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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2004, Publication : 92ème session CIT (2004)

Un représentant gouvernemental a rappelé que la question des prisons gérées par le secteur privé en Australie a été examinée par la commission en 1999 et que rien n'avait été reproché au gouvernement. Le gouvernement s'est également conformé à la demande de la commission de fournir des rapports plus détaillés, en communiquant un rapport de plus de cinquante pages. Depuis lors, aucun développement significatif n'a été rapporté. En Australie, la question des prisons relève de la compétence des Etats constituants. De ce fait, il est difficile, voire inapproprié, d'aborder les dispositions réglementant les prisons dans chaque juridiction. Le représentant gouvernemental a mis en évidence les trois raisons pour lesquelles il était en désaccord avec l'interprétation donnée par la commission d'experts de la convention. Lorsque la convention a été élaborée en 1930, la CIT n'avait pas à l'esprit le cas des prisons privées. Dans ces conditions, afin de s'adapter au temps présent, l'OIT doit prendre en considération les méthodes de gestion modernes. La gestion privée des prisons est une réalité et, si les commentaires de la commission d'experts étaient acceptés, les prisonniers n'auraient plus accès au travail et ces prisons devraient fermer. En Australie, le travail des détenus doit être effectué en conformité avec des directives établies par le gouvernement, qui s'appliquent tant aux prisons publiques qu'aux prisons privées. Les prisons privées doivent donc rester sous le contrôle d'une autorité publique. Les directives du gouvernement précitées prévoient des inspections, des conditions de travail en prison, des pénalités devant être imposées en cas de violation du contrat. Le gouvernement paie des entrepreneurs pour gérer les prisons et, en même temps, fournit un travail sérieux aux prisonniers afin de favoriser leur réinsertion. Les prisonniers ne sont pas engagés ou mis à la disposition d'entrepreneurs privés et les paiements faits à ces derniers ne dépendent pas de la productivité des détenus. En d'autres termes, il n'existe pas de relation d'emploi. Les responsabilités de la gestion des prisons privées sont normalement inscrites dans un contrat aux termes duquel l'entreprise privée est responsable de la gestion quotidienne de la prison alors que le gouvernement, par le biais de son agence des prisons, est responsable de la garde légale des prisonniers en tous temps ainsi que d'établir les règles régissant le traitement de ces derniers. Si le travail des prisonniers est exploité par l'entrepreneur, le gouvernement peut décider de mettre fin au contrat. L'orateur a réitéré sa demande d'une nouvelle interprétation de la convention, une interprétation qui protégerait les détenus des situations de servitude tout en reconnaissant et soutenant les politiques correctionnelles modernes.

Les membres employeurs ont rappelé que la commission d'experts avait fait connaître ses vues sur le travail dans les prisons privées dans une longue section de son rapport général de 2001, alors que seuls quelques gouvernements avaient fourni un rapport à ce sujet. La rareté des réponses avait rendu ces réflexions quelque peu théoriques. Dans son approche de la question, la commission d'experts se référait sans cesse à un mémoire du BIT de 1931 publié en 1932. Ce mémoire avait été préparé à la demande de la Société des nations à propos des "Règles minima pour le traitement des détenus" qui avaient été adoptées par la Commission internationale pénale et pénitentiaire. Il ne faisait donc pas partie des travaux préparatoires de la convention et ne constituait pas non plus une interprétation authentique de la convention adoptée par la Conférence en 1930. En toute hypothèse, personne ne conteste que ni la commission d'experts ni le BIT n'ont la compétence pour formuler des interprétations authentiques des conventions.

L'article 2, paragraphe 2 c), de la convention doit s'interpréter de manière restrictive, en sorte que cette disposition ne s'applique que lorsque le détenu est placé à la libre disposition de l'employeur privé en dehors de tout contrôle de l'Etat. A l'inverse, la collaboration entre l'Etat et l'employeur privé serait acceptable dès lors que l'Etat s'est doté d'une réglementation régissant l'exécution du travail par le détenu et qu'il veille à l'application de cette réglementation. S'agissant du consentement, la commission d'experts est d'avis qu'il n'y a pas travail forcé lorsque le détenu consent à travailler de son plein gré pour un employeur privé. Elle pose toutefois des conditions tout à fait irréalistes pour établir s'il y a libre consentement. Selon la commission d'experts, le caractère volontaire doit relever d'un véritable choix et non d'une alternative où ne pas travailler aurait des conséquences négatives, telles que d'avoir à rester en cellule pour des périodes excessivement longues, ne pas pouvoir échapper à l'ennui ou se trouver désavantagé dans le cadre de programmes de libération anticipée, du fait de n'avoir pas travaillé. Une telle approche confine à l'absurde, car les citoyens normaux hors des prisons ont aussi à faire face à des conséquences négatives lorsqu'ils décident de ne pas travailler. Aussi, pour évaluer dans quelle mesure le travail pénitentiaire dans une prison privatisée est volontaire, la commission d'experts estime qu'un certain nombre d'indices doivent être pris en compte. Le consentement devrait être formel et les conditions dans lesquelles le travail est effectué devraient s'approcher des conditions d'une relation de travail libre. La délicate question qui se pose alors est de savoir combien ces conditions doivent être proches de celles d'une relation libre d'emploi. A cet égard, la commission d'experts ne tient pas compte de l'évidente faible productivité des détenus, ni des risques particuliers que prennent les entreprises qui les emploient: les détenus ne sont pas couverts par une assurance de responsabilité civile contre tout dommage susceptible de survenir; la qualification des détenus disponibles ne correspond pas toujours aux exigences du travail à effectuer; et la durée de l'emploi est incertaine. Enfin, la commission d'experts pose dans son rapport la condition, plus réaliste, que les conditions de travail ne doivent pas avoir un caractère d'exploitation. Sur ce point spécifique, les membres employeurs rejoignent la commission d'experts.

Dans le passé, les entrepreneurs qui voulaient recourir au travail des détenus devaient payer l'Etat pour y avoir accès. De nos jours, c'est l'Etat qui doit offrir des incitations aux entrepreneurs pour qu'ils soient disposés à employer des détenus. En fournissant du travail dans les prisons, l'Etat se conforme à son obligation morale de favoriser la réadaptation et la réinsertion des détenus et de les aider à entretenir leurs qualifications professionnelles. Du temps où l'économie libre de marché n'était pas reconnue, l'ensemble des entreprises étaient soupçonnées d'exploiter leurs travailleurs. Ce peut être là une explication du libellé de l'article 2, paragraphe 2 c), de la convention, qui stipule que le détenu ne peut être "concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées". Il est bien évident que les détenus ne doivent pas être exploités lorsqu'ils travaillent pour des employeurs privés. Mais il ressort de ce libellé que la convention ne visait pas à prohiber en général tout travail effectué par des détenus pour des employeurs privés. L'approche correcte consiste à lire cette disposition conformément à la règle faisant prévaloir le sens ordinaire des mots. En conclusion, le travail des détenus pour des employeurs privés est acceptable, pour autant que ce travail soit effectué conformément à des règles édictées par l'Etat et sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques. Les conditions de travail ne doivent pas nécessairement être les mêmes que celles d'une relation de travail libre, mais elles ne doivent pas être des conditions d'exploitation. Dans le cas de l'Australie, les prisons à gestion privée restent placées sous le contrôle des autorités publiques, dans la mesure où le gouvernement a fixé les règles régissant le travail dans les prisons. Le gouvernement mène des inspections et impose des sanctions en cas d'infraction. Dès lors que le travail à effectuer est convenable et ne relève pas de l'exploitation, la condition du consentement est remplie. On doit espérer parvenir à s'accorder pour donner à cette convention un sens qui corresponde aux réalités actuelles.

Les membres travailleurs ont mentionné qu'ils n'allaient pas répéter entièrement quelle est leur position, position qu'ils ont fait valoir lors de la discussion de ce cas en 1999, même si apparemment c'est ce que le représentant gouvernemental et les membres employeurs viennent de faire. Il n'est pas constructif de s'en tenir à une position donnée sans évoluer. Tout au long du débat concernant le travail dans les prisons, quatre concepts clé se sont dégagés: la supervision et le contrôle de l'autorité publique sur le travail pénitentiaire; l'incompatibilité entre la convention et le fait de concéder des détenus ou de les mettre à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées; le fait que les conditions du travail pénitentiaire doivent être sensiblement équivalentes à celles du travail libre; et enfin, le principe du libre consentement du détenu à travailler. Les deux premiers concepts sont à considérer, convient-il de souligner, comme complémentaires l'un de l'autre et devant être appliquer l'un et l'autre. Les autres questions qui ont été soulevées étaient notamment de savoir si la convention était toujours d'actualité en ce qui concerne le travail privé dans les prisons, et la question de la punition par opposition à la réinsertion.

En ce qui concerne le commentaire des membres employeurs, selon lequel ce cas n'aurait pas dû apparaître devant cette commission, les membres travailleurs rejettent l'assertion des membres employeurs selon laquelle l'attention portée à cet aspect par la commission jouerait au détriment d'autres cas de violations très graves de la convention. Par le passé, la commission s'est toujours penchée sur cet aspect, elle le fait à nouveau cette année, et elle le fera encore certainement à l'avenir. L'inscription, à nouveau, de ce cas sur la liste, témoigne simplement du fait que la commission de la conférence a nettement perçu tout l'intérêt de l'examen des faits nouveaux concernant le travail forcé par la commission d'experts. La commission d'experts a soulevé l'importante question de savoir si la convention était toujours pertinente face à ce nouveau phénomène. Elle devrait à cet égard être félicitée et non critiquée. Se référant à un commentaire fait par le représentant gouvernemental, les membres travailleurs se sont déclarés convaincus que la commission d'experts n'avait pas un agenda secret sur cette question. De leur point de vue, toujours, la commission d'experts n'a pas non plus d'intérêt à noircir le tableau. Qui plus est, la nationalité de la présidente de la commission d'experts assure que cette commission ne commet aucune méprise sur la situation en Australie. Il est regrettable que le gouvernement soit resté aussi complètement imperméable aux observations et recommandations de la commissions d'experts. Que le gouvernement d'un pays hautement industrialisé tel que l'Australie ait une telle attitude est un très mauvais exemple pour d'autres pays et cela risque de porter atteinte au système de contrôle de l'OIT. Ce système, dont le véritable pilier est le travail indépendant, objectif et impartial de la commission d'experts, est des plus précieux ; il est supérieur à d'autres mécanismes internationaux de contrôle, au sein de l'OIT ou hors de cette organisation. Si les Etats estiment que l'interprétation d'une convention est erronée ou préjudiciable à leur égard, ils peuvent saisir la Cour internationale de Justice. Ceci n'arrive pas souvent car les gouvernements sont parfaitement conscients de la haute qualité de l'interprétation de la commission d'experts et que, par voie de conséquence, ils n'auraient pas gain de cause s'ils engageaient cette procédure. Par exemple, la France, la Suisse, l'Argentine et la Colombie ont suivi les observations de la commission d'experts, si décriées aujourd'hui par ce gouvernement, et ont ajusté leur droit et leur pratique. Les membres travailleurs ont incité le gouvernement à revoir sa position, à se rendre compte de l'évolution positive suivie par d'autres pays, et enfin à se défaire de cette approche polémique de la question en jeu pour adopter une attitude de dialogue avec l'OIT. Ce serait là la seule solution pour sortir de l'impasse actuelle et avancer.

Le membre employeur de l'Australie a appuyé les déclarations du représentant gouvernemental et du porte-parole des employeurs. En outre, il a souhaité souligner trois points. Premièrement, la gestion des prisons privées n'a pas été envisagée au moment de la discussion et de l'adoption de la convention. Par conséquent, il n'est pas opportun d'inclure ce type de prisons dans le champ d'application de la convention. Deuxièmement, il est clair que les détenus de ces prisons ne sont pas embauchés par les administrateurs de ces prisons ni mis à leur disposition. Affirmer le contraire est une perversion de langage. Les détenus restent sous la tutelle de l'Etat qui garde la responsabilité totale de leur traitement et qui contrôle entièrement les administrateurs à ce sujet. Par conséquent, les détenus restent sous la surveillance et le contrôle de l'autorité publique. Ils ne sont pas engagés par les administrateurs privés de ces prisons, dans la mesure où il n'y a pas de relation de travail et où ces derniers n'ont pas la possibilité de recruter ou licencier ces travailleurs. Par conséquent, les prisons privées sont comprises dans les exclusions prévues par les dispositions de la convention. Troisièmement, le travail réalisé par les détenus n'est pas fait au profit des administrateurs, mais plutôt dans un but de formation et de réinsertion. Pour ces raisons, l'observation de la commission d'experts devrait être traitée avec une grande prudence.

Le membre travailleur de la France a exprimé son étonnement face aux remarques de certains orateurs mettant en cause l'objectivité de la commission d'experts. Or, si depuis plus de soixante-dix ans les gouvernements n'ont pas saisi la Cour de Justice internationale, c'est bien parce qu'ils savent que, quant au fond, l'analyse de la commission d'experts n'est pas contestable. La privatisation du travail pénitentiaire, telle que pratiquée par l'Australie, va bien au-delà des dispositions protectrices de la convention. Le gouvernement considère pourtant que les modalités de gestion privée du travail pénitentiaire sont conformes à la convention et, s'agissant des conditions effectives de ce travail, qu'il est irréaliste de s'attendre à ce que les détenus soient rémunérés aux conditions du marché libre du travail. Pourtant, si l'on souhaite favoriser la réinsertion, les conditions de travail des prisonniers doivent se rapprocher autant que possible des conditions du marché du travail, même si elles ne peuvent être exactement identiques compte tenu de leur environnement carcéral. Si ces conditions ne sont pas réunies, il y a non seulement travail forcé, mais également concurrence déloyale vis-à-vis des travailleurs libres. Le travail pénitentiaire doit pouvoir contribuer à la formation et à la réhabilitation des personnes et non pas permettre à des investisseurs privés de dégager des profits en tirant un maximum de rentabilité du travail des prisonniers. Qu'en est-il en Australie? Une étude approfondie de la réalité du fonctionnement des prisons privées est indispensable. Il est avéré que dans certains Etats, notamment l'Etat de Victoria, le travail est imposé sans le consentement des prisonniers et les conditions de travail sont nettement inférieures à celles du marché du travail. Il s'agit clairement d'un cas de travail forcé et de violation de la convention. Il convient donc que le gouvernement prenne d'urgence les mesures appropriées en s'inspirant des bonnes pratiques des autres pays et en recourant aux bons offices techniques du Bureau. Cela devrait être reflété dans les conclusions.

Le membre travailleur du Royaume-Uni s'est dit profondément préoccupé que les mêmes gouvernements qui prétendent défendre l'autorité des mécanismes de contrôle de l'OIT soient ceux qui estiment que la commission d'experts a tort et que ses conclusions doivent être ignorées dès lors que ces conclusions leur déplaisent. Les critères dont la commission d'experts dit qu'ils doivent être réunis pour que la relation entre le détenu et la compagnie privée s'approche d'une relation de travail libre et puisse être admise au regard de l'article 2, paragraphe 2, de la convention sont les suivants. En premier lieu, les détenus ne peuvent être concédés par les prisons publiques ou privées à des particuliers, des compagnies ou des personnes morales privées. C'est la différence entre embaucher et concéder. Nonobstant l'obligation de vigilance qui impose au service public pénitentiaire de s'assurer que les détenus ne sont pas exploités, la relation doit être une relation directe entre le détenu et la compagnie. En outre, il ne doit y avoir ni obligation ni contrainte. Ainsi, les détenus qui refusent de travailler pour une entreprise privée ne doivent-ils pas faire l'objet de quelque sanction que ce soit, notamment sous la forme de refus d'avantages ou de libérations provisoires. L'appréciation du libre consentement exige des garanties supplémentaires en termes de niveau de salaire, qui doit au moins être le salaire minimum national ou celui qui prévaut dans la branche d'activité, de sécurité sociale et d'inspection du travail. Le travail doit aussi être soumis à la surveillance des autorités publiques. L'existence d'un ministre des prisons ou d'un fonctionnaire public en charge de la direction du système pénitentiaire ne suffit pas à assurer la surveillance par les autorités publiques du travail effectué par les détenus. Quel que soit l'endroit où le travail est effectué - à l'exception des programmes de libération anticipée légitime où les détenus travaillent hors de la prison sur un lieu de travail ordinaire - il doit être surveillé par des fonctionnaires publics.

Dès lors, la question est de savoir si le travail effectué dans des prisons privées, que ce soit pour une compagnie extérieure ou dans le cadre des tâches normales de la prison, telles que la préparation des repas ou le nettoyage, constitue effectivement un travail ou des services pour la compagnie privée gestionnaire de la prison. La conclusion de la commission d'experts est sans détour: les personnes détenues dans des prisons privées où les activités ne sont pas placées sous la surveillance des autorités publiques, qu'elles aient ou non été condamnées, ne peuvent être contraintes à travailler. Même un rapprochement du libre consentement ne suffirait pas dans la mesure où leur travail ne serait pas placé sous la surveillance d'une autorité publique. La commission d'experts a clairement rappelé que ces deux conditions étaient cumulatives et s'appliquaient séparément. Ainsi, la surveillance par l'autorité publique ne libère pas de l'obligation d'assurer que le détenu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Dans le cas des prisons à gestion privée en Australie, le consentement du détenu n'est pas assuré et il n'y a ni rapprochement d'une relation libre de travail ni surveillance par les autorités publiques. La prohibition du travail pour des compagnies privées s'applique a fortiori à tout travail effectué sous la surveillance de personnes privées, notamment dans les prisons à gestion privée. Cela ne signifie pas qu'aucun travail ne pourrait être effectué par les détenus pour des compagnies privées, dès lors que seraient réunies les conditions de la surveillance par les autorités publiques et d'un authentique libre consentement à une relation de travail s'approchant des conditions d'une relation de travail libre. Des compagnies qui s'en remettent au travail gratuit ou à peine rémunéré d'une main-d'oeuvre captive pour le fonctionnement quotidien de leurs prisons ne seraient pas viables sur le marché libre du travail. Des compagnies qui s'efforceraient de favoriser la réadaptation des prisonniers détenus dans des prisons publiques en leur fournissant un travail décent dans les conditions énoncées par la commission d'experts n'auraient rien à craindre de la convention.

La membre gouvernementale du Royaume-Uni a déclaré que son pays soutenait pleinement les objectifs de la convention, qu'il a ratifiée en 1931. Le Royaume-Uni appuie l'essentiel de la déclaration du représentant gouvernemental. Il continue à croire que tous les pays devraient mettre en place un système solide de réglementations et de règles qui assurent que l'on n'abuse pas du travail des prisonniers. En appliquant ces règles, tant les prisons du secteur public que du secteur privé et les ateliers devraient faire l'objet d'inspections rigoureuses et indépendantes, tant au niveau national qu'international. Si l'on accepte l'interprétation actuelle de la commission d'experts relative à la convention, le travail des prisonniers ne serait plus viable dans plusieurs prisons. Il est rarement possible de retrouver au sein des prisons les conditions du marché libre du travail. La convention ne reflète pas adéquatement les changements survenus dans la pratique du droit pénal ces soixante-dix dernières années. Se conformer à l'opinion de la commission d'experts serait très dommageable pour les prisonniers et leur réinsertion. Ce serait aussi contraire à l'objectif de la convention. Le gouvernement australien a suggéré qu'un processus soit établi afin d'examiner cette question et de formuler une interprétation plus moderne. A cet égard, l'oratrice a repris la suggestion faite antérieurement par sa délégation que cette question devrait être réexaminée de manière plus approfondie, avec l'appui des professionnels internationaux du droit pénal. Le Royaume-Uni est prêt à offrir son assistance à ce sujet.

La membre gouvernementale des Etats-Unis a rappelé que son pays n'avait pas encore ratifié cette convention. Aux Etats-Unis, il existe des prisons privées et des prisons publiques qui concèdent le travail des prisonniers. Lorsque le Comité consultatif tripartite sur les normes internationales du travail a examiné la possibilité de ratifier les conventions nos 29 et 105, au milieu des années quatre-vingt, il a vite réalisé que l'interprétation donnée par la commission d'experts à la convention no 29 rendait peu probable sa ratification. L'examen de la convention no 29 a été suspendu indéfiniment et le comité a mis l'accent sur la seule convention no 105, ratifiée par les Etats-Unis en 1991. L'interprétation des experts, très restrictive, mais également son manque de clarté constituent un problème fondamental. Ceci est particulièrement vrai des critères que les experts ont mentionnés afin de déterminer si le travail dans une prison privée est réellement volontaire. Au paragraphe 6 de son observation sur ce cas, la commission d'experts a noté qu'il n'était pas nécessaire que les conditions d'emploi dans les prisons privées soient exactement les mêmes que celles du marché libre du travail, mais qu'elles soient proches de celles d'une relation de travail libre. En effet, les experts ont admis, lors d'une observation générale antérieure, qu'il est difficile, voire impossible, dans le contexte des prisons, de reconstituer les conditions d'une relation d'emploi libre. Cependant, en étudiant la liste des critères développés par les experts pour arriver à ce jugement - dont certains se trouvent à la fin du paragraphe 6 de l'observation relative à ce cas -, il est presque impossible de savoir à quoi s'en tenir. Les Etats-Unis souhaiteraient considérer à nouveau la possibilité de ratifier la convention no 29 mais cela ne sera pas possible tant qu'il n'y aura pas une position claire et précise sur ce que la convention entend par travail en prison, et ce même si la loi et la pratique des Etats-Unis semblent être en pleine conformité avec tous les autres aspects de la convention. L'oratrice a rappelé que les pays qui envisagent de ratifier les conventions de l'OIT - qu'elles soient fondamentales ou techniques - nécessitent de savoir exactement à quoi ils s'engagent en contractant un engagement international obligatoire. L'oratrice s'est jointe aux orateurs précédents pour demander à l'OIT d'établir un processus qui poserait une interprétation claire et moderne de la convention - une interprétation qui protégerait les prisonniers et préserverait l'objectif original de la convention, tout en tenant compte des pratiques en cours dans les prisons modernes.

Le représentant gouvernemental, en réponse à la discussion, a souligné que les prisons privées en Australie restent sous le contrôle des autorités publiques qui sont responsables des directives, des inspections et des sanctions à appliquer aux administrateurs des prisons. Les prisons ont recours à des entrepreneurs pour administrer et surveiller le travail des détenus. Les employeurs ne paient pas pour disposer des détenus, ce sont plutôt les prisons qui paient les compagnies pour gérer les affaires de la prison. Les conditions de travail sont identiques dans les prisons publiques et privées. L'exploitation est interdite et les prisons privées font l'objet d'une surveillance étroite. En réponse aux membres travailleurs, l'orateur a déclaré que son gouvernement ne considère pas que la commission d'experts se trompe sur l'interprétation des dispositions de la convention, mais plutôt que sa position sur les prisons privées prête à confusion et a mené à une impasse. L'Australie tient à résoudre ce problème et est prête à travailler à cette fin, en collaboration avec le Bureau et la commission d'experts.

Les membres travailleurs ont déclaré qu'ils ne pensent pas que la commission d'experts soit infaillible. Mais même s'ils le pensaient, ils ne diraient rien de tel parce qu'il serait mal avisée de dire une telle chose aux experts et parce que cela ferait peser une étrange impression sur les relations entre la commission d'experts et la commission de la Conférence. D'autre part, contrairement à ce que le membre employeur de l'Australie a pu affirmer, la question des prisons privées était d'ores et déjà à l'examen en 1930, comme l'a fait observer la commission d'experts dans son rapport général de 2001. Les membres travailleurs ont déclaré que la convention était, sans doute aucun, une base adéquate pour discuter du phénomène des prisons privées et que l'idée d'élaborer un autre instrument ne les intéresse pas.

La commission d'experts est aussi chargée d'examiner les nouveaux développements à la lumière des normes de l'OIT. C'est exactement ce qu'elle a fait dans son rapport général de 2001. Cependant, tel que l'ont noté d'autres orateurs, plusieurs gouvernements ont décidé de ne pas participer aux préparatifs de cet exercice. Les gouvernements seraient donc les premiers à blâmer si les analyses de la commission d'experts relatives à la convention ne tenaient pas suffisamment compte à leurs yeux de la situation dans leur pays. Un dialogue devrait être entamé afin de mettre un terme à la confusion entourant ce sujet, et l'Australie devrait prendre note de l'expérience positive de certains pays qui ont accepté l'interprétation des normes faite par la commission d'experts. Exactement comme lors de la discussion de ce cas en 1999, les conclusions devraient demander au gouvernement de fournir des informations détaillées sur la surveillance des autorités publiques sur le travail dans les prisons privatisées et aussi souligner que la convention exige que les détenus ne soient pas concédés ou mis à la disposition d'entreprises privées ou de particuliers. Ces conclusions devraient aussi appeler à la réouverture du dialogue sur ces questions entre le gouvernement et la commission d'experts. Et ce dialogue se trouverait enrichi s'il s'étendait à l'étude des meilleures pratiques suivies par les pays mentionnés plus haut.

Les membres employeurs ont rappelé, en réponse à la déclaration des membres travailleurs selon laquelle la commission d'experts avait considéré que la question de la privatisation du travail pénitentiaire avait été examinée quand la convention avait été adoptée, que la commission d'experts s'était référée au Mémorandum de l'OIT de 1931 qui ne constituait pas une interprétation officielle de la convention. Les mesures visant à la réhabilitation et à la réinsertion par le travail sont importantes et il est un fait que l'Etat n'est souvent pas en mesure de fournir aux prisonniers un travail sérieux. Généralement, l'Etat est plutôt un employeur malheureux et le travail dans les prisons gérées par l'Etat est souvent abrutissant. Dès lors, il est dans l'intérêt du prisonnier d'être employé par un employeur privé, ce qui permettra d'accroître son employabilité en vue de sa libération. A cet égard, il faut souligner que la commission d'experts dans son analyse de 2001 n'a pas exclu la possibilité pour les prisonniers d'être employés par des employeurs privés. En réaction à un point soulevé au cours du débat, les membres employeurs ont indiqué que l'emploi des prisonniers par une entreprise privée n'entraîne pas une concurrence déloyale. La preuve en est que généralement c'est l'Etat qui doit entreprendre un travail de propagande pour convaincre les employeurs privés d'employer des prisonniers. Les membres employeurs ont attiré l'attention sur le fait que l'analyse de la commission d'experts dans son rapport de 2001 ne s'était basée que sur quelques rapports fournis par les gouvernements sur la question. Néanmoins, on peut penser que maintenant les gouvernements ont entamé une discussion sur le sujet. Il est à espérer que la commission d'experts n'ignorera pas les nouveaux éléments qui émergent de cette discussion et que les discussions avec tous les organes de contrôle se poursuivront. Finalement, les conclusions devront refléter le fait que des points de vue différents se sont manifestés au sein de la Commission de la Conférence sur ce sujet.

La commission a noté les informations orales fournies par le représentant gouvernemental ainsi que la discussion qui a suivi. Elle a rappelé que cette commission avait déjà discuté du travail dans les prisons privées en Australie. Peu de changements, que ce soit dans la loi ou dans la pratique, ont été rapportés à la commission d'experts et à la Commission de la Conférence au sujet du travail des condamnées pour des entreprises privées. La commission a exprimé l'espoir que le gouvernement poursuivrait le dialogue avec l'OIT et les partenaires sociaux en ce qui concerne la pratique du travail des prisonniers pour les entreprises privées. Les meilleures pratiques des Etats Membres devraient être prises en compte. La commission a souligné que la convention interdit que des prisonniers soient concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées, à moins que le travail ne soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques. La commission a noté que le gouvernement s'était engagé à remplir les obligations qui découlent de la convention et lui a demandé de prendre sans attendre les mesures nécessaires pour s'assurer que les prisonniers travaillant pour les entreprises privées sont volontaires et ne sont pas soumis à des pressions ou des menaces. La commission a exprimé l'espoir que le gouvernement fournirait un rapport détaillé sur les mesures prises pour examen par la commission d'experts.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 1999, Publication : 87ème session CIT (1999)

Un représentant gouvernemental a fermement appuyé la convention, qui fait partie des normes fondamentales de l'OIT, et le travail de la commission d'experts. Son gouvernement estime qu'il s'acquitte pleinement de ses obligations en vertu de la convention et ne partage pas l'opinion selon laquelle le travail exécuté dans des prisons privées constitue du travail forcé, étant donné que l'Etat exerce un contrôle suffisant et que le travail pénitentiaire ne s'effectue pas dans une optique de profit. Tout en reconnaissant le droit de la commission d'examiner des questions qui la préoccupent, il s'est toutefois déclaré surpris que ce cas soit soumis devant la présente commission alors que le dialogue est dans une phase liminaire. Le gouvernement a répondu avec bonne volonté, de manière détaillée et dans les délais aux questions soulevées par la commission d'experts à la fin de 1998. Il traitera de ces points dans un rapport détaillé ultérieurement cette année.

Il faut comprendre le texte de la convention à la lumière des intentions de ses rédacteurs, conformément au droit international. Il convient d'examiner sous cet angle la façon dont elle s'applique aux pratiques modernes. Ce serait une erreur pour la commission d'interpréter la convention de manière étroite et textuelle, sans placer les termes mêmes de la convention dans le contexte des objectifs de cet instrument. Les travaux préparatoires démontrent que la convention est née des préoccupations internationales à l'encontre des pratiques d'esclavage et de "travail indigène" dans les colonies. Tout en reconnaissant que, dans certains cas, il est nécessaire d'imposer un travail obligatoire à des fins d'intérêt public, en raison des abus graves et de l'exploitation qui se sont produits, l'OIT a adopté l'opinion ferme selon laquelle un tel travail ne devrait pas être imposé au bénéfice de personnes privées. Les contributions des Etats Membres en la matière ont révélé que l'existence d'un bénéfice privé est le problème en cause. Les pratiques abusives, qui apparaissent souvent lorsque le travail forcé est imposé en faveur d'employeurs privés, constituent un autre thème récurrent.

Lors de l'élaboration de la convention, et en particulier de l'article 2, paragraphe 2 c) , ses rédacteurs ont abordé la question spécifique du travail pénitentiaire et ils ont relevé le problème des pratiques abusives dans certains pays où des détenus étaient mis à la disposition de particuliers pour travailler dans des conditions d'esclavage ou de servitude pour dettes. L'idée des rédacteurs est clairement que le travail pénitentiaire constitue du travail forcé lorsqu'il s'effectue au bénéfice d'employeurs privés dans des conditions d'exploitation. Les travaux préparatoires montrent que cette mise à disposition en faveur d'employeurs privés a été considérée comme synonyme de travail ne s'effectuant pas sous la surveillance du gouvernement. Telle n'est cependant pas la situation dans les prisons modernes, qui sont gérées par des sociétés privées ayant conclu un accord avec le gouvernement. Ces sociétés privées ne tirent pas de bénéfice du travail des prisonniers.

En 1930, la commission qui avait discuté des instruments proposés a indiqué à la Conférence que les détenus exécutant une peine et devant travailler en application de cette peine n'étaient pas astreints au type de travail forcé envisagé et que ce travail devrait dès lors être exclu du champ d'application de la convention. Selon l'orateur, cette exception devrait s'appliquer de la même manière aux prisonniers détenus dans des prisons privées et à ceux détenus dans des prisons publiques. Dans ces deux cas, les détenus accomplissent une peine et doivent travailler pendant cette période.

Bien que la convention no 29 soit un instrument indépendant, son application a pour toile de fond le développement du droit international. Dans l'interprétation de la convention, il faut dès lors tenir compte des autres instruments importants en matière de droits de l'homme qui traitent des mêmes questions, afin d'assurer une jurisprudence internationale cohérente. Par exemple, l'article 8 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui est plus récent que la convention, dispose que n'est pas considéré comme "travail forcé ou obligatoire" tout travail ou service normalement requis d'un individu qui est détenu en vertu d'une décision de justice. L'ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus dispose que tous les prisonniers exécutant une peine devraient être obligés de travailler à des fins de réhabilitation et de préparation à la vie qui les attend après leur libération.

La convention, qui a été conçue dans un contexte économique et social très différent, doit également être appliquée au monde moderne, tout en conservant ses objectifs et ses principes. Les principes et la pratique de l'administration publique en Australie et dans d'autres pays se sont transformés au cours des dernières décennies. Cette transformation est dans une large mesure provoquée par les difficultés des finances publiques causées par les mutations économiques internationales, et notamment la mondialisation. Le mode d'exécution des services publics traditionnels a changé. L'accent est davantage mis sur la nécessité pour les gouvernements de veiller à ce que les services financés par des fonds publics soient exécutés efficacement que sur la prestation des services elle-même. Dans ce contexte, le gouvernement de Victoria a lancé en 1993 le Nouveau projet pour les prisons, qui vise à impliquer le secteur privé dans la construction et la gestion de trois nouvelles prisons.

Pour interpréter l'exception prévue par la convention pour certains types de travail pénitentiaire, il faut comprendre la nature de ce travail. L'article 10, paragraphe 3, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose que le traitement des condamnés dans le régime pénitentiaire devrait avoir pour but essentiel leur amendement et leur reclassement social. En effet, le gouvernement de Victoria a reconnu l'existence d'une relation de cause à effet entre chômage et activité criminelle. Le travail dans les prisons s'est alors concentré sur le développement d'aptitudes au travail d'un groupe de personnes ayant connu de longues périodes de chômage ou de travail limité, l'objectif étant qu'à leur libération ils soient davantage en mesure de trouver un emploi et de s'intégrer plus efficacement dans la communauté. Les programmes de travail pénitentiaire mettent dès lors fortement l'accent sur la préparation au travail et le développement de capacités par le biais de l'intégration et de la formation professionnelles. Les responsables de prisons doivent fournir un enseignement reconnu et des programmes qui permettent aux prisonniers de poursuivre leur formation tout au long de leur parcours dans le système pénitentiaire. Ils doivent également permettre aux prisonniers de poursuivre auprès d'institutions d'enseignement extérieures des études à temps partiel reconnues.

Les conditions actuelles de détention devraient dès lors être perçues comme une privation de liberté pour une période déterminée, au cours de laquelle le travail effectué représente une possibilité de réadaptation et de réparation envers la communauté. Le travail pénitentiaire n'est pas effectué dans le contexte d'une relation d'emploi comparable à celles qui existent dans la communauté. Le travail pénitentiaire ne devrait donc pas être traité comme un problème de relations professionnelles.

Le travail pénitentiaire dans l'Etat de Victoria répond aux deux critères essentiels de l'exception prévue à l'article 2, paragraphe 2 c), de la convention, à savoir que le travail soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que les prisonniers ne soient pas concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Le mode de surveillance et de contrôle des prisons, y compris du travail pénitentiaire, établi par le Parlement de Victoria, comprend la protection des droits des détenus et l'institution d'un Correctional Services Commissioner , autorité publique chargée de la surveillance et du contrôle des prisons pour adultes, qu'elles soient privées ou publiques. Ce cadre législatif traduit l'attachement de l'Etat de Victoria à la protection des droits des prisonniers, conformément aux obligations juridiques de l'Australie. Ce cadre législatif est également renforcé par les accords sur les services pénitentiaires conclus entre le gouvernement de Victoria et les opérateurs privés. Le Correctional Services Commissionner est responsable et dispose de l'autorité générale sur le système pénitentiaire pour adultes. Il est chargé de surveiller le respect de ces dispositions dans tous les services pénitentiaires, en vue de garantir la sécurité et le bien-être des détenus. Il est également responsable de la classification et du placement des prisonniers dans le système ainsi que du contrôle du bien-être et de la gestion des prisonniers, conformément aux règlements applicables et aux dispositions du Corrections Act . Des garanties nombreuses et substantielles assurent que les contractants fournissent les meilleures prestations en termes d'installations pénitentiaires et de services.

Le gouvernement de Victoria n'a pas transféré à des opérateurs privés le pouvoir de surveillance sur les détenus. Ces derniers restent sous le contrôle de l'Etat qui garde toute responsabilité pour leur surveillance et leur bien-être. La surveillance et le contrôle des prisons, publiques ou privées, sont précisés dans les accords sur les services pénitentiaires conclus avec les opérateurs. Ces accords contiennent des dispositions relatives à l'évaluation des prestations des opérateurs, y compris des études conduites par la Sentence Management Unit, en ce qui concerne les plans de gestion des peines dans les différentes prisons. Le Commissioner surveille les prestations des opérateurs, tant publics que privés, par rapport à la politique criminelle et aux normes de gestion en matière pénitentiaire, qui sont applicables à tout le système. Le Commissioner est également chargé d'accorder des autorisations au personnel travaillant dans les prisons publiques et privées. Aucune personne employée par un opérateur privé ne peut surveiller ni exercer le contrôle sur des prisonniers sans l'autorisation expresse du Commissioner . Il est dès lors clair que ce dernier exerce le contrôle et la surveillance sur tous les aspects du fonctionnement des prisons dans l'Etat de Victoria.

La seconde exigence de l'article 2, paragraphe 2 c), est que les détenus ne soient pas concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Cela vise les situations dans lesquelles le détenu est obligé par l'opérateur d'une prison privée de travailler ou est obligé par l'opérateur de la prison de travailler au bénéfice d'une entité privée, que la prison soit privée ou publique. On ne peut considérer qu'un détenu est concédé ou mis à la disposition d'une compagnie privée que s'il est employé par cette compagnie, qui peut être soit l'opérateur de la prison, soit un tiers, ou s'il est en état de servitude à l'égard de la compagnie privée. Aucune de ces situations n'existe dans les prisons de Victoria. Les prisonniers ne sont pas engagés dans une relation d'emploi. L'exécution du travail n'est qu'une des conditions de détention imposées par l'Etat, à moins que les détenus ne soient excusés pour des motifs déterminés par le Correctional Services Commissioner.

Il ne faut en aucune manière considérer que le prisonnier est un esclave, ni de l'opérateur ni du tiers pour qui le travail est exécuté. Les opérateurs ne sont pas habilités à "concéder" le détenu à un tiers, parce qu'il reste en tout temps sous la supervision et le contrôle du Commissioner. L'opérateur n'est dès lors qu'un agent du Commissioner aux fins d'organisation du travail destiné à faciliter la réhabilitation des détenus. Dans l'Etat de Victoria, les entreprises privées ne tirent pas de bénéfices économiques importants du travail des prisonniers dans les prisons privées. Quel que soit l'argument utilisé, les prisonniers détenus dans des prisons privées de l'Etat de Victoria et obligés de travailler ne sont pas pour autant concédés ou mis à la disposition d'entités privées.

Aux termes des accords sur les services pénitentiaires, tous les bénéfices dégagés des activités professionnelles en milieu carcéral ne sont pas acquis aux opérateurs privés. Ces accords prescrivent que l'opérateur veille à ce que toute recette provenant de ces activités soit séparée des recettes de l'entrepreneur. Il doit également veiller à ce que tout bénéfice dégagé par ces activités soit réinvesti dans ces activités ou soit dépensé de telle autre manière que le directeur de la Chancellerie du département de la Justice jugera opportune.

Le travail exécuté dans les prisons australiennes ne relevant pas de la définition du travail forcé ou obligatoire au sens de la convention, aucun problème ne se pose en ce qui concerne les autres conditions qui, pour la commission d'experts, sont applicables au travail des prisonniers, telles que le paiement de salaires identiques aux salaires du marché. Ces questions pourraient être pertinentes si le travail était imposé à des prisonniers en faveur d'intérêts privés, afin de garantir que les détenus ne soient pas exploités au bénéfice d'un employeur privé. Cependant, elles ne sont pas pertinentes lorsque le travail en question n'est tout simplement pas compris dans les termes "travail forcé ou obligatoire", au sens de la convention.

En conclusion, tout en reconnaissant que la commission d'experts a soulevé des questions importantes, le représentant gouvernemental n'a pas estimé que ces questions étaient suffisamment graves pour justifier leur examen urgent par la Commission de la Conférence. Il a déclaré se réjouir de l'examen que la commission d'experts ferait du rapport détaillé à soumettre par le gouvernement, et s'est dit persuadé que ses préoccupations seraient pleinement prises en compte. En remerciant la commission pour son attention, il a indiqué que son pays a fourni un document substantiel au Secrétariat pour examen par la commission d'experts. Ce document reflète l'importance que son pays accorde au respect d'instruments fondamentaux tels que la convention no 29.

Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental des informations détaillées qu'il a présentées. Le travail des détenus dans les prisons privées pour le compte d'employeurs privés est devenu ces dernières années une question à l'ordre du jour, comme l'ont fait ressortir les commentaires des membres employeurs dans le cadre de la discussion générale. Aujourd'hui, cette question est examinée par la commission dans le contexte de l'Australie, non pas parce que l'application de la convention dans ce pays suscite des préoccupations particulièrement graves, mais pour pouvoir examiner de quelle manière cette question se rapporte à l'application des dispositions de la convention. La commission d'experts a constaté qu'il existe, dans l'Etat de Victoria, trois prisons privées dans lesquelles les détenus s'exposent à certains inconvénients s'ils refusent de travailler et ne perçoivent, pour leur travail, qu'une rémunération inférieure au salaire minimum. Le représentant gouvernemental a donné d'amples précisions à ce sujet, précisant que le travail dans les prisons privées reste sous la supervision de l'Etat et des autorités publiques. Cela veut dire que les détenus dans les prisons privées restent sous le contrôle de l'Etat et que la relation pénitentiaire est établie avec l'Etat et non avec une entreprise privée. Les autorités ont accès à tout moment à ces prisons privées et peuvent ainsi vérifier la situation et consulter éventuellement les pièces qui les intéressent. Les taux de rémunération sont fixés par l'Etat. Toute recette provenant du travail accompli par des détenus doit être réinvestie dans les équipements, toute autre affectation nécessitant l'autorisation préalable des autorités publiques.

Les membres employeurs ont rappelé que la commission d'experts s'est exprimée à plusieurs reprises sur la question de la relation entre le travail accompli par des détenus dans les prisons privées et les exigences de la convention. La commission d'experts a noté que les prisons privées existent dans plusieurs Etats de l'Australie et que les détenus de ces établissements qui refusent de travailler ne s'exposent pas directement à des désavantages ou à des sanctions. Ce refus est cependant considéré comme une non-participation aux activités de réinsertion. Il s'agit là d'une description impartiale de la situation. L'article 2, paragraphe 2 c), de la convention est assez clair sur ce point, puisqu'il exclut de la définition du travail forcé ou obligatoire "tout travail ou service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à la condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées".

Les membres employeurs ont souligné que le travail accompli par les détenus est effectivement basé sur une décision judiciaire et ne constitue donc pas du travail forcé. Ce travail correspond donc à l'une des dérogations admises de ce terme. Cependant, la supervision et le contrôle des autorités publiques doivent être garantis, ce qui est conforme aux intérêts de l'Etat lui-même. Les membres employeurs ont souligné à cet égard que l'apparition de plus en plus fréquente de la gestion privée des établissements pénitentiaires ne peut être comparée avec le processus de privatisation beaucoup plus radical qui se produit actuellement dans de nombreux pays, dans des domaines tels que les télécommunications, les chemins de fer et les transports aériens. Le problème qui se pose avec la convention tient au fait que celle ci ne comporte pas de dispositions détaillées concernant l'extension de la supervision et du contrôle que les autorités publiques doivent exercer. Il importe à cet égard de noter qu'il n'a pas été possible de parvenir à une interprétation juridique plus poussée des dispositions de la convention pour définir les modalités selon lesquelles une telle supervision est conforme aux prescriptions de la convention. La commission d'experts a évoqué la nécessité, éventuellement, que tous les détenus aient à donner librement leur consentement pour accomplir un travail dans les prisons privées. Cependant, il s'agit là d'une extension des dispositions contenues dans la convention. Une telle règle aurait pour effet de privilégier les détenus des prisons privées par rapport à ceux des prisons publiques, dans lesquelles ce consentement ne serait pas nécessaire.

En ce qui concerne la signification du travail pénitentiaire pour les détenus eux-mêmes, les membres employeurs espèrent qu'il n'existe aucun désaccord fondamental quant à la nécessité de prendre toutes les mesures possibles pour favoriser la réinsertion des détenus, notamment en leur donnant la possibilité de travailler. Pour les prisons privées, l'une des difficultés majeures à cet égard consiste à fournir aux détenus un travail intelligent et constructif plutôt que les simples tâches ancillaires qu'on leur attribue trop souvent dans les prisons publiques. Le travail constitue un volet déterminant du processus de réinsertion des détenus; il les aide en outre à conserver leurs qualifications professionnelles et à gagner un peu d'argent, ce qui peut leur permettre de subvenir dans une certaine mesure aux besoins de leurs familles et éventuellement d'assurer le dédommagement des actes pour lesquels ils ont été condamnés.

En ce qui concerne le niveau des rémunérations offertes aux détenus, les membres employeurs ont déclaré qu'il n'y a pas lieu de les comparer avec celles qui sont offertes dans le cadre d'un emploi libre. D'une manière générale, les entreprises privées qui donnent du travail dans les établissements pénitentiaires s'exposent à un certain nombre de risques. Elles assument des risques touchant à la responsabilité en cas de dommages et le niveau de productivité qu'elles obtiennent est généralement très bas.

Pour conclure, les membres employeurs ont déclaré que le président de la commission d'experts, dans son intervention devant la commission, était fondé à désigner cette question comme l'une de celles dont la Commission de la Conférence et la commission d'experts devraient débattre de manière plus approfondie à l'avenir. On ne dispose pas, cependant, pour l'heure, d'éléments suffisants pour procéder à une évaluation adéquate. Dans le cas spécifique de l'Australie, la commission d'experts n'a soulevé aucune préoccupation majeure non plus qu'elle n'a évoqué de violation majeure des dispositions de la convention. Ce cas est examiné par la Commission de la Conférence essentiellement pour aborder un phénomène nouveau. Dans ses conclusions, la commission devrait donc se borner à demander au gouvernement de fournir des informations sur l'évolution de la situation, comme il s'est d'ailleurs déjà engagé lui-même à le faire.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour les informations qu'il avait fournies et ont noté avec intérêt qu'un rapport plus détaillé avait été transmis au Bureau. Ils ont rappelé que, l'année passée, la commission avait discuté du rapport spécial de la commission d'experts concernant la convention no 29. Dans ce rapport, la commission d'experts a dûment pris note des points de vue exprimés par les membres employeurs et travailleurs sur le problème du travail des prisonniers. Elle a affirmé être consciente des risques d'exploitation que le travail des prisonniers représente. Lors de la discussion générale qui a eu lieu cette année, le problème a été brièvement évoqué, la commission d'experts estimant que la question des prisonniers "concédé(s) ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées", selon les termes de la convention, mériterait à l'heure actuelle une attention renouvelée. C'est dans ce cadre que les commentaires de la commission sur l'application de la convention no 29 dans les prisons privatisées en Australie doivent se situer.

Ils ont rappelé que le travail en prison est exclu du champ d'application de la convention lorsque deux conditions sont réunies: il est "exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques" et si le prisonnier n'est pas "concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées". La commission d'experts a fait remarquer (paragr. 4 du rapport) que les deux conditions s'appliquent de manière indépendante et que donc la convention ne prévoit aucune exception à l'égard de la deuxième condition. L'interdiction est absolue et, comme indiqué dans l'étude d'ensemble de 1979 à ce sujet: cette interdiction "s'applique également au travail dans des ateliers que des entreprises privées font fonctionner à l'intérieur des prisons" et, à fortiori, à tout travail organisé dans les prisons privées.

En ce qui concerne le cas à l'examen, le Conseil australien des syndicats déclare que, dans toutes les prisons privées du Victoria, le travail est placé sous le contrôle d'opérateurs privés et les détenus doivent travailler pour une entreprise privée. Les conditions salariales et de travail dans les ateliers occupés par les prisonniers et gérés par les entreprises privées sont largement inférieures à celles des entreprises locales. Selon les informations dont disposent les membres travailleurs, les entreprises locales, souvent des petites et moyennes entreprises (PME), sont confrontées à une concurrence déloyale, les salaires dans les ateliers privés étant parfois dix fois plus bas que dans les entreprises normales. De plus, les autorités nationales dans la pratique n'ont plus aucune influence sur la nature des produits et services fabriqués dans les prisons privées. Ces produits et services entreraient de plus en plus en concurrence déloyale avec ceux fabriqués par les producteurs locaux. Les prisons privées et leurs ateliers sont gérés par quelques grandes entreprises qui opèrent au niveau mondial. Les membres travailleurs sont d'avis que cette relation entre les PME locales et les ateliers gérés par quelques grandes entreprises n'est pas conforme aux paragraphes 6 et 16, alinéa 2), de la recommandation (no 189) sur la création d'emplois dans les petites et moyennes entreprises, 1998; ce dernier paragraphe prévoyait que les autorités devraient prendre des mesures pour sauvegarder les intérêts légitimes des PME et de leurs travailleurs, dans le contexte de relations entre les PME et grandes entreprises. De plus, le contenu des contrats passés entre les autorités publiques et les grandes entreprises qui gèrent les ateliers et les prisons privées ne serait pas transparent; trop souvent, il ne serait pas accessible aux autorités financières et aux PME concurrentes.

Le gouvernement devrait fournir des informations détaillées sur la portée des contrats conclus entre les entreprises qui gèrent les ateliers dans les prisons ou les prisons en tant que telles et les autorités publiques afin que le BIT puisse vérifier que ces contrats n'ont pas une influence directe ou indirecte sur les conditions de travail et la nature volontaire du travail pénitentiaire. Les membres travailleurs estiment qu'il y a un manque de transparence qui risque de nuire à la nature volontaire du travail pénitentiaire, vu les normes de rentabilité auxquelles sont soumises les grandes entreprises qui gèrent ces ateliers et prisons. Dans le cadre de la question du travail pénitentiaire, le BIT devrait donc également tenir compte des dispositions de la recommandation no 189, qui mentionne dans son préambule la convention no 29, et plus particulièrement des paragraphes 6, alinéa 1 b), et 16, alinéa 2). Le gouvernement devrait fournir toutes les informations sur les mesures adoptées ou envisagées pour garantir le volontariat et la supervision par les autorités.

Le membre travailleur de l'Australie a déclaré, en premier lieu, que les travailleurs australiens souscrivent à la nécessité de programmes de réinsertion appropriés et créatifs pour les détenus. Cependant, la question du travail forcé, où qu'elle se pose, constitue une question grave. Cette convention couvre en outre des droits de l'homme fondamentaux.

Il a rappelé que depuis 1930, année de l'entrée en vigueur de la convention, et depuis 1979, date de la plus récente étude d'ensemble sur cette convention, de profonds changements sont intervenus dans le système pénitentiaire. Il s'est notamment produit une évolution rapide vers la privatisation de ce système, parallèlement à la mondialisation des entreprises, ce qui était difficilement prévisible en 1979 et encore moins en 1930. L'intervenant se félicite donc du fait que les organes de contrôle aient perçu l'existence de ce nouveau marché, sur lequel les droits fondamentaux du travail doivent également s'appliquer. En l'occurrence, il ne fait aucun doute que l'Australie ne satisfait pas à ses obligations en vertu de la convention.

L'intervenant a appelé l'attention de la commission sur les arrangements commerciaux complexes régissant les relations entre les entreprises privées et l'administration pénitentiaire australienne. Le processus de mondialisation ajoute à cette complexité. A titre d'exemple, on évoquera le cas de cette société britannique basée en Australie qui vient de remporter des marchés pour la gestion de prisons en Afrique du Sud. En outre, pour répondre à la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle tous les profits des activités professionnelles dans les prisons doivent être réinvestis soit dans ces mêmes activités soit dans des activités connexes, il convient de souligner que la situation est beaucoup plus complexe. Dans le cas des biens élaborés dans une prison pour un entrepreneur, ces biens sont revendus à un grossiste, puis à un détaillant avant de parvenir au consommateur. Il s'agit donc là d'une chaîne de distribution à quatre niveaux, avec une marge de profit à chacun d'eux, l'ensemble reposant sur le travail bon marché et forcé des détenus. Qui plus est, dans le cas d'espèce, les arrangements commerciaux entre le gouvernement et les entreprises privées présentent un manque de transparence flagrant. Le contrôleur aux comptes du Victoria a présenté récemment au Parlement un rapport sur la privatisation du système pénitentiaire et les arrangements commerciaux conclus dans ce cadre, en déclarant qu'il n'avait pas pu accomplir sa mission dans ce domaine. Des dispositions législatives instituant le secret ne lui ont pas permis de connaître les aspects financiers des contrats publics passés avec les opérateurs privés de prisons, au motif de la confidentialité commerciale. Il n'a donc pas pu examiner ou contrôler ces arrangements.

L'intervenant a également appelé l'attention sur d'autres questions relatives au travail des détenus dans les prisons privées. En premier lieu, pour ce qui est de leur protection sociale, ces détenus ne sont pas couverts par les dispositions protectrices de la même manière que les autres travailleurs. De plus, leur taux de rémunération est très faible, par comparaison avec les salaires versés en dehors du système pénitentiaire.

Bien que le représentant gouvernemental ait déclaré que les activités économiques dans les prisons restent sous le contrôle et la supervision des autorités publiques, il n'est pas nécessaire de s'interroger largement sur la capacité réelle de ces autorités de s'acquitter de leurs fonctions à cet égard. Le fait est que le contrôleur général a conclu que le cadre existant ne permet pas à l'autorité publique d'exercer son contrôle sur ces activités de manière efficace et indépendante. De son côté, la Commission catholique Justice et Paix a récemment signalé que le personnel pénitentiaire autant que la direction des établissements se heurtent à une surcharge de travail insurmontable.

Pour conclure, l'intervenant a exprimé l'espoir que les autres membres de la commission se prononceront, eux aussi, en faveur d'un examen, par le Conseil d'administration, de l'opportunité de mener une nouvelle étude d'ensemble sur l'application de cette convention. Se félicitant de l'attention qui a été consacrée à ce cas par la commission, il s'est rallié aux conclusions de la commission d'experts considérant que le gouvernement australien ne s'acquitte pas, à cet égard, de ses obligations au titre de la convention.

Le membre employeur de l'Australie a fait valoir que les conditions actuelles du travail des détenus n'existaient pas au moment de l'élaboration de la convention, il y a soixante-dix ans. Cet aspect a été reconnu explicitement par le membre travailleur de l'Australie et implicitement dans les commentaires formulés par le président de la commission d'experts et aux paragraphes 71 et 72 du rapport de la commission d'experts. La question mérite un examen attentif non seulement au regard du cas d'espèce, mais aussi dans un contexte plus général. L'intervenant a remercié le représentant gouvernemental des informations fournies et a déclaré appuyer ses propos. Il a également fait observer que la question de la concurrence entre les entreprises travaillant avec les prisons et d'autres établissements commerciaux ne relève pas des questions qui pourraient justifier un examen plus approfondi dans le cadre de celui du respect des dispositions de la convention.

Le membre gouvernemental de la Nouvelle-Zélande a souligné que cette convention, qui est l'une des conventions fondamentales, a pour objet les pires formes d'exploitation de la main-d'oeuvre. Il est donc capital que son application reste pertinente, dans un environnement économique et social en mutation constante. Les commentaires formulés par la commission d'experts sur la situation dans les prisons du Victoria permettent de penser que la pertinence de la convention est remise en question dans le contexte de l'évolution des modalités de gestion des prisons, notamment par des opérateurs de prisons privées dans un nombre croissant de pays.

Bien que le rapport de la commission d'experts ne comporte aucun élément établissant que les abus contre lesquels la convention a été conçue auraient cours dans les prisons australiennes, il a néanmoins été conclu à tout hasard que l'Australie serait en infraction par rapport à la convention. Dans son rapport général, la commission d'experts estime que la situation des détenus dans les prisons à gestion privée mérite un nouvel examen. La dernière étude d'ensemble consacrée à cette matière a été réalisée en 1979. Il y aurait lieu de suggérer que le Conseil d'administration envisage la possibilité de programmer dans un proche avenir une nouvelle étude d'ensemble sur les conventions touchant à ce domaine. Les commentaires de la commission d'experts sur la situation dans les prisons australiennes tendent à renforcer cette conclusion.

Le membre travailleur des Etats-Unis a rappelé que le recours au travail pénitentiaire dans les prisons privées est une question relativement nouvelle pour la commission. Cette pratique se développe non seulement en Australie, mais également aux Etats-Unis et dans d'autres pays. En quelques années, elle est devenue un secteur d'activité global, générant plusieurs milliards de dollars. Aux Etats-Unis, d'ici à l'an 2000, les ventes effectuées par les prisons privées dépasseront les 9 milliards de dollars. De grandes multinationales, souvent basées aux Etats-Unis, gèrent des prisons privées dans un certain nombre de pays. Ces activités se sont développées rapidement parce qu'elles sont rentables et offrent un certain intérêt public. Effectivement, elles ne profitent pas seulement aux compagnies qui gèrent les prisons privées, mais également à celles qui ont recours au travail pénitentiaire pour produire des biens à destination du marché.

L'orateur a pris note de l'argument du représentant gouvernemental, selon lequel ces activités visent à ce que les détenus acquièrent des capacités et une expérience professionnelles dans le cadre du processus de réhabilitation destiné à faciliter l'intégration des détenus sur le marché du travail, après leur libération. Personne ne se dit opposé à un processus effectif de réhabilitation. Par ailleurs, la commission a également été informée qu'une partie des revenus générés par le travail pénitentiaire est réinvestie dans ces activités et profite dès lors aux contribuables. Il a aussi été dit que des économies étaient faites. Le travail couvre en effet de 60 à 80 pour cent des dépenses d'exploitation d'une prison. Aux Etats-Unis, dans un nombre croissant de prisons privées, les employés perçoivent des salaires inférieurs à ceux des personnes employées par l'Etat. Une grande partie d'entre eux sont membres de syndicats mais perçoivent des rémunérations inférieures et n'ont pas droit à une pension. Au contraire, les dirigeants et administrateurs gagnent beaucoup plus d'argent que dans le secteur public. La situation qui prévaut aux Etats-Unis démontre qu'une grande partie des économies faites par les compagnies gérant des prisons privées dérive de l'utilisation de travailleurs non syndiqués. L'immense majorité des prisons privées aux Etats-Unis se situe dans les Etats du Sud, hostiles aux syndicats.

Dans les commentaires qu'elle a formulés sur la situation en Australie, la commission d'experts semble envisager des circonstances dans lesquelles le recours au travail pénitentiaire dans les prisons privées serait compatible avec la convention. Un tel travail devrait s'exercer sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques. Il devrait être totalement volontaire, et le détenu ne devrait pas être mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. En outre, la rémunération devrait correspondre à un salaire normal. La préoccupation évidente de la commission d'experts, fondée sur les informations dont elle dispose au sujet de la situation en Australie, est que ces conditions ne sont pas remplies dans ce pays. Le membre travailleur de l'Australie a montré par un cas flagrant que cette préoccupation était justifiée.

En conclusion, l'orateur a appuyé l'opinion de la commission d'experts, selon laquelle le développement rapide du travail pénitentiaire dans les prisons privées mérite une attention renouvelée, tant en Australie que dans d'autres pays. Il a également appuyé la suggestion d'entreprendre une nouvelle étude d'ensemble sur la convention, qui accorderait une attention particulière à la question du travail pénitentiaire dans les prisons privées.

Le membre travailleur du Pakistan a manifesté son appui aux commentaires formulés par les orateurs précédents sur cette question. Il a également relevé que l'OIT mène une campagne pour la ratification de cette convention. Bien que l'on ne mette pas en doute les traditions démocratiques de l'Australie, les déclarations du représentant gouvernemental ont été réfutées par le membre travailleur de ce pays. La formulation de l'article 2, paragraphe 2 c) , de la convention ne laisse aucun doute: les prisonniers ne peuvent pas être concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Cependant, environ 65 pour cent des prisonniers dans l'Etat de Victoria sont détenus dans des prisons privées. La commission d'experts a défini les conditions qui doivent être remplies pour que le travail des détenus soit conforme aux dispositions de la convention. Ces conditions comprennent le libre consentement des prisonniers concernés et le paiement de salaires minimums. Cependant, la rémunération que perçoivent les prisonniers dans l'Etat de Victoria est dix fois inférieure au salaire minimum. En outre, le membre travailleur de l'Australie a formulé un avertissement clair à l'encontre des dangers du secret légal et des affaires qui entravent la surveillance exercée par les autorités publiques sur la manière dont les entreprises privées gèrent les prisons. La convention consacre le droit fondamental des travailleurs de ne pas être soumis au travail forcé. Elle doit par conséquent être appliquée par tous les Etats Membres. Le gouvernement devrait donc procéder à un examen de sa législation et de sa pratique afin d'identifier les domaines dans lesquels les dispositions de la convention ne sont pas respectées.

Le membre gouvernemental du Royaume-Uni a confirmé que son gouvernement s'intéresse fortement à la question du travail pénitentiaire et se félicite des conseils de la commission d'experts sur l'application de la convention. Il a pris note des informations détaillées fournies par le représentant gouvernemental ainsi que des opinions claires exprimées par les membres travailleurs et employeurs.

Les gouvernements sont seuls responsables de l'administration des prisons. A cet égard, le Royaume-Uni, l'Australie et un certain nombre d'autres pays présentent de nombreux points communs dans leur tentative d'établir des régimes pénitentiaires décents et constructifs adaptés pour la réhabilitation des délinquants. La privatisation des prisons constitue un phénomène récent qui n'aurait pas pu être pris en compte au moment de l'élaboration de la convention en 1930. L'orateur a déclaré qu'il partage le souci de la commission d'experts que les prisonniers exécutant une peine ne fassent pas l'objet d'exploitation. Il est cependant difficile d'accepter l'idée que le travail et la formation effectués dans des prisons privatisées constituent par définition du travail forcé, en particulier lorsque la réglementation et les conditions sont identiques à celles prévalant dans les prisons publiques. Dans la discussion générale, l'orateur et plusieurs autres membres gouvernementaux ont souligné la nécessité d'adopter une interprétation réaliste et à jour de cette convention fondamentale. Dans le présent cas, il serait prématuré de tirer des conclusions définitives avant que les récents développements n'aient été examinés dans le cadre d'une étude d'ensemble sur le travail forcé. L'orateur a exprimé l'espoir que les conclusions de la commission reflètent pleinement cette opinion.

En outre, le membre gouvernemental des Etats-Unis a observé que ce cas est une bonne occasion d'examiner les aspects importants du travail pénitentiaire, un point clé de l'une des conventions fondamentales. La discussion au sein de cette commission ainsi que la réaction de la commission d'experts devraient permettre de donner un caractère actuel à l'interprétation de la convention. Celle-ci a été adoptée en 1930 et la dernière étude d'ensemble sur le sujet date de 1979. La situation a changé depuis, les prisons et le travail pénitentiaire également. Les prisons privées ainsi que les ateliers à l'intérieur des prisons sont d'un apport positif à la fois pour les prisonniers, en leur permettant de se réinsérer au moyen de la formation professionnelle, et pour le gouvernement, en allégeant le poids financier que représentent les prisons publiques. La commission d'experts a d'ailleurs demandé aux pays ayant ratifié la convention de faire part de leur position en droit et en pratique sur la question du travail pénitentiaire dans les prisons privées et au profit de partenaires privés. L'orateur a également estimé nécessaire l'élaboration d'une nouvelle étude d'ensemble sur le travail forcé et en particulier sur le travail pénitentiaire. D'une part, il est nécessaire de protéger les prisonniers contre les formes injustes de travail forcé et, d'autre part, il convient de mettre à leur disposition des programmes de réinsertion et de qualification professionnelles de manière à ce qu'ils puissent devenir des citoyens productifs à leur sortie de prison, et ce au meilleur rapport efficacité-coût. Le BIT ainsi que la commission d'experts devraient prêter une oreille attentive aux commentaires des travailleurs, des employeurs et du gouvernement sur ce cas et en prendre note.

Le membre travailleur de la France a relevé que le représentant gouvernemental de l'Australie ne semble pas convaincu que la convention doit s'appliquer au travail pénitentiaire tant dans les prisons privées que publiques. A cet égard, il a exprimé son désaccord et a insisté sur le fait que la convention est une convention fondamentale qui s'applique à tous; elle s'avère d'autant plus d'actualité que le système de prisons privées se développe. Il est dès lors abusif de prétendre qu'il s'agit d'un instrument désuet qui concerne les anciennes formes d'esclavage.

L'orateur a observé que la formation professionnelle et le travail sont des éléments reconnus pour la réinsertion des prisonniers. D'ailleurs, nombre de prisonniers ont eu des difficultés scolaires et ont besoin de formation et de qualification professionnelles. Toutefois, il a insisté sur le fait que ces prisonniers demeurent des êtres humains et doivent dès lors pouvoir jouir de certains droits, incluant ceux inscrits dans la Déclaration de Philadelphie et qui concernent un travail productif et librement choisi. Ils ont également droit à un salaire décent permettant la constitution d'un pécule en vue de leur sortie de prison ainsi qu'à la protection sociale et à une pension de retraite. Sinon comment leur est-il possible de se réinsérer à l'expiration de leur peine? L'orateur a noté que les maigres salaires versés aux prisonniers viennent en directe concurrence avec le travail libre; en outre, le développement des prisons privées entraîne avec lui une exploitation inquiétante du travail des prisonniers puisque nombre des sociétés uvrant dans ce domaine sont en tout premier lieu à la recherche de profits.

L'orateur a insisté sur le fait que les conditions de travail des prisonniers doivent respecter les normes pertinentes fixées; il a affirmé ne pas partager l'opinion émise par les membres employeurs que la convention doit être interprétée de manière restrictive. Enfin, il a insisté sur l'importance qu'un rapport détaillé soit fourni par le gouvernement qui examine en profondeur la pratique actuelle et les conditions du travail pénitentiaire concédé à des entreprises privées.

Le membre gouvernemental de l'Allemagne a accueilli favorablement les commentaires de la commission d'experts selon lesquels le travail dans les prisons privées constitue un problème nouveau qui doit être examiné en tenant compte de la situation actuelle. Jusqu'à maintenant, les débats sur le travail dans les prisons ont mis l'accent sur son caractère punitif et sur les avantages que, de manière injustifiée, les employeurs privés peuvent en tirer lorsqu'ils occupent des détenus. A cet égard, l'orateur a rappelé que l'article XX e) des réglementations du GATT permet d'introduire des mesures visant à limiter le commerce des produits fabriqués dans des établissements pénitentiaires. Mais la situation a changé. Aujourd'hui, on considère que le travail facilite la réinsertion des détenus dans la société. A ce sujet, il a fait mention des nombreuses questions que la commission d'experts a énumérées dans son observation générale sur la convention relative au travail forcé. Il a exprimé son désaccord avec le représentant gouvernemental de l'Australie qui a estimé que le champ d'application de la convention ne comprend pas le travail dans les prisons privées. La question de savoir si ce type de travail est contraire ou non à la convention se pose aussi pour les prisons privées. En conclusion, il a indiqué que, vingt ans après la publication de la dernière étude d'ensemble sur le travail forcé, il faut réexaminer cette question sans réserve. Le gouvernement devrait donc fournir des informations complètes sur ce point.

Le membre gouvernemental du Canada a évoqué les nouveaux développements intervenus depuis la dernière étude d'ensemble de la commission d'experts de 1979 sur la convention. Son gouvernement appuie pleinement la position de l'Australie en faveur de la proposition de la commission d'experts pour l'élaboration d'une nouvelle étude d'ensemble sur la convention qui tienne compte des nouveaux développements, notamment dans le domaine du travail pénitentiaire. Une telle étude d'ensemble donnerait une vision actualisée de la pratique dans différents pays et des différents problèmes d'application et permettrait aux experts de fournir un nouvel éclairage sur la problématique. Une nouvelle étude contribuerait à réaliser l'objectif de pérennité de la pertinence des conventions de l'OIT et à diffuser l'information concernant leur application dans un contexte moderne.

Le membre gouvernemental du Japon a déclaré appuyer le point de vue du membre gouvernemental de l'Australie selon lequel la convention devrait être interprétée de manière plus souple et coller aux réalités modernes. Une nouvelle étude d'ensemble devrait être conduite aussi bien en ce qui concerne cette convention que d'autres instruments.

Le membre travailleur de l'Allemagne a exprimé son accord avec les commentaires de la commission d'experts concernant l'applicabilité de la convention au travail exécuté dans les prisons privées. Avec l'augmentation du nombre des prisons privées, il est crucial que les principes affirmés dans la convention leur soient appliqués. L'utilisation du travail pénitentiaire n'est compatible avec la convention que s'il a fait l'objet du consentement des prisonniers concernés et des garanties concernant la rémunération des salaires normaux, etc. Bien qu'une étude d'ensemble sur le sujet soit nécessaire, l'évaluation et l'appréhension de ce phénomène ne devraient pas être retardées par la publication de cette étude. Contrairement à la déclaration faite par le membre employeur de l'Australie, la concurrence déloyale résultant du niveau très bas des salaires affecte l'application de la convention. En conclusion, l'orateur a rappelé l'avis général selon lequel la convention doit empêcher la concurrence déloyale.

Le représentant gouvernemental a souligné que la question préliminaire concerne l'article 2, paragraphe 2 c), qui est une clause d'exclusion. Le fait qu'une prison soit privée n'implique pas automatiquement que les dispositions de la convention lui soient applicables. En d'autres termes, si les circonstances visées à l'article 2, paragraphe 2 c), sont réunies, la convention ne s'applique pas aux prisons privées. Il n'est en outre pas utile de tenir compte du niveau des salaires du travail obligatoire des prisonniers ni d'un quelconque autre élément puisque la convention ne s'applique tout simplement pas.

Certaines des questions soulevées comme par exemple les dispositions de la recommandation no 189 ou les questions liées à la concurrence, si elles présentent un intérêt légitime pour le BIT, ne présentent pas de pertinence dans le cadre de cette discussion. L'unique question débattue est celle du travail forcé. Selon le membre travailleur de l'Australie, l'Auditeur général de Victoria aurait exprimé des préoccupations quant aux contrats relatifs à l'intervention des prisons privées à Victoria. Il est nécessaire de bien comprendre de quel type de contrat il s'agit. Ce sont des contrats conclus entre l'Etat et l'opérateur privé de l'administration pénitentiaire. Selon le gouvernement de Victoria, l'unique problème est celui du maintien de la confidentialité des prix pour des raisons commerciales. D'autres aspects tels que les critères de rentabilité, les conditions du contrôle des prisons ainsi que les questions administratives y relatives sont accessibles au public. Ces contrats comme les profits qu'ils génèrent pour les opérateurs privés doivent être distingués des profits retirés du travail des prisons dans lesquelles leur affectation est clairement connue. Le problème concernant les profits ou la répartition des profits entre le distributeur, le grossiste et le détaillant ne sont d'aucun intérêt pour cette commission.

L'orateur a déclaré appuyer la proposition d'une nouvelle étude d'ensemble de la commission d'experts sur cette question. Une telle étude pourrait mettre l'accent sur une nouvelle vision du travail pénitentiaire. L'application des conventions devrait être revue périodiquement afin que soit assurée leur capacité d'adaptation aux changements rapides de la société moderne. En l'espèce, la nécessité d'un nouvel examen se justifie en partie par les changements intervenus dans les pratiques de l'administration publique. Si une telle étude est nécessaire, il est également très clair que le travail pénitentiaire en Australie n'est pas du travail forcé même au regard de l'interprétation actuelle de la commission d'experts. Les faits exposés par le gouvernement de Victoria démontrent que le travail dans les prisons privées est exécuté sous le contrôle et la surveillance d'une autorité publique et dans le cadre d'une réglementation substantielle. En outre, les prisonniers ne sont pas recrutés ou mis à la disposition d'entités privées dans le but d'exploitation tel que celui que les rédacteurs de la convention voulaient proscrire.

En résumé, il est manifestement difficile d'appréhender la question des prisons privées. La solution serait que la commission d'experts élabore aussitôt que possible une nouvelle étude d'ensemble sur le travail forcé, qui porte l'attention sur les données existantes, et revoie leur interprétation à la lumière des conclusions de l'étude. Etant donné les incertitudes qui entourent cette matière comme cela ressort des déclarations d'un certain nombre de membres gouvernementaux, de membres employeurs et de quelques membres travailleurs, ce cas devrait être laissé de côté, et la commission devrait s'abstenir d'émettre des conclusions en l'espèce. Il conviendrait que le dialogue se poursuive dans le cadre du cycle normal des rapports de manière que tous développements mis en lumière par l'étude puissent être pris en considération.

Les membres employeurs ont noté la discussion animée, ce qui démontre l'importance de cette question. Bien que ce problème n'ait pas été envisagé au moment de l'adoption de la convention en 1930, il doit en être tenu compte lors de l'examen des dispositions de la convention. Ils ont noté que la commission d'experts n'avait pas encore fait une évaluation complète de cette question. A cet égard, les membres employeurs ont souscrit à la déclaration du président de la commission d'experts lors de la Commission de la Conférence ainsi qu'à la requête de la commission d'experts à l'effet que les gouvernements devraient fournir dans leur prochain rapport des informations concernant la position actuelle, en droit et en pratique, en ce qui a trait à cette question. Bien qu'une étude d'ensemble sur ce sujet apparaisse nécessaire, cette question devrait néanmoins être étudiée sans délai. En conclusion, les membres employeurs ont soutenu la demande de la commission d'experts pour obtenir des informations détaillées qui permettraient de donner un tableau plus complet sur cette question dans le monde entier. Puisque l'Australie n'est pas le seul pays concerné, cette commission devrait se limiter à demander des informations détaillées au gouvernement.

Les membres travailleurs ont souhaité attirer l'attention de la commission sur deux points. Premièrement, ils ont insisté pour que les gouvernements répondent à tous les points soulevés dans l'observation générale de la commission d'experts relative à la convention en tenant pleinement compte du tripartisme lors de l'envoi des réponses et de l'élaboration des rapports. Cette demande d'information devrait être reprise par la commission afin que la commission d'experts soit en mesure de mieux analyser les problèmes, tendances et nature des garanties instaurées au niveau de la gestion et du fonctionnement des ateliers dans les prisons. Dans le cadre de cet exercice, les gouvernements devraient tenir compte des paragraphes 70 à 72 du rapport général de la commission d'experts et des paragraphes 112 à 125 inclus dans la partie générale du rapport de la commission d'experts de 1998. Egalement, les membres travailleurs, se référant à la recommandation no 189, ont demandé aux gouvernements de tenir compte des répercussions du travail pénitentiaire et des services et marchandises qui y sont fabriqués sur les autres entreprises soumises à la législation du travail, plus particulièrement pour ce qui est des petites et moyennes entreprises. Les gouvernements devraient dès lors informer le BIT sur les mesures et procédures prises au niveau national pour tenir compte des conséquences sur l'emploi dans les PME et autres entreprises.

Deuxièmement, pour ce qui est des conditions de travail des prisonniers, les membres travailleurs ont insisté sur le fait que la position de la commission d'experts est claire et que les conditions de travail des prisonniers qui ne jouissent pas des droits des travailleurs libres soient établies afin de garantir que celles-ci soient convenables et se rapprochent de celles des autres travailleurs.

La commission a pris note des informations que le représentant gouvernemental a fournies oralement et des discussions qui ont suivi. Elle a aussi constaté qu'un rapport détaillé avait été soumis à l'examen de la commission d'experts. A propos du travail de détenus dans les prisons privées, elle a pris note des préoccupations formulées par le Conseil australien des syndicats selon lesquelles la supervision du travail des détenus dans les prisons privées de l'Etat de Victoria a été entièrement déléguée à des opérateurs privés. Tout en prenant note des assurances données à cet égard par le gouvernement, la commission lui a demandé de fournir à la commission d'experts des informations détaillées sur la supervision du travail dans les prisons privées pour que celle-ci puisse poursuivre son examen de cette question. En outre, la commission a souligné que la convention interdit de concéder ou de mettre des prisonniers à la disposition d'entreprises privées ou de particuliers. De plus, elle a considéré que la commission d'experts devrait examiner plus avant la mesure dans laquelle cette disposition est respectée en Australie. La commission a exhorté le gouvernement à continuer de fournir à la commission d'experts des informations sur ce point. Par ailleurs, la commission a incité tous les gouvernements à donner suite à l'observation générale de la commission d'experts sur la question du travail dans les prisons privées.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

La commission salue la ratification par l’Australie du protocole de 2014 à la convention sur le travail forcé, 1930. Elle, espère que le gouvernement fournira des informations détaillées sur son application, conformément au formulaire de rapport adopté par le Conseil d’administration.
La commission prend note des observations du Conseil australien des syndicats (ACTU) reçues le 31 août 2021.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1 et article 25 de la convention. 1. Traite des personnes et pratiques de travail forcé. Cadre législatif. La commission prend note de l’adoption de la loi du Commonwealth de 2018 sur l’esclavage moderne qui définit l’esclavage moderne comme la traite des personnes et les infractions d’esclavage et de conditions analogues à l’esclavage, qui inclut le travail forcé, conformément aux divisions 270 et 271 du Code pénal. Elle note avec intérêtque la loi exige que les grandes entreprises et autres entités, y compris le gouvernement australien, publient des déclarations annuelles sur l’esclavage moderne décrivant leurs efforts pour évaluer et traiter les risques d’esclavage moderne dans leurs opérations et leurs chaînes d’approvisionnement mondiales. Ces déclarations sont accessibles au public à travers le registre des déclarations sur l’esclavage moderne. La commission note qu’en décembre 2021, le gouvernement australien a publié la déclaration 2020-21 du Commonwealth sur l’esclavage moderne qui couvre les opérations et les chaînes d’approvisionnement mondiales de toutes les entités du Commonwealth qui ne sont pas des entreprises.
En ce qui concerne la Nouvelle-Galles du Sud, la commission prend note de l’adoption de la loi de 2018 sur l’esclavage moderne qui prévoit, entre autres, la nomination d’un commissaire à la lutte contre l’esclavage chargé de promouvoir les actions de lutte contre l’esclavage moderne, et d’identifier et de fournir une assistance et un soutien aux victimes de l’esclavage moderne. Elle note que, par souci de cohérence, les obligations de déclaration des entreprises prévues par la loi de Nouvelle-Galles du Sud ont été abrogées par la loi de 2021 portant modification de la loi sur l’esclavage moderne. Il est ainsi demandé aux entreprises de Nouvelle-Galles du Sud de suivre les prescriptions de la loi de 2018 du Commonwealth sur l’esclavage moderne concernant la publication annuelle des déclarations sur l’esclavage moderne.
La commission note que, tout en saluant l’adoption de la nouvelle législation, l’ACTU, dans ses observations, exprime des préoccupations concernant un certain nombre de points faibles, tels que: 1) l’absence de contrôle indépendant visant à garantir que les entreprises se conforment à la loi du Commonwealth; 2) l’absence de sanctions pour les entreprises qui ne signalent pas ou n’agissent pas sur l’esclavage moderne dans leurs chaînes d’approvisionnement et leurs opérations; et 3) l’absence d’obligation pour le Commonwealth de revenir sur les contrats de marchés publics ou autres avantages ou soutiens aux entreprises qui n’ont pas fait rapport sur l’esclavage moderne ou montré qu’elles prennent des mesures pour l’éliminer de leurs opérations et chaînes d’approvisionnement. La commission note que la commission australienne des droits de l’homme a exprimé des préoccupations similaires et a également regretté l’absence d’un régime national d’indemnisation des victimes de l’esclavage et de la traite des personnes (AHRC, soumission au CESCR, 7 janvier 2022, paragraphe 52). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de la loi du Commonwealth sur l’esclavage moderne et de la loi sur l’esclavage moderne de la Nouvelle-Galles du Sud, y compris sur l’impact que l’obligation de déclaration a pu avoir sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes et le travail forcé, dans les activités ou services des entreprises et des entités publiques.
Plan d’action national. La commission prend note de l’indication du gouvernement, selon laquelle le plan d’action national 2015-2019 de lutte contre la traite des êtres humains et l’esclavage a été remplacé par le plan d’action national 2020-2025 de lutte contre l’esclavage moderne, qui définit cinq priorités stratégiques nationales: 1) prévenir, 2) perturber, enquêter et poursuivre, 3) soutenir et protéger, 4) établir des partenariats et 5) mener des recherches. Le gouvernement ajoute qu’un cadre de suivi et d’évaluation a été établi afin de suivre les progrès réalisés par rapport aux résultats à court, moyen et long termes. En ce qui concerne les travaux menés par le groupe de travail expert multipartite sur l’exploitation du travail dans le cadre de la table ronde nationale sur la traite des êtres humains et l’esclavage, le gouvernement indique que le groupe de travail a formulé 27 recommandations en août 2018, qui sont actuellement examinées par le gouvernement. La commission salue l’adoption du Plan d’action national de lutte contre l’esclavage moderne 2020-2025 et prie le gouvernement d’indiquer si ’les objectifs fixés dans le cadre des cinq priorités stratégiques ont été atteints, et de fournir des informations sur toute évaluation des résultats obtenus et des éventuels obstacles identifiés. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur toute action entreprise ou envisagée suite aux recommandations formulées par le groupe de travail sur l’exploitation du travail.
Identification et protection des victimes. La commission a précédemment noté que, dans le cadre du programme de soutien du gouvernement australien aux personnes victimes de la traite, toutes les victimes de la traite des personnes orientées par la police fédérale australienne peuvent bénéficier d’un soutien intensif de 45 jours, et de 45 jours supplémentaires pour les victimes qui aident à l’enquête ou aux poursuites. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, de juillet 2017 à juin 2021, 259 personnes ont été orientées vers ce programme. Le soutien apporté comprend une gestion individuelle des cas, une aide financière, un hébergement sûr et sécurisé, une prise en charge médicale et sociale, des conseils, une formation au développement des compétences et l’orientation vers des conseils juridiques et migratoires. En outre, selon le rapport 2021 du comité interministériel sur la traite des êtres humains et l’esclavage, de juillet 2017 à juin 2020, un total de 119 visas a été accordé par l’intermédiaire du cadre des visas pour traite des êtres humains, à des victimes présumées de la traite qui ont aidé à la procédure de justice pénale et seraient en danger si elles étaient renvoyées dans leur pays. La commission note ’que le gouvernement indique que le médiateur du travail équitable a institué des processus opérationnels, créé des ressources éducatives et dispensé des formations pour faire en sorte que les inspecteurs du travail équitable identifient et orientent les cas potentiels de traite des personnes et d’esclavage, y compris en collaboration avec la police fédérale australienne. Tout en saluant les mesures mises en œuvre par le gouvernement pour identifier et protéger les victimes de la traite, la commission note, d’après un rapport publié en 2019 par l’institut australien de criminologie, qu’il était estimé que pour chaque victime détectée par les autorités, quatre victimes restaient non détectées (bulletin statistique no 16, pp. 1 et 6). La commission encourage le gouvernement à continuer de renforcer les capacités des agents chargés ’de l’application de la loi en vue d’une meilleure identification des ’situations de traite des personnes. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour garantir que toutes les victimes de traite des personnes bénéficient d’une protection et d’une assistance, ainsi que sur le nombre de victimes qui ont été identifiées et ont bénéficié de services de réadaptation et de réintégration.
Application de la loi. La commission note ’que le gouvernement indique qu’en 2020-21 la police fédérale australienne a enquêté sur plus de 224 signalements concernant des situations liées à la traite des personnes et à l’esclavage moderne. Le gouvernement ajoute que, depuis 2017, il y a eu cinq condamnations pour traite des personnes, esclavage ou infractions assimilables à l’esclavage, sur la base des divisions 270 et 271 du Code pénal. À cet égard, la commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle le faible nombre de condamnations, par rapport à d’autres types de crimes, reflète le fait que la traite des personnes et l’esclavage moderne passent souvent inaperçus ou ne sont pas signalés, notamment en raison de difficultés liées à l’obtention de preuves et du fait que les auteurs présumés restent à l’étranger. La commission note avec préoccupation le faible nombre persistant de condamnations pour traite des personnes. Elle prie le gouvernement de redoubler d’efforts pour s’assurer que toutes les personnes qui se livrent à la traite et à des pratiques analogues à l’esclavage fassent l’objet de poursuites et que, dans la pratique, des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées aux auteurs de ces actes. À cet égard, elle prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’enquêtes, de procédures pénales engagées, de personnes condamnées et de peines infligées sur la base des articles 270 et 271 du Code pénal.
2. Vulnérabilité des travailleurs migrants. La commission a précédemment noté que, malgré les réformes législatives entreprises par le gouvernement, un certain nombre de violations des droits des travailleurs migrants persistaient dans la pratique, telles que des heures de travail excessives, le sous-paiement des salaires, la discrimination et les menaces de licenciement. La commission note que, dans ses observations, l’ACTU indique que le travail forcé est présent dans les secteurs à haut risque, notamment l’agriculture, la construction, le travail domestique, la transformation de la viande, le nettoyage et l’hôtellerie, qui emploient un pourcentage élevé de travailleurs migrants. L’ACTU ajoute que, ces dernières années, il y a eu un développement sans précédent de la migration temporaire de la main-d’œuvre en Australie, en particulier dans le secteur de l’horticulture, où un rapport de 2021 a montré que plus de 40 pour cent de la main-d’œuvre horticole australienne bénéficie d’un visa temporaire. L’ACTU exprime d’autres préoccupations au sujet d’un programme de migration qualifiée qui repose de manière excessive sur des visas parrainés par l’employeur, dans le cadre desquels les travailleurs sont liés à un seul employeur, ce qui augmente le risque d’exploitation. De l’avis de l’ACTU, les sous-paiements systématiques, qui comprennent le paiement par les employeurs de salaires inférieurs aux taux convenus et le non-paiement des droits à la retraite, sont une forme d’exploitation au travail qui est répandue en Australie, les travailleurs migrants y étant particulièrement vulnérables. Pour remédier à cette situation, l’ACTU recommande au gouvernement d’introduire un système national d’octroi de licences pour l’embauche de main-d’œuvre. La commission note, à cet égard, l’indication du gouvernement selon laquelle, en mars 2019, le groupe de travail sur les travailleurs migrants, qui a été créé afin d’identifier les autres améliorations nécessaires, tant dans la législation que dans la pratique, pour prévenir et traiter l’exploitation des travailleurs migrants, a publié son rapport final. Le gouvernement indique que des progrès importants ont été réalisés dans la mise en œuvre des 22 recommandations de ce groupe de travail. La commission note, plus particulièrement, que le groupe de travail a recommandé de créer un système national d’enregistrement des embauches afin d’obliger les agences de recrutement à s’enregistrer auprès du gouvernement et les employeurs à n’utiliser que des agences enregistrées. Le gouvernement indique que cette recommandation n’a pas encore été mise en œuvre au niveau national, mais que des consultations sont en cours.
À cet égard, la commission note que de tels systèmes d’enregistrement ont été adoptés au niveau des États et des territoires, plus particulièrement dans le Queensland (Labour Hire Licensing Act2017) et en Australie-Méridionale (Labour Hire Licensing Act2017), dans l’état de Victoria (Labour Hire Licensing Act2018), et dans le Territoire de la capitale australienne (Labour Hire Licensing Act2020 ) . En conséquence, des infractions spécifiques ont été définies pour la fourniture de services de recrutement de main-d’œuvre sans licence ou pour l’embauche de travailleurs par l’intermédiaire d’un prestataire de services de recrutement de main-d’œuvre sans licence. La commission note en outre qu’au Queensland et dans l’État de Victoria, de nouvelles infractions pénales de vol de salaire ont été introduites dans la législation, assorties de peines d’emprisonnement pour les employeurs, respectivement par la loi de 2020 portant modification du Code pénal et d’autres textes législatifs (vol de salaire) et la loi de 2020 sur le vol de salaire. Ces infractions couvrent les situations dans lesquelles les employeurs retiennent malhonnêtement les salaires et autres droits des employés, ou se livrent à des pratiques visant à masquer le vol de salaire en falsifiant les registres des droits des employés ou en omettant de les conserver. La commission note avec intérêt les mesures législatives adoptées au niveau des États et des territoires afin de protéger les travailleurs contre l’exploitation. À cet égard, elle note que, selon le rapport 2021 Lives in Limbo du centre des travailleurs migrants, il existe une corrélation claire entre l’exploitation sur le lieu de travail et le statut de visa temporaire, 91 pour cent des travailleurs victimes de vol de salaire arrivant avec un visa sans possibilité de résidence permanente. En outre, 65 pour cent des détenteurs de visas temporaires ont été victimes d’un vol de salaire et un sur quatre a également été victime d’autres formes d’exploitation du travail.
La commission note en outre que le gouvernement déclare que les initiatives visant à mieux informer les travailleurs migrants sur leurs droits sur le lieu de travail, notamment au moyen d’informations fournies dans les avis d’octroi de visa, ont été poursuivies, y compris en collaboration avec le médiateur pour un travail équitable. Ce dernier encourage le respect des lois sur le lieu de travail en fournissant une éducation, une assistance, des conseils et une orientation aux employeurs et aux employés, y compris aux travailleurs vulnérables, par le biais de son site Internet, d’outils et de ressources en ligne, et d’un outil de signalement anonyme disponible en 16 langues. À cet égard, la commission note que le médiateur et le ministère de l’Intérieur ont établi un protocole d’assurance pour aider les titulaires de visas temporaires à s’adresser au médiateur en cas d’exploitation sur le lieu de travail. En vertu de ce protocole d’assurance, les titulaires de visas temporaires ne verront généralement pas leur visa annulé s’ils ont enfreint les conditions liées à l’octroi de leur visa de travail en raison d’une exploitation sur le lieu de travail, à condition qu’ils aient demandé l’aide du médiateur. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, en mai 2021, huit décisions ont été rendues concernant des infractions à la loi de 2017 portant modification de la loi sur le travail équitable (protection des travailleurs vulnérables), dont deux concernent les dispositions relatives aux «infractions graves», mais observe qu’aucune information n’est fournie sur la nature des infractions décelées.
La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises, tant en droit qu’en pratique, pour protéger les travailleurs migrants contre les pratiques abusives et de s’assurer qu’ils ne soient pas placés dans une position de vulnérabilité accrue au travail forcé. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique des lois sur les licences de recrutement de main-d’œuvre adoptées dans le Territoire de la capitale australienne, le Queensland, l’Australie-Méridionale et l’état de Victoria, ainsi que sur les dispositions relatives au vol de salaire adoptées dans le Queensland et l’état de Victoria, en indiquant le nombre d’infractions décelées et les sanctions imposées à cet égard. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé en ce qui concerne l’élaboration d’un système national de licences de recrutement de main-d’œuvre et la mise en œuvre des autres recommandations formulées par le groupe de travail sur les travailleurs migrants.

Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

Articles 1, paragraphe 1, 2, paragraphe 1 et 2, paragraphe 2c) de la convention. Privatisation des prisons et du travail pénitentiaire. Depuis plusieurs années, la commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention qui exclut le travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de la convention. Toutefois, lorsque les garanties nécessaires existent pour que les détenus concernés s’offrent de leur plein gré, en donnant leur consentement libre, formel et éclairé et sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, comme l’exige l’article 2, paragraphe 1, de la convention, le travail des détenus pour des entreprises privées ne relève pas du champ d’application de la convention, puisqu’il n’y a pas de contrainte. La commission a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le consentement libre, formel et éclairé des détenus soit légalement exigé pour le travail dans les prisons privées, ainsi que pour tout travail des détenus pour des entreprises privées.
1. Travail des détenus dans des prisons gérées par des entreprises privées. La commission a noté précédemment qu’il n’y avait pas de prisons privées sous la juridiction du Territoire du Nord et du Territoire de la capitale australienne. Elle a également noté qu’en Nouvelle-Galles du Sud, l’emploi des condamnés dans des centres correctionnels était volontaire.
En ce qui concerne le Queensland, la commission a observé que les détenus sont tenus d’effectuer un travail en vertu de l’article 66 de la loi de 2006 sur les services correctionnels, qui dispose que le directeur de l’établissement peut, par ordre écrit, transférer un détenu d’un établissement de services correctionnels à un camp de travail, et que le détenu doit effectuer un service communautaire selon les instructions du directeur. La commission note également que le travail effectué par les détenus ne se limite pas aux services communautaires effectués dans le cadre des camps de travail, mais comprend également des emplois dans des industries commerciales fonctionnant sur la base d’une rémunération à l’acte et dans des industries de services visant à maintenir l’autosuffisance du système correctionnel, ainsi que d’autres travaux non rémunérés. La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que le transfert de détenus dans un camp de travail est une décision de gestion prise eu égard au meilleur placement d’un détenu, conformément aux Custodial Operations Practice Directives (COPD) des services correctionnels du Queensland (QCS). Ces services communautaires comprennent l’entretien des espaces et infrastructures publics (peinture, tonte, jardinage et nettoyage) ainsi que la construction et la restauration de structures dans les espaces publics, telles que des tables de pique-nique. En 2019-20, 193 128 heures de services communautaires ont été effectuées par des détenus. Selon le gouvernement, la valeur financière du travail effectué dans la communauté par les détenus est représentative de la responsabilisation des délinquants et de mesures réparatrices pour la communauté dans le cadre de leur programme de réhabilitation. En ce qui concerne la participation des détenus aux activités commerciales fonctionnant sur la base d’une rémunération à l’acte et aux activités de services afin de maintenir l’autosuffisance du système correctionnel, le gouvernement déclare que les détenus condamnés sont censés travailler car cela leur donne l’occasion d’acquérir des compétences professionnelles et contribue à leur capacité à obtenir et à conserver un emploi à leur libération. Un comportement ou des performances professionnelles inacceptables peuvent entraîner la sanction d’être placé dans des postes de travail de niveau inférieur et de recevoir un taux de rémunération incitatif inférieur. Le gouvernement ajoute que la COPD sur l’emploi des détenus décrit l’objectif des services correctionnels du Queensland consistant à faire en sorte que les détenus condamnés soient employés chaque fois que cela est possible et que les industries pénitentiaires fournissent aux détenus une activité significative par le biais d’un emploi commercial, rémunéré à l’acte, de services aux détenus ou de travaux d’intérêt général. Selon la COPD susmentionnée, le directeur d’un établissement de services correctionnels doit assurer l’emploi des détenus en les affectant aux postes disponibles selon une approche interdisciplinaire tenant compte du comportement du détenu. La commission note, d’après le rapport 2022 sur les services publics de l’Australie, qu’en 2020-21, dans le Queensland, 26,3 pour cent des détenus éligibles étaient employés dans des activités commerciales et 38,9 pour cent dans des activités de services (chapitre 8, tableau 8 A.12). La commission prend également note que le gouvernement indique que, depuis le 1er juillet 2021, tous les établissements pénitentiaires du Queensland sont sous administration publique et les détenus ne seront plus sous administration privée dans l’État.
En ce qui concerne l’Australie-Méridionale, la commission rappelle que, conformément à l’article 29, paragraphe 1, de la loi de 1982 sur les services correctionnels, le travail pénitentiaire est obligatoire tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des établissements correctionnels. Le gouvernement indique toutefois que les détenus de la prison de Mt Gambier (la seule prison sous gestion privée d’AustralieMéridionale) demandent par écrit à participer à des programmes de travail, et que les détenus du centre de libération conditionnelle d’Adelaïde demandent volontairement à travailler à l’extérieur dans des entreprises privées. La commission prend note de l’adoption de la loi de 2021 portant modification de la loi sur les services correctionnels (responsabilité et autres mesures), qui a modifié l’article 29, paragraphe 1, de la loi sur les services correctionnels de 1982, mais elle observe que le travail pénitentiaire reste obligatoire alors que les personnes placées en détention provisoire ne sont plus explicitement exclues de cette obligation. Par ailleurs, elle note l’indication du gouvernement selon laquelle le centre de détention provisoire d’Adélaïde a été privatisé et est désormais géré par le secteur privé.
En ce qui concerne l’État de Victoria, la commission a précédemment noté l’indication du gouvernement selon laquelle les détenus travaillant pour des prisons publiques et privées ont les mêmes droits et prérogatives, et dans les deux cas, les condamnés doivent donner leur consentement pour travailler. La commission note que le gouvernement indique que tous les détenus condamnés ont la possibilité de travailler dans les ateliers du milieu carcéral afin de développer leurs compétences professionnelles. Le gouvernement ajoute que, dans les prisons privées, les détenus ne sont pas contraints de travailler. Les postes vacants dans les ateliers en milieu carcéral sont annoncés aux prisonniers et ces derniers ont la possibilité de postuler pour ces postes. Les détenus sont rémunérés pour leur travail dans les ateliers en milieu carcéral. Si un détenu refuse de travailler dans les ateliers en milieu carcéral, il est classé comme chômeur et ne reçoit aucune rémunération, mais il reçoit des produits de première nécessité et est encouragé à participer à d’autres activités structurées de la journée telles que la formation, l’éducation ou des programmes.
En ce qui concerne l’Australie occidentale, la commission a précédemment noté que le travail pénitentiaire est obligatoire en vertu de l’article 95, paragraphe 4, de la loi sur les prisons de 1981 et de l’article 43 du règlement des prisons de 1982. Le gouvernement a indiqué que ces dispositions n’étaient pas appliquées car, dans la pratique, les détenus ne sont pas contraints de participer à des programmes de travail, même dans les prisons à gestion privée. La commission a noté que, si l’article 6, paragraphe 5, alinéa 3, de la procédure pénitentiaire 302 relative aux camps de travail prévoit que les détenus peuvent demander à être placés dans un camp de travail, l’article 7, paragraphe 1, de ladite procédure dispose que le directeur désigné doit s’assurer que les détenus susceptibles d’être placés dans un camp de travail et qui n’ont pas déposé de demande sont évalués de manière appropriée en vue de leur inclusion. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle il existe actuellement cinq camps de travail pour détenus et les directeurs de ces camps savent qui sont les détenus admissibles et sollicitent de manière proactive tous les détenus afin de déterminer s’ils sont intéressés par un placement dans un camp de travail. Le ministère de la Justice encourage les détenus à envisager un placement dans un camp de travail, mais ceux-ci doivent y consentir individuellement et être informés des conditions du placement et les accepter.
À la lumière des considérations qui précèdent, la commission rappelle que la convention vise non seulement les situations où les détenus sont «employés» par l’entreprise privée ou placés en situation de fournir des services à l’entreprise privée, mais aussi les situations où les détenus sont concédés ou mis à la disposition des entreprises privées, tout en demeurant sous l’autorité et le contrôle de l’administration pénitentiaire. Elle attire à nouveau l’attention du gouvernement sur le fait que le travail des détenus dans des prisons privées ou pour des entreprises privées n’est compatible avec la convention que lorsqu’il n’est pas obligatoire. À cette fin, le consentement formel, libre et éclairé des personnes concernées est requis, ainsi que des garanties et des protections supplémentaires couvrant les éléments essentiels d’une relation de travail, tels que les salaires, la sécurité et la santé au travail et la sécurité sociale. La commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises dans les états du Queensland, d’Australie-Méridionale, de Victoria et d’Australie-Occidentale, tant en droit qu’en pratique, afin que le consentement formel, librement donné et éclairé des condamnés soit requis et que leurs conditions de travail se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, pour le travail dans les prisons gérées par des entreprises privées, et pour tout travail des détenus au profit d’entreprises privées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des locaux pénitentiaires. Elle prie en particulier le gouvernement de:
  • i)fournir des informations sur les dispositions législatives qui régissent les procédures et les conditions de travail des détenus employés dans d’autres activités en milieu carcéral du Queensland, y compris des activités commerciales et de services;
  • ii)modifier l’article 29, paragraphe 1, de la loi de 1982 sur les services correctionnels de l’Australie-Méridionale, afin de l’aligner sur la pratique indiquée, et préciser si les prévenus sont désormais obligés de travailler;
  • iii)fournir des informations sur les dispositions législatives qui dans l’état de Victoria prévoient que les détenus des prisons gérées par le secteur privé ne sont pas contraints de travailler, tout en indiquant comment, dans la pratique, il est assuré que les détenus concernés se proposent volontairement au travail, en donnant leur consentement libre et éclairé (prière de fournir également des exemples de formulaires par lesquels les détenus peuvent postuler à des postes vacants dans les ateliers en milieu carcéral et tout document signé à cet effet); et
  • iv)modifier l’article 95, paragraphe 4, de la loi sur les prisons et l’article 43 du règlement des prisons de l’Australie occidentale, afin d’aligner la législation sur la pratique indiquée.
2. Travail des détenus pour des entreprises privées. Tasmanie. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté qu’il n’y avait pas de prisons gérées par des entreprises privées en Tasmanie. Toutefois, conformément à l’article 33 de la loi de 1997 sur les établissements pénitentiaires, un détenu peut être chargé de travailler à l’intérieur ou à l’extérieur des locaux de la prison. Conformément à l’annexe 1 (partie 2.26) de la loi, le refus de se conformer à cette instruction est considéré comme une infraction à la loi sur les prisons. Le gouvernement a indiqué qu’en Tasmanie, les détenus travaillent pour des entreprises privées sur une base volontaire et doivent solliciter une permission de sortie conformément à la loi de 1997 sur les établissements pénitentiaires (articles 41 et 42). Le gouvernement a ajouté que, dans la pratique, les détenus ne sont pas tenus de participer à ce type d’emploi et ne sont pas pénalisés en cas de non-participation.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle aucun changement n’a été introduit pour aligner la législation sur la pratique indiquée, mais la demande de la commission de modifier la loi de 1997 sur les établissements pénitentiaires sera dûment prise en compte. La commission salue cette information et prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour aligner la législation sur la pratique indiquée selon laquelle les détenus travaillent pour des entreprises privées sur une base volontaire.
La commission soulève d’autres questions dans une demande adressée directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

La commission prend note des observations du Conseil australien des syndicats (ACTU), reçues le 4 octobre 2017.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. 1. Traite des personnes et pratiques de travail forcé. a) Cadre législatif et contrôle de l’application de la loi. La commission a précédemment pris note des informations fournies par le gouvernement sur l’application, dans la pratique, des chapitres 270 et 271 du Code pénal déterminant les «infractions d’esclavage», y compris les conditions d’esclavage et les conditions analogues à l’esclavage, la servitude, la traite des personnes et la servitude pour dettes. Elle a également pris note de l’adoption d’une infraction autonome concernant le travail forcé en vertu de la loi de février 2013 portant modification de la législation pénale (esclavage, conditions analogues à l’esclavage et traite des personnes), dont le but est de s’assurer qu’il n’est pas nécessaire qu’il y ait d’élément de mouvement pour engager des poursuites en cas de travail forcé et que l’exploitation au travail soit appréhendée et incriminée en fonction de son degré de gravité.
La commission note que, d’après les informations figurant dans le rapport du gouvernement, deux condamnations ont été prononcées pour servitude en application de l’article 270.5 du Code pénal, le 8 février 2017. Deux auteurs ont été condamnés, l’un à trois ans de prison, pouvant être libéré sous caution compte tenu qu’il avait passé 548 jours en détention avant jugement, l’autre à deux ans et six mois de prison, pouvant être libéré sous caution compte tenu qu’il avait passé 541 jours en détention avant jugement. De plus, un procès pour travail forcé, visant quatre accusés, est actuellement en cours. La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour garantir que des enquêtes sont menées et des poursuites engagées contre les personnes ayant imposé du travail forcé, y compris les auteurs d’actes de traite et de pratiques analogues à l’esclavage, et le prie de continuer à fournir des informations sur l’application, dans la pratique, des dispositions du Code pénal applicables, en indiquant le nombre de condamnations prononcées et de sanctions spécifiques imposées.
b) Programme d’action et coopération multipartite. La commission note que, d’après le rapport du gouvernement, le Plan d’action national contre la traite des personnes et l’esclavage 2015-2019, qui pose le cadre stratégique de la lutte de l’ensemble de la communauté contre la traite, l’esclavage et les pratiques analogues à l’esclavage, dont le travail forcé, a été lancé en décembre 2014. Le département de l’Attorney général du Commonwealth est chargé de mettre en œuvre ce plan d’action et d’en assurer le suivi, en consultation avec le Comité interministériel sur la traite et l’esclavage. La commission relève également que le gouvernement indique qu’il continue de travailler avec la société civile pour combattre le travail forcé et la traite des personnes. En août 2016, le gouvernement a créé un groupe de travail sur l’exploitation au travail, qui réunit des experts reflétant la diversité des parties concernées et qui est placé sous l’égide de la table ronde nationale sur la traite et l’esclavage. Ce groupe de travail examine actuellement des mesures de lutte contre les formes graves d’exploitation au travail qui relèvent de l’esclavage ou des pratiques analogues. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre du Plan d’action national contre la traite des personnes et l’esclavage 2015-2019, ainsi que sur les résultats des travaux menés par le groupe de travail sur l’exploitation au travail.
c) Protection des victimes. La commission note que le gouvernement indique que toutes les victimes de traite signalées par la police fédérale australienne ont le droit de bénéficier d’un soutien renforcé pendant quarante-cinq jours, dans le cadre du programme d’appui aux victimes de traite, mis en œuvre par le gouvernement australien. Ce soutien prend la forme d’une gestion individuelle des cas, d’un logement sûr, d’une prise en charge médicale et sociale, de conseils, d’une formation au développement des compétences et d’une orientation vers des services de conseils juridiques et migratoires. Un soutien de quarante-cinq jours supplémentaires est fourni aux victimes qui apportent leur aide à l’enquête ou à la procédure judiciaire. Les victimes présumées qui apportent cette aide bénéficient d’un soutien continu jusqu’à ce que l’affaire soit réglée, ce qui leur ouvre droit à des prestations supplémentaires telles que l’accès à un logement de longue durée, à des prestations de sécurité sociale, à des soins médicaux, à des services juridiques, à des cours de langue anglaise et à une aide à l’emploi et à la formation. Les victimes qui participent à une enquête peuvent également avoir le droit d’obtenir un visa permanent leur permettant, à eux et à leurs familles, de rester en Australie. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour veiller à ce que toutes les victimes bénéficient de protection et d’assistance, ainsi que sur le nombre de victimes identifiées ayant bénéficié de services de réadaptation et de réintégration.
2. Vulnérabilité des travailleurs migrants. La commission a précédemment noté que l’ACTU reconnaît que, depuis ses observations précédentes de 2010, un certain nombre de réformes législatives ont été entreprises par le gouvernement dans le but d’améliorer le régime des visas de «sous-classe 457» et de renforcer la protection des travailleurs migrants qualifiés. L’ACTU a cependant observé qu’un certain nombre de violations des droits des travailleurs continuaient d’être signalées, y compris en ce qui concernait des heures de travail excessives, le sous-paiement des salaires, des honoraires de placement trop élevés et des intérêts trop importants pour les prêts aux détenteurs de visas (457), ainsi que des menaces de licenciement au motif de l’appartenance syndicale. En ce qui concerne les mesures d’amélioration de la protection des travailleurs temporaires migrants, le gouvernement a indiqué que, depuis 2011, l’Ombudsman pour un travail équitable a rédigé des fiches d’information dans 27 langues pour sensibiliser les travailleurs. Il a également indiqué que la loi de 1958 sur les migrations avait été modifiée par la loi de 2013 portant amendement de la loi sur les migrations (réforme des sanctions pour les employeurs) dans le but de renforcer les sanctions prévues pour les cas d’emploi de travailleurs en situation irrégulière.
La commission relève d’après les observations de l’ACTU que l’Australie compte actuellement plus de 1,8 million de titulaires de visas temporaires, soit environ 10 pour cent de la population active en Australie. L’ACTU observe que, malgré quelques tentatives visant à améliorer le cadre réglementaire mis en place par le gouvernement, nombre de problèmes précédemment soulevés demeurent. Il indique que l’accès des migrants temporaires à l’information sur leurs droits en matière d’emploi n’est pas garanti et que ceux qui se retournent contre leur employeur sont souvent victimes de discrimination, notamment au motif de leur statut migratoire. L’ACTU exprime également son appui aux récentes modifications législatives, y compris l’introduction de sanctions plus lourdes pour les employeurs qui ne respectent pas les textes applicables.
La commission note que le gouvernement indique qu’il a présenté des mesures de protection des travailleurs vulnérables, en mai 2016. L’équipe spéciale chargée des travailleurs migrants a été créée en octobre 2016 et doit formuler de nouvelles propositions visant à améliorer la législation, le contrôle de l’application de la loi et les enquêtes menées, ou d’autres mesures concrètes permettant de repérer rapidement tout cas d’exploitation de travailleurs migrants et de remédier à cette situation dans les meilleurs délais. La commission relève également que la loi portant modification des dispositions relatives au travail équitable (protection des travailleurs vulnérables) a été adoptée en septembre 2017. Cette loi alourdit les peines prévues en cas de non-respect de la législation relative au lieu de travail, assure la responsabilité des entités franchisées et des entreprises propriétaires en cas de sous-paiement effectué par leurs franchisés ou filiales, sous certaines conditions, interdit expressément aux employeurs d’exiger de leurs employés qu’ils leur versent des paiements sans raison et renforce les pouvoirs de l’Ombudsman pour un travail équitable en matière de collecte de données probantes. De plus, le gouvernement indique qu’une équipe spéciale interinstitutions a été créée en juin 2015 pour améliorer les capacités opérationnelles, ainsi que les capacités en matière de renseignement, en vue d’appuyer les efforts que les autorités déploient pour s’attaquer à la fraude organisée, au travail illégal et à l’exploitation des travailleurs migrants. Cette équipe spéciale réunit des représentants du Département de l’immigration et de la protection des frontières et de la force frontalière australienne, ainsi que l’Ombudsman pour un travail équitable.
Aux niveaux de l’Etat et des territoires, les gouvernements du Victoria et d’Australie-Méridionale élaborent actuellement un régime d’accréditation des agences de recrutement. En Australie-Méridionale, le projet de loi en la matière fait actuellement l’objet de consultations; il interdit aux employeurs qui accueillent les migrants d’utiliser des agences de recrutement non accréditées. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises, tant en droit que dans la pratique, pour protéger les travailleurs migrants contre des pratiques abusives et des conditions de travail relevant du travail forcé. Elle le prie également de fournir des informations sur l’application de la loi de 2017 portant modification de la loi sur le travail équitable (protection des travailleurs vulnérables), dans la pratique, y compris sur les violations constatées et les sanctions imposées en la matière. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé au sujet de la mise en place d’un régime d’accréditation des agences de recrutement au Victoria et en Australie-Méridionale.
Article 2, paragraphe 2 c). Peines de travail d’intérêt général. La commission a précédemment prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises dans l’Etat du Victoria et dans le Territoire de la capitale australienne pour veiller à ce que les auteurs d’infractions n’exercent pas de travail d’intérêt général dans le cadre d’une ordonnance de travail général (CSO) pour des institutions ou organisations privées sans avoir donné formellement leur consentement libre et éclairé.
La commission note que le gouvernement indique que, dans l’Etat du Victoria, le travail d’intérêt général n’est exécuté qu’au sein d’organismes à but non lucratif, dont les institutions locales et étatiques. Le gouvernement indique également que les auteurs d’infractions donnent leur consentement à effectuer un travail d’intérêt général lors de la phase d’évaluation au tribunal et, si l’ordonnance de jugement comporte une sanction alternative, le fait que le condamné accepte cette décision suppose qu’il consent à exécuter le travail d’intérêt général. La commission note également que l’article 37(c) de la loi de Victoria de 1991 sur le prononcé des peines dispose qu’un tribunal peut rendre une ordonnance imposant un travail communautaire si l’auteur de l’infraction y consent.
La commission note que le gouvernement ne fournit aucune information sur le travail d’intérêt général dans le Territoire de la capitale australienne. Cependant, elle note que la possibilité offerte à certains auteurs d’infractions d’accomplir leur peine dans le cadre d’un travail d’intérêt général existe seulement depuis l’adoption du projet de loi de 2015 portant modification de la législation pénale (prononcé des peines et justice réparatrice). L’article 77(1)(c) de la loi pénale (prononcé des peines), tel que modifié, dispose qu’un tribunal ne peut rendre une ordonnance de traitement intensif permettant à l’auteur de l’infraction d’accomplir sa peine sous forme de travail d’intérêt général (dans le cadre d’un service de travaux d’intérêt général ou d’un programme de réadaptation, art. 11(5)) que si l’auteur de l’infraction a consenti, en connaissance de cause, à accomplir sa peine dans un tel cadre. L’article 77(2) dispose que l’auteur d’une infraction est considéré comme ayant donné son consentement éclairé si ce consentement est donné: a) après avoir reçu une explication claire sur l’ordonnance de traitement intensif qui contient suffisamment d’informations lui permettant de prendre une décision objective quant au fait d’accomplir sa peine dans le cadre d’un traitement intensif; et b) après avoir pu poser toutes questions sur l’ordonnance, obtenu une réponse à ces questions, et après que ces réponses semblent avoir été comprises.

Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. Privatisation des prisons et du travail pénitentiaire. Depuis plusieurs années, la commission appelle l’attention du gouvernement sur le fait que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions expressément prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, qui exclut le travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de la convention. Elle a noté que le gouvernement avait réitéré son point de vue selon lequel sa loi et sa pratique sont conformes à la convention, puisque les prisonniers détenus dans des établissements pénitentiaires à gestion privée restent sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques, et que le secteur privé n’a pas le droit de déterminer les conditions de travail des détenus, ces conditions étant fixées par les pouvoirs publics.
1. Travail pénitentiaire dans des prisons gérées par le secteur privé. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté qu’il n’existait pas de prisons gérées par le secteur privé dans les juridictions du Territoire du Nord et du Territoire de la capitale australienne. Elle a également noté que, en Nouvelle-Galles du Sud, l’emploi des condamnés dans les établissements pénitentiaires revêtait un caractère volontaire.
En ce qui concerne le Queensland, la commission a constaté que le travail pénitentiaire est obligatoire en application de l’article 66 de la loi de 2006 sur les services pénitentiaires, qui dispose que le directeur peut, sur ordonnance écrite, transférer un prisonnier d’un établissement pénitentiaire à un camp de travail et que celui-ci doit effectuer le travail d’intérêt général décidé par le directeur.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique qu’au Queensland, en vertu de la loi de 2006 sur les services pénitentiaires, aucune forme de travail forcé ou obligatoire n’est utilisée ni autorisée. Elle note également que le gouvernement réitère que les prisonniers ne sont pas forcés de participer aux programmes de travail agréés. D’après le gouvernement, le programme de travail auquel les prisonniers des établissements pénitentiaires participent fait partie de leur processus de réadaptation et de réintégration; souvent, les prisonniers demandent l’autorisation d’y participer. La commission note également que, d’après le rapport annuel du Département de la justice et de l’Attorney général pour 2016-17, le travail effectué par les prisonniers ne se limite pas aux travaux d’intérêt général exécutés dans le cadre de camps de travail, travaux régis par les articles 66 et 67 de la loi de 2006 sur les services pénitentiaires. Il s’agit également d’emplois dans le secteur du commerce pour un service contre rémunération, et dans le secteur des services, en vue de permettre l’autosuffisance du système pénitentiaire, ainsi que d’autres travaux non rémunérés (pp. 24 et 122). Le rapport de 2018 sur les services publics d’Australie montre que, en 2016-17, au Queensland, 30,5 pour cent des prisonniers remplissant les conditions requises travaillaient dans le secteur du commerce, tandis que 38,3 pour cent d’entre eux travaillaient dans le secteur des services (chap. 8, tableau 8A.11).
En ce qui concerne l’Australie-Méridionale, la commission a noté que, en application de l’article 29(1) de la loi de 1982 sur les services pénitentiaires, le travail pénitentiaire est obligatoire, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des établissements pénitentiaires. Le gouvernement a cependant indiqué que les détenus à la prison de Mt Gambier (unique prison à gestion privée d’Australie-Méridionale) présentent une demande écrite pour participer au programme de travail et que les détenus du centre de prélibération d’Adélaïde présentent librement leur candidature à un emploi extérieur dans des entreprises privées. La commission note que le gouvernement indique qu’aucune modification législative n’a été apportée à cet égard.
En ce qui concerne le Victoria, la commission a relevé que le gouvernement indique que les détenus qui travaillent pour des établissements à gestion publique ou des établissements à gestion privée ont les mêmes droits et prérogatives et que, dans les deux cas, ils ne peuvent travailler contre leur gré. La commission a prié le gouvernement d’indiquer comment leur consentement était obtenu. La commission note que le gouvernement ne fournit aucune information nouvelle sur ce point.
En ce qui concerne l’Australie-Occidentale, la commission a noté que le travail pénitentiaire est obligatoire en vertu de l’article 95(4) de la loi sur les prisons, ce que la Commission des relations du travail d’Australie-Occidentale a confirmé dans l’affaire Ireland c. Commissioner Corrective Services (2009, WAIRC 00123, paragr. 62) et que la Cour d’appel du travail a confirmé dans la même affaire (2009, WASCA 162), en se référant également à la règle 43 du règlement sur les prisons et à l’article 69 de la loi sur les prisons. Le gouvernement a indiqué que cette disposition n’était pas appliquée et que les détenus n’étaient pas contraints de participer à des programmes de travail, même dans les établissements pénitentiaires à gestion privée. Il a également indiqué qu’il existait actuellement six camps de travail dans la région d’Australie-Occidentale, que le placement y était volontaire et qu’il se faisait sur demande écrite de l’intéressé.
La commission note que le gouvernement indique que la législation applicable en matière de réglementation des programmes de travail des prisonniers en Australie-Occidentale n’a pas été modifiée. Cependant, elle note que la procédure no 302 sur les prisons (camps de travail) a été publiée en juin 2017. D’après son article 6.5.3, les détenus peuvent demander un placement en camp de travail, tandis que l’article 7.1 dispose que le superviseur désigné doit veiller à ce que soit dûment examinée la possibilité de placer les prisonniers aptes à un placement en camp de travail, même s’ils n’en ont pas fait la demande.
A cet égard, la commission considère que la convention ne porte pas uniquement sur les situations dans lesquelles les détenus sont «employés» par une entreprise privée ou placés dans une position dans laquelle ils fournissent des services à une entreprise privée, mais également sur les situations dans lesquelles les détenus sont recrutés par des entreprises privées ou mis à leur disposition, tout en restant sous l’autorité et le contrôle de l’administration pénitentiaire. La commission attire de nouveau l’attention du gouvernement sur le fait que le travail pénitentiaire au profit des entreprises privées n’est compatible avec la convention que s’il n’implique aucune coercition, ce qui requiert le consentement formel, libre et éclairé des personnes concernées, ainsi que des garanties et des sauvegardes couvrant les éléments essentiels de la relation de travail, tels que les salaires, la sécurité et la santé au travail, et la sécurité sociale. A la lumière de ce qui précède, la commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises, tant en droit que dans la pratique, au Queensland, en Australie-Méridionale, au Victoria et en Australie-Occidentale, où ce consentement peut ne pas être exigé, afin de garantir que le consentement formel, libre et éclairé des condamnés est exigé pour tout travail accompli dans des prisons à gestion privée, ainsi que pour tout travail de prisonniers pour des entreprises privées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des établissements pénitentiaires. La commission prie également le gouvernement: i) de fournir des informations sur les procédures et conditions de travail applicables aux prisonniers employés dans d’autres industries pénitentiaires au Queensland, y compris le commerce et les services, et de transmettre copie de toute disposition législative en la matière; ii) de modifier l’article 29(1) de la loi de 1982 d’Australie-Méridionale sur les services pénitentiaires en vue de l’aligner sur la pratique indiquée et les prescriptions de la convention; iii) d’indiquer comment le consentement éclairé des prisonniers au travail pour des entreprises privées est obtenu dans la pratique au Victoria et quelles mesures sont prises pour veiller à ce qu’ils y consentent librement et formellement; iv) de préciser comment les prisonniers sont placés en camps de travail quand ils n’en ont pas expressément fait la demande, en Australie-Occidentale.
2. Travail de prisonniers pour des entreprises privées. Tasmanie. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté qu’il n’y avait pas de prisons à gestion privée en Tasmanie. Cependant, elle a relevé que, d’après l’article 33 de la loi de 1997 de Tasmanie sur les établissements pénitentiaires, un prisonnier peut être contraint de travailler à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire où il se trouve. Elle a également noté que, en vertu du tableau 1 (partie 2.26) de cette loi, refuser d’obéir à cet ordre est considéré comme une infraction pénitentiaire. A cet égard, le gouvernement a affirmé que les prisonniers de Tasmanie peuvent travailler pour des entreprises privées si le directeur de l’établissement pénitentiaire le décide, et qu’ils sont consultés sur le type de travail à effectuer et qu’ils doivent librement y consentir.
La commission note que le gouvernement indique que les prisonniers de Tasmanie travaillent de manière volontaire pour des entreprises privées dans le cadre du plan d’aménagement de l’exécution de leur peine qui vise à faciliter leur emploi dès leur libération. Afin de garantir une sauvegarde supplémentaire, le prisonnier doit demander une permission à l’extérieur, en vertu de la loi de 1997 sur les établissements pénitentiaires (art. 41 et 42). Le gouvernement indique que les prisonniers ne sont pas obligés de travailler et qu’aucune sanction ne leur est infligée s’ils décident de ne pas travailler. De plus, tous les prisonniers employés par une entreprise privée sont payés selon le salaire minimum convenu et soumis aux mêmes conditions d’emploi que les autres employés. Tout en prenant bonne note du fait que le gouvernement affirme que les prisonniers ne sont pas contraints de travailler pour des entreprises privées dans la pratique, la commission prie le gouvernement de modifier l’article 33 et le tableau 1 (partie 2.26) de la loi de 1997 sur les établissements pénitentiaires afin de l’aligner sur la pratique indiquée.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

La commission prend note des observations du Conseil australien des syndicats (ACTU) reçus le 1er septembre 2014.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Cadre législatif concernant les pratiques de travail forcé. La commission prend note de l’information fournie par le gouvernement sur l’application dans la pratique des chapitres 270 et 271 du Code pénal relatifs aux «délits d’esclavage», y compris les conditions d’esclavage et les conditions analogues à l’esclavage, la servitude, le mariage forcé, la traite des personnes et la servitude pour dettes. Elle prend note en particulier de l’indication du gouvernement selon laquelle, depuis l’adoption des dispositions susmentionnées en 2005, dix personnes ont été condamnées pour des délits de pratiques analogues à l’esclavage, quatre pour servitude et trois pour traite des personnes. La commission prend note également de l’information sur les décisions des tribunaux et sur les sanctions imposées.
A cet égard, la commission note avec intérêt que le travail forcé constitue désormais un délit incriminé par la loi de février 2013 portant modification de la législation pénale (esclavage, conditions analogues à l’esclavage et traite des personnes). Selon le gouvernement, la modification a été adoptée pour s’assurer qu’il ne soit pas nécessaire qu’il y ait un élément de mouvement pour engager des poursuites en cas de travail forcé, et que l’exploitation au travail soit appréhendée et fasse l’objet de poursuites pénales en fonction du degré de gravité. Prenant dûment note de cette information, la commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour s’assurer que des enquêtes approfondies et des poursuites soient engagées contre les auteurs d’actes de travail forcé, y compris la traite des personnes et les pratiques analogues à l’esclavage, et elle le prie de continuer à fournir des informations sur l’application dans la pratique des dispositions pertinentes du Code pénal, en indiquant le nombre des condamnations et les sanctions spécifiques appliquées. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour protéger les victimes et faciliter leur accès à une assistance immédiate et à des voies de recours.
Situation vulnérable des travailleurs migrants. La commission note que l’ACTU reconnaît que, depuis ses observations précédentes en 2010, un certain nombre de réformes législatives ont été entreprises par le gouvernement dans le but d’améliorer le régime des visas de «sous-classe 457» et de renforcer la protection des travailleurs qualifiés étrangers. L’ACTU observe cependant que, malgré les mesures adoptées par le gouvernement, un certain nombre de violations des droits des travailleurs continuent d’être signalées, y compris en ce qui concerne des heures de travail excessives, le sous-paiement des salaires, des honoraires de placement trop élevés et des intérêts trop importants pour les prêts aux détenteurs de visas «457», ainsi que des menaces de licenciement en raison de l’appartenance syndicale.
En ce qui concerne les mesures d’amélioration de la protection des travailleurs temporaires migrants, la commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, depuis 2011, le Médiateur pour un travail équitable a produit des fiches d’information dans 27 langues pour sensibiliser les travailleurs, y compris les détenteurs d’un visa spécifique, aux droits et conditions d’emploi sur le lieu de travail. Le gouvernement indique aussi que la loi de 1958 sur les migrations a été modifiée par la loi de 2013 portant amendement de la loi sur les migrations (réforme des sanctions pour les employeurs) dans le but de renforcer les sanctions dans les cas d’emploi de travailleurs en situation irrégulière. La commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les mesures prises, tant en droit que dans la pratique, pour protéger les travailleurs migrants contre les pratiques et conditions abusives relevant du travail forcé. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour s’assurer que tous les travailleurs migrants puissent faire valoir leurs droits, y compris en ayant accès aux autorités compétentes.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c). Travail des prisonniers au profit d’entreprises privées. Dans ses précédents commentaires, la commission s’est référée à l’article 33 de la loi de 1997 sur l’exécution des peines (Tasmanie), aux termes de laquelle un prisonnier peut se voir exiger de travailler à l’intérieur ou à l’extérieur des locaux de la prison. Elle a également noté que, en vertu de l’annexe 1 (Partie 2.26) de la loi, tout refus de satisfaire à cette exigence est considéré comme une infraction aux règles pénitentiaires. A cet égard, la commission a noté la déclaration du gouvernement selon laquelle, en Tasmanie, les détenus peuvent travailler pour des entreprises privées à la discrétion du directeur des établissements pénitentiaires, sont consultés en ce qui concerne le type de travail à effectuer et doivent librement consentir à exercer ce travail. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle, au moment de l’établissement du rapport, la réponse du gouvernement de Tasmanie n’était pas disponible, la commission prie une fois de plus le gouvernement d’indiquer comment le consentement formel, libre et éclairé des prisonniers est obtenu dans le cas d’un travail exercé dans des entreprises privées, ce consentement devant être authentifié par des garanties supplémentaires couvrant les éléments essentiels d’une relation de travail libre, tels que des salaires, la sécurité et santé au travail, la sécurité sociale, etc.
Peine de travail d’intérêt général. S’agissant de sa demande précédente concernant les mesures prises à Victoria et dans le Territoire de la capitale australienne pour s’assurer que les personnes condamnées n’exercent pas un travail d’intérêt général dans le cadre d’une ordonnance de travail d’intérêt général (CSO) pour des institutions ou organisations privées sans avoir donné formellement leur consentement libre et éclairé, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, à Victoria, le travail d’intérêt général n’est exercé que dans des institutions à but non lucratif, y compris des institutions gouvernementales locales et de l’Etat. Le gouvernement indique également que le consentement des personnes condamnées à exercer un travail d’intérêt général est requis lors du processus d’évaluation devant le tribunal et que, si la sanction alternative est prévue dans la décision du tribunal, une acceptation de cette décision par l’auteur de l’infraction implique son consentement à exercer un travail d’intérêt général. A cet égard, la commission rappelle que l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention interdit expressément que les condamnés soient concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées, en ce sens que l’exception établie dans cet article en ce qui concerne le travail obligatoire des condamnés ne s’étend pas à leur travail pour des institutions privées, même si celles-ci sont sans but lucratif et même si les intéressés sont sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques. La commission observe également que, pour assurer la conformité avec la convention dans une situation où un travail d’intérêt général peut être exercé pour des institutions privées (par exemple un organisme de bienfaisance), les condamnés doivent donner leur consentement formel à l’exercice de ce travail. La commission prie par conséquent le gouvernement d’indiquer clairement si, à Victoria, un travail d’intérêt général réalisé en application d’une CSO peut être exercé pour une institution privée agissant dans l’intérêt de la collectivité et de produire une liste des associations et institutions agréées, en donnant des exemples de types de travail à exercer en tant que travail d’intérêt général. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle, au moment de l’établissement du rapport, la réponse du Territoire de la capitale australienne n’était pas disponible, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement d’indiquer les mesures prises dans cette juridiction afin de s’assurer que les personnes qui réalisent un travail d’intérêt général en application d’une CSO ne soient ni concédées ni mises à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées (y compris des organismes et institutions à but non lucratif) sans leur libre consentement.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 d). Pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre dans les cas de force majeure. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que l’article 2(1) de la loi de 1938 (Queensland) sur les transports publics, concernant la déclaration de l’état d’urgence (dans le cadre duquel certains pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre sont conférés au gouverneur) est libellé dans des termes assez larges pour autoriser son application dans des circonstances qui ne se limiteraient pas à des situations d’urgence au sens strict, tel que prévu à l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention. La commission a également pris note de la déclaration du gouvernement selon laquelle toute déclaration de l’état d’urgence en application de la loi susmentionnée doit être faite sous la forme d’une réglementation qui fait l’objet du contrôle normal du Parlement, cette déclaration ne pouvant par ailleurs être adoptée que dans des circonstances spécifiques qui reflètent l’ensemble des menaces susceptibles de peser sur la société contemporaine (y compris, par exemple, toutes menaces d’actes terroristes ou d’activités liées au terrorisme). Notant que, dans son dernier rapport, le gouvernement ne fournit pas d’informations à ce sujet, la commission réitère son ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises, dans le cadre de la future révision de la législation, pour limiter le champ d’application de l’article 2(1) de la loi de 1938 sur les transports publics aux situations d’urgence au sens strict du terme, telles que décrites dans la convention (c’est-à-dire guerres, sinistres ou menaces et, en général, toutes circonstances mettant en danger la vie ou les conditions normales d’existence de l’ensemble ou d’une partie de la population), et elle prie le gouvernement de fournir des informations sur tout développement intervenu à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. Privatisation des prisons et travail pénitentiaire. Travail des prisonniers au profit d’entreprises privées. Dans les commentaires qu’elle formule depuis de nombreuses années, la commission a souligné que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions expressément prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention qui exclut le travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de la convention. Elle a rappelé que tout travail ou service exigé d’une personne comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire n’est compatible avec la convention que si deux conditions sont satisfaites, à savoir que ledit travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ladite personne ne soit pas concédée ou mise à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Ces deux conditions s’appliquent de façon cumulative, c’est-à-dire que le fait qu’un détenu reste en permanence sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique ne dispense pas en soi le gouvernement de remplir la deuxième condition, à savoir que ledit détenu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Si l’une des deux conditions n’est pas observée, la situation ne relève pas de l’exception prévue par la convention, et par conséquent le travail exigé des détenus dans ces circonstances est interdit par l’article 1, paragraphe 1, de la convention. Toutefois, la commission a considéré que, lorsque les garanties nécessaires existent pour s’assurer que les détenus concernés acceptent volontairement un travail en donnant formellement leur consentement libre et éclairé et sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, comme l’exige l’article 2, paragraphe 1, de la convention, ce travail ne relèverait pas du champ d’application de cet instrument.
A cet égard, la commission a précédemment noté que des prisons privées existaient à Victoria, en Nouvelle-Galles du Sud, au Queensland, en Australie-Méridionale et en Australie-Occidentale alors qu’il n’en existait pas en Tasmanie, dans le Territoire du Nord et dans le Territoire de la capitale australienne. Elle a également noté que le gouvernement avait réitéré son point de vue selon lequel sa loi et sa pratique sont conformes à la convention, puisque les prisonniers détenus dans des établissements pénitentiaires à gestion privée restent sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques, comme exigé à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, et puisque le secteur privé n’a pas le droit de déterminer lui-même les conditions de travail des détenus, ces conditions étant fixées par les pouvoirs publics. Le gouvernement considérait donc que les prisonniers ne sont pas «concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées», puisque leur «garde légale» demeure confiée aux autorités publiques jusqu’à leur libération. Le gouvernement a également indiqué qu’aucun Etat australien n’envisage actuellement de modifier sa législation et sa pratique.
La commission a cependant noté un certain nombre de tendances positives dans l’application pratique de la législation en vigueur dans certains Etats australiens. Ainsi, en Nouvelle-Galles du Sud, s’agissant du caractère volontaire du travail, l’emploi de prisonniers dans les établissements pénitentiaires revêt un caractère volontaire. Le gouvernement a indiqué que, pour garantir l’obtention du consentement «éclairé» des prisonniers à un travail pour des compagnies privées, les mesures suivantes sont appliquées dans les établissements pénitentiaires gérés par le secteur privé (Junee et Parklea): un détenu souhaitant exercer un travail doit remplir un formulaire, le signer et le soumettre au directeur de l’industrie; s’il estime qu’il a été contraint de travailler, le détenu peut porter la question à l’attention de son superviseur immédiat ou du Comité de valorisation des détenus, ou bien encore présenter une plainte officielle au directeur général de l’établissement pénitentiaire ou au bureau du médiateur. Le gouvernement a également déclaré que les établissements pénitentiaires à gestion privée de Nouvelle-Galles du Sud ont pour obligation de respecter la présente convention.
S’agissant de l’Australie-Méridionale, la commission a noté que, en application de l’article 29(1) de la loi de 1982 sur les services pénitentiaires, le travail pénitentiaire est obligatoire, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire. Elle a pris note également de l’indication du gouvernement selon laquelle les détenus à la prison de Mt Gambier (la seule prison à gestion privée de l’Australie-Méridionale) présentent une demande écrite pour participer aux programmes de travail. Le gouvernement a aussi indiqué que les détenus du Centre de prélibération d’Adélaïde sont autorisés à présenter leur candidature à un emploi extérieur dans des entreprises privées, et que tout travail exécuté à l’extérieur par des détenus est volontaire.
S’agissant du Queensland, la commission a noté que le travail pénitentiaire est obligatoire en application de l’article 66 de la loi de 2006 sur les services pénitentiaires. Elle a pris note également du fait que le gouvernement a réitéré que les détenus ne sont pas obligés de participer à un programme de travail agréé. Selon le gouvernement, bien qu’aucun consentement formel des détenus ne soit requis, le programme de travail est une initiative volontaire qui permet aux détenus d’exécuter des projets de travail utiles grâce auxquels ils développent leurs compétences pratiques, ce qui facilite ensuite leur réinsertion sociale. Le gouvernement a aussi indiqué que le refus d’un détenu de participer à un programme de travail n’entraîne aucune conséquence.
En ce qui concerne l’Australie-Occidentale, la commission a noté que le travail pénitentiaire est obligatoire en vertu de l’article 95(4) de la loi sur les prisons. Elle a également pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle cette disposition n’était pas appliquée, les détenus n’étant pas contraints de participer à des programmes de travail, même dans les établissements pénitentiaires à gestion privée. Dans son rapport de 2011, le gouvernement a indiqué qu’il existe actuellement six camps de travail pour les détenus dans la région de l’Australie-Occidentale, dont le but est la réinsertion des détenus. Selon le gouvernement, ce placement en camp de travail est volontaire et a lieu après soumission d’une demande écrite par l’intéressé.
Dans son dernier rapport, le gouvernement déclare qu’en Australie-Occidentale les détenus ne sont pas engagés dans une relation d’emploi avec les prisons ou le Département des services pénitentiaires. Cela a été confirmé par la Commission des relations du travail de l’Australie-Occidentale, dans l’affaire Ireland contre Commissaire des services pénitentiaires (2009, WAIRC 00123), dans laquelle la commission a considéré que la relation entre un prisonnier et l’Etat, dans le cadre de la loi sur les prisons et ses textes d’application, n’a pas le caractère d’une relation entre employé et employeur.
La commission note cependant que, dans la même décision, la Commission des relations du travail déclare que «la possibilité de choisir [d’exercer un travail pénitentiaire] est supprimée lorsque le requérant devient un condamné. Il pourrait alors être contraint de travailler. (…) L’utilisation du terme “pourrait” [dans la règle 43(1) du règlement sur les prisons] donne à un directeur le pouvoir discrétionnaire de contraindre un condamné à travailler. Lorsqu’une telle instruction est donnée à l’intéressé, ce dernier ne peut la refuser. Cela est confirmé à l’article 69 de la loi sur les prisons, qui définit comme infraction pénitentiaire le fait de ne pas dûment exercer le travail qui a été assigné.» (2009, WAIRC 00123, paragr. 62). De même, dans sa décision sur la même affaire, la cour d’appel des relations du travail a souligné: «en tant que condamné (…), le requérant n’a pas exercé volontairement le travail pénitentiaire. L’article 95 de la loi sur les prisons et la règle 43 du règlement sur les prisons ont pour effet que le requérant était contraint de travailler. En étant affecté à un travail pénitentiaire, le requérant était tenu de travailler, et ce de la façon dont un gardien de prison lui ordonnait de le faire.» (2009, WASCA 162).
Dans ce contexte, la commission considère que l’absence de relation formelle d’emploi n’exclut pas la nécessité de s’assurer que le consentement des détenus est formellement exigé. A cet égard, la commission souligne une fois de plus que le travail de détenus pour des entreprises privées ne peut être considéré comme compatible avec l’interdiction explicite prévue par la convention que lorsque les garanties nécessaires existent pour s’assurer que le prisonnier concerné accepte volontairement un travail sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, comme l’exige l’article 2, paragraphe 1, de la convention. La commission a estimé que, dans ce contexte de captivité, il est nécessaire d’obtenir des prisonniers un consentement formel au travail pour des entreprises privées dans les prisons gérées par l’Etat ou dans des prisons à gestion privée, et que ce consentement doit être donné par écrit. De plus, dans la mesure où ce consentement formel est obtenu dans un contexte de privation de liberté et sans véritable alternative, certains facteurs sont nécessaires pour authentifier et confirmer l’expression d’un consentement libre et éclairé. La commission rappelle que l’indicateur le plus fiable du consentement au travail réside dans le fait que ce travail soit exécuté dans des conditions se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, ce qui comprend l’octroi d’une rémunération (avec retenues et cessions éventuelles), la sécurité sociale et la sécurité et santé au travail.
Compte tenu des considérations qui précèdent, la commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises, tant en droit que dans la pratique, en Australie-Occidentale et dans les autres juridictions où ce consentement pourrait ne pas être exigé, pour s’assurer qu’un consentement formel, libre et éclairé est exigé des prisonniers pour tout travail dans des établissements pénitentiaires à gestion privée, ainsi que pour tout travail des prisonniers au profit de compagnies privées, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des locaux de la prison, de manière à ce que ce consentement soit exempt de toute menace d’une peine quelconque au sens de l’article 2, paragraphe 1, de la convention, telle que la perte de privilèges ou une évaluation défavorable du comportement prise en compte en vue de la réduction de la peine. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les détenus qui, à Victoria, travaillent pour des établissements à gestion publique et des établissements à gestion privée ont les mêmes droits et prérogatives, et que dans les deux cas leur consentement doit être obtenu pour l’exercice d’un travail. La commission prie le gouvernement d’indiquer comment le consentement éclairé des détenus pour travailler pour des entreprises privées est obtenu dans la pratique, quelles mesures sont prises pour s’assurer que ce consentement est donné librement et formellement et à quels moyens de recours le détenu peut avoir accès s’il est allégué que son consentement n’a pas été librement donné.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. Travail des prisonniers au profit d’entreprises privées. La commission a précédemment noté que, aux termes de l’article 33 de la loi de 1997 sur l’exécution des peines (Tasmanie), un prisonnier peut se voir exiger de travailler à l’intérieur ou à l’extérieur des locaux de la prison, tout refus étant considéré comme une infraction aux règles pénitentiaires en vertu de l’annexe 1 de la loi en question. La commission a prié le gouvernement d’indiquer s’il pouvait être exigé des prisonniers de travailler à l’extérieur de la prison au profit d’entreprises privées. Le gouvernement déclare dans son rapport qu’en Tasmanie les prisonniers ont la possibilité de travailler pour des entreprises privées, qu’ils sont consultés en ce qui concerne le type de travail à exécuter et qu’ils doivent librement consentir à effectuer ce travail. Se référant à son observation au titre de la présente convention, la commission prie le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, comment il est assuré que les prisonniers donnent formellement leur consentement libre et éclairé au travail au profit d’entreprises privées en Tasmanie, et de préciser quelles autres garanties et sauvegardes couvrent les éléments constitutifs essentiels d’une relation de travail libre, telles que les salaires, la sécurité sociale, etc.
Peine de travail d’intérêt général. Dans ses commentaires précédents, la commission a prié le gouvernement d’indiquer si des mesures avaient été prises pour veiller à ce que des personnes accomplissant des travaux d’intérêt général aux termes d’une ordonnance de travail d’intérêt général (CSO) ne soient pas concédées ou mises à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées (y compris des organisations et institutions sans but lucratif) sans leur consentement.
La commission note que, selon le rapport du gouvernement, dans la majorité des Etats australiens, le consentement des personnes pour réaliser un travail d’intérêt général en application d’une CSO est soit exigé par la législation, soit demandé dans la pratique. Ainsi le gouvernement indique que, en Nouvelle-Galles du Sud, la personne condamnée signe un accord pour effectuer un travail non rémunéré dans le cadre d’une CSO, ainsi qu’un accord pour commencer à travailler sur un lieu de travail désigné. Au Queensland, conformément à la loi de 1992 sur les peines et sanctions, le tribunal ne rend une CSO qu’avec l’accord de la personne condamnée; le placement sur un site de travail d’intérêt général exige en outre l’accord du participant avant le début du travail. En Australie-Occidentale, aux termes de la loi de 2003 sur l’administration des peines, la personne condamnée doit signer un contrat de travail d’intérêt général avant de commencer à exécuter ce type de travail. Le gouvernement réitère également que, en Australie-Méridionale, une entrevue préliminaire est accordée à chaque personne condamnée exécutant un travail d’intérêt général, ce qui contribue à s’assurer du consentement volontaire des personnes concernées à travailler pour l’entité privée bénéficiaire des travaux d’intérêt général. S’agissant de la Tasmanie, le gouvernement déclare que, dans la pratique, les personnes condamnées sont tenues de signer un formulaire indiquant qu’elles acceptent de se conformer aux conditions imposées par la CSO; il leur est également directement demandé si elles sont prêtes à exécuter un travail dans le cadre de la CSO. La commission prend également note de l’indication du gouvernement selon laquelle, dans le Territoire du Nord, le consentement donné par la personne condamnée fait partie du processus d’évaluation, dans le cadre duquel celle-ci doit accepter l’exécution du projet de la CSO et y consentir.
La commission observe cependant qu’aucun consentement formel à l’exécution d’un travail CSO pour des institutions privées ne semble être exigé des personnes condamnées dans la région de Victoria et dans le Territoire de la capitale australienne. La commission, se référant également aux explications figurant aux paragraphes 123 à 128 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, exprime l’espoir que le gouvernement fournira dans son prochain rapport des informations sur les mesures prises ou envisagées dans ces Etats pour assurer que les personnes condamnées n’exercent pas un travail d’intérêt général dans le cadre d’une CSO pour des institutions ou organisations privées sans avoir donné formellement leur consentement libre et éclairé.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 d). Pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre dans les cas de force majeure. La commission a précédemment noté que l’article 2(1) de la loi de 1938 (Tasmanie) sur les transports publics, concernant la déclaration de l’état d’urgence (dans le cadre duquel certains pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre sont conférés au gouverneur), est libellé dans des termes assez larges pour autoriser son application dans des circonstances qui ne se limiteraient pas à des situations d’urgence au sens strict, telles que prévues à l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention. Elle a également noté que la Cour suprême du Queensland, dans son arrêt Dean c. Attorney General of Queensland ([1971] Qd.R391), a interprété cette disposition en considérant que sa portée ne se limitait pas à la catégorie des «catastrophes et calamités naturelles» et a étendu le champ des situations qui pouvaient donner lieu à une déclaration de l’état d’urgence.
La commission prend bonne note de l’opinion exprimée par le gouvernement dans son rapport, selon laquelle la déclaration d’un état d’urgence doit être adoptée dans des circonstances appropriées qui reflètent l’ensemble des menaces susceptibles de peser sur la société contemporaine (y compris, par exemple, toutes menaces d’actes terroristes ou d’activités liées au terrorisme). Le gouvernement confirme également que toute déclaration de ce type en vertu de la loi susmentionnée doit être faite sous la forme d’une réglementation qui fait l’objet du contrôle normal du Parlement.
Tout en prenant bonne note de ces déclarations, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement adoptera les mesures nécessaires, à l’occasion d’une future révision de la législation, pour limiter la disposition susmentionnée aux cas d’urgence au sens strict du terme, tel que prescrit à l’article 2, paragraphe 2 d) (c’est-à-dire guerres, sinistres ou menaces et, en général, toutes circonstances mettant en danger la vie ou les conditions normales d’existence de l’ensemble ou d’une partie de la population) et que, dans l’attente de l’adoption de ces mesures, le gouvernement continuera de fournir des informations sur l’application, dans la pratique, de l’article 2(1) de la loi de 1938 sur les transports publics.

Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Situation vulnérable des travailleurs migrants temporaires et mesures prises pour les protéger contre toute exploitation. La commission a précédemment noté les commentaires sur l’application de la convention soumis par le Conseil australien des syndicats (ACTU) dans une communication datée du 1er septembre 2008, dans lesquels l’ACTU a exprimé sa préoccupation au sujet de la situation vulnérable des travailleurs qualifiés étrangers bénéficiant de titres de séjour temporaires qui ne sont pas protégés de manière adéquate contre l’exploitation et qui sont parfois soumis au travail forcé. Selon l’ACTU, plusieurs cas ont été signalés dans lesquels des travailleurs bénéficiant de visas temporaires (en vertu du «régime des visas 457») ont été privés de salaire ou ont vu leurs salaires illégalement réduits pour régler les frais des agents de recrutement et les billets d’avion, ont été forcés de travailler de longues heures sans prendre de repas adéquats ou de pauses de repos, ont été contraints de travailler sur des lieux de travail insalubres ou ont été menacés d’expulsion s’ils cherchaient à faire valoir leurs droits. La commission a également pris note des deux communications supplémentaires de l’ACTU sur ce sujet en date, respectivement, des 31 août et 25 octobre 2010, ainsi que de la réponse du gouvernement reçue le 30 septembre 2010.
La commission note que, d’après la réponse du gouvernement datée du 1er avril 2009, celui-ci a annoncé une série de mesures visant à améliorer l’intégrité, la transparence et la souplesse du programme d’activités temporaires («sous-classe 457»). Le gouvernement indique que les principales mesures du marché du travail répondant aux préoccupations exprimées par l’ACTU comprennent, entre autres, l’élaboration d’un cadre du marché des salaires qui permettra d’assurer que les travailleurs employés au titre de la «sous-classe 457» ne sont pas exploités et que les salaires et conditions de travail locaux ne sont pas remis en cause. Ce cadre est compatible avec la législation et la pratique australiennes relatives aux lieux de travail, qui exigent que tous les travailleurs parrainés au titre de la «sous-classe 457» et autres détenteurs de visas temporaires ayant le droit de travailler soient recrutés conformément aux normes australiennes (y compris en ce qui concerne les rémunérations, les conventions collectives, l’indemnisation en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, la santé et la sécurité au travail) et bénéficient du même niveau de protection (en termes de traitement des plaintes pour sous-paiement ou exploitation) que les travailleurs australiens. Le gouvernement indique aussi que, outre la loi amendant la législation sur les migrations (protection des travailleurs) de 2008, qui prescrit un accroissement des échanges d’informations et de la coopération entre les administrations compétentes en ce qui concerne les détenteurs parrainés d’un visa temporaire, le ministre de l’Immigration et de la Citoyenneté a annoncé la nomination d’un expert juridique indépendant chargé de trouver des solutions pour renforcer la législation relative aux sanctions imposées aux employeurs. Le gouvernement indique enfin que, outre les enquêtes sur les plaintes liées à des travailleurs employés dans le cadre de la «sous-classe 457» et des autres travailleurs détenteurs d’un visa temporaire, les administrations et organismes gouvernementaux (et notamment le médiateur pour l’équité au travail) ont publié des fiches d’information pour sensibiliser davantage les détenteurs de visas à leurs droits.
Dans sa communication datée du 31 août 2010 et à laquelle il est fait référence ci-dessus, l’ACTU a noté que, depuis sa première communication en 2008, le «régime des visas 457» a fait l’objet d’un réaménagement complet, ayant pour but d’empêcher que les travailleurs détenteurs de visas temporaires ne soient davantage exploités ainsi que de renforcer les pouvoirs des autorités compétentes en matière de surveillance, d’ouverture d’enquêtes et d’imposition de sanctions aux employeurs qui ne respectent pas les prescriptions du «régime des visas 457». En outre, l’ancien système inéquitable de taux de salaire minimum applicable à ces travailleurs a été supprimé. L’ACTU a également noté que le gouvernement fédéral a consulté les partenaires sociaux et l’ensemble de la communauté sur le processus de réforme du «régime des visas 457». Tout en se félicitant de ce processus de réforme, l’ACTU a estimé qu’il est important de continuer de surveiller le fonctionnement des nouvelles lois et réglementations dans la pratique afin d’assurer qu’elles protègent suffisamment les droits des travailleurs migrants temporaires en Australie.
La commission prend note de ces informations et exprime l’espoir que le gouvernement continuera de décrire, dans ses prochains rapports, les mesures prises, aussi bien dans la législation que dans la pratique, pour améliorer la protection des travailleurs migrants temporaires. Elle le prie en particulier de fournir des informations sur les résultats obtenus suite aux mesures prises pour renforcer la législation relative aux sanctions imposées aux employeurs, auxquelles le gouvernement s’est référé dans son rapport.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c). Privatisation des prisons et travail pénitentiaire. Travail des prisonniers au profit d’entreprises privées. Dans les commentaires qu’elle formule depuis de nombreuses années, la commission a souligné que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions expressément prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention qui exclut le travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de la convention. La commission a rappelé que tout travail ou service exigé d’une personne comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire n’est compatible avec la convention que si deux conditions sont satisfaites, à savoir que ledit travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ladite personne ne soit pas concédée ou mise à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Ces deux conditions sont aussi importantes l’une que l’autre et elles s’appliquent de façon cumulative, c’est-à-dire que le fait qu’un détenu reste en permanence sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique ne dispense pas en soi l’autorité publique de remplir la deuxième condition, à savoir que ledit détenu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Si l’une des deux conditions n’est pas observée, la situation n’est pas exclue du champ d’application de la convention, et le travail exigé des détenus dans ces circonstances est interdit par l’article 1, paragraphe 1, de la convention. La commission a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention, par exemple en prescrivant que tout détenu travaillant pour des entreprises privées doit le faire à titre volontaire sans être soumis à des pressions ni faire l’objet de menaces d’une peine quelconque et, compte tenu du caractère captif de la main-d’œuvre pénitentiaire, en bénéficiant des garanties appropriées quant aux salaires et autres conditions d’emploi qui doivent être proches d’une relation de travail libre. En pareille situation, le travail des prisonniers pour des entreprises privées ne relève pas du champ d’application de la convention, puisqu’il ne revêt pas de caractère obligatoire.
La commission a précédemment noté que des prisons privées existaient à Victoria, en Nouvelle-Galles du Sud, au Queensland, en Australie-Méridionale et en Australie-Occidentale, alors qu’il n’en existait pas en Tasmanie, dans le Territoire du Nord et dans le Territoire de la Capitale australienne. D’après le rapport du gouvernement, il semble qu’il n’y ait eu que peu de changements dans la législation et la pratique nationales en ce qui concerne le travail des prisonniers détenus dans des établissements à gestion privée au cours de la période sur laquelle porte le rapport. Le gouvernement réitère son point de vue selon lequel sa loi et sa pratique sont conformes à la convention, puisque les prisonniers détenus dans des établissements pénitentiaires à gestion privée restent sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques, comme exigé par l’exception prévue à l’article 2, paragraphe 2 c), et puisque le secteur privé n’a pas le droit de déterminer lui-même les conditions de travail des détenus, ces conditions étant fixées par les pouvoirs publics. Le gouvernement considère donc que les prisonniers ne sont pas «concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées», puisque leur «garde légale» n’a pas été transférée à un fournisseur privé de services pénitentiaires et puisque les prisonniers ayant fait l’objet d’une condamnation demeurent sous la garde légale du secrétaire du ministère de la Justice (Victoria) ou du chef du Département des services pénitentiaires (Australie-Méridionale) jusqu’à leur libération.
La commission attire à nouveau l’attention du gouvernement sur les explications données au sujet de la portée des expressions «concédé ou mis à la disposition de» figurant aux paragraphes 56-58 et 109-111 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, et elle souligne que ces termes ne couvrent pas seulement les situations dans lesquelles les prisonniers sont «employés» par une compagnie privée ou se trouvent en état de servitude à l’égard de la compagnie privée, mais aussi des situations dans lesquelles la compagnie privée n’a pas un choix absolument discrétionnaire sur le type de travail qu’elle peut exiger du prisonnier parce qu’elle est limitée par les règles fixées par l’autorité publique. La commission rappelle, en se référant également au paragraphe 106 de l’étude d’ensemble susmentionnée, que l’interdiction de concéder des prisonniers ou de les mettre à disposition de compagnies privées est absolue, c’est-à-dire qu’elle ne se limite pas au travail effectué en dehors des établissements pénitentiaires, mais s’applique également au travail dans des ateliers que des entreprises privées font fonctionner à l’intérieur des prisons; elle s’applique par conséquent à tout travail organisé par des prisons à gestion privée.
Comme la commission l’a souligné à plusieurs reprises, le travail des prisonniers pour des entreprises privées ne peut être considéré comme compatible avec l’interdiction explicite prévue par la convention que lorsque les garanties nécessaires existent pour s’assurer que les prisonniers acceptent volontairement un travail sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, comme l’exige l’article 2, paragraphe 1, de la convention. La commission a estimé que, dans ce contexte de captivité, il est nécessaire d’obtenir des prisonniers un consentement formel au travail lorsque ce dernier est exécuté pour le compte d’entreprises privées dans les prisons gérées par l’Etat ou pour des prisons à gestion privée, et que ce consentement devait être donné par écrit. En outre, dans la mesure où ce consentement formel est obtenu dans un contexte de privation de liberté et sans véritable alternative, certains facteurs sont nécessaires pour authentifier et confirmer l’expression d’un consentement libre et éclairé. La commission rappelle que l’indicateur le plus fiable du consentement au travail est que ce travail soit exécuté dans des conditions se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, ce qui comprend le niveau des rémunérations (avec retenues et cessions éventuelles), la sécurité sociale et la sécurité et santé au travail (voir les explications figurant aux paragraphes 59-60 et 114-120 de l’étude d’ensemble de 2007 à laquelle il est fait référence ci-dessus).
La commission note que, d’après le rapport du gouvernement, aucun Etat australien n’envisage actuellement de modifier sa législation et sa pratique. Elle a toutefois précédemment noté un certain nombre de tendances positives dans l’application pratique de la législation en vigueur dans certains des Etats australiens susmentionnés. Ainsi, s’agissant du caractère volontaire du travail, elle a noté que, en Nouvelle-Galles du Sud, l’emploi de prisonniers dans les établissements pénitentiaires revêt un caractère volontaire et qu’aucun cas de travail forcé n’a été enregistré. Le gouvernement indique dans son dernier rapport que, pour garantir l’obtention du consentement «éclairé» des prisonniers à un travail pour des compagnies privées, les mesures ci-après sont appliquées dans les établissements pénitentiaires gérés par le secteur privé (Junee et Parklea): un détenu souhaitant exercer un travail doit remplir un formulaire, le signer et le soumettre au directeur de l’industrie; s’il estime qu’il a été contraint de travailler, le détenu peut porter la question à l’attention de son superviseur immédiat ou du Comité de valorisation des détenus, ou bien encore présenter une plainte officielle au directeur général de l’établissement pénitentiaire ou au bureau du médiateur. Le gouvernement indique également que les établissements pénitentiaires à gestion privée de Nouvelle-Galles du Sud ont pour obligation de respecter la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. La commission a précédemment noté que, en Australie-Méridionale, où le travail pénitentiaire est obligatoire, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire (art. 29(1) de la loi de 1982 sur les services pénitentiaires), les détenus à la prison de Mt Gambier (la seule prison à gestion privée de l’Australie-Méridionale) présentent une demande écrite pour participer aux programmes de travail. Le gouvernement indique, dans son dernier rapport, que les détenus du centre de prélibération d’Adélaïde sont autorisés à présenter leur candidature à un emploi extérieur dans des entreprises privées, et que tout travail exécuté à l’extérieur par des détenus est volontaire. Au Queensland, où le travail pénitentiaire est obligatoire en application de l’article 66 de la loi de 2006 sur les services pénitentiaires, les détenus ne sont pas obligés de participer à un programme de travail agréé: le gouvernement indique que, bien qu’aucun consentement formel des détenus ne soit requis, le programme de travail est une initiative volontaire qui permet aux détenus d’exécuter des projets de travail utiles grâce auxquels ils développent leurs compétences pratiques, ce qui facilite ensuite leur réinsertion sociale; le refus d’un détenu de participer à un programme de travail n’a pas de conséquence pour lui. S’agissant de l’Australie-Occidentale, où le travail pénitentiaire est obligatoire en vertu de l’article 95(4) de la loi sur les prisons, la commission a précédemment pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle cette disposition n’avait pas été appliquée, les détenus n’étant pas contraints de participer à des programmes de travail, même dans les établissements pénitentiaires à gestion privée. Le gouvernement indique dans son dernier rapport qu’il existe actuellement six camps de travail pour les détenus dans la région de l’Australie-Occidentale, dont le but est la réinsertion des détenus. Ce placement en camp de travail est volontaire et a lieu après soumission d’une demande écrite par l’intéressé.
Tout en notant avec intérêt ces éléments de la tendance positive de l’application pratique de la législation en vigueur dans les Etats australiens susmentionnés, la commission exprime le ferme espoir que les mesures nécessaires seront prises, tant en droit que dans la pratique, pour garantir qu’un consentement libre et éclairé soit exigé formellement des prisonniers pour tout travail dans des établissements pénitentiaires à gestion privée, ainsi que pour tout travail des prisonniers au profit de compagnies privées, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des locaux de la prison, et qu’un tel consentement est exempt de la menace d’une peine quelconque au sens large de l’article 2, paragraphe 1, de la convention, telle que la perte de privilèges ou une évaluation défavorable du comportement prise en compte en vue de la réduction de la peine. Par ailleurs, dans un contexte de privation de liberté, sans autres possibilités d’accès au marché libre du travail, un tel consentement «libre» et «éclairé» a besoin d’être authentifié par des conditions de travail se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, telles que des niveaux de rémunération (avec retenues et cessions éventuelles), la sécurité sociale et la sécurité et santé au travail. La commission veut croire que les mesures nécessaires seront prises dans tous les Etats australiens, aussi bien dans la législation que dans la pratique, pour accorder aux prisonniers travaillant dans des installations à gestion privée et aux autres prisonniers travaillant au profit d’entreprises privées un statut légal avec des droits et des conditions d’emploi qui soient compatibles avec cet instrument fondamental des droits de l’homme, et que le gouvernement sera bientôt en mesure de communiquer des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
La commission exprime également l’espoir que le gouvernement ne manquera pas de fournir des informations sur l’impact pratique de la recommandation du Recueil de directives pratiques de l’Association australasienne des secteurs qui emploient des prisonniers, à laquelle il s’est référé dans son précédent rapport, visant à créer un organisme consultatif indépendant comprenant des représentants des secteurs concernés, des syndicats et de la collectivité, et qu’il fournira également des informations sur toute mesure prise ou envisagée pour assurer le respect de la convention.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. 1. Travail des prisonniers au profit d’entreprises privées. La commission avait précédemment noté, d’après le rapport antérieur du gouvernement, qu’aux termes de l’article 33 de la loi de 1997 sur l’exécution des peines (Tasmanie) il peut être exigé d’un prisonnier de travailler à l’intérieur ou à l’extérieur des locaux de la prison, tout refus étant considéré comme une infraction aux règles pénitentiaires en vertu de l’annexe 1 de la loi en question. La commission avait demandé au gouvernement d’indiquer s’il peut être exigé des prisonniers de travailler à l’extérieur de la prison au profit d’entreprises privées. Compte tenu du fait que le rapport du gouvernement ne comporte aucune information sur cette question, la commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, s’il peut être exigé des prisonniers en Tasmanie de travailler en dehors de la prison au profit d’entreprises privées et, le cas échéant, si leur libre consentement d’effectuer un travail au profit de sociétés privées est exigé, de même que d’autres garanties et sauvegardes couvrant les éléments essentiels d’une relation de travail libre, tels que les salaires et la sécurité sociale, etc. La commission se réfère à ce propos à son observation adressée au gouvernement au titre de la convention.

2. Peine de travail d’intérêt général. La commission avait précédemment noté, d’après le rapport du gouvernement, qu’aux termes de la loi de 1997 sur l’exécution des peines (Tasmanie) un tribunal peut rendre une ordonnance de travail d’intérêt général (CSO), aux termes de laquelle un délinquant doit accomplir un travail ou une autre activité au sein de la communauté, dans le cadre d’un programme de travail d’intérêt général, sous la direction d’un fonctionnaire d’application des peines ou d’un surveillant. Les programmes de travail d’intérêt général peuvent comprendre, notamment, un travail au profit d’une organisation à but non lucratif. Le non-respect des dispositions d’une CSO peut entraîner la modification ou la suppression de celle-ci par le tribunal ou l’imposition d’une nouvelle peine pour l’acte délictueux pour lequel une CSO avait été rendue. La commission avait également noté que l’article 39 de la loi de 1995 sur l’exécution des peines (Australie-Occidentale) comporte des dispositions similaires. La commission avait demandé au gouvernement d’indiquer si des mesures avaient été prises pour veiller à ce que les personnes accomplissant des travaux d’intérêt général aux termes d’une CSO ne soient pas concédées ou mises à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées sans leur consentement.

La commission note, d’après l’indication du gouvernement dans son rapport, que, dans le Queensland et conformément à la loi de 1992 relative à la justice pour enfants, tous les programmes administrés par le département des communautés qui comportent un travail, y compris les programmes de travaux d’intérêt général, exigent l’accord du participant. Le gouvernement indique aussi qu’en Australie-Méridionale une entrevue préliminaire est accordée à chaque délinquant exécutant un travail d’intérêt général, ce qui contribue à s’assurer du consentement volontaire des personnes concernées à travailler au profit d’un utilisateur privé des travaux d’intérêt général. La commission prend note par ailleurs des indications du gouvernement concernant l’exécution des travaux d’intérêt général conformément à une CSO dans le Territoire du Nord. Compte tenu du fait que le rapport du gouvernement ne comporte aucune information sur cette question au sujet de la Tasmanie et de l’Australie-Occidentale, la commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer si des mesures ont été prises ou sont envisagées dans ces Etats, ainsi que dans les autres Etats australiens, pour veiller à ce que les personnes accomplissant des travaux d’intérêt général ordonnés par une CSO ne soient pas concédées ou mises à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées sans leur consentement et, le cas échéant, comment le consentement volontaire des personnes concernées à travailler au profit d’un utilisateur privé des travaux d’intérêt général est garanti. Prière de transmettre également des informations sur les dispositions régissant la peine de travail d’intérêt général et sur leur application dans la pratique.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 d). Pouvoir de réquisition de la main-d’œuvre en cas de force majeure. La commission avait précédemment noté, d’après le rapport du gouvernement, que l’article 2(1) de la loi de 1938 sur les transports publics concernant la déclaration de l’état d’urgence (qui accorde au gouverneur le pouvoir de réquisitionner la main-d’œuvre) est libellé dans des termes suffisamment larges pour permettre son application dans des circonstances qui ne se limitent pas aux cas de force majeure au sens strict de l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention. Elle avait également noté que la Cour suprême du Queensland dans l’affaire Dean v. Attorney-General of Queensland ([1971] Qd.R.391), dans son interprétation de cette disposition, estime qu’elle ne se limite pas à la catégorie des «catastrophes et sinistres naturels» et donne une portée plus large aux situations dans lesquelles l’état d’urgence peut être déclaré.

Le gouvernement indique qu’aucun changement significatif n’a été apporté à la loi de 1938 sur les transports publics depuis le dernier rapport. Il précise que cette disposition n’a été utilisée qu’une seule fois au Queensland depuis 1971, et que l’ordonnance relative à ce sujet ne comporte aucune exigence de travail forcé. Le gouvernement indique aussi qu’une déclaration à ce propos aux termes de la loi susmentionnée doit se faire par voie de règlement, ce qui suppose la surveillance normale du parlement.

Tout en prenant note de ces indications, la commission réitère l’espoir que le gouvernement adoptera les mesures nécessaires, à l’occasion d’une prochaine révision de la législation, en vue de limiter la disposition susmentionnée aux cas de force majeure au sens strict du terme, comme décrits à l’article 2, paragraphe 2 d) (c’est-à-dire dans les cas de guerre, de sinistres ou menaces de sinistres), et qu’en attendant l’adoption de telles mesures le gouvernement continuera à transmettre des informations sur l’application en pratique de l’article 2(1) de la loi de 1938 sur les transports publics.

Article 25. Sanctions pénales. Suite à ses commentaires antérieurs, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement au sujet, d’une part, des poursuites engagées au cours de la période du 1er juillet 2006 au 30 juin 2008 conformément aux articles 270 et 271 du Code pénal du Commonwealth de 1995 (qui traitent de l’esclavage et de la servitude sexuelle), dans sa teneur modifiée par la loi de modification du Code pénal (crimes de traite des personnes), 2005, et, d’autre part, des peines infligées aux auteurs. La commission note également, d’après l’indication du gouvernement dans son rapport, qu’aucune poursuite n’a été engagée au cours de la période soumise au rapport dans les régions suivantes: Nouvelle-Galles du Sud, Victoria, Australie-Occidentale, Australie-Méridionale, Tasmanie, Territoire du Nord et Territoire de la Capitale australienne, sur la base des dispositions qui criminalisent la servitude sexuelle. La commission saurait gré au gouvernement de continuer à fournir des informations, dans ses prochains rapports, sur toutes procédures judiciaires ayant été engagées sur la base de ces dispositions et sur toutes peines infligées.

Observation (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle note également les commentaires sur l’application de la convention soumis par le Conseil australien des syndicats (ACTU) dans une communication datée du 1er septembre 2008, dans laquelle celui-ci exprime sa préoccupation au sujet de la situation vulnérable des travailleurs qualifiés étrangers bénéficiant de titres de séjour temporaires, qui ne sont pas protégés de manière adéquate de l’exploitation et qui sont parfois soumis au travail forcé. Selon l’ACTU, les syndicats australiens et les médias ont signalé de nombreux cas dans lesquels les travailleurs au bénéfice de visas temporaires (en vertu du régime des visas 457) ont été privés de salaires ou ont vu leurs salaires illégalement réduits pour régler les frais des agents de recrutement ou de migration et les billets d’avion; ont été forcés de travailler de longues heures sans prendre de repas adéquats ou de pauses de repos; ont été forcés de travailler sur des lieux de travail insalubres; et ont été menacés d’expulsion s’ils cherchaient à faire valoir leurs droits. La commission note que cette communication a été transmise au gouvernement, le 18 septembre 2008, pour tout commentaire qu’il désirerait formuler au sujet des questions qui y sont soulevées. La commission espère que le gouvernement communiquera ses commentaires avec son prochain rapport.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. Privatisation des prisons et travail pénitentiaire. Travail de prisonniers au profit d’entreprises privées. Dans des commentaires qu’elle formule depuis de nombreuses années au sujet de la privatisation des prisons et du travail pénitentiaire en Australie, la commission a souligné que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions expressément prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention qui exclut le travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de la convention. La commission a rappelé que tout travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire n’est compatible avec la convention que si deux conditions sont satisfaites: à savoir que ledit travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privés. La commission a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention, par exemple en prévoyant que tout prisonnier travaillant pour une entreprise privée s’offre volontairement pour ce travail, sans avoir été soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, et en prévoyant également, compte tenu de la captivité de la main-d’œuvre pénitentiaire, certaines garanties quant au salaire et aux autres conditions d’emploi se rapprochant de celles d’une relation de travail libre. Dans cette situation, le travail de prisonniers au profit de compagnies privées ne relève pas du champ d’application de la convention puisqu’il n’inclut aucune contrainte.

La commission note avec regret que la position du gouvernement demeure inchangée et que le rapport réitère les déclarations du gouvernement déjà notées dans ses commentaires antérieurs. La commission constate qu’il apparaît à nouveau d’après le rapport du gouvernement que peu de changements ont été apportés à la législation et la pratique nationales au cours de la période 2006-2008 couverte par le rapport, en ce qui concerne le travail de prisonniers au profit d’entreprises privées. Le gouvernement réitère son point de vue selon lequel sa législation et sa pratique sont conformes à la convention, du fait que les prisons australiennes à gestion privée restent sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques, et que le secteur privé n’a aucune compétence pour déterminer les conditions de travail s’appliquant aux détenus, ces conditions étant fixées par les autorités publiques. Il ressort également du rapport qu’aucun Etat n’envisage actuellement de modifier sa législation et sa pratique.

Dans des commentaires antérieurs, la commission a noté que des prisons privées existent à Victoria, en Nouvelle-Galles du Sud, au Queensland, en Australie-Méridionale et en Australie-Occidentale, alors qu’il n’existe pas de prisons à gestion privée en Tasmanie, dans le Territoire du Nord et dans le Territoire de la Capitale australienne. Dans son dernier rapport, le gouvernement se réfère à nouveau au travail pénitentiaire dans les installations pénitentiaires privées en Nouvelle-Galles du Sud, au Queensland, en Australie-Méridionale, à Victoria et en Australie-Occidentale en mettant spécialement l’accent sur le fait que les prisonniers détenus dans des installations à gestion privée sont sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique, comme exigé par l’exception prévue à l’article 2, paragraphe 2 c). Le gouvernement réitère son point de vue selon lequel les prisonniers ne sont pas «concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privés», puisque la «garde légale» des prisonniers n’a pas été transférée à un fournisseur privé de services pénitentiaires et que les prisonniers ayant fait l’objet d’une condamnation demeurent sous la garde légale du ministre de la Justice jusqu’à leur libération (Victoria). Cependant, comme la commission l’a noté précédemment, le gouvernement reconnaît dans son rapport antérieur que «les prisonniers sont à la “disposition” du contractant privé, mais uniquement dans le sens très littéral du terme».

A cet égard, la commission attire à nouveau l’attention du gouvernement sur les explications concernant la portée des expressions «concédé ou mis à la disposition de» figurant aux paragraphes 56-58 et 109-111 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, et souligne que ces termes ne couvrent pas seulement les situations dans lesquelles les prisonniers sont «employés» par une compagnie privée ou se trouvent en état de servitude à l’égard de la compagnie privée, mais aussi des situations dans lesquelles la compagnie privée n’a pas un choix absolument discrétionnaire sur le type de travail qu’elle peut exiger du prisonnier parce qu’elle est limitée par les règles fixées par l’autorité publique et parce que l’exécution du travail n’est «qu’une des conditions de détention imposées par l’Etat». La commission se réfère également au paragraphe 106 de son étude d’ensemble de 2007, dans lequel elle a indiqué que l’interdiction de concéder des prisonniers ou de les mettre à disposition de compagnies privées est absolue, c’est-à-dire qu’elle ne se limite pas au travail effectué en dehors des établissements pénitentiaires, mais s’applique également au travail dans des ateliers que des entreprises privées font fonctionner à l’intérieur des prisons ainsi qu’à tout travail organisé par des prisons à gestion privée.

Se référant également aux explications fournies aux paragraphes 59-60 et 114-120 de son étude d’ensemble de 2007 susmentionnée, la commission souligne, une nouvelle fois, que le travail des prisonniers pour des entreprises privées ne peut être compatible avec l’interdiction explicite prévue par la convention que lorsque les garanties nécessaires existent pour s’assurer que les prisonniers acceptent volontairement un travail sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, comme l’exige l’article 2, paragraphe 1, de la convention. La commission a estimé que, dans ce contexte de captivité, il est nécessaire d’obtenir des prisonniers un consentement formel au travail lorsque ce dernier est exécuté pour le compte d’entreprises privées dans les prisons gérées par l’Etat ou pour les prisons à gestion privée, et que ce consentement devait être donné par écrit. En outre, dans la mesure où ce consentement formel est obtenu dans un contexte de privation de liberté et sans véritable alternative, certains facteurs sont nécessaires pour authentifier et confirmer l’expression d’un consentement libre et éclairé. La commission rappelle que l’indicateur le plus fiable du consentement au travail est que ce travail soit exécuté dans des conditions se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, ce qui comprend le niveau des rémunérations (avec retenues et cessions éventuelles), la sécurité sociale et la sécurité et santé au travail.

S’agissant du caractère volontaire du travail, la commission a précédemment noté que, dans les prisons à gestion privée de Victoria, de Nouvelle-Galles du Sud et d’Australie-Méridionale, il semble que le consentement formel au travail n’est jusqu’à présent pas exigé des détenus. Elle note, cependant, que le gouvernement confirme son indication antérieure selon laquelle, en Nouvelle-Galles du Sud, l’emploi de prisonniers dans les établissements pénitentiaires (y compris le Junee Correctional Centre, seul établissement à gestion privée) revêt un caractère volontaire et aucun cas de travail forcé n’a été enregistré. La commission note par ailleurs, d’après l’indication du gouvernement, qu’en Australie-Méridionale, où le travail pénitentiaire est obligatoire, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire (art. 29(1) de la loi de 1982 sur les Services pénitentiaires, section 6), les détenus à la prison de Mt Gambier (la seule prison à gestion privée de l’Australie-Méridionale) présentent une demande écrite pour participer aux programmes de travail.

La commission a pris note des indications réitérées par le gouvernement selon lesquelles au Queensland les prisonniers ne sont pas forcés de participer aux activités professionnelles approuvées: bien que le consentement formel des prisonniers ne soit pas requis, le programme de travail dépend de l’initiative volontaire et le fait pour un prisonnier de refuser de participer à un tel programme n’a aucune incidence négative pour lui. En ce qui concerne l’Australie-Occidentale, où la législation exige des prisonniers qu’ils travaillent (art. 95(4) de la loi sur les prisons, dans sa teneur modifiée en 2006), le gouvernement indique que la disposition pertinente n’a pas été appliquée, et que les prisonniers ne sont pas obligés de participer aux programmes de travail (même dans les prisons à gestion privée, comme la prison Acacia), même s’ils sont encouragés à le faire.

Tout en prenant note des indications susmentionnées au sujet de l’évolution positive dans l’application pratique de la législation en vigueur dans plusieurs Etats, la commission réitère l’espoir que des mesures seront prises pour garantir qu’un consentement librement donné et éclairé est exigé pour permettre le travail de prisonniers dans les prisons à gestion privée, ainsi que tout travail de prisonniers au profit de compagnies privées, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des locaux de la prison, et qu’un tel consentement est exempt de la menace d’une peine quelconque au sens large de l’article 2, paragraphe 1, de la convention, telle que la perte de privilèges ou une évaluation défavorable du comportement prise en compte en vue de la réduction de la peine. Par ailleurs, dans un contexte de privation de liberté, n’ayant pas d’autres possibilités d’accès au marché libre du travail, un tel consentement «libre» et «éclairé» a besoin d’être authentifié par des conditions de travail se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, telles que des niveaux de rémunération (avec retenues et cessions éventuelles), sécurité sociale et sécurité et santé au travail.

Compte tenu des considérations susmentionnées, la commission veut croire que les mesures nécessaires seront prises dans tous les Etats, aussi bien dans la législation que dans la pratique, pour accorder aux prisonniers travaillant dans des installations à gestion privée et aux autres prisonniers travaillant au profit d’entreprises privées un statut légal avec des droits et des conditions d’emploi qui soient compatibles avec cet instrument fondamental des droits de l’homme, et que le gouvernement sera bientôt en mesure de communiquer des informations sur les progrès réalisés à cet égard.

En ce qui concerne les Etats dans lesquels, d’après le rapport, les prisonniers ne sont pas obligés de participer à un programme de travail, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment dans la pratique les prisonniers donnent un consentement éclairé pour travailler dans les entreprises privées, quelles mesures sont prises pour s’assurer que ce consentement est donné librement et quels sont les recours dont disposerait le prisonnier qui alléguerait que son contentement n’a pas été donné librement.

Prière également de fournir des informations sur l’impact dans la pratique de la recommandation du Recueil de directives pratiques de l’Association australasienne des secteurs qui emploient des prisonniers, à laquelle se réfère le gouvernement dans son rapport, visant à créer un organisme consultatif indépendant comprenant des représentants des secteurs concernés, des syndicats et de la collectivité, en vue de contrôler la mise en place et le fonctionnement des secteurs qui emploient des prisonniers, ainsi que des informations sur toute mesure prise ou envisagée pour assurer le respect de la convention.

La commission soulève d’autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. 1. Travail des détenus réalisé pour le compte d’entreprises privées. La commission avait noté, d’après le rapport du gouvernement de 2004, qu’en vertu de l’article 33 de la loi sur l’exécution des peines de 1997 (Tasmanie) il peut être ordonné à un détenu de travailler dans la prison ou à l’extérieur de celle-ci. Tout refus de se conformer à un tel ordre de travailler constitue une infraction aux règles pénitentiaires en vertu du titre 1 de la loi. Se référant au point 5 de son observation sur cette même convention, la commission prie le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, s’il peut être ordonné à des détenus d’effectuer un travail à l’extérieur de la prison pour des entreprises privées et, dans l’affirmative, s’il est garanti que les intéressés donnent librement et de manière éclairée leur consentement pour travailler pour des entreprises privées et que ce travail est entouré de certaines garanties et sauvegardes couvrant les éléments essentiels d’une relation de travail libre, comme le salaire, la sécurité sociale, etc.

2. Peine de travail d’intérêt général. La commission avait noté, d’après le rapport du gouvernement de 2004, qu’en vertu de la loi de 1997 (Tasmanie) sur l’exécution des peines un tribunal peut rendre une ordonnance de travail d’intérêt général (CSO) prescrivant au condamné d’accomplir un travail ou une autre activité au sein de la collectivité, dans le cadre d’un système approprié d’administration des peines, sous le contrôle du juge d’application des peines ou d’un agent de probation. Dans le cadre de ce système, le travail peut notamment être réalisé pour le compte d’un organisme ne poursuivant pas de but lucratif pour ses membres. L’inobservation des conditions fixées par la CSO peut aboutir, si la question lui est déferrée, à ce que le tribunal modifie ou annule la CSO et impose en lieu et place une autre peine sanctionnant l’infraction qui avait donné lieu initialement à la CSO. La commission note, d’après le rapport du gouvernement de 2006, que l’article 39 de la loi sur les peines (Australie méridionale) contient des dispositions similaires.

La commission attire l’attention du gouvernement sur l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, qui interdit expressément que des personnes condamnées suite à une décision d’une instance judiciaire soient concédées ou mises à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. Ainsi, l’exception prévue par cet article de la convention au sujet du travail obligatoire imposé aux personnes condamnées ne s’étend pas au travail accompli pour le compte de personnes morales privées, même sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques. En conséquence, la commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport si des mesures ont été prises ou sont envisagées pour s’assurer que les personnes qui réalisent un travail d’intérêt général en application d’une CSO ne sont pas concédées ou mises à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées sans leur consentement et, le cas échéant, de préciser la manière dont il est garanti que ces personnes consentent librement à accomplir ce travail pour le compte d’un utilisateur privé de travail d’intérêt général. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur toute disposition régissant le travail d’intérêt général dans d’autres juridictions et sur l’application des dispositions en question dans la pratique.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 d). Pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre dans les cas de force majeure. La commission avait noté, d’après le rapport du gouvernement de 2004, que l’article 2(1) de la loi de 1938 (Tasmanie) sur les transports publics, qui concerne la déclaration de l’état d’urgence (dans le cadre duquel certains pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre sont conférés au Gouverneur) est libellé dans des termes assez larges pour autoriser son application dans des circonstances qui ne se limiteraient pas à des situations d’urgence au sens strict, telles que prévues à l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention. Elle avait également noté que la Cour suprême du Queensland, commentant cette disposition dans son arrêt Dean contre Attorney General of Queensland ([1971] Qd.R.391), a estimé que cet article ne limitait pas sa portée à la catégorie des «catastrophes et calamités naturelles» mais lassait au contraire un champ plus ouvert quant aux situations se prêtant à la déclaration de l’état d’urgence. La commission exprime donc l’espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que cette disposition ne puisse s’appliquer que dans des situations d’urgence au sens strict, comme prévu à l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention (c’est-à-dire en cas de guerre, de sinistre ou menace de sinistre) et que, dans cette attente, il fournira des informations sur l’application dans la pratique de l’article 2(1) de cette loi de 1938 sur les transports publics.

Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Faisant suite à ses précédents commentaires, la commission prend note des informations exhaustives et détaillées communiquées par le gouvernement dans ses rapports reçus en septembre 2004 et en octobre 2006, ainsi que de la discussion ayant eu lieu au sein de la Commission de la Conférence en juin 2004.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. Privatisation des prisons et du travail pénitentiaire. Dans ses précédents commentaires concernant la privatisation des prisons et du travail pénitentiaire en Australie, la commission avait souligné que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions expressément prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention pour exclure le travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de la convention. La commission avait rappelé que tout travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire n’est compatible avec la convention que si deux conditions sont satisfaites: à savoir que ledit travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. La commission a toujours clairement indiqué que ces deux conditions sont cumulatives, c’est-à-dire que le fait qu’un détenu reste en permanence sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique ne dispense pas en soi l’autorité publique de remplir la deuxième condition, à savoir que ledit détenu ne soit pas «concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées». La commission a précédemment demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention, par exemple en prévoyant que tout détenu travaillant pour une entreprise privée s’offre volontairement pour ce travail, sans avoir été soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, et en prévoyant également, compte tenu de la captivité de la main-d’œuvre pénitentiaire, certaines garanties quant au salaire et aux autres conditions d’emploi se rapprochant de celles d’une relation de travail libre.

Dans ses rapports, le gouvernement a considéré que sa législation et sa pratique sont conformes à la convention du fait que les prisons australiennes à gestion privée restent sous la supervision et le contrôle des autorités publiques et que le secteur privé n’a aucune compétence pour déterminer les conditions de travail s’appliquant aux détenus, ces conditions étant fixées par les autorités publiques. Le gouvernement affirme qu’il n’est pas nécessaire à l’Australie d’établir que le travail dans les prisons à gestion privée s’effectue sur une base volontaire ou sans la menace d’une peine, puisque les conditions de travail dans les prisons à gestion privée sont identiques ou similaires à celles des prisons à gestion publique.

Dans ses précédents commentaires, la commission avait relevé qu’il existe des prisons privées au Victoria, en Nouvelle-Galles du Sud, dans le Queensland, en Australie-Méridionale et en Australie-Occidentale mais qu’il n’existe pas de prisons gérées par des groupes privés en Tasmanie, dans le Territoire du Nord ni dans le Territoire de la Capitale australienne. Dans ses rapports de 2004 et de 2006, le gouvernement se réfère à nouveau en détail au travail pénitentiaire dans les établissements pénitentiaires privés de Nouvelle-Galles du Sud, du Queensland, de l’Australie-Occidentale et du Victoria, en soulignant en particulier que les personnes détenues dans ces établissements à gestion privée sont sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique, comme le prescrivent les dispositions dérogatoires de l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention. En outre, le gouvernement réitère son point de vue, selon lequel les détenus ne sont pas «concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées» puisque la relation contractuelle entre le Département des services pénitentiaires et les fournisseurs de services contractés ne prévoit pas la concession de main-d’œuvre pénitentiaire (Queensland). Dans son rapport reçu en 2002, le gouvernement reconnaissait toutefois que les «détenus sont à la “disposition” du contractant privé, mais uniquement dans le sens très littéral du terme».

Sur ce point, la commission attire l’attention du gouvernement sur les explications données aux paragraphes 56 à 58 et 109 à 111 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, à propos de la portée des termes «concédé ou mis à la disposition de». La commission a constaté que ces termes ne couvrent pas seulement les situations dans lesquelles le détenu est «employé» par une compagnie privée ou se trouve en état de servitude à l’égard de la compagnie privée, mais aussi des situations dans lesquelles la compagnie privée n’a pas un choix absolument discrétionnaire sur le type de travail qu’elle peut exiger du détenu parce qu’elle est limitée par les règles fixées par l’autorité publique et parce que l’exécution du travail n’est «qu’une des conditions de détention imposées par l’Etat». La commission se réfère également au paragraphe 106 de son étude d’ensemble de 2007, où elle a indiqué que l’interdiction de concéder des détenus ou les mettre à disposition de compagnies privées est absolue, c’est-à-dire qu’elle ne se limite pas au travail effectué en dehors des établissements pénitentiaires mais s’applique également au travail dans des ateliers que des entreprises privées font fonctionner à l’intérieur des prisons ainsi qu’à tout travail organisé par des prisons à gestion privée.

Se référant également aux explications données aux paragraphes 59 à 60 et 114 à 120 de son étude d’ensemble de 2007, la commission a souligné que le travail des détenus pour des entreprises privées ne peut être compatible avec l’interdiction explicite prévue par la convention que lorsque les garanties nécessaires existent pour s’assurer que les prisonniers acceptent volontairement un travail sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, comme l’exige l’article 2, paragraphe 1, de la convention. La commission a indiqué que, dans ce contexte de captivité, il est nécessaire d’obtenir des prisonniers un consentement formel au travail lorsque ce dernier est exécuté pour le compte d’entreprises privées dans les prisons gérées par l’Etat ou pour les prisons à gestion privée, et que ce consentement devrait être donné par écrit. En outre, dans la mesure où ce consentement formel est obtenu dans un contexte de privation de liberté et sans véritable alternative, certains facteurs sont nécessaires pour authentifier et confirmer l’expression d’un consentement libre et éclairé. La commission rappelle que l’indicateur le plus fiable du consentement au travail est que ce travail soit exécuté dans des conditions se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, ce qui comprend le niveau des rémunérations (avec retenues et cessions éventuelles), la sécurité sociale et la sécurité et santé au travail. Par ailleurs, d’autres facteurs peuvent également être considérés comme des éléments objectifs et des avantages quantifiables dont le prisonnier bénéficie en réalisant le travail et qui pourraient être pris en compte afin de déterminer si le consentement a été donné librement et de manière éclairée. Dans son étude d’ensemble de 2007, la commission a cité comme exemples de ces avantages l’acquisition de nouvelles compétences que le prisonnier pourra utiliser une fois libéré, la possibilité de continuer le travail du même type après sa libération, ou l’opportunité de travailler en groupe dans un environnement contrôlé permettant au prisonnier de développer sa capacité de travailler en équipe. La commission a indiqué que tous ces facteurs devaient être pris dans leur ensemble afin de déterminer si le consentement a été donné librement et ils devraient être examinés et évalués par les autorités publiques.

S’agissant du caractère volontaire du travail, la commission avait noté antérieurement que, dans les prisons à gestion privée du Victoria, de Nouvelle-Galles du Sud et d’Australie-Méridionale, il ne semblait pas jusque-là que l’on demandât formellement aux détenus de donner leur consentement au travail. Il ressort cependant des rapports reçus du gouvernement en 2004 et en 2006 qu’en Nouvelle-Galles du Sud l’emploi de détenus dans les établissements correctionnels (y compris le Junee Correctional Centre, seul établissement à gestion privée) revêt un caractère volontaire et aucun cas de travail forcé n’a été enregistré. Le gouvernement indique qu’au Queensland les détenus ne sont pas forcés de participer aux activités professionnelles approuvées: même si aucun consentement formel n’est requis des détenus, ce sont eux qui demandent (et donc qui consentent implicitement) à accomplir les activités approuvées. S’agissant de l’Australie-Occidentale, le gouvernement a indiqué en 2004 que l’intention à la base des règles 43, 44 et 45 du règlement des établissements pénitentiaires est de demander aux détenus de travailler mais non pas de les y forcer contre leur gré. Il indique également dans son dernier rapport que l’entretien de la prison privée n’entraînera aucun cas de travail forcé tel que défini par la convention. La commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour s’assurer que le consentement libre et éclairé est exigé des prisonniers qui travaillent dans les prisons privatisées, en tenant compte de l’ensemble des facteurs mentionnés par la commission ci-dessus.

Elle prie en particulier le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur:

–           les mesures prises pour s’assurer qu’un consentement éclairé, formel et donné par écrit est obtenu des prisonniers, sans la menace d’une peine quelconque;

–           les mesures prises pour s’assurer que ce consentement formel est authentifié par l’existence de facteurs objectifs et quantifiables comme la réalisation du travail dans des conditions se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, associée à d’autres avantages tels que l’acquisition de nouvelles compétences que le prisonnier pourra utiliser une fois libéré, la possibilité de continuer le travail du même type après sa libération, ou l’opportunité de travailler en groupe et de développer sa capacité de travailler en équipe et d’autres facteurs similaires;

–           les facteurs objectifs et quantifiables qui sont pris en compte par les autorités publiques pour authentifier le caractère volontaire du consentement;

–           les procédures suivies par les autorités publiques pour contrôler régulièrement que ces facteurs objectifs et quantifiables existent afin d’assurer que le travail effectué par les prisonniers est volontaire.

Article 25. Sanctions pénales. Suite à ses précédents commentaires, la commission note que le gouvernement indique dans son dernier rapport qu’il y a actuellement trois affaires en cours, dans le cadre desquelles sept personnes sont poursuivies sur le fondement de l’article 270 du Code pénal (qui traite de l’esclavage et de la servitude sexuelle), tel que modifié par la loi de 2005 modifiant le Code pénal (Infractions de traite de personnes). La commission saurait gré au gouvernement de communiquer des informations sur l’issue de ces procédures, notamment sur les sanctions imposées. Ayant également noté que le gouvernement indiquait dans son précédent rapport que six des huit Etats ou Territoires (Nouvelle-Galles du Sud, Victoria, Australie-Occidentale, Australie-Méridionale, Territoire du Nord et Territoire de la Capitale australienne) ont adopté des dispositions incriminant la servitude sexuelle, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur toute procédure engagée sur la base de ces dispositions et sur les sanctions éventuellement prononcées.

La commission adresse par ailleurs au gouvernement une demande directe portant sur certains autres points.

Observation (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

Se référant à ses précédents commentaires, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport de 2002. Elle prend également note des commentaires de la Chambre de commerce et d’industrie australienne (CCIA), joints au rapport du gouvernement.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la conventionPrivatisation des prisons et travail pénitentiaire.

1. Dans ses précédents commentaires, la commission avait relevé qu’il existait des prisons privées dans le Victoria, la Nouvelle-Galles du Sud, le Queensland et l’Australie-Méridionale et qu’il n’y avait pas de prisons gérées par des groupes privés dans la juridiction fédérale ni dans celles de Tasmanie, du Territoire du Nord et du Territoire de la Capitale australienne. Dans son rapport de 2002, le gouvernement indique que la première prison sous gestion privée en Australie-Occidentale a été ouverte en 2001. Cette dernière est administrée sous contrat par la Australian Integration Management Services Corporation (AIMS Corp), un fournisseur privé de services pénitentiaires, mais se trouve toujours sous le contrôle du Département de la justice. La commission avait souligné que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions, explicitement prévues par l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention, sous lesquelles le travail pénitentiaire obligatoire peut être exclu du champ d’application de la convention.

2. D’après le rapport de 2002 du gouvernement, il semble qu’il y ait eu peu de changement dans la législation et la pratique nationales au cours de la période allant de 2000 à 2002 en ce qui concerne le travail des détenus pour des entreprises privées. Le gouvernement indique à nouveau qu’en Australie les prisons sous gestion privée demeurent sous le contrôle d’une autorité publique dans la mesure où le gouvernement établit des directives sur le travail pénitentiaire, effectue des inspections et impose des sanctions en cas d’infraction. Les gestionnaires privés doivent agir dans le cadre de ces directives qui s’appliquent à la fois aux prisons sous gestion publique et sous gestion privée. Par conséquent, les détenus sont à la «disposition» du contractant privé uniquement dans le sens littéral du terme. Il n’existe aucune différence matérielle entre les prisons publiques et les prisons privées en ce qui concerne les obligations ou arrangements en matière de travail.

3. La commission note qu’à plusieurs reprises, dans ses rapports, le gouvernement a indiqué que, dans le Victoria, le travail pénitentiaire était réalisé sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique (le secrétaire du Département de la justice) et que les détenus restaient sous la «tutelle juridique» de l’Etat; le Bureau du commissaire chargé des services correctionnels (OCSC) au sein du Département de la justice garde la responsabilité totale de la classification et du placement des détenus dans le système et du contrôle du respect de leur bien-être et de leur gestion, selon les normes et conditions fixées par la loi sur l’exécution des peines (Corrections Act). Le gouvernement estime que le système global de contrôle et de surveillance des détenus condamnés exercé par l’Etat, dans le Victoria, tel qu’il est rigoureusement assuré en droit et en pratique, place le travail des détenus hors de la définition du «travail forcé ou obligatoire» figurant dans la convention. La commission note également que le gouvernement déclare à nouveau que le gouvernement du Victoria a pris le contrôle du Metropolitan Women’s Correctional Centre (MWCC) en octobre 2000, après qu’un certain nombre de problèmes liés aux activités dans l’établissement n’ont pas été résolus par le propriétaire et gestionnaire, la Corrections Corporation of Australia (CCA). Le 2 novembre 2000, le gouvernement a annoncé qu’un accord avait été conclu avec la CCA pour transférer la propriété et la gestion du MWCC au secteur public.

4. Dans son rapport de 2002, le gouvernement fait à nouveau référence en détail au travail pénitentiaire dans les prisons privées du Victoria, de la Nouvelle-Galles du Sud, du Queensland et de l’Australie-Méridionale, soulignant le fait que les prisonniers détenus dans des établissements sous gestion privée sont «sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique» comme demandé par l’exception prévue à l’article 2, paragraphe 2 c). En ce qui concerne les conditions de travail de ces détenus, le gouvernement est d’avis qu’«il est complètement irréaliste de suggérer ou de s’attendre à ce que les détenus soient rémunérés conformément aux conditions du marché libre du travail» (Nouvelle-Galles du Sud), qu’«il est anachronique» de suggérer que ces détenus doivent bénéficier de conditions d’emploi proches de celles d’une relation de travail libre, dans la mesure où il n’existe pas de relation de travail entre un établissement sous gestion privée et les détenus (Queensland), et qu’«il ne serait pas équitable de traiter plus favorablement les détenus des prisons sous gestion privée que ceux des prisons gérées par l’Etat» (Victoria).

5. Tout en notant ces opinions et commentaires, la commission souhaite rappeler ce qui suit. Premièrement, l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention interdit expressément que des détenus condamnés soient concédés ou mis à disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées, dans le sens où l’exception prévue par la convention dans cet article pour le travail pénitentiaire obligatoire ne s’étend pas au travail des détenus pour des employeurs privés (y compris les prisons privatisées et les ateliers dans les prisons), même sous une surveillance et un contrôle publics. La commission rappelle que tout travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation est compatible avec la convention seulement si deux conditions sont réunies, à savoir que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. La commission a toujours affirmé clairement que ces deux conditions étaient cumulatives et s’appliquaient indépendamment l’une de l’autre, c’est-à-dire que le fait qu’un détenu reste en permanence sous la surveillance et le contrôle d’une autorité publique ne dispense pas en soi le gouvernement de remplir la deuxième condition, à savoir que ledit détenu ne soit pas «concédé ou mis à disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées».

6. Deuxièmement, il n’est pas nécessaire que les conditions d’emploi soient exactement les mêmes que celles du marché libre du travail, mais qu’elles soient «proches de celles d’une relation de travail libre» (observation générale, 2001, point 10). A cet égard, la commission se réfère à nouveau aux explications données aux paragraphes 127 à 143 de son rapport général à la Conférence internationale du Travail de 2001 et aux points 5 à 11 de son observation générale de 2001 sur la convention où elle avait souligné que le travail des détenus pour des entreprises privées pouvait être réputé compatible avec l’interdiction explicite de la convention seulement si ce travail était effectué dans des conditions proches de celles d’une relation de travail libre, ce qui impliquait le consentement formel des personnes concernées, ainsi que des garanties et protections comprenant les éléments essentiels d’une relation de travail libre tels que les salaires, la sécurité sociale, etc.

7. L’argument concernant les «conditions proches de celles d’une relation de travail libre» ne doit pas éluder le fait que, dans les prisons sous gestion privée du Victoria, de la Nouvelle-Galles du Sud et de l’Australie-Méridionale, même le consentement formel des détenus ne semble pas être demandé jusqu’à maintenant. A cet égard, la commission serait reconnaissante au gouvernement d’indiquer de quelle manière la liberté du consentement des détenus est garantie dans la prison sous gestion privée, en Australie-Occidentale, où, selon l’affirmation du gouvernement dans son rapport, la création d’une prison privée n’introduirait aucune forme de travail forcé au sens de la convention.

8. A la lumière des éléments qui précèdent, et prenant note de la déclaration du gouvernement dans son rapport selon laquelle l’Australie est fortement attachée aux principes de la convention no 29 et ne cherche en aucun cas à altérer leur application, la commission exprime une nouvelle fois l’espoir que les mesures nécessaires seront prises pour assurer le respect de la convention et que le gouvernement sera bientôt en mesure d’indiquer les progrès réalisés à cet effet.

Article 25. Faisant suite à ses commentaires précédents concernant l’entrée en vigueur de la loi fédérale portant modification du Code pénal (esclavage et servitude sexuelle) de 1999 (loi sur l’esclavage), qui traite du commerce international de personnes aux fins d’exploitation sexuelle - commerce croissant et lucratif - et contient de nouvelles dispositions relatives à l’esclavage, à la servitude sexuelle et au recrutement par des moyens mensongers, la commission note que, d’après le rapport du gouvernement de 2002, la Nouvelle-Galles du Sud, l’Australie-Méridionale, le Territoire du Nord et le Territoire de la Capitale australienne ont adoptéà leur niveau les éléments du régime législatif concernant la servitude sexuelle. Le gouvernement indique qu’il n’y a pas eu, à ce jour, de poursuite en vertu de la loi fédérale. La commission saurait gré au gouvernement de bien vouloir continuer à fournir des informations sur l’application en pratique de la nouvelle loi fédérale et des législations adoptées au niveau des Etats et des Territoires, ainsi que sur tout autre aspect de la loi et de la pratique concernant la traite des personnes ayant été souligné dans son observation générale de 2000 sur la convention.

Observation (CEACR) - adoptée 2001, publiée 90ème session CIT (2002)

La commission a noté les informations complètes et détaillées communiquées par le gouvernement dans ses rapports reçus en novembre 1999 et en septembre et novembre 2000, dans ses déclarations à la Commission de la Conférence sur l’application des normes en 1999 et en 2001 et dans une lettre en date du 27 juin 2001, ainsi que la discussion sur le respect de la convention en Australie qui a eu lieu à la Commission de la Conférence en 1999.

Article 25 de la convention. La commission note avec intérêt dans les rapports du gouvernement que la loi fédérale portant modification du Code pénal (esclavage et servitude sexuelle) de 1999 (la loi sur l’esclavage), qui est entrée en vigueur le 21 septembre 1999, traite du commerce international, croissant et lucratif, de personnes aux fins d’exploitation sexuelle et contient de nouvelles dispositions relatives à l’esclavage, à la servitude sexuelle et au recrutement par des moyens mensongers; pour ces délits, un individu est passible d’une peine de prison de longue durée et une personne morale d’une amende de 9,9 millions de dollars australiens au maximum. Le gouvernement ajoute qu’il coopère avec les pays pertinents sur la manière de faire respecter la nouvelle législation pour ce qui concerne les activités transfrontières.

La commission attend avec intérêt que le gouvernement communique les informations sur l’application pratique de la nouvelle loi fédérale et sur l’adoption de la législation complémentaire prévue aux niveaux des Etats et des territoires, ainsi que sur les autres aspects de droit et de pratique concernant la traite de personnes, que la commission a évoqués dans son observation générale au titre de la convention, publiée en 2001.

Articles 1, paragraphe 1, et 2, paragraphes 1 et 2 c). Dans sa précédente observation concernant la privatisation des établissements pénitentiaires et du travail pénitentiaire en Australie, la commission a rappelé que le travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire n’est compatible avec la convention que si les deux conditions suivantes sont remplies: le travail ou service doit être exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et la personne ne doit pas être concédée ou mise à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées. La commission a demandé au gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises ou envisagées pour assurer que tous les prisonniers travaillant pour le compte d’entreprises privées proposent leurs services de leur propre initiative, sans faire l’objet d’aucune pression ou menace de sanction et, compte tenu de leur condition de main-d’oeuvre captive, sous réserve de garanties quant aux salaires et autres conditions d’emploi proches de celles d’une condition de travail en liberté.

La commission note que, dans sa lettre en date du 27 juin 2001, le gouvernement a retiré l’affirmation qu’il avait faite au cours du débat général à la Commission de la Conférence en 2001 et qui est reflétée au paragraphe 99 du rapport général de la commission, selon laquelle la Conférence internationale du Travail de 1930 avait accepté, plutôt que rejeté, la proposition tendant à ce que les entrepreneurs privés qui étaient payés par le gouvernement pour exécuter des services publics soient traités sur le même pied que les institutions publiques et ne puissent faire l’objet d’allégations de travail forcé. Néanmoins, de l’avis du gouvernement, cela ne retranche rien à ce qui subsiste dans sa déclaration devant la Commission de la Conférence et à sa position finale selon laquelle la gestion privée d’établissements pénitentiaires n’était pas envisagée par la Conférence de 1930. A cet égard, la commission renvoie aux explications fournies cette année dans son observation générale au titre de la convention.

Il ressort du rapport du gouvernement que la situation nationale n’a guère évolué en droit et en pratique au cours de ces dernières années en ce qui concerne le travail des détenus pour le compte d’entreprises privées. D’après le rapport du gouvernement reçu en novembre 2000, l’administrateur d’une prison privée (dans le Victoria) «n’est rien de plus qu’un agent du commissaire (aux services d’exécution des peines) chargé d’organiser les travaux pour aider à la réinsertion des détenus». Entre-temps, le «Code de pratique pour le développement d’entreprises d’exécution des peines», adopté en juillet 1997 par une résolution des ministres des services d’exécution des peines des Etats et des territoires, traite essentiellement de l’accès au marché et de l’impact sur l’industrie, mais ne comporte aucune référence aux droits, salaires ou conditions de travail des détenus.

En juin 2000, il n’existait pas de prisons administrées par des groupes privés dans la juridiction fédérale et celles de Tasmanie, du Territoire du Nord et du Territoire de la Capitale australienne, alors qu’il existait des prisons privées dans le Victoria, la Nouvelle-Galles du Sud, le Queensland et l’Australie-Méridionale.

En Australie-Occidentale, la première prison en gestion privée de cet Etat devait être achevée en septembre 2000 et administrée sous contrat par la Corrections Corporation of Australia (CCA), un fournisseur privé de services pénitentiaires, mais toujours sous le contrôle du ministère de la Justice. D’après le gouvernement, la création d’un établissement pénitentiaire privé n’introduirait aucune forme de travail forcé au sens de la convention.

Pour l’Etat du Victoria, le gouvernement a signalé en novembre 2000 que les détenus étaient tenus de travailler dès lors qu’ils avaient été reconnus coupables et condamnés et qu’ils avaient moins de 65 ans, qu’ils soient détenus dans une prison du secteur public ou du secteur privé. Si un détenu refusait de se conformer à une consigne de travail, l’administrateur de la prison était autoriséà lui infliger une sanction, par exemple une amende, et le détenu était susceptible de repasser à un régime de surveillance plus stricte dans une autre unité pénitentiaire.

Le premier contrat portant sur une prison en propriété et gestion privée dans le Victoria a été accordéà la CCA pour le Metropolitan women’s correctional centre (MWCC) dans le Deer Park près de Melbourne, dont l’entrée en service officielle est survenue en août 1996. Le gouvernement du Victoria est intervenu pour prendre le contrôle du MWCC en octobre 2000 après que la CCA ait manqué de résoudre un certain nombre de problèmes liés aux activités dans l’établissement, et le 2 novembre 2000 le gouvernement a annoncé qu’un accord avait été passé avec la CCA pour le transfert du MWCC en propriété et gestion publiques.

Les deux autres prisons du secteur privé dans l’Etat du Victoriaétaient le Fulham Correctional Centre du Victoria oriental, administré par l’Australasian Correctional Management pty. Ltd. (ACM) et la prison de Port Phillip près de Melbourne, une prison de sécurité maximale administrée par les services d’exécution des mesures pénales du groupe 4, ces deux établissements ayant été inaugurés en 1997. En 1998, le taux de rémunération dans les prisons privées avait été signalé comme étant de 6,5 ou 7,5 dollars australiens par jour, alors que le taux journalier minimum est de près de 75 dollars australiens pour les travailleurs employés en liberté. En 2000, le gouvernement a signalé des taux salariaux journaliers appliqués depuis avril 1998, compris entre 5,5 et 8,25 dollars australiens (en fonction du degré de responsabilité, de la complexité et des exigences de la tâche à accomplir, des compétences requises et/ou des heures de travail) pour les détenus employés dans les établissements en gestion des secteurs tant public que privé. Les détenus n’ont pas droit à la plupart des prestations de sécurité sociale, à l’exception des allocations familiales, et les enfants conservent le droit aux prestations de soins de santé.

En outre, en ce qui concerne les détenus obligés de travailler dans des ateliers en gestion privée, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des prisons d’Etat du Victoria, le gouvernement a indiqué que le secrétaire au Département de la justice peut, pour le compte et au nom de la Couronne, passer un accord avec toute personne susceptible, par ses fonctions, d’assurer la gestion d’entreprises pénitentiaires et des chantiers du secteur pénitentiaire; aucune information sur la pratique actuelle n’a été communiquée.

Dans la Nouvelle-Galles du Sud, le seul établissement en gestion privée est le Junee Correctional Centre, administré par ACM. «Tous les détenus sont censés participer de manière positive à toutes les activités du programme, y compris au programme de travail correctionnel, dans le cadre de leur réinsertion, et ils le font généralement sur la base d’une gamme de privilèges et de sanctions.» Aucune information sur les niveaux de salaires actuels ni sur les prestations de sécurité sociale ou autres conditions d’emploi n’a été fournie, sauf que les programmes sont censés se conformer au principe et à l’esprit de toutes les normes de sécurité et de santé au travail.

En Australie-Méridionale, les prisonniers condamnés sont tenus de travailler selon ce que décide l’administrateur, en vertu de la loi de 1982 sur les services d’exécution des mesures pénales. Cette loi couvre les détenus des prisons administrées par des opérateurs privés. Le contrat de gestion d’une prison privée pour la prison Mont Gambier exige que des services soient fournis pour aider les prisonniers à acquérir les moyens et compétences nécessaires pour trouver leur place sur le marché du travail après leur libération. Ce même contrat prévoit de manière détaillée une comptabilité séparée de tous les fonds accumulés grâce aux activités de travail et la distribution de tous les bénéfices entre les projets d’aménagement et de bien-être au profit des détenus à la prison; les projets communautaires et oeuvres de bienfaisance à l’échelle locale; les oeuvres caritatives de soutien aux victimes; le Département des services d’exécution des mesures pénales pour ce qui concerne les frais de pension et de logement des détenus, le solde étant conservé par le gérant «comme incitation à offrir de plus en plus de possibilités intéressantes et à générer des revenus valables». Aucune indication n’est fournie au sujet du niveau des paiements versés aux prisonniers pour le travail accompli. Les prisonniers «reçoivent une allocation plutôt qu’un salaire», laquelle «peut varier en fonction du niveau de compétence et d’aptitude et en fonction du comportement général du prisonnier» et «vise à encourager la réinsertion plutôt que la dimension commerciale de la politique du travail». Tous les prisonniers ont droit à une prestation de base; ceux qui reçoivent uniquement cette prestation de base sont ceux qui ont refusé tout net de travailler, un tel refus étant contraire à la loi sur les services d’exécution des mesures pénales. Les prisonniers sont tenus de travailler environ six heures par jour; aucune information n’a été communiquée concernant d’autres conditions de travail ou quelque couverture de sécurité sociale.

Le Queensland compte deux centres d’exécution des peines en exploitation privée, le Centre Arthur Gorrie et le Centre Borallon, qui fonctionnent sous mandat du Département des services d’exécution des mesures pénales. Alors que le gouvernement déclare qu’il n’existe pas de mesure dissuasive ou sanction pour forcer les prisonniers à travailler, le «refus de travailler est considéré comme le refus de participer pleinement au processus de réinsertion autogéré», et «l’attitude au travail fait partie du processus d’administration de la peine». Les niveaux de rémunération sont compris entre 2,04 et 3,99 dollars australiens par jour pour des postes non qualifiés à qualifiés, avec une prime d’encouragement allant jusqu’à 100 pour cent du taux de base et un plafond global de 55,86 dollars australiens par semaine. En moyenne, les détenus travaillent six heures par jour, cinq jours par semaine. Tous les coûts afférents au logement, à la nourriture, à la santé, aux soins dentaires et à la fourniture de toute une série de possibilités d’épanouissement et d’éducation sont pris en charge par l’Etat. Il n’est versé aux détenus aucune prestation de sécurité sociale. Sous réserve de contraintes physiques imposées par mesure de sécurité, tous les centres d’exécution des peines sont tenus d’observer les dispositions légales de sécurité et de santé au travail. La réparation des accidents du travail ne s’applique pas aux détenus, mais une «prestation de confort» pour l’achat d’articles essentiels tels que le dentifrice et le savon est versée aux détenus qui sont dans l’incapacité de travailler.

La commission a pris bonne note de ces indications. Se référant à nouveau aux explications figurant dans son observation générale de cette année au titre de la convention, la commission espère que le gouvernement réalisera que la privatisation du travail pénitentiaire transgresse les conditions spécifiques prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention pour l’exemption du travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de la convention. Pour être compatible avec la convention, le travail en milieu pénitentiaire privatisé exige donc le libre consentement des travailleurs concernés; dans le cas d’une main-d’oeuvre captive n’ayant pas d’autre accès au libre marché du travail, le «libre» consentement à une forme d’emploi se présentant de prime abord comme contraire à la lettre de la convention doit être corroboré par des conditions d’emploi non tributaires de la situation captive, donc proches de celles d’une relation de travail libre.

Aucune de ces conditions ne semble être réunie à ce jour en Australie, où le travail des détenus pour des entreprises privées (de même que pour des établissements publics) est obligatoire, comme dans le Victoria ou, en tout cas, un critère «dans le processus d’administration de la peine» comme dans le Queensland, et où les taux salariaux des détenus pour ce travail sont disproportionnés par rapport aux taux fixés par sentence arbitrale, même en tenant compte des déductions éventuelles pour le gîte et le couvert, et les prisonniers qui travaillent sont privés des prestations de sécurité sociale et des indemnités en cas d’accident du travail et de maladie professionnelle.

La commission espère que les mesures nécessaires seront prises pour assurer le respect de la convention et que le gouvernement sera bientôt en mesure de faire état de mesures prises à cet effet.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Se référant à ses commentaires antérieurs relatifs à la démission des membres de l'armée de terre, de la marine et de l'armée de l'air, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport reçu en octobre 1996, ainsi que de la documentation en annexe concernant la démission des aviateurs et des marins. Elle relève en particulier que le gouvernement indique que la marine royale australienne (RAN) et les forces aériennes royales australiennes (RAAF) ne recrutent ni ne forment plus d'apprentis, et qu'il n'existe en conséquence plus de texte en vigueur à ce sujet. Le gouvernement déclare que les membres actuels de la RAN et de la RAAF qui ont été formés comme apprentis avant que ces deux armées ne mettent un terme à cette formation sont désormais dégagés de leurs obligations à leur demande dans les mêmes conditions que tout autre engagé volontaire de ces deux armées. La commission a précédemment relevé que, conformément au règlement des forces aériennes (art. 92 1) a) ii) et aux instructions de l'armée de l'air (DI (AF) PERS 6-1), toute personne faisant son apprentissage dans l'aviation s'engage à servir neuf ou quinze ans. Elle saurait gré au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport si ces dispositions ont fait l'objet d'une abrogation formelle et, dans l'affirmative, de lui communiquer copie de tout texte pertinent.

Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans ses rapports qui lui sont parvenus en octobre 1996 et septembre 1998. Elle prend également note d'une communication reçue le 21 août 1998 du Conseil australien des syndicats (ACTU), qui contenait des déclarations concernant le travail pénitentiaire dans les prisons privées au Victoria se rapportant à la l'application de la convention, ainsi que de la réponse du gouvernement à ces allégations, parvenue le 6 novembre 1998.

Articles 1 a) et 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. 1. L'ACTU indique qu'il existe trois prisons privées dans l'Etat de Victoria, où sont incarcérés 47 pour cent de tous les détenus de cet Etat, et où tous les détenus de moins de 65 ans doivent y travailler sous peine de sanction. Le conseil ajoute qu'à la prison de femmes Deer Park les détenues qui refusent de travailler sont transférées dans les quartiers les moins désirables; à la prison de Fulham et de Port Phillip, les détenus perdent leurs avantages s'ils refusent de travailler. Il déclare enfin que dans toutes les prisons privées le travail est placé sous le contrôle d'opérateurs privés (et non de l'autorité publique) et que les détenus doivent travailler pour une entreprise privée (l'entreprise gérant la prison). Le taux de rémunération journalier serait de 6,50 dollars australiens ou 7,50 dollars australiens dans les prisons privées, contre un minimum de près de 75 dollars australiens pour les travailleurs libres.

2. Le gouvernement indique dans sa réponse que, tant dans les prisons publiques que dans les prisons privées, le travail pénitentiaire est placé sous la surveillance et le contrôle d'une autorité publique et que la garde des prisonniers reste la prérogative de l'Etat, qui en conserve la responsabilité globale; l'Office of the Correctional Services Commissioner (OCSC) garde la responsabilité directe du calcul des peines, de l'évaluation des prisonniers ainsi que de la classification et de l'attribution des niveaux de sécurité. En ce qui concerne les prisons privées, le ministre, le directeur de la Chancellerie et toute personne autorisée par lui ont libre accès à la prison, aux détenus, au personnel carcéral et à tous les documents pertinents qui sont en la possession des opérateurs privés, afin de veiller à ce que ces derniers respectent toutes lois et obligations contractuelles pertinentes, et que la sécurité et la santé des détenus soient assurées.

Les détenus des prisons privées seraient tenus de travailler dans le cadre des activités professionnelles prévues dans ces établissements en vertu de la "Victorian Corrections Act". Seuls les détenus malades et les détenues en état de grossesse ou s'occupant d'un enfant en bas âge ne seraient pas tenus de travailler. Les taux de rémunération et les horaires de travail seraient établis par l'OCSC. Les seuls détenus à ne percevoir aucun salaire sous quelque forme que ce soit seraient ceux ayant directement refusé de travailler, en infraction à la "Corrections Act", les "salaires" des détenus s'entendant plus comme des "allocations" pour coopération avec le système carcéral. Les détenus dans l'incapacité de travailler pour cause de maladie, de maternité, d'invalidité ou en raison de leur âge percevraient des "salaires" réduits. Les prisonniers ne seraient pas couverts par la "State Workers Compensation Scheme" ni admis à bénéficier de la plupart des prestations de sécurité sociale.

Le gouvernement indique que les bénéfices dégagés des activités professionnelles en milieu carcéral ne sont pas acquis aux opérateurs privés. L'Accord sur les services pénitentiaires conclu entre le gouvernement du Victoria et chaque opérateur privé prescrit à ce dernier de veiller à ce que toute recette provenant des activités professionnelles (en milieu carcéral) soit séparée des recettes de l'entrepreneur et de veiller à ce que tout bénéfice dégagé par les activités professionnelles (en milieu carcéral) soit réinvesti dans ces activités ou soit dépensé de telle autre manière que le directeur de la Chancellerie jugera opportune.

Selon le gouvernement, il n'est pas opportun de comparer les taux de rémunération des prisonniers avec ceux des travailleurs libres effectuant le même travail, sans tenir compte du contexte dans lequel s'effectue le travail pénitentiaire. L'activité professionnelle en milieu carcéral a pour but d'apporter aux détenus des capacités et une expérience professionnelles; elle s'inscrit dans le processus de leur réinsertion en vue de leur réintégration dans le marché du travail, une fois libérés.

3. Dans son rapport de 1996, le gouvernement se référait de manière détaillée au travail en prison dans les prisons non étatiques d'Australie-Méridionale, de Nouvelle-Galles du Sud, du Queensland et du Victoria, aucune prison privée n'existant dans le Territoire du Nord. Dans son rapport parvenu en septembre 1998, le gouvernement se réfère aussi à la législation appliquée par la Queensland Correction Services Commission et déclare que le travail pénitentiaire au Queensland rentre dans la dérogation prévue à l'article 2, paragraphe 2 c), que les détenus soient incarcérés dans un établissement de l'Etat ou dans un centre pénitentiaire privatisé. Il déclare également que, s'il n'existe pas de mesure dissuasive ou de sanction incitant les prisonniers à accepter de travailler, le refus de travailler serait considéré comme un refus de participer pleinement au processus de réinsertion autodirigée. Le gouvernement déclare encore que la "Queensland Corrective Services (Administration) Act de 1988" -- établissant les conditions de gestion et de fonctionnement de centres pénitentiaires gérés par des organismes privés agissant pour le compte de la Queensland Corrective Services Commission -- implique que les détenus des prisons gérées contractuellement sont "sous la surveillance et le contrôle des autorité publiques", conformément aux dispositions de cet article de la convention.

4. La commission rappelle qu'un travail ou un service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire est exclu du champ d'application de la convention aux deux conditions suivantes: "que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées". Le fait, donc, que le prisonnier reste à tout moment sous la supervision et le contrôle d'une autorité publique ne dispense pas en soi de la deuxième nécessité, à savoir qu'il ne doit pas être "concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées". La convention ne prévoit aucune exception à cet égard: l'interdiction est absolue et doit être respectée sans considération de la manière dont le revenu excédent attribué à l'entité de gestion de la pension privée est, à son tour, distribué. La commission fait observer, au paragraphe 98 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, que cette interdiction porte non seulement sur le travail en dehors de l'établissement pénitentiaire, mais s'applique également au travail dans des ateliers que des entreprises privées font fonctionner à l'intérieur des prisons et que, a fortiori, elle s'applique à tout travail organisé dans des prisons privées.

L'utilisation du travail de condamnés dans de tels ateliers ne serait compatible avec la convention que dans la mesure où elle serait soumise au libre consentement des prisonniers concernés et à des garanties quant au paiement d'un salaire normal, etc. La commission note que la rémunération accordée aux prisonniers est dix fois inférieure au salaire minimum. Même si les prisonniers acquièrent simultanément des capacités et l'expérience du travail, comme l'affirme le gouvernement, le taux de cette rémunération demeure nettement plus bas que celui des travailleurs en cours de formation. La commission observe également qu'un tel taux de rémunération ne saurait inciter les prisonniers à un travail productif. La pratique de la notion de surveillance et de contrôle des autorités publiques devrait également être examinée en profondeur, car la convention ne permet pas une délégation totale de la supervision ou du contrôle à une entreprise privée.

5. Se référant aux paragraphes 97 et 98 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé et aux paragraphes 116 à 125 de son rapport général de 1998 concernant le travail dans les prisons gérées par le secteur privé, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations, dans son prochain rapport, sur les mesures adoptées ou envisagées pour garantir, tant en droit que dans la pratique, que les détenus travaillant pour des employeurs privés se sont offerts de plein gré, sans être soumis à des pressions ou à la menace d'une peine quelconque et avec les garanties susmentionnées. Elle prie le gouvernement, compte tenu des exigences de la convention et des commentaires formulés ici, de continuer à communiquer des informations sur le travail dans les prisons non étatiques dans les juridictions autres que celle du Victoria.

[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 1999.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

Se référant à ses commentaires antérieurs relatifs à la démission des membres de l'armée, de la marine et des forces aériennes, la commission note les informations fournies par le gouvernement dans son rapport.

1. Armée. La commission a noté les textes régissant les conditions de service en retour (Manual of Personnel Administration (MPA), vol. 1, chap. 15).

2. Marine. La commission note les informations du gouvernement selon lesquelles le système RAN d'apprentissage dans la marine royale australienne a cessé d'exister en novembre 1993. Elle prie le gouvernement de fournir copie des textes qui régissent actuellement l'engagement, la formation et la démission des apprentis à leur demande.

3. Aviation. Dans ses commentaires précédents, la commission s'est référée à l'engagement, à la formation et à la démission des apprentis à leur demande. Elle avait observé notamment que, conformément au règlement de l'armée, la période d'engagement initiale d'un apprenti (qui pouvait s'engager à l'âge de 15 ans avec le consentement de ses parents) pouvait être de neuf ou quinze ans, alors que la durée de la formation dispensée à un apprenti s'élevait à quatre ans (instruction DI(AF) PERS 6-1). La commission avait relevé l'indication du gouvernement selon laquelle un régime de remplacement était en discussion au sein de l'armée de l'air et avait exprimé l'espoir que le gouvernement ferait connaître les mesures adoptées ou envisagées pour préserver le droit des apprentis de quitter le service après un certain temps, dans une relation raisonnable avec la durée de la formation reçue.

La commission note l'indication du gouvernement dans son dernier rapport, selon laquelle l'apprentissage professionnel dans les forces royales aériennes a cessé en 1992, que les engagés dans lesdites forces doivent avoir entre 17 et 42 ans, que les mineurs de moins de 18 ans peuvent s'engager avec le consentement écrit d'un de leurs parents ou de leur tuteur et qu'ils peuvent quitter le service dans les 90 jours de leur engagement sans avoir à fournir de motif.

La commission prie le gouvernement de fournir copie des textes qui régissent actuellement l'engagement, la formation et la démission des apprentis à leur demande.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

Se référant à ses commentaires antérieurs relatifs à la démission du personnel de l'armée, de la marine et des forces aériennes, la commission note les informations fournies par le gouvernement dans son rapport de mars 1992 de même que les documents figurant en annexe portant sur l'engagement et la démission des soldats, des marins et des aviateurs.

La commission prend note de l'indication du gouvernement selon laquelle les forces armées se sont efforcées de calculer sous une forme cohérente la durée du service obligatoire pour le personnel ayant bénéficié d'une formation prolongée et très onéreuse, financée par des fonds publics. Il s'agissait en l'occurrence de rendre la période de service obligatoire directement proportionnelle à la période de formation et à son coût d'ensemble, afin d'éviter d'interrompre le flux des membres du personnel appelé en remplacement, disposant des qualifications et de l'expérience requises par les Services, de façon à ne pas affecter l'efficacité opérationnelle et les perspectives de carrière et d'assurer l'utilisation la plus efficace des ressources limitées affectées à la formation.

1. Armée. La commission a pris note des conditions minima de service et des périodes de préavis des régimes d'engagement non limités adoptées le 1er juillet 1988. Elle prie le gouvernement de fournir un exemplaire des textes relatifs aux conditions de service en retour (c'est-à-dire MPA, vol. I, chap. 15).

2. Marine. La commission relève que la période minimum d'engagement pour un apprenti est de huit ans. La commission souhaite que le gouvernement fournisse des précisions sur le genre d'instruction et de formation reçues par les apprentis ainsi que sur la durée moyenne et maximum de cette instruction/formation.

3. Aviation. La commission a noté précédement que, conformément au règlement des forces aériennes (art. 92 1) a) ii)) et aux instructions de l'Armée de l'air (DI(AF)PERS 6-1)), toute personne faisant son apprentissage dans l'aviation s'engage à servir neuf ou quinze ans et qu'elle peut être recrutée en tant qu'apprenti à l'âge de 15 ans si ses parents l'y autorisent. Se référant aux paragraphes 67 à 76 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé où il est indiqué, en particulier, que le droit d'un travailleur au libre choix de son emploi demeure inaliénable, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures adoptées ou envisagées pour préserver le droit des apprentis, de se libérer du service après une période de temps raisonnable, en ce qui concerne notamment ceux âgés de moins de 18 ans à l'époque de leur engagement.

La commission prend note de l'indication du gouvernement dans son rapport, selon laquelle la période d'engagement initiale de neuf ans est raisonnable, ainsi que l'attestent le grand nombre de candidats qui, en s'engageant dans l'armée de l'air, ont conscience que leur formation entraîne l'obligation d'un service. Le gouvernement déclare également que cette période correspond aux périodes effectuées dans d'autres armes et que les candidats âgés de moins de 18 ans ont des entretiens confidentiels et contresignent l'acceptation de leurs parents. Se référant également au régime de préavis d'engagement adopté en septembre 1989, le gouvernement ajoute que ce régime s'applique aux apprentis dont la période d'engagement initiale de neuf ans est achevée.

La commission observe que, conformément aux règlements de l'armée, la période d'engagement initiale pourrait être non seulement de neuf ans mais de quinze ans alors que la durée de la formation dispensée à un apprenti s'élève à quatre ans (Instruction DI (AF) PERS 6-1).

La commission relève l'indication du gouvernement selon laquelle un régime de remplacement est en discussion à l'Armée de l'air. La commission exprime l'espoir que le gouvernement fera connaître les mesures adoptées ou envisagées pour préserver le droit des apprentis de quitter leur service après un certain temps, dans une relation raisonnable avec la durée de la formation qu'ils ont reçue.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1990, publiée 77ème session CIT (1990)

1. Dans ses commentaires précédents, la commission s'est référée à différents programmes d'engagement et de démission dans l'armée australienne. En ce qui concerne les forces aériennes (Royal Australian Air Force), la commission avait noté que le droit de démissionner sur simple demande de l'intéressé n'est en principe pas accordé aux soldats de l'armée de l'air avant qu'ils n'aient accompli 20 années de service, à l'exception de certains soldats engagés en vertu d'un programme d'engagement permanent, introduit le 1er août 1987, qui peuvent démissionner après 12 années de service avec un préavis de trois mois; l'insatisfaction ou le mécontentement concernant le service ne saurait jamais être considéré comme une raison acceptable pour démissionner (articles 9 et 40 à 43 des Instructions concernant la démission des soldats de l'armée de l'air DI (AF) PERS 7-1). Pour ce qui est de la marine australienne, la commission avait noté que seuls les marins qui ont accompli 20 ans de service naval feront l'objet d'une considération spéciale lorsqu'ils demanderont à démissionner avant l'expiration de leur engagement (article 10 des Instructions DI (N) PERS 43-8).

La démission sur simple demande de l'intéressé avant l'expiration normale d'un engagement appartient au pouvoir discrétionnaire du chef du personnel de chacune des trois armes, mais ce pouvoir est limité à certains cas énumérés dans le cadre des instructions de la marine et des forces aériennes (article 2 de DI (N) PERS 43-8 et articles 46 à 48 de DI (AF) PERS 7-1).

La commission avait prié le gouvernement d'indiquer s'il était envisagé d'étendre le programme d'engagement permanent introduit pour certains soldats de l'armée de l'air à tous les soldats de l'armée de l'air en général, si l'introduction proposée d'une période de service illimitée pour tous les enrôlés de l'armée australienne a été mise en vigueur et si des arrangements similaires étaient envisagés ou effectués pour la marine et les forces aériennes. La commission avait également demandé au gouvernement d'envoyer des exemplaires de tous les instruments légaux pertinents et de faire rapport sur les cas dans lesquels les chefs du personnel avaient exercé les pouvoirs discrétionnaires susmentionnés.

La commission note avec intérêt l'indication donnée par le gouvernement dans son rapport selon laquelle la Royal Australian Air Force n'a pas choisi d'étendre le programme d'engagement permanent à tout le personnel mais qu'elle est en train d'introduire "un système d'engagement avec préavis", en vertu duquel les soldats de l'armée de l'air (à l'exception des stagiaires), ayant accompli de six à douze ans de service, peuvent choisir de démissionner avec un préavis de six mois. La commission note également avec intérêt que le programme d'enrôlement de période illimitée de l'armée australienne et le programme de la marine qui est similaire sont entrés en vigueur, respectivement, le 1er juillet 1988 et le 1er janvier 1989. Le gouvernement indique aussi que les chefs du personnel ont exercé leur pouvoir discrétionnaire en matière de démission sur simple demande avant l'expiration normale d'une période de service dans un certain nombre de cas qui n'ont cependant pas été enregistrés.

La commission note que les modifications proposées aux conditions de service des soldats de l'armée de l'air comportent l'introduction d'un engagement avec préavis qui s'appliquerait entre la sixième et la douzième année de carrière, et la démission sur demande de l'intéressé serait normalement accordée à la fin du préavis de six mois au cours de l'engagement initial de trois ou six ans. Aucun droit général de démission sur demande ne serait accordé, mais une plus grande flexibilité serait introduite dans la nouvelle politique afin de permettre la démission dans des cas spéciaux ou exceptionnels.

La commission note cependant également que, selon la déclaration du gouvernement et en vertu du point 36 des nouvelles conditions de service proposées, il n'existe pas de droit de démission sur demande pour les soldats stagiaires dans l'armée de l'air au cours de leur période initiale d'enrôlement ou pour les autres soldats de l'armée de l'air au cours de leurs premières six années de service, excepté dans des circonstances très inhabituelles auxquelles les exigences du service et la force obligatoire des contrats doivent se plier; l'insatisfaction ou le mécontentement sont rarement acceptés comme des raisons valables de démission. A ce propos, la commission note qu'en vertu des Instructions DI (AF) PERS 6-1 la période d'enrôlement d'un soldat stagiaire de l'armée de l'air sera de neuf ou de 15 ans et, selon l'annexe des mêmes instructions, une personne peut être enrôlée comme stagiaire avec le consentement de ses parents ou de son tuteur à l'âge de 15 ans. Se référant aux paragraphes 67 à 76 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, où elle a notamment indiqué que le droit du travailleur au libre choix de son emploi reste inaliénable, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises ou envisagées en vue de préserver le droit des stagiaires, spécialement de ceux engagés avant l'âge de 18 ans, de quitter le service de leur propre initiative après un délai raisonnable. La commission prie également le gouvernement de fournir une copie des instructions sur les conditions de service des soldats de l'armée de l'air dès leur adoption, ainsi que des programmes d'enrôlement dans l'armée et dans la marine qui sont entrés en vigueur, respectivement, en juillet 1988 et janvier 1989.

2. La commission a noté les informations fournies par le gouvernement concernant la modification de la loi de 1985 sur l'Electricité du Queensland (continuité de l'approvisionnement), en vertu de la loi no 1 de 1988.

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