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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2021, Publication : 109ème session CIT (2021)

2021-KNM-087-Fr

Informations écrites communiquées par le gouvernement

Le gouvernement a communiqué les informations écrites ci-après, ainsi que des copies de la loi modifiant la loi sur les syndicats et sa note explicative.

En ratifiant la convention no 87 de l’OIT, le Cambodge s’est engagé à défendre et promouvoir la liberté syndicale et à protéger le droit syndical. À cet égard, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle (MTFP) du Royaume du Cambodge voudrait apporter les mises au point suivantes quant à l’application de la convention no 87:

1. Allégation de l’Internationale de l’éducation

Nous regrettons que M. RONG Chhun ait été arrêté le 31 juillet 2020. Nous aimerions profiter de cette occasion pour souligner qu’il a été arrêté en raison de ses activités le long de la frontière, animé de l’intention d’inciter au désordre social, au chaos et au soulèvement touchant à la sécurité nationale, qui n’avaient pas de rapport avec l’exercice d’activités syndicales.

Nous regrettons tout autant la situation d’autres membres de l’Association des enseignants indépendants du Cambodge (AEIC) et de son président, cités dans l’observation de l’Internationale de l’éducation d’octobre 2020. Ces cas sont examinés par la justice et nous serons en mesure de fournir des informations détaillées et des mises à jour sur ces cas lorsque nous en aurons été informés par le tribunal par l’intermédiaire du ministère de la Justice (MJ).

Comme le garantit la Constitution, la loi traite de manière égale tous les citoyens cambodgiens, indépendamment de leur affiliation politique, leur profession ou statut social, etc. Les détenus et prisonniers sont poursuivis et condamnés non pas pour ce qu’ils sont, mais pour les délits qu’ils ont commis.

Le Cambodge déploie tous ses efforts pour assurer un contexte propice à l’exercice des droits syndicaux exempt de violence et d’intimidation; toutefois, les droits syndicaux légitimes ne peuvent être utilisés comme un bouclier pour ceux qui violent la loi, qui dénigrent l’état de droit et contaminent les citoyens respectueux de la loi.

2. Allégation de la Confédération syndicale internationale

Après réception de l’observation de la Confédération syndicale internationale datée du 1er septembre 2019, concernant la prétendue répression violente de grèves par des hommes de main et la détention de dirigeants syndicaux ayant organisé la grève dans le secteur de l’habillement, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle (MTFP) a contacté les travailleurs et les employeurs concernés afin de recueillir des informations détaillées. Toutefois, obtenir d’eux un retour d’information pendant la pandémie a demandé du temps. Un complément d’information sera soumis à la commission dans notre réponse à la demande directe.

3. Droits syndicaux et libertés civiles

Meurtres de syndicalistes

Compte tenu des dernières informations en date concernant le cas no 2318 que nous avons échangées avec le Comité de la liberté syndicale dans notre communication du 31 janvier 2020, aucun élément nouveau n’est à signaler en raison de la pandémie de COVID-19.

Incidents survenus durant les manifestations de janvier 2014

Comme nous l’avons déjà indiqué, le MTFP et le MJ ont mis en place un groupe de travail et prié les organisations syndicales concernées de fournir des informations sur leurs affaires judiciaires afin que les deux ministères puissent donner suite auprès de la justice afin d’accélérer le règlement dans le respect des procédures légales applicables. S’agissant de ces affaires en cours, les tribunaux ont rencontré certaines difficultés, en particulier un manque de collaboration des parties, et la nature complexe des procédures pénales, qui nécessitent un complément d’enquête. Certaines impliquent des préjudices civils qui nécessitent l’accord mutuel à la fois des plaignants et des défendeurs pour mettre un terme à la procédure civile. Le MTFP et le MJ vont continuer à fournir une aide juridique aux parties afin de mener à terme tous les cas en attente dans le respect total des procédures légales en vigueur.

Formation des forces de police en ce qui concerne les actions collectives et de protestation

En octobre 2019, le MTFP a organisé, en collaboration avec le ministère de l’Intérieur, l’OIT et le bureau du Haut-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies au Cambodge, une formation des formateurs de deux jours sur «les droits de grève et de manifestation pacifique», menée en quatre sessions avec 128 participants, ainsi qu’une formation de suivi sur «les droits de grève et de manifestation pacifique» pour 30 participants, qui étaient des policiers du commissariat général de la police nationale, dans le but de contribuer à la promotion de la liberté syndicale et de l’harmonie dans les relations professionnelles. Parmi les thèmes de cette formation figuraient les notions de conflit du travail, règlement des conflits du travail, grèves, manifestations et émeutes, mesures de prévention pour les grèves et manifestations, mécanismes de règlement pour les grèves et les manifestations, le cadre légal national et international de la liberté de réunion, et la définition, les objectifs et le champ d’application de la loi sur les manifestations pacifiques.

4. Questions législatives: la loi sur les syndicats

Le MTFP tient à signaler que la loi modifiant la loi sur les syndicats a été promulguée le 3 janvier 2020; une copie de cette loi et de sa note explicative sont jointes en annexe à votre intention.

Droit de s’organiser et de s’affilier à des syndicats de fonctionnaires, y compris pour les enseignants

Nous souhaitons réitérer que, conformément à la convention no 87; la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales (LAONG) et la loi sur les syndicats ont été adoptées dans le but de promouvoir la liberté syndicale et de conférer les mêmes droits et avantages aux travailleurs et aux employeurs des secteurs public et privé.

L’article 3 modifié s’applique aux travailleurs domestiques, aux personnels des transports aérien et maritime et aux travailleurs du secteur informel. Dès lors, les travailleurs domestiques, les travailleurs de l’économie informelle et les enseignants qui ne sont pas des fonctionnaires sont libres de former un syndicat de travailleurs de leur choix dans le but de promouvoir ou protéger leurs intérêts, tant que sont respectées les conditions énoncées dans la loi sur les syndicats.

Le 6 juillet 2020, le groupe de travail du ministère de l’Intérieur chargé des amendements à la LAONG a eu une réunion finale avec les CSO faisant suite aux six précédentes. À la suite de cette réunion, les CSO ont demandé des modifications à 17 articles de la LAONG. Le groupe de travail examinera la légalité des modifications proposées.

Obligation de lire et d’écrire le Khmer

Dans le contexte cambodgien, en particulier pour la promotion de relations professionnelles harmonieuses, lire et écrire le khmer est une obligation pour les ressortissants étrangers qui veulent devenir dirigeants syndicaux, et cette exigence n’est pas incompatible avec la convention no 87. Cette obligation a été acceptée après des discussions en ateliers consultatifs tripartites et, dans les faits, personne n’a exprimé de préoccupations à ce sujet.

Dissolution de syndicats par les tribunaux après la fermeture totale d’entreprises ou d’établissements au titre du nouvel article 28

Cet amendement va dans le sens des commentaires de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR) et de la suggestion avancée par les organisations syndicales pendant les ateliers de consultation tripartite. Suivant la disposition modifiée, un syndicat de travailleurs local ne sera pas immédiatement dissous lorsque l’entreprise ferme; il sera dissous lorsque les obligations de l’employeur vis-à-vis des travailleurs ont été remplies conformément à la décision de justice. Cette disposition vise à déterminer les obligations lorsqu’un syndicat de travailleurs n’a plus de personnalité juridique, et cette préoccupation n’existe plus dans la pratique.

Droit de demander la dissolution en application du nouvel article 29

Nous souhaitons préciser que, conformément à cette disposition légale, une demande adressée par une partie intéressée ou par 50 pour cent des membres d’un syndicat ne constitue pas un motif de dissolution d’une organisation syndicale par les tribunaux. Comme en dispose le même article, le tribunal peut décider de dissoudre une organisation lorsqu’il constate que le motif de dissolution est rempli et que l’organisation ne remédie pas à ses carences dans un délai laissé à la discrétion de la justice.

5. Application de la convention dans la pratique: mécanisme d’adjudication indépendant

Le MTFP tient à réaffirmer son engagement à soutenir le conseil d’arbitrage, en s’ajoutant au soutien technique et financier des parties prenantes, afin d’assurer la pérennité de cette institution. Le soutien du ministère s’exprime, entre autres choses, par le projet d’amendement à la loi sur le travail, actuellement à l’examen, qui étendra la compétence du conseil d’arbitrage qui pourra dorénavant traiter les conflits du travail individuels. Toutefois, le grand nombre de litiges individuels et de conflits collectifs dépassera les capacités de cette institution. C’est pourquoi nous avons besoin de l’appui de toutes les parties prenantes pour soutenir le bon fonctionnement de cette institution.

Nous tenons à souligner que, pour garantir l’application effective des sentences arbitrales contraignantes, la loi sur le travail impose de les enregistrer au même titre que les conventions collectives.

La réglementation ministérielle (Prakas) sur le conseil d’arbitrage permet aussi, en cas de non-respect d’une sentence arbitrale contraignante, à une partie d’introduire auprès de la justice une demande de reconnaissance ou d’application forcée.

Discussion par la commission

Représentante gouvernementale, secrétaire d’État, ministère du Travail et de la Formation professionnelle – Ma délégation s’associe aux autres représentants pour vous féliciter chaleureusement, vous et le vice-président, de votre élection à la présidence de la Commission de l’application des normes. Il ne fait aucun doute que la commission est une pierre angulaire du système de contrôle de l’OIT et qu’elle joue un rôle important pour garantir l’application des normes internationales du travail. C’est aussi le cas du gouvernement royal du Cambodge, qui reste déterminé à garantir le respect de tous les droits et obligations consacrés dans tous les instruments internationaux pertinents ratifiés par le pays. Celui-ci a ratifié un très grand nombre de conventions internationales du travail fondamentales et, à ce titre, il s’attache à coopérer étroitement, de manière constructive et dans le respect mutuel, avec tous les partenaires sociaux et de développement, afin de garantir la protection des droits des travailleurs et des relations professionnelles harmonieuses, de maintenir la paix et la stabilité, et d’accroître encore le développement économique du Cambodge.

C’est donc dans cet esprit que le Cambodge coopère activement et continuellement avec les organes de contrôle de l’OIT. En plus des informations que nous avons présentées de notre propre initiative à la commission le mois dernier, ma délégation a l’honneur de présenter aujourd’hui des informations actualisées sur l’application de la convention au Cambodge.

Je voudrais rappeler que, suite à l’adoption par cette commission des recommandations de la mission de contacts directs, et avec l’assistance technique du BIT, le Cambodge a approuvé une feuille de route relative à la mise en œuvre des recommandations de l’OIT sur la liberté syndicale, après d’intenses consultations avec toutes les parties prenantes concernées. Cette feuille de route définit des mesures assorties de délais et les lignes directrices qui visent à la mise en œuvre des recommandations de l’OIT et à renforcer l’application de la convention.

Grâce au soutien et à la coopération continus du BIT, nous avons progressé dans un certain nombre de domaines, en particulier dans l’enregistrement des syndicats, la protection des dirigeants syndicaux et le renforcement des capacités liées à l’exercice de la liberté syndicale, l’objectif de tout cela étant de promouvoir l’exercice de la liberté syndicale au Cambodge. Le Cambodge a sans cesse rendu compte au BIT et aux parties prenantes concernées des progrès qu’il a accomplis dans la mise en œuvre de cette feuille de route.

Ma délégation a pris note des observations de la commission d’experts concernant l’amendement à la loi sur les syndicats. Nous tenons à réaffirmer que la loi sur les syndicats est une législation essentielle pour garantir les droits des organisations professionnelles énoncés dans la Constitution du Royaume du Cambodge, la loi sur le travail et les conventions nos 87 et 98. Suite à son adoption en 2016, et pour faire face à la situation du pays d’alors, la loi sur les syndicats a été modifiée et est entrée en vigueur début 2020.

Ma délégation saisit cette occasion pour souligner que la modification de la loi sur les syndicats vise à: promouvoir davantage la liberté syndicale des travailleurs domestiques; faciliter les procédures et les formalités d’enregistrement et le maintien de l’enregistrement des syndicats; faciliter les conditions requises pour obtenir le statut de multireprésentants; et promouvoir les droits et les obligations des syndicats de travailleurs minoritaires.

À cet égard, permettez-moi d’attirer l’attention de la commission sur le fait que le nombre de syndicats enregistrés a considérablement augmenté, après l’adoption de la loi sur les syndicats en 2016 et sa modification en 2020. Au mois de mars 2021, il y avait 5 546 syndicats enregistrés, dont 290 l’ont été après la modification de la loi sur les syndicats, et ce en dépit de la pandémie de COVID-19. Ce chiffre montre bien à quel point l’environnement est propice à l’exercice de la liberté syndicale au Cambodge.

En ce qui concerne les droits des travailleurs et des employeurs de constituer des organisations et de s’y affilier, et pour répondre à l’observation de la commission d’experts, l’article 3 modifié de la loi sur les syndicats couvre les travailleurs domestiques, le personnel travaillant dans le transport aérien et le transport maritime, ainsi que ceux qui travaillent dans des secteurs informels. À cet égard, les travailleurs domestiques, les travailleurs de l’économie informelle et les enseignants qui ne sont pas fonctionnaires sont libres de former un syndicat de travailleurs de leur choix pour promouvoir ou protéger leurs intérêts, pour autant que les conditions énoncées dans la loi sur les syndicats soient remplies.

Par l’intermédiaire du ministère de l’Éducation, de la Jeunesse et des Sports, le gouvernement protège fermement les droits, la liberté, la dignité et la profession de tous les enseignants et personnels de l’éducation qui exercent librement leurs droits et leur liberté, dans le cadre de la législation en vigueur. Les enseignants et le personnel de l’éducation ont le droit de créer des associations, des syndicats et/ou des organisations éducatives pour défendre et protéger leurs droits légaux et leurs intérêts. En aucun cas une association, un syndicat d’enseignants et/ou une organisation éducative ne peut être le prolongement d’un parti politique, et chacun doit respecter la législation en vigueur. Ceux-ci peuvent participer à toute activité politique prévue par la législation pertinente.

En ce qui concerne l’application de l’article 2 de la convention, la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales est en cours de révision, après des consultations menées avec la société civile en 2020. L’amendement à cette loi devrait entrer en vigueur dans un avenir proche.

En réponse à l’observation de la commission d’experts concernant l’obligation de savoir lire et écrire en khmer, ma délégation souhaiterait faire observer que, dans le contexte cambodgien, cette obligation est essentielle, notamment pour promouvoir des relations professionnelles harmonieuses, et qu’elle n’est pas incompatible avec la convention. Cette obligation a fait l’objet d’un accord à la suite des discussions qui ont eu lieu lors des ateliers de consultation tripartites et, dans la pratique, aucune préoccupation n’a été exprimée à ce sujet.

Ma délégation a également pris note de l’observation de la commission d’experts concernant la dissolution des syndicats. Je tiens à réaffirmer que le gouvernement a fait tout son possible pour garantir la protection des intérêts des syndicats et de leurs membres. L’amendement à la disposition de la loi sur les syndicats concernant cette question fait suite au commentaire de la commission d’experts et à la proposition des partenaires sociaux formulée lors des consultations tripartites. En vertu de la disposition juridique modifiée, un syndicat local ne sera pas immédiatement dissous en cas de fermeture de l’entreprise, sauf si les employeurs ont rempli leurs obligations à l’égard de leurs travailleurs, conformément à la décision du tribunal. Cette disposition vise à déterminer dans quelle condition un syndicat de travailleurs peut conserver ou perdre sa personnalité juridique.

Ma délégation tient à préciser que, en vertu de l’article 29 modifié de la loi sur les syndicats, la partie concernée ou 50 pour cent des membres du syndicat peuvent déposer une demande de dissolution d’un syndicat auprès du tribunal, cette demande ne constituant néanmoins pas un motif de dissolution. En vertu de la même disposition légale, le tribunal peut décider de dissoudre une organisation professionnelle s’il y a effectivement un motif de dissolution et si l’organisation ne parvient pas à combler ses failles dans les délais fixés par le pouvoir judiciaire. Ce processus permet à l’entité concernée d’exercer son droit de se défendre devant les tribunaux et lui laisse suffisamment de temps pour prouver à l’autorité judiciaire qu’elle peut conserver sa personnalité juridique.

En dépit de l’adoption récente de l’amendement à la loi sur les syndicats, nous saisissons néanmoins cette occasion pour demander l’assistance technique du BIT et appeler toutes les parties prenantes concernées à collaborer en vue de faire mieux connaître cet amendement et de renforcer les capacités pour améliorer sa mise en œuvre. Nous souhaitons également informer la commission qu’un examen annuel de la mise en œuvre de la loi sur les syndicats est prévu dans le cadre du Forum sur le travail, un mécanisme tripartite au sein duquel sont examinés les problèmes qui se posent dans la mise en œuvre de la législation en vigueur.

Prenant note de l’observation de la commission d’experts sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, nous souhaitons réitérer notre ferme engagement en faveur du bon fonctionnement du Conseil d’arbitrage, moyennant le soutien technique et financier des parties prenantes pour assurer la pérennité de cette institution. Dans le contexte actuel du projet d’amendement à la loi sur le travail, le Conseil d’arbitrage pourra examiner les cas de conflits individuels du travail, à la lumière de critères spécifiques qui seront définis par les prakas du ministère du Travail et de la Formation professionnelle. Ce ministère œuvre en étroite collaboration avec la Fondation du Conseil d’arbitrage et le Conseil d’arbitrage à l’élaboration des règlements d’application nécessaires, après l’adoption de l’amendement à la loi sur le travail en la matière.

Ma délégation tient à réaffirmer que, au Cambodge, personne n’a jamais été arrêté ou condamné pour ses activités syndicales légitimes. En tant que pays démocratique respectant la règle de droit, tous les citoyens cambodgiens sont traités de manière égale devant la loi, quels que soient leur affiliation politique, leur profession ou leur statut social, comme le garantit la Constitution.

Comme indiqué précédemment, les syndicalistes sont aussi des citoyens, ils sont donc également responsables de leurs actes répréhensibles devant la loi. Certains sont poursuivis ou condamnés par l’autorité judiciaire non pas en raison de ce qu’ils sont, mais parce qu’ils ont commis des infractions. En aucun cas les droits syndicaux légitimes ne doivent servir d’écran pour enfreindre la loi. La convention n’accorde pas non plus de privilège aux syndicalistes en ce qui concerne leur impunité. Cela ne signifie pas pour autant que le Cambodge ne respecte pas les droits syndicaux légitimes. Nous faisons respecter et protégeons les droits syndicaux sans dénigrer l’état de droit et sans porter atteinte aux citoyens respectueux de la loi. Une fois encore, nous appelons à une collaboration véritable et sincère de la part des parties prenantes concernées, dans le contexte de leurs observations et allégations, en particulier en ce qui concerne la discrimination syndicale. Le ministère du Travail et de la Formation professionnelle est prêt à répondre à toute demande d’action immédiate concernant les questions susmentionnées. Cela exigera de rassembler des informations et des données factuelles pour pouvoir répondre à ces questions, et nous tenons à remercier nos partenaires sociaux de continuer à coopérer avec nous à cet égard.

Comme je l’ai déjà indiqué, le Cambodge a fait des progrès considérables dans l’application de la convention, notamment en créant un environnement propice à l’exercice de la liberté syndicale, exempt de violences et d’intimidations, contrairement à ce qui a été allégué.

Nous souhaitons attirer votre attention sur les progrès réalisés par notre gouvernement et sur les défis auxquels nous sommes confrontés, en particulier dans le contexte sans précédent que nous connaissons. Nous saisissons cette occasion pour demander à toutes les parties prenantes de collaborer à la mise en œuvre de la feuille de route relative aux recommandations de l’OIT sur la liberté syndicale, et le Cambodge sollicite aussi l’assistance technique continue du BIT à cet égard. Nous continuerons à œuvrer avec les parties prenantes concernées et à fournir aux parties concernées une assistance juridique pour clôturer les affaires en suspens.

Pour terminer, je tiens à réaffirmer à la commission que le Cambodge reste déterminé à promouvoir, protéger et respecter tous les devoirs et obligations découlant des instruments pertinents auxquels il est partie. Nous sommes prêts à fournir des informations supplémentaires à la demande.

Membres travailleurs – Au Cambodge, la pandémie de COVID-19 a entraîné des fermetures d’usine en raison de commandes annulées ou réduites, laissé les hôtels vides, mis des chantiers de construction à l’arrêt et provoqué une croissance de l’économie informelle; de nombreux travailleurs ont dû lutter pour survivre l’année dernière. Tout cela est venu s’ajouter à un environnement déjà compliqué pour les droits des travailleurs; en réalité, la situation était déjà suffisamment mauvaise pour que l’Union européenne (UE) suspende temporairement son programme de préférence commerciale «Tout sauf les armes» en raison de violations des droits au travail et des droits de l’homme. Je n’aborderai que quelques points dans mes remarques liminaires.

En ce qui concerne les lois d’urgence, au cours de l’année écoulée, le gouvernement a adopté un certain nombre de lois et de décrets d’urgence qui restreignent l’exercice de la liberté syndicale. Le 10 avril 2020, le gouvernement a promulgué la loi sur l’administration de la nation dans les situations d’urgence qui lui accorde de larges pouvoirs lui permettant d’interdire les réunions et les rassemblements, de surveiller les télécommunications, de mobiliser l’armée, d’interdire ou de limiter les médias susceptibles de nuire à la «sécurité nationale», et une série d’autres mesures «appropriées et nécessaires». Les infractions sont passibles de lourdes peines d’emprisonnement et d’amendes. En mars 2021, une autre loi sur les mesures visant à prévenir la propagation de la COVID-19 et d’autres maladies graves, dangereuses et contagieuses prévoit également l’interdiction des rassemblements et des «mesures administratives et autres non spécifiées nécessaires pour répondre à la propagation de la COVID-19 et la prévenir». Des dispositions aussi vagues permettent aux autorités de commettre des abus, en ciblant arbitrairement les personnes et les organisations qui protestent contre les politiques gouvernementales.

Un projet de loi sur l’ordre public, très problématique, exigerait l’approbation des autorités pour l’utilisation d’espaces publics et leur permettrait de mettre un terme à un événement pour lequel une autorisation n’aurait pas été demandée.

En ce qui concerne le fait que les manifestations de travailleurs soient érigées en infractions, en juillet 2020, le dirigeant syndical Rong Chhun a été arrêté et accusé de «provocation au crime ou à des troubles sociaux». Des dizaines de policiers ont encerclé sa maison la nuit et l’ont arrêté sans mandat. Aucune preuve n’indique que Rong Chhun a commis une quelconque infraction. En effet, son arrestation fait suite à sa prise de position en faveur de villageois dans un conflit foncier le long de la frontière entre le Cambodge et le Viet Nam. L’année dernière, Soy Sros, présidente d’un syndicat local affilié à l’organisation syndicale Collective Union of Movement of Workers (CUMW), a également été arrêtée. La police l’a placée en détention le 3 avril 2020 dans la province de Kompong Speu à la suite d’une plainte au pénal de l’employeur pour des messages qu’elle avait publiés sur Facebook relatifs à un conflit lié au licenciement injuste de plusieurs membres syndicaux.

En ce qui concerne les obstacles à l’enregistrement, malgré quelques modifications apportées aux formulaires de demande, l’enregistrement des syndicats reste difficile et les demandes sont refusées pour des raisons arbitraires ou pour des erreurs techniques mineures. Dans un cas, un syndicat a présenté sa demande au ministère du Travail et de la Formation professionnelle le 25 décembre 2020, accompagnée des dix documents requis (conformément à la prakas no 249 et à l’avis no 039). Au cours de la première semaine de février 2021, ce ministère a contacté une première fois les dirigeants du syndicat local pour qu’ils corrigent des fautes d’orthographe sur la lettre d’accompagnement et dans le profil des dirigeants syndicaux. Le 15 février, les dirigeants syndicaux ont renvoyé les documents corrigés au ministère. Plus de deux mois plus tard, le 7 mai 2021, les dirigeants du syndicat local ont été appelés une seconde fois pour qu’ils modifient la taille des photos des dirigeants syndicaux, d’un format 3x4 à un format 4x6; ils ont à nouveau renvoyé les documents. À la date du 18 mai 2021, le syndicat n’était toujours pas enregistré, après avoir consacré un temps et des ressources considérables à la soumission de la demande d’enregistrement. Ce cas n’est pas une exception, car d’autres ont rapporté des agissements similaires de la part des autorités pour refuser l’enregistrement d’un syndicat, invoquant des points qui n’ont rien à voir avec la vérification de la volonté des travailleurs d’être représentés par un syndicat.

En ce qui concerne les questions législatives, depuis de nombreuses années, la commission d’experts et la présente commission font part de préoccupations quant à plusieurs éléments de la loi sur les syndicats. En décembre 2019, plusieurs amendements à la loi ont été adoptés, mais celle-ci n’est toujours pas conforme à la convention. En outre, des syndicats indiquent que le gouvernement n’a pas dialogué de façon constructive avec eux et a refusé d’examiner les modifications qu’ils suggéraient alors qu’elles auraient garanti la conformité de la loi avec la convention.

Sans être exhaustif, j’expose ici quelques-unes de nos préoccupations: les travailleurs domestiques, les travailleurs de l’économie informelle et d’autres personnes qui travaillent en dehors d’un modèle d’entreprise ne peuvent toujours pas, dans la pratique, constituer des syndicats et s’y affilier. De plus, les enseignants qui sont fonctionnaires ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, mais par la loi régressive sur les associations et les organisations non gouvernementales. La loi confère toujours aux autorités un pouvoir excessif de contrôle financier, dont des vérifications illimitées, ce qui porte atteinte au droit des travailleurs de gérer leurs organisations. Les critères d’éligibilité pour élire des dirigeants syndicaux, notamment celui lié à la résidence et l’obligation de savoir lire et écrire, empêchent l’exercice du droit d’élire librement des représentants syndicaux.

La loi prévoit toujours des motifs vastes pour demander la dissolution d’un syndicat plutôt que de laisser les statuts des organisations régler cette question, et limite les droits des syndicats minoritaires de négocier au nom de leurs propres membres, ce qui n’est pas propice à la promotion de la négociation collective et nuit au droit de s’affilier à un syndicat de son choix.

En ce qui concerne l’impossibilité pour les syndicats de représenter des membres, l’un des faits les plus préoccupants est le refus du ministère du Travail et de la Formation professionnelle de permettre aux syndicats de niveau supérieur de représenter leurs membres lors de conflits collectifs.

Par exemple, en avril 2020, une procédure de conciliation pour un conflit du travail était en cours au Département du travail de Siem Reap; des dirigeants du syndicat local qualifié de plus représentatif ainsi que le président de la fédération et le vice-président de la confédération y participaient. Au cours de la conciliation, le responsable du Bureau des différends a estimé que les dirigeants de la fédération et de la confédération n’étaient pas autorisés à prendre la parole pendant la réunion et a menacé de les exclure s’ils ne respectaient pas cette consigne. On leur a dit, à tort, qu’ils ne pouvaient pas participer parce que les syndicats qualifiés de plus représentatifs ne pouvaient pas se faire représenter. C’est une grave violation du droit à la liberté syndicale de refuser à un syndicat local le soutien d’organisations syndicales de niveau supérieur auxquelles il est affilié. Encore une fois, ce n’est pas un cas isolé, puisque d’autres syndicats ont indiqué qu’ils n’avaient pas pu représenter les intérêts de leurs membres lors de conflits collectifs alors que c’est un droit que la loi garantit aux syndicats ayant le statut d’organisation la plus représentative, pour autant que le différend ne découle pas d’une convention collective.

Enfin, dans la pratique, nous constatons que, partout dans le pays, des dirigeants et des membres de syndicat ont été victimes de licenciement lors de réductions de personnel liées à la pandémie de COVID-19. Le même scénario se répète également dans des usines de confection dans tout le pays.

Avant de conclure, je tiens à souligner que nous sommes profondément préoccupés par le climat de violence et d’impunité qui règne dans le pays, y compris la violence orchestrée par l’État. En effet, après tant d’années, les meurtres de Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy n’ont toujours pas été résolus et, sept ans après les faits, les affaires relatives à l’arrestation et à la détention arbitraires de syndicalistes qui ont eu lieu après les manifestations de 2014 sont aussi toujours en instance.

Je reviendrai plus en détails sur ces points dans mes observations finales mais, avant cela, la commission entendra d’autres témoignages de représentants des travailleurs du Cambodge et d’autres pays.

Membres employeurs – Je tiens tout d’abord à remercier la représentante gouvernementale pour les informations détaillées qu’elle a soumises aujourd’hui et je salue ses commentaires concernant l’attachement du gouvernement à l’application de la convention au Cambodge.

Dans un premier temps, je tiens à aborder plusieurs questions législatives concernant ce cas qui figurent dans les observations de la commission d’experts. Je tiens néanmoins à commencer par dire que le représentant des travailleurs a mentionné plusieurs textes de loi qui, selon nous, ne relèvent pas du cas à l’examen. Les employeurs aborderont uniquement les questions concernant la législation qui entrent dans le champ de la discussion du cas qui nous occupe aujourd’hui.

Premièrement, la commission d’experts a pris note des informations fournies par le gouvernement sur l’élaboration d’amendements à la loi sur les syndicats, en consultation avec les partenaires sociaux et avec le soutien technique du BIT. Nous commencerons donc par faire observer que nous considérons qu’il s’agit là d’un progrès, et nous saluons les avancées et la coopération du gouvernement avec le BIT et les partenaires sociaux à ce sujet.

Dans sa soumission à la Commission de la Conférence, le gouvernement a dit que la loi portant modification de la loi sur les syndicats (LTU) avait été promulguée le 3 janvier 2020 et qu’il en joignait copie. Nous le remercions pour cette information.

Dans ses précédents commentaires, la commission d’experts a instamment prié le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires, y compris les enseignants, bénéficient des droits à la liberté syndicale et que la législation soit modifiée en conséquence. Dans ses dernières observations, la commission d’experts a instamment prié le gouvernement de prendre des mesures appropriées et de fournir des informations sur les droits à la liberté syndicale des fonctionnaires, des travailleurs domestiques et des travailleurs de l’économie informelle.

Les membres employeurs demandent au gouvernement de continuer à définir les mesures juridiques appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, afin de garantir que les fonctionnaires qui ne sont pas couverts par la LTU bénéficient des droits à la liberté syndicale garantis par la convention. Ils invitent le gouvernement à envisager, avec les partenaires sociaux, la possibilité d’autoriser la formation de syndicats par secteur ou profession et à étudier la question de la suppression de tout obstacle juridique à la création de syndicats ou à l’affiliation à des syndicats pour les travailleurs domestiques.

Dans ses précédents commentaires, la commission d’experts a prié le gouvernement de modifier les articles 20, 21 et 38 de la LTU afin d’y supprimer l’obligation de savoir lire et écrire en khmer comme critère d’éligibilité des étrangers et de fournir des informations sur tout progrès à cet égard.

Les membres employeurs font observer que les prescriptions relatives à l’aptitude à lire et à écrire qui figurent dans les articles 20, 21 et 38 de la LTU peuvent nuire à l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs, telle que garantie par l’article 3 de la convention. Même si ces organisations peuvent choisir d’inclure ou non une disposition de cette nature dans leur statut, celle-ci ne doit pas être imposée par la loi. Les membres employeurs prient donc le gouvernement de supprimer l’obligation de savoir lire et écrire de la loi.

Dans sa précédente demande concernant les modifications de l’article 28 de la LTU, qui prévoit la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement, la commission d’experts a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 28 de la LTU en supprimant le paragraphe 2.

Les membres employeurs font observer que la dissolution des organisations d’employeurs et de travailleurs devrait être régie par les statuts de l’organisation ou décidée par un tribunal. La dissolution automatique par la loi n’est pas conforme à l’article 4 de la convention. Les employeurs prient donc le gouvernement d’abroger le paragraphe 2 de l’article 28 de la LTU.

Les membres employeurs notent également que, conformément à l’article 3 de la convention, il incombe aux associations de travailleurs et d’employeurs de définir, dans leurs statuts, les règles et procédures régissant leur dissolution, lorsqu’il y est procédé à l’initiative des membres. La dissolution ne devrait pas être régie par la loi et les membres employeurs prient donc le gouvernement d’abroger l’article 29 de la LTU.

La commission d’experts a noté avec satisfaction que les modifications de 2019 ont supprimé l’alinéa c) de l’article 29 de la LTU. Cette disposition prévoyait la dissolution d’un syndicat ou d’une association d’employeurs par le tribunal du travail dans les cas où ses dirigeants, ses gestionnaires ou les responsables de son administration étaient reconnus coupables d’une faute grave ou d’un délit commis au nom du syndicat ou de l’association d’employeurs. Les membres employeurs prennent note avec satisfaction de l’effet de ce changement juridique et saluent l’engagement du gouvernement sur ce point.

S’agissant de l’indépendance du pouvoir judiciaire, la commission d’experts a rappelé, dans ses précédents commentaires, l’importance du bon fonctionnement du système judiciaire en tant que rempart contre l’impunité, ainsi que moyen efficace de protection des droits à la liberté syndicale.

La commission d’experts prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le renforcement du Conseil d’arbitrage, y compris sur toutes mesures prises pour que les sentences du Conseil d’arbitrage soient dûment appliquées. Les membres employeurs notent avec satisfaction que le gouvernement s’emploie à faire du Conseil d’arbitrage une institution efficace et pérenne chargée des conflits du travail. Les membres employeurs invitent également le gouvernement à poursuivre ses efforts à ce sujet et à fournir des informations sur les futures mesures prises.

De manière générale, les membres employeurs estiment que les avancées concernant les modifications à la législation et la réactivité du gouvernement face aux points soulevés par la commission d’experts et la Commission de la Conférence, avec le soutien technique du Bureau, sont très positives. Nous saluons ces avancées et tenons à encourager le gouvernement à s’employer à progresser vers le respect de la convention, en droit et dans la pratique.

S’agissant de l’application de la convention, en droit et dans la pratique, nous tenons simplement à mentionner très brièvement les allégations d’arrestations de syndicalistes et de violence. À ce stade, nous tenons simplement à rappeler que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans un climat exempt de violence et d’intimidation, et nous encourageons le gouvernement à veiller à prendre toutes les mesures nécessaires pour créer et entretenir un tel climat, ainsi que pour favoriser un climat exempt d’intimidation.

Membre travailleur, Cambodge – Je suis le président de la Confédération du travail du Cambodge (CLC). En tant que membre travailleur, je voudrais insister sur la situation des travailleurs au Cambodge. Je me suis déjà exprimé devant cette commission lors de précédents examens de ce cas, j’ai témoigné devant la mission de contacts directs de l’OIT au Cambodge et j’ai participé à des consultations du gouvernement pour mettre en œuvre les recommandations. Je regrette de devoir vous informer que les syndicats et les travailleurs rencontrent toujours des difficultés.

En 2004, Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy ont été assassinés et, jusqu’à présent, les meurtriers n’ont pas été retrouvés. Justice n’a toujours pas été rendue aux victimes syndicales de la grève générale organisée en 2013 pour exiger des salaires plus élevés et au cours de laquelle cinq travailleurs ont été tués, 23 ont été emprisonnés alors que d’autres ont été poursuivis au pénal. Nous exhortons le gouvernement à continuer d’enquêter pour rendre véritablement justice aux victimes.

Au Cambodge, des syndicalistes sont poursuivis au civil comme au pénal pour l’exercice de leurs droits. À la fin de 2018, la CLC a transmis 58 des 121 cas au total au ministère du Travail mais, pour l’heure, seulement 16 poursuites pénales ont été abandonnées et 41 actions au civil ne sont toujours pas réglées.

Nous prions instamment le gouvernement de continuer à œuvrer pour que toutes les poursuites en instance soient abandonnées et que les 41 différends collectifs soient réglés. L’année dernière, deux dirigeantes syndicales ont dû faire face à des accusations pénales fabriquées de toutes pièces par une société pharmaceutique locale et une société du secteur de l’habillement, après avoir créé un syndicat. L’une d’entre elles a été jugée par contumace et condamnée à deux ans et demi de prison et à une amende de 100 000 dollars É.-U. à verser à la société. Le tribunal a émis un mandat d’arrêt à son encontre. Rong Chhun, le président de la Confédération cambodgienne des syndicats (CCU), a été arrêté le 31 juillet 2020. Il avait défendu les intérêts de paysans dans un conflit foncier. Il est toujours en prison et la date de son procès n’a pas encore été fixée. Nous exhortons le gouvernement à abandonner toutes les poursuites et à libérer tous les dirigeants syndicaux et travailleurs.

Nous regrettons que les mesures de la feuille de route du gouvernement ne portent pas sur le fond des recommandations de la mission de contacts directs ni ne modifient la législation et les pratiques.

La loi modifiée sur les syndicats exclut toujours les fonctionnaires. Les travailleurs indépendants et les travailleurs domestiques ne peuvent toujours pas former de syndicat puisque l’une des conditions est la présence d’au moins dix personnes sur un même lieu de travail. Ces associations de travailleurs n’ont pas été invitées à participer aux consultations visant à modifier la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales (LANGO). Les dirigeants syndicaux risquent constamment des licenciements injustes lorsqu’ils soutiennent leurs membres et non-membres en cas de licenciements massifs, de discrimination et de fermetures d’usines. Les fonctionnaires responsables des différends empêchent même les fédérations et leurs syndicats locaux qualifiés de plus représentatifs de représenter leurs membres lors des réunions de conciliation sur le lieu de travail.

De plus, un scénario s’est généralisé avec la pandémie, à savoir que les fonctionnaires en charge des différends du travail considèrent à tort que les conflits collectifs du travail concernant les relations professionnelles, les fermetures d’entreprise et les licenciements massifs relèvent de conflits individuels du travail, de manière à éviter que les délégués et membres syndicaux utilisent les moyens de recours prévus par la loi. Ces nouvelles obstructions sapent le rôle fondamental des syndicats dans la défense des droits protégés par la convention.

La capacité des syndicats à servir efficacement les travailleurs et leurs membres est largement entravée par les restrictions prévues par la loi sur les syndicats.

Membre employeuse, Cambodge – Je suis la vice-présidente de l’Association des employeurs du Cambodge et je suis responsable d’une organisation qui représente tous les secteurs liés au travail et aux affaires sociales. Nous avons été créés en 2005 et nous travaillons depuis longtemps avec l’OIT et ses organes pour résoudre des cas liés au travail et aux affaires sociales au Cambodge.

C’est avec regret que nous nous présentons devant cette commission. Pourtant, ce n’est pas parce que notre pays n’a pas progressé. Au contraire, je crois que les progrès accomplis dont il est question dans le rapport sont considérables et le gouvernement a été très réactif sur les points soulevés. J’espère que la commission reconnaîtra les progrès qu’a accomplis le Cambodge, qui se reflètent non seulement dans les commentaires du rapport, mais aussi dans le document que le gouvernement a soumis. Nous encourageons le gouvernement à continuer d’améliorer la qualité de ses rapports et à veiller à ce qu’ils soient présentés dans les temps pour éviter que la commission d’experts ne revienne sur les problèmes soulevés, alors que le pays a fait du bon travail pour les résoudre.

J’aborderai rapidement quelques points pour faire bien comprendre le marché local. Tout d’abord, je voudrais faire remarquer que les points soulevés par les membres travailleurs lors de leur allocution liminaire n’étaient, pour la plupart, pas liés au cas dont il est question. Nous ne pouvons accepter que la commission d’experts et la Commission de la Conférence permettent la discussion d’autres éléments que ceux exposés dans le cas. Nous n’accepterons pas que les conclusions sur nos travaux dépassent la portée du cas décrit. Une fois de plus, je voudrais souligner que la législation du travail du Cambodge couvre les relations de travail dans tous nos secteurs de l’emploi, à l’exception du secteur public. Le secteur public, ainsi que d’autres organes d’administration du gouvernement sont régis par les codes civils du gouvernement; il ne faut donc pas les confondre ici avec la loi sur les syndicats et la législation générale du travail du Cambodge.

Les principes de la liberté syndicale sont bien inscrits dans la Constitution et dans les lois. Les méthodologies que nous utilisons pour formuler nos lois font véritablement participer tous les partenaires sociaux et mettent en avant nos différents points de vue et opinions. Un délai suffisant est également prévu. Des lois sont élaborées en tenant compte du contexte local et du niveau de développement dans le pays.

Le nombre de syndicats enregistrés depuis la formulation de la loi sur les syndicats témoigne de la liberté syndicale au Cambodge. Comme notre représentante gouvernementale l’a mentionné, 5 546 organisations syndicales ont été enregistrées, dont plus de 3 000 syndicats dans 650 usines de confection, de chaussures et de sacs à main. Cela représente environ 4,6 syndicats par entreprise.

La multiplicité des syndicats au sein d’une entreprise n’a pas produit de résultats satisfaisants dans le secteur de la confection au Cambodge, où des grèves paralysantes ont eu lieu avant l’élaboration et la mise en œuvre de la loi sur les syndicats. Au contraire, cela a conduit à la conclusion de conventions collectives faibles, à des grèves multiples, à des membres syndicaux désabusés et à de nombreuses luttes intestines entre les syndicats.

Je pense qu’il est important de souligner que la liberté syndicale n’exempte pas quiconque de la responsabilité de respecter la loi. Il est essentiel que nos lois répondent aux défis que doit relever le pays et l’aident à parvenir à des relations professionnelles plus harmonieuses et plus constructives, et toutes les parties doivent respecter la loi et être tenues responsables devant la loi en cas d’infraction.

Il est très important que les lois soient adaptées pour tenir compte du contexte local et du niveau de développement de notre pays. J’insiste sur ce point, car l’obligation faite aux syndicats de faire preuve d’un certain niveau d’éducation, obligation désormais supprimée dans la loi, était essentielle pour pouvoir assurer une meilleure qualité du mouvement syndical au Cambodge. Cela dit, cette obligation a été supprimée mais, si un étranger souhaite devenir syndicaliste, le gouvernement a tout à fait le pouvoir d’exiger un certain niveau d’éducation de la part des travailleurs étrangers dans le pays pour préserver et garantir la qualité de l’emploi des Cambodgiens.

Au Cambodge, nous concevons de nouvelles lois. Jamais nous n’avions eu de loi sur les syndicats, donc nous en avons formulé une. Nous n’avions pas de loi sur la sécurité sociale, nous avons formulé une loi sur la sécurité sociale. Pour ce faire, il faut des interlocuteurs capables de lire, d’écrire et de comprendre l’objet des négociations. Le simple fait d’exiger de savoir lire et écrire semble une exigence raisonnable pour disposer de partenaires sociaux forts dans le pays, capables de contribuer efficacement à l’élaboration des lois sociales et du travail dans le pays.

C’étaient les quelques points que je voulais soulever. Je souhaite encore insister, et espérer que la commission le reconnaisse, sur les progrès accomplis dans le pays. Nous continuons d’encourager le gouvernement à renforcer la qualité de ses rapports et à veiller à les soumettre en temps voulu pour que le Cambodge continue d’être un acteur actif.

Membre gouvernemental, Portugal – J’ai l’honneur de m’exprimer au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres. Les pays candidats – la République de Macédoine du Nord, le Monténégro et l’Albanie –, la Norvège, pays de l’Association européenne de libre-échange (AELE) et membre de l’Espace économique européen (EEE), ainsi que la République de Moldova, souscrivent à cette déclaration.

L’UE et ses États membres sont attachés à la promotion, à la protection, au respect et à la réalisation des droits de l’homme, notamment les droits au travail et le droit syndical, ainsi que la liberté syndicale.

Nous œuvrons résolument en faveur de la ratification et de la mise en œuvre universelles des normes internationales du travail et soutenons l’OIT dans son rôle indispensable consistant à élaborer, à promouvoir et à contrôler l’application des normes internationales du travail, et des conventions fondamentales en particulier.

L’UE et ses États membres sont des partenaires de développement engagés vis-à vis du Cambodge, notamment par l’accord «Tout sauf les armes» dans le cadre du système de préférences généralisées qui garantit un accès aux marchés de l’UE en franchise de droits et sans contingent, ayant eu pour effet une croissance soutenue et la création d’emplois au cours des dernières décennies. Toutefois, en raison de violations graves et systématiques des droits de l’homme, en particulier du droit à la participation politique et des libertés fondamentales, ce traitement préférentiel est partiellement suspendu depuis août 2020.

En ce qui concerne les droits au travail et, en particulier, la liberté syndicale et la protection du droit syndical, et pour ce qui est des réformes législatives, nous regrettons que la commission estime qu’il y a une absence structurelle de progrès. Nous prenons note des amendements à la LTU, en particulier l’extension de sa couverture aux travailleurs domestiques, aux enseignants qui ne sont pas fonctionnaires et aux travailleurs de l’économie informelle. Toutefois, malgré ces changements, la révision de la LTU n’assure toujours pas la conformité avec la convention, étant donné que les dispositions de la loi (article 10) n’autorisent pas la création de syndicats par secteur ou profession, ce qui empêche les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle de jouir effectivement de la liberté syndicale et du droit syndical.

De la même manière, la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales contrevient toujours aux droits à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical pour les fonctionnaires, y compris les enseignants, conférée par la convention. En particulier, de sérieuses carences demeurent en ce qui concerne la reconnaissance du droit des associations de fonctionnaires d’élaborer leurs propres constitutions et règles, d’élire des représentants, d’organiser des activités et de formuler des programmes sans ingérence des autorités publiques.

Nous prions instamment le gouvernement de prendre les mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, et de modifier la législation en conséquence. Il est également important de garantir et de protéger l’exercice plein et entier de ces droits par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle. Nous prions également le gouvernement de modifier d’autres articles pertinents de la LTU afin de répondre aux observations de la commission s’agissant de la dissolution des organisations représentatives.

En outre, nous soulignons la nécessité d’un système judiciaire indépendant afin de garantir la bonne application du droit syndical des partenaires sociaux et de protéger leur liberté syndicale. À l’instar de la commission, nous saluons l’engagement du gouvernement à renforcer le Conseil d’arbitrage et insistons sur son rôle important dans le traitement des conflits collectifs, ainsi que des éventuels conflits individuels qui pourraient naître dans un futur proche.

L’UE demeure vivement préoccupée par les informations qui font état de harcèlement continuel, d’agression et d’arrestation de dirigeants syndicaux et prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’exercice des droits syndicaux et les activités syndicales et faire en sorte que les syndicalistes ne soient pas pénalement poursuivis pour avoir exercé leurs droits conférés par la convention. À ce sujet, nous invitons le gouvernement à continuer de fournir des informations sur toutes les affaires pénales en instance concernant des syndicalistes.

L’UE demeure profondément préoccupée par l’absence persistante de mesures ou de résultats concrets en ce qui concerne les enquêtes sur le meurtre de trois dirigeants syndicaux en 2004 et 2007, et demande aux autorités cambodgiennes de faire aboutir ces enquêtes sans délai et de traduire les auteurs en justice.

Nous invitons également le Cambodge à demeurer vigilant sur les licenciements dus à la crise de la COVID-19, en particulier sur ceux qui semblent viser des dirigeants syndicaux.

L’UE et ses États membres continueront de suivre la situation au Cambodge de près.

Membre gouvernementale, Thaïlande – J’ai l’honneur de prononcer cette déclaration au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE). Nous saluons les avancées accomplies par le Cambodge dans la mise en œuvre de la convention, notamment les récents amendements à la loi sur les syndicats et le nombre croissant de syndicats enregistrés.

Le Cambodge a fait la preuve de son engagement et de sa volonté à œuvrer en faveur de la protection et de la promotion de la liberté syndicale, conformément aux normes internationales du travail. En particulier, les autorités cambodgiennes, avec l’OIT et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), ont organisé la formation des policiers sur le droit de grève et le droit de manifestation pacifique. Cela est louable.

Nous mesurons les efforts déployés par le gouvernement cambodgien pour collaborer activement avec le système de contrôle de l’OIT et ses partenaires sociaux, et constatons qu’il soumet dans les délais les rapports de situation réguliers dus au titre de la feuille de route relative à la mise en œuvre des recommandations de l’OIT concernant la liberté syndicale. Nous espérons que le Cambodge continuera à mettre en œuvre les recommandations de l’OIT.

Nous saluons les mesures énergiques prises par le Cambodge au sujet du mécanisme de dialogue social en vue de parvenir à des relations de travail harmonieuses. Animés d’un esprit constructif, nous invitons le Cambodge et ses partenaires sociaux à continuer d’employer le dialogue social dans la promotion de l’exercice de la liberté syndicale.

À la lumière des progrès et des résultats positifs susmentionnés au sujet de l’application de la convention, l’ASEAN demande à l’OIT et à l’ensemble des partenaires de continuer à aider le Cambodge et à coopérer de manière constructive sur ce point.

Membre travailleur, Australie – La délégation des travailleurs suisses et l’Internationale de l’éducation s’associent à la présente déclaration. Le gouvernement utilise la pandémie de COVID-19 pour continuer de priver les travailleurs cambodgiens de la liberté syndicale et de la liberté de réunion. Au cours de l’année écoulée, le contrôle des activités syndicales a été resserré, des dirigeants syndicaux ont été harcelés et des intrusions ont eu lieu lors de protestations syndicales.

Le 1er juillet 2020, Yang Sophorn, présidente de l’Alliance cambodgienne des syndicats (CATU), a reçu un courrier menaçant de dissoudre l’alliance si elle poursuivait sa médiation dans un conflit du travail collectif concernant la fermeture d’une usine de vêtements. En raison des restrictions liées à la COVID-19, la CATU n’a pu tenir de congrès avant la date d’échéance de son enregistrement.

En juillet 2020, la police a bloqué une manifestation de travailleurs menée par Rong Chhun, président de la Confédération des syndicats du Cambodge, contre la fermeture de l’usine de vêtements. Le 31 juillet 2020, les autorités ont arrêté Rong Chhun, qui a ensuite été inculpé pour «incitation au crime». Rong Chhun se trouve toujours en détention.

Le 6 août 2020, le Département du travail a menacé les présidents de la Fédération syndicale cambodgienne des travailleurs du tourisme et du syndicat Le Méridien Angkor de dissolution de ces deux syndicats pour organisation présumée de grèves illégales et blocage d’une route publique aux abords d’un hôtel de luxe.

Le 7 août, au moins sept manifestants ont été arrêtés au cours d’une manifestation de soutien organisée, malgré l’avertissement du gouvernement, pour réclamer la libération de Rong Chhun.

Le 10 août, la présidente de l’Association cambodgienne des enseignants indépendants (CITA), Mme Ouk Chayavy, a été agressée et renversée de sa motocyclette alors qu’elle venait de rendre visite à Rong Chhun en prison. À cette époque-là, elle soumettait des requêtes à l’ONU et aux États-Unis réclamant la libération de Rong Chhun.

En septembre 2020, la police s’est rendue dans sept bureaux d’organisations professionnelles pour inspecter leurs registres et dossiers du personnel. Elle a perquisitionné le bureau de la CITA en affirmant qu’elle «effectuait un recensement» et en réclamant des informations sur l’enregistrement et les activités du groupe.

Le 30 septembre 2020, la police a fait irruption dans une réunion de la CLC et vérifié les pièces d’identité de tous les participants, le programme et tous les documents. Le harcèlement policier pousse désormais les propriétaires à refuser de louer des locaux à des syndicats ou à des ONG pour leurs réunions.

Le 11 mai 2021, Kang Nakorn, de l’Independent Democracy of Informal Economy Association (IDEA), a été arrêté par la police alors qu’il recueillait le nom de membres traversant une situation économique difficile pendant la flambée de COVID-19. Le 25 mai, il a été libéré à la condition que l’IDEA ne fasse pas de publicité autour de son cas.

Nous implorons le gouvernement cambodgien de garantir que la liberté syndicale peut être exercée dans un climat exempt de menaces, d’intimidation et de violence.

Membre gouvernementale, États-Unis d’Amérique – Le gouvernement du Cambodge a soumis des informations à cette commission en réponse aux récentes observations de la commission d’experts. Les développements récents qui sont intervenus depuis le dernier examen de ce cas en 2017 sont les suivants: en janvier 2020, amendements à la loi sur les syndicats de 2016; sessions de formation de la police dispensées en octobre 2019 sur les situations d’actions collectives et de protestation; et, en mai 2019, acquittement de six syndicalistes qui faisaient l’objet de poursuites pénales pour avoir participé aux manifestations de janvier 2014.

Malgré ces efforts, des défis importants persistent. La commission d’experts prend note des informations faisant continuellement état de violences, d’arrestations, ainsi que de l’absence de progrès dans les enquêtes sur la mort de syndicalistes. Nous prions instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts, en s’attachant en priorité aux domaines suivants: premièrement, garantir un climat exempt d’intimidation et de violence en multipliant les efforts pour enquêter sur ces actes, engager des poursuites contre leurs auteurs et les tenir pour responsables; deuxièmement, veiller à ce qu’aucune accusation ou sanction pénale ne soit imposée pour l’exercice pacifique d’activités syndicales, y compris la participation à des actions collectives et de protestation. Nous demandons au gouvernement de fournir d’autres informations sur les infractions présumées et la législation en vertu de laquelle cinq syndicalistes ont été arrêtés en août 2020; troisièmement, réviser le prakas no 249 sur l’enregistrement des syndicats, en tenant compte des informations récentes selon lesquelles certains syndicats continueraient de rencontrer des difficultés à s’enregistrer; quatrièmement, modifier le processus visant à déterminer les critères d’éligibilité des cas qui seront examinés par le Conseil d’arbitrage, en donnant à celui-ci le pouvoir de déterminer s’il s’agit ou non de conflits collectifs; et, enfin, malgré les amendements récents à la loi sur les syndicats de 2016, d’autres amendements sont nécessaires pour combler les lacunes et régler les problèmes de non-conformité, en particulier en ce qui concerne l’article 55 sur les syndicats les plus représentatifs; l’article 28 sur le pouvoir du gouvernement de dissoudre les syndicats dans les entreprises qui sont fermées; et le chapitre 15 sur les sanctions excessivement élevées imposées en cas de non-respect de la loi sur les syndicats.

Nous prions le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour résoudre ces problèmes de longue date, conformément à la convention. Les États-Unis restent déterminés à collaborer avec le gouvernement pour faire progresser les droits des travailleurs au Cambodge.

Membre travailleuse, Japon – Mon intervention s’aligne sur celle du Congrès national des syndicats de Singapour (SNTUC) et d’IndustriALL. Le secteur de l’habillement au Cambodge est le secteur le plus vulnérable, puisque la plupart des travailleurs y occupent des emplois précaires. Pourtant, on empêche systématiquement les syndicats du secteur de l’habillement de représenter les intérêts de leurs membres, en ce qui concerne les salaires et les demandes d’indemnisation, et leurs dirigeants sont souvent licenciés après avoir déposé une demande d’enregistrement.

Le gouvernement a adopté plusieurs sous-décrets et amendements à la loi sur les syndicats afin de préciser le rôle des syndicats minoritaires pour ce qui est de représenter leurs membres dans les conflits collectifs du travail. Toutefois, le gouvernement ne les a toujours pas mis en œuvre. Les fédérations nationales sont encore confrontées aux difficultés mentionnées ci-après pour représenter les membres syndicaux.

En 2018, les représentants de la CCAWDU, qui est une fédération nationale de syndicats de travailleurs de l’habillement, n’ont pas été autorisés par les responsables des conflits du travail à s’exprimer ni à représenter leurs membres lors des réunions de conciliation qui concernaient des cas de licenciements discriminatoires des dirigeants syndicaux et des demandes d’amélioration des conditions de travail. Les représentants de la CCAWDU ont ensuite reçu une lettre d’avertissement du ministère du Travail.

De même, dans de nombreux cas, les demandes des syndicats auprès du Conseil d’arbitrage ont été rejetées. De nombreux cas montrent que le ministère du Travail n’a pas appliqué les procédures de discrimination antisyndicale prévues par la loi sur le travail et a accepté les licenciements et les cessations d’activité des dirigeants syndicaux élus du secteur de l’habillement, sous la forme de contrats de travail non renouvelés ou à court terme. Malgré la présence du Conseil d’arbitrage, de plus en plus de conflits du travail, comme les licenciements massifs, ont été renvoyés devant la Commission de règlement des grèves et des manifestations liées au travail. Les conciliations menées par cette commission ont pour objet d’assurer la sécurité publique et de prévenir les actions collectives et les manifestations publiques. Dans tous les cas renvoyés devant cette commission, les demandes des syndicats du secteur de l’habillement sont rejetées et les travailleurs reçoivent une rémunération et des avantages bien inférieurs à ceux garantis par la loi.

Permettez-moi de réaffirmer que l’exercice du droit à la liberté syndicale des syndicats, qui est le droit le plus essentiel, exige de garantir une représentation équitable des travailleurs syndiqués dans le règlement des conflits. Nous prions instamment le gouvernement d’accélérer le processus visant à améliorer le système judiciaire, y compris le renforcement de la fonction du Conseil d’arbitrage.

Membre gouvernemental, Suisse – La suisse regrette le fait que nous devions à nouveau discuter du respect de la convention no 87 – une convention fondamentale – par le Cambodge. Depuis 1999, le Cambodge figure régulièrement sur la liste des cas devant être examinés par notre commission. Les syndicalistes indépendants et les travailleurs de divers secteurs sont encore discriminés, harcelés, menacés, arrêtés, ou encore emprisonnés lorsqu’ils tentent d’exercer leurs droits. À ce sujet, depuis la ratification, la commission d’experts a formulé plus de 30 recommandations. Onze cas de violations ont été dénoncés auprès du Comité de la liberté syndicale, dont un est encore actif et deux font l’objet d’un suivi.

Aujourd’hui, la Suisse exprime sa préoccupation face à cette pression persistante sur les activités syndicales et regrette que la police utilise encore des méthodes violentes et intimidantes. Pour cette raison, la Suisse encourage, d’une part, l’assistante technique du BIT pour la formation des organes de sécurité, et, d’autre part, la coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, en vue d’améliorer la connaissance des principes fondamentaux des droits de l’homme. C’est par le dialogue social et la négociation que la paix se construit.

La nécessité d’accélérer les procédures d’enquête, de fournir des informations sur les procédures pénales en cours et d’assurer le suivi de l’application de la convention dans la pratique reste une priorité.

Enfin, la Suisse exprime l’espoir que la loi sur le tribunal du travail ainsi que la loi sur les syndicats soient mises en conformité avec les normes internationales du travail.

Observatrice, Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) – Cinq années se sont écoulées depuis la promulgation de la loi cambodgienne sur les syndicats en 2016. Le recours à la négociation collective est rare pour gérer de bonnes relations professionnelles au Cambodge. L’application de la loi et l’attribution du statut représentatif aux fins de la négociation collective ne se sont pas accompagnées de sanctions efficaces imposées aux employeurs qui refusent de reconnaître les syndicats et de négocier, ou de la responsabilité des organes de l’administration du travail.

Le conflit survenu dans un hôtel-casino à Phnom Penh est un bon exemple de ces difficultés. En 2018, le Syndicat pour les droits du travail, qui représente 50 pour cent des travailleurs de ce lieu de travail, a demandé le statut d’organisation la plus représentative aux fins de la négociation collective. Le syndicat s’est retrouvé coincé dans un long processus administratif avec l’autorité compétente. À ce jour, il n’a toujours pas obtenu ce statut.

Depuis 2019, le syndicat agit auprès de la direction pour exiger des salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail. Les dirigeants et membres syndicaux font l’objet de menaces, d’intimidation, de harcèlement et d’ingérence de toutes sortes de la part de l’employeur, suite à la campagne que le syndicat a lancée sur le lieu de travail pour obtenir un salaire assurant des conditions d’existence convenables. Le président du syndicat a été interrogé par des agents de police lors des réunions forcées avec la direction. Il a ensuite été suspendu de ses fonctions. Ce dirigeant syndical a été menacé de contrôle permanent de sa conduite, de ses activités et de ses conversations.

En septembre, l’autorité a renvoyé le conflit devant le Conseil d’arbitrage, en demandant la suspension du dirigeant syndical, et ce malgré la pétition signée par 3 800 travailleurs envoyée à l’autorité, appelant à la réintégration effective de leur dirigeant et à la négociation collective. Le ministère a considéré cette suspension comme un cas individuel et n’a pas mis à disposition les voies de recours applicables aux pratiques déloyales prévus par la loi.

Bien que la loi sur le travail et la loi sur les syndicats contiennent des dispositions claires sur le droit de négociation collective, sur les conflits collectifs du travail et sur les recours en cas de violation, les autorités administratives du travail peuvent encore contrôler ce processus en mettant des obstacles administratifs et en accusant des retards. En l’absence d’un statut légal permettant de négocier, le syndicat n’a pas le statut ni institutionnel ni légal pour négocier des mesures de sécurité sur le lieu de travail pour faire face à la pandémie ou au plan de licenciement concernant 1 329 travailleurs.

Je termine mon intervention en priant le gouvernement de garantir l’application de la loi sur les syndicats à toutes les parties aux relations professionnelles concernées, aux fins de l’application effective de la convention au Cambodge.

Membre travailleur, Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) – Je m’exprime au nom de l’ITF et de la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Lors de la discussion qui s’est tenue au sein de cette commission en 2017 sur le respect de la convention par le Cambodge, nous avons exprimé de vives préoccupations à propos du plus grand exploitant d’aéroports du Cambodge, une multinationale française, qui exploite trois grands aéroports dans le pays – à savoir Siem Reap, Phnom Penh et Sihanoukville. En 2017, nous avons exprimé des préoccupations face aux modifications unilatéralement apportées à la convention collective et à la discrimination antisyndicale, entre autres choses.

Malheureusement, nous devons dire aujourd’hui que l’exploitant français d’aéroports a considérablement nui à la représentativité de la Fédération cambodgienne des ouvriers du transport (CTWF), affiliée à l’ITF, en évitant les négociations de bonne foi, en retardant la conclusion d’une convention collective équitable et en se livrant à une nouvelle discrimination antisyndicale. En janvier 2019, la CTWF a obtenu le statut d’organisation la plus représentative à Siem Reap et a cherché à entamer des négociations. L’entreprise a rejeté cette demande au motif qu’elle voulait regrouper les négociations avec celles de Phnom Penh. En mars 2019, lorsque la CTWF a obtenu le statut d’organisation la plus représentative à Phnom Penh, l’entreprise a de nouveau remis à plus tard les négociations afin que les trois aéroports puissent négocier ensemble.

Plus récemment, dans le contexte de la pandémie, l’entreprise a licencié plus de 100 travailleurs et a lancé un processus de restructuration sans consulter le syndicat. Ces licenciements visent les membres syndicaux de manière disproportionnée et constituent une violation manifeste des principes de la liberté syndicale. L’autorité aéroportuaire continue également à proposer des indemnités de licenciement inférieures au minimum légal.

Alors que l’entreprise avait finalement entamé des négociations avec le syndicat, suite à plusieurs décisions du Conseil d’arbitrage, ces négociations ont à nouveau été retardées et n’ont guère progressé. Si les licenciements continuent de cibler les membres syndicaux, c’est le statut d’organisation la plus représentative de la CTWF qui serait menacé.

Une restructuration d’entreprise ne devrait pas menacer les travailleurs syndiqués et leurs organisations. Les licenciements qui visent de manière disproportionnée les membres syndicaux menacent non seulement la capacité de la CTWF à représenter ses membres, mais cela crée également un climat de peur qui n’est pas propice à la liberté syndicale. Les retards pris dans la conclusion de conventions collectives démontrent également l’incapacité du gouvernement à garantir le droit à une négociation collective réelle.

En outre, la multinationale française n’a pas non plus assumé les responsabilités qui lui incombent au titre de la Déclaration de l’OIT sur les entreprises multinationales ni rempli ses obligations en vertu de la loi française sur le devoir de vigilance, qui appelle les entreprises à faire preuve de la diligence requise dans le domaine des droits de l’homme et à remédier ainsi aux conséquences dommageables de leurs activités. La liberté syndicale et la négociation collective sont des droits fondamentaux couverts par tous les instruments relatifs aux droits de l’homme et dans tous les domaines, ainsi que par la loi française sur le devoir de vigilance. L’exploitant d’aéroports doit réintégrer les travailleurs licenciés et reprendre les négociations collectives en vue de conclure un accord sans délai. La liberté syndicale et la négociation collective ne peuvent pas être un angle mort de la diligence requise en matière de droits de l’homme.

Membre travailleur, Burkina Faso – Le Cambodge a ratifié la convention en 1999. La commission intervient depuis 2016 concernant des manquements liés à sa mise en œuvre. En 2019, le Cambodge a encore été visé par des allégations de répression violente de grèves par des criminels spécialement engagés à cette fin, et de détention de dirigeants syndicaux qui avaient organisé des grèves dans le secteur de l’habillement.

En ce qui concerne les cas de meurtres de syndicalistes, la commission a recommandé de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres de dirigeants syndicaux, dont ceux de Chea Vichea et de Ros Sovannereth, puis de Hy Vuthy en 2007.

Faut-il avoir peur ou honte de dire que les fondements de l’OIT vont très mal aujourd’hui? D’abord, parce qu’il n’y a eu aucun effort. Je crains que ce soit cette négligence à analyser les interpellations sur les risques du réchauffement climatique qui a conduit à l’apparition de micro-organismes, tels que la COVID-19, ayant mis en péril presque toute l’humanité.

Représentante gouvernementale – Ma délégation a écouté tous les orateurs et représentants et prend note de leurs interventions. Les commentaires constructifs et les points de vue exprimés à la commission seront rapportés au Cambodge et dûment pris en considération, afin d’assurer un environnement propice à l’exercice de la liberté syndicale.

Ma délégation tient à réaffirmer que le Cambodge est déterminé à mettre en œuvre la convention. Le Cambodge a toujours œuvré en étroite collaboration avec les partenaires sociaux pour promouvoir l’exercice de la liberté syndicale et maintenir des relations professionnelles harmonieuses, avec le soutien technique du BIT. Ma délégation tient à réaffirmer que le Cambodge continuera à œuvrer en étroite collaboration avec les partenaires sociaux pour réviser la loi sur les syndicats et tout autre instrument juridique connexe.

En ce qui concerne le droit des syndicats minoritaires de représenter leurs membres dans les conflits du travail, nous tenons à souligner que, en vertu de l’article 59 modifié de la loi sur les syndicats, les syndicats minoritaires peuvent représenter leurs membres dans les conflits du travail individuels et collectifs qui ne découlent pas de l’application de la convention collective. Il s’agit donc ici des syndicats de travailleurs minoritaires ou des représentants des travailleurs, dans le cas où aucun syndicat de travailleurs n’aurait le droit de représenter les membres ou les travailleurs dans les conflits collectifs du travail, dans toutes les procédures de règlement des conflits, y compris la conciliation au sein du ministère du Travail et de la Formation professionnelle et du Conseil d’arbitrage. En outre, l’amendement a ajouté le point i) à l’article 59 modifié de la loi sur les syndicats qui se lit comme suit: «représenter de bonne foi ses membres dans le règlement des conflits collectifs de travail ne découle pas de l’application de la convention collective». L’amendement vise à rectifier l’interprétation erronée selon laquelle les syndicats minoritaires n’ont pas le droit de représenter leurs membres dans les conflits collectifs du travail.

Depuis l’entrée en vigueur de l’amendement à la loi sur les syndicats, et jusqu’au 31 mars 2021, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a renvoyé 432 conflits collectifs du travail devant le Conseil d’arbitrage pour règlement, desquels: 30 cas concernaient les conflits liés au statut représentatif; 339 cas concernaient des conflits liés à la représentation des syndicats de travailleurs minoritaires; et 63 cas concernaient des conflits liés à la représentation des travailleurs.

Depuis l’adoption de la loi portant modification de la loi sur les syndicats en 2020, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’a reçu aucune plainte à ce sujet. Le ministère du Travail et de la Formation professionnelle continuera à œuvrer pour faire mieux comprendre cette nouvelle législation et renforcer son application.

Bien que cela n’entre pas dans le cadre de la discussion, ma délégation souhaiterait aborder l’allégation relative à la loi sur l’état d’urgence. Ma délégation souhaite rappeler que le fait que le Cambodge dispose de la loi sur l’état d’urgence n’a rien d’exceptionnel. De fait, beaucoup de pays appliquent déjà strictement ce type de loi, alors que le Cambodge ne l’a toujours pas appliquée depuis son adoption. Il est injuste d’affirmer que, en raison de la loi sur l’état d’urgence, le Cambodge ne respecte pas les droits de l’homme, alors qu’une loi de ce type existe depuis longtemps et est strictement appliquée dans d’autres pays et qu’il n’y a eu aucune plainte à ce sujet. Même lorsque la pandémie de COVID-19 plongeait le monde dans l’inconnu, le Cambodge n’a jamais déclaré l’état d’urgence. Malgré cette période difficile et sans précédent que nous connaissons, le Cambodge continue à œuvrer sans relâche pour protéger et promouvoir la liberté syndicale consacrée dans la convention.

Ma délégation tient à rappeler que certains sont poursuivis ou condamnés par l’autorité judiciaire non pas en raison de ce qu’ils sont, mais parce qu’ils ont commis des infractions. En aucun cas les droits syndicaux légitimes ne doivent servir d’écran pour enfreindre la loi, dénigrer l’état de droit et porter atteinte aux citoyens respectueux de la loi. Les normes internationales du travail ne confèrent aucun privilège aux syndicalistes en ce qui concerne leur impunité.

Ma délégation tient à réaffirmer que le Cambodge continuera à œuvrer avec les parties prenantes concernées et à leur fournir une assistance juridique pour régler les affaires en cours, en particulier les affaires pénales. Cependant, il faut également rappeler que les organes exécutifs, législatifs et judiciaires sont indépendants les uns des autres, comme le prévoit la Constitution du Royaume du Cambodge, et que le gouvernement ne joue donc aucun rôle dans les procédures judiciaires.

Ma délégation tient à exprimer nos remerciements à la commission pour ses observations et à tous les États membres de l’ASEAN, aux représentants des organisations de travailleurs et d’organisations d’employeurs et d’autres, pour leur intervention constructive et le soutien qu’ils ont apporté au Cambodge à cet égard.

Membres employeurs – Je voudrais remercier la représentante gouvernementale pour les informations très détaillées qu’elle a présentées à la commission et je voudrais également remercier tous les intervenants qui ont contribué à cette discussion. Je tiens cependant à rappeler que les orateurs doivent se concentrer sur les éléments que la commission doit examiner dans le cadre de ce cas. Les employeurs estiment qu’il n’est ni utile ni approprié de débattre de points qui n’entrent pas dans le cadre de l’examen approprié de ce cas.

Les membres employeurs ont pris note des informations écrites et orales très détaillées que la représentante gouvernementale a présentées à la commission et, comme il a déjà été indiqué, des débats fructueux qui ont suivi. Nous prenons note, en premier lieu, des progrès réalisés dans la mise en conformité de certains aspects de la loi avec la convention, et nous saluons les efforts déployés par le gouvernement à cet égard.

Nous notons également qu’un certain nombre de questions importantes restent en suspens et doivent être traitées. Par conséquent, les membres employeurs demandent au gouvernement de continuer à prendre les mesures juridiques appropriées, en consultation avec les partenaires sociaux, pour que les fonctionnaires qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats puissent jouir des droits de la liberté syndicale, comme l’exige la convention.

Les membres employeurs demandent également au gouvernement de supprimer l’obligation de savoir lire et écrire prévue aux articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats, en vue d’assurer la pleine participation. Les membres employeurs prient également le gouvernement d’abroger le paragraphe 2 de l’article 28 de la loi sur les syndicats sur la dissolution automatique des organisations de travailleurs en cas de fermeture d’une entreprise ou d’un établissement; et ils le prient aussi d’abroger l’article 29 de la loi sur les syndicats sur la dissolution d’organisations d’employeurs et de travailleurs à l’initiative de leurs membres.

Nous estimons que ce sont là certains des points auxquels le gouvernement doit encore s’attacher, en collaboration avec les partenaires sociaux et avec l’assistance technique du BIT, si nécessaire.

Nous faisons également observer que, pour garantir le respect de la convention en droit et dans la pratique, il convient de rappeler que la liberté syndicale ne peut être exercée que dans un environnement exempt de violence et d’intimidation et nous appelons donc le gouvernement à continuer de former les agents de police à la gestion des conflits du travail et des actions de protestation.

Nous encourageons également le gouvernement à continuer d’examiner, avec les partenaires sociaux, la possibilité de permettre la formation d’organisations d’employeurs et de travailleurs par secteur ou par profession, et nous continuons d’encourager le gouvernement à poursuivre ses efforts pour faire du Conseil d’arbitrage une institution capable de traiter efficacement et durablement les conflits du travail.

Nous sommes d’avis que le Cambodge a déployé beaucoup d’efforts pour se conformer à la convention, tant en droit que dans la pratique, et, même si beaucoup reste à faire, nous estimons que ces efforts sont très encourageants et nous espérons qu’ils seront consignés dans le procès-verbal. Les membres employeurs demandent également au gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises dans le cadre de tous ces efforts.

Membres travailleurs – Nous remercions le gouvernement pour ses commentaires et nous remercions tous les autres orateurs pour leurs interventions. Les employeurs du Cambodge ont indiqué que plusieurs éléments examinés au sein de la commission n’auraient pas dû l’être. Nous souhaiterions nous référer au Règlement de la Conférence qui définit le mandat de notre commission et qui prévoit, à l’article 7, paragraphe 1 a), que notre commission est chargée d’examiner les mesures prises par les Membres afin de donner effet aux dispositions des conventions auxquelles ils sont partie.

Nous devons préciser en particulier que tout ce que nous avons dit aujourd’hui s’inscrit dans le cadre de l’application de la convention, des observations de la commission d’experts et des règles régissant nos débats au sein de la Commission de la Conférence.

Comme l’ont indiqué beaucoup d’intervenants aujourd’hui, le gouvernement cambodgien continue de commettre de graves violations du droit à la liberté syndicale en droit et dans la pratique. Et ce en dépit du contrôle régulier de la commission d’experts, du Comité de la liberté syndicale et de la présente commission. De fait, malgré les missions de l’OIT, les feuilles de route et la coopération technique, il semblerait que nous n’avancions pas. Même les réformes juridiques que le gouvernement a promulguées fin 2019 n’ont pas fait changer la situation des travailleurs et des syndicats et, de fait, de nombreux obstacles subsistent. Il est tout à fait clair que la loi sur les syndicats a pour objectif de limiter les droits des syndicats à représenter efficacement les intérêts de leurs membres. Une situation aggravée d’autant par les lois d’urgence qui ne sont pas limitées dans le temps et qui vont probablement rester en vigueur longtemps après la fin de la pandémie.

Mais permettez-moi de revenir à la question de la violence antisyndicale dont j’ai déjà fait état lors de mes remarques liminaires. La violence, y compris le meurtre, ne sera jamais tolérée. Les membres travailleurs n’oublieront jamais nos amis qui ont payé de leur vie et nous continuerons à nous battre jusqu’à ce que justice leur soit rendue. Cela fait dix-sept ans que Chea Vichea et Ros Sovannareth ont été assassinés et quatorze ans que Hy Vuthy l’a été. Rien ne peut justifier le fait que ces affaires soient encore en instance et que les auteurs physiques et intellectuels de ces crimes courent toujours. Nous partageons les vives préoccupations de la commission d’experts quant à l’absence de résultats concrets dans ces affaires. Nous prions instamment le gouvernement de mettre fin à cette impunité et de faire en sorte que tous les responsables de ces actes rendent des comptes.

La violence policière contre les travailleurs et les syndicalistes est également intolérable. Il ne s’agit pas simplement d’une question de formation, même si nous sommes satisfaits du fait que les policiers puissent au moins connaître les droits des manifestants et agissent en conformité avec le droit international et les meilleures pratiques en vigueur. Toutefois, nous estimons que les violences policières reflètent le peu d’importance que le gouvernement accorde aux actions des travailleurs et au rôle des syndicats. Tant que le gouvernement n’indiquera pas clairement que les syndicats sont un élément important de la société, et tant que leurs efforts pour instaurer des relations professionnelles solides ne seront pas valorisés et continueront d’être réprimés, il ne faudra pas s’étonner que la police continue de perpétrer des actes de violence à leur encontre. Tant que cela ne changera pas, je crains que les manuels ne servent à rien.

Enfin, je constate que, sept ans après les faits, plusieurs syndicalistes font toujours l’objet de poursuites pénales ou civiles pour avoir participé aux manifestations qui ont eu lieu au début de l’année 2014. Ne perdons pas de vue les raisons pour lesquelles les travailleurs manifestaient. Ces travailleurs protestaient pour obtenir un salaire minimum décent qui, aujourd’hui encore, est trop faible. En réponse à ces manifestations, le 3 janvier, la police militaire a ouvert le feu sur les travailleurs du secteur de l’habillement qui défilaient dans la rue Veng Sreng, faisant plusieurs morts et blessés. Rien ne justifie l’inculpation d’un travailleur pour avoir exercé pacifiquement son droit syndical et de rassemblement. Il est tout simplement inacceptable que certaines affaires soient encore en instance et que les travailleurs concernés vivent toujours sous la menace de peines de prison ou de lourdes amendes.

Les membres travailleurs insistent pour que le gouvernement du Cambodge agisse concrètement en faveur de la liberté syndicale. À ce titre, nous recommandons les points suivants:

  • - s’abstenir d’arrêter, de détenir et de poursuivre arbitrairement des syndicalistes en raison de leurs activités syndicales légitimes, et abandonner toutes les charges contre ceux qui ont été accusés de délits;
  • - de fournir à la commission d’experts des informations concernant les enquêtes ouvertes sur les meurtres et les violences perpétrés contre des dirigeants syndicaux, et de veiller à ce que les auteurs et les commanditaires de ces crimes soient traduits en justice;
  • - veiller à ce qu’une enquête soit rapidement ouverte sur les actes de discrimination antisyndicale et, s’ils sont avérés, garantir l’accès à des moyens de recours et de réparation appropriés et l’imposition de sanctions dissuasives;
  • - avec l’assistance technique du BIT, élaborer des directives, un code de pratique ou un manuel sur le maintien de l’ordre et la gestion des actions collectives et de protestation;
  • - modifier la loi sur les syndicats, en consultation avec les partenaires sociaux, pour la mettre en conformité avec la convention;
  • - veiller à ce que les travailleurs puissent enregistrer des syndicats via un processus simple, objectif et transparent;
  • - garantir que les enseignants, les fonctionnaires, les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle peuvent former des syndicats et s’y affilier, en droit et dans la pratique, conformément à la convention;
  • - veiller à ce que tous les syndicats aient le droit de représenter leurs membres dans les procédures de règlement des conflits au niveau de l’entreprise et au niveau ministériel, ainsi que devant le Conseil d’arbitrage;
  • - s’assurer que les décisions contraignantes rendues par le Conseil d’arbitrage sont effectivement appliquées.

Nous prions instamment le gouvernement d’accepter une mission de contacts directs.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des déclarations écrites et verbales fournies par la représentante gouvernementale et de la discussion qui a suivi.

La commission a exprimé sa profonde préoccupation devant la poursuite des actes de violence contre des travailleurs, les arrestations de nombreux syndicalistes en rapport avec leurs activités ainsi que devant l’absence d’enquêtes efficaces et en temps opportun sur ces incidents.

À cet égard, la commission prie instamment le gouvernement:

  • - d’enquêter sur toutes les allégations de répression violente de l’activité syndicale et de détention de dirigeants syndicaux;
  • - de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer les enquêtes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), et d’assurer que les auteurs de ces crimes sont traduits en justice;
  • - d’engager tous les efforts nécessaires pour conclure les procédures judiciaires intentées à des syndicalistes dans le cadre des incidents des manifestations de janvier 2014, d’assurer qu’aucune inculpation ou sanction ne soit imposée pour l’exercice pacifique d’activités syndicales et d’abandonner tous les chefs d’inculpation pénale contre les syndicalistes accusés dans le cadre des manifestations de janvier 2014; et
  • - de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme aux arrestations arbitraires, aux détentions et poursuites de syndicalistes pour avoir mené des activités syndicales légitimes.

La commission a également noté que, si des mesures positives ont été prises pour mettre la législation en conformité avec la convention, des problèmes graves de conformité restent sans réponse.

Ayant examiné la question et prenant en compte l’exposé du gouvernement ainsi que la discussion qui a suivi, la commission demande au gouvernement cambodgien:

  • - de communiquer à la commission d’experts les rapports des trois commissions chargées d’enquêter sur les violences visant des dirigeants syndicaux et les meurtres de certains d’entre eux;
  • - d’assurer que des enquêtes sont promptement diligentées contre les actes de discrimination antisyndicale et que, si les faits sont avérés, des réparations adéquates et des sanctions dissuasives sont appliquées;
  • - avec l’assistance technique du BIT, d’élaborer des lignes directrices, un code de bonne pratique ou un manuel sur le maintien de l’ordre et le traitement des actions collectives et actions de protestation;
  • - de modifier la loi sur les syndicats en consultation avec les partenaires sociaux pour garantir sa conformité avec la convention;
  • - d’assurer que les travailleurs peuvent enregistrer des syndicats par le biais d’une procédure simple, objective et transparente;
  • - de continuer à identifier, en consultation avec les partenaires sociaux, des mesures légales appropriées pour garantir que les enseignants, les travailleurs domestiques et les fonctionnaires qui ne sont pas couverts par la Loi sur les syndicats jouissent des droits à la liberté syndicale au sens de la convention;
  • - d’abroger, dans la Loi sur les syndicats, le critère d’alphabétisation figurant dans les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats, le paragraphe 2 de l’article 28 sur la dissolution automatique des organisations de travailleurs en cas de fermeture totale d’une entreprise ou d’un établissement, et l’article 29 sur la dissolution des organisations d’employeurs et de travailleurs à l’initiative de membres de ces organisations;
  • - de discuter avec les partenaires sociaux de la possibilité d’autoriser la constitution d’organisations d’employeurs et de travailleurs par secteur ou profession; et
  • - d’intensifier ses efforts pour faire du Conseil d’arbitrage une institution efficace et pérenne pour traiter les conflits du travail, et de faire en sorte que les décisions contraignantes du Conseil d’arbitrage soient effectivement appliquées en droit et dans la pratique.

La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises sur toutes les matières qui précèdent à la commission d’experts avant sa réunion de novembre 2021.

Enfin, la commission recommande que le gouvernement accepte dès que possible une mission de contacts directs dans le but de donner pleinement effet à ces conclusions et fasse rapport sur les progrès accomplis à la commission d’experts avant sa réunion de novembre 2021.

Représentante gouvernementale – Le Cambodge prend note des conclusions et recommandations formulées par la commission. Le Cambodge continuera à travailler en étroite collaboration avec les parties prenantes concernées pour protéger et promouvoir la liberté syndicale consacrée dans la convention. Ma délégation tient à réaffirmer que le Cambodge reste déterminé à respecter les droits et les obligations découlant des instruments pertinents auxquels il est partie.

Toutefois, ma délégation note avec regret que, malgré tous nos efforts et les informations et les précisions que nous avons fournies, certaines questions sont encore délibérément choisies pour mettre un éclairage négatif sur l’exercice de la liberté syndicale au Cambodge, sans tenir compte des progrès réels accomplis sur le terrain. Nous constatons que certaines questions n’ont plus lieu d’être puisqu’elles ont été réglées par la mise en œuvre de la feuille de route. Les progrès dans la mise en œuvre de cette feuille de route ont été régulièrement communiqués au BIT. Le Cambodge continuera à travailler en étroite collaboration avec ses partenaires sociaux pour mettre à jour sa feuille de route, et les progrès réalisés dans ce cadre seront communiqués en temps utile.

En ce qui concerne les allégations infondées, nous tenons à réaffirmer qu’il n’y a pas d’arrestation de syndicalistes au Cambodge en lien avec leurs activités syndicales. Certains sont poursuivis et condamnés par le tribunal pour les infractions qu’ils ont commises.

Encore une fois, ma délégation souhaite exprimer sa reconnaissance à tous les représentants pour leurs interventions constructives, ainsi qu’au BIT et aux autres partenaires pour le large soutien apporté au Cambodge. Le Cambodge sollicite le soutien technique continu du BIT.

Toutefois, ma délégation demande qu’on lui accorde un laps de temps suffisant pour examiner et mettre en œuvre les recommandations de la commission, en particulier en cette période difficile sans précédent. La mission de contacts directs ne devrait pas être envisagée dans le présent cas, puisqu’il n’y a pas de violation grave de la convention.

Malgré cette période difficile, ma délégation tient à garantir que le Cambodge soumettra un rapport détaillé d’ici à novembre 2021 et demande à la commission d’experts d’examiner ultérieurement la nécessité d’une mission de contacts directs.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2017, Publication : 106ème session CIT (2017)

 2017-Cambodia--C087-Fr

Un représentant gouvernemental a rappelé qu’une mission de contacts directs, demandée par la Commission de la Conférence en 2016, s’est rendue dans le pays du 27 au 31 mars 2017. Cette mission a rencontré le ministre ainsi que des hauts fonctionnaires du ministère du Travail et de la Formation professionnelle (MTFP), des représentants du ministère de l’Intérieur, du ministère de la Justice, de la police nationale, du secrétariat du Conseil d’arbitrage, du secrétariat du Comité national des grèves et manifestations, des représentants des confédérations, fédérations, syndicats et associations de travailleurs, et des représentants d’organisations non gouvernementales nationales et internationales intéressées. Le gouvernement a examiné et pris bonne note des conclusions et recommandations de la mission de contacts directs.

A propos des meurtres de syndicalistes, le gouvernement regrette vivement les pertes de vies humaines et compatit à la douleur des familles des victimes. Il est déterminé à prendre toutes les mesures nécessaires, dans le respect de la législation nationale, pour amener les auteurs et les instigateurs de ces actes devant les tribunaux et rendre ainsi justice aux familles des victimes. Il est regrettable que, comme cela a été expliqué à la mission de contacts directs, le gouvernement n’ait pas été en mesure d’accélérer la procédure d’instruction en raison de plusieurs difficultés, dont le manque de collaboration des familles des victimes. Quoi qu’il en soit, le gouvernement est résolu à faire tout ce qui est en son pouvoir pour clore l’enquête. Des progrès ont été accomplis et une sous-commission tripartite sera constituée pour offrir un meilleur accès et faciliter le dépôt de preuves et d’informations par toutes les parties concernées, et surtout par les familles des victimes. Cette sous-commission aidera la Commission interministérielle spéciale d’enquête sur le cas no 2318, concernant les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea, Hy Vuthy et Ros Sovanareth, à l’examen devant le Comité de la liberté syndicale afin d’accélérer et de clore l’instruction. En outre, l’orateur a souligné que le droit de faire grève dans des conditions licites et de manifester pacifiquement est bien protégé dans le cadre légal actuel et il est pleinement exercé. Toutefois, afin de garantir la sécurité publique et l’intérêt public, toute grève ou manifestation violente est punissable dans les conditions définies dans la législation en vigueur. Le gouvernement regrette les événements de janvier 2014 qui ont été orchestrés par des politiciens qui ont utilisé la question du salaire minimum pour leur propagande. Comme cela a été dit à la mission de contacts directs, il s’agissait là d’une émeute, un incident qui ne relève pas de la définition de la grève que donnent les normes internationales du travail et qui s’accompagnait d’actions violentes et de destructions de biens publics et privés. Lorsqu’il est confronté à de tels incidents ou de telles menaces qui mettent en danger l’ordre public, le gouvernement doit agir d’urgence pour préserver la paix et la stabilité dans le pays. Si, ce faisant, les forces de police violent la loi, ces incidents font l’objet d’une enquête et les responsables sont condamnés. En réponse à l’allégation formulée spécifiquement par la Confédération syndicale internationale (CSI) à cet égard, le gouvernement a besoin de suffisamment de temps pour en rendre compte puisqu’il attend toujours les décisions de justice correspondantes.

Sur le plan législatif, la loi sur les syndicats qui a été récemment adoptée vise à protéger les droits et intérêts licites de toutes les personnes couvertes par le droit du travail ainsi que les personnels du transport aérien et maritime; à garantir les droits à la négociation collective; à promouvoir des relations professionnelles harmonieuses; et à contribuer à l’essor du travail décent et au renforcement de la productivité et de l’investissement. Il a été dûment tenu compte des commentaires des partenaires sociaux et des préoccupations qu’ils ont exprimées à propos de la mise en œuvre de la loi sur les syndicats, et les questions d’enregistrement des syndicats et de représentation syndicale ont déjà été discutées. Pour faciliter l’enregistrement d’un syndicat qui vient de se créer, le MTFP a simplifié et modifié les procédures d’enregistrement. Plus précisément, la loi sur les syndicats a ramené le délai d’enregistrement, qui était fixé précédemment à soixante jours par la loi sur le travail, à trente jours à peine. Autrement dit, tandis que la loi sur le travail imposait aux demandeurs un délai d’attente pouvant aller jusqu’à soixante jours, la loi sur les syndicats prescrit qu’un syndicat doit être considéré comme dûment enregistré si le candidat ne reçoit aucune nouvelle du greffe dans les trente jours qui suivent le dépôt de sa demande. Par ailleurs, le prakas no 249 relatif à l’enregistrement des syndicats et des associations d’employeurs, qui a été promulgué le 27 juin 2016, détaille les procédures pertinentes et dresse la liste des documents exigés et des formulaires téléchargeables. En outre, alors que, dans le passé, les syndicats ne pouvaient solliciter leur enregistrement qu’auprès du MTFP, à Phnom Penh, dans un souci de gain de temps et de réduction des dépenses, les compétences en matière d’enregistrement ont été déléguées à chaque département provincial du travail et de la formation professionnelle. Plusieurs programmes de formation ont été organisés à l’intention des fonctionnaires de l’enregistrement. Un mécanisme de recours a été mis en place pour trancher les litiges liés à la procédure d’enregistrement. Cependant, du fait de leur nouveauté, ces règlements et pratiques suscitent des difficultés. Il est toujours possible d’apporter des améliorations et certains points doivent être revus pour remédier aux difficultés auxquelles les partenaires sociaux se heurtent dans ce domaine. Concernant la reconnaissance du statut d’organisation la plus représentative et de la capacité des syndicats à représenter leurs adhérents, un décret de mise en application a été élaboré en concertation avec les partenaires sociaux. Ainsi, pour l’instant, il n’est pas nécessaire de modifier la législation; c’est plutôt son interprétation qui devrait être précisée par le biais d’un processus de consultation tripartite. Plusieurs cours de formation pour employeurs et travailleurs ont été dispensés par le MTFP en collaboration avec des syndicats et des associations d’employeurs, afin d’assurer une bonne compréhension de la législation et de son application dans la pratique. Qui plus est, les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle ne sont pas exclus du champ d’application de la loi sur les syndicats. Ils peuvent librement créer des syndicats de leur choix tant que ceux-ci répondent aux conditions fixées par la loi. S’ils ne peuvent créer un syndicat dans les conditions fixées par la loi sur les syndicats, ils peuvent toujours adhérer à une association qui a pour mission de préserver leurs droits et leurs intérêts. Dans la même veine, les fonctionnaires jouissent de la liberté syndicale qu’ils exercent dans le cadre de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales. Tandis que le ministère de l’Intérieur peut refuser un enregistrement qui menacerait ou affecterait de manière négative la sécurité publique ou l’ordre public, le demandeur a la possibilité d’introduire un recours contre cette décision devant les tribunaux. Par les textes de lois et décrets en vigueur, tels que la loi sur le statut commun des fonctionnaires, la loi sur l’éducation, la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales et la loi sur les syndicats et ses décrets d’application, la liberté d’association de tous les travailleurs, y compris les enseignants, les fonctionnaires, les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle, est totalement protégée et librement exercée. Afin de mieux promouvoir l’exercice de cette liberté, le gouvernement réexaminera les recommandations formulées par la mission de contacts directs et par cette commission pour voir si d’autres mesures devraient être prises. Les décrets d’application de la loi sur les syndicats sont en cours de rédaction et seront soumis à des consultations tripartites. Le 9 mai 2017 s’est tenue au MTFP une réunion tripartite pour discuter de quatre projets de prakas portant sur leur mise en application. D’autres consultations seront organisées afin de répondre à toutes les préoccupations des partenaires sociaux. Le gouvernement devrait bénéficier de l’assistance technique du BIT à cet effet et il s’est engagé à communiquer un rapport sur la mise en application de la législation en temps utile.

Enfin, s’agissant de l’application de la convention dans la pratique, la dernière main a été mise à un avant-projet de loi sur le règlement des conflits du travail qui a été diffusé pour commentaires. L’équipe de rédacteurs du MTFP travaille actuellement sur les commentaires et l’information en retour reçus du BIT et du Conseil d’arbitrage et elle attend d’autres commentaires des ministères compétents avant de procéder à la consultation tripartite sur l’avant-projet révisé avec le soutien et l’assistance technique du BIT. Conscient de l’efficacité du Conseil d’arbitrage, le gouvernement entend promouvoir son rôle en donnant à cette institution compétence sur les litiges individuels. Le projet de loi sera soumis au Parlement en vue de son adoption d’ici à la fin de l’année.

En conclusion, le gouvernement fait tout ce qui est en son pouvoir pour promouvoir l’exercice de la liberté syndicale et consulter les partenaires sociaux. L’orateur a appelé à une collaboration forte et étroite avec les partenaires sociaux afin d’édifier un contexte pacifique et des relations professionnelles harmonieuses dans l’intérêt des individus et du développement économique. La mise en pratique des recommandations a besoin de temps. Le gouvernement s’est engagé à fournir en temps utile à la commission d’experts des informations détaillées sur les observations formulées par les partenaires sociaux.

Les membres travailleurs ont souligné que la commission a examiné l’application de la convention en 2007, 2010, 2011, 2013, 2014 et 2016. Pourtant, le gouvernement continue de limiter ou d’interdire effectivement aux syndicats d’exercer leur droit d’organisation. Depuis 2016, la situation s’est considérablement détériorée. Le gouvernement a adopté des lois hautement répressives qui restreignent la liberté syndicale. La plus nuisible est probablement la nouvelle loi sur les syndicats, adoptée le 17 mai 2016. Les observations et les demandes directes de la commission d’experts ainsi que les remarques de la mission de contacts directs montrent clairement que nombre de ses dispositions enfreignent la convention, même si le gouvernement prétend que la loi est parfaitement conforme à l’instrument. Il s’agit, par exemple, des exigences s’appliquant à la direction des syndicats et l’imposition d’un quorum pour toute prise de décisions, ainsi que des dispositions qui facilitent la dissolution des syndicats. Les enseignants ne peuvent toujours pas constituer de syndicats, et les travailleurs de l’économie informelle, dont les travailleurs domestiques, restent effectivement exclus de la couverture de la loi. Le gouvernement suggère qu’ils s’enregistrent en tant qu’ONG, mais l’extension des droits syndicaux n’est pas assurée. La procédure particulièrement fastidieuse pour enregistrer les syndicats prévue dans la loi sur les syndicats et dans ces décrets d’application soulève bien des préoccupations. En vertu de ces décrets, les requérants doivent remplir de nombreux formulaires exigeant trop d’informations, pour la plupart inutiles, concernant non seulement les travailleurs, mais aussi leur famille étendue. Dans de nombreux cas, le gouvernement ou les employeurs ne fournissent pas aux travailleurs toutes les informations nécessaires pour remplir le questionnaire. Des demandes d’enregistrement sont refusées pour de simples coquilles, pour des raisons qui n’entrent pas dans le champ d’application de la législation ou sans aucune raison. La loi interdisant aux syndicats de mener des activités syndicales avant leur enregistrement, sous peine de sanction, les délais excessifs et les refus arbitraires d’enregistrer des organisations empêchent les travailleurs d’exercer leurs droits fondamentaux comme le prescrit la convention. Le processus d’enregistrement est en réalité une demande d’autorisation préalable à laquelle il est répondu de façon arbitraire. En outre, une fois qu’un syndicat est enregistré, il doit présenter tous les ans au gouvernement une liste complète de ses activités afin de conserver son enregistrement. Il s’agit d’une ingérence extraordinaire dans les activités des syndicats, qui constitue une violation de la convention.

Les dispositions de la loi sur les syndicats relatives au statut d’organisation la plus représentative soulèvent aussi de vives préoccupations. Seul un syndicat ayant obtenu ledit statut peut agir au nom des travailleurs auprès du Conseil d’arbitrage ou des tribunaux, même s’il ne représente que 30 pour cent de ceux-ci en cas de plaintes ou de conflits, ou peut négocier collectivement au nom des travailleurs. Il s’agit d’une violation manifeste de la liberté syndicale. De plus, le gouvernement ne réglementant pas ce point, des syndicats ne parviennent pas à obtenir le statut d’organisation la plus représentative et ne peuvent donc pas déposer plainte auprès du Conseil d’arbitrage ou des tribunaux. Cette situation a conduit à une forte diminution du nombre de cas soumis au Conseil d’arbitrage, privant ainsi les travailleurs d’un accès à une voie de recours en cas de violation de la loi sur le travail. Du reste, certains syndicats ne peuvent pas négocier collectivement alors que des conventions collectives arrivent à échéance sans syndicat autorisé à les renégocier.

Le projet de loi sur le règlement des conflits du travail prévoit un processus de règlement des conflits excessivement long, exigeant des travailleurs et des syndicats de passer par des étapes intermédiaires aussi nombreuses qu’inutiles. Une autre source de préoccupation, liée à un contexte plus vaste, est celle du manque d’indépendance du système judiciaire. Toutes les parties estiment que le Conseil d’arbitrage est fiable et neutre. Mais la loi le placerait dans un nouveau système sous l’autorité du tribunal du travail, pouvant être soumis à l’influence du pouvoir exécutif. De plus, le projet prévoit des amendes excessives qui ciblent de façon disproportionnée les travailleurs et érigent en infraction l’exercice pacifique de libertés fondamentales. Même le projet de loi sur le salaire minimum prévoit de fortes restrictions de la liberté syndicale, par exemple en proposant d’interdire toutes formes «d’objection» au salaire minimum convenu (article 26) et en interdisant de mener une recherche indépendante sur le salaire minimum (article 23). En outre, le gouvernement continue de poursuivre pénalement des dirigeants syndicaux et les tribunaux, connus pour leur manque d’indépendance, en maintenant indéfiniment ces accusations. Ces dirigeants doivent alors constamment rendre des comptes aux tribunaux et leur liberté de mouvement est limitée. Les accusations qui pèsent sur ces dirigeants syndicaux sont une forme de harcèlement et d’intimidation. Depuis 2014, 25 dirigeants de la Confédération cambodgienne du travail ou de ses organisations affiliées ont été emprisonnés. A l’instar de la commission d’experts, les membres travailleurs se sont dit profondément préoccupés qu’aucune responsabilité n’ait été établie pour les violences de janvier 2014 contre les manifestants réclamant des salaires plus élevés et qui ont fait cinq morts, des dizaines de blessés et au cours desquelles 23 personnes ont été arrêtées. A cet égard, une enquête crédible et indépendante est exigée. Le gouvernement affirme que les commissions mises en place pour enquêter ont mené leur travail à bien, mais qu’elles n’ont pas pu diffuser leurs rapports. Les membres travailleurs, comme la commission d’experts et la mission de contacts directs, ont réclamé du gouvernement qu’il publie leurs résultats et conclusions. En outre, cela fait plus de dix ans que les meurtres de Chea Vichea et Hy Vuthy ne sont pas élucidés. Pour mettre un terme à l’impunité, le gouvernement doit conclure ces enquêtes et traduire les auteurs devant la justice sans délai.

Le gouvernement continue de limiter le droit de protester publiquement. Environ 2 000 travailleurs fêtant le 1er mai n’ont pas pu défiler pour faire valoir leurs revendications, dont une hausse salariale et la fin des pratiques antisyndicales. Il convient de rappeler une fois de plus que des travailleurs sont toujours sanctionnés ou renvoyés pour leurs activités syndicales. Il est peu fréquent que des enquêtes soient efficacement menées sur ces infractions, et les travailleurs obtiennent rarement réparation, même lorsque le Conseil d’arbitrage se prononce en leur faveur. Enfin, les membres travailleurs ont rappelé que le Comité de la liberté syndicale a estimé que «les contrats à durée déterminée ne devraient pas être utilisés délibérément à des fins antisyndicales et que, dans certaines circonstances, le renouvellement répété de contrats à durée déterminée pendant plusieurs années peut être un obstacle à l’exercice des droits syndicaux». Le gouvernement n’a eu de cesse de saper les décisions du Conseil d’arbitrage lorsque celles-ci donnaient de la loi une interprétation qui interdit la reconduction de contrats à durée déterminée au-delà de deux ans et il a tenté d’étendre leur utilisation pendant une période encore plus longue. En conclusion, les membres travailleurs ont prié instamment le gouvernement de respecter la convention en droit et dans la pratique.

Les membres employeurs ont rappelé que l’application de la convention par le Cambodge est examinée par la commission depuis un certain nombre d’années. Ce cas ne présente rien de nouveau sur le fond et toutes les questions ont déjà été discutées dans le passé. Une mission de contacts directs s’est rendue dans le pays et il faudrait que son rapport soit diffusé. Ce cas porte sur les quatre points ci-après: 1) l’enquête sur les actes de violence et les meurtres non élucidés de plusieurs syndicalistes; 2) des questions législatives; 3) le droit d’organisation qui n’est pas dûment reconnu pour les enseignants, les fonctionnaires, les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle; et 4) l’indépendance du pouvoir judiciaire. S’agissant du premier point, depuis 2014, un grand nombre de dirigeants et militants syndicaux ont été accusés d’infractions pénales en raison de leurs activités syndicales et un nombre croissant d’injonctions et d’arrêtés de réquisition contre des syndicats et des travailleurs ont été dressés dans des conflits du travail, ce qui restreint les activités et les actions revendicatives des syndicats. De nombreuses allégations ont été faites en ce qui concerne le recours persistant à la violence par la police contre des travailleurs lors d’actions de protestation. Un cadre pour l’exercice des droits à la liberté syndicale doit être arrêté. Les membres employeurs ont donc encouragé le gouvernement et les partenaires sociaux à étudier l’expérience d’autres pays en la matière. S’agissant des recommandations qui sont faites depuis longtemps de procéder à des enquêtes diligentes et indépendantes sur les meurtres de trois dirigeants syndicaux, ils ont pris note des informations fournies par le gouvernement concernant la mise en place, en août 2015, d’une commission interministérielle spéciale chargée de mener des enquêtes.

Au sujet des faits survenus durant les grèves et les manifestations des 2 et 3 janvier 2014, qui se sont soldées par des violences graves et des agressions, ainsi que par le décès et les arrestations de travailleurs, et ont donné lieu à des allégations d’irrégularités de procédure dans les procès, le gouvernement a fourni des informations sur les travaux des trois organes suivants, indiquant plus spécifiquement que: i) la commission sur l’évaluation des dégâts a évalué les dégâts découlant des troubles et les besoins en matière de réparation; ii) la commission chargée d’enquêter sur les violences de la route Veng Sreng a conclu que les violences constatées sont davantage constitutives de troubles civils que d’actions revendicatives; et que iii) la commission d’étude sur les salaires minima des travailleurs des secteurs de l’habillement et de la chaussure est devenue le Comité consultatif tripartite du travail, qui rend des avis sur les conditions de travail et en assure la promotion, notamment en ce qui concerne la fixation du salaire minimum. Les membres employeurs ont donc demandé si le fait de discuter tous les ans de cet aspect permettait de faire le meilleur usage de la Commission de la Conférence. L’orateur estime qu’on ne peut prouver que des meurtres ont été commis pour entraver la liberté syndicale qu’en démontrant qu’ils l’ont été dans cette intention, faute de quoi ils doivent être traités comme des délits pénaux. Les membres employeurs ont exhorté le gouvernement à mener ces enquêtes à bon port.

Concernant les questions législatives, les membres employeurs ont noté que la loi sur les syndicats a été promulguée en mai 2016 et que, lors de son élaboration, une série de consultations tripartites, bipartites, multilatérales et publiques ont été menées et que les commentaires du BIT ont été pris en considération dans le texte final. Néanmoins, le texte ne donne pas pleinement satisfaction aux partenaires sociaux. Les employeurs ne sont pas satisfaits du nombre minimal de membres requis pour la constitution d’un syndicat, et les travailleurs ne sont pas satisfaits du champ d’application de la loi, qui exclut les fonctionnaires. La Confédération syndicale internationale (CSI) a également soulevé des questions concernant la nouvelle loi sur les syndicats, comme l’a noté la commission d’experts: critères excessifs pour les dirigeants et les cadres, dont l’âge, le niveau d’alphabétisation, le casier judiciaire et la résidence permanente; le quorum imposé pour la prise de décisions, celui-ci devant être fixé par les syndicats eux-mêmes; l’obligation de modifier l’article consacré à la dissolution des syndicats; les procédures d’enregistrement et la reconnaissance du statut de l’organisation la plus représentative. Ces questions sont légitimes et devraient être examinées. Il est donc regrettable qu’aucun détail supplémentaire n’ait été fourni. Sans cela, on ne peut que recommander de mettre tous les éléments à la disposition des autorités compétentes de sorte qu’ils puissent faire l’objet d’un examen.

S’agissant des droits syndicaux et des libertés civiles, les membres employeurs ont rappelé que l’article 2 de la convention garantit le droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. Le droit de constituer des organisations professionnelles et de s’y affilier est donc garanti pour tous, y compris les fonctionnaires. Les agents publics, qu’ils soient ou non commis à l’administration de l’Etat aux niveaux central, régional ou local, sont des fonctionnaires des organes chargés d’assurer des services publics importants ou sont employés dans des entreprises publiques. En tenant compte de l’indication du gouvernement selon laquelle l’article 36 du Statut commun des fonctionnaires garantit les droits à la liberté syndicale des fonctionnaires affectés à un poste permanent, l’article 37 de la loi sur l’éducation garantit ces droits aux enseignants, et la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales énonce également des droits en matière de liberté syndicale. Toutefois, pour les membres employeurs, certaines dispositions de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales contreviennent aux droits à la liberté syndicale des fonctionnaires en subordonnant l’enregistrement d’une association à l’autorisation du ministère de l’Intérieur, ce qui est contraire à l’article 1 de la convention. En outre, cette loi ne contient pas de dispositions reconnaissant aux associations de fonctionnaires le droit d’établir des statuts et règlements, le droit d’élire des représentants, le droit d’organiser des activités et de formuler des programmes sans ingérence des autorités publiques et le droit de s’affilier à des fédérations ou des confédérations, notamment au niveau international. Cela a entraîné une situation potentiellement ambiguë qui peut donner lieu à des applications différentes et conflictuelles de la convention. Les membres employeurs ont prié instamment le gouvernement de prendre, en concertation avec les partenaires sociaux, des mesures appropriées, notamment en modifiant immédiatement la législation, pour faire en sorte que les fonctionnaires, notamment les enseignants (qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats) exercent pleinement leurs droits à la liberté syndicale.

S’agissant du dernier point, les membres employeurs ont félicité le gouvernement pour les progrès accomplis concernant l’élaboration de directives sur le fonctionnement du tribunal du travail et de la Chambre du travail, même le rôle de l’appareil judiciaire n’est pas réglementé par la convention. Le gouvernement a indiqué que la loi sur le fonctionnement du tribunal du travail est en cours d’élaboration, avec l’assistance technique du BIT, et qu’il a l’intention de consulter les partenaires sociaux d’ici à la fin de l’année pour veiller à ce que le système de règlement des conflits du travail soit rapide, libre et équitable. Les membres employeurs ont prié instamment le gouvernement d’achever ces travaux en consultant pleinement les partenaires sociaux.

En conclusion, il n’y a pas d’informations nouvelles, hormis une série de nouvelles allégations. Pour apporter des éclaircissements sur ces questions, le rapport de la mission de contacts directs devrait être publié de sorte qu’il puisse servir de base aux futures actions à mener.

Le membre travailleur du Cambodge a déclaré que, depuis l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats, en mai 2016, la liberté syndicale est encore plus restreinte. Beaucoup de nouvelles exigences ont été imposées, comme le type d’informations à fournir, comprenant le relevé des états de service, le numéro de sécurité sociale, les noms des dirigeants et leur numéro de téléphone, et les renseignements concernant le conjoint, les parents et les enfants. Ces critères sont excessifs, infondés et ne font que répandre la peur. L’enregistrement des syndicats peut maintenant être bloqué simplement parce que les informations nécessaires n’ont pas été fournies. Dans certains cas, l’enregistrement a été bloqué par des responsables gouvernementaux qui renvoyaient sans cesse les documents pour modification. En outre, il faudra maintenant communiquer au ministère les comptes bancaires, les états financiers et les rapports d’activité pour pouvoir conserver le statut de syndicat enregistré. Les syndicats et les particuliers peuvent être poursuivis en justice pour incitation à la contestation si jamais ils s’opposent au salaire minimum approuvé par le Conseil des salaires. En bref, le droit des syndicats de gérer leur fonctionnement et de conduire leurs activités a été affaibli. Depuis l’adoption de la loi sur les syndicats, la négociation collective visant à régler les conflits collectifs est paralysée. Le ministère du Travail et le Conseil d’arbitrage ont empêché les syndicats de soumettre des dossiers au nom de leurs membres pour des conflits collectifs, parce que ces syndicats n’avaient pas conservé leur statut de syndicat enregistré, ou parce qu’ils ne faisaient plus partie des syndicats les plus représentatifs. Les employeurs en ont profité pour refuser les négociations visant à conclure des conventions collectives ou à régler des différends. Le problème examiné par la commission concerne la mise en œuvre de ces nouvelles dispositions de la législation et non l’absence d’un règlement ministériel. L’absence de dissolution de syndicats ne signifie pas pour autant que les syndicats peuvent fonctionner et mener leurs activités librement. Tant que la loi sur les syndicats restera en vigueur, les syndicats et les syndicalistes seront régulièrement menacés d’être poursuivis en justice pour «activités illégales». En outre, au nom du maintien d’une «paix judiciaire», des syndicats pourraient perdre le droit de représenter les intérêts de leurs membres sur le lieu de travail. Les critères liés à l’âge, au niveau d’alphabétisation et à l’absence de casier judiciaire, imposés aux dirigeants syndicaux, ont laissé de côté bon nombre de syndicats de l’économie informelle. Les travailleurs du secteur informel ne peuvent pas communiquer des informations relatives à leur emploi et sont de fait exclus. En outre, aucune mesure n’a été prise pour réformer le Statut commun des fonctionnaires ni la loi sur l’éducation et garantir l’égalité des droits pour les fonctionnaires et les enseignants. Les employeurs continuent de recourir aux contrats de travail à court terme et de licencier des travailleurs qui adhérent à un syndicat. Le harcèlement judiciaire est monnaie courante et la violence reste impunie. Peu de mesures ont été prises par le gouvernement pour mettre en œuvre la protection juridique des syndicats, pour traiter ou absorber les dossiers en suspens en matière d’arbitrage, notamment ceux concernant les sentences arbitrales de réintégration présentés par les centres nationaux à la commission l’an dernier. Au lieu de cela, les autorités et les employeurs se sont servis de la loi sur les syndicats pour remettre en cause le statut juridique ou la représentativité des syndicats. Les syndicalistes craignent véritablement que le projet de règlement de procédure du Tribunal du travail n’exclue encore davantage les syndicats minoritaires de la possibilité de soumettre des dossiers pour des conflits collectifs. En vertu de la procédure obligatoire relative aux conflits, le droit des syndicats de déclarer une action collective serait encore affaibli. En ce qui concerne la liberté syndicale et le respect des droits syndicaux, la situation ne s’est pas améliorée depuis le dernier examen de la question par la commission. Le gouvernement doit modifier les décrets d’application de la loi sur les syndicats afin de mettre celle-ci en conformité avec la convention, abandonner les poursuites pénales contre les travailleurs et les dirigeants syndicaux et régler les cas de réintégration. Enfin, le gouvernement doit aussi prendre des mesures pour garantir que des enquêtes justes, indépendantes et transparentes sont diligentées sur les assassinats précédents, que leurs auteurs sont sanctionnés et les victimes indemnisées en application de la loi.

Le membre employeur du Cambodge a rappelé que, depuis que son pays a fait l’objet d’une discussion au sein de la commission en 2010, le gouvernement a fait preuve d’un ferme engagement. La mission de contacts directs a visité le Cambodge en mars 2017 et formulé des recommandations en mai 2017 pour une amélioration de la situation, délai insuffisant pour que le gouvernement puisse les mettre en œuvre à temps pour la Conférence. En ce qui concerne la recommandation concernant l’exercice de la liberté syndicale dans un climat exempt d’intimidation et de violence, la commission d’experts devrait indiquer le délai dans lequel le processus doit être mis en œuvre, au vu de la courte période qui s’est écoulée depuis que les recommandations ont été adoptées. La recommandation concernant le droit syndical de tous les travailleurs, y compris les enseignants et les fonctionnaires, les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle, nécessite du temps, car des consultations avec les organisations représentatives des travailleurs et la procédure visant à obtenir l’assistance technique du BIT prennent une à deux années. La recommandation relative à l’amendement de la loi sur les syndicats exige également du temps, de même que les recommandations relatives à l’application de la convention dans la pratique. L’orateur a estimé que ce cas ne devrait pas être cité à nouveau en 2018.

Le membre gouvernemental de Malte, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres, ainsi que du Monténégro, de l’ex-République yougoslave de Macédoine, de la Serbie, de l’Albanie, de la Bosnie-Herzégovine et de la Norvège, a rappelé que ce cas a été discuté par la Commission de la Conférence en 2016 et salue le fait que, comme celle-ci l’a demandé, une mission de contacts directs a été constituée. Il a toutefois profondément regretté les allégations des travailleurs citées dans le rapport de la mission de contacts directs, notamment quant à l’usage répété de violences policières à l’encontre des travailleurs pendant les actions de protestation et quant à l’augmentation du nombre d’injonctions et de réquisitions dressées lors de conflits du travail pour restreindre les activités des syndicats. Des informations complémentaires sur ces allégations sont attendues. Il est demandé au gouvernement de prendre des mesures urgentes et concrètes pour répondre à l’appel de la commission d’experts et garantir que les droits syndicaux sont pleinement respectés et que les syndicalistes sont en mesure de mener leurs activités dans un climat exempt d’intimidation ou de risque. La Commission de la Conférence avait également demandé au gouvernement de mener des enquêtes exhaustives et rapides sur les assassinats de syndicalistes en 2004 et 2007, ainsi que sur d’autres actes de violence contre des militants syndicaux et de déférer les auteurs et les commanditaires à la justice. Il est toujours regrettable que, en dépit de la création de la commission interministérielle d’enquêtes spéciales, aucun progrès n’ait été rapporté en la matière. En conséquence, l’orateur a instamment prié le gouvernement de fournir les informations demandées par la commission d’experts sur le résultat des enquêtes sur ces cas. En outre, on attend du gouvernement des informations au sujet des conclusions des commissions constituées pour enquêter sur les décès, les blessures et les arrestations de manifestants des 2 et 3 janvier 2014 qui avaient suivi une manifestation liée à un conflit du travail. L’intervention de la police doit être proportionnelle à la menace pour l’ordre public. De plus, étant donné le doute quant à la conformité de certains aspects de la loi sur les syndicats avec la convention, le gouvernement devrait collaborer davantage avec le BIT pour assurer la pleine conformité de la loi. Enfin, l’orateur a noté avec intérêt qu’une loi concernant le règlement du tribunal du travail est actuellement en cours d’élaboration avec l’aide du BIT. Le gouvernement devrait consulter les partenaires sociaux sur cette loi afin qu’elle soit adoptée rapidement de manière à assurer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire et faire en sorte que les droits de liberté syndicale soient respectés et renforcés. Il est important, notamment dans le contexte du système de préférences généralisées de l’Union européenne, que le Cambodge prenne des mesures concrètes et durables pour assurer le respect des droits fondamentaux au travail.

Le membre gouvernemental de la Thaïlande, s’exprimant au nom de l’ASEAN, a salué les progrès réalisés dans l’application de la convention et a noté les efforts constants accomplis par le gouvernement pour garantir et promouvoir la liberté syndicale en conformité avec les normes internationales du travail. Le gouvernement devrait prendre des mesures visant à donner effet aux recommandations de la mission de contacts directs. Compte tenu du rôle essentiel du dialogue social pour la promotion de relations professionnelles harmonieuses, le gouvernement et les partenaires sociaux devraient poursuivre le dialogue social à tous les niveaux afin de promouvoir la liberté syndicale. A la lumière des progrès réalisés, l’orateur a demandé à la commission d’accorder au gouvernement un délai suffisant pour lui permettre d’examiner et d’appliquer comme il se doit les recommandations de la mission de contacts directs.

Une observatrice représentant IndustriALL Global Union a rappelé que la loi sur les syndicats et son application continuent à poser de graves problèmes quant à leur conformité avec la convention no 87 et avec la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, car le gouvernement a pris peu de mesures pour assurer la protection juridique des syndicats. Elle a déploré un retard dans la mise en œuvre des décisions arbitrales que les employeurs ignorent en toute impunité et qui continue à empêcher la réintégration de syndicalistes indépendants. La Confédération cambodgienne du travail fait part d’un arriéré de décisions arbitrales non respectées, concernant au moins 2 826 membres (dont 2 584 dans le secteur du prêt-à-porter), qui attendent leur réintégration depuis 2013. Il est inquiétant de constater que les employeurs ont recours au contentieux pour contourner les décisions arbitrales, ainsi qu’au harcèlement judiciaire pour licencier des dirigeants syndicaux qui doivent démontrer une discrimination antisyndicale au civil, là où les dispositions concernant le droit du travail sont rarement examinées. L’application des décisions arbitrales est terriblement faible, comparée au taux de retrait des travailleurs qui ne peuvent se permettre d’attendre des années pour être réintégrés. Dans de nombreux cas de cet ordre, les syndicats sont obligés de faire grève pour faire pression auprès des employeurs afin qu’ils appliquent la réintégration, action qui donne lieu à de multiples poursuites pénales à leur encontre, sur une durée indéterminée. La nouvelle loi sur la procédure de règlement des conflits du travail, qui est en cours de rédaction, risque bien d’être utilisée par le gouvernement en tant qu’outil administratif visant à surveiller et à sanctionner encore plus les syndicats qui cherchent à obtenir réparation pour le non-respect des conventions nos 87 et 98. Elle impose en effet une procédure de règlement des litiges extrêmement lourde dans les tribunaux du travail nouvellement créés, ceux-ci ayant toutes les chances d’être sous l’influence du pouvoir exécutif. La procédure et les dispositions obligatoires s’appliquant au syndicat le plus représentatif, de même que la nomination par le conciliateur des représentants des travailleurs chargés de résoudre le conflit, éliminent le rôle des syndicats minoritaires et réduisent l’espace accordé aux syndicats pour organiser leurs activités, y compris leurs actions revendicatives. Le gouvernement est instamment prié de mener des consultations à propos de la loi sur la procédure relative aux conflits du travail, afin de garantir les droits des syndicats minoritaires, et de veiller en outre à ce qu’un système décisionnel soit accessible et disponible pour résoudre rapidement et équitablement des conflits, conformément à la convention. Le gouvernement devrait accepter l’assistance technique du BIT, de même que l’envoi d’une mission tripartite de haut niveau.

Le membre gouvernemental des Etats-Unis a félicité le gouvernement pour son engagement continu auprès de l’OIT et de ses mandants, y compris lors de la récente mission de contacts directs, pour rendre sa législation conforme aux normes internationales du travail. Notant toutefois que certains points doivent encore être améliorés, il fait part de son soutien constant à la fois à la commission d’experts et à la Commission de la Conférence. Il a relevé en particulier les observations de la commission d’experts selon lesquelles certaines dispositions majeures de la loi sur les syndicats ne sont pas conformes à la convention. Le gouvernement devrait envisager de prendre les mesures suivantes: modifier la loi de façon à ce qu’elle couvre les travailleurs qui en sont actuellement exclus; supprimer toutes les conditions d’enregistrement excessives pouvant avoir un impact sur la capacité qu’a un syndicat de s’enregistrer, de constituer des fédérations, ou pouvant constituer une ingérence dans les activités d’un syndicat; supprimer les conditions imposant un quorum ou un seuil en matière de scrutin spécifique, qui peuvent avoir une incidence sur le droit d’un syndicat d’élaborer sa propre constitution et son propre règlement; supprimer les conditions minimales en matière de niveau d’alphabétisation et de limite d’âge, qui entravent le droit de vote ou la capacité de se porter candidat; et veiller à ce que tout règlement d’application ultérieure ne restreigne pas d’autant la capacité des syndicats de s’enregistrer et d’obtenir le plus de représentativité possible, ou l’accès aux procédures de règlement des différends. Etant donné les allégations selon lesquelles des dirigeants et des activistes syndicaux ont été accusés d’infractions pénales pour avoir participé à des activités syndicales, et compte tenu des informations relatant un nombre plus grand de règlements de différends dans un sens défavorable, dans le but de restreindre l’activité syndicale, il faudrait aussi que le gouvernement prenne des mesures propices à instaurer un environnement exempt de violence, de pressions et d’intimidation à l’égard des syndicalistes. Le gouvernement est instamment prié de prendre des mesures immédiates pour traiter efficacement les questions concernant la non-conformité de sa législation avec la convention, avec l’assistance technique du BIT et en pleine concertation avec les partenaires sociaux. Pour ce faire, il doit commencer par se conformer aux recommandations de la Commission de la Conférence de 2016. Enfin, l’orateur a prié instamment le gouvernement de communiquer au BIT un rapport d’activité sur les efforts qu’il déploie afin d’adopter le règlement de procédure du tribunal du travail.

La membre travailleuse du Japon a indiqué que le gouvernement doit s’efforcer de créer un environnement qui permette aux syndicats d’assumer leur rôle sans craindre de faire l’objet d’accusations pénales infondées. Des actions au civil et au pénal ont été engagées contre des dirigeants syndicaux pour différents motifs, tels qu’entrave à l’activité commerciale, obstacles à la circulation ou incitation à la grève. Les poursuites ont eu pour effet de maintenir les chefs d’accusation de manière indéfinie. En outre, les syndicats font l’objet de convocations intempestives et d’un harcèlement judiciaire dont le but est l’intimidation et le gel des activités syndicales. L’oratrice a cité les cas de cinq militants déférés à la justice par une entreprise de confection pour avoir organisé une grève et de trois militants détenus pendant un mois pour avoir pris part à une manifestation pour la réintégration de conducteurs de bus licenciés. Des responsables de la Confédération du travail du Cambodge ont été inculpés d’outrage suite à une manifestation à laquelle ils n’avaient pourtant pas participé. Dans plusieurs cas, des entreprises ont engagé des poursuites pour cause de manque à gagner dont le montant atteint parfois 60 000 dollars. Les employeurs ont tendance à recourir aux tribunaux civils afin de contourner la loi et passer outre les sentences du Conseil d’arbitrage. Le gouvernement est instamment prié de prendre des mesures visant à empêcher les poursuites pénales contre les dirigeants syndicaux.

La membre gouvernementale de la Suisse a indiqué que son pays reconnaît le processus transparent et inclusif mené par le gouvernement pour adopter la loi sur les syndicats, en particulier les consultations avec le parti de l’opposition et l’organisation d’un forum public en mars 2016. Certaines dispositions de la loi demeurent cependant préoccupantes et il est regrettable que les demandes faites précédemment soient restées sans réponse, car elles restent valables: donner la possibilité d’exercer la liberté syndicale sans violence et intimidations, assurer la mise en conformité du droit et de la pratique avec la convention, et poursuivre les auteurs de meurtres et de violences à l’encontre de syndicalistes pour mettre un terme à l’impunité. Il faut dès lors espérer que la loi sur les tribunaux du travail et celle sur les syndicats soient mises en conformité avec la convention.

Le membre travailleur de l’Australie a déclaré que le gouvernement a soit tacitement permis, soit directement participé à la discrimination, l’intimidation et la violence envers des travailleurs syndiqués et leurs représentants. Les membres et les dirigeants de syndicats indépendants sont régulièrement licenciés. Dans le cas des syndicats indépendants, leurs dirigeants ou leurs candidats sont licenciés dès que l’employeur est informé de leur identité, ce qui entraîne la destruction du syndicat. Dans certains cas, les syndicats locaux sont déplacés avec tout ou la majorité de leurs membres. Des dirigeants syndicaux sont licenciés pour inconduite grave et des accusations de délits fabriquées de toutes pièces. Des grévistes sont licenciés bien qu’ils respectent toutes les procédures. La protection juridique n’est pas garantie et le recours à des briseurs de grève demeure impuni. Les réintégrations prononcées par le Conseil d’arbitrage sont tout simplement ignorées, parfois pendant des années. La situation est illustrée par l’affaire de l’Alliance cambodgienne des syndicats et celle du Syndicat cambodgien des travailleurs du bâtiment et du bois. Trois dirigeants de l’Alliance cambodgienne des syndicats ont été licenciés et le dernier restant a démissionné, suite à des menaces proférées par des représentants de l’entreprise contre ses parents. Trois dirigeants du Syndicat cambodgien des travailleurs du bâtiment et du bois ont été renvoyés après un congrès; plus de 60 ouvriers ont été séquestrés par un agent de sécurité afin de les empêcher de participer à une grève, et un autre dirigeant a été menacé de poursuites judiciaires pour un prétendu vol de biens de l’entreprise et pour incitation à la grève. Des violations aussi flagrantes que graves de la convention ne peuvent pas être tolérées; le gouvernement doit être placé sous une surveillance du plus haut niveau possible.

La membre travailleuse des Etats-Unis, s’exprimant avec le Congrès du travail du Canada, a rappelé que la loi sur les syndicats interdit expressément aux enseignants de se syndiquer. Alors que le gouvernement répète que les enseignants peuvent exercer leur liberté syndicale aux termes de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales, des groupes tels que Human Rights Watch décrient cette loi qu’ils jugent «conçue pour restreindre les activités légitimes de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme en violation du droit à la liberté d’association». La commission d’experts a noté que cette loi viole la convention. Effectivement, le gouvernement s’en sert à des fins de discrimination politique envers des organisations dissidentes. Depuis six mois, l’Association cambodgienne indépendante des enseignants ne peut obtenir son enregistrement en raison de son orientation politique hostile au parti au pouvoir. Dans les faits, la loi sur les syndicats interdit aussi aux travailleurs de l’économie informelle de se syndiquer. Pour pouvoir créer un syndicat, les travailleurs de l’économie informelle doivent remplir la condition consistant à compter dans leurs rangs au moins dix travailleurs employés dans l’économie formelle par un même employeur. Il est extrêmement difficile aux travailleurs de l’économie informelle de s’organiser sur ce modèle. A titre d’exemple, le Syndicat cambodgien des travailleurs du bâtiment et du bois, qui représente les travailleurs informels de la construction, n’a pu enregistrer aucune de ses sept antennes locales. Cette restriction frappe l’énorme majorité des travailleurs cambodgiens. L’Organisation de coopération et de développement économiques estime que 76,7 pour cent des travailleurs cambodgiens travaillent dans l’économie informelle. Plus de la moitié sont des femmes et tous sont marginalisés. S’agissant des travailleurs domestiques, la plupart des 240 000 que compte le pays doivent cuisiner, nettoyer et s’occuper des enfants de leur employeur entre huit et treize heures par jour. Ils travaillent sept jours par semaine et n’ont pas de vacances. Le Réseau des travailleurs domestiques cambodgiens, citant une étude de l’OIT, a révélé que 60 pour cent des travailleurs domestiques gagnent moins de 50 dollars par mois, et que seuls 4 pour cent gagnent plus de 100 dollars des Etats-Unis par mois. Pour mettre ces chiffres en perspective, il faut savoir que des chercheurs spécialisés dans le domaine du salaire de survie préconisent une rémunération mensuelle d’au moins 195 dollars des Etats-Unis en 2016. Le fait que le droit à la liberté syndicale soit refusé aux travailleurs de l’économie informelle employés dans des industries précaires est particulièrement préoccupant. La commission a répété à de nombreuses reprises que la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales n’offre pas les mêmes droits syndicaux aux fonctionnaires et aux travailleurs de l’économie informelle. Elle ne constitue pas une solution de rechange qui éviterait de modifier les lois applicables pour protéger pleinement le droit de ces travailleurs de s’organiser. L’oratrice a prié instamment le gouvernement de faire en sorte que tous les travailleurs cambodgiens jouissent des protections contenues dans la convention.

La membre employeuse de l’Australie s’est ralliée aux déclarations des membres employeurs et du membre employeur du Cambodge. Alors qu’une mission de contacts directs s’est rendue dans le pays en mars 2017, son rapport n’a pas été disponible avant mai 2017. D’après les extraits du rapport communiqués par le membre employeur du Cambodge, toutes les parties ont été consultées sur les questions en suspens dont la commission est saisie. Le rapport ne fait pas état de preuves d’actes d’intimidation ou de violence dans le contexte actuel. De plus, les employeurs ont indiqué que la législation fixe à dix le nombre minimum de membres requis pour enregistrer un syndicat d’entreprise, ce qui est plus bas que le seuil proposé à l’origine. L’existence de 3 400 syndicats d’entreprise enregistrés témoigne de l’absence d’actes d’intimidation ou de discrimination. L’oratrice a recommandé que le rapport de la mission de contacts directs soit publié, ce qui permettrait de clore ce cas et, si cela s’avère nécessaire, de repartir sur de nouvelles bases.

La membre travailleuse de la France, s’exprimant également au nom de la Fédération internationale des ouvriers du transport, a déclaré que la liberté d’association pose de nombreux problèmes au Cambodge et impacte de plein fouet les capacités de négociation collective des travailleurs, et donc leurs conditions de travail et leurs salaires. Si l’Etat est garant de la mise en œuvre des normes internationales du travail, les entreprises ne sont pas pour autant exemptes de responsabilités, notamment en ce qu’elles ont devoir de vigilance tout au long de leur chaîne d’approvisionnement. Malheureusement, une grande entreprise de la construction bafoue allègrement les droits fondamentaux des travailleurs par le biais de l’entreprise commune moyennant laquelle elle opère dans les trois aéroports du pays et qui a, en 2012, apporté unilatéralement des modifications substantielles à l’accord collectif existant, au mépris des trois organisations syndicales représentées sur ces sites. Au motif de vouloir introduire la polyvalence dans les emplois, l’entreprise a commencé à harceler les travailleurs afin qu’ils signent individuellement une lettre dite «volontaire» supprimant toutes les garanties obtenues pour la période de l’accord couvrant 2011-2013. Menaces, intimidations, lettres d’avertissement, discriminations ont alors été le quotidien de ces travailleurs qui refusaient de voir leurs droits ainsi niés. L’entreprise a alors recruté de nouveaux employés polyvalents qui ont eu pour interdiction de dévoiler les termes de leurs contrats de travail aux trois syndicats signataires de l’Accord sur l’échelle des salaires et la description des tâches 2004-2013 et de l’Accord 2011-2013. Les salariés ont vu leurs charges et intensité de travail augmenter, la comptabilité des heures supplémentaires se réduire drastiquement, les perspectives d’avancements et les bonus disparaître, et les salaires baisser des deux tiers. Dans l’aéroport de Siem Reap, l’entreprise a interdit les grèves et régulièrement recouru à des embauches en contrats à durée déterminée pour casser les grèves. La responsabilité sociale des entreprises sur une base volontaire, et dans ce cas d’une multinationale française, est largement insuffisante pour garantir les droits fondamentaux dans le cadre des chaînes d’approvisionnement mondiales. Il convient d’appeler au respect des droits fondamentaux par les multinationales dans les chaînes d’approvisionnement, au respect des normes internationales du travail et au respect des principes des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits humains, et de soutenir une norme de l’OIT relative au travail décent dans les chaînes d’approvisionnement. L’oratrice a conclu en déclarant son soutien à l’initiative du gouvernement de l’Equateur pour un traité contraignant des Nations Unies relatif aux entreprises et aux droits humains.

La membre travailleuse de la République de Corée a rappelé que, lors de l’examen du cas par la Commission de la Conférence en 2016, elle avait déjà parlé du recours croissant à des contrats à durée déterminée (CDD) dans l’industrie du textile, ce qui crée une insécurité de l’emploi et nuit à la liberté syndicale. En dehors du secteur de l’habillement, le recours aux CDD est également devenu une pratique courante dans d’autres secteurs. Conformément à la législation nationale, la durée des CDD ne peut excéder une période de deux ans. Toutefois, dans la pratique, les employeurs passent outre en obtenant l’autorisation de responsables du ministère du Travail et de la Formation professionnelle, ou en faisant signer aux travailleurs une renonciation et en leur promettant une indemnité de licenciement de 5 pour cent à la fin de leur CDD. Si la loi interdit le non-renouvellement d’un CDD relevant d’une discrimination antisyndicale, les travailleurs peuvent voir leur contrat non renouvelé pour n’importe quel motif. Le large recours aux CDD permet aux employeurs de pratiquer une discrimination et de licencier en toute impunité des dirigeants syndicaux et des syndicalistes. A cet égard, elle a mentionné plusieurs exemples se rapportant à l’habillement, à la brasserie et à d’autres secteurs de production. L’oratrice a invité le gouvernement à veiller à ce que l’application des articles 67, 73 et 75 du Code du travail en matière de restriction du recours aux CDD soit assurée de telle sorte que les travailleurs puissent exercer librement leurs droits syndicaux.

Le représentant gouvernemental a remercié ses collègues de l’ASEAN pour leur soutien et leurs encouragements pour une meilleure liberté syndicale au Cambodge et il a encore remercié les délégués pour leurs contributions constructives et pour leur soutien à l’amélioration de l’application de la convention et à la réalisation de l’ambitieux programme de promotion du travail décent dans le pays. Le gouvernement continuera à mettre en place un cadre légal solide en assurant une mise en application plus effective de la législation. Des relations professionnelles pacifiques et harmonieuses pourraient se concrétiser grâce à un dialogue social à tous les niveaux. L’assistance technique du BIT reste une stratégie de mise en œuvre essentielle. Le gouvernement se félicite du soutien supplémentaire qu’il a reçu pour mettre en œuvre les recommandations de la mission de contacts directs en temps voulu. Un Comité national de suivi de l’application des conventions internationales du travail ratifiées par le Cambodge a été constitué en application de l’avis royal no 432 du 29 mai 2017. Tout en réitérant l’engagement du gouvernement à rendre compte de tout progrès accompli dans les délais impartis, l’orateur a indiqué qu’un temps suffisant est nécessaire pour mettre en œuvre les recommandations de la mission de contacts directs.

Les membres employeurs ont déclaré que la commission a reçu une abondance d’informations, certaines nouvelles et beaucoup d’autres non. La discussion confirme que les questions posées ont été bien comprises. Le rapport de la mission de contacts directs rend l’essence de la situation et résume les recommandations faites depuis des années. Il faut que le gouvernement sollicite l’assistance technique du BIT pour régler les questions en suspens, les commentaires de la commission d’experts pouvant fournir des orientations en la matière. Les membres employeurs ont à nouveau encouragé le gouvernement à normaliser la capacité de toutes les organisations et de tous les travailleurs de s’affilier à toutes les organisations de leur choix. La préoccupation exprimée aussi bien par les organisations d’employeurs que par les organisations de travailleurs en ce qui concerne la loi sur les syndicats doit être traitée par le biais du dialogue social, pour lequel le gouvernement a exprimé son plein engagement. De même, les recommandations de la mission de contacts directs en ce qui concerne l’exercice du droit d’action collective doivent être examinées par le biais d’un dialogue social. Le dialogue social est, d’une manière générale, le moyen privilégié pour résoudre ces questions à l’interne. On devrait allouer plus de temps au gouvernement pour examiner ces questions au niveau interne.

Les membres travailleurs ont fait remarquer que les problèmes restent inchangés d’une année à l’autre. Les actes de violence commis par des policiers ou des hommes de main contre des syndicalistes se poursuivent en toute impunité. Les licenciements antisyndicaux de travailleurs se répètent régulièrement sans qu’aucune sanction soit prise ou réparation accordée. Le harcèlement et l’intimidation de dirigeants et activistes syndicaux par des employeurs ou des fonctionnaires continuent. Les travailleurs qui participent à des rassemblements pacifiques se heurtent à une formation de policiers lourdement armés. Le cadre légal applicable aux syndicats est totalement étranger à la convention. Le climat de violence et les meurtres de syndicalistes font gravement obstacle à la liberté syndicale, comme l’a souligné de manière répétée la Conférence internationale du Travail. Une résolution adoptée en 1970 indiquait qu’«il est communément admis que la liberté d’association est globalement inefficace sans la protection des libertés publiques fondamentales des syndicalistes». La loi sur les syndicats et les nouveaux projets de lois éloignent encore plus le Cambodge de ses obligations légales. Le gouvernement se sert de la nouvelle législation pour refuser d’enregistrer des syndicats qui ne sont pas dans la ligne définie par le parti politique au pouvoir. Les syndicats qui ne sont pas enregistrés sont considérés comme illégaux et leurs dirigeants peuvent être sanctionnés pour une activité syndicale légitime exercée en l’absence d’enregistrement, même lorsque celui-ci a été refusé de manière arbitraire. Les contrats à durée déterminée sont d’un usage courant dans un but de sape des syndicats. A ces problèmes s’ajoutent ceux d’un pouvoir judiciaire extrêmement politisé. Les membres travailleurs ont pris note avec intérêt du rapport de la mission de contacts directs qui se fait l’écho de bon nombre des sujets de préoccupation que lui-même et la commission d’experts avaient soulevés auparavant. Or ils ont noté que le gouvernement n’a nullement l’intention de prendre la moindre mesure pour remédier aux problèmes que le groupe des travailleurs, l’OIT et d’autres organes des Nations Unies ont soulevés. Le rapport a été remis aux mandants tripartites au Cambodge et il est surprenant d’entendre quelqu’un affirmer qu’il n’a pas été distribué. Il faut espérer qu’il sera également communiqué à la commission d’experts en vue de son examen pendant la session de novembre 2017. Les membres travailleurs ont prié instamment le gouvernement de dresser une feuille de route avec tous les partenaires sociaux afin d’arrêter des actions assorties de délais qui devront mettre en pratique les recommandations de la commission d’experts et de la mission de contacts directs.

Conclusions

La commission a pris note des déclarations orales faites par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

La commission a exprimé sa profonde préoccupation face aux actes de violence au cours desquels des travailleurs ont été tués, blessés ou arrêtés.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a prié le gouvernement:

- de s’assurer que la liberté syndicale peut être exercée dans un climat exempt d’intimidations et de violences contre les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives;

- de fournir à la commission d’experts les rapports des trois commissions chargées d’enquêter sur les assassinats de dirigeants syndicaux et sur les actes de violence perpétrés à leur encontre, et de veiller à ce que les auteurs et les responsables de ces crimes soient traduits devant la justice;

- de veiller à ce que tout acte de discrimination antisyndicale fasse rapidement l’objet d’une enquête et, s’il est avéré, à ce que des voies de recours appropriées soient prévues et des sanctions dissuasives appliquées;

- de poursuivre la révision de la loi sur les syndicats, en étroite consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, afin de trouver des solutions compatibles avec la convention no 87;

- de s’assurer que les travailleurs peuvent enregistrer des syndicats au moyen d’une procédure simple, objective et transparente;

- de garantir que les enseignants, les fonctionnaires, les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle sont protégés en droit et dans la pratique conformément à la convention no 87;

- de s’assurer que tous les syndicats ont le droit de représenter leurs membres devant le conseil d’arbitrage;

- d’achever, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs, les textes de loi et réglementations proposés sur les conflits du travail conformément à la convention no 87, de façon à ce que le système de règlement des conflits du travail repose sur une base légale solide lui permettant de concilier équitablement les intérêts et les besoins des travailleurs et des employeurs concernés par les conflits;

- d’élaborer une feuille de route pour définir des actions assorties de délais afin de mettre en œuvre les conclusions de la présente commission.

La commission a recommandé au gouvernement de se prévaloir de l’assistance technique du BIT et de rendre compte des progrès accomplis à la commission d’experts avant sa réunion de novembre 2017.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2016, Publication : 105ème session CIT (2016)

 2016-Cambodia-C087-Fr

Un représentant gouvernemental a déclaré que le Cambodge respecte pleinement le droit de grève mais que les actes de violence commis pendant une grève sont interdits. Il a souligné que le droit de grève prévu par la convention est assujetti à la législation nationale. Conformément à l’article 37 de la Constitution, le droit de faire grève et de manifester sans violence doit être exercé dans le cadre de la loi. Lorsqu’ils exercent ce droit, les travailleurs doivent respecter la procédure applicable telle que définie dans la législation nationale. L’exercice du droit de grève ne doit pas troubler l’ordre public du pays. L’orateur a assuré qu’aucun travailleur n’a été détenu sans qu’un abus relevant du droit pénal n’ait été commis, par exemple endommager les biens publics ou privés ou attenter à l’intégrité physique d’autres personnes. Le nombre d’enregistrement de nouveaux syndicats s’accroît chaque année. En 2015, le ministère a enregistré 237 nouveaux syndicats d’entreprises. A ce jour, 16 confédérations syndicales, 100 fédérations syndicales, 3 434 syndicats à l’échelle de l’entreprise et 8 associations d’employeurs ont été enregistrés. Le ministère de l’Education, de la Jeunesse et des Sports organise des réunions annuelles, trimestrielles et mensuelles avec les représentants des enseignants. En 2014, 121 organisations non gouvernementales (ONG) et associations ont signé le protocole d’accord sur la collaboration avec le ministère. Il n’est pas interdit aux enseignants de participer à une grève ou à une manifestation à condition que l’exercice de cette liberté soit conforme à la procédure nationale, par exemple, l’obligation d’assurer un service minimum, ce qui est conforme aux principes des normes internationales du travail. Les enseignants et les fonctionnaires sont libres de former des associations de leur choix en vertu de la loi sur les associations et les ONG, qui vise à garantir la protection du droit et de la liberté des citoyens de constituer de telles associations et ONG pour protéger leurs intérêts dans le respect de la loi et l’intérêt public. Cette liberté est également garantie par l’article 36 de la loi sur le statut commun des fonctionnaires et par l’article 37 de la loi de 2007 sur l’éducation.

En ce qui concerne les assassinats de dirigeants syndicaux, l’orateur a indiqué que la commission interministérielle spéciale établie pour enquêter sur ces cas agit avec diligence et est résolue à faire traduire en justice les véritables auteurs de ces actes. Etant donné la nature essentielle de ce cas, il est nécessaire de consacrer le temps voulu à l’enquête afin qu’elle aboutisse à des conclusions justes et équitables. L’orateur a exprimé l’espoir que la commission et toutes les parties prenantes reconnaîtront l’engagement du gouvernement à cet égard.

L’orateur a déploré les incidents qui ont eu lieu au début de janvier 2014. Toutefois, il a précisé que ces incidents étaient une émeute dont les instigateurs étaient des politiciens qui ont utilisé le prétexte de la détermination du salaire minimum à des fins de propagande. Cette émeute ne relève pas de la grève telle que définie par les normes internationales du travail. Les manifestants ont bloqué les rues à minuit, jeté un cocktail Molotov et détruit des biens privés et publics. Le coût de ces dommages est estimé à environ 75 millions de dollars des Etats-Unis. Le gouvernement a dû agir pour rétablir la paix et la stabilité. L’orateur a déclaré qu’un rapport détaillé sur cette question serait soumis à la commission d’experts d’ici à septembre 2016.

Conformément aux dispositions de la loi de 2014 sur l’organisation des tribunaux, l’institution d’un tribunal du travail spécialisé est en cours et il sera opérationnel prochainement. Le gouvernement, avec l’assistance technique du BIT, élabore le projet de loi sur la procédure de travail du Tribunal du travail. La consultation tripartite sur ce projet aura lieu avant la fin de 2016. La nouvelle loi sur les syndicats vise à protéger les droits et les intérêts des travailleurs et des employeurs en garantissant le droit de négociation collective entre les travailleurs et les employeurs, en améliorant les relations professionnelles et en tenant compte de l’emploi et du développement national. L’élaboration de la loi a pris près de dix ans et, pendant cette période, de nombreuses consultations bipartites, tripartites, multilatérales et publiques ont été effectuées. L’examen en vue de la mise en œuvre de cette nouvelle loi figure à l’ordre du jour du gouvernement, dans le but de traiter les problèmes constatés pendant sa mise en œuvre. En conclusion, l’orateur a déclaré que son gouvernement est résolu à garantir la liberté d’association en veillant à l’application de l’ensemble de la législation, et a demandé à cet égard toute la collaboration des partenaires sociaux.

Les membres employeurs ont noté que la commission a examiné ce cas à six reprises, la dernière en 2014, que la commission d’experts a fait des observations à cet égard chaque année depuis 2007, et que le cas a déjà été examiné par le Comité de la liberté syndicale. Le cas démontre la nécessité d’étudier le moyen dont la commission reçoit et traite les informations. Jusqu’à une date récente, il était centré sur une liste de questions, et non sur des violations de la convention ou des signes de progrès ou non, de la part du gouvernement. Le rapport de la commission d’experts, ayant noté les informations divergentes fournies par les organisations de travailleurs et le gouvernement sur un certain nombre de points, a rappelé combien il est nécessaire d’instaurer un climat qui soit exempt de violence, de pression ou de menaces à l’exercice de la liberté syndicale. En raison de ces divergences, la commission a des difficultés à rendre des conclusions concrètes et, à moins qu’elle ne parvienne à démontrer que les informations fournies répondent aux obligations du Cambodge au titre de de la convention, elle n’a d’autre choix que de continuer à demander plus d’informations, ce qu’il serait préférable d’éviter. La citation, par la commission d’experts, des conclusions du Comité de la liberté syndicale sur les procès qui ont été réalisés à la suite du meurtre d’un syndicaliste il y a quelque temps, montre combien il est nécessaire de se concentrer sur la conformité avec les conventions et la responsabilisation dans leur application. Les membres employeurs, tout en insistant sur le fait qu’ils ne tolèrent pas la moindre violence envers les travailleurs, les syndicats ou les employeurs, se posent la question de savoir en quoi les préoccupations du Comité de la liberté syndicale à propos de la procédure pénale appliquée à une personne reconnue coupable du meurtre d’un syndicaliste doivent être examinées par la commission dans le cadre des questions relatives à la liberté syndicale.

Quant aux questions relatives à la liberté syndicale qui ont fait l’objet de précédentes recommandations, la commission a été précédemment informée que le gouvernement a mis en place trois commissions visant à mener des enquêtes sur un certain nombre d’actes de violence commis lors des grèves de 2014 qui portaient, notamment, sur les salaires minimaux. Les membres employeurs ont pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle il présentera les conclusions de ces commissions, qui ne sont pas encore connues, d’ici à la fin de 2016. Ils notent également que des progrès ont été accomplis dans le règlement des problèmes exprimés au sujet des ressources fragmentées et dispersées de la procédure judiciaire, notamment dans le cadre de la mise à disposition d’arbitres ayant reçu la formation appropriée. Le gouvernement a offert des formations aux arbitres et a instauré des unités de travail spécialisées dans les différents niveaux du système judiciaire, de façon à offrir la spécialisation et l’expérience nécessaires pour permettre une résolution rapide et efficace des problèmes liés au travail. Il convient de noter cependant que ce travail est en cours. La nouvelle loi sur les syndicats trouve son origine dans les plaintes exprimées concernant le mauvais traitement et le harcèlement subis par les syndicalistes et les restrictions évidentes rencontrées lors de la constitution de nouveaux syndicats, dans le contexte caractérisé par une nette augmentation de nouveaux syndicats ces dernières années dans le pays. Ces deux questions doivent clairement être réglées. La loi sur les syndicats porte en grande partie sur les sujets ayant fait l’objet de préoccupations et pour lesquels le gouvernement est prié de mettre pleinement en œuvre la loi, et ce dans les meilleurs délais, avant d’en fournir copie à la commission d’experts. A moins que l’on puisse réellement prouver la non-conformité de la loi avec la convention, auquel cas la question devrait être soumise au gouvernement pour qu’il y réponde, les membres employeurs estiment que la commission devrait considérer cette question comme étant résolue.

Préoccupés par les restrictions que le gouvernement a cherché à instaurer à propos de la nomination de nouveaux représentants syndicaux, en particulier la condition de savoir lire et écrire qui semble constituer une forme d’autorisation préalable contraire à l’article 2 de la convention, les membres employeurs prient instamment le gouvernement d’examiner la question, ainsi que toute autre éventuelle anomalie, avant de chercher à donner effet à la loi. Notant que la commission d’experts a demandé des informations sur tout progrès portant sur la rédaction des principes directeurs à appliquer sur le fonctionnement du Tribunal du travail et de la Chambre du travail, les membres employeurs ont proposé que le gouvernement présente un rapport succinct qui permette d’entreprendre toute éventuelle enquête pouvant s’imposer dans la mise en pratique des différents aspects couverts dans le cadre de ces principes. En ce qui concerne l’avancement du Cambodge sur le chemin de la démocratie, les mesures que le pays a récemment prises sont très importantes. Il s’agit de l’instauration d’un service judiciaire spécialisé et de la loi sur les syndicats, qui permettent de considérer que le cas du Cambodge est en progrès, même s’il n’est pas reconnu en tant que tel. Le BIT a récemment mené des consultations dans le pays au sujet des tribunaux du travail et des institutions connexes, et un processus de consultation avec les partenaires sociaux a débuté. Selon les membres employeurs, un délai raisonnable devrait être accordé au Cambodge avant qu’il ne soit prié de fournir un rapport détaillé sur les progrès qui ont été accomplis concernant les recommandations de la commission, ce qui n’exclut pas que des questions soient posées à propos de la violation des principes de la liberté syndicale. Ils recommandent que le gouvernement soit appelé à fournir des informations actualisées brèves sur les points suivants: i) ses activités concernant les trois commissions d’enquête, dont il a promis de rendre compte en décembre 2016; ii) la mise en place de la juridiction du travail, avec les ressources et la formation qui l’accompagnent, tout en prenant note des travaux actifs qui ont été réalisés et de l’assistance offerte par le BIT à cet égard; et iii) l’application de la nouvelle loi sur le travail, en tenant compte des remarques de la commission à ce sujet.

Les membres travailleurs ont regretté que, en dépit des appels réitérés de l’OIT, du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, des syndicats, de grandes enseignes mondiales de l’habillement et d’organisations de la société civile, le gouvernement ait décidé d’adopter une loi profondément régressive qui viole la convention à bien des égards. S’ajoutant à celle concernant les organisations non gouvernementales, extrêmement restrictive et susceptible d’être appliquée aux syndicats du secteur informel qui ne sont pas reconnus au titre de la législation du travail, cette nouvelle loi manifeste une hostilité croissante envers les syndicats et la société civile. Les violations de la liberté syndicale sont nombreuses et restent impunies. En mai 2016, dans une déclaration commune, trois rapporteurs spéciaux des Nations Unies ont indiqué: «Nous sommes […] préoccupés par les actions entreprises par les autorités cambodgiennes en vue de dissuader la tenue de manifestations pacifiques ou de les disperser, et d’arrêter quiconque proteste contre ce qui est vu comme une persécution croissante de la société civile par le gouvernement et contre les restrictions injustifiées des libertés fondamentales dans le pays.» De profondes réformes sont donc nécessaires.

Les membres travailleurs ont rappelé que les syndicats n’ont été consultés qu’une fois pendant le long processus de rédaction de la loi sur les syndicats – sans que leur avis n’ait été pris en considération. Ils ont rappelé également les critiques qui soulignaient qu’elle serait utilisée pour étouffer le mouvement syndical indépendant du pays, alors même que celui-ci se mobilise pour obtenir une revalorisation salariale et des améliorations des conditions de travail. L’OIT a attiré l’attention du gouvernement à plusieurs reprises sur «plusieurs préoccupations et lacunes» et le bureau du Rapporteur spécial des Nations Unies pour le Cambodge a pointé du doigt plusieurs dispositions, dont certaines violent la propre Constitution du pays. Les membres travailleurs ont mentionné: i) l’article 3 qui exclut diverses catégories de travailleurs du champ d’application de la loi, y compris les fonctionnaires, les enseignants, les travailleurs informels et les travailleurs domestiques; ii) l’article 14 qui interdit aux syndicats de conclure des accords juridiques avant d’être enregistrés; iii) l’article 17 qui exige des syndicats qu’ils fournissent un niveau excessif d’information au gouvernement au sujet de leurs finances et de leurs activités, sous peine de voir leur enregistrement annulé; iv) l’article 20 qui impose aux dirigeants syndicaux des critères illégaux d’âge et de niveau d’alphabétisation, et les soumet à des contrôles radicaux d’antécédents criminels susceptibles de disqualifier des personnes ayant eu des activités syndicales légitimes; et v) l’article 29 relatif aux requêtes en dissolution d’un syndicat sans préciser clairement qui peut déposer de telles requêtes. Quant aux sanctions encourues par les employeurs en vertu de la loi, elles sont bien trop faibles pour être dissuasives. Ils ont appelé le gouvernement à corriger la situation afin que la loi soit conforme aux conventions de l’OIT.

Au sujet des violences perpétrées à l’encontre de manifestants en janvier 2014, qui ont fait cinq morts, des dizaines de blessés graves et ont entraîné des arrestations sans fondement, les membres travailleurs ont déploré l’absence de sanctions et ont demandé une enquête indépendante et crédible sur ces événements. Ils ont soutenu la demande que la commission d’experts a adressée au gouvernement de rendre publics les résultats et conclusions des enquêtes. Citant des exemples concrets, ils ont indiqué que la criminalisation de l’activité syndicale dissuade les syndicats d’organiser des actions librement. En ce qui concerne le recours illicite aux contrats à durée déterminée, qui est commun dans certains secteurs, ils ont souligné que le Comité de la liberté syndicale a rappelé que «les contrats à durée déterminée ne doivent pas être utilisés de manière délibérément antisyndicale et que, dans certaines circonstances, l’embauche de travailleurs par le biais de contrats à durée déterminée renouvelés pendant plusieurs années peut constituer un obstacle à l’exercice des droits syndicaux». Or ce type de contrats est utilisé précisément à cette fin dans le secteur de l’habillement. Malgré le rappel à la loi du Conseil d’arbitrage, celle-ci n’est pas appliquée et le gouvernement a tenté à maintes reprises de déstabiliser ce conseil.

Les membres travailleurs ont détaillé un exemple de violation de la liberté syndicale dans une société de transport qui illustre selon eux l’absence grave de droits au Cambodge: deux dirigeants syndicaux ont été arrêtés pour avoir entrepris une manifestation pacifique demandant la reconnaissance d’un syndicat et le respect de sentences arbitrales, des poursuites pénales étant même engagées contre des dirigeants syndicaux qui n’étaient pas sur les lieux, et les dirigeants de l’entreprise refusant de mettre en œuvre les décisions du Conseil d’arbitrage. Ce comportement doit cesser, et le gouvernement est instamment appelé à mettre un terme à la répression et à respecter la liberté syndicale.

Le membre employeur du Cambodge a déclaré qu’il se félicitait que la loi sur les syndicats, qui est conforme avec les normes internationales du travail, ait été adoptée après de larges consultations tripartites officielles. La procédure pour l’établissement d’un tribunal du travail spécialisé, qui a été menée avec l’appui du BIT et à l’issue d’une consultation tripartite, prendra du temps, et il a demandé que le temps nécessaire soit accordé pour poursuivre ce processus. L’orateur a mis l’accent sur les problèmes que rencontre le mouvement syndical au Cambodge pour permettre l’existence de relations professionnelles saines et respectueuses, notamment: i) l’existence d’un mouvement syndical fragmenté et non représentatif, qui est source de luttes internes et de comportements illégaux entre les syndicats (ce qui provoque de nombreux conflits au sein des entreprises notamment parce que les syndicats ne représentent pas les travailleurs, mais poursuivent des objectifs personnels); ii) l’ingérence extérieure de syndicats dans des entreprises qu’ils ne représentent pas (en particulier l’ingérence liée à l’externalisation qui s’accompagne souvent d’actes d’intimidation et d’ingérence perturbant le lieu de travail, de l’exploitation et de menaces contre les travailleurs); iii) des syndicats minoritaires tirant parti de la loi pour obtenir des avantages personnels, et ce parce qu’ils ne représentent pas les intérêts des travailleurs; et iv) l’incapacité de recourir aux accords de négociation collective de manière efficace et d’en tirer parti pour les travailleurs, les employeurs et l’industrie. Se référant aux commentaires de la commission d’experts en 2015, il a déclaré qu’il revient également aux syndicats de veiller à ce que la liberté syndicale s’exerce dans un climat exempt de violence, de pression ou de menace de quelque nature que ce soit. Les syndicats doivent exercer leurs droits dans le cadre de la législation du pays et doivent répondre de leurs actes s’ils sortent de la légalité. Les négociations de 2014 sur le salaire minimum ont donné lieu à des manifestations à caractère politique qui sont devenues violentes. Les employeurs sont contre tout acte de violence, de quelque nature que ce soit, et les personnes qui se sont rendues coupables de crimes doivent rendre des comptes, qu’il s’agisse d’un employeur ou d’un travailleur. La protection de la liberté syndicale pour les fonctionnaires et les enseignants est prévue aux termes de l’article 36 de la loi sur le statut commun des fonctionnaires et de l’article 37 de la loi sur l’éducation. Il espère que le gouvernement continuera à faire rapport à la commission sur les progrès réalisés et l’invite à le faire par le biais du comité interministériel chargé de faire rapport sur les questions intéressant l’OIT.

Le membre travailleur du Cambodge a rappelé que le Cambodge a ratifié 13 conventions de l’OIT et que la convention no 87 l’avait été en 1999. Même si de nombreuses lois garantissant les droits syndicaux sont en vigueur, leur application pose toujours des difficultés. Les syndicats indépendants continuent de rencontrer de gros problèmes, dont des assassinats, des arrestations, de la discrimination syndicale et de l’ingérence dans leurs activités. Il a rappelé le meurtre, en 2004, de trois dirigeants syndicaux, Chea Vichea, Ros Sovanareth et Hy Vuthy. Depuis lors, des assassinats avaient toujours lieu: cinq travailleurs ont été tués en 2013. Il a également mentionné différents incidents au cours desquels des dirigeants syndicaux ont été blessés, poursuivis, emprisonnés ou licenciés sans avoir été indemnisés ou réintégrés. Il est rare que les dirigeants et les membres syndicaux indépendants obtiennent véritablement justice dans les cas de discrimination. La loi sur l’organisation des tribunaux a été adoptée en 2014 sans consultation des syndicats et une loi sur la procédure de travail du Tribunal du travail est en cours de rédaction; le gouvernement est encouragé à initier des consultations avec les syndicats sur ce projet de loi. A propos des licenciements injustes de syndicalistes, 80 pour cent des travailleurs disposent de contrats de courte durée, ce qui permet aux employeurs de les licencier facilement lorsqu’ils adhèrent à des organisations syndicales indépendantes. Les travailleuses sont aussi facilement renvoyées lorsqu’elles tombent enceintes. L’orateur a également rappelé que, dans certains cas, des partis politiques et des entreprises interviennent dans les activités des syndicats qui ne peuvent dès lors plus être considérés comme indépendants et autonomes, en violation du deuxième paragraphe de l’article 3 de la convention. Du reste, la loi sur les syndicats, adoptée en mai 2016, est toujours très restrictive pour les organisations syndicales: le quorum requis pour le vote d’une grève est de 50 pour cent plus un du total des membres. Les syndicats doivent également envoyer des rapports financiers au ministère du Travail. De la même façon, les parties concernées ont le droit de vérifier les comptes des syndicats et de les dissoudre. Il est instamment demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour: i) veiller à ce que les syndicats soient exempts de toute menace de meurtre, de violence et d’ingérence; ii) garantir que des enquêtes justes, indépendantes et transparentes sont diligentées sur les assassinats précédents, que leurs auteurs sont sanctionnés et les victimes indemnisées en application de la loi; iii) s’assurer de l’abandon des poursuites contre les dirigeants des 6 centrales syndicales nationales; iv) empêcher les employeurs de poursuivre des syndicats indépendants; v) cesser d’intervenir dans les activités des organisations syndicales et protéger les syndicats contre l’ingérence des employeurs; vi) travailler en collaboration avec des organisations syndicales pour modifier la loi sur les syndicats dans le respect des normes internationales du travail; vii) prévoir que la durée des contrats à durée déterminée ne soit pas inférieure à deux ans pour éviter la discrimination des syndicalistes et des travailleuses enceintes; et viii) veiller à la composition tripartite du nouveau Tribunal du travail, à son indépendance, à son professionnalisme, à son efficacité, à ce que le consensus prévale dans ses décisions et à ce que son accès soit rapide et gratuit. Il convient que le BIT assiste le gouvernement en envoyant une mission tripartite pour traiter ces questions.

La membre gouvernementale des Pays-Bas, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres, et déclarant que l’Albanie, l’Islande, la Norvège et la République de Moldova se rallient à la déclaration, a indiqué qu’ils attachaient une grande importance aux droits de l’homme, notamment à la liberté syndicale, et étaient conscients du rôle majeur que joue l’OIT dans l’élaboration, la promotion et le contrôle de l’application des normes internationales du travail. Le gouvernement est instamment prié de faire en sorte que les droits syndicaux soient pleinement respectés et que les syndicalistes puissent exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation ou de risque. A cet égard, ils espèrent que la commission d’enquête spéciale, établie en juin 2015 pour élucider une affaire criminelle concernant le meurtre de trois personnes, Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, tiendra les organisations nationales d’employeurs et de travailleurs informées de manière régulière des résultats obtenus dans ce dossier. Notant la récente adoption de la loi sur les syndicats, ils comptent que le gouvernement l’applique de façon équitable et impartiale, et demandent au BIT de veiller à ce que l’ensemble de ses dispositions soient conformes à la convention. Encourageant le gouvernement à inclure les fonctionnaires, les enseignants et les travailleurs nationaux dans le champ d’application de la nouvelle loi, ils invitent instamment le gouvernement à: i) fournir les informations requises par la commission d’experts sur les mesures prises ou envisagées pour que les droits de ces groupes soient pleinement garantis au titre de la convention; ii) se prévaloir de l’assistance technique du BIT; et iii) s’acquitter de ses obligations de faire rapport.

Le membre gouvernemental de la Thaïlande, s’exprimant au nom des Etats membres de l’ASEAN, a pris note avec satisfaction des informations fournies et des progrès réalisés par le gouvernement. Tout en le félicitant pour l’adoption d’une loi sur les syndicats, l’orateur a encouragé le gouvernement à la mettre effectivement en pratique. Il a également félicité le gouvernement de l’engagement qu’il a pris de mettre en place des tribunaux du travail dans un futur proche et de développer une loi sur le salaire minimum, conformément aux normes internationales du travail. Mettant l’accent sur l’engagement du gouvernement à renforcer le dialogue social dans le pays, il a prié instamment la commission de prendre en considération les progrès significatifs réalisés.

La membre gouvernementale des Etats-Unis s’est dite préoccupée par les restrictions qui continuent de peser sur le droit à la liberté syndicale et par l’absence de protection des droits des travailleurs au Cambodge. Elle s’est référée aux allégations figurant dans les observations récentes de la commission d’experts en ce qui concerne les entraves permanentes à l’enregistrement de nouveaux syndicats indépendants, et les intimidations chroniques dont font l’objet les enseignants qui adhèrent à des syndicats. La véritable liberté syndicale ne peut être exercée que dans un environnement exempt de toute violence, de toute pression et de toute menace. Tout en prenant note des informations que le gouvernement a fournies sur les travaux des trois commissions (la Commission sur l’évaluation des dégâts, la Commission chargée d’enquêter sur la violence sur la route Veng Sreng et la Commission d’étude sur les salaires minima des travailleurs du secteur de l’habillement et de la chaussure) qui ont été créées au lendemain de graves épisodes de violence, de décès et d’arrestations de travailleurs en 2014, l’oratrice s’est dite toujours préoccupée par les allégations d’arrestations et de détentions chroniques de travailleurs participant à des manifestations. Elle a fait écho à la demande de la commission d’experts en vue d’obtenir des informations supplémentaires sur les conclusions et les recommandations des trois commissions et a prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir la violence antisyndicale, notamment en menant des enquêtes approfondies dans les meilleurs délais et en traduisant les responsables en justice. Depuis 2008, l’OIT s’est associée au gouvernement et à ses partenaires sociaux pour élaborer une loi sur les syndicats. Malgré de nombreuses consultations et les révisions recommandées au fil des ans, le gouvernement a adopté une loi sur les syndicats en 2016 qui semble loin d’être conforme aux normes internationales du travail. Les principaux points de préoccupation sont les suivants: i) le fait que certaines catégories de travailleurs sont privés du droit d’adhérer à des syndicats; ii) les seuils élevés qui sont fixés pour les scrutins de grève; iii) l’excès et la lourdeur des exigences en matière d’audit et l’opacité des dispositions concernant les parties pertinentes qui peuvent demander un audit des activités syndicales; iv) la capacité des tribunaux à intervenir dans la dissolution de syndicats qui devrait plutôt être déterminée par les statuts et règlements administratifs du syndicat; et v) l’absence de sanctions suffisamment dissuasives en cas de non-conformité. La membre gouvernementale a prié instamment le gouvernement de soumettre un exemplaire de la loi sur les syndicats à l’examen de la commission d’experts en 2016, et de prendre immédiatement des mesures avec l’assistance technique du BIT et en pleine consultation avec les partenaires sociaux, afin de remédier aux problèmes de non-conformité avec la convention.

Le membre travailleur de l’Australie a rappelé que, en vertu de l’article 36 de la Constitution, les citoyens khmers ont le droit de constituer des syndicats et de s’affilier à des syndicats. Même si cela peut être considéré comme un point de départ honnête à une garantie en droit de la liberté syndicale, la réalité montre que, ces dernières années, le droit d’association et d’organisation des travailleurs est attaqué de manière continue sur plusieurs fronts, parfois mortellement. L’inégalité de l’application du droit pénal est l’un des indicateurs de la dégradation de la situation. Il y a eu des attaques violentes et des dirigeants syndicaux ont même été assassinés. Toutefois, dans la plupart des cas, ces actes sont restés impunis. Pourtant, le gouvernement a recouru à plusieurs reprises et avec empressement au droit pénal contre les travailleurs et les dirigeants syndicaux. Pas moins de six dirigeants de centrales syndicales nationales ont été inculpés pour violences volontaires et dégradations après la grève de 2014. Le président du Congrès cambodgien du travail est actuellement sous contrôle judiciaire, ce qui l’empêche de participer aux manifestations ou de s’approcher des travailleurs dans certaines zones, de mener des grèves ou des manifestations ou de déménager. Cent quatre-vingt-dix-huit affaires pénales concernant des travailleurs et des syndicats, essentiellement dans le textile et l’habillement, sont également en suspens. D’après une analyse de la nouvelle loi sur les syndicats menée par le bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme au Cambodge, il existe plusieurs domaines clés dans lesquels l’application du droit pénal a des conséquences directes sur la capacité des personnes à constituer des syndicats et à s’y affilier. Il s’agit notamment: i) de l’obligation selon laquelle les dirigeants syndicaux doivent déclarer qu’ils n’ont jamais été condamnés pour une infraction pénale; et ii) de la capacité du nouveau Tribunal du travail de dissoudre un syndicat dans son ensemble lorsque des membres de ce dernier ont été convaincus d’infraction ou même de faute grave. Toute action politique visant à incriminer la syndicalisation et à recourir au droit pénal en tant qu’instrument de répression de l’organisation syndicale ne fera que nuire à la réputation internationale du Cambodge. Le gouvernement est instamment prié de rejeter cette approche.

Le membre travailleur de la République de Corée a rappelé que le Comité de la liberté syndicale a indiqué dans son rapport adopté en mars 2016 que les contrats à durée déterminée ne devraient pas être utilisés délibérément à des fins antisyndicales et pouvaient être un obstacle à l’exercice des droits syndicaux. Beaucoup de manufactures de prêt-à-porter se sont constituées toute une main-d’œuvre en recourant au renouvellement répété de contrats de courte durée. Cela va à l’encontre de la loi sur le travail, mais cela est largement utilisé dans la pratique et ce phénomène s’accroît. Les implications juridiques de l’emploi dans le cadre de contrats de courte durée sont nombreuses, entre autres moins de droits et de prestations pour les travailleurs, des licenciements plus faciles et des préavis de licenciement plus courts, des difficultés pour démontrer des actes de représailles antisyndicales, moins d’indemnités à la fin du contrat et un accès restreint aux prestations de congé maternité. L’utilisation des contrats de courte durée crée plus d’instabilité pour les travailleurs qui, à juste titre, craignent que leur contrat ne soit pas renouvelé s’ils n’obéissent pas à l’employeur ou s’ils adhèrent à un syndicat. De plus, dans une situation où la plupart des contrats sont des contrats de courte durée, il est difficile de trouver des dirigeants syndicaux puisqu’ils ne pourront pas assurer un mandat de deux ans. L’expérience professionnelle d’une année requise par la législation du travail pour les dirigeants syndicaux peut être difficile à acquérir dans le cadre des contrats de courte durée. Un protocole d’accord dans le secteur du prêt-à-porter a été conclu en 2012 entre l’Association des fabricants de vêtements du Cambodge (GMAC) et plusieurs syndicats. Ce protocole dispose qu’un accord doit être obtenu sur cette question. Néanmoins, aucune négociation n’a été entamée sur cette question. Par conséquent, tout en approuvant la recommandation du Comité de la liberté syndicale, l’orateur demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures appropriées pour promouvoir ces négociations afin de parvenir à un accord sur le recours aux contrats de courte durée et de veiller à ce que les travailleurs du secteur du prêt-à-porter puissent exercer librement leurs droits syndicaux.

Le membre gouvernemental du Canada a vivement encouragé tous les Etats membres à respecter les termes de la convention, et il a rappelé que c’est aux gouvernements qu’il incombe de faire en sorte que la liberté syndicale s’exerce dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces quelles qu’elles soient. Bien que des mesures positives aient été prises dans l’ensemble, la démarche doit se poursuivre et des informations doivent être communiquées, comme l’a souligné la commission d’experts. Les préoccupations que suscite la loi sur les syndicats portent principalement sur l’insuffisance de la protection du droit de tous les travailleurs et employeurs de constituer librement des organisations de leur choix et du droit qu’ont ces organisations d’organiser leur administration interne sans ingérence. A cet égard, le gouvernement devrait reprendre les discussions dans le cadre du dialogue social et devant l’assemblée nationale, afin de réviser la loi. L’orateur s’est également dit déçu par l’aspect restrictif pour la société civile de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales, du fait que son application à des professions qui ne sont pas couvertes par la loi sur les syndicats pourrait constituer une violation de la convention. Enfin, dans l’attente des conclusions et recommandations des commissions cambodgiennes instituées à la suite des événements et violences de 2014, il a insisté sur l’urgente nécessité d’assurer l’efficacité du système judiciaire en tant que rempart contre l’impunité et que moyen de protection efficace des droits des travailleurs pendant les conflits du travail.

Le membre travailleur des Philippines a exprimé son soutien aux travailleurs au Cambodge en ce qui concerne les pratiques antisyndicales discriminatoires qui sont très répandues. Des membres et des dirigeants de fédérations et de syndicats qui sont indépendants et critiques à l’égard des employeurs sont de plus en plus la cible de harcèlement, de discrimination et de licenciements antisyndicaux. Depuis la fin de 2013, 867 membres de la Confédération cambodgienne du travail (CLC) ont été licenciés en raison de leur appartenance à un syndicat et de leurs activités syndicales et 67 seulement d’entre eux ont été réintégrés dans leur emploi. Le rejet par les employeurs de la sentence arbitrale sur la réintégration de travailleurs ainsi que l’absence de volonté du gouvernement de faire appliquer ces sentences portent gravement atteinte aux syndicats librement choisis par les travailleurs. L’orateur a donné l’exemple de la grève de protestation de novembre 2014 à l’aéroport de Siem Reap. Elle a duré dix jours et, pendant cette période, des travailleurs ont été engagés pour remplacer les grévistes. Sept dirigeants syndicaux ont été licenciés au motif d’avoir organisé la grève. La direction de l’aéroport a demandé au vice-président du syndicat de ne plus présenter de plaintes contre l’entreprise, et lui a offert de le réintégrer dans son emploi en échange de sa coopération. Au lieu de veiller à ce que les travailleurs licenciés abusivement soient réintégrés, le ministère du Travail a demandé à l’employeur de verser une indemnisation monétaire aux dirigeants syndicaux qui avaient été licenciés, lesquels à ce jour n’ont pas été réintégrés et sont sans emploi.

Le membre travailleur du Japon s’est déclaré préoccupé que l’article 29 de la loi sur les syndicats garantisse le droit à «des parties concernées» ou à 50 pour cent de l’ensemble des membres d’un syndicat de prendre l’initiative de demander une dissolution du syndicat devant le Tribunal du travail. Dans l’intérêt des relations professionnelles, la dissolution d’un syndicat ne doit être décidée qu’en dernier ressort, et après avoir épuisé les autres possibilités moins préjudiciables pour l’organisation dans son ensemble. Qui plus est, la dissolution d’un syndicat doit se faire conformément aux règlements intérieurs et statuts du syndicat. Les dispositions de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales concernant l’enregistrement obligatoire de toutes les associations nationales et internationales; le pouvoir discrétionnaire absolu du ministère de l’Intérieur en matière d’enregistrement, et la condition de «neutralité politique» applicable à toutes les associations et organisations, constituent une violation du droit à la liberté syndicale. Il a prié instamment le gouvernement de consulter les syndicats et d’envisager la révision de ces lois pour qu’elles soient pleinement conformes à la convention.

Le représentant gouvernemental a remercié ses collègues de l’ASEAN, en particulier la Thaïlande, pour leur soutien et leurs encouragements en vue d’améliorer la liberté syndicale au Cambodge. Il a pris acte de tous les commentaires constructifs des représentants d’employeurs et de travailleurs de ces pays, ainsi que des autres délégués gouvernementaux qui pourront précieusement contribuer à la réalisation du programme ambitieux de construction d’un avenir fondé sur le travail décent. Le gouvernement a activement travaillé à l’élaboration d’un cadre juridique solide en adoptant des lois et des règlements. La loi sur les syndicats a été récemment adoptée et ses instruments d’application sont en cours d’élaboration. Quant à la loi sur les procédures de travail du Tribunal du travail, elle est en cours de rédaction. Le gouvernement collabore étroitement avec le programme Better Work de l’OIT intitulé Better Factories Cambodia en vue d’améliorer et de renforcer l’inspection du travail pour garantir de meilleures conditions de travail. Il est indispensable que toutes les parties concernées participent et collaborent pour continuer d’améliorer l’application effective des normes internationales du travail et des lois et règlements du pays. Tout en réitérant son engagement à entièrement satisfaire aux obligations de présenter des rapports, il a assuré qu’un rapport détaillé sera soumis à la commission d’experts d’ici septembre 2016.

Les membres travailleurs ont indiqué que les membres de la commission ne pouvaient qu’encourager le gouvernement à faire de rapides progrès sur la voie de la liberté syndicale. Cependant, ils ont entendu de la part de plusieurs délégués, et notamment du membre travailleur du Cambodge, une description de la situation qui demeure très sérieuse. Ils ont rappelé qu’à propos des assassinats de Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, le Comité de la liberté syndicale avait dû avoir recours à l’utilisation exceptionnelle du paragraphe 69 de ses procédures pour l’examen des plaintes en violation de la liberté syndicale pour inviter le gouvernement à le rencontrer afin de lui remettre des informations manquantes. Le gouvernement a accepté cette invitation à communiquer des informations en mai 2015. Relevant que cela faisait plus d’un an, ils ont insisté sur l’importance de fournir les réponses aux requêtes qui avaient été formulées. La question de l’impunité demeure un problème crucial.

Depuis 2006, le Cambodge est soumis à un contrôle permanent de la commission pour ce qui est de l’application de cette convention, de la convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, et de ses manquements en matière de présentation de rapports. Chaque année, les questions restent les mêmes: actes de violence antisyndicale qui restent impunis (y compris des assassinats); licenciements antisyndicaux; harcèlement et intimidation par des agents de l’Etat; interdiction du droit à la liberté d’expression et de réunion; et cadre juridique non conforme à la convention. Les contrats de courte durée, objet de l’observation de la commission d’experts en 2015 et des conclusions du Comité de la liberté syndicale en 2016, sont régulièrement utilisés pour frustrer les syndicats. Ces problèmes sont aggravés par un appareil judiciaire politisé qui ne garantit pas la justice. Les membres travailleurs se sont à nouveau dits préoccupés par le fait que, malgré l’intervention de l’OIT, de l’ONU, des syndicats internationaux et des marques mondiales de l’habillement, le gouvernement a encore raté une occasion d’adopter une loi conforme à la convention, et qu’il a préféré adopter une loi contenant de nombreuses dispositions contraires à la convention. Lorsque les travailleurs ont pacifiquement manifesté après l’adoption de la loi, ils ont été la cible d’attaques et d’agressions.

A plusieurs reprises, les grandes marques internationales ont exprimé, avec les travailleurs, leur préoccupation face à l’environnement préjudiciable dans le pays pour les travailleurs. Le pays peut et doit immédiatement changer de cap et instaurer un environnement juridique propice au plein exercice du droit à la liberté syndicale, qui doit également être garanti dans la pratique. Les membres travailleurs ont demandé au gouvernement: i) de mettre la loi sur les syndicats entièrement en conformité avec les dispositions de la convention, en coopération avec les partenaires sociaux et avec à nouveau l’assistance technique du BIT; ii) de veiller à ce que les enseignants et les fonctionnaires, ainsi que les travailleurs de l’économie informelle, qui ne sont pas couverts par la législation relative aux syndicats, puissent pleinement exercer les droits consacrés par la convention; iii) de mener des enquêtes complètes dans les meilleurs délais sur l’assassinat des syndicalistes mentionnés dans le rapport de la commission d’experts et d’engager des poursuites à l’encontre des auteurs et des instigateurs de ces actes; iv) de veiller à ce que la commission interministérielle spéciale tienne régulièrement les organisations nationales d’employeurs et de travailleurs informées de l’avancée de ses enquêtes en vue de promouvoir le dialogue social, et de mettre un terme à l’impunité dont jouissent les auteurs d’actes de violence à l’encontre de syndicalistes; v) de mener une enquête indépendante sur les épisodes de violence commis à l’encontre de syndicalistes les 3 et 4 janvier 2014, y compris sur les blessures et les décès occasionnés, et d’engager des poursuites à l’encontre des auteurs et des instigateurs de ces crimes; vi) de veiller à ce que les travailleurs soient en mesure de participer librement à des manifestations publiques pacifiques; vii) d’abandonner les poursuites pénales engagées contre des dirigeants syndicaux en raison de leur participation à des manifestations pacifiques; et viii) de veiller à l’application des décisions du conseil d’arbitrage en matière de contrats de courte durée, en limitant leur cumul à une durée de deux ans. Au vu de l’absence de progrès réalisés depuis le dernier examen du présent cas par la commission, et compte tenu que la commission a examiné le présent cas à plusieurs reprises ces dernières années, les membres travailleurs ont instamment prié le gouvernement d’accepter une mission tripartite de haut niveau en 2016.

Les membres employeurs ont rappelé l’historique de ce cas, les préoccupations des travailleurs concernant l’absence de progrès sur certaines questions soulevées et les changements instaurés par le gouvernement. Le gouvernement a fourni d’autre part des informations sur les initiatives entreprises, incluant: i) l’introduction et la mise en œuvre en cours de la refonte des tribunaux du travail et des chambres du travail; ii) l’introduction de formations et de ressources nécessaires aux tribunaux du travail et aux chambres du travail; et iii) l’adoption de la loi sur les syndicats et l’engagement pris en vue de sa mise en œuvre effective. Les membres employeurs ont fait écho à l’appel des travailleurs à mettre en place de manière efficace et rapide ces initiatives mais considèrent que des progrès considérables ont déjà été réalisés et qu’il faut donner au Cambodge la latitude nécessaire pour prouver qu’il peut mener ces initiatives à une conclusion rapide et efficace, à savoir l’achèvement des enquêtes des trois commissions sur les meurtres de 2014 qui doivent être conclues cette année; la finalisation des directives et de la manière dont elles seraient rendues opérationnelles; ainsi que la mise en œuvre effective de la loi sur les syndicats par le biais d’une approche favorisant l’équilibre entre les droits des travailleurs et ceux des employeurs. Les membres employeurs ont exprimé l’avis que le pays doit bénéficier d’une marge de manœuvre, mais ont pressé le gouvernement de fournir le plus vite possible à la commission un rapport concernant les actions entreprises afin de mettre pleinement en œuvre les initiatives entreprises.

Conclusions

La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi sur les questions soulevées par la commission d’experts.

La commission a noté la proposition du gouvernement d’établir de nouveaux tribunaux du travail, ainsi que la persistance de questions concernant la liberté syndicale pour les organisations de travailleurs.

Tenant compte de la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a prié instamment le gouvernement:

  • - de veiller à ce que la liberté syndicale puisse être exercée dans un climat exempt d’intimidation et sans violence contre les travailleurs, les syndicats ou les employeurs, et d’agir en conséquence;
  • - de s’assurer que la loi sur les syndicats soit pleinement conforme aux dispositions de la convention no 87, et d’engager le dialogue social, avec l’assistance technique du BIT;
  • - de s’assurer que les enseignants et les fonctionnaires soient protégés en droit et dans la pratique conformément à la convention no 87;
  • - de diligenter des enquêtes exhaustives et rapides concernant les meurtres et les violences à l’égard des dirigeants syndicaux et traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes;
  • - de s’assurer que la Commission interministérielle spéciale tienne les organisations d’employeurs et de travailleurs informées de manière régulière sur les progrès de ses enquêtes; et
  • - de présenter un rapport à la commission d’experts avant sa réunion de novembre 2016 en fournissant des informations à jour sur ses activités concernant les trois comités d’investigation déjà établies, sur la mise en place, la dotation en ressources et la formation de la juridiction du travail, ainsi que sur la mise en œuvre de la nouvelle loi sur les syndicats.

Le gouvernement devrait accepter une mission de contacts directs avant la prochaine session de la Conférence internationale du Travail pour évaluer les progrès réalisés dans la mise en œuvre de ces conclusions.

Le représentant gouvernemental a indiqué que, s’agissant de l’invitation de la commission d’accepter une mission de contacts directs, il sera nécessaire de consulter d’abord les instances gouvernementales compétentes. Son gouvernement prendra contact avec le BIT en temps utile.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2014, Publication : 103ème session CIT (2014)

 2014-Cambodia-C87-Fr

Un représentant gouvernemental a déclaré que la Constitution du Cambodge et sa législation du travail garantissent l’une comme l’autre la liberté syndicale. En outre, le gouvernement rédige actuellement un projet de loi sur les syndicats. Le ministère de l’Intérieur, qui a publié des directives pour l’enregistrement des associations et des organisations non gouvernementales (ONG), a enregistré, à ce jour, 4 003 organisations de ce type. Le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a enregistré, à ce jour, 12 confédérations syndicales, 80 fédérations syndicales, 3 026 syndicats au niveau de l’entreprise et sept associations d’employeurs. Des associations et des ONG ont participé à la rédaction de projets de lois et de règlements. Le gouvernement à l’évidence respecte le droit à la liberté syndicale. Concernant les accusations de la communauté internationale selon lesquelles le Cambodge ne respecte pas la convention no 87, l’orateur a fait le point sur trois affaires importantes. En premier lieu, Chhouk Bandith a été condamné par la cour d’appel à 18 mois d’emprisonnement et à verser 38 millions de riel (KHR) aux victimes à titre de réparation. La police est à sa recherche. Deuxièmement, les deux suspects accusés du meurtre du dirigeant syndical Chea Vichea ont été relâchés et l’affaire a été rouverte. Troisièmement, dans le cas no 2655 du Comité de la liberté syndicale, le vice-président du Syndicat cambodgien des travailleurs du bâtiment et du bois (BWTUC) et trois de ses dirigeants ont rencontré, à deux reprises en 2014, des représentants du ministère du Travail et de la Formation professionnelle. La direction du BWTUC changeant fréquemment, le vice-président a demandé davantage de temps pour examiner les allégations. La commission sera tenue informée de l’évolution des dossiers. La loi sur les syndicats est actuellement examinée, avec l’assistance du BIT, et le ministère du Travail et de la Formation professionnelle s’engage à l’adopter avant la fin de l’année 2014 ou tout début 2015. L’Assemblée nationale prépare actuellement trois autres lois sur la mise en place du système judiciaire, l’organisation et le fonctionnement du conseil des juges, et le statut des juges et des procureurs. Enfin, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle prévoit de modifier la législation du travail, notamment ses dispositions concernant les contrats à durée déterminée.

Les membres employeurs ont rappelé que la commission a examiné ce cas l’an dernier et qu’elle avait pris note dans ses conclusions des problèmes graves rencontrés en termes d’impunité et d’irrégularités de la procédure judiciaire. Ils avaient également demandé que des mesures soient prises afin de remédier au manque d’indépendance du système judiciaire et à son fonctionnement inefficace, que des informations soient fournies sur le projet de loi concernant le statut des juges et des procureurs et que le gouvernement redouble d’efforts afin d’assurer l’adoption rapide du projet de loi sur les syndicats d’ici à la fin 2013. La commission d’experts a noté avec regret qu’elle n’avait reçu aucune information de la part du gouvernement. Notant que des élections ont eu lieu en juillet 2013, les membres employeurs se sentent encouragés par l’information reçue du gouvernement selon laquelle trois projets de loi sont sur le point d’être adoptés par l’Assemblée nationale. Il s’agit de la loi sur l’organisation des tribunaux (qui instaure les tribunaux du travail), la loi sur le conseil suprême des magistrats, et la loi sur le statut des juges et des procureurs. En outre, un conseil interministériel comprenant des employeurs et des travailleurs a été établi afin de faciliter l’envoi de rapports au BIT. Le BIT est encouragé à fournir une assistance technique sur la mise en place et le fonctionnement du conseil interministériel, et le gouvernement est encouragé à continuer à avoir recours à cette aide. Les membres employeurs comprennent aussi que le gouvernement travaille avec les partenaires sociaux sur le projet de loi sur les syndicats qui doit être examiné par l’OIT. Ils ont encouragé le gouvernement à poursuivre ses progrès dans ce sens et à consulter les partenaires sociaux pendant l’élaboration du projet de législation. Il est nécessaire de garantir que la législation concernant les syndicats prévoit un équilibre entre les responsabilités des employeurs et celles des syndicats eu égard aux pratiques de travail déloyales, et qu’elle interdise clairement la violence. Certains problèmes nationaux devraient également être pris en considération: un environnement économique difficile; la multiplicité des syndicats dans une entreprise; et les violences dans les manifestations syndicales. En outre, la présente commission devrait prendre note des progrès accomplis par le gouvernement en faveur de la promotion de la liberté syndicale depuis la ratification de la convention no 87. Ils ont encouragé le gouvernement à indiquer sans autre délai les progrès réalisés à ce jour et les mesures mises en œuvre, et à continuer de solliciter l’assistance technique du BIT s’il la juge utile.

Les membres travailleurs se sont dits déçus par le fait que le cas examiné aujourd’hui a déjà fait l’objet de discussions à quatre reprises en cinq ans, et que la situation s’est régulièrement détériorée d’année en année. Il y a toutefois de l’espoir: des syndicats internationaux et certaines des plus grandes marques internationales ont mis conjointement au point une feuille de route pour demander instamment au gouvernement de prendre des mesures concernant différentes questions. Des relations professionnelles durables ne seront possibles au Cambodge que si elles se fondent sur le respect du droit à la liberté syndicale et la négociation collective. Les 2 et 3 janvier 2014, le gouvernement a fait usage d’une extrême violence pour réprimer des manifestations spontanées organisées par des travailleurs du secteur du textile, après l’annonce du gouvernement d’un nouveau taux de salaire minimum bien en deçà du taux de celui qui avait été proposé à l’issue de ses propres recherches comme étant à même de remplir les besoins de base. Des soldats lourdement armés et la police se sont mobilisés et sont responsables de la mort de six personnes – à ce jour – et d’environ 40 hospitalisations pour blessures par balle. Plutôt que de tenir compte des appels du Rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l’homme au Cambodge à mettre en place un comité indépendant chargé d’enquêter sur la violence, le gouvernement a mis en place un comité trié sur le volet, et a félicité publiquement ses forces de sécurité de leurs efforts. Le gouvernement n’a donné aucune indemnisation aux victimes ni à leurs familles. Vingt-trois travailleurs ont été arrêtés pour avoir participé aux manifestations. Ils ont été jugés de manière inéquitable et ont été condamnés à quatre et cinq ans de prison. Néanmoins, du fait des fortes pressions internationales, leurs peines ont été suspendues. Les membres travailleurs sont profondément préoccupés par le fait que ces peines, même si elles sont suspendues, pourraient servir à menacer, à limiter, voire interdire, l’exercice de la liberté syndicale.

Après les manifestations des 2 et 3 janvier, le gouvernement a fait usage de la force à maintes reprises pour disperser les rassemblements portant sur des questions de travail et jeter les responsables syndicaux en prison pour leur participation à ces manifestations. Sans aucun fondement juridique, le gouvernement a gelé l’enregistrement de nouveaux syndicats indépendants pendant la crise, et a ensuite imposé des critères ponctuels qui font obstacle à l’enregistrement de nouveaux syndicats. Le gouvernement n’a pas respecté l’échéance fixée par la présente commission pour l’adoption d’une nouvelle loi sur les syndicats en conformité avec la convention no 87. Le projet de loi actuel montre un recul par rapport au Code du travail actuel. S’il n’est pas modifié significativement, et s’il n’intègre pas les contributions du BIT et des syndicats, il serait préférable d’y renoncer complètement, dans la mesure où il ne fera qu’étouffer davantage le droit syndical des travailleurs du Cambodge. Le gouvernement n’a pas donné suite à un certain nombre de questions soulevées dans le rapport de la commission d’experts – il n’a pas conduit d’enquête indépendante concernant le meurtre des dirigeants syndicaux Chea Vichea, Ros Sovannareh et Hy Vuthy; et aucune mesure sérieuse n’a été prise pour arrêter Chhouk Bandith, reconnu coupable d’avoir abattu par balle plusieurs travailleurs du secteur du textile en 2012. Le système judiciaire demeure profondément corrompu. En mai 2014, l’Assemblée nationale, composée entièrement de membres du Parti du peuple cambodgien (PPC), a adopté rapidement trois lois qui devraient mettre ostensiblement la législation nationale en conformité avec les normes internationales d’administration de la justice. Néanmoins, les lois ont été rédigées secrètement et les groupes de défense des droits avaient mis en garde contre le fait que, si elles étaient approuvées par le Sénat, ces lois renforceraient le contrôle du gouvernement sur les juges et les procureurs et menaceraient gravement l’état de droit. Enfin, la cause du conflit actuel au Cambodge est la fixation du salaire minimum, soit le thème de l’étude d’ensemble de 2014 de la commission d’experts. Une étude demandée par le gouvernement cambodgien en août 2013 a établi que le salaire minimum approprié devrait se situer entre 157 et 177 dollars E.-U. par mois. Néanmoins, le gouvernement a établi le salaire minimum à 95 dollars E.-U., et ensuite à 100 dollars E.-U. par mois. Des syndicats internationaux et les marques de vêtements ont appelé ensemble le gouvernement à assurer immédiatement aux travailleurs le salaire de subsistance, un droit inscrit dans la Constitution cambodgienne et approprié pour un secteur qui génère 5,5 milliards de dollars E.-U. par an.

La membre employeuse du Cambodge a estimé que certains membres travailleurs avaient délibérément dépassé le cadre de ce cas et a demandé à ce que ces interventions ne soient pas consignées. En ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire, des progrès ont été réalisés avec l’adoption des trois lois susmentionnées qui répondent aux demandes de la commission. L’oratrice a donc demandé à ce que cette question ne soit plus examinée par cette commission en reconnaissant que le renforcement des capacités du pouvoir judiciaire prendra du temps. Le gouvernement devrait être encouragé à renforcer davantage le système judiciaire, y compris les systèmes d’arbitrage commercial et d’arbitrage du travail. En ce qui concerne la liberté syndicale, l’oratrice a dénoncé l’inexactitude des informations communiquées par la Confédération syndicale internationale (CSI) et réaffirmé qu’il y a eu une augmentation du nombre de syndicats de 60 pour cent l’année dernière, ce qui porte le nombre total de syndicats à 3 026 en 2013, dont 3 000 dans le secteur du textile (dans 800 usines); une augmentation de 80 pour cent du nombre de fédérations (80) et une augmentation du nombre de grèves de 255 pour cent en 2012 et de 21 pour cent en 2013. Ces chiffres montrent que les syndicats fonctionnent sans crainte et qu’ils ont beaucoup de droits et de libertés en droit et en pratique. La réalité sur le terrain se caractérise par une prolifération de syndicats minoritaires non représentatifs et violents qui font obstacle à des relations professionnelles harmonieuses qui sont elles-mêmes nécessaires à une croissance harmonieuse. La législation nationale n’a pas établi de nombre minimum de membres pour constituer un syndicat. L’oratrice a posé la question de savoir comment les employeurs sont censés négocier collectivement avec 17 syndicats essentiellement non représentatifs au sein d’une même usine. Selon la membre employeuse, plutôt que de formuler des accusations qui ne reflètent pas la réalité, la commission ferait mieux de reconnaître et de discuter des défis pratiques tels qu’ils se posent réellement. Les libertés autorisées par la législation nationale sont mal utilisées. La violence qui a éclaté en janvier 2014 a débuté au sein du mouvement syndical. Les syndicalistes ont détruit des hôpitaux, lesquels sont actuellement en cours de reconstruction; ils ont dégradé des lieux de travail et ont rendu invalides des fonctionnaires. La violence, qui nuit à la primauté du droit et à la durabilité des entreprises, devrait être condamnée par toutes les parties concernées. De plus, la prescription concernant l’enregistrement approprié des syndicats plutôt que l’enregistrement automatique et la reconnaissance de la violence de la part des syndicats ne devraient pas être considérées comme des atteintes à la liberté syndicale. Il est essentiel que le projet de loi sur les syndicats tienne compte des besoins du Cambodge, tels que le besoin d’attirer des investissements et de créer des emplois. La loi est actuellement dans sa phase d’élaboration. Elle est examinée et négociée par les partenaires sociaux, et il est inopportun d’examiner des dispositions spécifiques d’un projet de loi en adressant une demande au gouvernement. L’oratrice a demandé le retrait du Cambodge de la liste des cas et préconisé l’adoption de conclusions axées sur les questions considérées et entrant dans le cadre délimité par l’observation de la commission d’experts.

La membre gouvernementale de la Grèce, s’exprimant au nom de l’Union européenne (EU) et de ses Etats membres, ainsi qu’au nom de l’ex-République yougoslave de Macédoine, du Monténégro, de l’Islande, de la Serbie, de l’Albanie, de la Norvège, de l’Ukraine et de la République de Moldova, a exprimé son engagement en faveur de la promotion de la ratification et l’application universelles des huit conventions fondamentales de l’OIT. Ces conventions constituent d’importants instruments internationaux permettant de garantir la démocratie, l’état de droit et le respect de droits de l’homme. Leur application sous-tend le développement du potentiel humain et de la croissance économique de chaque pays. En janvier 2014, l’UE a exprimé son inquiétude concernant les violentes manifestations se déroulant au Cambodge et le recours excessif à la force pour les étouffer. L’oratrice a exhorté toutes les parties concernées à œuvrer par tous les moyens à l’élaboration d’une solution pacifique. Elle s’est félicitée de la libération, intervenue le 30 mai 2014, des syndicalistes et des travailleurs du secteur de la confection poursuivis pour des motifs ayant trait aux manifestations, espérant qu’il s’agissait d’une évolution positive de la situation de la liberté d’assemblée à Phnom Penh, qui s’était détériorée peu de temps auparavant. Le gouvernement devrait accélérer la restauration des droits fondamentaux des travailleurs et publier les résultats de l’enquête sur les assassinats ayant eu lieu en janvier. Les parties prenantes doivent développer un dialogue constructif sur l’amélioration des relations professionnelles. Concernant les points relevés dans le rapport de la commission d’experts, l’oratrice a exhorté le gouvernement à transmettre les informations demandées sur les résultats des enquêtes concernant les meurtres des dirigeants syndicaux. Le gouvernement devrait également veiller au respect total des droits syndicaux des travailleurs et garantir qu’ils sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et de danger. Il devrait démontrer en quoi son projet de réforme législative va promouvoir l’indépendance et l’effectivité du système judiciaire. Il devrait accroître ses efforts pour adopter rapidement la loi sur les syndicats en consultant de manière approfondie les partenaires sociaux. Enfin, l’oratrice a appelé le gouvernement à recourir à l’assistance technique du BIT et à s’acquitter de ses obligations en matière de rapports.

La membre travailleuse de la République de Corée a indiqué que les droits de la personne sont facilement violés en l’absence de liberté syndicale, comme le montre la répression sanglante de la manifestation pacifique des travailleurs en janvier 2014. Le 2 janvier, devant le siège d’une entreprise coréenne au Cambodge, des forces spéciales ont été déployées pour réprimer la manifestation des travailleurs, dix desquels ont été arrêtés par les militaires. Trente-huit manifestants ont été gravement blessés, et d’autres ont été tués. En réaction à cette violence, la Confédération coréenne des syndicats (KCTU) et d’autres organisations professionnelles et civiles asiatiques ont envoyé une mission d’enquête au Cambodge. Il ressort des entretiens avec les travailleurs qui avaient manifesté ou été témoins des arrestations que, alors que les travailleurs manifestaient pacifiquement, des soldats armés de fusils, de lance-pierres, de couteaux et de tuyaux en fer ont réprimé la manifestation. Les soldats ont même arrêté dix manifestants. Recourir à l’armée et à la police contre les citoyens de son propre pays n’est en aucun cas acceptable. La mobilisation des forces armées pour réprimer les manifestations sur les salaires était disproportionnée et a été fermement condamnée par les Nations Unies. Le gouvernement devrait ouvrir une enquête approfondie et indépendante sur la répression sanglante des manifestants, afin de contraindre les responsables à rendre des comptes. Il devrait aussi indemniser les victimes et leur famille. Si les autorités n’ont pas arrêté les responsables des assassinats de travailleurs, le gouvernement n’a pas perdu de temps pour arrêter 23 travailleurs et pour les placer en détention sans possibilité de caution. Bien qu’ils aient été relâchés le 30 mai 2014, ces travailleurs ont été condamnés à des peines comme l’interdiction d’assumer des fonctions de responsables syndicaux. Aucune enquête n’a été ouverte pour déterminer si les dix travailleurs arrêtés avaient commis des actes de violence ou des dommages matériels; des témoins ont même indiqué que l’un d’entre eux, Vorn Pao, a tenté de calmer la situation en appelant à la non-violence. La détention sans possibilité de caution, les condamnations qui ont suivi et la suspension de peines sont de graves violations des droits civils et sont politiquement motivées. Elles devraient donc être annulées. Au Cambodge, l’impunité règne en ce qui concerne la violence contre des responsables syndicaux, et cela permet à ces crimes de se répéter. Il doit y avoir une justice, et il est urgent d’avoir un système judiciaire indépendant.

La membre travailleuse des Etats-Unis a rappelé que, en dépit du fait que le gouvernement se penche depuis longtemps sur l’adoption d’une nouvelle loi sur les syndicats qui soit conforme à la convention, la situation dans le pays se dégrade dangereusement. Certes, à la suite de la diffusion en 2011 du premier projet de loi, le mouvement syndical est parvenu à retirer du projet certaines restrictions à la liberté syndicale; mais on note depuis le début 2014 un ralentissement dans la promulgation de la loi sur les syndicats. Le gouvernement a présenté depuis peu un nouveau projet dont la qualité est bien inférieure à celle du projet qui avait été préparé tout au long de l’année 2011 en consultation avec les syndicats. Le nouveau projet a fait l’objet de critiques du BIT qui lui reproche, entre autres, les faits suivants: il augmente le nombre minimum de travailleurs requis pour enregistrer un syndicat, qui passe ainsi de 8 à 20 pour cent de la main-d’œuvre; les tribunaux bénéficient d’un pouvoir accru en termes de suspension ou de révocation des enregistrements des syndicats pour des infractions très diverses; le projet reste vague en ce qui concerne les sanctions imposées aux syndicalistes; les qualifications requises pour devenir responsable syndical sont excessives, notamment en ce qui concerne l’âge et le niveau d’éducation, et l’absence d’antécédent judiciaire; la nécessité requise de spécifier le montant des cotisations syndicales; le projet régit les détails du déroulement d’un vote de grève; il restreint le mandat des dirigeants syndicaux élus, etc. En outre, le nouveau projet n’autorise la négociation collective et les droits de représentation qu’au seul syndicat le plus représentatif ou à la fédération la plus importante, limitant ainsi les droits des syndicats minoritaires, ce qui va à l’encontre de la convention no 98. Le gouvernement n’est pas parvenu à trouver une solution malgré les préoccupations dont le BIT lui a fait part au sujet des problèmes susmentionnés. Etant d’avis qu’une nouvelle loi sur les syndicats qui soit conforme aux principes de l’OIT s’impose pour assurer un régime de relations professionnelles durable, l’oratrice a instamment prié le gouvernement de tenir compte des points de vue que les syndicats ont exprimés en détail au sujet du projet de loi et de collaborer de façon constructive avec le BIT.

Le membre gouvernemental du Canada s’est déclaré extrêmement préoccupé par les informations faisant état de violences, de meurtres, d’actes de torture et d’intimidation, qui figurent dans l’observation de la commission d’experts de 2013, ainsi que par les informations faisant état en 2014 d’un usage excessif de la force face aux manifestations de travailleurs au Cambodge, notamment les décès de grévistes travaillant dans le secteur du textile. Les syndicalistes doivent pouvoir exercer leurs activités sans faire l’objet d’intimidations ou courir un risque pour leur intégrité physique ou celle des membres de leur famille, et les travailleurs ont le droit de participer à des manifestations pacifiques pour défendre leurs intérêts professionnels. Le membre gouvernemental a instamment demandé que les manifestations pacifiques puissent se dérouler en toute sécurité et sans crainte d’actes d’intimidation, d’arrestations ou d’un recours excessif à la force de la part des autorités cambodgiennes. Prenant note de l’observation de la commission d’experts selon laquelle une situation d’impunité prévaut, il a également demandé que des enquêtes soient ouvertes à propos des meurtres, des décès et autres formes de violence exercée à l’encontre des dirigeants syndicalistes, que soient présentées devant des juridictions impartiales toutes les informations pertinentes et que les coupables soient punis. L’orateur a demandé au gouvernement cambodgien de déployer sans attendre les efforts nécessaires, en pleine consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, pour assurer l’adoption rapide de la loi sur les syndicats. Enfin, en l’absence de réponse et d’informations de la part du gouvernement, ce dernier est invité à coopérer pleinement avec les mécanismes de contrôle de l’OIT et avec les partenaires sociaux.

Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a souligné que les nombreuses organisations syndicales qui existent au Cambodge ne sont pas traitées sur un pied d’égalité. En ce qui concerne l’enregistrement par le ministère et la reconnaissance par les employeurs, la priorité est donnée aux organisations qui sont contrôlées par le gouvernement, les partis politiques ou les employeurs, alors que les syndicats indépendants n’ont pas pu être enregistrés pendant des mois et même des années et n’ont donc pas été en mesure de fonctionner légalement. Après avoir gelé l’enregistrement des syndicats début 2014, le gouvernement a durci les conditions d’enregistrement, lequel est devenu encore plus difficile. La Commission consultative du travail qui définit les nouvelles politiques du travail ne comprend que des syndicats fidèles au gouvernement. Presque tout le secteur du textile refuse de négocier collectivement avec les syndicats indépendants. En outre, les syndicats indépendants sont confrontés à une discrimination antisyndicale constante. L’orateur s’est également référé aux cas examinés par le Conseil d’arbitrage dans lesquels, en dépit de décisions favorables aux dirigeants syndicaux licenciés, les employeurs ne se sont jamais conformés aux décisions de réintégration. Enfin, il a exprimé sa préoccupation au sujet de l’utilisation régulière du système judiciaire pour intimider les syndicalistes indépendants qui défendent les droits des travailleurs.

Le membre gouvernemental des Pays-Bas a remercié la commission d’experts pour son excellent rapport et a encouragé le gouvernement à appliquer pleinement les conventions de l’OIT, notamment la convention no 87. Se félicitant de l’accord obtenu sur l’établissement de la liste des 25 cas soumis à l’examen de la commission, l’orateur a souligné l’importance de conclusions cohérentes et fondées sur un consensus et invite toutes les parties à mettre à profit les résultats obtenus durant la période précédant le Conseil d’administration de novembre 2014. Insistant de nouveau sur l’attachement de son gouvernement au système de contrôle de l’OIT, dont l’efficacité et la crédibilité sont essentielles à cette Organisation, il compte sur une collaboration constructive pour accomplir de nouveaux progrès, sur une base tripartite, à la prochaine session du Conseil d’administration.

La membre travailleuse de l’Indonésie a cité un rapport de 2013 du BIT sur le programme «Better Factories Cambodia», selon lequel 90 pour cent des usines nouvellement enregistrées et évaluées emploient tous les travailleurs avec un contrat à durée déterminée. Le recours à ces contrats implique souvent que les travailleurs reçoivent des prestations minimales inférieures à celles auxquelles ils ont droit. La décision prise par le secteur du textile d’utiliser des contrats à durée indéterminée au lieu de contrats à durée déterminée a provoqué une grande insécurité de l’emploi pour de nombreux travailleurs, portant ainsi atteinte aux relations professionnelles. L’effet recherché est d’empêcher la formation de nouveaux syndicats et d’affaiblir le pouvoir des syndicats existants. Ce changement n’a rien à voir avec une diminution du nombre de travailleurs à plein temps et réguliers, mais il s’agit plutôt d’une décision prise par le secteur du textile dans son ensemble pour reclasser tout simplement les travailleurs, afin de les intimider et d’entraver les efforts visant à constituer des syndicats indépendants. Ce système viole la législation nationale du travail. Il est pourtant largement autorisé dans la pratique. Les travailleurs ayant des contrats à durée déterminée ont moins de droits que ceux ayant des contrats à durée indéterminée – en termes de congé annuel payé, de droits d’ancienneté et de congé maternité par exemple. Il est également plus facile de les licencier. Le passage à des contrats à durée déterminée nuit à la liberté syndicale et à la négociation collective. Les travailleurs peuvent raisonnablement craindre de ne pas voir leurs contrats renouvelés s’ils n’obéissent pas à leurs employeurs – ou s’ils adhèrent à un syndicat. Malgré un protocole d’accord établi quelques années auparavant entre l’Association des fabricants de vêtements du Cambodge et plusieurs syndicats, qui inclut une obligation d’examiner la question, aucune négociation n’a encore été entreprise.

La membre gouvernementale des Etats-Unis a rappelé que, depuis de nombreuses années, les organes de contrôle de l’OIT ne cessent de demander au gouvernement de mettre un terme à la situation actuelle d’impunité en ce qui concerne les actes de violence commis contre des dirigeants syndicaux, de garantir les droits syndicaux des travailleurs et l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, et d’adopter, après avoir pleinement consulté les partenaires sociaux, une loi sur les syndicats qui garantit pleinement les droits énoncés dans la convention no 87. Or, depuis un an, la situation au Cambodge a empiré et les conditions de travail se sont considérablement détériorées. Les salaires dans le secteur du textile ont continué de baisser, d’où des mouvements sociaux et un manque de retenue de la part du gouvernement dans la façon de traiter ces mouvements sociaux et une dégradation des relations professionnelles dans le pays. L’oratrice a souligné que, malgré la libération la semaine passée de plusieurs syndicalistes, elle reste préoccupée, d’une part, par le fait qu’ils ont été détenus et, d’autre part, par les irrégularités apparemment commises lors de leur procès, les accusations portées contre eux et la menace constante qu’ils soient emprisonnés. Elle a instamment demandé au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les faits commis pendant les manifestations de janvier – agressions, arrestations, voire décès de travailleurs. Elle s’est déclarée préoccupée par l’action manifestement concertée d’employeurs qui ont engagé des poursuites contre les dirigeants de syndicats indépendants et par de possibles ingérences du gouvernement dans les activités syndicales. La liberté syndicale ne peut être véritablement exercée que dans un climat exempt de violences, de pressions et de menaces quelles qu’elles soient. L’oratrice a instamment demandé au gouvernement d’adopter et de mettre en œuvre une loi sur les syndicats qui soit pleinement conforme aux normes internationales et fondée sur un dialogue transparent et véritable avec l’ensemble des partenaires sociaux, ainsi qu’avec l’OIT. Il semble que le gouvernement ne tienne pas compte des recommandations de l’OIT au sujet de son projet de loi sur les syndicats et qu’il ne soit pas sur la bonne voie en ce qui concerne plusieurs dispositions essentielles. L’oratrice a instamment prié le gouvernement de rendre public le projet de loi et d’entamer des consultations avec les partenaires sociaux avant de le présenter au Parlement. Enfin, elle a encouragé le gouvernement à renforcer sa collaboration avec les organes de contrôle de l’OIT et à recourir à l’assistance technique du BIT afin de mettre la législation et la pratique nationales en conformité avec la convention no 87. Cela sera essentiel pour promouvoir la paix sociale et attaquer à la racine les causes des actuels différends du travail au Cambodge.

Le représentant gouvernemental a indiqué que son gouvernement avait pris bonne note de tous les commentaires constructifs formulés au cours de la discussion. Bonne note est également prise de toutes les recommandations du Comité de la liberté syndicale. En étroite collaboration avec toutes les parties prenantes et avec l’assistance technique du Bureau, le gouvernement finalisera le projet de loi sur les syndicats, qui garantira le droit d’organisation et la liberté syndicale conformément aux normes internationales pertinentes. Des informations sur les progrès réalisés à cet égard seront communiquées à la commission d’experts en temps opportun.

Les membres employeurs ont apprécié les commentaires des gouvernements, des travailleurs et des employeurs. Le gouvernement a pris des mesures pour remédier à la situation s’agissant de l’indépendance et de l’efficacité du système judiciaire, notamment par l’adoption, par l’Assemblée nationale, de projets de lois sur: 1) l’organisation des tribunaux; 2) le conseil suprême des magistrats; et 3) le statut des juges et des procureurs. C’est là une première étape importante. Le gouvernement a également institué un Conseil de coordination interministérielle, auquel participent les partenaires sociaux, qui doit connaître des procédures d’envoi des rapports au titre de la convention no 87. Il s’agit de deux points pour lesquels la Commission de la Conférence avait, en 2013, prié le gouvernement de prendre des mesures immédiates. Le gouvernement doit communiquer au Bureau un rapport exhaustif sur ces mesures et sur les progrès réalisés à cet égard. Par ailleurs, des négociations tripartites sont en cours sur un projet de loi sur les syndicats et, quoique des préoccupations se soient exprimées à propos de cette loi, il est important que le processus de consultation tripartite soit mené à son terme avant que la commission d’experts ne se prononce sur la conformité de la législation. Le gouvernement devra remettre un rapport au Bureau lorsque les négociations seront terminées. En outre, le gouvernement doit agir de concert avec les partenaires sociaux afin d’éradiquer la violence et le harcèlement, que les membres employeurs ne manquent pas de condamner. Ils prient à nouveau instamment le gouvernement de solliciter l’assistance technique du BIT afin d’honorer ses obligations de faire rapport, afin que la commission d’experts puisse mieux évaluer les progrès réalisés ou non. Les conclusions de la Commission de la Conférence devraient aussi mentionner les domaines qui sont en progrès et ceux où d’autres progrès ou mesures s’imposent. Les membres employeurs ne reconnaissant pas que le droit de grève figure dans la convention no 87, les conclusions devraient aussi préciser que la commission n’a pas traité du droit de grève dans le cas présent.

Les membres travailleurs ont estimé qu’il était clair, eu égard à la discussion et aux discussions antérieures sur ce cas, que des problèmes très graves restent en suspens. Les syndicats mondiaux et les marques internationales s’efforcent de remédier aux problèmes du travail dans le secteur de la confection. C’est le secteur le plus important, mais il n’est pas le seul à être concerné par la négation de la liberté syndicale et du droit de négociation collective; la plupart des travailleurs cambodgiens travaillant dans d’autres secteurs, tels que ceux des produits agricoles, du sucre et du caoutchouc, sont également affectés. L’OIT doit jouer un bien plus grand rôle au Cambodge afin d’identifier les solutions permettant la viabilité des emplois et de l’économie. Les travailleurs cambodgiens aspirent à un dialogue de bonne foi avec le gouvernement, mais se heurtent à un autoritarisme croissant de sa part. Les membres travailleurs sont très préoccupés par cette situation. Le gouvernement doit impérativement mener des enquêtes indépendantes sur les meurtres et les agressions de manifestants en janvier 2014 et les meurtres de syndicalistes et en poursuivre les auteurs; il doit annuler les condamnations prononcées à l’encontre de 25 personnes le 30 mai 2013; il doit garantir que les travailleurs puissent librement adhérer à un syndicat sans condition préalable; il doit garantir que les travailleurs licenciés en raison de leurs activités syndicales licites soient réintégrés et indemnisés; il doit garantir le droit d’assemblée et la liberté d’expression; il doit modifier la rédaction de l’actuel projet de loi sur les syndicats en consultation avec les syndicats indépendants et à la lumière des observations formulées par les organes de contrôle de l’OIT; et il doit consulter la société civile sur la nouvelle proposition de législation sur le système judiciaire. Le BIT devrait faciliter une discussion sur les contrats à durée déterminée et leur impact au Cambodge sur la liberté syndicale et envoyer une mission tripartite de haut niveau dès que possible, étant donné la gravité des violations et l’absence de progrès accomplis. Les conclusions de la commission devraient figurer dans un paragraphe spécial du rapport de la présente commission.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2013, Publication : 102ème session CIT (2013)

2013-Cambodia-C87-Fr

Un représentant gouvernemental, se référant aux cas de Chea Vichea, Hy Vuthy et Ros Sovannareth (Comité de la liberté syndicale, cas no 2318), a indiqué que le Premier ministre a récemment promulgué une ordonnance (lettre no 397 du 6 mars 2013) instituant un comité de coordination ayant pour mandat exclusif de coordonner les ministères chargés de répondre aux questions se rapportant au cas no 2318. En outre, le Premier ministre a promulgué une autre ordonnance (lettre no 1080 du 6 juin 2013) instituant un comité permanent auquel participeront tous les partenaires sociaux ainsi que 20 ministères différents et qui sera chargé de coordonner l’élaboration de la politique nationale de l’emploi et de répondre à toutes les questions soulevées par l’OIT. Ces deux ordonnances seront traduites et transmises à la commission d’experts en temps voulu. S’agissant des questions liées à la liberté syndicale, le gouvernement respecte les principes sur lesquels se fonde la convention, et la législation du travail cambodgienne donne pleinement effet à ses dispositions. Les organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs peuvent s’organiser et exercer leurs droits en toute liberté. On compte à ce jour 12 chambres syndicales, 76 fédérations syndicales et 2 765 syndicats d’entreprise, principalement dans les secteurs de l’habillement et de la chaussure qui regroupent quelque 460 entreprises. Par ailleurs, les organisations de travailleurs jouent un rôle crucial dans l’élaboration de la législation nationale et participent activement aux discussions sur les questions de travail. Dans les efforts qu’il déploie pour relever une série de défis dans le domaine des relations professionnelles et renforcer le dialogue social, le gouvernement a mis en place un comité tripartite en charge de la surveillance des grèves, un autre comité tripartite ayant compétence sur les contrats de travail, et un troisième chargé des salaires minima. Ces trois comités se composent de représentants des employeurs et des travailleurs librement élus par leurs organisations respectives.

En outre, une nouvelle loi sur les syndicats a été élaborée avec la participation active des partenaires sociaux et l’assistance technique du Bureau. Ce projet de loi est actuellement examiné par le Conseil des juristes du Conseil des ministres. Lorsqu’il disposera de la version finale du projet, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle le transmettra à la commission d’experts. En outre, le ministère de la Justice a été chargé de rédiger la loi sur les tribunaux du travail en consultation avec tous les partenaires sociaux, comme le veut la pratique établie. S’agissant de l’indépendance du système judiciaire et des obligations du gouvernement en matière de présentation de rapports sur les textes de loi récents, comme par exemple la loi anticorruption, un des comités récemment constitués mentionné ci-dessus sera chargé de répondre aux demandes de la commission d’experts, probablement après les élections générales de juillet 2013 et dès qu’il se sera familiarisé avec les procédures de l’OIT, en particulier avec le fonctionnement des organes de contrôle; l’assistance du Bureau ainsi qu’une formation ont été sollicitées à cet égard. Par ailleurs, le gouvernement a nommé à la mission diplomatique du Cambodge à Genève un attaché chargé des questions de travail qui facilitera la communication et le dialogue entre le Bureau et les instances concernées au Cambodge. Le représentant gouvernemental a déclaré que des progrès significatifs ont été réalisés au fil des ans mais que, le marché du travail changeant et les relations professionnelles se diversifiant, une législation et un dialogue social appropriés s’imposent pour continuer à répondre aux besoins des employeurs et des travailleurs.

Les membres travailleurs ont souligné que, déjà dans ses conclusions de 2007 et 2011, cette commission s’est référée aux assassinats de syndicalistes, au harcèlement, aux arrestations et disparitions de dirigeants syndicaux, à la question de l’efficacité et du manque d’indépendance de la justice et au climat d’impunité. Ces mêmes mots sont repris depuis 2003 par la commission d’experts dans les commentaires qu’elle formule au gouvernement. Dans sa dernière observation, elle souligne que les assassinats des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy n’ont toujours pas été élucidés, ce qui pose une nouvelle fois la question du fonctionnement efficace et indépendant de la justice et du climat d’impunité. Bien que le gouvernement ait été prié de prendre des mesures concrètes à cet égard et, en particulier, d’adopter sans délai le projet de loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur le fonctionnement des tribunaux et de les communiquer, à ce jour aucun progrès n’a été réalisé. S’agissant du harcèlement dont sont victimes les membres de l’Association cambodgienne des enseignants indépendants (CITA), celui-ci illustre le problème plus général des syndicats de la fonction publique qui ne sont pas couverts par le projet de loi sur les syndicats et sont considérés comme de simples associations. En outre, au Cambodge comme dans de nombreux pays, le recours aux contrats temporaires et la multiplication des contrats de courte durée porte directement ou indirectement atteinte à la possibilité des travailleurs de s’affilier à un syndicat, or tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, doivent avoir la possibilité de s’affilier au syndicat de leur choix. Les membres travailleurs ont souligné que tous ces problèmes sont encore plus accentués dans le secteur du textile qui constitue un secteur essentiel de l’économie cambodgienne, représentant 80 pour cent des exportations nationales. Bien que la main‑d’œuvre employée soit qualifiée, les rémunérations et les conditions de travail sont mauvaises et les travailleurs sont soumis à d’énormes pressions. Les entreprises qui imposent ces conditions sont des sous-traitants de grandes marques mondialement connues qui ne se soucient pas de ces pratiques. Or il existe un lien évident entre le respect de conditions de travail décentes et l’exercice de la liberté syndicale dans une entreprise. Le climat de violence et de corruption rend la tâche des syndicats difficile et ce sont les travailleurs qui en pâtissent. Un mouvement syndical libre et un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces est indispensable pour permettre aux partenaires sociaux de mener un dialogue efficace en vue de garantir des conditions de travail conformes aux normes de l’OIT. La détention de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une atteinte grave aux libertés publiques en général et aux droits syndicaux en particulier. Les intérêts économiques importants liés au secteur du textile seront d’autant mieux protégés que la liberté syndicale sera garantie.

Les membres employeurs ont noté que ce cas représente un défi pour cette commission car, malgré sept observations formulées par la commission d’experts depuis 2007, une mission de contacts directs en 2008, une double note de bas de page en 2010 et une discussion devant la Conférence en 2011, il n’y a guère eu de progrès. Une loi sur les manifestations pacifiques a été adoptée en 2009, mais elle ne semble pas être en conformité avec les dispositions de la convention. Des problèmes tels que le climat d’impunité, le contexte de violence dirigée contre les responsables syndicaux et le manque d’indépendance du pouvoir judiciaire n’ont pas reçu de solution. Des travailleurs continuent de dénoncer des actes de violence et de harcèlement, il n’existe toujours pas de tribunaux du travail et le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge a recommandé l’adoption de mesures favorisant l’indépendance du pouvoir judiciaire. Il y a lieu de se féliciter de l’indication du gouvernement selon laquelle il a adopté une loi anticorruption et créé une unité de lutte contre la corruption, et le gouvernement devra donc fournir des informations sur la composition et le mandat de cette unité ainsi qu’une copie de la loi, afin de permettre à la commission d’experts d’évaluer ces nouvelles mesures. En outre, les membres employeurs ont prié instamment le gouvernement à communiquer dans son prochain rapport des informations sur les progrès réalisés en vue de la création de tribunaux du travail. Le gouvernement devra également prendre des mesures pour assurer d’urgence l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire et adopter sans délai le projet de loi sur le statut des juges et des procureurs, et le projet de loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux. Les membres employeurs ont exprimé le regret que le gouvernement reste muet à propos des observations relatives à des violations des droits syndicaux, notamment des allégations d’actes graves de violence et de harcèlement à l’encontre de syndicalistes et ils ont prié le gouvernement de faire connaître sa position sur la question. De même, ils ont instamment prié le gouvernement d’intensifier ses efforts, en pleine consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, pour s’assurer que la version finale du projet de loi sur la liberté syndicale et les syndicats soit en pleine conformité avec la convention. Le gouvernement doit aller de l’avant et mettre à profit les mesures qu’il a prises pour réaliser des progrès tant en droit qu’en pratique.

Le membre travailleur du Cambodge a tout d’abord évoqué l’utilisation des contrats de courte durée ou à durée déterminée (FDCs) et déclaré que près de 60 pour cent des employeurs recourent à des sous-traitants et aux contrats de courte durée pour éviter la création de syndicats dans leurs entreprises, sapant de la sorte le droit des travailleurs à la liberté syndicale et à la négociation collective. En outre, les travailleurs sous contrat de courte de durée ont souvent des conditions de travail moins favorables, avec notamment des salaires inférieurs et des prestations sociales limitées. S’agissant de l’assassinat de dirigeants syndicaux, les auteurs des meurtres de Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, en 2004, n’ont toujours pas été identifiés. A l’occasion d’un autre incident, le gouverneur Chhouk Bandith, qui avait tiré sur trois travailleuses grévistes et les avait grièvement blessées en février 2012, n’a pas été poursuivi du fait des réticences des autorités judiciaires à mener une enquête sérieuse. Des mesures efficaces s’imposent donc pour que des enquêtes soient menées au sujet de ces meurtres, que les coupables soient poursuivis en justice avec toute la rigueur de la loi et que justice soit faite. L’orateur s’est également référé aux violences et menaces dirigées contre des dirigeants et militants syndicaux, dans la mesure où il arrive régulièrement que des individus soient engagés pour agresser des dirigeants et des membres de syndicats indépendants. En 2013, des dirigeants de la Coalition syndicale démocratique des travailleurs cambodgiens de l’habillement (CCAWDU) ont été victimes de ce genre d’agression. Par ailleurs, le nombre des dirigeants syndicaux licenciés est passé de 40 en 2010 à 45 en 2011 et 116 en 2012. La question de l’enregistrement des syndicats constitue un autre sujet de préoccupation dans la mesure où tous les syndicats qui veulent s’enregistrer auprès du ministère du Travail doivent d’abord en aviser l’entreprise, tandis que le ministère du Travail tarde souvent à délivrer le certificat d’enregistrement, empêchant ainsi le syndicat de fonctionner normalement. D’autre part, des partis politiques et des employeurs cherchent parfois à créer des syndicats qui ne sauraient être considérés comme indépendants, ce qui constitue une claire violation de l’article 3 de la convention. S’agissant du projet de loi sur les syndicats, des améliorations s’imposent du fait que le projet ne couvre pas les travailleurs du secteur public (fonctionnaires, enseignants, policiers, travailleurs du transport aérien et maritime, juges) ni les travailleurs domestiques. L’orateur a aussi soulevé la question de l’insuffisance de la réglementation en matière de santé et de sécurité, notamment en ce qui concerne la question de la ventilation insuffisante et des conditions de travail dangereuses qui se soldent souvent par des accidents tragiques et des pertes de vies humaines.

La membre employeuse du Cambodge a déclaré que droit à liberté syndicale et droit d’organisation sont des pratiques extrêmement bien suivies au Cambodge, et elle a rejeté comme étant totalement erronée la référence, dans le rapport de la commission d’experts, à un «climat persistant de violence et d’intimidation envers les syndicats». La liberté syndicale est inscrite dans l’article 36 de la Constitution et dans les articles 266 à 278 du chapitre 11 de la loi sur le travail. En outre, la loi sur le travail n’exige pas un nombre minimum de membres pour pouvoir créer un syndicat, ce qui veut dire qu’une entreprise peut avoir plus d’un syndicat, parfois il en existe jusque dix. En référence aux discussions que cette commission a eues en 2011, il y a lieu de noter que, malgré un contexte économique difficile, la situation continue de progresser et le gouvernement agit sur plusieurs fronts prioritaires allant de la révision de la loi sur le travail à l’augmentation du nombre des grèves, en passant par la mise en place de centres d’arbitrage commercial, l’élargissement des programmes de sécurité sociale, la diversification de la stratégie économique, la priorité donnée à la politique de l’emploi et la promotion des activités de la nouvelle unité de lutte contre la corruption. Les syndicats sont non seulement libres mais aussi en nombre croissant au Cambodge où on comptait 2 765 syndicats et 76 fédérations syndicales enregistrés en 2012, soit des progressions de 60 et 90 pour cent, respectivement, par rapport à 2011. S’agissant des statistiques sur les grèves dans le secteur de l’habillement, leur nombre a progressé de 255 pour cent en 2012 par rapport à 2011, tandis que, entre les mois de janvier et mars 2013, le nombre de grèves a progressé de 25 pour cent par rapport à la période correspondante de 2012. Du point de vue d’un employeur, le véritable défi vient de la multiplicité de syndicats et du caractère violent des manifestations, autant de signes d’un contexte de relations professionnelles balbutiant et d’un mouvement syndical jeune qui doit encore arriver à maturité, se consolider et gagner en cohésion. S’agissant de l’obligation du gouvernement de faire rapport, elle s’est félicitée de la constitution d’un nouveau groupe de travail interministériel regroupant les ministères concernés, ce qui facilitera grandement la collecte et la communication des informations en temps voulu. L’assistance du BIT en vue du renforcement des capacités du groupe susmentionné devrait permettre aux institutions représentées au sein de ce groupe de mieux s’acquitter de leurs responsabilités. S’agissant des allégations concernant les FDCs, les questions relatives aux contrats d’emploi ont été sorties de leur contexte dans le but de susciter un débat sur la liberté syndicale. Tant les employeurs que les syndicats conviennent de la nécessité d’examiner l’évolution du contexte économique et la problématique des FDCs sans pour autant donner à la question des proportions exagérées et décrier les conditions dans lesquelles les entreprises investissent au Cambodge. Concernant l’adoption prochaine du projet de loi sur les syndicats, cette législation a été initiée et élaborée dans le cadre d’un véritable processus tripartite et, par conséquent, ne saurait constituer une violation grave de la convention dont il faille délibérer au sein de cette commission. En invoquant le projet de loi sur les syndicats pour suggérer une absence de liberté syndicale au Cambodge, on court le risque de saper cette démarche législative authentiquement tripartite et novatrice. S’agissant des décès de syndicalistes, l’oratrice a reconnu qu’il s’agit d’une question grave et a espéré que l’enquête et la justice suivront normalement leur cours. Consciente de l’importance des enjeux futurs, elle a exprimé l’espoir que le BIT continuera d’apporter son soutien aux partenaires sociaux cambodgiens qui feront tout pour continuer de renforcer les systèmes de relations professionnelles et leurs mécanismes.

Une observatrice représentant l’Internationale de l’éducation (IE) a exprimé son accord avec la commission d’experts qui, dans ses commentaires antérieurs, a considéré que le projet de loi portant réglementation des syndicats n’est conforme ni à la convention no 87 ni à la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Cette commission a conclu en 2011 que le gouvernement devait intensifier ses efforts, en concertation pleine et entière avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, et il est déplorable de constater que la dernière version du projet de loi sur les syndicats n’est pas finalisée. Alors que le projet de loi qui a été communiqué en 2011 répondait à certaines préoccupations soulevées par la commission d’experts dans son observation, il est difficile de savoir quelles modifications ont été apportées depuis lors. L’exclusion persistante de fonctionnaires, dont des enseignants, du champ d’application du projet de loi sur les syndicats demeure une question cruciale. Le gouvernement a de nouveau refusé l’enregistrement de la Confédération cambodgienne des syndicats (CCU) en tant que confédération syndicale au motif que la plupart de ses membres sont des enseignants, ce qui montre que le gouvernement ne respecte pas la convention. Les syndicats du secteur public sont toujours privés de droits syndicaux et leurs activités sont réglementées par la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales, ce qui est aussi problématique. Malgré l’assistance technique du BIT, le gouvernement n’a pas fait preuve de la volonté nécessaire pour faire progresser les choses. Le gouvernement doit réexaminer le projet de loi sur les syndicats, veiller à ce qu’il soit conforme aux normes internationales du travail, notamment en ce qui concerne la protection des fonctionnaires, et l’adopter immédiatement.

Le membre travailleur de l’Indonésie a souligné que l’augmentation significative du recours aux FDCs, notamment dans l’industrie du vêtement, a créé une insécurité importante de l’emploi, a nui aux relations professionnelles, a contribué à faire augmenter le nombre de grèves dans les entreprises depuis 2005 et porté atteinte à la puissance des syndicats en place. Généralement, ces contrats sont d’une durée de moins de trois mois, et les travailleurs craignent que leur contrat ne soit pas renouvelé s’ils participent à des activités syndicales ou deviennent membres d’un syndicat. La stratégie du gouvernement pour être concurrentiel sur les marchés mondiaux, consistant à recourir à des travailleurs sous FDCs et à des types d’emploi extrêmement précaires, ne conduira qu’à fragiliser l’économie et le climat politique. Beaucoup d’industries de l’habillement ne fonctionnent désormais qu’avec des travailleurs sous FDCs à court terme sans cesse renouvelés, en violation de la législation du travail, notamment de l’article 67 de la loi de 1997 sur le travail, qui limite à deux ans la durée des contrats individuels. Dans sa décision, le Conseil d’arbitrage a considéré que cette législation limite les renouvellements de contrat à une période maximum de deux ans, mais les usines de ce secteur ne tiennent pas compte de cette décision. Dans la pratique, le recours généralisé aux FDCs au détriment des contrats à durée indéterminée (UDCs) porte atteinte à la liberté syndicale et la négociation collective. La durée des contrats à court terme n’offre pas de temps suffisant pour former un syndicat, ni de déterminer ni de mettre en place des dirigeants syndicaux, ce qui a de graves répercussions sur l’efficacité de la direction des syndicats et sur leur capacité à réaliser des changements sur le lieu de travail. En outre, la législation du travail impose aux dirigeants syndicaux d’avoir une année d’expérience dans l’entreprise – période qu’il est difficile de cumuler avec des FDCs. La plupart des usines du secteur de l’habillement ont transformé les UDCs en FDCs, au moyen de différentes tactiques, notamment en fermant l’usine pour la rouvrir immédiatement sous un autre nom et en «réembauchant» les travailleurs sous FDCs.

La membre travailleuse de la Suède, s’exprimant au nom des membres travailleurs d’autres syndicats nordiques, a déclaré que la discrimination antisyndicale au Cambodge demeure un problème grave et que les travailleurs qui sont licenciés en raison de leurs activités syndicales disposent rarement de voies de recours efficaces. A ce jour, le Conseil d’arbitrage demeure le seul mécanisme chargé de régler les conflits du travail en l’absence d’un tribunal du travail. Le Conseil examine les différends de manière transparente et objective mais ses décisions ne sont pas contraignantes alors que son existence même est menacée en raison d’un financement insuffisant. Il est courant que des employeurs qui se rendent coupables de discrimination antisyndicale ignorent tout simplement les décisions du Conseil, et cela en toute impunité. Par conséquent, les syndicats cambodgiens et les travailleurs doivent disposer de voies de recours efficaces pour lutter contre la discrimination antisyndicale. Bien que fondées, les décisions du Conseil d’arbitrage ont été systématiquement ignorées, et les travailleurs n’ont d’autre option que de recourir à la justice, avec ses procédures judiciaires longues et coûteuses, ou de descendre dans la rue pour défendre leurs droits.

Le membre travailleur des Philippines a déclaré que la liberté syndicale ne peut réellement s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces, quelles qu’elles soient, contre les membres et les dirigeants syndicaux, ce qui n’est pas le cas au Cambodge. L’orateur a présenté en détail deux affaires qui démontrent les pratiques d’intimidation et de harcèlement et la violence auxquelles les travailleurs sont confrontés au Cambodge. Dans la première affaire, le 20 février 2012, le gouverneur Chhouk Bandith, a tiré sur un groupe de grévistes, les blessant grièvement. Il a été inculpé, en avril 2012, pour «blessures involontaires», malgré les témoignages accablants de plus de deux douzaines de témoins confirmant clairement l’acte intentionnel. L’affaire a été rouverte, mais les victimes – des syndicats et les organisations de défense des droits de l’homme – sont très sceptiques quant à la perspective d’une enquête impartiale. La deuxième affaire concerne deux personnes, Born Samnang et Sok Sam Oeun, qui ont été condamnées en 2005 pour l’assassinat du dirigeant syndical Chea Vichea, alors président du Syndicat libre des travailleurs (FTU). Bien que des préoccupations aient été exprimées face aux irrégularités de procédure et à l’absence de preuves et que la Cour suprême ait demandé de rejuger l’affaire, la Cour d’appel a confirmé la décision initiale. Les autorités cambodgiennes doivent mener une enquête approfondie, indépendante et impartiale sur ces deux cas. Depuis la mort de Chea Vichea, deux autres militants de la FTU ont été assassinés à Phnom Penh, allongeant ainsi la longue liste des attaques injustifiables commises contre les libertés publiques et les droits syndicaux.

Le représentant gouvernemental a remercié les membres employeurs et travailleurs pour leurs commentaires reflétant les efforts déployés par le gouvernement pour mettre en œuvre les dispositions de la législation cambodgienne conformément à la convention. Afin de promouvoir la liberté syndicale, le gouvernement a donné à tous les travailleurs la possibilité de s’organiser et d’exercer leurs droits librement. A ce jour, il existe 12 chambres syndicales, 76 fédérations syndicales et 2 765 syndicats au niveau de l’entreprise au Cambodge. Pour la seule année 2012, 74 conventions collectives ont été enregistrées auprès du ministère du Travail et de la Formation professionnelle. Les syndicats ont joué un rôle crucial dans l’élaboration de la législation nationale et dans diverses discussions sur des questions en matière de travail. Des représentants syndicaux ont été inclus dans une commission mise en place le 6 juin 2013, qui s’est vu confier le mandat de procéder à la coordination et à l’élaboration de la politique de l’emploi du Cambodge et de répondre aux questions soulevées par l’OIT. Le représentant gouvernemental a exprimé des regrets au sujet de certains commentaires qui ne reflètent pas correctement la situation au Cambodge et ne reconnaissent pas les efforts déployés pour poursuivre la mise en œuvre effective des dispositions de la loi cambodgienne du travail, conformément à la convention. Le gouvernement continue de répondre aux besoins des employeurs et des travailleurs et à l’évolution de l’environnement industriel. En dépit des progrès significatifs accomplis pendant des années, le gouvernement est conscient de la nécessité de continuer à élaborer des lois et des réglementations nationales et de renforcer les fondations déjà solides du dialogue social.

Les membres travailleurs ont déclaré qu’afin de remédier aux manquements qui ont été soulignés en matière de liberté syndicale et de protection du droit syndical le gouvernement doit, sans délai: i) adopter, avant la fin de l’année 2013, une loi sur les syndicats conforme à la convention et couvrant tous les travailleurs des secteurs privé et public, quel que soit leur type de contrat (permanent, temporaire, temps partiel ou temps plein), en consultation avec les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs et avec l’assistance technique du BIT si nécessaire; ii) faire en sorte que les responsables d’actes de violence contre les syndicalistes et les travailleurs soient poursuivis et sanctionnés par la justice rapidement et de manière transparente; iii) convoquer un comité tripartite s’engageant à trouver un accord sur les contrats temporaires dans un délai de six mois; et iv) assurer le financement continu du Conseil d’arbitrage et lui octroyer le pouvoir d’adopter des décisions contraignantes.

Les membres employeurs ont exprimé leur souhait de voir les commentaires qu’ils avaient faits à l’ouverture de ce cas sur les lacunes dans l’action du gouvernement reflétés dans les conclusions de cette commission. On peut résumer ce cas à quatre points importants qui appellent une action immédiate de la part du gouvernement: le silence du gouvernement à l’égard de la situation de la liberté syndicale; l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire; l’adoption de la loi anticorruption avec son plan stratégique quinquennal ainsi que la création d’une unité anticorruption; et l’implication des partenaires sociaux. Les membres employeurs ont encouragé le gouvernement à adopter une loi traitant de la question de la liberté d’association des syndicats et à veiller à ce que la violence contre les travailleurs ne soit pas permise. Ils ont exhorté le gouvernement à garantir l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, en mettant notamment l’accent sur les mesures de renforcement des capacités et l’établissement de garanties contre la corruption. A cet égard, les membres employeurs ont également exhorté le gouvernement à adopter sans délai le projet de loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, et à prendre des mesures afin d’assurer leur pleine application. Ils ont demandé au gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés, particulièrement en ce qui concerne les mesures prises pour mettre en place des tribunaux du travail. En outre, ils ont encouragé le gouvernement à fournir des informations sur le mandat de l’institution anticorruption et ses activités, y compris une copie de la loi, du plan stratégique et tout autre document pertinent. Les membres employeurs ont indiqué qu’ils étaient encouragés par certaines des mesures prises, par exemple la consultation des partenaires sociaux par le gouvernement sur le projet de loi sur les syndicats. Toutefois, il est important que le gouvernement continue d’impliquer les partenaires sociaux dans les efforts qu’il déploie pour assurer le respect de la convention en droit et en pratique. Les membres employeurs ont exprimé l’espoir qu’ils seraient en mesure de constater des progrès pour chacun des quatre points susmentionnés.

Conclusions

La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental ainsi que de la discussion qui a suivi.

La commission a noté que les questions graves concernant ce cas portent sur le climat d’impunité qui prévaut dans le pays et sur des procédures judiciaires viciées dans les procès impliquant les auteurs présumés du meurtre de trois dirigeants syndicaux, ainsi que la nécessité d’assurer l’indépendance et l’efficacité du pouvoir judiciaire. D’autres questions concernent un certain nombre de divergences déjà anciennes entre la législation et la pratique, et la convention.

La commission a pris note des informations communiquées par le représentant gouvernemental, indiquant la mise en place d’un Comité de coordination chargé de coordonner les activités de tous les ministères concernés pour traiter les questions relatives au meurtre de dirigeants syndicaux, ainsi que d’un Comité permanent sur la politique de l’emploi chargé aussi de traiter les questions soulevées par l’OIT. Le représentant gouvernemental a fait également état de l’élaboration d’un projet de loi sur les syndicats avec l’assistance technique du BIT, ainsi que de l’intention d’élaborer une loi sur les tribunaux du travail.

La commission a déploré le fait que, malgré le renvoi du cas concernant Chea Vichea devant la Cour pour un nouveau procès, il n’y ait pas eu d’investigations complètes, indépendantes et impartiales concernant ce meurtre, les personnes précédemment inculpées ayant été renvoyées en prison sans qu’aucune nouvelle preuve n’ait été fournie. La commission a également pris note avec préoccupation des allégations de violence, de menaces et d’intimidation continuelles à l’égard de dirigeants et de membres syndicaux. Rappelant que la liberté syndicale des travailleurs et des employeurs ne peut être exercée que dans un climat exempt de violence, de pression ou de menaces de toutes sortes, la commission a instamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à l’impunité concernant les actes de violence à l’encontre de syndicalistes, et a demandé une fois encore l’ouverture d’enquêtes indépendantes afin de veiller à ce que les auteurs et les instigateurs de ces crimes odieux soient traduits en justice.

La commission a pris note des préoccupations exprimées par la commission d’experts à propos du système judiciaire. Elle a rappelé ses précédentes recommandations dans lesquelles elle avait prié instamment le gouvernement d’adopter sans délai la loi proposée sur le statut des juges et des procureurs, ainsi que la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, et d’en assurer l’application complète, et a exprimé l’espoir que le gouvernement serait en mesure de faire état de progrès réalisés à cet égard.

La commission a en outre observé que le processus de réforme législatif est toujours en cours et a demandé une fois encore au gouvernement de redoubler d’efforts, en consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, pour veiller à ce que la loi sur les syndicats soit adoptée avant la fin de l’année 2013 afin de mieux garantir les droits accordés par la convention. Elle a demandé au gouvernement de prendre d’autres mesures pour garantir les droits syndicaux des travailleurs du secteur public et des travailleurs de tout type de contrat. Elle a notamment prié le gouvernement de communiquer à la commission d’experts les textes sur la loi contre la corruption et son plan stratégique, et a exprimé l’espoir que les ressources nécessaires seraient accordées pour leur mise en œuvre efficace. Des ressources adéquates devraient aussi être allouées pour le bon fonctionnement d’une justice indépendante. La commission a aussi demandé au gouvernement de transmettre à la commission d’experts tous les textes de projets de loi dont il est question, de manière à lui permettre de formuler des commentaires sur leur conformité avec la convention, et a exprimé l’espoir qu’elle pourrait constater des progrès concrets à cet égard dans un proche avenir.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2011, Publication : 100ème session CIT (2011)

Un représentant gouvernemental a fait savoir que, au cours de la deuxième phase de mise en oeuvre de la «Stratégie rectangulaire» pour la croissance, l’emploi, l’équité et l’efficacité, son gouvernement a défini le «Développement du secteur privé et l’emploi» comme étant un moteur stratégique de la création d’emplois, de l’amélioration des conditions de travail et de la croissance économique. Le mouvement syndical connaît un développement exponentiel, qui va de pair avec le développement de l’industrie de l’habillement, de l’hôtellerie et du tourisme. Dans le cadre de la stratégie, le gouvernement s’emploie activement à atteindre l’objectif d’efficacité et de protection des droits, tout en veillant à assurer la liberté et la dignité des personnes. La réforme juridique et judiciaire, qui constitue un élément clé de la stratégie, comprend le renforcement de la capacité judiciaire dans le domaine des droits fondamentaux du travail, dont notamment la liberté syndicale et la négociation collective, sans oublier la formation dans le domaine des relations professionnelles. Pour ce qui est de l’enquête sur les trois cas concernant le meurtre d’anciens dirigeants syndicaux, le gouvernement a indiqué qu’il ne dispose pas d’information récente depuis que la Cour suprême a libéré sous caution les deux suspects. Si des éléments nouveaux se présentent, le gouvernement ne manquera pas d’en informer le BIT. Etant donné que les relations professionnelles en sont encore à un stade embryonnaire dans le pays et compte tenu de l’essor de l’industrie de l’habillement, de l’augmentation du nombre des syndicats et aussi des conflits du travail, le gouvernement a créé, avec l’aide du BIT, le Conseil de l’arbitrage qui permet un règlement pacifique des conflits du travail. Grâce à ce conseil, le nombre de grèves a été réduit de moitié ces trois dernières années. Le gouvernement prépare aussi activement un projet de loi syndicale qui devrait garantir aux travailleurs le droit d’organisation et de négociation collective. Le projet de loi encourage aussi la négociation collective dans la meure où il favorise l’harmonisation des règles en vue de la certification du syndicat ayant le statut le plus représentatif et du syndicat minoritaire; la création d’un cadre juridique pour les accords de négociation collective; et la définition des pratiques déloyales de travail par les employeurs et les travailleurs. Il est à espérer que la commission continuera à collaborer avec le gouvernement afin d’améliorer encore les relations professionnelles et l’application de la liberté syndicale par le biais d’un renforcement des capacités institutionnelles.

Les membres travailleurs ont insisté sur le fait qu’il règne un climat général de répression des activités syndicales au Cambodge. Ce climat implique du harcèlement antisyndical, de l’intimidation et des licenciements de syndicalistes, ainsi que des mesures discriminatoires à l’encontre des syndicats libres. Le rapport de la commission d’experts fait également état de violences policières, d’agressions et d’assassinats de syndicalistes. Le rapport mentionne le nom des syndicalistes assassinés pour lesquels les coupables n’ont jamais été punis. La commission d’experts avait demandé des informations précises au gouvernement, qui n’ont pas été transmises à ce jour. D’une façon générale, des mesures doivent être prises pour assurer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire. Ce point est d’ailleurs repris non seulement par la commission d’experts, mais également par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge. Par ailleurs, le gouvernement a annoncé le vote prochain d’une loi sur les tribunaux du travail et d’une loi sur les syndicats. Cette dernière a d’ailleurs été transmise au BIT et le gouvernement a bénéficié de l’assistance technique du Bureau. S’agissant des tribunaux du travail, le Cambodge dispose d’une instance prévue par la législation du travail appelée Conseil d’arbitrage. Les membres travailleurs, bien qu’ils ne nient pas l’utilité d’une telle instance, constatent néanmoins qu’elle ne peut remplacer une vraie instance de jugement. D’ailleurs, ils ont constaté que les employeurs, particulièrement dans les cas de discrimination antisyndicale, décident souvent de ne pas appliquer les sentences arbitrales. S’agissant de la loi sur les syndicats, cette dernière doit impérativement être discutée avec l’ensemble des partenaires sociaux. Mais, selon les informations que détiennent les membres travailleurs, cette concertation ne se fait qu’entre le gouvernement et les employeurs du secteur privé, les travailleurs n’ayant qu’un statut d’observateur. Il semble en outre que cette loi présente plusieurs problèmes de conformité avec la convention, d’où la nécessité de se concerter avec les organisations syndicales avant de poursuivre avec ce projet de loi.

Les membres employeurs ont fait part de leur déception concernant la déclaration du gouvernement, qui a témoigné du fait qu’aucune action significative n’a été prise et qu’aucune nouvelle information n’a été fournie. La même discussion aurait pu avoir lieu l’année dernière. C’est la cinquième fois que ce cas sérieux, qui concerne des violations des libertés civiles, des assassinats de syndicalistes, des menaces de mort, un climat d’impunité, de la répression et l’absence de loi sur les syndicats, est discuté. Ce cas a fait l’objet d’une double note de bas de page l’année dernière. Suite aux observations de la commission d’experts en 2007 et 2008 et de la mission de contacts directs en 2008, la loi sur les manifestations pacifiques a été adoptée en 2009, mais cette loi viole la convention et doit donc être amendée. Les membres employeurs ont regretté que peu de progrès aient été accomplis dans le domaine de la liberté syndicale et du droit d’organisation. La Confédération syndicale internationale (CSI) a fait état d’actes de violence et de harcèlement à l’encontre de syndicalistes. Le Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC) rencontre toujours des difficultés à être reconnu par le gouvernement comme un interlocuteur valable. Les enquêtes sur les assassinats de syndicalistes sont insuffisantes. Un tribunal du travail fonctionnel n’a toujours pas été mis sur pied. Le Rapporteur spécial des NU sur la situation des droits de l’homme au Cambodge a recommandé que des mesures soient prises pour accroître l’indépendance et l’efficacité de l’appareil judiciaire. En bref, ce cas fait du «sur place», et aucun progrès sérieux ne peut être réellement discuté. Ils ont conclu en insistant sur le fait que l’assistance technique du Bureau doit être fournie au gouvernement.

La membre employeuse du Cambodge a estimé que les progrès réalisés depuis la ratification de la convention en 1999 ont été remarquables à bien des égards. Selon le registre du ministère du Travail et de la formation professionnelle, 1 725 syndicats, 41 fédérations de syndicats, sept confédérations de syndicats couvrant tous les secteurs et l’Alliance du Syndicat national du Cambodge ont été enregistrés en 2010; 80 à 90 pour cent des syndicats appartiennent à l’industrie du vêtement, ce qui signifie qu’il existe près de 1 380 à 1 553 syndicats dans ce secteur industriel avec environ 300 usines. Ceci prouve que les travailleurs sont libres de s’organiser. En outre, le Code du travail autorise la constitution de plusieurs syndicats au sein de la même entreprise. Beaucoup de travailleurs appartiennent à plusieurs syndicats dans la même entreprise. Les employeurs sont donc confrontés à des problèmes pratiques avec ces syndicats, y compris le problème du double comptage des membres, de la concurrence et de la lutte entre les syndicats. Les employeurs ont dû négocier avec plusieurs de ces syndicats à la fois. Il a été largement reconnu par tous les partenaires sociaux que le mouvement syndical est désorganisé et fragmenté. Elle a indiqué que les employeurs ont cherché à coopérer avec le syndicat le plus représentatif et ont encouragé l’amélioration des structures et la représentativité des syndicats afin d’assurer un dialogue constructif et concret. Elle a espéré que cela deviendrait une réalité avec l’adoption du projet de loi sur les syndicats. L’article 36, paragraphes 5 et 6, de la Constitution garantit au citoyen le droit de constituer et de s’affilier à des syndicats, et les articles 266 à 278 du Code du travail garantissent la liberté syndicale. Elle a ensuite mis en exergue certains mécanismes tripartites dans le pays. Elle s’est référée aux huit groupes de travail tripartites publics et privés qui n’avaient pas été mentionnés auparavant par l’organe de contrôle. Le huitième groupe de travail a examiné des questions relatives au travail et aux affaires sociales, et le projet de loi sur les syndicats a été préparé. L’oratrice a également mentionné que les partenaires sociaux étaient représentés dans les structures de direction des programmes Better Work («Travailler mieux») du BIT, du Conseil arbitral du travail, du Fonds national de sécurité sociale et du Programme d’emploi des jeunes. Elle a rappelé que le principe de la liberté syndicale est respecté au Cambodge. Elle a exprimé sa tristesse à propos de l’assassinat des dirigeants syndicaux.

La membre travailleuse de l’Indonésie a déploré les actes de discrimination antisyndicale au Cambodge. En 2010, comme conséquence directe des activités syndicales, plus de 1 000 travailleurs ont été licenciés, 35 travailleurs blessés et 11 arrêtés. Des travailleurs ont été menacés par les employeurs ou ont été mis sur la liste noire en raison de leurs activités syndicales. En septembre 2010, 817 travailleurs ont été suspendus ou révoqués, dix travailleurs arrêtés et 28 travailleurs blessés pour avoir participé à une grève nationale dans laquelle des centaines de milliers de travailleurs ont demandé une augmentation du salaire minimum. Paho Sak, le président du FTUWKC a également été violemment attaqué. L’oratrice s’est dite préoccupée par l’arrestation et la détention de Sous Chanta, un dirigeant syndical de l’usine de vêtements «United Apparel Garment Factory» dans la mesure où cette arrestation semble être fabriquée de toutes pièces pour le punir à cause de ses activités syndicales. Ce ne sont là que des exemples de violence antisyndicale et d’intimidation, qui ont eu lieu depuis le dernier examen de ce cas par la commission. Afin d’empêcher les travailleurs d’exercer leur droit de s’organiser, les employeurs ont recours à de nombreuses tactiques, y compris l’utilisation croissante de contrats de courte durée, la sous-traitance, l’externalisation et les syndicats «jaunes». L’oratrice a appelé le gouvernement à veiller à ce que les travailleurs puissent s’associer librement, que les droits des travailleurs soient respectés et les auteurs de violences antisyndicales soient poursuivis.

La membre travailleuse de la Finlande s’est dite vivement préoccupée que le gouvernement n’ait toujours pas pris de mesures pour rendre sa législation et sa pratique conformes à la convention. Malgré les demandes formulées à plusieurs reprises par les organes de contrôle de l’OIT et après sept années, le gouvernement n’a toujours pas innocenté les personnes accusées à tort d’avoir assassiné les responsables syndicaux et n’a pas assuré d’enquêtes indépendantes pour que les véritables auteurs soient traînés en justice. Le climat d’impunité demeure, et les personnes à l’origine de violences visant les syndicalistes n’ont pas grand-chose à craindre des autorités. Les employeurs contestent souvent les décisions du Conseil d’arbitrage devant les tribunaux, ou les ignorent purement et simplement. Les travailleurs qui cherchent à renforcer leurs droits sont contraints d’intenter une action auprès des tribunaux civils ou pénaux, ce qui est long et coûteux. Le système judiciaire du pays est corrompu, manque de moyens et n’est pas impartial. Il est essentiel que le gouvernement prenne des mesures en la matière et, en conséquence, il est instamment prié d’adopter son projet de loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, et de les appliquer pleinement. Soulignant la gravité du cas, l’oratrice a déploré le manque d’engagement du gouvernement et a instamment prié ce dernier de prendre des mesures concrètes pour garantir une véritable liberté syndicale aux travailleurs cambodgiens.

Une observatrice représentant l’Internationale de l’éducation a déclaré qu’il n’existe pas de syndicat d’enseignants au Cambodge car aucun fonctionnaire ne bénéficie de la liberté syndicale dans ce pays. La loi du travail de 1997 ne les autorise pas à former un syndicat et à avoir accès aux mécanismes de convention collective. En effet, les fonctionnaires sont régis par la loi de 1994 qui prévoit que tous les aspects régissant les relations professionnelles des fonctionnaires sont légiférés sans être négociés. A cet égard, le Comité de la liberté syndicale a souligné l’incompatibilité du Statut commun des fonctionnaires publics avec la convention no 87 et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Malgré les recommandations du Comité de la liberté syndicale formulées en 2004, aucun amendement n’a été adopté. L’oratrice a indiqué que la l’Association indépendante des enseignants (CITA) et ses membres font l’objet de discrimination et de harcèlement. En effet, en 2009 la CITA a soumis une nouvelle plainte portant sur des manoeuvres d’intimidation exercées par les autorités et les forces de police. Des hauts fonctionnaires du gouvernement se sont servis de leur position pour faire pression sur des enseignants afin de les dissuader d’adhérer à la CITA ou de les pousser à quitter l’association. Etant nommés par le gouvernement, les directeurs d’établissements et les autorités éducatives sont effectivement obligés de faire allégeance au pouvoir. En 2010, la CITA a soumis au ministère 34 cas individuels d’enseignants discriminés en raison de leur engagement syndical. Les cas portent sur des représailles en matière de promotion, de réduction salariale, de transfert ou de licenciements; seulement 14 cas ont été résolus. L’oratrice a conclu que, malgré les demandes réitérées au gouvernement cambodgien visant à amender le Statut commun des fonctionnaires publics permettant de garantir pleinement le droit syndical et le droit à la négociation collective des fonctionnaires publics, les travailleurs craignent que les amendements législatifs en cours aillent dans la mauvaise direction, comme l’ont souligné les autres intervenants travailleurs.

Le membre travailleur des Etats-Unis a indiqué que, bien que le gouvernement se soit engagé dans des consultations avec les syndicats en ce qui concerne l’adoption d’une nouvelle loi sur les syndicats, il est lui-même très préoccupé quant à la qualité de ces consultations et aux résultats qui en découleront. L’actuel projet de loi prend peu en compte les recommandations des syndicats mais, au contraire, reflète très largement les priorités des employeurs du secteur de l’habillement. Ce projet de loi doit être substantiellement modifié avant son adoption, sinon il ne fera que perpétuer les dysfonctionnements actuels. Entre autres, ce projet de loi reproduit l’exclusion des fonctionnaires, de la police, des travailleurs du secteur maritime et aérien, des juges et des travailleurs domestiques, qui apparaît dans la loi actuelle; il impose des conditions d’éligibilité concernant les dirigeants syndicaux, qui sont incompatibles avec les principes de la liberté syndicale; il permet aux autorités administratives de suspendre ou d’annuler l’enregistrement d’un syndicat; enfin, il octroie des droits exclusifs de négociation à un syndicat qui représente peut-être nettement moins que la majorité des travailleurs sur le lieu de travail. L’orateur a donc prié instamment le gouvernement de tenir compte des points de vue exprimés par les syndicats sur toutes ces questions.

Le représentant gouvernemental a apporté des clarifications sur les cas d’anciens dirigeants syndicaux, en précisant qu’ils étaient toujours en instance puisque toutes les informations nécessaires étaient en cours d’être compilées. Il a assuré que justice serait faite rapidement. Il a réitéré la volonté du gouvernement de mieux protéger la liberté syndicale et la négociation collective et s’est engagé à ce que la situation s’améliore avec l’entrée en vigueur du projet de loi. De fausses informations ont été utilisées par la CSI puisque les listes noires alléguées n’existent pas. Enfin, le gouvernement prendra en compte les commentaires et recommandations formulés pendant la discussion du cas.

Les membres employeurs ont estimé qu’il y avait un sérieux problème au sein de cette commission quant à savoir où l’on en était réellement avec ce cas, ce qui était d’ailleurs confirmé par les nettes divergences entre les propos du gouvernement et ceux de la membre employeuse du Cambodge. Le BIT doit aider le gouvernement à fournir à la commission d’experts un rapport détaillé de la situation en droit et en pratique, rapport qui doit également inclure une copie du projet de loi. Ceci permettra à la commission d’experts d’avoir une vision plus claire concernant la situation juridique, notamment en ce qui concerne la liberté syndicale et la négociation collective, et lui permettra également de formuler des commentaires sur le projet de loi. Les membres employeurs ont insisté sur le fait qu’il fallait aller de l’avant avec ce cas. Pour ce faire, le gouvernement doit faire un travail sur le terrain, en coopération avec le BIT, afin de permettre à la Commission de la Conférence d’engager un dialogue réel avec le gouvernement l’année prochaine.

Les membres travailleurs ont souligné qu’ils ne pouvaient pas comprendre pourquoi le gouvernement n’était pas ou très peu intervenu pour remédier aux situations de violations graves de la liberté syndicale au Cambodge. Le gouvernement doit prendre, dans les plus brefs délais, toutes les mesures nécessaires pour mettre fin aux violations des droits des travailleurs qui s’engagent dans une organisation syndicale. S’agissant du pouvoir judiciaire, ils ont constaté que le gouvernement a encore beaucoup à faire, notamment en ce qui concerne les changements législatifs garantissant l’indépendance du pouvoir judiciaire. En effet, le projet de loi en matière de liberté syndicale n’est pas conforme à la convention. Toute modification de la législation cambodgienne devrait se faire en concertation avec les organisations syndicales. Les membres travailleurs ont conclu en proposant au gouvernement de faire appel à l’assistance technique du BIT.

Conclusions

La commission a pris note de la déclaration faite par le représentant gouvernemental, ainsi que la discussion qui a suivi. Elle a rappelé que la commission d’experts a évoqué le climat d’impunité dans le pays, dans le contexte de l’assassinat de trois dirigeants syndicaux, des préoccupations concernant l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, ainsi que certaines divergences entre la législation et la pratique, d’une part, et la convention, d’autre part.

La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental concernant le développement du mouvement syndical et l’évolution de la liberté syndicale dans le pays. Il a fait référence à la «Stratégie rectangulaire» adoptée par le gouvernement pour assurer la croissance, l’emploi, l’équité et l’efficacité. Cela comprend des plans de réformes légales et judiciaires et la formation de la magistrature sur les droits fondamentaux que sont le droit syndical et le droit de négociation collective. Le gouvernement a accueilli favorablement l’assistance technique du Bureau à cet égard ainsi qu’en ce qui concerne la préparation d’un projet de loi sur les syndicats visant à garantir le droit syndical et à promouvoir la négociation collective.

La commission a déploré le fait que des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales n’aient toujours pas été menées sur les assassinats des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy. Elle a également noté avec préoccupation les allégations de menaces et d’intimidation subies par des dirigeants et affiliés syndicaux. Rappelant que le droit des travailleurs et des employeurs en matière de liberté syndicale ne peut être exercé que dans un climat exempt de toute forme de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes, elle a prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à l’impunité en ce qui concerne les actes de violence contre des syndicalistes et de s’assurer que les auteurs et les instigateurs de ces crimes odieux soient traduits en justice.

La commission a noté les préoccupations exprimées au sujet du système judiciaire par la commission d’experts et dans le rapport de 2010 du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge. Elle a prié instamment le gouvernement d’adopter sans délai le projet de loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux et d’assurer leur pleine application. Elle a prié le gouvernement de fournir des informations sur les progrès accomplis à cet égard ainsi qu’en ce qui concerne la création de tribunaux du travail.

La commission a observé qu’une réforme législative était en cours et a considéré que le gouvernement devrait intensifier ses efforts, en pleine consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, afin d’assurer que le projet de loi final soit en totale conformité avec la convention. En particulier, la commission a voulu croire que la nouvelle loi garantira pleinement les droits prévus par la convention aux fonctionnaires, enseignants, travailleurs du secteur des transports aériens et maritimes, juges et travailleurs domestiques. Elle a prié le gouvernement de transmettre les projets de loi à la commission d’experts afin qu’elle soit en mesure de se prononcer quant à leur conformité avec la convention.

La commission a prié le gouvernement de fournir à la commission d’experts, en vue de sa réunion de cette année, un rapport complet sur toutes les mesures prises en la matière et contenant des données par secteur d’activité sur le nombre de syndicats et d’affiliations, le nombre de conventions collectives et leur couverture. Elle a exprimé le ferme espoir d’être en mesure de constater des progrès importants sur toutes ces questions lors de sa prochaine session.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2010, Publication : 99ème session CIT (2010)

Pas disponible en espagnol.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2007, Publication : 96ème session CIT (2007)

Un représentant gouvernemental a déclaré que la liberté syndicale est garantie par les articles 266 à 278 du chapitre 11 de la loi cambodgienne sur le travail, eux-mêmes conformes aux dispositions de la convention no 87. En 2007, il y a 1 075 syndicats dans le pays, librement créés et enregistrés conformément à la législation nationale. Les membres de ces syndicats exercent librement leurs droits, et ils n'ont jamais été victimes de menaces ou de harcèlement. Les rapports des projets du BIT Better Factories et Résolution des conflits du travail indiquent que, en ce qui concerne la liberté syndicale, la situation s'est considérablement améliorée dans le secteur textile; cela a permis de résoudre de nombreux conflits du travail dans les délais appropriés et à la satisfaction des parties concernées.

L'orateur a indiqué que, le 6 avril 2007, la Cour d'appel avait tenu une audience sur le meurtre de Chea Vichea, l'ancien président du Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC), et que le 12 avril 2007 elle avait rendu un verdict confirmant le jugement d'instance d'août 2005, à savoir la condamnation à vingt ans de réclusion des accusés Born Samnag et Sok Sam Oeun. L'affaire a suivi la voie judiciaire normale et est donc sortie du domaine de compétence du gouvernement. S'agissant de l'affaire Ros Sovannareth, elle fait actuellement l'objet d'une enquête des autorités compétentes.

L'orateur a réaffirmé que le gouvernement a mis l'accent sur une gestion efficace et efficiente des fonctionnaires relevant du ministère de l'Intérieur et du ministère de l'Education, en particulier en ce qui concerne les aspects financier et technique, et il a déclaré que les associations des travailleurs de la fonction publique relèvent de la loi sur le travail. Ces informations prouvent la volonté du gouvernement de veiller au respect des principes de la convention no 87.

Les membres employeurs ont regretté que le gouvernement n'ait pas fourni de rapport sur l'application de la convention no 87, bien que la commission d'experts lui demande de fournir ces informations depuis 2003. Le fait de ne pas fournir ce rapport donne l'impression qu'aucun effort n'est fait pour mettre en œuvre les dispositions de la convention. Cela revient à ne pas appliquer la convention dans le droit et dans la pratique: les juges et les fonctionnaires doivent pouvoir créer des organisations chargées de défendre leurs intérêts et en devenir membres. La commission d'experts demande un amendement à la disposition du Code du travail selon laquelle quiconque a été inculpé pour un délit ne peut être élu à un poste de responsabilité dans une association professionnelle. Les employeurs ont également fait remarquer qu'il n'est pas clairement indiqué quels sont les fonctionnaires définis comme des "fonctionnaires ayant des tâches législatives" et qui ne peuvent pas constituer des organisations, et quelles sont les conditions dans lesquelles la création d'une organisation de travailleurs ou d'employeurs peut être refusée. De plus, il existe des limitations au droit des associations d'organisations professionnelles de s'affilier à des organisations internationales.

Les membres employeurs ont pris note des problèmes relatifs à l'application de la convention dans la pratique et ont affirmé que les droits des organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de tout type de menaces à l'encontre des dirigeants syndicaux et des membres de ces organisations. Les exemples de violations qui ont été fournis ne se rapportent pas seulement à la convention, mais également à la Constitution du Cambodge, qui garantit expressément la liberté syndicale. Les membres employeurs ont conclu en priant instamment le gouvernement de fournir des informations complètes sur la mise en œuvre de la convention, tel que demandé par la commission d'experts depuis plusieurs années.

Les membres travailleurs ont regretté que le gouvernement n'ait pas envoyé de rapport et ont jugé la déclaration du représentant gouvernemental décevante. Il est essentiel qu'à l'heure où ce pays connaît un fort développement économique, en particulier grâce à l'expansion du secteur du textile, tous les travailleurs, y compris ceux de ce secteur, puissent jouir de la liberté syndicale. Or ce n'est pas le cas. En effet, la loi sur le travail ne s'applique ni aux fonctionnaires publics ni aux travailleurs domestiques. L'Association indépendante des enseignants du Cambodge (CITA) n'a pas été reconnue comme organisation syndicale. Elle ne peut pas négocier de conventions collectives au nom des enseignants et fait l'objet de harcèlement, d'intimidation et d'une surveillance de la part des autorités locales et policières. Ce manque de protection existe également dans le secteur informel.

Lorsqu'ils peuvent s'organiser, les travailleurs sont confrontés à un climat d'intimidation et de violence. Ainsi, il y a trois ans, le président et un autre membre du FTUWKC ont été assassinés. Deux innocents ont été condamnés pour ce crime alors que le témoin de ce meurtre, retrouvé par la Confédération syndicale internationale, a peur de témoigner. Cette année, un autre syndicaliste a été assassiné. Les preuves ne manquent pas des actes de harcèlement et de répression systématiquement exercés par la police contre les actions collectives menées par les syndicats et notamment le FTUWKC. Il incombe pourtant au gouvernement d'assurer un climat exempt de violence, menaces ou pressions afin que les organisations d'employeurs et de travailleurs puissent exercer leurs droits.

Par ailleurs, il n'existe pas de système de règlement des conflits puisque les tribunaux prévus par la loi sur le travail pour régler les litiges entre les travailleurs et les employeurs n'ont toujours pas été établis. Les travailleurs qui réclament ou protestent se retrouvent pourtant devant les juridictions civiles pour dommages causés aux entreprises. Dans la plupart des cas, les plaintes sont retirées quand le travailleur démissionne ou accepte d'arrêter son action. L'intimidation et la corruption remplacent les procédures légales de règlement des conflits.

Il ressort de tout ceci qu'un long chemin doit encore être parcouru pour mettre fin au climat d'impunité et assurer les conditions essentielles propices à l'exercice de la liberté syndicale.

Le membre travailleur de la France a insisté sur la gravité des commentaires de la CSI et a tenu à fournir les informations complémentaires suivantes. En novembre 2004, après avoir rencontré M. Rong Chlun, président de la CITA, l'organisation syndicale à laquelle appartient l'orateur a fait part à Sa Majesté le Roi du Cambodge de ses inquiétudes face aux pressions et menaces exercées à l'encontre des dirigeants et adhérents syndicaux en raison de leurs activités syndicales. Deux autres militants syndicaux (Chea Vichea et Ros Sovannareth) avaient été assassinés la même année. Des faits précis mettaient en cause la violence des interventions policières contre les travailleurs en grève: utilisation de canons à eau, agressions, etc. Ces faits doivent être rapprochés de l'imposition d'un service minimum dans toutes les entreprises citées dans la demande directe de la commission d'experts, mesure qui restreint encore davantage le droit de grève. Ces inquiétudes se sont avérées fondées puisque, en octobre 2005, Rong Chlun et un autre syndicaliste étaient arrêtés pour avoir critiqué la politique du gouvernement. Chea Mony, président du Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge faisait l'objet d'un mandat d'arrêt. Il a par la suite pu témoigner de la situation tendue pour les travailleurs exerçant leurs droits syndicaux, notamment dans le secteur du textile et de l'habillement, secteur qui subit de plein fouet les effets de la libéralisation des échanges commerciaux. Cette situation tendue s'est traduite par l'assassinat du responsable syndical de l'entreprise d'habillement Suntex, Hy Vuthy. L'impunité des auteurs de ces crimes constitue un autre élément de pression à l'encontre des syndicalistes et des travailleurs. L'ensemble de la communauté internationale s'est mobilisé pour demander la réouverture du procès qui a vu la condamnation de deux innocents pour l'assassinat des membres du Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC).

Pour conclure, il est déplorable de constater que, malgré la gravité de la situation de la liberté syndicale au Cambodge, le gouvernement n'ait pas communiqué les rapports dus pour les conventions nos 87 et 98.

Le membre travailleur du Royaume-Uni a affirmé que, bien que l'on dise que la liberté d'association existe au Cambodge, son exercice est, en réalité, extrêmement restreint. Si les travailleurs ont la possibilité de former des syndicats - il existe effectivement de multiples syndicats - de graves problèmes se posent lorsque les syndicats tentent de négocier collectivement. Les travailleurs sont également victimes d'une répression qui prend la forme de licenciements, d'intimidations, d'actes de violence et même de meurtres.

Les travailleurs qui tentent de s'engager dans des négociations collectives sont systématiquement licenciés. De plus, les licenciements sont faciles car le système de la sous-traitance est très répandu au Cambodge: 60 à 70 pour cent des travailleurs sont employés sur la base de contrats de courte durée, ce qui rend impossible l'exercice d'une véritable liberté syndicale. L'orateur a cité, à titre d'exemple, le cas du syndicat River Rich, dont 30 membres ont été licenciés en décembre 2006 après y avoir adhéré et avoir essayé de négocier une convention collective. Comme ils étaient au bénéfice de contrats de courte durée et avaient reçu une indemnité de licenciement, le conseil d'arbitrage a refusé leur réintégration. Les travailleurs de l'usine ont très vivement protesté après ces licenciements injustes; la compagnie, pour sa part, n'a pas honoré la promesse faite en février 2007, a refusé de réintégrer les syndicalistes dans leurs postes, a versé des pots-de-vin à 20 travailleurs licenciés afin qu'ils retirent leurs plaintes, et a poursuivi une campagne antisyndicale incluant des menaces contre le syndicat.

La police a également été impliquée dans la campagne antisyndicale de la compagnie, en utilisant des gaz lacrymogènes pour disperser les participants à une conférence de presse organisée par la Coalition syndicale démocratique des travailleurs de l'industrie de l'habillement (CAWDU), fédération syndicale à laquelle appartient le syndicat River Rich, et en tentant d'arrêter le secrétaire général de cette organisation et d'autres syndicalistes. Trois syndicalistes, Phin Sophea, Check Bunsan et Pom Chimma, font à présent l'objet de poursuites pénales pour avoir pris part à cette protestation légitime.

La répression des syndicalistes a pris de nombreuses formes, y compris l'inscription sur des listes noires et l'engagement de poursuites pénales contre les intéressés. En ce qui concerne le syndicat de la société Fortune Garments, l'orateur a déclaré que celle-ci avait poursuivi le dirigeant syndical pour incitation à la grève, et qu'elle avait fait de même en ce qui concerne le comité exécutif du syndicat, exigeant que celui-ci paye une amende de 50 000 dollars des Etats-Unis - soit l'équivalent de plus de neuf ans de salaire par membre du comité. La répression des dirigeants syndicaux peut aussi avoir une issue mortelle, comme le montrent les assassinats de Hy Vuthy, Chea Vichea et Ros Sovannareth.

Le pouvoir du conseil d'arbitrage est très fortement limité et le fonctionnement du ministère du Travail est très insuffisant. Malgré les efforts déployés par certains acheteurs internationaux et par le projet Better Factories du BIT, les actes de violence se poursuivent, illustrant la faiblesse de la règle de droit et le climat général de violence et d'intimidation, qui vise plus particulièrement le FTUWKC, reconnu comme le syndicat indépendant le plus représentatif du secteur textile dans un rapport du projet conjoint Banque mondiale/BIT "Better Factories".

L'orateur a conclu en soulignant la nécessité d'une enquête objective, menée par une mission d'experts du BIT, et il a recommandé instamment au gouvernement de prendre d'urgence des mesures pour que les travailleurs puissent exercer pleinement leurs droits sans crainte de licenciement, d'inscription sur une liste noire, d'actes de violence ou encore de meurtre.

Le représentant gouvernemental a remercié les membres employeurs et travailleurs pour leurs contributions au débat. Il a toutefois estimé que certains des commentaires formulés ne sont pas fondés dans les faits.

Les membres travailleurs ont souligné que les travailleurs cambodgiens ne jouissent ni en droit ni en pratique de la liberté syndicale. Le gouvernement doit prendre des mesures pour que la loi sur le travail s'applique au personnel du secteur public et aux travailleurs domestiques; reconnaître la CITA et les autres organisations indépendantes; reconnaître et respecter le droit de grève; mettre en place les tribunaux du travail; et surtout mettre fin au climat d'intimidation et d'impunité. A cette fin, les membres travailleurs ont demandé une mission de contacts directs.

Les membres employeurs ont appuyé les membres travailleurs pour demander au gouvernement de mettre en œuvre, dans la législation et dans la pratique, les exigences de la convention. La liberté syndicale constitue la base du dialogue social. Les membres employeurs ont demandé au gouvernement de dresser un tableau complet de la situation de la liberté syndicale au Cambodge dans son prochain rapport. Enfin, ils ont appuyé la demande des membres travailleurs pour qu'une mission de contacts directs de l'OIT soit envoyée au Cambodge.

La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental ainsi que de la discussion qui l'a suivie. Elle a rappelé que la commission d'experts s'était référée à des allégations de la Confédération syndicale internationale concernant: le harcèlement permanent qui vise l'Association cambodgienne des enseignants indépendants (CITA); la non-reconnaissance de la Fédération cambodgienne des syndicats de la construction (CCTUF); les arrestations et les disparitions de dirigeants syndicaux; la répression violente des travailleurs par la police et l'armée; et la condamnation de deux innocents pour le meurtre d'un dirigeant syndical. La Confédération syndicale internationale (CSI) s'était également référée à plusieurs dispositions de la législation du travail contraires à la convention.

La commission a déploré le fait que le gouvernement n'ait pas fourni de rapports complets à la commission d'experts. Elle a fait part de sa profonde préoccupation quant aux déclarations faites au sujet de l'assassinat des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, des menaces de mort proférées et du climat d'impunité qui semble se faire jour dans le pays. Comme la commission d'experts, elle a rappelé que les droits des organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de toute violence, pressions ou menaces de quelque type que ce soit contre les dirigeants et les membres de ces organisations. Pour que tel soit le cas, la commission a demandé instamment au gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour que ce principe essentiel soit respecté et qu'il soit mis fin à l'impunité. Elle a exhorté le gouvernement de prendre immédiatement à cette fin des mesures permettant de garantir l'ouverture d'enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux cambodgiens susmentionnés afin de traîner en justice non seulement les auteurs de ces crimes dictés par la haine, mais aussi leurs instigateurs. La commission a recommandé instamment au gouvernement d'accepter une mission de contacts directs du BIT sur ces graves questions. Elle a espéré pouvoir constater dans un proche avenir que d'importants progrès ont été accomplis pour mettre le droit et la pratique en conformité avec la convention, et elle a demandé au gouvernement de soumettre un rapport détaillé à la commission d'experts, pour examen en 2007.

Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 27 septembre 2023, concernant: de nombreux obstacles à l’enregistrement des syndicats; la violence à l’encontre des syndicalistes et l’impunité des auteurs; la qualification erronée des conflits collectifs du travail et le refus d’accorder des recours judiciaires; et les lacunes qui subsistent dans la législation cambodgienne et qui sont incompatibles avec la convention. En outre, la CSI allègue des cas spécifiques de graves pratiques antisyndicales, de violence policière et d’arrestation et d’emprisonnement de dirigeants syndicaux. La CSI fait également référence à des incidents graves de violations signalées aux libertés civiles fondamentales des syndicalistes, y compris la répression de leur liberté d’expression, accompagnée d’intimidations policières et de la persécution de dirigeants syndicaux pour avoir participé à des grèves pacifiques. La CSI exprime sa profonde préoccupation face au climat antisyndical répandu dans le pays et à la persistance d’obstacles juridiques et pratiques de longue date à l’exercice de la liberté syndicale. La commission prie le gouvernement de fournir des commentaires détaillés sur ces graves allégations, ainsi que sur les autres questions soulevées par la CSI dans ses observations de 2021.
La commission exprime son profond regret que le gouvernement n’ait pas fourni de rapport cette année sur l’application de la convention ni sur les progrès réalisés en ce qui concerne les recommandations de la mission de contacts directs qui a eu lieu en mars 2022 à la demande de la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2021. La commission se voit donc dans l’obligation d’examiner les questions soulevées dans ses commentaires précédents et les recommandations de la mission de contacts directs sans bénéficier d’un retour d’information de la part du gouvernement sur les mesures qu’il aurait prises ou envisagées.

Droits syndicaux et libertés civiles

Meurtres de syndicalistes. La commission rappelle que son commentaire précédent concernait sa recommandation de longue date, ainsi que celle de la Commission de l’application des normes de la Conférence, de mener des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007). Tout en notant que le gouvernement du Cambodge s’est présenté devant le Comité de la liberté syndicale dans le cadre du paragraphe 69 des procédures spéciales en vue de l’informer des progrès accomplis à cet égard (cas no 2318, 404e rapport, novembre 2023, paragraphe 6, la commission doit observer avec une profonde préoccupation que le gouvernement n’a toujours pas fourni d’informations sur les progrès accomplis à cet égard. Rappelant une fois de plus la nécessité de conclure les enquêtes en cours et de traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes, la commission prie instamment les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer le processus d’enquête et à rendre compte des progrès significatifs réalisés.
Incidents durant les manifestations de janvier 2014. En ce qui concerne les syndicalistes faisant l’objet de procédures pénales pour des incidents survenus lors des manifestations de janvier 2014, la commission, dans son commentaire précédent, avait prié le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les procédures judiciaires en cours visant des syndicalistes, notamment sur tout verdict rendu, ainsi que des informations détaillées sur toute décision de justice résultant des conclusions des commissions d’enquête sur les allégations de meurtres, de violences physiques et d’arrestations de travailleurs qui manifestaient, de même que tous les documents liés aux rapports des commissions qui ne mettent pas directement en cause les affaires internes du pays. La commission prend note des recommandations de la mission de contacts directs de 2022 invitant le gouvernement à réviser les listes de travailleurs qui font toujours l’objet de poursuites pénales avec les syndicats concernés et à fournir plus de clarté sur les accusations restantes et les actions qui ont eu lieu, ainsi que sur les jugements définitifs des tribunaux. La commission note avec un profond regret que le gouvernement n’a fourni aucune information à cet égard, plus d’un an après la visite de la mission de contacts directs dans le pays et la publication de ses recommandations. La commission prie donc instamment le gouvernement d’examiner la liste des décisions judiciaires en cours avec les syndicats concernés et de fournir des informations détaillées sur chacun des cas de poursuites pénales liées aux manifestations de janvier 2014.
Violence, intimidation, arrestation et emprisonnement de syndicalistes pour avoir mené une action industrielle pacifique. Formation des forces de police en ce qui concerne les actions collectives et de protestation. La commission rappelle en outre les conclusions de la Commission de l’application des normes appelant le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin aux arrestations, détentions et poursuites arbitraires de syndicalistes pour avoir mené des activités syndicales légitimes. La commission note avec une profonde préoccupation les dernières allégations de la CSI concernant les arrestations en cours de travailleurs impliqués dans un conflit avec un casino. La commission note que cette question a été soulevée devant le Comité de la liberté syndicale qui avait une fois de plus prié instamment le gouvernement de veiller à la libération immédiate et inconditionnelle du président du syndicat (voir 404e rapport, paragr. 203 et 207 c)). Rappelant sa précédente demande au gouvernement de fournir des informations sur le nombre de policiers qui participent aux formations, leur durée et les sujets qu’elles abordent, y compris la question de savoir si les conséquences disciplinaires de l’usage excessif de la force font partie de la formation, la commission prend note de la recommandation de la mission de contacts directs concernant la criminalisation et la politisation de l’activité syndicale et la nécessité de donner des instructions claires pour que le recours à la police en cas de grève ne se fasse qu’en cas de menace réelle pour l’ordre public et que l’intervention soit proportionnée à la menace pour l’ordre public et évite le danger d’une violence excessive. La commission prie instamment le gouvernement de veiller à ce que tous les syndicalistes détenus pour avoir mené une activité syndicale légitime soient immédiatement libérés. Elle prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour envisager d’autres mesures, y compris l’élaboration de lignes directrices, afin de garantir que les actions syndicales pacifiques ne sont pas réprimées, ainsi que sur les progrès réalisés pour assurer des programmes de formation réguliers et systématiques des inspecteurs du travail, des responsables des conflits du travail, des policiers, des travailleurs et des employeurs, comme l’a recommandé la mission de contacts directs. Regrettant que le gouvernement n’ait fourni aucune information en réponse à sa précédente demande, la commission réitère sa demande d’informations détaillées sur le nombre de policiers formés, la durée de la formation, les sujets abordés et si les conséquences disciplinaires de l’usage excessif de la force font également partie de la formation.

Questions législatives

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. Fonctionnaires et enseignants du secteur public.Notant avec regret que le gouvernement n’a fourni aucune information sur la manière dont les droits à la liberté syndicale des fonctionnaires sont protégés, la commission doit à nouveau prier instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour garantir que les fonctionnaires (dont les enseignants), qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, peuvent pleinement exercer leurs droits syndicaux tels que conférés par la convention et que la législation est modifiée en conséquence.
Travailleurs domestiques. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait noté la profonde préoccupation exprimée par les organisations de travailleurs concernant les difficultés rencontrées par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle pour constituer des syndicats ou et de s’y affilier, étant donné que la loi sur les syndicats prévoit un modèle de syndicat d’entreprise, dont les exigences sont souvent très difficiles à satisfaire par ces travailleurs. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour promouvoir la jouissance pleine et effective des droits énoncés dans la convention par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle et rappelle que l’examen de l’adaptation du cadre législatif pour permettre expressément la formation de syndicats par secteur ou par profession peut faciliter l’exercice des droits énoncés dans la convention par ces travailleurs.
Application dans la pratique. Enregistrement des syndicats. La commission rappelle les conclusions de 2021 de la Commission de l’application des normes invitant le gouvernement à veiller à ce que les travailleurs puissent enregistrer leurs syndicats par le biais d’un processus simple, objectif et transparent. La commission note à cet égard les conclusions et recommandations de la mission de contacts directs de 2022 selon lesquelles les obstacles pratiques à la formation et au fonctionnement des syndicats, en particulier en ce qui concerne l’enregistrement des syndicats ou la reconnaissance de leur statut le plus représentatif, devraient être rapidement résolus. La mission de contacts directs a proposé de simplifier les formulaires d’enregistrement et de veiller à ce que des instructions claires soient données aux fonctionnaires du ministère afin que seules les exigences spécifiquement énoncées dans la loi puissent être requises pour accorder l’enregistrement, ce qui faciliterait le processus. La mission de contacts directs avait également recommandé d’éliminer toute autorité discrétionnaire (telle que la demande au syndicat de fournir la liste des employés) et de dispenser une formation, y compris avec l’assistance technique de l’OIT, afin de renforcer la capacité des fonctionnaires du ministère et des syndicats à comprendre les attentes à cet égard. Enfin, la mission de contacts directs avait suggéré qu’une base de données en ligne indiquant les demandes d’enregistrement, les questions en suspens et la résolution finale contribuerait à la transparence du processus et démontrerait la cohérence de l’application. Regrettant que le gouvernement n’ait pas fourni d’informations sur les mesures prises pour résoudre les divers obstacles pratiques à l’enregistrement, la commission prie instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées à cet égard.
Articles 2 et 3. Audits financiers et maintien de l’enregistrement. Dans son commentaire précédent, la commission a observé que les amendements de 2019 à la loi sur les syndicats prévoyaient: i) un nouvel article 27 exigeant des organisations qu’elles présentent non seulement un état financier à leurs membres, mais aussi qu’elles le fassent vérifier par une entreprise indépendante à la demande d’un donateur ou d’un certain pourcentage de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations); et ii) un nouvel article 17, sur le maintien de l’enregistrement, exigeant non seulement la présentation des états financiers annuels et des rapports d’activité, mais également leur vérification par un cabinet d’audit indépendant à la demande d’un donateur ou d’un certain pourcentage de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations). Observant que ces dispositions pourraient soumettre les syndicats à la menace de demandes d’audit futiles, ce qui entraînerait une lourde charge pour le maintien de l’enregistrement, la commission prie à nouveau le gouvernement de réviser les articles 17 et 27 de la loi sur les syndicats, en consultation avec les organisations représentatives concernées, de sorte que les audits des états financiers et des rapports d’activité ne soient exigés que lorsqu’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi.
Article 3. Droit d’élire librement des représentants. Conditions à respecter pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des syndicats.En l'absence d'informations de la part du gouvernement,, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de cette loi afin de supprimer l’obligation de lire et d’écrire le khmer comme critère d’éligibilité des étrangers. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès à cet égard.
Droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leur activité et de formuler leur programme. Dans ses commentaires précédents, la commission avait fait référence à la nécessité de modifier l’article 326 (1) de la loi sur le travail aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum visant à protéger les installations et les équipements dans une entreprise où une grève a lieu, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle est habilité à déterminer le service minimum en question. Elle avait aussi prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de l’article 326 (2) de la loi sur le travail, en donnant notamment des exemples de sanctions imposées aux travailleurs pour faute grave. Regrettant que le gouvernement n’ait pas fourni d’informations supplémentaires à cet égard, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises, en consultation avec les partenaires sociaux concernés, pour modifier l’article 326 de la loi sur le travail et de fournir des informations sur son application dans la pratique.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait également noté que la CSI dénonçait qu’il était courant de remplacer des travailleurs et de prononcer des injonctions pour empêcher une action revendicative, même si les syndicats avaient respecté toutes les procédures. La commission prend également note des conclusions de la mission des contacts directs concernant la nécessité de clarifier le rôle du Comité des grèves et des manifestations dans la résolution des conflits du travail et de veiller à ce qu’il ne restreigne pas le droit légitime des organisations de travailleurs de mener des actions syndicales pour défendre les intérêts de leurs membres. La commission prie à nouveau le gouvernement d’engager un dialogue tripartite approfondi sur les questions soulevées à propos de la légalité des actions revendicatives afin de réexaminer la réglementation existante et son application dans la pratique, et de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’exercice légitime et pacifique du droit de grève.
Article 4. Dissolution des organisations représentatives. La commission rappelle que ses commentaires précédents concernaient le paragraphe 2 de l’article 28 de la loi sur les syndicats qui prévoit la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement, et la nécessité de veiller à ce que les organisations de travailleurs ou d’employeurs ne soient dissoutes que dans le cadre des procédures définies par ses statuts ou par le jugement d’un tribunal. La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 28 de la loi sur les syndicats en supprimant entièrement son paragraphe 2 et de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Motifs de demande de dissolution par un tribunal. Rappelant que la seule manière pour les membres de demander la dissolution devait être celle prévue dans les statuts de l’organisation, la commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats afin de laisser aux statuts et règlements des syndicats ou des associations d’employeurs le soin de déterminer la procédure de dissolution par leurs membres.

Application pratique

Mécanismes de décision indépendants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note des observations de la CSI dénonçant le refus du ministère du Travail et de la Formation professionnelle d’autoriser les syndicats de niveau supérieur à représenter ou à soutenir leurs membres dans les conflits collectifs et l’exemple donné où les autorités auraient déclaré que les dirigeants des fédérations et des confédérations n’étaient pas autorisés à prendre la parole au cours de la réunion d’un cas de conciliation d’un conflit collectif du travail. La commission regrette que le gouvernement n’ait pas fourni d’informations en réponse et observe que ces préoccupations sont liées au fonctionnement de mécanismes d’arbitrage indépendants, tels que le Conseil d’arbitrage. La commission rappelle à cet égard ses commentaires précédents concernant l’importance de veiller au bon fonctionnement du système judiciaire en tant que garantie contre l’impunité et moyen efficace de protéger les droits syndicaux des travailleurs pendant les conflits du travail. La commission note dans les conclusions de la mission de contacts directs qu’il y a eu plusieurs plaintes concernant la qualification des litiges devant le Conseil d’arbitrage, comme la qualification du licenciement d’un responsable syndical en tant que litige individuel, ce qui a empêché l’audition de cette allégation spécifique. La commission prend note de la recommandation du rapport de la mission de contacts directs selon laquelle les licenciements de dirigeants syndicaux avant ou après l’enregistrement du syndicat devraient être considérés comme un conflit collectif pouvant être soumis au Conseil d’arbitrage comme recours rapide. En outre, la mission de contacts directs a recommandé que toute évolution du fonctionnement du Conseil d’arbitrage envisagée par le gouvernement ne se fasse qu’après des consultations complètes et utiles avec tous les acteurs et toutes les parties prenantes concernés. Enfin, la commission prend note de la forte recommandation de la mission de contacts directs selon laquelle des mesures urgentes doivent être prises pour recruter et former de nouveaux arbitres et que les confédérations et fédérations syndicales doivent pouvoir représenter leurs membres sans avoir à obtenir l’approbation préalable du ministère du Travail et de la Formation professionnelle. Soulignant l’importance de l’indépendance des mécanismes d’arbitrage, la commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute évolution du fonctionnement et de l’activité du Conseil d’arbitrage, et d’inclure des statistiques sur le nombre et la nature des litiges dont il est saisi et sur le degré de respect des sentences non contraignantes du Conseil d’arbitrage, ainsi que sur toute décision visant à garantir que les sentences du Conseil d’arbitrage, lorsqu’elles sont contraignantes, soient dûment appliquées.
Finalement, la commission note que la mission de contacts directs avaitobservé que la feuille de route et les rapports d’avancement sur la mise en œuvre des recommandations de la mission de contacts directs de 2017 étaient dans une certaine mesure administrativement complexes, se concentrant davantage sur la procédure que sur des résultats orientés vers l’action. La mission de contacts directs avait donc suggéré au gouvernement de simplifier la feuille de route et son rapport d’avancement, en pleine consultation avec les partenaires sociaux et avec le soutien de l’OIT, afin d’identifier les domaines prioritaires d’action urgente sur la base de ses recommandations et de celles des organes de contrôle, avec des résultats et des délais clairs, en garantissant la responsabilité et la transparence. L’examen périodique de l’adéquation des mesures prises devrait être effectué avec toutes les parties concernées. La commission regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur les mesures prises à cet égard et le prie d’indiquer les mesures prises pour associer les partenaires sociaux concernés à la définition des domaines d’action prioritaires au regard de toutes ses demandes susmentionnées, en précisant clairement les résultats attendus, les organes responsables et les délais.
La commission note avec une profonde préoccupation : l'ancienneté des questions importantes soulevées dans ce commentaire ; l'absence de progrès dans l'élaboration d'une feuille de route avec les partenaires sociaux, comme l'a recommandé la mission de contacts directs, établissant un ordre de priorité des questions à traiter et à résoudre rapidement ; les nouvelles allégations de violations graves des libertés civiles essentielles à l'exercice de la liberté syndicale, y compris l'arrestation et la détention de syndicalistes ; et l'absence totale de rapport de la part du gouvernement cette année. Dans ces circonstances, la commission considère que ce cas remplit les critères énoncés au paragraphe 109 de son rapport général pour être soumis à la Conférence.
[ La commission demande au gouvernement de fournir des données complètes à la Conférence à sa 112 e session et de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2024 .]

Demande directe (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. Conditions d’enregistrement. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que la mission de contacts directs de mars 2017 avait souligné les préoccupations exprimées par des organisations de travailleurs à propos des conditions requises pour obtenir et conserver leur enregistrement, et de leur application dans la pratique, y compris les allégations de refus arbitraire de demandes d’enregistrement et d’introduction par voie réglementaire de nouvelles conditions non prévues par la loi. Elle avait noté que le gouvernement indiquait dans son rapport que: i) à la suite d’un forum syndical sur le sujet, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle avait émis l’instruction no 39/18, enjoignant à tous les départements chargés de l’enregistrement des organisations de faciliter le processus, notamment en n’exigeant pas de renseignements sur la situation familiale et en permettant au personnel administratif des fédérations ou confédérations d’aider à l’enregistrement des syndicats locaux qui leur sont affiliés; ii) 72 inspecteurs du travail avaient participé à une formation sur les procédures d’enregistrement; et iii) le 31 mai 2019, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle avait publié l’instruction no 53/19, demandant aux départements compétents de revoir les documents exigés pour les fédérations et confédérations de syndicats de travailleurs et de supprimer certaines conditions. La commission note que le gouvernement indique par ailleurs: i) les conditions établies dans la loi sur les syndicats ne doivent pas être vues comme des obstacles à l’enregistrement; ii) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’a reçu aucune plainte concernant exclusivement le refus, la suspension ou le rejet de l’enregistrement; iii) les requêtes du responsable du registre visant à modifier des informations incorrectes dans le formulaire de demande d’enregistrement ne doivent pas être considérées comme des restrictions à l’enregistrement, iv) les procédures légales visent à garantir que les syndicats sont constitués pour protéger les droits et avantages légitimes des travailleurs; v) l’évolution des procédures d’enregistrement a conduit à une augmentation du nombre d’enregistrements de syndicats, malgré les difficultés rencontrées à cause de la pandémie de COVID-19 (394 nouvelles organisations enregistrées); et vi) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle accueille favorablement toutes les plaintes relatives au processus d’enregistrement pour que les autorités puissent les examiner et les traiter. Par ailleurs, la commission note que dans ses observations et faisant référence à des exemples concrets, la Confédération syndicale internationale (CSI) allègue que, malgré certaines modifications apportées aux formulaires de demande, l’enregistrement des syndicats reste difficile et les demandes sont refusées pour des raisons arbitraires ou des erreurs techniques extrêmement mineures. La commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires à cet égard et, en consultation avec les organisations de travailleurs, de continuer d’évaluer le fonctionnement des procédures d’enregistrement, ainsi que de prendre toute mesure supplémentaire nécessaire pour que l’enregistrement ne soit qu’une formalité simple et rapide n’impliquant aucune discrétion ou autorisation préalable.
Articles 2 et 3. Audits financiers et maintien de l’enregistrement. Dans son précédent commentaire, la commission avait observé que les modifications apportées en 2019 à la loi sur les syndicats prévoyaient: i) un nouvel article 27 exigeant des organisations qu’elles présentent non seulement un état financier à leurs membres, mais aussi qu’elles le fassent vérifier par une entreprise indépendante à la demande d’un donateur ou d’un certain pourcentage de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations); et ii) un nouvel article 17, sur le maintien de l’enregistrement, exigeant non seulement la présentation des états financiers annuels et des rapports d’activité, mais également leur vérification par un cabinet d’audit indépendant à la demande d’un donateur ou d’un certain pourcentage de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations). La commission estime que ces dispositions pourraient exposer les syndicats à des demandes fantaisistes de vérification, ce qui générerait des frais importants pour conserver leur enregistrement. De tels audits financiers ne doivent être imposés que s’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi (ce qui ne devrait pas enfreindre les principes de la liberté syndicale tels que consacrés dans la convention), comme des allégations justifiées de détournement de fonds, ou de manque de légitimité ou d’indépendance. La commission note que selon les observations de la CSI à cet égard, la loi sur les syndicats accorderait un pouvoir excessif de contrôle financier aux autorités, notamment un nombre illimité de vérifications, portant ainsi atteinte au droit des travailleurs de gérer leurs organisations. Notant qu’il ne fournit aucune information supplémentaire à cet égard, la commission prie de nouveau le gouvernement de revoir les articles 17 et 27 de la loi sur les syndicats, en consultation avec les organisations représentatives concernées, pour que la vérification des états financiers et des rapports d’activité n’ait lieu que lorsqu’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi.
Conditions de quorum ou de scrutin pour certaines décisions dans les statuts d’un syndicat. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle les conditions prévues à l’article 13 de la loi sur les syndicats, sur les statuts des syndicats (quorum à la majorité absolue pour les décisions sur la grève et la modification des statuts, ainsi que pour les assemblées générales des syndicats, et vote à la majorité absolue pour la décision de faire grève), n’obligeaient pas de participer personnellement aux réunions et les syndicats pouvaient choisir d’autres moyens appropriés pour convoquer une réunion et déterminer les conditions pour y participer, conformément à leurs statuts, à condition que le quorum fixé soit atteint. De plus, le gouvernement indiquait que les malentendus concernant l’application de cette disposition avaient été dissipés au cours de l’atelier tripartite du 24 mars 2017, mais que des améliorations seraient possibles en procédant à d’autres consultations; que depuis l’atelier, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’avait pas reçu de demandes relatives à l’application de l’article 13 de la loi sur les syndicats; et qu’un forum syndical annuel avait été organisé pour revoir la mise en œuvre de cette loi. N’ayant reçu aucune information supplémentaire à ce sujet, la commission s’attend à ce que le gouvernement continue de prendre les mesures nécessaires, notamment dans le contexte d’une nouvelle révision de la loi sur les syndicats, pour préciser l’application des conditions de quorum et permettre aux syndicats de déterminer librement dans leurs statuts ou règlements d’autres moyens qu’une présence effective (procuration ou délégation) pour atteindre le quorum fixé, y compris en ce qui concerne les organisations de niveau supérieur.
Article 3. Droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leur activité et de formuler leur programme. Dans ses commentaires précédents, la commission avait fait référence à la nécessité de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum visant à protéger les installations et les équipements dans une entreprise où une grève a lieu, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle est habilité à déterminer le service minimum en question. Elle avait aussi prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de l’article 326(2) de la loi sur le travail, en donnant notamment des exemples de sanctions imposées aux travailleurs pour faute grave. La commission avait noté que le gouvernement indiquait que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle avait consulté les parties concernées sur l’application de l’article 326 lors de l’élaboration d’un règlement visant à déterminer le service minimum dans une entreprise où une grève a lieu. Elle s’était alors félicitée de l’indication du gouvernement selon laquelle il allait solliciter l’assistance technique du BIT pour organiser une consultation tripartite sur le projet de règlement. N’ayant reçu aucune information supplémentaire à ce propos et rappelant ses précédentes recommandations, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard, y compris sur l’application dans la pratique de l’article 326 de la loi sur le travail.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait également noté que la CSI dénonçait qu’il était courant de remplacer des travailleurs et de prononcer des injonctions pour empêcher une action revendicative, même si les syndicats avaient respecté toutes les procédures. Dans ses observations, la CSI alléguait aussi que des grèves avaient été violemment réprimées par des criminels engagés à cette fin, que des travailleurs grévistes avaient été massivement licenciés et que des dirigeants syndicaux avaient été placés en détention pour l’organisation d’une grève dans le secteur de l’habillement. La commission avait aussi noté que, selon le gouvernement: i) des injonctions avaient été émises pour protéger les propriétés privées, ainsi que le bien-être et la vie des travailleurs; ii) des injonctions n’avaient jamais été émises contre des grèves correctement menées, dans le respect de la loi, mais uniquement en cas de grève illégale et exigeaient alors la reprise du travail dans les 48 heures, faute de quoi les travailleurs étaient considérés comme ayant commis une faute grave et pouvaient être licenciés; iii) à cause d’un manque d’application effective de la législation et des règlements concernés, de plus en plus de dirigeants syndicaux opportunistes organisaient des grèves illégales dans leur propre intérêt, fragilisant ainsi les efforts déployés pour mettre en place des relations professionnelles constructives et pacifiques; et iv) 99 pour cent des grèves ne respectaient pas au moins une des conditions prévues par la loi. La commission avait donc observé que la réponse du gouvernement et les observations de la CSI confirmaient l’existence de problèmes majeurs et d’importantes difficultés entourant la légalité de l’exercice des actions revendicatives dans le pays. N’ayant reçu aucune information supplémentaire à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement d’engager un dialogue tripartite approfondi sur les questions soulevées à propos de la légalité des actions revendicatives afin de réexaminer la réglementation existante et son application dans la pratique, et de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’exercice légitime et pacifique du droit de grève.
Articles 5 et 6. Capacité des organisations de niveau supérieur de représenter leurs membres. La commission prend note des observations de la CSI dénonçant le refus du ministère du Travail et de la Formation professionnelle de permettre aux syndicats de niveau supérieur de représenter leurs membres lors de conflits collectifs. À titre d’exemple, la CSI fait référence à une procédure de conciliation pour un conflit du travail où les autorités auraient affirmé que les dirigeants de fédérations et confédérations n’étaient pas autorisés à s’exprimer pendant la réunion et que les syndicats qualifiés de plus représentatifs ne pouvaient se faire représenter. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

La commission prend note des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2021, relatives à des points examinés dans le présent commentaire et dans lesquelles elle dénonce également qu’en août 2021: i) Rong Chhun, le président de la Confédération cambodgienne des syndicats (CCU) et l’ancien président de l’Association cambodgienne des enseignants indépendants (CITA), arrêté en juillet 2020 après avoir pris parti pour des villageois dans un différend foncier le long de la frontière entre le Cambodge et le Viet Nam, a été condamné à deux ans de prison; et ii) Sar Kanika, la présidente de l’Association des travailleurs informels du Cambodge, qui avait également participé à ces activités syndicales en défense des intérêts économiques des fermiers, a été condamnée à 20 mois de prison. La commission se félicite de l’annonce de la libération de M. Chhun et de Mme Kanika, en novembre 2021.
La commission note que la CSI dénonce par ailleurs qu’au cours de l’année écoulée, plusieurs lois et décrets d’urgence ont été adoptés, restreignant l’exercice de la liberté syndicale. En particulier, la CSI fait référence à: i) la loi sur l’administration de la nation dans les situations d’urgence, affirmant qu’elle accorde au gouvernement de larges pouvoirs lui permettant d’interdire les réunions et les rassemblements, de surveiller les télécommunications et d’interdire ou de limiter les médias susceptibles de nuire à la «sécurité nationale», définit une série d’autres mesures «appropriées et nécessaires» et prévoit que toute infraction est passible de lourdes peines d’emprisonnement et d’amendes; et ii) la loi sur les mesures visant à prévenir la propagation de la COVID-19 et d’autres maladies graves, dangereuses et contagieuses, qui comprend l’interdiction des rassemblements, ainsi que des «mesures administratives et autres non spécifiées, nécessaires pour répondre à la propagation de la COVID-19 et la prévenir». La CSI allègue que des dispositions aussi vagues permettent des abus et autorisent les autorités à cibler arbitrairement les personnes et les organisations qui protestent contre les politiques gouvernementales. En outre, toujours selon la CSI, un projet de loi sur l’ordre public, très problématique, exigerait l’autorisation des autorités pour utiliser des espaces publics et leur permettrait de mettre un terme à tout événement pour lequel aucune autorisation n’aurait été demandée. La CSI allègue par ailleurs que le 3 avril 2020, Mme Soy Sros, la présidente d’un syndicat local affilié au Syndicat collectif du mouvement des travailleurs (CUMW), a été arrêtée par la police de la province de Kompong Speu à la suite d’une plainte déposée au pénal par son employeur pour des messages publiés sur les réseaux sociaux liés à un conflit du travail dû au licenciement injuste de plusieurs membres syndicaux. La commission note qu’en ce qui concerne la nécessité d’enquêter sur les allégations de répression violente d’activités syndicales et d’arrestations ou de poursuites judiciaires de dirigeants syndicaux pour des activités syndicales légitimes, le gouvernement: i) indique que des procédures de dépôt de plaintes et de réclamation existent à tous les niveaux et toute personne, y compris des syndicalistes, peut y recourir et en bénéficier; ii) note que d’une façon générale, les syndicats et les syndicalistes doivent présenter leurs réclamations aux autorités compétentes qui prendront des mesures immédiates, conformément aux règles et procédures applicables, et feront suivre les informations pertinentes pour que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle puisse fournir une assistance juridique appropriée; et iii) affirme que les dirigeants syndicaux qui commettent des infractions pénales doivent répondre de leurs actes. Tout en observant, à partir des informations publiquement disponibles, qu’il y a eu une certaine évolution concernant la libération de Mme Soy Sros, la commission regrette que le gouvernement n’ait pas fourni davantage d’informations quant aux autres allégations spécifiques d’organisations de travailleurs qui lui ont été soumises et le prie de fournir ses commentaires détaillés sur toutes ces allégations graves.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 109e session, juin 2021)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail (ci-après, la Commission de la Conférence) concernant l’application de la convention par le Cambodge. La commission observe que la Commission de la Conférence a exprimé sa profonde préoccupation devant la poursuite des actes de violence contre des travailleurs, les arrestations de nombreux syndicalistes en rapport avec leurs activités, ainsi que devant l’absence d’enquêtes efficaces et en temps opportun sur ces incidents, et a prié instamment le gouvernement: i) d’enquêter sur toutes les allégations de répression violente de l’activité syndicale et de détention de dirigeants syndicaux; ii) de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer les enquêtes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), et d’assurer que les auteurs de ces crimes sont traduits en justice; iii) d’engager tous les efforts nécessaires pour conclure les procédures judiciaires intentées à des syndicalistes dans le cadre des incidents des manifestations de janvier 2014, d’assurer qu’aucune inculpation ou sanction ne soit imposée pour l’exercice pacifique d’activités syndicales et d’abandonner tous les chefs d’inculpation pénale contre les syndicalistes accusés dans le cadre des manifestations de janvier 2014; et iv) de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme aux arrestations arbitraires, aux détentions et poursuites de syndicalistes pour avoir mené des activités syndicales légitimes. La Commission de la Conférence a également noté que, si des mesures positives ont été prises pour mettre la législation en conformité avec la convention, des problèmes graves de conformité restent sans réponse et a demandé au gouvernement cambodgien: 1) de communiquer à la commission d’experts les rapports des trois commissions chargées d’enquêter sur les violences visant des dirigeants syndicaux et les meurtres de certains d’entre eux; 2) d’assurer que des enquêtes sont promptement diligentées contre les actes de discrimination antisyndicale et que, si les faits sont avérés, des réparations adéquates et des sanctions dissuasives sont appliquées; 3) avec l’assistance technique du BIT, d’élaborer des lignes directrices, un code de bonne pratique ou un manuel sur le maintien de l’ordre et le traitement des actions collectives et actions de protestation; 4) de modifier la loi sur les syndicats en consultation avec les partenaires sociaux pour garantir sa conformité avec la convention; 5) d’assurer que les travailleurs peuvent enregistrer des syndicats par le biais d’une procédure simple, objective et transparente; 6) de continuer à identifier, en consultation avec les partenaires sociaux, des mesures légales appropriées pour garantir que les enseignants, les travailleurs domestiques et les fonctionnaires qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats jouissent des droits à la liberté syndicale au sens de la convention; 7) d’abroger, dans la loi sur les syndicats, le critère d’alphabétisation figurant dans les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats, le paragraphe 2 de l’article 28 sur la dissolution automatique des organisations de travailleurs en cas de fermeture totale d’une entreprise ou d’un établissement, et l’article 29 sur la dissolution des organisations d’employeurs et de travailleurs à l’initiative de membres de ces organisations; 8) de discuter avec les partenaires sociaux de la possibilité d’autoriser la constitution d’organisations d’employeurs et de travailleurs par secteur ou profession; et 9) d’intensifier ses efforts pour faire du Conseil d’arbitrage une institution efficace et pérenne pour traiter les conflits du travail, et de faire en sorte que les décisions contraignantes du Conseil d’arbitrage soient effectivement appliquées en droit et dans la pratique. Enfin, la Commission de la Conférence a recommandé que le gouvernement accepte dès que possible une mission de contacts directs. À cet égard, la commission accueille favorablement que, par une communication datée du 10 août 2021, le gouvernement accepte la mission de contacts directs et ait pris en contact avec le BIT pour l’organiser dès que possible dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

Droits syndicaux et libertés publiques

Meurtres de syndicalistes. S’agissant de la recommandation qu’elle fait depuis longtemps de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), la commission note que: i) en ce qui concerne le meurtre de Chea Vichea, le gouvernement indique que la police de Phnom Penh a rouvert l’enquête, note que malgré les difficultés, la police fait tout son possible pour clore l’affaire et répète qu’il est indispensable que les membres de la famille et toutes les parties concernées collaborent étroitement; ii) en ce qui concerne le meurtre de Ros Sovannareth, le gouvernement rappelle que la Cour d’appel a réexaminé l’affaire et a rendu son verdict en juillet 2019, condamnant le suspect, Thach Saveth, à 15 ans de prison pour meurtre prémédité; et iii) en ce qui concerne le meurtre de Hy Vuthy, le gouvernement rappelle que Chan Sophon, le suspect qui avait été arrêté en septembre 2013, a fait appel et a été libéré en février 2014 et indique que l’autre suspect, Phal Vannak, a aussi été condamné par contumace et est sous le coup d’un mandat d’arrêt. La commission note par ailleurs que la CSI déplore une fois encore que ces meurtres ne soient pas résolus, ainsi que l’impunité persistante 17 et 14 ans plus tard. La commission réitère sa profonde préoccupation face à l’absence de progrès concernant les enquêtes et renvoie à cet égard aux conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale lors de son examen du cas no 2318 (voir 396e rapport, novembre 2021, paragr. 166 à 172). Rappelant une nouvelle fois la nécessité de conclure les enquêtes et de traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes, la commission prie instamment et fermement les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer la procédure d’enquête et de communiquer des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
Incidents durant les manifestations de janvier 2014. En ce qui concerne les syndicalistes faisant l’objet de procédures pénales pour les incidents survenus au cours des manifestations de janvier 2014, dans son précédent commentaire, la commission avait noté avec intérêt que les six dirigeants syndicaux initialement condamnés à une peine de trois ans et demi de prison avec sursis avaient été acquittés de tous les chefs d’accusation le 28 mai 2019. Elle avait aussi noté que pour les autres syndicalistes faisant encore l’objet de procédures judiciaires, un groupe de travail avait été mis en place pour suivre les affaires en cours devant les tribunaux en vue d’accélérer leur résolution. Enfin, elle avait pris note de statistiques détaillées relatives aux efforts visant à résoudre les affaires et avait demandé au gouvernement de continuer de fournir des informations sur les procédures en cours. La commission note que dans son dernier rapport, le gouvernement: i) réaffirme qu’on ne peut pas considérer que les émeutes survenues s’inscrivaient dans le cadre de l’exercice pacifique d’activités syndicales et qu’il s’agissait d’un acte à motivation politique; ii) déclare que les plaintes ont été déposées auprès des tribunaux compétents qui ont statué à leur discrétion en fonction des preuves fournies (certains suspects ont été relaxés s’ils étaient innocents en application des règles de procédure); iii) indique qu’en novembre 2021, peu d’affaires pénales étaient en instance devant les tribunaux et aucune ne concernait la liberté syndicale; et iv) rappelle que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le ministère de la Justice ont collaboré pour apporter un soutien juridique aux syndicalistes dont les affaires étaient toujours en cours. La commission note par ailleurs que la CSI: i) rappelle que les travailleurs du secteur de l’habillement protestaient pour obtenir un salaire minimum leur permettant de vivre et qu’en réponse, la police militaire a ouvert le feu sur les manifestants, faisant plusieurs morts et blessés; ii) déplore que sept ans après les manifestations de 2014, des cas d’arrestation et de détention arbitraires de syndicalistes ne soient toujours pas résolus; et iii) dénonce que plusieurs syndicalistes font toujours l’objet de poursuites civiles ou pénales pour avoir pacifiquement participé aux manifestations. La commission note également qu’en réponse à la demande de la Commission de la Conférence de communiquer à la commission d’experts les rapports des trois commissions chargées d’enquêter sur les violences visant des dirigeants syndicaux et les meurtres de certains d’entre eux, le gouvernement répète qu’il ne peut pas partager les rapports détaillés des commissions, car ils relèvent des affaires internes du pays, mais que, comme cela a été rapporté à la mission de contact directs de 2016, les conclusions des trois commissions ont été soumises aux tribunaux compétents pour la suite de la procédure et le gouvernement fera part de l’issue de la procédure judiciaire lorsqu’elle sera terminée. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les procédures judiciaires en cours visant des syndicalistes, notamment sur tout verdict rendu. Elle le prie également de communiquer des informations détaillées sur toute décision de justice résultant des conclusions des commissions qui ont enquêté sur les allégations de meurtres, de violences physiques et d’arrestations de travailleurs qui manifestaient, de même que tous les documents liés aux rapports des commissions qui ne mettent pas directement en cause les affaires internes du pays.
Formation des forces de police en ce qui concerne les actions collectives et de protestation. Dans ses commentaires précédents, rappelant que l’intervention de la police devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public et que les autorités compétentes devraient recevoir des instructions adéquates pour éviter l’écueil d’un usage disproportionné de la force lorsqu’elles tentent de contrôler des manifestations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public, la commission avait encouragé le gouvernement à envisager de solliciter l’assistance technique du Bureau en rapport avec la formation des forces de police dans le but, par exemple, d’élaborer des lignes directrices, un code de bonne pratique ou un manuel sur l’attitude à avoir lors d’actions collectives et de protestation. La commission prend bonne note que le gouvernement fait savoir que: i) 120 policiers de quatre unités différentes ont reçu une formation organisée par le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, avec le soutien du BIT; ii) des formations complémentaires ont eu lieu en 2020 et un total 550 policiers ont participé à des formations sur le droit de faire grève et de manifester pacifiquement; et iii) compte tenu des résultats de ces formations, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle maintiendra ses contacts avec les institutions concernées pour engager des consultations en vue d’élaborer des lignes directrices sur l’attitude à avoir lors de conflits du travail et d’actions collectives, et une demande d’appui technique sera présentée au BIT en temps voulu. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations à cet égard, surtout sur l’élaboration, avec l’assistance du BIT, de lignes directrices, d’un code de bonne pratique ou d’un manuel sur le maintien de l’ordre et le traitement des actions collectives et actions de protestation, ainsi que sur le nombre de policiers qui participent aux formations, leur durée et les sujets qu’elles abordent, y compris la question de savoir si les conséquences disciplinaires de l’usage excessif de la force font partie de la formation.

Questions législatives

La commission note que le gouvernement répète les informations qu’il avait fournies sur les amendements à la loi sur les syndicats, qui est entrée en vigueur en janvier 2020, et indique qu’ils ont donné lieu à une augmentation du nombre d’organisations professionnelles enregistrées. Il précise que sur 5 650 organisations inscrites, 5 352 sont des syndicats locaux de travailleurs, 247 des fédérations de syndicats de travailleurs, 40 des confédérations de syndicats de travailleurs et 11 des organisations d’employeurs. La commission note, d’après l’indication du gouvernement, qu’il n’est pas nécessaire de modifier davantage la loi sur les syndicats; que l’une des principales priorités est de sensibiliser les syndicalistes aux dispositions de la loi sur les syndicats; qu’il accueille favorablement que de futures consultations se tiennent pour revoir le contenu de la loi et sa mise en œuvre; et qu’il souhaite demander le soutien du BIT pour organiser des formations sur la loi sur les syndicats afin de renforcer les capacités des partenaires sociaux. Le gouvernement encourage une fois encore les travailleurs et les syndicalistes à déposer plainte auprès du ministère du Travail et de la Formation professionnelle en cas d’irrégularités liées à l’enregistrement, à la représentation ou à l’exercice de la liberté syndicale en application de la loi sur les syndicats. D’autre part, la commission note que la CSI allègue que les modifications apportées à la loi sur les syndicats ne permettent pas une mise en conformité de la législation avec la convention et des syndicats ont fait savoir que le gouvernement n’avait mené aucun dialogue constructif avec eux et avait refusé d’examiner les propositions d’amendement des syndicats alors qu’ils auraient permis d’assurer le respect de la convention.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. Dans ses commentaires précédents, la commission avait instamment prié le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour garantir que les fonctionnaires (dont les enseignants), qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, peuvent pleinement bénéficier de leurs droits syndicaux tels que conférés par la convention et que la législation est modifiée en conséquence. La commission note que le gouvernement répète que la loi sur les syndicats est applicable aux enseignants qui travaillent dans des établissements privés et que les fonctionnaires et les enseignants des écoles publiques peuvent jouir de la liberté syndicale conformément à la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales. Le gouvernement ajoute que la convention n’exige pas que la liberté syndicale de tous les individus soit couverte par un instrument législatif unique et indique que ces différents régimes sont dus au système administratif et à la répartition des compétences des institutions étatiques chargées de l’enregistrement des organisations professionnelles. À cet égard, la commission se doit de rappeler qu’elle avait déjà souligné que certaines dispositions de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales contreviennent aux droits que la convention reconnaît aux fonctionnaires en matière de liberté syndicale, car elle ne confère pas aux associations de fonctionnaires le droit de rédiger des statuts et un règlement, le droit d’élire des représentants, le droit d’organiser des activités et de formuler des programmes sans l’ingérence des autorités publiques, ni le droit de s’affilier à des fédérations ou confédérations, y compris à l’échelon international, et soumet l’enregistrement de ces associations à l’autorisation du ministère de l’Intérieur. En outre, la commission avait noté que les organisations et associations de travailleurs étaient particulièrement inquiètes face au manque de protection des droits syndicaux des enseignants (mentionnant en particulier les sanctions et les menaces visant des enseignants qui cherchent à s’organiser). La commission note que les observations de la CSI allèguent une nouvelle fois que le cadre régressif de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales n’est pas conforme à la convention. Regrettant l’absence persistante de progrès à cet égard, la commission se doit une fois encore de prier urgemment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour garantir que les fonctionnaires (dont les enseignants), qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, peuvent pleinement exercer leurs droits syndicaux tels que conférés par la convention et que la législation est modifiée en conséquence.
En ce qui concerne les travailleurs domestiques, la commission note que le gouvernement déclare que la loi sur les syndicats est applicable à cette catégorie de travailleurs. De plus, pour ce qui est de la possibilité d’autoriser la formation d’organisations par secteur ou profession, le gouvernement indique qu’il n’est pas interdit de constituer des organisations par secteur ou profession tant que les conditions de la loi sur les syndicats sont remplies et affirme que la convention n’exige pas qu’une loi nationale énonce précisément cette disposition. Le gouvernement ajoute qu’il souhaiterait solliciter l’assistance du BIT pour organiser des formations en vue de sensibiliser davantage les travailleurs et les employeurs à ce sujet. Ayant dûment pris note de ces indications, la commission rappelle que les organisations syndicales continuent d’exprimer une profonde préoccupation face aux difficultés que rencontrent les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle en général qui cherchent à constituer des syndicats et à s’y affilier, car la loi sur les syndicats préconise un modèle de syndicat d’entreprise dont les conditions sont très difficiles à remplir pour ces travailleurs et n’autorise pas la création de syndicats par secteur ou profession. Elle note également que, dans ses observations, la CSI souligne de nouveau que l’une des lacunes les plus importantes de la législation nationale est que les travailleurs domestiques, les travailleurs de l’économie informelle et les autres travailleurs qui ne sont pas organisés selon un modèle de syndicat d’entreprise ne peuvent toujours pas, dans la pratique, constituer des syndicats ni s’y affilier. La commission encourage le gouvernement à promouvoir l’exercice complet et effectif par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle des droits que confère la convention. Pour ces travailleurs et les autres travailleurs qui ne sont pas facilement organisés sur un modèle au niveau de l’entreprise, la commission prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour autoriser la formation de syndicats par secteur ou profession, en consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT.
Article 3. Droit d’élire librement des représentants. Conditions à respecter pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des syndicats et des associations d’employeurs. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats afin de supprimer l’obligation de savoir lire et écrire le khmer de la liste des conditions d’éligibilité pour les étrangers. La commission note, d’une part, que le gouvernement indique à cet égard que la loi sur les syndicats a été modifiée par un consensus tripartite et que cette condition n’est pas incompatible avec la convention. Elle note d’autre part que les observations de la CSI dénoncent encore cette exigence comme l’un des obstacles importants à la mise en conformité de la loi sur les syndicats avec la convention. La commission rappelle aussi que l’imposition de l’obligation de savoir lire et écrire en tant que condition d’éligibilité des représentants est incompatible avec la convention (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 104). La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour supprimer l’obligation de savoir lire et écrire le khmer des articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
Article 4. Dissolution des organisations représentatives. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de modifier le paragraphe 2 de l’article 28 de la loi sur les syndicats qui prévoit la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement. Elle avait observé que les modifications de 2019 à la loi sur les syndicats prévoyaient toujours, à son paragraphe 2 de l’article 28, la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement, mais incluaient une condition supplémentaire, à savoir le versement intégral aux travailleurs des salaires et autres prestations. La commission note que le gouvernement réaffirme que l’objectif des modifications apportées était de veiller aux intérêts des travailleurs et des syndicats en cas de fermeture d’une entreprise; qu’à l’époque, les modifications avaient été favorablement accueillies par les syndicats; et qu’étant donné que les syndicats locaux sont légalement liés aux entreprises dans lesquelles ils se constituent, lorsque celle-ci n’existe plus légalement, le syndicat est amené à disparaître également. À cet égard, la commission se doit de rappeler que si le versement des salaires et des autres prestations peut en effet constituer une raison légitime pour un syndicat de rester en activité après la dissolution de l’entreprise concernée, il en existe d’autres (comme la défense d’autres revendications légitimes, y compris à l’encontre de tout successeur légal de l’ancienne société). Rappelant que la dissolution d’une organisation de travailleurs ou d’employeurs ne peut être décidée que dans le cadre des procédures définies par ses statuts ou par le jugement d’un tribunal, la commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 28 de la loi sur les syndicats en supprimant entièrement son paragraphe 2.
Motifs de demande de dissolution par un tribunal. La commission avait également demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats, qui accorde à toute partie concernée ou à 50 pour cent du nombre total des membres du syndicat ou de l’association d’employeurs le droit de déposer au tribunal du travail une demande de dissolution. Observant que les modifications de 2019 à la loi sur les syndicats ne modifiaient pas la disposition en question et notant que les membres pouvaient toujours décider de quitter le syndicat, la commission avait rappelé sa précédente observation, à savoir que la seule manière pour les membres de demander la dissolution devait être celle prévue dans les statuts de l’organisation. Notant que le gouvernement ne formule pas de commentaires supplémentaires à cet égard, la commission le prie de nouveau de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats afin de laisser aux statuts et règlements des syndicats ou des associations d’employeurs le soin de déterminer la procédure de dissolution par leurs membres.

Application de la convention dans la pratique

Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans ses commentaires précédents, la commission avait rappelé combien il était important de veiller au bon fonctionnement du système judiciaire en tant que garantie contre l’impunité et moyen efficace de protéger les droits syndicaux des travailleurs pendant les conflits du travail, ainsi que de répondre aux vives préoccupations soulevées quant à l’indépendance du pouvoir judiciaire et son effet sur l’application de la convention. Elle s’était également félicitée de l’engagement du gouvernement à renforcer le Conseil d’arbitrage et avait voulu croire qu’il resterait facilement accessible et continuerait à jouer un rôle important dans le traitement des conflits collectifs et que les éventuelles mesures nécessaires seraient prises en vue de l’application effective de ses sentences lorsqu’elles sont contraignantes. La commission note avec intérêt l’indication du gouvernement selon laquelle la nouvelle modification apportée à la loi sur le travail a étendu la compétence du Conseil d’arbitrage pour qu’il entende également les conflits individuels et la réaffirmation du gouvernement de son engagement ferme à soutenir les activités du conseil et à garantir la pérennité de cette institution. Elle note aussi qu’il signale qu’en ce qui concerne les décisions du Conseil d’arbitrage, les parties au différend sont priées de choisir dès le début si la sentence est ou non contraignante et en cas de non-respect d’une sentence contraignante, la partie concernée peut déposer plainte auprès du tribunal compétent pour qu’il fasse appliquer la décision. Soulignant l’importance de l’indépendance du pouvoir judiciaire, la commission invite le gouvernement à continuer de fournir des informations sur le fonctionnement du Conseil d’arbitrage, notamment sur le nombre et la nature des litiges portés devant lui et sur le niveau de respect des sentences du Conseil d’arbitrage qui ne sont pas contraignantes, ainsi que sur le recours aux tribunaux pour garantir que les sentences du conseil, lorsqu’elles sont contraignantes, sont dûment exécutées, y compris le nombre de décisions de justice rendues à cette fin.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. Conditions d'enregistrement. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, dans son rapport, la mission de contacts directs (DCM) de mars 2017 soulignait les préoccupations exprimées par des organisations de travailleurs en raison des conditions requises pour obtenir et conserver leur enregistrement, et de leur application dans la pratique, y compris les allégations de refus arbitraire de demandes d’enregistrement (par exemple, en raison de simples fautes de frappe) et d'introduction par voie réglementaire de nouvelles conditions non prévues par la loi (par exemple des informations biographiques détaillées sur les dirigeants syndicaux et leur famille ou une liste détaillée de tous les travailleurs participant aux élections). La commission avait prié le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires: i) pour garantir que la procédure d'enregistrement soit menée rapidement de manière simple, objective et transparente, sans qu'il y ait de discrétion ou d'autorisation préalable; et ii) en large consultation avec les organisations de travailleurs, pour supprimer les conditions qui ne sont pas indispensables à l'enregistrement, mais qui peuvent dissuader d’engager la procédure d’enregistrement ou la compliquer, et pour modifier, le cas échéant, et évaluer l'application de la loi sur les syndicats (LTU) et de son règlement sur l'enregistrement à cet égard. La commission note que le gouvernement informe que le 13 décembre 2018, il a organisé un forum syndical sur la mise en œuvre de la LTU pour discuter des difficultés relatives à l'enregistrement des syndicats. En conséquence, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a émis l'instruction no 39/18, qui enjoint à tous les départements chargés de l'enregistrement des organisations de faciliter le processus comme suit: i) ne pas exiger de renseignements sur la situation familiale des dirigeants syndicaux; ii) ne pas exiger immédiatement les cartes d’emploi des travailleurs ni de preuve d’adhésion à la caisse nationale de sécurité sociale et permettre que ces documents soient fournis dans les 45 jours suivant la date de réception de l'enregistrement; et iii) permettre au personnel administratif des fédérations ou confédérations d'aider à l'enregistrement des syndicats locaux qui leur sont affiliés. Le gouvernement ajoute que 72 inspecteurs du travail ont participé à une formation sur les procédures d'enregistrement. Le gouvernement informe qu'après l'adoption de la loi sur les syndicats en 2016 et jusqu'au premier semestre de 2019, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a enregistré 1 419 nouveaux syndicats. Selon le gouvernement, cela montre que le nombre d'enregistrements a été multiplié par quatre (par rapport aux enregistrements effectués avant l’adoption de la loi - par exemple, en 2015, seuls 238 nouveaux syndicats avaient été enregistrés) et que cette loi ne restreint pas la liberté syndicale. En outre, le gouvernement indique que le 31 mai 2019, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a publié l'instruction n° 53/19, demandant aux départements compétents de revoir les documents exigés pour les fédérations et confédérations de syndicats de travailleurs, et de supprimer les conditions suivantes: présentation des cartes de membre et de la liste des travailleurs (il suffit de fournir la liste des membres qui ont payé les cotisations, assortie de la confirmation de l’employeur); actualisation de la liste des syndicats et des fédérations qui sont membres; présentation de tout rapport financier et rapport d'activité si le syndicat ou la fédération les ont déjà présentés à leurs membres et en ont envoyé une copie au ministère du Travail et de la Formation professionnelle; et notification de tout compte bancaire des syndicats ou fédérations (si les syndicats ou fédérations ont déjà notifié leurs comptes bancaires au ministère du Travail et de la Formation professionnelle). La commission se félicite des mesures prises pour faciliter la procédure d'enregistrement et invite le gouvernement à continuer d'évaluer son fonctionnement en consultation avec les organisations de travailleurs, en vue d'envisager toute mesure supplémentaire nécessaire pour que l'enregistrement fonctionne comme une simple formalité qui n'implique aucun pouvoir discrétionnaire ni autorisation préalable.
Articles 2 et 3. Audits financiers et maintien de l’enregistrement. La commission observe en outre que les amendements de 2019 de la loi sur les syndicats prévoient: i) un nouvel article 27 exigeant des organisations qu’elles présentent non seulement un état financier à leurs membres, mais aussi qu’elles le fassent vérifier par une entreprise indépendante à la demande d’un donateur ou d’un certain nombre de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations); et de la même façon; ii) un nouvel article 17 sur le maintien de l’enregistrement qui exige non seulement la présentation des états financiers annuels et des rapports d’activité, mais également leur vérification par une entreprise indépendante, à la demande d’un donateur ou d’un certain nombre de ses membres (10 pour cent pour les syndicats locaux et 5 pour cent pour les fédérations ou confédérations). La commission estime que ces dispositions pourraient exposer les syndicats à des demandes fantaisistes de vérification, ce qui générerait des frais importants pour conserver leur enregistrement. De tels audits financiers ne doivent être imposés que s’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi (ce qui ne devrait pas enfreindre les principes de la liberté syndicale tels que consacrés dans la convention), comme des allégations justifiées de détournement de fonds, ou de manque de légitimité ou d’indépendance. La commission prie le gouvernement, en consultation avec les organisations représentatives concernées, de revoir les articles 17 et 27 de la loi sur les syndicats de sorte que la vérification des états financiers et des rapports d’activité n’ait lieu que lorsqu’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi.
Conditions de quorum ou de scrutin pour certaines décisions dans les statuts d’un syndicat. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle les conditions prévues pour les statuts des syndicats à l’article 13 de la loi sur les syndicats (qui fixe un quorum à la majorité absolue pour les décisions sur la grève et sur la modification des statuts, ainsi que pour les assemblées générales des syndicats, et un vote à la majorité absolue pour la décision de faire grève) n’obligeaient pas de participer personnellement aux réunions, et les syndicats pouvaient choisir d’autres moyens appropriés pour convoquer une réunion et déterminer les conditions de participation à la réunion, conformément à leurs statuts, à condition que le quorum fixé soit atteint. De plus, le gouvernement indiquait que les malentendus concernant l’application de cette disposition avaient été dissipés au cours de l’atelier tripartite du 24 mars 2017, mais que des améliorations seraient possibles en procédant à d’autres consultations. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que depuis le dernier atelier du 24 mars 2017, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’a pas reçu de demandes relatives à l’application de l’article 13 de la loi sur les syndicats et que le forum syndical annuel est organisé pour revoir la mise en œuvre de cette loi. Prenant bonne note des explications fournies, la commission s’attend à ce que le gouvernement continue à prendre les mesures nécessaires, notamment dans le contexte d’une nouvelle révision de la loi sur les syndicats, pour préciser l’application des conditions de quorum et permettre aux syndicats de déterminer librement dans leurs statuts ou règlements d’autres moyens qu’une présence effective (procuration ou délégation) pour atteindre le quorum fixé, y compris en ce qui concerne les organisations de niveau supérieur.
Article 3. Droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action. Dans ses commentaires précédents, la commission avait fait référence à la nécessité de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum visant à protéger les installations et les équipements dans une entreprise où une grève a lieu, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle est habilité à déterminer le service minimum en question. La commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de l’article 326(2) de la loi sur le travail, en donnant notamment des exemples de sanctions imposées aux travailleurs pour faute grave. La commission note que le gouvernement indique que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a consulté les parties concernées sur l’application de l’article 326 de la loi sur le travail lors de l’élaboration d’un règlement pour déterminer le service minimum dans une entreprise où une grève a lieu. La commission se félicite que le gouvernement indique qu’il va solliciter l’assistance technique du BIT pour organiser une consultation tripartite sur le projet de règlement sur ce point en 2020. Rappelant ses précédentes recommandations, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard, y compris sur l’application dans la pratique de l’article 326 de la loi sur le travail.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait également noté que: i) la Confédération syndicale internationale (CSI) affirmait qu’il est courant de remplacer des travailleurs et de prononcer des injonctions pour empêcher une action revendicative, même si les syndicats ont respecté toutes les procédures; et ii) la mission de contacts directs avait observé que, alors que de nombreuses organisations de travailleurs affirmaient que les grèves faisaient souvent l’objet d’injonctions, même lorsque toutes les conditions requises par la loi avaient été pleinement respectées, et donnaient lieu à des licenciements ou à des sanctions pénales si elles étaient menées malgré tout, le gouvernement et les employeurs affirmaient que la plupart des grèves, sinon toutes, ne remplissaient pas entièrement les conditions prévues par la loi. Le gouvernement affirme dans son rapport que: i) les injonctions sont émises pour protéger les propriétés privées, ainsi que le bien-être et la vie des travailleurs; ii) des injonctions ne sont jamais émises contre des grèves correctement menées, dans le respect de la loi, mais uniquement lorsque la grève est illégale et exigent alors des travailleurs qu’ils reprennent le travail dans les 48 heures, faute de quoi ils sont considérés comme ayant commis une faute grave et peuvent être licenciés; iii) le manque d’application effective de la législation et des règlements concernés conduit de plus en plus de dirigeants syndicaux opportunistes à organiser des grèves illégales dans leur propre intérêt, ce qui fragilise les efforts déployés pour mettre en place des relations professionnelles constructives et pacifiques (à titre d’exemple, le gouvernement affirme que des dirigeants syndicaux ont menacé des propriétaires d’usine de faire grève s’ils ne cédaient pas à leurs revendications excessives, attitude que le gouvernement assimile à de l’extorsion de fonds); et iv) 99 pour cent des grèves ne respectent pas au moins une des conditions prévues par la loi. La commission note également que, dans ses observations, la CSI allègue que des grèves ont été violemment réprimées par des criminels engagés à cette fin, que des travailleurs grévistes ont été massivement licenciés et que des dirigeants syndicaux ont été placés en détention pour avoir organisé une grève dans le secteur de l’habillement. La commission observe donc que la réponse du gouvernement et les observations de la CSI confirment l’existence de problèmes majeurs et d’importantes difficultés entourant la légalité de l’exercice des actions revendicatives dans le pays. Regrettant le manque de progrès à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement d’engager un dialogue tripartite approfondi sur les questions soulevées à propos de la légalité des actions revendicatives afin de réexaminer la réglementation existante et son application dans la pratique, et de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’exercice légitime et pacifique du droit de grève.
Capacité des syndicats de représenter leurs membres. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, dans le cadre de l’application de la feuille de route et de l’élaboration de prakas (réglementation), pour s’assurer que les organisations n’ayant pas le statut d’organisation la plus représentative ne seront pas privées des moyens essentiels pour défendre les intérêts professionnels de leurs membres, par exemple en présentant des réclamations en leur nom et en les représentant dans des différends (par exemple devant le conseil d’arbitrage), y compris en tirant parti de leur affiliation à des organisations de plus haut niveau. La commission note avec intérêt que le gouvernement indique que, pour éviter toute inquiétude et tout malentendu: i) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a émis la prakas no 303 pour préciser que les syndicats minoritaires peuvent représenter leurs membres lors de conflits du travail individuels et collectifs ne découlant pas d’une convention collective; et ii) l’article 59 de la loi sur les syndicats a été modifié pour disposer explicitement que les syndicats de travailleurs minoritaires peuvent représenter leurs membres lors de la résolution de conflits du travail individuels et collectifs ne découlant pas d’une convention collective. La commission note également que le gouvernement fournit des informations statistiques sur la présentation de réclamations devant le conseil d’arbitrage: en 2017, sur 50 conflits collectifs du travail, les travailleurs étaient représentés par un syndicat disposant du statut d’organisation la plus représentative dans 6 cas, ils l’étaient par des syndicats minoritaires dans 25 cas, et dans 9 cas, ils étaient représentés par des représentants de travailleurs; en 2018, sur 59 conflits collectifs du travail, les travailleurs étaient représentés par un syndicat disposant du statut d’organisation la plus représentative dans 2 cas, ils l’étaient par des syndicats minoritaires dans 42 cas et, dans 15 cas, ils étaient représentés par des représentants de travailleurs; et du 1er janvier au 31 mai 2019, sur 43 conflits collectifs du travail, les travailleurs étaient représentés par un syndicat disposant du statut d’organisation la plus représentative dans 1 cas, ils l’étaient par des syndicats minoritaires dans 30 cas et, dans 12 cas, ils étaient représentés par des représentants de travailleurs.

Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note des observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 21 septembre 2020, alléguant que les modifications de la loi sur les syndicats, adoptées en décembre 2019, qui sont examinées dans ce commentaire, n’ont pas permis de mettre la loi sur les syndicats en conformité avec la convention.
La commission prend note, en outre, des observations de l’Internationale de l’éducation, reçues le 1er octobre 2020, dénonçant l’arrestation de cinq syndicalistes en lien avec leurs activités, dont le président de la Confédération cambodgienne des syndicats (CCU), ainsi qu’une attaque contre le président de l’Association indépendante des enseignants cambodgiens (CITA) le 10 août 2020. Rappelant que les droits syndicaux ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de toute violence et d’intimidation, et dans le cadre d’un système qui garantit le respect effectif des libertés civiles, la commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à propos de ces graves allégations.
La commission a procédé à l’examen de l’application de la convention sur la base des observations reçues des partenaires sociaux cette année (voir questions législatives), ainsi que sur la base des informations dont elle disposait en 2019.
La commission prend note des commentaires par lesquels le gouvernement répond aux observations formulées en 2016 et en 2017 par la CSI, y compris de l’indication de la suppression de la loi promulguée des dispositions du projet de loi sur les salaires minima que la CSI remettait en cause, alléguant qu’elles interdisaient des activités syndicales légitimes. La commission prend par ailleurs note des observations soumises par la CSI le 1er septembre 2019 sur des questions faisant l’objet du présent commentaire, ainsi que sur des allégations de répression violente de grèves par des criminels spécialement engagés à cette fin et de détention de dirigeants syndicaux qui ont organisé des actions de grève dans le secteur de l’habillement. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.

Droits syndicaux et libertés publiques

Meurtres de syndicalistes. S’agissant de la recommandation qu’elle fait depuis longtemps de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), la commission note que le gouvernement indique une fois de plus que les ministères et les institutions concernés travaillent sur ces cas, mais leur ancienneté et le manque de collaboration de la famille de M. Vichea compliquent encore l’enquête. Le gouvernement déclare également que, pour que l’enquête aboutisse, toutes les parties impliquées, y compris les familles des victimes, doivent entièrement coopérer et indique que l’enquête a été présentée lors de la réunion annuelle de la Commission nationale chargée d’examiner la mise en œuvre des conventions internationales du travail ratifiées par le Cambodge (NCRILC). La commission doit exprimer une fois de plus sa profonde préoccupation face à l’absence de résultats concrets concernant les enquêtes, même en gardant à l’esprit le manque de coopération des familles des victimes, et la commission renvoie aux conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale lors de son examen du cas no 2318 (voir 391e rapport, octobre 2019). Rappelant la nécessité de conclure les enquêtes et de traduire les auteurs et les instigateurs de ces crimes en justice, la commission prie à nouveau instamment les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer la procédure d’enquête.
Incidents durant les manifestations de janvier 2014. En ce qui concerne les syndicalistes faisant l’objet de procédures pénales pour les incidents survenus au cours des manifestations de janvier 2014, la commission note avec intérêt l’indication du gouvernement selon laquelle les six dirigeants syndicaux qui avaient été condamnés à une peine de deux ans et demi de prison avec sursis et au versement collectif d’une indemnité de 8 750 dollars des États-Unis ont été acquittés de tous les chefs d’accusation par la Cour d’appel, le 28 mai 2019, à la suite du pourvoi en appel du premier jugement interjeté avec l’assistance juridique du ministère du Travail et de la Formation professionnelle et du ministère de la Justice. La commission note également l’indication du gouvernement selon laquelle: a) en ce qui concerne les autres syndicalistes faisant encore l’objet de procédures judiciaires, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le ministère de la Justice ont mis en place un groupe de travail qui a demandé aux syndicats de fournir des informations sur leurs cas pour que les deux ministères puissent suivre les affaires en vue d’accélérer leur résolution (jusqu’à présent 80 pour cent des affaires pénales engagées contre des syndicalistes ont été résolues); b) sur un total de 121 affaires pénales identifiées impliquant des syndicalistes, 71 affaires ont été résolues (des verdicts ont été prononcés dans 27 cas, 13 cas ont été classés sans suite par le procureur et les poursuites ont été abandonnées par le juge chargé de l’enquête dans 23 cas), 33 affaires font toujours l’objet d’une procédure judiciaire et 17 affaires n’ont pas trait à la liberté syndicale ou aux droits au travail, mais ont également été résolues; et c) sur les 19 affaires civiles, 11 ont été résolues (des verdicts ont été prononcés dans 9 cas et les poursuites ont été abandonnées dans 2 cas) et la procédure judiciaire est en cours pour 8 affaires (dont 2 ne sont pas liées à la liberté syndicale ou aux droits au travail). La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les procédures en cours, en particulier sur toute décision rendue, et de s’efforcer de veiller à ce qu’aucune poursuite criminelle ne soit entamée ni aucune sanction imposée pour l’exercice pacifique d’activités syndicales.
Formation des forces de police en ce qui concerne les actions collectives et de protestation. Dans ses commentaires précédents, rappelant que l’intervention de la police devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public et que les autorités compétentes devraient recevoir des instructions adéquates pour éviter l’écueil d’un usage disproportionné de la force lorsqu’elles tentent de contrôler des manifestations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public, la commission avait encouragé le gouvernement à envisager de solliciter l’assistance technique du Bureau en rapport avec la formation des forces de police dans le but, par exemple, d’élaborer des principes directeurs, un code de bonnes pratiques ou un manuel sur l’attitude à avoir lors d’actions collectives et de protestation. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle: i) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a coopéré avec le ministère de l’Intérieur pour préparer des documents destinés à la formation des forces de police afin de veiller au plein respect des droits syndicaux; ii) le 18 décembre 2018, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a envoyé un courrier au BIT pour solliciter son assistance technique afin de prodiguer une formation aux forces de police; et iii) en avril 2019, des représentants du ministère ont rencontré des fonctionnaires du BIT pour préparer la formation destinée à la police nationale et sont convenus d’organiser quatre formations des formateurs, en coopération avec le ministère de l’Intérieur et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, qui auront lieu au second semestre de 2019. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur l’évolution de la situation à cet égard, y compris en ce qui concerne l’achèvement des quatre cours de formation, leur durée, le nombre de participants et les sujets particuliers couverts.

Questions législatives

La commission prend bonne note des informations fournies par le gouvernement à propos de la procédure de préparation des amendements à la loi sur les syndicats (LTU), en consultation avec les partenaires sociaux. Le gouvernement indique que: i) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a soumis un premier projet d’amendement à la consultation des mandants tripartites; ii) les organisations d’employeurs et de travailleurs ont présenté leurs commentaires par écrit; iii) deux ateliers consultatifs tripartites nationaux ont eu lieu le 25 avril 2019 et le 2 août 2019, avec le soutien technique du BIT, au cours desquels les partenaires sociaux ont pu ajouter des commentaires; iv) le 9 août 2019, un projet final a été présenté au Conseil des ministres pour ensuite le soumettre à l’Assemblée nationale pour examen et adoption d’ici la fin de 2019; et v) entre temps, plusieurs réglementations (prakas) ont été adoptées pour simplifier la mise en œuvre de la loi sur les syndicats, notamment pour ce qui est de l’enregistrement des syndicats, des fédérations et des confédérations. La commission observe que le projet de loi a été approuvé par l’Assemblée nationale le 26 novembre 2019 et promulguée le 19 décembre 2019.
Article 2 de la convention. Droits des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. Dans ses commentaires précédents, la commission avait instamment prié le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires – y compris les enseignants – qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, puissent pleinement bénéficier de leur liberté d’association telle que conférée par la convention et que la législation soit modifiée en conséquence. La commission note que, bien que le gouvernement ait indiqué lors de sa présentation, en juin 2019, du Rapport sur l’évolution de la mise en œuvre des recommandations de l’OIT à propos de la liberté syndicale qu’il continuait d’organiser des ateliers consultatifs et de finaliser le projet d’amendement à la législation, aucun amendement n’a été préparé à ce propos. Dans son rapport, le gouvernement ne fait que répéter qu’il estime que la liberté syndicale est garantie à tous les travailleurs par le biais de deux textes de loi: i) la loi sur les syndicats, qui s’applique au secteur privé, y compris aux travailleurs domestiques (les amendements feront explicitement référence aux travailleurs domestiques à l’article 3 de la loi sur les syndicats relatif au champ d’application de la loi), les enseignants qui ne sont pas fonctionnaires et les travailleurs de l’économie informelle qui répondent aux critères de cette loi pour la création d’un syndicat; et ii) la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales qui prévoit le droit des fonctionnaires, y compris les enseignants qui ont maintenant un tel statut, de se syndiquer.
La commission se doit de répéter que certaines dispositions de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales contreviennent aux droits que la convention reconnaît aux fonctionnaires en matière de liberté syndicale, car elle ne confère pas aux associations de fonctionnaires le droit de rédiger des statuts et un règlement, le droit d’élire des représentants, le droit d’organiser des activités et de formuler des programmes sans l’ingérence des autorités publiques ni le droit de s’affilier à des fédérations ou confédérations, y compris à l’échelon international, et soumet l’enregistrement de ces associations à l’autorisation du ministère de l’Intérieur. En outre, la commission avait noté que les organisations et associations de travailleurs étaient particulièrement inquiètes face: i) au manque de protection des droits syndicaux des enseignants (mentionnant en particulier les sanctions et menaces contre des enseignants qui cherchent à s’organiser); et ii) aux difficultés rencontrées par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle en général lorsqu’ils veulent créer des syndicats ou s’y affilier, du fait que la loi sur les syndicats préconise un modèle de syndicat d’entreprise, dont les conditions sont très difficiles à remplir pour ces travailleurs, et n’autorise pas la création de syndicats par secteur ou profession. De la même façon, elle avait pris note que la CSI affirmait que l’absence de toute structure de représentation sectorielle se traduisait par la privation du droit de s’organiser pour des centaines de milliers de travailleurs de l’économie informelle. Regrettant l’absence continue de progrès à cet égard, la commission se doit une fois de plus de prier instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires, y compris les enseignants, qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, puissent pleinement bénéficier de leur liberté d’association telle que conférée par la convention et que la législation soit modifiée en conséquence. Elle encourage en outre le gouvernement à promouvoir la jouissance pleine et effective de ces droits par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle et, à cette fin, à soumettre à des consultations tripartites la possibilité d’autoriser la formation de syndicats par secteur ou profession.
Article 3. Droit d’élire librement des représentants. Conditions à respecter pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des syndicats. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats qui fixent les conditions suivantes pour voter: être candidat à une élection ou occuper un poste de direction ou de gestion dans une organisation d’employeurs ou de travailleurs, avoir atteint l’âge de 18 ans révolus, savoir lire et écrire, et signer une déclaration attestant de n’avoir jamais été condamné pour une infraction pénale. La commission note avec satisfaction que les modifications apportées en 2019 à la loi sur les syndicats ont supprimé les conditions relatives à la déclaration attestant de n’avoir jamais été condamné pour une infraction pénale et, pour les ressortissants cambodgiens, l’obligation de savoir lire et écrire. Toutefois, la commission note que les articles 20 et 21 modifiés imposent toujours l’obligation de savoir lire et écrire pour les ressortissants étrangers. En outre, la commission observe que les amendements de 2019 à la loi sur les syndicats ne modifient pas l’article 38 s’agissant de l’élection de représentants des travailleurs dans une entreprise ou un établissement. Comme la commission l’avait déjà noté dans ses commentaires précédents, cet article pose des problèmes analogues de compatibilité avec la convention. Rappelant ses commentaires précédents, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de cette loi afin de supprimer l’obligation de lire et d’écrire le khmer comme critère d’éligibilité des étrangers. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès à cet égard.
Article 4. Dissolution des organisations représentatives. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de modifier le paragraphe 2 de l’article 28 de la loi sur les syndicats qui prévoit la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement. La commission observe que les amendements de 2019 à la loi sur les syndicats prévoient toujours, au paragraphe 2 de l’article 28 de la loi, la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement, en incluant une condition supplémentaire: le versement intégral des salaires et autres prestations aux travailleurs. À cet égard, la commission estime que si le versement des salaires et des autres prestations peut en effet constituer une raison légitime pour un syndicat de rester en activité après la dissolution de l’entreprise concernée, il en existe d’autres (comme la défense d’autres revendications légitimes). Rappelant que la dissolution d’une organisation de travailleurs ou d’employeurs ne peut être décidée que dans le cadre des procédures définies par ses statuts ou par un jugement d’un tribunal, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 28 de la loi sur les syndicats en supprimant entièrement son paragraphe 2.
Motifs de demande de dissolution par un tribunal. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats, qui accorde à toute partie concernée ou à 50 pour cent du nombre total de membres du syndicat ou de l’association d’employeurs le droit de déposer au tribunal du travail une demande de dissolution. Observant que les amendements de 2019 à la loi sur les syndicats ne modifiaient pas la disposition en question, et notant que les membres peuvent toujours décider de quitter le syndicat, la commission doit à nouveau rappeler que la seule manière pour les membres de demander la dissolution doit être celle prévue dans les statuts de l’organisation. La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats pour laisser aux statuts et règlements des syndicats ou des associations d’employeurs le soin de déterminer la procédure de dissolution par leurs membres.
La commission avait aussi demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier le paragraphe (c) de l’article 29 de la loi sur les syndicats, qui prévoit qu’un syndicat ou une association d’employeurs est dissous par le tribunal du travail dans les cas où ses dirigeants, ses gestionnaires et les responsables de son administration sont reconnus coupables d’une faute grave ou d’un délit commis au nom du syndicat ou de l’association d’employeurs. La commission avait rappelé que, s’il s’avère que des représentants de syndicat se sont gravement méconduits ou ont commis des délits par des actes allant au-delà des limites de l’activité syndicale normale – y compris des actes commis pour le compte du syndicat –, ils peuvent être poursuivis en vertu des dispositions légales applicables et dans le respect des procédures judiciaires ordinaires, sans provoquer la dissolution du syndicat et le priver de toute possibilité d’action. La commission observe avec satisfaction que les amendements de 2019 ont supprimé le paragraphe susmentionné de la loi sur les syndicats.

Application de la convention dans la pratique

Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans ses commentaires précédents, la commission avait rappelé combien il était important de veiller au bon fonctionnement du système judiciaire en tant que sauvegarde contre l’impunité et moyen efficace de protection des droits des travailleurs à la liberté syndicale pendant des conflits du travail, ainsi que pour répondre aux vives préoccupations qui se sont exprimées quant à l’indépendance du pouvoir judiciaire et son effet sur l’application de la convention. Elle s’était félicitée de l’engagement du gouvernement à renforcer le conseil d’arbitrage et avait voulu croire qu’il resterait facilement accessible et continuerait à jouer son rôle important de traitement des conflits collectifs, et que les éventuelles mesures nécessaires seraient prises pour faire en sorte que ses sentences, lorsqu’elles ont force obligatoire, fussent dûment appliquées. La commission note que le gouvernement indique qu’il a supprimé le projet de loi sur la procédure relative aux tribunaux du travail et note avec intérêt que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a décidé de continuer de soutenir financièrement le conseil d’arbitrage et étudie la possibilité de tenter la résolution des conflits relatifs aux droits individuels au travail par son intermédiaire en 2020. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations à cet égard, y compris en ce qui concerne toute mesure prise pour veiller à ce que les sentences du conseil d’arbitrage qui ont force obligatoire soient dûment appliquées.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2019, publiée 109ème session CIT (2021)

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. Conditions d’enregistrement. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, dans son rapport, la mission de contacts directs soulignait les préoccupations exprimées par des organisations de travailleurs en raison des conditions requises pour obtenir et conserver leur enregistrement et de leur application dans la pratique. Ces organisations faisaient notamment état du rejet arbitraire de demandes d’enregistrement (par exemple en raison de simples fautes de frappe) et de nouvelles conditions requises, non prévues dans la loi (par exemple des renseignements biographiques détaillés sur les dirigeants syndicaux et leur famille, ou la liste détaillée de tous les travailleurs participant à des élections). La commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires: i) pour assurer que la procédure d’enregistrement est menée rapidement, d’une manière simple, objective et transparente ne comportant ni pouvoir discrétionnaire ni autorisation préalable; et ii) en procédant à une large consultation des organisations de travailleurs, pour supprimer les conditions qui ne sont pas indispensables à l’enregistrement, mais qui peuvent dissuader d’engager la procédure d’enregistrement ou la compliquer, et pour modifier, le cas échéant, et évaluer l’application de la loi sur les syndicats (LTU) et de son règlement sur l’enregistrement à cet égard. La commission note que le gouvernement indique que, le 13 décembre 2018, il a organisé un forum syndical sur l’application de la loi sur les syndicats pour discuter des difficultés relatives à l’enregistrement des syndicats. A la suite de ce forum, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a émis l’instruction no 39/18, ordonnant à tous les départements chargés de l’enregistrement des organisations de faciliter le processus comme suit: i) en n’exigeant pas de renseignements sur la situation familiale des dirigeants syndicaux; ii) en n’exigeant pas immédiatement les cartes d’emploi des travailleurs ni de preuve d’adhésion à la caisse nationale de sécurité sociale, et en permettant que ces documents leur soient remis ultérieurement, dans un délai de 45 jours après la date de la réception de l’enregistrement; et iii) en permettant au personnel administratif des fédérations ou des confédérations d’aider à l’enregistrement des syndicats locaux qui leur sont affiliés. Le gouvernement ajoute que 72 inspecteurs du travail ont participé à la formation sur les procédures d’enregistrement. Le gouvernement indique que depuis l’adoption de la loi sur les syndicats en 2016 et jusqu’au premier semestre de 2019, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a enregistré 1 419 nouveaux syndicats. Selon le gouvernement, ce chiffre indique que le nombre d’enregistrements a été multiplié par quatre (par rapport aux enregistrements effectués avant l’adoption de la loi – par exemple, en 2015, seulement 238 nouveaux syndicats avaient été enregistrés) et que la loi sur les syndicats ne limite pas la liberté syndicale. En outre, le gouvernement indique que, le 31 mai 2019, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a émis l’instruction no 53/19, demandant aux départements compétents de revoir les documents exigés de la part des fédérations et des confédérations de syndicats de travailleurs et de supprimer les conditions suivantes: la présentation des cartes de membre et de la liste des travailleurs (la présentation de la liste des membres qui ont payé leur cotisation, assortie de la confirmation de l’employeur, suffit); l’actualisation de la liste des syndicats et des fédérations membres; la présentation de tous les rapports financiers et d’activité si le syndicat ou la fédération les ont déjà présentés à leurs membres et en ont envoyé une copie au ministère du Travail et de la Formation professionnelle; et la notification de tous les comptes bancaires des syndicats ou des fédérations (si les syndicats ou les fédérations ont déjà notifié leurs comptes bancaires au ministère du Travail et de la Formation professionnelle). La commission salue les mesures adoptées pour faciliter la procédure d’enregistrement et invite le gouvernement à continuer d’évaluer son application en consultation avec les organisations de travailleurs pour envisager de nouvelles mesures afin de veiller à ce que l’enregistrement fonctionne comme une simple formalité et ne comporte aucun pouvoir discrétionnaire ni autorisation préalable.
Articles 2 et 3. Audits financiers et maintien de l’enregistrement. La commission observe que le projet d’amendement de la loi sur les syndicats contient: i) une disposition exigeant des organisations qu’elles présentent non seulement un état financier à leurs membres, mais aussi qu’elles le fassent vérifier par une entreprise indépendante à la demande d’un donateur ou d’un certain nombre de ses membres (10 pour cent pour les syndicats et 5 pour cent pour les fédérations); et de la même façon; ii) une disposition sur le maintien de l’enregistrement (art. 17 du projet) qui exige non seulement la présentation des états financiers annuels et des rapports d’activité, mais également leur vérification par une entreprise indépendante à la demande d’un donateur ou d’un certain nombre de ses membres (10 pour cent pour les syndicats et 5 pour cent pour les fédérations). La commission estime que ces dispositions pourraient exposer les syndicats à des demandes fantaisistes de vérification, ce qui générerait des frais importants pour conserver leur enregistrement. De tels audits financiers ne doivent être imposés que s’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi (ce qui ne devrait pas enfreindre les principes de la liberté syndicale tels que consacrés dans la convention), comme des allégations justifiées de détournement de fonds, ou de manque de légitimité ou d’indépendance. La commission prie le gouvernement, en consultation avec les organisations représentatives concernées, de revoir les conditions entourant le maintien de l’enregistrement prévues dans le projet d’amendement de la loi sur les syndicats de sorte que la vérification des états financiers et des rapports d’activité n’ait lieu que lorsqu’il y a de sérieux motifs de penser que les activités d’une organisation sont contraires à ses statuts ou à la loi.
Conditions de quorum ou de scrutin pour certaines décisions dans les statuts d’un syndicat. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle les conditions prévues pour les statuts des syndicats à l’article 13 de la loi sur les syndicats (qui fixe un quorum à la majorité absolue pour les décisions sur la grève et sur la modification des statuts, ainsi que pour les assemblées générales des syndicats, et un vote à la majorité absolue pour la décision de faire grève) n’obligeaient pas de participer personnellement aux réunions, et les syndicats pouvaient choisir d’autres moyens appropriés pour convoquer une réunion et déterminer les conditions de participation à la réunion, conformément à leurs statuts, à condition que le quorum fixé fût atteint. De plus, le gouvernement indiquait que les malentendus concernant l’application de cette disposition avaient été dissipés au cours de l’atelier tripartite du 24 mars 2017, mais que des améliorations seraient possibles en procédant à d’autres consultations. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que depuis le dernier atelier du 24 mars 2017, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’a pas reçu de demandes relatives à l’application de l’article 13 de la loi sur les syndicats et que le forum syndical annuel est organisé pour revoir la mise en œuvre de la loi. Prenant bonne note des explications fournies, la commission s’attend à ce que le gouvernement continuera à prendre les mesures nécessaires, notamment dans le contexte de la révision de la loi sur les syndicats, pour préciser l’application des conditions de quorum et permettre aux syndicats de déterminer librement dans leurs statuts ou règlements d’autres moyens (procuration ou délégation) pour ne pas obliger les votants à être présents et pour atteindre le quorum fixé, y compris en ce qui concerne les organisations de niveau supérieur.
Article 3. Droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action. Dans ses commentaires précédents, la commission avait fait référence à la nécessité de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum visant à protéger les installations et les équipements dans une entreprise où une grève a lieu, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle est habilité à déterminer le service minimum en question. La commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de l’article 326(2) de la loi sur le travail, en donnant en particulier des exemples de sanctions imposées aux travailleurs pour faute grave. Elle note que le gouvernement indique que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a consulté les parties concernées sur l’application de l’article 326 de la loi sur le travail lors de l’élaboration d’un règlement pour déterminer le service minimum dans une entreprise où une grève a lieu. La commission salue que le gouvernement indique qu’il va solliciter l’assistance technique du BIT pour organiser une consultation tripartite sur le projet de règlement sur ce point au début de 2020. Rappelant ses précédentes recommandations, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard, y compris sur l’application dans la pratique de l’article 326 de la loi sur le travail.
Dans ses commentaires précédents, la commission avait également noté que: i) la Confédération syndicale internationale (CSI) affirmait qu’il est courant de remplacer des travailleurs et de prononcer des injonctions pour empêcher une action revendicative, même si les syndicats ont respecté toutes les procédures; et ii) la mission de contacts directs avait observé que, alors que de nombreuses organisations de travailleurs affirmaient que les grèves faisaient souvent l’objet d’injonctions, même lorsque toutes les conditions requises par la loi avaient été pleinement respectées, et donnaient lieu à des licenciements ou à des sanctions pénales si elles étaient menées malgré tout, le gouvernement et les employeurs affirmaient que la plupart des grèves, sinon toutes, ne remplissaient pas entièrement les conditions prévues par la loi. Le gouvernement affirme dans son rapport que: i) les injonctions sont émises pour protéger les propriétés privées, ainsi que le bien-être et la vie des travailleurs; ii) des injonctions n’ont jamais été émises contre des grèves correctement menées, dans le respect de la loi, mais uniquement lorsque la grève est illégale et exigent alors des travailleurs qu’ils reprennent le travail dans les 48 heures; dans le cas contraire, il serait considéré qu’ils ont commis une faute grave et pourraient être licenciés; iii) le manque d’application effective de la législation concernée conduit de plus en plus de dirigeants syndicaux opportunistes à organiser des grèves illégales dans leur propre intérêt, ce qui fragilise les efforts déployés pour mettre en place des relations professionnelles constructives et pacifiques (à titre d’exemple, le gouvernement affirme que des dirigeants syndicaux ont menacé des propriétaires d’usine de faire grève s’ils ne cédaient pas à leurs revendications excessives, attitude que le gouvernement assimile à de l’extorsion de fonds); et iv) 99 pour cent des grèves ne respectent pas au moins une des conditions prévues par la loi. La commission note également que, dans ses observations, la CSI allègue que des grèves ont été violemment réprimées par des criminels spécialement engagés à cette fin, que des travailleurs grévistes ont été massivement licenciés et que des dirigeants syndicaux ont été placés en détention pour avoir organisé une grève dans le secteur de l’habillement. La commission observe donc que la réponse du gouvernement et les observations de la CSI confirment l’existence de problèmes majeurs et d’importantes difficultés entourant la légalité de l’exercice des actions revendicatives dans le pays. Regrettant le manque de progrès à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement d’engager un dialogue tripartite approfondi sur les questions soulevées à propos de la légalité des actions revendicatives afin de réexaminer la réglementation existante et son application dans la pratique, et de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’exercice légitime et pacifique du droit de grève.
Capacité des syndicats de représenter leurs membres. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, dans le cadre de l’application de la feuille de route et de l’élaboration de prakas (réglementation), pour s’assurer que les organisations n’ayant pas le statut d’organisation la plus représentative ne seront pas privées des moyens essentiels pour défendre les intérêts professionnels de leurs membres, par exemple en présentant des réclamations en leur nom et en les représentant dans des différends (par exemple devant le conseil d’arbitrage), y compris en tirant parti de leur affiliation à des organisations de plus haut niveau. La commission note avec intérêt que le gouvernement indique que, pour éviter toute inquiétude et tout malentendu: i) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a émis la prakas no 303 pour préciser que les syndicats minoritaires peuvent représenter leurs membres lors de conflits du travail individuels et collectifs ne découlant pas d’une convention collective; et ii) l’article 59 de la loi sur les syndicats va être modifié pour disposer explicitement que les syndicats de travailleurs minoritaires peuvent représenter leurs membres lors de la résolution de conflits du travail individuels et collectifs ne découlant pas d’une convention collective. Elle note également que le gouvernement fournit des informations statistiques sur la présentation de réclamations devant le conseil d’arbitrage: en 2017, sur 50 conflits collectifs du travail, les travailleurs étaient présentés par un syndicat disposant du statut d’organisation la plus représentative dans 6 cas, ils l’étaient par des syndicats minoritaires dans 25 cas et dans 9 cas, ils étaient représentés par des représentants de travailleurs; en 2018, sur 59 conflits collectifs du travail, les travailleurs étaient présentés par un syndicat disposant du statut d’organisation la plus représentative dans 2 cas, ils l’étaient par des syndicats minoritaires dans 42 cas et, dans 15 cas, ils étaient représentés par des représentants de travailleurs; et du 1er janvier au 31 mai 2019, sur 43 conflits collectifs du travail, les travailleurs étaient présentés par un syndicat disposant du statut d’organisation la plus représentative dans 1 cas, ils l’étaient par des syndicats minoritaires dans 30 cas et dans 12 cas, ils étaient représentés par des représentants de travailleurs. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard, y compris en ce qui concerne l’adoption de l’amendement à l’article 59 de la loi sur les syndicats.

Observation (CEACR) - adoptée 2019, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note des commentaires par lesquels le gouvernement répond aux observations formulées en 2016 et en 2017 par la Confédération syndicale internationale (CSI), y compris de l’indication de la suppression de la loi promulguée des dispositions du projet de loi sur les salaires minima que la CSI remettait en cause, alléguant qu’elles interdisaient des activités syndicales légitimes. La commission prend par ailleurs note des observations soumises par la CSI le 1er septembre 2019 sur des questions faisant l’objet du présent commentaire, ainsi que sur des allégations de répression violente de grèves par des criminels spécialement engagés à cette fin et de détention de dirigeants syndicaux qui ont organisé des actions de grève dans le secteur de l’habillement. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.

Droits syndicaux et libertés publiques

Meurtres de syndicalistes. S’agissant de la recommandation qu’elle fait depuis longtemps de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), la commission note que le gouvernement indique une fois de plus que les ministères et les institutions concernés travaillent sur ces cas, mais leur ancienneté et le manque de collaboration de la famille de M. Vichea compliquent encore l’enquête. Le gouvernement déclare également que, pour que l’enquête aboutisse, toutes les parties impliquées, y compris les familles des victimes, doivent entièrement coopérer et indique que l’enquête a été présentée lors de la réunion annuelle de la Commission nationale chargée d’examiner la mise en œuvre des conventions internationales du travail ratifiées par le Cambodge (NCRILC). La commission doit exprimer une fois de plus sa profonde préoccupation face à l’absence de résultats concrets concernant les enquêtes, même en gardant à l’esprit le manque de coopération des familles des victimes, et la commission renvoie aux conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale lors de son examen du cas no 2318 (voir 390e rapport, octobre novembre 2019). Rappelant la nécessité de conclure les enquêtes et de traduire les auteurs et les instigateurs de ces crimes en justice, la commission prie à nouveau instamment les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer la procédure d’enquête.
Incidents durant les manifestations de janvier 2014. En ce qui concerne les syndicalistes faisant l’objet de procédures pénales pour les incidents survenus au cours des manifestations de janvier 2014, la commission note avec intérêt l’indication du gouvernement selon laquelle les six dirigeants syndicaux qui avaient été condamnés à une peine de deux ans et demi de prison avec sursis et au versement collectif d’une indemnité de 8 750 dollars des Etats-Unis ont été acquittés de tous les chefs d’accusation par la Cour d’appel, le 28 mai 2019, à la suite du pourvoi en appel du premier jugement interjeté avec l’assistance juridique du ministère du Travail et de la Formation professionnelle et du ministère de la Justice. La commission note également l’indication du gouvernement selon laquelle: a) en ce qui concerne les autres syndicalistes faisant encore l’objet de procédures judiciaires, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le ministère de la Justice ont mis en place un groupe de travail qui a demandé aux syndicats de fournir des informations sur leurs cas pour que les deux ministères puissent suivre les affaires en vue d’accélérer leur résolution (jusqu’à présent 80 pour cent des affaires pénales engagées contre des syndicalistes ont été résolues); b) sur un total de 121 affaires pénales identifiées impliquant des syndicalistes, 71 affaires ont été résolues (des verdicts ont été prononcés dans 27 cas, 13 cas ont été classés sans suite par le procureur et les poursuites ont été abandonnées par le juge chargé de l’enquête dans 23 cas), 33 affaires font toujours l’objet d’une procédure judiciaire et 17 affaires n’ont pas trait à la liberté syndicale ou aux droits au travail, mais ont également été résolues; et c) sur les 19 affaires civiles, 11 ont été résolues (des verdicts ont été prononcés dans 9 cas et les poursuites ont été abandonnées dans 2 cas) et la procédure judiciaire est en cours pour 8 affaires (dont 2 ne sont pas liées à la liberté syndicale ou aux droits au travail). La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les procédures en cours, en particulier sur toute décision rendue, et de s’efforcer de veiller à ce qu’aucune poursuite criminelle ne soit entamée ni aucune sanction imposée pour l’exercice pacifique d’activités syndicales.
Formation des forces de police en ce qui concerne les actions collectives et de protestation. Dans ses commentaires précédents, rappelant que l’intervention de la police devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public et que les autorités compétentes devraient recevoir des instructions adéquates pour éviter l’écueil d’un usage disproportionné de la force lorsqu’elles tentent de contrôler des manifestations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public, la commission avait encouragé le gouvernement à envisager de solliciter l’assistance technique du Bureau en rapport avec la formation des forces de police dans le but, par exemple, d’élaborer des principes directeurs, un code de bonnes pratiques ou un manuel sur l’attitude à avoir lors d’actions collectives et de protestation. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle: i) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a coopéré avec le ministère de l’Intérieur pour préparer des documents destinés à la formation des forces de police afin de veiller au plein respect des droits syndicaux; ii) le 18 décembre 2018, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a envoyé un courrier au BIT pour solliciter son assistance technique afin de prodiguer une formation aux forces de police; et iii) en avril 2019, des représentants du ministère ont rencontré des fonctionnaires du BIT pour préparer la formation destinée à la police nationale et sont convenus d’organiser quatre formations des formateurs, en coopération avec le ministère de l’Intérieur et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, qui auront lieu au second semestre de 2019. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur l’évolution de la situation à cet égard, y compris en ce qui concerne l’achèvement des quatre cours de formation, leur durée, le nombre de participants et les sujets particuliers couverts.

Questions législatives

La commission prend bonne note des informations fournies par le gouvernement à propos de la procédure de préparation des amendements à la loi sur les syndicats (LTU), en consultation avec les partenaires sociaux. Le gouvernement indique que: i) le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a soumis un premier projet d’amendement à la consultation des mandants tripartites; ii) les organisations d’employeurs et de travailleurs ont présenté leurs commentaires par écrit; iii) deux ateliers consultatifs tripartites nationaux ont eu lieu le 25 avril 2019 et le 2 août 2019, avec le soutien technique du BIT, au cours desquels les partenaires sociaux ont pu ajouter des commentaires; iv) le 9 août 2019, un projet final a été présenté au Conseil des ministres pour ensuite le soumettre à l’Assemblée nationale pour examen et adoption d’ici la fin de 2019; et v) entre temps, plusieurs réglementations (prakas) ont été adoptées pour simplifier la mise en œuvre de la loi sur les syndicats, notamment pour ce qui est de l’enregistrement des syndicats, des fédérations et des confédérations. La commission observe que le projet de loi a été approuvé par l’Assemblée nationale le 26 novembre 2019. La commission prie le gouvernement de fournir une copie des modifications adoptées à la loi sur les syndicats.
Article 2 de la convention. Droits des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. Dans ses commentaires précédents, la commission avait instamment prié le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires – y compris les enseignants – qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, puissent pleinement bénéficier de leur liberté d’association telle que conférée par la convention et que la législation soit modifiée en conséquence. La commission note que, bien que le gouvernement ait indiqué lors de sa présentation, en juin 2019, du Rapport sur l’évolution de la mise en œuvre des recommandations de l’OIT à propos de la liberté syndicale qu’il continuait d’organiser des ateliers consultatifs et de finaliser le projet d’amendement à la législation, aucun amendement n’a été préparé à ce propos. Dans son rapport, le gouvernement ne fait que répéter qu’il estime que la liberté syndicale est garantie à tous les travailleurs par le biais de deux textes de loi: i) la loi sur les syndicats, qui s’applique au secteur privé, y compris aux travailleurs domestiques (les amendements feront explicitement référence aux travailleurs domestiques à l’article 3 de la loi sur les syndicats relatif au champ d’application de la loi), les enseignants qui ne sont pas fonctionnaires et les travailleurs de l’économie informelle qui répondent aux critères de cette loi pour la création d’un syndicat; et ii) la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales qui prévoit le droit des fonctionnaires, y compris les enseignants qui ont maintenant un tel statut, de se syndiquer.
La commission se doit de répéter que certaines dispositions de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales contreviennent aux droits que la convention reconnaît aux fonctionnaires en matière de liberté syndicale, car elle ne confère pas aux associations de fonctionnaires le droit de rédiger des statuts et un règlement, le droit d’élire des représentants, le droit d’organiser des activités et de formuler des programmes sans l’ingérence des autorités publiques ni le droit de s’affilier à des fédérations ou confédérations, y compris à l’échelon international, et soumet l’enregistrement de ces associations à l’autorisation du ministère de l’Intérieur. En outre, la commission avait noté que les organisations et associations de travailleurs étaient particulièrement inquiètes face: i) au manque de protection des droits syndicaux des enseignants (mentionnant en particulier les sanctions et menaces contre des enseignants qui cherchent à s’organiser); et ii) aux difficultés rencontrées par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle en général lorsqu’ils veulent créer des syndicats ou s’y affilier, du fait que la loi sur les syndicats préconise un modèle de syndicat d’entreprise, dont les conditions sont très difficiles à remplir pour ces travailleurs, et n’autorise pas la création de syndicats par secteur ou profession. De la même façon, elle avait pris note que la CSI affirmait que l’absence de toute structure de représentation sectorielle se traduisait par la privation du droit de s’organiser pour des centaines de milliers de travailleurs de l’économie informelle. Regrettant l’absence de progrès à cet égard, la commission se doit une fois de plus de prier instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires, y compris les enseignants, qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, puissent pleinement bénéficier de leur liberté d’association telle que conférée par la convention et que la législation soit modifiée en conséquence. Elle encourage en outre le gouvernement à promouvoir la jouissance pleine et effective de ces droits par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle et, à cette fin, à soumettre à des consultations tripartites la possibilité d’autoriser la formation de syndicats par secteur ou profession.
Article 3. Droit d’élire librement des représentants. Conditions à respecter pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des syndicats. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats qui fixent les conditions suivantes pour voter: être candidat à une élection ou occuper un poste de direction ou de gestion dans une organisation d’employeurs ou de travailleurs, avoir atteint l’âge de 18 ans révolus, savoir lire et écrire, et signer une déclaration attestant de n’avoir jamais été condamné pour une infraction pénale. La commission note avec intérêt que les amendements de la loi sur les syndicats que le gouvernement a présenté suppriment les conditions relatives à la déclaration attestant de n’avoir jamais été condamné pour une infraction pénale et, pour les ressortissants cambodgiens, l’obligation de savoir lire et écrire. Toutefois, la commission note que le projet d’amendement présenté impose toujours l’obligation de savoir lire et écrire pour les ressortissants étrangers (art. 20 et 21). En outre, la commission observe que le projet présenté n’inclut pas de proposition visant à modifier l’article 38, relatif à l’élection de représentants des travailleurs dans une entreprise ou un établissement. Comme la commission l’avait déjà noté dans ses commentaires précédents, cet article est également incompatible avec la convention. Ayant dûment pris note du projet d’amendement, la commission rappelle ses commentaires précédents et s’attend à ce que, dans le cadre des consultations qu’il mène sur la modification de la loi sur les syndicats, le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de cette loi afin de supprimer l’obligation de lire et d’écrire le khmer comme critère d’éligibilité des étrangers. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès à cet égard.
Article 4. Dissolution des organisations représentatives. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier le paragraphe 2 de l’article 28 de la loi sur les syndicats qui prévoit la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement. La commission observe que le projet d’amendement de la loi sur les syndicats présenté par le gouvernement continue de prévoir, au paragraphe 2 de l’article 28 de la loi, la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement en y ajoutant une condition supplémentaire: le versement intégral des salaires et autres prestations aux travailleurs. A cet égard, la commission estime que si le versement des salaires et des autres prestations peut en effet constituer une raison légitime pour un syndicat de rester en activité après la dissolution de l’entreprise concernée, il en existe d’autres (comme la défense d’autres revendications légitimes). Rappelant que la dissolution d’une organisation de travailleurs ou d’employeurs ne peut être décidée que dans le cadre des procédures définies par ses statuts ou par un jugement d’un tribunal, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 28 de la loi sur les syndicats en supprimant entièrement son paragraphe 2.
Motifs de demande de dissolution par un tribunal. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats, qui accorde à toute partie concernée ou à 50 pour cent du nombre total de membres du syndicat ou de l’association d’employeurs le droit de déposer au tribunal du travail une demande de dissolution. Observant que le projet d’amendement de la loi sur les syndicats présenté par le gouvernement ne modifie pas la disposition en question, et que les membres peuvent toujours décider de quitter le syndicat, la commission doit à nouveau rappeler que la seule manière pour les membres de demander la dissolution doit être celle prévue dans les statuts de l’organisation. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats pour laisser aux statuts et règlements des syndicats ou des associations d’employeurs le soin de déterminer la procédure de dissolution par leurs membres.
La commission avait aussi demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier le paragraphe (c) de l’article 29 qui prévoit qu’un syndicat ou une association d’employeurs est dissous par le tribunal du travail dans les cas où ses dirigeants, ses gestionnaires et les responsables de son administration sont reconnus coupables d’une faute grave ou d’un délit commis au nom du syndicat ou de l’association d’employeurs. La commission avait rappelé que, s’il s’avère que des représentants de syndicat se sont gravement méconduits ou ont commis des délits par des actes allant au-delà des limites de l’activité syndicale normale – y compris des actes commis pour le compte du syndicat –, ils peuvent être poursuivis en vertu des dispositions légales applicables et dans le respect des procédures judiciaires ordinaires, sans provoquer la dissolution du syndicat et le priver de toute possibilité d’action. La commission observe avec intérêt que les amendements soumis par le gouvernement suppriment le paragraphe susmentionné de la loi sur les syndicats. La commission prie le gouvernement de fournir une copie de l’amendement supprimant le paragraphe c) de l’article 29 de la loi sur les syndicats.
Application de la convention dans la pratique
Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans ses commentaires précédents, la commission avait rappelé combien il était important de veiller au bon fonctionnement du système judiciaire en tant que sauvegarde contre l’impunité et moyen efficace de protection des droits des travailleurs à la liberté syndicale pendant des conflits du travail, ainsi que pour répondre aux vives préoccupations qui se sont exprimées quant à l’indépendance du pouvoir judiciaire et son effet sur l’application de la convention. Elle s’était félicitée de l’engagement du gouvernement à renforcer le conseil d’arbitrage et avait voulu croire qu’il resterait facilement accessible et continuerait à jouer son rôle important de traitement des conflits collectifs, et que les éventuelles mesures nécessaires seraient prises pour faire en sorte que ses sentences, lorsqu’elles ont force obligatoire, fussent dûment appliquées. La commission note que le gouvernement indique qu’il a supprimé le projet de loi sur la procédure relative aux tribunaux du travail et note avec intérêt que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a décidé de continuer de soutenir financièrement le conseil d’arbitrage et étudie la possibilité de tenter la résolution des conflits relatifs aux droits individuels au travail par son intermédiaire au début de 2020. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations à cet égard, y compris en ce qui concerne toute mesure prise pour veiller à ce que les sentences du conseil d’arbitrage qui ont force obligatoire soient dûment appliquées.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. Conditions d’enregistrement. La commission note que, dans son rapport, la mission de contacts directs a souligné les préoccupations exprimées par des organisations de travailleurs en raison des conditions requises pour obtenir et conserver leur enregistrement et de leur application dans la pratique. Ces organisations ont fait état notamment du rejet arbitraire de demandes d’enregistrement (par exemple en raison de fautes de frappe) et de nouvelles conditions requises, qui n’étaient pas prévues dans la loi, par le biais du prakas 249 (qui réglemente l’enregistrement d’organisations de travailleurs et d’associations d’employeurs), par exemple des renseignements biographiques détaillés sur les dirigeants syndicaux et leur famille, ou la liste détaillée de tous les travailleurs participant à des élections. Des syndicats ont considéré que ces questions étaient particulièrement problématiques, étant donné que la loi sur les syndicats dispose que seuls les syndicats enregistrés ont le droit de déployer des activités et que toute infraction est passible de sanction. La mission de contacts directs a noté que le gouvernement a reconnu l’existence d’une situation confuse en ce qui concerne le processus d’enregistrement, ainsi que la nécessité de donner des instructions (notamment pour préciser que les formulaires d’enregistrement qui sont délivrés ne sont pas obligatoires) et de former comme il convient les fonctionnaires responsables. La mission de contacts directs s’est félicitée de l’engagement du gouvernement à prendre en compte ces préoccupations et l’a encouragé, en consultant pleinement les partenaires sociaux, à modifier la réglementation relative à l’enregistrement afin de supprimer les conditions requises qui ne sont pas indispensables pour l’enregistrement, mais qui peuvent dissuader de demander l’enregistrement d’organisations de travailleurs ou le compliquer (par exemple l’obligation de fournir des renseignements biographiques détaillés des dirigeants et de leur famille, ou une liste détaillée des personnes participant à des élections), à ne prévoir que les moyens les plus simples et les plus accessibles pour procéder aux vérifications de forme, d’une manière compatible avec les principes de la liberté d’association, et à préciser aux autorités responsables et aux travailleurs que les formulaires types ne sont pas obligatoires. La commission prend dûment note de l’indication du gouvernement selon laquelle il organise des cours de formation pour les fonctionnaires chargés de mettre en œuvre la nouvelle réglementation, et pour les syndicats et les employeurs. Le gouvernement indique également que des consultations tripartites sont effectuées pour répondre aux préoccupations, surmonter les difficultés et dissiper les malentendus. Inversement, la commission note que la Confédération syndicale internationale (CSI) affirme que la nouvelle réglementation et sa mise en œuvre continuent à être utilisées pour empêcher les syndicats de déployer leurs activités normales en imposant des conditions excessives pour obtenir et conserver l’enregistrement (la CSI fait état par exemple d’obstacles administratifs au motif d’éléments mineurs, comme des fautes d’orthographe dans les documents, et affirme qu’une très grande proportion de syndicats n’ont pas été en mesure de satisfaire aux conditions requises pour maintenir leur enregistrement). De plus, la commission constate que le projet de feuille de route soumis par le gouvernement a l’OIT prévoit notamment l’organisation d’ateliers pour réexaminer et réviser la procédure d’enregistrement de syndicats. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires: i) pour assurer que la procédure d’enregistrement est menée rapidement, d’une manière simple, objective et transparente ne comportant ni pouvoir discrétionnaire ni autorisation préalable; et ii) en procédant à une large consultation des organisations de travailleurs, pour supprimer les conditions qui ne sont pas indispensables à l’enregistrement, mais qui peuvent dissuader d’engager la procédure d’enregistrement ou la compliquer, et pour modifier, le cas échéant, et évaluer l’application de la loi sur les syndicats et de son règlement sur l’enregistrement à cet égard.
Articles 2 et 3. Conditions de quorum ou de scrutin pour certaines décisions dans les statuts d’un syndicat. La commission prend note de l’indication suivante du gouvernement: les conditions prévues pour les statuts des syndicats à l’article 13 de la loi sur les syndicats (qui fixe un quorum à la majorité absolue pour les décisions sur la grève et sur la modification des statuts, ainsi que pour les assemblées générales des syndicats, et un vote à la majorité absolue pour la décision de faire grève) n’obligent pas de participer personnellement aux réunions, et les syndicats peuvent choisir d’autres moyens appropriés pour convoquer une réunion et déterminer les conditions de participation à la réunion, conformément à leurs statuts, à condition que le quorum fixé soit atteint. Le gouvernement indique en outre que les malentendus concernant l’application de cette disposition ont été dissipés au cours de l’atelier tripartite du 24 mars 2017, mais que des améliorations seraient possibles en procédant à d’autres consultations. Prenant dûment note des explications fournies, la commission veut croire que le gouvernement continuera à prendre les mesures nécessaires pour expliquer l’application des conditions de quorum et permettre aux syndicats de déterminer librement dans leurs statuts ou règlements des moyens (procuration ou délégation) pour ne pas obliger les votants à être présents et pour atteindre le quorum fixé, y compris en ce qui concerne les organisations de niveau supérieur.
Article 3. Droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action. Dans ses commentaires précédents, la commission s’était référée à la nécessité de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum visant à protéger les installations et les équipements dans une entreprise où une grève a lieu, le ministre du Travail est habilité à déterminer le service minimum en question. La commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de l’article 326(2) de la loi sur le travail, en donnant en particulier tout exemple de sanctions imposées aux travailleurs pour faute grave. Dans sa réponse, le gouvernement indique qu’il examine encore cette question et qu’il demande l’assistante technique du BIT. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard.
La commission note que, dans ses observations, la CSI affirme qu’il est courant de remplacer des travailleurs et de prononcer des injonctions pour empêcher une action revendicative, même si les syndicats ont respecté toutes les procédures. La commission note aussi que la mission de contacts directs a observé que, alors que de nombreuses organisations de travailleurs affirment que les grèves, même lorsque toutes les conditions requises par la loi ont été pleinement respectées, souvent, font l’objet d’injonctions et donnent lieu à des licenciements ou à des sanctions pénales si elles sont effectuées malgré tout, le gouvernement et les employeurs affirment que la plupart des grèves, sinon toutes, ne remplissent pas les conditions prévues par la loi. La commission prie le gouvernement d’engager un dialogue tripartite approfondi sur les questions soulevées à propos de la légalité des actions revendicatives afin de réexaminer la réglementation existante et son application dans la pratique, et de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’exercice légitime et pacifique du droit de grève.
Capacité des syndicats de représenter leurs membres. La commission note que la mission de contacts directs: i) a observé que la loi sur les syndicats empêche les syndicats n’ayant pas le statut de syndicat le plus représentatif de représenter leurs membres pour des questions revêtant un intérêt collectif, et a rappelé que, alors que la plupart des syndicats représentatifs peuvent bénéficier de droits de négociation exclusifs, les syndicats minoritaires devraient pouvoir représenter leurs membres en cas de réclamations au sein de l’entreprise ou dans des procédures de règlement des différends, y compris devant le conseil d’arbitrage; ii) a noté avec préoccupation combien cette disposition de la loi sur les syndicats a contribué à faire baisser sensiblement le nombre de cas soumis au conseil d’arbitrage depuis l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats; iii) a observé que la loi sur les syndicats a limité les capacités des organisations de travailleurs de haut niveau de représenter directement les travailleurs; et iv) a salué l’indication du gouvernement selon laquelle il traite actuellement les questions portant sur la reconnaissance du statut d’organisation la plus représentative aux syndicats, y compris en adoptant les réglementations nécessaires, et qu’il réexaminera le rôle accordé aux syndicats minoritaires. La commission note que la CSI exprime des préoccupations analogues dans ses observations. La CSI affirme que les nouvelles réglementations empêchent les syndicats minoritaires de représenter leurs membres dans un différend. La commission prend note aussi de l’indication suivante du gouvernement: dans le cadre de consultations tripartites, il élabore actuellement des réglementations (prakas) sur le statut de syndicat le plus représentatif, et le projet de feuille de route prévoit notamment l’élaboration de réglementations qui seront soumises à un examen tripartite et dont l’objectif est de donner des droits aux syndicats minoritaires pour représenter leurs membres dans des différends collectifs. Tout en rappelant que, en vertu de la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, les syndicats les plus représentatifs peuvent bénéficier de droits de négociation collective exclusifs, la commission prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, dans le cadre de l’application de la feuille de route et de l’élaboration de prakas (réglementation pertinente), pour s’assurer que les organisations n’ayant pas le statut d’organisation la plus représentative ne seront pas privées des moyens essentiels pour défendre les intérêts professionnels de leurs membres, par exemple en présentant des réclamations en leur nom et en les représentant dans des différends (par exemple devant le conseil d’arbitrage), y compris en tirant parti de leur affiliation à des organisations de haut niveau. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

La commission prend note des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 1er septembre 2017.
La commission prend note des commentaires par lesquels le gouvernement répond aux observations formulées en 2016 par la Confédération syndicale internationale (CSI) qui affirmait qu’un grand nombre de dirigeants et activistes syndicaux avaient été inculpés au pénal pour les activités syndicales qu’ils menaient depuis 2014, et dénonçait une augmentation du nombre des injonctions et ordres de réquisition délivrés contre des syndicats et des travailleurs pendant des conflits du travail dans le but d’entraver les activités des syndicats et les actions collectives. Le gouvernement déclare qu’il passe tous les cas en revue séparément afin de voir s’ils étaient fondés juridiquement et s’ils sont clos. S’agissant des cas pour lesquels la procédure n’est pas terminée, il déclare qu’il rendra compte des résultats une fois que les jugements définitifs seront prononcés. La commission prend également note des observations reçues de la CSI le 1er septembre 2017 sur des questions faisant l’objet du présent commentaire et qui allèguent aussi de plusieurs violations de la convention dans la pratique, en s’appuyant sur ses précédentes observations, et dénoncent le traitement des activités syndicales comme des délits pénaux donnant lieu à du harcèlement, des arrestations et de longues procédures devant une justice dont l’indépendance est mise en doute. Les allégations de la CSI portent en outre sur l’utilisation de contrats à court terme pour mettre fin à l’emploi de dirigeants syndicaux et de syndicalistes afin d’affaiblir les syndicats actifs. De plus, selon la CSI, l’avant projet de loi sur les salaires minima (2016) contient des dispositions qui interdisent les activités syndicales légitimes. La commission note avec préoccupation la gravité de ces allégations et prie la commission de faire connaître ses commentaires sur les observations de la CSI de 2016 et 2017, en particulier sur les cas spécifiques mentionnés et sur l’issue de toute procédure judiciaire qui serait toujours en cours, ainsi que sur les allégations de l’usage étendu de contrats de courte durée dans le but de fragiliser la liberté syndicale, et le projet de loi sur le salaire minimum érigeant en délit des activités syndicales légitimes ayant pour sujet la discussion et la fixation du salaire minimum.
La commission prend également note du rapport de la mission de contacts directs (MCD) qui s’est rendue dans le pays du 27 au 31 mars à la demande de la Commission de l’application des normes de la Conférence formulée en juin 2016.

Suite donnée à la discussion de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 106e session, juin 2017)

La commission prend note de la discussion qui s’est tenue à la Commission de la Conférence en juin 2017 concernant l’application de la convention par le Cambodge. La commission note que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence priait le gouvernement: i) de s’assurer que la liberté syndicale peut être exercée dans un climat exempt d’intimidations et de violences contre les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives; ii) de fournir à la commission d’experts les rapports des trois commissions chargées d’enquêter sur les assassinats de dirigeants syndicaux et sur les actes de violence perpétrés à leur encontre, et de veiller à ce que les auteurs et les responsables de ces crimes soient traduits devant la justice; iii) de veiller à ce que tout acte de discrimination antisyndicale fasse rapidement l’objet d’une enquête et, s’il est avéré, à ce que des voies de recours appropriées soient prévues et des sanctions dissuasives appliquées; iv) de poursuivre la révision de la loi sur les syndicats, en étroite consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, afin de trouver des solutions compatibles avec la convention no 87; v) de s’assurer que les travailleurs peuvent enregistrer des syndicats au moyen d’une procédure simple, objective et transparente; vi) de garantir que les enseignants, les fonctionnaires, les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle sont protégés en droit et dans la pratique conformément à la convention no 87; vii) de s’assurer que tous les syndicats ont le droit de représenter leurs membres devant le conseil d’arbitrage; viii) d’achever, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs, les textes de loi et réglementations proposés sur les conflits du travail conformément à la convention no 87, de façon à ce que le système de règlement des conflits du travail repose sur une base légale solide lui permettant de concilier équitablement les intérêts et les besoins des travailleurs et des employeurs concernés par les conflits; et ix) d’élaborer une feuille de route pour définir des actions assorties de délais afin de mettre en œuvre les conclusions de la Commission de la Conférence.
La commission note que le gouvernement indique que le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a convoqué une réunion tripartite le 25 août afin de discuter de mesures à prendre pour appliquer les conclusions de la Commission de la Conférence, laquelle a débouché sur une feuille de route préparée en concertation avec les partenaires sociaux. Après le dépôt de son rapport, le gouvernement a soumis un projet de feuille de route au BIT en lui demandant de l’examiner et de lui apporter une assistance technique. La commission s’attend à ce que, par un dialogue social achevé et avec l’aide du Bureau, la feuille de route soit bientôt finalisée pour donner pleinement effet aux conclusions de la Commission de la Conférence et, à cet égard, elle attire l’attention du gouvernement sur les questions abordées ci-dessous.

Droits syndicaux et libertés publiques

Meurtres de syndicalistes. S’agissant de la recommandation qu’elle fait depuis longtemps de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux Chea Vichea et Ros Sovannareth (en 2004) et Hy Vuthy (en 2007), la commission avait précédemment pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle une Commission interministérielle avait été créée en août 2015 afin de mener rapidement des enquêtes approfondies sur ces affaires pénales et qu’un groupe de travail tripartite dépendant du secrétariat de la commission avait été constitué par la suite afin de permettre aux organisations d’employeurs et de travailleurs de communiquer des informations en rapport avec l’enquête et de formuler leurs commentaires sur les conclusions de la commission. La commission note que le gouvernement indique qu’il n’a pas été en mesure de boucler les enquêtes en raison des difficultés qu’il a rencontrées, notamment le manque de collaboration des familles des victimes, mais qu’il est déterminé à prendre toutes les mesures qui s’imposent et qu’il continuera à ne ménager aucun effort pour conclure les enquêtes et traîner les coupables et les instigateurs devant la justice. La commission note dans les conclusions de l’examen par le Comité de la liberté syndicale du cas no 2318 (383e rapport, octobre 2017) que le Commissariat national de la police a créé un groupe d’enquête en 2015, que la Commission interministérielle s’est réunie une deuxième fois en janvier 2017 et qu’aucune avancée n’a été signalée dans le fonctionnement du groupe de travail tripartite. La commission se doit d’exprimer sa profonde préoccupation devant l’absence de progrès concrets dans les enquêtes.
Rappelant la nécessité de conclure les enquêtes et de traduire les auteurs et les instigateurs de ces crimes en justice afin de mettre un terme à la situation d’impunité qui prévaut dans le pays en matière de violence contre des syndicalistes, la commission prie instamment les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer la procédure d’enquête et prie avec fermeté le gouvernement de tenir les partenaires sociaux dûment informés de l’évolution de la situation et de rendre compte des progrès tangibles.
Incidents durant une manifestation en janvier 2014. Dans ses précédentes observations, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur toutes conclusions et recommandations formulées par les trois commissions créées à la suite des incidents survenus lors des manifestations et des grèves des 2 et 3 janvier 2014, qui ont entraîné des violences graves et des attaques, des décès et l’arrestation de travailleurs, et sur les allégations de vices de procédure dans le déroulement des procès qui ont suivi. Elle notait aussi que la CSI affirmait que les commissions créées pour enquêter sur les incidents ne sont pas crédibles, qu’il reste nécessaire de procéder à une enquête indépendante sur ces événements et que les personnes responsables des actes de violence – qui ont provoqué le décès de cinq manifestants et l’arrestation injustifiée de 23 travailleurs – doivent répondre de leurs actes. La commission note que le gouvernement déclare que les conclusions des trois commissions ont été communiquées aux juridictions compétentes pour qu’elles y donnent suite et qu’il ne sera pas en mesure de les produire tant que la procédure judiciaire ne sera pas terminée. Elle note également que, dans les conclusions du cas no 2318 (383e rapport, octobre 2017), le Comité de la liberté syndicale a prié instamment le gouvernement: i) de préciser si les allégations spécifiques d’homicides, d’agressions physiques et d’arrestations de travailleurs protestataires suite à la manifestation de janvier 2014 font l’objet d’une enquête dans le cadre des commissions d’investigation mentionnées et, le cas échéant, de fournir les conclusions des commissions à ce sujet; et ii) dans le cas où les enquêtes en cours ne porteraient pas sur ces questions, de diligenter une enquête indépendante sur ces graves allégations sans délai et de l’informer des résultats de cette enquête ainsi que des mesures prises en conséquence. La commission note en outre que la MCD, rappelant qu’il est important de fournir une assistance et de dispenser une formation aux forces de police afin d’assurer le respect total des droits syndicaux, a rappelé au gouvernement qu’il pouvait solliciter l’assistance technique du BIT dans le but, par exemple, d’élaborer des principes directeurs, un code de bonnes pratiques ou un manuel sur le traitement des actions collectives et de protestation. Rappelant que l’intervention de la police devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public et que les autorités compétentes devraient recevoir des instructions adéquates de façon à éviter le danger d’un usage disproportionné de la force lorsqu’elles tentent de contrôler les manifestations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public, la commission invite le gouvernement à envisager de solliciter l’assistance technique du Bureau en rapport avec la formation des forces de police dans le but, par exemple, d’élaborer des principes directeurs, un code de bonnes pratiques ou un manuel sur l’attitude à avoir lors d’actions collectives et de protestation.

Questions législatives

Article 2 de la convention. Droits des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission note que le gouvernement déclare que la liberté syndicale est garantie à tous les travailleurs par le biais de deux textes de loi: i) la loi sur les syndicats, qui s’applique au secteur privé, y compris les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle qui répondent aux critères de cette loi pour la création d’un syndicat; et ii) la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales (LAONG), qui prescrit le droit des juges, des enseignants et autres fonctionnaires de se syndiquer, mais aussi des travailleurs domestiques et des travailleurs de l’économie informelle qui ne remplissent pas les conditions de la loi sur les syndicats. Le gouvernement indique aussi que d’autres mesures seront prises par le biais de la feuille de route afin de mettre en œuvre les conclusions de la Commission de la Conférence. La commission doit rappeler à nouveau que certaines dispositions de la LAONG contreviennent aux droits que la convention reconnaît aux fonctionnaires en matière de liberté syndicale car elle ne reconnaît pas aux associations de fonctionnaires le droit de rédiger des statuts et un règlement, le droit d’élire des représentants, le droit d’organiser des activités et de formuler des programmes sans l’ingérence des autorités publiques ni le droit de s’affilier à des fédérations ou confédérations, y compris à l’échelon international, et soumet l’enregistrement de ces associations à l’autorisation du ministère de l’Intérieur. Tout en notant que le gouvernement a indiqué à la MCD que cet enregistrement ne peut être refusé que s’il met en danger ou affecte de façon négative la sécurité publique ou l’ordre public, la commission doit rappeler que ces motifs donnent aux autorités un pouvoir discrétionnaire incompatible avec l’article 2 de la convention et souligne à cet égard les conclusions de la Commission de la Conférence de 2017 selon lesquelles la procédure d’enregistrement doit être simple, objective et transparente. La commission note en outre que la MCD a observé dans ses conclusions que les organisations et associations de travailleurs sont particulièrement inquiètes: i) du manque de protection des droits syndicaux des enseignants (mentionnant en particulier les sanctions et menaces contre des enseignants qui cherchent à s’organiser); et ii) des difficultés rencontrées par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle en général lorsqu’ils veulent créer des syndicats ou s’y affilier, du fait que la loi sur les syndicats préconise un modèle de syndicat d’entreprise, dont les conditions sont très difficiles à remplir pour ces travailleurs, et n’autorise pas la création de syndicats de secteur ou par profession. En outre, la commission note que la CSI affirme que l’absence de toute structure de représentation sectorielle se traduit par la privation du droit de s’organiser pour des centaines de milliers de travailleurs de l’économie informelle). En conséquence, la commission se voit une fois de plus obligée de prier instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en concertation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires, y compris les enseignants, qui ne sont pas couverts par la loi sur les syndicats, puissent pleinement bénéficier de leur liberté d’association telle que conférée par la convention et que la législation soit modifiée en conséquence. Elle encourage en outre le gouvernement à promouvoir la jouissance pleine et effective de ces droits par les travailleurs domestiques et les travailleurs de l’économie informelle et, à cette fin, à soumettre à des consultations tripartites dans le contexte de l’application de la feuille de route destinée à donner effet aux conclusions de la Commission de la Conférence la possibilité d’autoriser la formation de syndicats par secteur ou profession.
Article 3. Droit d’élire librement des représentants. Conditions à respecter pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des syndicats. Dans ses précédents commentaires, la commission priait le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de la loi sur les syndicats qui fixent comme conditions pour voter, être candidat à une élection ou occuper un poste de direction ou de gestion dans une organisation de travailleurs ou d’employeurs d’avoir atteint l’âge de 18 ans révolus, de savoir lire et écrire et de signer une déclaration disant qu’ils n’ont jamais été condamnés pour un délit pénal. La commission note que le gouvernement déclare que les critères d’âge et d’alphabétisation sont indispensables pour assurer le bon fonctionnement des syndicats de travailleurs. Il indique aussi qu’un mineur émancipé et sain d’esprit jouit, aux termes du Code civil de la capacité juridique complète et est traité comme s’il avait atteint l’âge minimum légal (18 ans). La commission se félicite de ce que le gouvernement indique que de plus amples discussions auront lieu avec les partenaires sociaux, comme elle l’a recommandé. S’agissant de l’âge minimum et des critères d’alphabétisation, la commission rappelle une fois encore qu’elle estime que sont incompatibles avec la convention les obligations que le candidat aux élections syndicales soit majeur ou sache lire et écrire (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 104). Prenant dûment note du fait que le gouvernement indique que la procédure d’émancipation du Code civil prévoit déjà la possibilité de reconnaître la pleine capacité juridique à des mineurs, la commission considère que le gouvernement pourrait supprimer le critère de la majorité de la loi sur les syndicats pour les mineurs qui ont atteint l’âge minimum légal d’admission à l’emploi salarié (les personnes de 15 ans, aux termes de l’article 177 de la loi sur le travail). En outre, la commission rappelle qu’elle considère qu’une condamnation pour un acte qui, par sa nature, ne met pas en cause l’intégrité de l’intéressé et ne présente pas de risques véritables pour l’exercice des fonctions syndicales ne doit pas constituer un motif de disqualification (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 106). La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre, dans le cadre des consultations en cours sur l’application de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour modifier les articles 20, 21 et 38 de cette loi afin: i) de garantir le droit des mineurs qui ont atteint l’âge minimum obligatoire pour exercer un emploi salarié de présenter leur candidature à des fonctions syndicales; ii) de supprimer l’obligation de lire et d’écrire le khmer comme critère d’éligibilité; et iii) de garantir le respect plein et entier du principe précité concernant la disqualification pour une fonction syndicale en cas de délit pénal.
Article 4. Dissolution des organisations représentatives. Dans ses précédents commentaires, la commission demandait au gouvernement de modifier le paragraphe 2 de l’article 28 de la loi sur les syndicats qui prévoit la dissolution automatique d’un syndicat en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement. La commission note que le gouvernement déclare que cette disposition n’est pas contraire à la convention puisqu’elle n’envisage pas la dissolution automatique du syndicat provoquée par la fermeture de son entreprise ou établissement et ne constitue pas une décision de l’autorité administrative. La commission observe à cet égard qu’un syndicat peut avoir un intérêt légitime à poursuivre ses activités après la dissolution de l’entreprise concernée (par exemple pour défendre d’éventuelles revendications de ses membres). Rappelant que la dissolution d’une organisation de travailleurs ou d’employeurs ne peut être décidée que dans le cadre des procédures définies par ses statuts, ou par un jugement d’un tribunal, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 28 de la loi sur les syndicats en supprimant son paragraphe 2.
Motifs de demande de dissolution par un tribunal. Dans son précédent commentaire, la commission demandait au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats, qui accorde à toute partie concernée ou à 50 pour cent du nombre total de membres du syndicat et de l’association d’employeurs le droit de déposer au tribunal du travail une demande de dissolution. La commission note que le gouvernement déclare que cette disposition a pour but d’assurer la liberté syndicale ainsi que la démocratie et les droits des adhérents, et elle rappelle que seule la justice est pleinement habilitée à dissoudre un syndicat à partir d’une plainte. La commission rappelle à nouveau que la seule manière pour les membres de demander la dissolution doit être celle prévue dans les statuts de l’organisation. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats pour laisser aux statuts et règlements des syndicats ou des associations d’employeurs le soin de déterminer la procédure de dissolution par leurs membres.
La commission avait aussi demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier le paragraphe c) de l’article 29 qui prévoit qu’un syndicat ou une association d’employeurs est dissous par le tribunal du travail dans les cas où ses dirigeants, ses gestionnaires et les responsables de son administration sont reconnus coupables d’une faute grave ou d’un délit commis au nom du syndicat ou de l’association d’employeurs. La commission note que le gouvernement répond que: i) cette disposition ne porte pas sur les délits commis à titre personnel ou individuel par des dirigeants ou des personnes responsables de l’administration du syndicat; et ii) seuls les délits commis par des dirigeants ou des personnes responsables de l’administration du syndicat entraînent sa dissolution (autrement dit, le syndicat lui-même doit répondre des délits graves qui ont été commis). La commission doit rappeler que, s’il s’avère que des représentants de syndicat se sont gravement méconduits ou ont commis des délits par des actes allant au-delà des limites de l’activité syndicale normale – y compris des actes commis pour le compte du syndicat –, ils peuvent être poursuivis en vertu des dispositions légales applicables et dans le respect des procédures judiciaires ordinaires, sans provoquer la dissolution du syndicat et le priver de toute possibilité d’action. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la loi sur les syndicats en supprimant son paragraphe c).

Application de la convention dans la pratique

Indépendance du pouvoir judiciaire. La commission note que le gouvernement indique qu’un projet de loi de procédure pour les conflits du travail a été achevé en août 2017 et que, avec le soutien du BIT, un atelier consultatif tripartite devra être organisé pour discuter du projet et examiner des commentaires destinés à l’améliorer avant qu’il soit soumis au Parlement en vue de son adoption pour la fin de 2017. Le gouvernement précise que ce projet de loi vise également à renforcer le conseil d’arbitrage et à élargir ses prérogatives. Il déclare reconnaître, avec les partenaires sociaux, l’efficacité de ce conseil, et il a l’intention de promouvoir son rôle, notamment en l’habilitant à traiter les conflits individuels. A cet égard, la commission prend note des recommandations de la MCD qui, prenant note de l’engagement du gouvernement à renforcer le conseil d’arbitrage, veut croire que toutes les mesures seront prises pour lui permettre de rester accessible et de continuer à jouer son rôle important de traitement des conflits collectifs et faire en sorte que ses sentences, lorsqu’elles ont force obligatoire, sont dûment appliquées (la MCD avait observé que les organisations de travailleurs affirmaient que, souvent, les sentences du conseil d’arbitrage, même lorsqu’elles étaient juridiquement contraignantes, n’étaient pas suivies; une constatation que l’on retrouve également dans les dernières observations en date de la CSI). La commission prend également note des vives préoccupations exprimées par la CSI, ainsi que par des organisations nationales de travailleurs, à la MCD sur le manque d’indépendance allégué du pouvoir judiciaire et de son utilisation pour traiter comme des délits pénaux des activités syndicales légitimes et les entraver. A cet égard, la commission rappelle que l’une des conclusions de la mission de contacts directs qui s’est rendue dans le pays en 2008 concernait le manque d’efficacité et d’impartialité des instances judiciaires. La mission avait noté en particulier qu’il est très difficile aux autorités judiciaires de s’acquitter de leur mandat en raison d’un manque de capacité, comme le prouve par exemple le fait que fréquemment les décisions des tribunaux et les comptes rendus d’audience ne sont ni enregistrés ni publiés, et que les instances judiciaires n’ont pas été en mesure de s’acquitter de leurs fonctions d’une manière impartiale et indépendante en raison des ingérences dont elles font l’objet de la part des autorités politiques (voir 351e rapport, cas no 2318, paragr. 250). La mission s’est référée à la nécessité de prendre des mesures afin de garantir l’indépendance et l’efficacité des instances judiciaires, notamment par le biais de mesures de renforcement de leur capacité et la mise en place de garanties contre la corruption. La commission s’attend à ce que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour mener à bien rapidement l’adoption de la loi de procédure pour les conflits du travail en totale concertation avec les partenaires sociaux, afin d’assurer le bon fonctionnement du système judiciaire en tant que sauvegarde contre l’impunité et de moyen efficace de protection des droits des travailleurs à la liberté syndicale pendant des conflits du travail, ainsi que pour répondre aux vives préoccupations qui se sont exprimées quant à l’indépendance du judiciaire et son impact sur l’application de la convention, à travers les mesures décrites ci-dessus. La commission se félicite de l’engagement du gouvernement à renforcer le conseil d’arbitrage et veut croire qu’il restera facilement accessible et continuera à jouer son rôle important de traitement des conflits collectifs, et que les éventuelles mesures nécessaires seront prises pour faire en sorte que ses sentences, lorsqu’elles ont force obligatoire, soient dûment appliquées.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

La commission prend note de la promulgation, le 17 mai 2016, de la loi sur les syndicats (LTU).
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. Article 13 de la LTU: exigences à inclure dans les statuts. La commission note que cet article définit en détail un certain nombre d’exigences à inclure dans les statuts des syndicats. Elle rappelle que la législation nationale devrait se limiter à définir des exigences formelles respectant les statuts des syndicats, et que toute disposition allant au-delà de ces exigences formelles peut constituer un acte d’ingérence contraire au droit des organisations de travailleurs d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, en application de l’article 3 de la convention. La commission est d’avis qu’un certain nombre d’exigences formulées à l’article 13, fixant des quorums ou des scrutins spécifiques pour certaines décisions, vont au-delà des exigences formelles, la détermination de ces questions devant être laissée à l’appréciation du syndicat lui-même. La commission prie le gouvernement de consulter les partenaires sociaux afin de supprimer ces exigences qui restreignent indûment le droit des syndicats d’élaborer les statuts et règlements administratifs sans ingérence des pouvoirs publics.
Article 3. Droit d’élire des représentants librement. Article 20 de la LTU: conditions à respecter pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des syndicats. En vertu de cette disposition, les candidats potentiels – qu’ils soient ressortissants du pays ou étrangers – devraient avoir l’âge minimum requis (18 ans), savoir au moins lire et écrire la langue nationale et faire une déclaration selon laquelle ils n’ont jamais été condamnés pour un quelconque délit pénal. S’agissant de l’âge minimum et du critère d’alphabétisation, la commission rappelle qu’elle considère incompatible avec la convention les obligations que le candidat aux élections syndicales soit majeur ou sache lire et écrire (voir étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 104). La commission prie par conséquent le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 20 de la LTU afin de garantir le droit des mineurs qui ont atteint l’âge minimum obligatoire pour exercer un emploi salarié (les personnes de 15 ans, en vertu de l’article 177 de la loi sur le travail) de présenter leur candidature à des fonctions syndicales, et de supprimer l’obligation de lire et d’écrire le khmer comme critère d’éligibilité. La commission rappelle en outre qu’elle considère qu’une condamnation pour un acte qui, par sa nature, ne met pas en cause l’intégrité de l’intéressé et ne présente pas de risques véritables pour l’exercice des fonctions syndicales ne doit pas constituer un motif de disqualification (voir étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 106). La commission observe à cet égard que le Comité de la liberté syndicale, dans son récent examen d’un cas, prie le gouvernement de modifier l’article 20 de la LTU, et de porter cet aspect législatif devant la commission (cas no 3121, 380e rapport, paragr. 142). La commission prie le gouvernement de garantir le respect plein et entier de ce principe en prenant les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 20 de la LTU.
Article 21 de la LTU: obligations pour les dirigeants, les gestionnaires et les responsables de l’administration des associations d’employeurs. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que les amendements demandés ci dessus pour l’article 20 concernant les fonctions syndicales s’appliquent également, le cas échéant, à l’article 21 relatif à l’exercice de fonctions au sein d’associations d’employeurs, qui contient des dispositions similaires. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 21 de la LTU en tenant compte des principes susmentionnés.
Article 38 de la LTU: droit de vote et de présenter une candidature à un poste électif de représentant. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que les modifications demandées ci-dessus pour l’article 20 concernant les fonctions syndicales s’appliquent également à l’article 38 concernant les critères à respecter pour avoir le droit de voter et de se présenter comme candidat aux élections à des postes de représentant, qui contiennent des dispositions similaires. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 38 de la LTU en tenant compte des principes susmentionnés concernant l’âge minimum et l’obligation de savoir lire et écrire.
Article 4. Dissolution des organisations représentatives. Article 28 de la LTU: dissolution des syndicats ou des associations d’employeurs. Le paragraphe 2 de cette disposition prévoit qu’un syndicat est automatiquement dissous en cas de fermeture complète de l’entreprise ou de l’établissement. Rappelant que la dissolution d’une organisation de travailleurs ou d’employeurs ne saurait être décidée que dans le cadre des procédures définies par ses statuts, ou par un jugement d’un tribunal, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier en conséquence l’article 28 de la LTU en supprimant son paragraphe 2.
Article 29 de la LTU: motifs de demandes de dissolution par un tribunal. En vertu de cette disposition, toute partie concernée ou 50 pour cent du nombre total des membres du syndicat ou de l’association d’employeurs ont le droit de déposer une plainte auprès du tribunal du travail afin de demander la dissolution du syndicat ou de l’association d’employeurs. La commission considère que la façon dont les membres peuvent demander une dissolution devrait être déterminée par les règlements de l’organisation. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 29 de la LTU de manière à laisser le soin aux syndicats ou aux associations d’employeurs d’appliquer leurs propres statuts et règlements administratifs pour déterminer les procédures de leur dissolution par leurs membres. De plus, en vertu du paragraphe c) de l’article 29, un syndicat ou une association d’employeurs est dissous par le tribunal du travail dans les cas où ses dirigeants, ses gestionnaires et les responsables de son administration sont reconnus coupables d’une faute grave ou d’un délit commis au nom du syndicat ou de l’association d’employeurs. A cet égard, la commission est d’avis que s’il est prouvé que les responsables syndicaux ont commis une faute grave ou des délits en perpétrant des actes qui vont au-delà des limites de l’activité syndicale normale, ils peuvent être poursuivis en application des dispositions légales en vigueur et conformément aux procédures judiciaires ordinaires, sans que cela n’entraîne la dissolution du syndicat ou que cela prive ce dernier de toute possibilité d’action. La commission prie le gouvernement de modifier l’article 20 de la LTU en supprimant son paragraphe c).
La commission veut croire que le gouvernement tiendra pleinement compte de ses commentaires sur la LTU et qu’il prendra rapidement des mesures, en consultation avec les partenaires sociaux, pour modifier la loi en conséquence.
Droit des organisations de travailleurs et d’employeurs d’organiser leur activité et de formuler leur programme d’action. Dans ses précédents commentaires, la commission s’était référée à la nécessité de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum visant à protéger les installations et les équipements dans une entreprise où une grève a lieu, le ministre du Travail est habilité à déterminer le service minimum en question. La commission avait également prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application pratique de l’article 326(2) de la loi sur le travail, en donnant en particulier tout exemple de sanctions à imposer aux travailleurs pour faute grave. Dans sa réponse, le gouvernement déclare qu’il sollicite l’assistance du Bureau pour travailler sur le projet Prakas afin de répondre de façon claire aux préoccupations que suscitent ces dispositions. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
Loi anticorruption. La commission avait prié le gouvernement de transmettre une copie de la loi anticorruption, telle qu’adoptée, ainsi que des informations sur les activités de l’Unité de lutte contre la corruption, son plan stratégique et tout autre document pertinent. Le gouvernement réaffirme que le texte de loi sera transmis lorsqu’il aura été traduit en anglais et il se réfère aux informations disponibles publiquement sur les activités de l’Unité de lutte contre la corruption.

Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

La commission prend note des observations à caractère général formulées par l’Organisation internationale des employeurs (OIE), reçues le 1er septembre 2016. Elle prend note également des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2016, dans lesquelles est dénoncé le fait qu’un grand nombre de dirigeants syndicaux et d’activistes ont été accusés de délits pénaux pour leurs activités syndicales depuis 2014, et qu’il y a eu une augmentation du nombre des injonctions et des ordres de réquisition contre les syndicats et les travailleurs, lors de conflits du travail, en vue de restreindre les activités des syndicats et les actions revendicatives. Il est allégué qu’au moins 114 injonctions et ordres de réquisition ont été émis depuis 2014, en particulier dans l’industrie de l’habillement et le secteur du tourisme. La CSI proteste également contre le recours persistant à la violence par la police contre des travailleurs lors d’actions de protestation. La commission note avec préoccupation la gravité de ces allégations et prie le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les observations soumises par la CSI, et en particulier des détails sur les cas spécifiques mentionnés.
La commission prend note des commentaires du gouvernement en réponse aux précédentes allégations de la CSI, de l’Internationale de l’éducation (IE) et de l’Association nationale des enseignants pour le développement (NEAD), faisant état de violences à l’encontre de syndicalistes, de poursuites judiciaires pour harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et d’activistes, de blocage de l’enregistrement de nouveaux syndicats indépendants et d’intimidations contre les enseignants adhérant à des syndicats (en particulier les intimidations de la police pendant le Congrès national de la NEAD en septembre 2014). La commission observe que, bien qu’il continue de réfuter l’allégation de blocage de l’enregistrement de nouveaux syndicats, le gouvernement indique que la plupart des cas présentés précédemment ont été résolus au moyen des procédures légales en vigueur et que les autorités compétentes travaillent actuellement en étroite collaboration avec toutes les parties concernées pour assurer le plein respect de la législation nationale et de la convention.

Suivi de la discussion de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 105e session, mai-juin 2016)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu en juin 2016 au sein de la Commission de la Conférence sur l’application des normes concernant l’application de la convention par le Cambodge. La commission note que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a prié le gouvernement: i) de veiller à ce que la liberté syndicale puisse être exercée dans un climat exempt d’intimidation et sans violence contre les travailleurs, les syndicats ou les employeurs, et d’agir en conséquence; ii) de s’assurer que la loi sur les syndicats est pleinement conforme aux dispositions de la convention et d’engager le dialogue social avec l’assistance technique du BIT; iii) de s’assurer que les enseignants et les fonctionnaires sont protégés en droit et dans la pratique, conformément à la convention; iv) de diligenter des enquêtes exhaustives et rapides concernant les meurtres et les violences à l’égard des dirigeants syndicaux, et traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes; v) de s’assurer que la Commission interministérielle spéciale tient les organisations d’employeurs et de travailleurs informées de manière régulière sur les progrès de ses enquêtes. La commission note également que la Commission de la Conférence a invité le gouvernement à accepter une mission de contacts directs avant la prochaine session de la Conférence internationale du Travail pour évaluer les progrès réalisés. La commission accueille favorablement l’acceptation par le gouvernement de la mission de contacts directs et veut croire que la mission aura lieu dans un proche avenir.

Droits syndicaux et libertés publiques

Assassinats de syndicalistes. S’agissant de la recommandation qu’elle fait depuis longtemps de procéder à des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux M. Chea Vichea, M. Ros Sovannareth et M. Hy Vuthy, la commission avait précédemment pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle une Commission interministérielle spéciale avait été créée en août 2015 afin de mener rapidement des enquêtes approfondies sur ces procédures pénales. La commission note, d’après le rapport du gouvernement, que la Commission interministérielle spéciale a tenu sa première réunion le 9 août 2016 et a adopté des mesures au sujet de son propre fonctionnement, comprenant l’utilisation des moyens de communication électroniques pour rendre compte des progrès réalisés par chaque membre de la commission, ainsi que la tenue de réunions trimestrielles pour dresser le bilan des progrès réalisés sur chaque affaire. S’agissant de sa précédente recommandation visant à assurer que la Commission interministérielle spéciale informe de manière régulière les organisations d’employeurs et de travailleurs sur les progrès de ces enquêtes, la commission note, d’après les conclusions du Comité de la liberté syndicale concernant le cas no 2318 (voir 380e rapport, novembre 2016), qu’un groupe de travail tripartite rattaché au secrétariat de la commission a également été créé pour permettre aux organisations d’employeurs et de travailleurs de fournir des informations sur les enquêtes, et d’indiquer leur réaction aux conclusions de la commission. Tout en prenant bonne note des mesures exposées, la commission se voit contrainte d’exprimer sa préoccupation quant à l’absence de résultats concrets concernant les enquêtes demandées, en dépit de tout le temps qui s’est écoulé depuis la création de la commission interministérielle. Rappelant la nécessité de conclure les enquêtes et de traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces crimes, afin de mettre un terme à la situation d’impunité qui prévaut dans le pays en ce qui concerne les actes de violence à l’encontre de syndicalistes, la commission prie instamment les autorités compétentes de prendre toutes les mesures nécessaires pour mener promptement à bien la procédure d’enquête et prie fermement le gouvernement de tenir les partenaires sociaux dûment informés des progrès réalisés et de rendre compte à la mission de contacts directs des progrès concrets accomplis à cet égard.
Incidents durant une manifestation en janvier 2014. Dans sa précédente observation, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur toutes conclusions et recommandations formulées par les trois commissions établies suite aux incidents survenus lors des manifestations et des grèves des 2 et 3 janvier 2014, qui ont entraîné des violences graves et des attaques, des décès et l’arrestation de travailleurs, et sur les allégations de vices de procédure dans le déroulement des procès qui s’en sont suivis. Dans son rapport, le gouvernement réitère que les mouvements de grève ont donné lieu à des violences et que les forces de sécurité ont dû intervenir pour protéger les biens privés et publics et restaurer le calme. Le gouvernement indique également que les trois commissions ont été transformées et se sont vu attribuer des rôles et responsabilités plus spécifiques: i) la commission sur l’évaluation des dégâts a conclu que le montant total des dommages n’était pas inférieur à 75 millions de dollars des Etats-Unis, y compris les dommages aux biens publics et privés à Phnom Penh et dans certaines autres provinces; ii) la commission chargée d’enquêter sur la violence sur la route Veng Sreng a conclu que l’incident était une émeute qui avait éclaté à l’instigation de certains politiciens qui se sont servis des normes des salaires minima comme moyens de propagande, et qu’elle ne relevait pas de la définition d’une grève au sens des normes internationales du travail, puisque les manifestants avaient bloqué les voies publiques à minuit, avaient acclamé le jet de bouteilles d’essence enflammées contre les autorités et avaient détruit des biens privés et publics; iii) la commission d’étude sur les salaires minima des travailleurs des secteurs de l’habillement et de la chaussure était devenue l’actuel Comité consultatif du travail, qui est tripartite et rend des avis sur la promotion des conditions de travail, y compris la fixation du salaire minimum. La commission note cependant que la CSI affirme que les commissions créées pour enquêter sur les incidents ne sont pas crédibles, qu’il reste nécessaire de procéder à une enquête indépendante sur ces événements et que les personnes responsables des actes de violence – qui ont provoqué le décès de cinq manifestants et l’arrestation injustifiée de 23 travailleurs – doivent être tenues responsables. Prenant note des avis divergents exprimés par le gouvernement et la CSI sur la gestion de ces incidents, la commission se doit d’exprimer sa profonde préoccupation devant les actes de violence qui ont conduit à des décès, des blessures et l’arrestation de manifestants, après ce qui était à l’origine une manifestation relative à un conflit du travail, et devant l’absence d’informations du gouvernement à cet égard. La commission, rappelant que l’intervention de la police devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public et que les autorités compétentes devraient recevoir des instructions adéquates de façon à éviter le danger d’un usage disproportionné de la force lorsqu’elles tentent de contrôler les manifestations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public, prie instamment le gouvernement de fournir des informations spécifiques et les conclusions des commissions en ce qui concerne les circonstances ayant conduit à des décès, des blessures et des allégations d’arrestations injustifiées de manifestants, et sur toute mesure prise en application des conclusions des trois commissions susmentionnées.

Questions législatives

Loi sur les syndicats (LTU). Dans sa précédente observation, la commission, tout en observant que le gouvernement avait révisé à nouveau le projet de loi avant de le soumettre au Conseil des ministres, a voulu croire que le projet de loi sur les syndicats serait adopté dans un très proche avenir et qu’il serait pleinement conforme aux dispositions de la convention. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la LTU a été promulguée le 17 mai 2016 et selon laquelle, durant la période de préparation du projet, de 2008 à 2016, une série de consultations bipartites, tripartites, multilatérales et publiques avaient été tenues, et les commentaires techniques du BIT avaient été intégrés dans le projet final. Le gouvernement fait cependant remarquer que, en dépit des efforts déployés, la loi ne donne pas entière satisfaction aux partenaires sociaux: i) les employeurs ne sont pas satisfaits du seuil minimum avant qu’un syndicat puisse être créé; ii) les travailleurs ne sont pas satisfaits de la portée de la loi, qui exclut les fonctionnaires. La commission prend note également des préoccupations de la CSI quant à un certain nombre de dispositions de la loi sur les syndicats. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires sur les questions soulevées par la CSI.
Article 2 de la convention. Droits des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix et de s’affilier à ces organisations. Article 3 de la LTU: champ d’application de la loi. Notant qu’en vertu de cet article la loi s’applique à toutes les personnes qui relèvent des dispositions de la législation du travail, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment les magistrats et les travailleurs domestiques, qui sont exclus du champ d’application de la loi sur le travail en vertu de son article 1, peuvent pleinement bénéficier des droits qui leur sont conférés par la convention. De plus, la commission prie le gouvernement d’indiquer si les travailleurs de l’économie informelle relèvent du champ d’application de la LTU ou comment il est assuré qu’ils bénéficient des droits syndicaux que leur confère la convention.
La commission rappelle que le droit de constituer des organisations syndicales et de s’y affilier devrait être garanti à tous les agents de la fonction publique, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat à l’échelon central, régional ou local, qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou qu’ils travaillent dans des entreprises à caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 64). La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les fonctionnaires nommés à un poste permanent dans la fonction publique jouissent de la liberté d’association au titre de l’article 36 du statut commun aux fonctionnaires et que les enseignants, en particulier, bénéficient de ce droit en application de l’article 37 de la loi sur l’enseignement. La commission croit comprendre que ces dispositions se réfèrent au droit d’association conféré au titre de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales. Après un examen de cette loi, la commission considère que certaines dispositions ne sont pas conformes à la liberté d’association des fonctionnaires telle que la prévoit la convention, en ce qu’elle subordonne l’enregistrement de leur syndicat à l’autorisation du ministère de l’Intérieur, ce qui est contraire au droit de constitution d’organisations sans autorisation préalable, tel que consacré à l’article 1 de la convention. De plus, cette loi ne comprend pas de disposition reconnaissant aux syndicats de fonctionnaires le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leurs activités et de formuler leur programme d’action, sans ingérence des pouvoirs publics, ou leur droit de s’affilier à des fédérations ou confédérations, y compris au niveau international. La commission se voit par conséquent, une fois de plus, obligée de prier instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées, en consultation avec les partenaires sociaux, pour faire en sorte que les fonctionnaires, y compris les enseignants qui ne sont pas couverts par la LTU, puissent pleinement bénéficier de leur liberté d’association telle que conférée par la convention et que la législation soit modifiée en conséquence.
La commission formule d’autres commentaires sur la LTU dans une demande directe et elle veut croire que le gouvernement y répondra, au moyen de consultations constructives avec les partenaires sociaux et en tenant compte de leurs observations, pour placer la loi en conformité avec les dispositions de la convention. A cet égard, la commission rappelle que le gouvernement a la possibilité de continuer de bénéficier de l’assistance technique du Bureau. Elle prie en outre le gouvernement de rendre compte de l’application de la LTU.

Application de la convention dans la pratique

Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans sa précédente observation, la commission avait prié le gouvernement d’indiquer tout progrès accompli dans la rédaction des directives sur le fonctionnement du tribunal du travail et de la Chambre du travail et de fournir des informations sur les progrès réalisés dans le cadre de leur création et de leur fonctionnement. Dans sa réponse, le gouvernement indique que la loi sur le fonctionnement du tribunal du travail est encore en cours de rédaction, avec l’assistance technique et l’appui financier du Bureau. Le gouvernement a bénéficié de l’expérience d’autres pays tels que Singapour, le Japon et l’Australie et il devrait consulter les partenaires sociaux sur le projet de loi à la fin de l’année, afin de tenir compte de ce qui est nécessaire pour la mise en place d’un système de règlement des conflits du travail, rapide, libre et juste. La commission veut croire que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour procéder rapidement à l’adoption de la loi sur le fonctionnement du tribunal du travail, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, afin d’assurer l’efficacité du système judiciaire comme sauvegarde contre l’impunité, et comme un moyen effectif de protéger les droits des travailleurs lors de conflits du travail.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

Article 3 de la convention. Droit d’élire des représentants librement. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre en compte, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les principes selon lesquels une condamnation pour une infraction, dont la nature ne remet pas en cause l’intégrité de la personne intéressée et ne présente pas de risque véritable pour l’exercice de fonctions syndicales, ne constitue pas un motif justifiant l’interdiction d’exercer des fonctions syndicales; et le droit des organisations d’élire librement leurs représentants ne devrait pas être entravé en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. La commission note que, dans sa réponse, le gouvernement précise que les travailleurs qui n’ont pas au moins trois mois d’ancienneté dans l’entreprise/l’établissement et dont le niveau d’éducation leur permet au moins de lire et d’écrire le khmer pourront se présenter comme candidats aux postes de délégués syndicaux. A cet égard, dans son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphe 104, la commission estime que sont incompatibles avec la convention les obligations que le candidat aux élections syndicales soit majeur ou sache lire et écrire. En outre, la commission note l’indication du gouvernement selon laquelle un ressortissant étranger ne peut présenter sa candidature que si sa résidence dans le pays est conforme aux dispositions de la loi sur l’immigration et ce, jusqu’à la fin du mandat sollicité.
Droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leurs activités et d’élaborer leurs programmes. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation afin de s’assurer que, lorsqu’il existe un différend concernant la mise en place de services minima, celui-ci est réglé par un organe indépendant investi de la confiance de l’ensemble des parties au conflit, et non par l’autorité exécutive ou administrative. Le gouvernement se réfère à l’article 329 de la loi sur le travail, portant sur les différends concernant la qualification d’un service essentiel qui doivent être réglés par le tribunal du travail, ou en son absence, par un tribunal ordinaire. La commission rappelle toutefois que ses commentaires portent plutôt sur la nécessité de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail, aux termes duquel, en l’absence d’un accord entre les parties sur le service minimum, le ministère en charge du Travail est habilité à le déterminer. En outre, en ce qui concerne l’article 326(2) de la loi sur le travail, en vertu duquel les travailleurs tenus d’assurer un service minimum, qui ne se présentent pas pour accomplir ce travail, sont considérés comme coupables de faute grave, la commission note que le gouvernement est d’avis que cette disposition n’a pas besoin d’être modifiée dans la mesure où elle est conforme aux principes de la liberté syndicale.
La commission veut croire que le gouvernement gardera à l’esprit les principes ci-dessus dans la finalisation du projet de loi sur les syndicats. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application pratique de l’article 326(2) de la loi sur le travail, en fournissant en particulier tout exemple de sanctions imposées aux travailleurs pour faute grave.
Loi anticorruption. La commission avait prié le gouvernement de transmettre une copie de la loi anticorruption, telle qu’adoptée, ainsi que des informations sur les activités de l’Unité de lutte contre la corruption, son plan stratégique et tout autre document pertinent. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle une copie de la loi ainsi que les autres documents seront transmis une fois qu’ils auront été traduits en anglais.

Observation (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

La commission note les observations à caractère général de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), reçues le 1er septembre 2015. La commission note en outre les observations formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 1er septembre 2015, faisant état en particulier de violences à l’encontre de syndicalistes au cours d’une grève ou lors de la célébration du 1er mai, de poursuites judiciaires pour harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et le blocage récurrent de l’enregistrement de nouveaux syndicats indépendants. Dans ses observations, la CSI fait part également de ses commentaires sur le projet de loi sur les syndicats. La commission note en outre les observations formulées par l’Internationale de l’éducation (IE) et son affiliée, l’Association nationale des enseignants pour le développement (NEAD), dans une communication reçue le 28 septembre 2015 sur des actes d’intimidation de la police lors du Congrès national de la NEAD en septembre 2014. La commission prie le gouvernement de faire part de ses commentaires sur les observations soumises par la CSI, l’IE et la NEAD.
La commission note également les observations soumises par l’Association indépendante des travailleurs de l’éducation du Cambodge (CITA) reçues le 4 août 2015, dans lesquelles elle se disait préoccupée au sujet de la loi nouvellement adoptée sur les associations et les organisations non gouvernementales. La commission est particulièrement préoccupée par le nombre de dispositions contenues dans cette loi, qui semblent aller à l’encontre des droits fondamentaux des enseignants prévus dans la convention. La commission prie instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises ou envisagées pour veiller à ce que les enseignants et les fonctionnaires, qui ne sont pas couverts par la législation générale sur les syndicats, soient pleinement garantis de leurs droits au titre de la convention.
La commission prend note des commentaires que le gouvernement a fournis en réponse aux précédentes observations de la CSI, l’IE et la NEAD concernant l’arrestation et la détention de travailleurs impliqués dans des manifestations, des obstacles à l’enregistrement de nouveaux syndicats indépendants et des mesures d’intimidation à l’encontre d’enseignants s’affiliant à des syndicats. La commission observe que le gouvernement s’oppose à presque toutes les allégations exprimées au sujet des questions qui ont été soulevées. Etant donné les divergences entre l’information fournie par les organisations des travailleurs et celle fournie par le gouvernement, la commission se doit de rappeler que la liberté d’association ne peut s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pression ou de menaces quelconques à l’encontre des dirigeants et des membres des organisations de travailleurs et d’employeurs, et qu’il est du ressort du gouvernement de garantir le respect de ce principe.
Assassinats de syndicalistes. Dans sa précédente observation, la commission exhortait le gouvernement à faire en sorte que des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux M. Chea Vichea, M. Ros Sovannareth et M. Hy Vuthy soient promptement menées. En ce qui concerne le meurtre de M. Ros Sovannareth, le gouvernement répète que l’affaire a déjà été réglée à la suite de l’arrestation et de la condamnation de M. Thach Saveth également connu sous le nom Chan Sopheak. L’intéressé a été condamné à quinze années d’emprisonnement le 15 février 2005 pour assassinat et purge actuellement sa peine en prison. A cet égard, la commission note les conclusions et les recommandations du Comité de la liberté syndicale concernant le cas no 2318, rappelant que M. Thach Saveth a été inculpé de l’assassinat de M. Ros Sovannareth dans le cadre de procès marqués par des irrégularités judiciaires et par l’absence de toute procédure régulière. Le comité a demandé au gouvernement de diligenter une enquête et d’indiquer si M. Thach Saveth a effectivement eu la possibilité de faire appel auprès du tribunal concerné et, dans l’affirmative, s’il a exercé son droit (voir 376e rapport, paragr. 218). La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle une commission interministérielle spéciale a été créée en août 2015 afin de mener rapidement des enquêtes approfondies sur ces procédures pénales. La commission prie à nouveau le gouvernement de faire en sorte que des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux susmentionnés soient menées promptement et de traduire en justice non seulement les auteurs, mais également les instigateurs de ces crimes odieux afin de mettre un terme à la situation d’impunité qui prévaut. Elle espère que le gouvernement sera prochainement en mesure de rendre compte de progrès accomplis à cet égard. La commission prie le gouvernement de s’assurer que la Commission interministérielle spéciale tiendra les organisations d’employeurs et de travailleurs nationales informées de manière régulière sur les progrès de ses enquêtes en vue de promouvoir le dialogue social et de mettre un terme au climat d’impunité entourant les actes de violence à l’encontre de syndicalistes.
Droits syndicaux et libertés publiques. Dans sa précédente observation, la commission avait prié instamment le gouvernement de mener une enquête sur les événements survenus les 2 et 3 janvier 2014 où des grèves et des manifestations sur la détermination du salaire minimum ont entraîné des décès, des violences graves et des attaques, ainsi que l’arrestation de travailleurs, et également sur d’éventuels vices de procédure dans le déroulement des procès qui s’en sont suivis. Dans son rapport, le gouvernement déclare une nouvelle fois que les grèves ont tourné à la violence et que les forces de sécurité ont dû intervenir afin de protéger les biens privés et publics et de restaurer la paix. Le gouvernement indique que trois commissions ont été établies suite à ces incidents: la Commission sur l’évaluation des dégâts, la Commission chargée d’enquêter sur la violence sur la route Veng Sreng et la Commission d’étude sur les salaires minima des travailleurs du secteur de l’habillement et de la chaussure. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes conclusions et recommandations formulées par ces commissions au sujet des incidents de janvier 2014, ainsi que sur toutes mesures de suivi prises à cet égard.
Suite à ses précédents commentaires, et tout en prenant dûment note des détails fournis concernant les tâches et la mission de la Commission de règlement des conflits survenus dans les grèves et les manifestations, la commission prie le gouvernement de rendre compte de ses travaux à ce sujet.
Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans sa précédente observation, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur tout renforcement des capacités, ou toute autre mesure prise en relation avec ces lois nouvellement adoptées, sur le statut des juges et des procureurs et sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux. Le gouvernement indique qu’un atelier national a été organisé en décembre 2014 sur la formation. Plus de 500 personnes y ont participé, qui représentaient toutes les parties prenantes concernées. D’autres formations sont menées par l’intermédiaire de la commission technique sur la réforme légale et judiciaire et par la direction générale de l’administration judiciaire, à l’intention des fonctionnaires des tribunaux provinciaux/municipaux. Le gouvernement explique en outre que les conflits du travail doivent être réglés par le tribunal du travail spécialisé, au tribunal de première instance et dans les chambres du travail des tribunaux supérieurs (cour d’appel et cour suprême). Pour conclure, le gouvernement indique qu’il convient de mettre au point des directives sur le fonctionnement du Tribunal du travail et de la Chambre du travail. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout progrès accompli dans la rédaction des directives sur le fonctionnement du Tribunal du travail et de la Chambre du travail et de fournir des informations sur les progrès accomplis dans le cadre de leur création et de leur fonctionnement. La commission rappelle à nouveau le besoin urgent d’assurer l’efficacité du système judiciaire comme sauvegarde à l’impunité, et un moyen effectif de protéger les droits des travailleurs lors de conflits de travail.
Projet de loi sur les syndicats. Dans sa précédente observation, tout en notant l’indication selon laquelle le projet de loi sur les syndicats devait être adopté début de 2015, la commission avait prié instamment le gouvernement d’accélérer l’adoption des amendements législatifs prenant en compte tous ses précédents commentaires, garantissant les droits inscrits dans la convention à tous les travailleurs, que ce soit par la loi sur les syndicats ou toute autre mesure législative pertinente. A cet égard, la commission note que le gouvernement renouvelle son engagement de garantir un processus complet et approfondi, et la commission accueille favorablement le fait qu’il collabore avec le BIT tout au long du processus de rédaction. Elle observe que la CSI a fourni des commentaires sur la version de 2014 du projet de loi, dans lesquels elle se disait préoccupée par un certain nombre de dispositions. Observant que le gouvernement a révisé à nouveau le projet de loi avant de le soumettre au Conseil des ministres, la commission veut croire que le projet de loi sur les syndicats sera adopté dans un très proche avenir et qu’il sera en entière conformité avec les dispositions de la convention. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout progrès à cet égard et de fournir une copie de la loi sur les syndicats dès qu’elle aura été adoptée.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

Articles 2 et 3 de la convention. Contrats de durée déterminée. La commission prend note de l’indication par la Confédération syndicale internationale (CSI), dans une communication reçue le 1er septembre 2014, selon laquelle la nette augmentation du recours à des contrats de travail à durée déterminée, en particulier dans l’industrie du textile, a eu pour effet d’empêcher la constitution de nouveaux syndicats ou de porter atteinte au pouvoir des syndicats existants. La CSI allègue que les travailleurs craignent que leurs contrats ne soient pas renouvelés s’ils adhèrent à un syndicat et qu’il est devenu plus difficile de prouver les représailles antisyndicales. Selon la CSI, il existe des obstacles pratiques, en ce sens que les travailleurs peuvent ne pas être employés durant une durée suffisante pour constituer un syndicat ou mener jusqu’à son terme la totalité d’un mandat de dirigeant syndical. De plus, la CSI fait observer que la législation du travail exige des dirigeants syndicaux qu’ils aient une année d’expérience dans l’usine, ce qui peut s’avérer difficile dans le cadre de contrats de durée déterminée. Rappelant que le recours à des contrats de travail à durée déterminée ne devrait pas se faire d’une façon telle qu’ils entravent l’exercice des droits consacrés par la convention, la commission prie le gouvernement de formuler ses commentaires à ce sujet.
Article 3. Droit d’élire des représentants librement. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre en compte, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les principes selon lesquels une condamnation pour une infraction dont la nature ne remet pas en cause l’intégrité de la personne intéressée et ne présente pas de risque véritable pour l’exercice de fonctions syndicales ne constitue pas un motif justifiant l’interdiction d’exercer des fonctions syndicales; et le droit des organisations d’élire librement leurs représentants ne devrait pas être entravé en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle la modification de la loi n’est pas nécessaire dans le contexte de la prochaine loi sur les syndicats. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle le projet de loi sur les syndicats devrait être adopté début 2015, la commission veut croire que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour faire adopter les modifications législatives qui tiendront compte de ses commentaires à cet égard.
Droit de grève. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement de: 1) modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail, en vertu duquel les travailleurs tenus d’assurer un service minimum, qui ne se présentent pas pour accomplir ce travail, sont considérés comme coupables de faute grave et par conséquent risquent d’être licenciés; et 2) modifier la législation afin de s’assurer que, lorsqu’il existe un différend concernant la mise en place de services minima, celui-ci est réglé par un organe indépendant investi de la confiance de l’ensemble des parties au conflit, et non par l’autorité exécutive ou administrative. La commission note que le gouvernement se réfère à cet égard à la prochaine loi sur les syndicats et que, étant donné que les services essentiels sont une question de sécurité nationale ainsi que de droit public général, d’ordre et de bien-être, elle nécessite la coordination et l’implication d’une présence ministérielle plus large allant au-delà du seul ministère du Travail et de la Formation professionnelle. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle le projet de loi sur les syndicats devrait être adopté début 2015, la commission veut croire que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour faire adopter les modifications législatives qui tiendront compte de ses commentaires à ce sujet.
Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission avait précédemment prié le gouvernement d’indiquer les progrès réalisés pour que soit prévu dans la législation le droit des syndicats ou des organisations professionnelles de s’affilier à des organisations internationales, dans le cadre de la prochaine loi sur les syndicats. La commission accueille favorablement l’indication du gouvernement selon laquelle la nouvelle loi sur les syndicats contient une disposition explicite prévoyant que les organisations d’employeurs et de travailleurs peuvent s’affilier à des organisations internationales d’employeurs et de travailleurs, et elle prie le gouvernement de communiquer copie de la nouvelle loi dès que celle-ci aura été adoptée.
Loi anticorruption. La commission avait prié le gouvernement de transmettre une copie de la loi anticorruption, telle qu’adoptée, ainsi que des informations sur les activités de l’Unité de lutte contre la corruption, son plan stratégique et tout autre document pertinent. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie de la loi anticorruption, telle qu’adoptée, ainsi que des informations sur les activités de l’Unité de lutte contre la corruption, son plan stratégique et tout autre document pertinent, qui n’ont pas été reçus avec son dernier rapport.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2015.]

Observation (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

Suivi de la discussion de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 103e session, mai-juin 2014)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu devant la Commission de l’application des normes de la Conférence en mai-juin 2014 à propos de l’application de la convention.
La commission prend note des observations formulées par l’Organisation internationale des employeurs (OIE) dans une communication reçue le 1er septembre 2014. Elle note par ailleurs les observations de l’OIE et de la Fédération cambodgienne des employeurs et des associations d’entreprises (CAMFEBA) reçues le 1er septembre 2014 concernant les progrès réalisés depuis la ratification de la convention et les défis résultant d’une multiplicité d’organisations syndicales. Celles-ci évoquent une prolifération de syndicats minoritaires sans caractère représentatif, qui ne suscite pas un environnement propice à des relations professionnelles harmonieuses.
La commission prend note en outre des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 31 août 2014, qui portent en particulier sur les assassinats, les arrestations et les détentions de travailleurs ayant participé aux manifestations, et sur un blocage de l’enregistrement de nouveaux syndicats indépendants. Elle prend note en outre des observations de l’Internationale de l’éducation (IE) et de son affiliée, l’Association nationale des travailleurs de l’éducation pour le développement (NEAD), reçues le 10 septembre 2014 dans une communication traitant des graves violences dirigées contre les manifestants et de l’absence d’un cadre légal permettant aux enseignants et aux fonctionnaires de créer des syndicats, ainsi que des intimidations dont ils font l’objet lorsqu’ils s’affilient à une association. La commission note que le gouvernement, répondant aux précédentes observations des organisations de travailleurs, indique la formation, en décembre 2012, d’un groupe de travail tripartite chargé d’étudier le contrat de travail et assure qu’aucun affilié d’un syndicat ayant rempli ses obligations et respecté la loi n’a été démis de ses fonctions.
La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires sur les observations communiquées par l’OIE, la CAMFEBA, la CSI, l’IE et la NEAD. Elle prie aussi le gouvernement de répondre à l’allégation de la CSI selon laquelle l’enregistrement d’au moins 30 nouveaux syndicats indépendants a été bloqué en raison de nouveaux critères imposés pour la circonstance et que la nouvelle obligation imposée aux dirigeants syndicaux de présenter un extrait de casier judiciaire pose problème à ceux qui ont été mis en examen pour cause d’activités syndicales légitimes.
Dans sa précédente observation, la commission avait pris note des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2318; elle avait exhorté le gouvernement à faire en sorte que des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres de Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy soient promptement menées, et elle avait prié le gouvernement de mener une enquête indépendante et impartiale sur les poursuites engagées contre Born Samnang et Sok Sam Oeun, les deux individus qui ont été condamnés pour le meurtre de Chea Vichea à l’issue d’un procès caractérisé par l’absence de garantie pour le droit à la défense. La commission accueille favorablement l’information reçue du gouvernement selon laquelle, le 25 septembre 2013, la Cour suprême a abandonné les charges retenues contre Born Samnang et Sok Sam Oeun et que ceux-ci ont été remis en liberté. La commission note que le gouvernement indique en outre que les autorités compétentes enquêtent toujours afin de découvrir les coupables de ces meurtres et que les cas de Ros Sovannareth et Hy Vuthy sont toujours devant les tribunaux. La commission prie à nouveau le gouvernement de faire en sorte que des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy soient menées promptement afin que les coupables soient punis, et de mettre un terme à la situation actuelle d’impunité, et elle espère qu’il sera bientôt en mesure de faire état de progrès à cet égard.
Droits syndicaux et libertés publiques. Dans son observation précédente, la commission priait instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs sont pleinement respectés et que les syndicalistes sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et de danger pour leur sécurité personnelle et leur vie, ainsi que pour celles de leurs familles. La commission note que le gouvernement indique que les autorités n’interfèrent pas dans le droit des organisations syndicales et que le gouvernement n’a arrêté personne qui n’ait pas agi contrairement à la loi. La commission prend note avec préoccupation des autres allégations de violence grave et de harcèlement à l’encontre de membres et de dirigeants de syndicats qui ont eu lieu depuis le mois de janvier 2014, et en particulier de l’information fournie par la CSI et la NEAD à propos des grèves et manifestations des 2 et 3 janvier 2014 relatives à la détermination du salaire minimum, qui ont entraîné des décès, des violences graves et des attaques, ainsi que l’arrestation de 23 travailleurs et, par la suite, de leurs procès dont il est allégué qu’ils étaient entachés de vices de procédure. La commission note par ailleurs les allégations de l’OIE et de la CAMFEBA selon lesquelles les violences de janvier 2014 ont commencé au sein du mouvement syndical. La commission prend également note des informations reçues de la CSI à propos de la création d’un nouveau Comité de règlement des grèves et manifestations qui serait composé des chefs des forces armées, et des allégations selon lesquelles, après les manifestations du mois de janvier, le gouvernement a recouru de manière répétée à la force pour disperser les manifestations et les défilés, notamment lors de la Journée internationale de la femme et du 1er mai, et a arrêté des responsables syndicaux pour avoir participé à ces manifestations. La CSI allègue en outre que des propriétaires d’ateliers de confection ont entamé des actions judiciaires civiles et pénales pour des dégâts provoqués à leurs biens, sans qu’ils soient en mesure d’en apporter la preuve, et qu’ils ont eu recours au système judiciaire pour harceler des syndicalistes en déposant des plaintes dépourvues de tout fondement. Rappelant que, en l’absence de libertés publiques, les droits syndicaux sont limités ou inexistants, la commission prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les libertés publiques soient pleinement respectées et que les syndicalistes soient en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et de danger pour leur sécurité personnelle et leur vie, ainsi que pour celles de leurs familles. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur la création, les buts et le fonctionnement du Comité de règlement des grèves et manifestations, et pour faire en sorte que des enquêtes complètes soient promptement menées sur les événements des 2 et 3 janvier 2014 par des organes indépendants ayant la confiance de toutes les parties. La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans sa précédente observation, la commission avait, comme la Commission de la Conférence en 2013, prié le gouvernement d’indiquer si les projets de loi sur le statut des juges et des procureurs et sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux avaient été adoptés, et de fournir des informations à cet égard et sur les progrès réalisés en vue de la création de tribunaux du travail. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle ces lois ont été adoptées par l’Assemblée nationale et transmises au Sénat, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout renforcement des capacités, ou toute autre mesure prise en relation avec ces lois afin de garantir l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire en pratique. La commission prie par ailleurs le gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés en vue de la création de tribunaux du travail.
Projet de loi sur les syndicats. Dans sa précédente observation, la commission priait le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises en vue de l’adoption de la nouvelle loi, et elle exprimait l’espoir que les partenaires sociaux seraient pleinement consultés tout au long du processus et que la loi prendrait en compte tous ses commentaires, en particulier celui demandant que les droits inscrits dans la convention soient pleinement garantis aux fonctionnaires, aux enseignants, aux travailleurs du transport aérien et maritime, aux juges et aux travailleurs domestiques. La commission note que le gouvernement indique que les partenaires sociaux ont été consultés sur le projet de loi, lequel sera amendé en conséquence. Elle note en outre que le gouvernement indique que les travailleurs du transport aérien et maritime sont couverts par la loi, tandis que les fonctionnaires, les enseignants, les militaires et les policiers sont couverts par d’autres textes de loi. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle le projet de loi sur les syndicats devrait être adopté pour le début de 2015, la commission veut croire que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer l’adoption des amendements législatifs prenant en compte tous ses précédents commentaires, garantissant les droits inscrits dans la convention à tous les travailleurs, que ce soit par la loi sur les syndicats ou par toute autre mesure législative pertinente. La commission rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2015.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera communiqué aux fins de son examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les questions qui avaient été soulevées dans sa demande directe antérieure qui était conçue dans les termes suivants:
Répétition
Article 3 de la convention. Droit d’élire des représentants librement. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle, ainsi que l’article 2(3) du Prakas no 021 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, aux termes duquel les personnes responsables de la direction et de l’administration d’une organisation ne doivent pas avoir été reconnues coupables d’actes criminels, afin de limiter ces restrictions aux condamnations mettant clairement en cause l’intégrité de la personne intéressée. La commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. Elle rappelle qu’une condamnation pour une infraction dont la nature ne remet pas en cause l’intégrité de la personne intéressée et ne présente pas de risque véritable pour l’exercice de fonctions syndicales ne constitue pas un motif justifiant l’interdiction d’exercer des fonctions syndicales et qu’un texte de loi prévoyant une interdiction fondée sur une infraction est incompatible avec les principes de la liberté syndicale. La commission prie de nouveau le gouvernement d’adopter, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte, et de communiquer des informations sur ce point.
En outre, la commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail, en vertu duquel les membres de syndicats doivent avoir exercé leur profession ou occupé leur emploi pendant au moins une année avant d’être élus à des fonctions syndicales. La commission avait noté que, dans son rapport, le gouvernement indiquait que le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que de telles dispositions peuvent entraver le droit des organisations d’élire librement leurs représentants en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. La commission considère que, afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de les assouplir, soit en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 117). La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants, soit en acceptant la candidature de personnes engagées dans le secteur depuis moins d’un an et de personnes ayant travaillé antérieurement dans l’organisation concernée.
Droit de grève. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail, en vertu duquel un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu, et, si les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord, il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. La commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que les autorités peuvent établir un régime de service minimum dans les services d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que des dommages à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Les services minima seraient appropriés dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause de droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers, ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 160 et 162). La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que les services minima seront conformes aux principes susmentionnés, et le prie notamment de: 1) modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail, en vertu duquel les travailleurs tenus d’assurer un service minimum qui ne se présentent pas pour accomplir ce travail sont considérés comme coupables de faute grave; et 2) modifier la législation afin de s’assurer que, lorsqu’il existe un différend concernant la mise en place de services minima, celui-ci est réglé par un organe indépendant investi de la confiance de l’ensemble des parties au conflit, et non par l’Autorité exécutive ou administrative.
Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission avait précédemment prié le gouvernement d’indiquer si les syndicats ou les organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de mentionner les dispositions législatives applicables. Elle avait noté que le gouvernement indiquait qu’aucune disposition ne prévoyait ce droit à l’époque, mais qu’en pratique de nombreux syndicats étaient affiliés à des organisations internationales, et que la prochaine loi sur les syndicats comporterait une disposition garantissant ce droit. La commission prie de nouveau le gouvernement d’indiquer les progrès réalisés pour que ce droit soit expressément prévu dans la législation, afin d’aligner le droit et la pratique.
La commission rappelle, d’après l’indication antérieure du gouvernement, qu’une loi de lutte contre la corruption a été adoptée en même temps qu’un plan stratégique quinquennal (2011-2015) et qu’une Unité de lutte contre la corruption (ACU) a été créée dans le cadre de la réforme légale et judiciaire que le gouvernement s’est engagé à mener pour lutter contre l’impunité. La commission prend note d’une copie du projet de loi de lutte contre la corruption, transmise par le gouvernement. Elle prie le gouvernement de transmettre une copie de la loi adoptée, dans le cas où elle est différente du projet, ainsi que des informations sur les activités de l’Unité de lutte contre la corruption, ainsi que des copies du plan stratégique et de tout autre document pertinent.

Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Suivi donné aux conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 102e session, juin 2013)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu devant la Commission de l’application des normes de la Conférence, en juin 2013, concernant l’application de la convention.
La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu.
La commission rappelle qu’elle avait précédemment prié instamment le gouvernement de transmettre ses observations sur les commentaires formulés en 2010, 2011 et 2013 par la Confédération syndicale internationale (CSI), la Confédération cambodgienne du travail (CLC), l’Internationale de l’éducation (IE), l’Association indépendante des enseignants cambodgiens (CITA), le Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC) qui se référaient à des actes graves de violence et de harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes. La commission prend note avec préoccupation des nouveaux commentaires soumis par la CSI dans une communication datée du 21 août 2013 et alléguant de violations graves de la convention. La commission prie instamment le gouvernement de fournir ses observations sur tous les commentaires en suspens soumis par la CSI, la CLC, l’IE, la CITA et le FTUWKC.
La commission prend note des commentaires de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) et de la Fédération cambodgienne des associations d’employeurs et d’entreprises (CAMFEBA) dans une communication en date du 30 août 2013. Elle note que ces deux organisations considèrent que «la liberté syndicale et le droit syndical sont extrêmement bien pratiqués au Cambodge», qu’elles évoquent les défis résultant d’une multiplicité croissante de syndicats, contestent les allégations concernant l’utilisation de contrats à durée déterminée et estiment que la question de la loi sur les syndicats ne devrait pas être examinée par la commission.
La commission prend note des dernières conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2318, concernant les assassinats des dirigeants syndicaux Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy et la poursuite de la répression à l’encontre des syndicalistes, qui avaient dû être examinées en l’absence de réponse du gouvernement, et dont le caractère avait été considéré comme extrêmement grave et urgent (370e rapport, paragr. 144 à 168). En l’absence de réponse du gouvernement, la commission ainsi que le Comité de la liberté syndicale et la Commission de la Conférence exhortent à nouveau le gouvernement à faire en sorte que des enquêtes complètes et indépendantes sur les meurtres de Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy soient promptement menées pour s’assurer que toutes les informations disponibles sont finalement communiquées à la justice afin de démasquer les véritables assassins de ces dirigeants syndicaux et leurs instigateurs, punir les coupables et mettre un terme à la situation actuelle d’impunité pour les actes de violence commis contre des dirigeants syndicaux. En outre, la commission prie le gouvernement de mener une enquête indépendante et impartiale sur les poursuites engagées contre Born Samnang et Sok Sam Oeun, et notamment sur les allégations de torture et autres mauvais traitements infligés par la police, d’intimidation de témoins et d’ingérence politique dans la procédure judiciaire. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’issue de ces enquêtes et sur les mesures d’indemnisation pour leur emprisonnement abusif.
Droits syndicaux et libertés publiques. Dans ses précédentes observations, la commission priait instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires dans un très proche avenir pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs sont pleinement respectés et que les syndicalistes sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et de danger pour leur sécurité personnelle et leur vie, ainsi que pour celles de leurs familles. La commission prend note avec regret de l’absence de réponse du gouvernement, en particulier en ce qui concerne les commentaires de plusieurs organisations de travailleurs alléguant de graves actes de violence et de harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, et compte tenu des discussions sur le Cambodge à la Commission de l’application des normes de la Conférence qui ont souligné le climat persistant de violence et d’intimidation envers les syndicalistes. La commission se voit obligée de rappeler une fois encore que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces, quelles qu’elles soient, visant les responsables et les membres d’organisations de travailleurs, et que la détention de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une atteinte grave aux libertés publiques en général et aux droits syndicaux en particulier. Elle rappelle en outre que les travailleurs ont le droit de participer à des manifestations pacifiques pour défendre leurs intérêts professionnels. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie à nouveau le gouvernement d’adopter toutes les mesures nécessaires, dans un très proche avenir, pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs sont pleinement respectés et que les syndicalistes sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et sans danger pour leur sécurité personnelle et pour leur vie, ainsi que celles de leurs familles, conformément aux principes susmentionnés. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à ce sujet.
Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans ses précédentes observations, la commission, avait pris note des conclusions de la mission de contacts directs de l’OIT d’avril 2008, relevant les graves problèmes de capacité et de manque d’indépendance du pouvoir judiciaire. La commission avait prié le gouvernement de prendre des mesures concrètes et tangibles pour assurer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, notamment des mesures visant à renforcer ses capacités et mettre en place des garanties contre la corruption. A cet égard, la commission note qu’en juin 2013 la Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement: i) d’adopter sans délai le projet de loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, et d’assurer leur pleine application; ii) de communiquer des informations sur les progrès réalisés à cet égard, ainsi que sur la création de tribunaux du travail; et iii) de communiquer les projets de textes à la commission d’experts. La commission note avec regret qu’aucun de ces textes n’a été communiqué. La commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer si ces lois ont été adoptées et, dans l’affirmative, d’en transmettre copie. Dans le cas contraire, elle prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires en vue de leur adoption sans délai.
En outre, la commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur tout progrès réalisé pour créer des tribunaux du travail.
Projet de loi sur les syndicats. La commission note qu’en juin 2013 la Commission de la Conférence a une fois de plus demandé au gouvernement d’intensifier ses efforts, en pleine consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, pour s’assurer que la loi sur les syndicats soit rapidement adoptée d’ici à la fin de 2013 afin de garantir pleinement les droits inscrits dans la convention. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises en vue de l’adoption de cette loi et exprime le ferme espoir que les partenaires sociaux seront pleinement consultés tout au long du processus et que la version finale du projet de loi sur les syndicats prendra en compte tous ses commentaires, et en particulier celui demandant que les droits inscrits dans la convention soient pleinement garantis aux fonctionnaires, aux enseignants, aux travailleurs du transport aérien et maritime, aux juges et aux travailleurs domestiques.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

La commission prend note de l’information fournie par le gouvernement dans son rapport, selon laquelle des consultations se sont tenues au sujet du projet de législation sur les syndicats, auquel il a été apporté la touche finale en août 2011 et qui a été transmis au Conseil des ministres pour examen. Le gouvernement ajoute qu’il espère que les institutions compétentes auxquelles ce projet de législation sera envoyé ensuite le réviseront pour l’améliorer. La commission note qu’elle n’a pas reçu copie de la version finale du projet de législation et que le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations sur les questions spécifiques soulevées dans sa précédente demande directe. Elle se voit donc contrainte de réitérer ses commentaires et elle exprime l’espoir qu’un rapport contenant des informations complètes lui sera communiqué pour examen à sa prochaine session.
Article 3 de la convention. Droit d’élire des représentants librement. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle, ainsi que l’article 2(3) du Prakas no 021 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, aux termes duquel les personnes responsables de la direction et de l’administration d’une organisation ne doivent pas avoir été reconnues coupables d’actes criminels, afin de limiter ces restrictions aux condamnations mettant clairement en cause l’intégrité de la personne intéressée. La commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. Elle rappelle qu’une condamnation pour une infraction dont la nature ne remet pas en cause l’intégrité de la personne intéressée et ne présente pas de risque véritable pour l’exercice de fonctions syndicales ne constitue pas un motif justifiant l’interdiction d’exercer des fonctions syndicales et qu’un texte de loi prévoyant une interdiction fondée sur une infraction est incompatible avec les principes de la liberté syndicale. La commission prie de nouveau le gouvernement d’adopter, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte, et de communiquer des informations sur ce point.
En outre, la commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail, en vertu duquel les membres de syndicats doivent avoir exercé leur profession ou occupé leur emploi pendant au moins une année avant d’être élus à des fonctions syndicales. La commission avait noté que, dans son rapport, le gouvernement indiquait que le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que de telles dispositions peuvent entraver le droit des organisations d’élire librement leurs représentants en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. La commission considère que, afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de les assouplir, soit en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 117). La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants, soit en acceptant la candidature de personnes engagées dans le secteur depuis moins d’un an et de personnes ayant travaillé antérieurement dans l’organisation concernée.
Droit de grève. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail, en vertu duquel un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu, et, si les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord, il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. La commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que les autorités peuvent établir un régime de service minimum dans les services d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que des dommages à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Les services minima seraient appropriés dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause de droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers, ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 160 et 162). La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que les services minima seront conformes aux principes susmentionnés, et le prie notamment de: 1) modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail, en vertu duquel les travailleurs tenus d’assurer un service minimum qui ne se présentent pas pour accomplir ce travail sont considérés comme coupables de faute grave; et 2) modifier la législation afin de s’assurer que, lorsqu’il existe un différend concernant la mise en place de services minima, celui-ci est réglé par un organe indépendant investi de la confiance de l’ensemble des parties au conflit, et non par l’Autorité exécutive ou administrative.
Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission avait précédemment prié le gouvernement d’indiquer si les syndicats ou les organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de mentionner les dispositions législatives applicables. Elle avait noté que le gouvernement indiquait qu’aucune disposition ne prévoyait ce droit à l’époque, mais qu’en pratique de nombreux syndicats étaient affiliés à des organisations internationales, et que la prochaine loi sur les syndicats comporterait une disposition garantissant ce droit. La commission prie de nouveau le gouvernement d’indiquer les progrès réalisés pour que ce droit soit expressément prévu dans la législation, afin d’aligner le droit et la pratique.

Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

La commission prend note de la réponse du gouvernement aux préoccupations exprimées en 2011 par la Confédération syndicale internationale (CSI) quant à un recours accru à des contrats à durée déterminée, susceptible de compromettre la jouissance des droits à la liberté syndicale et à la négociation collective. Le gouvernement indique que ce problème déjà ancien a fait l’objet de consultations tripartites, sur la base des projets de modification de la législation préparés par le ministère du Travail et de la Formation professionnelle, mais qu’aucun consensus n’a été obtenu. Il ajoute que la question fera l’objet de nouvelles consultations, dans un proche avenir, au sein du Comité consultatif tripartite du travail.
La commission note avec regret que le gouvernement ne répond ni aux autres commentaires de 2011 de la CSI, de la Confédération cambodgienne du travail (CLC) et de l’Internationale de l’éducation (IE), ni aux commentaires de 2010 de la CSI et du Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC), qui se référaient en particulier à de graves actes de violence et de harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes. De plus, la commission prend note avec préoccupation des nouveaux commentaires de la CSI, dans une communication datée du 31 juillet 2012, ainsi que de l’IE et de l’Association indépendante des enseignants du Cambodge (CITA), dans une communication du 31 août 2012, qui se réfèrent de nouveau à de graves actes de violence et de harcèlement contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes. La commission prie instamment le gouvernement de transmettre ses observations sur tous les points soulevés en 2010, 2011 et 2012 par la CSI, la CLC, l’IE et la CITA, et par le FTUWKC.
La commission prend note des dernières conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2318, concernant les assassinats des dirigeants syndicaux Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy et la poursuite de la répression des syndicalistes, qui avaient dû être examinées en l’absence de réponse du gouvernement, et dont le caractère avait été considéré comme extrêmement grave et urgent (365e rapport, novembre 2012, paragr. 286-290). Dans ses précédents commentaires concernant ces assassinats, la commission avait noté que: 1) les condamnations de Sok Sam Oeun et Born Samnang pour le meurtre de Chea Vichea avaient été renvoyées à la cour d’appel par la Cour suprême et que ces personnes avaient été libérées sous caution; 2) une enquête était en cours sur le meurtre de Chea Vichea, avant le renvoi de l’affaire à la cour d’appel pour l’ouverture d’une nouvelle procédure; 3) la Cour suprême avait ordonné, le 2 mars 2011, la mise en liberté provisoire sous caution de Thach Saveth, qui avait été condamné du meurtre de Ros Sovannareth et qui attendait depuis plusieurs années une révision de sa condamnation; et 4) l’affaire du meurtre de Hy Vuthy avait été transmise au procureur de la Cour municipale de Phnom Penh le 2 septembre 2010 pour l’ouverture d’une instruction. Dans le cas du meurtre de Chea Vichea, la cour d’appel avait annoncé que les preuves étaient insuffisantes pour accuser les deux individus qui avaient purgé une peine d’emprisonnement, avait indiqué que les accusations devraient être retirées et avait transmis le cas afin qu’il soit procédé à une nouvelle enquête. La commission avait exprimé le ferme espoir que la réouverture de ces affaires permettrait que des enquêtes complètes et indépendantes soient menées sur les meurtres des dirigeants syndicaux cambodgiens précités et pour juger les véritables auteurs de ces crimes odieux, ainsi que les instigateurs. De plus, compte tenu de ceci et de l’absence totale de procédure judiciaire régulière dans le cadre des procès de Sok Sam Oeun, Born Samnang et Thach Saveth, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur toutes mesures prises afin de les indemniser. La commission prend note de l’indication du gouvernement, dans son rapport, selon laquelle le ministère du Travail et de la Formation professionnelle a adressé une lettre au ministère de la Justice, et que ces informations seront fournies lorsque la réponse de ce dernier aura été reçue. La commission prie instamment le gouvernement de fournir les informations précédemment demandées au sujet de l’indemnisation dont devraient bénéficier Sok Sam Oeun, Born Samnang et Thach Saveth.
Droits syndicaux et libertés publiques. Dans ses précédentes observations, la commission avait prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, dans un proche avenir, pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs soient pleinement respectés et que les syndicalistes soient en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et de danger pour leur sécurité personnelle et leur vie ainsi pour que celles de leur famille. La commission note avec regret que, dans son rapport, le gouvernement reste silencieux sur ces questions, en particulier en ce qui concerne les commentaires faits par plusieurs organisations de travailleurs alléguant de graves actes de violence et de harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, et en ce qui concerne les discussions sur le Cambodge qu’a tenues la Commission de la Conférence sur l’application des normes, en juin 2011, à propos du climat persistant de violence et d’intimidation envers les syndicalistes. La commission se doit de rappeler une fois encore que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces, quelles qu’elles soient, visant les responsables et les membres d’organisations de travailleurs, et que la détention de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une atteinte grave aux libertés publiques en général et aux droits syndicaux en particulier. La commission rappelle en outre que les travailleurs ont le droit de participer à des manifestations pacifiques pour défendre leurs intérêts professionnels. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie de nouveau le gouvernement d’adopter toutes les mesures nécessaires, dans un très proche avenir, pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs sont pleinement respectés et que les syndicalistes sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et sans danger pour leur sécurité personnelle et leur vie, ainsi que celles de leur famille, conformément aux principes susmentionnés. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à ce sujet.
Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans ses précédentes observations, la commission, prenant note des conclusions de la mission de contact direct d’avril 2008, avait mentionné les graves problèmes de capacité et de manque d’indépendance du pouvoir judiciaire, et avait prié le gouvernement de prendre des mesures concrètes et tangibles pour assurer l’indépendance et l’efficacité du système judicaire, notamment des mesures visant à renforcer ses capacités et mettre en place des garanties contre la corruption. A cet égard, la commission rappelle qu’en 2011 la Commission de l’application des normes de la Conférence avait prié instamment le gouvernement de: 1) adopter sans délai le projet de loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, et à assurer leur application totale; 2) communiquer des informations sur les progrès réalisés à cet égard, ainsi qu’à propos de la création de tribunaux du travail; et 3) communiquer les projets de textes à la commission d’experts de façon qu’elle soit en mesure de formuler des commentaires quant à leur conformité avec la convention. La commission note qu’aucun de ces textes n’a été reçu. La commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer si ces lois ont été adoptées et, dans l’affirmative, d’en transmettre une copie. Si tel n’est pas le cas, elle prie le gouvernement de les adopter sans délai.
La commission prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé pour créer des tribunaux du travail.
De plus, s’agissant de l’indication précédente du gouvernement selon laquelle une loi contre la corruption avait été adoptée en même temps qu’un plan stratégique quinquennal (2011-2015) et qu’une unité de lutte contre la corruption (ACU) avait été créée, la commission note la déclaration du gouvernement à la 316e session du Conseil d’administration que l’ACU a été constituée comme il s’y était engagé afin d’adopter une réforme juridique et judiciaire de lutte contre l’impunité, et prie le gouvernement de fournir des informations sur la composition et le mandat de l’institution de lutte contre la corruption et sur ses activités, ainsi qu’une copie de la loi, du plan stratégique et de tout autre document pertinent.
Projet de loi sur les syndicats. Dans sa précédente observation, la commission avait noté que la CSI, la CLC et l’IE, dans leurs commentaires de 2011, avaient exprimé leur préoccupation à propos de plusieurs dispositions du projet de loi sur les syndicats, en particulier pour ce qui est de son champ d’application, de l’obligation pour un syndicat local de se faire enregistrer, de la possibilité pour le ministère du Travail de suspendre l’enregistrement d’un syndicat, des qualifications requises des dirigeants syndicaux et des sanctions imposées aux responsables et membres de syndicats qui se rendraient coupables de pratiques déloyales du travail. La commission avait également noté que le gouvernement avait bénéficié de l’assistance du Bureau pour ce projet de loi. La commission rappelle qu’en 2011 la Commission de l’application des normes de la Conférence avait prié le gouvernement: 1) d’intensifier ses efforts, en consultation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, pour s’assurer que le projet final de législation sur les syndicats serait pleinement conforme à la convention; et 2) de transmettre le projet de texte à la commission d’experts afin que celle-ci soit en mesure de faire des commentaires sur sa conformité avec la convention. La commission note que, d’après le rapport du gouvernement, de nombreuses consultations ont eu lieu sur le projet, qui a été finalisé en août 2011 et adressé au Conseil des ministres pour examen. Le gouvernement ajoute qu’il espère que les institutions compétentes auxquelles il sera envoyé ensuite l’examineront afin de l’améliorer. La commission note que la copie du projet de législation final sur les syndicats n’a pas été reçue. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises en vue de l’adoption de la loi sur les syndicats, et exprime le ferme espoir que les partenaires sociaux seront pleinement consultés tout au long du processus, et que la version finale du projet de loi sur les syndicats prendra en compte tous ses commentaires et en particulier celui demandant que les droits inscrits dans la convention soient pleinement garantis aux fonctionnaires, aux enseignants, aux travailleurs du transport aérien et maritime, aux juges et aux travailleurs domestiques.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

La commission note que le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations sur les questions soulevées dans sa précédente demande directe. Elle se doit par conséquent de réitérer ses commentaires et espère qu’un rapport contenant des informations complètes sera communiqué en vue de sa prochaine session.
Article 3 de la convention. Droit d’élire des représentants librement. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle, ainsi que l’article 2(3) du Prakas no 021 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, aux termes duquel les personnes responsables de la direction et de l’administration d’une organisation ne doivent pas avoir été reconnues coupables d’actes criminels, afin de limiter ces restrictions aux condamnations mettant clairement en cause l’intégrité de la personne intéressée. La commission avait noté que, dans son rapport, le gouvernement indiquait que le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle qu’une condamnation pour une infraction dont la nature ne remet pas en cause l’intégrité de la personne intéressée et ne présente pas de risque véritable pour l’exercice de fonctions syndicales ne constitue pas un motif justifiant l’interdiction d’exercer des fonctions syndicales et qu’un texte de loi prévoyant une interdiction fondée sur une infraction est incompatible avec les principes de la liberté syndicale. La commission prie à nouveau le gouvernement d’adopter, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte, et de communiquer des informations sur ce point.
En outre, la commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail, en vertu duquel les membres de syndicats doivent avoir exercé leur profession ou occupé leur emploi pendant au moins une année avant d’être élus à des fonctions syndicales. La commission avait noté que, dans son rapport, le gouvernement indiquait que le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que de telles dispositions peuvent entraver le droit des organisations d’élire librement leurs représentants en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. La commission considère que, afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de les assouplir, par exemple en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession ou en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 117). La commission prie le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants, soit en acceptant la candidature de personnes engagées dans le secteur depuis moins d’un an et de personnes ayant travaillé antérieurement dans l’organisation concernée.
Droit de grève. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail, en vertu duquel un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu, et, si les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord, qu’il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. La commission avait pris note de l’indication faite par le gouvernement dans son rapport, selon laquelle le ministère allait continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que les autorités peuvent établir un régime de service minimum dans les services d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que des dommages à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Les services minimums seraient appropriés dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers, ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 160 et 162). La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que les services minimums seront conformes aux principes susmentionnés; elle le prie notamment de: 1) modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail, en vertu duquel les travailleurs tenus d’assurer un service minimum qui ne se présentent pas pour accomplir ce travail sont considérés comme coupables de faute grave; et 2) modifier la législation afin de s’assurer que, lorsqu’il existe un différend concernant la mise en place de services minimums, celui-ci est réglé par un organe indépendant investi de la confiance de l’ensemble des parties au conflit, et non par l’autorité exécutive ou administrative.
Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission avait précédemment prié le gouvernement d’indiquer si les syndicats ou les organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de mentionner les dispositions législatives applicables. La commission avait noté que, dans son rapport, le gouvernement indiquait qu’aucune disposition ne prévoyait ce droit à l’époque, mais qu’en pratique de nombreux syndicats étaient affiliés à des organisations internationales, et que la prochaine loi sur les syndicats comporterait une disposition garantissant ce droit. La commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, les progrès réalisés pour que ce droit soit expressément prévu dans la législation afin d’aligner le droit et la pratique.

Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

La commission prend note des commentaires présentés par la Confédération syndicale internationale (CSI) en date des 4 et 31 août 2011, et par la Confédération cambodgienne du travail (CLC) et l’Internationale de l’éducation (IE), dans deux communications datées toutes deux du 31 août 2011. La commission note que ces commentaires portent sur des actes graves de violence et de harcèlement visant des responsables et des membres de syndicats et d’autres violations de la convention, et expriment des préoccupations quant à un recours accru aux contrats à durée déterminée susceptibles de compromettre la jouissance des droits à la liberté syndicale et à la négociation collective. La commission prie instamment le gouvernement de transmettre ses observations sur tous les points soulevés par la CSI, la CLC et l’IE, ainsi que sur les commentaires formulés en 2010 par la CSI et le Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC).
De plus, la commission prend note des conclusions et des recommandations du Comité de la liberté syndicale concernant le meurtre des dirigeants syndicaux Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, et la répression sans relâche dont font l’objet les syndicalistes (cas no 2318). En ce qui concerne l’impunité persistante entourant ces trois meurtres, la commission avait noté dans sa précédente observation que les condamnations de Sok Sam Oeun et Born Samnang pour le meurtre de Chea Vichea avaient été renvoyées à la cour d’appel par la Cour suprême et qu’ils avaient été libérés sous caution; que Thach Saveth, qui avait été condamné pour le meurtre de Ros Sovannareth, attendait depuis plusieurs années une révision de sa condamnation par la Cour suprême; et qu’aucune information n’avait été transmise à propos du meurtre de Hy Vuthy. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport, suivant lesquelles: 1) une enquête est en cours sur le meurtre de Chea Vichea, à la suite de quoi l’affaire sera renvoyée à la cour d’appel pour l’ouverture d’une nouvelle procédure; 2) la Cour suprême a ordonné, le 2 mars 2011, la mise en liberté provisoire sous caution de Thach Saveth; et 3) l’affaire du meurtre de Hy Vuthy a été transmise au procureur de la Cour municipale de Phnom Penh le 2 septembre 2010 pour l’ouverture d’une instruction. La commission exprime le ferme espoir que la réouverture de ces trois affaires par le pouvoir judiciaire permettra que des enquêtes complètes et indépendantes soient menées sur les meurtres des dirigeants syndicaux cambodgiens précités et pour juger les véritables auteurs de ces crimes odieux, ainsi que les instigateurs. Rappelant ses précédents commentaires et les conclusions du Comité de la liberté syndicale s’agissant de l’absence totale de procédure judiciaire régulière dans le cadre des procès de Sok Sam Oeun, Born Samnang et Thach Saveth, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes mesures prises afin de les indemniser.
Enfin, la commission prend note des discussions concernant le Cambodge qui ont eu lieu à la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2011. Elle note en particulier que la Commission de la Conférence a invité instamment le gouvernement à: 1) adopter sans délai le projet de loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, et à assurer leur application totale; 2) communiquer des informations sur les progrès réalisés à cet égard, ainsi qu’à propos de la création de tribunaux du travail; 3) intensifier ses efforts, en totale concertation avec les partenaires sociaux et avec l’assistance du BIT, pour faire en sorte que le projet de loi sur les syndicats soit en pleine conformité avec la convention; et 4) communiquer les projets de texte à la commission d’experts de façon qu’elle soit en mesure de formuler des commentaires quant à sa conformité avec la convention.
Droits syndicaux et libertés publiques. Dans ses précédentes observations, la commission priait instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs soient pleinement respectés et que les syndicalistes soient en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et de danger. La commission prend note des commentaires présentés par la CSI et la CLC concernant des actes graves de violence et de harcèlement visant des dirigeants et des membres de syndicats, tels que l’agression du président de la FTUWKC ou l’arrestation d’un autre dirigeant syndical, ainsi que des discussions qu’a eues la Commission de la Conférence à propos du climat persistant de violence et d’intimidation envers les syndicalistes. La commission se doit de rappeler une fois encore que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces quelles qu’elles soient, visant les responsables et les membres d’organisations de travailleurs, et que l’arrestation de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une atteinte grave aux libertés publiques en général et aux droits syndicaux en particulier. La commission rappelle en outre que les travailleurs ont le droit de participer à des manifestations pacifiques pour défendre leurs intérêts professionnels. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie à nouveau le gouvernement d’adopter toutes les mesures nécessaires, dans un très proche avenir, pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs sont pleinement respectés et que les syndicalistes sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et sans danger pour leur sécurité personnelle et leur vie, ainsi que celles de leur famille, conformément aux principes susmentionnés.
Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans ses précédentes observations, la commission, prenant note des conclusions de la mission de contact direct d’avril 2008, avait mentionné les graves problèmes de capacité et de manque d’indépendance du pouvoir judiciaire. Elle avait prié le gouvernement de prendre sans tarder des mesures concrètes et tangibles pour assurer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, notamment des mesures visant à renforcer ses capacités et mettre en place des garanties contre la corruption. La commission note que le gouvernement indique dans son rapport qu’une loi contre la corruption a été adoptée en même temps qu’un plan stratégique quinquennal (2011-2015) et qu’une institution de lutte contre la corruption a été créée. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la composition et le mandat de l’institution de lutte contre la corruption et sur ses activités, ainsi qu’une copie de la loi, du plan stratégique et de tout autre document pertinent.
S’agissant des projets de loi sur le statut des juges et procureurs et sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, en l’absence de toute nouvelle information, la commission prie le gouvernement d’indiquer si ces lois ont été adoptées. Si tel est le cas, elle réitère sa demande au gouvernement de fournir une copie de ces lois. Sinon, elle invite le gouvernement à les adopter sans délai.
En outre, en l’absence de toute nouvelle information sur la création des tribunaux du travail, la commission se doit de réitérer la demande adressée au gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
Projet de loi sur les syndicats. Dans sa précédente observation, la commission notait que le gouvernement avait indiqué qu’il élaborait, en collaboration avec le BIT, un projet de loi sur les syndicats. La commission note que, dans leurs commentaires de 2011, la CSI, la CLC et l’IE expriment leurs préoccupations à propos de plusieurs dispositions du projet de loi sur les syndicats, en particulier pour ce qui est de son champ d’application, de l’obligation pour un syndicat local de se faire enregistrer, de la possibilité pour le ministère du Travail de suspendre l’enregistrement d’un syndicat, des qualifications requises des dirigeants syndicaux et des sanctions imposées aux responsables et membres de syndicats qui se rendraient coupables de pratiques déloyales du travail. En outre, la CLC indique que, lors de l’élaboration du projet de loi, le gouvernement n’a pris en compte que les commentaires des organisations d’employeurs. L’IE indique en outre que l’Association cambodgienne des enseignants indépendants n’a pas été consultée. La commission note également que la Commission de la Conférence voulait croire que la nouvelle législation ferait en sorte, en particulier, que les droits inscrits dans la convention seraient pleinement garantis aux fonctionnaires, aux enseignants, aux travailleurs du transport aérien et maritime, aux juges et aux travailleurs domestiques. La commission a également été informée qu’un projet de loi sur les syndicats a été envoyé au Bureau et que le gouvernement a bénéficié de l’assistance du Bureau pour ce projet de loi. La commission prie le gouvernement de faire en sorte que les partenaires sociaux soient pleinement consultés sur le projet de loi sur les syndicats. En outre, la commission exprime le ferme espoir que la version finale du projet de loi sur les syndicats prendra en compte tous ses commentaires et en particulier celui demandant que les droits inscrits dans la Constitution soient pleinement garantis aux fonctionnaires, aux enseignants, aux travailleurs du transport aérien et maritime, aux juges et aux travailleurs domestiques. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur l’adoption de la loi sur les syndicats.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

La commission prend note des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 24 août 2010.

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. Dans ses précédents commentaires, la commission avait prié le gouvernement d’adopter les mesures nécessaires pour s’assurer que les juges et les personnes engagées à titre temporaire ou permanent dans la fonction publique bénéficient du droit de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que le Code du travail ne s’applique pas aux juges ni à certaines catégories de fonctionnaires, qu’ils font l’objet de lois distinctes et qu’ils ont leurs propres associations. Notant qu’une loi sur le statut des juges et des procureurs est en cours d’élaboration, la commission prie le gouvernement de tenir compte du fait que les juges devraient bénéficier du droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels, et lui demande de communiquer, dans son prochain rapport, des informations sur ce point.

En outre, dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l’expression «fonctionnaire de l’ordre législatif» désigne les employés des secrétariats de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui sont exclus du champ d’application des dispositions du Statut commun des fonctionnaires. La commission note que tant le Comité de la liberté syndicale (cas no 2222) que la CSI mentionnent des associations de fonctionnaires qui sont enregistrées mais que le ministère du Travail ne reconnaît pas comme syndicats, notamment des associations d’enseignants. De plus, la commission note que, au cours des discussions qui se sont déroulées à la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2010, le gouvernement a indiqué qu’il envisageait de garantir le droit à la liberté syndicale aux fonctionnaires. La commission rappelle que, à l’exception des membres de la police et des forces armées, la garantie du droit d’organisation doit s’appliquer à tous les travailleurs, y compris les fonctionnaires et les agents des services publics. Tous les agents de la fonction publique doivent avoir le droit de constituer des organisations professionnelles, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat, qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou qu’ils travaillent dans des entreprises de caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 48, 49 et 55). De plus, tous les travailleurs, qu’ils soient employés à titre permanent ou temporaire, doivent avoir le droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. Rappelant que la Commission de la Conférence a exprimé l’espoir que les mesures nécessaires seraient prises dans un proche avenir pour assurer le droit à la liberté syndicale aux fonctionnaires, la commission prie le gouvernement de communiquer, dans son prochain rapport, des informations sur toute mesure législative prise ou envisagée pour s’assurer que les fonctionnaires, y compris les enseignants, les employés de l’ordre législatif et les personnes employées à titre temporaire, bénéficient du droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier.

Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. La commission avait précédemment demandé au gouvernement d’indiquer si les organisations de travailleurs et d’employeurs peuvent se voir refuser un enregistrement et, dans l’affirmative, de mentionner les motifs admissibles de refus. La commission avait pris note de l’information du gouvernement selon laquelle les critères et les procédures concernant l’enregistrement sont fixés dans le Prakas no 021 et que, si les autorités ne répondent pas dans les deux mois suivant la réception d’une demande d’enregistrement d’une organisation, l’organisation est considérée comme enregistrée. La commission prend dûment note de la déclaration faite par le gouvernement dans son rapport selon laquelle aucun enregistrement n’a été refusé et que, pour être accordée, la demande d’enregistrement doit seulement remplir les critères fixés dans le Code du travail et le Prakas no 021.

Article 3. Droit d’élire des représentants librement. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle, ainsi que l’article 2(3) du Prakas no 021 de 2006 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, aux termes duquel les personnes responsables de la direction et de l’administration d’une organisation ne doivent pas avoir été reconnues coupables d’actes criminels, afin de limiter ces restrictions aux condamnations mettant clairement en cause l’intégrité de la personne intéressée. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que le ministère va continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle qu’une condamnation pour une infraction dont la nature ne remet pas en cause l’intégrité de la personne intéressée et ne présente pas de risque véritable pour l’exercice de fonctions syndicales ne constitue pas un motif justifiant l’interdiction d’exercer des fonctions syndicales, et qu’un texte de loi prévoyant une interdiction fondée sur une infraction est incompatible avec les principes de la liberté syndicale. La commission prie le gouvernement d’adopter, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte, et de communiquer, dans son prochain rapport, des informations sur ce point.

En outre, la commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail, en vertu duquel les membres de syndicats doivent avoir exercé leur profession ou occupé leur emploi pendant au moins une année avant d’être élus à des fonctions syndicales. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que le ministère va continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que de telles dispositions peuvent entraver le droit des organisations d’élire librement leurs représentants en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. Afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de les assouplir, par exemple en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession ou en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 117). La commission prie le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que le principe susmentionné sera pris en compte, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants, soit en acceptant la candidature de personnes engagées dans le secteur depuis moins d’un an et des personnes ayant travaillé antérieurement dans l’organisation concernée.

Droit de grève. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail, en vertu duquel un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu, que les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord, et qu’il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. La commission prend note de l’indication faite par le gouvernement dans son rapport selon laquelle le ministère va continuer à appliquer la loi sur le travail jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur les syndicats. La commission rappelle que les autorités peuvent établir un régime de services minimums dans les services d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Les services minimums seraient appropriés dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 160 et 162). La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre, dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les syndicats, les mesures nécessaires pour s’assurer que les services minimums seront conformes aux principes susmentionnés; elle le prie notamment de: 1) modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail, en vertu duquel les travailleurs tenus d’assurer un service minimum qui ne se présentent pas pour accomplir ce travail sont considérés comme coupables d’une faute grave; et 2) modifier la législation afin de s’assurer que, lorsqu’il existe un différend concernant la mise en place de services minimums, celui-ci est réglé par un organe indépendant investi de la confiance de l’ensemble des parties au conflit, et non par l’autorité exécutive ou administrative.

Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission avait précédemment prié le gouvernement d’indiquer si les syndicats ou les organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de mentionner les dispositions législatives applicables. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique qu’aucune disposition légale ne prévoit ce droit pour l’heure, mais qu’en pratique de nombreux syndicats sont affiliés à des organisations internationales, et que la prochaine loi sur les syndicats comportera une disposition qui garantit ce droit. La commission prie le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, les progrès réalisés pour que ce droit soit expressément prévu dans la législation afin d’aligner le droit et la pratique.

Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

La commission prend note des commentaires présentés par la Confédération syndicale internationale (CSI) et datés du 24 août 2010, qui concernent des actes de violence et de harcèlement visant des responsables et des membres de syndicats ainsi que d’autres violations de la convention. La commission prend note en particulier des informations de la CSI concernant l’absence de tribunal du travail, les lacunes générales du système judiciaire dans le cadre du meurtre des syndicalistes Chea Vichea et Ros Sovannareth, et le climat de répression des activités syndicales qui perdure.

La commission prend également note des observations formulées par le Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC) le 31 août 2010 selon lesquelles les syndicats indépendants restent fragiles, continuent à manquer de ressources et à exercer leurs activités dans un contexte extrêmement difficile. D’après ces observations, le FTUWKC a des difficultés à être reconnu par le gouvernement en tant que partie prenante au processus d’élaboration des politiques, et le harcèlement antisyndical, les intimidations et les licenciements de syndicalistes n’ont pas cessé. Ces derniers font toujours l’objet de violences policières, d’agressions, et sont victimes d’une application peu rigoureuse de la loi et de l’impunité des employeurs. La commission note aussi que, selon le FTUWKC, la loi de 2009 sur les manifestations pacifiques a de graves effets sur l’organisation de grèves, de rassemblements et d’autres activités syndicales, et que le Code pénal de 2009, en définissant la diffamation et la désinformation comme des infractions pénales, risque d’avoir des effets sur les activités syndicales. La commission prie instamment le gouvernement de transmettre, dans son prochain rapport, ses observations sur l’ensemble des questions soulevées par la CSI et le FTUWKC.

De plus, la commission prend note des conclusions et des recommandations du Comité de la liberté syndicale concernant le meurtre des responsables syndicaux Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, la répression sans relâche dont font l’objet les syndicalistes (cas no 2318) et la non-reconnaissance aux fonctionnaires du droit de constituer des syndicats (cas no 2222).

En ce qui concerne l’impunité persistante entourant les meurtres des syndicalistes susmentionnés, la commission rappelle que deux personnes ont été condamnées pour le meurtre de Chea Vichea (Sok Sam Oeun et Born Samnang) et que Thach Saveth a été reconnu coupable pour le meurtre de Ros Sovannareth, lors de procès marqués par des irrégularités judiciaires et par l’absence de procédure régulière. En dépit d’appels internationaux depuis la date des meurtres pour que soient diligentées des investigations complètes, indépendantes et impartiales, y compris au sujet du meurtre de Hy Vuthy, le gouvernement a omis de transmettre des informations sur les mesures prises à cet égard ou un rapport indépendant. Tout en notant que les condamnations de Sok Sam Oeun et de Born Samnang ont été renvoyées à la cour d’appel par la Cour suprême et qu’ils ont été libérés sous caution, le gouvernement n’a pas encore transmis d’information au sujet des enquêtes qui doivent être menées pour déterminer les véritables auteurs et instigateurs de l’assassinat de Chea Vichea. Par ailleurs, Thach Saveth est dans l’attente, depuis plusieurs années maintenant, d’une révision de sa condamnation par la Cour suprême. Aucune information n’a été transmise en ce qui concerne les progrès réalisés dans les enquêtes sur le meurtre de Hy Vuthy.

Enfin, la commission prend note des discussions concernant le Cambodge qui ont eu lieu à la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2010. Elle note en particulier que la Commission de la Conférence a regretté le manque d’informations concernant les enquêtes indépendantes sur ces meurtres qui n’ont toujours pas eu lieu. La Commission de la Conférence a rappelé que la liberté syndicale des travailleurs et des employeurs ne peut s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions et de menaces et a instamment prié le gouvernement d’assurer le respect de ce principe fondamental et de mettre fin à l’impunité en prenant, dans les meilleurs délais, les mesures nécessaires pour que des enquêtes complètes et impartiales soient menées sur le meurtre de ces responsables syndicaux et pour juger les auteurs, mais également les instigateurs, de ces crimes odieux. De plus, prenant note des graves anomalies concernant la procédure judiciaire, anomalies déjà mentionnées par la Cour suprême, la Commission de la Conférence a espéré que les personnes condamnées pour ces meurtres seraient lavées des accusations portées contre elles dans les meilleurs délais, et que la Cour suprême examinerait rapidement le recours formé par Thach Saveth pour assurer sa libération.

Droits syndicaux et libertés publiques. Dans ses précédents commentaires, la commission priait instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs sont pleinement respectés et que les syndicats sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation et sans danger. La commission prend note des observations formulées par la CSI, et de la discussion qui s’est déroulée à la Commission de la Conférence concernant le climat de violence et d’intimidation que subissent les syndicalistes, et qui perdure. La commission rappelle à nouveau que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces, quelles qu’elles soient, visant les responsables et les membres d’organisations de travailleurs, et que l’arrestation de syndicalistes pour des raisons liées à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une atteinte grave aux libertés publiques en général, et aux droits syndicaux en particulier. La commission rappelle également que les travailleurs ont le droit de participer à des manifestations pacifiques pour défendre leurs intérêts professionnels. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement d’adopter toutes les mesures nécessaires, dans un très proche avenir, pour s’assurer que les droits syndicaux des travailleurs sont pleinement respectés et que les syndicalistes sont en mesure d’exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidation, et sans danger pour leur sécurité personnelle et leur vie, conformément aux principes susmentionnés.

S’agissant du meurtre des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, dans ses précédents commentaires, la commission avait demandé au gouvernement de prendre dans les meilleurs délais des mesures concrètes pour mener des enquêtes indépendantes et d’accélérer le réexamen des condamnations de Born Samnang et de Sok Sam Oeun pour le meurtre de Chea Vichea, ainsi que de la condamnation de Thach Saveth pour le meurtre de Ros Sovannareth, et de prendre des mesures pour qu’ils soient libérés en attendant les résultats des enquêtes indépendantes mentionnées. La commission note que, pendant les discussions qui se sont déroulées à la Commission de la Conférence, le gouvernement a indiqué que Born Samnang et Sok Sam Oeun avaient été libérés sous caution, en attendant que leur cas soit réexaminé par la cour d’appel car la Cour suprême avait constaté des irrégularités dans la procédure pénale. Le gouvernement ajoute dans son rapport qu’il n’a pas reçu d’informations sur la date du réexamen. La commission note que, d’après le FTUWKC, le 17 août 2009, la cour d’appel a ordonné le réexamen de l’affaire Chea Vichea afin de diligenter une nouvelle enquête, mais qu’aucune enquête n’a été menée. La commission note avec préoccupation que le gouvernement ne transmet pas, dans son rapport, d’informations faisant état de progrès pour mener des enquêtes sur ces trois meurtres. Par conséquent, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de mettre fin à l’impunité en prenant sans délai les mesures nécessaires pour que des enquêtes complètes et impartiales soient menées sur les meurtres des responsables syndicaux mentionnés, et pour juger les auteurs, mais également les instigateurs, de ces crimes odieux. La commission prie instamment le gouvernement de transmettre, avec son prochain rapport, des informations détaillées sur:

i)     les mesures prises pour lever toutes les charges à l’encontre de Born Samnang et de Sok Sam Oeun et pour le remboursement des cautions payées ainsi que pour l’ouverture d’une enquête complète concernant le meurtre de Chea Vichea telle que demandée par la Cour suprême;

ii)    la révision attendue, par la Cour suprême, de la décision de la cour d’appel concernant la condamnation de Thach Saveth pour le meurtre de Ros Sovannareth, et l’ouverture d’une enquête sur ce crime; et

iii)   les résultats de l’enquête sur le meurtre de Hy Vuthy.

Indépendance du pouvoir judiciaire. Dans sa précédente observation, prenant note des conclusions de la mission de contacts directs de l’OIT d’avril 2008, la commission avait mentionné les graves problèmes de moyens et le manque d’indépendance du pouvoir judiciaire; elle avait prié le gouvernement de prendre sans tarder des mesures concrètes pour assurer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, notamment des mesures visant à renforcer ses capacités et mettre en place des garanties contre la corruption. A cet égard, la commission prend note du rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies du 16 septembre 2010 sur la situation des droits de l’homme au Cambodge, dans lequel plusieurs mesures sont recommandées pour renforcer l’indépendance du pouvoir judiciaire, notamment l’adoption sans tarder de la loi sur le statut des juges et des procureurs, et de la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux. La commission prie le gouvernement de transmettre, avec son prochain rapport, des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, notamment pour adopter la loi sur le statut des juges et des procureurs et la loi sur l’organisation et le fonctionnement des tribunaux, en transmettant copie des textes de loi applicables.

Respect du droit et évolution de la législation. Enfin, la commission note que, au cours des discussions qui se sont déroulées à la Commission de la Conférence, le gouvernement a rappelé: i) qu’il envisageait de créer un tribunal du travail conformément aux normes internationales; et ii) que le projet de loi sur les syndicats qu’il élaborait en coopération avec le BIT serait adopté par le Parlement en 2011, et qu’il espérait que la loi garantirait aux travailleurs et aux employeurs le droit de s’organiser et de négocier collectivement. Le gouvernement ajoute dans son rapport que le groupe de travail du ministère du Travail et de la Formation professionnelle a achevé son examen du projet de loi sur les syndicats, lequel comporte 17 chapitres et 90 articles, que le projet a été transmis au BIT en vue d’être examiné, que les associations de travailleurs et d’employeurs seront consultées séparément à son sujet et qu’il sera ensuite présenté lors d’une réunion publique rassemblant des acteurs divers (représentants d’organismes publics, de syndicats, d’associations d’employeurs et d’organisations internationales, notamment l’OIT et la Société financière internationale (groupe de la Banque mondiale)). La commission prie le gouvernement de transmettre, avec son prochain rapport, des informations sur la création du tribunal du travail et l’adoption de la loi sur les syndicats et sur les consultations menées en la matière.

Rappelant sa demande adressée au gouvernement de ne négliger aucun effort pour prendre les mesures nécessaires afin de rendre sa législation conforme à la convention, la commission rappelle au gouvernement que, s’il le souhaite, il peut recourir à l’assistance technique du Bureau.

La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission avait demandé précédemment au gouvernement de transmettre copie des textes de loi prévoyant pour les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique le droit de constituer des organisations. A cet égard, la commission note que le gouvernement ne fait pas mention de lois couvrant spécifiquement les catégories susmentionnées de fonctionnaires. Le gouvernement répète que les fonctionnaires de la législature et de l’ordre judiciaire ne sont pas couverts par les Statuts communs des fonctionnaires. Dans ces conditions, la commission rappelle que, à l’exception des membres de la police et des forces armées, tous les travailleurs devraient jouir du droit syndical, y compris les agents publics et les hauts fonctionnaires. Tous les agents de la fonction publique devraient avoir le droit de constituer des organisations professionnelles, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat, ou qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou travaillant dans des entreprises de caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 48, 49 et 55). De plus, tous les travailleurs, qu’ils soient occupés à titre permanent ou temporaire, devraient avoir le droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. En conséquence, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures législatives nécessaires pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. Notant en outre l’indication du gouvernement selon laquelle les «fonctionnaires de l’ordre législatif» – exclus également des dispositions des Statuts communs des fonctionnaires – sont des agents des secrétariats de l’Assemblée nationale et du Sénat, la commission demande au gouvernement d’indiquer la législation qui garantit à ces catégories de fonctionnaires le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. Le gouvernement est aussi prié de communiquer copie de la législation applicable.

Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. La commission avait pris note précédemment de l’article 268 de la loi sur le travail qui porte sur la procédure d’enregistrement. Elle avait demandé au gouvernement un complément d’information sur la procédure d’enregistrement et, en particulier, d’indiquer tous cas de refus d’enregistrement d’organisations de travailleurs et d’employeurs. Le gouvernement indique à cet égard que de nouveaux critères et procédures en matière d’enregistrement ont été fixés dans le Prakas no 021 du 15 février 2006. Le gouvernement indique aussi que, si les autorités ne répondent pas dans un délai de deux mois après réception d’une demande d’enregistrement d’une organisation, l’organisation est considérée comme étant enregistrée. Tout en prenant note de ces indications, la commission fait observer toutefois que le Prakas no 021 de 2006 n’indique pas si les demandes d’enregistrement d’organisations peuvent être refusées, et pour quels motifs. En conséquence, la commission demande au gouvernement d’indiquer si l’enregistrement d’organisations de travailleurs et d’employeurs peut être refusé et, dans l’affirmative, de préciser les motifs admissibles de refus. La commission demande aussi au gouvernement d’apporter des précisions sur la procédure d’enregistrement et d’indiquer les cas éventuels de refus d’enregistrement.

Article 3. Droit d’élire librement leurs représentants. La commission avait demandé précédemment au gouvernement de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle. La commission avait demandé aussi au gouvernement de modifier l’article 2(3) du Prakas no 21 de 2006 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, qui prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation ne doivent jamais avoir été reconnues coupables d’aucun acte criminel. La commission avait demandé au gouvernement de modifier ces dispositions afin de limiter ces restrictions aux condamnations pour des actes qui, manifestement, mettent en cause l’intégrité de la personne intéressée. Le gouvernement avait indiqué à ce sujet que ces questions seront traitées dans la prochaine loi sur les syndicats. Dans ces conditions, la commission exprime l’espoir que, en vertu de la loi sur les syndicats, il ne pourra être interdit d’occuper des fonctions syndicales qu’aux personnes ayant été condamnées pour des actes mettant clairement en cause leur intégrité. La commission prie le gouvernement d’indiquer les progrès accomplis dans l’élaboration de la loi sur les syndicats, et d’en communiquer copie dès qu’elle aura été adoptée.

La commission avait demandé précédemment au gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail qui prévoit que les membres de syndicats doivent avoir exercé la profession ou occupé l’emploi depuis au moins un an avant d’être élus à des fonctions syndicales. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le but de cette condition est de garantir que les responsables syndicaux aient suffisamment de connaissances et d’expérience. Le gouvernement avait indiqué aussi qu’il envisagera de modifier l’article 269(4) mais que ce n’est pas encore le cas. A ce sujet, la commission rappelle que les dispositions de ce type entravent le droit des organisations d’élire librement leurs représentants en se privant de personnes qualifiées pour des fonctions syndicales ou en privant les syndicats de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. Afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de l’assouplir, par exemple en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession, ou en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 117). En conséquence, la commission prie le gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail afin de le rendre conforme à la convention, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession depuis moins d’un an, ou ayant été précédemment occupées dans l’organisation intéressée.

Droit de grève. La commission avait demandé précédemment au gouvernement de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail qui dispose qu’un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu et que les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord, et qu’il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. La commission avait noté l’indication du gouvernement, à savoir que, pour élaborer la loi sur les syndicats, il envisagera de définir étroitement l’expression «service minimum» afin que ce libellé ne désigne que le service minimum destiné à garantir la sécurité ou la protection de la population contre la destruction de biens de production, ou dans les entreprises de services collectifs. Le gouvernement avait aussi indiqué qu’il envisagera de donner au Conseil d’arbitrage, ou à un autre organe d’arbitrage indépendant, la faculté de déterminer le service minimum défini dans la loi sur les syndicats. Dans ces conditions, la commission rappelle que les autorités peuvent établir un système de service minimum dans les services qui sont d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Un service minimum serait approprié dans les situations où une limitation importante, voire une interdiction totale, de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 160 et 162). La commission espère que le service minimum prévu dans la loi sur les syndicats sera conforme aux principes susmentionnés. De plus, la commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour: 1) modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail qui dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave; et 2) modifier la législation pour qu’un désaccord quant à l’établissement d’un service minimum soit réglé par un organisme indépendant jouissant de la confiance de l’ensemble des parties au différend, et non par l’autorité exécutive ou administrative.

Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission avait demandé précédemment au gouvernement d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables. Le gouvernement avait indiqué à cet égard que, bien qu’aucune disposition juridique ne prévoie ce droit actuellement, dans la pratique beaucoup de syndicats sont affiliés à des organisations internationales. Notant aussi l’indication selon laquelle la loi sur les syndicats comprendra une disposition garantissant ce droit, la commission prie le gouvernement d’indiquer les progrès accomplis à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

La commission prend note des commentaires soumis en août 2009 par la Confédération syndicale internationale (CSI) et le Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC) concernant les actes de violence et de harcèlement à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ainsi que d’autres violations de la convention. La commission demande au gouvernement d’envoyer ses observations à cet égard. La commission prend également note des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2318 (351e rapport).

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:

Dans son commentaire précédent, la commission avait pris note de la discussion qui a eu lieu en 2007 au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence, et en particulier du fait que la Commission de la Conférence s’était dite profondément préoccupée par les déclarations concernant l’assassinat des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, les menaces de mort proférées et la prévalence d’un climat d’impunité dans le pays. La Commission de la Conférence, rappelant que les organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent exercer leurs droits que dans un climat exempt de violences, de pressions ou de menaces visant les dirigeants et les membres de ces organisations, avait invité le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de ce principe fondamental et mettre fin à l’impunité. Elle avait aussi prié instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour diligenter des enquêtes approfondies et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux cambodgiens susmentionnés, afin de ne pas traduire uniquement en justice les auteurs, mais aussi les instigateurs de ces crimes odieux.

Ayant pris aussi note des observations de la CSI sur les irrégularités qui avaient accompagné les procès de Born Samnang et Sok Sam Oeun – ces deux hommes ont été accusés du meurtre de Chea Vichea, malgré des preuves substantielles de leur innocence – et sur les nombreux acte de harcèlement et de violence à l’encontre de dirigeants syndicaux, la commission avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris des enquêtes judiciaires, pour mettre un terme aux actes de violence et d’intimidation commis à l’encontre de responsables syndicaux et de membres de syndicats. Enfin, la commission avait noté que le gouvernement acceptait une mission de contacts directs, comme l’avait demandé la Commission de la Conférence. Elle avait exprimé le ferme espoir que la mission aboutirait à des résultats importants en ce qui concerne l’ensemble des questions graves susmentionnées.

Dans ce contexte, la commission note avec préoccupation que, selon le FTUWKC, une campagne de violence et de répression systématiques a été menée contre lui dans une usine, y compris des agressions violentes commises par des bandes, à l’encontre de dirigeants syndicaux en dehors de l’usine. Elle avait aussi pris note des allégations suivantes: une manifestation de ce syndicat aurait été violemment dispersée – la police a tiré dans le dos d’un travailleur et 16 syndicalistes ont été arrêtés puis détenus; 1 500 travailleurs auraient été licenciés à la suite de la manifestation, tous ou presque seraient des dirigeants ou des membres du FTUWKC; une liste noire des personnes licenciées par la direction aurait ensuite été établie; et la direction aurait fait circuler leurs noms et leurs photos dans d’autres usines. Le FTUWKC affirme aussi que les autorités ont peu fait pour enquêter sur les graves lésions qu’ont subies les dirigeants syndicaux et, de fait, elles ont participé régulièrement à la répression violente de manifestations, de grèves et de marches de travailleurs dans plusieurs usines.

La CSI indique aussi que, dans de nombreuses d’usines, des syndicalistes continuent de subir des répressions de tout type sans que les autorités n’interviennent ou presque. Ces actes antisyndicaux comprennent les faits suivants: actes de violence commis par des voyous engagés à cette fin, menaces de mort, établissement de listes noires, traduction en justice de syndicalistes pour des motifs infondés, retenues sur les salaires et exclusion des possibilités de promotion. Un dirigeant du FTUWKC a été frappé par quatre ou cinq personnes masquées et armées de barres de fer alors qu’il se rendait de son domicile au travail. La CSI indique aussi que les activités de l’Association cambodgienne des enseignants indépendants (CITA) sont constamment entravées; le gouvernement ne reconnaît pas cette association comme syndicat et, souvent, ses manifestations et protestations ont été interdites. Une autre organisation, l’Association cambodgienne des fonctionnaires indépendants (CICSA), n’est pas reconnue non plus comme syndicat.

Enfin, la commission prend note du rapport de la mission de contacts directs qui a séjourné au Cambodge du 21 au 25 avril 2008. La commission prend note avec une profonde préoccupation du rapport de la mission et de ses conclusions, entre autres celles qui suivent: 1) le système judiciaire cambodgien fait face à de graves problèmes de capacité et de manque d’indépendance; 2) la condamnation de Born Samnang et de Sok Sam Oeun pour le meurtre du dirigeant syndical Chea Vichea a été prononcée le 12 avril 2007, au cours d’un procès marqué par des irrégularités de procédure, y compris le fait que le tribunal a refusé de prendre en considération des éléments prouvant leur innocence; 3) Thach Saveth a été condamné à 15 ans d’emprisonnement pour le meurtre du dirigeant syndical Ros Sovannareth; et 4) le gouvernement n’a fait état d’aucune mesure concrète pour veiller à ce que les cas en suspens soient examinés convenablement et en toute indépendance. De plus, la commission note avec préoccupation qu’elle n’a pas reçu d’information sur les progrès de l’enquête concernant Hy Vuthy.

Dans ces circonstances, la commission ne peut que déplorer l’absence de fait nouveau à cet égard dans le rapport du gouvernement, six mois après la mission de contacts directs. La commission prie le gouvernement de faire le nécessaire pour prendre des mesures concrètes et tangibles et de toute urgence pour: 1) diligenter des enquêtes indépendantes, de toute urgence, sur les meurtres de Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy; 2) accélérer la révision des condamnations de Born Samnang et Sok Sam Oeun pour le meurtre de Chea Vichea, ainsi que la condamnation de Thach Saveth pour le meurtre de Ros Sovannareth, et prendre des mesures en vue de leur libération en attendant les résultats des enquêtes indépendantes susmentionnées; 3) prendre les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, y compris des mesures de renforcement des capacités et des mesures de protection contre la corruption. A cet égard, la commission recommande au gouvernement de recourir à l’assistance technique du Bureau, notamment pour renforcer les capacités institutionnelles ainsi que pour établir des tribunaux du travail et pour réviser la loi sur les syndicats. Enfin, la commission prie instamment le gouvernement, comme l’a fait le Comité de la liberté syndicale, de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les droits syndicaux des travailleurs au Cambodge soient pleinement respectés et à ce que les syndicalistes puissent exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidations et de risques pour leur sécurité personnelle et leur vie.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un très proche avenir.

La commission note les conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2318, et en particulier la décision de la Cour suprême en date du 31 décembre 2008 ordonnant la libération de Born Samnang et Sok Sam Oeun. Relevant à cet égard que la Cour suprême a également ordonné la réouverture de l’enquête concernant l’assassinat de Chea Vichea, la commission, à l’instar du Comité de la liberté syndicale, prie instamment le gouvernement de s’assurer que l’enquête soit diligentée promptement, de manière indépendante et expéditive, et d’en indiquer les résultats.

Enfin, la commission note la réponse du gouvernement aux observations de la CSI et du FTUWKC de 2008 et espère que le groupe de travail qui examine la législation sur les syndicats tiendra compte de toutes ces questions en instance. En outre, la commission note l’indication du gouvernement selon laquelle plus de 1 000 syndicats ont été constitués et des activités tripartites ont été tenues.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 99e session et de répondre en détail aux présents commentaires en 2010.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission avait demandé précédemment au gouvernement de transmettre copie des textes de loi prévoyant pour les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique le droit de constituer des organisations. A cet égard, la commission note que le gouvernement ne fait pas mention de lois couvrant spécifiquement les catégories susmentionnées de fonctionnaires. Le gouvernement répète que les fonctionnaires de la législature et de l’ordre judiciaire ne sont pas couverts par les Statuts communs des fonctionnaires. Dans ces conditions, la commission rappelle que, à l’exception des membres de la police et des forces armées, tous les travailleurs devraient jouir du droit syndical, y compris les agents publics et les hauts fonctionnaires. Tous les agents de la fonction publique devraient avoir le droit de constituer des organisations professionnelles, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat, ou qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou travaillant dans des entreprises de caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 48, 49 et 55). De plus, tous les travailleurs, qu’ils soient occupés à titre permanent ou temporaire, devraient avoir le droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. En conséquence, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures législatives nécessaires pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. Notant en outre l’indication du gouvernement selon laquelle les «fonctionnaires de l’ordre législatif» – exclus également des dispositions des Statuts communs des fonctionnaires – sont des agents des secrétariats de l’Assemblée nationale et du Sénat, la commission demande au gouvernement d’indiquer la législation qui garantit à ces catégories de fonctionnaires le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. Le gouvernement est aussi prié de communiquer copie de la législation applicable.

Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. La commission avait pris note précédemment de l’article 268 de la loi sur le travail qui porte sur la procédure d’enregistrement. Elle avait demandé au gouvernement un complément d’information sur la procédure d’enregistrement et, en particulier, d’indiquer tous cas de refus d’enregistrement d’organisations de travailleurs et d’employeurs. Le gouvernement indique à cet égard que de nouveaux critères et procédures en matière d’enregistrement ont été fixés dans le Prakas no 021 du 15 février 2006. Le gouvernement indique aussi que, si les autorités ne répondent pas dans un délai de deux mois après réception d’une demande d’enregistrement d’une organisation, l’organisation est considérée comme étant enregistrée. Tout en prenant note de ces indications, la commission fait observer toutefois que le Prakas no 021 de 2006 n’indique pas si les demandes d’enregistrement d’organisations peuvent être refusées, et pour quels motifs. En conséquence, la commission demande au gouvernement d’indiquer si l’enregistrement d’organisations de travailleurs et d’employeurs peut être refusé et, dans l’affirmative, de préciser les motifs admissibles de refus. La commission demande aussi au gouvernement d’apporter des précisions sur la procédure d’enregistrement et d’indiquer les cas éventuels de refus d’enregistrement.

Article 3. Droit d’élire librement leurs représentants. La commission avait demandé précédemment au gouvernement de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle. La commission avait demandé aussi au gouvernement de modifier l’article 2(3) du Prakas no 21 de 2006 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, qui prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation ne doivent jamais avoir été reconnues coupables d’aucun acte criminel. La commission avait demandé au gouvernement de modifier ces dispositions afin de limiter ces restrictions aux condamnations pour des actes qui, manifestement, mettent en cause l’intégrité de la personne intéressée. Le gouvernement indique à ce sujet que ces questions seront traitées dans la prochaine loi sur les syndicats. Dans ces conditions, la commission exprime l’espoir que, en vertu de la loi sur les syndicats, il ne pourra être interdit d’occuper des fonctions syndicales qu’aux personnes ayant été condamnées pour des actes mettant clairement en cause leur intégrité. La commission prie le gouvernement d’indiquer les progrès accomplis dans l’élaboration de la loi sur les syndicats, et d’en communiquer copie dès qu’elle aura été adoptée.

La commission avait demandé précédemment au gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail qui prévoit que les membres de syndicats doivent avoir exercé la profession ou occupé l’emploi depuis au moins un an avant d’être élus à des fonctions syndicales. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le but de cette condition est de garantir que les responsables syndicaux aient suffisamment de connaissances et d’expérience. Le gouvernement indique aussi qu’il envisagera de modifier l’article 269(4) mais que ce n’est pas encore le cas. A ce sujet, la commission rappelle que les dispositions de ce type entravent le droit des organisations d’élire librement leurs représentants en se privant de personnes qualifiées pour des fonctions syndicales ou en privant les syndicats de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. Afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de l’assouplir, par exemple en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession, ou en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 117). En conséquence, la commission prie le gouvernement de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail afin de le rendre conforme à la convention, soit en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession depuis moins d’un an, ou ayant été précédemment occupées dans l’organisation intéressée.

Droit de grève. La commission avait demandé précédemment au gouvernement de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail qui dispose qu’un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu et que les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord, et qu’il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que, pour élaborer la loi sur les syndicats, il envisagera de définir étroitement l’expression «service minimum» afin que ce libellé ne désigne que le service minimum destiné à garantir la sécurité ou la protection de la population contre la destruction de biens de production, ou dans les entreprises de services collectifs. Le gouvernement indique aussi qu’il envisagera de donner au Conseil d’arbitrage, ou à un autre organe d’arbitrage indépendant, la faculté de déterminer le service minimum défini dans la loi sur les syndicats. Dans ces conditions, la commission rappelle que les autorités peuvent établir un système de service minimum dans les services qui sont d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Un service minimum serait approprié dans les situations où une limitation importante, voire une interdiction totale, de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 160 et 162). La commission espère que le service minimum prévu dans la loi sur les syndicats sera conforme aux principes susmentionnés. De plus, la commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour: 1) modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail qui dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave; et 2) modifier la législation pour qu’un désaccord quant à l’établissement d’un service minimum soit réglé par un organisme indépendant jouissant de la confiance de l’ensemble des parties au différend, et non par l’autorité exécutive ou administrative.

Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission avait demandé précédemment au gouvernement d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables. Le gouvernement indique à cet égard que, bien qu’aucune disposition juridique ne prévoie ce droit actuellement, dans la pratique beaucoup de syndicats sont affiliés à des organisations internationales. Notant aussi l’indication selon laquelle la loi sur les syndicats comprendra une disposition garantissant ce droit, la commission prie le gouvernement d’indiquer les progrès accomplis à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

La commission note les observations soumises par la Confédération syndicale internationale (CSI) et le Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC) dans des communications du 29 août 2008. La commission prend note aussi des conclusions et recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2318 (351e rapport).

Dans son commentaire précédent, la commission avait pris note de la discussion qui a eu lieu en 2007 au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence, et en particulier du fait que la Commission de la Conférence s’était dite profondément préoccupée par les déclarations concernant l’assassinat des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, les menaces de mort proférées et la prévalence d’un climat d’impunité dans le pays. La Commission de la Conférence, rappelant que les organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent exercer leurs droits que dans un climat exempt de violences, de pressions ou de menaces visant les dirigeants et les membres de ces organisations, avait invité le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de ce principe fondamental et mettre fin à l’impunité. Elle avait aussi prié instamment le gouvernement de prendre des mesures sans délai pour diligenter des enquêtes approfondies et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux cambodgiens susmentionnés, afin de ne pas traduire uniquement en justice les auteurs, mais aussi les instigateurs de ces crimes odieux.

Ayant pris aussi note des observations de la CSI sur les irrégularités qui avaient accompagné les procès de Born Samnang et Sok Sam Oeun – ces deux hommes ont été accusés du meurtre de Chea Vichea, malgré des preuves substantielles de leur innocence – et sur les nombreux acte de harcèlement et de violence à l’encontre de dirigeants syndicaux, la commission avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris des enquêtes judiciaires, pour mettre un terme aux actes de violence et d’intimidation commis à l’encontre de responsables syndicaux et de membres de syndicats. Enfin, la commission avait noté que le gouvernement acceptait une mission de contacts directs, comme l’avait demandé la Commission de la Conférence. Elle avait exprimé le ferme espoir que la mission aboutirait à des résultats importants en ce qui concerne l’ensemble des questions graves susmentionnées.

Dans ce contexte, la commission note avec préoccupation que, selon le FTUWKC, une campagne de violence et de répression systématiques a été menée contre lui dans une usine, y compris des agressions violentes commises par des bandes, à l’encontre de dirigeants syndicaux en dehors de l’usine. Elle avait aussi pris note des allégations suivantes: une manifestation de ce syndicat aurait été violemment dispersée – la police a tiré dans le dos d’un travailleur et 16 syndicalistes ont été arrêtés puis détenus; 1 500 travailleurs auraient été licenciés à la suite de la manifestation, tous ou presque seraient des dirigeants ou des membres du FTUWKC; une liste noire des personnes licenciées par la direction aurait ensuite été établie; et la direction aurait fait circuler leurs noms et leurs photos dans d’autres usines. Le FTUWKC affirme aussi que les autorités ont peu fait pour enquêter sur les graves lésions qu’ont subies les dirigeants syndicaux et, de fait, elles ont participé régulièrement à la répression violente de manifestations, de grèves et de marches de travailleurs dans plusieurs usines.

La CSI indique aussi que, dans de nombreuses d’usines, des syndicalistes continuent de subir des répressions de tout type sans que les autorités n’interviennent ou presque. Ces actes antisyndicaux comprennent les faits suivants: actes de violence commis par des voyous engagés à cette fin, menaces de mort, établissement de listes noires, traduction en justice de syndicalistes pour des motifs infondés, retenues sur les salaires et exclusion des possibilités de promotion. Un dirigeant du FTUWKC a été frappé par quatre ou cinq personnes masquées et armées de barres de fer alors qu’il se rendait de son domicile au travail. La CSI indique aussi que les activités de l’Association cambodgienne des enseignants indépendants sont constamment entravées; le gouvernement ne reconnaît pas cette association comme syndicat et, souvent, ses manifestations et protestations ont été interdites. Une autre organisation, l’Association cambodgienne des fonctionnaires indépendants (CICSA), n’est pas reconnue non plus comme syndicat.

Enfin, la commission prend note du rapport de la mission de contacts directs qui a séjourné au Cambodge du 21 au 25 avril 2008. La commission prend note avec une profonde préoccupation du rapport de la mission et de ses conclusions, entre autres celles qui suivent: 1) le système judiciaire cambodgien fait face à de graves problèmes de capacité et de manque d’indépendance; 2) la condamnation de Born Samnang et de Sok Sam Oeun pour le meurtre du dirigeant syndical Chea Vichea a été prononcée le 12 avril 2007, au cours d’un procès marqué par des irrégularités de procédure, y compris le fait que le tribunal a refusé de prendre en considération des éléments prouvant leur innocence; 3) Thach Saveth a été condamné à 15 ans d’emprisonnement pour le meurtre du dirigeant syndical Ros Sovannareth; et 4) le gouvernement n’a fait état d’aucune mesure concrète pour veiller à ce que les cas en suspens soient examinés convenablement et en toute indépendance. De plus, la commission note avec préoccupation qu’elle n’a pas reçu d’information sur les progrès de l’enquête concernant Hy Vuthy.

Dans ces circonstances, la commission ne peut que déplorer l’absence de fait nouveau à cet égard dans le rapport du gouvernement, six mois après la mission de contacts directs. La commission prie le gouvernement de faire le nécessaire pour prendre des mesures concrètes et tangibles et de toute urgence pour: 1) diligenter des enquêtes indépendantes, de toute urgence, sur les meurtres de Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy; 2) accélérer la révision des condamnations de Born Samnang et Sok Sam Oeun pour le meurtre de Chea Vichea, ainsi que la condamnation de Thach Saveth pour le meurtre de Ros Sovannareth, et prendre des mesures en vue de leur libération en attendant les résultats des enquêtes indépendantes susmentionnées; 3) prendre les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire, y compris des mesures de renforcement des capacités et des mesures de protection contre la corruption. A cet égard, la commission recommande au gouvernement de recourir à l’assistance technique du Bureau, notamment pour renforcer les capacités institutionnelles ainsi que pour établir des tribunaux du travail et pour réviser la loi sur les syndicats. Enfin, la commission prie instamment le gouvernement, comme l’a fait le Comité de la liberté syndicale, de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les droits syndicaux des travailleurs au Cambodge soient pleinement respectés et à ce que les syndicalistes puissent exercer leurs activités dans un climat exempt d’intimidations et de risques pour leur sécurité personnelle et leur vie.

La commission adresse une demande directe sur d’autres points au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. La commission avait prié le gouvernement de modifier la législation pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. A cet égard, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique font l’objet de lois distinctes, d’institutions publiques ou de ministères, que ces lois protègent efficacement leurs droits et que la loi leur donne le droit de se syndiquer et de participer aux activités d’associations. Afin d’évaluer cette question comme il le faut, la commission prie le gouvernement de transmettre copie des lois prévoyant le droit de constituer des organisations et de s’y affilier pour l’ensemble des catégories de fonctionnaires mentionnées plus haut.

La commission regrette que le gouvernement n’ait communiqué aucune information sur les autres problèmes d’application de la convention qu’elle avait soulevés.

Par conséquent, la commission prie à nouveau le gouvernement:

–           de préciser le sens de l’expression «fonctionnaire de l’ordre législatif» qui est mentionnée à l’article 1 des statuts communs des fonctionnaires;

–           de fournir un complément d’information sur la procédure d’enregistrement et, en particulier, d’indiquer si l’enregistrement d’organisations d’employeurs et de travailleurs peut être refusé;

–           de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des postes de responsabilité d’administration et de gestion d’une organisation professionnelle, ainsi que l’article 2(3) du Prakas no 21 de 2006 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, qui prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation ne doivent jamais avoir été reconnues coupables d’une infraction pénale, afin de limiter cette restriction aux condamnations qui mettent manifestement en cause l’intégrité de la personne intéressée;

–           de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail, qui prévoit que les membres d’un syndicat doivent avoir exercé la profession ou occupé leur emploi depuis au moins un an pour pouvoir être élus au bureau du syndicat soit en exemptant de la condition relative à la profession une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature des personnes qui sont occupées dans le secteur concerné depuis moins d’un an ou qui ont précédemment travaillé dans l’organisation intéressée;

–           de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail, qui dispose qu’un service minimum doit être prévu dans l’entreprise en cas de grève et que, lorsque les parties au conflit ne sont pas parvenues à un accord, il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question;

–           de modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail, qui dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave;

–           de modifier la législation pour que, en cas de conflit concernant l’établissement du service minimum, le conflit soit réglé par un organisme indépendant qui bénéficie de la confiance de l’ensemble des parties, et non par l’autorité exécutive ou administrative; et

–           d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables.

La commission exprime l’espoir que le gouvernement transmettra des informations complètes sur les mesures prises ou envisagées pour l’ensemble de ces points. De plus, elle rappelle qu’il peut faire appel à l’assistance technique du BIT et veut croire qu’il aura recours à cette possibilité sans tarder.

Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

La commission prend note du rapport du gouvernement et des commentaires soumis par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication du 28 août 2007. Elle prend également note de la discussion qui a eu lieu en 2007 à la Commission de l’application des normes de la Conférence; elle note en particulier que la Commission de la Conférence a déploré que le gouvernement n’ait pas transmis de rapports complets à la commission d’experts et qu’elle s’est dite gravement préoccupée par les déclarations concernant l’assassinat des syndicalistes Chea Vichea, Ros Sovannareth et Hy Vuthy, par les menaces de mort proférées et par l’apparition d’un climat d’impunité dans le pays. La Commission de la Conférence avait également rappelé que les organisations de travailleurs et d’employeurs ne pouvaient exercer leurs droits qu’en l’absence de violences, de pressions ou de menaces visant les dirigeants et les membres de ces organisations, et avait invité le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de ce principe fondamental et mettre fin à l’impunité. A cette fin, elle avait prié instamment le gouvernement de prendre des mesures sans délai pour diligenter des enquêtes approfondies et indépendantes sur les meurtres des dirigeants syndicaux cambodgiens afin de traduire en justice les auteurs, mais aussi les instigateurs de ces crimes haineux.

La CSI indique que des obstacles sont mis aux activités de l’Association cambodgienne des enseignants indépendants (CITA), que, malgré le manque de preuves, les dirigeants syndicaux Lach Sambo, Yeom Khun et Sal Koem San ont été condamnés pour confinement illégal dans le cadre d’une grève, et que certains des employeurs ont refusé d’appliquer des décisions rendues par des conseils d’arbitrage concernant la réintégration à leur poste de syndicalistes licenciés. La CSI mentionne également de nombreux actes de harcèlement et de violence visant les dirigeants et les membres de syndicats, notamment la détention, par les autorités, d’un dirigeant du Syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC), dans le cadre d’une manifestation organisée en mai 2006 par ce syndicat. Elle affirme aussi que Chi Simun, Lem Semret, Em Chhay Tieng, Chey Rithy et Yeng Vann Yuth, dirigeants du FTUWKC, ont fait l’objet d’attaques. Enfin, elle indique que de nouveaux éléments ont été apportés qui prouvent l’innocence des deux hommes condamnés en 2005 pour le meurtre de Chea Vichea, président du FTUWKC. Il s’agit notamment du témoignage d’un témoin oculaire qui innocente les deux hommes accusés du meurtre, et du témoignage de l’ancien chef de la police de Phnom Penh corroborant que les deux hommes ont fait l’objet d’une machination. Elle rappelle que, à maintes reprises, elle a relevé l’interdépendance entre les libertés publiques et les droits syndicaux, soulignant ainsi l’idée qu’un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans le respect des droits fondamentaux de l’homme. L’exercice des libertés publiques, en matière syndicale, doit s’évaluer par rapport aux règles énoncées à l’article 3 de la convention, et c’est en relation avec cette norme que le respect de certains droits fondamentaux de la personne humaine prend toute son importance pour la vie syndicale (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 26). La commission regrette profondément que le gouvernement donne peu d’informations en réponse aux commentaires de la CSI, en particulier compte tenu de la gravité des allégations. Dans ces circonstances, la commission prie instamment le gouvernement d’adopter les mesures nécessaires, y compris l’ouverture d’enquêtes judiciaires, pour mettre fin aux actes de violence et d’intimidation visant les dirigeants et les membres de syndicats.

La commission note que la Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement d’accepter une mission de contacts directs du BIT pour aborder les graves problèmes soulevés en matière de liberté syndicale. A cet égard, la commission note la communication du gouvernement du 2 novembre 2007 dans laquelle il indique que, suite à une mission de haut niveau au Cambodge en octobre, une mission de contacts directs est acceptée pour mars ou avril 2008. La commission note avec intérêt cette évolution et exprime le ferme espoir que cette mission de contacts directs produira des résultats significatifs concernant les graves questions susmentionnées.

La commission adresse une demande directe au gouvernement.

[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2008.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

La commission constate avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle ne peut donc que demander à nouveau au gouvernement:

–         de modifier sa législation pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier;

–         de préciser le sens de l’expression «fonctionnaires de l’ordre législatif» qui est mentionnée à l’article 1 des statuts communs des fonctionnaires;

–         de fournir un complément d’informations sur la procédure d’enregistrement et, en particulier, d’indiquer si l’enregistrement d’organisations de travailleurs et d’employeurs peut être refusé;

–         de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des postes de responsabilité d’administration et de gestion d’une organisation professionnelle, ainsi que l’article 2(3) du Prakas no 277 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, qui prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation ne doivent avoir été jamais reconnues coupables d’une infraction pénale, afin de limiter cette restriction aux condamnations qui mettent manifestement en cause l’intégrité de la personne intéressée;

–         de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail qui prévoit que les membres d’un syndicat doivent avoir exercé leur profession ou occupé leur emploi depuis au moins un an pour pouvoir être élus au bureau du syndicat soit en exemptant de la condition relative à la profession une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature des personnes qui sont occupées dans le secteur intéressé depuis moins d’un an ou qui ont précédemment travaillé dans l’organisation intéressée;

–         de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail qui dispose qu’un service minimum doit être prévu dans l’entreprise en cas de grève et que, lorsque les parties au conflit ne sont pas parvenues à un accord, il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question;

–         de modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail qui dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave;

–         de modifier la législation pour que, en cas de conflit concernant l’établissement du service minimum, le conflit soit réglé par un organisme indépendant qui bénéficie de la confiance de l’ensemble des parties, et non par l’autorité exécutive ou administrative; et

–         d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables.

La commission prie le gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées concernant les questions mentionnées plus haut. De plus, la commission rappelle au gouvernement qu’il peut bénéficier de l’assistance technique du BIT et espère qu’il y aura recours sans délai.

Observation (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

La commission constate avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu.

La commission prend note des commentaires sur l’application de la convention de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) du 10 août 2006. La confédération évoque des questions qu’elle avait déjà soulevées et fait état du harcèlement permanent qui vise l’Association cambodgienne des enseignants indépendants, de l’arrestation et de la disparition de dirigeants syndicaux, d’actes de violence commis par les forces armées et la police contre des grévistes, et de la condamnation de deux hommes innocents pour l’assassinat d’un dirigeant syndical. A cet égard, la commission rappelle que le droit des organisations d’employeurs et de travailleurs ne peut être exercé que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de tous ordres contre des dirigeants ou des membres de ces organisations, et qu’il incombe au gouvernement de veiller au respect de ce principe. La commission demande au gouvernement de communiquer ses observations à propos de l’ensemble de ces commentaires graves, et à propos des commentaires de 2005 de la CISL (exclusion des fonctionnaires du champ d’application de la loi sur le travail, restrictions au droit d’élire librement les représentants syndicaux et restrictions au droit de grève – entre autres, imposition dans toutes les entreprises d’un service minimum, qu’il s’agisse ou non de services d’utilité publique, non-reconnaissance de la Fédération cambodgienne des syndicats de la construction (CCTUF), assassinat de deux dirigeants syndicaux, menaces à l’encontre de syndicalistes, intimidations, harcèlements et agressions physiques, et répression violente par la police de grèves et de manifestations).

La commission adresse au gouvernement une demande directe portant sur des questions supplémentaires.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

La commission constate avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle ne peut donc que demander à nouveau au gouvernement:

–         de modifier sa législation pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier;

–         de préciser le sens de l’expression «fonctionnaires de l’ordre législatif» qui est mentionné à l’article 1 des statuts communs des fonctionnaires;

–         de fournir un complément d’information sur la procédure d’enregistrement et, en particulier, d’indiquer si l’enregistrement d’organisations de travailleurs et d’employeurs peut être refusé;

–         de modifier l’article 269(3) de la loi sur le travail, qui interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administration et de gestion d’une organisation professionnelle, ainsi que l’article 2(3) du Prakas no 277 sur l’enregistrement des organisations professionnelles, qui prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation, ne doivent jamais avoir été reconnues coupables d’une infraction pénale afin que cette restriction se limite aux condamnations qui mettent manifestement en cause l’intégrité de la personne intéressée;

–         de modifier l’article 269(4) de la loi sur le travail qui prévoit que les membres d’un syndicat doivent avoir exercé leur profession ou occuper leur emploi depuis au moins un an pour pouvoir être élus au bureau du syndicat, soit en exemptant de la condition de profession une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature de personnes qui sont occupées dans le secteur intéressé depuis moins d’un an ou qui ont précédemment travaillé dans l’organisation intéressée,

–         de modifier l’article 326(1) de la loi sur le travail qui dispose qu’un service minimum doit être prévu dans l’entreprise en cas de grève et que, lorsque les parties au conflit ne sont pas parvenues à un accord, il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question;

–         de modifier l’article 326(2) de la loi sur le travail qui dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave;

–         de modifier la législation pour que, en cas de conflit concernant l’établissement du service minimum, le conflit soit réglé par un organisme indépendant qui bénéficie de la confiance de l’ensemble des parties, et non par l’autorité exécutive ou administrative; et

–         d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables.

La commission demande au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées à propos de l’ensemble des points susmentionnés.

La commission prend note aussi des commentaires sur l’application de la convention que la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a adressée dans une communication du 31 août 2005. La commission note que ces commentaires portent sur des questions législatives qu’elle a soulevées dans sa demande directe précédente et, plus particulièrement, sur l’exclusion des fonctionnaires du champ d’application de la loi sur le travail, sur les restrictions au droit d’élire librement les représentants syndicaux et sur les restrictions au droit de grève – entre autres, imposition dans toutes les entreprises d’un service minimum, qu’il s’agisse ou non de services d’utilité publique. La CISL affirme en outre que, même si des membres de la Fédération cambodgienne des syndicats de la construction (CCTUF) ont obtenu le statut d’organisation la plus représentative sur le site du projet de conservation d’Angkor Vat, la direction refuse de la reconnaître et de négocier avec elle. La CISL souligne aussi que deux dirigeants syndicaux ont été assassinés, que des syndicalistes font l’objet de menaces, d’intimidations, de harcèlements et d’agressions physiques et que la police réprime violemment les grèves et les manifestations. La commission demande au gouvernement de communiquer ses commentaires au sujet de ces observations.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:

Article 2 de la convention. a) Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. La commission note que certaines catégories de travailleurs, entre autres les juges, les fonctionnaires temporaires et permanents et les personnes régies par les statuts communs des fonctionnaires ou par les statuts diplomatiques, ne sont pas couvertes par les dispositions du Code du travail relatives à la liberté syndicale. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que les statuts communs des fonctionnaires consacrent le droit de ces derniers d’être membres d’associations ayant la personnalité juridique ou de participer à la gestion de celles-ci. Toutefois, la commission note que, selon son article 1, les statuts communs des fonctionnaires ne s’appliquent pas aux fonctionnaires de l’ordre législatif. La commission rappelle que, à l’exception des membres de la police et des forces armées, la garantie du droit syndical doit s’appliquer à tous les travailleurs, y compris les agents de la fonction publique et les fonctionnaires. Tous les agents de la fonction publique et fonctionnaires doivent avoir le droit de constituer des organisations professionnelles, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat, qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou qu’ils travaillent dans des entreprises à caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 48, 49 et 55). De plus, tous les travailleurs, qu’ils soient occupés à titre permanent ou temporaire, doivent avoir le droit de constituer des organisations de leur choix ou de s’y affilier. La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. Elle demande en outre au gouvernement de clarifier la signification de l’expression «fonctionnaires de l’ordre législatif» mentionnée à l’article 1 des statuts communs des fonctionnaires.

b) Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. La commission prend note de l’article 268 de la loi sur le travail qui porte sur la procédure d’enregistrement. La commission note que la législation n’indique pas si la demande d’enregistrement d’une organisation peut être refusée et, si c’est le cas, les motifs autorisés de refus. La commission demande au gouvernement de préciser ces points. Elle demande aussi au gouvernement un complément d’information sur la procédure d’enregistrement et d’indiquer tout cas de refus d’enregistrement.

Article 3. a) Droit d’élire librement leurs représentants. La commission note que l’article 269 3) de la loi sur le travail interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle. En outre, l’article 2 3) du prakas no 277 sur l’enregistrement des organisations professionnelles prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation ne doivent jamais avoir été reconnues coupables d’aucun acte criminel. A ce sujet, la commission rappelle qu’une condamnation pour un acte qui, par sa nature, ne met pas en cause l’intégrité de l’intéressé et ne présente pas de risques véritables pour l’exercice des fonctions syndicales ne doit pas constituer un motif de disqualification. Par conséquent, une législation qui établit des critères d’inéligibilité trop extensifs, par exemple par le biais d’une définition ouverte ou d’une longue énumération couvrant des actes sans réel rapport avec les qualités d’intégrité requises pour s’acquitter d’un mandat syndical, est incompatible avec la convention (voir étude d’ensemble de 1994, paragr. 120). La commission demande donc au gouvernement de modifier l’article 269 3) de la loi sur le travail et l’article 2 3) du prakas no 277 de façon à limiter cette restriction aux condamnations qui ont manifestement trait à l’intégrité de l’intéressé.

Par ailleurs, la commission prend note de l’article 269 4) de la loi sur le travail qui prévoit que les membres responsables de l’administration et de la gestion d’une organisation professionnelle, au moment de leur élection, doivent avoir exercé la profession ou occupé l’emploi depuis au moins un an. A cet égard, la commission estime que de telles dispositions peuvent entraver le droit des organisations d’élire librement leurs représentants, en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. Afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de les assouplir, par exemple en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession ou en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble, paragr. 117). La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour la rendre conforme à la convention soit en exemptant de la condition de profession une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature de personnes qui sont occupées dans le secteur intéressé depuis moins d’un an ou qui ont travaillé antérieurement dans l’organisation intéressée.

b) Droit de grève. La commission note qu’en vertu de l’article 326 1) de la loi sur le travail un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu et que les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord. Cet article prévoit aussi qu’il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. L’article 326 2) dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave. Par ailleurs, l’article 334 permet à l’employeur de remplacer les travailleurs tenus d’assurer le service minimum qui ne s’acquittent pas de cette obligation. A ce sujet, la commission rappelle que les autorités peuvent établir un système de service minimum dans les services d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Le service minimum serait approprié dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble de 1994, paragr. 160 et 162). La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour veiller à ce que l’obligation d’établir un service minimum soit limitée aux cas susmentionnés, compte tenu en particulier des graves conséquences que pourrait avoir le fait de ne pas assurer ce service (art. 326 2)) et du droit qu’a l’employeur, au titre de l’article 334, de remplacer les travailleurs qui n’assurent pas le service minimum. A propos de la disposition selon laquelle tout désaccord concernant l’établissement du service minimum doit être réglé par le ministère du Travail, la commission demande au gouvernement de modifier sa législation pour que ce type de désaccord soit réglé par un organisme indépendant jouissant de la confiance de l’ensemble des parties au différend, et non par l’autorité exécutive ou administrative. La commission demande au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées à cet égard.

Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission demande au gouvernement d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:

Article 2 de la convention. a) Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. La commission note que certaines catégories de travailleurs, entre autres les juges, les fonctionnaires temporaires et permanents et les personnes régies par les statuts communs des fonctionnaires ou par les statuts diplomatiques, ne sont pas couvertes par les dispositions du Code du travail relatives à la liberté syndicale. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que les statuts communs des fonctionnaires consacrent le droit de ces derniers d’être membres d’associations ayant la personnalité juridique ou de participer à la gestion de celles-ci. Toutefois, la commission note que, selon son article 1, les statuts communs des fonctionnaires ne s’appliquent pas aux fonctionnaires de l’ordre législatif. La commission rappelle que, à l’exception des membres de la police et des forces armées, la garantie du droit syndical doit s’appliquer à tous les travailleurs, y compris les agents de la fonction publique et les fonctionnaires. Tous les agents de la fonction publique et fonctionnaires doivent avoir le droit de constituer des organisations professionnelles, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat, qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou qu’ils travaillent dans des entreprises à caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 48, 49 et 55). De plus, tous les travailleurs, qu’ils soient occupés à titre permanent ou temporaire, doivent avoir le droit de constituer des organisations de leur choix ou de s’y affilier. La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. Elle demande en outre au gouvernement de clarifier la signification de l’expression «fonctionnaires de l’ordre législatif» mentionnée à l’article 1 des statuts communs des fonctionnaires.

b) Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. La commission prend note de l’article 268 de la loi sur le travail qui porte sur la procédure d’enregistrement. La commission note que la législation n’indique pas si la demande d’enregistrement d’une organisation peut être refusée et, si c’est le cas, les motifs autorisés de refus. La commission demande au gouvernement de préciser ces points. Elle demande aussi au gouvernement un complément d’information sur la procédure d’enregistrement et d’indiquer tout cas de refus d’enregistrement.

Article 3. a) Droit d’élire librement leurs représentants. La commission note que l’article 269 3) de la loi sur le travail interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle. En outre, l’article 2 3) du prakas no 277 sur l’enregistrement des organisations professionnelles prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation ne doivent jamais avoir été reconnues coupables d’aucun acte criminel. A ce sujet, la commission rappelle qu’une condamnation pour un acte qui, par sa nature, ne met pas en cause l’intégrité de l’intéressé et ne présente pas de risques véritables pour l’exercice des fonctions syndicales ne doit pas constituer un motif de disqualification. Par conséquent, une législation qui établit des critères d’inéligibilité trop extensifs, par exemple par le biais d’une définition ouverte ou d’une longue énumération couvrant des actes sans réel rapport avec les qualités d’intégrité requises pour s’acquitter d’un mandat syndical, est incompatible avec la convention (voir étude d’ensemble de 1994, paragr. 120). La commission demande donc au gouvernement de modifier l’article 269 3) de la loi sur le travail et l’article 2 3) du prakas no 277 de façon à limiter cette restriction aux condamnations qui ont manifestement trait à l’intégrité de l’intéressé.

Par ailleurs, la commission prend note de l’article 269 4) de la loi sur le travail qui prévoit que les membres responsables de l’administration et de la gestion d’une organisation professionnelle, au moment de leur élection, doivent avoir exercé la profession ou occupé l’emploi depuis au moins un an. A cet égard, la commission estime que de telles dispositions peuvent entraver le droit des organisations d’élire librement leurs représentants, en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. Afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de les assouplir, par exemple en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession ou en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble, paragr. 117). La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour la rendre conforme à la convention soit en exemptant de la condition de profession une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature de personnes qui sont occupées dans le secteur intéressé depuis moins d’un an ou qui ont travaillé antérieurement dans l’organisation intéressée.

b) Droit de grève. La commission note qu’en vertu de l’article 326 1) de la loi sur le travail un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu et que les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord. Cet article prévoit aussi qu’il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. L’article 326 2) dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave. Par ailleurs, l’article 334 permet à l’employeur de remplacer les travailleurs tenus d’assurer le service minimum qui ne s’acquittent pas de cette obligation. A ce sujet, la commission rappelle que les autorités peuvent établir un système de service minimum dans les services d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Le service minimum serait approprié dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble de 1994, paragr. 160 et 162). La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour veiller à ce que l’obligation d’établir un service minimum soit limitée aux cas susmentionnés, compte tenu en particulier des graves conséquences que pourrait avoir le fait de ne pas assurer ce service (art. 326 2)) et du droit qu’a l’employeur, au titre de l’article 334, de remplacer les travailleurs qui n’assurent pas le service minimum. A propos de la disposition selon laquelle tout désaccord concernant l’établissement du service minimum doit être réglé par le ministère du Travail, la commission demande au gouvernement de modifier sa législation pour que ce type de désaccord soit réglé par un organisme indépendant jouissant de la confiance de l’ensemble des parties au différend, et non par l’autorité exécutive ou administrative. La commission demande au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées à cet égard.

Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission demande au gouvernement d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

La commission prend note avec intérêt des informations contenues dans le premier rapport du gouvernement. Elle souhaite soulever un certain nombre de points concernant l’application des articles suivants de la convention.

Article 2 de la convention. a) Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. La commission note que certaines catégories de travailleurs, entre autres les juges, les fonctionnaires temporaires et permanents et les personnes régies par les statuts communs des fonctionnaires ou par les statuts diplomatiques, ne sont pas couvertes par les dispositions du Code du travail relatives à la liberté syndicale. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que les statuts communs des fonctionnaires consacrent le droit de ces derniers d’être membres d’associations ayant la personnalité juridique ou de participer à la gestion de celles-ci. Toutefois, la commission note que, selon son article 1, les statuts communs des fonctionnaires ne s’appliquent pas aux fonctionnaires de l’ordre législatif. La commission rappelle que, à l’exception des membres de la police et des forces armées, la garantie du droit syndical doit s’appliquer à tous les travailleurs, y compris les agents de la fonction publique et les fonctionnaires. Tous les agents de la fonction publique et fonctionnaires doivent avoir le droit de constituer des organisations professionnelles, qu’ils s’occupent de l’administration de l’Etat, qu’ils soient des agents d’organismes assurant d’importants services publics ou qu’ils travaillent dans des entreprises à caractère économique appartenant à l’Etat (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 48, 49 et 55). De plus, tous les travailleurs, qu’ils soient occupés à titre permanent ou temporaire, doivent avoir le droit de constituer des organisations de leur choix ou de s’y affilier. La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour que les juges et les agents temporaires ou permanents de la fonction publique aient le droit de constituer des organisations et de s’y affilier. Elle demande en outre au gouvernement de clarifier la signification de l’expression «fonctionnaires de l’ordre législatif» mentionnée à l’article 1 des statuts communs des fonctionnaires.

b) Droit des travailleurs de constituer des organisations sans autorisation préalable. La commission prend note de l’article 268 de la loi sur le travail qui porte sur la procédure d’enregistrement. La commission note que la législation n’indique pas si la demande d’enregistrement d’une organisation peut être refusée et, si c’est le cas, les motifs autorisés de refus. La commission demande au gouvernement de préciser ces points. Elle demande aussi au gouvernement un complément d’information sur la procédure d’enregistrement et d’indiquer tout cas de refus d’enregistrement.

Article 3. a) Droit d’élire librement leurs représentants. La commission note que l’article 269 3) de la loi sur le travail interdit aux personnes reconnues coupables d’une infraction pénale d’être élues à des fonctions d’administrateur d’une organisation professionnelle. En outre, l’article 2 3) du prakas no 277 sur l’enregistrement des organisations professionnelles prévoit que les personnes responsables de la direction et de l’administration de l’organisation ne doivent jamais avoir été reconnues coupables d’aucun acte criminel. A ce sujet, la commission rappelle qu’une condamnation pour un acte qui, par sa nature, ne met pas en cause l’intégrité de l’intéressé et ne présente pas de risques véritables pour l’exercice des fonctions syndicales ne doit pas constituer un motif de disqualification. Par conséquent, une législation qui établit des critères d’inéligibilité trop extensifs, par exemple par le biais d’une définition ouverte ou d’une longue énumération couvrant des actes sans réel rapport avec les qualités d’intégrité requises pour s’acquitter d’un mandat syndical, est incompatible avec la convention (voir étude d’ensemble de 1994, paragr. 120). La commission demande donc au gouvernement de modifier l’article 269 3) de la loi sur le travail et l’article 2 3) du prakas no 277 de façon à limiter cette restriction aux condamnations qui ont manifestement trait à l’intégrité de l’intéressé.

Par ailleurs, la commission prend note de l’article 269 4) de la loi sur le travail qui prévoit que les membres responsables de l’administration et de la gestion d’une organisation professionnelle, au moment de leur élection, doivent avoir exercé la profession ou occupé l’emploi depuis au moins un an. A cet égard, la commission estime que de telles dispositions peuvent entraver le droit des organisations d’élire librement leurs représentants, en leur ôtant la possibilité d’élire des personnes qualifiées ou en les privant de l’expérience de certains dirigeants lorsqu’elles ne disposent pas, dans leurs propres rangs, de personnes compétentes en nombre suffisant. Afin de rendre ces législations conformes à la convention, il serait souhaitable de les assouplir, par exemple en acceptant la candidature de personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession ou en levant la condition d’appartenance à la profession pour une proportion raisonnable des dirigeants (voir étude d’ensemble, paragr. 117). La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour la rendre conforme à la convention soit en exemptant de la condition de profession une proportion raisonnable des dirigeants d’une organisation, soit en acceptant la candidature de personnes qui sont occupées dans le secteur intéressé depuis moins d’un an ou qui ont travaillé antérieurement dans l’organisation intéressée.

b) Droit de grève. La commission note qu’en vertu de l’article 326 1) de la loi sur le travail un service minimum doit être prévu dans l’entreprise lorsqu’une grève a lieu et que les parties au différend ne sont pas parvenues à un accord. Cet article prévoit aussi qu’il incombe au ministère du Travail de déterminer le service minimum en question. L’article 326 2) dispose que les travailleurs qui sont tenus d’assurer le service minimum mais qui ne s’acquittent pas de cette obligation sont considérés coupables d’une faute de conduite grave. Par ailleurs, l’article 334 permet à l’employeur de remplacer les travailleurs tenus d’assurer le service minimum qui ne s’acquittent pas de cette obligation. A ce sujet, la commission rappelle que les autorités peuvent établir un système de service minimum dans les services d’utilité publique afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties au différend, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs. Le service minimum serait approprié dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations (voir étude d’ensemble de 1994, paragr. 160 et 162). La commission demande donc au gouvernement de modifier sa législation pour veiller à ce que l’obligation d’établir un service minimum soit limitée aux cas susmentionnés, compte tenu en particulier des graves conséquences que pourrait avoir le fait de ne pas assurer ce service (art. 326 2)) et du droit qu’a l’employeur, au titre de l’article 334, de remplacer les travailleurs qui n’assurent pas le service minimum. A propos de la disposition selon laquelle tout désaccord concernant l’établissement du service minimum doit être réglé par le ministère du Travail, la commission demande au gouvernement de modifier sa législation pour que ce type de désaccord soit réglé par un organisme indépendant jouissant de la confiance de l’ensemble des parties au différend, et non par l’autorité exécutive ou administrative. La commission demande au gouvernement de la tenir informée des mesures prises ou envisagées à cet égard.

Article 5. Droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales. La commission demande au gouvernement d’indiquer si les syndicats d’organisations professionnelles ont le droit de s’affilier à des organisations internationales, et de préciser quelles sont les dispositions législatives applicables.

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