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont la possibilité, tant en droit qu’en pratique, d’exercer pleinement les droits prévus dans la convention, tout en gardant à l’esprit les principales difficultés que rencontrent des parties de la population, comme celles qui habitent des régions éloignées.
    La commission rappelle en outre sa demande d’informations sur les résultats de tout examen de l’impact de la structure pyramidale d’organisation prévue à l’article 4 de la loi. Notant d’après le rapport de la mission de contacts directs que cette structure imposée pose un problème pour la constitution des organisations de travailleurs et d’employeurs, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les travailleurs et les employeurs puissent constituer les organisations de leur choix en droit et en pratique, y compris au niveau sectoriel, et puissent s’y affilier, et de fournir une copie des amendements proposés dès qu’ils auront été présentés au Parlement.
    La commission prend également note des allégations contenues dans l’observation de la CSI selon laquelle les syndicats se voient souvent refuser leur enregistrement pour des raisons arbitraires, y compris l’exigence que les membres du comité exécutif soumettent leurs curriculum vitae, que tous les membres du syndicat remettent des photocopies de leurs cartes d’identité nationales, et qu’une lettre de l’usine soit produite indiquant qu’elle a été informée de la tentative d’enregistrement d’un syndicat. La commission note avec intérêt, d’après le rapport de la mission, que le ministère a assuré un suivi au niveau des communes à l’issue de consultations nationales sur les obstacles rencontrés et qu’il a publié une directive donnant pour instruction aux fonctionnaires du travail de cesser d’exiger des documents qui ne sont pas requis par la loi, tout en pouvant demander les cartes d’identité des membres fondateurs. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout refus d’enregistrement, y compris les motifs de ces refus, et les procédures d’examen et d’appel en cas de refus.
    Article 3. La commission rappelle que ses précédents commentaires concernaient certaines restrictions à l’éligibilité à une fonction syndicale énoncées dans le règlement de la loi sur l’organisation du travail, notamment l’obligation d’avoir exercé le même métier ou la même activité pendant au moins six mois (aucune période initiale ne devrait être exigée) et l’obligation pour les travailleurs étrangers de satisfaire à une condition de résidence de cinq ans (cette période devrait être réduite à un niveau raisonnable, tel que trois ans). La commission prend note en outre des préoccupations exprimées par la CSI au sujet de l’exigence selon laquelle les dirigeants syndicaux doivent être âgés de 21 ans. La commission exprime à nouveau l’espoir que ces exigences seront réexaminées dans le cadre du processus de réforme législative, en consultation avec les partenaires sociaux, afin de garantir le droit des travailleurs d’élire librement leurs dirigeants, et elle prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour modifier le règlement no 5.
    En outre, rappelant ses précédents commentaires concernant l’obligation d’obtenir l’autorisation de la fédération du travail compétente, en vertu de l’article 40(b) de la loi sur l’organisation du travail, pour déclencher une grève, la commission prie le gouvernement de faire état des progrès réalisés dans la modification de cette disposition dans le cadre de l’examen du droit du travail.
    En ce qui concerne la loi sur le règlement des conflits du travail, la commission note que le gouvernement a indiqué qu’un projet de loi modifié était en cours d’examen au Parlement et répondait à la nécessité de prolonger le mandat des organes de règlement des conflits et de modifier les sanctions prévues par la loi pour les adapter au contexte national. Voulant croire que le texte, une fois adopté, aura éliminé toute sanction d’emprisonnement, tout en assurant une protection effective du droit d’organisation, la commission prie le gouvernement de transmettre une copie de la loi modifiée.
    Libertés publiques. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note de l’adoption, le 4 octobre 2016, de la nouvelle loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques. Observant que le chapitre sur les règles et le chapitre correspondant sur les infractions et les sanctions pouvaient encore donner lieu à de graves restrictions au droit des organisations de mener leurs activités sans ingérence, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur la manière dont cette loi était appliquée et sur les sanctions imposées. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les forces de police du Myanmar ne restreignent pas les droits et ne prennent aucune mesure allant au-delà de la loi, mais les violations de la loi doivent être sanctionnées. Le gouvernement indique par ailleurs que chaque citoyen est responsable de la paix publique et de la prévalence de la loi et de l’ordre.
    La commission prend également note des préoccupations exprimées par la CSI selon lesquelles la Chambre haute du Parlement a adopté des amendements à cette loi le 7 mars 2018, prévoyant à l’article 18 que quiconque soutient une manifestation, que ce soit financièrement, matériellement ou par d’autres moyens, serait considéré comme portant atteinte à la sécurité nationale, à l’état de droit, à l’ordre public et à la morale publique et risquerait une peine pouvant atteindre trois ans de prison et une amende. La commission croit comprendre, d’après le rapport de la mission, que cette disposition n’a pas été définitivement adoptée par le Parlement de l’Union. La commission prie le gouvernement de veiller à ce que les travailleurs et les employeurs puissent mener et appuyer leurs activités sans menace d’emprisonnement, de violence ou d’autres violations de leurs libertés publiques par la police ou les services de sécurité privés et de faire état de tout fait nouveau concernant l’amendement proposé, ainsi que de toute sanction imposée aux organisations de travailleurs ou d’employeurs en vertu de la loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques.
    Zones économiques spéciales (ZES). Dans ses précédents commentaires, la commission avait demandé au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir pleinement les droits reconnus par la convention aux travailleurs des zones économiques spéciales, notamment en veillant à ce que la loi sur les zones économiques spéciales n’aille pas à l’encontre de l’application de la loi sur l’organisation du travail et de la loi sur le règlement des conflits du travail dans ces zones. Elle avait en outre prié le gouvernement de fournir des informations pratiques détaillées sur la manière dont les conflits dans les ZES sont réglés, ainsi que les statistiques pertinentes sur l’inspection du travail dans les ZES, y compris le nombre de contrôles menés par des inspecteurs du travail, toute infraction constatée et la nature des sanctions imposées ainsi que leur nombre.
    La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère du Travail, de l’Immigration et de la Population collabore avec le comité de gestion de la ZES de Thilawa en ce qui concerne les questions de travail, notamment le règlement des conflits. La section de la main-d’œuvre du centre de service à guichet unique (OSSC) a recueilli des rapports mensuels de chaque entreprise et procède à des inspections et des contrôles pour s’assurer que les usines respectent leurs engagements. La section agit à titre de négociateur ou de médiateur pour régler les conflits, et elle a résolu 24 cas en 2017 et 16 jusqu’à août 2018. Elle tient également des discussions sur l’échange d’informations sur le droit du travail. En outre, des fonctionnaires du Département de l’inspection des usines et du droit général du travail effectuent des visites mensuelles dans les usines pour expliquer les lois sur la protection sociale. Le BIT a également été invité en 2016 à organiser un séminaire dans la zone économique spéciale de Thilawa sur le droit d’association, et le président du comité de gestion a demandé l’aide du BIT pour l’élaboration de directives du travail à l’intention des employeurs et des salariés. Le gouvernement affirme que le comité de gestion de la ZES ne fera pas obstacle aux activités organisées par les travailleurs et les employeurs en ce qui concerne la formation d’associations, l’élaboration de leurs constitutions, l’élection de leurs représentants et leur liberté d’expression conformément aux lois existantes au Myanmar.
    La commission prend également note des préoccupations exprimées par la CSI indiquant que la loi sur les ZES impose les décisions relatives au règlement des conflits sans la consultation des partenaires sociaux et que les comités de gestion des ZES sont composés de représentants des travailleurs. La commission prie le gouvernement de répondre à ses préoccupations. Prenant note, dans le rapport de la mission de contacts directs, de la demande renouvelée du gouvernement au BIT de mener dans les ZES des activités de sensibilisation aux droits énoncés dans la convention, ainsi que des demandes d’élaboration de directives du travail, la commission veut croire que cette assistance sera fournie dans un proche avenir et prie le gouvernement de faire état des progrès réalisés à cet égard.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

    Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leurs activités. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note des préoccupations exprimées par la Confédération syndicale internationale (CSI) en ce qui concerne la règle imposant qu’il y ait une majorité de travailleurs qui votent en faveur de la grève pour que celle-ci puisse avoir lieu et avait prié le gouvernement de confirmer qu’une telle condition s’entend de la majorité des votants. La commission s’attend à ce que, à l’occasion de la révision de la loi sur les organisations syndicales (LOL), le gouvernement prenne toutes mesures propres à clarifier que cette condition concerne seulement la majorité des votants, afin qu’elle ne constitue pas une restriction excessive à l’exercice de l’action revendicative.
    La commission s’attend en outre à ce que, dans le cadre de la révision des lois sur le travail, le gouvernement tienne compte de l’importance qui s’attache à garantir que les organisations de travailleurs peuvent mener des actions de protestation contre la politique économique et sociale du gouvernement, que les actions de solidarité sont protégées lorsque l’action revendicative initiale est elle-même légitime et que la règle imposant aux piquets de grève de respecter une distance de 500 yards (487 mètres) est réduite de telle sorte qu’elle ne rend pas l’impact de l’action revendicative totalement dérisoire.
    Enfin, rappelant ses précédents commentaires concernant la règle imposant, en vertu de l’article 40(b) de la LOL, d’avoir la permission de la fédération correspondante pour pouvoir lancer une grève, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier cette disposition afin que les organisations de travailleurs aient le droit d’organiser librement leurs activités sous la seule condition, en cette matière, de se conformer à leurs propres statuts.

    Observation (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

    La commission prend note des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue le 1er septembre 2017, qui portent sur l’application de la convention, ainsi que de la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, que le Myanmar n’a pas ratifiée. En particulier, la commission note que la CSI se dit préoccupée par les nombreux obstacles à l’élaboration d’un mouvement syndical solide, et en fournit plusieurs exemples. La commission note en outre la réponse détaillée du gouvernement en relation avec les cas soulevés.
    Libertés publiques. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur l’état d’avancement du processus de révision de la législation ayant trait aux rassemblements pacifiques. La commission prend note de l’indication suivante du gouvernement: une nouvelle loi sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques a été adoptée le 4 octobre 2016 et est pleinement conforme aux normes concernant les droits des citoyens et aux normes démocratiques. Elle prévoit seulement un préavis de 24 heures et porte abrogation de dispositions prévoyant des sanctions. La commission note néanmoins que le chapitre sur les règles et le chapitre correspondant sur les infractions et les sanctions pourraient encore donner lieu à de graves restrictions au droit des organisations de mener leurs activités sans ingérence. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la manière dont la loi est appliquée et les sanctions imposées.
    Processus de réforme de la législation du travail. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés dans la réforme de la loi du travail. La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son dernier rapport selon lesquelles un projet de loi visant à modifier la loi sur le règlement des conflits du travail a été examiné avec les partenaires sociaux au sein du groupe de travail technique sur la réforme de la législation du travail qui s’est réuni le 22 juillet 2017. Le gouvernement ajoute que les sanctions prévues dans la loi sont en cours d’examen et que des projets d’amendement sont en cours d’élaboration. Des activités de renforcement des capacités ont également été réalisées. Toutefois, la commission prend note des observations de la CSI qui, tout en reconnaissant les premières mesures prises par le gouvernement pour engager une réforme de la législation du travail sur la base de la consultation tripartite, se dit préoccupée par ce processus et indique que le gouvernement a refusé de communiquer pleinement les textes proposés et s’est montré réticent à traiter les principales carences. La CSI craint que des amendements proposés par le gouvernement aggravent en fait le cadre législatif actuel et se réfère en particulier au fait que le gouvernement a estimé que les travailleurs du secteur informel ne devraient pas bénéficier du droit d’association alors que, dans les faits, des dizaines de milliers de travailleurs ont déjà constitué des syndicats en vertu de la loi de 2011 sur les organisations syndicales. En l’absence d’informations complémentaires du gouvernement sur les dispositions de la loi sur les organisations syndicales ou de la loi sur le règlement des conflits du travail qu’il se propose de modifier, et dont il n’a pas communiqué les projets de textes correspondants, la commission s’attend à ce que le gouvernement prenne en compte ses commentaires précédents, qu’elle rappelle ci-dessus, au sujet du processus de réforme. La commission prie le gouvernement de communiquer dans son prochain rapport des informations détaillées sur les progrès accomplis à cet égard.
    Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations. Dans ses commentaires précédents, la commission avait observé qu’un nombre minimum de travailleurs est requis pour pouvoir constituer un syndicat et, au surplus, qu’il est nécessaire de parvenir à affilier 10 pour cent des travailleurs de la branche ou du secteur considérés pour pouvoir constituer une simple organisation de base. La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre des mesures pour revoir, en concertation avec les partenaires sociaux, la règle imposant de parvenir à affilier 10 pour cent des travailleurs afin de modifier l’article 4 de la loi sur les organisations syndicales, afin que les travailleurs puissent constituer des organisations de leur choix, et s’affilier à ces organisations sans entrave. De plus, la commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer les résultats de l’examen de l’impact qu’a la structure pyramidale prévue à l’article 4 de la loi sur les organisations syndicales, et les mesures prises pour garantir dans la pratique que le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix ainsi que celui de s’y affilier s’exerce sans entrave.
    Article 3. Droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs dirigeants. La commission rappelle ses commentaires précédents concernant certaines restrictions prévues par la réglementation d’application de la loi sur les organisations syndicales qui affectent l’éligibilité à des responsabilités syndicales, notamment l’obligation d’avoir travaillé dans la branche ou le secteur d’activité considérés depuis au moins six mois ainsi que l’obligation faite aux travailleurs étrangers de satisfaire à la condition d’être résidents dans le pays depuis au moins cinq ans. La commission veut croire que ces conditions seront revues dans le cadre du processus de réforme législative, en consultation avec les partenaires sociaux, afin de garantir le droit des travailleurs d’élire librement leurs dirigeants. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour modifier la règle 5.
    Zones économiques spéciales (ZES). La commission prend note de la réponse du gouvernement aux observations de la CSI concernant la loi de 2014 sur les ZES. La commission rappelle que la CSI a indiqué que les procédures de règlement des conflits dans ces zones ont été rendues beaucoup plus complexes qu’à l’extérieur de celles-ci, et que les pouvoirs des inspecteurs du travail y ont été délégués aux organismes gestionnaires des ZES. La commission prend note de l’indication suivante du gouvernement: l’inspection du travail peut agir en coordination et coopérer avec les comités de gestion de la zone économique spéciale concernée afin d’exercer ses compétences conformément à la législation du travail; la loi sur les organisations syndicales et la loi sur le règlement des conflits du travail peuvent être appliquées dans les ZES. La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir pleinement les droits reconnus par la convention aux travailleurs des ZES, y compris en veillant à ce que la loi sur les ZES n’aille pas à l’encontre de l’application dans les ZES de la loi sur les organisations syndicales et de la loi sur le règlement des conflits du travail. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations pratiques détaillées sur la manière dont les conflits dans les ZES sont réglés, ainsi que les statistiques pertinentes sur l’inspection du travail dans les ZES, y compris le nombre de contrôles menés par des inspecteurs du travail dans les ZES, toute infraction constatée et la nature des sanctions imposées ainsi que leur nombre.
    La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

    Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs dirigeants. La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) relatives à certaines restrictions prévues par la réglementation d’application de la loi sur les organisations syndicales (LOL) qui affectent l’éligibilité à des responsabilités syndicales, notamment l’obligation d’avoir travaillé dans la branche ou le secteur d’activité considérés depuis au moins six mois ainsi que l’obligation faite aux travailleurs étrangers de satisfaire à une condition de séjour dans le pays depuis cinq ans. La commission rappelle à cet égard que des règles d’éligibilité qui sont basées sur une condition d’appartenance à une profession devraient être plus flexibles soit en admettant la candidature de personnes ayant exercé antérieurement dans la profession considérée, soit en dispensant de cette obligation une proportion raisonnable des candidats à la direction d’une organisation. S’agissant des travailleurs étrangers, la règle afférente à l’ancienneté de leur résidence dans le pays devrait imposer une ancienneté raisonnable (voir étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 102). La commission note que le gouvernement déclare que des efforts ont été entrepris, avec l’assistance du Bureau, afin de revoir et modifier les lois sur le travail actuellement en vigueur, et elle le prie de fournir des informations sur les mesures prises en vue de réviser la règle 5, en concertation avec les partenaires sociaux, et d’indiquer les mesures prises en vue de sa modification, à la lumière des indications rappelées ci-dessus.
    En outre, rappelant ses précédents commentaires concernant l’article 26, qui fixe un plafond aux cotisations syndicales, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout changement à cet égard, suite à cette révision.
    Droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leurs activités. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note des préoccupations exprimées par la CSI en ce qui concerne la règle imposant qu’il y ait une majorité de travailleurs qui votent en faveur de la grève pour que celle-ci puisse avoir lieu, et elle avait prié le gouvernement de confirmer qu’une telle condition s’entend de la majorité des votants. La commission veut croire que, à l’occasion de la révision de la LOL, le gouvernement prendra toutes mesures propres à clarifier que cette condition s’entend de la majorité des votants, afin qu’elle ne constitue pas une restriction excessive à l’exercice de l’action revendicative.
    La commission veut croire en outre que, dans le cadre de la révision des lois sur le travail, le gouvernement tiendra compte de l’importance qui s’attache à garantir que les organisations de travailleurs peuvent mener des actions de protestation contre la politique économique et sociale du gouvernement, que les actions de solidarité sont protégées lorsque l’action revendicative initiale est elle-même légitime, et que la règle imposant aux piquets de grève de respecter une distance de 500 yards (487 mètres) est réduite de telle sorte qu’elle ne rende pas l’impact de l’action revendicative totalement dérisoire.
    Enfin, rappelant ses précédents commentaires concernant la règle imposant, en vertu de l’article 40 b) de la LOL, d’avoir la permission de la fédération correspondante pour pouvoir lancer une grève, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier cette disposition afin que les organisations de travailleurs aient le droit d’organiser librement leurs activités, sous la seule condition, en cette matière, de se conformer à leurs propres statuts.

    Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

    La commission prend note des observations à caractère général formulées par l’Organisation internationale des employeurs (OIE), reçues le 1er septembre 2016. La commission prend également note des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans des communications reçues les 31 août et 26 septembre 2016, qui concernent l’application de la présente convention et aussi celle de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, (laquelle n’a pas été ratifiée par le Myanmar), ainsi que de la réponse du gouvernement à ces observations. La commission note en particulier que la CSI exprime des préoccupations tant à propos des difficultés rencontrées par des syndicalistes dans l’exercice de leur activité que du caractère insignifiant des sanctions imposées. Pour sa part, le gouvernement fait état d’une récente aggravation des sanctions punissant les agissements antisyndicaux, ainsi que de la révision actuellement en cours de la loi sur le règlement des conflits du travail. En particulier, le gouvernement indique que, dans une réunion à laquelle ont participé les parties concernées sur la réforme du droit du travail et des capacités institutionnelles, il a été convenu, en priorité absolue, de modifier la loi portant organisation du travail (LOL), la loi de résolution des conflits du travail, ainsi que la loi du travail et du développement des compétences. La commission prend note, en outre, de la décision prise par le Conseil d’administration à sa 328e session (novembre 2016), accueillant favorablement des mesures prises par le gouvernement afin de réformer la législation du travail, promouvoir la liberté syndicale et institutionnaliser le dialogue social (document GB.328/INS/9). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés dans le domaine de la réforme de la loi du travail et sur tout amendement à venir de la loi sur le règlement des conflits du travail.
    Libertés publiques. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur le processus de révision de la législation ayant trait aux rassemblements pacifiques. La commission prend note de l’adoption, le 24 juin 2014, de la loi modifiée sur le droit aux rassemblements et aux cortèges pacifiques. L’interdiction de tels rassemblements a été supprimée du chapitre 4 et les sanctions prévues pour les infractions dans ce domaine ont été abaissées. Le gouvernement ajoute que le ministère de l’Intérieur s’efforce de retirer la loi modifiée et que des discussions et des consultations ont actuellement lieu au Parlement en vue de l’adoption d’une nouvelle loi. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
    Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations. Dans ses commentaires précédents, la commission avait observé qu’un nombre minimum de travailleurs est requis pour pouvoir constituer un syndicat et, au surplus, il est nécessaire de parvenir à affilier 10 pour cent des travailleurs de la branche ou du secteur considérés pour pouvoir constituer une simple organisation de base. La commission note que la CSI exprime à nouveau ses préoccupations quant aux conséquences possibles que cette double exigence risque d’avoir sur la syndicalisation dans les grandes entreprises. La commission espère que le gouvernement en tiendra pleinement compte dans le cadre de la réforme du droit du travail. La commission prie une fois de plus le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de revoir, en concertation avec les partenaires sociaux concernés, cette règle imposant de parvenir à affilier 10 pour cent des travailleurs, en modifiant l’article 4 de la LOL de telle sorte que les travailleurs soient libres de constituer, sans entrave, les organisations de leur choix.
    La commission prend note en outre des préoccupations exprimées par la CSI à propos de la structuration que la loi prévoit pour les syndicats en imposant un minimum d’adhérents à chaque niveau, ce qui rend la syndicalisation particulièrement difficile. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles il existe à l’heure actuelle 2 204 organisations d’employeurs et de travailleurs, dont 2 036 organisations syndicales de base, 28 organisations patronales de base, 115 organisations syndicales urbaines et une organisation patronale urbaine, 14 organisations syndicales régionales ou nationales, huit fédérations syndicales et une fédération patronale et, enfin, une confédération syndicale. La commission prie une fois de plus le gouvernement de revoir, en concertation avec les partenaires sociaux concernés, la structuration prévue à l’article 4 de la LOL, afin de garantir dans la pratique que le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix ainsi que celui de s’affilier à de telles organisations s’exerce sans entrave.
    Zones économiques spéciales (ZES). La commission prend note des observations formulées par la CSI à propos de la loi de 2014 sur les zones économiques spéciales (ZES) et ses dispositions, qui annuleraient et remplaceraient toute législation antérieure dans ce domaine. La CSI ajoute que les procédures de règlement des conflits dans ces zones ont été rendues beaucoup plus complexes qu’à l’extérieur de celles-ci et que les pouvoirs des inspecteurs du travail y ont été délégués aux organismes gestionnaires des ZES. La commission prie le gouvernement de fournir à cet égard ses commentaires détaillés et de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir pleinement les droits reconnus par la convention aux travailleurs des ZES.
    La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

    Se référant à son observation, la commission rappelle les questions soulevées par la Confédération syndicale internationale (CSI) au sujet d’un certain nombre de dispositions de la loi sur l’organisation du travail. N’ayant pas reçu de réponse du gouvernement sur ce point, la commission prie à nouveau le gouvernement de fournir les informations suivantes.
    Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer ses observations sur les points soulevés dans les observations précédentes de la CSI au sujet de la signification de certains termes utilisés dans la législation, tels que «corps de métier» ou «activité», en particulier en ce qui concerne les possibilités, pour les organisations, fédérations ou confédérations de travailleurs aux niveaux régional/d’une ville ou au niveau de l’Etat, de représenter les travailleurs dans différents corps de métier ou activités.
    Article 3. Droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs dirigeants. La commission prend note des observations de la CSI au sujet de certaines restrictions relatives à l’éligibilité à des fonctions de dirigeant, stipulées dans les règles de la loi sur l’organisation du travail (LOL), y compris l’obligation d’avoir travaillé dans le même corps de métier ou la même activité durant au moins six mois, ainsi que l’obligation pour les travailleurs étrangers de satisfaire une condition de résidence de cinq ans. La commission rappelle à cet égard que les règles d’éligibilité fondées sur une obligation d’appartenir à une profession devraient être assouplies soit en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable de dirigeants de l’organisation. En ce qui concerne les travailleurs étrangers, la période de résidence exigée pour être éligible devrait être fixée à un niveau raisonnable (voir étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 102). La commission prie le gouvernement de revoir la règle 5 en consultation avec les partenaires sociaux et d’indiquer toute mesure prise pour la modifier à la lumière des indications ci-dessus.
    Par ailleurs, rappelant ses précédents commentaires au sujet de l’article 26 qui prévoit un plafond de cotisations syndicales, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour modifier cette disposition de manière à ce que les travailleurs puissent déterminer librement le montant des cotisations syndicales lors de l’établissement des statuts et du règlement de leur organisation.
    Enfin, la commission note que la CSI estime que la règle 7, qui fixe à deux ans la durée du mandat d’un dirigeant syndical, est ambiguë dans la mesure où il existe une possibilité que des membres du comité exécutif puissent être candidats pour plusieurs mandats consécutifs, et elle prie le gouvernement d’indiquer si tel est le cas.
    Droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leurs activités. La commission prie de nouveau le gouvernement de fournir des informations spécifiques en réponse à sa précédente demande et d’indiquer si l’article 54 de la LOL ne sanctionne que les délits pénaux ayant pour but d’inciter les travailleurs à adhérer à des syndicats et s’il n’est pas appliqué de façon plus large au risque de porter atteinte à l’exercice normal des activités des organisations de travailleurs durant une campagne syndicale.
    Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté les préoccupations exprimées par la CSI en ce qui concerne l’exigence qu’une majorité de travailleurs votent en faveur de la grève, et elle prie de nouveau le gouvernement de confirmer que cette condition concerne la majorité des votants pour assurer que cela ne constitue pas un obstacle excessif à l’engagement d’une action revendicative. Elle prie également le gouvernement de confirmer d’une manière plus générale que les organisations de travailleurs peuvent engager des actions revendicatives contre la politique économique et sociale du gouvernement, et que les actions de solidarité sont protégées lorsque l’action initiale est légitime. Enfin, rappelant ses précédents commentaires au sujet de l’obligation que fait l’article 40(b) d’obtenir l’approbation de la fédération syndicale concernée pour engager la grève, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour modifier cet article afin de garantir le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leurs activités, en ne se conformant qu’aux dispositions de leurs propres règlements.
    [Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2016.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

    La commission prend note des observations formulées par l’Organisation internationale des employeurs (OIE) dans une communication reçue le 1er septembre 2014. Elle note les observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2014 et la réponse du gouvernement à cet égard.
    Cadre général de la liberté d’association. La commission prend note de l’information fournie par le gouvernement selon laquelle, après l’adoption en 2012 de la loi sur l’organisation du travail (LOL), il existe à présent 1 384 organisations syndicales de base, 45 organisations syndicales de sous-district, deux fédérations syndicales, 28 organisations d’employeurs de base, une organisation d’employeurs de sous-district et une fédération d’employeurs, toutes librement constituées en vertu de la loi. Le gouvernement indique également que le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale de l’Union et le greffier en chef ont rencontré les dirigeants de trois fédérations syndicales informelles, à savoir la Fédération des syndicats du Myanmar (FTUM), la Fédération agricole et paysanne du Myanmar (AFFM) et la Fédération syndicale du Myanmar (MTUF) afin de déterminer les modalités pour leur reconnaissance comme fédérations officielles. De plus, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale de l’Union et le greffier en chef mènent régulièrement des discussions avec ces dirigeants afin de les consulter sur les défis, les difficultés et les progrès constatés dans l’application du principe de la liberté d’association. Le gouvernement se réfère également à un Comité consultatif de projet (PAC) dont l’objectif immédiat est d’examiner les nouvelles dispositions de la loi sur le travail ou les dispositions amendées de cette loi afin de placer la législation nationale en plus étroite conformité avec les normes internationales du travail. Le gouvernement indique que la LOL sera révisée, en temps utile, en coopération avec le conseiller technique en chef du BIT sur la liberté syndicale. De plus, un groupe d’experts a été constitué pour mettre en œuvre la réforme de la loi sur le travail et exécuter les activités de renforcement des capacités institutionnelles, dans le cadre du Groupe de travail sectoriel sur les possibilités d’emploi, avec les représentants des ministères compétents, du BIT et d’autres agences et institutions internationales.
    La commission prend note des observations de la CSI selon lesquelles, bien que la LOL contienne un certain nombre d’améliorations, elle considère que ses principales dispositions ne sont manifestement pas conformes à la convention ou sont ambiguës et que leur mise en œuvre et leur contrôle sont irréguliers. De plus, la CSI observe qu’aucune des questions soulevées dans ses observations de 2012 ou de celles soulevées dans la demande directe n’a été traitée par le gouvernement. Elle note en outre que, bien qu’il y ait eu une augmentation encourageante du nombre des syndicats enregistrés, certaines questions relatives à la procédure d’enregistrement restent peu claires. Ni la FTUM ni aucune autre association syndicale n’ont été reconnues par le gouvernement, laissant ainsi les travailleurs sans porte-parole au niveau national et sans la capacité d’engager un dialogue tripartite officiel. La commission prie le gouvernement de répondre en détail à ces observations dans son prochain rapport.
    Libertés publiques. La commission prend note de la réponse du gouvernement à ses précédents commentaires, selon laquelle aucune personne du nom de Naw Bay Bay n’est détenue et il existe 40 détenus du nom de Nyo Win et, par conséquent, le gouvernement aurait besoin de davantage d’informations pour déterminer la situation de l’intéressé.
    La commission prend note également de l’information fournie par le gouvernement selon laquelle l’article 9(d) de la loi no 15/2011 sur le droit de réunion et de manifestation pacifiques a été abrogé et le ministère de l’Intérieur a été averti de la révision des articles 8(d), 12(c) et (f). La CSI fait cependant état du harcèlement persistant de dirigeants syndicaux et de travailleurs participant à des campagnes de recrutement syndical et indique que, malgré des modifications mineures intervenues en 2014, le gouvernement continue d’arrêter et de condamner des travailleurs et des militants qui participent à des réunions pacifiques comme les y autorise la loi no 15/2011. Compte tenu des préoccupations exprimées par la CSI au sujet de la persistance des arrestations et détentions en application de la loi, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’état de la révision de la loi.
    Article 2 de la convention. Cadre législatif. Droit des travailleurs de constituer des organisations. La commission rappelle ses précédents commentaires dans lesquels elle avait pris note des préoccupations exprimées par la CSI en ce qui concerne l’exigence d’un nombre minimum d’adhérents pour constituer une organisation de travailleurs à différents niveaux. La commission rappelle que si l’exigence d’un nombre d’adhérents minimum n’est en elle-même pas incompatible avec la convention, ce nombre devrait être fixé d’une manière raisonnable afin de ne pas faire obstacle à la création d’organisations. Elle note à cet égard que l’article 4(a) de la LOL exige un nombre de 30 adhérents, mais que cet article se réfère de plus à la nécessité que 10 pour cent des travailleurs soient affiliés dans le corps de métier ou l’activité pour que puisse être constituée une organisation syndicale de base. Une telle exigence pourrait rendre particulièrement difficile l’exercice par les travailleurs de leur droit de constituer des organisations dans les grandes entreprises. La CSI se réfère aussi à ce qu’elle considère comme une structure syndicale excessivement rigide qui empêche l’enregistrement des syndicats de plus haut niveau, et elle souligne le fait que, à ce jour, aucune confédération syndicale nationale n’a été reconnue aux termes de la loi.
    Compte tenu des cas spécifiques signalés par la CSI de travailleurs dont il est allégué qu’ils avaient été confrontés à de graves difficultés dans l’exercice de leur droit de constituer des organisations du fait des exigences stipulées à l’article 4 de la LOL, la commission prie le gouvernement de revoir ces exigences en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées, en vue de leur modification, de manière à ce que le simple fait de constituer une organisation ne fasse pas l’objet d’exigences déraisonnables et de manière à faciliter la reconnaissance des organisations de niveau national qui peuvent participer au dialogue social tripartite sur des questions en cours d’étude par le gouvernement, susceptibles de porter atteinte aux intérêts socio-économiques des travailleurs.
    La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
    [Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2016.]

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

    Se référant à son observation, la commission prend note des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) au sujet d’un certain nombre de dispositions de la loi sur l’organisation du travail.
    Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations. La commission prend note en particulier des préoccupations exprimées par la CSI en ce qui concerne l’exigence d’un nombre minimum d’adhérents pour constituer une organisation de travailleurs à différents niveaux. La commission rappelle que si l’exigence d’un nombre d’adhérents minimum n’est en elle-même pas incompatible avec la convention, ce nombre devrait être fixé d’une manière raisonnable afin de ne pas faire obstacle à la création d’organisations. Compte tenu des cas spécifiques soulevés dans lesquels des travailleurs ont été sérieusement entravés dans leur capacité de constituer des organisations en raison des exigences prescrites à l’article 4 de la loi, la commission prie le gouvernement de revoir ces exigences avec les organisations de travailleurs et d’employeurs concernées afin de les modifier pour que l’acte simple consistant à créer une organisation ne fasse pas l’objet de l’imposition de conditions déraisonnables. La commission rappelle la disponibilité de l’assistance du BIT dans ce domaine.
    La commission note que la CSI a soulevé un certain nombre d’autres questions en relation avec la signification de certains termes utilisés dans la législation, tels que «corps de métier» ou «activité», en particulier en ce qui concerne les possibilités, pour les organisations, fédérations ou confédérations de travailleurs au niveau régional/d’une ville ou au niveau de l’Etat, de représenter les travailleurs dans différents corps de métier ou activités et elle prie le gouvernement de communiquer ses observations à cet égard.
    Article 3. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur activité. Notant les préoccupations exprimées par la CSI dans ses commentaires, la commission prie le gouvernement d’indiquer si l’article 54 de la loi ne sanctionne que les délits pénaux ayant pour but d’inciter des travailleurs à adhérer à des syndicats et s’il n’est pas appliqué de façon plus large au risque de porter atteinte à l’exercice normal des activités des organisations des travailleurs durant une campagne syndicale.
    La commission prend note également des préoccupations exprimées par la CSI en ce qui concerne l’exigence qu’une majorité de travailleurs votent en faveur de la grève et elle prie le gouvernement de confirmer que cette condition concerne la majorité des votants pour assurer que cela ne constitue pas un obstacle excessif à l’engagement d’une action revendicative. Elle prie également le gouvernement de confirmer d’une manière plus générale que les organisations de travailleurs peuvent engager des actions revendicatives pour protester contre la politique économique et sociale du gouvernement et que les actions de solidarité sont protégées lorsque l’action initiale est légitime.
    A cet égard, la commission prend note de l’adoption de la loi no 15 sur le droit de se réunir et de défiler de manière pacifique, qui définit les conditions de demande d’une autorisation de défiler pacifiquement. La commission note que la loi semble laisser l’octroi de l’autorisation à la discrétion de l’autorité responsable, qu’elle ne se réfère pas à un droit de manifester pacifiquement et qu’elle n’autorise pas le recours aux tribunaux en cas de refus. La commission considère que, dans la mesure où cette loi couvrirait les manifestations auxquelles auraient appelé des organisations de travailleurs ou d’employeurs pour protester contre la politique économique et sociale générale du gouvernement, les restrictions devraient être raisonnables et il ne devrait pas être fait obstacle au recours devant un organe judiciaire indépendant. La commission observe également que certaines dispositions de la loi restreignent de façon générale les actions revendicatives ou les propos des manifestants, ce qui risque dans la pratique de constituer une application contraire à la convention. La commission prie par conséquent le gouvernement de réexaminer en particulier les articles 8(d), 9(c), 12(c et f) de la loi en vue de les modifier de manière à ce qu’ils ne fassent pas obstacle à l’exercice des droits fondamentaux et des libertés civiles fondamentales.
    La commission prend note des commentaires de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) sur le droit de grève, formulés dans une communication datée du 29 août 2012, qui sont examinés dans le rapport général de la commission.

    Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

    La commission prend note des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication en date du 31 août 2012, qui, tout en exprimant un certain nombre de préoccupations quant aux dispositions spécifiques de la législation récemment adoptée, fait observer qu’il y a eu un certain nombre de développements positifs et bienvenus dans la situation de la liberté syndicale au Myanmar.
    La commission prend note des commentaires de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), en date du 29 août 2012, qui concernent le droit de grève et sont traités dans le rapport général de la commission.
    La commission observe que, à sa 316e session, le Conseil d’administration du BIT a décidé de ne pas prendre d’autres mesures au sujet de la plainte déposée en application de l’article 26 de la Constitution, qui était pendante en relation avec l’application de cette convention.
    Cadre législatif. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté avec intérêt la signature et la promulgation, par le Président, de la loi sur les organisations syndicales et avait exprimé le ferme espoir que cette loi entrerait en vigueur immédiatement et serait effectivement appliquée afin de garantir à tous les travailleurs du pays un cadre législatif attendu de longue date dans lequel ils puissent exercer les droits prévus par la convention. La commission note avec satisfaction que la loi sur les organisations syndicales est entrée en vigueur le 9 mars 2012 et que, d’après la dernière communication du gouvernement, il existe aujourd’hui 264 organisations syndicales de base, une fédération syndicale et 12 organisations d’employeurs de base enregistrées dans le cadre de la loi sur les organisations syndicales. La commission note également avec intérêt la promulgation de la loi du 28 mars 2012 sur le règlement des conflits du travail et la publication des règles correspondantes le 26 avril 2012. Elle note avec satisfaction que l’adoption de cette loi a donné lieu à l’abrogation de la loi de 1929 sur les conflits du travail, au sujet de laquelle la commission a fait des commentaires pendant de nombreuses années. La commission prend également note avec intérêt de la déclaration du gouvernement, dans son rapport, selon laquelle l’ordonnance no 2/1988 concernant l’interdiction des rassemblements et défilés illégaux est contraire à l’article 354 de la Constitution et à la loi no 15, récemment promulguée, sur le droit de se réunir et de défiler de manière pacifique, et elle n’a donc plus force de loi. S’agissant de l’ordonnance no 6/1988, relative à la constitution d’organisations, le gouvernement indique que, depuis l’entrée en vigueur de la loi sur les organisations syndicales et de la loi no 15, celle-ci ne s’applique qu’aux organisations sociales. La commission veut croire, par conséquent, que l’ordonnance no 6 ne sera plus applicable, de quelque manière que ce soit, aux organisations de travailleurs et d’employeurs au sens de la convention.
    En ce qui concerne les dispositions de la nouvelle législation, la commission avait prié le gouvernement, dans ses précédents commentaires, d’indiquer si la nouvelle loi sur les organisations syndicales permet effectivement la constitution et la reconnaissance de plus d’une confédération syndicale, et elle l’avait prié également d’indiquer les mesures prises pour modifier les articles 26 et 40(b) afin de garantir le droit de toutes les organisations syndicales, y compris des organisations de base, d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action en toute liberté. La commission note avec intérêt qu’un conseiller technique en chef sur la liberté syndicale a rejoint le bureau de liaison en juin 2012 et qu’il travaille activement avec le gouvernement et les organisations de travailleurs et d’employeurs pour sensibiliser davantage la population au droit à la liberté syndicale et aider les parties à appliquer les lois nouvellement adoptées d’une manière compatible avec les principes de la liberté syndicale. La commission prie le gouvernement de réexaminer ces dispositions avec les partenaires sociaux et le BIT afin d’assurer qu’elles sont appliquées dans la pratique en pleine conformité avec la convention et qu’elles sont modifiées, si besoin est, et d’indiquer les mesures prises à cet égard.
    Libertés publiques. La commission note avec satisfaction la libération de Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min, et de nombreuses autres personnes détenues pour avoir exercé leurs libertés publiques fondamentales et leur droit à la liberté syndicale. La commission prie le gouvernement d’indiquer si Naw Bey Bey et Nyo Win, auxquels elle s’est référée dans ses commentaires précédents, ont été libérés.
    La commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle la loi de 1908 sur les associations illégales ne fait pas obstacle à la liberté syndicale des travailleurs mais sanctionne les actes de terrorisme. La commission prend note également des préoccupations exprimées par la CSI en ce qui concerne le statut ambigu de la déclaration no 1/2006. La commission veut croire que la déclaration no 1/2006 n’aura plus force de loi, en particulier à la lumière du récent retour dans le pays des dirigeants et membres de la Fédération des syndicats de Birmanie, et elle prie le gouvernement de confirmer que cette attente ne sera pas vaine.
    La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

    Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

    La commission note les commentaires fournis par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication en date du 31 août 2011.
    La commission note, par ailleurs, les conclusions adoptées par la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2011. La commission relève en particulier que la Commission de la Conférence a pris note avec une profonde préoccupation de la persistance du gouvernement, au fil des années, à ne pas éliminer les graves lacunes concernant l’application de la convention. La commission observe, par ailleurs, qu’une plainte introduite en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT relative à l’application de la convention est en instance de décision devant le Conseil d’administration.
    Cadre législatif. Dans ses précédents commentaires, la commission a rappelé les questions qu’elle soulève depuis des années à propos de l’absence totale de cadre législatif permettant l’exercice des droits garantis par la convention. La commission rappelle qu’elle a non seulement prié instamment le gouvernement d’adopter une loi qui permettrait aux travailleurs d’établir librement les organisations de leur choix, mais qu’elle a également souligné qu’il était urgent de procéder à l’abrogation d’un certain nombre de textes juridiques qui continuent à porter gravement atteinte aux droits à la liberté syndicale dans le pays.
    La commission note avec intérêt que, selon le rapport du gouvernement, et sur base des avis de l’OIT, la loi sur les organisations syndicales a été adoptée par le Parlement (Hluttaw) le 16 septembre 2011, puis signée et promulguée par le Président le 11 octobre 2011. La commission relève que la loi contient des dispositions relatives à la constitution des organisations syndicales, à leurs fonctions et devoirs, à leurs droits et responsabilités, y compris le droit de grève. En outre, la commission note avec intérêt que la nouvelle loi abroge la loi de 1926 sur les syndicats, et elle comprend également qu’un projet de loi portant abrogation de la loi de 1964 définissant les droits fondamentaux et responsabilités des travailleurs du peuple a été introduit devant le Parlement.
    La commission s’attend fermement à ce que la loi sur les organisations syndicales entre en vigueur immédiatement et soit effectivement appliquée afin de garantir à tous les travailleurs du pays un cadre législatif attendu de longue date dans lequel ils puissent exercer les droits prévus par la convention.
    S’agissant des dispositions de la nouvelle loi et rappelant que, en vertu des articles 2 et 5 de la convention, le pluralisme syndical doit rester possible dans tous les cas (étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 91-93), la commission observe avec préoccupation que la traduction anglaise de la loi semble faire référence à une organisation syndicale unique (art. 6, 7, 11, 12 et 14). La commission prie le gouvernement d’indiquer si la nouvelle loi sur les organisations syndicales permet effectivement la constitution et la reconnaissance de plus d’une confédération syndicale.
    La commission observe également avec préoccupation que l’article 40(b) semble n’autoriser l’exercice du droit de grève qu’avec l’approbation des «fédérations syndicales concernées». La commission considère que le droit de grève ne devrait pas être soumis à des restrictions législatives confiant l’autorité d’autoriser la grève à des organisations de travailleurs d’un niveau supérieur, indépendamment des statuts des organisations concernées ou de l’affiliation des organisations de niveau inférieur. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour modifier cet article afin de garantir le droit de toutes les organisations syndicales, y compris des organisations de base, d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action en toute liberté.
    En outre, la commission observe avec préoccupation que l’article 26 dispose que les organisations syndicales de base doivent allouer des contributions mensuelles aux organisations syndicales de niveau supérieur, fédérations et confédérations, telles que requises par les fédérations syndicales concernées. Rappelant que l’article 3 de la convention protège le droit des organisations de travailleurs et d’employeurs d’organiser leur gestion sans ingérence des autorités publiques, et que ce droit comprend en particulier la protection de leur autonomie, indépendance financière et de leurs biens et propriétés, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour amender cet article afin de garantir que la transmission de fonds à une organisation de travailleurs de niveau supérieur est une question relevant de la seule détermination des organisations elles-mêmes et non pas d’une intervention législative ou de toute autre nature de la part du gouvernement.
    La commission examinera la nouvelle loi sur les organisations syndicales de manière plus détaillée au cours de sa prochaine session pour laquelle elle espère avoir reçu un complément d’information de la part du gouvernement, dans son prochain rapport, concernant l’application de la loi en pratique et l’adoption de toutes réglementations et instructions pertinentes.
    La commission rappelle, par ailleurs, ses précédents commentaires concernant la clause dérogatoire de caractère très général inscrite à l’article 354 de la Constitution qui subordonne l’exercice de la liberté syndicale aux «lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté du droit et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société ou l’ordre public et la moralité». La commission s’attend fermement à ce que, avec l’entrée en vigueur de la loi sur les organisations syndicales, le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que cet article ne soit pas utilisé pour autoriser des restrictions relatives aux droits consacrés dans la convention et prie le gouvernement de fournir toutes les informations pertinentes sur l’application pratique de la loi sur les organisations syndicales.
    Enfin, la commission rappelle ses précédents commentaires s’agissant des dispositions législatives suivantes: i) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988 qui prévoit que «la demande de constitution d’une organisation doit être présentée pour autorisation au ministère de l’Intérieur et des Affaires religieuses» (art. 3(a)) et précise que toute personne reconnue coupable d’appartenir à des organisations non autorisées ou d’aider ou d’encourager de telles organisations ou d’agir sous le couvert de ces organisations sera punie de l’emprisonnement pour une durée maximale de trois ans (art. 7); ii) l’ordonnance no 2/88 qui interdit les réunions, des marches ou la participation à des manifestations qui regroupent cinq personnes ou plus, indépendamment du fait qu’une telle réunion ou participation ait pour objectif de provoquer des troubles ou de commettre un crime; iii) la loi de 1908 sur les associations illégales qui prévoit que quiconque est membre d’une association illégale prend part aux réunions d’une telle association, participe financièrement aux objectifs d’une telle association ou reçoit ou sollicite une telle participation, ou aide de quelque manière que ce soit au fonctionnement d’une telle association, sera passible d’une peine d’emprisonnement comprise entre deux et trois ans et d’une amende (art. 17.1); iv) la loi de 1929 sur les conflits de travail qui établit de nombreuses interdictions du droit de grève et habilite le Président à déférer les conflits de travail à des tribunaux d’investigation ou à des tribunaux du travail.
    Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté l’indication du gouvernement que le Hluttaw prendrait les mesures nécessaires, après les élections de 2010, pour abroger les ordonnances nos 2/88 et 6/88, la loi sur les associations illégales ainsi que la déclaration no 1/2006. La commission observe cependant que dans son dernier rapport, bien que rappelant que ces questions sont en discussion devant le Hluttaw, le gouvernement indique que ces ordonnances sont importantes pour assurer le respect de la loi et le maintien de l’ordre, de la paix et de la tranquillité de la communauté, et que la loi sur les associations illégales est nécessaire pour se protéger de forces armées illégales. La commission rappelle à cet égard les préoccupations graves qu’elle soulève depuis de nombreuses années s’agissant de ces lois et de leur utilisation pour emprisonner les travailleurs ayant eu des contacts avec des organisations syndicales, ainsi que le montrent les plaintes introduites devant le Comité de la liberté syndicale (voir cas no 2591, 349e rapport). Prenant également note de l’indication donnée par le gouvernement au Conseil d’administration de novembre 2011 que ces lois seront abrogées une fois que le projet de loi sur la liberté de réunion et de procession pacifique actuellement devant le Parlement aura été promulgué, la commission prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour l’abrogation des ordonnances nos 2/88 et 6/88, ainsi que de la loi sur les associations illégales et la déclaration no 1/2006, afin qu’elle ne puissent plus être appliquées d’une manière pouvant porter atteinte aux droits des organisations de travailleurs et d’employeurs, et de fournir une copie de la loi sur les réunions et processions pacifiques une fois adoptée.
    Libertés publiques. Comme dans ses précédents commentaires, la commission note à nouveau la préoccupation de la Commission de la Conférence, préoccupation qu’elle partage, relativement au maintien en détention pour des raisons liées à l’exercice de la liberté d’expression et de la liberté syndicale de nombreuses personnes malgré les appels répétés à leur libération. La commission rappelle à cet égard l’appel pressant de la Commission de la Conférence au gouvernement de mettre fin à la pratique consistant à persécuter les travailleurs ou d’autres personnes pour avoir eu des contacts avec des organisations de travailleurs et de veiller à la libération immédiate de Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min, ainsi que de toutes les autres personnes emprisonnées pour avoir exercé leurs libertés publiques fondamentales et leur droit à la liberté syndicale. La commission regrette profondément que le gouvernement se contente de réitérer les informations fournies dans ses précédents rapports selon lesquelles ces personnes ne seraient pas des travailleurs et déclare qu’elles continuent à purger leur peine de prison.
    Néanmoins, la commission accueille favorablement les informations récentes fournies par le gouvernement selon lesquelles Myo Aung Thant ait été libéré après avoir passé treize ans en prison pour avoir eu des contacts avec la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB). La commission note également l’information fournie par le gouvernement que Tin Hla a reçu un traitement médical pour la tuberculose à la prison centrale d’Insein et est en bonne santé.
    La commission note cependant avec regret que le gouvernement n’a pas fourni les informations demandées dans son précédent commentaire s’agissant des autres personnes présumées purger des peines pour l’exercice de leur liberté syndicale (Khin Maung Cho (aka Pho Toke), Nyo Win, Kan Myint, Thein Win, Tin Oo, Kyi Thein, Chaw Su Hlaing, U Aung Thein, Khin Maung Win, Ma Khin Mar Soe, Ma Thein Thein Aye, U Aung Moe, et Naw Bey Bey).
    La commission rappelle que le respect du droit à la vie et aux autres libertés publiques est une condition préalable fondamentale à l’exercice des droits prévus dans la convention, et que les travailleurs et les employeurs devraient être en mesure d’exercer leurs droits syndicaux dans un climat de complète liberté et sécurité, à l’abri de la violence et des menaces. En outre, la commission rappelle que, s’il est vrai que les syndicalistes sont tenus, conformément à l’article 8 de la convention, de respecter la législation nationale, «la législation ne devra pas porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la présente convention». Les pouvoirs publics ne devraient pas intervenir dans les activités légitimes des syndicats par des arrestations ou des détentions arbitraires, et les syndicalistes ne devraient pas être harcelés en raison de leur affiliation ou de leurs activités syndicales en usant d’allégations de conduite criminelle à leur égard.
    La commission prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour la libération immédiate de Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win, Myo Min et toutes les personnes emprisonnées pour avoir exercé leurs libertés publiques fondamentales et leur liberté syndicale, et de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard dans son prochain rapport, ainsi que sur la situation, y compris médicale, de tous les travailleurs détenus susmentionnés.
    Prolongation du mandat de l’OIT. La commission note que la Commission de la Conférence a de nouveau suggéré que le gouvernement accepte une prolongation de la présence de l’OIT pour couvrir les questions touchant à la convention. La commission note avec regret l’indication du gouvernement dans son dernier rapport qu’une prolongation de la présence de l’OIT pour couvrir les questions touchant à la convention n’était plus exigée, compte tenu du fait que la loi sur les organisations syndicales a été approuvée et que la constitution d’organisations de travailleurs en résultera. La commission considère cependant que le gouvernement aura justement besoin d’une plus grande assistance dans le cadre de cette nouvelle configuration pour veiller à ce que toutes les parties comprennent effectivement ce nouveau système de droits et responsabilités et le mettent en œuvre dans le véritable esprit de la convention. La commission exprime par conséquent à nouveau le ferme espoir que le gouvernement sera en mesure d’accepter une telle prolongation dans un très proche avenir, et elle le prie de fournir des informations sur tout développement à cet égard.
    La commission prie le gouvernement de transmettre un rapport détaillé concernant toutes les mesures concrètes prises, avec la participation pleine et authentique des travailleurs et employeurs de tous les secteurs de la société, sans considération de leurs opinions politiques, pour appliquer la loi sur les organisations syndicales et adopter les autres mesures nécessaires afin que tous les travailleurs et tous les employeurs puissent exercer pleinement et effectivement leurs droits en vertu de la convention sans ingérence des autorités publiques.
    [Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 2012.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

    La commission prend note des commentaires en date du 24 août 2010 de la Confédération syndicale internationale (CSI) se référant à des questions graves dont la commission a déjà pris note.

    La commission prend note des conclusions adoptées par la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2010. Elle note en particulier que la Commission de la Conférence a pris note avec une profonde préoccupation de la persistance du gouvernement, au fil des années, à ne pas éliminer les graves lacunes concernant l’application de la convention.

    Libertés publiques. Dans ses précédents commentaires, la commission rappelait la référence faite par la CSI à l’arrestation de six travailleurs, leur interrogatoire musclé et leur condamnation à vingt ans de prison pour sédition, ainsi qu’à la condamnation à des peines de prison supplémentaires de Thurein Aung, Wai Lin, Kyaw Win et Myo Min (cinq ans de prison pour association avec la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) et trois ans de prison pour avoir franchi illégalement une frontière). Elle avait pris note de l’arrestation du dirigeant du Syndicat des chemins de fer U Tin Hla et de celle de Su Su Nway, condamnés à douze ans et demi de prison. La CSI avait signalé en outre la condamnation, fin 2008, à de longues peines de prison pour contact avec des groupes en exil, sédition et d’autres accusations, de trois travailleurs – Khin Maung Cho (alias Pho Toke), Nyo Win et Kan Myint – employés à la fabrique de savon A21 de la zone industrielle de Hlaing Thayar.

    De plus, dans ses précédents commentaires, la commission rappelait que la CSI avait fait état, antérieurement, de nombreuses autres graves violations de la convention, notamment des faits suivants:

    –           l’emprisonnement de Myo Aung Thant, membre du Syndicat de l’industrie pétrochimique de Birmanie, emprisonné aujourd’hui depuis plus de douze ans après avoir été condamné pour haute trahison pour avoir entretenu des contacts avec la FTUB (sur la base de l’article 122(1) du Code pénal);

    –           le meurtre de Saw Mya Than, membre de la FTUB et dirigeant du Syndicat des travailleurs de l’enseignement Kawthoolei (KEWU), qui aurait été tué par l’armée en représailles d’un acte d’insurrection; le Comité de la liberté syndicale avait demandé au gouvernement, dans le cadre du cas no 2268, de diligenter une enquête indépendante sur la mort de Saw Mya Than;

    –           la disparition, le 22 septembre 2007, de Lay Lay Mon, militante syndicale qui avait été prisonnière politique et qui a aidé les travailleurs à s’organiser pour soutenir les manifestations déclenchées par des moines et des citoyens lors des soulèvements de Yangoon. On pense que l’intéressée serait incarcérée dans la prison d’Insein, mais on ne sait pas si et quand elle devrait être jugée;

    –           la disparition de la militante syndicale Myint Soe, la dernière semaine du mois de septembre 2007, après s’être engagée activement aux côtés de travailleurs pour renforcer leur implication dans le soulèvement du mois de septembre;

    –           l’arrestation par les autorités militaires, les 8 et 9 août 2006, de sept membres de la famille du militant de la FTUB Thein Win à leur domicile, dans le quartier Kyun Tharyar de la ville de Pegu. En garde à vue, plusieurs membres masculins de cette famille ont été torturés au cours de leur interrogatoire. Les 3 et 4 septembre 2006, les autorités ont relâché quatre de ces personnes. Cependant, trois des enfants de Thein Win (Tin Oo, Kyi Thein et Chaw Su Hlaing) ont été condamnés à dix-huit ans de prison, sur la base de l’article 17(1) et (2) de la loi sur les associations illégales. Tin Oo aurait subi, au cours de sa détention, de graves tortures à l’origine de troubles mentaux et l’on craindrait pour sa santé;

    –           l’arrestation en mars 2006 de cinq militants syndicaux ou militants pour la démocratie clandestine, recherchés pour diverses infractions liées aux efforts déployés par les intéressés pour fournir des informations à la FTUB et à d’autres organisations considérées comme illégales par le régime et aussi pour avoir organisé des manifestations pacifiques contre le SPDC. Ces cinq personnes ont été condamnées à de longues peines de prison et quatre d’entre elles purgent leur peine dans la prison d’Insein (U Aung Thein, 76 ans, condamné à vingt ans; Khin Maung Win, condamné à dix-sept ans; Ma Khin Mar Soe, condamné à dix-sept ans; Ma Thein Thein Aye, condamné à onze ans; U Aung Moe, âgé de 78 ans, condamné à vingt ans);

    –           des actes d’intimidation commis par l’armée à l’égard de 934 ouvriers de l’établissement Hae Wae Garment, dans la localité d’Okkapala sud, dans l’agglomération de Yangoon, qui avaient déclenché une grève le 2 mai 2006 pour réclamer de meilleures conditions de travail. Les 48 travailleurs admis à rencontrer les autorités ont été contraints de signer une déclaration écrite disant qu’il n’y avait aucun problème dans l’usine;

    –           l’arrestation et la condamnation à une peine de quatre ans de prison assortie de travaux forcés de Naw Bey Bey, militante du Syndicat des travailleurs de la santé de l’Etat de Karen (KHWU) qui serait détenue à Toungoo;

    –           l’arrestation, la torture et le meurtre par une unité du bataillon d’infanterie 83 de Saw Thoo Di, également connu sous le nom de Saw Ther Paw, membre du comité du Syndicat des travailleurs de l’agriculture de l’Etat de Karen (KAWU) de la localité de Kya-Inn, le 29 avril 2006;

    –           le bombardement au mortier et à la grenade du village de Pha par le bataillon d’infanterie légère 308, dépêché par la direction militaire du SPDC qui avait appris que la FTUB et la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK) y étaient en train de préparer une manifestation pour la défense des droits des travailleurs le 30 avril 2006;

    –           l’arrestation, la torture et la condamnation par un tribunal spécial constitué en prison de dix militants de la FTUB à des peines d’emprisonnement allant de trois à vingt-cinq ans, pour avoir utilisé des téléphones cellulaires pour transmettre des informations depuis le Myanmar à la FTUB, laquelle les a ensuite relayées à l’OIT et au mouvement syndical international.

    La commission note que le gouvernement réitère dans son rapport que les six personnes, incluant Thurein Aung, arrêtées pour avoir, selon leurs dires, participé aux manifestations du 1er mai, n’étaient pas des travailleurs. Le gouvernement ajoute qu’aucun travailleur n’a été sanctionné pour avoir exercé des activités syndicales; que les travailleurs ont le droit de demander le respect de leurs droits, individuellement ou collectivement; qu’ils sont des milliers à le faire chaque année et qu’aucun travailleur n’a commis d’acte quel qu’il soit en ce qui concerne les manifestations du 1er mai. La commission note en outre que, au cours de la séance de la Commission de la Conférence, le représentant gouvernemental a réitéré que le ministère des Affaires intérieures a déclaré que la FTUB est une organisation terroriste et qu’elle ne saurait donc être reconnue comme une organisation légitime de travailleurs.

    La commission note que la Commission de la Conférence a observé avec une extrême préoccupation que, en dépit de nombreux appels à leur libération, un grand nombre de personnes sont toujours en prison pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression et d’association, et qu’elle a prié instamment le gouvernement de mettre immédiatement un terme à la pratique consistant à persécuter les travailleurs ou d’autres personnes pour avoir eu des contacts avec des organisations de travailleurs, y compris des organisations en exil, et à faire en sorte d’assurer la libération immédiate de Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyanw Win et Myo Min, ainsi que de toutes les autres personnes emprisonnées pour avoir exercé leurs libertés publiques fondamentales et leurs droits d’association.

    La commission ne peut que déplorer que le gouvernement n’ait fourni, dans son rapport, aucune information sur la situation des nombreuses personnes susvisées et ne fournit pas non plus le moindre élément qui montrerait que des mesures ont été prises pour faire suite à ses demandes précédentes, notamment quant à la nécessité de la conduite d’investigations indépendantes sur ces questions. Une fois de plus, la commission regrette profondément que les informations fournies soient si minimes, par contraste flagrant avec l’extrême gravité des questions soulevées par la CSI.

    La commission rappelle que le respect du droit à la vie et aux autres libertés publiques est une condition préalable fondamentale à l’exercice des droits prévus dans la convention, et que les travailleurs et les employeurs devraient être en mesure d’exercer leurs droits syndicaux dans un climat de complète liberté et sécurité, à l’abri de la violence et des menaces. Par ailleurs, en ce qui concerne les cas signalés de torture, de cruauté et de mauvais traitements, la commission souligne à nouveau que les syndicalistes, tout comme les autres individus, doivent bénéficier des garanties prévues dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que les gouvernements devraient donner les instructions nécessaires pour veiller à ce qu’aucun détenu ne soit victime de tels traitements (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 30).

    Enfin, la commission rappelle à nouveau que, s’il est vrai que les syndicalistes doivent, conformément à l’article 8 de la convention, respecter la législation nationale, «la législation ne devra pas porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la présente convention». Les pouvoirs publics ne devraient pas intervenir dans les activités légitimes des syndicats par des arrestations ou des détentions arbitraires, et les syndicalistes ne devraient pas être harcelés à raison de leur affiliation ou de leurs activités syndicales en usant d’allégations de conduite criminelle à leur égard.

    En conséquence, la commission déplore profondément à nouveau les faits graves allégués de meurtres, d’arrestations, de détention, de tortures et de condamnation à de longues peines d’emprisonnement frappant des syndicalistes à raison de l’exercice normal d’activités syndicales. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises et les instructions données afin d’assurer le respect des libertés publiques fondamentales à l’égard des travailleurs syndiqués et des dirigeants syndicaux, de prendre toutes les dispositions nécessaires pour la libération immédiate de Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyanw Win, Myo Min et toutes les autres personnes emprisonnées en raison d’activités syndicales, et de veiller à ce qu’aucun travailleur ne soit plus sanctionné pour l’exercice de telles activités, en particulier pour avoir des contacts avec des organisations de travailleurs de leur propre choix.

    Par ailleurs, tout en rappelant que le droit des travailleurs et des employeurs de constituer librement des organisations de leur choix et de s’y affilier ne peut exister sans qu’une telle liberté ne soit établie et reconnue dans la législation et la pratique, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement d’indiquer toutes les mesures prises, et notamment les instructions établies, pour assurer le fonctionnement libre de toute forme d’organisation de représentation collective de travailleurs, librement choisie par eux pour défendre et promouvoir leurs intérêts économiques et sociaux, y compris les organisations qui fonctionnent en exil.

    Cadre législatif. Dans ses précédents commentaires, la commission rappelait les questions qu’elle soulève depuis des années à propos du cadre législatif, notamment à propos de l’interdiction des syndicats et de l’absence de tout fondement légal de la liberté d’association au Myanmar (législation antisyndicale répressive; obscurité du cadre législatif, ordonnances et décret de l’Armée instaurant des restrictions supplémentaires de la liberté d’association; système du syndicat unique instauré par la loi de 1964 et cadre constitutionnel obscur); l’obligation pour la FTUB d’opérer dans la clandestinité, étant accusée de terrorisme; création de «comités de travailleurs» par les pouvoirs publics; répression singulière frappant les gens de mer, y compris à l’étranger, et déni de leur droit d’être représentés par le Syndicat des gens de mer de Birmanie (SUB) affilié à la FTUB et à la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF).

    La commission rappelle par ailleurs que, depuis plusieurs années, elle constate l’existence de dispositions de la législation qui contiennent d’importantes restrictions à la liberté syndicale ou des dispositions qui, bien que n’étant pas directement dirigées contre la liberté syndicale, peuvent être appliquées d’une manière qui en altère gravement l’exercice. Il s’agit tout particulièrement de: i) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988 qui prévoit que «la demande de constitution d’une organisation doit être présentée pour autorisation au ministère de l’Intérieur et des Affaires religieuses (art. 3(a)) et précise que toute personne reconnue coupable d’appartenir à des organisations non autorisées ou d’aider ou d’encourager de telles organisations ou d’agir sous le couvert de ces organisations sera punie de l’emprisonnement pour une durée maximale de trois ans (art. 7); ii) l’ordonnance no 2/88 qui interdit les réunions, des marches ou la participation à des manifestations qui regroupent cinq personnes ou plus, indépendamment du fait qu’une telle réunion ou participation ait pour objectif de provoquer des troubles ou de commettre des crimes; iii) la loi de 1908 sur les associations illégales qui prévoit que quiconque est membre d’une association illégale prend part aux réunions d’une telle association, participe financièrement aux objectifs d’une telle association ou reçoit ou sollicite une telle participation, ou aide de quelque manière que ce soit au fonctionnement d’une telle association, sera passible de l’emprisonnement pour une période comprise entre deux et trois ans et d’une amende (art. 17.1); iv) la loi de 1926 sur les syndicats qui prévoit que 50 pour cent des travailleurs d’un site donné doivent appartenir au syndicat pour que celui-ci soit légalement reconnu; v) la loi de 1964 qui définit les droits fondamentaux et les responsabilités des travailleurs qui instaure un système obligatoire d’organisation et de représentation des travailleurs et impose un système d’unicité syndicale; vi) la loi de 1929 sur les conflits de travail qui établit de nombreuses restrictions au droit de grève et habilite le Président à déférer les conflits de travail à des tribunaux d’investigation ou à des tribunaux du travail. Enfin, la commission rappelle son observation antérieure dans laquelle elle avait relevé qu’il n’existe actuellement aucune base légale pour le respect et la concrétisation de la liberté syndicale au Myanmar et que la clause dérogatoire de caractère très général inscrite à l’article 354 de la Constitution subordonne l’exercice de ce droit «aux lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté du droit et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société ou l’ordre public et la moralité».

    La commission note que, devant la Commission de la Conférence, en juin 2010, le représentant gouvernemental a souligné que, conformément à la feuille de route, le Myanmar s’est engagé à poursuivre sa transformation en une société démocratique, que la liberté d’association ainsi que les autres libertés publiques fondamentales prévues par la nouvelle Constitution seront inscrites dans le cadre dans lequel la nouvelle législation sur les syndicats sera développée et, par ailleurs, que nul n’a été ou n’est arrêté pour l’exercice implicite ou explicite de droits dérivés de la convention. La commission note que la Commission de la Conférence, rappelant les divergences profondes et anciennes entre la législation nationale et la pratique, d’une part, et la convention, d’autre part, et observant que le gouvernement a lui-même admis qu’il ne saurait y avoir de syndicats légaux dans le pays, pour l’heure, a demandé instamment dans les termes les plus fermes que le gouvernement adopte immédiatement les mesures nécessaires pour assurer que tous les travailleurs et tous les employeurs jouissent des droits prévus par la convention et qu’il abroge les ordonnances nos 2/88 et 6/88 ainsi que la loi sur les associations illégales. La Commission de la Conférence a en outre souligné qu’il serait crucial que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour instaurer un climat dans lequel travailleurs et employeurs pourraient exercer immédiatement leurs droits d’association, sans crainte et loin de toute intimidation, menace ou violence.

    La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que le processus d’élaboration de la législation sur les organisations de travailleurs se fondera sur trois piliers: la nouvelle Constitution, une assistance et des conseils continus de la part de l’OIT et la convention. Elle note que le gouvernement indique que le Pyidaungsu Hluttaw (c’est-à-dire l’Assemblée/Parlement de l’Union) prendra les mesures nécessaires, après les élections de 2010, pour abroger les ordonnances nos 2/8/8 et 6/88, la loi sur les associations illégales ainsi que la déclaration no 1/2006. Le rapport du gouvernement ajoute que le premier projet de législation sur les syndicats fut terminé en mai 2010 et qu’il consiste en 15 chapitres portant, entre autres, sur des questions liées à l’organisation, les devoirs, les droits, la collecte de fonds et les dépenses. Le gouvernement indique par ailleurs que ce premier projet a été soumis au Procureur général pour avis juridique; que le gouvernement pense demander l’assistance technique du Bureau à ce propos et que la fédération des chambres de commerce et d’industrie de l’Union du Myanmar (UMFCCI) ainsi que les organisations de travailleurs seront consultés et leurs avis seront pris en considération pour améliorer cet instrument. La commission prie le gouvernement de transmettre copie du projet de législation auquel il se réfère et invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du Bureau.

    Dans ces circonstances, notant que les élections générales prévues ont eu lieu le 7 novembre 2010, la commission prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour que le Pyidaungsu Hluttaw procède immédiatement, dès qu’il aura été constitué, à l’abrogation des ordonnances nos 2/88 et 6/88, de la loi sur les associations illégales et de la déclaration no 1/2006, de sorte que ces instruments ne puissent plus être appliqués d’une manière qui porte atteinte aux droits des organisations de travailleurs et d’employeurs. Elle prie également le gouvernement de veiller à ce que les mesures nécessaires soient prises sans délai pour l’élaboration d’une loi sur les syndicats qui garantisse pleinement le droit des travailleurs de créer les organisations de leur choix et de s’affilier à de telles organisations, sans autorisation préalable, et de lui faire parvenir copie de ladite loi, une fois adoptée.

    La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de fournir un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises, avec la participation pleine et authentique des travailleurs et employeurs de tous les secteurs de la société, sans considération de leurs opinions politiques, pour adopter une législation qui garantisse à tous les travailleurs et à tous les employeurs le droit de constituer les organisations de leur choix et, au surplus, le droit de ces organisations de mener leurs activités et formuler leurs programmes, de s’affilier à des fédérations, confédérations et organisations internationales de leur choix, sans intervention des autorités publiques. Elle prie le gouvernement de communiquer tout projet de loi, ordonnance ou instruction à cet égard afin de pouvoir en examiner la conformité par rapport aux dispositions de la convention.

    Enfin, la commission encourage le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.

    Prolongation du mandat de l’OIT. La commission note que la Commission de la Conférence, rappelant ses conclusions précédentes selon lesquelles la persistance du travail forcé ne saurait être dissociée de la situation d’absence totale de liberté d’association et de persécution systématique de ceux qui tentent de s’organiser, a réitéré la demande faite précédemment au gouvernement d’accepter une prolongation de la présence de l’OIT pour couvrir les questions touchant à la convention. Rappelant que le gouvernement a indiqué dans ses précédents rapports qu’une prolongation de la présence de l’OIT pour couvrir les questions touchant à la convention était à l’examen, la commission exprime à nouveau le ferme espoir que le gouvernement sera en mesure d’accepter une telle prolongation dans un très proche avenir, et elle le prie de lui fournir des informations à cet égard.

    Observation (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

    La commission prend note des discussions au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2009. Elle prend note aussi des conclusions et recommandations auxquelles le Comité de la liberté syndicale est parvenu dans les cas nos 2268 et 2591 (354e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 305e session, juin 2009, paragr. 154 à 168), et des observations présentées par la Confédération syndicale internationale (CSI), dans une communication en date du 26 août 2009, qui se réfère à des questions graves dont avait pris note la commission dans ses commentaires antérieurs.

    La commission rappelle la référence antérieure de la CSI à l’arrestation, à l’interrogatoire par la manière forte et à la condamnation à de longues peines de prison de six travailleurs (Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min). Les six travailleurs ont été condamnés le 7 septembre 2007 à vingt ans de prison pour sédition et d’autres chefs d’inculpation, et Thurein Aung, Wai Lin, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min ont été condamnés à cinq ans de prison de plus pour liens avec la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) sur la base de l’article 17(1) de la loi sur les associations illégales et trois ans de plus pour franchissement illégal de la frontière, ce qui porte leurs condamnations à 28 ans de prison au total. La commission note, d’après les observations de 2009 de la CSI, que les six travailleurs en question ont fait appel de leurs condamnations devant le tribunal supérieur (divisional court), qui a rejeté leur appel; ils ont ensuite recouru devant la Cour suprême qui a examiné les cas le 4 avril 2008 et a maintenu les décisions de justice initiales.

    La commission rappelle les allégations antérieures concernant le dirigeant du Syndicat des chemins de fer, U Tin Hla. Selon la CSI, U Tin Hla a été arrêté avec toute sa famille le 20 novembre 2007 et, si les membres de sa famille ont été remis en liberté par la suite, lui-même a été condamné à sept ans de prison sur le fondement de l’article 19(a) du Code pénal pour possession d’explosifs, lesquels n’étaient en fait que du fil électrique et des outils dans une boîte à outils. La CSI avait indiqué que son crime résidait manifestement dans les efforts qu’il avait déployés pour syndiquer les travailleurs des chemins de fer et d’autres secteurs pour soutenir le mouvement de protestation populaire lancé par les moines bouddhistes et la population à la fin du mois de septembre 2007. Dans ses commentaires de 2009, la CSI ajoute que U Tin Hla est toujours en prison, et qu’il souffre de tuberculose et de diabète.

    En ce qui concerne Su Su Nway qui aurait été arrêtée en raison de ses actes de soutien de la participation des travailleurs au soulèvement de septembre 2007, la commission note que, dans ses observations de 2009, la CSI déclare qu’en novembre 2008 Su Su Nway a été condamnée pour avoir incité un groupe de personnes à perturber la tranquillité de l’Etat et à entraver le travail des fonctionnaires, et pour avoir publié des communications qui portent atteinte aux relations du Myanmar avec d’autres nations. Elle a été condamnée à douze ans et six mois de prison. La CSI indique aussi qu’à la fin de 2008 trois travailleurs – Khin Maung Cho (aka. Pho Toke), Nyo Win et Kan Myint – employés dans l’usine de savon A21 dans la zone industrielle de Hlaing Thayar ont été condamnés à de longues peines de prison pour implication avec des groupes exilés, sédition et d’autres charges. Khin Maung Cho a été condamné à dix-neuf ans de prison, Kan Myint à dix ans et Nyo Win à cinq ans.

    La commission rappelle que la CSI avait précédemment signalé de nombreuses autres violations graves de la convention et notamment:

    –           l’emprisonnement de Myo Aung Thant, membre du Syndicat de l’industrie pétrochimique de Birmanie, emprisonné aujourd’hui depuis plus de douze ans après avoir été condamné pour haute trahison pour avoir entretenu des contacts avec la FTUB (sur la base de l’article 122(1) du Code pénal);

    –           le meurtre de Saw Mya Than, membre de la FTUB et dirigeant du Syndicat des travailleurs de l’enseignement Kawthoolei (KEWU), qui aurait été tué par l’armée en représailles d’un acte d’insurrection; le Comité de la liberté syndicale avait demandé au gouvernement, dans le cadre du cas no 2268, de diligenter une enquête indépendante sur la mort de Saw Mya Than;

    –           la disparition, le 22 septembre 2007, de Lay Lay Mon, militante syndicale qui avait été prisonnière politique et qui a aidé les travailleurs à s’organiser pour soutenir les manifestations déclenchées par des moines et des citoyens lors des soulèvements de Yangoon. On pense que l’intéressée serait incarcérée dans la prison d’Insein, mais on ne sait pas si et quand elle devrait être jugée;

    –           la disparition de la militante syndicale Myint Soe, la dernière semaine du mois de septembre 2007, après s’être engagée activement aux côtés de travailleurs pour renforcer leur implication dans le soulèvement du mois de septembre;

    –           l’arrestation par les autorités militaires, les 8 et 9 août 2006, de sept membres de la famille du militant de la FTUB Thein Win à leur domicile, dans le quartier Kyun Tharyar de la ville de Pegu. En garde à vue, plusieurs membres masculins de cette famille ont été torturés au cours de leur interrogatoire. Les 3 et 4 septembre 2006, les autorités ont relâché quatre de ces personnes. Cependant, trois des enfants de Thein Win (Tin Oo, Kyi Thein et Chaw Su Hlaing) ont été condamnés à 18 ans de prison, sur la base de l’article 17(1) et (2) de la loi sur les associations illégales. Tin Oo aurait subi, au cours de sa détention, de graves tortures à l’origine de troubles mentaux et l’on craindrait pour sa santé;

    –           l’arrestation en mars 2006 de cinq militants syndicaux ou militants pour la démocratie clandestine, recherchés pour diverses infractions liées aux efforts déployés par les intéressés pour fournir des informations à la FTUB et à d’autres organisations considérées comme illégales par le régime et aussi pour avoir organisé des manifestations pacifiques contre le SPDC. Ces cinq personnes ont été condamnées à de longues peines de prison et quatre d’entre elles purgent leur peine dans la prison d’Insein (U Aung Thein, 76 ans, condamné à 20 ans; Khin Maung Win, condamné à 17 ans; Ma Khin Mar Soe, condamné à 17 ans; Ma Thein Thein Aye, condamné à 11 ans; U Aung Moe, âgé de 78 ans, condamné à 20 ans);

    –           des actes d’intimidation commis par l’armée à l’égard de 934 ouvriers de l’établissement Hae Wae Garment, dans la localité d’Okkapala sud, dans l’agglomération de Yangoon, qui avaient déclenché une grève le 2 mai 2006 pour réclamer de meilleures conditions de travail. Les 48 travailleurs admis à rencontrer les autorités ont été contraints de signer une déclaration écrite disant qu’il n’y avait aucun problème dans l’usine;

    –           l’arrestation et la condamnation à une peine de quatre ans de prison assortie de travaux forcés de Naw Bey Bey, militante du Syndicat des travailleurs de la santé de l’Etat de Karen (KHWU) qui serait détenue à Toungoo;

    –           l’arrestation, la torture et le meurtre par une unité du bataillon d’infanterie 83 de Saw Thoo Di, également connu sous le nom de Saw Ther Paw, membre du comité du Syndicat des travailleurs de l’agriculture de l’Etat de Karen (KAWU) de la localité de Kya-Inn, le 29 avril 2006;

    –           le bombardement au mortier et à la grenade du village de Pha par le bataillon d’infanterie légère 308, dépêché par la direction militaire du SPDC qui avait appris que la FTUB et la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK) y étaient en train de préparer une manifestation pour la défense des droits des travailleurs le 30 avril 2006;

    –           l’arrestation, la torture et la condamnation par un tribunal spécial constitué en prison de dix militants de la FTUB à des peines d’emprisonnement allant de trois à vingt-cinq ans, pour avoir utilisé des téléphones cellulaires pour transmettre des informations depuis le Myanmar à la FTUB, laquelle les a ensuite relayées à l’OIT et au mouvement syndical international.

    En ce qui concerne les six travailleurs qui auraient été arrêtés pour participation aux cérémonies du 1er mai 2007, la commission note que la déclaration du représentant du gouvernement à la Commission de la Conférence réitère l’indication antérieure du gouvernement selon laquelle ces personnes n’ont pas été arrêtées pour participation aux cérémonies du 1er mai, mais pour violation de la législation en vigueur et leur implication dans des activités illégales et des tentatives d’actes terroristes dans le pays; qu’il y aurait des preuves solides que ces personnes ont reçu des instructions, une formation et une aide financière de la FTUB, un groupe terroriste en exil et une association illégale qui dirige les attentats à la bombe et les actes terroristes pour provoquer des troubles dans le pays. Le représentant du gouvernement ajoute que toute demande de les libérer immédiatement représenterait une violation de la souveraineté nationale et serait contraire aux principes de base du droit public international et à l’article 8 de la convention qui prévoit que la loi du pays devrait être respectée.

    En ce qui concerne U Tin Hla, la commission note que la déclaration du représentant du gouvernement à la Commission de la Conférence réitère l’indication antérieure du gouvernement selon laquelle U Tin Hla n’était ni un dirigeant syndical ni un syndicaliste, mais qu’il avait travaillé comme surveillant dans les chemins de fer du Myanmar, qui ne possèdent pas de syndicat. Il avait été arrêté par la police pendant qu’il perpétrait le crime de détention de munitions et avait été par la suite accusé et condamné. Pour ce qui est des autres allégations de la CSI au sujet de meurtre, de détention, de torture, d’arrestation et de condamnation de syndicalistes, le gouvernement déclare que les personnes mentionnées n’ont pas été arrêtées et condamnées pour avoir participé à des activités syndicales, mais pour avoir incité à la haine et au mépris à l’égard du gouvernement.

    La commission ne peut que déplorer que le gouvernement se contente en grande partie dans son rapport de réitérer ses observations antérieures – qualifiant la FTUB d’organisation terroriste et indiquant de manière péremptoire que les nombreuses personnes signalées ont été condamnées pour violation de la législation en vigueur et pour incitation à la haine à l’égard du gouvernement – en ne fournissant aucune preuve des mesures prises pour appliquer les demandes antérieures de la commission. La commission regrette à nouveau profondément le ton arrogant du gouvernement dans sa réponse et le manque d’informations fournies, ce qui contraste sévèrement avec l’extrême gravité des questions soulevées par la CSI. La commission condamne à nouveau fortement les opinions exprimées par le gouvernement, selon lesquelles les commentaires formulés par les organisations de travailleurs au titre de l’article 23 de la Constitution de l’OIT et des recommandations des organes de contrôle de l’OIT pour remédier aux violations des droits fondamentaux des travailleurs, constituent une ingérence dans les affaires internes, en soulignant à ce propos que le fait pour un Etat d’être Membre de l’OIT entraîne pour lui l’obligation de respecter dans la législation nationale les principes de la liberté syndicale et les conventions que l’Etat a librement ratifiées, dont la convention no 87.

    La commission souligne à nouveau que le respect du droit à la vie et aux autres libertés civiles est une condition préalable fondamentale à l’exercice des droits prévus dans la convention et que les travailleurs et les employeurs devraient être en mesure d’exercer leurs droits syndicaux dans un climat de complète liberté et sécurité, à l’abri de la violence et des menaces. Par ailleurs, en ce qui concerne les cas signalés de torture, de cruauté et de mauvais traitements, la commission souligne à nouveau que les syndicalistes, tout comme les autres individus, doivent bénéficier des garanties prévues dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que les gouvernements devraient donner les instructions nécessaires pour veiller à ce qu’aucun détenu ne soit victime de tels traitements (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 30).

    Enfin, tout en rappelant qu’il n’existe pas actuellement de base légale pour le respect et la concrétisation de la liberté syndicale au Myanmar, la commission rappelle à nouveau qu’il est vrai que les syndicalistes doivent, conformément à l’article 8 de la convention, respecter la législation nationale, mais «la législation ne devra pas porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la présente convention». Les pouvoirs publics ne devraient pas s’ingérer dans les activités légitimes des syndicats par l’intermédiaire d’arrestations ou de détentions arbitraires et les allégations de conduite criminelle ne devraient pas être utilisées pour harceler les syndicalistes en raison de leur affiliation ou de leurs activités syndicales.

    La commission déplore donc à nouveau fortement les allégations sérieuses de meurtre, d’arrestation, de détention, de torture et de condamnation à de longues périodes d’emprisonnement de syndicalistes pour exercice normal d’activités syndicales, y compris tout simplement pour avoir communiqué des informations à la FTUB ou participé aux manifestations du 1er mai. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de fournir des informations sur les mesures adoptées et les instructions établies, sans délai, de manière à assurer le respect des libertés civiles fondamentales des syndicalistes et des dirigeants syndicaux et de prendre toutes les mesures nécessaires pour libérer immédiatement Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win, Myo Min et toutes les autres personnes qui ont été emprisonnées pour exercice d’activités syndicales et pour veiller à ce qu’aucun travailleur ne soit sanctionné pour l’exercice de telles activités, en particulier pour avoir eu des contacts avec des organisations de travailleurs de leur choix. Par ailleurs, tout en rappelant que le droit des travailleurs et des employeurs de constituer librement des organisations de leur choix et s’y affilier ne peut exister sans qu’une telle liberté ne soit établie et reconnue dans la législation et la pratique, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement d’indiquer toutes les mesures prises, et notamment les instructions établies, pour assurer le fonctionnement libre de toute forme d’organisation de représentation collective de travailleurs, librement choisie par eux pour défendre et promouvoir leurs intérêts économiques et sociaux, y compris les organisations qui fonctionnent en exil.

    La commission rappelle les questions qu’elle soulève depuis de nombreuses années au sujet du cadre législatif et notamment de l’interdiction des syndicats et de l’absence de toute base légale à la liberté syndicale au Myanmar (législation de répression à l’égard des syndicats, cadre législatif obscur, ordres militaires et décrets limitant encore davantage la liberté syndicale, système d’unicité syndicale établi dans la loi de 1964 et cadre constitutionnel imprécis); la FTUB forcée de travailler dans la clandestinité et accusée de terrorisme; «des comités de travailleurs» organisés par les pouvoirs publics; et la répression des marins même à l’étranger et le déni de leur droit d’être représentés par le Syndicat des gens de mer de Birmanie (SUB), affilié à la FTUB et à la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF).

    La commission rappelle par ailleurs que, depuis plusieurs années, elle constate l’existence de dispositions de la législation qui contiennent d’importantes restrictions à la liberté syndicale ou des dispositions qui, bien que n’étant pas directement dirigées contre la liberté syndicale, peuvent être appliquées d’une manière qui en altère gravement l’exercice. Il s’agit tout particulièrement de: i) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988 qui prévoit que «la demande de constitution d’une organisation doit être présentée pour autorisation au ministère de l’Intérieur et des Affaires religieuses (art. 3(a)) et précise que toute personne reconnue coupable d’appartenir à des organisations non autorisées ou d’aider ou d’encourager de telles organisations ou d’agir sous le couvert de ces organisations sera punie de l’emprisonnement pour une durée maximale de trois ans (art. 7); ii) l’ordonnance no 2/88 qui interdit les réunions, des marches ou la participation à des manifestations qui regroupent cinq personnes ou plus, indépendamment du fait qu’une telle réunion ou participation ait pour objectif de provoquer des troubles ou de commettre des crimes; iii) la loi de 1908 sur les associations illégales qui prévoit que quiconque est membre d’une association illégale prend part aux réunions d’une telle association, participe financièrement aux objectifs d’une telle association ou reçoit ou sollicite une telle participation, ou aide de quelque manière que ce soit au fonctionnement d’une telle association, sera passible de l’emprisonnement pour une période comprise entre deux et trois ans et d’une amende (art. 17.1); iv) la loi de 1926 sur les syndicats qui prévoit que 50 pour cent des travailleurs d’un site donné doivent appartenir au syndicat pour que celui-ci soit légalement reconnu; v) la loi de 1964 qui définit les droits fondamentaux et les responsabilités des travailleurs qui instaure un système obligatoire d’organisation et de représentation des travailleurs et impose un système d’unicité syndicale; vi) la loi de 1929 sur les conflits de travail qui établit de nombreuses restrictions au droit de grève et habilite le Président à déférer les conflits de travail à des tribunaux d’investigation ou à des tribunaux du travail.

    Tout en rappelant qu’elle avait déjà demandé un rapport détaillé sur les mesures prises pour traiter les questions législatives susmentionnées, la commission note avec un profond regret que le gouvernement se limite à répéter les informations précédemment communiquées au sujet de l’adoption de la Constitution et des réformes législatives à venir. Le gouvernement réitère que plusieurs articles de la Constitution donneront effet aux dispositions de la convention (paragr. 96 du chapitre IV, paragr. 353, 354 et 355 du chapitre VIII et tableau 1, liste législative sur les syndicats dans le chapitre XV) et répète que, une fois que la Constitution entrera en vigueur, les dispositions de la législation nationale seront modifiées en conséquence et de nouvelles lois élaborées, notamment la loi sur les syndicats, et ce conformément à la convention no 87. En ce qui concerne la législation, la commission note par ailleurs, selon le gouvernement, que la FTUB a été déclarée organisation terroriste par le ministère de l’Intérieur dans la déclaration no 1/2006, et a été également considérée comme association illégale aux termes de la loi de 1908 sur les associations illégales.

    En ce qui concerne les indications du gouvernement, la commission note par ailleurs que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence, désirant souligner les liens intrinsèques entre la liberté syndicale et la démocratie, a constaté avec regret que le gouvernement s’est engagé dans celle-ci sans assurer les conditions de base préalables à la première. La Commission de la Conférence appelle aussi le gouvernement à prendre des mesures concrètes, et ce de toute urgence, en assurant pleinement et véritablement la participation de tous les secteurs de la société, quelles que soient leurs opinions politiques, pour veiller à ce que la Constitution, la législation et la pratique soient pleinement conformes à la convention.

    Enfin, la commission rappelle son observation antérieure dans laquelle elle avait relevé qu’il n’existe actuellement aucune base légale pour le respect et la concrétisation de la liberté syndicale au Myanmar et que la clause dérogatoire de caractère très général inscrite à l’article 354 de la Constitution subordonne l’exercice de ce droit «aux lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté du droit et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société ou l’ordre public et la moralité». La commission avait noté avec un profond regret que le libellé de cet article 354 de la Constitution risque de perpétuer les violations continues de la liberté d’association en droit et dans la pratique. Rappelant les questions particulièrement graves et urgentes qu’elle soulève depuis maintenant près de vingt ans, la commission déplore cette carence persistante à prendre quelque mesure que ce soit pour remédier à cette situation législative qui constitue un manquement grave et persistant du gouvernement aux obligations que fait peser à son égard la ratification volontaire de cette convention. De plus, la commission note avec un profond regret, une fois encore, l’exclusion des partenaires sociaux et de la société civile dans son ensemble de toutes consultations dignes de ce nom, consultations qui seraient pourtant indispensables à la mise en place d’un cadre législatif répondant aux questions particulièrement graves et urgentes soulevées à propos de l’application de la convention.

    En conséquence, la commission prie instamment une fois de plus le gouvernement de communiquer sans délai un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises en assurant pleinement et véritablement la participation de tous les secteurs de la société, quelles que soient leurs opinions politiques, pour adopter une législation garantissant à tous les travailleurs et employeurs le droit de constituer des organisations de leur choix et celui de s’affilier à ces organisations, ainsi que le droit de ces organisations d’exercer leurs activités et de formuler leurs programmes d’action, de même que de s’affilier à des fédérations, confédérations et organisations internationales de leur choix, sans intervention de la part des autorités publiques. En outre, elle demande dans les termes les plus fermes que le gouvernement abroge immédiatement les ordonnances nos 2/88 et 6/88, la loi sur les associations illégales et la déclaration no 1/2006 du ministère de l’Intérieur, afin que ces instruments ne puissent être appliqués d’une manière qui porte atteinte aux droits des organisations de travailleurs et d’employeurs. La commission prie à nouveau le gouvernement de faire état de toutes mesures prises en vue de l’adoption de tous projets de loi, ordonnances ou instructions qui garantissent la liberté syndicale, afin qu’elle puisse en examiner la conformité par rapport aux dispositions de la convention.

    La commission note que la Commission de la Conférence, tout en rappelant sa conclusion antérieure au sujet du fait que la persistance du travail forcé ne peut être dissociée de la situation qui prévaut dans le pays et qui se caractérise par l’absence complète de liberté syndicale et la persécution systématique des personnes qui tentent de s’organiser, appelle le gouvernement à accepter une extension de la présence de l’OIT dans le pays pour couvrir les questions relatives à la convention no 87. Tout en notant, d’après l’indication du gouvernement dans son rapport, qu’une extension de la présence de l’OIT pour couvrir les questions relatives à la convention est à l’examen, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement sera en mesure d’accepter dans un très proche avenir une telle extension.

    Observation (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

    La commission prend note des conclusions et recommandations auxquelles le Comité de la liberté syndicale est parvenu dans les cas nos 2268 et 2591 (351e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 303e session, novembre 2008, paragr. 1016-1050; 349e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 301e session, paragr. 1062-1093). Elle prend également note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) en date du 29 août 2008, qui portent sur des questions graves qui se sont posées dans le courant de 2007 ainsi que ses observations antérieures qui portaient sur des problèmes très graves qui se sont posés en 2005-06, et de la réponse du gouvernement sur certains de ces problèmes.

    1. En réponse aux commentaires de la CSI relatifs à la répression violente organisée par le gouvernement en septembre 2007 à l’encontre des manifestations de protestation contre le gouvernement militaire du Conseil d’Etat pour la paix et le développement (SPDC), qui avaient été déclenchées par des moines bouddhistes, soutenus bientôt par des ouvriers, des étudiants et des militants des droits civiques, le gouvernement indique que ces désordres ont fait dix morts et 14 blessés et qu’au total 2 284 personnes ont été mises en cause dans ces troubles à Yangon et 643 à l’extérieur de Yangon. Sur ce total, 2 836 personnes (soit 2 235 à Yangon et 601 hors de Yangon) ont été relâchées et 91 (soit 49 à Yangon et 42 à l’extérieur de Yangon) ont été maintenues en état d’arrestation parce qu’il s’est avéré qu’elles étaient impliquées dans des actes de violence et de terrorisme justifiant que des mesures prévues par la loi soient prises à leur encontre. Le gouvernement ajoute que le SPDC fait tout ce qui est en son pouvoir pour parvenir à instaurer une société pacifique, moderne, disciplinée, florissante et démocratique, soutenant les trois grandes causes nationales. Il fait valoir que la grande majorité de la population a d’ores et déjà adopté la Constitution, la quatrième étape d’une «feuille de route» qui en compte sept sur la conformation du futur Etat. Le 23 septembre 2008, il a fait libérer des prisons 9 002 personnes en raison de leur bonne conduite et de leur discipline et pour des considérations sociales et familiales.

    2. La commission note que la CSI dénonce l’arrestation, l’interrogatoire par la manière forte et la condamnation à de longues peines de prison de six travailleurs (Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min) qui avaient participé aux manifestations du 1er mai 2007 aux abords du Centre américain, à Yangon, et avaient tenté de faire passer vers le monde extérieur, à travers la frontière thaïlandaise, de l’information sur la situation dans le pays. Leurs avocats ont subi un tel harcèlement de la part des autorités qu’ils ont fini par renoncer à les défendre le 4 août. Les six travailleurs ont été condamnés le 7 septembre à vingt ans de prison pour sédition et sur d’autres chefs, et Thurein Aung, Wai Lin, Kyaw Win et Myo Min ont été condamnés à cinq ans de prison de plus pour liens avec la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), sur la base de l’article 17(1) de la loi sur les associations illégales et trois ans de plus pour franchissement illégal de la frontière, ce qui porte leurs condamnations à vingt-huit ans de prison au total. Les six militants ont fait appel. Leur appel a été rejeté, ce qui les a conduits à former recours devant la Cour suprême, recours qui était encore pendant à la fin de l’année.

    La commission note que, selon le gouvernement, la Cour suprême a tenu plusieurs audiences sur cette affaire toujours pendante. Le gouvernement regrette que le Comité de la liberté syndicale ait demandé dans le cas no 2591 (voir ci-après) la libération de ces six militants, cette demande constituant à ses yeux une ingérence dans les affaires internes du pays. Le gouvernement ajoute que: i) l’article 8 de la convention prescrit aux travailleurs et à leurs organisations de respecter la légalité; ii) les six personnes en question n’étaient pas des travailleurs de l’usine ou du lieu de travail considérés; iii) elles ont été arrêtées non pas pour avoir manifesté le jour du 1er mai mais pour avoir incité à la haine ou à l’outrage à l’égard du gouvernement (art. 124(A) du Code pénal), pour être membres d’une association illégale ou avoir eu des contacts avec elle (art. 17(1) de la loi de 1908 sur les associations illégales) et pour être sorties du pays et y être rentrées illégalement (art. 13(1) de la loi de 1947 disposant en matière d’immigration (urgence); iv) la FTUB ne représente aucune force de travail au Myanmar; elle est un groupe terroriste agissant sous le couvert d’une organisation de travailleurs; v) les autorités permettent que les détenus aient la visite de connaissances et de membres de leurs familles; elles ont également autorisé M. Thomás Ojea Quintana, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar à rencontrer Thurein Aung, Kyaw Kyaw et Su Su Ngwe le 5 août 2008. A la demande de Thurein Aung, le gouvernement a pris des dispositions pour que celui-ci bénéficie d’un traitement médico-dentaire; vi) le Rapporteur spécial a également rencontré le ministre du Travail et le Comité des droits de l’homme. S’agissant en particulier de la FTUB, le gouvernement ajoute que: i) après l’adoption de la Constitution, les organisations et associations du Myanmar devront être établies conformément à la législation en vigueur dans le pays et devraient avoir le droit d’agir en justice (locus standi); ii) la FTUB n’est pas représentée où que ce soit parmi les travailleurs du pays; elle a été illégalement constituée hors du pays par des personnes qui se dissimulent et qui fuient la justice; iii) des éléments de preuve solides montrent que la FTUB s’est livrée à des agissements terroristes qui ont été révélés en juin 2004; invoquant la Convention pour la répression du terrorisme et la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, le gouvernement a officiellement déclaré, par effet de la déclaration no 172 006 du 12 avril 2007, que la FTUB était une organisation terroriste.

    La commission prend note à cet égard des conclusions et recommandations auxquelles est parvenu le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2591 (349e rapport, paragr. 1062-1093; et 351e rapport, paragr. 144-150), aux termes desquelles «il est indéniable que les six personnes en question ont été punies pour avoir exercé leur droit fondamental à la liberté d’association et à la liberté d’expression». Elle observe que leur condamnation repose sur des faits tels que la tenue d’une conférence publique sur «les problèmes rencontrés par les travailleurs sur leurs lieux de travail respectifs, qui ont un effet perturbateur pour eux» ou encore tient au fait d’avoir préparé un discours sur «les salaires, les prix disproportionnés des biens et denrées, le droit aux congés et le droit à une pension, et l’absence de réponse du gouvernement sur ces questions», sujets qui ont été considérés par le gouvernement et les tribunaux comme une «diffamation du gouvernement». La commission note également que le Comité de la liberté syndicale a appelé le gouvernement à reconnaître la FTUB en tant qu’organisation syndicale légitime et à permettre le libre fonctionnement de toute forme d’organisation de la représentation collective des travailleurs, notamment la légalisation de la FTUB (349e rapport, paragr. 1083, 1089, 1092; 351e rapport, paragr. 1038). S’agissant du recours formé par ces travailleurs devant la Cour suprême, le Comité de la liberté syndicale se déclare profondément préoccupé par «les indications contenues dans le jugement [de première instance] selon lesquelles le tribunal a explicitement ordonné la destruction de presque tous les éléments de preuve qui lui ont été soumis (affaire no 82), rendant ainsi pratiquement impossible toute révision de l’affaire par une instance supérieure» (349e rapport, paragr. 1088). Par suite, le Comité de la liberté syndicale a demandé la libération immédiate des six activistes nommés – Thurein Aung, Wai Lin, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Kyaw, Kyaw Win et Myo Min.

    3. La commission note que la CSI évoque la situation de Myo Aung Thant, membre du Syndicat de l’industrie pétrochimique de Birmanie, emprisonné aujourd’hui depuis plus de onze ans après avoir été condamné pour haute trahison (sur la base de l’article 122(1) du Code pénal) pour avoir entretenu des contacts avec la FTUB. La commission note que, d’après le gouvernement, Myo Aung Thant est toujours en prison pour avoir enfreint les lois de son pays, que sa remise en liberté est impossible et que la CSI ne devrait pas s’ingérer dans les affaires judiciaires internes d’un Etat Membre de l’OIT. La commission note à cet égard que, dans les conclusions et recommandations auxquelles il est parvenu dans le cas no 2268 (351e rapport, paragr. 1016-1050), le Comité de la liberté syndicale déplore le refus du gouvernement d’envisager la remise en liberté de Myo Aung Thant et appelle instamment le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer la libération immédiate de prison de l’intéressé.

    4. La commission note que la CSI se réfère au meurtre de Saw Mya Than (membre de la FTUB et dirigeant du Syndicat des travailleurs de l’enseignement Kawthoolei (KEWU)) qui aurait été tué par l’armée en représailles d’un acte d’insurrection. La commission note que, selon le gouvernement, la mort de Saw Mya Than est le résultat d’un accident déclenché par le KNU, une organisation rebelle. La commission note que le Comité de la liberté syndicale a demandé au gouvernement, dans le cadre du cas no 2268, de diligenter une enquête indépendante sur la mort de Saw Mya Than, qui serait menée par un groupe d’experts apparaissant comme impartiaux pour toutes les parties concernées.

    5. La commission note que la CSI se réfère à l’arrestation et la condamnation d’un dirigeant du Syndicat des chemins de fer qui a une longue carrière comme électricien au service de la Myanmar Railway Corporation. U Tin Hla a été arrêté avec toute sa famille le 20 novembre 2007 et, si les membres de sa famille ont été remis en liberté par suite, lui-même a été condamné sur le fondement de l’article 19(1) du Code pénal pour possession d’explosifs, lesquels n’étaient en fait que du fil électrique et des outils dans une boîte à outils. A l’issue d’un court procès, il a été condamné à sept ans de prison. En réalité, son crime résidait manifestement dans les efforts qu’il avait déployés pour syndiquer les travailleurs des chemins de fer et d’autres secteurs pour soutenir le mouvement de protestation populaire lancé par les moines bouddhistes et la population à la fin de mois de septembre 2007. Il avait 60 ans au moment de son arrestation et il y a lieu de craindre pour sa santé en prison. Ses demandes de voir un médecin ont été rejetées.

    La commission note que, selon le gouvernement, la CSI se réfère toujours à un syndicat imaginaire lorsqu’elle formule des allégations à propos de personnes. U Tin Hla n’était pas membre d’un syndicat mais chef d’atelier dans les chemins de fer, où il n’y a pas de syndicat. Le 14 novembre 2007 à 21 h 30, la police de la Division de Yangon a procédé à un contrôle inopiné à son domicile et y a découvert 337 cartouches de carabine 30/30 et 13 cartouches de 9 millimètres. Le tribunal de la ville l’a condamné à sept ans de prison.

    6. La commission note que la CSI fait état de l’arrestation, le 13 novembre à Yangon, de Su Su Nway, une militante qui avait saisi l’OIT d’une plainte pour travail forcé, démarche qui avait abouti à la condamnation de quatre personnalités locales reconnues coupables d’avoir soumis de la main-d’œuvre à un travail forcé. Cette militante a été arrêtée en raison de ses actes de soutien de la participation des travailleurs au soulèvement de septembre. A la fin de l’année, elle se trouvait en détention à la prison d’Insein, en attente d’être jugée sur le chef d’inculpation de sédition. La commission note que, selon le gouvernement, cette affaire n’a pas de lien avec les droits des travailleurs; que sur la plainte no 2469/07 Su Su Nway a été inculpée sur la base des articles 143 et 147 du Code pénal et que l’affaire est actuellement devant un tribunal spécial de la prison d’Insein (procédure criminelle ordinaire no 10/2008).

    7. La commission note que la CSI fait état de:

    –           la disparition, le 22 septembre 2007, de Lay Lay Mon, militante syndicale qui avait été prisonnière politique et qui a aidé les travailleurs à s’organiser pour soutenir les manifestations déclenchées par des moines et des citoyens lors des soulèvements de Yangon. On pense que l’intéressée serait incarcérée dans la prison d’Insein mais, à la fin de l’année, on ne savait pas si elle devait être jugée;

    –           la disparition de la militante syndicale Myint Soe, la dernière semaine du mois de septembre 2007, après s’être engagée activement aux côtés de travailleurs pour renforcer leur implication dans le soulèvement du mois de septembre.

    8. La commission note que la CSI fait état de l’arrestation, par les autorités militaires, les 8 et 9 août 2006, de sept membres de la famille du militant de la FTUB Thein Win à leur domicile, dans le quartier Kyun Tharyar de la ville de Pegu. En garde à vue, plusieurs membres de sexe masculin de cette famille ont été torturés au cours de leur interrogatoire. Les 3 et 4 septembre 2006, les autorités ont relâché quatre de ces personnes. D’après la dernière communication de la CSI, trois des enfants de Thein Win (Tin Oo, Kyi Thein et Chaw Su Hlaing) auraient été condamnés à dix-huit ans de prison, sur la base de l’article 17(1) et (2) de la loi sur les associations illégales. Tin Oo aurait subi au cours de sa détention de graves tortures à l’origine de troubles mentaux et l’on craindrait pour sa santé.

    La commission note que, selon le gouvernement, Thein Win et six autres personnes ont été jugés dans le cadre de la procédure pénale no 1675/06 par le tribunal de Toungoo, Division de Pegu, le 20 septembre 2008. Les prévenus étaient liés à l’explosion d’une bombe à Paenwegone, aux soulèvements ainsi qu’à la participation d’activités terroristes. Le commandement militaire du Sud a procédé aux enquêtes nécessaires et le père, la mère, le frère, la sœur et la belle-sœur ont été relâchés en septembre 2006 et, après avoir regagné leur domicile, ils ont fui le Myanmar le 2 octobre 2006 pour se rendre à Maesauk, en Thaïlande.

    9. La commission note que la CSI se réfère à l’arrestation en mars 2006 de cinq militants syndicaux ou militants pour la démocratie clandestins, recherchés pour diverses infractions liées aux efforts déployés par les intéressés pour fournir des informations à la FTUB et à d’autres organisations considérées comme illégales par le régime et aussi pour avoir organisé des manifestations pacifiques contre le SPDC. Ces cinq personnes ont été condamnées à de longues peines de prison et quatre d’entre elles purgent leur peine dans la prison d’Insein (U Aung Thein, 76 ans, condamné à vingt ans; Khin Maung Win, condamné à dix-sept ans; Ma Khin Mar Soe, condamné à dix-sept ans; Ma Thein Thein Aye, condamné à onze ans; U Aung Moe, âgé de 78 ans, condamné à vingt ans). D’après la communication la plus récente de la CSI, ces personnes sont toujours en prison.

    10. La commission note que la CSI fait état d’actes d’intimidation commis par l’armée à l’égard de 934 ouvriers de l’établissement Hae Wae Garment, dans la localité d’Okkapala Sud, dans l’agglomération de Yangon, qui avaient déclenché une grève le 2 mai 2006 pour obtenir de meilleures conditions de travail. Les quarante-huit travailleurs admis à rencontrer les autorités ont été contraints de signer une déclaration écrite disant qu’il n’y avait aucun problème dans l’usine. Un détachement de 12 à 20 policiers a été régulièrement présent à l’usine depuis le retour des ouvriers au travail.

    11. La commission note que la CSI fait état de:

    –           l’arrestation et la condamnation à une peine de quatre ans de prison assortie de travaux forcés de Nwa Bey Bey, militante du Syndicat des travailleurs de la santé de l’Etat de Karen (KHWU), qui serait détenue à Toungoo;

    –           l’arrestation, la torture et le meurtre par une unité du bataillon d’infanterie 83 de Saw Thoo Di, également connu sous le nom de Saw Ther Paw, membre du comité du Syndicat des travailleurs de l’agriculture de l’Etat de Karen (KAWU) de la localité de Kya-Inn, le 28 avril 2006.

    12. La commission note que la CSI fait état du bombardement au mortier et à la grenade du village de Pha par le bataillon d’infanterie légère 308, dépêché par la Direction militaire du SPDC qui avait appris que la FTUB et la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK) y étaient en train de préparer une manifestation pour la défense des droits des travailleurs le 30 avril 2006.

    13. La commission note que la CSI se réfère à la découverte par le SPDC, début juin 2005, d’un réseau clandestin de dix militants de la FTUB dans le secteur de Pegu qui fournissaient soutien et éducation à des travailleurs et qui entretenaient un réseau de relais de l’information avec des structures de la FTUB à l’étranger. Sept hommes et trois femmes ont été arrêtés. Dans une conférence de presse organisée le 28 août 2005, les dirigeants du SPDC ont accusé ces personnes d’avoir utilisé des téléphones cellulaires pour transmettre des informations depuis le Myanmar à la FTUB, laquelle les a ensuite relayées à l’OIT et au Mouvement syndical international. Les membres de la FTUB arrêtés ont été amenés au Centre d’interrogatoire à Aug Tha Pay, dans le quartier de Mayangone, où ils ont été interrogés et torturés par un service spécial de la police et le Bureau des opérations spéciales (contre-espionnage militaire) pendant les mois de juin et juillet. Le 29 juillet 2005, ils ont été transférés à la prison d’Insein et leur affaire a été déférée à un tribunal spécial, qui tient ses audiences à l’intérieur de la prison. Au cours de ce procès secret, ils n’ont eu accès ni à des conseils ni à des témoins de l’extérieur, et la procédure n’était manifestement pas conforme aux normes internationales reconnues en la matière. Ils ont été jugés coupables et condamnés le 10 octobre 2005. Wai Lin et Win Myint, en tant que principaux dirigeants du réseau, ont été condamnés respectivement à vingt-cinq et dix-huit ans de prison; les autres – cinq hommes et deux femmes (Hla Myint Than, Major Win Myint, Ye Myint, Thein Lwin Oo, Aung Myint Thein, Aye Chan, Kin Kyi) – ont tous été condamnés à sept ans de prison; une employée de banque, Ma Aye Thin Khine, a été condamnée à trois ans de prison. Dans sa plus récente communication, la CSI ajoute qu’à la fin de 2007 tous ces membres de la FTUB se trouvaient encore incarcérés à la prison d’Insein.

    La commission note avec un profond regret que la réponse du gouvernement ne reconnaît pas à l’égard de ces personnes l’un quelconque des droits fondamentaux et des libertés publiques fondamentales qui sont prévus par la convention. La commission regrette le ton récusatoire de la réponse du gouvernement aux observations de la CSI et le caractère laconique des informations qu’il communique en réponse, qui contraste résolument avec l’extrême gravité des questions soulevées par la CSI. Elle condamne fermement les affirmations du gouvernement selon lesquelles les observations formulées par des organisations de travailleurs en application de l’article 23 de la Constitution de l’OIT et les recommandations formulées par les organes de contrôle de l’OIT tendant à ce qu’il soit fait réparation des atteintes aux droits fondamentaux des travailleurs constituent une ingérence dans ses affaires internes. Elle souligne à ce propos que son appartenance en tant qu’Etat à l’Organisation internationale du Travail emporte l’obligation de respecter, dans la législation nationale, les principes de la liberté syndicale ainsi que les conventions librement ratifiées par le pays, parmi lesquelles la convention no 87. La commission souligne que les droits établis par la convention ne peuvent s’exercer sans le respect du droit à la vie et des libertés publiques, et que les travailleurs comme les employeurs doivent être en mesure d’exercer librement leurs droits syndicaux dans un climat d’entière liberté et de sécurité, exempt de toute violence ou menace. De plus, s’agissant des actes de torture, de cruauté et de mauvais traitement signalés, la commission souligne que les syndicalistes, comme tous les autres individus, doivent bénéficier des garanties prévues par la Déclaration universelle des droits de l’homme et par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que les gouvernements doivent donner les instructions nécessaires pour qu’aucun détenu ne fasse l’objet de tels traitements (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 29-30). En outre, notant que plusieurs syndicalistes ont été jugés par des tribunaux spéciaux, siégeant à l’intérieur d’une prison, et qu’un tribunal a ordonné la destruction de preuves, rendant ainsi pratiquement impossible tout appel de son jugement, la commission exprime avec force qu’il doit être dans la politique de tout gouvernement d’assurer le respect des droits de l’homme et notamment celui de tout accusé (ou de tout détenu) de bénéficier d’une procédure équitable, présentant toutes les garanties d’une administration régulière de la justice.

    La commission, notant qu’il n’existe aujourd’hui aucune base légale qui fonde le respect et la concrétisation de la liberté syndicale au Myanmar, rappelle une fois de plus que si, effectivement, les syndicats sont tenus, en vertu de l’article 8 de la convention, de respecter la légalité, ce même article prévoit que «la législation nationale ne devra pas porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la présente convention». Les autorités ne doivent pas invoquer des activités syndicales légitimes comme un prétexte pour arrêter ou placer en détention des syndicalistes et faire peser sur eux des accusations pénales en représailles de leur affiliation ou de leurs activités syndicales. A cet égard, la commission regrette profondément que des activités syndicales normales, telles que des allocutions sur des questions d’ordre économique et social d’intérêt direct pour les travailleurs, la participation à des cérémonies du 1er mai et la simple communication d’informations à la FTUB soient présentées par le gouvernement comme une activité criminelle et réprimées à ce titre par de lourdes peines de prison. La commission souligne que la tenue de meetings et la formulation de revendications de caractère économique et social à l’occasion du 1er mai sont des formes traditionnelles de l’action syndicale, et les syndicats devraient avoir le droit d’organiser librement les assemblées qu’ils veulent pour commémorer le 1er mai. La liberté d’expression, qui devrait être garantie à tous les syndicalistes, devrait également leur être garantie lorsqu’ils entendent critiquer la politique économique et sociale du gouvernement. S’agissant de la condamnation de syndicalistes pour avoir franchi la frontière et des propos du gouvernement selon lesquels la FTUB serait une organisation «étrangère», la commission souligne que, en vertu du principe consacré par la Déclaration universelle des droits de l’homme, toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays, et que l’exil forcé de dirigeants ou de militants syndicaux constitue une atteinte grave aux droits de l’homme et aux droits syndicaux, puisqu’il affaiblit le mouvement syndical dans son entier en le privant de ses dirigeants. Quant à la référence faite par le gouvernement à d’autres conventions afin de justifier ses violations de cette convention fondamentale, la commission souligne qu’un Etat ne peut arguer que ses autres engagements ou accords justifient la non-application de conventions de l’OIT qu’il a ratifiées.

    La commission déplore à nouveau vivement les graves faits de meurtres, d’arrestations, de placements en détention, de tortures et de condamnations à de longues peines de prison subis par des syndicalistes en raison de l’exercice d’activités syndicales ordinaires, et notamment pour le simple fait d’avoir communiqué des informations à la FTUB et d’avoir participé à des commémorations du 1er mai. La commission prie instamment, une fois de plus, le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises et sur les instructions données sans délai pour garantir le respect des libertés civiles fondamentales à l’égard des syndicalistes et dirigeants syndicaux, et de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que les personnes mises en prison en raison de l’exercice d’activités syndicales soient libérées immédiatement, et pour garantir qu’aucun travailleur ne soit sanctionné en raison de l’exercice de telles activités, en particulier pour avoir des contacts avec des organisations de travailleurs de son choix. Rappelant en outre que le droit des travailleurs et des employeurs de constituer librement des organisations de leur choix et celui de s’y affilier ne peut s’exercer que s’il existe une telle liberté et qu’elle est reconnue en droit et dans la pratique, la commission prie instamment le gouvernement d’indiquer toutes les mesures prises, y compris toutes les instructions émises, pour garantir le libre exercice de toute forme d’organisation de la représentation collective des travailleurs, librement choisie par ceux-ci pour la défense et le progrès de leurs intérêts économiques et sociaux, y compris à travers des organisations qui fonctionnent aujourd’hui en exil.

    En ce qui concerne le cadre législatif (articles 2, 3, 5 et 6 de la convention), la commission prend note des observations de la CSI portant sur des problèmes que la commission soulève depuis des années: interdiction des syndicats et absence de toute base légale de la liberté d’association au Myanmar (législation antisyndicale et répressive, cadre législatif obscur, existence d’ordonnances et de décrets militaires restreignant de manière supplémentaire la liberté syndicale, pérennisation du système du syndicat unique instauré avec la loi de 1964 et cadre constitutionnel flou); le fait que la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) est contrainte d’opérer clandestinement et est accusée de terrorisme; la création de «comités ouvriers» par les autorités; la répression qui frappe les gens de mer, y compris à l’étranger, et le refus de reconnaître leur droit d’être représentés par le syndicat des gens de mer de Birmanie (SUB), affilié à la FTUB et à la Fédération internationale des travailleurs des transports (FIT).

    La commission note que d’après le gouvernement:

    –      le référendum portant sur la Constitution a remporté un succès, sanctionné par un «oui» à 92,4 pour cent selon l’annonce no 10/2008 du 15 mai 2008 de la commission d’organisation du référendum du gouvernement de l’Union du Myanmar. Le chapitre VIII de la Constitution, relatif à la citoyenneté, aux droits fondamentaux et aux devoirs des citoyens, dispose, sous son paragraphe 354, que: «est reconnue la liberté d’exercer les droits suivants, sous réserve des lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté de la loi et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société, l’ordre public et la moralité: a) le droit des citoyens d’exprimer librement leurs convictions et leurs opinions; b) le droit des citoyens de s’assembler pacifiquement, sans arme; c) le droit des citoyens de constituer des associations et des syndicats.»;

    –      par effet de ces dispositions, un cadre législatif a été mis en place et les premières démarches ont été entreprises en vue de la création de syndicats de base, visant à des organisations de travailleurs libres et indépendantes. Des syndicats de base ont d’ores et déjà été constitués dans onze zones industrielles;

    –      en outre, les diverses commissions compétentes ont déjà commencé à modifier, revoir et réviser les dispositions des diverses lois du travail adoptées sur la base de la loi de 1964 définissant les droits fondamentaux et responsabilités des travailleurs. Les questions soulevées par la commission à propos de la loi de 1929 sur les conflits du travail et de la loi de 1926 sur syndicats sont abordées dans la nouvelle Constitution de l’Etat sous son chapitre IV, relatif à la législation, son chapitre VIII, relatif à la citoyenneté, aux droits fondamentaux et aux devoirs des citoyens, et sous son chapitre XV, portant dispositions générales. Quant aux ordonnances nos 2/88 et 6/88, le gouvernement indique que, au cours de cette période transitoire, il sera nécessaire d’instaurer des mesures de protection contre les personnes qui tenteront de susciter la haine, le défi ou la provocation à l’égard du gouvernement établi par la loi de l’Union du Myanmar ou à l’égard de l’une quelconque de ses entités constitutives. Néanmoins, par effet de la nouvelle Constitution de l’Etat, l’ordonnance no 6/88 sera abordée à l’avenir à travers la rédaction de la nouvelle loi sur les syndicats, et les procédures d’enregistrement des organisations de travailleurs seront incorporées dans cette nouvelle loi;

    –      enfin, concernant les gens de mer, le gouvernement indique que le Département de l’administration maritime, qui relève du ministère des Transports, a autorisé les marins du Myanmar qui travaillent à bord de navires à informer et saisir de toute plainte la Division du contrôle de l’emploi des gens de mer (SECD) et aussi à informer et saisir de toute plainte la FIT ou toute autre association valide, du préjudice subi quant à leurs intérêts et à leurs droits.

    La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle observe qu’il existe des dispositions de législation qui contiennent d’importantes restrictions à la liberté syndicale ou des dispositions qui, bien que n’étant pas directement dirigées contre la liberté syndicale, peuvent être appliquées d’une manière qui en altère gravement l’exercice. Plus spécifiquement: 1) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988, qui dispose que «les organisations demanderont la permission de se constituer au Ministre de l’intérieur et des affaires religieuses» (art. 3 a)), et précise que toute personne reconnue coupable d’appartenir, d’aider ou d’inciter des organisations non autorisées, ou d’agir sous le couvert de telles organisations, sera punie d’une peine d’emprisonnement d’une durée maximale de trois ans (art. 7); 2) l’ordonnance no 2/88, qui interdit de se réunir ou de marcher en cortège, par groupe de cinq ou plus, sans considération de ce que cet acte soit motivé ou non par l’intention de créer des perturbations ou de commettre un crime; 3) la loi de 1908 sur les associations illégales, qui dispose que quiconque est membre d’une association illégale, participe aux réunions d’une telle association, contribue, reçoit ou sollicite des contributions pour les finalités d’une telle association, ou encore assiste de quelque manière que ce soit le fonctionnement d’une telle association, sera puni d’une peine de deux ans de prison au moins et de trois ans au plus et sera passible d’une amende (art. 17.1); 4) la loi de 1926 sur les syndicats qui impose que 50 pour cent des travailleurs du site considéré doivent appartenir au syndicat pour que celui-ci soit légalement reconnu; 5) la loi de 1964 définissant les droits fondamentaux et les responsabilités des travailleurs, qui instaure un système obligatoire d’organisation et de représentation des travailleurs et impose le régime du syndicat unique; et 6) la loi de 1929 sur les conflits du travail, qui pose de nombreuses restrictions au droit de grève et habilite le président à déférer les conflits du travail à des cours d’investigation ou à des tribunaux du travail.

    Tout en prenant note des indications du gouvernement concernant l’adoption de la Constitution et les réformes législatives à venir, la commission est amenée à relever qu’il n’existe actuellement aucune base légale pour le respect et la concrétisation de la liberté syndicale au Myanmar et que la clause dérogatoire de caractère très général inscrite à l’article 354 de la Constitution subordonne l’exercice de ce droit «aux lois adoptées pour la sécurité de l’Etat, la primauté du droit et de l’ordre, la paix et la tranquillité de la société ou l’ordre public et la moralité». La commission note avec un profond regret que le libellé de cet article 354 de la Constitution risque de perpétuer les violations continuelles de la liberté d’association en droit et dans la pratique. Rappelant les questions particulièrement graves et urgentes qu’elle soulève depuis maintenant près de vingt ans, la commission déplore cette carence persistante à prendre quelque mesure que ce soit pour remédier à cette situation législative qui constitue un manquement grave et persistant du gouvernement aux obligations que fait peser à son égard la ratification volontaire de cette convention. De plus, la commission regrette profondément l’exclusion des partenaires sociaux et de la société civile dans son ensemble de toute consultation digne de ce nom, consultation qui serait pourtant le fondement indispensable à la mise en place d’un cadre législatif répondant aux questions particulièrement graves et urgentes soulevées à propos de l’application de la convention. Elle est également amenée à exprimer de sérieux doutes quant à l’idée selon laquelle les «syndicats» dont parle le gouvernement seraient le fruit du libre choix et des intérêts des travailleurs dans le contexte actuel, qui se caractérise par une absence totale d’instruments législatifs d’exécution et par des violations récurrentes de la liberté syndicale dans la pratique.

    En conséquence, la commission prie instamment une fois de plus le gouvernement de communiquer sans délai un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises pour adopter une législation garantissant à tous les travailleurs et employeurs le droit de constituer des organisations de leur choix et celui de s’affilier à ces organisations, ainsi que le droit de ces organisations d’exercer leur activités et de formuler leurs programmes d’action, de même que de s’affilier à des fédérations, confédérations et organisations internationales de leur choix, sans intervention de la part des autorités publiques. En outre, elle demande dans les termes les plus fermes que le gouvernement abroge immédiatement les ordonnances nos 2/88 et 6/88, ainsi que la loi sur les associations illégales, afin que ces instruments ne puissent être appliqués d’une manière qui porte atteinte aux droits des organisations de travailleurs et d’employeurs. La commission prie le gouvernement de faire état de toutes mesures prises en vue de l’adoption de tous projets de lois, ordonnances ou instructions qui garantissent la liberté syndicale, afin qu’elle puisse en examiner la conformité par rapport aux dispositions de la convention.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 98e session et de répondre en détail aux présents commentaires en 2009.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

    La commission prend note du rapport du gouvernement, notamment de sa réponse à certains des commentaires que la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais Confédération syndicale internationale (CSI), a formulés dans une communication en date du 12 juillet 2006.

    La commission prend note des conclusions et recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale dans son rapport intérimaire au sujet du cas no 2268 (340rapport, paragr. 1064-1112) et relève en particulier que ce dernier demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur le meurtre présumé d’un syndicaliste, Saw Mya Than, et de libérer de prison Myo Aung Thant. La commission note que dans sa réponse le gouvernement se réfère à ses précédentes communications.

    La commission note également les commentaires de la CSI en date du 27 août 2007 portant sur de nombreuses questions graves posées en 2006, qui s’ajoutent aux questions que la commission soulève déjà depuis des années, notamment la situation d’un obscur «cadre législatif»; un système de syndicat unique; des ordonnances et des décrets du régime militaire limitant encore la liberté syndicale; l’interdiction des syndicats; la mise en place par les autorités de «comités de travailleurs»; le fait que la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) soit réduite à la clandestinité et accusée de terrorisme; et la répression qui sévit à l’égard des gens de mer, y compris à l’étranger, notamment le déni de leur droit d’être représentés par l’Union des gens de mer de Birmanie (SUB):

    –           Les 8 et 9 août 2006, les autorités militaires arrêtent huit membres de la famille du membre et activiste de la FTUB, Thein Win, à leur domicile dans la section Kyun Tharyar de la ville de Pegu, ainsi que dix supposés complices de Thein Win, dont le chef du village, ainsi que d’autres personnes âgées. La mère et l’une des sœurs de Thein Win ont été relâchées après une journée, tandis que les autres ont été envoyés à la prison de Taungoo où ils ont subi un interrogatoire intensif sous la torture par le service d’intelligence militaire et des responsables d’une branche spéciale du service sur les activités de Thein Win, notamment sur un voyage qu’il aurait accompli à Pegu afin d’organiser des activités dans le cadre de la célébration du 1er mai. Alors qu’ils étaient détenus à Taungoo, les membres de la famille avaient reçu de leur interrogateur l’obligation de signer des «confessions» sur les activités de Thein Win, et la plupart d’entre eux ont été forcés de le faire sous la torture. Les 3 et 4 septembre 2006, les autorités ont libéré la plupart des membres de la famille et des amis de Thein Win. Cependant, la majorité d’entre eux ont par la suite reçu la visite et des menaces d’officiers des services de renseignements de l’armée qui ont exigé de chaque prisonnier de verser une somme d’un million de kyats dans un fonds de l’armée. Trois des frères et sœurs de Thein Win (Tin Oo, Kyi Thein et Chaw Su Hlaing) sont encore détenus jusqu’à la fin de l’année pour violation de l’article 17(1) et (2) de la loi sur les associations non autorisées par la loi.

    –           En mars 2006, cinq activistes politiques et syndicaux agissant dans la clandestinité ont été arrêtés pour diverses infractions commises dans leurs efforts pour fournir des informations à la FTUB et à d’autres organisations, que le régime considère comme étant illégales, et pour organiser des manifestations pacifiques anti-SPDC. Les cinq personnes ont toutes été condamnées à purger de longues peines d’emprisonnement, et quatre d’entre elles purgent actuellement cette peine dans la prison d’Insein (il s’agit de U Aung Thein, 76 ans, condamné à vingt ans de prison; Khin Maung Win, condamné à dix-sept ans de prison; Ma Khin Mar Soe condamné à dix-sept ans de prison; Ma Thein Thein Aye condamné à onze ans de prison; et U Aung Moe, 78 ans, condamné à vingt ans de prison).

    –           934 travailleurs ont subi des actes d’intimidation par l’armée dans la fabrique de vêtements Hae Wae, situé à Rangoon dans le quartier sud d’Okkapala. Ils s’étaient mis en grève le 2 mai 2006 pour réclamer de meilleures conditions de travail. Les 48 travailleurs qui ont pu rencontrer les autorités ont été obligés de signer une déclaration écrite attestant qu’il n’existait pas de problèmes à l’usine. Un détachement de 12 à 20 policiers était régulièrement présent à l’usine une fois que les travailleurs ont repris le travail.

    –           Naw Bey Bey, membre activiste du Syndicat des travailleurs de la santé de Karen (KHWU), a été arrêtée et condamnée à quatre ans de prison accompagnés de travaux forcés. Cette dernière serait détenue à Taungoo.

    Par ailleurs, la commission rappelle les informations relatant des faits graves allégués par la CISL, auxquels le gouvernement n’a fourni aucune nouvelle information:

    –           l’arrestation, la torture et l’assassinat de Saw Thoo Di, également connu sous le nom de Saw Ther Paw, membre du comité du Syndicat des travailleurs agricoles de Karen (KAWU), dans l’Etat de Karen, par une section armée du bataillon d’infanterie no 83 à l’extérieur de son village, le 28 avril.

    –           Le village de Pha est bombardé au mortier et à la grenade d’artillerie par le bataillon d’infanterie légère no 308 qui avait été envoyé par les militaires du Conseil d’Etat pour la paix et le développement (SPDC) qui venait d’apprendre, le 30 avril, que la FTUB et la Fédération des syndicats-Kawthoolei (FTUK) s’apprêtaient à célébrer les droits des travailleurs le 1er mai.

    –           Au début de juin 2005, le SPDC découvre dans la région de Pegu un réseau clandestin de dix militants de la FTUB qui s’employaient à fournir un soutien et une éducation aux travailleurs, à constituer un réseau et à servir de lien d’information avec les structures de la FTUB à l’étranger. Sept hommes et trois femmes ont ainsi été arrêtés. Lors d’une conférence de presse tenue le 28 août, les dirigeants du SPDC ont accusé ces militants d’avoir utilisé des téléphones satellites pour transmettre des informations de l’intérieur du Myanmar à la FTUB, laquelle les a relayées à l’OIT ainsi qu’au mouvement syndical international. Les membres de la FTUB ainsi arrêtés ont été transférés au centre d’interrogation, de sinistre réputation, d’Aug Tha Pay de Mayangone, district de Rangoon, où ils ont été soumis à des interrogatoires et des tortures par le personnel de la police spéciale et celui du bureau des opérations spéciales (renseignement militaire) pendant les mois de juin et juillet. Le 29 juillet, ils ont été transférés à la prison d’Insein, et leur dossier a été remis à un tribunal spécial qui tient ses audiences à l’intérieur de la prison. Dans le cadre de ce procès, qui était donc secret, tout accès à un conseil ou à des témoins de l’extérieur a été refusé aux militants; de toute évidence, la conduite de la procédure était loin de satisfaire aux normes judiciaires internationales. Le 10 octobre, ils ont été déclarés coupables et condamnés. Ainsi, Wai Lin et Win Myint ont été condamnés respectivement, en tant que dirigeants du réseau, à vingt-cinq ans et à dix-huit ans de prison; les cinq autres hommes et deux des femmes (Hla Myint Than, Major Win Myint, Ye Myint, Thein Lwin Oo, Aung Myint Thein, Aye Chan, Kin Kyi), ont tous été condamnés à sept ans de prison, et Ma Aye Thin Khine, employée de banque, a été condamnée à trois ans de prison. Dans sa communication du 27 août 2007, la CSI ajoute que, fin 2006, tous ces membres de la FTUB étaient encore détenus dans la prison d’Insein. La santé du commandant de l’armée à la retraite Myint Lwin, âgé de 77 ans, condamné à sept ans de prison, était très préoccupante.

    –           Thet Naing, autre dirigeant clandestin de la FTUB, a été libéré de la prison de Myitkyina en novembre 2004 au terme d’une peine de sept années purgée à la suite de sa nouvelle arrestation pour son rôle dans l’organisation d’une manifestation de protestation des travailleurs de la fabrique de vêtements Yam Ze Kyang. Il reste affecté par une altération du système nerveux consécutive aux tortures subies pendant son interrogatoire et aux mauvais traitements reçus pendant sa détention. Aujourd’hui, il a quitté le pays et a rejoint la FTUB à l’étranger.

    La commission prend note des informations que le gouvernement a fournies au sujet de certaines des autres allégations communiquées par la CISL en 2006:

    –           Le 17 avril 2005, quatre travailleurs (Hlae Hlae Khaing, Zin Min Khing, Moe Thi et Mar Mar) ont été arrêtés par la police à la suite d’une grève à l’usine de vêtements de la zone industrielle Hlaingthayar et de leur emprisonnement à Rangoon pour avoir soi-disant enfreint la loi par leurs actions dans l’usine (ils ont été libérés le 2 mai après la mobilisation des autres travailleurs de l’usine qui a été réprimée par l’armée). Le gouvernement indique que la mobilisation était due à des revendications portant sur le paiement mensuel des primes annuelles et que le conflit a pu être réglé par le biais de négociations et d’une conciliation.

    –           Le 3 novembre 2005, le militant de la FTUB Aung Myint (voir ci-dessus) est décédé dans des circonstances non élucidées dans sa cellule de la prison d’Insein. Selon la CISL, les autorités ont indiqué à la famille qu’il était mort de dysenterie mais ont refusé de remettre son corps pour ses funérailles, de sorte qu’il n’a pas été possible de vérifier si le décès était dû à des traitements abusifs, à la maladie ou à une autre cause. Les fonctionnaires de police se sont chargés eux-mêmes de la crémation du corps. Le gouvernement indique qu’il souffrait de tuberculose et qu’il a reçu un traitement à l’hôpital de la prison où il était détenu ainsi qu’à l’hôpital public d’Insein, qu’il était ensuite retourné, à sa demande, à l’hôpital de la prison où il est décédé le 6 novembre 2005. Les membres de sa famille ayant eu des difficultés à organiser ses funérailles, les autorités ont incinéré le corps en consultation avec les membres de la famille.

    –           Myo Aung Thant, membre du Syndicat de la All Burma Petro-Chemical Corporation, a été arrêté en 1997 et accusé à l’époque de haute trahison pour avoir entretenu des contacts avec la FTUB. Selon la CISL, le SPDC explique maintenant que l’intéressé a été emprisonné pendant dix ans pour haute trahison sur le fondement de l’article 122(1) du Code pénal, plus sept ans pour infractions à la loi sur les dispositions d’urgence, plus trois ans pour infractions à la loi sur les associations illégales. Myo Aung Thant est détenu dans une région éloignée du pays, dans la prison de Myitkyina, dans l’Etat de Kachin et, selon sa famille, en 2005, il a été mis en isolement dans une petite cellule sans fenêtre. Le gouvernement précise que la cellule est de 10 pieds (environ 3 mètres) de long et autant de large, la porte principale étant de 7 pieds sur 2,5 (environ 2 mètres x 70 centimètres) et le lit de 6 pieds sur 4 (environ 1,80 x 1,20 mètre). Il a subi un contrôle médical qui a révélé qu’il souffrait d’hémorroïdes. Il a été transporté à l’hôpital général de Myitkyina pour y être opéré. Les membres de sa famille (sa mère, son fils, sa sœur et sa nièce) ont pu lui rendre visite à sept reprises.

    La commission regrette le peu d’informations fournies par le gouvernement en réponse au nombre important de faits particulièrement graves qui sont allégués, dont la plupart sont restés sans réponse. Elle prie instamment le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des observations détaillées sur toutes les allégations susmentionnées.

    Une fois de plus, la commission déplore très vivement la gravité des actes allégués récemment et détaillant la longue liste de syndicalistes arrêtés, emprisonnés, torturés et condamnés à de longues peines de prison pour exercice d’activités syndicales, y compris pour le simple fait d’avoir envoyé des informations à la FTUB. La commission rappelle une fois de plus que le respect des libertés civiles est une condition essentielle de l’exercice de la liberté syndicale, et que les travailleurs et employeurs doivent être en mesure d’exercer leurs droits de libre association dans un climat d’entière liberté et de sécurité, loin de toute violence ou de menaces. Elle rappelle qu’un climat de violence, dans lequel le meurtre ou la disparition de dirigeants syndicaux reste impuni, constitue un obstacle extrêmement grave à l’exercice des droits syndicaux et que de tels actes exigent que des mesures strictes soient prises par les autorités. Elle souligne que les autorités ne doivent pas invoquer des activités syndicales légitimes comme prétexte d’arrestation ou de mise en détention arbitraire. En outre, s’agissant plus particulièrement de la torture, des actes de cruauté et des mauvais traitements, la commission souligne que les syndicalistes, comme tous les autres individus, doivent bénéficier des garanties prévues dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que les gouvernements doivent donner les instructions nécessaires pour qu’aucun détenu ne fasse l’objet de tels traitements (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 29 et 30). En conséquence, la commission prie une fois de plus instamment le gouvernement de donner des informations sur les mesures prises et les instructions données sans délai pour assurer le respect des libertés civiles fondamentales à l’égard des syndicalistes et des dirigeants syndicaux et de prendre toutes les mesures nécessaires pour la libération immédiate de toutes les personnes ayant été emprisonnées pour l’exercice d’activités syndicales, et de veiller à ce que plus aucun travailleur ne soit sanctionné en raison de l’exercice de telles activités, notamment pour avoir eu des contacts avec des organisations de travailleurs de son choix. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement sera en mesure de faire rapidement état de progrès à cet égard.

    S’agissant du cadre législatif (articles 2, 3, 5 et 6 de la convention), la commission rappelle avoir pris acte, dans sa précédente observation, d’une absence totale de progrès concernant l’adoption d’un cadre législatif qui admettrait la constitution d’organisations de travailleurs libres et indépendantes. Elle avait en particulier regretté la longueur des délais écoulés dans l’attente de l’adoption de la Constitution et l’absence de participation des partenaires sociaux et de l’ensemble de la société civile à ce processus, qui serait une base nécessaire à la mise en place d’un cadre législatif sur les problèmes particulièrement graves et pressants qui se posent depuis près de vingt ans dans l’application de la convention. En outre, la commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle indique qu’il existe certains textes législatifs qui contiennent des restrictions importantes à la liberté d’association ou des dispositifs qui, bien que ne visant pas directement la liberté syndicale, peuvent être appliqués dans un sens de nature à altérer gravement l’exercice du droit de se syndiquer. Il s’agit concrètement des instruments suivants: 1) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988 qui dispose que «les organisations demanderont l’autorisation de se constituer au ministre de l’Intérieur et des Affaires religieuses» (art. 3(a)) et prévoit que toute personne reconnue coupable d’être membre, de complicité ou d’utiliser les qualités d’organisations non autorisées sera punie d’une peine d’emprisonnement d’une durée pouvant atteindre trois ans (art. 7); 2) l’ordonnance no 2/88 qui interdit les réunions, marches ou cortèges de groupes de cinq personnes ou plus, sans considération que cette réunion ait ou non pour but de fomenter des troubles ou de commettre un crime; et 3) la loi de 1908 sur les associations illégales, aux termes de laquelle toute personne qui est membre d’une association illégale, qui participe aux réunions d’une telle association, qui contribue, reçoit ou sollicite une contribution pour les fins d’une telle association, ou encore qui aide d’une manière quelconque ses activités sera punie de deux ans au moins ou de trois ans au plus d’emprisonnement et encourra, en outre, une peine d’amende (art. 17.1).

    Tout en notant l’indication du gouvernement selon laquelle: i) les délégués de la convention nationale ont achevé avec succès l’élaboration des principes fondamentaux et des principes de base détaillés en vue de la rédaction de la Constitution; ii) des travaux ont été entrepris à la base, en particulier dans la division de Yangon, sous la surveillance du Comité de surveillance de la zone industrielle, en vue de la création du nouveau syndicat et 11 organisations de travailleurs de base ont été formées dans les zones industrielles de la division de Yangon et d’autres seront formées dans les autres zones industrielles de Myanmar; iii) les travailleurs peuvent négocier avec leurs employeurs leurs conditions de travail dans le cadre de la législation du travail soit individuellement, soit en groupe; une telle négociation a eu lieu en 2006 dans 80 usines et lieux de travail, et dans 140 usines et lieux de travail en 2007; chacune de ces négociations a été réglée par les représentants du gouvernement, des employeurs et des travailleurs grâce à une conciliation et à la négociation.

    Tout en prenant note des indications du gouvernement, la commission doit toutefois rappeler une nouvelle fois le retard important pris dans l’adoption de la Constitution et le fait que, entre-temps, aucun progrès n’a été réalisé sur les questions particulièrement graves et urgentes qu’elle soulève depuis maintenant près de vingt ans. Elle se doit d’exprimer de sérieux doutes sur la question de savoir si ces organisations reflètent réellement le libre choix et les intérêts des travailleurs, compte tenu de la situation décrite ci-dessus, exempte de toute protection législative en vue de l’exercice d’une réelle liberté syndicale.

    La commission prie une fois de plus instamment le gouvernement de fournir sans délai un rapport détaillé sur les mesures concrètes en vue de l’adoption d’une législation qui garantisse à tous les travailleurs et à tous les employeurs le droit de constituer les organisations de leur choix et celui de s’affilier à de telles organisations, de même que le droit de ces organisations d’organiser leurs activités, de formuler leurs programmes d’action et de s’affilier à toutes organisations, fédérations ou confédérations internationales de leur choix, sans intervention aucune des autorités publiques. De plus, elle appelle le gouvernement dans les termes les plus forts à abroger immédiatement les ordonnances nos 2/88 et 6/88, ainsi que la loi sur les associations illégales, afin que ces instruments ne puissent plus être invoqués d’une manière qui porte atteinte aux droits des organisations d’employeurs et de travailleurs. Elle prie le gouvernement de communiquer toute mesure prise en vue de l’adoption de la Constitution et de fournir le texte des principes fondamentaux applicables à l’élaboration de ladite Constitution, ainsi que tout autre projet de lois, d’ordonnances ou d’instructions élaboré en vue de garantir la liberté d’association, de façon qu’elle puisse en examiner la conformité avec les dispositions de la convention. Enfin, la commission prie le gouvernement d’indiquer la façon dont les membres de la société civile prennent part à l’adoption des principes fondamentaux.

    Observation (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

    La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle observe que ce rapport ne contient pas d’information ayant trait spécifiquement aux questions soulevées dans ses précédents commentaires, mais se réfère plutôt, une fois de plus, au processus constitutionnel par lequel les lois sur le travail sont élaborées.

    La commission prend note des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans son rapport intérimaire concernant le cas no 2268 (340e rapport, paragr. 1064-1112) et observe en particulier que le comité demande au gouvernement d’ouvrir une enquête indépendante sur le meurtre présumé d’un syndicaliste, Saw Mya Than, et de libérer de prison Myo Aung Thant.

    La commission prend également note des commentaires de la Confédération des syndicats libres (CISL) en date du 12 juillet 2006, qui se réfèrent à de nombreuses questions graves que la commission a soulevées depuis des années, notamment à: la situation actuelle d’un obscur «cadre législatif»; un système de syndicat unique; des ordonnances et des décrets du régime militaire limitant encore la liberté syndicale; l’interdiction des syndicats; la mise en place par les autorités de «comités de travailleurs»; le fait que la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) soit réduite à la clandestinité et accusée de terrorisme; la répression qui sévit à l’égard des gens de mer, y compris à l’étranger, et le déni de leur droit d’être représentés par l’Union des gens de mer de Birmanie (SUB). La commission note que les observations du gouvernement quant aux questions soulevées par la CISL se réfèrent principalement à ses communications précédentes. La CISL se réfère en outre aux faits allégués suivants:

    1.     Le 17 avril 2005, la police arrête quatre travailleurs (Hlae Hlae Khaing, Zin Min Khing, Moe Thi et Mar Mar), suite à une grève survenue dans une fabrique de vêtements de la zone industrielle de Hlaingthayar, et les emprisonne à Rangoon au motif d’avoir enfreint la loi à travers les activités menées dans ce cadre. Le 18 avril, les travailleurs de la fabrique se mettent en grève pour exiger leur libération immédiate. Le 19 avril, la police et l’armée, sous la direction du Major Tin San, convergent sur la fabrique dont ils déclarent unilatéralement la fermeture jusqu’à nouvel avis. Les ouvriers sont menacés d’arrestation s’ils ne cessent pas leur grève. Enfin, le Major général Myint Swe, commandant des forces armées de Rangoon, arrive sur les lieux avec neuf fourgons cellulaires et lance un ultimatum: évacuation immédiate du périmètre ou arrestation de toutes les personnes présentes par l’armée. Les travailleurs cessent immédiatement leur grève et quittent la fabrique. Le 2 mai, les quatre ouvriers arrêtés sont libérés de prison.

    2.     Saw Thoo Di, également connu sous le nom de Saw Ther Paw, membre du Comité du syndicat des travailleurs agricoles de Karen (KAWU), venant de l’agglomération de Kya-Inn, dans l’Etat de Karen, est arrêté par une section en armes du bataillon d’infanterie no 83 à l’extérieur de son village le 28 avril, torturé, puis tué d’un coup d’arme à feu.

    3.     Les militaires du Conseil d’Etat pour la paix et le développement (SPDC) viennent à apprendre, le 30 avril, que la FTUB et la Fédération des syndicats – Kawthoolei (FTUK) – s’apprêtent à commémorer les droits des travailleurs le 1er mai dans le village de Pha et ils y envoient le bataillon d’infanterie légère no 308, qui bombarde le village au mortier et à la grenade d’artillerie, dans le but de tuer les organisateurs et mettre un terme à leurs préparatifs.

    4.     Au début de juin 2005, le SPDC découvre dans la région de Pegu un réseau clandestin de dix militants de la FTUB qui s’emploient à fournir un soutien et une éducation aux travailleurs, à constituer un maillage et à servir de lien d’information avec les structures de la FTUB à l’étranger. Sept hommes et trois femmes sont ainsi arrêtés. Lors d’une conférence de presse tenue le 28 août, les dirigeants du SPDC accusent ces militants d’avoir utilisé des téléphones portables pour transmettre des informations de l’intérieur du Myanmar à la FTUB, laquelle les a relayées à l’OIT ainsi qu’au Mouvement syndical international. Les membres de la FTUB ainsi arrêtés ont été transférés au centre d’interrogation de sinistre réputation d’Aug Tha Pay de Mayangone, district de Rangoon, où ils ont été soumis à des investigations et à des tortures par le personnel de la police spéciale et du Bureau des opérations spéciales (renseignement militaire) pendant les mois de juin et juillet. Le 29 juillet, ils ont été transférés à la prison d’Insein et leur dossier a été remis à un tribunal spécial qui mène ses audiences à l’intérieur de la prison. Dans le cadre de ce procès, qui était donc secret, tout accès à un conseil ou à des témoins de l’extérieur a été refusé aux militants et, de toute évidence, la conduite de la procédure était loin de satisfaire aux normes judiciaires internationales. Le 10 octobre, ils ont été déclarés coupables et condamnés. Ainsi, Wai Lin et Win Myint ont été condamnés respectivement, en tant que leaders du réseau, à 25 ans et à 18 ans; les cinq autres hommes et deux des femmes (Hla Myint Than, Major Win Myint, Ye Myint, Thein Lwin Oo, Aung Myint Thein, Aye Chan, Kin Kyi) ont tous été condamnés à sept ans de prison et Ma Aye Thin Khine, employée de banque, a été condamnée à trois ans de prison.

    5.     Le 3 novembre 2005, le militant de la FTUB Aung Myint (voir ci-dessus) décède dans des circonstances non élucidées dans sa cellule de la prison d’Insein. Au moment de son arrestation, le 2 juillet, en même temps que les autres membres du réseau de la FTUB de Pegu, il était en bonne forme et condition physique. Les autorités ont dit à la famille qu’il était mort de dysenterie mais ont refusé de rendre le corps pour les funérailles, empêchant ainsi de déterminer s’il était mort de mauvais traitements, de maladie ou d’une autre cause. Ce sont les fonctionnaires de la police qui ont procédé à la crémation du corps.

    6.     Myo Aung Thant, membre du Syndicat de la All Burma Petro-Chemical Corporation, a été arrêté en 1997 et accusé à l’époque de haute trahison pour avoir entretenu des contacts avec la FTUB. Aujourd’hui, le SPDC explique que l’intéressé a été emprisonné pendant dix ans pour haute trahison sur le fondement de l’article 122(1) du Code pénal, plus sept ans pour infractions à la loi sur les dispositions d’urgence, plus trois ans pour infraction à la loi sur les associations illégales. Myo Aung Thant est détenu dans une région éloignée du pays, dans la prison de Myitkyina, dans l’Etat de Kachin et, selon sa famille, a été mis au secret dans une petite cellule sans fenêtre dans le courant de l’année 2005.

    7.     Thet Naing, autre dirigeant clandestin de la FTUB, a été libéré de la prison de Myitkyina en novembre 2004, au terme d’une peine de sept années imposée après sa réarrestation pour son rôle dans l’organisation d’une manifestation de protestation des travailleurs de la fabrique de vêtements de Yam Ze Kyang. Il reste affecté par une altération du système nerveux consécutive aux tortures auxquelles il a été soumis pendant son interrogatoire et aux mauvais traitements subis ensuite pendant sa détention. Il a aujourd’hui quitté le pays et rejoint la FTUB à l’étranger.

    La commission regrette que le gouvernement n’ait pas fourni d’observations détaillées sur les faits particulièrement graves allégués par la CISL, en 2005 et 2006, et elle le prie instamment d’y apporter une réponse détaillée dans son prochain rapport.

    La commission déplore le plus vivement ces allégations graves plus récentes détaillant l’arrestation, l’emprisonnement, la torture et la condamnation à de longues années de prison pour l’exercice d’activités syndicales, y compris pour le simple fait d’avoir envoyé des informations à la FTUB, de syndicalistes dont la liste est particulièrement longue. La commission rappelle une fois de plus que le respect des libertés civiles est une condition essentielle de l’exercice de la liberté syndicale et que travailleurs et employeurs doivent être en mesure d’exercer leurs droits de libre association dans un climat d’entière liberté et de sécurité, loin de toute violence ou de menaces. Elle rappelle qu’un climat de violence, dans lequel le meurtre ou la disparition de dirigeants syndicaux restent impunis, constitue un obstacle extrêmement grave à l’exercice des droits syndicaux et que de tels actes exigent que des mesures strictes soient prises par les autorités. Enfin, elle souligne que les autorités ne doivent pas invoquer des activités syndicales légitimes comme prétexte d’arrestation ou de mise en détention arbitraire. S’agissant plus particulièrement de la torture, des actes de cruauté et des mauvais traitements, la commission fait valoir que les syndicalistes, comme tous les autres individus, doivent bénéficier des garanties prévues dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que les gouvernements doivent donner les instructions nécessaires pour qu’aucun détenu ne fasse l’objet de tels traitements (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 29 et 30). En conséquence, la commission prie instamment, une fois de plus, le gouvernement de donner des informations sur les mesures prises et les instructions données sans délai pour assurer le respect des libertés civiles fondamentales à l’égard des syndicalistes et des dirigeants syndicaux, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour la libération immédiate de toutes les personnes ayant été emprisonnées pour l’exercice d’activités syndicales et de veiller à ce que plus aucun travailleur ne soit sanctionné à raison de l’exercice de telles activités, notamment pour avoir eu des contacts avec des organisations de travailleurs de son choix. La commission veut fermement croire que le gouvernement sera en mesure de faire rapidement état de progrès sur ce plan.

    Articles 2, 3, 5 et 6 de la convention. S’agissant du cadre législatif, la commission rappelle avoir pris acte, dans sa précédente observation, d’une absence totale de progrès dans le sens de l’instauration d’un cadre législatif qui serait propre à admettre la constitution d’organisations de travailleurs libres et indépendantes. Elle rappelle en outre que, depuis plusieurs années, elle fait valoir qu’il existe certains éléments de législation qui font peser des restrictions importantes sur la liberté d’association ou qui, bien que ne visant pas directement la liberté syndicale, peuvent être appliqués dans un sens de nature à altérer gravement l’exercice du droit de se syndiquer. Il s’agit concrètement des instruments suivants: 1) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988, qui dispose que «les organisations demanderont l’autorisation de se constituer au ministre de l’Intérieur et des Affaires religieuses» (art. 3(a)), et prévoit que toute personne reconnue coupable d’être membre, d’aider, d’instrumenter ou d’utiliser les qualités d’organisations non autorisées sera punie d’une peine d’emprisonnement d’une durée pouvant atteindre trois ans (art. 7); 2) l’ordonnance no 2/88, qui interdit les réunions, marches ou cortèges de groupes de cinq personnes ou plus, sans considération de ce que cette réunion ait ou non pour but de fomenter des troubles ou de commettre un crime; et 3) la loi de 1908 sur les associations illégales, aux termes de laquelle toute personne qui est membre d’une association illégale, qui participe aux réunions d’une telle association, qui contribue, reçoit ou sollicite une contribution pour les fins d’une telle association, ou encore qui aide d’une manière quelconque ses activités, sera punie de deux ans au moins ou de trois ans au plus d’emprisonnement et encourra en outre un peine d’amende (art. 17.1).

    Notant que le gouvernement déclare qu’il lancera les projets de loi du travail relatifs aux mesures de protection des travailleurs dès que la nouvelle Constitution de l’Etat aura été finalisée, la commission ne peut que regretter, une fois de plus, la longueur des délais écoulés dans l’attente de l’adoption de la Constitution et le fait que, entre-temps, aucun progrès n’ait été accompli par rapport aux problèmes particulièrement graves et pressants qu’elle met en relief depuis maintenant vingt ans. La commission incite une fois de plus le gouvernement à fournir un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises en vue de l’adoption d’une législation qui garantisse à tous les travailleurs et à tous les employeurs le droit de constituer les organisations de leur choix et celui de s’affilier à de telles organisations, de même que le droit de ces organisations d’organiser leurs activités, de formuler leurs programmes d’action et de s’affilier à toutes organisations, fédérations ou confédérations internationales de leur choix, sans intervention aucune des autorités publiques. De plus, elle appelle le gouvernement dans les termes les plus forts à abroger les ordonnances nos 2/88 et 6/88, ainsi que la loi sur les associations illégales, afin que ces instruments ne puissent plus être invoqués d’une manière qui porte atteinte aux droits des organisations d’employeurs et de travailleurs. Elle prie le gouvernement de communiquer tout projet de loi, d’ordonnance ou d’instruction élaboré dans cet objectif, de manière à pouvoir en examiner la conformité par rapport aux dispositions de la convention.

    [Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 2007.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

    La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement des informations orales et écrites fournies par le représentant du gouvernement à la Commission de la Conférence en juin 2005, ainsi que de la discussion qui a eu lieu au sein de cette commission et du paragraphe spécial qui en a résulté dans le rapport de la Commission de la Conférence au sujet du défaut continu d’application de la convention. La commission prend note également des conclusions et recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2268 (333e rapport, paragr. 642-770 et 337e rapport, paragr. 1058-1112).

    Par ailleurs, la commission prend note des observations datées du 31 août 2005 reçues de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) sur les questions suivantes: législation obscure, système syndical unique, ordonnances et décrets militaires limitant davantage la liberté syndicale, interdiction des syndicats, «les comités de travailleurs» organisés par les autorités, la Fédération indépendante des syndicats indépendants (FTUB) - organisation indépendante de travailleurs forcée de travailler dans la clandestinité et accusée de terrorisme, répression des marins même à l’étranger, détention de syndicalistes et violations spécifiques de droits syndicaux en 2004. La commission prie le gouvernement de fournir ses observations dans son prochain rapport au sujet des commentaires formulés par la CISL.

    A. Violations des libertés civiles fondamentales. 1. Assassinats et tortures de syndicalistes. La commission rappelle que, dans ses commentaires antérieurs, elle avait demandé au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer les droits qui leur sont garantis par la convention dans un climat de sécurité totale exempt de toute menace ou de toute crainte. Elle prend note des conclusions de la Commission de la Conférence selon lesquelles le respect des libertés civiles est essentiel pour l’exercice de la liberté syndicale et que les travailleurs et les employeurs devraient être capables d’exercer leurs droits en matière de liberté syndicale dans un climat de liberté et de sécurité totales, à l’abri de la violence et des menaces.

    Par ailleurs, la commission prend note avec regret des conclusions et recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2268 au sujet du décès de Saw Mya Than, membre de la FTUB et fonctionnaire de la KEWU, ainsi que des commentaires exprimés par les membres travailleurs de la Commission de la Conférence concernant Koe Moe Naung qui, selon l’allégation, a été arrêté le 19 mai à sa résidence à Ranong à la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar par deux hommes non identifiés, amené au régiment 431 d’infanterie légère basé dans le village et torturé à mort au cours de l’interrogatoire; ce dernier était un dirigeant syndicaliste qui s’occupait de l’organisation syndicale des pêcheurs de Burmese et des travailleurs migrants du Myanmar dans la province de Ranong.

    La commission déplore vivement ces allégations de violations des libertés civiles fondamentales de syndicalistes et dirigeants syndicaux et rappelle qu’un climat de violence, où surviennent impunément des assassinats et disparitions de dirigeants syndicaux, constitue un grave obstacle à l’exercice des droits syndicaux et que de tels actes exigent de sévères mesures de la part des autorités (voir l’étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 29). En ce qui concerne plus particulièrement les tortures, sévices et mauvais traitements, la commission souligne que les syndicalistes, comme toute autre personne, doivent bénéficier des garanties prévues dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (voir l’étude d’ensemble, op. cit., paragr. 30). La commission demande en conséquence au gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les mesures adoptées et les instructions établies sans délai de manière à assurer le respect des libertés civiles fondamentales des syndicalistes et des dirigeants syndicaux.

    2. Arrestations, condamnations et emprisonnement pour activités syndicales notamment des contacts avec des organisations à l’étranger. La commission rappelle que, dans ses commentaires antérieurs, elle avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que nul ne puisse être sanctionné pour avoir été en contact avec un syndicat ou une association de travailleurs, tout en notant que les jugements de la Cour suprême, faisant référence à des contacts avec des organisations illicites à l’étranger, étaient ambigus à ce propos. La commission note à ce sujet, d’après le rapport du gouvernement, que les trois organisateurs de la FTUB, Nai Min Kyi, Aye Myint et Shwe Mahn (et non Nai Yetka comme indiqué dans le précédent rapport de la commission) qui avaient été précédemment condamnés à de lourdes peines de prison pour activités liées au BIT, ont été finalement libérés après que leurs jugements eurent été commués en peines plus légères. Shwe Mahn a été libéré le 29 avril 2005 alors que Nai Min Kyi et Aye Myint ont été graciés et libérés en janvier 2005. Par ailleurs, la Cour suprême a indiqué au cours de la procédure d’appel que «la communication et la coopération avec le BIT ne constituent pas une infraction aux termes de la législation en vigueur du Myanmar». La commission prend note de ces informations.

    La commission prend note avec regret, cependant, des conclusions et recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2268 concernant la condamnation du secrétaire général de la FTUB pour haute trahison, la condamnation et l’emprisonnement de Myo Aung Thant sur la base, selon l’allégation, d’une confession obtenue sous la torture, ainsi que la condamnation et l’emprisonnement de Khin Kyaw, membre du syndicat des marins de Birmanie; selon l’allégation, les deux derniers n’ont pas bénéficié d’un procès équitable avec accès aux services d’un avocat de leur choix.

    La commission prend note également avec un profond regret du texte du jugement daté du 9 avril 2004, rendu par le tribunal du Township Ma-ha-aung-mye, lequel a condamné 10 travailleurs (U Hla Soe, U Than Win, U Win Kyi, Daw Hnin Pa Pa (aka) Myint Myint Tun, Myint Oo (aka) Ni Ni, Aung Aung Naing (aka) Ba Gyi Aung, Htay Lwin Oo, Aung Naing Thu (aka) Po Htaung, Ye Tun Min, Zaw Min Naing, U Tin Oo] à sept ans d’emprisonnement conformément à l’article 5(j) de la loi de 1950 sur les dispositions en matière d’urgence pour avoir accompli «des activités en vue de la constitution d’un syndicat au Myanmar». La commission note, d’après le libellé du jugement du tribunal que les accusations portent notamment sur le fait d’avoir pris contact avec les forces d’opposition à Maesod, Thaïlande, reçu un appui financier de la part de groupes exilés, reçu une formation syndicale de la part des organisations susmentionnées, diffusé des informations de l’intérieur du pays vers les forces d’opposition exilées et de s’être réunis pour constituer un syndicat. Le tribunal conclut qu’en prenant part à de telles activités interdites «les accusés avaient l’intention de détruire la stabilité et la sécurité de l’Union en vue de ruiner la moralité publique et d’inciter à un comportement aberrant».

    La commission déplore très vivement la condamnation de syndicalistes à l’emprisonnement pour l’exercice de ce qui semble être des activités syndicales régulières telles que la constitution d’organisations de travailleurs, la communication avec des organisations internationales de leur choix et l’acceptation d’une assistance financière et d’une formation de la part de celles-ci. Elle souligne à nouveau que le respect des libertés civiles est essentiel pour l’exercice de la liberté syndicale et que les travailleurs et les employeurs devraient être capables d’exercer leurs droits en matière de liberté syndicale dans un climat de liberté et de sécurité totales, à l’abri de la violence et des menaces. Les autorités ne devraient pas utiliser les activités syndicales légitimes comme prétexte aux arrestations et détentions arbitraires. La commission prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour libérer immédiatement tous ceux qui ont été emprisonnés pour exercice d’activités syndicales et pour garantir qu’aucun travailleur n’est sanctionné pour avoir exercé de telles activités, en particulier pour avoir eu des contacts avec des organisations de travailleurs de son choix. La commission veut croire que le gouvernement sera en mesure d’indiquer dans son prochain rapport le progrès réalisé à cet égard.

    B. Articles 2, 3, 5 et 6 de la convention. Cadre législatif. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait noté l’absence totale de progrès par rapport à l’établissement d’un cadre législatif permettant la constitution d’organisations de travailleurs libres et indépendantes, et ce en dépit des commentaires qu’elle formule sur cette question depuis la ratification de la convention il y a cinquante ans. La commission avait prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires de manière à adopter un cadre législatif permettant la constitution d’organisations de travailleurs libres et indépendantes et pour que les ordonnances nos 6/88 et 2/88 ainsi que la loi de 1908 sur les associations illégales ne s’appliquent pas à l’exercice du droit syndical. La commission rappelle que 1) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988 dispose que «les organisations qui souhaitent se constituer doivent en demander l’autorisation au ministère de l’Intérieur et des Affaires religieuses» (art. 3(a)) et prévoit qu’est passible d’une peine d’emprisonnement maximale de trois ans quiconque est reconnu coupable d’être membre d’une des nombreuses organisations qui n’ont pas été autorisées ou d’aider, encourager ou utiliser ces organisations (art. 7); 2) l’ordonnance no 2/88 interdit les rassemblements ou manifestations de cinq personnes ou plus, que ce soit dans le but de troubler l’ordre public ou de commettre un délit; et 3) la loi de 1908 sur les associations illicites qui prévoit des peines d’emprisonnement de deux à trois ans et une amende à l’encontre de quiconque est membre d’une association illicite, prend part à des réunions de ce type d’association, contribue à ses objectifs, bénéficie de son aide ou la sollicite ou, de quelque façon que ce soit, participe à ses activités (art. 17.1).

    La commission note, d’après les informations fournies dans le rapport du gouvernement et par le représentant du gouvernement à la Commission de la Conférence en juin 2005, que les organisations de travailleurs concernées qui avaient été supprimées depuis 1988, pourraient être rétablies une fois que le Myanmar aura sa nouvelle Constitution. Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement du Myanmar a adopté un plan de route en sept étapes, dont la première consiste à reconvoquer la Convention nationale. Ce processus qui a débuté en 1993 et a été interrompu en 1996 était destiné à établir les principes de base en vue de l’élaboration d’une nouvelle constitution. Au cours de ses sessions qui se sont tenues entre 1993 et 1996, la Convention nationale a adopté les principes de base. La session de la Convention nationale qui a débuté le 20 mai 2004 a organisé des discussions au sujet des principes de base pour le secteur social, et notamment les droits des travailleurs et les droits de prévoyance sociale. Les discussions ont également porté sur le principe de base de la constitution des organisations de travailleurs. Au cours du processus d’élaboration d’une nouvelle Constitution d’Etat, ces principes de base devraient fournir un cadre pour l’élaboration de dispositions légales détaillées. Au total, 104 principes de base ont été adoptés par consensus, et il était indiqué que «l’Etat promulguera les lois nécessaires destinées à protéger les droits des travailleurs». Le gouvernement indique dans son dernier rapport qu’une nouvelle législation verra le jour avec la nouvelle Constitution.

    La commission souligne que le processus du plan de route en sept étapes, en vue de l’élaboration d’une nouvelle Constitution qui devrait finalement ouvrir la voie à la formation d’organisations de travailleurs appropriées, a commencé en 1993 et se trouve toujours dans sa phase initiale. La commission constate que les documents annexés au rapport du gouvernement comportent une liste des sujets qui devraient à l’avenir être traités par la législation, et notamment des sujets aussi généraux que «les différends du travail» et les «organisations du travail» sans aucune autre proposition quant au contenu des «principes de base détaillés» relatifs à ces questions. Par ailleurs, aucun texte législatif n’a été annexé au rapport et il n’existe aucune indication quant aux mesures destinées à abroger les ordonnances nos 2/88 et 6/88 ainsi que la loi sur les associations illicites, comme demandé précédemment par la commission.

    La commission note avec un profond regret que les informations fournies par le gouvernement continuent à montrer une absence totale de progrès par rapport à l’établissement d’un cadre législatif en vertu duquel des organisations de travailleurs libres et indépendantes peuvent se constituer ainsi que l’absence totale de tout dialogue réel à ce propos. Notant qu’il est urgent que des mesures soient prises pour modifier la législation et la Constitution avec la participation totale et réelle de tous les secteurs de la société, quelles que soient leurs opinions politiques, la commission, tout comme la Commission de la Conférence, demande à nouveau instamment au gouvernement de communiquer tout projet de loi pertinent et de fournir un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises pour promulguer une législation garantissant à tous les travailleurs et employeurs le droit de constituer des organisations de leur choix et de s’affilier à ces organisations, ainsi que les droits de ces organisations d’exercer leurs activités et de formuler leurs programmes d’action et de s’affilier aux fédérations, confédérations et organisations internationales de leur choix sans ingérence de la part des pouvoirs publics. Elle demande aussi instamment au gouvernement, dans les termes les plus fermes, d’abroger les ordonnances nos 2/88 et 6/88 ainsi que la loi sur les associations illicites, de manière qu’elles ne puissent être appliquées de façon à enfreindre les droits des organisations d’employeurs et de travailleurs.

    [Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2006.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

    La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement, des informations présentées oralement par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 2004, du débat qui a suivi et du paragraphe spécial inséré en conséquence dans le rapport de la Commission de la Conférence pour signaler le défaut continu d’application de la convention. La commission prend aussi note des observations en date du 19 juillet 2004 de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL). Enfin, la commission prend note du rapport du Comité de la liberté syndicale à propos du cas no 2268 (voir 333e rapport, paragr. 642 à 770).

    Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, dans un très proche avenir, pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer pleinement les droits qui leur sont garantis par la convention, dans un climat de pleine sécurité exempt de toute menace ou de toute crainte.

    La commission prend note de l’indication du gouvernement dans son dernier rapport, à savoir que la loi sur les syndicats est toujours en vigueur et que la liberté syndicale des travailleurs ne fait l’objet de restrictions d’aucune sorte. Dans son rapport, le gouvernement indique que plusieurs associations professionnelles et de corps de métier et autres associations, dont des associations qui veillent au bien-être des travailleurs, fonctionnent de façon satisfaisante au Myanmar. Par ailleurs, la commission note à la lecture du rapport du gouvernement que, depuis 1988, lorsque la Constitution a été suspendue, aucun syndicat au Myanmar ne satisfait aux exigences de la convention et que, tant qu’une constitution solide et acceptée par le peuple du Myanmar n’aura pas étéélaborée, des syndicats du premier degré et des mécanismes appropriés ne pourront pas être établis. A cet égard, la commission note que le représentant gouvernemental a indiquéà la Commission de la Conférence que, le 20 mai 2004, la convention nationale avait délibéré sur les principes fondamentaux du secteur social, y compris sur les droits des travailleurs, et que ces principes constitueraient le cadre dans lequel des dispositions détaillées seraient élaborées à l’occasion de l’élaboration de la nouvelle constitution. La commission note enfin que le gouvernement estime que les commentaires de la CISL sont analogues à ceux à propos desquels il a précédemment répondu et que, par conséquent, il n’est pas nécessaire d’y répondre.

    La commission, une fois de plus, doit relever qu’elle formule des commentaires à propos du défaut d’application de la convention par le gouvernement, tant en droit que dans la pratique, depuis la ratification de cet instrument il y a près de 50 ans. La commission note que le rapport du gouvernement ne contient aucune des informations que la Commission de la Conférence a demandées à sa dernière session. En particulier, la Commission de la Conférence avait demandé au gouvernement de communiquer tous les projets de loi pertinents, ainsi qu’un rapport détaillé sur les mesures concrètes prises pour accroître la conformité de la législation à la convention, et de répondre à propos des commentaires de la CISL. La commission ne peut que constater avec un profond regret que les informations fournies continuent à démontrer l’absence totale de progrès dans l’élaboration d’un cadre législatif permettant la création d’organisations de travailleurs libres et indépendantes.

    A propos de l’indication selon laquelle la participation aux relations professionnelles des associations veillant au bien-être des travailleurs est encouragée, la commission réaffirme qu’elle a toujours considéré que ces associations n’ont aucun des attributs caractéristiques des organisations de travailleurs libres et indépendantes dont la création est l’objectif de la convention. A l’instar du Comité de la liberté syndicale, la commission estime que ces associations ne présentent pas les garanties nécessaires d’indépendance en ce qui concerne leur composition et leur fonctionnement, et ne peuvent donc pas remplacer des organisations de travailleurs librement choisies.

    La commission rappelle que, outre l’absence totale d’un cadre législatif garantissant le droit d’organisation, certains textes législatifs comportent des restrictions importantes à la liberté syndicale ou des dispositions qui, même si elles ne visent pas directement la liberté syndicale, peuvent être appliquées d’une façon qui compromet gravement l’exercice du droit d’organisation. La commission note à cet égard ce qui suit: 1) l’ordonnance no 6/88 du 30 septembre 1988 prévoit que les organisations qui souhaitent se constituer doivent en demander l’autorisation au ministère de l’Intérieur et des Affaires religieuses (art. 3 a)) et qu’est passible d’une peine d’emprisonnement maximale de trois ans quiconque est reconnu coupable des infractions suivantes: être membre d’une des nombreuses organisations qui n’ont pas été autorisées ou aider, encourager ou utiliser ces organisations (art. 7); 2) l’ordonnance no 2/88 qui interdit les rassemblements ou manifestations de cinq personnes ou plus, que ce soit dans le but de troubler l’ordre public ou de commettre un délit; et 3) la loi de 1908 sur les associations illicites qui prévoient des peines d’emprisonnement de deux à trois ans et une amende pour quiconque est membre d’une association illicite, prend part à des réunions de ce type d’association, contribue à leurs objectifs, bénéficie de leur aide ou la sollicite ou, de quelque façon que ce soit, participe à leurs activités (art. 17.1). La commission demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les ordonnances 6/88 et 2/88, et la loi de 1908 sur les associations illicites, ne puissent pas s’appliquer à l’exercice du droit syndical tel que prévu par la convention, et de la tenir informée à cet égard.

    La commission prend aussi note des commentaires de la CISL selon lesquels: trois dirigeants de la Fédération indépendante des syndicats - Birmanie (FTUB), Nai Min Kyi, Aye Myint et Nai Yetka, ont été arrêtés le 16 juillet 2003 par la «Junte» et condamnés à mort le 28 novembre 2003 par le Tribunal de district de Rangoon en vertu de la loi sur la haute trahison. La CISL indique que les éléments suivants ont été présentés au procès: les contacts que ces trois personnes entretenaient avec la FTUB, la détention d’une version birmane du rapport de 1998 de la Commission d’enquête de l’OIT sur le travail forcé au Myanmar, et la détention d’une carte de visite professionnelle du chargé de liaison par intérim de l’OIT à Yangon. A cet égard, la commission note que le représentant gouvernemental a indiquéà la Commission de la Conférence que le premier recours que ces trois personnes ont intenté devant la Cour suprême a eu une issue positive, leurs condamnations étant commuées à des peines beaucoup plus légères. La commission note aussi que, dans sa seconde sentence du 14 octobre 2004, la Cour suprême a commué les peines infligées à Nai Min Kyi et à Aye Myint à des peines d’emprisonnement de deux ans, assorties de travail. La commission note en outre que, dans son second jugement, la Cour suprême a clairement indiqué que «le Myanmar étant Membre de l’Organisation des Nations Unies et de l’Organisation internationale du Travail, il entretient des communications et collabore avec de telles organisations. Toute personne peut communiquer et coopérer avec ces organisations. Le fait de communiquer et coopérer avec l’OIT ne constitue pas une infraction à la législation en vigueur au Myanmar.»

    La commission rappelle que le fait de participer à des activités syndicales ne confère pas d’immunité contre les sanctions prévues par le droit pénal ordinaire, mais que les autorités ne devraient pas se servir des activités syndicales licites comme prétexte pour procéder à des arrestations ou à des détentions arbitraires. De plus, la commission estime que les peines de détention, en particulier lorsqu’elles sont assorties de travail, qui sont infligées aux personnes ayant participéà des activités syndicales constituent une violation flagrante des principes de la liberté syndicale. Notant que les jugements de la Cour suprême font référence à des contacts avec des organisations illicites à l’étranger, ce qui est ambigu, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que nul ne puisse être sanctionné pour avoir été en contact avec un syndicat ou une association de travailleurs. Elle prie instamment le gouvernement de faire tout le nécessaire pour que les travailleurs et employeurs puissent exercer les droits qui leur sont garantis par la convention, dans un climat de pleine sécurité exempt de toute menace.

    La commission demande au gouvernement de répondre en détail, dans son prochain rapport, sur les graves questions que la CISL a évoquées. A nouveau, elle demande instamment au gouvernement de prendre, dans un très proche avenir, toutes les mesures nécessaires pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer librement les droits qui leur sont garantis par la convention et, en particulier, pour qu’ils puissent constituer les organisations de leur choix et s’y affilier, sans autorisation préalable, pour la défense et la promotion de leurs intérêts; pour que ces organisations puissent organiser librement leur gestion et leurs activités et formuler leurs programmes d’action; pour que des organisations du premier degré puissent constituer des fédérations et des confédérations; et pour que ces dernières puissent elles-mêmes s’affilier, sans aucun obstacle, à des organisations internationales de travailleurs et d’employeurs (articles 2, 3, 5 et 6 de la convention).

    [Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2005.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

    La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement, des informations présentées oralement par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 2003, du débat qui s’est ensuivi et du paragraphe spécial inséré en conséquence dans le rapport de la Commission de la Conférence pour signaler le défaut persistant d’application de la convention. La commission prend également note des observations reçues de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en 2002.

    La commission prend note des indications données par le gouvernement dans son dernier rapport, à l’effet que le Myanmar est en transition vers la démocratie et fait tout ce qui est en son pouvoir pour promouvoir les droits, les intérêts et le bien-être des travailleurs et pour trouver les moyens de prendre des mesures transitoires appropriées avant l’élaboration de la Constitution. Le gouvernement ajoute qu’aucune réponse positive aux commentaires de la commission relatifs à la création d’organisations syndicales du premier degré n’est à attendre avant l’apparition d’une Constitution de l’Etat forte.

    La commission se voit malgré tout conduite à rappeler qu’elle émet des commentaires constatant le défaut d’application de cette convention par le gouvernement tant en droit que dans la pratique pratiquement depuis la ratification de cet instrument, voici cinquante ans. Alors que le gouvernement continue de se référer à l’élaboration en cours de la nouvelle Constitution de l’Etat et à la recherche de mesures et moyens appropriés de développer les mécanismes existants pour que les associations de travailleurs soient en mesure de défendre les droits, les intérêts et le bien-être de leurs mandants, la commission a le profond regret de constater qu’il n’y a absolument aucun progrès à signaler sur le plan de l’élaboration d’un cadre législatif dans lequel des organisations de travailleurs libres et indépendantes pourraient être constituées. Elle prend dûment note du fait que le gouvernement évoque à nouveau dans son rapport des associations de travailleurs conçues comme des précurseurs de syndicats, qui assurent de leur mieux, pour l’heure, la défense et la promotion des intérêts des travailleurs. Elle prend dûment note également du regret exprimé par le gouvernement devant ses divergences par rapport à lui quant au rôle que de telles associations sont appelées à jouer. Sur ce point, la commission est conduite à réaffirmer qu’elle a toujours considéré que ces associations n’ont aucun des attributs caractéristiques des organisations de travailleurs libres et indépendantes dont la création est l’objectif de la convention. La commission craint, en fait, que la persistance du gouvernement à arguer de la conformité du rôle de ces associations à vocation sociale par rapport à la convention ne soit que l’expression pure et simple de l’insignifiance qu’il attribue aux questions fondamentales qu’elle soulève depuis de nombreuses années.

    La commission prend dûment note des commentaires formulés par la CISL au regard de cette situation en ce qui concerne: les restrictions importantes que la loi de 1926 sur les syndicats fait peser sur la liberté syndicale; la dissolution de tous les syndicats en 1988 par le régime militaire; l’ordonnance no 2/88 de 1988 qualifiant d’infraction pénale toute réunion, marche ou manifestation de cinq personnes ou plus; la loi sur les associations illégales, qui punit de l’emprisonnement l’appartenance à une association qualifiée comme telle. La CISL se réfère en outre à l’application pratique de la convention et, plus spécifiquement, à la Fédération indépendante des syndicats - Birmanie (FTUB) qui, dans le contexte évoqué ci-dessus, est contrainte de fonctionner clandestinement depuis sa création en 1991. La CISL signale en outre que deux dirigeants de la FTUB et un autre dirigeant syndical sont toujours en prison pour le seul fait d’avoir exercé leurs droits syndicaux, sans que les charges retenues contre eux leur aient été signifiées et sans non plus le moindre procès en perspective. Enfin, la CISL signale le statut d’illégalité persistante dans lequel est tenu le Syndicat des gens de mer de Birmanie (SUB), affiliéà la FTUB, et l’interdiction qui continue de frapper les contrats d’engagement de marins conclus sous l’égide de la Fédération internationale des travailleurs des transports.

    La commission a le regret de constater que le gouvernement ne fournit aucune information en réponse à ces questions graves soulevées par la CISL. Rappelant que le respect des libertés civiles est un préalable indispensable à l’exercice de la liberté syndicale, la commission prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer les droits qui leur sont garantis par la convention dans un climat de sécurité exempt de toute menace.

    La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires dans un très proche avenir pour que les travailleurs et les employeurs puissent exercer librement les droits qui leur sont garantis par la convention, et en particulier: qu’ils puissent constituer les organisations de leur choix et s’y affilier, sans autorisation préalable, pour la défense et la promotion de leurs intérêts; que ces organisations puissent organiser librement leur gestion et leur activité et formuler leur programme d’action; que des organisations du premier degré puissent constituer des fédérations et des confédérations, qui puissent elles-mêmes s’affilier sans aucun obstacle à des organisations internationales (articles 2, 3, 5 et 6 de la convention).

    Observation (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

    La commission prend note des informations contenues dans les rapports du gouvernement. Elle note, en particulier, l’indication du gouvernement dans son dernier rapport selon laquelle le ministre du Travail a engagé des discussions approfondies avec le bureau du ministre de la Justice et d’autres ministères et organisations concernés au sujet des mesures devant être appliquées pour exprimer la volonté du gouvernement de se conformer aux dispositions de la convention. La commission est néanmoins tenue de souligner que, depuis plus de huit ans, elle prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle l’élaboration d’une nouvelle Constitution d’Etat était en cours ainsi que la révision et le remaniement d’anciennes lois relatives au travail, dont la loi sur les syndicats, sans qu’aucun progrès tangible n’ait été réaliséà ce propos. Tout en notant l’affirmation du gouvernement selon laquelle un important progrès a été réalisé avec la création de l’Association du Myanmar des gens de mer à l’étranger, la commission considère qu’aucun progrès réel n’a été accompli pour fournir un cadre législatif dans lequel des organisations de travailleurs libres et indépendantes peuvent être constituées.

    La commission rappelle à nouveau qu’elle formule depuis plus de quarante ans des commentaires sur le défaut d’application de cette convention par le gouvernement, tant dans la législation que dans la pratique. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de garantir le droit pour les travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix pour la défense de leurs intérêts et de s’y affilier, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces organisations, des syndicats de premier degré, des fédérations et des confédérations, et afin de garantir le droit, pour ces syndicats de premier degré, fédérations et confédérations, de s’affilier à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention).

    De plus, tout en notant l’indication dans les rapports du gouvernement selon laquelle les associations de protection des travailleurs et les comités de surveillance pour les travailleurs assurent la protection des droits des travailleurs et peuvent être considérés comme remplaçant les syndicats, la commission est d’avis que de telles associations ne constituent pas un substitut au droit fondamental d’organisation prévu dans la convention.

    La commission invite donc fermement le gouvernement à prendre les mesures nécessaires afin de garantir pleinement le droit de se syndiquer et celui pour les organisations de s’affilier à des organisations internationales, sans se heurter à des obstacles. En outre, elle prie à nouveau le gouvernement de fournir, avec son prochain rapport, copie de toutes révisions proposées de la loi sur les syndicats, actuellement en cours d’examen.

    [Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 2003.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2001, publiée 90ème session CIT (2002)

    La commission constate avec regret que pour la troisième année consécutive, elle n’a pas reçu de rapport de la part du gouvernement.

    La commission note l’information communiquée oralement par le représentant du gouvernement à la Commission de la Conférence en 2001, ainsi que la discussion qui y a eu lieu et le paragraphe spécial qui en a résulté dans le rapport de ladite commission, pour défaut persistant de mettre en oeuvre la convention.

    Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l’élaboration d’une nouvelle Constitution d’Etat était en cours ainsi que la révision et le remaniement d’anciennes législations, dont la loi sur les syndicats. Cependant, la commission avait rappelé que le gouvernement se référait depuis plusieurs années à l’élaboration d’une nouvelle législation du travail et d’une nouvelle Constitution. Elle déplore une fois de plus qu’aucun élément tangible de progrès dans ce sens n’a été portéà sa connaissance.

    La commission rappelle que cela fait plus de quarante ans qu’elle formule des commentaires sur le défaut d’application de cette convention, tant en droit qu’en pratique. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin, notamment, de garantir le droit pour les travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix pour la défense de leurs intérêts et de s’y affilier, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces organisations, des syndicats de premier degré, des fédérations et des confédérations, et afin de garantir le droit, pour ces syndicats de premier degré, fédérations et confédérations, de s’affilier à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention).

    La commission déplore profondément le manque de coopération de la part du gouvernement, qui se traduit notamment par l’absence totale de rapport au titre de cette convention au cours des années passées malgré un défaut sérieux d’application de ses dispositions.

    La commission ne peut que réaffirmer une fois de plus l’urgence, pour le gouvernement, de prendre les mesures nécessaires afin de garantir pleinement le droit de se syndiquer et celui, pour les organisations, de s’affilier à des organisations internationales sans se heurter à aucun obstacle. En outre, elle prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie, dans son prochain rapport, du projet le plus récent de révision de la loi sur les syndicats afin de pouvoir apprécier la conformité de ce texte avec la convention.

    Observation (CEACR) - adoptée 2000, publiée 89ème session CIT (2001)

    La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu.

    Dans ses commentaires antérieurs, la commission a pris note de la mention d’un paragraphe spécial dans le rapport de 1999 de la Commission de l’application des normes de la Conférence pour défaut continu d’application de la convention par le Myanmar.

    La commission avait noté en outre qu’il était procédéà l’élaboration d’une nouvelle Constitution de l’Etat, ainsi qu’à la révision et à la refonte de l’ancienne législation du travail, y compris de la loi sur les syndicats. La commission avait cependant rappelé que depuis de nombreuses années le gouvernement annonçait l’élaboration d’une nouvelle législation du travail et d’une nouvelle Constitution. Elle avait déploré qu’aucun élément tangible de progrès dans ce sens n’ait été portéà sa connaissance.

    La commission rappelle en outre que depuis plus de quarante ans elle formule des commentaires sur le défaut d’application de cette convention, tant en droit qu’en pratique. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin, notamment, de garantir le droit pour les travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix pour la défense de leurs intérêts et de s’y affilier, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces organisations, des syndicats de premier degré, des fédérations et des confédérations, et afin de garantir le droit, pour ces syndicats de premier degré, fédérations et confédérations, de s’affilier à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention).

    La commission regrette profondément le manque de coopération manifesté par le gouvernement, notamment l’absence totale de rapports au titre de la présente convention depuis plusieurs années malgré le grave défaut d’application de ses dispositions.

    La commission ne peut que réaffirmer une fois de plus l’urgence, pour le gouvernement, de prendre les mesures nécessaires afin de garantir pleinement le droit de se syndiquer et celui, pour les organisations, de s’affilier à des organisations internationales sans se heurter à aucun obstacle. En outre, elle prie le gouvernement de communiquer copie, dans son prochain rapport, du projet le plus récent de révision de la loi sur les syndicats afin de pouvoir apprécier la conformité de ce texte avec la convention.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 89esession.]

    Observation (CEACR) - adoptée 1999, publiée 88ème session CIT (2000)

    La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu.

    La commission prend note des informations écrites et orales fournies par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 1999, de la discussion qui a fait suite et de la mention subséquente d'un paragraphe spécial dans le rapport de la Commission de la Conférence pour défaut continu d'application de la convention.

    Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait noté qu'il était procédé à l'élaboration d'une nouvelle Constitution de l'Etat, ainsi qu'à la révision et à la refonte de l'ancienne législation du travail, y compris de la loi sur les syndicats. La commission avait cependant rappelé que depuis plus de cinq ans le gouvernement annonçait l'élaboration d'une nouvelle législation du travail et d'une nouvelle Constitution. Elle déplore qu'aucun élément tangible de progrès dans ce sens n'ait été porté à sa connaissance.

    La commission rappelle en outre que cela fait plus de quarante ans qu'elle formule des commentaires sur le défaut d'application de cette convention, tant en droit qu'en pratique. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin, notamment, de garantir le droit pour les travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix pour la défense de leurs intérêts et de s'y affilier, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces organisations, des syndicats de premier degré, des fédérations et des confédérations, et afin de garantir le droit, pour ces syndicats de premier degré, fédérations et confédérations, de s'affilier à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention).

    La commission ne peut que réaffirmer une fois de plus l'urgence, pour le gouvernement, de prendre les mesures nécessaires afin de garantir pleinement le droit de se syndiquer et celui, pour les organisations, de s'affilier à des organisations internationales sans se heurter à aucun obstacle. En outre, elle prie le gouvernement de communiquer copie, dans son prochain rapport, du projet le plus récent de révision de la loi sur les syndicats afin de pouvoir apprécier la conformité de ce texte avec la convention.

    Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

    La commission prend note des informations écrites et orales fournies par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 1998, de la discussion qui a fait suite et de la mention subséquente d'un paragraphe spécial dans le rapport de la Commission de la Conférence pour défaut continu d'application de la convention. Elle prend également note des informations communiquées par le gouvernement dans son dernier rapport.

    La commission note que, d'après le rapport du gouvernement, il est procédé actuellement à l'élaboration d'une nouvelle Constitution de l'Etat, ainsi qu'à la révision et à la refonte de l'ancienne législation du travail, y compris de la loi sur les syndicats. Le gouvernement ajoute qu'il ne pourra y avoir application pratique des dispositions de la nouvelle loi sur les syndicats que lorsque cet instrument aura été adopté.

    La commission doit cependant rappeler que depuis plus de cinq ans le gouvernement annonce l'élaboration d'une nouvelle législation du travail et d'une nouvelle Constitution sans qu'aucun élément tangible de progrès dans ce sens n'ait été porté à sa connaissance. Elle rappelle en outre une fois de plus que cela fait plus de quarante ans qu'elle formule des commentaires sur le défaut d'application de cette convention, tant en droit qu'en pratique. Dans ses précédents commentaires, la commission a appelé instamment le gouvernement à prendre les mesures nécessaires afin, notamment, de garantir le droit pour les travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix pour la défense de leurs intérêts et de s'y affilier, en n'ayant à se conformer qu'aux règles de ces organisations, des syndicats du premier degré, des fédérations et des confédérations, et afin de garantir le droit, pour ces syndicats du premier degré, fédérations et confédérations, de s'affilier à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention). La commission ne peut que réaffirmer l'urgence, pour le gouvernement, de prendre les mesures nécessaires afin de garantir pleinement le droit de se syndiquer et celui, pour les organisations, de s'affilier à des organisations internationales sans se heurter à aucun obstacle. Elle prie le gouvernement de communiquer copie, dans son prochain rapport, du projet le plus récent de révision de la loi sur les syndicats afin de pouvoir apprécier la conformité de ce texte avec la convention.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 87e session.]

    Observation (CEACR) - adoptée 1997, publiée 86ème session CIT (1998)

    La commission prend note de la déclaration du représentant gouvernemental faite devant la Commission de la Conférence en 1997, ainsi que des discussions qui ont eu lieu en son sein, qui ont abouti à l'inclusion, dans le rapport de la Commission de la Conférence, d'un paragraphe spécial pour défaut continu d'application. Elle doit une fois encore exprimer son profond regret de n'avoir pas reçu de rapport du gouvernement alors que la Commission de la Conférence, dans ses conclusions, a instamment prié le gouvernement de communiquer un rapport détaillé au Bureau. Elle constate avec une très profonde préoccupation que le plus récent rapport du gouvernement a été reçu il y a plus de trois ans.

    Dans ces conditions, la commission ne peut que relever avec le plus profond regret qu'elle formule des commentaires sur le défaut continu d'application de cette convention depuis plus de 40 ans, aussi bien dans la législation que dans la pratique. Dans ses précédents commentaires, elle avait, entre autres, prié instamment le gouvernement d'adopter les mesures nécessaires pour garantir le droit des travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, des syndicats de base, des fédérations et des confédérations de leur choix en vue de promouvoir et de défendre leurs intérêts, et de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières, ainsi que le droit des syndicats de base, des fédérations et des confédérations de s'affilier librement à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention). Le Bureau n'ayant reçu aucune information sur ce point, la commission doit une fois encore exhorter le gouvernement à adopter d'urgence les mesures nécessaires pour garantir pleinement le droit syndical et le droit de s'affilier librement aux organisations internationales.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 86e session.)]

    Observation (CEACR) - adoptée 1996, publiée 85ème session CIT (1997)

    La commission note la déclaration du représentant gouvernemental faite, en 1996, devant la Commission de la Conférence ainsi que le débat qui a eu lieu en son sein. Toutefois, elle se doit à nouveau de constater avec regret que le gouvernement n'a pas communiqué le rapport que la Commission de la Conférence lui avait demandé dans ses conclusions. Elle constate aussi avec regret que, dans sa déclaration faite devant la Commission de la Conférence, le représentant gouvernemental s'est borné à reprendre les commentaires formulés ces dernières années sur l'intention de son pays d'appliquer la convention, sans être en mesure d'indiquer si des progrès quelconques ont été accomplis dans le droit et dans la pratique. Par ailleurs, tout en notant que le représentant gouvernemental a signalé à la Commission de la Conférence que le gouvernement avait officiellement demandé au Bureau de fournir une assistance technique en vue d'élaborer la législation sur les syndicats et l'avait invité à se rendre dans le pays à une date fixée d'un commun accord, de sorte qu'il puisse apporter sa contribution à l'élaboration de la nouvelle législation, la commission constate avec regret que la mission programmée pour mai 1996 n'a pu être reçue.

    Dans ces circonstances, la commission se doit à nouveau de rappeler qu'elle formule des commentaires, depuis maintenant quarante ans, sur les graves incompatibilités entre, d'une part, le droit et la pratique du pays et, d'autre part, la convention. En particulier, elle demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de garantir aux travailleurs le droit de constituer, sans autorisation préalable, des syndicats de base, fédérations et confédérations de leur choix pour promouvoir et défendre leurs intérêts ainsi que le droit d'adhérer à ces organisations à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières, et en vue de garantir à tous les syndicats de base, fédérations ou confédérations le droit de s'affilier à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention). Aucun progrès réel n'ayant été communiqué au Bureau, la commission se doit à nouveau d'engager le gouvernement à adopter, sans plus tarder, les mesures nécessaires afin de garantir pleinement le droit de se syndiquer et le droit de s'affilier, sans entrave, à des organisations internationales.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 85e session.]

    Observation (CEACR) - adoptée 1995, publiée 82ème session CIT (1995)

    La commission prend note du rapport du gouvernement, ainsi que des informations écrites et orales communiquées à la Commission de la Conférence en juin 1994 et de la discussion détaillée qui a eu lieu à cette occasion. Elle note, en outre, avec préoccupation les conclusions du Comité de la liberté syndicale sur le cas no 1752 (295e rapport, paragr. 87 à 119, approuvé par le Conseil d'administration à sa 261e session, nov. 1994) en ce qui concerne les restrictions imposées au droit des gens de mer de constituer un syndicat indépendant pour défendre leurs droits et leurs intérêts fondamentaux et de s'affilier à une fédération internationale, restrictions qui ne font qu'illustrer une fois de plus la manière dont la liberté syndicale est bafouée au Myanmar.

    La commission note, à la lecture du rapport du gouvernement, que la Convention nationale convoquée pour adopter les principes fondamentaux qui serviront de base à la nouvelle Constitution poursuit ses travaux. Le gouvernement indique en outre que l'étude détaillée des questions liées au travail, notamment le droit d'association des travailleurs, sera entreprise en temps utile.

    La commission note qu'une mission du BIT s'est rendue récemment dans le pays afin de poursuivre le dialogue sur les mesures qui doivent être prises pour mettre le droit et la pratique du Myanmar en conformité avec la convention.

    La commission rappelle à cet égard qu'elle a formulé des commentaires au sujet des graves incompatibilités existant entre le droit et la pratique du gouvernement, d'une part, et la convention, de l'autre, depuis 40 ans. Elle exprime donc le ferme espoir que, grâce à l'assistance du BIT, le gouvernement prendra, dans un très proche avenir, les mesures nécessaires pour qu'une nouvelle législation soit adoptée qui permette aux travailleurs, sans distinction d'aucune sorte et sans autorisation préalable, de constituer les syndicats de base, les fédérations et les confédérations de leur choix, et de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières, afin de servir et de défendre leurs intérêts, et garantisse le droit des syndicats de base, fédérations ou confédérations de s'affilier à des organisations internationales, rendant ainsi le droit et la pratique pleinement conformes aux exigences des articles 2, 5 et 6 de la convention. La commission prie le gouvernement de rendre compte en détail des progrès accomplis à cet égard et de joindre à son prochain rapport une copie de tout projet de législation pertinent.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 82e session.]

    Observation (CEACR) - adoptée 1995, publiée 83ème session CIT (1996)

    La commission prend note des informations écrites et orales fournies à la Commission de la Conférence en 1995, ainsi que de la discussion approfondie qui a eu lieu en son sein. Elle doit cependant constater avec regret qu'elle n'a pas reçu le rapport du gouvernement que la Commission de la Conférence lui avait demandé dans ses conclusions.

    La commission souhaite rappeler qu'elle fait des commentaires depuis maintenant quarante ans sur les graves incompatibilités entre, d'une part, le droit et la pratique du gouvernement et, d'autre part, la convention. En particulier, la commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer aux travailleurs le droit de constituer, sans autorisation préalable, des organisations, fédérations et confédérations de base de leur propre choix pour promouvoir et défendre leurs intérêts et garantir le droit de toute organisation, fédération ou confédération de base de ce type à s'affilier à des organisations internationales (articles 2, 5 et 6 de la convention).

    La commission prend bonne note des indications fournies par le gouvernement à la Commission de la Conférence de 1995, dans lesquelles il déclare vouloir connaître l'avis du Bureau concernant le projet de loi sur les syndicats afin de contribuer à l'effort visant l'application des principes de la liberté syndicale, ainsi que de l'expression de son désir sincère de coopérer avec l'OIT et de l'engagement qu'il prend de mettre son droit et sa pratique en harmonie avec la convention no 87. Cependant, comme aucun progrès réel n'a encore été communiqué au Bureau, la commission se doit à nouveau de prier instamment le gouvernement d'adopter de toute urgence les mesures nécessaires afin de garantir pleinement le droit de se syndiquer ainsi que le droit de s'affilier, sans obstacle, à des organisations internationales.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 83e session.]

    Observation (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

    La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des informations écrites et orales fournies à la Commission de la Conférence, en juin 1993, et de la discussion détaillée qui a eu lieu à cette occasion.

    Faisant suite à ses précédents commentaires, la commission note que, selon les informations communiquées à la Commission de la Conférence et selon le rapport du gouvernement, la Convention nationale a été convoquée le 9 janvier 1993 et a formulé à cette occasion les principes fondamentaux devant être consacrés par la nouvelle Constitution pour garantir les droits fondamentaux, notamment la liberté syndicale des travailleurs. Elle note en outre que de nouvelles lois sur le travail, qui reflètent les principes de la convention, remplaceront d'anciennes lois, à savoir la loi no 6 de 1964 et le règlement d'application no 5 de 1976, qui instauraient un système de monopole syndical, et que les autorités compétentes ont été saisies de ces nouveaux instruments actuellement à l'examen.

    Tout en prenant note de ces informations, comme la Commission de la Conférence, la commission se voit dans l'obligation de souligner que le gouvernement a donné des assurances du même genre depuis plusieurs années. Elle constate avec inquiétude qu'aucun progrès réel n'a été accompli dans ce domaine, ni sur le plan législatif ni dans la pratique. Elle appelle donc instamment le gouvernement à faire en sorte qu'une nouvelle législation soit adoptée à l'effet de permettre aux travailleurs de créer les organisations de base, les fédérations et les confédérations de leur choix selon les structures qu'ils jugent appropriées et sans autorisation préalable, afin de rendre la législation et la pratique pleinement conformes aux exigences des articles 2, 5 et 6 de la convention, ratifiée par ce pays voici plus de trente-cinq ans. Elle prie le gouvernement de faire rapport de manière détaillée sur tout progrès accompli à cet égard et de lui communiquer copie, avec son prochain rapport, des projets de lois pertinents.

    DEMANDES Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1994. #DATE_RAPPORT:30:06:1994

    Observation (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

    Se référant à ses précédentes observations, la commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des informations écrites et orales communiquées à la Commission de la Conférence en juin 1992 et des discussions approfondies qui ont eu lieu à cette occasion.

    Au cours de ces discussions sur le monopole syndical institué en application des articles 2 et 6(b) du règlement no 5 de 1976, le gouvernement a fait état de la rédaction en cours d'une nouvelle législation du travail pour traduire les changements survenus dans le pays, et plus précisément la refonte de la Constitution selon les principes d'un système démocratique multipartite et la réorientation de la politique du pays vers l'économie de marché. La Commission de la Conférence a appelé instamment le gouvernement à adopter dès que possible une législation supprimant les restrictions du règlement de 1976 à la liberté des travailleurs de s'affilier aux syndicats de leur choix. Dans son rapport, le gouvernement indique que la nouvelle Constitution doit être élaborée selon les principes directeurs adoptés lors de la convention nationale des représentants en janvier 1993.

    Considérant l'activité que déploie actuellement le pays sur le plan législatif, la commission prie le gouvernement de veiller à ce que les principes de la liberté d'association soient consacrés par la nouvelle législation, de sorte que les travailleurs puissent créer les syndicats de premier niveau, les fédérations et les confédérations de leur choix, et de choisir les structures qui leur conviennent, sans autorisation préalable, conformément aux articles 2, 5 et 6 de la convention. La commission veut croire que le prochain rapport du gouvernement contiendra des informations sur tous progrès intervenus à cet égard.

    Observation (CEACR) - adoptée 1992, publiée 79ème session CIT (1992)

    La commission note que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu. Elle a cependant pris connaissance des informations écrites communiquées par le gouvernement, de la déclaration d'un représentant gouvernemental ainsi que du long débat qui a suivi devant la Commission de la Conférence en 1991.

    Se référant à son observation précédente, la commission note que, selon les informations écrites transmises par le gouvernement, la loi no 6 de 1964 et le règlement d'application no 5 de 1976 sont tombés en désuétude, bien qu'il n'y ait pas eu d'amendement formel ou d'abrogation, et qu'un grand nombre d'organisations de travailleurs existent dans la pratique. La commission observe également qu'un représentant gouvernemental a déclaré qu'avec l'abolition du système politique de parti unique la structure de syndicat unique a automatiquement disparu et que la loi et le règlement organisant l'unicité syndicale sont automatiquement devenus caducs.

    Tout en prenant note de ces indications déjà données précédemment, la commission se voit obligée de réitérer son observation antérieure et demande instamment à nouveau au gouvernement d'adopter dans un proche avenir les textes nécessaires pour lever les restrictions à la liberté des travailleurs et des employeurs de créer des organisations professionnelles de leur choix et permettre la possibilité du pluralisme syndical au niveau des syndicats, des fédérations et des confédérations, afin de mettre sa législation et sa pratique en conformité avec les exigences des articles 2, 5 et 6 de la convention.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 79e session.]

    Observation (CEACR) - adoptée 1991, publiée 78ème session CIT (1991)

    La commission note les informations fournies par un représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 1989, ainsi que celles qui figurent dans le rapport du gouvernement.

    Elle rappelle que depuis de nombreuses années elle soulève la question du monopole syndical instauré par l'article 9 de la loi no 6 de 1964, dans sa teneur modifiée, et par les articles 2 et 6 b) de son règlement d'application no 5 de 1976. Ces dispositions établissent clairement une structure de syndicalisme unique et empêchent les travailleurs de créer d'autres organisations en dehors de cette structure. Un tel régime est en contradiction avec les articles 2, 5 et 6 de la convention, qui prévoient le droit de libre association à des fins syndicales pour tous les travailleurs, y compris le droit de constituer des fédérations et confédérations.

    Dans les informations fournies à la Commission de la Conférence en 1989 et réitérées dans son rapport, le gouvernement indique que des changements politiques, économiques et sociaux sont actuellement en cours dans le pays. Des élections libres et régulières ont eu lieu en 1990 et l'élaboration d'une nouvelle Constitution constitue actuellement l'une des principales priorités. Le gouvernement a déclaré que cette nouvelle Constitution comportera des dispositions prévoyant expressément la liberté syndicale et la protection du droit syndical. Le gouvernement espère que cette Constitution sera en harmonie avec la convention no 87. La commission partage les espérances du gouvernement à cet égard et le prie de la tenir informée de toute évolution en ce sens.

    En outre, le gouvernement déclare dans son rapport que les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'y affilier, et qu'aucune disposition légale ou administrative ne doit pouvoir les en empêcher. La commission note que ces assertions ne paraissent pas concorder avec les dispositions susmentionnées si celles-ci sont toujours en vigueur. Or le gouvernement ne précise pas si elles ont été abrogées ou modifiées pour les mettre en conformité avec les exigences de la convention. Si cela a néanmoins été le cas, la commission aimerait que le gouvernement communique copie de la législation applicable en l'espèce. Au cas où il n'y aurait eu ni modification ni abrogation, il revient une fois de plus à la commission d'inviter à nouveau le gouvernement à adopter les dispositions nécessaires pour mettre sa législation et sa pratique en pleine conformité avec la convention, qui a été ratifiée il y a plus de trente-cinq ans.

    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 78e session et de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1991.]

    Observation (CEACR) - adoptée 1989, publiée 76ème session CIT (1989)

    La commission a pris note de la réponse du gouvernement à ses commentaires précédents.

    Elle rappelle que depuis de nombreuses années elle soulève la question du monopole syndical instauré par l'article 9 de la loi no 6 de 1964, dans sa teneur modifiée, et par les articles 2 et 6 b) de son règlement d'application no 5 de 1976. Ces dispositions établissent clairement une structure de syndicalisme unique et empêchent les travailleurs de créer d'autres organisations en dehors de cette structure. Ce régime est en contradiction avec les articles 2, 5 et 6 de la convention, qui stipulent le droit de libre association à des fins syndicales pour tous les travailleurs, y compris le droit de constituer des fédérations et des confédérations.

    Dans ses rapports précédents, le gouvernement a déclaré que les travailleurs, ayant été par le passé déçus par l'expérience d'une structure syndicale pluraliste, avaient décidé eux-mêmes d'instituer une structure syndicale unique. Celle-ci n'a donc pas été imposée par la loi. Du point de vue du gouvernement, il s'ensuit que la structure actuelle ne pourrait, par conséquent, être modifiée qu'avec l'assentiment des travailleurs, et ceux-ci n'ont pas encore formulé de proposition dans ce sens.

    A plusieurs occasions, le gouvernement a indiqué que la législation en vigueur n'empêche pas les travailleurs de constituer d'autres associations s'ils le désirent. Il en veut pour preuve que divers groupes de membres de professions libérales ont créé des associations pour leur propre compte. Cette assertion concerne apparemment des médecins, du personnel infirmier, des acteurs et des écrivains. Dans ses commentaires précédents, la commission a prié le gouvernement de fournir des informations complémentaires quant à la nature de ces associations et des activités qu'elles peuvent exercer. Le gouvernement indique dans son rapport que des changements politiques majeurs ont lieu actuellement. En particulier, l'ancien régime de parti unique est en cours de transformation en un régime à partis multiples. Cette transformation incite le gouvernement à conclure qu'il serait futile de répondre de façon détaillée au sujet d'une situation qui n'existe plus. Le gouvernement exprime au surplus l'espoir que dans ses futurs rapports il pourra être en mesure de faire état d'une pleine conformité de la législation avec la convention.

    Compte tenu de cette nouvelle situation et étant donné que le gouvernement s'est déclaré prêt à respecter ses obligations en vertu de la convention, la commission veut croire qu'il prendra effectivement les mesures nécessaires pour mettre sa législation en conformité avec cette dernière, en particulier avec son article 2. Elle rappelle également que les services techniques et consultatifs du Bureau demeurent à sa disposition en cas de besoin.

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