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Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

La commission prend note de la réponse du gouvernement aux observations formulées conjointement par l’Organisation internationale des employeurs, la Chambre nationale de commerce et des services de l’Uruguay et la Chambre des industries de l’Uruguay en 2018. Elle prend également note des observations de l’Assemblée intersyndicale des travailleurs – Convention nationale des travailleurs, reçues le 31 août 2022, qui mentionnent deux épisodes au cours desquels la police aurait fait usage de violence contre des manifestants. La commission note que, dans sa réponse, le gouvernement indique que les manifestations étaient autorisées dans le cadre de la loi, que la police est intervenue pour dégager l’entrée du port et de la gare routière de Montevideo, qui étaient bloqués par les manifestants, que les travailleurs arrêtés ont été immédiatement relâchés et que le ministère de l’Intérieur a reconnu qu’un des policiers avait agi avec excès. La commission prie le gouvernement de veiller à ce que l’intervention de la force publique dans les manifestations syndicales soit dûment proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il s’agit de contrôler.
Article 3 de la convention. Occupation du lieu de travail et droit de la direction de l’entreprise d’y pénétrer dans des contextes de conflits du travail. Rappelant que l’exercice du droit de grève et l’occupation du lieu de travail doivent respecter la liberté de travail des non-grévistes, ainsi que le droit de la direction de l’entreprise de pénétrer dans les locaux de l’entreprise, la commission et le Comité de la liberté syndicale (cas no 2699) ont demandé au gouvernement de soumettre au Parlement un projet visant à réglementer l’occupation des entreprises d’une manière pleinement conforme à la convention et de faire rapport sur les progrès concrets accomplis à cet égard. La commission prend note avec intérêt l’information du gouvernement selon laquelle, le 9 juillet 2020, la loi no 19.889 de «urgente consideración» (loi à examiner de toute urgence) (LUC) a été promulguée, dont l’article 392 dispose que «l’État garantit l’exercice pacifique du droit de grève, le droit des non-grévistes d’accéder aux établissements respectifs et d’y travailler, et le droit de la direction des entreprises d’entrer librement dans les locaux».
Projet de loi sur la personnalité juridique. La commission note que, dans son rapport sur l’application de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, le gouvernement indique qu’à la suite d’échanges au sein d’une commission tripartite spéciale, il a élaboré un projet de loi sur la personnalité juridique des organisations professionnelles, qu’il a soumis au Parlement le 3 août 2021 et qui est actuellement examiné au Sénat. La commission renvoie au commentaire qu’elle formule sur ce projet de loi dans son commentaire sur l’application de la convention no 98.

Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

La commission prend note des observations conjointes de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), de la Chambre des industries de l’Uruguay (CIU) et de la Chambre nationale de commerce et des services de l’Uruguay (CNCS), reçues les 31 août 2016 et 31 août 2018, relatives aux questions traitées dans la présente observation. La commission prend note des observations conjointes additionnelles de l’OIE, de la CIU et de la CNCS reçues le 28 novembre 2018. Elle prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.
Article 3 de la convention. Occupation du lieu de travail et droit de la direction de l’entreprise d’y pénétrer dans des contextes de conflits du travail. Dans ses précédents commentaires, la commission avait accueilli favorablement la signature, en mars 2015, d’un accord tripartite engageant le gouvernement et les partenaires sociaux à entamer un dialogue constructif sur les questions identifiées dans le rapport du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2699. La commission avait exprimé le ferme espoir que l’accord faciliterait l’amorce d’un processus de dialogue tripartite fructueux à l’occasion duquel seraient prises, en tenant compte des commentaires du Comité de la liberté syndicale et de la présente commission sur la question de l’occupation du lieu de travail, des mesures concrètes permettant de mettre la législation et la pratique en pleine conformité avec la convention.
La commission note que, dans leurs observations conjointes, l’OIE, la CIU et la CNCS affirment que: i) dans le cadre du dialogue tripartite qui a suivi l’accord de 2015, le gouvernement, en 2016 et 2017, a soumis à la discussion tripartite deux propositions normatives dont le contenu en matière d’occupation du lieu de travail n’est pas conforme aux observations et recommandations des organes de contrôle de l’OIT; ii) l’adoption en mars 2017 du décret 76/017 sur la libre circulation dans les rues, sur les routes et sur les chemins éloigne encore davantage le gouvernement de ses engagements, puisque ce décret exclut les grèves de son champ d’application; iii) il n’existe pas dans le pays de piquets de grève ou d’occupations d’entreprises qui se déroulent de manière pacifique puisque, dans l’immense majorité des cas, ces actes donnent lieu à des menaces et/ou des violences physiques et que, dans tous les cas, ils s’accompagnent à tout le moins de violences morales; iv) tous les tribunaux civils qui ont examiné les recours en amparo (action protectrice) interjetés par les travailleurs pour défendre leur liberté de travail ont statué en leur faveur; v) en revanche, dans le cadre du décret 165/2006 qui régit les démarches que les syndicats doivent entreprendre pour occuper un poste de travail, il n’y a eu aucun cas où un employeur ait réussi à faire libérer son entreprise par l’autorité du travail; c’est pourquoi ce décret qui considère l’occupation de l’entreprise comme une modalité de droit de grève devrait être abrogé. La commission note que les organisations d’employeurs ont en outre déclaré que le gouvernement manque depuis plus de huit ans à son obligation de soumettre au Parlement un projet de loi sur les observations des organes de contrôle en matière d’occupation des lieux de travail et que, devant l’impossibilité de parvenir à un accord tripartite sur cette question, il incombe au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme à cette situation de non-conformité. La commission note par ailleurs que le gouvernement déclare qu’en cas d’occupation d’un lieu de travail, c’est le système de justice civile qui est compétent pour connaître des recours en amparo formés par des travailleurs qui estiment que leur liberté de travail a été violée et que, à cet égard, il existe une jurisprudence constante protégeant la liberté du travail.
La commission note en outre que, dans le cadre des discussions tripartites qui ont suivi l’accord de mars 2015, le gouvernement a soumis aux partenaires sociaux deux propositions de modifications normatives en septembre 2016 et mars 2017. Elle note en particulier que la proposition de mars 2017 porte sur un mécanisme pour une procédure de prévention et de résolution des conflits qui prévoit spécifiquement: i) dans les cas où les piquets de grève ou les occupations des entreprises ne respecteraient pas la procédure prévue de prévention et de règlement des conflits, le pouvoir du ministère du Travail, des Migrations et de la Sécurité sociale (MTSS) et/ou du ministère de l’Intérieur d’intimer, dans un délai impératif de vingt-quatre heures, la levée des piquets de grève et de l’occupation, avec recours éventuel à la force publique; et ii) l’obligation que les piquets de grève mis en place en tant que mesure syndicale aient un comportement pacifique, ne troublent pas l’ordre public, et permettent la libre circulation et le libre accès, étant entendu que l’intervention du ministère de l’Intérieur et de la force publique peut être possible si cette obligation n’est pas respectée. La commission constate toutefois que la proposition gouvernementale de mars 2017: i) ne semble pas envisager de modification concernant les occupations d’entreprise qui se dérouleraient après la finalisation de la procédure de prévention et de résolution des conflits ; ii) ne prévoit pas explicitement l’assujettissement de ces occupations à l’obligation de respecter la liberté de travail des non-grévistes. A ce sujet, la commission réitère que «tant que la grève reste pacifique, les piquets de grève et l’occupation des locaux devraient être permis. Les limitations aux piquets de grève et à l’occupation des locaux ne peuvent être acceptées que si les actions perdent leur caractère pacifique. Il est cependant nécessaire, dans tous les cas, de garantir le respect de la liberté de travail des non-grévistes et le droit de la direction de pénétrer dans les locaux.» (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 149).
La commission observe finalement que: i) Assemblée intersyndicale des travailleurs - Convention nationale des travailleurs (PIT-CNT), tout en étant d’accord avec l’initiative visant à convenir d’une procédure générique de prévention des conflits dans les contextes où il n’en existe pas, ne soutient pas la modification de la législation en matière d’occupation des entreprises proposée par le gouvernement, car elle considère que cette question relève de la négociation collective; et ii) comme indiqué dans leurs observations adressées à la commission, les organisations patronales qui ont soumis un projet alternatif de modifications législatives ne soutiennent pas le projet du gouvernement, considérant en particulier que les occupations du lieu de travail ne constituent pas une forme de droit de grève et que le décret qui les réglemente devrait être dérogé.
Compte tenu de ce qui précède, la commission note que, dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord tripartite de mars 2015, des consultations approfondies ont eu lieu sur la réforme de la législation relative aux relations collectives du travail, avec un échange de vues sur un certain nombre de projets de textes. La commission note toutefois que ces efforts n’ont pas débouché sur un consensus tripartite quant à la question spécifique de l’occupation des entreprises et que, à ce jour, aucun projet de loi n’a été présenté pour répondre à toutes ses demandes. Soulignant à nouveau la pertinence des lignes directrices établies par la jurisprudence nationale à cet égard, la commission prie le gouvernement, après avoir soumis le texte à la consultation des partenaires sociaux, de soumettre au Parlement un projet de réglementation des occupations d’entreprises dans le plein respect de l’accord. Rappelant que le gouvernement peut continuer à compter sur l’assistance technique du Bureau, la commission exprime le ferme espoir qu’il pourra faire état de progrès concrets à cet égard dès que possible.

Observation (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

La commission prend note des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), de la Chambre des industries de l’Uruguay (CIU) et de la Chambre nationale de commerce et des services de l’Uruguay (CNCS) relatives aux questions traitées dans la présente observation, reçues le 1er septembre et le 1er décembre 2015.
La commission prend également note des observations de caractère général de l’OIE reçues le 1er septembre 2015.
Article 3 de la convention. Occupation du lieu de travail et droit de la direction de l’entreprise de pénétrer dans les locaux de cette dernière dans des contextes de conflits du travail. Dans son rapport, le gouvernement indique que, suivant les avis du Comité de la liberté syndicale et de la commission, l’occupation du lieu de travail est une modalité du droit de grève, pour autant qu’elle se déroule de manière pacifique. Le gouvernement souligne que, en cas de conflit avec les droits des travailleurs non grévistes ou avec la direction de l’entreprise, le pouvoir judiciaire intervient dans le cadre de la compétence résiduelle des tribunaux civils qui ont constitué une jurisprudence allant majoritairement dans le sens d’une défense rapide, par des actions protectrices (amparo), du droit de travailler, allant au-delà des avis des organes de contrôle de l’OIT, vu qu’elles accordent non seulement l’autorisation de pénétrer dans les locaux, mais aussi de faire évacuer le lieu de travail. Le gouvernement indique que, en mars 2015, quelques jours après son entrée en fonction, il a signé un accord avec les représentants des travailleurs (Assemblée intersyndicale des travailleurs – Convention nationale des travailleurs, PIT-CNT) et des employeurs (Chambre nationale de commerce et de services et Chambre d’industrie de l’Uruguay) en vue d’entamer un dialogue constructif sur les questions mentionnées dans le rapport du Comité de la liberté syndicale dans le cadre du cas no 2699, en particulier pour ce qui a trait à la loi no 18566 sur la négociation collective. Le gouvernement indique que, sur proposition des organisations d’employeurs, la question de l’occupation des lieux de travail sera également discutée. La commission prend note avec intérêt de cet accord tripartite et du processus de dialogue entamé à cette occasion. Elle note que, dans leurs observations, l’OIE, la CIU et la CNCS indiquent que, bien que deux réunions aient été organisées à la suite de cet accord tripartite et qu’elles attendent de voir quels seront les résultats de cette négociation aucun progrès n’a été accompli et la violation des normes fondamentales du travail persiste. De même, la commission note que le gouvernement a demandé au BIT la participation d’un expert pour collaborer au travail prévu pour les mois à venir dans le cadre tripartite.
La commission accueille favorablement l’accord tripartite conclu entre le gouvernement et les partenaires sociaux en mars 2015 et espère fermement qu’il constitue l’amorce d’un processus de dialogue tripartite fructueux à l’occasion duquel seront prises, en tenant compte des commentaires du Comité de la liberté syndicale et de la Commission sur la question de l’occupation des lieux de travail, des mesures concrètes afin de mettre la législation et la pratique en totale conformité avec la convention. Notant avec préoccupation que les organisations d’employeurs indiquent qu’il n’y a pas eu de progrès depuis la signature de l’accord tripartite, la commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’évolution du dialogue social et sur ses résultats.

Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Article 3 de la convention. Occupation du lieu de travail et droit de la direction de l’entreprise de pénétrer dans les locaux de cette dernière dans des contextes de conflits du travail. La commission observe que, par communication du 31 août 2012, l’Organisation internationale des employeurs (OIE), la Chambre de l’industrie de l’Uruguay (CIU) et la Chambre nationale de commerce et de services de l’Uruguay (CNCS) ont fait part de leurs commentaires sur l’application de la convention, en rappelant les recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2699 et en indiquant que: 1) contrairement à ce qui avait été dit par le comité en ce qui concerne l’occupation du lieu de travail, et en totale opposition avec ce qui lui était demandé, le gouvernement n’a rien fait dans la pratique, et les normes en vigueur ne respectent pas les principes de la convention; 2) le fait de veiller au respect de la pratique des principes en question ne doit pas passer par la médiation et les efforts déployés pour canaliser un conflit; 3) le gouvernement doit protéger la liberté du travail et celle-ci ne se protège pas par la médiation; 4) soutenir qu’en ayant recours à la justice le gouvernement se plie à ce qu’ordonnent les organes de contrôle ne résiste pas à l’analyse, et le fait de recourir obligatoirement à la justice pour protéger les droits des employeurs découle de ce que le gouvernement ne respecte ni la loi ni le mandat de l’OIT; 5) l’article 57 de la Constitution nationale garantit le droit de grève mais exige sa réglementation par la loi et c’est ce qu’invoquent les employeurs; 6) les organisations parties à l’affaire susmentionnée devant le Comité de la liberté syndicale font leur la position de l’OIE en ce qui concerne le droit de grève; 7) les occupations des lieux de travail continuent à se succéder et les employeurs doivent recourir à la justice car le gouvernement ne protège par leurs droits; face à l’inaction et à l’omission flagrante du gouvernement de satisfaire à ce qu’ordonnent les organes de contrôle, c’est l’administration de la justice qui doit protéger l’employeur; 8) le jugement no 184/12 de la cour d’appel du troisième degré de juridiction civile, en date du 15 août 2012 et qui porte sur l’occupation d’une entreprise, stipule que: a) l’article 6 du décret no 165/06 – auquel il est fait objection dans le cadre de la plainte devant le Comité de la liberté syndicale – ne saurait constituer un moyen d’obtenir le même résultat que par des mesures de protection et peut encore moins être considéré comme un moyen approprié pour protéger les droits impliqués; b) les droits humains reconnus aux articles 7, 28, 32 et 36 de la Constitution ont été violés; c) les situations de fait (telles que l’occupation du lieu de travail) portent atteinte à la jouissance de la liberté, de la sécurité, du travail et de la propriété, à la disponibilité des documents d’identité des particuliers et à la liberté de travail, que ce soit dans l’agriculture, l’industrie, le commerce, les professions libérales et toute autre activité légale; d) les droits humains violés en pareil cas résultent de l’absence de prises de mesures par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale (MTSS) pour reconnaître l’occupation et au fait que le MTSS n’a pas pour objet de se faire l’avocat ou le procureur des travailleurs ou des employeurs, des usurpateurs ou des propriétaires, des créanciers ou des débiteurs, et doit agir spontanément sans que l’on soit tenu de le lui demander, et sans qu’il soit nécessaire que les victimes réclament la prise de mesures; et 9) le jugement du tribunal est précis quant aux actes du ministère du Travail et démontre le manque absolu de protection effective et juridique des employeurs, et l’argument selon lequel le gouvernement ne s’est jamais refusé à obéir à un ordre de la justice n’est pas valable car, si la justice n’est pas obéie, on ne se trouve pas en présence d’un gouvernement démocratique.
La commission prend note du fait que le gouvernement indique dans son rapport que: 1) contrairement à ce que soutiennent l’OIE, la CIU et la CNCS, le taux de conflit en Uruguay est aujourd’hui le plus faible de ces dernières années, selon les chiffres d’entités indépendantes, tels que l’indice des conflits du travail établi et suivi par le Programme des relations du travail de l’Université catholique de l’Uruguay; 2) s’agissant de la protection de la liberté du travail et du droit des employeurs à pénétrer dans les locaux occupés, il convient de noter que, bien que les prud’hommes n’aient pas compétence en matière de conflits collectifs du travail, la justice civile – du fait de sa compétence résiduelle – a assumé une juridiction dans les affaires de plaintes de travailleurs non occupants qui, d’une manière générale et conformément à une jurisprudence bien établie, ont obtenu satisfaction de leurs intérêts en ce sens qu’une décision du tribunal a ordonné la cessation de l’occupation; 3) la soumission des cas de demande de cessation de l’occupation des locaux par des non-grévistes signifie qu’il existe un haut degré de garantie de la liberté du travail, qui a été protégé par des jugements sommaires conformément à la procédure des protections (amparo) (la reconnaissance de sa compétence par le pouvoir judiciaire comporte la soumission des cas de cessation de l’occupation des lieux de travail à un organisme clairement indépendant et approprié pour trancher les conflits de droit entre les parties); 4) des sanctions ont été prononcées suite à des demandes de cessation de l’occupation des lieux de travail; 5) afin de sauvegarder le droit des travailleurs non grévistes, ainsi que les droits des employeurs, la Direction nationale du travail, par l’intermédiaire de l’Unité des conflits collectifs du travail, consacre chaque année des milliers d’heures de travail à la négociation collective pour prévenir et résoudre les conflits de cette nature (il s’agit d’un corps spécialisé de médiateurs, auquel font appel les parties de façon volontaire, en demandant l’intervention du pouvoir exécutif pour résoudre les conflits collectifs; quand ce dispositif est épuisé et que le conflit persiste ou qu’il s’exprime sous la forme d’une occupation ou de piquets de grève, les parties ont recours à la justice en sollicitant la protection de leurs droits); 6) les autorités judiciaires se sont régulièrement prononcées pour la protection du droit au travail des non-grévistes et des droits des employeurs, dans le cadre d’une procédure très brève (trois jours en première instance) et ont imposé des sanctions et, lorsque leur jugement n’est pas appliqué par les occupants, c’est le pouvoir exécutif qui, par l’intermédiaire des services du ministère de l’Intérieur (police), exécute l’ordre judiciaire d’évacuation, et jamais un ordre judiciaire n’a été ignoré parce que cela violerait la Constitution de la République et le principe de séparation des pouvoirs; 7) on voit bien ici que les droits constitutionnels des employeurs auxquels il est fait allusion sont garantis par l’Etat; selon le gouvernement, ce que les employeurs cachent dans leurs plaintes n’a d’autre objectif que vouloir réglementer le droit de grève et de rappeler qu’ils ont déclaré qu’il «n’existe pas de droit de grève dans le texte des conventions internationales de l’OIT»; 8) c’est ce type d’argumentation, et pas un autre, présenté à la dernière Conférence internationale du Travail qui a débouché sur la situation qui s’est instaurée au sein de la Commission de l’application des normes; 9) le gouvernement partage totalement la position de la commission selon laquelle en précisant la portée et la signification de la convention, il faut comprendre que, conformément aux articles 3 et 10 de la convention, la grève est pleinement reconnue pour les normes internationales; 10) le gouvernement réaffirme le respect le plus strict des droits humains et les employeurs s’appuient sur une hypothèse équivoque, dans la mesure où la grève, en tant que droit, est admise dans de multiples instruments internationaux comme un droit humain; 11) la législation nationale reconnaît le droit de grève dans la Constitution nationale (art. 57), ce que les employeurs semblent ne pas reconnaître eux-mêmes en adoptant une position manifestement inconstitutionnelle; de par la nature de ce droit (la qualité indiscutable du droit humain) et son appui dans la Constitution nationale, l’Etat n’est pas disposé à engager une discussion de ce type; 12) la conceptualisation théorique à laquelle se livrent les employeurs est manifestement régressive et ignore la position du Comité de la liberté syndicale lui-même; il convient à ce égard de préciser que le Comité de la liberté syndicale admet que les occupations d’entreprises ou d’autres lieux de travail sont des modalités ou des formes d’exercice du droit de grève; 13) les conseillers des chambres d’industrie ont recours à des citations de «seconde main», sorties de leur contexte, et leurs considérations sur l’occupation ne font aucunement partie de la conception que le Comité de la liberté syndicale lui-même a exprimée de façon traditionnelle et coutumière, à savoir qu’il considère l’occupation comme une pratique légitime à condition qu’elle soit pacifique; et 14) la Constitution nationale protège le droit à la liberté du travail, le droit à l’exercice de la liberté d’entreprise (art. 7, 10, 36 et 53), le droit de propriété (art. 7 et 32), le droit d’égalité devant la loi (art. 8), le droit à la sécurité juridique et le droit de libre circulation (art. 7).
La commission prend note de l’ensemble de ces informations et rappelle que, en analysant l’application de la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, par l’Uruguay, elle avait pris note du fait que, dans le cadre de la mission du BIT qui s’était rendue dans le pays en août 2011, un accord tripartite avait été conclu entre le MTSS et les représentants des travailleurs (Assemblée intersyndicale des travailleurs – Convention nationale de travailleurs PIT-CNT) et des employeurs (Chambre nationale du commerce et des services et Chambre d’industrie de l’Uruguay), et que cet accord représentait l’engagement d’une nouvelle étape du dialogue sur les commentaires du Comité de la liberté syndicale dans le cadre du cas no 2699, de la commission et de la Commission de l’application des normes de la Conférence. La commission prend également note que, suite à cet accord, des réunions tripartites sont en train d’être organisées sur ces sujets.
La commission rappelle que, dans son examen du cas no 2699, le Comité de la liberté syndicale avait estimé que l’exercice du droit de grève et l’occupation du lieu de travail doivent respecter la liberté de travail des non-grévistes, ainsi que le droit de la direction de l’entreprise de pénétrer dans les locaux de celle-ci, et avait demandé au gouvernement de veiller au respect de ces principes dans les normes réglementaires qui s’y rapportent et dans la pratique.
La commission rappelle également qu’elle a souligné à de nombreuses reprises que «les piquets de grève et l’occupation des lieux de travail doivent être autorisés à condition que ces actions se déroulent pacifiquement. On ne peut imposer de sanctions en pareil cas que lorsque ces actions perdent leur caractère pacifique. Cela dit, l’on doit dans tous les cas garantir le respect de la liberté de travail des non-grévistes, ainsi que le droit de la direction à pénétrer dans les locaux de l’entreprise.» (Voir étude d’ensemble sur les conventions fondamentales de 2012, paragr. 149.) Dans ces conditions, la commission exprime le ferme espoir que, dans le cadre du processus de dialogue tripartite qui a été engagé, les mesures nécessaires seront prises pour que, en tenant compte des commentaires du Comité de la liberté syndicale et de la commission, le respect de ce principe soit pleinement garanti dans la législation et dans la pratique, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives. La commission espère que le processus de consultation en cours prendra en considération les décisions des tribunaux nationaux.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

La commission observe que, dans leurs commentaires concernant l’application de la convention no 98, l’Organisation internationale des employeurs (OIE), la Chambre des industries de l’Uruguay (CIU) et la Chambre nationale de commerce et de services de l’Uruguay (CNCS) ont rappelé que le Comité de la liberté syndicale, dans le cas no 2699, a estimé que l’exercice du droit de grève et l’occupation du lieu de travail doivent respecter la liberté de travail des travailleurs non grévistes, ainsi que le droit de la direction de l’entreprise de pénétrer dans les locaux de cette dernière, et a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller au respect de ces principes dans la législation et dans la pratique. Selon l’OIE, la CIU et la CNCS, le gouvernement n’a pas promulgué de dispositions législatives pour assurer le respect des principes susmentionnés et, dans les faits, les entreprises peuvent toujours être occupées par les travailleurs, le droit au travail des travailleurs non grévistes n’est pas respecté et, dans certains cas, l’accès aux locaux de l’entreprise est refusé à la direction. La commission prie le gouvernement de communiquer dans son prochain rapport des informations sur les mesures prises à cet égard.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

La commission note que, dans la décision de justice relative à la liberté syndicale jointe par le gouvernement à son rapport, dans le contexte d'un arrêt de travail, l'employeur a fait dresser un constat d'huissier afin de permettre aux travailleurs qui veulent exercer leur droit au travail de le faire constater légalement. La commission, sans méconnaître le principe du droit au travail, se déclare préoccupée par le fait que l'initiative de l'employeur en question puisse, dans la pratique, constituer une pression indue à l'égard des grévistes. A cet égard, elle prie le gouvernement de faire savoir s'il existe dans la législation une disposition permettant à l'employeur de prendre une telle mesure en cas de grève et de préciser comment cette disposition s'applique dans la pratique sans porter atteinte à l'exercice du droit de grève.

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