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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2023, Publication : 111ème session CIT (2023)

2023-KHM-105-Fr

Informations écrites communiquées par le gouvernement

Le gouvernement a communiqué les informations écrites présentées ci-après, ainsi qu’une copie de la loi de 2018 portant modification du Code pénal, du Code de procédure pénale et de la loi sur les prisons.

Le Royaume du Cambodge, résolument engagé à abolir le travail forcé et obligatoire sur son territoire, a dûment ratifié la convention no 105. Cette ratification témoigne de la détermination inébranlable du Royaume à éliminer cette pratique à travers le pays. Fidèle au respect de cet engagement, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle s’est efforcé de préciser ci-après comment s’applique la convention au Cambodge.

Veiller à ce qu’aucun travail obligatoire ne soit imposé aux personnes qui expriment des opinions politiques ou des opinions opposées au système établi

Nous tenons à souligner le fait que tous les citoyens cambodgiens jouissent de libertés incontestables, notamment du droit d’exprimer pacifiquement leurs opinions et de participer à des activités politiques. Ces libertés sont garanties par la Constitution du Royaume du Cambodge, ainsi que par la législation qui l’accompagne. Il importe donc de réaffirmer qu’au Cambodge aucune mesure punitive n’est appliquée aux personnes qui expriment pacifiquement leurs opinions politiques, y compris aux membres de l’opposition, aux défenseurs des droits de l’homme et aux journalistes, pour autant que leurs actions ne portent pas atteinte aux droits d’autrui, conformément aux limites fixées par la législation en vigueur.

Les droits de l’homme consacrés par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et les autres instruments relatifs aux droits de l’homme, aux droits de la femme et aux droits de l’enfant sont reconnus et défendus sans équivoque par la Constitution. L’article 36 de la Constitution confère aux citoyens khmers, quel que soit leur genre, le droit de chercher un emploi correspondant à leurs capacités et aux besoins de la société.

Conformément aux normes internationales du travail, la loi cambodgienne sur le travail (article 15) interdit sans ambiguïté le travail forcé ou obligatoire et s’aligne ainsi sur la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930. Cette disposition s’applique à toutes les personnes, y compris les travailleurs domestiques ou les employés de maison et les travailleurs agricoles.

Conformément aux Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus, tels qu’énoncés dans la résolution 45/111 du 14 décembre 1990 de l’Assemblée générale des Nations Unies, des modalités ont été mises en place pour permettre aux détenus d’exercer un emploi rémunéré. Cette pratique vise à faciliter leur réintégration sur le marché du travail, contribuer à subvenir à leur propre soutien financier et à celui de leur famille, ces principes ayant été consacrés par la législation nationale, en particulier par la loi sur les prisons.

Le travail pénitentiaire est avant tout un processus de réadaptation visant à faciliter la réinsertion des détenus dans la société. Conformément à la loi de 2011 sur les prisons (articles 68 et 69), les détenus condamnés qui présentent peu de risque et qui ont été jugés physiquement aptes doivent être affectés à un travail dans le cadre du fonctionnement quotidien de la prison, accomplir tout travail d’intérêt public profitable à la communauté ou être obligés de participer aux ateliers privatisés d’artisanat et d’agriculture. Ce travail n’est pas affecté aux détenus sur la base d’une opposition politique, de la défense des droits de l’homme ou d’une activité journalistique, et des mesures de sécurité sont mises en œuvre avec diligence.

Le gouvernement ne cesse de réaffirmer son attachement aux principes consacrés par la Constitution du Royaume du Cambodge, ainsi que par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et les différents instruments relatifs aux droits de l’homme. Tous les Cambodgiens, sans distinction de race, de couleur, de genre, de langue, de religion, d’opinions politiques, d’origine ethnique, de nationalité, de classe socio-économique ou de possession de biens, sont égaux devant la loi.

Le ministère du Travail et de la Formation professionnelle n’a jamais été confronté à une situation dans laquelle des détenus condamnés ont été contraints au travail pénitentiaire en raison de leur opposition politique, de leurs activités de défense des droits de l’homme ou journalistiques. S’il avait connaissance de telles pratiques, ce ministère serait disposé à coopérer avec les autorités compétentes pour prendre rapidement des mesures. En outre, il n’existe pas de preuve tangible qui pourrait laisser penser que le travail pénitentiaire est un moyen de punir les personnes qui expriment des opinions politiques ou qui sont en désaccord avec le système établi. Le ministère du Travail et de la Formation professionnelle invite donc l’OIT et les parties prenantes concernées à communiquer des informations détaillées sur tout élément qui pourrait démontrer que tel est le cas.

Information relative au projet de loi sur la cybercriminalité et à la loi portant modification du Code pénal

En ce qui concerne la formulation du projet de loi sur la cybercriminalité, le ministère de l’Intérieur s’est résolument engagé à faire respecter la Constitution et la législation du Royaume du Cambodge. Cet engagement témoigne d’une large reconnaissance des droits de l’homme consacrés par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme, aux droits de la femme et aux droits de l’enfant. Dans ce contexte, un groupe de travail chargé de ces questions a organisé une réunion d’examen, en collaboration avec une équipe technique du ministère de l’Intérieur, et a accueilli un séminaire technique interministériel auquel ont participé des représentants du ministère de la Justice, du ministère des Postes et Télécommunications, du ministère de l’Information, du ministère de l’Industrie, de la Science, de la Technologie et de l’Innovation, ainsi que du ministère du Commerce. Grâce à ce processus collaboratif, cette initiative a progressé. Le projet de loi sur la cybercriminalité est actuellement examiné par toutes les parties prenantes concernées, et un effort concerté est actuellement déployé pour intégrer et harmoniser les contributions de toutes les parties, de manière à garantir une législation efficace, efficiente, pertinente et cohérente.

Interdire le travail obligatoire pour sanctionner la participation pacifique à des grèves

En ce qui concerne les affaires liées à MM. Van Narong et Pel Voeun, celles-ci font toujours l’objet d’une procédure d’appel. Il est important de noter que MM. Van Narong et Pel Voeun ont tous deux un emploi actif, ce qui invalide toute allégation d’emprisonnement.

En ce qui concerne l’arrestation de dirigeants syndicaux au casino, le ministère du Travail et de la Formation professionnelle se voit contraint de préciser que la grève menée par les dirigeants syndicaux en question n’a pas rempli les conditions légales préalables à l’exercice du droit de grève. Les travailleurs ont effectivement le droit d’organiser une grève mais, pour ce faire, certaines conditions légales doivent d’abord être remplies. Ces conditions impliquent notamment l’absence de décision ou de notification de décision rendue par le Conseil d’arbitrage dans les délais légaux, ainsi que l’existence d’une objection à une sentence arbitrale non contraignante. Il est essentiel de noter que ces conditions n’ont pas été remplies en l’espèce.

En conséquence, le 16 décembre 2021, le tribunal de première instance de Phnom Penh a rendu une décision provisoire indiquant que le conflit collectif du travail qui avait lieu à NagaWorld devait être soumis à la procédure du Conseil d’arbitrage. En outre, le tribunal a jugé que toute nouvelle revendication non soumise préalablement à la procédure du Conseil d’arbitrage ne pouvait constituer un motif valable de grève, comme le prévoit la loi sur le travail. Toutefois, malgré cette décision, les travailleurs licenciés ont entamé leur grève à l’extérieur de NagaWorld.

Les anciens employés de NagaWorld ont été tenus responsables de leurs actes et ont été placés en détention, après avoir été inculpés au titre des articles 494 (incitation) et 495 (incitation à commettre un crime) du Code pénal. Cette action en justice fait suite à la participation de ces personnes à une grève jugée illégale et ayant créé des troubles importants à l’ordre et à la sécurité publics.

D’autres personnes ont été arrêtées parce que reconnues coupables de porter atteinte au droit à la vie d’autrui dans le contexte de la pandémie de COVID-19. Cette violation provenait du fait qu’elles avaient refusé de se conformer aux mesures de prévention du COVID-19 imposées par le gouvernement, notamment de se soumettre à des tests rapides et de respecter les protocoles de distanciation sociale pendant la grève. Au total, ces transgressions ont conduit à l’arrestation de 11 grévistes.

En réaction à la situation, ces personnes ont écrit une lettre au ministère du Travail et de la Formation professionnelle, lui demandant d’intervenir par des moyens légaux pour obtenir leur libération sous caution. Elles ont en outre promis, à titre d’efforts pour régler à l’amiable ce conflit du travail, de respecter strictement les directives sanitaires, de ne pas entraver la réalisation de test de dépistage du COVID-19 et de s’abstenir de tout rassemblement ou manifestation susceptible de compromettre l’ordre public, la paix et la sécurité.

Conformément à leur demande, et suite à l’aide juridique fournie par le ministère du Travail et de la Formation professionnelle et le ministère de la Justice, le tribunal de première instance de Phnom Penh a rendu une décision le 14 mars 2022. Le tribunal a ordonné la libération sous caution des anciens travailleurs, ce qui a satisfait leurs demandes.

Le cas des dirigeants arrêtés de la Fédération syndicale de l’amitié des travailleurs est pour l’heure ambigu puisqu’il n’y a pas d’informations suffisantes concernant leur employeur. Le ministère du Travail et de la Formation professionnelle invite donc l’OIT et les parties prenantes concernées à communiquer des informations détaillées qui pourraient faciliter les mesures appropriées à prendre.

Discussion par la commission

Président – Nous allons entamer la discussion sur le deuxième point de l’ordre du jour, à savoir le Cambodge et l’application de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957.

Représentant gouvernemental – Cette commission est la clé de voûte du système de contrôle de l’OIT et joue un rôle essentiel dans la garantie de l’application des conventions internationales du travail. Partageant le même engagement, le Royaume du Cambodge a honoré sa promesse de respecter tous les droits et obligations énoncés dans cette convention qu’il a ratifiée.

En témoignage de son dévouement, le Cambodge est fier d’avoir ratifié huit conventions internationales fondamentales du travail. Nous nous efforçons d’entretenir des relations constructives et de coopération avec tous les partenaires sociaux et de développement afin de garantir la protection des droits au travail et de favoriser des relations industrielles harmonieuses pour soutenir le développement économique du Cambodge.

Reconnaissant les contributions importantes de la commission, le Cambodge a collaboré activement avec le mécanisme de contrôle de l’OIT conformément à ses engagements et en complément des informations écrites pertinentes fournies en mai 2023. Ma délégation a pris note du rapport de la commission d’experts et a le plaisir de présenter de nouvelles informations actualisées sur l’application de la convention au Cambodge.

À cet égard, il convient de noter que la Constitution défend et intègre les principes fondamentaux des droits de l’homme consacrés par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Au Cambodge, tant les droits de l’homme que les droits au travail sont protégés en droit et dans la pratique.

Nous sommes fiers de déclarer que le travail forcé n’a pas sa place dans notre pays. Aucun élément de preuve n’indique l’existence de travail forcé dans le Royaume. Il existe uniquement des personnes qui ont vraiment besoin d’un emploi et qui travaillent dur pour être mieux payées afin de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. En accord avec les normes internationales du travail, l’article 15 de la loi sur le travail interdit le travail forcé ou obligatoire, conformément à la convention ratifiée par le Royaume du Cambodge en 1969. Nous avons le plaisir de souligner que, en vertu de la convention, l’expression «travail forcé ou obligatoire» désigne tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré.

La convention exclut toutefois tout travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation judiciaire, à la condition que ce travail soit exécuté sous la surveillance des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé à des entités privées. Comme énoncé dans les principes fondamentaux de l’ONU relatifs au traitement des détenus, il faut réunir les conditions qui permettent aux détenus de prendre un emploi utile et rémunéré, lequel facilitera leur réintégration sur le marché du travail.

Le Cambodge réaffirme son engagement dans la promotion et la protection des droits de l’homme en intégrant cette approche dans sa législation nationale, en particulier dans sa loi sur les prisons. En outre, la loi sur les prisons est conforme à un grand nombre d’instruments internationaux, dont la Déclaration universelle des droits de l’homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture. Cette loi vise à éduquer, à remettre sur la bonne voie et à réinsérer les prisonniers en vue de leur intégration dans la société. Nous prenons note de la préoccupation de la commission d’experts concernant les diverses dispositions du Code pénal du Cambodge. Pour mieux situer le contexte, il est pertinent de noter que l’article 5 du Code pénal impose clairement une interprétation stricte du droit pénal. Cela ne va pas à l’encontre des préoccupations exprimées par la commission d’experts, qui souhaite s’assurer que les dispositions du Code pénal ne présentent aucun caractère coercitif.

Nous prenons note de la préoccupation de la commission d’experts concernant l’emprisonnement présumé de deux syndicalistes. Ici, nous tenons à préciser que leurs cas comparaissent actuellement en appel. Contrairement à l’allégation d’emprisonnement, ils restent activement employés et jouissent pleinement du droit à un procès équitable. En outre, l’arrestation des manifestants mentionnée dans le rapport de la commission d’experts n’était pas simplement due à leur participation à des grèves illégales, mais l’action en justice se fondait sur des atteintes à l’ordre public et à la sécurité publique, en violation des lois sur les mesures de prévention du COVID-19 visant à garantir les droits à la vie d’autrui dans le contexte de la pandémie.

Nous exprimons notre inquiétude quant à l’attribution d’une double note de bas de page à ce cas. Aucune preuve n’a été découverte, suggérant que le travail en prison est utilisé comme une forme de punition pour ceux qui s’opposent au système établi ou qui participent à une grève. Si de telles informations étaient présentées, le Cambodge agirait rapidement. Dès lors, nous invitons le BIT et les parties prenantes concernées à fournir des informations détaillées si le cas se présentait. Notre intention de nous engager en faveur de l’état de droit, en renforçant la mise en œuvre des lois et des règlements, est d’une importance capitale pour garantir que notre bonne gouvernance reste intacte. À ce titre, l’application de la loi ne doit pas être interprétée à tort comme un moyen de pression politique.

En conclusion, ma délégation remercie la commission pour cette opportunité et réaffirme l’engagement du Cambodge à promouvoir la protection et le respect des principes inscrits dans tous les instruments pertinents auxquels le Cambodge est partie.

Membres travailleurs – Le climat qui règne actuellement et depuis de nombreuses années au Cambodge est un climat peu propice à l’exercice des libertés publiques, en ce compris la liberté syndicale et la liberté d’action collective.

En effet, le rapport de la commission d’experts fait état d’arrestations et de poursuites de membres du parti de l’opposition, des représentants d’organisations non gouvernementales, des syndicalistes et des défenseurs des droits de l’homme. Plusieurs membres de l’unique parti d’opposition au Cambodge, le Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), ont été emprisonnés avec obligation de travail pénitentiaire. Le rapport évoque également les arrestations de 25 défenseurs des droits de l’homme et les condamnations de 9 personnalités politiques de l’opposition. Pas moins de 50 cas de harcèlement de journalistes ont également été signalés en 2021. La condamnation de Van Narong et Pel Voeun, membres de la Confédération du travail du Cambodge (CTC), condamnés à des peines de prison pour des charges de délit mineur et de dénonciation calomnieuse, est également évoquée dans le rapport de la commission d’experts. Plus récemment, nous devons déplorer la condamnation à des peines d’emprisonnement prononcées contre les dirigeants du syndicat Labor Rights Supported Union (LRSU) sur base de dispositions du Code pénal que nous évoquerons dans un instant.

Tous ces événements démontrent que les libertés publiques et syndicales sont bafouées au Cambodge. Or le libre exercice de ces libertés publiques et syndicales est une condition préalable à l’exercice des libertés fondamentales consacrées par les instruments internationaux du travail qui s’imposent au Cambodge. Des institutions et experts internationaux dressent des constats similaires. Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies s’est ainsi déclaré préoccupé par la violation persistante de la liberté d’expression, l’arrestation et le placement en détention de manifestants, la dissolution du CNRP en 2017 et de trois autres partis d’opposition en 2021, les menaces, le harcèlement, les arrestations arbitraires et les procès collectifs que subissent des membres de l’opposition et l’absence persistante d’un pouvoir judiciaire indépendant et impartial. À plusieurs reprises, des experts des Nations Unies ainsi que le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Cambodge ont également dénoncé de telles pratiques.

Tout cela ne devrait pas laisser le gouvernement cambodgien de marbre. Il est grand temps de remédier à cette situation et de restaurer un environnement propice à l’exercice des libertés publiques, condition préalable au plein respect des normes internationales fondamentales du travail, en ce compris la convention.

Nous sommes en effet aujourd’hui amenés à examiner la conformité de la loi et de la pratique cambodgiennes avec la convention. Il apparaîtra très vite de notre examen que de nombreuses dispositions légales et l’application qui en est faite au Cambodge sont contraires au prescrit de la convention.

En vertu de l’article 1 a) de la convention, tout État Membre «s’engage à supprimer le travail forcé ou obligatoire et à n’y recourir sous aucune forme en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique ou en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi». Or l’article 68 de la loi sur les prisons prévoit que les peines de prison s’accompagnent d’une obligation de travail. Lue en combinaison avec d’autres dispositions de la législation cambodgienne, cette disposition a pour conséquence que certaines activités qui relèvent de l’article 1 a) de la convention peuvent faire l’objet de peines de prison assorties d’une obligation de travail.

Les dispositions suivantes sont particulièrement mises en avant dans le rapport de la commission d’experts:

- l’article 42 de la loi sur les partis politiques, tel que modifié en 2017, qui punit jusqu’à un an de prison plusieurs infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par une décision de justice ou dont l’enregistrement a été refusé;

- les articles 494 et 495 portant sur l’incitation au trouble de la sécurité publique par des discours, des écrits, des images ou toute autre communication audiovisuelle en public ou pour le public;

- l’article 522 relatif à la publication de commentaires visant à exercer une coercition illégale sur les autorités judiciaires;

- l’article 523 sur le discrédit des décisions de justice, du Code pénal de 2009;

- les articles 305 à 309 concernant les délits de diffamation et d’injure;

- les articles 445 et 437bis du Code pénal relatives aux délits d’insulte au Roi et de critique du Roi.

Nous l’avons vu, ces dispositions ont été utilisées pour emprisonner et condamner des dissidents politiques, des journalistes, des blogueurs ainsi que des syndicalistes qui peuvent faire l’objet d’une obligation de travail. Il est évident que la voie qui devrait être privilégiée est celle de la suppression de toute sanction pénale pour l’expression d’opinions politiques démocratiques. Le prescrit de la convention est toutefois très clair, de telles sanctions pénales ne peuvent être assorties de peines de travail.

Le cas du Cambodge nous permet également d’aborder le prescrit de l’article 1 d) de la convention. Il prévoit que tout État Membre «s’engage à supprimer le travail forcé ou obligatoire et à n’y recourir sous aucune forme en tant que punition pour avoir participé à des grèves». Il apparaît pourtant du rapport de la commission d’experts que des syndicalistes ont subi des condamnations pénales suite à leur participation à des actions collectives pacifiques.

Nous ne devons pas répéter à quel point l’exercice du droit d’action collective est fondamental pour la défense des droits fondamentaux au travail. C’est pourquoi la convention prévoit que la participation à une grève ne peut faire l’objet d’une sanction assortie d’une peine de travail forcé. Il apparaît néanmoins que la législation et la pratique du Cambodge ne répondent pas au prescrit de l’article 1 d) de la convention.

L’abolition du travail forcé est un objectif fondamental poursuivi par l’OIT. Il ne peut y avoir de justice sociale là où sévit le travail forcé. La révision profonde des législations et pratiques cambodgiennes susmentionnées en matière de répression pénale est indispensable afin de rétablir un environnement propice à l’exercice des libertés publiques dans le pays, en ce compris la liberté syndicale et la liberté d’action collective.

Membres employeurs – Les membres employeurs insistent sur le fait qu’il est important que les États respectent la convention, qui est l’une des dix conventions fondamentales de l’OIT.

Quelques éléments de contexte: le Cambodge a ratifié la convention en 1999. Nous notons que, jusqu’à présent, la commission d’experts a rédigé quatre observations sur ce cas: en 2014, en 2017, en 2018 et en 2022. Aujourd’hui, pour la deuxième fois, la commission se penche sur l’application de la convention au Cambodge. Nous notons que, cette année, la commission d’experts a attribué une double note de bas de page à ce cas. Nous remarquons néanmoins que les points soulevés n’ont pas été abordés par la mission de contacts directs qui s’est rendue au Cambodge l’an dernier. Le manque apparent de préoccupation grave avant cela et les préoccupations exprimées cette année, très peu de temps avant les élections nationales auxquelles plusieurs figures syndicales de haut rang citées dans ce cas sont susceptibles de jouer un rôle de premier plan, nous font nous interroger sur la raison d’être d’une telle note. Ce cas n’a pas connu la même trajectoire que d’autres cas qui se sont vu attribuer une double note de bas de page. Quoi qu’il en soit, la commission a retenu deux grandes questions ici.

Premièrement, les sanctions comportant l’obligation de travailler en tant que sanction à l’égard de personnes qui expriment certaines opinions politiques, sanctions contraires à l’article 1 a) de la convention; et, deuxièmement, le travail obligatoire imposé aux travailleurs en tant que punition pour avoir participé à des grèves, ce qui est contraire à l’article 1 d) de la convention.

Permettez-moi de rappeler brièvement que les membres travailleurs se sont dit préoccupés par l’imposition de sanctions comportant du travail forcé dans le but de censurer l’expression d’avis divergents sur des questions politiques, sociales ou économiques, ainsi que par le caractère arbitraire de l’imposition de telles sanctions par des tribunaux. Ces préoccupations ont été exprimées après la dissolution d’un important parti de l’opposition, en 2017, et l’emprisonnement de ses dirigeants qui s’ensuivit.

Le gouvernement a, quant à lui, souligné qu’il ne convenait pas d’interpréter l’article 68 de la loi sur les prisons comme contrevenant à la convention. Il a insisté sur le fait que l’imposition de travail obligatoire aux prisonniers représentant peu de risques visait à offrir éducation et réadaptation, conformément aux normes internationales relatives aux prisonniers. Nous notons qu’il est courant, dans le monde, d’imposer aux prisonniers des activités de nature à les réadapter qui ne supposent ni abus ni préjudice.

Dans ses observations et dans l’Étude d’ensemble de 2012, la commission d’experts a noté que, si le travail imposé à un délinquant de droit commun a pour objectif de réadapter ou réinsérer l’individu, il n’en va pas de même dans le cas d’une personne condamnée pour ses opinions ou pour sa participation à une grève. Les membres employeurs sont surpris, car cela ne va pas dans le sens de ce que dit la commission d’experts quand elle laisse entendre qu’il y a des régimes différents, complètement différents, selon que les circonstances relèvent, ou non, de la liberté d’expression ou d’infractions pénales. Je reviendrai sur ce point.

Les membres employeurs insistent sur l’importance de la liberté d’expression, notamment l’expression d’opinions politiques et la participation à la politique, en tant que valeurs fondamentales des sociétés démocratiques. Nous prenons note de la préoccupation exprimée par le Comité des droits de l’homme de l’ONU et les experts en droits de l’homme au sujet d’allégations faisant état de violations persistantes de la liberté d’expression, de la dissolution des partis d’opposition et de l’emprisonnement – comportant du travail obligatoire – de membres de l’opposition, de défenseurs des droits de l’homme et de journalistes.

Nous notons que la commission d’experts fait observer que les dispositions pénales nationales continuent d’être utilisées pour arrêter, poursuivre et condamner les défenseurs des droits de l’homme, les membres de l’opposition et les journalistes qui expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, ce qui conduit à l’imposition de peines de prison comportant du travail.

À ce sujet, les membres employeurs rejoignent la commission d’experts quand elle demande au gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces pour garantir que les personnes qui expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi sans viser à inciter à des troubles, à l’insurrection ou à la violence ne sont pas condamnées à des sanctions comportant du travail obligatoire. Ils rejoignent également la commission d’experts quand elle recommande instamment au gouvernement de revoir le champ d’application des dispositions pénales correspondantes afin de faire en sorte que leur exécution dans la pratique n’aboutisse pas à une violation de l’article 1 a) de la convention.

Pour ce faire, à l’instar de la commission d’experts, nous prions le gouvernement de transmettre copie des amendements apportés en 2018 au Code pénal qui incriminent la formulation de critiques à l’égard du Roi et de fournir des informations sur l’application, dans la pratique, des dispositions pénales qui relèvent du champ d’application de l’article 1 a) de la convention.

En ce qui concerne la punition pour avoir participé à des grèves, il s’agit d’une nouvelle question que la commission a retenue dans son observation concernant l’application de la convention par le Cambodge. Nous prenons note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) concernant deux membres de la Confédération du travail du Cambodge (CTC), condamnés à des peines de prison pour des charges de délit mineur et de dénonciation calomnieuse. Nous prenons également note des observations de la commission d’experts concernant l’arrestation de quatre dirigeants syndicaux accusés d’avoir organisé une grève illégale, du fait que des experts des Nations Unies en matière de droits de l’homme ont fait référence à l’arrestation et à la détention de dirigeants et militants syndicaux lors d’une grève, et de la préoccupation que des experts des Nations Unies ont exprimée quant à l’utilisation des mesures adoptées dans le contexte de la COVID-19 pour restreindre des grèves légales et pacifiques. Nous sommes d’accord avec la commission d’experts quand elle demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que l’application des dispositions législatives ne conduit pas, dans la pratique, à l’imposition de sanctions comportant du travail obligatoire à l’égard de travailleurs, pour le simple fait d’organiser des grèves ou d’y participer pacifiquement.

En outre, nous sommes d’accord avec la commission d’experts quand elle demande au gouvernement de fournir une copie de la décision de justice relative à l’arrestation des quatre dirigeants syndicaux et aux poursuites engagées contre eux. Toutefois, nous faisons observer que les exemples cités ne suffisent pas à établir qu’il est systématiquement dérogé aux dispositions de la convention. Il ne nous semble pas qu’il suffit d’associer le fait d’être membre d’un syndicat au fait d’être emprisonné pour infraction à la législation nationale pour étayer des allégations de manquement à la convention. Il importe plutôt de comprendre les circonstances qui entourent chaque cas. Il serait par exemple utile de connaître le comportement des personnes citées au moment de leur arrestation. C’est pour cela qu’il est important de consulter la décision du tribunal correspondante.

Cela ne revient pas à nier le fait que les personnes emprisonnées l’ont été à tort, mais à affirmer clairement que nous devons examiner ces cas sous toutes les coutures pour nous assurer qu’il y a manquement aux normes internationales, et non transgression pure et simple de la législation pénale valide.

Cela étant, nous demeurons préoccupés qu’une telle discrimination soit ne serait-ce que possible en vertu de la loi nationale. Sur ce point, depuis l’examen de ce cas en 2018, il n’y a eu aucun progrès significatif concernant la protection juridique de la liberté d’expression et le fait que les dispositions nationales continuent d’être utilisées pour poursuivre et condamner des personnes qui expriment leurs opinions politiques. Nous invitons donc le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT pour s’attaquer aux points mentionnés ici.

Nous prions également le gouvernement de s’attaquer, en consultation avec ses partenaires sociaux, aux questions découlant des cas de d’arrestation et d’emprisonnement de syndicalistes afin de vérifier s’il s’agit de cas conformes à la convention et, à cette fin, de transmettre copie des décisions de justice correspondantes. Nous prions également le gouvernement de transmettre copie des amendements apportés en 2018 au Code pénal qui incriminent la formulation de critiques à l’égard du Roi et de fournir des informations sur l’application, dans la pratique, des dispositions pénales qui relèvent du champ d’application de l’article 1 a) de la convention. Dernier point: nous prions instamment le gouvernement de prendre des mesures pour faire en sorte que le travail imposé aux prisonniers soit compatible avec l’objectif affirmé d’éducation et de réadaptation et qu’il ne s’agisse pas d’une mesure punitive. Je vous remercie pour votre attention. Nous attendons avec intérêt d’entendre les autres intervenants.

Membre travailleur, Cambodge – Je suis le président de la CTC et, au nom des travailleurs cambodgiens, je voudrais revenir sur la situation du travail au Cambodge.

Le gouvernement du Cambodge a ratifié 13 conventions de l’OIT, y compris les normes fondamentales du travail en 1999. Selon les conclusions de la commission d’experts, ainsi que de la présente commission en 2018, le Cambodge doit mettre ses lois et pratiques en conformité avec la convention. Aucune sanction impliquant le travail forcé ou obligatoire ne saurait être imposée conformément à l’article 1 a) de la convention. Comme le souligne à nouveau la commission d’experts dans son rapport, la sanction pénale imposée sous la forme de travail forcé et obligatoire dans le cadre de condamnations pénales est toujours prévue à l’article 68 de la loi cambodgienne sur les prisons. L’expression de points de vue et d’opinions politiques – qui s’opposent à l’ordre politique, social ou économique du Cambodge – n’est toujours pas libre et comporte le risque de sanctions pénales – au sens de l’article 1 a) de la convention.

Les travailleurs et les syndicats sont menacés de sanctions pénales lorsqu’ils mènent ou participent à des grèves et à des manifestations au sens de l’article 1 d) de la convention.

Révision et législation du travail: la commission d’experts a prié le gouvernement de veiller à ce que les sanctions prévues par un certain nombre de dispositions de la législation nationale n’impliquent pas le travail forcé et obligatoire. D’après l’expérience des syndicats, les autorités gouvernementales, les employeurs et les briseurs de grève utilisent souvent des dispositions du Code pénal et d’autres infractions pénales prévues par la législation pour engager des poursuites et nous condamner alors que nous menons des activités syndicales, exprimons des opinions publiques ou menons des grèves.

Dans de trop nombreux cas, les dispositions suivantes sont utilisées contre les travailleurs et les dirigeants syndicaux pour les condamner à des peines d’emprisonnement ou les soumettre à des procédures judiciaires prolongées et non transparentes pendant des années sans procès. Il s’agit notamment des dispositions suivantes du Code pénal: article 28 (instigation); articles 494 et 495 (incitation à commettre un crime); articles 217-218 (violence intentionnelle); article 411 (dommages intentionnels); articles 311 et 312 (diffamation); article 424 (menaces de destruction); article 78 (obstruction en vertu de la loi sur la circulation); ainsi que l’article 11 (loi sur la prévention de la propagation du COVID-19).

Nous sommes préoccupés par le fait que les accusations d’incitation au désordre au sens des articles 494 et 495 sont largement utilisées pour empêcher les syndicalistes et les militants d’exprimer publiquement et de partager leurs opinions et leurs critiques sur les politiques et les pratiques du gouvernement, ou pour intimider les travailleurs et qu’ils cessent de prendre part aux grèves et aux manifestations organisées par les syndicats. Nous ne pourrons pas jouer notre rôle, nous ne pourrons pas nous faire entendre et organiser des négociations collectives dès lors que ces articles peuvent être largement appliqués pour criminaliser les opinions que nous exprimons et les actions syndicales que nous menons.

Nous prions instamment le gouvernement de consulter les syndicats et les partenaires sociaux et d’examiner avec eux le large champ d’application et les applications arbitraires de ces dispositions légales et de veiller à ce que ces dispositions ne soient pas utilisées pour harceler et sanctionner la libre expression des opinions politiques, la libre organisation d’activités syndicales, de grèves et de manifestations.

Condamnations et peines infligées pour avoir exprimé des opinions, organisé des grèves et constitué des syndicats: nous sommes profondément préoccupés par les arrestations, détentions, harcèlements judiciaires et condamnations à l’encontre de membres de syndicats indépendants, d’ONG et de représentants d’associations, de journalistes indépendants, de défenseurs des droits de l’homme et de militants sociaux au Cambodge – au motif qu’ils exercent leur droit d’exprimer des opinions et d’organiser des grèves et des manifestations.

En 2016, 46 travailleurs d’une compagnie de bus ont été licenciés pour avoir constitué un syndicat. Les dirigeants et militants syndicaux de la Fédération ont été accusés de multiples infractions pénales. Van Narong et Pel Voeun ont été condamnés à six mois de prison avec sursis pour délit mineur et dénonciation calomnieuse. L’affaire est toujours en instance devant la Cour d’appel. Ya Kuyny et Ngim Bunthy ont été condamnés à deux ans de prison en 2018.

Chan Rith, Seb Thon et Tep Sopha, dirigeants et membres de l’Association des agriculteurs pour la paix et le développement (FAPD), ont été poursuivis dans deux affaires distinctes par des propriétaires terriens et le ministère de l’Environnement pour violences intentionnelles lors de manifestations d’agriculteurs contre l’accaparement des terres. Tep Sopha a été condamné à un an de prison et a purgé sa peine en 2020.

Tang Sakbuoy a été poursuivie par son employeur pour de fausses infractions pénales après avoir formé un syndicat avec d’autres personnes. Elle a été condamnée en 2020 à dix-huit mois de prison. La cour a confirmé un mandat d’arrêt à son encontre.

Rong Chhun, président de la Confédération cambodgienne des syndicats (CCU), a été reconnu coupable d’incitation à commettre un crime et de troubles sociaux après avoir fait des commentaires publics sur la perte de terres par les agriculteurs dans les zones frontalières. Il a été condamné en 2021 à deux ans de prison.

Chhim Sithar et huit membres du LRSU ont été reconnus coupables d’incitation à commettre un crime pour avoir mené des grèves afin de protester contre les licenciements massifs et les pratiques antisyndicales d’un groupe de casinos. Ils ont été condamnés en mai 2023 à des peines allant d’un an et demi à deux ans de prison.

Nous prions instamment le gouvernement d’abandonner toutes les charges retenues contre les dirigeants syndicaux, les dirigeants d’associations de travailleurs et les militants pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression, à la liberté d’organisation et leur droit de faire grève et de manifester. Nous prions également le gouvernement d’accélérer la résolution de plusieurs affaires pénales, déjà anciennes, concernant la liberté d’association des syndicalistes. Sur les 44 affaires pénales soumises au gouvernement en 2018, 29 sont toujours en instance.

Membre employeur, Cambodge – Je m’exprime au nom de la Fédération cambodgienne des employeurs et des associations d’entreprises. Tout d’abord, nous demandons que toutes les questions qui dépassent le cadre des discussions de la convention, qui est le sujet principal aujourd’hui, soient retirées du compte rendu des travaux. Compte tenu du grand nombre d’informations examinées aujourd’hui, nous ne sommes pas en mesure de répondre à toutes. Permettez-moi tout d’abord de vous présenter le contexte.

Les employeurs cambodgiens souhaitent attirer l’attention de la commission sur la teneur de cette affaire. Le Cambodge organise des élections nationales le 23 juillet de cette année, c’est-à-dire dans quelques semaines. La campagne électorale bat déjà son plein et les partis politiques essayent par tous les moyens de gagner le soutien des électeurs, par le biais de plateformes nationales et internationales. Nous, employeurs cambodgiens, souhaitons réaffirmer notre adhésion aux conventions que le Cambodge a ratifiées et notre engagement en faveur du respect des conventions par les partenaires tripartites et les autres parties intéressées, y compris la convention.

La question soumise aujourd’hui à la commission concerne des réclamations et des événements ayant trait aux activités, respectivement, des partis politiques et des syndicats. Nous n’avons pas connaissance qu’au Cambodge, que ce soit en droit ou dans la pratique, des sanctions soient imposées pour avoir ou exprimer certaines opinions politiques ou manifester son opposition idéologique à l’ordre établi ou pour participer à une grève légale.

Tout en prenant la question très au sérieux, nous demandons respectueusement à la commission d’experts de fournir des preuves plus concrètes de travail forcé ou obligatoire afin que ces cas puissent être traités efficacement.

Au Cambodge, dans la mesure où la loi sur le travail prévoit certaines sanctions et punitions dans le contexte des grèves, ces sanctions sont spécifiques et limitées à la protection des travailleurs non grévistes contre la coercition ou la menace, à la protection des travailleurs grévistes contre les sanctions illégales des employeurs et à la protection des travailleurs grévistes contre le remplacement au-delà des accords de service minimum. Cela dit, la loi sur le travail prévoit également qu’une grève doit être pacifique. Commettre des actes de violence pendant une grève est considéré comme une faute grave qui peut être sanctionnée. Dans le système juridique cambodgien, la commission d’actes de violence ou d’autres délits peut relever du Code pénal, ce qui expose l’auteur de l’infraction à des sanctions pénales conformément à la loi.

Comme la commission l’a noté dans les observations de la CSI, les deux personnes en question ont été condamnées à des peines d’emprisonnement pour avoir commis des crimes sanctionnés par le Code pénal. Il s’avère que leurs sanctions résultent de la poursuite des crimes qu’ils ont commis et non de leur participation à une grève. La commission prend note de l’observation de la CSI selon laquelle les deux personnes ont été condamnées après avoir participé à une manifestation. Toutefois, la participation à une grève ne met pas un individu à l’abri de poursuites pour la commission d’actes criminels ou d’autres violations de la loi. En ce qui concerne les faits et circonstances réels des deux individus, le gouvernement a indiqué que les individus en question ne sont pas emprisonnés et qu’ils sont en fait en activité. Cela exclut qu’ils soient actuellement soumis à une forme quelconque de travail forcé ou obligatoire.

En conclusion, au nom des employeurs cambodgiens, je tiens à dire que nous sommes profondément préoccupés par les conséquences négatives que pourrait avoir sur la vie et les moyens de subsistance des Cambodgiens le fait de continuer à examiner des allégations qui ne contiennent pas de preuves concrètes d’une violation de la convention. Selon nous, prêter attention à de telles allégations sans s’appuyer sur des faits ou apporter des preuves concrètes expose le Cambodge au risque d’être mal perçu et injustement dénigré comme étant impliqué dans le travail forcé et l’esclavage moderne. Les effets et les dommages causés peuvent être dévastateurs non seulement pour la réputation du Cambodge, mais aussi pour sa capacité à attirer les touristes, les talents et les investissements, ce qui, à son tour, nuira aux travailleurs, aux entreprises et au développement durable du Cambodge.

Cela étant, si des preuves concrètes de travail forcé sont apportées, nous demandons bien évidemment au gouvernement d’examiner la question pour résoudre ces problèmes de travail forcé et, si nécessaire, sollicitons l’assistance technique du BIT.

Membre gouvernementale, Suède – J’ai l’honneur de m’exprimer au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres. L’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la République de Macédoine du Nord, la République de Moldova, le Monténégro, pays candidats, la Norvège, pays de l’AELE, membres de l’Espace économique européen, se rallient à cette déclaration.

Conformément au plan d’action de l’UE en faveur des droits de l’homme et de la démocratie 2020, nous sommes attachés à la promotion, à la protection, au respect et à la réalisation des droits de l’homme, dont les droits au travail font partie intégrante, y compris l’abolition du travail forcé.

À cette fin, nous soutenons l’OIT dans son rôle indispensable consistant à élaborer, à promouvoir et à contrôler l’application des normes internationales du travail, et des conventions fondamentales en particulier.

L’UE et ses États membres sont des partenaires de développement engagés vis-à-vis du Cambodge, notamment par l’accord «Tout sauf les armes» dans le cadre du système de préférences généralisées qui garantit un accès aux marchés de l’UE en franchise de droits et sans contingent, ayant eu pour effet une croissance soutenue et la création d’emplois au cours des dernières décennies.

Les avantages commerciaux accordés dans le cadre de l’accord EBA sont soumis à la condition que le Cambodge respecte les principes internationaux fondamentaux, inscrits dans les conventions fondamentales des Nations Unies et de l’OIT. Toutefois, en raison de violations graves et systématiques des droits de l’homme, en particulier du droit à la participation politique et des libertés fondamentales, ce traitement préférentiel est partiellement suspendu depuis août 2020. Nous n’avons eu de cesse d’exprimer notre profonde préoccupation quant à l’évolution de la situation politique dans le pays.

Nous regrettons vivement l’existence de dispositions dans diverses lois, telles que la loi sur les prisons de 2011, la loi sur les partis politiques, telle qu’amendée en 2017, et le Code pénal de 2009, tel qu’amendé en 2018, qui prévoient des sanctions pénales pouvant impliquer le travail obligatoire et que les autorités cambodgiennes continuent d’utiliser contre les membres des partis d’opposition, les militants et les défenseurs des droits de l’homme, les journalistes et les militants des médias sociaux, ainsi que les membres d’organisations syndicales. Nous exprimons notre profonde préoccupation face à la violation persistante de la liberté d’expression. Nous déplorons le fait que des personnes exprimant leur opposition ou des critiques continuent d’être condamnées à des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’au travail obligatoire. Aucune sanction pouvant impliquer un travail obligatoire ne doit être imposée pour l’expression pacifique d’opinions politiques ou d’opinions opposées au système établi.

Nous prenons note avec inquiétude des observations du Comité des droits de l’homme des Nations Unies. Nous nous associons à la commission d’experts et appelons les autorités cambodgiennes à prendre des mesures immédiates et efficaces pour s’assurer qu’aucune sanction pénale ne puisse être imposée aux personnes qui expriment des opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique au système politique, économique ou social établi. Nous prions donc instamment les autorités cambodgiennes de limiter la portée des dispositions des lois pertinentes à des situations impliquant un recours à la violence ou une incitation à la violence, ou de supprimer les peines comportant du travail obligatoire de façon à s’assurer que l’application de ces dispositions dans la pratique n’aboutisse pas à la violation de la convention.

Les prochaines mesures prises par les autorités cambodgiennes concernant les dispositions du projet de loi sur la cybercriminalité, actuellement en préparation, et le sous-décret relatif à la passerelle nationale d’accès à internet, dont la mise en œuvre a été suspendue, constitueront un test décisif de la volonté des autorités de s’engager et de modifier leur ligne de conduite.

En accord avec la commission d’experts, nous prions également instamment les autorités cambodgiennes de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que l’application des dispositions législatives ne conduise pas dans la pratique à l’imposition de peines pouvant impliquer une obligation de travail à des travailleurs et à des membres des syndicats pour le simple fait d’organiser des grèves ou d’y participer pacifiquement. Nous sommes préoccupés par les informations relatives à l’arrestation et à la poursuite de membres et de dirigeants syndicaux pour avoir participé à des grèves. Nous souscrivons à la demande de la commission d’experts de fournir une copie de la décision de justice relative aux quatre dirigeants de la Fédération syndicale de l’amitié des travailleurs qui ont été arrêtés et ont fait l’objet de poursuite après avoir organisé une grève.

En ce qui concerne le travail forcé en général, nous sommes alarmés par le nombre de cas de traite des êtres humains impliquant du travail forcé et par son augmentation spectaculaire au cours des deux dernières années. À cet effet, nous prions instamment les autorités d’intensifier leurs efforts pour combattre et prévenir la traite des êtres humains dans le pays. Nous continuons à demander aux autorités cambodgiennes de prendre les mesures nécessaires pour garantir la poursuite de ces cas, de fournir des informations en temps utile sur les arrestations et les condamnations, et de protéger et d’aider les victimes de la traite.

Nous encourageons également vivement les autorités à mettre en œuvre toutes les autres recommandations issues de la mission de contacts directs du BIT du printemps 2022, afin de mettre un terme aux violations des droits au travail et de s’engager sur la voie d’une réforme constructive. L’UE et ses États membres resteront très attentifs à la situation au Cambodge

Membre gouvernementale, Suisse – La Suisse réitère ses inquiétudes présentées l’année dernière, ainsi qu’en 2017, dans l’enceinte de cette commission au sujet de l’application, par le Cambodge, de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.

Depuis 1999, le Cambodge figure régulièrement sur la liste des cas devant la commission. Aujourd’hui, la Suisse exprime sa préoccupation face à l’utilisation de dispositions du Code pénal pour restreindre systématiquement la liberté d’expression et la liberté syndicale. Il est primordial que toute personne, notamment les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme, les opposants politiques ou les militants des médias sociaux, puissent exprimer de manière libre leur opinion sans risque de représailles.

La Suisse rappelle que, conformément à l’article 1er de la convention, l’exercice de la liberté d’expression et d’opinion ainsi que l’exercice de la liberté d’association et de réunion ne doivent pas arbitrairement restreindre, ni conduire à une peine d’obligation de travail.

Par conséquent, la Suisse condamne fermement les pratiques décrites par la commission d’experts et le Rapporteur spécial sur le Cambodge du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, visant à pénaliser des personnes qui expriment ou manifestent pacifiquement leur opposition à l’ordre social, politique et économique établi. Elle a pris note des observations déposées et explications exposées par le gouvernement du Cambodge et l’appelle à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme à ces pratiques.

Membre travailleuse, Australie – Au nom du mouvement syndical australien, je fais part de la profonde préoccupation que suscite parmi nous la situation des droits des travailleurs au Cambodge, où le gouvernement applique fréquemment des sanctions pénales à des syndicalistes qui mènent leurs activités normales, expriment librement leur opinion et exercent le droit de mener des grèves et d’y participer.

La commission d’experts a constaté que les opposants politiques, les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme et les militants de réseaux sociaux qui expriment leur opposition ou des critiques à l’égard des autorités, dans le cadre de la protection que garantit la convention, sont condamnés et emprisonnés, et obligés d’effectuer un travail forcé ou obligatoire en application de l’article 68 de la loi sur les prisons.

La condamnation en 2020 de M. Rong Chhun, président de la Confédération cambodgienne des syndicats (CCU), a été prononcée au motif que, lors de sa visite dans la région le 20 juillet 2020, il avait appuyé des agriculteurs qui s’étaient plaints d’avoir perdu leurs terres à la suite des travaux du Comité mixte des frontières qui a délimité la frontière entre le Cambodge et le Viet Nam. Le 30 juillet 2020, M. Rong Chhun a été arrêté et détenu dans l’attente d’un procès pour «incitation à commettre un délit pénal ou à provoquer des troubles sociaux», en application des articles 494 et 495 du Code pénal. Mme Sar Kanika, présidente de l’Association des travailleurs informels du Cambodge, et M. Ton Nimol, membre du Conseil de surveillance du Cambodge, qui s’étaient joints aux manifestations appelant à la remise en liberté de Rong Chhun, ont tous deux été arrêtés le 7 août pour avoir rendu publique sur les réseaux sociaux la déclaration de M. Rong Chhun. Ils ont été inculpés pour la même infraction pénale puis placés en détention provisoire. Le 18 août 2021, M. Rong Chhun a été condamné à vingt-quatre mois d’emprisonnement, et Mme Sar Kanika et M. Ton Nimol à vingt mois. En novembre 2021, le tribunal municipal de Phnom Penh a statué sur l’appel et a suspendu leurs peines. Ils ont purgé quinze mois d’emprisonnement, détention provisoire comprise.

Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge a noté en 2021 que les peines d’emprisonnement et les lourdes amendes infligées à ces trois militants n’étaient ni justifiées ni proportionnées.

Le gouvernement continue d’utiliser l’emprisonnement et la menace de sanctions pénales pour réprimer l’opposition. De fait, pas plus tard que vendredi dernier, le Premier ministre Hun Sen a expressément et publiquement menacé de détenir à nouveau M. Rong Chhun – qui est maintenant aussi vice-président du «Candlelight Party» – et ses partisans s’ils protestaient contre l’abrogation de l’enregistrement du «Candlelight Party».

Nous demandons au gouvernement de respecter ses obligations en vertu de la convention et, donc, de cesser de criminaliser ses opposants et de libérer immédiatement et sans condition les personnes qui ont été détenues pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression et de réunion – y compris la dirigeante syndicale Chhim Sithar et les membres de son syndicat qui, il y a deux semaines, ont été condamnés pour avoir exercé leur droit à la liberté syndicale.

Membre gouvernementale, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord – Le Royaume-Uni félicite le gouvernement royal du Cambodge pour son soutien au programme de l’OIT Better Factories Cambodia (Amélioration des conditions de travail dans les usines cambodgiennes), qui permet de surveiller les conditions de travail dans les usines de confection cambodgiennes et d’en rendre compte, ce qui aide les usines à améliorer les conditions de travail conformément aux normes nationales et internationales.

Le Royaume-Uni prend également acte de la coopération de longue date du Cambodge avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et des progrès réalisés dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels. Le Royaume-Uni félicite le Cambodge pour sa réponse à la pandémie de COVID-19, notamment en ce qui concerne la protection sociale et les soins de santé.

Reconnaissant les progrès économiques réalisés par le Cambodge au cours des vingt dernières années, le Royaume-Uni reste déterminé à participer à l’action que le Cambodge déploie pour faire progresser les droits civils et politiques, au moyen d’un dialogue constructif.

Le renforcement de la protection des droits de l’homme – tels que la liberté d’expression, syndicale et de pensée – soutiendra également le secteur économique cambodgien en encourageant l’innovation, grâce au partage ouvert d’idées et d’informations. Par conséquent, le Royaume-Uni regrette la condamnation, le 25 mai 2023, de Mme Chhim Sithar, dirigeante du Syndicat pour les droits du travail des travailleurs khmers de l’hôtel Naga (LRSU), et de huit autres membres, actuels ou non, de ce syndicat.

Le Royaume-Uni appelle les autorités cambodgiennes à rappeler l’importance fondamentale que revêt le respect de la liberté syndicale, qui est l’une des principales garanties de la paix et de la justice sociale, comme l’a pleinement reconnu le Cambodge lorsqu’il a volontairement ratifié, il y a plus de vingt ans, la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

Dans le même temps, le Royaume-Uni continue de suivre les restrictions qui visent l’espace civil et politique et est préoccupé par ses restrictions actuelles.

Nous sommes déçus que Voice of Democracy, l’un des rares médias indépendants du Cambodge, ait été fermé. Le Royaume-Uni a déclaré publiquement qu’une presse libre est essentielle pour des sociétés ouvertes et démocratiques. La liberté d’expression ne se mesure pas au nombre de médias qui existent dans un pays; les médias doivent être indépendants et équilibrés.

Le Royaume-Uni regrette aussi le traitement et l’issue du cas de M. Kem Sokha et sa condamnation à vingt-sept ans d’assignation à résidence, ainsi que la décision de la commission électorale cambodgienne d’annuler l’enregistrement du Candlelight Party sur les listes électorales.

Le Royaume-Uni appelle le Cambodge à poursuivre un dialogue constructif et à mettre en œuvre les recommandations du rapport.

Membre employeuse, Thaïlande – Je fais cette déclaration au nom de la Confédération des employeurs de l’ASEAN. L’absence de travail forcé ou obligatoire est un élément fondamental du concept de travail décent, et nous nous associons au Cambodge pour réaffirmer notre adhésion et notre soutien à l’abolition du travail forcé.

En ce qui concerne le cas du Cambodge, nous considérons que ce pays a présenté des arguments solides et convaincants justifiant le respect de ses obligations, tout en fournissant des informations contextuelles et des faits précieux sur le cas et en mettant en évidence l’analyse importante de la manière dont la convention est appliquée, qui tient compte des différentes réalités nationales et des systèmes juridiques existants. À cet égard, nous souhaitons mettre l’accent sur la qualité et l’efficacité des systèmes nationaux cambodgiens pour traiter les questions importantes qui sont examinées. Les systèmes que nous avons mis en place au Cambodge, y compris les systèmes de dialogue social, qu’ils soient formels ou informels, tripartites ou bipartites, sont intrinsèquement sensibles au contexte et contribuent à promouvoir le consensus, à établir de meilleures relations de travail et à favoriser la paix industrielle, ce qui, en fin de compte, profite aux travailleurs, aux employeurs et au développement économique et social du Cambodge. Nous invitons donc cette commission à prendre en compte les facteurs susmentionnés et à respecter le système interne existant ainsi que les pratiques mises en œuvre au Cambodge.

Membre travailleuse, Suisse – La commission d’experts a, à juste titre, exprimé une fois encore sa profonde préoccupation s’agissant du recours constant aux dispositions de la législation nationale, y compris du Code pénal, pour poursuivre et condamner les personnes qui expriment des opinions opposées aux autorités au Cambodge ou qui participent à des grèves. Des éléments attestent de la hausse du nombre de condamnations et de sanctions pénales comportant l’obligation de travail obligatoire, depuis le dernier examen du cas en 2018, concernant des dirigeants et des militants syndicaux, en violation de l’article 1 de la convention. Par exemple, Mme Taing Sorkbouy et six autres fondateurs de syndicat ont été licenciés le 31 octobre 2018, après avoir créé un syndicat dans son entreprise et demandé une amélioration des conditions de travail. Même si leur plainte auprès du conseil d’arbitrage a abouti à une sentence ordonnant la réintégration des travailleurs en février 2020, l’entreprise a fait appel de cette décision et refusé de les réintégrer.

En juin 2020, l’entreprise a porté plainte contre Mme Tang Sorkbouy pour faux et abus de confiance après neuf ans d’emploi. Elle a été jugée par contumace et condamnée par le tribunal de première instance de Phnom Penh à deux ans et six mois de prison et à une forte amende. Elle n’avait jamais reçu de mandat de comparution, ce qui serait dû à une erreur dans l’adresse postale enregistrée. Le recours déposé par son avocat en octobre 2020 n’a pas abouti. La peine a été réduite à dix-huit mois. Nous notons avec une grande préoccupation une augmentation des cas dans lesquels la persécution de militants syndicaux pour leurs activités syndicales n’a pas réussi à les dissuader de s’impliquer, mais que ces personnes doivent répondre d’accusations pénales graves qui les contraignent à se mettre en retrait.

Nous prions instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les accusations pénales ne servent pas à intimider, à condamner et à emprisonner des militants syndicaux qui expriment leur opinion et qui exercent leurs droits, en rendant la législation nationale qui autorise le travail forcé en prison applicable à ces personnes, ce qui contrevient à la convention.

Membre gouvernementale, Canada – Le Canada prend note du rapport du gouvernement cambodgien et des informations complémentaires fournies en début de semaine, qui affirment que la liberté des citoyens de s’exprimer pacifiquement et de s’engager en politique est garantie par la législation nationale du Cambodge.

Toutefois, les conclusions présentées par la commission d’experts font état d’un recours constant aux dispositions de la législation nationale pour arrêter, poursuivre et condamner des personnes qui expriment des opinions politiques ou une opposition, notamment des membres de partis politiques d’opposition, des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes. Les condamnations donnent lieu à des peines telles que l’emprisonnement impliquant du travail pénitentiaire obligatoire, en violation de la convention. À l’approche des élections nationales de juillet 2023, la prévalence accrue de ces mesures est particulièrement préoccupante pour le Canada.

Le Canada condamne fermement le recours à la législation nationale pour poursuivre et condamner les militants politiques, les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme et les militants des médias sociaux qui expriment leur opposition ou des critiques à l’égard des autorités. Conformément aux recommandations de la commission d’experts, le Canada prie instamment le gouvernement du Cambodge:

- de revoir et réviser la loi sur les partis politiques ainsi que le Code pénal, en limitant clairement la portée de ces dispositions concernant le recours à la violence ou une incitation à la violence, et en supprimant les peines comportant du travail obligatoire de façon à s’assurer que l’application de ces dispositions dans la pratique n’aboutisse pas à la violation de la convention.

- de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que l’application des dispositions législatives ne conduise pas dans la pratique à l’imposition de peines impliquant une obligation de travail (comme du travail pénitentiaire obligatoire) à des travailleurs pour le simple fait d’organiser des grèves ou d’y participer pacifiquement.

Nous espérons sincèrement que le prochain rapport du gouvernement à la commission d’experts fera état de développements positifs.

Membre gouvernementale, Brunéi Darussalam – J’ai l’honneur de prononcer cette déclaration au nom des États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). Nous avons pris note du rapport de la commission d’experts et des informations détaillées présentées par le gouvernement royal du Cambodge.

Nous reconnaissons et apprécions les progrès réalisés par le Cambodge en matière de droits au travail et sommes rassurés par le fait que le travail forcé ou obligatoire n’a pas sa place au Cambodge, comme le prévoient les deux conventions fondamentales. L’interdiction stricte du travail forcé ou obligatoire au Cambodge, qui est respectée à la fois dans la loi et dans la pratique, est digne d’éloges.

Nous encourageons le gouvernement à poursuivre ses efforts pour promouvoir le travail décent, les droits au travail et l’amélioration des conditions de travail. Nous demandons également à la commission de garantir une interprétation et une application claires et impartiales des conventions visées, et ainsi éliminer toute ambiguïté susceptible d’entraîner une confusion entre les différentes conventions du travail.

Reconnaissant le rôle essentiel que jouent le dialogue social et le tripartisme dans la promotion de relations professionnelles harmonieuses, nous encourageons le gouvernement et ses partenaires sociaux à continuer de recourir au processus de dialogue social à tous les niveaux, afin de promouvoir l’application des normes fondamentales du travail.

Interprétation du chinois: Membre gouvernementale, Chine – Nous remercions la représentante du gouvernement du Cambodge pour ces informations détaillées. Nous avons lu le rapport de la commission d’experts avec attention. Nous notons que le gouvernement s’est sincèrement acquitté de ses obligations au titre des conventions ratifiées et qu’il a déployé des efforts inlassables à cette fin. La Constitution reconnaît et protège clairement les droits de l’homme, et la législation du travail cambodgienne est conforme aux normes internationales du travail. Elle interdit expressément le travail forcé ou obligatoire. Le gouvernement veille à ce qu’aucune sanction impliquant du travail obligatoire ne puisse être imposée aux personnes qui expriment des opinions politiques et des oppositions au système politique cambodgien. Le gouvernement collabore activement avec l’OIT et remet les documents pertinents dans les délais, ce qui témoigne de son attitude positive de coopération et de dialogue. Nous apprécions cela.

Nous pensons que l’examen de ce cas devrait se concentrer sur le respect de la convention par le Cambodge, plutôt que de s’immiscer dans les affaires intérieures d’un pays, et encore moins de politiser des questions techniques. Nous appelons cette commission à formuler une conclusion qui repose sur des faits complets et précis et qui reflète objectivement et justement les progrès réalisés par le gouvernement dans la mise en œuvre de la convention et, enfin, à prendre une décision constructive afin d’éviter de porter atteinte à la souveraineté, au système juridique et aux affaires intérieures d’un pays.

Membre gouvernemental, États-Unis d’Amérique – Nous remercions le gouvernement du Cambodge d’avoir fourni des informations supplémentaires à cette commission, en réponse aux récentes observations de la commission d’experts. Nous notons que les informations fournies portent sur le recours à diverses dispositions de la législation nationale qui permettent des peines d’emprisonnement et des sanctions impliquant une obligation de travail pour réprimer des activités protégées par la convention.

Malgré ces informations, nous restons profondément préoccupés par le fait que des travailleurs, des dirigeants syndicaux et d’autres défenseurs des droits de l’homme continuent d’être emprisonnés et soumis au travail obligatoire pour avoir exercé leurs principes et droits fondamentaux, y compris le droit de grève. Nous notons que la commission d’experts déplore vivement le recours constant à la législation nationale pour arrêter, poursuivre et condamner ces personnes, donnant lieu à des peines d’emprisonnement qui impliquent un travail pénitentiaire obligatoire.

Nous sommes également profondément préoccupés par le fait que neuf membres du Syndicat pour les droits du travail des employés khmers de l’hôtel Naga ont été condamnés pour incitation à commettre un crime au titre des articles 494 et 495 du Code pénal le 25 mai, après avoir participé à une grève pacifique dans un casino qui a commencé en décembre 2021, et que, conformément à l’article 68 de la loi sur les prisons de 2011, ils sont soumis, pendant leur incarcération, à une obligation de travail.

Nous prions instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour mettre en œuvre les récentes recommandations des organes de contrôle de l’OIT, en accordant la priorité aux domaines suivants: premièrement, s’assurer qu’aucune peine d’emprisonnement impliquant une obligation de travail ne peut être imposée pour l’exercice pacifique d’activités syndicales telles que la participation à des grèves et à des manifestations publiques, y compris dans le cas de la grève du casino; et, à cette fin, revoir et amender l’article 42 de la loi sur les partis politiques de même que les articles 445, 437bis, 494, 495, 522 et 523 du Code pénal, afin de limiter clairement la portée de ces dispositions aux seules situations impliquant un recours à la violence ou une incitation à la violence, ou en supprimant les peines comportant du travail obligatoire de façon à s’assurer que l’application de ces dispositions dans la pratique n’aboutisse pas à la violation la convention.

Nous prions instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour résoudre ces problèmes de longue date, dans le respect de la convention. Les États-Unis restent déterminés à collaborer avec le gouvernement pour faire progresser les droits des travailleurs au Cambodge.

Membre travailleur, Royaume-Uni – Je m’exprime au nom des travailleurs du Royaume-Uni, avec le soutien d’IndustriALL Global Union. La convention est essentielle pour empêcher le travail forcé ou obligatoire en tant que moyen pour réprimer les critiques à l’encontre du gouvernement et sanctionner les syndicalistes qui ont participé à des grèves. Nous constatons qu’au Cambodge, le plus souvent, les peines d’emprisonnement comportent du travail forcé. La menace d’une peine d’emprisonnement constitue donc une menace de travail forcé, et recourir à cette menace pour entraver les activités syndicales porte atteinte à la convention.

Ce cas a fait l’objet en 2018 d’une double note de bas de page de la commission, et le gouvernement a été prié de prendre des mesures, en droit et dans la pratique, pour veiller à ce qu’aucune sanction comportant du travail forcé ou obligatoire ne puisse être imposée. Pourtant, le 11 décembre de la même année, six dirigeants syndicaux nationaux ont été condamnés chacun à deux ans et demi de prison avec sursis pour avoir participé en 2013 à des grèves motivées par des revendications en vue d’une hausse des salaires minimums prévus par la loi. Ils ont été poursuivis en 2014 à la suite de multiples accusations d’actes de violence, de dommages à des biens et d’entraves à la circulation, actes qui ont été qualifiés par la suite d’actes d’instigation – ce type d’actes a une portée plus large au regard de l’article 28 du Code pénal. Les condamnations à des peines avec sursis comportaient aussi une amende collective d’un montant de quelque 6 800 dollars, ce qui a découragé ces personnes de participer à des grèves et à des manifestations. La Cour d’appel les a finalement acquittés le 28 mai 2019.

Des employeurs ont appliqué des modalités analogues de harcèlement judiciaire en engageant des poursuites pénales au titre des articles 217, 218 et 411 du Code pénal pour la participation entre 2013 et 2014 à des grèves salariales dans le secteur de l’habillement. Il s’agit là d’un problème important dans ce secteur.

À titre d’exemple, deux syndicalistes ont été reconnus coupables de violence intentionnelle assortie de circonstances aggravantes (articles 217 et 218 du Code pénal), après une grève en 2013 dans une entreprise de confection. Ils ont eux aussi été condamnés en décembre 2018 à une peine de prison avec sursis. Le même mois, le tribunal a retiré les accusations de violence intentionnelle assortie de circonstances aggravantes qui visaient neuf syndicalistes, à la suite d’une grève menée en 2014. Deux d’entre eux ont toutefois été condamnés à une peine avec sursis, dont ils ont fait appel en 2019.

Enfin, toujours dans le cadre de la vague d’actions punitives de décembre, sept syndicalistes, dont deux du syndicat du secteur de l’habillement Coalition syndicale démocratique des travailleurs cambodgiens de l’habillement (CCAWDU), ont été inculpés pour des délits commis dans des circonstances aggravantes (article 411 du Code pénal), après avoir soutenu des travailleurs en grève qui réclamaient une amélioration des conditions de travail. Ils ont été condamnés à une autre peine avec sursis et à une amende d’un montant exorbitant (8,5 millions de dollars). Dans ce cas aussi, compte tenu de la fragilité des accusations, les travailleurs ont intenté un recours en 2019. Ces sanctions pénales prévoient une peine d’emprisonnement d’un à cinq ans. Elles ont manifestement été utilisées pour condamner des syndicalistes pour leur participation à des grèves, situation qui est visée par l’article 1 d) de la convention. Même les peines avec sursis servent donc à intimider les travailleurs cambodgiens et à restreindre leur liberté de mener leurs activités légitimes, y compris leur participation à des grèves, car ils sont soumis à la menace d’un travail obligatoire en application de l’article 68 de la loi cambodgienne. Il s’agit là d’une violation flagrante de la convention.

Membre travailleuse, Italie – Je m’exprime au nom des syndicats italiens suivants: la Confédération générale italienne du travail (CGIL), la Confédération italienne des syndicats de travailleurs (CISL) et l’Union italienne du Travail (UIL). Les travailleurs italiens sont préoccupés par l’emprisonnement de syndicalistes et la forte augmentation des cas de harcèlement judiciaire contre des militants de la société civile qui défendent les droits et intérêts des communautés qu’ils représentent.

Le gouvernement recourt de plus en plus à des peines de prison prévues par le Code pénal et par d’autres lois à l’encontre de syndicalistes et de militants pour des situations couvertes par l’article 1 de la convention. À titre d’exemple, Tep Sopha, membre de l’Association d’agriculteurs pour la paix et le développement, a été condamné pour des infractions pénales et pour obstruction à l’action d’agents publics lors d’un procès intenté par le ministère de l’Environnement parce qu’il organisait les agriculteurs en vue d’une manifestation à Sihanoukville visant à contester la qualification de terres protégées attribuée à des terres où vivent traditionnellement ces agriculteurs. Il a été condamné à un an de prison, le 23 janvier 2019.

Seb Thon et dix autres membres de l’organisation ont été poursuivis par un propriétaire terrien pour dommages volontaires et agressions au cours d’une manifestation d’agriculteurs contre l’accaparement des terres en décembre 2019. Seb Thon a été condamné à un an de prison avec sursis et à une amende. L’appel qu’il a formé est toujours en instance, depuis 2020.

Après les poursuites engagées contre Rong Chhun, président de la CCU, en juillet 2020, pour des accusations d’incitation à l’insurrection parce qu’il avait fait une déclaration publique sur la perte de terres que subissaient les agriculteurs, le ministère de l’Intérieur et les autorités de police ont arrêté dix militants de la société civile et de la jeunesse, mis en examen en vertu des articles 494 et 495 du Code pénal. Ces personnes ont été libérées avec sursis en novembre 2021. En 2021, quatre militants de l’organisation environnementale Mother Nature ont été arrêtés et inculpés pour insulte au Roi et conspiration. En novembre 2022, un défenseur des forêts a été condamné à cinq ans de prison en vertu de l’article 97 de la loi sur les forêts. En mai 2023, des défenseurs des droits fonciers de la Coalition de la communauté des agriculteurs cambodgiens ont été arrêtés après leur atelier de planification de projets, organisé en interne.

Nous prions instamment le gouvernement d’abandonner toutes les charges en suspens et de cesser de prononcer des peines privatives de liberté comportant du travail obligatoire et du travail forcé à l’encontre de syndicalistes et de militants qui exercent simplement leurs droits et libertés fondamentales.

Observateur, Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) – Je prends la parole aujourd’hui pour soulever la question de l’arrestation et de la détention arbitraires de plusieurs membres de notre organisation au Cambodge, le Syndicat pour les droits du travail. Parmi les personnes arrêtées figurait sa présidente, Chhim Sithar. Cette arrestation a eu lieu à la suite d’une grève pacifique en opposition à des actes répétés de pratiques antisyndicales chez leur employeur à Phnom Penh. Ils sont sanctionnés pour avoir participé à une grève, ce qui est contraire à l’article 1 d) de la convention.

En janvier 2022, plusieurs rapporteurs spéciaux des Nations Unies ont dénoncé leur arrestation, estimant que «de nombreuses arrestations de grévistes, pour la plupart des femmes, ont été opérées de manière violente et semblent contrevenir aux libertés d’association, de réunion et d’expression». Les militants syndicaux ont été accusés d’«incitation à commettre un crime» au titre des articles 494 et 495 du Code pénal. L’ancien Directeur général de l’OIT, Guy Ryder, avait appelé le Premier ministre du pays à «user de ses pouvoirs pour assurer la libération immédiate de tous les travailleurs détenus et l’abandon de toutes les charges criminelles liées à leur activité syndicale».

Or, le mois dernier, un tribunal a reconnu coupables neuf dirigeants du Syndicat pour les droits du travail, dont sa présidente. Chhim Sithar a été condamnée à deux ans de prison, dont huit mois ont déjà été purgés. Cinq autres personnes ont été condamnées à un an et demi de prison, trois autres ont été condamnées à un an de prison avec sursis. Comme la commission d’experts l’a indiqué précédemment, les peines de prison impliquent un travail obligatoire.

Nous condamnons l’emprisonnement de nos membres pour leur activité syndicale, ainsi que l’absence totale de procédure régulière et de droit à un procès équitable pour se défendre contre des accusations sans fondement. Nous souhaiterions faire écho à la déclaration de la commission d’experts qui constate «l’absence de progrès en ce qui concerne la protection de la liberté d’expression au Cambodge» et «déplore vivement que les dispositions de la législation nationale, y compris du Code pénal, continuent à être utilisées pour poursuivre et condamner des personnes qui expriment des opinions politiques ou manifestent une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, ce qui entraîne l’imposition de peines de prison impliquant du travail pénitentiaire obligatoire».

Nous reprenons les conclusions du Comité de la liberté syndicale, qui rappelait en mars 2023 que «nul ne devrait être privé de liberté ni faire l’objet de sanctions pénales pour avoir déclenché ou participé à une grève pacifique» et demandons au gouvernement de faire en sorte que toutes les accusations portées contre les dirigeants et les membres du Syndicat pour les droits du travail pour avoir participé à une grève pacifique soient abandonnées. Nous prions instamment le gouvernement du Cambodge de libérer immédiatement la présidente du Syndicat pour les droits du travail, Chhim Sithar, et tous les membres du Syndicat pour les droits du travail emprisonnés, ainsi que toutes les personnes emprisonnées arbitrairement.

Observateur, Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) – L’article 1 d) de la convention interdit expressément le recours à des sanctions comportant toute forme de travail forcé ou obligatoire en tant que punition pour avoir participé à des grèves, c’est-à-dire à toute sanction comportant du travail obligatoire pour le simple fait d’avoir organisé ou participé à des grèves. Or les dispositions du Code pénal prévoyant de telles peines sont régulièrement utilisées pour cibler des syndicalistes qui mènent une grève légale.

Les condamnations prononcées en application des dispositions du Code pénal applicables peuvent conduire à du travail obligatoire en vertu de l’article 68 de la loi sur les prisons. Il ne s’agit pas uniquement de la réadaptation des prisonniers. L’article 71 de la loi sur les prisons permet au directeur des établissements pénitentiaires de nouer des contrats avec des entités privées, de créer de l’emploi pour le secteur pénitentiaire, pour les programmes d’artisanat et d’agriculture, ainsi que de nouer des contrats de vente des produits issus de ces programmes. Des entités privées peuvent tirer profit du travail pénitentiaire obligatoire, ce qui constitue en soi une violation de la convention no 29. La pénalisation des grèves, assortie de la possibilité d’imposer du travail obligatoire, est aggravée par le harcèlement judiciaire constant que subissent les syndicalistes de la part des employeurs et des briseurs de grève, ainsi que par une justice pénale ambiguë. Les condamnations assorties de peines de travail obligatoire pour participation à des grèves créent également une atmosphère d’intimidation et de peur qui porte préjudice à la liberté syndicale.

La commission d’experts a mis en lumière le cas de Van Narong et de Pel Voeun, travailleurs du secteur des transports condamnés à six mois de prison pour dénonciation calomnieuse, en application des articles 311 et 312 du Code pénal. Il est important de comprendre les faits pour bien comprendre l’affaire. Après une grève des travailleurs d’une grande compagnie d’autobus en 2015, deux dirigeants syndicaux ont été arrêtés après avoir été agressés par des membres d’une association de tuk-tuk et de motos-taxis. Ils ont été arrêtés pour des chefs inventés de violences volontaires aggravées et d’obstruction à l’action d’agents publics en vertu du Code pénal, avant d’être ensuite libérés. Les choses n’en sont pas restées là. La compagnie d’autobus a intenté une action en justice pour ces mêmes infractions alléguées contre ces deux personnes et contre quatre dirigeants de la CLC qui n’étaient même pas présents au moment de la manifestation. D’autres procédures pénales ont été intentées contre un total de 46 syndicalistes, dont Van Narong et Pel Voeun, par la compagnie d’autobus, des briseurs de grève et des contre-manifestants. Le fait que le gouvernement ait affirmé que Van Narong et Pel Voeun avaient été libérés sous caution n’est pas vraiment rassurant, car ils savent qu’ils peuvent être condamnés pour des crimes qu’ils n’ont pas commis, et notamment à du travail pénitentiaire obligatoire.

Nous prions le Cambodge de respecter l’article 1 d) de la convention et de ne plus imposer de sanctions comportant du travail pénitentiaire obligatoire aux travailleurs qui participent à des grèves.

Représentant gouvernemental – Ma délégation souhaite remercier tous les orateurs et les délégués pour leurs interventions constructives et leurs commentaires judicieux. Nous souhaitons réaffirmer encore l’engagement inébranlable du Cambodge à respecter la convention en ce qui concerne l’abolition du travail forcé dans notre pays. Contrairement aux allégations d’autres délégations, le Cambodge s’engage sans relâche à promouvoir et à protéger les droits de l’homme. La liberté de réunion, d’association et d’expression des personnes et des sociétés civiles sont garanties dans le Royaume, comme le prévoient la Constitution et d’autres instruments internationaux. En tant que pays qui défend résolument l’État de droit, renforcer la mise en œuvre de la législation est fondamental pour notre bonne gouvernance. Toute tentative visant à qualifier, indûment, de pression politique les activités d’application de la loi porte atteinte à l’État de droit. À ce titre, nous nous devons de préciser que des individus, impliqués dans des activités de grève, ont été appréhendés non pas simplement en raison de leur participation à des grèves illégales, mais aussi parce que leurs actes avaient gravement perturbé l’ordre et la sécurité publics et porté atteinte au droit à la vie d’autrui, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19. Ces affaires sont en instance devant les tribunaux.

Nous affirmons que le travail forcé est totalement incompatible avec nos valeurs et qu’il n’a pas sa place dans le Royaume. À ce jour, il n’existe aucune preuve étayée de l’utilisation du travail obligatoire en prison pour sanctionner des personnes ayant simplement exprimé leurs opinions politiques ou manifesté leur opposition au système établi, ou ayant participé à des grèves au Cambodge. Ainsi, l’absence de preuves de travail forcé remettrait en question la validité d’une note de bas de page concernant le Cambodge. En fait, le travail pénitentiaire est avant tout un processus de réadaptation destiné à faciliter la réinsertion des prisonniers dans la société et sur le marché du travail. En vertu de la loi sur les prisons, les condamnés présentant de «faibles risques», qui ont les capacités physiques requises, peuvent être appelés à effectuer des travaux dans le cadre des activités quotidiennes de la prison, à exécuter des tâches communautaires ou à participer à l’industrie pénitentiaire et à des activités artisanales et agricoles dans l’établissement pénitentiaire. Ces emplois ne sont pas attribués en fonction de l’opposition politique, de la défense des droits de l’homme ou de l’activité journalistique, et les mesures de sécurité sont mises en œuvre avec vigilance. Toutefois, nous constatons avec regret qu’une poignée de délégués a tenté d’exploiter et de politiser cette discussion en faveur d’un groupe d’individus poursuivis pour une conspiration qui visait à renverser un gouvernement légitimement élu. Dans le présent cas, force est de souligner qu’un tel délit va au-delà d’un simple délit pénal; il s’agit d’une attaque directe contre le peuple et l’essence même de la démocratie. Un crime est un crime, et d’autres aspirations ne sauraient le justifier. Toutes ces charges sont retenues en raison d’infractions anticonstitutionnelles et criminelles, et non pour un motif politique ou un motif inventé de toutes pièces.

Quant à la liberté d’expression et de presse, elle reste vivante et dynamique dans le Royaume. Le média dont la licence a été révoquée avait gravement porté atteinte à la profession de journaliste en diffusant des fausses informations. Ainsi, la mesure prise à l’encontre d’un média non professionnel n’a pas enfreint la liberté de presse ou la liberté d’expression dans le Royaume, mais a contribué à renforcer la profession de journaliste. Certes, il n’est pas surprenant que, aujourd’hui, certains délégués explorent et exploitent tous les moyens pour placer le Cambodge sur les radars internationaux. L’explication est simple: il y aura des élections générales en juillet cette année. Et c’est sans vergogne qu’ils enfreignent les règles et les pratiques pour diaboliser notre gouvernement. Certaines questions – dissolution d’un parti politique, interdiction faite à un parti politique de participer aux élections de juillet, révocation de la licence d’un média – ne relèvent ni de l’ordre du jour actuel ni de la convention. Par conséquent, nous rappelons aux délégués que la politisation entrave non seulement un dialogue productif, mais menace aussi l’intégrité et le mandat de cette commission.

Pour conclure, ma délégation souhaite exprimer sa profonde gratitude à la commission pour son observation, ainsi qu’à tous les États membres de l’ASEAN, aux distingués délégués, aux représentants des travailleurs et des employeurs et à d’autres personnes pour leurs interventions inestimables et le soutien qu’ils ont apporté au Cambodge tout au long de ce processus.

Membres employeurs – Les membres employeurs remercient les différents orateurs qui ont pris la parole, et notamment le gouvernement du Cambodge pour son intervention et les informations qu’il a fournies. Nous rappelons à la commission que cette convention est une convention fondamentale, qui doit donc faire l’objet d’une attention particulière de la part des gouvernements, des travailleurs et des employeurs. Notre position sur ce cas est en accord avec les recommandations de la commission d’experts. Les membres employeurs s’opposent à toute forme de restriction illégale de la liberté d’expression et des droits fondamentaux qui y sont liés. Mais nous réitérons notre point de vue précédemment exprimé, à savoir qu’avant de formuler des conclusions nous devons enquêter sur toutes les circonstances, d’où l’appel à davantage d’informations sur des aspects tels que l’emprisonnement de différentes personnes. Compte tenu de tous ces éléments, les membres employeurs recommandent au gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces afin:

- de garantir qu’aucune sanction impliquant du travail obligatoire ne puisse être imposée aux personnes qui expriment des opinions politiques ou manifestent leur opposition au système établi, ce qui est contraire à l’article 1 a) de la convention, et que l’application des dispositions législatives ne conduise pas en pratique à l’imposition de sanctions aux travailleurs pour le simple fait d’organiser des grèves ou d’y participer pacifiquement, en violation de l’article 1 d) de la convention;

- de revoir la formulation des articles pertinents du Code pénal et de la loi sur les partis politiques, en limitant la portée de ces dispositions à des situations impliquant un recours à la violence ou une incitation à la violence, ou en supprimant les peines comportant du travail obligatoire;

- de fournir une copie du texte des amendements de 2018 au Code pénal qui incrimine la formulation de critiques à l’égard du Roi et de fournir des informations sur l’application dans la pratique des dispositions du Code pénal et de la loi sur les partis politiques;

- de fournir une copie de la décision de justice relative à l’arrestation et à la poursuite des quatre dirigeants syndicaux accusés d’avoir organisé une grève illégale.

Enfin, constatant l’absence de progrès en matière de protection de la liberté d’expression et le fait qu’aucune assistance technique du BIT n’a encore été demandée, nous appelons une nouvelle fois le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT pour l’aider à mettre en œuvre ces recommandations. Nous espérons que le gouvernement fournira les informations demandées d’ici au 1er septembre de cette année et adoptera en temps voulu les mesures indiquées par cette commission.

Membres travailleurs – Nous regrettons les critiques formulées à l’égard du choix indépendant et impartial posé par la commission d’experts, conformément à son mandat, de sélectionner le cas du Cambodge comme un cas de double note de bas de page sur base des critères objectifs rappelés au paragraphe 144 de son rapport. La commission d’experts expose également les raisons de la sélection du cas comme un cas de double note de bas de page.

Nous avons également entendu des tentatives de justifier les poursuites et les emprisonnements de syndicalistes en renvoyant aux dispositions du Code pénal national. À ce sujet, le groupe des travailleurs souhaiterait insister sur la prudence dont tout un chacun devrait faire preuve lorsqu’il est renvoyé à la législation pénale nationale pour justifier les poursuites et les emprisonnements de membres des organisations de travailleurs et d’employeurs pour le simple fait d’avoir exercé leurs droits et libertés civils consacrés par la convention.

Les violations de la convention par le gouvernement du Cambodge ont déjà fait l’objet d’une discussion devant notre commission en 2018. Le contexte plus général de violations flagrantes des libertés publiques, en ce compris des libertés syndicales, suscitent depuis longtemps de profondes inquiétudes pour le groupe des travailleurs.

Nous avons pu le constater au cours de nos discussions, la situation dans le pays ne s’est pas améliorée, que du contraire. Nous devrons malheureusement répéter la plupart de nos recommandations au gouvernement du Cambodge. En 2018 déjà, le Cambodge avait fait l’objet d’une double note de bas de page, ce qui renforce encore nos préoccupations quant à la gravité de la situation.

Plus récemment, en 2021, notre commission s’est également penchée sur l’examen du respect par le Cambodge de la convention no 87. À l’issue de cet examen, une mission de contacts directs a été organisée en 2022. Les problématiques traitées à cette occasion entretiennent des liens étroits avec l’examen du respect de la convention par le Cambodge et nous invitons le gouvernement du Cambodge à donner suite aux recommandations émises à l’issue de cette mission.

Le gouvernement a aujourd’hui l’obligation de s’engager à prendre toutes les mesures législatives pour veiller à ce que des peines comportant un travail obligatoire ne soient pas imposées pour faire taire et censurer l’expression pacifique des opinions politiques. Le droit d’assemblée et de réunion est le moyen par lequel les citoyens peuvent s’efforcer d’assurer la diffusion et l’acceptation de leurs opinions et doivent donc être protégés eux aussi.

De plus, l’article 1 d) de la convention interdit l’imposition de travail obligatoire comme punition pour avoir organisé des grèves ou y avoir participé pacifiquement. Le gouvernement doit veiller à ce que la liberté syndicale puisse s’exercer dans un climat exempt d’intimidation et de violence. Toutes les personnes emprisonnées pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression et de réunion doivent être libérées immédiatement et sans condition. Les poursuites et condamnations prononcées doivent être abandonnées. Ces éléments ont également fait l’objet d’une plainte auprès du Comité de la liberté syndicale, qui a rendu un rapport en mars 2023. Nous invitons le gouvernement à donner suite aux recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale.

Des réformes institutionnelles sont également nécessaires pour garantir l’indépendance et l’impartialité du pouvoir judiciaire. La liberté d’expression et de réunion pacifique, la liberté syndicale et la protection contre les arrestations arbitraires doivent être garanties comme garde-fou contre l’imposition d’un travail obligatoire pour l’exercice de ces droits. Cela nécessite le ferme engagement à entreprendre de vastes réformes législatives au regard de certaines lois qui ne sont manifestement pas conformes à la convention.

Il s’agira plus particulièrement de revoir les dispositions législatives suivantes en vue de les rendre pleinement conformes au prescrit de la convention:

- l’article 42 de la loi sur les partis politiques, tel que modifié en 2017, qui punit jusqu’à un an de prison plusieurs infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par une décision de justice ou dont l’enregistrement a été refusé;

- les articles 494 et 495 portant sur l’incitation au trouble de la sécurité publique par des discours, des écrits, des images ou toute autre communication audiovisuelle en public ou pour le public;

- l’article 522 relatif à la publication de commentaires visant à exercer une coercition illégale sur les autorités judiciaires;

- l’article 523 sur le discrédit des décisions de justice du Code pénal de 2009;

- les articles 305 à 309 concernant les délits de diffamation et d’injure;

- les articles 445 et 437bis du Code pénal relatifs aux délits d’insulte au Roi et de critique du Roi.

La liberté d’expression et de réunion, le droit d’action collective et le droit de ne pas être astreint au travail forcé et obligatoire sont des questions extrêmement importantes pour les travailleurs, mais aussi pour les valeurs de l’OIT dans son ensemble.

Par conséquent, le gouvernement doit travailler avec l’OIT pour donner pleinement effet à la convention. Une double note de bas de page signifie que la commission d’experts est gravement préoccupée. Les membres travailleurs ont évoqué à cet égard l’article 68 de la loi sur les prisons, suivant lequel les détenus jugés physiquement aptes doivent être affectés au travail quotidien de la prison, et se sont dit opposés à la demande visant à supprimer du compte rendu les commentaires relatifs à la loi sur les syndicats et au projet de loi sur le salaire minimum.

Nous invitons le gouvernement du Cambodge à se prévaloir de l’assistance technique de l’OIT afin de mettre en œuvre toutes ces recommandations. Au vu de la gravité de la situation, nous invitons également le gouvernement à accepter la venue d’une mission tripartite de haut niveau.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des informations que le représentant gouvernemental a fournies par écrit et oralement et de la discussion qui a suivi.

La commission a vivement déploré que les dispositions de la législation nationale, y compris du Code pénal, continuent à être utilisées pour poursuivre et condamner des personnes qui expriment des opinions politiques ou manifestent une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, ce qui entraîne l’imposition de peines de prison impliquant du travail pénitentiaire obligatoire.

La commission s’est déclarée profondément préoccupée par l’arrestation et l’emprisonnement de syndicalistes et d’autres personnes pour avoir exercé leurs libertés civiles et exprimé des opinions politiques différentes de celles du gouvernement.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission prie instamment le gouvernement du Cambodge de prendre des mesures efficaces et assorties de délais pour:

- garantir que le droit d’avoir ou d’exprimer certaines opinions politiques ou de manifester son opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, sans menace de sanctions comportant du travail obligatoire, est pleinement respecté;

- s’assurer que l’application de dispositions législatives prévoyant l’imposition de sanctions comportant l’obligation de travailler ne sont pas incompatibles avec l’article 1 de la convention;

- abroger ou modifier les dispositions pertinentes du Code pénal et de la loi sur les partis politiques prévoyant, et débouchant sur, des sanctions comportant l’obligation de travailler, en consultation avec les partenaires sociaux, afin de les mettre en conformité avec la convention;

- libérer immédiatement et sans condition, annuler les condamnations et abandonner toutes les charges contre des personnes qui ont exprimé des opinions politiques ou manifesté leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, qui ont été sanctionnées pour avoir participé à des grèves;

- garantir l’accès à des recours judiciaires efficaces pour les victimes de travail obligatoire en violation de la convention;

- mettre en œuvre les recommandations sur les questions relevant de la convention formulées par la mission de contacts directs qui a eu lieu en mars-avril 2022, dans le cadre de la convention no 87;

- élaborer un plan d’action, en consultation avec les partenaires sociaux, pour mettre en œuvre ces recommandations sans délai.

La commission prie le gouvernement de fournir toute information pertinente demandée par la commission d’experts avant le 1er septembre 2023, ainsi que des informations détaillées sur les mesures prises pour mettre en œuvre ces recommandations.

La commission invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique de l’OIT pour mettre en œuvre efficacement toutes les recommandations de la commission.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2018, Publication : 107ème session CIT (2018)

 2018-KHM-C105-Fr

Un représentant gouvernemental a souligné le rôle crucial de la commission d’experts afin de garantir le respect de toutes les conventions internationales du travail ainsi que d’autres instruments pertinents relatifs aux droits de l’homme. Le gouvernement du Cambodge s’est engagé à faire de son mieux pour respecter toutes ses obligations internationales. Tel que prévu par la Constitution, les droits au travail et les droits de l’homme sont garantis en droit et en pratique au Cambodge. Le travail forcé est prohibé de manière explicite par l’article 15 du Code du travail. S’agissant de la définition du travail forcé que donne la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, ainsi que de ses exceptions, la loi sur les prisons a pour but de fournir aux prisonniers l’éducation, la formation et la réhabilitation professionnelles qui permettront leur réinsertion dans la société et empêcheront la récidive tout en leur garantissant une détention sécurisée, une bonne santé et un traitement humain, conformément aux principes internationaux et aux règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté. L’article 68 de la loi sur les prisons inclut toutes les normes internationales et les meilleures pratiques mises en œuvre dans le domaine de l’industrie pénitentiaire dans certains pays développés. Il ne faut donc pas considérer cette disposition comme contraire aux conventions nos 29 et 105. L’article 68 prévoit que les détenus condamnés qui présentent peu de risque et qui ont été jugés physiquement aptes doivent être affectés à un travail dans le cadre du fonctionnement quotidien de la prison, accomplir tout travail d’intérêt public profitable à la communauté ou être obligés de participer aux ateliers privatisés d’artisanat et d’agriculture. L’orateur a exprimé sa profonde préoccupation quant aux commentaires et conclusions de la commission d’experts au sujet de l’application de la convention no 105. En ce qui concerne la demande d’informations à jour sur la situation en matière de liberté syndicale au Cambodge et la feuille de route destinée au traitement de cette question, l’orateur a assuré que ces informations seront fournies. En raison des prochaines élections nationales, la situation est devenue très politique. En outre, certaines ONG et la société civile n’éprouvent aucune hésitation lorsqu’il s’agit de discréditer, diaboliser et finalement détruire le gouvernement du Royaume du Cambodge et le parti au pouvoir dont les réalisations satisfont indiscutablement l’ensemble du peuple cambodgien.

Les membres employeurs ont souligné que c’est la première fois que la Commission de la Conférence examine l’application par le Cambodge de la convention no 105. La commission d’experts n’a émis que deux observations pertinentes au sujet de l’application de la convention, une en 2015 et une autre en 2017. Ces observations évoquent une application irrégulière du Code pénal de 2009 et rapportent des cas concernant des personnalités politiques et des syndicalistes placés en garde à vue pour des infractions punies de simples amendes par le Code pénal. Il n’est fait aucune mention de personnes ayant été soumises à des conditions relevant du travail forcé pendant leur détention. Or, pour qu’une violation de la convention soit constatée, il faut démontrer que des personnes sont contraintes à des activités interdites. En l’absence d’une preuve démontrant clairement une violation de la convention, aucun cas ne devrait être examiné par cette commission ni faire l’objet d’une double note de bas de page. Il ne suffit pas de supposer que la détention en elle-même implique le travail forcé. Le fait que la détention soit légale ou non n’est pas déterminant pour savoir si la convention a été violée. Les observations qui ont servi de toile de fond à cette affaire s’appuient largement sur les rapports de 2014, 2016 et 2017 de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge. Ces rapports attirent l’attention et expriment une vive préoccupation sur la question des droits de l’homme au Cambodge. Ces questions concernent tout un chacun et les membres employeurs sont conscients des préoccupations stratégiques régionales et mondiales et demandent que des pressions soient exercées sur le Cambodge à cet égard. Cependant, la commission ne devrait pas se prêter à servir de tribune pour des sujets de préoccupations plus larges, que ce soit à l’égard du Cambodge ou dans toute autre situation. Le mandat et le devoir de la commission consistent à examiner les cas de violation des conventions ratifiées et non à s’intéresser à des questions qui sont traitées de manière plus appropriée dans d’autres enceintes. Ainsi, les conclusions sur ce cas devraient se limiter à observer que l’application incohérente par le Cambodge de son Code pénal peut mener à ce qu’une personne détenue soit soumise à des pressions impliquant des formes de travail forcé. En l’absence de preuve de l’existence de tels cas, la commission devrait se borner à réclamer du gouvernement l’assurance qu’aucune personne, détenue ou non, n’est ni ne sera soumise à des conditions de travail forcé. Telle était la position adoptée par la commission d’experts dans son observation de 2015 lorsqu’elle a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires visant à ce qu’aucune sanction comportant un travail obligatoire ne puisse être imposée pour avoir soutenu ou exprimé des opinions politiques. Il ne fait aucun doute que la commission n’est pas compétente pour élaborer des conclusions sur des pratiques qui, bien que préoccupantes en elles-mêmes, ne constituent pas des violations d’une norme de travail ratifiée par le Cambodge.

Les membres travailleurs ont rappelé que la commission a examiné pratiquement chaque année des cas de manquement grave du Cambodge au respect des droits et principes fondamentaux au travail et cela, hélas, avec des résultats très décevants. La commission d’experts a attribué une double note de bas de page à ce cas parce qu’elle juge préoccupantes les mesures législatives et pratiques adoptées par le gouvernement, et il n’y a aucune raison de mettre cette décision en question. Les droits civils fondamentaux, comme le droit à la liberté d’expression et le droit d’assemblée et de réunion, ne sont pas garantis dans ce pays. Au contraire, des travailleurs et des citoyens sont systématiquement l’objet de lourdes condamnations pénales assorties de l’obligation de travailler parce qu’ils ont exercé des droits que leur garantit la convention. Le recours à des sanctions impliquant du travail forcé ou obligatoire en tant que moyen de censurer l’expression d’une opposition sur des matières politiques, sociales ou économiques, ou de punir la participation à des grèves est clairement interdit par l’article 1 de la convention. Le droit d’assemblée et de réunion est le moyen par lequel les citoyens peuvent s’efforcer d’assurer la diffusion et l’acceptation de leurs opinions et relève donc clairement de la protection assurée par cet instrument. Or, dans les faits, des dirigeants et adhérents de syndicats sont privés de l’exercice de ces droits. Cette commission ainsi que d’autres organes de contrôle de l’OIT ont condamné de manière répétée l’incarcération de syndicalistes cambodgiens pour avoir exprimé leurs opinions et s’être engagés dans des activités pacifiques telles que des grèves. Les membres travailleurs regrettent vivement que, en dépit de recommandations très claires adressées au gouvernement, la répression des syndicalistes continue. Le nombre des syndicalistes menacés de chefs d’inculpation pénale ou de peines de prison en représailles pour des activités syndicales pacifiques ne cesse d’augmenter. La Confédération cambodgienne du travail compte à elle seule au moins 26 dirigeants et membres actuellement menacés de sanctions pénales pour avoir exprimé leurs opinions sur des politiques sociales et économiques qui posent problème. Les lois sur le travail qui ont été adoptées récemment ou celles qui sont en discussion semblent conçues pour renforcer encore l’emprise sur les syndicalistes. La commission d’experts ainsi que d’autres organes des Nations Unies ont critiqué la loi sur les syndicats de 2016 et la loi sur les associations et organisations non gouvernementales (LANGO) de 2015 qui avaient pour effet de priver les enseignants, les fonctionnaires et les travailleurs domestiques de la liberté syndicale. Malgré les modifications apportées au projet de loi sur le salaire minimum, son texte reste problématique, en particulier parce qu’il interdit la diffusion d’études sur les salaires qui n’ont pas été soumises au Conseil tripartite national dans les quinze jours. Une telle entrave pourrait avoir un impact considérable sur la liberté économique et les économistes, et les universitaires pourraient voir leurs possibilités de diffuser, consulter et discuter des recherches essentielles sur des questions économiques et sociales considérablement réduites. En outre, le projet de loi prévoit des amendes administratives lourdes et disproportionnées sans possibilité de recours explicite. Faute d’être acquittées, ces amendes pourraient conduire à une inculpation pénale. Compte tenu d’une incapacité supposée de beaucoup de travailleurs et de dirigeants syndicaux à acquitter de lourdes amendes, par un effet d’accumulation, ces dispositions pourraient avoir pour résultat de criminaliser l’exercice pacifique des libertés fondamentales. Ces questions ont un rapport incontestable avec la discussion de l’an dernier sur la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Dans ses conclusions, la commission invitait le gouvernement à faire en sorte que la liberté syndicale puisse être exercée dans un climat exempt d’intimidation et de violence envers les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives. Elle priait aussi le gouvernement d’organiser des consultations avec les partenaires sociaux en vue d’élaborer une feuille de route assortie de délais pour ce qui est de la mise en œuvre des recommandations. Dans ses entretiens avec la mission de contacts directs qui s’est rendue dans le pays en mars 2017, le gouvernement a admis que la loi sur les syndicats présentait de nombreuses carences. Il est donc décevant que, alors même que ces recommandations aient été formulées un an plus tôt, le gouvernement n’ait démarré ses consultations qu’il y a quelques semaines; il faut qu’il explique les causes de ce retard excessif et comment il compte remédier à sa lenteur.

Les membres travailleurs ont exprimé leur vive préoccupation devant la détérioration du climat politique et social, y compris les procédures intentées contre des opposants politiques et des défenseurs des droits de l’homme et leur emprisonnement. Bien que le Code pénal ne punisse les délits de diffamation et insultes publiques que de peines d’amendes, la loi a été appliquée de manière arbitraire afin d’infliger des peines d’emprisonnement aux opposants politiques et aux défenseurs des droits de l’homme. La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge a noté que la palette des dispositions du Code pénal utilisées pour entraver la liberté d’expression ne cesse de s’élargir, et elle a insisté pour que les lois soient appliquées de manière cohérente par le gouvernement et les tribunaux. Elle a mis en garde contre le fait qu’une répression pénale des activistes pourrait engendrer un climat de crainte et d’intimidation susceptible d’affecter de manière négative le droit à la libre expression, ce qui serait propice à susciter l’autocensure. En outre, la répression dirigée contre les syndicalistes et les activistes de la société civile coïncidait avec la dissolution du principal parti d’opposition, le Parti du sauvetage national du Cambodge (PSNC), par la Cour suprême. Bien qu’elle ait été modifiée en 2017, la loi sur les partis politiques a conservé ses dispositions qui font problème. Divers délits en rapport avec l’administration ou la gestion d’un parti politique qui a été dissous, ou dont les activités ont été suspendues par la justice, ou dont l’enregistrement a été refusé sont passibles de peines de prison pouvant aller jusqu’à un an et qui impliquent du travail forcé. Au total, 118 membres du PSNC sont interdits de toute activité politique pour cinq ans. Il est impossible de ne pas partager la profonde préoccupation de la commission d’experts devant les détentions et poursuites à grande échelle ciblant le parti d’opposition, la société civile et les syndicats. L’absence de garanties légales pour la liberté d’expression, la liberté de se réunir pacifiquement, la liberté syndicale ainsi que la protection contre l’arrestation arbitraire expose incontestablement les travailleurs et les citoyens au travail obligatoire à titre de punition pour avoir tenu ou exposé des opinions politiques ou idéologiques. Compte tenu de l’absence d’indépendance du pouvoir judiciaire qu’avait relevée la mission de contacts directs en 2008, cette situation est particulièrement préoccupante. La capacité du système judiciaire à s’acquitter de sa mission est compromise par son manque de moyens d’action; le judiciaire est soumis à l’ingérence du politique, ce qui compromet sa capacité à exercer ses fonctions de manière impartiale et indépendante. La Rapporteuse spéciale des Nations Unies a noté que beaucoup sont toujours privés d’un accès à la justice et s’est dite préoccupée par la fréquence et la longueur excessive des détentions provisoires. Les procédures pénales sont truffées d’incohérences et d’irrégularités; les règles de la preuve diffèrent suivant les juges. Une telle pratique contrevient au principe qui veut que toute personne accusée d’un délit pénal a le droit de connaître et de contester les preuves retenues contre elle. La cohérence et l’équité, en particulier dans les affaires criminelles, nécessitent que la règle de la preuve soit la même dans tous les cas similaires. Des élections générales sont imminentes au Cambodge. Les libertés fondamentales et l’état de droit seraient dépourvus de sens s’ils n’étaient réaffirmés lorsque le débat tourne au contentieux. La liberté d’expression et la liberté syndicale sont essentielles à la démocratie, au progrès social et à une croissance économique inclusive. Limiter ces droits sous la menace du travail obligatoire constitue non seulement une négation des libertés de base, mais aussi une pierre d’achoppement sur la voie du pays vers la démocratie et la prospérité.

La membre employeuse du Cambodge a souligné que tout ce qui n’est pas lié à l’application de la convention no 105, comme les questions relatives à la loi sur le salaire minimum, la loi sur les syndicats, les peines d’emprisonnement ou toute autre sanction, à l’exception de celles relatives au travail forcé, n’est pas pertinent et devait être supprimé du procès-verbal. La discussion de ce cas doit se limiter au travail forcé. Dès lors qu’il n’existe pas de preuve de violation manifeste de la convention, il est inacceptable que le Cambodge soit à nouveau interpelé par la commission. L’oratrice souligne l’impact que la discussion de ce cas risque d’avoir sur la décision d’autres gouvernements et d’entreprises de s’engager et d’investir au Cambodge. Le simple fait que ce cas soit discuté au titre de la convention no 105 est de nature à donner du Cambodge l’image (ou l’impression fausse) d’un pays pratiquant le travail forcé. Ce n’est pas le cas puisque aucune preuve pertinente n’a été apportée à cet effet. Les employeurs cambodgiens ont un vif intérêt dans les travaux de la commission en ce qui concerne les défis liés à l’application des conventions. Ils sont d’ailleurs présents afin de faire face à ces défis pour protéger leurs entreprises ainsi qu’un environnement propice aux investissements. Le Cambodge connaît un climat économique dynamique qui évolue et se diversifie rapidement. L’engagement de gouvernements et d’investisseurs du monde entier est indispensable pour la croissance et la création d’emplois de qualité au Cambodge. Chaque pays mérite un examen équitable et régulier par la commission d’experts. Or le Cambodge a été injustement sanctionné par une double note de bas de page à propos d’une situation qui a été éradiquée. L’évaluation de la commission d’experts démontre l’absence de violation de la convention. Bien qu’existent uniquement des possibilités de violation, la situation est la même dans d’autres pays ayant une législation similaire. Cette commission devrait examiner uniquement les violations de conventions les plus graves. La conclusion clé de la discussion de ce cas devrait être un appel à revoir la transparence et l’intégrité des procédures pour les doubles notes de bas de page.

Le membre travailleur du Cambodge a affirmé que les dirigeants et les membres des organisations syndicales indépendantes rencontrent toujours de graves problèmes, tels que meurtres, détentions, discrimination, violence et sanctions, lorsqu’ils tentent d’exercer leurs droits. En 2004, Chea Vichea, Ros Sovanareth et Hy Vuthy ont été assassinés. En 2013, pendant une grève générale organisée pour réclamer une hausse du salaire minimum dans l’industrie du vêtement, cinq travailleurs ont été tués, 23 ont été emprisonnés pendant des mois et plus de 30 autres personnes ont été blessées. Les droits de réunion publique et de grève ont été restreints, et les syndicats ne peuvent plus rencontrer leurs membres que dans des lieux privés. Six dirigeants syndicaux restent sous le coup d’une accusation pénale pour avoir pris part aux grèves de 2013. Le gouvernement est prié d’abandonner les poursuites à leur encontre, de mettre en œuvre les recommandations de la commission et de fournir des rapports aux trois instances chargées d’enquêter sur les violences et les assassinats survenus pendant la grève de 2013 afin de traduire leurs auteurs en justice et d’indemniser les victimes. De 2014 à 2017, des dirigeants syndicaux et des milliers de travailleurs ont subi des violences de la part de tiers ou de la police alors qu’ils exerçaient leurs droits lors d’actions collectives, 26 travailleurs ont été poursuivis au pénal et 17 d’entre eux ont été emprisonnés pendant deux à huit mois. En 2016 et 2017, les syndicats ont porté ces cas à la connaissance de la commission qui a spécifiquement demandé au gouvernement d’y apporter remède, mais aucun progrès n’a été enregistré et, dans l’un des cas, de nouvelles poursuites ont été intentées contre les dirigeants. Le gouvernement s’est engagé à appliquer les recommandations de la commission en suivant une feuille de route composée d’actions concrètes, et deux consultations ont eu lieu. Le gouvernement est invité à arrêter définitivement une feuille de route assortie d’un calendrier, à modifier la loi sur les syndicats et la loi LANGO pour les rendre conformes à la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et à modifier la loi sur les manifestations pacifiques et le Code pénal pour qu’ils respectent les dispositions de la convention no 105.

La membre gouvernementale de la Bulgarie, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres, ainsi que de l’ex-République yougoslave de Macédoine, du Monténégro, de l’Albanie, de la Bosnie-Herzégovine et de la Norvège, a fait référence à la promotion des normes fondamentales du travail de l’UE dans le cadre du Plan d’action en faveur des droits de l’homme et de la démocratie de 2015 dans lequel figure l’éradication du travail forcé et la protection de la liberté syndicale et du droit d’organisation. Le Cambodge bénéficie d’un accès aux marchés européens sans droits de douane ni quotas dans le cadre de l’initiative «Tout sauf les armes» (TSA) en vertu du système de préférences généralisées. L’UE est le plus grand marché pour les exportations cambodgiennes, surtout pour l’industrie du vêtement. L’initiative TSA prévoit l’obligation pour le Cambodge de respecter ses obligations en application des principes fondamentaux internationaux des droits de l’homme et des conventions internationales fondamentales du travail auxquels l’UE et ses citoyens attachent une grande importance. L’UE a déjà exprimé des préoccupations relatives à la détérioration de la démocratie, des droits de l’homme et de l’état de droit dans le pays. L’ajout de peines d’emprisonnement assorties de travail obligatoire à des dispositions législatives utilisées contre des personnes qui expriment des points de vue politiques ou idéologiques dissidents est également particulièrement inquiétant. Les dispositions en question de la loi sur les partis politiques de 2007 et du Code pénal ont trait à l’incitation à troubler la sécurité publique par des discours, des écrits, des images ou toute autre communication audiovisuelle en public ou pour le public; la publication de commentaires visant à exercer une coercition illégale sur les autorités judiciaires; et le discrédit causé aux décisions de justice. Le gouvernement est prié de s’assurer que ces dispositions ne sont employées que lorsque les faits le justifient pleinement et uniquement en lien avec des cas de violence ou d’incitation à la violence. L’application dans la pratique du Code pénal, de la loi sur les syndicats, de la loi LANGO et de la loi sur les manifestations pacifiques ne devrait pas impliquer de sanctions assorties de travail obligatoire pour des situations visées par la convention no 105. L’expression pacifique d’opinions ou de points de vue politiques opposés au système établi ne devrait en aucun cas être sanctionnée par une peine s’accompagnant de travail obligatoire. L’oratrice a prié instamment le gouvernement de cesser de se servir du système judiciaire comme d’un outil politique pour harceler, intimider, arrêter et poursuivre des opposants politiques, des adhérents de syndicats, des membres de la société civile, des militants pour les droits au travail et des défenseurs des droits de l’homme. L’UE a l’intention de suivre la situation de près, tout en restant disposée à aider le Cambodge à remplir ses obligations liées au processus de démocratisation, aux droits de l’homme et à l’état de droit, et à soutenir le développement économique et durable du pays.

Le membre gouvernemental de la Thaïlande, s’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a réaffirmé le fort attachement des nations de l’Asie du Sud-Est à l’élimination du travail forcé, à l’application du programme de travail des ministres du Travail de l’ASEAN (2016-2020) et aux programmes de travail des organes subsidiaires. Les Etats membres de l’ASEAN se réjouissent à l’idée de continuer à collaborer avec le BIT pour en soutenir activement les objectifs au niveau régional. L’orateur a salué les progrès réalisés en matière de promotion des droits des travailleurs et le fait que le gouvernement a garanti que le travail forcé était strictement interdit en droit et dans la pratique. Il a invité le gouvernement à continuer de s’employer à promouvoir les droits des travailleurs, des conditions de travail décentes et des relations professionnelles harmonieuses grâce au dialogue social.

La membre travailleuse de l’Allemagne, s’exprimant au nom de la Confédération allemande des syndicats (DGB) et des syndicats néerlandais, danois, finlandais, norvégiens et suédois, a déclaré que le gouvernement cambodgien contrevient à la convention en droit et dans la pratique. L’article 68 de la loi sur les prisons dispose expressément que les prisonniers peuvent être astreints au travail obligatoire. Le gouvernement utilise l’incarcération pour faire délibérément obstacle aux activités des syndicalistes et pour pénaliser des activités critiques à l’égard du gouvernement. Les dispositions juridiques portant interdiction de l’outrage à la monarchie, de l’incitation au crime ou des troubles à l’ordre public, de la diffamation, de la subornation de témoins ou de l’atteinte aux intérêts nationaux sont systématiquement détournées. Le détournement de ces dispositions de la législation pénale est particulièrement problématique. Leur champ d’application étant libellé de façon très générale, ces dispositions juridiques sont utilisées à mauvais escient pour intimider et réprimer stratégiquement les opposants au régime. En 2017, un militant syndical a été condamné à deux ans d’emprisonnement pour incitation à un crime grave parce qu’il s’était exprimé, dans un entretien radiophonique, en faveur de la suppression du système de préférences commerciales avec les Etats-Unis et l’UE; des journalistes ont été poursuivis pour diffamation parce qu’ils avaient demandé aux habitants d’un village leurs habitudes en matière de vote. La détention préventive est également pratiquée de manière arbitraire. De longue durée, elle ne respecte pas les garanties d’une procédure régulière. Le détournement arbitraire des peines de prison, systématiquement assorties de travail obligatoire en vertu de la législation en vigueur, crée un climat de menace et d’intimidation dans lequel ni les syndicalistes ni la société civile dans son ensemble ne peuvent exercer de droits fondamentaux, tels que la liberté d’expression, la liberté de réunion et la liberté syndicale, droits de l’homme que la Constitution cambodgienne protège en principe. L’oratrice a demandé au gouvernement de mettre sa législation et sa pratique en conformité avec la convention et de mettre un terme à la répression des syndicalistes et des dissidents.

Le membre travailleur de l’Indonésie, s’exprimant au nom de la Confédération syndicale indonésienne pour la prospérité (KSBSI) et de la Confédération coréenne des syndicats (KCTU), a insisté sur le fait qu’aucun travailleur ne devrait être mis en examen ou arrêté pour avoir eu des activités légitimes. Il prend note de la préoccupation exprimée par la commission d’experts selon laquelle des membres de syndicats, des défenseurs des droits de l’homme et des représentants d’ONG continuent de faire l’objet de menaces, de harcèlement, d’arrestations, de mise en détention et de poursuites pour diffamation et insultes publiques. Bien qu’en vertu du Code pénal ces infractions ne soient passibles que d’amendes, plusieurs syndicalistes ont été condamnés à des peines de prison. Des exemples sont donnés d’application arbitraire et répressive de lois pénales, par exemple: cas de travailleurs qui ont protesté contre le licenciement abusif de dirigeants syndicaux, non-respect de sentences arbitrales ou d’ordonnances judiciaires. Le 14 février 2018, quatre dirigeants syndicaux de la Fédération syndicale de l’amicale des travailleurs ont été convoqués par la justice et placés en détention préventive pour avoir organisé une grève. Dans 71 des cas répertoriés depuis la dernière élection nationale de 2014, des syndicalistes ont été déférés à la justice par des employeurs et des autorités pour infractions pénales telles que diffamations, violence et dégâts volontaires, ou entrave à la circulation lors de protestations ouvrières. Conformément au Code pénal, ces syndicalistes peuvent être condamnés à des peines de prison comprises entre six mois et une année. Un coordonnateur de l’association agricole a été condamné à une peine de prison de six mois en vertu des articles 377 et 378 du Code pénal, qui prévoient des peines d’emprisonnement de six mois à trois ans ainsi que des amendes comprises entre un million et six millions de riels. Le 6 février 2016, une action de protestation contre le licenciement en 2015 de 45 employés qui tentaient de créer une section de la Fédération cambodgienne des ouvriers du transport s’est achevée par une violente attaque au cours de laquelle des chauffeurs de bus ont été arrêtés et 14 personnes ont été blessées. Un membre de l’Association cambodgienne des travailleurs informels a été arrêté pour violence volontaire aggravée, obstruction à des fonctionnaires et blocage d’une voie publique. Le même jour, quatre dirigeants de syndicats indépendants, dont Ath Thorn, le président de la Confédération cambodgienne du travail, ont également été condamnés alors qu’aucun n’était présent. Il est nécessaire de mettre un terme à l’utilisation détournée des lois dans le but de traiter des travailleurs et des syndicalistes comme des criminels. Le gouvernement est invité à prendre des mesures urgentes et concrètes afin de se conformer à la demande de la commission d’experts selon laquelle les droits syndicaux doivent être pleinement respectés et les syndicalistes doivent avoir la possibilité d’œuvrer dans un climat exempt d’intimidation ou de violence.

Le membre gouvernemental de la Suisse a exprimé sa profonde préoccupation face aux mesures de détention, aux traitements et aux poursuites judiciaires dont font l’objet des membres du parti d’opposition, des représentants d’ONG, des membres de syndicats et des défenseurs des droits de l’homme. Ces derniers se voient sanctionnés et emprisonnés pour leurs activités à des peines d’emprisonnement, qui comportent notamment une obligation de travailler en prison. A cet égard, il a appelé le gouvernement du Cambodge à prendre les mesures nécessaires pour garantir la liberté d’opinion et d’expression ainsi que la liberté syndicale et le droit de réunion pacifique. Ces droits font partie intégrante des droits de l’homme et des conventions fondamentales du travail. Il a également encouragé le gouvernement à entreprendre tout changement législatif nécessaire pour abolir les sanctions imposant du travail obligatoire afin d’être en conformité avec la convention.

La membre travailleuse de la France a déclaré que les violations commises sous la convention relèvent d’une pratique arbitraire et contraire à toutes les valeurs d’humanisme et de respect de la dignité dus à tout être humain, pratique arbitraire étant donné que, à travers la loi LANGO, le gouvernement du Cambodge utilise des mesures extrêmement coercitives, dont le travail forcé, comme mesures d’intimidation et de rétorsion. L’exigence générale de neutralité des ONG envers les partis politiques en vertu de l’article 24 de la loi LANGO permet des interprétations arbitraires de l’administration qui visent à suspendre les activités, à imposer des amendes, ainsi qu’à annuler l’enregistrement d’une ONG. La même disposition autorise également le ministère de l’Intérieur à annuler l’enregistrement selon une allégation très vague de trouble à la sécurité publique et nationale. Ainsi, le ministère des Affaires étrangères a ordonné à l’Institut national démocratique (NDI) de fermer, et d’expulser tout son personnel étranger le 23 août 2017. Le ministère des Affaires étrangères a revendiqué son autorité en vertu de l’article 34 de la loi LANGO pour mettre un terme aux activités de toute organisation de la société civile internationale n’ayant pas d’enregistrement d’un protocole d’entente avec le ministère. L’ordre est venu après que le NDI a été accusé de fournir au Parti du sauvetage national du Cambodge un plan «mal intentionné» pour renverser le gouvernement. Par ailleurs, le 28 juillet 2017, le gouverneur du district d’Ek Phnom, à Battambang, a publié une lettre ordonnant à tous les chefs de commune du district d’Ek Phnom de rendre compte de toutes les ONG et associations opérant dans la région. La lettre indiquait que les organisations devraient obtenir la permission des autorités du district avant de mener des activités dans le district d’Ek Phnom. Les chefs communaux sont tenus de publier des rapports sur les ONG et les associations qui mettent en œuvre des activités à Ek Phnom. La lettre indiquait que les chefs de commune qui omettent de rapporter cette information seraient soumis à des sanctions, et ce sont ces sanctions que le gouvernement cambodgien utilise comme mesures d’intimidation. Dans cette loi LANGO, les chefs d’inculpation potentiels sont vagues, sujets à interprétation et donc totalement dénués de neutralité et d’objectivité. Les ONG et organisations de la société civile doivent maintenant soumettre chaque année un rapport au ministre de l’Intérieur, rapport à la fois financier et détaillant leurs activités. Cela permet au gouvernement de contrôler les comptes des associations et de questionner certains de leurs choix, voire de fabriquer de fausses preuves pour les décrédibiliser. De telles fautes inventées qui visent à museler la société civile tombent sous le coup de la diffamation ou du trouble à l’ordre public, deux offenses qui, au Cambodge, sont sévèrement punies. Un exemple frappant est celui de la longueur de la détention préventive de responsables de l’Association pour les droits de l’homme et le développement au Cambodge, 427 jours de détention préventive leur ont été infligés, pendant lesquels le travail forcé a été utilisé. Compte tenu du nombre incalculable de possibilités de tomber sous le coup de la loi LANGO, l’oratrice a appelé le gouvernement du Cambodge à s’engager pleinement pour éradiquer complètement toute forme de recours au travail forcé, tant en termes de moyen d’intimidation pour museler la libre expression, aussi bien de façon préventive, qu’en termes de punition pour toute peine, quelle qu’en soit la nature.

La membre travailleuse de l’Australie a rappelé que sa délégation a exprimé à plusieurs reprises sa profonde inquiétude concernant la situation des droits du travail au Cambodge, où les membres de syndicats sont constamment victimes de discrimination, harcèlement, menaces, détention provisoire, arrestation et emprisonnement pour avoir voulu exercer leurs droits fondamentaux, et ce en dépit de la ratification de la convention en 1999. Le non-respect persistant par le gouvernement des normes internationales du travail, notamment en ce qui concerne le droit de réunion pacifique, la liberté syndicale et le droit de ne pas être arrêté pour un motif arbitraire, nécessite un examen suivi de la commission. Le droit de réunion pacifique, soumis à une procédure de notification prévue par la loi sur les manifestations pacifiques, est devenu un système d’autorisation. L’interprétation et l’application arbitraires de la loi augmentent l’incertitude et le risque de sanctions pour ceux qui veulent exercer ce droit. On peut citer à cet égard les exemples concrets suivants: envoi par la mairie de Phnom Penh, en 2016 et 2017, de policiers armés pour empêcher 2 000 à 3 000 membres d’un groupement de syndicats indépendants de défiler de manière pacifique jusqu’à l’Assemblée nationale pour célébrer le 1er mai; mesures visant à empêcher des ONG telles que le Comité d’action des droits de l’homme du Cambodge de se réunir pour célébrer la Journée des droits de l’homme (10 décembre 2016), menaçant de prendre des «mesures» si les manifestants décidaient de passer outre; rejet de la demande formulée par 200 Khmers Kroms de présenter une pétition à l’Assemblée nationale (22 juin 2017). De même, les autorités de la province de Banteay Meanchey ont déconseillé aux villageois de rejoindre les rangs du Parti du sauvetage national du Cambodge et de participer aux célébrations par les ONG de la Journée des droits de l’homme; l’administration provinciale du district Bovil de Battaambang n’a pas donné l’autorisation à la communauté de Boeung Bram de défiler à la Journée des droits de l’homme; les autorités de Kampot ont refusé trois demandes de célébration; les autorités de Takeo ont interdit à la Fédération Khmer Krom de célébrer la Journée internationale des droits de l’homme dans plusieurs villages et communes. Des menaces plus explicites de responsables du gouvernement violaient de toute évidence l’article 1 de la convention. Dans un discours, le Premier ministre Hun Sen a menacé «d’éliminer 100 à 200 personnes» si elles soutenaient la «révolution de couleur» pour assurer la stabilité du Cambodge. Le Premier ministre a réaffirmé qu’il était prêt à recourir aux armes et à des peines de prison pour empêcher les manifestations ou menaces contre les résultats des élections de 2018; de même, le ministre des Affaires sociales, Vong Soth, a menacé de frapper avec des cannes de bambou toute personne manifestant contre les élections de 2018; le Premier ministre Hun Sen a ordonné aux dirigeants syndicaux du secteur de la confection de veiller à ce que les travailleurs des usines n’organisent pas de protestations politiques ou ne s’associent avec ce qui reste du parti de l’opposition dissous depuis lors. L’orateur a invité la commission à se prononcer de la manière la plus forte contre les violations constantes de la convention dont se rend coupable le gouvernement et à rester attentive à l’évolution de la situation.

Le représentant gouvernemental a remercié les délégués pour leurs interventions et leurs commentaires constructifs. Des éclaircissements concernant les motifs pour lesquels le Cambodge fait l’objet d’une double note de bas de page s’imposent. Le gouvernement est d’avis que cela est lié aux élections à venir en juillet 2018. Certains délégués se sont servis de cette séance comme plate-forme politique déguisée afin de ternir la réputation du gouvernement ainsi que ses efforts et ses réalisations. S’ils souhaitaient exprimer leur mécontentement politique, ces délégués auraient dû choisir une autre tribune. Il existe à Genève un certain nombre d’organismes et de mécanismes des Nations Unies qui s’occupent des questions liées aux droits de l’homme, à l’état de droit et à la démocratie. Ceux qui souhaitent améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays pourraient exploiter la session du Conseil des droits de l’homme. La Conférence internationale du Travail est la tribune où l’on débat des lois du travail et des conventions pertinentes. Il n’est pas opportun d’exploiter cette tribune pour faire de la propagande politique afin de mettre en avant d’autres partis politiques ou personnes. Concernant la situation de la liberté syndicale, le gouvernement ainsi que les parties concernées, y compris l’OIT, se sont entendus quant à la marche à suivre afin d’y apporter des améliorations. En réponse à la déclaration de la représentante de l’UE, si l’initiative «Tout sauf les armes» a considérablement aidé la population et l’économie du Cambodge, les intérêts souverains du pays devraient néanmoins être respectés. La communauté internationale doit respecter la souveraineté du Cambodge ainsi que la paix, la stabilité et le développement économique du pays.

Les membres travailleurs ont déclaré qu’il n’existe aucune garantie effective des libertés civiles fondamentales au Cambodge et que ceux qui exercent leur droit à la liberté d’expression et le droit de réunion sont passibles de poursuites pénales, d’emprisonnement et de travail obligatoire. Les syndicalistes, les défenseurs des droits de l’homme, l’opposition politique et pratiquement tous ceux qui expriment des positions opposées à celles du gouvernement font l’objet d’énormes pressions impliquant des détentions et des poursuites pénales. Les dispositions législatives sur la diffamation publique sont appliquées de manière sélective pour sanctionner des opinions critiques. Les membres travailleurs sont très préoccupés par le manque d’impartialité et d’indépendance du pouvoir judiciaire, ainsi que par les périodes de détention préventive excessives visant à punir ceux qui s’opposent au gouvernement actuel. Cela est particulièrement inquiétant dans le contexte des prochaines élections au cours desquelles le libre débat et l’échange de vues prendront encore plus d’importance. Le gouvernement a donc l’obligation de prendre des mesures législatives pour veiller à ce que des peines comportant un travail obligatoire ne soient pas imposées pour faire taire et censurer l’expression pacifique des opinions politiques. Le droit d’assemblée et de réunion est le moyen par lequel les citoyens peuvent s’efforcer d’assurer la diffusion et l’acceptation de leurs opinions et doivent donc être protégés eux aussi. De plus, l’article 1 d) de la convention no 105 interdit l’imposition de travail obligatoire comme punition pour avoir organisé des grèves ou y avoir participé pacifiquement. Le gouvernement doit veiller à ce que la liberté syndicale puisse s’exercer dans un climat exempt d’intimidation et de violence. Toutes les personnes emprisonnées pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression et de réunion doivent être libérées immédiatement et sans condition. Des réformes institutionnelles sont également nécessaires pour garantir l’indépendance et l’impartialité du pouvoir judiciaire. La liberté d’expression et de réunion pacifique, la liberté syndicale et la protection contre les arrestations arbitraires doivent être garanties comme garde-fou contre l’imposition d’un travail obligatoire pour l’exercice de ces droits. Cela nécessite le ferme engagement à entreprendre de vastes réformes législatives au regard de certaines lois qui ne sont manifestement pas conformes à la convention, notamment la loi sur les partis politiques, le Code pénal, la loi sur les syndicats, la loi LANGO, la loi sur les manifestations pacifiques et le projet de loi sur le salaire minimum. La liberté d’expression et de réunion, le droit de grève et le droit de ne pas être astreint au travail forcé et obligatoire sont des questions extrêmement importantes pour les travailleurs, mais aussi pour les valeurs de l’OIT dans son ensemble. Par conséquent, le gouvernement doit travailler avec l’OIT pour donner pleinement effet à la convention. Une double note de bas de page signifie que la commission d’experts est gravement préoccupée. Les membres travailleurs ont évoqué à cet égard l’article 68 de la loi sur les prisons suivant lequel les détenus jugés physiquement aptes doivent être affectés au travail quotidien de la prison et se sont dits opposés à la demande visant à supprimer du compte rendu les commentaires relatifs à la loi sur les syndicats et au projet de loi sur le salaire minimum.

Les membres employeurs ont réaffirmé que, s’il n’y a aucun doute quant à l’existence de problèmes graves concernant la situation des droits de l’homme au Cambodge, comme cela a été observé par plusieurs organes des Nations Unies ainsi que par la Rapporteuse spéciale des Nations Unies, la Commission de la Conférence doit se cantonner à l’examen de la convention no 105. Le fait que ce cas fasse l’objet d’une double note de bas de page signifie que c’est un cas grave. Toutefois, aucune preuve confirmant l’existence de travail forcé dans le pays n’a été fournie. S’il y a un risque potentiel que des pratiques de travail forcé soient imposées, on ne dispose pas pour autant de preuves à cet égard. Dans de telles circonstances, et compte tenu des profondes préoccupations qui existent concernant l’application de diverses lois prévoyant des sanctions dans la pratique, il faudrait demander au gouvernement de garantir qu’il n’imposera pas le travail forcé.

Conclusions

La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

Prenant en compte les exposés du gouvernement et la discussion du cas qui a suivi, la commission a prié instamment le gouvernement:

  • de prendre des mesures, en droit et dans la pratique, pour faire en sorte qu’aucune sanction impliquant du travail forcé ou obligatoire ne puisse être imposée, conformément à l’article 1, paragraphe a), de la convention no 105, y compris en modifiant la législation en vigueur qui autorise le recours au travail forcé.
  • La commission invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT pour donner suite à la présente recommandation. Elle le prie également de faire rapport en détail sur les mesures prises pour mettre cette recommandation en pratique à la prochaine réunion de la commission d’experts, en novembre 2018.

    Le représentant gouvernemental a réitéré qu’il n’y a pas de place pour le travail forcé au Cambodge et que son gouvernement est disposé à fournir des éléments factuels et juridiques pour faire la lumière sur ce malentendu ou cette erreur d’interprétation de la convention et de la législation et la réglementation pertinentes du Cambodge qui sont à l’origine de l’allégation erronée quant à l’existence de telles pratiques. Malgré le respect que lui inspire le travail de la commission d’experts, tout examen qui dépasse les limites du champ d’application de la convention ne ferait pas progresser son application. Une compréhension réciproque et une collaboration étroite entre les partenaires sociaux et les partenaires de développement sont des outils efficaces pour dissiper les malentendus et les tensions. Le dialogue social et les mécanismes tripartites tels qu’ils existent maintenant jouent un rôle des plus critiques dans le maintien d’une paix, d’une stabilité et d’un développement durement acquis par le Cambodge. Le représentant gouvernemental se félicite de l’assistance fournie par l’OIT pour promouvoir les droits au travail et le travail décent conformément aux normes internationales du travail.

    Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

    La commission prend note des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), reçues le 1er septembre 2023. Elle prend également note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 27 septembre 2023. La commission prie le gouvernement de fournir sa réponse à ces observations.

    Suivi des conclusions de la Commission de l ’ application des normes (Conférence internationale du Travail, 111 e session, juin 2023)

    La commission prend note de la discussion détaillée qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes (ci-après «Commission de la Conférence»), lors de la 111e session de la Conférence internationale du Travail (juin 2023), au sujet de l’application de la convention par le Cambodge.
    La commission note que la Commission de la Conférence a vivement déploré que les dispositions de la législation nationale, y compris du Code pénal, continuent à être utilisées pour poursuivre et condamner des personnes qui expriment des opinions politiques ou manifestent une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, ou pour sanctionner ceux qui participent à des grèves, ce qui entraîne l’imposition de peines de prison impliquant du travail pénitentiaire obligatoire. La Commission de la Conférence a également noté avec une profonde préoccupation l’arrestation et l’emprisonnement de syndicalistes et d’autres personnes pour avoir exercé leurs libertés publiques et exprimé des opinions politiques différentes de celles du gouvernement. La Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement de prendre des mesures pour libérer immédiatement et sans condition, annuler les condamnations et abandonner toutes les charges contre des personnes qui ont exprimé des opinions politiques ou manifesté leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, ou qui ont été sanctionnées pour avoir participé à des grèves.
    Article 1 a) de la convention.Peines comportant une obligation de travail sanctionnant l’expression de certaines opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission rappelle que des peines d’emprisonnement, qui impliquent une obligation de travail conformément à l’article 68 de la loi sur les prisons de 2011, peuvent être imposées en vertu de diverses dispositions de la législation nationale dans des circonstances relevant de l’article 1 a) de la convention, y compris:
    • l’article 42 de la loi sur les partis politiques, dans sa teneur modifiée en 2017, en vertu duquel plusieurs infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, ou dont les activités ont été suspendues par un tribunal, ou dont l’enregistrement a été refusé, sont passibles de peines d’emprisonnement pouvant s’élever à une année de prison;
    • les articles suivants du Code pénal: les articles 494 et 495 sur l’incitation à troubler la sécurité publique par des discours, des écrits, des images ou toute communication audiovisuelle en public ou à destination du public; l’article 522 sur la publication de commentaires visant à exercer une coercition illégale sur les autorités judiciaires; et l’article 523 sur le discrédit des décisions judiciaires;
    • les articles 445 et 437 bis du Code pénal, introduits en 2018, relatifs à l’insulte au Roi et à la critique du Roi.
    La commission note que, à l’instar de ses demandes antérieures, la Commission de la Conférence a prié instamment le gouvernement de prendre des mesures efficaces et assorties de délais pour: i) garantir que le droit d’avoir ou d’exprimer certaines opinions politiques ou de manifester son opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, sans menace de sanctions impliquant du travail obligatoire, est pleinement respecté; et ii) abroger ou modifier les dispositions pertinentes du Code pénal et de la loi sur les partis politiques prévoyant, et débouchant sur, des sanctions impliquant l’obligation de travailler, en consultation avec les partenaires sociaux, afin de les mettre en conformité avec la convention.
    La commission note que le gouvernement indique à nouveau, dans son rapport, que les citoyens cambodgiens jouissent des libertés fondamentales, notamment du droit d’exprimer pacifiquement leurs opinions et de se livrer à des activités politiques, qui sont consacrées par la Constitution. Il ajoute qu’il n’existe pas de mesures punitives pour les personnes qui expriment pacifiquement leurs opinions politiques, y compris les membres de l’opposition, les défenseurs des droits de l’homme ou les journalistes, dès lors que leurs activités restent dans le cadre légal et ne portent pas atteinte aux droits d’autrui. Le gouvernement indique que les poursuites judiciaires engagées contre les militants ne sont pas fondées sur l’exercice des droits de l’homme et des droits sociaux ou sur leur statut de militants, mais sur le fait qu’ils ont enfreint des lois spécifiques, notamment celles relatives à la délation, à la diffusion de fausses nouvelles, à l’incitation à provoquer des troubles à la paix sociale, et à la trahison, entre autres. Toutes les personnes faisant l’objet d’une action en justice sont assurées de bénéficier d’une procédure régulière. Le gouvernement ajoute que les dispositions législatives sont fondamentalement conçues pour préserver l’ordre, la sécurité, la sûreté, les intérêts et les droits de tous les citoyens. Il déclare en outre que la loi sur le travail interdit le travail forcé ou obligatoire et que le travail en prison est avant tout un processus de réadaptation visant à faciliter la réinsertion des prisonniers dans la société, et qu’il n’est pas assigné en raison de de l’opposition politique, de la défense des droits de l’homme ou d’une activité journalistique.
    La commission note que, dans ses observations, la CSI déplore le climat de répression qui règne actuellement, et depuis longtemps, au Cambodge et qui n’est pas propice à l’exercice des libertés publiques, y compris la liberté syndicale et la liberté d’action collective, compte tenu notamment des arrestations et des poursuites engagées contre des membres de partis d’opposition, des représentants d’organisations non gouvernementales, des syndicalistes et des défenseurs des droits de l’homme. La CSI déclare que les dispositions de la législation susmentionnées sont utilisées pour emprisonner et condamner des dissidents politiques, des journalistes, des blogueurs et des syndicalistes, qui peuvent ainsi être soumis à une obligation de travailler. La SCI souligne qu’un examen approfondi de ces dispositions et de la pratique nationale concernant le contrôle de l’application du droit pénal est essentiel.
    La commission note également que, dans ses observations, l’OIE reproduit les déclarations des membres employeurs lors de la discussion à la Commission de la Conférence et exprime l’espoir que des progrès seront réalisés dans l’application de la convention conformément aux conclusions de la Commission de la Conférence, et en étroite consultation avec l’organisation d’employeurs la plus représentative au Cambodge.
    La commission note en outre que, dans son rapport du 20 juillet 2023, le Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge indique qu’il n’a cessé de recevoir des informations faisant état d’attaques, d’arrestations injustifiées et de poursuites à l’encontre de défenseurs des droits de l’homme, de journalistes et de professionnels des médias, de dissidents politiques et d’autres personnes considérées comme des opposants aux autorités. Il indique qu’au début de l’année 2023, on estimait que des dizaines de défenseurs des droits de l’homme et d’écologistes étaient en détention, et que ce nombre avait augmenté par rapport à l’année précédente. Le Rapporteur spécial mentionne également quatre procès collectifs entre mars 2021 et décembre 2022, principalement contre des membres de l’ancien Parti du salut national du Cambodge (CNRP), sous des chefs d’accusation tels que l’incitation (articles 494 et 495 du Code pénal), le complot (article 453) et la conspiration avec une puissance étrangère (article 443), qui ont abouti à un certain nombre de peines d’emprisonnement (A/HRC/54/75, 20 juillet 2023).
    Par conséquent, la commission déplore profondément une nouvelle fois l’utilisation continue de plusieurs dispositions de la législation nationale pour poursuivre et condamner des membres de l’opposition, des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes en raison de leur travail, ce qui conduit à l’imposition de peines d’emprisonnement qui impliquent un travail obligatoire en prison. La commission prie instamment et fermement le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces, tant en droit qu’en pratique, pour mettre fin à toute violation de la convention, en s’assurant qu’aucune personne qui exprime des opinions politiques ou manifeste une opposition idéologique au système politique, social ou économique établi, y compris les membres de l’opposition, les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes, ne puisse être condamnée à une peine d’emprisonnement impliquant une obligation de travail. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de modifier l’article 42 de la loi sur les partis politiques et les articles 437 bis, 445, 494, 495, 522 et 523 du Code pénal en limitant clairement le champ d’application de ces dispositions aux situations liées à l’usage de la violence ou à l’incitation à la violence, ou en abrogeant les sanctions impliquant un travail obligatoire (travail pénitentiaire obligatoire). Enfin, la commission prie instamment le gouvernement d’assurer la libération immédiate de toute personne condamnée à une peine d’emprisonnement impliquant du travail obligatoire, pour avoir exprimé pacifiquement des opinions politiques ou s’être opposée au système politique, social ou économique établi.
    En ce qui concerne le projet de loi sur la cybercriminalité, la commission prend note des informations écrites communiquées par le gouvernement à la Commission de la Conférence, selon lesquelles un groupe de travail spécialisé a organisé une réunion pour procéder à l’examen du projet de loi et un processus de collaboration a facilité la mise en œuvre de cette initiative. Le projet de loi sur la cybercriminalité fait l’objet de délibérations avec toutes les parties prenantes concernées, dans le cadre d’un effort concerté pour intégrer et harmoniser les contributions de toutes les parties afin de garantir l’efficacité, l’efficience, la pertinence et la cohérence de la loi. La commission exprime le ferme espoir que le projet de loi sur la cybercriminalité sera en conformité avec la convention, et ne laissera pas de marge d’interprétation dans son application qui pourrait conduire à l’imposition d’une peine impliquant un travail obligatoire aux personnes qui expriment des opinions politiques ou manifestent une opposition à l’ordre politique, social ou économique établi.
    Article 1 d). Punition pour avoir participé à des grèves. La commission a précédemment noté: i) la condamnation à une peine d’emprisonnement pour délit mineur et dénonciation calomnieuse, en vertu des articles 311 et 312 du Code pénal, de deux membres de la Confédération du travail du Cambodge (CLC), après qu’ils ont participé à une manifestation à la suite du licenciement de membres du syndicat et déposé une plainte contre deux travailleurs pour violence; ii) l’arrestation et l’inculpation de quatre dirigeants de la Fédération syndicale de de l’amitié des travailleurs pour avoir organisé une grève illégale, entravé la circulation et troublé l’ordre public; et iii) l’arrestation et la détention d’au moins 29 dirigeants et militants syndicaux de casinos lors d’une grève, dont neuf ont été inculpés d’incitation à commettre un crime, en vertu des articles 494 et 495 du Code pénal.
    La commission note que le gouvernement indique que les rassemblements pacifiques, lorsqu’ils se déroulent en coopération avec les autorités et dans le respect des mesures de sécurité, de sûreté et de santé publique, constituent l’exercice des droits garantis par la Constitution. Cependant, des rassemblements non déclarés ou d’autres actions qui constituent une violation de la loi obligent les autorités à intervenir. Le gouvernement indique qu’il a été nécessaire de procéder à des arrestations, suite à des violations des mesures de sécurité, de sûreté et de santé publique, ainsi qu’à des cas d’incitation à la violence et à des troubles sociaux mettant en péril l’ordre public, la sécurité et les droits à la liberté d’autrui.
    La commission note également que le gouvernement a déclaré, dans les informations écrites qu’il a fournies à la Commission de la Conférence, que les deux membres de la CLC condamnés à une peine d’emprisonnement, mentionnés ci-dessus, ont actuellement un emploi. Lors de la discussion du cas par la Commission de la Conférence, le gouvernement a ajouté que leurs cas faisaient actuellement l’objet d’un appel, et les membres travailleurs du Cambodge ont précisé qu’ils avaient été condamnés en première instance à des peines d’emprisonnement de six mois avec sursis.
    En ce qui concerne l’arrestation des dirigeants syndicaux du casino Naga World, le gouvernement indique, dans les informations écrites qu’il a fournies à la Commission de la Conférence, que la grève qu’ils ont menée n’a pas respecté les conditions légales d’exercice du droit de grève. Il souligne qu’en dépit de la décision de décembre 2021 indiquant que le conflit collectif du travail à Naga World devait être soumis à la procédure et au mécanisme du Conseil d’arbitrage et que toute nouvelle revendication qui n’avait pas été soumise à la procédure du Conseil d’arbitrage ne pouvait constituer une cause valable de grève, les travailleurs licenciés ont entamé leur grève à l’extérieur de Naga World. Ils ont été tenus responsables de leurs actes et inculpés en vertu des articles 494 et 495 du Code pénal, car leur participation à la grève, considérée illégale, avait créé des troubles importants à l’ordre et à la sécurité publics. Le gouvernement ajoute que ces grévistes avaient également été arrêtés, en raison de la violation des mesures préventives du COVID-19 pendant la grève. Au total, les manquements ont conduit à l’arrestation de onze grévistes. En mars 2022, le tribunal a ordonné la libération sous caution de ces anciens travailleurs. À cet égard, la commission note qu’au cours de la discussion au sein de la Commission de la Conférence, un certain nombre de délégués ont signalé que, en mai 2023, neuf membres du LRSU avaient été reconnus coupables d’incitation à commettre un crime, en vertu des articles 494 et 495 du Code pénal après avoir participé à des grèves pacifiques au casino, et condamnés à des peines allant jusqu’à deux ans d’emprisonnement.
    La commission note que, dans ses observations, la CSI fait également référence aux peines de prison prononcées à l’encontre des dirigeants du Labour Rights Supported Union (LRSU) sur le fondement de dispositions du Code pénal, ce qui est contraire à la convention. La CSI ajoute qu’il semblerait que des syndicalistes aient été pénalement condamnés en raison de leur participation à des actions collectives pacifiques.
    La commission a constamment souligné qu’un travailleur qui participe à une grève d’une manière pacifique ne fait qu’user d’un droit essentiel et, par conséquent, ne doit pas être passible de sanctions pénales et que, par conséquent, aucune peine d’amende ou de prison ne peut être encourue. De telles sanctions ne sont envisageables que si, à l’occasion de la grève, des violences contre les personnes ou les biens, ou d’autres infractions graves de droit pénal sont commises, et ce exclusivement en application des textes punissant de tels faits, notamment du Code pénal (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 158). La commission prie donc instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer qu’aucune disposition de la législation n’est utilisée pour condamner une personne qui organise ou participe pacifiquement à une grève à une peine d’emprisonnement impliquant du travail obligatoire. Elle prie le gouvernement de fournir copie des décisions de justice susmentionnées. Enfin, la commission prie instamment le gouvernement d’assurer la libération immédiate de toute personne condamnée à une peine d’emprisonnement assortie d’un travail obligatoire, pour avoir exercé pacifiquement son droit de grève.

    Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

    Article 1 a) de la convention. Peines comportant une obligation de travail sanctionnant l’expression de certaines opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Notant qu’en vertu de l’article 68 de la loi sur les prisons de 2011, les peines d’emprisonnement s’accompagnent d’une obligation de travail, la commission a précédemment fait référence à plusieurs dispositions de la législation nationale prévoyant des peines de prison pour certaines activités qui relèvent du champ d’application de l’article 1 a) de la convention et qui ont donc une incidence sur l’application de cette dernière. La commission a noté avec une profonde préoccupation que des membres du parti de l’opposition, des représentants d’organisations non gouvernementales, des syndicalistes et des défenseurs des droits de l’homme avaient été arrêtés et fait l’objet de poursuites. De plus, elle a déploré l’emprisonnement (assorti de travail pénitentiaire obligatoire) de plusieurs membres du Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), dissous en novembre 2017.
    La commission a prié le gouvernement de revoir les dispositions de la législation nationale ci-après et l’a instamment prié de s’assurer qu’aucune peine impliquant une obligation de travail ne peut être imposée en application de ces dispositions pour sanctionner des personnes qui expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi:
    • i)l’article 42 de la loi sur les partis politiques dans sa teneur modifiée en 2017 en vertu duquel plusieurs infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par une décision de justice ou dont l’enregistrement a été refusé, sont passibles de peines pouvant s’élever à une année de prison;
    • ii)les articles 494 et 495 ayant trait à l’incitation au trouble de la sécurité publique par des discours, des écrits, des images ou toute autre communication audiovisuelle en public ou pour le public, l’article 522 relatif à la publication de commentaires visant à exercer une coercition illégale sur les autorités judiciaires et l’article 523 sur le discrédit des décisions de justice, du Code pénal de 2009;
    • iii)les articles 305 à 309 concernant les délits de diffamation et d’injure;
    • iv)les dispositions du Code pénal relatives aux délits d’insulte au Roi et de critique du Roi (articles 445 et 427bis introduits en 2018).
    Le gouvernement indique dans son rapport que la législation nationale garantit la liberté des citoyens de s’exprimer pacifiquement et de faire de la politique. Le gouvernement affirme que tout citoyen peut librement soutenir un parti politique sans subir de discrimination, sauf en cas de commission d’infractions pénales et souligne qu’il n’a pas le pouvoir de dissoudre un parti politique, seule la Cour suprême y étant habilitée. En outre, il indique que l’article 42 de la loi sur les partis politiques dans sa teneur modifiée définit précisément la peine encourue par toute personne qui «continue d’administrer ou de diriger un parti politique qui a été définitivement dissous par la Cour suprême». Le gouvernement ajoute que, en application du Code pénal, critiquer les communications et les décisions de la Cour dans le but de causer des troubles ou de mettre en danger les institutions du gouvernement cambodgien, et ne pas respecter une décision de la Cour sont considérés comme des infractions pénales. En ce qui concerne la loi sur la cybercriminalité, le gouvernement indique que l’adoption du projet de loi a été reportée en raison de la pandémie de COVID-19 et les discussions à son propos sont toujours en cours.
    La commission note que, dans ses observations finales de 2022, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies s’est déclaré préoccupé par: i) la violation persistante de la liberté d’expression, y compris des informations selon lesquelles de nombreux médias ont été fermés, des sites Web critiques envers le gouvernement ont été bloqués, et des actions pénales et civiles ont été intentées contre des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme; ii) l’arrestation et le placement en détention de manifestants; iii) la dissolution du CNRP en 2017 et de trois autres partis d’opposition en 2021; iv) les menaces, le harcèlement, les arrestations arbitraires et les procès collectifs que subissent des membres de l’opposition; et v) l’absence persistante d’un pouvoir judiciaire indépendant et impartial (CCPR/C/KHM/CO/3, paragr. 20, 32, 34, 36 et 38). À cet égard, la commission prend également note des informations contenues dans le communiqué de presse du 29 juin 2022 émanant de plusieurs experts des Nations Unies selon lesquelles au moins 43 personnes liées au CNRP ont été condamnées en juin 2022 lors d’un procès collectif pour complot et incitation à des peines allant jusqu’à huit ans de prison. Les experts des Nations Unies ont souligné l’existence de failles judiciaires dans ces procès politiques, de même que le manque de preuves concrètes pour soutenir les accusations.
    En outre, la commission note que dans leur déclaration du 24 août 2021 des experts des Nations Unies en matière de droits de l’homme ont fait part de leur inquiétude au sujet des articles 494 et 495 du Code pénal qui sont systématiquement employés pour cibler les défenseurs des droits de l’homme et les condamner. Par ailleurs, dans un communiqué de presse du 6 octobre 2021, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Cambodge a mis en exergue l’intolérance à l’égard des critiques publiées sur le Web concernant la riposte des autorités à la pandémie de COVID-19 qui a conduit à des arrestations et des poursuites; 25 défenseurs des droits de l’homme ont été arrêtés, 9 personnalités politiques de l’opposition ont été condamnées à des peines allant jusqu’à 25 ans de prison et 50 cas de harcèlement de journalistes ont été signalés en 2021.
    La commission déplore vivement le recours constant aux dispositions de la législation nationale pour arrêter, poursuivre et condamner des défenseurs des droits de l’homme, des membres de l’opposition et des journalistes qui expriment des opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, ce qui conduit à l’imposition de peines de prison impliquant du travail pénitentiaire obligatoire. La commission rappelle que bien que certaines condamnations aient été prononcées en application des lois de l’État, elles peuvent relever du champ d’application de la convention et ainsi lui être contraires dès lors qu’elles permettent de contraindre au travail des personnes ayant ou exprimant des opinions politiques ou idéologiques. La commission souligne que la législation peut apporter certaines limites à l’exercice des droits et libertés d’expression, qui doivent être acceptées comme étant un moyen normal de prévenir les abus (par exemple pour assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui ou de répondre aux justes exigences de l’ordre public). Toutefois, ces limites doivent satisfaire à des normes strictes d’examen quant à leur justification et leur portée, et les infractions prévues par la législation dans ce but ne doivent pas être définies en des termes si larges ou appliquées par le pouvoir judiciaire de manière à donner lieu à l’imposition de peines impliquant du travail obligatoire en tant que sanction pour l’expression de certaines opinions politiques ou idéologiques (l’Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 302 à 304).
    La commission prie instamment et fermement le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces pour s’assurer qu’aucune sanction pénale impliquant ‘une obligation de travail, notamment du travail pénitentiaire obligatoire, ne peut être imposée aux personnes qui expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique au système établi, dont les membres de l’opposition, les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes. Elle le prie instamment de revoir la formulation de l’article 42 de la loi sur les partis politiques, de même que les articles 445, 437bis, 494, 495, 522 et 523 du Code pénal, soit en limitant clairement la portée de ces dispositions à des situations impliquant un recours à la violence ou une incitation à la violence, soit en supprimant les peines comportant du travail obligatoire de façon à s’assurer que l’ application de ces dispositions dans la pratique n’aboutit pas à la violation la convention. La commission prie également le gouvernement de former les organes chargés de l’application de la loi en ce sens. Elle le prie une nouvelle fois de communiquer le texte des amendements de 2018 au Code pénal qui incriminent la formulation de critiques à l’égard du Roi et de fournir des informations sur l’application dans la pratique des dispositions du Code pénal et de la loi sur les partis politiques susmentionnées, notamment sur les faits qui ont donné lieu à des condamnations et la nature des peines appliquées. La commission exprime le ferme espoir que le projet de loi sur la cybercriminalité sera rédigé et appliqué en tenant compte des principes évoqués ci-dessus et des obligations qui incombent au gouvernement au titre de la convention.
    Article 1 d). Punition pour avoir participé à des grèves. La commission a précédemment noté que d’après les observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), Van Narong et Pel Voeun, deux membres de la Confédération du travail du Cambodge (CTC), avaient été condamnés à des peines de prison pour des charges de délit mineur et de dénonciation calomnieuse, en application des articles 311 et 312 du Code pénal, après avoir participé à une manifestation pour protester contre le licenciement de deux membres syndicaux et déposé plainte contre deux travailleurs pour des actes de violence. Elle a aussi noté que quatre dirigeants de la Fédération syndicale de l’amitié des travailleurs avaient été arrêtés et poursuivis pour avoir organisé une grève illégale, entravé la circulation et troublé l’ordre public. La commission a prié le gouvernement d’indiquer les dispositions légales et les arguments de fait sur la base desquels ces personnes avaient été arrêtées et poursuivies.
    Le gouvernement indique que Van Narong et Pel Voeun ont été condamnés pour délit mineur et dénonciation calomnieuse, et que leurs allégations de violence étaient fictives. Quant à l’arrestation des quatre dirigeants de la Fédération syndicale de l’amitié des travailleurs et aux poursuites intentées contre eux, le gouvernement indique qu’il tiendra la commission informée de l’évolution de cette affaire. Il souligne également que les personnes sont poursuivies pour les délits qu’elles ont commis et que les membres des syndicats ne jouissent d’aucun privilège ni d’aucune impunité.
    La commission note que dans un communiqué de presse du 5 janvier 2022, plusieurs experts des Nations Unies en matière de droits de l’homme ont fait référence à l’arrestation et à la détention d’au moins 29 dirigeants et militants syndicaux de casinos lors d’une grève. Neuf personnes ont déjà été inculpées d’incitation à commettre un crime au titre des articles 494 et 495 du Code pénal et sont toujours en détention tandis que les autres ont été libérées. La commission note également les inquiétudes exprimées par des experts des droits de l’homme des Nations Unies dans un communiqué de presse du 16 février 2022 au sujet des mesures adoptées dans le contexte de la pandémie de COVID-19 utilisées pour imposer des restrictions à des travailleurs faisant légalement et pacifiquement grève. Selon les experts, de telles restrictions sont injustifiées, inutiles et disproportionnées.
    La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que l’application des dispositions législatives ne conduit pas dans la pratique à l’imposition de peines impliquant une obligation de travail (comme du travail pénitentiaire obligatoire) à des travailleurs pour le simple fait d’organiser des grèves ou d’y participer pacifiquement, conformément à l’article 1 d) de la convention. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les progrès réalisés en ce sens et de fournir une copie de la décision de justice relative aux quatre dirigeants susmentionnés de la Fédération syndicale de l’amitié des travailleurs.
    Compte tenu de la situation décrite ci-dessus, la commission ne peut que constater l’absence de progrès en ce qui concerne la protection de la liberté d’expression au Cambodge et le fait que les opposants politiques, les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme et les militants des médias sociaux qui expriment leur opposition ou des critiques à l’égard des autorités sont condamnés et emprisonnés en vertu de diverses dispositions de la législation nationale, notamment du Code pénal. La commission déplore vivement que les dispositions de la législation nationale, y compris du Code pénal, continuent à être utilisées pour poursuivre et condamner des personnes qui expriment des opinions politiques ou manifestent une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi, ce qui entraîne l’imposition de peines de prison impliquant du travail pénitentiaire obligatoire. La commission considère que ce cas répond aux critères établis au paragraphe 114 de son rapport général pour être appelé devant la Conférence.
    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 111e session et de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2023.]

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

    La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2018.
    Article 1 d) de la convention. Sanction pour avoir participé à des grèves. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que, en vertu de l’article 68 de la loi de 2011 sur les prisons, les peines d’emprisonnement comportent une obligation de travail. Elle a également pris note des déclarations du gouvernement, selon lesquelles aucun travailleur n’a été arrêté pour le simple fait d’avoir organisé une grève ou d’avoir participé pacifiquement à une grève, excepté dans les cas où des infractions punies par le Code pénal ont été commises dans ce cadre. La commission note cependant que, selon les observations reçues de la CSI en 2017 dans le contexte de l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, depuis 2014, 25 dirigeants de la Confédération du travail du Cambodge (CTC) ou d’organisations affiliées à celle-ci ont été emprisonnés à raison de leurs activités syndicales. Notamment, en 2016, deux membres de l’Organisation syndicale libre qui avaient mené une action de grève pendant un mois ont été placés en détention – sans qu’aucun mandat n’ait été délivré à cette fin – et ont été accusés par un tribunal provincial des chefs d’incitation à la violence et de recours intentionnel à la violence. La procédure en vigueur en matière de grève avait été respectée et l’action de grève s’était déroulée pacifiquement. En conséquence, la commission a prié le gouvernement d’indiquer les dispositions législatives ainsi que les éléments de fait sur la base desquels ces personnes ont été arrêtées et poursuivies, par exemple en communiquant copie des rapports de police ou des décisions de justice les concernant.
    La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que les allégations concernant le placement en détention sans mandat d’arrêt de deux membres du Syndicat libre en février 2016 ne reflètent pas la vérité. Il déclare qu’un mandat d’arrêt (no 92DBKK/016) a été délivré par le Tribunal de première instance de la province de Kompong Speu le 2 février 2016 à l’encontre des intéressés – Yong Leap et Touch Srun – et que ceux-ci ont été placés sous contrôle judiciaire pour incitation à commettre des infractions et pour des actes de violence délibérée avec circonstances aggravantes, infractions visées par les articles 494, 495 et 218 du Code pénal. La commission prend note des mandats d’arrêt et rapports de police pertinents, dont une copie était jointe au rapport du gouvernement.
    Cependant, la commission note que, d’après les observations de la CSI et l’Indice CSI 2018 des droits dans le monde, deux membres de la CTC, Van Narong et Pel Voeun, ont été condamnés le 20 octobre 2017 à des peines de six mois d’emprisonnement sur des charges de délit mineur et de dénonciation calomnieuse prévus aux articles 311 et 312 du Code pénal. Ils avaient pris part, en février 2017, à une manifestation organisée contre la compagnie Capitol Bus pour réclamer la réintégration des conducteurs qui avaient été licenciés après avoir adhéré à ce syndicat. La CSI indique également qu’ils avaient également déposé une plainte contre deux travailleurs d’un syndicat jaune nommé «Le Cambodge pour l’Association de développement de la Confédération (CADC)» qui avaient frappé les manifestants. Sur leur plainte, le tribunal a ordonné le non lieu faute de preuve, mais il a par contre accueilli favorablement l’action en diffamation que les deux membres du CADC ont ensuite engagée contre eux. La CSI indique également dans ses observations que, le 14 février 2018, quatre dirigeants de la Fédération du syndicat de l’amitié des travailleurs ont été arrêtés et que des poursuites ont été engagées contre eux sur les chefs d’organisation d’une grève illégale, d’entrave à la circulation et de trouble à l’ordre public.
    La commission rappelle une fois de plus à cet égard que, en vertu de l’article 1 d) de la convention, aucune sanction comportant un travail obligatoire, notamment un travail pénitentiaire obligatoire, ne devrait être imposée à des travailleurs pour le simple fait d’avoir organisé ou participé pacifiquement à des grèves. La commission prie donc le gouvernement d’indiquer les dispositions légales et les éléments de fait sur la base desquels les personnes désignées ci-dessus ont été arrêtées et poursuivies, par exemple en communiquant copie des rapports de police ou des décisions de justice les concernant.

    Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

    Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 107e session, mai-juin 2018)

    La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2018, et des discussions détaillées ayant eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en mai-juin 2018 concernant l’application par le Cambodge de la convention.
    Article 1 a) de la convention. Peines comportant une obligation de travail sanctionnant l’expression de certaines opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté qu’en vertu de l’article 68 de la loi sur les prisons de 2011 les peines d’emprisonnement comportent une obligation de travail. Elle a également noté qu’en vertu de l’article 42 de la loi sur les partis politiques de 2017 diverses infractions en lien avec l’administration ou la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont l’activité a été suspendue par un tribunal ou encore dont l’enregistrement a été refusé, sont passibles de peines d’emprisonnement d’une durée maximale d’un an, peines qui comportent une obligation de travail. Le gouvernement a déclaré qu’aucune décision d’une juridiction compétente n’a ordonné la dissolution d’un parti politique.
    La commission a noté en outre que, bien que les délits de diffamation publique et d’insultes (art. 305-309) ne soient passibles que d’amendes conformément au Code pénal de 2009, dans la pratique, ces dispositions ont donné lieu à l’application de peines d’emprisonnement. De plus, plusieurs articles du Code pénal de 2009 prévoyant une peine d’emprisonnement continuent d’être utilisés dans des circonstances couvertes par l’article 1 a) de la convention, à savoir: i) les articles 494 et 495, relatifs à l’incitation à la perturbation de la sécurité publique par des paroles, des écrits, des représentations graphiques ou des communications audiovisuelles diffusées en public ou à l’adresse du public; ii) l’article 522 relatif à la publication de commentaires visant à exercer une contrainte illégale sur les autorités judiciaires; et iii) l’article 523 relatif au discrédit de décisions judiciaires. Elle a noté en outre qu’une législation sur la cybercriminalité était en préparation.
    En outre, depuis 2014, la commission exprime sa préoccupation face à plusieurs cas dans lesquels des membres de partis d’opposition, des représentants d’organisations non gouvernementales, des syndicalistes et des défenseurs des droits de l’homme ont été arrêtés et ont fait l’objet de poursuites, notamment par l’arrestation et les poursuites exercées contre plusieurs hauts responsables du Parti du salut national du Cambodge (CNRP) en 2016 et 2017.
    La commission note que, d’après les observations de la CSI, avec le gouvernement actuel, la poursuite au pénal de l’expression d’un discours politique divergent ou d’opinions différentes est une pratique courante qui s’appuie sur une législation permettant de le faire. L’application pratique de certaines dispositions du Code pénal pourrait relever du champ d’application de la convention. Par exemple, l’article 311 incrimine la dénonciation publique de faits connus pour être faux imputés à des représentants de l’autorité tels qu’un magistrat, un officier de police judiciaire ou un employeur, ou encore une personne ayant autorité pour déférer ladite dénonciation à l’autorité compétente. Cette infraction est passible d’une peine d’emprisonnement d’un mois à un an et d’une amende de 100 000 riels à 2 millions de riels (soit de 24 à 487 dollars des Etats-Unis) aux termes de l’article 312. De plus, l’article 502 incrimine les paroles, les gestes, les écrits, les représentations graphiques ou les objets qui portent atteinte à la dignité de personnes. En outre, l’insulte à un fonctionnaire public ou à un détenteur d’une charge publique élective est passible d’une peine d’emprisonnement de un à six jours et d’une amende de 1 000 à 100 000 riels (0,24 à 24 dollars E. U.). L’amendement à la Constitution qui a été adopté le 15 février 2018 restreint davantage les libertés fondamentales dans le pays, comme cela a été le cas suite à d’autres changements apportés à la législation, notamment au Code pénal. Le crime d’insulte au Roi, prévu par l’article 445 du Code pénal dans sa teneur modifiée, est passible de peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à six mois et d’une amende pouvant atteindre 10 millions de riels (2 495 dollars E.-U.) dans le cas de paroles, de gestes, d’écrits, de représentations graphiques ou de manifestations au cours de réunions publiques qui portent atteinte à la dignité du monarque. La CSI indique également que deux personnes ont été arrêtées sur la base de l’article 445: le 14 mai 2018, Khean Navy, le principal d’une école primaire de Kampong Thom, a été arrêté pour insulte au Roi parce qu’il avait blâmé le monarque pour la dissolution du CNRP en 2017 et pour la perte d’une partie du territoire khmer; le 21 mai 2018, une autre personne, vivant à Siem Reap, a fait l’objet de poursuites pour avoir partagé sur Facebook un message présumé insultant à l’égard du Roi.
    La commission note que, dans ses conclusions, adoptées en juin 2018, la Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour s’assurer que, tant en droit qu’en pratique, aucune sanction comportant du travail obligatoire ne peut être imposée dans les circonstances relevant de la convention, y compris à travers la modification de la législation actuellement en vigueur qui autorise le travail obligatoire. Elle a également instamment prié le gouvernement de recourir à l’assistance technique du Bureau pour définir les mesures propres à concrétiser cette recommandation.
    La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que la loi sur les prisons de 2011 a été adoptée en respectant un large éventail de normes internationales et que les personnes emprisonnées sont tenues d’accomplir un travail à des fins d’éducation, de réformation, de réadaptation et de réinsertion dans la société. Le gouvernement déclare que la présente convention ne saurait être interprétée sans se référer à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et que son application ne saurait donner lieu à des aménagements particuliers, quels qu’ils soient, en faveur d’un groupe donné. Le gouvernement déclare également que, selon les lois du Cambodge, il n’est pas imposé de sanction pour l’expression pacifique d’opinions politiques et qu’il n’y a pas, dans ce pays, de personnes qui ont été condamnées pour avoir exprimé pacifiquement des opinions politiques. En conséquence, il n’est pas imposé de sanction comportant une obligation de travail dans les situations visées à l’article 1 de la convention. Le gouvernement déclare en outre que, s’agissant des actes d’incitation, les articles 494 et 495 du Code pénal ne prévoient des peines d’emprisonnement (lesquelles comportent une obligation de travailler) que pour sanctionner les actes d’incitation directe à la commission d’un crime ou tout autre acte ayant porté gravement atteinte à la sécurité publique. L’article 522 prévoit des peines d’emprisonnement en cas de publication, avant le prononcé de la décision définitive du tribunal, de tout commentaire tendant à exercer une pression sur le tribunal pendant qu’une procédure est en cours, en vue d’influer sur la décision dudit tribunal. La finalité de cet article est de garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire. De même, l’article 523 vise à protéger le pays et ses institutions contre un danger causé par des actes critiques tels que décrits dans cet article. Enfin, le gouvernement déclare qu’il sera communiqué à la commission copie de la loi sur la cybercriminalité lorsque ce texte aura été adopté.
    La commission note que, d’après le bulletin d’information émanant du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) du 30 avril 2018, le principal parti d’opposition, le CNRP, a été dissous en novembre 2017 et son dirigeant, Kem Sokha, a été placé en détention depuis septembre 2017 pour des faits de trahison en rapport avec les commentaires qu’il a formulés en 2013 à propos de sa stratégie politique de terrain pour critiquer le gouvernement en place. De nombreux autres membres et soutiens de ce parti ont été emprisonnés, ainsi que d’anciens leaders d’autres partis politiques, parmi lesquels Nhek Bun Chhay, du Front uni national khmer, et Soun Sereyrotha du Parti du pouvoir khmer.
    La commission note également que, le 11 mai 2018, la porte-parole du HCDH a exprimé sa déception face à la décision de la Cour d’appel du Cambodge du 10 mai 2018 confirmant la condamnation pour «insurrection» de 11 membres et soutiens du CNRP qui avaient été condamnés en première instance le 21 juillet 2015 à des peines allant de sept à vingt ans de prison en lien avec des violences qui se seraient produites à l’occasion d’une manifestation dans le Parc de la liberté, à Phnom Penh, le 15 juillet 2014. La porte-parole a indiqué qu’aucune preuve n’a été rapportée ni lors du procès en première instance ni lors du procès en appel, permettant de faire le lien entre les 11 personnes accusées et des actes de violence ou d’«insurrection» définie dans la loi comme une «violence collective de nature à mettre en danger les institutions du royaume ou violer l’intégrité du territoire national». Aucun des témoignages des victimes blessées ni aucun des enregistrements vidéo qui ont été produits à charge dans le cadre du procès ne permettaient d’établir que l’un quelconque des accusés ait pu entreprendre, commettre ou diriger des actes de violence ou inciter à de tels actes. De plus, la commission note que, le 20 février 2018, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge et le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression se sont déclarés gravement préoccupés par les changements apportés à la Constitution du Cambodge, ainsi que par d’autres changements introduits dans la législation insérant dans le Code pénal une infraction de lèse-majesté rendant illégale toute insulte à la monarchie.
    La commission considère à cet égard que, si la présente convention a été conçue pour compléter la convention no 29, l’exception concernant le travail en prison prévue à l’article 2, paragraphe 2, de la convention no 29 «aux fins de la présente convention» ne s’applique pas automatiquement à la convention no 105. Par conséquent, s’agissant de l’exception concernant le travail en prison, si une personne est tenue d’accomplir un travail obligatoire en prison après avoir été condamnée pour avoir exprimé certaines opinions politiques, cette situation relève du champ d’application de l’article 1 a) de la convention no 105. La commission observe à cet égard que, si le travail imposé à un délinquant de droit commun condamné, par exemple, pour vol, enlèvement, attentat ou autre comportement violent a pour objectif de réadapter ou réinsérer l’individu, il n’en va pas de même dans le cas de personnes condamnées en raison de leurs opinions (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 300).
    La commission déplore que des dirigeants, des membres et des soutiens du CNRP, parti qui a été dissous en novembre 2017, aient été condamnés à des peines d’emprisonnement (peines qui impliquent une obligation de travail) en raison de leurs opinions politiques. La commission se doit également d’exprimer sa profonde préoccupation face à l’adoption d’amendements au Code pénal qui incriminent la critique du Roi. Elle rappelle une fois de plus que toute restriction des libertés et droits fondamentaux, dont la liberté d’expression, a une incidence sur l’application de la convention dès lors que le non-respect de cette restriction est sanctionné par une peine comportant une obligation de travail en prison. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que les garanties juridiques qui protègent la liberté de pensée et la liberté d’expression, le droit de réunion pacifique, la liberté d’association et le droit de ne pas être arrêté pour un motif arbitraire constituent une protection importante contre l’imposition de travail obligatoire en tant que sanction de l’expression de certaines opinions politiques, ou la manifestation d’une opposition idéologique, ou en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 302). Par conséquent, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates afin que, tant en droit qu’en pratique, aucune peine comportant une obligation de travail, notamment une obligation de travail en prison, ne puisse être imposée pour punir l’expression d’opinions politiques ou la manifestation d’une opposition à l’ordre établi. A cet égard, la commission prie le gouvernement de s’assurer que l’article 42 de la loi sur les partis politiques dans sa teneur modifiée de 2017 et les articles 494, 495, 522 et 523 du Code pénal de 2009 sont modifiés soit en restreignant clairement le champ d’application de ces dispositions aux situations dans lesquelles il est avéré qu’il a été fait recours à la violence ou incité à la violence, soit en supprimant les sanctions comportant du travail obligatoire. Elle prie également le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que l’application des dispositions pertinentes du Code pénal ne donne pas lieu, dans la pratique, à l’imposition de sanctions comportant du travail obligatoire dans les situations visées à l’article 1 a) de la convention. La commission prie le gouvernement de communiquer le texte des amendements de 2018 au Code pénal qui incriminent la critique à l’égard du Roi, et de fournir des informations sur l’application de ces amendements dans la pratique, notamment sur toute poursuite exercée, condamnation prononcée et peine imposée dans ce contexte. Enfin, elle prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès concernant l’adoption de la loi sur la cybercriminalité et d’en communiquer le texte lorsque cette loi aura été adoptée. La commission encourage le gouvernement à recourir à l’assistance technique du BIT en vue de rendre sa législation et sa pratique pleinement conformes à la convention.
    La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

    Article 1 d) de la convention. Punition de la participation à des grèves. La commission avait précédemment pris note de la communication de 2014 de la Confédération syndicale internationale (CSI) concernant l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, selon laquelle 23 travailleurs avaient été arrêtés en janvier 2014 pour avoir participé à des grèves et des manifestations. Ces travailleurs avaient tous été condamnés à des peines de quatre à cinq années d’emprisonnement, mais l’application de ces peines avait été suspendue et les travailleurs concernés avaient recouvré leur liberté grâce à la pression internationale. La commission avait également constaté que, dans son rapport de 2014, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge s’était déclaré préoccupé par la multiplication des mesures d’intimidation judiciaire à l’encontre de militants syndicaux en 2014, notamment des arrestations dans les provinces de Kandal, Kampong Speu et Takeo.
    La commission prend note de l’information communiquée par le gouvernement dans son rapport, selon laquelle aucun travailleur n’a été arrêté pour le simple fait d’organiser ou de participer pacifiquement à une grève, à moins qu’il n’ait commis des délits pénaux relevant du Code pénal. La commission note cependant les observations de la CSI reçues le 1er septembre 2017 concernant l’application de la convention no 87, selon lesquelles 25 dirigeants de la Confédération cambodgienne du travail ou de ses affiliés avaient été emprisonnés, depuis 2014, pour leurs activités syndicales. Parmi eux, deux membres du Syndicat libre avaient été arrêtés sans mandat d’arrêt en février 2016 et accusés d’incitation à la violence et de violence intentionnelle par un tribunal provincial un mois plus tard. Ils étaient les meneurs de travailleurs engagés dans une grève d’un mois suite au licenciement de trois syndicalistes au motif qu’ils avaient tenté de créer un syndicat dans l’usine de vêtements de Cerie, district de Samrong Tong, alors que la procédure de grève avait été respectée et que la protestation était pacifique. A cet égard, la commission rappelle une fois de plus que, en vertu de l’article 1 d) de la convention, aucune sanction comportant un travail obligatoire, y compris du travail pénitentiaire obligatoire, ne devrait être imposée à des travailleurs pour le simple fait d’avoir organisé des grèves ou d’avoir participé pacifiquement à des grèves. La commission prie donc une fois de plus le gouvernement de préciser les dispositions législatives et les faits sur la base desquels ces personnes ont été arrêtées et poursuivies, par exemple en communiquant copie des rapports de police ou des décisions des tribunaux.
    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 107e session et de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2018.]

    Observation (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

    Article 1 a) de la convention. Peines comportant une obligation de travail sanctionnant l’expression de certaines opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission a précédemment noté que, en vertu de l’article 41 de la loi sur les partis politiques de 1997, diverses infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal ou dont l’enregistrement a été refusé sont passibles de peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an, peines qui comportent une obligation de travailler en vertu de l’article 68 de la loi sur les prisons de 2011. La commission a également noté que, en vertu du Code pénal de 2009, les délits de diffamation et d’insultes (art. 305-309) ne sont plus passibles que de peines d’amende. Elle a également pris note de l’adoption de la loi de 2009 sur les manifestations pacifiques et de l’arrestation de sept opposants parlementaires en juillet 2014 alors qu’ils manifestaient contre l’interdiction des manifestations imposées par le gouvernement en janvier 2014, suite aux nombreuses manifestations qui s’étaient multipliées à la fin de l’année 2013.
    La commission prend note de l’information communiquée par le gouvernement dans son rapport, selon laquelle aucun parti politique n’a été dissous par décision du tribunal en application de la loi de 2007 sur les partis politiques. Le gouvernement indique aussi que les manifestations ne peuvent avoir lieu quand elles mettent en danger ou portent atteinte de quelque manière que ce soit à l’ordre, à la sûreté et à la sécurité publics. De plus, des personnes ayant participé à des émeutes ou ayant dirigé des émeutes ont été arrêtées dans le cadre des délits prévus dans le Code pénal.
    La commission note également que la loi de 2007 sur les partis politiques a été modifiée en 2017, mais que l’article 42 de la version amendée conserve les dispositions de l’article 41 de la version précédente. De plus, plusieurs articles du Code pénal de 2009 prévoyant une peine d’emprisonnement peuvent encore être utilisés dans des situations relevant de l’article 1 a) de la convention, notamment les articles 494 et 495 sur l’incitation à troubler la sécurité publique par des discours, des écrits, des images ou toute autre communication audiovisuelle en public ou pour le public; l’article 522 sur la publication de commentaires visant à exercer une coercition illégale sur les autorités judiciaires; et l’article 523 sur le discrédit porté aux décisions de justice. La commission note également l’adoption en 2015 de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales et, en 2016, de la loi sur les syndicats. En outre, la législation sur le cybercrime est en cours d’élaboration.
    La commission note que, selon le rapport de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge, daté du 5 septembre 2016, pour nombre de lois, le niveau de conformité au droit international des droits de l’homme dépend de l’interprétation et de l’application qui sont faites de la loi par les forces de l’ordre et le corps judiciaire (A/HRC/33/62, paragr. 29). Dans son rapport du 27 juillet 2017, la Rapporteuse spéciale exprime sa préoccupation face aux multiples lois (relatives aux associations et aux ONG, à l’élection des membres de l’Assemblée nationale, aux syndicats, aux manifestations pacifiques) qui peuvent être utilisées pour limiter l’exercice de la liberté de réunion et d’association et de la liberté d’expression (A/HRC/36/61, paragr. 47).
    La commission note également qu’il est indiqué, dans le rapport de 2017 de la Rapporteuse spéciale, que plusieurs hauts responsables du Parti du sauvetage national du Cambodge (PSNC), principal parti d’opposition, ont été reconnus coupables et ont été condamnés (paragr. 6). Le sénateur Hong Sok Hour a été condamné à sept ans d’emprisonnement le 9 novembre 2016 pour falsification de documents et incitation à commettre une infraction après un message posté sur Facebook. Le sénateur Thak Lany, actuellement en exil, a été condamné par contumace à dix-huit mois d’emprisonnement pour diffamation et incitation à commettre une infraction en lien avec la diffusion d’un clip vidéo sur Facebook, qui aurait contenu un discours commentant le décès d’un activiste politique, Kem Ley (paragr. 7). De plus le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, dans une déclaration du 4 septembre 2017, s’est déclaré gravement préoccupé par l’arrestation de Kem Sokha, président actuel du PSNC. Kem Sokha est accusé de trahison et risque une peine d’emprisonnement de quinze à trente ans s’il est condamné, pour une vidéo d’un discours qu’il avait prononcé en 2013, et qui a depuis été rendu public.
    La commission note en outre que, selon le rapport de 2017 de la Rapporteuse spéciale, beaucoup de représentants d’ONG, de membres de syndicats et de défenseurs des droits de l’homme sont toujours victimes de menaces et de harcèlement et continuent d’être arrêtés, placés en détention provisoire et poursuivis (paragr. 45). En particulier, en 2016, cinq membres de l’Association pour les droits de l’homme et le développement (ADHOC) ont été arrêtés et placés en détention préventive durant plus d’un an. Ils ont été libérés sous contrôle judiciaire en juin 2017, et la date de leur procès n’est toujours pas connue (paragr. 21 et 22). Qui plus est, plusieurs protestataires liés à la campagne Black Monday contre l’arrestation de ces membres de l’ADHOC ont été arrêtés et poursuivis pour diffamation, insultes publiques et diverses atteintes à l’ordre public, en application du Code pénal. Entre autres, Tep Vanny a fait l’objet de poursuites après avoir participé à la manifestation du Black Monday le 15 août 2016. Elle a ensuite été accusée d’ «actes de violence intentionnels avec circonstances aggravantes» en lien avec une autre manifestation qui avait eu lieu en 2013 et a été condamnée à deux ans et demi d’emprisonnement, le 23 février 2017 (paragr. 45). De plus, un analyste politique indépendant, Kim Sok, est en détention provisoire depuis le 17 février 2017 pour des chefs d’accusation de diffamation et d’incitation au désordre, parce qu’il avait exprimé publiquement son opinion selon laquelle le parti au pouvoir était responsable du meurtre de Kem Ley (paragr. 48).
    La commission note que, bien que les délits de diffamation publique et d’insultes ne soient passibles que d’amendes en vertu du Code pénal de 2009, ces dispositions ont été appliquées aux différentes personnes susmentionnées qui ont été sanctionnées par des peines d’emprisonnement (qui comportent une obligation de travailler). La commission se voit dans l’obligation d’exprimer sa profonde préoccupation face aux mesures de détention et aux poursuites judiciaires dont font l’objet des membres du parti d’opposition, des représentants d’ONG, des membres de syndicats et des défenseurs des droits de l’homme, et elle rappelle que la restriction des droits et libertés fondamentaux, y compris la liberté d’expression, peut avoir une incidence sur l’application de la convention lorsque ces restrictions sont mises en œuvre à travers l’application de sanctions comportant l’obligation de travailler. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que les garanties juridiques qui entourent l’exercice de la liberté de pensée et d’expression, du droit de réunion pacifique, de la liberté d’association et du droit de ne pas être arrêté pour motif arbitraire constituent une protection importante contre l’imposition de travail obligatoire en tant que sanction de l’expression de certaines opinions politiques ou idéologiques, ou en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique (étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 302). La commission prie par conséquent instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour s’assurer que, tant en droit qu’en pratique, aucune sanction comportant du travail obligatoire n’est imposée en tant que sanction de l’expression d’opinions politiques ou de la manifestation d’une opposition à l’ordre établi. A cet égard, elle prie le gouvernement de s’assurer que l’article 42 de la loi sur les partis politiques, telle que modifiée en 2017, et les articles 494, 495, 522 et 523 du Code pénal de 2009 sont modifiés, en restreignant clairement le champ d’application de ces dispositions aux situations liées au recours à la violence ou à l’incitation à la violence, ou en supprimant les sanctions comportant du travail obligatoire. Elle prie également le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que l’application du Code pénal, de la loi sur les syndicats, de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales et de la loi sur les manifestations pacifiques n’aboutit pas, dans la pratique, à l’imposition de sanctions comportant du travail obligatoire, dans les situations visées à l’article 1 a) de la convention. Enfin, la commission prie le gouvernement de communiquer copie de la législation sur le cybercrime, lorsqu’elle aura été adoptée.
    La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
    [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 107e session et de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2018.]

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

    Se référant à sa demande précédente relative aux règles régissant l’emploi dans les transports maritimes, la commission note que le gouvernement déclare que, bien que la législation du travail actuelle ne couvre pas les relations d’emploi dans les transports maritimes, il n’est pas possible pour l’instant d’adopter une législation spécifique à ce domaine. La commission note, en outre, les informations communiquées par le gouvernement quant à l’application dans la pratique de l’article 12 de la loi de 1995 sur la presse. Enfin, elle prend note des informations communiquées par le gouvernement concernant les mesures disciplinaires et les sanctions pénales applicables aux agents de la fonction publique.
    Article 1 d) de la convention. Punition de la participation à des grèves. La commission note la communication de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 31 août 2014 concernant l’application de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, selon laquelle 23 travailleurs ont été arrêtés en janvier 2014 pour avoir participé à des grèves et des manifestations. Selon la CSI, ces 23 travailleurs ont été condamnés à des peines de quatre à cinq années d’emprisonnement mais l’application de ces peines a été suspendue et ces travailleurs ont recouvré leur liberté grâce à la pression internationale. Corroborant cette communication de la CSI, la commission constate que, dans son rapport d’août 2014, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge s’est déclaré préoccupé par la multiplication des mesures d’intimidation judiciaire à l’encontre de militants syndicaux aux mois d’avril et de mai 2014, notamment des arrestations mues par de telles intentions dans les provinces de Kandal, Kampong Speu et Takeo (A/HRC/27/70, paragr. 24). A cet égard, la commission rappelle que, en vertu de l’article 1 d) de la convention, aucune sanction comportant un travail obligatoire, y compris du travail pénitentiaire obligatoire, ne devrait être imposée à des travailleurs pour le simple fait d’avoir organisé des grèves ou d’avoir participé pacifiquement à des grèves. La commission prie le gouvernement de préciser les dispositions législatives et les faits sur la base desquels ces personnes ont été arrêtées.

    Observation (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

    Article 1 a) de la convention. Peines d’emprisonnement comportant une obligation de travail sanctionnant l’expression de certaines opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission a noté précédemment que, en vertu de l’article 61 des dispositions de 1992 relatives aux institutions judiciaires, à la loi pénale et aux procédures applicables au Cambodge pour la période de transition, les faits d’incitation à la haine contre une nation, une race ou une religion à travers des discours ou des assemblées publiques, par des écrits, publications, illustrations ou films ou tout autre moyen de communication audiovisuelle («incitation à la discrimination») sont passibles de peines pouvant s’élever à une année d’emprisonnement (peines qui sont assorties d’une obligation de travail en prison conformément à l’article 68 de la loi de 2011 sur les prisons). Elle a relevé également que, en vertu de l’article 41 de la loi sur les partis politiques de 1997, diverses infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal ou dont l’enregistrement a été refusé, sont elles aussi passibles de peines pouvant s’élever à une année d’emprisonnement.
    La commission note que le gouvernement indique que l’article 41 de la loi sur les partis politiques de 1997 n’a jamais été appliqué dans la pratique et que l’article 61 de la loi de 1992 a été abrogé et remplacé par le Code pénal de 2009. Le gouvernement se réfère en particulier aux articles du Code pénal qui concernent la diffamation, les manifestations publiques et les injures à des représentants de la force publique. La commission observe à cet égard que, si les délits de diffamation et d’injures (art. 305-309) ne sont passibles que de peines d’amende, de nombreuses peines d’emprisonnement restent prévues par le Code pénal dans des situations qui relèvent de l’article 1 a) de la convention; de telles sanctions sont donc incompatibles avec la convention:
    • -l’article 445, punissant les insultes au roi;
    • -les articles 504 et 505, punissant la provocation directe en vue de commettre un délit grave ou une discrimination sur la base de motifs ethniques, nationaux, raciaux ou religieux par le biais de discours ou réunions publics, publications ou tout autre support audiovisuel;
    • -l’article 511, punissant l’injure faite à un fonctionnaire ou une personne exerçant un mandat public électif dans l’exercice de ses fonctions, par des paroles, des gestes, des écrits, des dessins ou des objets;
    • -l’article 517, punissant la célébration, dans un lieu de culte ouvert au public, d’une cérémonie bouddhiste sans l’autorisation d’une autorité religieuse.
    Se référant aux paragraphes 302 et 303 de son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, la commission attire à nouveau l’attention du gouvernement sur le fait que les sanctions comportant une obligation de travail, y compris un travail pénitentiaire obligatoire, sont incompatibles avec la convention dès lors que ces peines sanctionnent l’interdiction d’exprimer une opinion ou de manifester une opposition à l’ordre politique, social ou économique établi. En conséquence, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre les dispositions susmentionnées du Code pénal ainsi que l’article 41 de la loi sur les partis politiques de 1997 en conformité avec la convention, soit en limitant leur champ d’application aux seuls actes de violence ou d’incitation à la violence, soit en substituant les peines d’emprisonnement par d’autres types de sanctions (par exemple des amendes), de manière à garantir qu’aucune peine comportant une obligation de travail ne puisse être imposée en tant que sanction à l’égard de ceux qui ont ou expriment certaines opinions politiques. Dans l’attente de l’adoption de ces mesures, la commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur l’application des dispositions susmentionnées dans la pratique en communiquant, le cas échéant, copie de toute décision de justice qui serait de nature à en définir ou en illustrer la portée.
    La commission prend note de l’adoption, le 21 octobre 2009, de la loi sur les manifestations pacifiques qui remplace la loi de 1991 sur les manifestations. Elle note à cet égard que le gouvernement indique que si la liberté d’expression et le droit de manifester pacifiquement sont garantis par la Constitution, ces droits ne doivent pas s’exercer d’une manière qui attente à la liberté ou à la dignité d’autrui ou à la tradition de la nation, à l’ordre public ou à la sécurité nationale.
    La commission se réfère à cet égard aux préoccupations exprimées par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge dans son rapport d’août 2014, après que le gouvernement a interdit en janvier 2014 toute manifestation, suite aux nombreuses manifestations qui se sont multipliées à la fin de l’année 2013. Le rapporteur spécial a observé à ce sujet que, si des mesures limitant les libertés publiques et politiques peuvent être prises dans certaines situations d’urgence, en l’occurrence, les autorités ne semblent pas avoir officiellement proclamé un état d’urgence en raison d’une menace pour la vie de la nation. Le rapporteur indique en outre que sept opposants parlementaires ont été arrêtés en juillet 2014 alors qu’ils manifestaient pour la levée de cette interdiction, qui était toujours en vigueur au moment de l’établissement de son rapport (A/HRC/27/70, paragr. 17, 21 et 22). Se référant aux explications développées sous le premier point de la présente observation, la commission prie le gouvernement d’indiquer quelles sont les dispositions légales sur la base desquelles l’interdiction des manifestations a été imposée, et notamment les dispositions légales et les faits ayant justifié l’arrestation des manifestants.
    La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

    Communication de textes. La commission prend note du nouveau Code pénal, de la loi sur les manifestations, ainsi que de la circulaire no 005 (2000) et de la notification no 20 (2000) sur le droit de grève, que le gouvernement a communiqués avec son rapport. Elle prie à nouveau le gouvernement de fournir dans son prochain rapport copie des dispositions régissant le travail pénitentiaire et de la loi régissant les relations du travail dans le transport maritime, à laquelle il est fait référence à l’article 1(d) de la loi sur le travail, 1997, notamment toutes dispositions disciplinaires applicables aux gens de mer.
    Article 1 a) de la convention. Sanctions comportant du travail obligatoire imposées à l’encontre de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. La commission a précédemment noté que l’article 61 des dispositions relatives à la législation et à la procédure judiciaire et pénale applicables au Cambodge durant la période transitoire, 1992, prévoit des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) en cas d’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse au moyen de discours ou de réunions sur la place publique, d’écrits, de publications, de peinture, de films ou de tout autre moyen de communication audiovisuel («incitation à la discrimination»). Elle a également noté les dispositions de l’article 41 de la loi sur les partis politiques du 28 octobre 1997, prévoyant des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) pour différentes infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal, ou dont l’enregistrement a été refusé.
    La commission a rappelé que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle s’est référée à cet égard au paragraphe 154 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, dans lequel elle a souligné que la convention n’interdit pas d’appliquer de sanctions comportant du travail obligatoire aux personnes qui recourent à la violence, incitent à la violence ou s’engagent dans des actes préparatoires à la violence; mais que les peines comportant du travail obligatoire relèvent de la convention lorsqu’elles sanctionnent l’interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi. Des problèmes similaires d’application de la convention peuvent également se poser lorsque la législation prévoit des restrictions pour la constitution et le fonctionnement d’associations, lorsque les autorités administratives jouissent de pouvoirs étendus de suspendre des associations ou d’empêcher leur création, si de telles restrictions sont passibles de sanctions comportant du travail obligatoire.
    La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées, y compris copie de toute décision de justice qui en définirait ou en illustrerait la portée, de sorte que la commission puisse vérifier si elles sont appliquées de manière compatible avec la convention.
    La commission a noté que l’article 12 de la loi du 18 juillet 1995 relative à la presse interdit la publication ou la reproduction d’informations qui affectent la sécurité nationale ou la stabilité politique, toute infraction à cette interdiction étant passible d’amendes, mais également de sanctions pénales. Notant que le rapport du gouvernement ne contient aucune information à ce sujet et se référant aux explications fournies sous le point 1 ci-dessus, la commission espère que le gouvernement ne manquera pas de fournir dans son prochain rapport des informations au sujet de l’application pratique de l’article 12 de la loi relative à la presse de 1995, en indiquant la nature des sanctions pénales applicables en cas d’infraction à l’article 12. Prière de transmettre copie des textes pertinents, ainsi que de toute décision de justice susceptible d’en définir ou illustrer la portée, en indiquant les sanctions pénales infligées.
    La commission prend note de la loi sur les manifestations que le gouvernement a fournie avec son rapport. Elle note en particulier que l’article 1 de ladite loi interdit les manifestations qui peuvent porter atteinte à la tranquillité, à l’ordre ou à la sécurité publics. En vertu de l’article 4, les autorités peuvent prendre des mesures pour mettre un terme à toute manifestation organisée sans l’autorisation des autorités locales. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur l’application pratique de la loi sur les manifestations, en indiquant en particulier si des peines d’emprisonnement peuvent être appliquées en cas de violation de ses dispositions. Prière de fournir copie de tout texte pertinent ainsi que de toute décision de justice prononcée sur le fondement de cette loi, en indiquant les sanctions infligées.
    La commission note l’adoption du nouveau Code pénal, en vigueur depuis décembre 2010. Dans l’attente de la traduction du nouveau texte, la commission note le rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge, présenté le 2 août 2011 à la 18e session du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (document no A/HRC/18/46), dans lequel le Rapporteur spécial se dit préoccupé de constater que des dispositions de plusieurs lois au Cambodge, y compris celles du nouveau Code pénal, limitent les libertés des personnes au-delà des normes internationales, tout comme l’interprétation et l’application qu’en font les tribunaux. La commission note également que, dans son rapport, le Rapporteur spécial évoque une tendance inquiétante aux restrictions de la liberté d’expression sous forme d’actions en justice pour diffamation, désinformation et provocation, qui s’est traduite par des peines d’emprisonnement prononcées à l’encontre de particuliers, notamment de journalistes, d’employés d’ONG et de parlementaires, qui n’avaient pas l’intention de porter atteinte à la sécurité nationale. A cet égard, le Rapporteur spécial se réfère en particulier aux condamnations pour diffamation et désinformation en vertu de l’article 305 du nouveau Code pénal et pour provocation en vertu de l’article 495 du même code, dans le cadre desquels des peines d’emprisonnement (avec obligation de travailler) ont été imposées.
    Corroborant les communications du Rapporteur spécial des Nations Unies, la commission note le rapport du Groupe de travail sur l’examen périodique universel, présenté le 4 janvier 2010 à la 13e session du Conseil des droits de l’homme (document A/HRC/13/4), dans lequel le groupe de travail a recommandé au Cambodge de «réexaminer le nouveau Code pénal, récemment adopté, afin de garantir que les restrictions permises à la liberté d’expression soient conformes à celles autorisées et de définir la portée des délits de diffamation et de désinformation afin de garantir que ceux-ci ne portent pas atteinte à la liberté d’expression et de donner aux magistrats des instructions claires afin que ces dispositions ne donnent pas lieu à des accusations bien souvent disproportionnées» (paragr. 46). La commission espère que le gouvernement fournira dans son prochain rapport des informations sur les mesures prises ou envisagées afin de donner effet à ces recommandations, en particulier en ce qui concerne la révision des dispositions qui restreignent la liberté d’expression, ainsi que des informations sur toute autre mesure prise ou envisagée afin d’assurer la conformité avec la convention sur ce point.
    Article 1 c). Mesures disciplinaires applicables aux agents de la fonction publique. La commission a précédemment noté que l’article 35 de la loi sur le statut des fonctionnaires publics, du 26 octobre 1994, interdit strictement aux fonctionnaires publics d’effectuer certains actes, comme par exemple d’accomplir un travail personnel pendant les heures de travail, de publier des faits relatifs à leur poste sans autorisation préalable du ministre, ou d’exercer une profession interdite par le statut particulier de leur corps, cette interdiction étant assortie de sanctions disciplinaires conformément à l’article 40 de la même loi, sans préjudice de toute poursuite pénale éventuelle. Notant que le rapport du gouvernement ne contient aucune information à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement de préciser la portée de la responsabilité pénale prévue à l’article 35 et d’indiquer les sanctions pénales applicables, en transmettant copie des textes pertinents, afin de permettre à la commission d’évaluer la conformité des sanctions avec la convention.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

    La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:

    La commission saurait gré au gouvernement de communiquer, avec son prochain rapport, copies de la législation suivante: le texte actualisé et consolidé du Code pénal et du Règlement sur les prisons (ainsi que de toutes autres dispositions régissant le travail pénitentiaire); les lois régissant les assemblées, les réunions et les rassemblements publics; la loi régissant les relations du travail dans le transport maritime, à laquelle il est fait référence à l’article 1(d) de la loi sur le travail, 1997, notamment toutes dispositions disciplinaires applicables aux gens de mer; la circulaire no 005 Mosalvy datée du 6 mars 2000 concernant le droit de grève et la notification no 20 Mosalvy datée du 29 août 2000 sur le droit de grève des travailleurs, auxquelles il est fait référence dans le rapport. Prière de fournir également des informations supplémentaires sur les points suivants.

    Article 1 a) de la convention.Sanction à l’égard de personnes qui expriment certaines opinions politiques.1. La commission note que l’article 61 des dispositions relatives à la législation et à la procédure judiciaire et pénale applicables au Cambodge durant la période transitoire, 1992, prévoit des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) en cas d’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse au moyen de discours ou de réunions sur la place publique, d’écrits, de publications, de peinture, de films ou de tout autre moyen de communication audiovisuelle («incitation à la discrimination»). Elle prend note également des dispositions de l’article 41 de la loi sur les partis politiques du 28 octobre 1997, prévoyant des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) pour différentes infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal, ou dont l’enregistrement a été refusé.

    La commission rappelle que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle se réfère à ce propos au paragraphe 154 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, dans lequel elle fait observer que la convention n’interdit pas la punition par des peines comportant du travail obligatoire des personnes qui recourent à la violence, incitent à la violence ou s’engagent dans des actes préparatoires à la violence; mais que les peines comportant du travail obligatoire relèvent de la convention lorsqu’elles sanctionnent l’interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi. Des problèmes similaires d’application de la convention peuvent également se poser avec les restrictions frappant la constitution et le fonctionnement d’associations, lorsque les autorités administratives jouissent de pouvoirs étendus de suspendre des associations ou d’opposer un refus à leur création, si de telles restrictions sont passibles de sanctions comportant du travail obligatoire.

    La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées, y compris copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée, de manière à permettre à la commission de vérifier si elles sont appliquées de manière compatible avec la convention.

    2. La commission note que l’article 12 de la loi du 18 juillet 1995 relative à la presse interdit la publication ou la reproduction d’informations qui affectent la sécurité nationale ou la stabilité politique, toute infraction à cette interdiction étant passible d’amendes mais également de peines, conformément à la loi pénale. Se référant aux explications données sous le point 1 de la présente demande directe, la commission prie le gouvernement de fournir des précisions au sujet de cette disposition, en indiquant la nature des sanctions pénales applicables en cas d’infraction à l’article 12 et de transmettre copies des textes pertinents, ainsi que des informations sur l’application de cet article dans la pratique, et notamment copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée et indiquant les sanctions pénales infligées.

    Article 1 c).Mesures disciplinaires applicables aux agents de la fonction publique.La commission note que l’article 35 de la loi sur le statut des fonctionnaires publics, du 26 octobre 1994, interdit strictement aux fonctionnaires publics d’effectuer certains actes, comme par exemple d’accomplir un travail personnel pendant les heures de travail, de publier des faits relatifs à leur poste sans autorisation préalable du Ministre, ou d’exercer une profession interdite par le statut particulier de leur corps, cette interdiction étant assortie de sanctions disciplinaires conformément à l’article 40 de la même loi, sans préjudice de toutes poursuites pénales éventuelles. Prière de préciser la portée de la responsabilité pénale prévue à l’article 35 et d’indiquer les sanctions pénales applicables, en transmettant copie des textes pertinents, en vue de permettre à la commission d’évaluer leur conformité avec la convention.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

    La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points suivants soulevés dans sa précédente demande directe:

    La commission saurait gré au gouvernement de communiquer, avec son prochain rapport, copies de la législation suivante: le texte actualisé et consolidé du Code pénal et du Règlement sur les prisons (ainsi que de toutes autres dispositions régissant le travail pénitentiaire); les lois régissant les assemblées, les réunions et les rassemblements publics; la loi régissant les relations du travail dans le transport maritime, à laquelle il est fait référence à l’article 1(d) de la loi sur le travail, 1997, notamment toutes dispositions disciplinaires applicables aux gens de mer; la circulaire no 005 Mosalvy datée du 6 mars 2000 concernant le droit de grève et la notification no 20 Mosalvy datée du 29 août 2000 sur le droit de grève des travailleurs, auxquelles il est fait référence dans le rapport. Prière de fournir également des informations supplémentaires sur les points suivants.

    Article 1 a) de la convention.Sanction à l’égard de personnes qui expriment certaines opinions politiques.1. La commission note que l’article 61 des dispositions relatives à la législation et à la procédure judiciaire et pénale applicables au Cambodge durant la période transitoire, 1992, prévoit des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) en cas d’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse au moyen de discours ou de réunions sur la place publique, d’écrits, de publications, de peinture, de films ou de tout autre moyen de communication audiovisuelle («incitation à la discrimination»). Elle prend note également des dispositions de l’article 41 de la loi sur les partis politiques du 28 octobre 1997, prévoyant des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) pour différentes infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal, ou dont l’enregistrement a été refusé.

    La commission rappelle que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle se réfère à ce propos au paragraphe 154 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, dans lequel elle fait observer que la convention n’interdit pas la punition par des peines comportant du travail obligatoire des personnes qui recourent à la violence, incitent à la violence ou s’engagent dans des actes préparatoires à la violence; mais que les peines comportant du travail obligatoire relèvent de la convention lorsqu’elles sanctionnent l’interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi. Des problèmes similaires d’application de la convention peuvent également se poser avec les restrictions frappant la constitution et le fonctionnement d’associations, lorsque les autorités administratives jouissent de pouvoirs étendus de suspendre des associations ou d’opposer un refus à leur création, si de telles restrictions sont passibles de sanctions comportant du travail obligatoire.

    La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées, y compris copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée, de manière à permettre à la commission de vérifier si elles sont appliquées de manière compatible avec la convention.

    2. La commission note que l’article 12 de la loi du 18 juillet 1995 relative à la presse interdit la publication ou la reproduction d’informations qui affectent la sécurité nationale ou la stabilité politique, toute infraction à cette interdiction étant passible d’amendes mais également de peines, conformément à la loi pénale. Se référant aux explications données sous le point 1 de la présente demande directe, la commission prie le gouvernement de fournir des précisions au sujet de cette disposition, en indiquant la nature des sanctions pénales applicables en cas d’infraction à l’article 12 et de transmettre copies des textes pertinents, ainsi que des informations sur l’application de cet article dans la pratique, et notamment copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée et indiquant les sanctions pénales infligées.

    Article 1 c).Mesures disciplinaires applicables aux agents de la fonction publique.La commission note que l’article 35 de la loi sur le statut des fonctionnaires publics, du 26 octobre 1994, interdit strictement aux fonctionnaires publics d’effectuer certains actes, comme par exemple d’accomplir un travail personnel pendant les heures de travail, de publier des faits relatifs à leur poste sans autorisation préalable du Ministre, ou d’exercer une profession interdite par le statut particulier de leur corps, cette interdiction étant assortie de sanctions disciplinaires conformément à l’article 40 de la même loi, sans préjudice de toutes poursuites pénales éventuelles. Prière de préciser la portée de la responsabilité pénale prévue à l’article 35 et d’indiquer les sanctions pénales applicables, en transmettant copie des textes pertinents, en vue de permettre à la commission d’évaluer leur conformité avec la convention.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

    La commission note avec regret que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points suivants soulevés dans sa précédente demande directe:

    La commission saurait gré au gouvernement de communiquer, avec son prochain rapport, copies de la législation suivante: le texte actualisé et consolidé du Code pénal et du Règlement sur les prisons (ainsi que de toutes autres dispositions régissant le travail pénitentiaire); les lois régissant les assemblées, les réunions et les rassemblements publics; la loi régissant les relations du travail dans le transport maritime, à laquelle il est fait référence à l’article 1(d) de la loi sur le travail, 1997, notamment toutes dispositions disciplinaires applicables aux gens de mer; la circulaire no 005 Mosalvy datée du 6 mars 2000 concernant le droit de grève et la notification no 20 Mosalvy datée du 29 août 2000 sur le droit de grève des travailleurs, auxquelles il est fait référence dans le rapport. Prière de fournir également des informations supplémentaires sur les points suivants.

    Article 1 a) de la convention.Sanction à l’égard de personnes qui expriment certaines opinions politiques. 1. La commission note que l’article 61 des dispositions relatives à la législation et à la procédure judiciaire et pénale applicables au Cambodge durant la période transitoire, 1992, prévoit des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) en cas d’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse au moyen de discours ou de réunions sur la place publique, d’écrits, de publications, de peinture, de films ou de tout autre moyen de communication audiovisuelle («incitation à la discrimination»). Elle prend note également des dispositions de l’article 41 de la loi sur les partis politiques du 28 octobre 1997, prévoyant des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) pour différentes infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal, ou dont l’enregistrement a été refusé.

    La commission rappelle que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle se réfère à ce propos au paragraphe 154 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, dans lequel elle fait observer que la convention n’interdit pas la punition par des peines comportant du travail obligatoire des personnes qui recourent à la violence, incitent à la violence ou s’engagent dans des actes préparatoires à la violence; mais que les peines comportant du travail obligatoire relèvent de la convention lorsqu’elles sanctionnent l’interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi. Des problèmes similaires d’application de la convention peuvent également se poser avec les restrictions frappant la constitution et le fonctionnement d’associations, lorsque les autorités administratives jouissent de pouvoirs étendus de suspendre des associations ou d’opposer un refus à leur création, si de telles restrictions sont passibles de sanctions comportant du travail obligatoire.

    La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées, y compris copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée, de manière à permettre à la commission de vérifier si elles sont appliquées de manière compatible avec la convention.

    2. La commission note que l’article 12 de la loi du 18 juillet 1995 relative à la presse interdit la publication ou la reproduction d’informations qui affectent la sécurité nationale ou la stabilité politique, toute infraction à cette interdiction étant passible d’amendes mais également de peines, conformément à la loi pénale. Se référant aux explications données sous le point 1 de la présente demande directe, la commission prie le gouvernement de fournir des précisions au sujet de cette disposition, en indiquant la nature des sanctions pénales applicables en cas d’infraction à l’article 12 et de transmettre copies des textes pertinents, ainsi que des informations sur l’application de cet article dans la pratique, et notamment copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée et indiquant les sanctions pénales infligées.

    Article 1 c).Mesures disciplinaires applicables aux agents de la fonction publique. La commission note que l’article 35 de la loi sur le statut des fonctionnaires publics, du 26 octobre 1994, interdit strictement aux fonctionnaires publics d’effectuer certains actes, comme par exemple d’accomplir un travail personnel pendant les heures de travail, de publier des faits relatifs à leur poste sans autorisation préalable du Ministre, ou d’exercer une profession interdite par le statut particulier de leur corps, cette interdiction étant assortie de sanctions disciplinaires conformément à l’article 40 de la même loi, sans préjudice de toutes poursuites pénales éventuelles. Prière de préciser la portée de la responsabilité pénale prévue à l’article 35 et d’indiquer les sanctions pénales applicables, en transmettant copie des textes pertinents, en vue de permettre à la commission d’évaluer leur conformité avec la convention.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

    La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle espère qu’un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points suivants soulevés dans sa précédente demande directe:

    La commission saurait gré au gouvernement de communiquer, avec son prochain rapport, copies de la législation suivante: le texte actualisé et consolidé du Code pénal et du Règlement sur les prisons (ainsi que de toutes autres dispositions régissant le travail pénitentiaire); les lois régissant les assemblées, les réunions et les rassemblements publics; la loi régissant les relations du travail dans le transport maritime, à laquelle il est fait référence à l’article 1(d) de la loi sur le travail, 1997, notamment toutes dispositions disciplinaires applicables aux gens de mer; la circulaire no 005 Mosalvy datée du 6 mars 2000 concernant le droit de grève et la notification no 20 Mosalvy datée du 29 août 2000 sur le droit de grève des travailleurs, auxquelles il est fait référence dans le rapport. Prière de fournir également des informations supplémentaires sur les points suivants.

    Article 1 a) de la convention. 1. La commission note que l’article 61 des dispositions relatives à la législation et à la procédure judiciaire et pénale applicables au Cambodge durant la période transitoire, 1992, prévoit des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) en cas d’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse au moyen de discours ou de réunions sur la place publique, d’écrits, de publications, de peinture, de films ou de tout autre moyen de communication audiovisuelle («incitation à la discrimination»). Elle prend note également des dispositions de l’article 41 de la loi sur les partis politiques du 28 octobre 1997, prévoyant des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) pour différentes infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal, ou dont l’enregistrement a été refusé.

    La commission rappelle que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle se réfère à ce propos aux paragraphes 133 à 140 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, dans lesquels elle fait observer que la convention n’interdit pas la punition par des peines comportant du travail obligatoire des personnes qui recourent à la violence, incitent à la violence ou s’engagent dans des actes préparatoires à la violence; mais que les peines comportant du travail obligatoire relèvent de la convention lorsqu’elles sanctionnent l’interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi. Des problèmes similaires d’application de la convention peuvent également se poser avec les restrictions frappant la constitution et le fonctionnement d’associations, lorsque les autorités administratives jouissent de pouvoirs étendus de suspendre des associations ou d’opposer un refus à leur création, si de telles restrictions sont passibles de sanctions comportant du travail obligatoire.

    La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées, y compris copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée, de manière à permettre à la commission de vérifier si elles sont appliquées de manière compatible avec la convention.

    2. La commission note que l’article 12 de la loi du 18 juillet 1995 relative à la presse interdit la publication ou la reproduction d’informations qui affectent la sécurité nationale ou la stabilité politique, toute infraction à cette interdiction étant passible d’amendes mais également de peines, conformément à la loi pénale. Se référant aux explications données sous le point 1 de la présente demande directe, la commission prie le gouvernement de fournir des précisions au sujet de cette disposition, en indiquant la nature des sanctions pénales applicables en cas d’infraction à l’article 12 et de transmettre copies des textes pertinents, ainsi que des informations sur l’application de cet article dans la pratique, et notamment copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée et indiquant les sanctions pénales infligées.

    Article 1 c). La commission note que l’article 35 de la loi sur le statut des fonctionnaires publics, du 26 octobre 1994, interdit strictement aux fonctionnaires publics d’effectuer certains actes, comme par exemple d’accomplir un travail personnel pendant les heures de travail, de publier des faits relatifs à leur poste sans autorisation préalable du Ministre, ou d’exercer une profession interdite par le statut particulier de leur corps, cette interdiction étant assortie de sanctions disciplinaires conformément à l’article 40 de la même loi, sans préjudice de toutes poursuites pénales éventuelles. Prière de préciser la portée de la responsabilité pénale prévue à l’article 35 et d’indiquer les sanctions pénales applicables, en transmettant copie des textes pertinents, en vue de permettre à la commission d’évaluer leur conformité avec la convention.

    Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

    La commission prend note avec intérêt des informations fournies par le gouvernement dans son premier rapport sur l’application de la convention. Elle prend note, en particulier, de la Constitution du Royaume de Cambodge de 1993, dans sa teneur modifiée en 1999, des dispositions relatives à la législation et à la procédure judiciaire et pénale applicables au Cambodge au cours de la période transitoire, adoptées par décision du Conseil national suprême le 10 septembre 1992, ainsi que des autres textes transmis par le gouvernement. La commission saurait gré au gouvernement de communiquer, avec son prochain rapport, copies de la législation suivante: le texte actualisé et consolidé du Code pénal et du Règlement sur les prisons (ainsi que de toutes autres dispositions régissant le travail pénitentiaire); les lois régissant les assemblées, les réunions et les rassemblements publics; la loi régissant les relations du travail dans le transport maritime, à laquelle il est fait référence à l’article 1(d) de la loi sur le travail, 1997, notamment toutes dispositions disciplinaires applicables aux gens de mer; la circulaire no 005 Mosalvy datée du 6 mars 2000 concernant le droit de grève et la notification no 20 Mosalvy datée du 29 août 2000 sur le droit de grève des travailleurs, auxquelles il est fait référence dans le rapport. Prière de fournir également des informations supplémentaires sur les points suivants.

    1. Article 1 a) de la convention. La commission note que l’article 61 des dispositions relatives à la législation et à la procédure judiciaire et pénale applicables au Cambodge durant la période transitoire, 1992, prévoit des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) en cas d’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse au moyen de discours ou de réunions sur la place publique, d’écrits, de publications, de peinture, de films ou de tout autre moyen de communication audiovisuelle («incitation à la discrimination»). Elle prend note également des dispositions de l’article 41 de la loi sur les partis politiques du 28 octobre 1997, prévoyant des peines d’emprisonnement pour une durée maximum d’une année (comportant un travail pénitentiaire obligatoire) pour différentes infractions relatives à l’administration ou à la gestion d’un parti politique qui a été dissous, dont les activités ont été suspendues par un tribunal, ou dont l’enregistrement a été refusé.

    La commission rappelle que l’article 1 a) de la convention interdit le recours au travail forcé ou obligatoire en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi. Elle se réfère à ce propos aux paragraphes 133 à 140 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, dans lesquels elle fait observer que la convention n’interdit pas la punition par des peines comportant du travail obligatoire des personnes qui recourent à la violence, incitent à la violence ou s’engagent dans des actes préparatoires à la violence; mais que les peines comportant du travail obligatoire relèvent de la convention lorsqu’elles sanctionnent l’interdiction d’exprimer des opinions ou de manifester une opposition au système politique, social ou économique établi. Des problèmes similaires d’application de la convention peuvent également se poser avec les restrictions frappant la constitution et le fonctionnement d’associations, lorsque les autorités administratives jouissent de pouvoirs étendus de suspendre des associations ou d’opposer un refus à leur création, si de telles restrictions sont passibles de sanctions comportant du travail obligatoire.

    La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées, et de transmettre notamment copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée, de manière à permettre à la commission de vérifier si elles sont appliquées de manière compatible avec la convention.

    2. La commission note que l’article 12 de la loi du 18 juillet 1995 relative à la presse interdit la publication ou la reproduction d’informations qui affectent la sécurité nationale ou la stabilité politique, toute infraction à cette interdiction étant passible d’amendes mais également de peines, conformément à la loi pénale. Se référant aux explications données sous le point 1 de la présente demande directe, la commission prie le gouvernement de fournir des précisions au sujet de cette disposition, en indiquant la nature des sanctions pénales applicables en cas d’infraction à l’article 12 et de transmettre copies des textes pertinents, ainsi que des informations sur l’application de cet article dans la pratique, et notamment copie de toutes décisions de justice qui en définissent ou en illustrent la portée et indiquant les sanctions pénales infligées.

    Article 1 c). La commission note que l’article 35 de la loi sur le statut des fonctionnaires publics, du 26 octobre 1994, interdit strictement aux fonctionnaires publics d’effectuer certains actes, comme par exemple d’accomplir un travail personnel pendant les heures de travail, de publier des faits relatifs à leur poste sans autorisation préalable du Ministre, ou d’exercer une profession interdite par le statut particulier de leur corps, cette interdiction étant assortie de sanctions disciplinaires conformément à l’article 40 de la même loi, sans préjudice de toutes poursuites pénales éventuelles. Prière de préciser la portée de la responsabilité pénale prévue à l’article 35 et d’indiquer les sanctions pénales applicables, en transmettant copie des textes pertinents, en vue de permettre à la commission d’évaluer leur conformité avec la convention.

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