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Cas individuel (CAS) - Discussion : 1999, Publication : 87ème session CIT (1999)

Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

S'agissant de la servitude pour dettes touchant les communautés Ashaninka et Ucayali, bien que les Ashaninka aient été dans le passé soumis à la servitude pour dettes dans le cadre des pratiques des "enganche o habilitación", la lutte pour leur émancipation et leurs droits sur la terre a porté ses fruits dans la création de l'Organisation indigène de la région d'Atalaya (OIRA). Celle-ci aura lutté jusqu'à l'obtention de la possession des terres de la part des Ashaninka, en établissant des liens entre les indigènes et leur territoire.

Les Ashaninka propriétaires de leurs terres se sont libérés de la domination de leur employeur et c'est ainsi que la Constitution reconnaît que la terre indigène et les droits y affectés sont plus forts que ceux inhérents à toute propriété privée, et qu'il y a eu des titres sur les terres des Ashaninka. L'enregistrement des terres a initié un processus d'autodéveloppement.

L'émancipation des esclaves en Atalaya constitue un exemple important de la libération des indigènes. L'expérience Ashaninka démontre que le droit d'autodétermination constitue l'antithèse de l'esclavage et que la base de cette liberté se reflète dans la reconnaissance des droits territoriaux.

S'agissant des actions envisagées par le gouvernement pour l'application de la convention en particulier celle consistant à veiller à ce que la servitude pour dettes ne soit pas appliquée en Atalaya et Ucayali , des visites ont été effectuées en Atalaya auprès des communautés autochtones, des paysans et des éleveurs qui constituent la masse laborieuse des bûcherons. A cette occasion, des discussions sur les questions de travail ont été organisées de manière à sensibiliser les travailleurs sur leurs droits. Ces visites ont été coordonnées par le ESSALUD et l'Agence agraire d'Atalaya.

De juin à décembre 1999, la Zone de travail et de promotion sociale d'Atalaya (Région d'Ucayali) prévoit des visites d'inspection dans tous les centres de travail, aussi bien en zone urbaine qu'en zone rurale.

En particulier, il y a lieu de signaler trois dénonciations auprès de l'Autorité du travail concernant la pratique du travail forcé des autochtones sans identification et analphabètes, entraînant ainsi une sanction des employeurs conformément à la loi.

Parallèlement, l'OIRA organise des campagnes d'enregistrement et d'éducation à l'intention de toutes les communautés autochtones.

S'agissant des travailleurs de Madre de Dios, il convient de préciser que le travail des adolescents notamment celui des enfants dans les installations aurifères de Madre de Dios diminue sensiblement pour diverses raisons parmi lesquelles:

-- après avoir été éminemment artisanal, le travail d'extraction aurifère s'est progressivement mécanisé avec l'acquisition, par les centres de travail, de matériel lourd tel que tombereaux, pelleteuses mécaniques, tracteurs, dragueurs, etc.; un matériel qui requiert une main-d'oeuvre adulte qualifiée, et non des adolescents ou des enfants;

-- les zones de grande activité minière, telles que celle de Huaypetue, ont diminué leur activité de 14 pour cent du fait que l'extraction aurifère n'atteint plus les niveaux antérieurs. Cette situation a entraîné la saisie du matériel des mineurs par les entreprises vendeuses (AUTRISA, EXPUMISA, FERREYROS), ceux-ci n'ayant pas réussi à honorer leurs engagements. En outre, les effets du phénomène "El Niño" ont entraîné la paralysie conjoncturelle des activités à cause de la pénurie et de la hausse des prix des combustibles, carburants et aliments de première nécessité;

-- grâce aux opérations réalisées entre 1996 et 1998 par l'autorité administrative départementale du travail, les employeurs ont engagé moins d'adolescents par crainte de sanctions légales.

S'agissant des actions entreprises par le ministère du Travail, il est important de noter qu'une grande opération a été réalisée en 1996 dans tout le département de Madre de Dios, avec la visite de 328 centres pour mineurs impliquant 1.614 travailleurs. Cette inspection a révélé 54 cas d'adolescents dont 40 garçons et 14 filles âgés de 10 à 18 ans. Les employeurs ont été alors priés de régulariser l'autorisation de travail des adolescents et de payer les dettes. Dans un cas particulier, le transfert d'un mineur à un centre d'assistance a été effectué en raison de son grave état de santé.

Pendant les vacances, les jeunes âgés de 16 à 18 ans, et en particulier ceux de la zone rurale et des provinces montagneuses des départements de Cuzco, Apurímac et Puno, émigrent jusqu'au département de Madre de Dios à la recherche de travail pour financer leurs frais d'études.

De même, les jeunes âgés de 16 à 18 ans se font souvent embaucher comme aide-cuisiniers dans les campements miniers. En 1996, certains d'entre eux ont été victimes d'agressions sexuelles de la part de leurs camarades et de leur employeur. La situation s'est améliorée à la suite des dispositions prises à cet égard.

En réalité, le travail des adolescents dans le département de Madre de Dios, notamment dans les centres aurifères, s'est développé de manière alarmante dans les années soixante-dix à quatre-vingt où l'exploitation minière était artisanale avec une quantité importante de main-d'oeuvre. Depuis les années quatre-vingt-dix, les problèmes susmentionnés ainsi que les effets de la crise économique mondiale sur le plan national ont éliminé l'emploi des adolescents dans ce secteur. Enfin, à Huaypetue, les fonctionnaires du ministère du Travail assurent le contrôle de l'application des normes du travail, tout en orientant les mineurs dans leurs droits.

Tout cela confirme que le gouvernement prend toutes les mesures nécessaires pour l'application de la convention, notamment avec le renforcement du système d'inspection dans les zones concernées.

S'agissant du travail du condamné, le droit positif national comprend les dispositions suivantes:

i) Constitution

-- Article 22 de la Constitution: "Le travail est un droit et un devoir. Il est le fondement du bien-être social et aide à la réalisation des personnes."

-- Article 23, paragraphe 3, de la Constitution: "Nul n'est obligé d'exécuter un travail sans rémunération ou sans y avoir librement consenti."

ii) Code de procédure pénale

-- Article 65: "Le travail est un droit et un devoir du condamné. Il contribue à sa réhabilitation."

-- Article 67: "Le travail du condamné est rémunéré."

Il convient de préciser que le travail constitue la base du bien-être social en améliorant le niveau de vie et de progrès de la société.

S'agissant des condamnés, la législation nationale mentionne que le travail pénitentiaire ne présente pas de caractère affligeant, qu'il n'est pas utilisé comme mesure disciplinaire, de même qu'il ne constitue pas une atteinte à la dignité du condamné. Au contraire, un des principes du Code de procédure pénale se réfère à la remise de peine au moyen du travail et de l'éducation comme un avantage pénitentiaire non obligatoire. Dans le cas contraire, une rémunération s'imposerait.

En outre, le gouvernement favorise l'éducation des détenus, notamment par le biais d'une convention entre l'Institut national pénitentiaire (INPE) et la Faculté d'administration de l'Université Inca Garcilaso De La Vega. Ainsi, les condamnés ont la possibilité de suivre un cours par correspondance en sciences administratives.

En conclusion, le gouvernement respecte rigoureusement l'application de la convention et il n'existe pas de travail forcé dans le pays.

Une représentante gouvernementale a évoqué devant la commission d'abord la question de la servitude pour dettes dans les communautés Ashaninkas d'Atalaya et Ucayali. A ce sujet, elle a réitéré les informations que le gouvernement avait communiquées par écrit et a ajouté que le gouvernement avait mis en oeuvre des actions pour vérifier les conditions de travail et le respect des autres droits du travail. Elle a ajouté que les activités réalisées en collaboration avec l'organisme de sécurité sociale et de santé (ESSALUD), organisme relevant du ministère du Travail et de la Promotion sociale, ont permis de dispenser périodiquement des soins de santé aux membres de ces communautés et d'améliorer la santé et l'hygiène dans cette région.

S'agissant du travail des enfants dans la région d'Atalaya, elle s'est reportée aux informations écrites du gouvernement et a précisé que les sanctions infligées aux employeurs ont représenté, par entreprise, une somme de 10 à 15.000 dollars des Etats-Unis. Toutefois, le nombre de personnes mineures concernées n'a pas dépassé 50 par entreprise. L'oratrice est consciente que la réalité dépasse largement les trois cas qui ont fait l'objet de plaintes, et le ministère du Travail et de la Promotion sociale a donc décidé de procéder à une supervision constante de la région en question, afin de disposer des informations nécessaires pour pouvoir dresser un bilan actualisé de la situation du travail dans la région. Ces informations seront transmises en temps opportun au Bureau.

En ce qui concerne les travailleurs des zones de Madre de Dios, Kosñipata, Lares et autres, elle a repris les informations écrites du gouvernement et indiqué que, préoccupé par ce problème, il a prévu, en concertation avec l'OIT, d'installer un centre pour l'élimination du travail des enfants dans les mines. Elle a signalé aussi que, malgré les difficultés géographiques, le ministère du Travail et de la Promotion sociale a mené à bien en 1996, 1997 et 1998 différentes activités dans le département de Madre de Dios. Le gouvernement a communiqué par écrit les résultats de ces activités. Par ailleurs, en 1997, une opération du même ordre a été menée, et trois enfants qui travaillaient dans des exploitations minières ont été trouvés. Enfin, en 1998, 412 visites ont été effectuées, programmées ou non, dans tous les secteurs économiques, en particulier l'industrie minière. Dans ce dernier secteur, quatre enfants seulement ont été recensés. Pour cette année deux opérations dites de "balayage" sont prévues en zone rurale. L'objectif est d'inspecter les lieux d'exploitation forestière, dans le cas des bûcherons, ainsi que les exploitations d'élevage et d'agriculture, de façon à prendre les mesures nécessaires pour la protection des travailleurs. Le ministère de l'Agriculture devrait apporter son concours à ces inspections. Il fournira les informations nécessaires sur les autorisations et concessions qu'il accordera aux exploitations forestières. L'oratrice a reconnu qu'actuellement le gouvernement n'est pas en mesure de répondre aux questions de la commission d'experts. Toutefois, les résultats des mesures prises cette année permettront d'adresser, ces prochains mois, des statistiques et des informations relatives à chaque cas en question.

Enfin, à propos du travail pénitentiaire, elle s'est reportée aux informations communiquées par écrit. Elle a mentionné l'exemple de la participation d'un groupe de détenus des prisons de Chorrillos et de Castro Castro à l'un des programmes d'emploi du ministère du Travail et de la Promotion sociale, à savoir le Programme féminin d'emploi et de formation (PROFECE). Sur la base du volontariat, les détenus ont formé des groupes de travail, appelés GOOL, suivant leur capacité manuelle respective. Les produits de ces groupes sont vendus au bénéfice des détenus dans les différents centres du PROFECE et, parfois, exportés avec le concours du gouvernement. Ainsi, une aide économique est apportée aux détenus et à leur famille en vue de leur réinsertion. Elle a souligné qu'il existe un projet pour la mise en oeuvre d'un programme d'éducation à distance dans d'autres centres pénitentiaires. Enfin, elle a indiqué que son gouvernement s'engage à envoyer les informations détaillées requises.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour l'information orale et écrite transmise. Rappelant que ce cas a été examiné par la commission d'experts, étant entendu que la commission estimait que le gouvernement n'avait pas répondu aux questions soulevées, ils ont noté que le gouvernement s'est limité à répéter des faits et des situations déjà connus mais qu'il n'a pas fourni d'informations concernant les évolutions et les problèmes nouveaux d'application. Ils ont rappelé que la commission a déjà examiné la situation concernant la convention en 1992 et 1993, époque à laquelle de graves violations avaient été constatées. D'ailleurs, en 1993, les conclusions de la commission ont inclus un paragraphe spécial. Les membres travailleurs ont rappelé que l'observation de la commission d'experts porte sur trois situations spécifiques de non-conformité avec les termes de la convention. En premier lieu, la situation de travail forcé (esclavage, servitude pour dettes ou servitude en tant que telle) dont sont victimes des peuples indigènes; deuxièmement, l'exploitation des mineurs, y compris des enfants et des adolescents, dans les mines de Madre de Dios. Ces deux situations ont déjà été discutées en 1993. Enfin, la troisième situation concerne le travail des prisonniers.

Pour ce qui est de la situation des peuples indigènes, les membres travailleurs ont rappelé qu'en 1997 la Confédération mondiale du travail a communiqué une série de commentaires concernant des formes de travail forcé et d'esclavage touchant des populations indigènes des régions d'Atalaya et Ucayali. Or le gouvernement n'a toujours pas répondu aux commentaires formulés. Dans ce contexte, la forme la plus courante de travail forcé consiste en une servitude pour dettes qui s'instaure à travers un système appelé "enganche o habilitación" consistant à fournir aux travailleurs indigènes les biens nécessaires à leur subsistance et à leur travail, créant ainsi une dette qu'ils doivent rembourser par la production de biens ou de services. Dans ses observations précédentes, la commission d'experts a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour éradiquer les différentes pratiques relevant du travail forcé, notamment la servitude pour dettes, mais également certaines formes dolosives ou violentes de recrutement de main-d'oeuvre et les conditions de travail et d'exploitation indignes de l'être humain auxquelles sont soumis les travailleurs des communautés indigènes d'Atalaya, y compris des enfants. La commission d'experts a également souligné le problème, au regard du travail forcé tel que défini par la convention, que pose le paiement du salaire en biens de consommation par des employeurs désignés par le vocable "bûcherons". Ces employeurs, surtout dans le secteur de l'exploitation du bois, se livrent en outre à des irrégularités sur la législation du travail concernant les horaires de travail, le repos hebdomadaire et les congés. Cette année, la commission d'experts constate que, bien que certaines mesures aient été prises, il subsiste des problèmes qui appellent une action énergique et soutenue de la part des autorités et elle exprime une fois de plus l'espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour mettre un terme aux pratiques par lesquelles de nombreux travailleurs, dont des enfants et des adolescents, sont soumis à un travail forcé au sens de la convention.

Les membres travailleurs ont observé que le gouvernement a communiqué des informations écrites dans lesquelles il rapporte de façon très succincte une série de faits qui auraient contribué à l'amélioration du sort des populations indigènes, à savoir notamment l'enregistrement des terres qui aurait initié un processus d'autodéveloppement; des visites auprès des communautés autochtones afin que la servitude pour dettes ne soit pas appliquée et des actions de sensibilisation concernant leurs droits auprès des travailleurs. Les membres travailleurs ont reconnu que la création de l'Organisation indigène de la région d'Atalaya (OIRA) et l'action de l'Association interethnique pour le développement (AIDEPS) ont largement contribué à la conception et la mise en oeuvre d'une politique d'enregistrement des terres et forêts et à l'obtention de la possession des terres par les peuples indigènes. Pourtant, ils ont observé qu'il ne s'agit pas d'initiatives prises par les autorités péruviennes. C'est par des actions tant extérieures incluant l'OIT que nationales que des programmes ont été développés et certaines lois mises en oeuvre pour protéger les peuples indigènes contre l'esclavage. Ces initiatives ont stimulé l'autodéveloppement des peuples indigènes et ont contribué à diminuer la dépendance et la servitude. Les membres travailleurs ont observé que le gouvernement a fait également mention de façon très lapidaire de quelques poursuites et dénonciations concernant la pratique du travail forcé ayant entraîné une sanction des employeurs conformément à la loi. Ils ont noté l'information fournie oralement par le représentant gouvernemental, information qui sera minutieusement examinée par la commission d'experts.

Pour ce qui est du travail des mineurs, les membres travailleurs ont observé que la commission d'experts s'y réfère, y compris au travail exécuté par des enfants et des adolescents, dans les mines de Madre de Dios. Ils ont rappelé que l'organisation syndicale, la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou, a notamment dénoncé les procédés frauduleux d'embauche par des contrats de quatre-vingt-dix jours. Les contrats offerts sont de durée limitée afin d'éviter la subvention du retour aux travailleurs, empêchant ainsi le travailleur de rentrer chez lui. Mention est faite également de salaires dérisoires, d'horaires excessifs et d'une assistance médicale inexistante. Dans ses informations écrites, le gouvernement a reconnu que des enfants et des adolescents sont impliqués. Il s'est référé également aux enfants et adolescents qui travaillent comme aide cuisiniers dans les campements miniers, reconnaissant que certains ont été victimes d'agressions sexuelles. Les membres travailleurs ont relevé que le gouvernement estime que le travail forcé par des enfants et des adolescents a diminué, notamment à cause de la dégradation de la situation économique ainsi que de nouvelles méthodes d'exploitation. Ces évolutions auraient entraîné une diminution "naturelle" du travail des adolescents et notamment des enfants dans les installations de Madre de Dios. Le gouvernement mentionne également quelques poursuites judiciaires et des inspections réalisées entre 1996 et 1998 qui auraient découragé les employeurs, engageant moins d'adolescents par crainte de sanctions légales.

En ce qui concerne le travail des prisonniers, les membres travailleurs ont rappelé que la commission d'experts a demandé des informations sur les mesures prises ou envisagées afin d'établir le caractère volontaire du travail des condamnés étant donné que la législation en vigueur ne donne pas de précisions à cet égard. Reprenant les informations écrites mentionnées, les membres travailleurs ont relevé que le gouvernement ne fournit pas de réponses claires et suffisantes.

Enfin les membres travailleurs ont déploré que les informations complémentaires sur le travail forcé et la lutte contre le travail forcé dont sont victimes les peuples indigènes soient si succinctes et limitées. Ils ont insisté sur le fait que des affirmations détaillées devaient être fournies à la commission d'experts afin qu'elle puisse suivre la situation et les développements de près. Une politique plus active de prévention et de suppression du travail forcé devrait être mise en oeuvre afin que cessent toutes les pratiques de servitude pour dettes. Pour ce qui est du travail forcé dans les mines effectué par les travailleurs des peuples indigènes, y compris par des enfants et des adolescents, les membres travailleurs ont considéré que, bien que les informations reçues montrent une amélioration de la situation, cet état de fait est principalement dû à des facteurs extérieurs qui n'ont rien à voir avec une politique active mise en oeuvre par le gouvernement. Dans ce contexte, des informations détaillées devraient être fournies à la commission d'experts et une politique énergique contre le travail forcé dont sont victimes les enfants et les adolescents devrait être développée. En ce qui concerne le travail pénitentiaire, les membres travailleurs ont demandé avec insistance que le gouvernement fournisse dans les délais des informations précises sur les mesures prises pour donner pleinement effet à la convention. Le consentement nécessaire des détenus doit être garanti en vue de l'accomplissement de travaux pour le compte d'intérêts privés. Le gouvernement doit également fournir des informations détaillées sur les conditions de travail.

Les membres employeurs ont rappelé que ce cas a été discuté par la commission en 1992 et 1993 lorsqu'avaient été observées de sérieuses violations de la convention. Depuis lors, peu de changements ont été notés et de nouvelles allégations ont été présentées à la commission d'experts par la Confédération mondiale du travail (CMT). Le travail en servitude semble être une forme très répandue de travail forcé dans le pays, qui affecte principalement les populations indigènes d'Atalaya et Ucayali. La forme la plus courante de travail forcé est la servitude pour dettes aux termes de laquelle les travailleurs indigènes se voient offrir des moyens de subsistance et de travail mais contractent en même temps une dette qu'ils doivent rembourser en fournissant des biens ou des services. Toutefois, ces travailleurs vivent sans avoir jamais les moyens de rembourser totalement leurs dettes.

Les membres employeurs ont noté que le représentant gouvernemental n'a fourni aucune information détaillée en ce qui a trait à ces allégations. Ils ont de plus rappelé les discussions qui ont eu lieu en 1993 et qui ont mis en exergue l'existence du travail des enfants d'Atalaya. Toutefois, aucune information n'a été fournie sur le nombre de cas dans lesquels les autorités compétentes sont intervenues. Bien que le représentant gouvernemental ait fait mention de programmes d'inspection, il n'a donné aucune information sur les résultats de ces inspections.

Les membres employeurs ont de plus noté les commentaires formulés par la Fédération nationale des mineurs, des travailleurs de l'acier, de la sidérurgie et de la métallurgie du Pérou (FNTMMSP) concernant des pratiques déloyales d'embauche qui ont cours principalement à Puno et à Cuzco. Les contrats offerts ont une durée limitée de quelques jours, à l'expiration desquels les employeurs doivent couvrir les coûts de retour des travailleurs. Comme les employeurs ne le font pas, les travailleurs sont dans l'impossibilité de rentrer chez eux. A cet égard, les membres employeurs ont observé les mauvaises conditions de travail alléguées dans ce secteur, telles que salaires insuffisants, longues heures de travail et inexistence de soins médicaux. Bien que le gouvernement ait indiqué, en 1996, certains progrès en ce qui concerne les procédures judiciaires intentées contre des entrepreneurs pour cause de violation du droit à la liberté de certains travailleurs, ils ont prié instamment le gouvernement d'intensifier ces types de procédure. Ils ont souscrit à la déclaration des membres travailleurs selon laquelle certains progrès ont été accomplis dans ce domaine.

En ce qui concerne le travail pénitentiaire, les membres employeurs ont rappelé que cette pratique constitue un problème relativement nouveau pour la commission. Il existe de bonnes raisons pour obliger les prisonniers à travailler. Toutefois, un cadre juridique et des dispositions spécifiques sont nécessaires à cet égard.

En ce qui concerne les problèmes récurrents, le gouvernement devrait être instamment prié de fournir des informations détaillées sur les questions soulevées par la commission d'experts. De plus, le gouvernement devrait indiquer le plus rapidement possible les résultats de l'évaluation des mesures d'inspection.

Le membre travailleur du Pérou a déclaré que le gouvernement reconnaît les difficultés qu'il rencontre dans l'application de la convention, en particulier en ce qui concerne les Ashaninkas et la zone de Madre de Dios. Cependant, le problème de fond auquel sont confrontées ces populations, ainsi que d'autres, réside dans la centralisation du système administratif qui place ces populations dans une situation d'abandon total. Il importe d'effectuer les changements demandés par la commission d'experts. Par son action, le gouvernement devra apporter rapidement une solution à cette situation. En ce qui concerne le travail pénitentiaire, nombre de difficultés sont provoquées par l'importante surpopulation dont souffrent les détenus, ce qui a pour conséquence que leur travail effectué ne l'est pas sur une base volontaire.

Le membre travailleur de la Roumanie a souscrit pleinement aux déclarations des membres travailleurs. Il a rappelé que la commission d'experts avait estimé que les mesures prises par le gouvernement pour mettre fin aux pratiques de travail forcé étaient insuffisantes. Le travail forcé, qui vise particulièrement les peuples indigènes, touche les domaines de l'agriculture, de l'élevage et de l'exploitation forestière et prend la forme de servitude pour dettes. L'orateur déclare que, selon certaines informations, ce problème touche environ 10 millions de personnes, y compris des enfants. Il se réfère également aux observations de la commission d'experts concernant le travail inhumain des mineurs et souligne que les employeurs de ces mineurs, en refusant de prendre en charge leurs frais de retour, les empêchent de rentrer chez eux. Il insiste pour que le gouvernement soit prié de prendre des mesures afin de mettre un terme aux pratiques de travail forcé au regard des dispositions de la convention.

Le membre travailleur de la Colombie a exprimé sa préoccupation à l'égard des travailleurs en servitude au Pérou. En dépit des engagements pris par les différents gouvernements de ce pays, la situation ne semble pas avoir trouvé de solution définitive. Il en résulte le maintien inacceptable de situations aberrantes comme celles mentionnées dans le rapport de la commission d'experts concernant le travail en servitude qui affecte les indigènes, les enfants et les détenus. Les membres de la commission gardent en mémoire la situation des enfants qui travaillent pour rembourser des dettes dans les installations aurifères de Madre de Dios, ainsi que l'ignorance de la situation affichée par les différents gouvernements du Pérou. Enfin, l'orateur a prié le représentant gouvernemental d'indiquer le nombre d'inspecteurs du travail surveillant l'application de la législation; la périodicité des visites d'inspection dans les installations aurifères de Madre de Dios; et les mesures prises en vue d'améliorer les conditions de détention au Pérou.

La représentante gouvernementale a indiqué que "Madre de Dios" n'est pas une entreprise mais une région de la forêt dont l'accès est difficile, qui dispose de peu d'infrastructures et est peu sûre. De plus, elle a été touchée par "El Niño" et "La Niña". Il a donc été difficile de faire un bilan des cas de travail forcé et de travail des enfants, en particulier dans les exploitations minières, et de prendre des mesures pour faire mieux appliquer la convention. Toutefois, le gouvernement a demandé l'assistance du BIT pour résoudre ces problèmes qui le préoccupent, et des réunions et autres activités, également en collaboration avec l'OIT, sont organisées pour convaincre les patrons des mines de ne pas engager des enfants. L'inspection du travail se heurte à des difficultés, en particulier du fait que, très souvent, ce sont des entreprises du secteur informel qui ont recours au travail forcé, notamment les entreprises d'orpaillage. Or, ces entreprises sont éphémères. Toutefois, l'inspection du travail visite périodiquement les autres entreprises. A propos du travail des personnes qui purgent une peine ou se trouvent en détention provisoire, ceux qui participent à un programme d'emploi ne le font pas pour un employeur privé. Au contraire, ils peuvent devenir des microentrepreneurs. Il s'agit donc d'un travail volontaire qui leur bénéficie et qui débouche sur des réductions de peine, en vertu du système "deux pour un". Le ministère du Travail se borne à placer leurs produits sur le marché national ou international. De même, le ministère de la Justice et l'Institut national pénitentiaire s'occupent de la question du surpeuplement des prisons et font le nécessaire pour les rendre plus humaines. En réponse au membre travailleur du Pérou, l'orateur a indiqué que le cadre administratif n'empêche pas les directeurs régionaux du travail de disposer de leurs propres inspecteurs et médiateurs. De plus, dans le cas d'Atalaya, à la suite des plaintes soumises à l'OIT, a été créée une sous-direction du travail qui s'occupe de la question des orpailleurs et des travailleurs des communautés autochtones. Elle effectue périodiquement des inspections. L'orateur a rappelé que l'inspection du travail fait l'objet d'une profonde et positive réforme depuis 1996. Il a indiqué que, actuellement, on compte 100 inspecteurs à Lima et 300 dans le pays. De plus, fréquemment, des séminaires sont organisés, avec la collaboration de l'OIT, sur l'inspection du travail.

La commission a pris note des informations écrites et orales fournies par la représentante gouvernementale et de la discussion qui a suivi devant la commission. Elle a rappelé qu'elle a déjà examiné ce cas dans le passé, en particulier en 1993. En ce qui concerne le travail forcé, imposé en particulier aux peuples indigènes dans l'agriculture et l'exploitation forestière, la commission prend note des explications du gouvernement selon lesquelles les pratiques de travail forcé à travers le système de "enganche o habilitación", qui existaient dans le passé, ont aujourd'hui largement disparu grâce à la reconnaissance des droits sur les terres en faveur de ces peuples. Elle a également pris note de la déclaration du gouvernement selon laquelle il est envisagé d'accroître le nombre de visites d'inspection dans les régions où ils vivent. Elle a aussi pris note de la déclaration selon laquelle le travail, y compris le travail forcé des enfants dans le secteur minier, a diminué en raison d'une combinaison de facteurs tels que le déclin économique, la modification des pratiques de travail, les activités de l'inspection du travail, ainsi que l'assistance du BIT. La commission a pris note des informations succinctes qui ont été communiquées. Elle a prié le gouvernement de fournir des informations détaillées à la commission d'experts sur les efforts qu'il a entrepris en vue d'éliminer le travail forcé et de prévenir sa réapparition à l'avenir, au moyen, en particulier, des visites d'inspection, les infractions constatées et les sanctions imposées. En ce qui concerne le travail pénitentiaire, la commission a pris note de l'information fournie pendant la discussion, mais a exprimé le regret que le gouvernement n'ait pas fourni toutes les informations demandées par la commission d'experts sur le consentement des détenus à travailler pour des employeurs privés, ainsi que sur la nature volontaire du travail des personnes maintenues en détention préventive. Elle a prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de garantir l'application de la convention à cet égard et de communiquer à la commission d'experts des informations détaillées sur les mesures prises.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 1993, Publication : 80ème session CIT (1993)

Un représentant gouvernemental s'est référé séparément aux trois situations soulevées par la commission d'experts dans son rapport. Tout d'abord, concernant les communautés indigènes d'Atalaya, il indique que l'autorité administrative du travail de Puno, qui est l'autorité dont dépendent administrativement ces communautés, a rencontré des difficultés pour répondre aux attentes des travailleurs. En réponse à cela, la commission multisectorielle chargée d'examiner leur situation avait recommandé la création de la zone régionale de travail et de la promotion sociale de Huaypetue. En outre, un programme d'inspection adapté au secteur informel est en cours d'élaboration. Par ailleurs, un Plan général de revalorisation des communautés indigènes est actuellement mis en oeuvre avec les communautés indigènes des Ashanincas et Shipibos qui avaient été obligées de quitter leur territoire originel. Par l'action du gouvernement en faveur du retour de ces communautés dans leurs zones d'origine et de la revalorisation de leur propre organisation, l'on cherche à éradiquer les pratiques de servitude pour dette, les formes violentes d'embauche de la main-d'oeuvre et les conditions du travail forcé. Concernant le travail sans rémunération des enfants dans les entreprises d'épluchage des châtaignes de Puerto Maldonado, l'orateur a indiqué que son gouvernement avait pris les mesures les plus sévères à l'encontre de ceux qui obligent directement ou indirectement des mineurs à travailler sans rémunération. Selon un rapport de la Direction nationale des relations du travail du 20 mai 1993, la présence de mineurs dans cette activité est due à une coutume propre des mères de famille qui amènent volontairement leurs enfants et époux à effectuer ce travail lorsque le paiement est fonction de la quantité de châtaignes épluchées par jour. Cependant, les mesures appropriées de dissuasion ont été prises, y compris par le contrôle de l'application du décret législatif no 728 et de son règlement (loi sur l'emploi). Pour ce qui est des établissements clandestins d'embauche ("enganche"), leur fermeture a été possible à Cuzco grâce à une campagne d'inspection et sanction et à la légalisation des petites entreprises d'embauche fonctionnant en conformité avec les exigences des deux textes légaux précités. Par ailleurs, la création de la zone régionale de travail et de la promotion sociale des Huaypetue permettra d'éviter que les travailleurs intéressés soient obligés de se déplacer jusqu'à Madre de Dios, ce qui devra contribuer à la solution du problème. Finalement, la police nationale pourra, en vertu de la communication no 201-92-DS-CUS du 13 novembre 1992, effectuer la surveillance et le contrôle des travailleurs qui émigrent à Madre de Dios sans les contrats de travail dûment autorisés par le ministère du Travail.

Les membres employeurs ont tout d'abord attiré l'attention sur le fait que la plupart des informations dont les experts se sont servis pour leur rapport avaient comme source le propre gouvernement. Ensuite, et en ce qui concerne les communautés indigènes d'Atalaya, ils s'interrogent sur les conditions de vie que celles-ci rencontreront là où le gouvernement s'efforce de les faire revenir, notamment du fait de l'utilisation de méthodes criminelles d'embauche qui touchent également les enfants, parfois tenus dans des situations et des conditions absolument inhumaines. Ils estiment que la déclaration du représentant gouvernemental ne fait état d'aucune amélioration substantielle et demandent qu'une information plus détaillée soit fournie aux experts. Quant au travail des enfants dans l'épluchage des châtaignes, les membres employeurs sont conscients des conditions de grande pauvreté qui le rendent possible. Cependant, celles-ci devraient justifier d'autant plus la prise de mesures sévères à l'encontre de ce phénomène, car il n'est pas possible de le supprimer par la seule législation. Ils demandent donc au gouvernement de préciser les mesures concrètes envisagées. Egalement dans le cas des travailleurs des mines et des laveries d'or de Madre de Dios, les conditions de travail sont extrêmement dures et leur amélioration problématique du fait des difficultés de mise en oeuvre des sanctions pénales. Pour toutes les trois situations traitées par la commission d'experts, les explications fournies par le gouvernement sont trop vagues. Les membres employeurs lui demandent donc de préciser à l'avenir les mesures qui, dans la pratique, ont effectivement été prises et quel a été leur impact. Ils ont demandé des éclaircissements sur le nombre des régions indigènes existantes et les délais envisagés pour le retour des communautés dans leur lieu de résidence originelle.

Les membres travailleurs ont déclaré qu'ils se ralliaient entièrement à la déclaration des membres employeurs. Ils ont rappelé que le problème considéré existait pratiquement depuis la ratification de la convention par le Pérou en 1960 et souligné que le problème n'était pas d'ordre législatif mais concernait plutôt la mise en oeuvre de la législation pertinente. L'impatience tant des membres employeurs que des membres travailleurs se justifie en raison de la gravité du problème, c'est-à-dire des situations d'esclavage, de travail des enfants et d'exploitation des peuples indigènes. Concernant le travail sans rémunération des enfants, les membres travailleurs ont attiré l'attention sur le problème de sanctionner les responsables, étant donné que ce sont les mères elles-mêmes qui, souvent, amènent leurs enfants travailler. Néanmoins, il faut sanctionner ceux qui, n'ayant aucun lien familial avec les enfants, les font travailler sans rémunération. Ils demandent au gouvernement de fournir le rapport final de la commission multisectorielle établi par la résolution ministérielle du 26 juin 1990 et de communiquer des rapports détaillés à la commission d'experts. Finalement, ils ont attiré l'attention sur l'importance d'adopter et appliquer des sanctions appropriées, comme le souligne la commission d'experts dans le paragraphe 111 de son rapport général.

Le membre travailleur de la Colombie a déclaré que la communauté internationale, et les membres de la commission encore moins, ne pouvait rester impassible devant la gravité des faits liés au travail des enfants, des jeunes et des femmes dans les laveries d'or de Madre de Dios. Il a indiqué que, selon les dénonciations présentées par un journaliste de Puerto Maldonado, des fosses communes auraient été trouvées dans cette zone où des mineurs victimes de maladies et accidents étaient enterrés. L'orateur a mentionné le phénomène appelé des "ahijaditos" consistant à remettre, de la part de certaines familles, l'autorité parentale à d'autres familles ou personnes qui jouent le rôle d'employeurs dans des conditions absolument illégales. En ce qui concerne l'extraction d'or à Madre de Dios, le Bureau départemental des statistiques avait établi en 1984 qu'environ 30 000 personnes étaient employées et que ce chiffre augmentait pendant les périodes de pluies et de vacances, ce qui laisserait supposer l'embauche illégale d'enfants et de jeunes. Par ailleurs, le déplacement en camion jusqu'au lieu de travail depuis Cuzco peut durer trois jours, ce qui signifie parfois que les travailleurs arrivent à destination malades et assez faibles pour contracter la malaria. L'orateur a remis à la commission un document contenant un ensemble d'informations concernant le cas examiné et a conclu en demandant instamment au gouvernement de fournir, lors de la prochaine Conférence, une information vaste et détaillée sur les mesures adoptées en la matière.

Le membre travailleur du Pérou a indiqué que le temps qui s'écoule depuis la présentation des dénonciations rend celles-ci peu à peu inconsistantes et moins crédibles. Leur extrême gravité exige que leur traitement soit plus rapide; autrement, les conclusions ou recommandations des organes de l'OIT arriveront trop tard pour pouvoir être d'une efficacité quelconque dans la défense des droits des travailleurs. L'orateur considère donc qu'il est absolument nécessaire et urgent de changer la méthodologie de la discussion et de l'adoption des conclusions de la commission.

Le représentant gouvernemental a décrit la zone géographique où les phénomènes mentionnés dans le rapport de la commission d'experts ont lieu et rappelé que par le passé les terroristes s'y étaient installés et avaient abusé et fait travailler des mineurs, mais que cela n'était plus le cas actuellement. Son pays, qui a été pratiquement détruit entre 1985 et 1990, est maintenant sur la voie de la reconstruction. Concernant les zones ou "fonds" auxquels faisaient allusion les membres employeurs, l'orateur a précisé qu'il s'agissait bien de 80 zones où une population de 13 200 habitants avait été recensée, ainsi que 205 établissements commerciaux, 166 stations d'élevage, 2 700 agriculteurs et 118 exploitants de bois, employant 1 400 personnes. D'autres informations et statistiques seront remises à la commission. Par ailleurs, l'orateur a insisté une nouvelle fois sur la création de la zone régionale recommandée par la commission multisectorielle à laquelle il s'était déjà référé. En outre, son pays ne dispose pas dans la zone en question d'un personnel qualifié pour veiller au respect des normes du travail. L'orateur demande donc au BIT de soutenir les efforts de formation d'inspecteurs.

La commission a pris note des déclarations du représentant gouvernemental et a tenu compte que les données sur lesquelles se base la commission d'experts proviennent de rapports du gouvernement. La commission a observé avec préoccupation que persistent les graves problèmes soulevés par la commission d'experts. Par rapport aux communautés indigènes d'Atalaya, la commission a pris note que l'on n'avait pas encore donné suite aux recommandations formulées par la commission multisectorielle, malgré la gravité des problèmes qui ont été observés en matière de servitude pour dettes, de privation de liberté et des droits constitutionnels, et d'utilisation de la violence contre les travailleurs de ces communautés. On n'a pas non plus pris des mesures pour éviter que les enfants soient, de manière indirecte, obligés de travailler dans des conditions telles qu'elles n'ont plus aucune similitude avec une relation libre de travail. Quant aux travailleurs des mines et des laveries d'or de Madre de Dios, la commission espère que le gouvernement communiquera, avec son prochain rapport, le rapport final de la commission multisectorielle créée pour examiner la situation de ces travailleurs. La commission demande instamment au gouvernement de prendre d'urgence les mesures nécessaires pour assurer le plein respect de la convention et mettre fin aux pratiques qui ont été dénoncées et qui constituent de graves violations de la convention et de communiquer des informations détaillées dans son prochain rapport. La commission a décidé de discuter ce cas à nouveau lors de sa prochaine session.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 1992, Publication : 79ème session CIT (1992)

En ce qui concerne la convention no 105, le vice-ministre du Travail a exprimé la reconnaissance de son gouvernement pour l'observation de la commission d'experts et déclaré que l'abrogation, par le nouveau Code pénal, de l'article 44 du Code pénal constituait une étape dans l'histoire de son pays.

En ce qui concerne la convention no 29 il a déclaré le travail forcé interdit dans l'ensemble du territoire national et que les pratiques dénoncées par la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou sont illégales. La Constitution politique du Pérou interdit de telles pratiques, qui sont sanctionnées comme des délits par le nouveau Code pénal (décret législatif no 635 de 1991). Il est vrai que le ministère du Travail n'est pas directement présent dans l'ensemble du territoire national, mais des inspections périodiques sont effectuées.

Communautés indigènes d'Atalaya. La commission multisectorielle créée par la résolution ministérielle no 083-88-PCM a assigné dans son rapport les tâches suivantes au ministère du Travail: 1) l'inspection préventive des exploitations et des campements ayant fait l'objet de plaintes; 2) la création de la "zone de travail d'Atalya"; 3) la formation des dirigeants communaux dans le domaine du travail et la diffusion des normes du travail en collaboration avec les organisations d'indigènes (Association interethnique de développement de la forêt péruvienne et Organisation indigène régionale d'Atalaya). D'après le recensement de 1981, les 12.400 habitants appartiennent à différents groupes ethno-linguistiques (Ashanicas, Campas, Shipibos, Conibos, Picos, Anahuacas et Yaminaguas) représentant 80 communautés indigènes qui parlent environ 30 des 52 dialectes de l'Amazonie péruvienne. Malheureusement, les deuxième et troisième types d'activité prévus par la commission multisectorielle n'ont pu être menés à bien. Les inspections effectuées par le ministère du Travail n'ont pas non plus été en mesure de mener une enquête approfondie sur la situation des 17 exploitations ayant fait l'objet de plaintes, en raison du manque de coopération des autorités locales, de l'absence des employeurs et de la pauvreté des moyens. D'autres problèmes se posent dans la région d'Atalaya tels que celui de la propriété des terres, de leur invasion et de leur colonisation, celui de la déforestation, ainsi que des problèmes de droits de l'homme. La commission ministérielle a prévu, entre autres propositions, l'intervention d'autres départements ministériels compétents, ainsi que de prendre contact avec l'OIT afin d'obtenir, avec sa collaboration, le financement de l'assistance technique qui lui permettra de mener à bien la tâche qui lui a été confiée.

Travailleurs des mines et des laveries d'or de Madre de Dios. Le ministère du Travail a institué en août 1991 une commission chargée d'étudier et de trouver une solution au problème visé par l'observation de la commission d'experts. La commission multisectorielle est chargée de mener une campagne active de formation visant à mettre en garde les travailleurs sur les conditions de travail qu'ils peuvent se voir proposer. Les bureaux de l'emploi qui pratiquent l'"enganche" ont fait l'objet de visites d'inspection et, dans les cas appropriés, ont été frappés par des amendes ou des mesures de fermeture. L'autorité du travail de Cuzco a pris des dispositions afin que les contrats de travail soient conclus conformément aux dispositions légales en vigueur et approuvés par elle. Une assistance juridique a été apportée aux travailleurs manquant de ressources économiques, avec l'aide, dans les cas appropriés, de la police.

Travail sans rémunération des mineurs dans des entreprises d'épluchage de châtaignes à Puerto Maldonado. L'orateur a reconnu que le travail des enfants était associé à la pauvreté et à la nécessité d'une stratégie de survie des familles. Il est lié à l'organisation familiale et au mode de production agraire, tout en étant comparable au travail à domicile dans les zones urbaines. Le travail de l'épluchage de châtaignes est un travail à la tâche, où une somme déterminée est versée pour chaque kilo de châtaignes épluchées. Suite à une négociation collective, les entreprises ont accordé une augmentation de salaire. Bien que le système légal péruvien comporte des dispositions visant à éviter l'exploitation des mineurs, il n'en demeure pas moins évident qu'il ne pourra être mis fin à la pauvreté critique, à la misère et aux mauvaises conditions de vie prévalant dans certaines régions du pays par le seul recours à un texte législatif.

Les membres travailleurs ont déclaré que, en ce qui concerne la convention no 105, dont l'application est discutée déjà depuis 1980, un net cas de progrès peut être constaté suite à l'abrogation de l'ancien article 44 du Code pénal, et ils ont exprimé l'espoir que dans le futur cette convention sera pleinement appliquée dans la pratique.

En ce qui concerne l'application de la convention no 29, les membres travailleurs ont signalé qu'il n'existe pas de problèmes relatifs à la législation. Comme l'a signalé la commission d'experts depuis 1987, les problèmes concernent la pratique, qui a donné lieu à des commentaires de la part de la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou. Les problèmes en cause sont très graves et ont tous comme dénominateur commun des situations qui présentent les caractéristiques de l'esclavage et qui exigent des actions efficaces là où elles se produisent. Pour cela, il ne suffit pas que la commission d'experts demande au gouvernement de communiquer des informations qui résultent de l'inspection du travail ou des travaux des commissions sur le travail forcé dans les mines et les laveries d'or de Madre de Dios ainsi que sur le travail forcé des communautés indigènes d'Atalaya; il faut également exiger que des mesures concrètes soient prises pour éliminer toutes pratiques de travail forcé ainsi que le travail forcé des mineurs travaillant dans les entreprises d'épluchage de châtaignes à Puerto Maldonado (le rapport du gouvernement ne fournit pas d'observations à ce sujet bien que le représentant gouvernemental ait reconnu l'existence desdites pratiques et ait déclaré qu'il s'agit d'un problème lié à la pauvreté). Les membres travailleurs ont exprimé l'espoir que la commission d'experts examinerait les mesures concrètes qui sont prises sur le terrain et que l'année prochaine des progrès puissent être constatés.

Les membres employeurs ont également souligné la gravité des problèmes relatifs à l'application de la présente convention. Les problèmes en question semblent avoir existé depuis la ratification en 1960 et démontrent clairement l'existence de pratiques répréhensibles: la nécessité pour les travailleurs des mines et des laveries d'or de Madre de Dios de rester en permanence sur les lieux de travail, qui se situent à des endroits éloignés, parce que les employeurs ne paient pas, contrairement à ce qu'ils se sont engagés à faire, les frais de retour des travailleurs à leur domicile dans le cadre de contrats qui durent généralement 90 jours; l'emploi d'enfants avec leurs mères qui travaillent dans les entreprises d'épluchage de châtaignes de Puerto Maldonado afin de pouvoir remplir le nombre de barils de châtaignes exigés chaque jour; et la situation de servitude dans laquelle se trouvent les communautés indigènes d'Atalaya dans le sens que leur sont fournies par le patron des avances sous forme d'ustensiles de travail, de repas ou d'argent. Bien que, selon le représentant gouvernemental, une nouvelle législation ait été adoptée en 1991 prévoyant des sanctions pour les cas de travail forcé, le gouvernement n'a pas communiqué un rapport sur l'application de la convention no 81 sur l'inspection du travail, dont la mise en pratique est essentielle pour l'abolition du travail forcé. Or, afin de garantir la mise en oeuvre des dispositions, y compris de celles adoptées en 1991, il faut nécessairement que le nombre d'inspecteurs du travail ainsi que les conditions pour l'accomplissement de leurs tâches se conforment aux différentes conventions de l'OIT sur l'inspection du travail. Le représentant gouvernemental a indiqué que cela n'est actuellement pas le cas et il a reconnu que le nombre d'inspecteurs du travail n'est pas assez élevé. Il est important que la commission d'experts tienne compte de cela et qu'elle puisse prendre en considération ces éléments pour connaître les dimensions exactes des problèmes. Etant donné qu'il s'agit d'un cas grave, les membres employeurs ont demandé que ce cas soit rediscuté l'année prochaine en vue d'établir à ce moment s'il y a eu progrès.

Enfin, les membres employeurs ont pris note avec satisfaction du progrès enregistré au niveau de la législation en application de la convention no 105. Ils ont toutefois souligné que la pratique doit également s'ajuster à ce qui est garanti par la convention.

Le représentant gouvernemental a déclaré que le nouvel article 128 du Code pénal prévoit des peines de deux à quatre ans d'emprisonnement pour ceux qui mettent en danger la vie des enfants sous tutelle ou sous garde, c'est-à-dire aussi pour les parents qui, afin d'augmenter leurs revenus, soumettent leurs enfants à un régime de travail sans contrat. Il a ajouté que l'inspection du travail donnait actuellement les résultats souhaités et que le gouvernement avait envoyé à la commission d'experts des exemples de résolutions qui sanctionnent les entreprises qui pratiquent le travail forcé. Les résolutions en question ont été accompagnées d'actions de police afin de supprimer ce genre de situations.

Le membre travailleur de la Colombie a exprimé sa préoccupation quant aux graves problèmes discutés et ayant trait au travail forcé des enfants. Ces problèmes n'existent pas seulement au Pérou mais dans la plupart des pays de l'Amérique latine, et également dans le secteur informel. Des déclarations de bonne volonté et l'adoption de lois ne suffisent pas; il faut également tenir compte de la pauvreté, de la redistribution déficiente de la richesse et du modèle économique actuel. Lors de la prochaine session de cette commission, il ne faudra pas seulement exiger un rapport de caractère politique mais également des indications précises sur les mesures concrètes mises en oeuvre pour protéger les droits des enfants.

La commission a pris note avec préoccupation des violations de la convention no 29 qui ont été signalées par la commission d'experts. Elle a également noté les informations communiquées par le représentant gouvernemental mais a regretté qu'une situation qui n'est pas conforme à ladite convention persiste. Bien que la commission ait exprimé sa satisfaction au sujet des progrès réalisés jusqu'à présent en relation avec la convention no 105, elle a souligné la gravité de la situation actuelle. La commission a par conséquent demandé instamment au gouvernement de fournir toutes les informations possibles et de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme aux violations mentionnées, et elle a mis en relief sa décision de discuter à nouveau de ce cas lors de sa prochaine session.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note du rapport du gouvernement reçu en 2019 ainsi que des informations supplémentaires communiquées suite à la décision adoptée par le Conseil d’administration à sa 338e session (juin 2020).
La commission prend également note des observations conjointes de la Centrale autonome des travailleurs du Pérou (CATP), de la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP), de la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) et de la Centrale unitaire des travailleurs du Pérou (CUT-Perú), transmises par le gouvernement avec ses informations supplémentaires.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. 1- Incidence de certaines clauses contractuelles contenues dans le contrat type signé par des enseignants de l’Université pontificale catholique du Pérou sur la liberté de quitter leur emploi. La commission a précédemment noté l’adoption par le Conseil d’administration, lors de sa 329e session (mars 2017), des recommandations formulées par le comité tripartite établi pour examiner la réclamation présentée, en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT, par la CGTP contre le Pérou, et alléguant l’inexécution de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957. La réclamation portait sur l’effet de clauses contenues dans les contrats de courte durée signés successivement par certains enseignants et l’Université pontificale catholique. Ces clauses prévoyaient que, si à l’expiration du contrat de travail le titulaire du contrat ne s’est pas acquitté de la charge d’enseignement prévue, il s’engage à effectuer la charge d’enseignement restante sans coût supplémentaire pour l’Université, ou de percevoir une part moindre de ses prestations sociales ou, si celles-ci ne suffisent pas à couvrir les montants dus, de rembourser les montants correspondants à l’Université. La commission a noté que le comité tripartite avait invité le gouvernement à veiller à ce que les autorités compétentes engagent des discussions avec l’Université pour examiner le contenu et les modalités d’application des contrats types signés par elle et les enseignants qu’elle emploie, dans le but d’éviter que, d’une utilisation réitérée de ces clauses, il ne résulte une accumulation de dettes qui place le travailleur dans une situation de dépendance compromettant sa liberté de mettre fin à la relation de travail. La commission prend note de l’indication du gouvernement, dans son rapport, selon laquelle l’Université a mis en œuvre plusieurs mesures afin d’éviter toute accumulation de tâches d’enseignement ou de recherche des enseignants, plus particulièrement: i) en renforçant le système de contrôle et de suivi de la charge de travail d’enseignement ou de recherche des enseignants; ii) en assurant une programmation préalable de la charge de travail d’enseignement pour chaque enseignant; iii) en mettant à la disposition des enseignants des programmes de formation pour améliorer leur méthodologie et accroître leurs compétences; et (iv) en mettant en œuvre des mesures qui ne nuisent pas économiquement aux enseignants: si, à l’expiration du contrat de travail, l’enseignant n’a pas accompli, de manière injustifiée, les tâches requises, son contrat de travail n’est pas renouvelé, sans réduction ni charge financières, en veillant toutefois à ce que l’enseignant reçoive l’intégralité des prestations de sécurité sociale. La commission salue ces informations et prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le contenu et l’impact des mesures prises par l’Université pontificale catholique pour éviter dans la pratique toute situation qui placerait des travailleurs de l’Université dans une situation de dépendance compromettant leur liberté de mettre fin à la relation de travail.
2- Travail domestique réalisé dans des conditions relevant du travail forcé. S’agissant des mesures prises pour renforcer la protection des travailleuses domestiques contre les pratiques relevant du travail forcé, la commission a pris note de l’adoption du Plan d’action 2016-17 pour promouvoir le respect des droits des travailleurs domestiques, et de la mise en place d’un registre des travailleurs domestiques et de leurs ayants droit afin de permettre aux employeurs d’inscrire en ligne leurs employés qui, ainsi, bénéficient des prestations médicales de l’assurance-santé. La commission prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement sur les activités menées dans le cadre du plan d’action, notamment: i) de nombreuses publications, ainsi que des activités de sensibilisation et de formation sur les droits des travailleurs domestiques et une assistance juridique, y compris pour les fonctionnaires et les inspecteurs du travail; ii) plusieurs événements visant à promouvoir la syndicalisation des travailleurs domestiques et l’enregistrement des travailleurs domestiques par les employeurs; iii) l’adoption par la Superintendance nationale de l’inspection du travail (SUNAFIL) du Protocole n° 001-2017-SUNAFIL/INII pour enquêter sur le respect des obligations concernant les travailleurs domestiques (résolution n° 113-2017-SUNAFIL du 8 juin 2017), entre autres en surveillant les agences de placement; et iv) la certification des compétences professionnelles de 542 travailleurs domestiques en 2016-17. Le gouvernement ajoute que, depuis 2016, un système de signalement en ligne des cas de travail des enfants et de travail forcé permet d’enregistrer les plaintes, et que ces informations sont adressées à la Direction de l’inspection du travail (DIT). La commission note que le Plan national d’action 2018-2021 sur les droits de l’homme, adopté en vertu du décret suprême n° 002-2018-JUS du 1er février 2018, fixe à nouveau en tant qu’action stratégique spécifique la promotion de l’enregistrement des travailleurs domestiques. Saluant la ratification par le Pérou, le 26 novembre 2018, de la convention (n° 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle plusieurs projets de loi sont en cours d’examen pour modifier la législation sur les travailleurs domestiques. À cet égard, la commission note que, dans leurs observations conjointes, la CATP, la CTP, la CGTP et la CUT-Perú indiquent que la loi no 31047 sur les travailleuses et les travailleurs domestiques a été promulguée le 1er octobre 2020. Cette loi reconnaît les droits au travail, ainsi que le droit à la sécurité sociale et à la sécurité et à la santé au travail des travailleurs domestiques. Les syndicats ajoutent que le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi (MTPE) sera chargé d’élaborer les règlements nécessaires à la mise en œuvre de la nouvelle loi et que la SUNAFIL devra mettre à jour son protocole d’inspection pour les travailleurs domestiques. Selon les organisations syndicales, l’une des principales difficultés sera de garantir l’accès des inspecteurs du travail au lieu de travail qui est aussi le domicile de l’employeur et donc, par nature, inviolable.
La commission note en outre que, selon l’enquête nationale auprès des ménages de 2017 sur les conditions de vie et la pauvreté (ENAHO 2017, INEI), 92,4 pour cent des travailleurs domestiques se trouvaient dans le secteur informel, 40 pour cent d’entre eux travaillaient plus de 48 heures par semaine et près de la moitié d’entre eux percevaient un salaire inférieur au salaire vital minimum. Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement précise que, selon des données statistiques publiées par l’Institut national des statistiques et d’informatique (INEI), en 2019, 30,6 pour cent des travailleurs domestiques ne disposaient d’aucune assurance maladie et 82,8 pour cent d’entre eux n’avaient pas d’assurance retraite (ENAHO 2019).
La commission prend dûment note des mesures prises par le gouvernement pour accorder une plus grande protection aux travailleuses domestiques et salue à ce propos la promulgation de la loi no 31047 sur les travailleuses et les travailleurs domestiques. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur la mise en œuvre des règlements, des actions ou des programmes spécifiques adoptés pour faire mieux connaître leurs droits aux travailleurs domestiques, leur garantir une assistance et une protection adéquates pour leur permettre de dénoncer auprès des autorités compétentes toute exploitation dont ils sont victimes, améliorer leur enregistrement par les employeurs et renforcer les inspections dans ce secteur. La commission prie en outre le gouvernement de communiquer des informations sur le nombre de travailleurs domestiques qui ont été enregistrés par les employeurs, le nombre d’inspections effectuées dans le secteur du travail domestique et la nature des infractions constatées, le nombre de cas de travail forcé identifiés ou dénoncés au moyen du système de signalement en ligne, et les sanctions imposées.
3- Traite des personnes. Se référant à ses précédents commentaires concernant les mesures complémentaires prises pour renforcer le cadre législatif et institutionnel de lutte contre la traite des personnes et de protection des victimes de cette infraction, la commission prend note avec intérêt de l’adoption du Plan national 2017-2021 de lutte contre la traite des personnes (décret suprême n° 017-2017-IN) qui définit quatre objectifs stratégiques: i) la prévention et la sensibilisation; ii) la protection et la réinsertion des victimes; iii) le suivi et les poursuites; et iv) la gouvernance institutionnelle. Elle note plus particulièrement que la Commission multisectorielle de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants est chargée de coordonner, de suivre et d’évaluer le plan aux niveaux national, régional et local (article 4 du décret suprême). Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement ajoute que les objectifs stratégiques du Plan national sont mis en œuvre par les groupes de travail de la commission multisectorielle qui surveillent les différents acteurs concernés et suivent la réalisation des objectifs fixés. La commission note toutefois que, dans leurs observations conjointes, le CATP, la CTP, la CGTP et la CUT-Perú expriment leur préoccupation face à l’absence d’un système de suivi et d’évaluation permettant d’apprécier les effets des actions déjà mises en œuvre, ce qui limite donc leur efficacité.
Se référant à ses commentaires précédents sur la nécessité de renforcer la protection des victimes de traite, la commission note que plusieurs instruments ont été adoptés à cette fin:
  • – le Plan national d’action 2018-2021 sur les droits de l’homme, qui prévoit des actions stratégiques visant à renforcer l’assistance et la protection des victimes de la traite et du trafic illicite de migrants, et à assurer leur régularisation et leur retour en toute sécurité, ainsi que la ratification de la convention (n° 97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949, et de la convention (n° 143) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975;
  • – la loi n° 30925 du 5 avril 2019 destinée à renforcer la mise en place d’hébergements provisoires pour les victimes de la traite en leur attribuant de manière préférentielle les biens saisis par la justice. Cette loi prévoit également l’élaboration par le gouvernement d’un programme budgétaire multisectoriel aux fins de la mise en œuvre et du suivi des politiques relatives à la traite des personnes;
  • – le décret suprême n° 009-2019-MIMP du 10 avril 2019, qui porte adoption du Guide pour l’élaboration d’un plan individualisé de réinsertion des victimes de traite, lequel fournit des orientations sur les actions et les procédures que doivent suivre les différentes institutions intervenant dans la protection des victimes, en complément du Protocole intersectoriel pour la prévention et la répression de la traite des personnes et pour la protection, l’assistance et la réinsertion des victimes (décret suprême n° 005-2016-IN). Le guide prévoit que ces plans doivent prendre en compte les besoins et les intérêts réels des victimes, être adaptés aux caractéristiques particulières de chaque cas, donner accès à la santé, à l’éducation, au travail, à la sécurité et aux services juridiques, et être élaborés dans un délai de 30 jours civils à compter de l’acceptation par la personne concernée du lancement de ce processus. Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique en outre que le Protocole intersectoriel est actuellement revu par la Commission multisectorielle de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants; et
  • – des programmes et des actions spécifiques axés sur l’insertion sur le marché du travail des victimes de traite, y compris dans certaines régions comme Cusco et Puno.
Le gouvernement indique toutefois que beaucoup de victimes de traite n’ont pas accès aux programmes de protection, principalement en raison du nombre insuffisant de centres d’accueil disponibles et du manque de centres d’accueil spécialisés pour les victimes de la traite.
En ce qui concerne la répression de la traite des personnes, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère public a pris plusieurs mesures, en particulier en collaboration avec le BIT, pour renforcer la coopération interinstitutionnelle et les mécanismes d’inspection et de poursuite, afin d’identifier les cas de traite des personnes, d’intervenir rapidement et d’imposer des sanctions. Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique qu’en novembre 2018, un service de police chargé d’enquêter sur la traite des personnes (SITRAP PNP1) a été créé qui est composé de la Direction chargée des enquêtes sur les cas de traite des personnes et de trafic illicite des migrants (DIRCTPTIM) et de 24 unités d’enquêteurs spécialisés de différentes régions. Au sujet des opérations menées par la DIRCTPTIM, le gouvernement déclare qu’il faut plus de policiers pour mener des opérations de prévention et de secours dans tout le pays. Dans ses informations supplémentaires, il indique que, de 2019 à juillet 2020, la DIRCTPTIM a mené 192 opérations et 1 626 victimes de traite ont été secourues. Il ajoute que les services spécialisés du ministère public pour la lutte contre la traite des personnes (FISTRAP) rencontrent également des difficultés dans l’application des articles 153 et 153-A du Code pénal qui incriminent la traite des personnes, faute d’un nombre suffisant de juges spécialisés dans ce domaine, ce qui génère une confusion entre les différentes infractions pénales et l’imposition de sanctions qui ne sont pas toujours appropriées. Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique que le ministère public a récemment adopté deux instruments importants pour s’assurer que les enquêtes adéquates sont menées, les poursuites judiciaires engagées, et que les victimes bénéficient d’une protection à travers le renforcement de la coordination interinstitutionnelle entre les FISTRAP et les forces de police: le Protocole du ministère public pour la prise en charge des victimes de la traite des personnes et du trafic illicite de migrants (résolution no 1191-2019-MP-FN du 2 septembre 2019); et le Guide opérationnel interinstitutionnel pour la collaboration des procureurs et de la police dans les enquêtes sur les affaires de traite des personnes (résolution no 489 2020 MFN du 2 mars 2020). La commission note que, d’après les statistiques fournies par le gouvernement, de 2018 à mai 2019, 255 cas de traite à des fins d’exploitation au travail ont été identifiés, et 77 condamnations pour traite des personnes ont été prononcées.
La commission prie le gouvernement de poursuivre ses efforts pour lutter contre la traite des personnes et d’indiquer les mesures prises pour prévenir la traite des personnes, protéger les victimes et poursuivre et punir les auteurs, notamment dans le cadre de chacun des quatre objectifs stratégiques du Plan national 2017-2021 de lutte contre la traite des personnes. Prière aussi de fournir des informations sur toute évaluation de l’impact de ces mesures menée par la commission multisectorielle de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants. La commission prie en outre le gouvernement de continuer à communiquer des informations sur les mesures prises pour renforcer les ressources humaines et financières des différentes institutions chargées des enquêtes et des poursuites dans les cas de traite des personnes, et pour améliorer encore la coordination et la collaboration entre ces institutions aux niveaux national et régional. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre et la nature des enquêtes menées sur les cas de traite des personnes, y compris par la DIRCTPTIM et les départements décentralisés d’enquête sur la traite, des procédures judiciaires engagées et des condamnations prononcées en application des articles 153 et 153-A du Code pénal, tout en précisant les difficultés auxquelles pourraient faire face les différentes autorités chargées des poursuites dans les cas de traite des personnes.
Article 2, paragraphe 2, c). Travail exigé comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire. Service communautaire. La commission rappelle que le Code pénal prévoit diverses peines alternatives à l’emprisonnement, dont l’exécution de travaux communautaires qui peuvent être appliqués en tant que peine autonome (lorsque la peine est spécifiquement associée à une infraction) ou en tant que peine alternative à une peine privative de liberté (lorsque, de l’avis du tribunal, la peine à remplacer n’est pas supérieure à quatre ans d’emprisonnement), qui obligent l’intéressé à effectuer gratuitement un travail pour diverses entités (articles 31 à 34 du Code pénal et article 119 du Code de l’exécution des peines). La commission note que, conformément à l’article 4 du décret-loi n° 1191 du 22 août 2015 qui a introduit un nouvel article 34.2 dans le Code pénal, la peine de service communautaire peut également être exécutée dans des institutions privées sans but lucratif et ayant des fins sociales ou d’assistance. La commission observe que les dispositions législatives susmentionnées n’indiquent pas la possibilité pour le condamné d’accepter ou de refuser la peine d’exécution de service communautaire lorsqu’elle est appliquée en tant qu’alternative à une peine d’emprisonnement. La commission rappelle que, si l’exécution d’un service communautaire peut être effectuée au profit d’institutions privées, telles que des associations caritatives, la personne condamnée doit pouvoir donner son consentement formel à l’exécution du travail, et les conditions de son exécution devraient être gérées et supervisées de manière appropriée, afin de garantir que le travail réalisé est effectivement un travail d’intérêt général et que les entités pour lesquelles il est effectué sont sans but lucratif. Se référant également à sa demande directe de 2020 sur l’application de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, la commission prie le gouvernement d’indiquer si la peine de service communautaire peut être imposée sans le consentement de la personne condamnée. Elle prie aussi le gouvernement de fournir des informations sur la manière dont la peine de service communautaire est appliquée, en indiquant la nature du contrôle exercé par le juge qui prononce la peine, la liste des entités privées autorisées à accueillir les personnes condamnées à cette peine, ainsi que des exemples des travaux effectués.

Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans son rapport de 2019 ainsi que des informations supplémentaires fournies à la lumière de la décision adoptée par le Conseil d’Administration à sa 338e session (juin 2020).
La commission prend également note des observations conjointes de la Centrale autonome des travailleurs du Pérou (CATP), de la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP), de la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) et de la Centrale unitaire des travailleurs du Pérou (CUT-Perú), transmises par le gouvernement avec ses informations supplémentaires.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Lutte contre le travail forcé. a) Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF). La commission a précédemment noté le manque d’informations fournies par le gouvernement sur la mise en œuvre des trois objectifs stratégiques du deuxième Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF-II), ainsi que les observations faites par la CATP selon lesquelles le manque de financement ne permettait pas de réaliser les actions prévues dans le PNLCTF-II ni de renforcer les capacités de la Commission nationale pour la lutte contre le travail forcé (CNLTF), tant aux niveaux national que régional, en particulier dans les régions où se trouvent les zones les plus à risque. La commission a prié le gouvernement de fournir des informations complètes sur toute évaluation faite sur la mise en œuvre du PNLCTF-II et sur les mesures prises pour renforcer les capacités de la CNLCTF. La commission a exprimé l’espoir que des plans régionaux de lutte contre le travail forcé pourraient être élaborés et qu’ils prendraient en compte les spécificités des éventuelles situations de travail forcé dans les différentes régions du pays. La commission note que le gouvernement déclare dans son rapport que l’évaluation faite en 2018 par la CNLCTF, avec l’aide du BIT, a montré que la conception du PNLCTF-II, et plus particulièrement l’absence d’indicateurs de base ou d’objectifs exprimés en termes absolus, ne permettait pas d’évaluer ses résultats et son efficacité, et que les institutions concernées ne rendaient compte que partiellement de ce qui avait été fait. Le gouvernement ajoute toutefois que la mise en œuvre du PNLCTF-II a permis de mieux connaître le travail forcé, en particulier dans les régions d’Ucayali et de Madre de Dios où deux études de cas ont été menées avec l’aide du BIT. En outre, en 2018, plusieurs ateliers visant à élaborer des plans régionaux de lutte contre la traite des personnes, tout en intégrant des actions de lutte contre le travail forcé, se sont tenus dans les régions de Cusco, Loreto, Amazonas, Tumbes et Ica. La commission prend bonne note de l’adoption du PNLCTF-III pour 2019-2021 (décret suprême n° 015-2019-TR du 18 septembre 2019) qui fixe deux objectifs spécifiques: i) développer une capacité adéquate des institutions gouvernementales pour prévenir et éliminer le travail forcé, en particulier à travers des actions spécifiques visant à prévenir et à détecter les cas de travail forcé, à fournir une assistance aux victimes de traite, à sanctionner les auteurs et à rétablir les droits des victimes; et ii) réduire la tolérance de la population à l’égard du travail forcé par des activités destinées à renforcer les capacités et des activités de sensibilisation, en particulier parmi les fonctionnaires et employés publics. La commission note que, dans leurs observations conjointes, la CATP, la CTP, la CGTP et la CUT-Perú soulignent que la mise en œuvre du PNLCTF-III requiert l’allocation de ressources adéquates aux institutions faisant partie de la CNLCTF.
Saluant l’adoption du PNLCTF-III et notant qu’il prévoit expressément l’élaboration d’un système de suivi et de rapports d’évaluation annuels, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur la mise en œuvre des deux objectifs stratégiques du PNLCTF-III et sur toute évaluation des mesures adoptées dans ce cadre. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise pour renforcer les capacités de la CNLCTF tant au niveau national que régional, ainsi que sur le contenu et l’impact des plans régionaux de lutte contre le travail forcé mis en place dans les différentes régions du pays, en particulier dans celles où se trouvent les zones les plus à risque.
b) Diagnostic. La commission a précédemment relevé qu’en mars 2017 le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi (MTPE), l’Institut national de la Statistique et de l’Informatique (INEI) et le BIT avaient conclu un accord de coopération visant à collecter des données statistiques pour connaître la dimension réelle de la problématique du travail forcé dans les zones les plus «vulnérables» du pays. La commission a exprimé l’espoir que ces données pourraient être collectées rapidement. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, dans le cadre de cet accord de coopération, l’INEI réalisera une étude sur la prévalence du travail forcé dans la région de Cusco, avec l’aide du BIT, qui fournira des informations statistiques quantitatives et améliorera les politiques et les actions publiques. Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique que des réunions techniques ont été organisées, qu’un questionnaire a été élaboré et que des projets pilotes ont été menés à cet égard, à la fin de l’année 2019. Le gouvernement indique cependant que du fait de la pandémie de la COVID-19, ces actions sont suspendues. La commission note que, dans leurs observations conjointes, la CATP, la CTP, la CGTP et la CUT-Perú encouragent le gouvernement à mener cette étude afin que des informations fiables soient collectées et contribuent à l’amélioration des interventions de politique publique dans les différents secteurs économiques. De plus, la commission note que, si le projet Bridge, dans le cadre duquel l’assistance technique du BIT a été fournie au Pérou, a pris fin le 19 octobre 2019, le BIT prévoit de continuer à aider le gouvernement ainsi que les organisations d’employeurs et de travailleurs dans la mise en œuvre du PNLCTF-III, notamment en réalisant la première étude sur la main-d’œuvre en 2020-21. La commission veut croire que le gouvernement fera tout son possible pour que, dans un avenir proche, des données quantitatives et qualitatives sur le travail forcé soient recueillies, analysées et communiquées aux autorités compétentes afin qu’elles puissent mieux cibler leurs actions, utiliser de manière appropriée les ressources humaines et financières et identifier les victimes du travail forcé. Plus particulièrement, la commission exprime l’espoir que l’assistance technique du Bureau aidera le gouvernement à réaliser des progrès tangibles dans ce sens, et elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les résultats des statistiques recueillies sur le travail forcé, et sur les mesures prises en conséquence.
c) Inspection du travail. La commission a précédemment noté que la Superintendance nationale de l’inspection du travail (SUNAFIL) avait initié un processus de restructuration du Groupe spécial d’inspection du travail contre le travail forcé et le travail des enfants (GEIT), créé en 2008, afin d’en accroître l’efficacité, et qu’en avril 2016 le protocole d’intervention en matière de travail forcé préparé par la SUNAFIL avait été adopté. Ce protocole contient des directives minima en vue d’une action coordonnées et efficace du système d’inspection du travail dans le domaine de la prévention et de l’élimination du travail forcé. Prenant note des observations de la CATP sur les difficultés financières auxquelles faisait face la SUNAFIL, la commission a prié le gouvernement de redoubler d’efforts et de prendre toutes les mesures pour s’assurer que le GEIT dispose des ressources humaines et matérielles adéquates pour se déplacer rapidement et efficacement sur l’ensemble du territoire national. La commission prend note de l’adoption de la résolution no 05-2018-SUNAFIL du 10 janvier 2018 qui porte: i) création d’un nouveau groupe d’inspection spécialisé dans la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants (GEIT-TFI), composé d’au moins dix inspecteurs (superviseur, inspecteurs du travail et inspecteurs auxiliaires); et ii) adoption du protocole no 001 2018-SUNAFIL/INII relatif aux actions que le GEIT-TFI doit mener, dont une seconde version a été adoptée en vertu de la résolution no 152-2019-SUNAFIL du 7 mai 2019. Conformément au protocole d’action, le GEIT-TFI est chargé: de mener des inspections à des fins de contrôle et de fournir des conseils dans la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants; d’obtenir des informations; de promouvoir la collaboration intergouvernementale et multisectorielle; de participer à des formations et à des stages; et de suggérer des améliorations dans le fonctionnement de la SUNAFIL. La commission note également que le protocole d’action sur le travail forcé a été adopté en vertu de la résolution n° 217 2019-SUNAFIL du 9 juillet 2019 afin de recueillir et d’utiliser des informations qui permettront d’identifier les secteurs économiques ou les régions dans lesquels le travail forcé existe, de diffuser des informations, de mener des activités de sensibilisation sur la protection des droits fondamentaux au travail, et de renforcer les capacités du personnel de l’inspection du travail sur les questions liées au travail forcé. La commission note que le protocole prévoit l’imposition d’amendes administratives dans les cas de situations de travail forcé (paragraphe 14.2 du protocole). La commission note en outre que le PNCLTF-III prévoit des actions spécifiques pour former les inspecteurs à l’identification des situations de travail forcé et pour veiller à ce qu’un nombre suffisant de cadres se spécialisent sur cette question et à ce que suffisamment d’équipements, de matériel et de ressources logistiques soient mis à leur disposition pour qu’ils puissent s’acquitter plus efficacement de leurs fonctions d’inspection. La commission note que, dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique que 174 ordres d’inspection sur le travail forcé ont été émis, 29 infractions ont été constatées, et 10 peines d’amendes ont été imposées dans le cadre du traitement administratif des infractions. La commission prie le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour renforcer la capacité institutionnelle de la SUNAFIL, et plus particulièrement du GEIT-TFI, notamment en lui assurant des ressources humaines et matérielles suffisantes pour couvrir rapidement et efficacement l’ensemble du territoire national. Elle prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur l’impact des mesures prises à cette fin, notamment dans le cadre du PNLCTF-III et de la résolution no 217-2019-SUNAFIL. Compte tenu du fait que les inspections menées par le GEIT-TFI peuvent permettent d’identifier des travailleurs en situation de travail forcé et les libérer, ainsi que fournir aux tribunaux des documents qui serviront à engager des poursuites civiles et pénales contre les auteurs de ces pratiques, la commission prie le gouvernement de continuer à communiquer des informations sur le nombre des inspections menées, les régions ciblées, les infractions constatées et des sanctions administratives imposées.
Article 25. Application de sanctions pénales efficaces. La commission a précédemment salué l’introduction dans le Code pénal des dispositions des articles 153-B (exploitation sexuelle), 153-C (esclavage et autres formes d’exploitation) et 168-B (travail forcé), qui prévoient des peines d’emprisonnement. La commission prend note de l’adoption de la loi no 30924 du 29 mars 2019, qui modifie l’article 168-B du Code pénal en assortissant d’amendes les peines de prison dont les auteurs de travail forcé sont passibles. La commission note également que, dans leurs observations conjointes, la CATP, la CTP, la CGTP et la CUT-Perú se déclarent préoccupées par une proposition législative (projet de loi no 05556/2020 CR) visant à incriminer «l’exploitation des êtres humains» qui, selon elles, aboutirait à la suppression de certaines infractions prévues dans le Code pénal, parmi lesquelles l’exploitation sexuelle, le travail forcé et l’esclavage.
En outre, la commission note que, dans le contexte de l’accord-cadre de coopération interinstitutionnelle conclu le 6 août 2018 par le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi et l’OIT, plusieurs actions sont prévues afin d’organiser des ateliers avec le ministère public, le pouvoir judiciaire et la police nationale afin de renforcer leur capacité d’enquêter, de traiter et de sanctionner efficacement les cas de travail forcé. Dans ses informations supplémentaires, le gouvernement fait référence à plusieurs ateliers organisés à cet égard, en collaboration avec l’OIT, en 2020. La commission note que le PNLCTF-III prévoit également des actions spécifiques pour former la police nationale et les procureurs à l’identification des situations de travail forcé. La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts à cet égard, et le prie de fournir des informations sur les mesures prises, en particulier dans le cadre du PNLCTF-III et de l’accord-cadre de coopération interinstitutionnelle conclu avec l’OIT, pour continuer de renforcer la capacité des autorités chargées du contrôle de l’application de la loi à mieux détecter les situations de travail forcé, identifier et protéger les victimes, mener des enquêtes et initier des poursuites dans tous les cas de travail forcé. La commission prie aussi le gouvernement de communiquer des informations sur les enquêtes menées, les procédures judiciaires engagées et les sanctions imposées en application des articles 168-B, 153-B et 153-C du Code pénal. Enfin, la commission prie le gouvernement de faire part de ses commentaires sur les observations des organisations syndicales concernant le projet de loi no 05556/2020 CR.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

Suivi des recommandations du comité tripartite (réclamation présentée en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT)

Article 1, paragraphe1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Incidence de certaines clauses contractuelles contenues dans le contrat type signé entre les enseignants et l’Université pontificale catholique du Pérou sur la liberté de quitter son emploi. La commission prend note de l’adoption par le Conseil d’administration à sa 329e session (mars 2017) des recommandations formulées par le comité tripartite établi pour examiner la réclamation présentée par la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) contre le Pérou alléguant l’inexécution de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957. La commission observe que la réclamation porte sur l’effet de clauses contenues dans les contrats de courte durée signés successivement entre certains enseignants et l’université pontificale. La clause prévoit que, si à l’expiration du contrat de travail le titulaire du contrat ne s’est pas acquitté de la charge d’enseignement prévue, il s’engage à s’acquitter de la charge d’enseignement restante sans coût additionnel pour l’université ou à recevoir une part moindre de ses prestations sociales ou, si celles-ci ne suffisent pas à couvrir les montants dus, à rembourser les montants correspondants à l’université. La commission note que le comité tripartite a suggéré au gouvernement de veiller «à ce que la question des contrats types et de la clause susmentionnée fasse l’objet d’un examen de la part de l’université et des autorités compétentes dans le but d’éviter que d’une utilisation réitérée de ces clauses ne résulte une accumulation d’une dette qui place le travailleur dans une situation de dépendance qui compromet sa liberté de mettre fin à la relation d’emploi». Le comité tripartite a invité le gouvernement à veiller à ce que les autorités compétentes engagent des discussions avec l’université pour examiner le contenu et les modalités d’application des contrats types signés entre elle et les enseignants qu’elle emploie. La commission prie par conséquent le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises à cette fin dans son prochain rapport.
2. Se référant à son observation, la commission prie le gouvernement de fournir, en plus des informations sur la mise en œuvre du Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF-II) et sur l’application de la législation incriminant le travail forcé, des informations plus spécifiques sur les points suivants.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1. Alinéa a). Travail domestique dans des conditions de travail forcé. S’agissant des mesures prises pour renforcer la protection des travailleuses domestiques contre les pratiques relevant du travail forcé, la commission prend note de l’adoption du Plan d’action pour promouvoir le respect des droits des travailleurs domestiques 2016-17 (résolution ministérielle no 066-2016-TR). Elle relève qu’une table de travail doit être instituée pour assurer le suivi de ce plan. Par ailleurs, pour encourager la formalisation de ce secteur, un registre des travailleurs domestiques et de leurs ayants droit a été créé permettant aux employeurs d’inscrire en ligne leurs employés qui ainsi bénéficient des prestations médicales de l’assurance-santé. Ainsi, selon la Caisse d’assurance santé (EsSalud), 65 pour cent des travailleurs domestiques étaient couverts par l’assurance-maladie en 2015. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre du Plan d’action pour promouvoir le respect des droits des travailleurs domestiques 2016-17 en ce qui concerne en particulier les actions visant à sensibiliser ces travailleurs à leurs droits, à leur garantir une assistance et une protection adéquate pour pouvoir dénoncer toute situation d’exploitation dont ils seraient victimes auprès des autorités compétentes, et à renforcer les contrôles dans ce secteur.
Alinéa b). Traite des personnes. Se référant à ses précédents commentaires, la commission note avec intérêt que le gouvernement a continué de renforcer le cadre législatif et institutionnel de lutte contre la traite des personnes et de protection des victimes de ce délit. Elle relève en particulier l’adoption des mesures suivantes:
  • -la loi no 30251 du 30 septembre 2014 qui modifie l’article 153 du Code pénal en complétant la définition des éléments constitutifs du délit de traite des personnes et en précisant que le consentement de la victime à une quelconque forme d’exploitation est inopérant lorsque l’agent a eu recours à des moyens tels que la violence, la menace, la tromperie, l’abus de pouvoir ou d’une situation de vulnérabilité;
  • -le décret suprême no 001-2015-JUS qui approuve la Politique nationale contre la traite des personnes et ses formes d’exploitation. Cette politique propose des stratégies et des directives pour orienter sa mise en œuvre à travers les axes de la prévention, la répression et la protection des victimes;
  • -le décret suprême no 001-2016-IN du 8 février 2016 qui crée la Commission multisectorielle permanente contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants (qui remplace le Groupe de travail multisectoriel permanent contre la traite des personnes). Cette dernière est chargée de la coordination et du suivi des activités à mettre en œuvre dans le cadre du Plan d'action national contre la traite des personnes pour 2011-2016 et de l’élaboration d’un rapport annuel sur les progrès réalisés à cet effet ainsi que d’un rapport annuel sur la traite des personnes;
  • -le Protocole intersectoriel pour la prévention et la répression du délit de traite des personnes et pour la protection, l’assistance et la réintégration des victimes qui établit des directives opérationnelles dans l’ensemble de ces domaines (décret suprême no 005-2016-IN); et le Protocole pour l’assistance et la protection par la police nationale des victimes et témoins du délit de traite des personnes (R.M. no 0430-2016-IN). Dans le cadre de la mise en œuvre de ce protocole, 24 ateliers de renforcement des capacités ont été menés en 2014 et 2015 dans différentes villes du pays auxquels ont participé près de 900 fonctionnaires de la police nationale.
S’agissant des mesures de prévention, la commission note les activités de sensibilisation développées par les différentes institutions gouvernementales et notamment celles menées par le ministère public auprès des agents de police et des fonctionnaires territoriaux. Le gouvernement se réfère également à la distribution de fiches d’information à l’intention des Péruviens qui souhaitent émigrer, qui visent à favoriser un processus de migration sûr et régulier et à attirer l’attention sur les risques de traite des personnes. En ce qui concerne la protection des victimes, le gouvernement indique que les centres «urgence femmes» prodiguent une assistance intégrale aux victimes de traite à des fins d’exploitation sexuelle (40 femmes ont été accueillies jusqu’en 2015 et 29 pour les deux premiers trimestres de 2016). Enfin, dans le domaine de la répression, le gouvernement indique que, depuis 2014, 25 départements décentralisés d’investigation de la traite ont été créés qui, conjointement avec la Direction d’investigation des délits de traite des personnes et de trafic illicite de migrants (Dirintrap), mènent des enquêtes et des opérations de police. Il ressort des statistiques fournies par le gouvernement que, entre janvier 2014 et juin 2016, 154 opérations de police ont été menées ayant permis de libérer 1 197 victimes présumées de traite; 118 procédures judiciaires sont en cours (concernant 159 personnes mises en examen et 170 victimes); 42 décisions de justice ont été prononcées condamnant 68 accusés.
La commission salue les efforts entrepris par le gouvernement pour disposer d’un cadre législatif et institutionnel solide de lutte contre la traite des personnes et l’encourage à prendre toutes les mesures requises pour mettre effectivement en œuvre sa Politique nationale contre la traite des personnes et ses formes d’exploitation. Elle le prie de continuer à fournir des informations détaillées à ce sujet et notamment sur les rapports d’évaluation et les rapports annuels produits par la Commission multisectorielle permanente contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants. Notant que peu de victimes semblent avoir bénéficié de protection et d’assistance par rapport au nombre de victimes présumées qui ont été libérées suite à des opérations de police, la commission prie le gouvernement de renforcer le volet de la protection des victimes et de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard. Enfin, la commission souhaiterait que le gouvernement fournisse des informations sur les opérations menées par la Dirintrap et les départements décentralisés d’investigation de la traite, sur les procédures judiciaires engagées et sur le nombre et la nature des condamnations prononcées sur la base des articles 153 et 153-A du Code pénal ainsi que sur les difficultés auxquelles sont confrontées les différentes autorités de la chaîne répressive en matière de lutte contre la traite des personnes.

Observation (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

La commission prend note des observations communiquées par la Centrale autonome des travailleurs du Pérou (CATP) le 1er septembre 2016.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Lutte contre le travail forcé. Depuis un certain nombre d’années, la commission examine les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre les différentes formes de travail forcé existant au Pérou (pratiques de servitude pour dettes des populations indigènes dans le secteur de l’extraction du bois, situations de travail forcé dans le secteur des mines artisanales, traite des personnes ou exploitation des travailleuses domestiques). La commission a précédemment demandé au gouvernement de prendre des mesures pour renforcer les capacités de la Commission nationale pour la lutte contre le travail forcé (CNLTF); mettre en œuvre les différents volets du deuxième Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF-II); et compléter la législation nationale en adoptant une disposition pénale qui incrimine spécifiquement le travail forcé et en définit les éléments constitutifs de manière à couvrir l’ensemble des pratiques de travail forcé existant dans le pays. La commission prend note de l’adoption, le 5 janvier 2017, du décret législatif no 1323 qui renforce la lutte contre le féminicide, la violence familiale et la violence liée au genre. La commission note avec satisfaction que ce décret incorpore dans le Code pénal un certain nombre de dispositions qui incriminent des pratiques relevant du travail forcé: les articles 153-B et 153-C qui définissent les éléments constitutifs de «l’exploitation sexuelle» et de «l’esclavage et les autres formes d’exploitation» en prévoyant des peines de prison allant de dix à quinze ans; et l’article 168-B qui incrimine le «travail forcé», le définit comme le fait de soumettre ou obliger une personne, à travers tout moyen ou contre sa volonté, à réaliser un travail ou un service, rémunéré ou non, et prévoit des peines de prison comprises entre six et douze ans.
a) Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF). La commission a noté que le deuxième Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF-II) visait l’éradication du travail forcé pour 2017, à travers la réalisation de trois objectif stratégiques: la formation et la sensibilisation au travail forcé; l’établissement d’un système intégral d’identification, de protection et de réinsertion des victimes; et l’identification et la réduction des facteurs de vulnérabilité au travail forcé. La commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur les évaluations menées dans le cadre du mécanisme de suivi et d’évaluation de la mise en œuvre du PNLCTF-II et sur la mise à disposition des ressources nécessaires pour réaliser les objectifs fixés.
Dans son rapport, le gouvernement indique qu’il n’est pas en mesure de donner des informations sur la réalisation des objectifs du plan, car les différentes entités intégrant la CNLCTF ont fourni des informations sans respecter le format prévu à cet effet. Le gouvernement précise que ces entités recevront une formation à cet égard. Il ajoute que l’une des priorités de la CNLCTF est d’instituer les commissions régionales, en particulier dans les zones à risque, et d’élaborer des plans régionaux de lutte contre le travail forcé. A cet égard, la commission note que la CATP exprime sa préoccupation face au fait que le manque de financement ne permet pas de réaliser les actions prévues dans le PNLCTF-II ni de renforcer les capacités de la CNLCTF tant aux niveaux national que régional. La CATP regrette également l’absence de commissions régionales de lutte contre le travail forcé en particulier dans les régions où se trouvent les zones les plus à risque.
La commission veut croire que dans son prochain rapport le gouvernement sera en mesure de communiquer des informations complètes sur la mise en œuvre des trois objectifs stratégiques du PNLCTF-II et sur l’évaluation qui aura été faite des mesures prises dans ce cadre. Elle encourage une nouvelle fois vivement le gouvernement à renforcer les capacités de la CNLCTF, tant aux niveaux national que régional. Rappelant qu’il est indispensable de renforcer la présence de l’Etat dans les régions où la prévalence du travail forcé est forte, la commission espère que des plans régionaux de lutte contre le travail forcé auront pu être élaborés, et qu’ils prendront en compte les spécificités des situations de travail forcé qui peuvent exister dans les différentes régions du pays.
b) Diagnostic. La commission a encouragé le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour disposer d’une étude qualitative et quantitative complétant les informations déjà disponibles sur les différentes pratiques de travail forcé, comme le prévoit le PNLCTF-II. A cet égard, elle relève qu’en mars 2017 le ministère de l’Emploi et de la Promotion de l’emploi (MTPE), l’Institut national de la Statistique et de l’Informatique (INEI) et le BIT ont souscrit un accord de coopération visant à collecter des informations statistiques pour connaître la dimension réelle de la problématique du travail forcé dans les zones les plus «vulnérables» du pays. La commission espère que toutes les mesures seront prises pour que ces données puissent être collectées rapidement de manière à ce qu’elles puissent être analysées et mises à disposition des autorités compétentes pour permettre à ces dernières de mieux orienter leur action et de s’assurer que les ressources humaines et les moyens financiers sont utilisés à bon escient et que les victimes sont identifiées.
c) Inspection du travail. La commission a précédemment souligné la nécessité de prendre les mesures appropriées pour garantir le bon fonctionnement du nouveau Groupe spécial d’inspection du travail contre le travail forcé et le travail des enfants (GEIT). Le gouvernement indique à cet égard que les 15 inspecteurs du travail intégrant ce groupe sont basés dans la circonscription de Lima et qu’ils disposent des mêmes moyens financiers et matériels que les autres inspecteurs du travail de cette circonscription. Le gouvernement fournit des statistiques sur les visites d’inspection et de conseil menées entre 2014 et 2016 concernant le travail des enfants et le travail forcé. Il ressort de ces données que le GEIT concentre majoritairement ses visites sur le contrôle du travail des enfants. Aucune information n’a été transmise sur les constatations auxquelles ont donné lieu les visites d’inspection sur les régions ciblées, ni sur la nature des violations constatées et des sanctions qui auraient été infligées. Le gouvernement indique par ailleurs que, tenant compte des résultats obtenus, la Superintendance nationale de l’inspection du travail (SUNAFIL) a initié un processus de restructuration du GEIT. En outre, en avril 2016, le protocole d’intervention en matière de travail forcé préparé par la SUNAFIL a été adopté. Celui-ci contient des directives minima en vue d’une action articulée et efficace du système d’inspection du travail dans le domaine de la prévention et de l’éradication du travail forcé (orientations sur la préparation des interventions, indicateurs permettant d’identifier les situations de travail forcé, questions types, etc.). Enfin, la SUNAFIL mène différents types d’activités visant à sensibiliser, prévenir et former à la lutte contre le travail forcé, tant aux niveaux national que régional.
La commission observe que dans ses observations la CATP se réfère aux difficultés financières auxquelles fait face la SUNAFIL, alors que les régions où l’existence du travail forcé est suspectée sont éloignées et dangereuses et que la collecte de données et les visites d’inspection revêtent un coût élevé. La CATP considère que le gouvernement doit donc solliciter les budgets nécessaires pour que les actions d’inspection puissent être menées.
La commission prend note de ces informations et rappelle le rôle essentiel de l’inspection du travail dans la lutte contre le travail forcé. Elle prie le gouvernement de poursuivre ses efforts et de prendre toutes les mesures pour s’assurer que le GEIT dispose des ressources humaines et matérielles adéquates pour se déplacer de manière rapide et efficace sur l’ensemble du territoire national. Considérant que les inspections menées par le GEIT permettent d’identifier et de libérer les travailleurs des situations de travail forcé dans lesquelles ils se trouvent et également de mettre à disposition de la justice les documents qui serviront à initier les poursuites civiles et pénales contre les auteurs de ces pratiques, la commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur le nombre d’inspections menées, les infractions constatées et les sanctions administratives imposées.
Article 25. Application de sanctions pénales efficaces. La commission a précédemment insisté sur la nécessité de compléter la législation pénale en incriminant spécifiquement le travail forcé et en en définissant plus précisément ses éléments constitutifs de manière à permettre aux autorités compétentes d’être plus à même de mener les enquêtes adéquates, d’initier des procédures judiciaires et de sanctionner les auteurs des différentes formes de travail forcé. Elle a également souligné que, pour faire reculer le travail forcé, il est indispensable que les responsables de ces pratiques se voient infliger des sanctions pénales suffisamment dissuasives, conformément à l’article 25 de la convention. La commission salue les dispositions qui ont été introduites dans le Code pénal et les peines prévues. La commission espère que l’adoption de ces dispositions sera accompagnée des mesures appropriées destinées à renforcer les capacités des autorités chargées d’appliquer la loi de manière à assurer une meilleure identification des situations relevant du travail forcé, identifier les victimes et leur apporter la protection requise. Prière de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cette fin ainsi que sur les enquêtes menées, les procédures judiciaires engagées et les sanctions prononcées sur la base des nouvelles dispositions des articles 168-B, 153-B et 153-C du Code pénal.
La commission veut croire que le gouvernement continuera à mettre tout en œuvre pour prévenir et lutter efficacement contre toutes les formes de travail forcé existant dans le pays. Elle espère que l’assistance technique du Bureau dont le gouvernement continue de bénéficier, notamment à travers le projet Bridge Pérou qui a pour objectif de contribuer à renforcer les politiques publiques nationales de lutte contre le travail forcé, l’aidera à obtenir des progrès tangibles à cet égard et également à présenter des informations concrètes sur les mesures prises.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Se référant à son observation, la commission prie le gouvernement de bien vouloir fournir, en plus des informations sur la mise en œuvre du Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF-II), des informations plus spécifiques sur les points suivants.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. 1.   Travail domestique dans des conditions de travail forcé. En réponse à la demande de la commission concernant les mesures prises pour renforcer la protection des travailleuses domestiques contre l’imposition de pratiques qui relèvent du travail forcé, le gouvernement indique que le projet de loi visant à modifier la loi sur les travailleuses domestiques en vue de renforcer leurs droits est en cours d’adoption. La Direction générale des droits fondamentaux et sécurité et santé au travail du ministère du Travail a par ailleurs considéré nécessaire l’élaboration d’un plan d’action pour le secteur domestique afin de contribuer à l’amélioration des conditions de travail à travers, notamment, la réalisation d’activité destinées à assurer un plus grand respect de la législation du travail. Ce plan préparé avec les organisations syndicales du secteur devrait être adopté prochainement et certaines actions prévues sont déjà mises en œuvre. La commission espère que le projet de loi visant à modifier la loi sur les travailleuses domestiques ainsi que le plan d’action pour le secteur domestique seront adoptés prochainement. Prière d’indiquer les mesures concrètes prises pour renforcer les contrôles dans ce secteur afin de protéger cette catégorie de travailleurs contre l’imposition de pratiques qui relèvent du travail forcé, leur apporter une assistance qui leur permette de faire valoir leurs droits et de dénoncer tout abus dont elles seraient victimes auprès des autorités compétentes.
2. Traite des personnes. La commission a précédemment noté que les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre la traite des personnes témoignent de son engagement à combattre ce fléau, et elle l’a encouragé à poursuivre sur cette voie. Dans son dernier rapport, le gouvernement se réfère à différentes activités de renforcement des capacités de la police ainsi qu’à l’institution de réseaux multisectoriels aux niveaux national, régional et local en vue de développer des politiques publiques locales de lutte contre la traite des personnes. Il indique également qu’une proposition de modification de la loi no 28950 contre la traite des personnes et le trafic illégal de migrants est à l’étude pour faciliter sa compréhension et son utilisation par les autorités de poursuite et judiciaires et assurer la sanction des responsables. A cet égard, le gouvernement indique que les plaintes enregistrées auprès du ministère public pour le délit de traite en 2012 concernaient 754 victimes, dont 626 femmes, et que la majorité était victime de traite à des fins d’exploitation sexuelle.
La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les activités menées pour lutter contre la traite des personnes, et en particulier sur:
  • -la proposition de modification de la loi no 28950 contre la traite des personnes et le trafic illégal de migrants;
  • -les activités de sensibilisation et de formation des entités publiques qui interviennent dans la lutte contre la traite des personnes;
  • -la manière dont l’assistance et la protection des victimes sont garanties;
  • -les activités menées et coordonnées par le Groupe de travail multisectoriel permanent contre la traite des personnes (GTMPTP) et la division de la lutte contre la traite des personnes établie au sein de la Direction de l’investigation criminelle de la police nationale;
  • -les poursuites judiciaires engagées et les sanctions prononcées sur la base des articles 153 et 153A du Code pénal.

Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

La commission prend note des observations communiquées par la Centrale unitaire des travailleurs du Pérou (CUT) le 25 juin 2013 ainsi que du rapport du gouvernement.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Lutte contre le travail forcé. La commission observe que, depuis un certain nombre d’années, le gouvernement prend des mesures pour lutter contre les différentes formes de travail forcé existant au Pérou (pratiques de servitude pour dettes des populations indigènes dans le secteur de l’extraction du bois, traite des personnes ou exploitation des travailleuses domestiques). La création de la Commission nationale pour la lutte contre le travail forcé (CNLTF) et l’adoption du premier Plan national de lutte contre le travail forcé en 2007 ont constitué les éléments centraux de cette politique. La commission relève à cet égard que le gouvernement a bénéficié d’une assistance technique intégrée du Bureau international du Travail, y compris dans le cadre des fonds imputés sur le Compte de programmes spéciaux pour renforcer l’application des normes internationales du travail.
a) Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF). La commission note avec intérêt l’adoption par décret suprême no 04-2013-TR du 9 juin 2013 du deuxième Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF-II) qui couvre la période 2013-2017. Ce plan a été élaboré dans le cadre d’un processus participatif qui a également intégré des représentants des régions particulièrement touchées par le travail forcé, comme Ulcayali, Madre de Dios, Cusco, Loreto et Puno, ce qui devrait faciliter sa mise en œuvre. Pour réaliser l’objectif général d’éradication du travail forcé d’ici à 2017, le plan définit comme éléments préalables la nécessité de disposer d’ici à 2014 d’une étude de base qui établisse un état des lieux du travail forcé dans le pays; de mener en 2013-14 des interventions pilotes dans les régions et secteurs d’activités où des situations de travail forcé ont été constatées (extraction du bois, mines artisanales, travail domestique); et de renforcer les capacités de la CNLCTF. Ce plan fixe en outre trois objectifs stratégiques: i) la formation et la sensibilisation au travail forcé, ses caractéristiques, son ampleur, ses causes, et les groupes et régions affectées; ii) l’établissement et la mise en œuvre d’un système intégral d’identification, de protection et de réinsertion des victimes en articulant et coordonnant les rôles, procédures et outils des différentes entités concernées; et iii) l’identification et la réduction des facteurs de vulnérabilité au travail forcé. Pour chaque objectif stratégique, des activités sont programmées et des objectifs définis. La commission note par ailleurs qu’un protocole intersectoriel sur le travail forcé est en cours d’élaboration, qui devrait constituer un outil méthodologique destiné à aider les institutions publiques et privées à mettre en œuvre le PNLCTF-II.
La commission constate que le PNLCTF-II prévoit un mécanisme de suivi et d’évaluation de sa mise en œuvre et prie le gouvernement de fournir des informations sur les rapports d’évaluation annuels qui auront été préparés dans ce cadre et de préciser comment les obstacles identifiés à la réalisation des objectifs auront été pris en compte dans la révision des plans opérationnels annuels. Tout en notant que le financement des activités prévues dans le PNLCTF-II repose sur les différentes entités publiques, nationales, régionales et locales compétentes qui devront s’assurer d’obtenir des lignes budgétaires pour la réalisation des activités du PNLCTF-II, la commission veut croire que le gouvernement ne manquera pas de donner l’impulsion politique nécessaire pour que les ressources nécessaires à la mise en œuvre effective de ce deuxième plan national soient mises à disposition. A cet égard, elle encourage vivement le gouvernement à renforcer les capacités de la CNLCTF, tant au niveau national que régional, et rappelle qu’il est indispensable de renforcer la présence de l’Etat dans les régions où la prévalence du travail forcé est forte.
b) Mesures législatives. Dans ses précédents commentaires, la commission a souligné la nécessité de compléter la législation nationale en adoptant une disposition pénale qui incrimine spécifiquement le travail forcé et en définit les éléments constitutifs de manière à couvrir l’ensemble des pratiques de travail forcé qui existent dans le pays. Dans son rapport, le gouvernement indique que la sous-commission de la CNLCTF a élaboré une proposition de modification de l’article 168 du Code pénal relatif au délit contre la liberté du travail, qui sera prochainement présentée à la CNLCTF pour approbation puis soumise au Conseil national des droits de l’homme afin qu’il présente un projet de loi au Congrès de la République.
Dans ses observations, la CUT souligne que la rédaction actuelle de l’article 168 du Code pénal est lacunaire et que sa modification constitue un objectif prioritaire à atteindre dans les plus brefs délais. Pour la CUT, la proposition de modification de l’article 168 du Code pénal faite par le ministère du Travail lors d’une réunion de la CNLCTF en avril 2013 est positive et tient compte des recommandations formulées par la commission d’experts.
La commission note que, comme cela était déjà prévu dans le plan opérationnel 2012-13 du premier PNLCTF, la question de l’adéquation de la législation nationale aux normes internationales en matière de liberté au travail et travail forcé figure dans le PNLCTF-II en tant qu’objectif à atteindre pour 2013 14. La commission prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que la législation nationale pénale soit complétée dans les plus brefs délais afin de permettre de réprimer effectivement toutes les formes de travail forcé soit en modifiant l’article 168 du Code pénal, soit en ajoutant une disposition dans le Code pénal qui incrimine le travail forcé et en définit les éléments constitutifs.
c) Diagnostic. La commission note que le PNLCTF-II s’est fixé comme objectif pour 2014 de disposer d’une étude de base qui établisse un état des lieux du travail forcé dans le pays afin de pouvoir systématiser les informations disponibles et adopter des mécanismes institutionnels de suivi et d’actualisation. Le gouvernement se réfère également à un projet d’étude sur le travail forcé des enfants dans la production de charbon dans les scieries de Pucallpa. La CUT souligne que le PNLCTF-II reconnaît le manque de données systématiques et la faiblesse des mécanismes institutionnels permettant de rendre compte de la situation réelle du travail forcé et considère qu’il est nécessaire de disposer d’informations fiables pour identifier les groupes de personnes affectés et préparer un plan d’action spécifique pour éradiquer ces pratiques et obtenir le financement nécessaire à cette fin. La commission espère que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour s’assurer qu’une étude qualitative et quantitative complétant les informations déjà disponibles sur les différentes pratiques de travail forcé pourra effectivement être finalisée en 2014, comme le prévoit le PNLCTF-II. De telles données sont indispensables pour l’évaluation et la réalisation de l’ensemble des objectifs du PNLCTF-II et pour s’assurer que les ressources atteignent effectivement les populations et les régions concernées.
d) Inspection du travail. Dans ses précédents commentaires, la commission a exprimé sa préoccupation par le fait que, depuis sa création en 2008, le Groupe spécial de l’inspection du travail contre le travail forcé (GEIT) n’ait constaté aucune situation de travail forcé. A ce sujet, elle a observé que le plan opérationnel 2012-13 prévoyait de «réactiver et renforcer le GEIT» en soulignant la nécessité d’évaluer «les problèmes actuels du GEIT», de promouvoir des actions visant à renforcer sa capacité de mobilité sur le territoire et de le doter des ressources suffisantes. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que par résolution en date du 8 mars 2013 a été constitué le Groupe spécial d’inspection du travail contre le travail forcé et le travail des enfants et qu’il sera composé de 15 inspecteurs du travail. Il ajoute qu’en 2012 la Direction générale de l’inspection du travail a ordonné deux inspections concernant deux entreprises et 145 travailleurs et que ces visites n’ont identifié aucun travailleur en situation de travail forcé.
La commission constate que, si le nouveau groupe d’inspection spécialisé sera composé de 15 inspecteurs (contre cinq pour le GEIT en 2008), il sera en charge de deux thématiques: le travail forcé et le travail des enfants. La commission relève en outre que le PNLCTF-II ne se réfère plus au renforcement des services d’inspection du travail. La commission rappelle le rôle essentiel de l’inspection du travail dans la lutte contre le travail forcé. En effet, l’inspection du travail est l’entité publique la plus à même d’identifier les travailleurs victimes de travail forcé et de les libérer, et également de récolter les éléments de preuve qui serviront à initier les poursuites judiciaires contre les auteurs de ces pratiques. Par conséquent, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour garantir le bon fonctionnement du nouveau groupe spécial d’inspection du travail contre le travail forcé et le travail des enfants. Prière de fournir des informations sur sa composition, ses ressources, les moyens matériels dont il dispose pour mener à bien ses missions sur l’ensemble du territoire national, et de préciser le nombre d’inspections menées et de situations de travail forcé identifiées et les suites judiciaires données aux infractions constatées.
Article 25. Application de sanctions pénales efficaces. La commission a précédemment souligné que, pour faire reculer le travail forcé, il est indispensable que les responsables de ces pratiques se voient infliger des sanctions pénales suffisamment dissuasives, conformément à l’article 25 de la convention. Elle constate que les informations communiquées par le gouvernement sur les plaintes déposées auprès du ministère public concernent uniquement le délit de traite des personnes (art. 153 du Code pénal). Comme la commission l’a déjà indiqué, l’absence de dispositions pénales spécifiques réprimant et sanctionnant le travail forcé fait obstacle à l’initiation de poursuites judiciaires à l’encontre des personnes qui imposent du travail forcé sous une autre forme que la traite des personnes. Dans ces circonstances, la commission insiste à nouveau sur la nécessité de compléter la législation pénale en incriminant spécifiquement le travail forcé et en en définissant les éléments constitutifs afin que les autorités de police et de poursuite puissent disposer d’une base légale qui leur permette de mener les enquêtes adéquates et d’initier des procédures judiciaires contre les auteurs des différentes formes de travail forcé existant au Pérou.
Enfin, notant que le PNLCTF-II se réfère à l’Organisation internationale du Travail en tant qu’organisme qui peut apporter une assistance technique permanente à la Commission nationale de lutte contre le travail forcé, la commission espère que le Bureau pourra continuer à accompagner le gouvernement dans ce processus d’éradication de toutes les formes de travail forcé.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

La commission prend note du rapport du gouvernement qui contient des informations et des réponses très détaillées à ses précédents commentaires, ainsi que des observations communiquées par la Centrale unitaire des travailleurs du Pérou (CUT) sur l’application de la convention, qui ont été transmises au gouvernement en septembre 2011.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Remarques préliminaires. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté les différentes mesures prises par le gouvernement pour renforcer son cadre institutionnel et législatif de lutte contre différentes formes de travail forcé existant au Pérou: pratiques analogues à l’esclavage et servitude pour dettes des populations indigènes, traite des personnes et exploitation des travailleuses domestiques. Elle a noté en particulier l’approbation du Plan national de lutte contre le travail forcé et la création de la Commission nationale pour la lutte contre le travail forcé (CNLTF) ainsi que de différentes institutions spécialisées dans le travail forcé au sein notamment de l’inspection du travail et de la police. Elle a demandé au gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre des différents volets du plan d’action.
La commission relève que, dans ses observations, la CUT souligne que le Pérou a fait des progrès dans la lutte contre le travail forcé en renforçant son cadre légal et institutionnel mais il reste beaucoup à faire pour éradiquer du territoire toutes les formes de travail forcé. Le pays ne dispose pas d’estimations statistiques sur le phénomène si ce n’est les chiffres émanant des autorités qui reçoivent les plaintes qui ne représentent que la partie émergée de l’iceberg. A titre d’illustration, la CUT décrit en détail le processus qui conduit à l’imposition de travail forcé dans deux situations concrètes dans la région de Madre de Dios: la première concerne les paysans provenant de régions très pauvres des Andes qui se retrouvent victimes de traite et de servitude pour dettes dans les mines aurifères et la seconde concerne les communautés indigènes dans le secteur de la coupe du bois. La CUT se réfère également à la récolte de châtaignes et souligne que le dénominateur commun de l’imposition de ces pratiques est la pauvreté et la présence limitée de l’Etat.
1. Lutte contre le travail forcé, en particulier des communautés indigènes. a) Plan national de lutte contre le travail forcé (PNLCTF). La commission note que le PNLCTF a été actualisé suite à l’adoption d’un plan opérationnel pour la période 2012-13 qui couvre six volets d’actions prioritaires. Elle relève également que la CNLTF a élaboré un projet de nouveau plan national qui fait actuellement l’objet d’un processus de consultations aux niveaux national et régional. Ce plan, qui couvre la période 2013-2017 et fixe des objectifs concrets et des indicateurs de la mise en œuvre de ses différents volets, offrira un cadre global et interinstitutionnel de lutte contre le travail forcé. La commission espère que le nouveau plan national (2013-2017) pourra être adopté très prochainement et que, dans le cadre du processus de consultation, il sera dûment tenu compte des obstacles ayant empêché la mise en œuvre effective de certaines mesures prévues dans le PNLCTF actuellement en vigueur. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur tout rapport d’évaluation de la mise en œuvre du plan opérationnel 2012-13. La commission prie également le gouvernement de s’assurer que ce plan sera accompagné du financement nécessaire à sa mise en œuvre tant au niveau national que régional. Dans ce contexte, la commission relève, d’après le plan opérationnel 2012-13 que l’une des priorités est d’impulser la mise en place de commissions régionales de lutte contre le travail forcé et de leur apporter un appui technique sur les plans conceptuel, normatif et opérationnel afin de leur permettre de diagnostiquer le travail forcé et d’élaborer des plans de lutte régionaux. Elle se félicite à cet égard de la création d’une commission régionale pour la région d’Ucayali. Considérant qu’il est essentiel de renforcer la présence de l’Etat dans les régions ou la prévalence du travail forcé est forte, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour permettre la création et le bon fonctionnement des commissions régionales pour la lutte contre le travail forcé.
b) Mesures législatives. Dans ses précédents commentaires, la commission a souligné la nécessité de compléter la législation nationale en adoptant une disposition pénale qui incrimine spécifiquement le travail forcé et en définit les éléments constitutifs de manière à couvrir l’ensemble des pratiques de travail forcé qui existent dans le pays. Elle note, d’après les informations communiquées par le gouvernement dans son rapport, que la proposition de modification du Code pénal élaborée par le ministère du Travail, qui visait à incriminer le travail forcé, n’a pas aboutie compte tenu du fait que le bureau général du conseil juridique du ministère de la Justice considère que le thème du travail forcé est déjà couvert par les dispositions de l’article 153 du Code pénal qui incriminent la traite des personnes. La commission relève que la Direction générale des droits fondamentaux et de la sécurité et santé du ministère du Travail ne partage pas cet avis et a élaboré un nouveau projet qui doit être soumis directement au ministère de la Justice. La commission note par ailleurs que, dans ses observations, la CUT insiste pour que la législation interdise le travail forcé et notamment tout type de relation de travail qui implique le paiement d’une dette par le travail et conduit à la servitude pour dettes. Le syndicat souligne également que certains éléments qui entrent dans le processus d’imposition de travail forcé des communautés indigènes dans la coupe du bois doivent faire l’objet de réglementation.
La commission rappelle à cet égard que le travail forcé, tel que défini par la convention, est une notion plus vaste que la traite des personnes et il importe, compte tenu notamment du principe de l’interprétation stricte de la loi pénale, que les juridictions nationales disposent de normes précises. Par ailleurs, les spécificités du mode opératoire de la traite des personnes ne se retrouvent pas automatiquement dans les autres formes de travail forcé, et notamment la servitude pour dettes ou certaines formes d’exploitation au travail des communautés indigènes. Par conséquent, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que la proposition législative du ministère du Travail d’inclure dans le Code pénal l’infraction de travail forcé en tant que délit autonome permettant de réprimer toutes les formes de travail forcé et prévoir les sanctions adaptées à la gravité des faits, puisse être adoptée dans les plus brefs délais, comme cela est prévu dans le plan opérationnel 2012-13 du PNLCTF.
Se référant à sa précédente observation, la commission note qu’un projet de modification de la réglementation concernant l’enregistrement des agences privées de placement a été élaboré qui prévoit notamment d’annuler l’inscription au Registre national des entreprises qui auraient participé, permis, ou seraient intervenues dans la réalisation des délits de traite des personnes ou travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’état d’avancement de ce projet.
c) Diagnostic. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement se réfère à différentes initiatives de la Direction générale des droits fondamentaux et de la sécurité et santé du ministère du Travail demandant à certains ministères, autorités chargées de recevoir les plaintes et autorités régionales des informations sur les zones et lieux où sévissent des pratiques de travail forcé en vue de leur compilation et analyse. Certaines de ces données ont déjà été transmises à l’inspection du travail afin qu’elle définisse une campagne d’inspection. La commission relève que le plan opérationnel 2012-13 consacre un volet à l’obtention d’informations sur le travail forcé et la réalisation d’un diagnostic de la situation. La commission considère que l’obtention de données fiables sur l’ampleur et les caractéristiques des différentes pratiques de travail forcé existantes est essentielle et constitue un préalable indispensable à la planification des interventions publiques et à leur réussite. La commission encourage vivement le gouvernement à mener une étude qualitative et quantitative qui complétera les informations déjà disponibles sur les différentes pratiques de travail forcé de manière à pouvoir s’assurer que les mesures prévues dans le cadre du plan national ciblent l’ensemble des populations et des régions concernées et, le cas échéant, pouvoir les réorienter.
d) Inspection du travail. Se référant à la création du Groupe spécial de l’inspection du travail contre le travail forcé (GEIT), la commission a considéré que la spécialisation d’un groupe d’inspecteurs dans la lutte contre le travail forcé constituait un élément positif. Elle a toutefois relevé avec préoccupation que le GEIT ne semblait pas disposer des ressources financières pour mener à bien ses missions et a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires à cet égard. La commission note que le gouvernement se réfère au renforcement de l’inspection du travail par l’intégration de 46 nouveaux inspecteurs auxiliaires et au transfert d’inspecteurs du travail vers les régions pour renforcer les moyens d’action des gouvernements régionaux à cet égard. La commission note les statistiques fournies sur les visites d’inspection menées dans le domaine du travail forcé et observe que ces visites se sont concentrées sur deux régions, Lima et Madre de Dios, et que sur 64 visites menées entre 2007 et 2010 aucune n’a débouché sur l’identification de travailleurs en situation de travail forcé. Le gouvernement confirme à cet égard qu’aucune amende n’a été imposée sur la base de l’article 25 du règlement d’application de la loi générale de l’inspection du travail (décret suprême no 019-2006-TR), en vertu duquel le travail forcé, rétribué ou non, ainsi que la traite ou la captation de personnes à cette fin constituent des infractions très graves en matière de relations de travail et sont passibles d’une sanction administrative (amende).
La commission exprime sa préoccupation par l’absence d’informations sur les activités menées par le GEIT et sur les mesures prises par le gouvernement pour renforcer sa capacité d’action ainsi que par le fait qu’aucune infraction n’a pu être constatée. Ceci compte tenu du fait que des études ont permis d’identifier certaines régions où prévalent les pratiques de travail forcé ainsi que les processus d’imposition de ces pratiques. La commission relève que le plan opérationnel 2012-13 prévoit de «réactiver et renforcer le GEIT» en soulignant qu’il est nécessaire d’évaluer «les problèmes actuels du GEIT», de promouvoir des actions visant à renforcer sa capacité de mobilité sur le territoire en ciblant les régions de prévalence et en le dotant des ressources suffisantes. La commission rappelle le rôle essentiel que joue l’inspection du travail dans la lutte contre le travail forcé. Les visites d’inspection menées par le GEIT devraient non seulement permettre d’identifier les travailleurs victimes de travail forcé et les libérer de ces situations, mais également de disposer des éléments de preuve qui serviront à initier les poursuites civiles et pénales contre les auteurs de ces pratiques. Par conséquent, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures pour mettre à la disposition du GEIT du personnel et des ressources matérielles adéquates pour mener à bien ses missions sur l’ensemble du territoire national. Prière de préciser le nombre d’inspections menées, les situations de travail forcé identifiées et les suites judiciaires données aux infractions constatées.
e) Sensibilisation et prévention. La commission prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement au sujet des nombreuses activités de sensibilisation et de formation sur la problématique du travail forcé, menées tant par le ministère du Travail que par les autres ministères compétents dans la lutte contre le travail forcé. La commission relève en particulier qu’une grande partie de ces activités a ciblé les communautés indigènes ainsi que les autorités directement en charge de l’identification et de la répression des pratiques de travail forcé telles que l’inspection du travail ou la police. La commission encourage le gouvernement à continuer de développer les actions de sensibilisation de la population dans son ensemble et des catégories à risques ainsi que des activités de formation des autorités publiques en charge de la lutte contre le travail forcé.
2. Travail domestique dans des conditions de travail forcé. Se référant à ses précédents commentaires, la commission prend bonne note des mesures prises pour renforcer la protection des travailleuses domestiques et en particulier les activités destinées à sensibiliser ces travailleuses à leurs droits. La commission note également que le ministère de la Femme et du Développement social élabore un projet de loi visant à modifier la loi sur les travailleuses domestiques en vue de renforcer leurs droits et notamment leur garantir le droit à un contrat écrit, un temps de travail limité et une rémunération correspondant au salaire minimum vital. La commission espère que ce projet de loi pourra être adopté prochainement de manière à renforcer le régime juridique applicable aux travailleurs domestiques. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises, dans le cadre du plan national de lutte contre le travail forcé, pour protéger cette catégorie de travailleurs contre l’imposition de pratiques qui relèvent du travail forcé, leur apporter une assistance et leur permettre de faire valoir leurs droits et de dénoncer tout abus dont elles seraient victimes auprès des autorités compétentes.
3. Traite des personnes. La commission prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement sur les mesures prises pour lutter contre la traite des personnes dans le cadre des activités menées et coordonnées par le Groupe de travail multisectoriel permanent contre la traitre des personnes (GTMPTP) en ce qui concerne en particulier la prévention, la formation et la protection des victimes ainsi que celles menées par la division de la lutte contre la traite des personnes établie au sein de la Direction de l’investigation criminelle de la police nationale. La commission note en particulier que la ligne téléphonique concernant la traite des personnes accessible, 24 heures sur 24, reçoit un nombre important d’appels (1 268 en 2010 et 1 024 en 2011) et que, dans le cadre de ces appels, les professionnels qui prodiguent assistance et conseil aux victimes ont pu transmettre un certain nombre de plaintes aux autorités compétentes, qui ont fait l’objet d’enquêtes et de procédures judiciaires (31 en 2010 et 36 en 2011). En outre, grâce au système d’enregistrement des statistiques du délit de traite des personnes et délits assimilés (RETA), qui compile les données sur les plaintes, enquêtes policières, lieux, faits et victimes de la traite, des contrôles et des activités de formation ont pu être menés de manière ciblée. Enfin, il ressort des chiffres de l’Observatoire de la criminalité au sujet des 228 plaintes déposées pour le délit de traite des personnes que, sur les 396 victimes concernées, la majorité sont des mineurs (65,3 pour cent), de sexe féminin (81,6 pour cent) et de nationalité péruvienne (92,4 pour cent).
Notant que les informations détaillées et complètes communiquées par le gouvernement sur les mesures qu’il prend pour lutter contre la traite des personnes témoignent de son engagement à combattre ce fléau, la commission l’encourage à poursuivre sur cette voie et le prie de continuer à fournir des informations à cet égard. La commission souhaiterait que le gouvernement indique la manière dont les activités menées pour lutter contre la traite des personnes se coordonnent avec celles menées dans le cadre du plan national de lutte contre le travail forcé, ainsi que les mesures prises pour renforcer la collaboration entre les différentes institutions chargées de lutter contre les différentes pratiques de travail forcé au sein notamment de l’inspection du travail et des autorités de police et de poursuite.
Article 25. Sanctions pénales efficaces et strictement appliquées. Dans ses précédents commentaires, la commission a souligné que les pratiques de travail forcé au Pérou prennent différentes formes (pratiques analogues à l’esclavage ou servitude pour dettes des populations indigènes, traite des personnes, exploitation des travailleurs domestiques) et que l’absence de dispositions pénales spécifiques réprimant et sanctionnant le travail forcé semblait faire obstacle à l’initiation de poursuites judiciaires à l’encontre des auteurs de ces pratiques. Ceci à l’exception de la traite des personnes dont les éléments constitutifs sont précisément définis aux articles 153 et 153A du Code pénal. A cet égard, la commission relève avec intérêt, d’après les informations communiquées par le gouvernement, qu’un nombre important de procédures judiciaires ont été engagées dans les affaires de traite des personnes et des sanctions pénales ont pu être prononcées à l’encontre des auteurs. Tel n’est pas le cas des autres formes de travail forcé dont les auteurs ne semblent pas être sanctionnés. Dans ces circonstances, la commission se réfère à ses commentaires ci-dessus sur la nécessité de compléter la législation pénale de manière à incriminer spécifiquement le travail forcé et à en définir les éléments constitutifs de telle sorte que les autorités de police et de poursuite puissent disposer d’une base légale qui leur permette de mener les enquêtes adéquates et initier des procédures judiciaires contre les auteurs des différentes formes de travail forcé existant au Pérou. A cet égard, la commission rappelle que, pour faire reculer le travail forcé, il est indispensable que les auteurs de ces pratiques se voient infliger des sanctions pénales suffisamment dissuasives, conformément à l’article 25 de la convention. S’agissant de la traite des personnes, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’application pratique des articles 153 et 153A du Code pénal.
La commission encourage le gouvernement à continuer de se prévaloir de l’assistance technique du Bureau.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Travail pénitentiaire pour des entreprises privées. Dans ses précédents commentaires, la commission avait demandé au gouvernement d’indiquer la rémunération perçue par les détenus lorsqu’ils travaillent pour le compte d’entreprises privées. En réponse, le gouvernement fournit des informations sur les différentes modalités de réalisation du travail et sur la répartition du produit du travail. La commission note ces informations et prie une nouvelle fois le gouvernement d’indiquer comment, et en vertu de quelles dispositions, est fixé le niveau des rémunérations que les entreprises privées doivent verser pour le travail réalisé par les personnes condamnées. Prière également de communiquer copie du décret no 023‑2001‑JUS réglementant le Code d’exécution des peines.

Prestation de services à la communauté. En l’absence de réponse du gouvernement, la commission le prie à nouveau de communiquer la liste des entités privées d’utilité sociale (entités habilitées) qui sont mentionnées aux articles 34 du Code pénal, 119 du Code d’exécution pénale et 4 de la loi no 27030 d’exécution des peines de prestation de services à la communauté.

Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

La commission prend note du rapport du gouvernement, des observations de la Confédération nationale des institutions d’entreprises privées (CONFIEP) transmises par le gouvernement avec son rapport ainsi que des observations formulées sur l’application de la convention par la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) qui ont été communiquées au gouvernement le 16 novembre 2009.

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. 1. Travail forcé des communautés indigènes. Depuis de nombreuses années, la commission examine la situation des membres des communautés indigènes victimes de pratiques de travail forcé (esclavage, servitude pour dettes ou servitude proprement dite), en particulier dans des secteurs comme l’agriculture, l’élevage et l’exploitation forestière. Elle s’est notamment référée à la région de l’Atalaya, à la cueillette de châtaignes à Madre de Dios ou au travail forcé sévissant dans les activités illégales de taille du bois dans la région d’Ucayali. La commission a noté la création en 2007 de la Commission nationale pour la lutte contre le travail forcé et l’approbation du Plan national de lutte contre le travail forcé, dont l’objectif est de traiter des questions structurelles (conditions de vulnérabilité des victimes) et de prendre les mesures coordonnées pour résoudre les situations concrètes de travail forcé. La commission a pris note des différentes composantes de ce plan d’action et a demandé au gouvernement de fournir des informations sur leur mise en œuvre et sur les résultats obtenus. La commission relève à cet égard que la CGTP considère que les mesures prises pour mettre en œuvre ce plan sont insuffisantes. La CONFIEP, quant à elle, formule une appréciation favorable sur la manière dont le gouvernement lutte contre le travail forcé.

Mesures législatives. L’un des objectifs du plan national est de disposer d’une législation conforme aux normes internationales en matière de liberté du travail et donnant une base légale à la lutte contre le travail forcé. Le gouvernement a précédemment reconnu que la législation ne contient pas de dispositions spécifiques qui englobent intégralement la question du travail forcé, et qu’une actualisation et une harmonisation de la législation pénale, civile et du travail sur cette question étaient nécessaires. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique qu’il n’existe pas encore de norme qui incrimine spécifiquement le travail forcé et en définit les éléments constitutifs mais une proposition législative est à l’étude qui devrait être prochainement examinée par le congrès. Le gouvernement précise cependant que d’autres dispositions de la législation nationale protègent le droit à la liberté du travail, comme par exemple l’article 168 du Code pénal, qui punit d’une peine de prison toute personne qui oblige ou menace une personne à réaliser un travail sans percevoir la rémunération correspondante, ou l’article 153, qui incrimine et définit les éléments constitutifs de la traite des personnes. Le gouvernement considère que, compte tenu du fait que cet article définit les éléments constitutifs du délit de traite des personnes en se référant à la finalité de celle-ci, à savoir l’exploitation, les victimes de travail forcé pourraient bénéficier de la protection et de l’assistance garanties sur la base de cet article. Le gouvernement conclut en espérant que le dispositif normatif pourra être prochainement complété par une proposition de loi qui permettra d’obtenir l’adéquation de la législation nationale avec la convention.

La commission prend note de ces informations. Elle rappelle à cet égard que le travail forcé, tel qu’il résulte de la convention, est une notion plus vaste que la traite des personnes, et qu’il importe que les juridictions nationales disposent de normes précises, compte tenu notamment du principe de l’interprétation stricte de la loi pénale. Par conséquent, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que la proposition législative à laquelle il se réfère aboutisse à l’adoption d’une disposition pénale incriminant spécifiquement le travail forcé et définissant les éléments constitutifs du travail forcé de manière à couvrir l’ensemble des pratiques de travail forcé qui existent dans le pays. Enfin, se référant à sa précédente observation, la commission souhaiterait que le gouvernement indique s’il a été donné suite à la proposition du plan national d’élaborer un projet de loi destinée à réglementer les agences privées de placement et les systèmes de recrutement de main-d’œuvre, en mettant l’accent sur la prévention du travail forcé et en les incluant dans le champ de compétence de l’inspection du travail.

Inspection du travail. La commission a noté que le plan national prévoit de renforcer l’inspection du travail, notamment par la création d’unités d’inspection mobiles dans des zones géographiques d’accès difficile et par l’établissement de mécanismes pour recevoir les plaintes et les transmettre aux entités correspondantes. Le gouvernement indique qu’un groupe spécial de l’inspection du travail contre le travail forcé (GEIT) a été constitué en août 2008. Ce groupe, composé de cinq inspecteurs du travail et dirigé par un superviseur, a réalisé sa première mission entre septembre et décembre 2008. Cette mission visait à contrôler l’activité de la taille du bois dans le département de Loreto, d’une part, et à développer les capacités d’investigation du GEIT, d’autre part. Le groupe a conclu que, dans ce département, le système de l’«habilitación» demeure un mode largement généralisé de recrutement de la main-d’œuvre métisse et indigène dans l’activité extractive du bois. La seconde mission consistait en un plan opérationnel d’inspection des entreprises exportatrices de la filière bois et, en particulier, auprès des concessions forestières éloignées des villes. Le gouvernement précise que les difficultés financières ont empêché le GEIT de se déplacer dans ces zones et communautés éloignées. Il indique également que le GEIT a mené des enquêtes préliminaires sur des situations de travail forcé dans les activités agro-industrielle et minière.

La commission prend note de ces informations. Elle note également que, dans ses commentaires, la CGTP souligne que le GEIT est établi à Lima, la capitale, et non dans la zone où l’occurrence du travail forcé est importante, à savoir dans la forêt amazonienne; ceci rend difficilement réalisables les objectifs fixés par le plan d’action. La commission considère que la spécialisation d’un groupe d’inspecteurs dans la lutte contre le travail forcé constitue un élément positif. Elle relève toutefois avec préoccupation que le GEIT ne semble pas disposer des ressources financières pour mener à bien ses missions. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour s’assurer que le GEIT dispose des ressources humaines et matérielles adéquates pour se déplacer de manière rapide, efficace et sûre sur l’ensemble du territoire national. Prière de préciser le nombre d’inspections menées, les situations de travail forcé constatées et les suites judiciaires données aux infractions constatées.

Sensibilisation et prévention. La commission prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement au sujet des mesures prises pour informer et sensibiliser à la problématique du travail forcé. Elle relève en particulier le projet de stratégie de communication qui, en l’absence de financement, n’a pas encore été mis en œuvre. Elle note également la page Web du ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi consacrée au travail forcé; les actions décentralisées menées par le ministère de l’Education pour diffuser le plan d’action et mener des actions de sensibilisation et de prévention auprès des enseignants, des étudiants et des pères de famille en privilégiant les zones rurales où la population est plus vulnérable; la diffusion de reportages télévisés consacrés au travail forcé sur la chaîne de l’Etat; les actions de sensibilisation et de formation menées auprès des écoles de police et les fonctionnaires des institutions liées à la problématique du travail forcé. La commission encourage le gouvernement à continuer de développer ce type d’actions de sensibilisation et le prie de communiquer des informations à cet égard. Elle souhaiterait également que le gouvernement indique les mesures prises pour mieux identifier les victimes et connaître leur nombre et s’il a mis en œuvre les propositions du plan national visant à mener des études sur le travail forcé dans certains secteurs et à établir périodiquement des diagnostics sur la situation du travail forcé.

2. Travail domestique dans des conditions de travail forcé. La commission avait pris note des allégations de pratiques de travail forcé dont seraient victimes certaines travailleuses domestiques. Elle note les informations fournies par le gouvernement sur les nombreuses activités menées pour que les travailleuses domestiques connaissent leurs droits, que ce soit à travers des ateliers de formation ou des campagnes d’information (distribution de dépliants, affichages, programmes télévisés). La commission relève que, dans ses observations, la CGTP confirme que de nombreuses travailleuses domestiques subissent des violations de leurs droits qui relèvent du travail forcé. Le syndicat se réfère à des travailleuses exploitées, obligées de travailler plus de dix-huit heures par jour, sans percevoir de rémunération, ou alors une rémunération en nature, et privées de leur liberté de mouvement ou de leurs papiers d’identité. La CGTP souligne qu’il est nécessaire d’adopter des modifications à la législation et de disposer d’un diagnostic quantitatif et qualitatif du travail forcé dans ce secteur car, en l’absence d’une telle évaluation, il est difficile de lutter contre cette forme de travail forcé. En outre, l’Etat devrait mettre à disposition des travailleuses domestiques des outils leur permettant de faire valoir leurs droits. La commission veut croire que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des travailleuses domestiques contre l’imposition de pratiques qui relèvent du travail forcé, tant sur le plan législatif que dans la pratique, en prévoyant des mesures destinées à leur apporter une assistance et leur permettre de faire valoir leurs droits et dénoncer tout abus dont elles seraient victimes.

3. Traite des personnes. En plus de l’adoption des dispositions du Code pénal qui incriminent et définissent les éléments constitutifs de la traite des personnes auxquelles elle s’est référée ci-dessus, la commission prend note de la création de la Division de la lutte contre la traite des personnes au sein de la Direction de l’investigation criminelle de la police nationale. Le gouvernement indique que cette division travaille avec le GEIT sur les plaintes de traite des personnes, aux fins de l’exploitation de leur travail, déposées sur la ligne téléphonique créée à cette fin par le ministère de l’Intérieur. Le gouvernement se réfère également au système d’enregistrement et de statistiques du délit de traite des personnes et délits assimilés qui établit des indicateurs sur les plaintes, enquêtes, lieux, faits, identification des personnes et typologie de la traite. En outre a été mise en place une ligne téléphonique accessible vingt-quatre heures sur vingt‑quatre et sept jours sur sept avec des professionnels qui prodiguent assistance et conseil aux victimes de la traite et, le cas échéant, peuvent transmettre des plaintes aux services de police. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour lutter contre la traite des personnes et, en particulier, pour protéger et assister les victimes. Prière de fournir des informations sur les résultats obtenus par la Division de la lutte contre la traite des personnes de la police nationale, sur les difficultés rencontrées et sur les mesures prises pour les surmonter.

Article 25. Sanctions pénales efficaces et strictement appliquées. La commission avait noté que l’absence de dispositions pénales spécifiques réprimant et sanctionnant le travail forcé empêchait de donner effet à l’article 25 de la convention aux termes duquel le fait d’exiger illégalement du travail forcé doit être passible de sanctions pénales, et ces sanctions doivent être réellement efficaces et strictement appliquées. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement fournit des informations sur certains mécanismes mis en place pour permettre aux victimes de dénoncer leur situation (ligne téléphonique gratuite pour la traite des personnes ou dénonciation en ligne sur la page Web du ministère du Travail consacrée au travail forcé). La commission relève que le gouvernement ne fournit aucune information sur l’initiation de poursuites judiciaires à l’encontre de personnes qui auraient été inculpées d’avoir imposé du travail forcé.

La commission souligne que, comme le montre les développements qui précèdent, les pratiques de travail forcé au Pérou prennent différentes formes (y compris les pratiques analogues à l’esclavage ou la servitude pour dettes des populations indigènes, l’exploitation des travailleuses domestiques), et il semble que la législation actuellement en vigueur ne permette pas de sanctionner les auteurs de ces pratiques. La commission relève que la CGTP souligne que, lorsque des situations de travail forcé sont identifiées, l’absence d’incrimination pénale sur la base de laquelle effectuer les plaintes empêche de sanctionner les coupables. Dans ces circonstances, la commission se réfère à ses commentaires ci-dessus sur la nécessité d’adopter une disposition pénale incriminant spécifiquement le travail forcé et définissant les éléments constitutifs, sur la base de laquelle les autorités de police et de poursuite pourront initier les procédures judiciaires contre les auteurs des différentes formes de travail forcé existant au Pérou. S’agissant de la traite des personnes, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application pratique des articles 153 et 153A du Code pénal et de communiquer copie des décisions de justice pertinentes. Prière d’indiquer également si les juridictions pénales ont prononcé des décisions sur la base de l’article 168 du Code pénal susmentionné.

Enfin, la commission note que, selon l’article 25 du règlement d’application de la loi générale de l’inspection du travail (décret suprême no 019-2006-TR), le travail forcé, rétribué ou non, ainsi que la traite ou la captation de personnes à cette fin constituent une infraction très grave en matière de relations de travail et sont passibles d’une sanction administrative (amende). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les sanctions infligées sur la base de cette disposition en précisant leur nombre et leur montant.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Travail pénitentiaire pour des entreprises privées. Dans sa demande directe précédente, la commission avait demandé au gouvernement d’indiquer la rémunération perçue par les détenus lorsqu’ils travaillent pour le compte d’entreprises privées. La commission note que le rapport du gouvernement ne contient pas les informations demandées et espère que le gouvernement les communiquera dans son prochain rapport.

Prestation de services à la communauté. La commission avait demandé au gouvernement de communiquer la liste des entités privées d’utilité sociale (entités habilitées) qui sont mentionnées aux articles 34 du Code pénal, 119 du Code d’exécution pénale et 4 de la loi no 27030. La liste n’ayant pas été jointe au rapport, la commission prie le gouvernement de l’envoyer avec son prochain rapport.

Observation (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Travail forcé des communautés indigènes. Dans des observations qu’elle formule depuis de nombreuses années, la commission s’est référée à l’existence de pratiques de travail forcé (esclavage, servitude pour dettes ou servitude proprement dite) auxquelles seraient soumis des membres des communautés indigènes, en particulier dans la région de l’Atalaya, dans des secteurs comme l’agriculture, l’élevage et l’exploitation forestière. Dans son observation précédente, la commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur la validation et la mise en œuvre du plan d’action pour l’élimination du travail forcé.

Mesures prises par le gouvernement. La commission prend note de la création de la Commission nationale pour la lutte contre le travail forcé, en vertu du décret suprême no 001-2007-TR du 13 janvier 2007, dont l’objectif est d’être l’instance de coordination permanente des politiques et actions en matière de travail forcé dans les différents secteurs, tant à l’échelle nationale que régionale. La commission, présidée par le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi, réunit entre autres des représentants des ministères du Travail, de la Santé, de l’Education et de l’Agriculture et des représentants des organisations d’employeurs et de travailleurs. La commission note avec intérêt que le décret suprême no 009-2007-TR porte approbation du Plan national de lutte contre le travail forcé dont l’objectif est à court et à moyen terme, d’un côté, de traiter des questions structurelles (conditions de vulnérabilité des victimes) et, de l’autre, de prendre à court terme les mesures coordonnées pour résoudre les situations concrètes de travail forcé. Le plan comporte des mesures législatives destinées à incriminer spécifiquement le travail forcé et à sanctionner ces pratiques; des mesures visant à renforcer les services de l’inspection et à leur dispenser une formation; la réalisation d’enquêtes dans les secteurs où des éléments indiquent l’existence du travail forcé; le développement d’une stratégie de communication pour informer la population sur le problème du travail forcé, et l’informatisation des plaintes pour travail forcé.

Mesures législatives.La commission note que l’un des objectifs du plan national (composante III) est de disposer d’une législation conforme aux normes internationales en matière de liberté du travail et de règles donnant une base légale à la lutte contre le travail forcé.

La commission prend note des actions prévues dans le plan national et espère que le gouvernement fournira des informations sur les progrès réalisés en ce qui concerne:

–           l’élaboration et l’harmonisation de la législation relative à la lutte contre le problème du travail forcé;

–           l’élaboration du projet de loi destinée à réglementer les agences privées de placement et les systèmes de recrutement de main-d’œuvre, en plaçant l’accent sur la prévention du travail forcé et sur leur inclusion dans le champ de compétence de l’inspection du travail;

–           l’élaboration d’une étude sur la viabilité de normes réglementant spécifiquement le travail dans des activités économiques pour lesquelles des éléments indiquent l’existence du travail forcé;

–           les services de défense juridique gratuite pour les citoyens qui ont été victimes du travail forcé et le déclenchement d’actions pénales contre les auteurs actifs du délit de travail forcé.

Inspection. La commission prend note du rôle prépondérant que l’inspection du travail joue dans la lutte contre le travail forcé, et des mesures prévues dans le plan pour le renforcement institutionnel de l’inspection, entre autres:

–           la création d’unités d’inspection mobiles dans des zones géographiques d’accès difficile où ont été identifiées des situations de travail forcé;

–           l’établissement de mécanismes pour recevoir les plaintes et les transmettre aux entités correspondantes;

–           l’incorporation d’un module sur le travail forcé dans les plans de formation des agents de l’inspection du travail;

–           l’inclusion dans le programme d’études de l’école de police de la question des droits fondamentaux au travail.

La commission note que, parmi les premières initiatives envisagées, un atelier binational Pérou-Brésil se tiendra à Pucallpa-Ucayali, auquel participeront des spécialistes du groupe d’inspection mobile du Brésil. L’objectif principal de l’atelier est le développement d’activités concrètes dans la région de Ucayali pour lutter contre le travail forcé dans les activités illégales de taille du bois. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les conclusions qui ont été formulées au cours de l’atelier binational Pérou-Brésil et sur les autres initiatives qui ont été prévues dans le plan en ce qui concerne les services d’inspection.

Enquêtes et statistiques. Parmi les initiatives prévues pour permettre d’identifier les groupes touchés et connaître le nombre des victimes, le plan prévoit:

–           de mener des enquêtes sur le travail forcé dans certains secteurs où des éléments indiquent l’existence du travail forcé, par exemple la cueillette de châtaignes à Madre de Dios, le travail domestique, la pêche et les activités minières artisanales, l’agriculture et divers secteurs de production dans toute l’Amazonie péruvienne;

–           d’établir périodiquement des diagnostics sur l’existence ou sur les éléments indiquant l’existence du travail forcé, compte étant tenu en général des questions hommes/femmes.

En ce qui concerne le travail domestique dans des conditions de travail forcé, la commission prend note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres, désormais la Confédération syndicale internationale (CSI), qui ont été communiqués au gouvernement en septembre 2006. Dans ses commentaires, la CSI allègue que l’on trouve dans le secteur du travail domestique des éléments constitutifs de pratiques de travail forcé. Les femmes qui forment la majorité des travailleurs de ce secteur vivent et travaillent au domicile de l’employeur. Souvent, ce dernier confisque leurs documents d’identité, ce qui les empêche de quitter leur emploi. Dans de nombreux cas, elles ne reçoivent pas de rémunération car elles ont des dettes envers l’employeur qui déduit de leur salaire les sommes correspondant à l’alimentation, au logement, aux frais médicaux et aux éventuels dommages causés par la travailleuse, qui doit alors continuer de travailler sans être rémunérée pour couvrir ces coûts.

La commission espère que le gouvernement fournira des informations sur les enquêtes qui ont été menées dans les secteurs visés par le plan national et, en particulier, au sujet de la situation des travailleurs domestiques et des allégations de la CSI.

Article 25. Sanctions en cas d’imposition de travail forcé. Dans son observation précédente, la commission avait demandé au gouvernement d’indiquer le nombre de cas de travail forcé dénoncés, l’évolution du traitement de ces cas, et en particulier la proportion de plaintes ayant débouché sur des procédures pénales, ainsi que le nombre de condamnations prononcées.

Dans son rapport, le gouvernement indique que la législation ne contient pas de dispositions spécifiques qui englobent intégralement la question du travail forcé. Par conséquent, l’Etat devra actualiser et harmoniser la législation pénale, civile et du travail sur cette question. En outre, le plan national prévoit l’établissement de mécanismes de présentation de plaintes et, actuellement, le ministère du Travail et les organisations non gouvernementales développent des systèmes informatisés à cette fin. Le gouvernement ajoute qu’il ne dispose pas d’information sur les procédures pénales engagées ou les condamnations prononcées pour travail forcé.

La commission rappelle que, conformément à l’article 25 de la convention, le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire est passible de sanctions pénales et tout Membre ratifiant la convention a l’obligation de s’assurer que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées. La commission note que l’absence de dispositions spécifiques dans la législation pénale réprimant et sanctionnant le travail forcé empêche de donner effet à cette disposition de la convention. Elle a en outre pour conséquence de laisser impunis les responsables de l’imposition de travail forcé. De plus, les mesures prévues dans le plan national au sujet de la création de mécanismes de présentation de plaintes ne pourront être appliquées en l’absence de base légale permettant d’incriminer les pratiques de travail forcé.

La commission espère que le gouvernement prendra rapidement les mesures nécessaires pour incriminer et sanctionner spécifiquement dans la législation pénale les pratiques de travail forcé. Dans cette attente, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mécanismes de présentation de plaintes qui ont été créés et, le cas échéant, sur les plaintes qui ont été présentées en application des dispositions actuelles de la législation nationale.

La commission prend dûment note des mesures prises par le gouvernement pour éliminer le travail forcé. Ces mesures, qui constituent certes un premier pas important, doivent être renforcées et déboucher sur une action systématique et proportionnée à l’ampleur et à la gravité du problème. L’orientation du plan national d’action devrait permettre d’atteindre cet objectif. La commission espère que chacune des composantes du Plan national d’action de lutte contre le travail forcé seront mises en œuvre efficacement, et que le gouvernement pourra communiquer des informations dans son prochain rapport sur les progrès réalisés et les résultats obtenus.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

La commission prend note des informations fournies par le gouvernement au sujet des conséquences que le tremblement de terre d’août dernier a eues sur la capacité du gouvernement de soumettre ses rapports. Elle espère qu’un rapport sera transmis pour examen lors de sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans sa précédente demande directe, qui était conçue dans les termes suivants:

1. Travail pénitentiaire pour des entreprises privées. La commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour garantir que les détenus puissent donner leur consentement lorsqu’ils réalisent un travail pour le compte de particuliers et sur les conditions de travail pour le compte d’entreprises privées.

La commission prend note des indications fournies par l’Institut national pénitentiaire que le gouvernement a communiquées dans son rapport, selon lesquelles, pour toutes les tâches réalisées dans des établissements pénitentiaires, le consentement et l’acceptation expresse des détenus sont nécessaires. Une demande formelle dans ce sens doit être faite aux détenus intéressés.

A propos des conditions de travail, la commission demande au gouvernement d’indiquer la rémunération que les détenus reçoivent lorsqu’ils travaillent pour le compte d’entreprises privées.

2. Prestation de services à la communauté. La commission prend note des articles 34 du Code pénal et 119 du Code d’exécution pénale qui portent sur la peine de prestation de services à la communauté. A cet égard, la commission note que toute personne condamnée à la peine susmentionnée peut être tenue de réaliser des tâches pour des entités juridiques à caractère privé. La commission rappelle que l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention interdit expressément de concéder ou de mettre à la disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées les personnes qui ont été condamnées. L’exception prévue dans cette disposition de la convention ne s’étend pas au travail effectué pour le compte d’entreprises privées d’utilité sociale, même dans le cas où ces entités n’ont pas de but lucratif. Toutefois, les peines comportant du travail pour le compte de ces entités peuvent être imposées si le condamné le demande ou y consent librement.

La commission note qu’en vertu de la loi no 27030 le registre des entités habilitées à recevoir la prestation de services à la communauté a été créé, et que l’inscription est effectuée à la demande de ces entités. Le registre doit contenir les informations nécessaires pour déterminer les activités que ces entités déploient, ainsi que les travaux qui doivent être réalisés dans le cadre de la prestation de services.

La commission demande au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises ou envisagées pour que les personnes condamnées à la peine de prestations de services à la communauté ne soient pas concédées ou mises à la disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées sans leur consentement. La commission demande au gouvernement de communiquer la liste des entités privées d’utilité sociale (entités habilitées) qui sont mentionnées aux articles 34 du Code pénal, 119 du Code d’exécution pénale et 4 de la loi no 27030.

Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

La commission prend note des informations fournies par le gouvernement au sujet des conséquences que le tremblement de terre d’août dernier a eues sur la capacité du gouvernement de soumettre ses rapports. Elle espère qu’un rapport sera transmis pour examen lors de sa prochaine session et qu’il contiendra des informations complètes sur les points soulevés dans son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention.Travail forcé des communautés indigènes. Dans des observations qu’elle formule depuis de nombreuses années, la commission s’est référée à l’existence de pratiques de travail forcé (esclavage, servitude pour dettes ou servitude proprement dite) auxquelles seraient soumis des membres des communautés indigènes, en particulier dans la région de l’Atalaya, dans des secteurs comme l’agriculture, l’élevage et l’exploitation forestière.

Dans son observation de 1993, la commission avait pris note du rapport final de la commission multisectorielle instituée en vertu de la résolution 083-88-PCM et composée de représentants des ministères du Travail, de la Justice et de l’Agriculture, et de l’Institut péruvien des questions indigènes – rapport communiqué par le gouvernement. Le rapport avait établi que les communautés indigènes d’Atalaya qualifiées de «captives» sont réduites à une situation de servitude à l’intérieur d’exploitations agricoles ou forestières, grandes ou moyennes, et constituent une main-d’œuvre gratuite ou semi-gratuite, dans le cadre du système de «habilitación» ou «enganche». Dans ce système, le patron fournit à l’indigène, à titre d’avance, des instruments de travail, des aliments ou de l’argent pour que ce dernier puisse extraire du bois et ainsi, en théorie, rembourser sa dette initiale et tirer un revenu. Astreints à payer la dette initiale plus les intérêts, les indigènes restent définitivement prisonniers du cercle vicieux de l’exploitation et de la misère. Selon le rapport, 17 exploitations ont été dénoncées pour avoir comme mode de relation de travail l’esclavage et la servitude. A propos des conditions de travail, le rapport indiquait que les indigènes travaillent de dix à douze heures par jour et, qui plus est, ne perçoivent pas le salaire minimum vital et ne sont pas rémunérés pour les heures supplémentaires qu’ils effectuent. De plus, les dispositions de la législation du travail relatives à la sécurité sociale et à la sécurité et l’hygiène ne sont pas respectées. Le rapport signalait aussi la difficulté ou l’impossibilité, pour les indigènes, de se déplacer librement à l’extérieur de l’exploitation ou du campement et dénonçait l’emprisonnement pour dettes dans des cachots improvisés dans l’enceinte des exploitations. Le rapport concluait que la situation dans la région d’Atalaya nécessitait une action urgente de l’Etat.

En 1998, la commission avait pris note des commentaires de la Confédération mondiale du travail (CMT) qui faisait aussi état du travail forcé auquel étaient soumises les communautés indigènes Ashaninka, dans les conditions susmentionnées.

Dans son observation de 2003, la commission, prenant note des indications du gouvernement selon lesquelles des sanctions administratives et pénales avaient été infligées aux responsables de l’imposition de travail forcé, avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur le nombre de plaintes déposées, sur les procédures en cours et de communiquer copie des décisions judiciaires sanctionnant l’imposition de travail forcé.

La commission prend note du document intitulé «Le travail forcé dans l’extraction du bois en Amazonie péruvienne», publié en 2004 dans le cadre du Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé. Ce document, que le gouvernement a validé, confirme les allégations convergentes relatives à l’existence de travail forcé, principalement dans les travaux d’extraction illicite du bois, dans diverses régions du bassin amazonique péruvien. Actuellement, deux des départements les plus durement touchés par ce type de relation de travail sont Ucayali et Madre de Dios. Le nombre de personnes dans cette situation serait d’environ 33 000, pour la plupart originaires des différents groupes ethniques de l’Amazonie péruvienne. Le document confirme également la pratique du système de «habilitación-enganche» et décrit la situation des travailleurs qui se trouvent dans les zones proches des lieux d’habitation des communautés indigènes et à l’intérieur des camps d’extraction du bois. Dans des cas extrêmes, moins fréquents, des indigènes sont capturés et contraints à travailler dans les exploitations de bois, mais la plupart de ces cas relèvent des deux situations suivantes.

La première situation relevant du système de «habilitación» est celle dans laquelle le travailleur qui coupe le bois est séparé de l’industriel forestier qui finance l’activité en recourant à plusieurs intermédiaires. L’avance (argent, produits manufacturés, etc.) est versée à une communauté indigène en échange d’une certaine quantité de bois qui doit être livrée pendant la saison d’extraction du bois ou à la fin de la coupe. Dans beaucoup de cas, la valeur monétaire du bois n’est pas précisée. C’est à partir du moment où une avance est donnée que commence le mécanisme d’endettement («enganche»). On trompe les travailleurs (on leur dit qu’ils ne réalisent pas les tâches qui étaient convenues) en sous-évaluant la quantité ou la qualité du bois qui a été coupé, de sorte que, pour pouvoir payer sa «dette», la communauté doit soit livrer davantage de bois soit envoyer d’autres travailleurs à l’exploitation forestière. Ainsi, la «dette» en cours peut servir à obliger, pendant des décennies ou des générations, des indigènes à travailler.

Dans la deuxième situation, il y a transfert de travailleurs à une exploitation forestière éloignée. D’une manière générale, les travailleurs sont amenés de Puno, Cuzco ou Puerto Maldonado. Dans l’exploitation forestière, ils doivent effectuer des achats (biens de subsistance, outils) dont le prix peut être de 100 à 200 pour cent supérieur à ceux qui sont pratiqués dans les localités urbaines. Il leur est donc impossible de payer ces achats. Lorsqu’ils essaient de s’enfuir de l’exploitation avant la fin de la saison de coupe, il peut être fait recours à la violence pour les en empêcher. A la fin de la récolte, les travailleurs ont des dettes supérieures à leur salaire et sont obligés de revenir l’année suivante pour payer leurs dettes en livrant davantage de bois.

Le document indique aussi que ce sont de grandes entreprises internationales, ou des groupes industriels forestiers puissants qui financent les activités d’extraction de bois.

Mesures prises par le gouvernement. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement, après avoir examiné le document «Le travail forcé dans l’extraction du bois dans l’Amazonie péruvienne», a indiqué qu’il s’engageait à prendre les mesures nécessaires pour éliminer le travail forcé. La commission prend note de la création de la Commission nationale intersectorielle pour l’élimination du travail forcé (résolution suprême no 028-2005-TR) qui vise à enquêter sur ce problème et à l’analyser en vue de l’élaboration d’un plan d’action. La commission note avec intérêt que le projet de plan d’action national pour l’élimination du travail forcé a été élaboré et que, en vertu de la résolution suprême no 056-2005, la phase de validation sociale a été approuvée et devra s’achever dans un délai de 90 jours ouvrables.

La commission observe que les graves problèmes qui persistent nécessitent des mesures énergiques et soutenues de la part des autorités. Elle espère que les mesures prises permettront de lutter efficacement contre les pratiques par lesquelles de nombreux travailleurs sont soumis au travail forcé. La commission espère également que le gouvernement fournira des informations sur la validation et la mise en œuvre du plan d’action pour l’élimination du travail forcé.

Article 25. Sanctions en cas d’imposition de travail forcé. La commission note que, en réponse à son observation précédente, le gouvernement indique qu’aucune plainte pour exaction de travail forcé n’a été enregistrée. Etant donné que l’existence de ces situations a été constatée, l’absence de sanction indique que le système judiciaire est incapable d’examiner ces pratiques et d’en sanctionner les coupables. La commission rappelle que, conformément à l’article 25 de la convention, le gouvernement a l’obligation de s’assurer que les sanctions pénales prises à l’encontre des personnes déclarées coupables d’avoir exigé illégalement du travail forcé sont réellement efficaces et strictement appliquées. La commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour garantir l’application de cet article de la convention. La commission veut croire que, dans son prochain rapport, le gouvernement indiquera le nombre de cas de travail forcé qui ont été dénoncés, l’évolution du traitement de ces cas et, en particulier, la proportion de plaintes qui ont débouché sur des poursuites pénales, ainsi que le nombre de condamnations qui ont été décidées.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un très proche avenir.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

1. Travail pénitentiaire pour des entreprises privées. La commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour garantir que les détenus puissent donner leur consentement lorsqu’ils réalisent un travail pour le compte de particuliers et sur les conditions de travail pour le compte d’entreprises privées.

La commission prend note des indications fournies par l’Institut national pénitentiaire que le gouvernement a communiquées dans son rapport, selon lesquelles, pour toutes les tâches réalisées dans des établissements pénitentiaires, le consentement et l’acceptation expresse des détenus sont nécessaires. Une demande formelle dans ce sens doit être faite aux détenus intéressés.

A propos des conditions de travail, la commission demande au gouvernement d’indiquer la rémunération que les détenus reçoivent lorsqu’ils travaillent pour le compte d’entreprises privées.

2. Prestation de services à la communauté. La commission prend note des articles 34 du Code pénal et 119 du Code d’exécution pénale qui portent sur la peine de prestation de services à la communauté. A cet égard, la commission note que toute personne condamnée à la peine susmentionnée peut être tenue de réaliser des tâches pour des entités juridiques à caractère privé. La commission rappelle que l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention interdit expressément de concéder ou de mettre à la disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées les personnes qui ont été condamnées. L’exception prévue dans cette disposition de la convention ne s’étend pas au travail effectué pour le compte d’entreprises privées d’utilité sociale, même dans le cas où ces entités n’ont pas de but lucratif. Toutefois, les peines comportant du travail pour le compte de ces entités peuvent être imposées si le condamné le demande ou y consent librement.

La commission note qu’en vertu de la loi no 27030 le registre des entités habilitées à recevoir la prestation de services à la communauté a été créé, et que l’inscription est effectuée à la demande de ces entités. Le registre doit contenir les informations nécessaires pour déterminer les activités que ces entités déploient, ainsi que les travaux qui doivent être réalisés dans le cadre de la prestation de services.

La commission demande au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises ou envisagées pour que les personnes condamnées à la peine de prestations de services à la communauté ne soient pas concédées ou mises à la disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées sans leur consentement. La commission demande au gouvernement de communiquer la liste des entités privées d’utilité sociale (entités habilitées) qui sont mentionnées aux articles 34 du Code pénal, 119 du Code d’exécution pénale et 4 de la loi no 27030.

Observation (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

1. Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Travail forcé des communautés indigènes. Dans des observations qu’elle formule depuis de nombreuses années, la commission s’est référée à l’existence de pratiques de travail forcé (esclavage, servitude pour dettes ou servitude proprement dite) auxquelles seraient soumis des membres des communautés indigènes, en particulier dans la région de l’Atalaya, dans des secteurs comme l’agriculture, l’élevage et l’exploitation forestière.

Dans son observation de 1993, la commission avait pris note du rapport final de la commission multisectorielle instituée en vertu de la résolution 083-88-PCM et composée de représentants des ministères du Travail, de la Justice et de l’Agriculture, et de l’Institut péruvien des questions indigènes, - rapport communiqué par le gouvernement. Le rapport avait établi que les communautés indigènes d’Atalaya qualifiées de «captives» sont réduites à une situation de servitude à l’intérieur d’exploitations agricoles ou forestières, grandes ou moyennes, et constituent une main-d’œuvre gratuite ou semi-gratuite, dans le cadre du système de «habilitación» ou «enganche». Dans ce système, le patron fournit à l’indigène, à titre d’avance, des instruments de travail, des aliments ou de l’argent pour que ce dernier puisse extraire du bois et ainsi, en théorie, rembourser sa dette initiale et tirer un revenu. Astreints à payer la dette initiale plus les intérêts, les indigènes restent définitivement prisonniers du cercle vicieux de l’exploitation et de la misère. Selon le rapport, 17 exploitations ont été dénoncées pour avoir comme mode de relation de travail l’esclavage et la servitude. A propos des conditions de travail, le rapport indiquait que les indigènes travaillent de dix à douze heures par jour et, qui plus est, ne perçoivent pas le salaire minimum vital et ne sont pas rémunérés pour les heures supplémentaires qu’ils effectuent. De plus, les dispositions de la législation du travail relatives à la sécurité sociale et à la sécurité et l’hygiène ne sont pas respectées. Le rapport signalait aussi la difficulté ou l’impossibilité, pour les indigènes, de se déplacer librement à l’extérieur de l’exploitation ou du campement et dénonçait l’emprisonnement pour dettes dans des cachots improvisés dans l’enceinte des exploitations. Le rapport concluait que la situation dans la région d’Atalaya nécessitait une action urgente de l’Etat.

En 1998, la commission avait pris note des commentaires de la Confédération mondiale du travail (CMT) qui faisait aussi état du travail forcé auquel étaient soumises les communautés indigènes Ashaninka, dans les conditions susmentionnées.

Dans son observation de 2003, la commission, prenant note des indications du gouvernement selon lesquelles des sanctions administratives et pénales avaient été infligées aux responsables de l’imposition de travail forcé, avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur le nombre de plaintes déposées, sur les procédures en cours et de communiquer copie des décisions judiciaires sanctionnant l’imposition de travail forcé.

La commission prend note du document intitulé «Le travail forcé dans l’extraction du bois en Amazonie péruvienne», publié en 2004 dans le cadre du Programme d’action spécial de l’OIT pour combattre le travail forcé. Ce document, que le gouvernement a validé, confirme les allégations convergentes relatives à l’existence de travail forcé, principalement dans les travaux d’extraction illicite du bois, dans diverses régions du bassin amazonique péruvien. Actuellement, deux des départements les plus durement touchés par ce type de relation de travail sont Ucayali et Madre de Dios. Le nombre de personnes dans cette situation serait d’environ 33 000, pour la plupart originaires des différents groupes ethniques de l’Amazonie péruvienne. Le document confirme également la pratique du système de «habilitación-enganche» et décrit la situation des travailleurs qui se trouvent dans les zones proches des lieux d’habitation des communautés indigènes et à l’intérieur des camps d’extraction du bois. Dans des cas extrêmes, moins fréquents, des indigènes sont capturés et contraints à travailler dans les exploitations de bois, mais la plupart de ces cas relèvent des deux situations suivantes.

La première situation relevant du système de «habilitación» est celle dans laquelle le travailleur qui coupe le bois est séparé de l’industriel forestier qui finance l’activité en recourant à plusieurs intermédiaires. L’avance (argent, produits manufacturés, etc.) est versée à une communauté indigène en échange d’une certaine quantité de bois qui doit être livrée pendant la saison d’extraction du bois ou à la fin de la coupe. Dans beaucoup de cas, la valeur monétaire du bois n’est pas précisée. C’est à partir du moment où une avance est donnée que commence le mécanisme d’endettement («enganche»). On trompe les travailleurs (on leur dit qu’ils ne réalisent pas les tâches qui étaient convenues) en sous-évaluant la quantité ou la qualité du bois qui a été coupé, de sorte que, pour pouvoir payer sa «dette», la communauté doit soit livrer davantage de bois soit envoyer d’autres travailleurs à l’exploitation forestière. Ainsi, la «dette» en cours peut servir à obliger, pendant des décennies ou des générations, des indigènes à travailler.

Dans la deuxième situation, il y a transfert de travailleurs à une exploitation forestière éloignée. D’une manière générale, les travailleurs sont amenés de Puno, Cuzco ou Puerto Maldonado. Dans l’exploitation forestière, ils doivent effectuer des achats (biens de subsistance, outils) dont le prix peut être de 100 à 200 pour cent supérieur à ceux qui sont pratiqués dans les localités urbaines. Il leur est donc impossible de payer ces achats. Lorsqu’ils essaient de s’enfuir de l’exploitation avant la fin de la saison de coupe, il peut être fait recours à la violence pour les en empêcher. A la fin de la récolte, les travailleurs ont des dettes supérieures à leur salaire et sont obligés de revenir l’année suivante pour payer leurs dettes en livrant davantage de bois.

Le document indique aussi que ce sont de grandes entreprises internationales, ou des groupes industriels forestiers puissants qui financent les activités d’extraction de bois.

Mesures prises par le gouvernement. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement, après avoir examiné le document «Le travail forcé dans l’extraction du bois dans l’Amazonie péruvienne», a indiqué qu’il s’engageait à prendre les mesures nécessaires pour éliminer le travail forcé. La commission prend note de la création de la Commission nationale intersectorielle pour l’élimination du travail forcé (résolution suprême no 028-2005-TR) qui vise à enquêter sur ce problème et à l’analyser en vue de l’élaboration d’un plan d’action. La commission note avec intérêt que le projet de plan d’action national pour l’élimination du travail forcé a été élaboré et que, en vertu de la résolution suprême no 056-2005, la phase de validation sociale a été approuvée et devra s’achever dans un délai de 90 jours ouvrables.

La commission observe que les graves problèmes qui persistent nécessitent des mesures énergiques et soutenues de la part des autorités. Elle espère que les mesures prises permettront de lutter efficacement contre les pratiques par lesquelles de nombreux travailleurs sont soumis au travail forcé. La commission espère également que le gouvernement fournira des informations sur la validation et la mise en œuvre du plan d’action pour l’élimination du travail forcé.

Article 25. Sanctions en cas d’imposition de travail forcé. La commission note que, en réponse à son observation précédente, le gouvernement indique qu’aucune plainte pour exaction de travail forcé n’a été enregistrée. Etant donné que l’existence de ces situations a été constatée, l’absence de sanction indique que le système judiciaire est incapable d’examiner ces pratiques et d’en sanctionner les coupables. La commission rappelle que, conformément à l’article 25 de la convention, le gouvernement a l’obligation de s’assurer que les sanctions pénales prises à l’encontre des personnes déclarées coupables d’avoir exigé illégalement du travail forcé sont réellement efficaces et strictement appliquées. La commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour garantir l’application de cet article de la convention. La commission veut croire que, dans son prochain rapport, le gouvernement indiquera le nombre de cas de travail forcé qui ont été dénoncés, l’évolution du traitement de ces cas et, en particulier, la proportion de plaintes qui ont débouché sur des poursuites pénales, ainsi que le nombre de condamnations qui ont été décidées.

2. Travail forcé des enfants dans les mines et les laveries d’or de Madre de Dios. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note des initiatives que le gouvernement avait prises pour mettre un terme aux migrations de populations rurales des départements de Cuzco et Puno en direction du département de Madre de Dios, migrations qui favorisent le phénomène du travail des enfants dans des centres miniers, dans des conditions assimilables à du travail forcé. La commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur toute autre mesure prise pour éliminer totalement le travail forcé de mineurs dans cette zone.

La commission note, d’après le rapport du gouvernement, que la Direction du travail et de la promotion de l’emploi de Madre de Dios a décidé de mener des opérations pour savoir si des enfants travaillent dans les différents centres aurifères du secteur informel qui se trouvent sur les rives des fleuves Inambari et Madre de Dios. Le gouvernement indique aussi que des actions sont envisagées dans la région des fleuves de Tambopata et de Malinoski.

S’agissant du travail forcé d’enfants, la commission note que le Pérou a ratifié la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, et qu’il a communiqué son premier rapport sur l’application de cette convention. Etant donné que l’article 3 a) de la convention no 182 dispose que l’expression «les pires formes de travail des enfants» comprend «toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire», la commission estime que les questions relatives au travail forcé d’enfants peuvent être examinées plus spécifiquement dans le cadre de la convention no 182. La protection des enfants est renforcée par le fait que la convention no 182 exige de tout Membre qui la ratifie de prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l’interdiction et l’élimination des pires formes de travail des enfants, et ce de toute urgence. Par conséquent, la commission renvoie le gouvernement aux commentaires qu’elle formule sous la convention no 182.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

La commission note que, selon l’article 4 de la loi sur le service militaire (loi no 27178), le service militaire a pour but d’instruire les Péruviens en âge d’accomplir leurs obligations militaires pour permettre leur participation efficace à la défense nationale et au développement du pays.

La commission rappelle que, en vertu de la convention, seuls les travaux ayant un caractère purement militaire sont exclus de son champ d’application. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les travaux accomplis par les personnes effectuant leur service militaire obligatoire.

Observation (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

1. Faisant suite à ses précédents commentaires relatifs à l’obligation des condamnés de travailler, la commission prend note avec satisfaction de la modification de l’article 65 du Code d’exécution des peines (loi no 27187) qui établit le caractère volontaire du travail effectué par des condamnés.

2. Se référant à ses précédents commentaires concernant des pratiques de travail forcé auxquelles seraient soumis des membres de peuples indigènes, en particulier dans les régions d’Atalaya et Ucayali, la commission prend note des informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles les actions menées conjointement par le ministère du Travail, la police nationale, le ministère de l’Agriculture, les autorités judiciaires et le ministère public, ainsi que l’action conjointe de l’Organisation indigène de la région Atalaya (OIRA) avec la zone de travail et de promotion sociale d’Atalaya, ont permis de mettre un terme au système d’«enganche» (embauche à des conditions léonines), si bien qu’il n’y a plus de pratique de travail forcé dans cette zone. Le gouvernement indique en outre que des sanctions administratives et pénales ont été prononcées à l’encontre des responsables et qu’une évaluation actualisée de la situation du travail dans la région sera communiquée. La commission souhaiterait que le gouvernement fournisse des informations sur le nombre de plaintes déposées, les procédures en cours et la teneur des décisions judiciaires sanctionnant l’imposition de travail forcé.

3. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note des initiatives prises par le gouvernement pour mettre un terme aux migrations de populations rurales des départements de Cuzco et Puño en direction du département de Madre de Dios, phénomène qui alimente un système ayant pour effet que des personnes mineures sont employées dans des centres miniers dans des conditions assimilables à du travail forcé. La commission note que le gouvernement déclare dans son rapport que la mécanisation des tâches d’extraction, conjuguée au renforcement du système d’inspection, a contribuéà une réduction de travail de personnes mineures dans ces zones.

La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute autre mesure prise en vue de l’éradication totale du travail forcé des mineurs dans cette zone.

4. La commission prend note des informations du gouvernement relatives au travail productif accompli par les prisonniers. Elle constate cependant que le rapport ne contient pas d’information concernant les mesures prises ou envisagées pour garantir que les prisonniers donnent leur consentement au travail effectué pour le compte de particuliers. La commission exprime l’espoir que le gouvernement fournira dans son prochain rapport des informations sur cette question, de même que sur les conditions de travail des prisonniers travaillant pour le compte d’entreprises privées: rémunération, couverture de sécurité sociale, etc.

Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

La commission prend note du rapport communiqué par le gouvernement en novembre 1996 ainsi que de son plus récent rapport. Elle rappelle que ce cas a été examiné par la Commission de la Conférence en 1993, qu'à cette occasion de graves violations de la convention avaient été constatées et qu'il avait été décidé d'y revenir ultérieurement. Elle prend également note des commentaires communiqués par la Confédération mondiale du travail (CMT) en octobre 1997 et de la réponse faite par le gouvernement en novembre 1998.

1. La commission constate que les commentaires de la CMT visent des pratiques de travail forcé (esclavage, servitude pour dettes ou servitude en tant que telle) auxquelles sont soumises des personnes appartenant, en particulier, aux peuples indigènes des régions de Atalaya et Ucayali. Les premières victimes de ces pratiques, selon la CMT, sont les communautés Ashaninka, établies dans la région du Alto Ucayali, entre Atalaya et Bolognesi. Le travail forcé auquel ces personnes sont soumises consiste en travaux dans les domaines de l'agriculture, de l'élevage et de l'exploitation forestière. La forme habituelle par laquelle les Ashaninka sont soumis aux travaux forcés est la servitude pour dettes, imposée à travers un système appelé "enganche o habilitación" (embauche ou habilitation), qui consiste à fournir à des travailleurs indigènes les biens nécessaires à leur subsistance et à leur travail en créant une dette qu'ils doivent rembourser par la production de biens ou services. La dette peut être de courte durée, aux termes d'un contrat, ou bien revêtir un caractère permanent, obligeant les travailleurs à vivre aux abords de l'exploitation, laquelle constitue ainsi une sorte de domaine sur lequel ils vivent et travaillent dans l'endettement, sans qu'il ne soit question de les payer.

2. La commission constate que la réponse du gouvernement ne contient pas d'éléments concernant les commentaires formulés par la CMT et se borne à répéter que ces commentaires visent des faits qui se sont certes produits dans la région de Atalaya mais qui sont désormais révolus. Sur ce point, la commission prie instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées au sujet des allégations, notamment des pratiques de "enganche o habilitación", qui font l'objet de ses observations depuis plusieurs années. Elle prie le gouvernement de donner des informations sur les mesures qu'il entreprend pour remédier aux pratiques de travail forcé interdites par la convention, en particulier en ce qui concerne la servitude pour dettes, qui frappent essentiellement les communautés Ashaninka de Atalaya et Ucayali.

3. Dans sa précédente observation concernant les communautés indigènes de Atalaya, la commission priait le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d'éradiquer les différentes pratiques relevant du travail forcé, au sens de l'article 1, paragraphe 1, et de l'article 2 de la convention, notamment la servitude pour dettes, certaines formes trompeuses ou violentes d'enrôlement de main-d'oeuvre et les conditions de travail et d'exploitation indignes de l'être humain auxquelles sont soumises des personnes mineures des communautés indigènes d'Atalaya. Selon ce qu'il ressort du rapport communiqué par le gouvernement en 1996, la résolution suprême no 056-94-TR de septembre 1994 a eu pour effet la création de la Zone de travail et de promotion sociale de Atalaya. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de cas dont l'autorité permanente du travail de la zone a pu être saisie à propos de pratiques de travail forcé imposé à des personnes -- mineures ou non --, notamment des membres des communautés indigènes, et sur les sanctions prises à l'égard des coupables, conformément à l'article 25.

4. Dans son précédent rapport, le gouvernement indiquait que la Direction générale du travail et de la promotion sociale de Ucayali avait mis en place tout un système d'inspections, en coordination avec l'autorité judiciaire, la police, le ministère public, le ministère de l'Agriculture et la préfecture. Les opérations d'inspection menées dans la zone d'Atalaya ont fait apparaître que cette localité a de nombreux commerces et plus d'une centaine d'élevages et d'exploitations forestières, qui emploient 1 430 salariés sur quelque 28 800 travailleurs qu'elle peut compter. Elles ont aussi fait apparaître que la population indigène est établie sur les rives des fleuves Ucayali et Urubamba et que la majorité travaille à l'extraction du bois dans les zones difficiles d'accès, pour le compte d'employeurs désignés par le vocable de "madereros", qui rétribuent leurs services en biens de consommation, tels que des aliments et des vêtements. Des irrégularités ont été constatées par rapport à la législation du travail sur le plan des horaires de travail, qui ont tendance à s'allonger considérablement en période d'abattage, de même que sur le plan du repos hebdomadaire et des congés. La commission note en outre que, selon le gouvernement, des sanctions sont appliquées en fonction desdites infractions et que le contrôle s'est trouvé facilité par la présence de l'autorité du travail dans la zone. La commission souligne le problème que pose le paiement du salaire en biens de consommation, au regard du travail forcé tel que défini par la convention. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d'infractions constatées dans cette zone et sur les sanctions prises, conformément à l'article 25.

5. La commission avait pris note des commentaires formulés par la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou (FNTMMSP) concernant les procédés frauduleux d'embauche auxquels recourent des particuliers pratiquant l'"enganche" généralement à Puño et à Cuzco, pour le compte de groupes employeurs miniers auxquels la Direction nationale des mines a octroyé des concessions. Les contrats proposés sont généralement de 90 jours (raison pour laquelle ces travailleurs sont appelés "noventeros") à l'échéance desquels l'employeur devrait subvenir aux frais de retour, ce qu'il ne fait généralement pas, empêchant ainsi le travailleur de rentrer chez lui. Cette organisation déclarait en outre que les salaires étaient dérisoires, les horaires excessifs et l'assistance médicale inexistante, malgré le risque élevé de maladies telles que la malaria, la tuberculose, la rage et la leishmaniose ("uta"). Elle ajoutait que de nombreux mineurs étaient assujettis à un travail inhumain, comme en atteste le rapport "Menores trabajadores en los lavaderos de Madre de Dios" établi par la Coordination pour les droits de l'enfant de la région Inka. A cet égard, la commission prend note avec intérêt des informations communiquées par le gouvernement en 1996 au sujet des procédures judiciaires engagées contre un groupe de recruteurs pour violation de la liberté individuelle dans des conditions de contrainte et de trafic de mineurs et pour violation de la liberté du travail. Rappelant la teneur de l'article 25 de la convention, la commission prie une fois de plus le gouvernement de communiquer copie de la directive élaborée en décembre 1993 dans le but de fixer les conditions réglementaires de l'acheminement des travailleurs jusqu'aux installations aurifères, exploitations agricoles, élevages et autres entreprises des zones de Madre de Dios, Kosñipata, Lares et autres, et de tenir le Bureau informé des résultats obtenus, dans la pratique, par l'application de cette directive.

6. La commission constate que, bien que certaines mesures auraient été prises pour mettre un terme aux situations décrites à propos des communautés indigènes de Atalaya et des mines et installations aurifères de Madre de Dios, il subsiste des problèmes qui appellent une action énergique et soutenue de la part des autorités. La commission exprime une fois de plus l'espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour mettre un terme aux pratiques par lesquelles de nombreux travailleurs, dont des enfants et des adolescents, sont soumis à un travail forcé au sens de la convention.

7. Dans une demande adressée directement au gouvernement et portant sur l'article 2, paragraphe 2 c), à propos du travail pénitentiaire obligatoire en conséquence d'une condamnation, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées afin d'établir le caractère volontaire du travail des condamnés, considérant qu'en vertu de l'article 65 du Code d'exécution des peines le travail est un droit et un devoir du condamné et qu'aucune disposition du titre deuxième du Code, concernant le travail, ne précise le caractère volontaire du travail des condamnés. La commission constate que le gouvernement indique dans son rapport que la Constitution consacre expressément que nul ne sera contraint de travailler sans rétribution ou sans son libre consentement. De même, le gouvernement déclare que la notion de réhabilitation par le travail et par l'enseignement, qui est contenue dans l'article 65 du Code d'exécution des peines, est une institution de prévention spéciale ayant pour finalité de susciter l'intérêt du détenu pour le travail et l'instruction. L'article 67 de ce même code dispose que le travail dans les centres pénitentiaires est rémunéré et qu'il vise la réhabilitation des détenus.

8. La commission rappelle qu'en vertu de la convention il ne peut être imposé de travail aux détenus qu'en vertu d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire, ce qui n'empêche pas que des personnes en détention provisoire travaillent, si elles le désirent, sur une base purement volontaire. La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour instituer le caractère volontaire du travail des condamnés et elle espère qu'il fournira des informations à ce sujet dans son prochain rapport.

9. S'agissant de l'article 131 c) du règlement du Code d'exécution des peines, selon lequel du travail peut être donné aux condamnés par des particuliers, par l'intermédiaire de l'administration pénitentiaire, la commission avait noté que le gouvernement envisageait l'adoption des mesures nécessaires pour donner pleinement effet à la convention en établissant de manière explicite dans la loi que le consentement des détenus est nécessaire pour l'accomplissement de travaux pour le compte de particuliers. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations à cet égard.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 87e session.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

1. Travail pénitentiaire obligatoire en exécution d'une peine. Dans sa précédente demande directe, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour établir le caractère volontaire du travail des prévenus étant donné qu'en vertu de l'article 65 du Code d'exécution pénale le travail est un droit et un devoir du détenu et qu'aucune disposition de son deuxième chapitre sur le travail ne précise le caractère volontaire du travail des prévenus.

La commission note, d'après les indications communiquées par le gouvernement dans son rapport, que les conditions de travail des prévenus seront, dans la mesure du possible, semblables à celles d'une relation de travail libre. La commission rappelle qu'en vertu de la convention le travail ne peut être imposé qu'à des prisonniers condamnés, ce qui n'empêche pas que les personnes détenues dans l'attente d'un jugement ou d'une sentence acceptent de travailler sur une base purement volontaire. Elle espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour établir le caractère volontaire du travail des détenus et qu'il communiquera des informations sur ce point dans son prochain rapport.

2. En relation avec l'article 131 c) du Règlement du Code d'exécution des peines en vertu duquel le travail des prisonniers peut être fourni à des particuliers par l'administration pénitentiaire, la commission note que le gouvernement examine la possibilité d'adopter les mesures nécessaires pour appliquer pleinement la convention et prévoir de manière expresse le consentement des prisonniers mis à la disposition de particuliers. La commission espère que ces mesures seront adoptées prochainement pour assurer le respect de la convention sur ce point et que le gouvernement communiquera des informations à ce sujet.

3. La commission note les informations et les rapports d'inspection qui ont été communiqués par le gouvernement sur la situation des mineurs travaillant dans des entreprises d'épluchage de châtaignes à Puerto Maldonado.

La commission note que le rapport du gouvernement ne contient pas d'information sur les points suivants qui ont été soulevés dans sa précédente demande directe:

Dans des commentaires antérieurs, la commission avait demandé des informations sur les travaux effectués par les personnes accomplissant leur service militaire obligatoire.

La commission avait noté les indications communiquées par le gouvernement, selon lesquelles, en application de l'article 53 de la loi sur le service militaire obligatoire, l'article 5 b) du décret-loi no 434 portant organisation du ministère de la Défense et de l'article no 280 de la Constitution politique de l'Etat, les personnels des forces armées, y compris les conscrits, participent aux programmes suivants de développement national: plan des voies nationales; aménagement rural; appui au développement régional, et actions civico-militaires. Les conscrits prennent part à ces activités en accomplissant des tâches auxiliaires en tant que main-d'oeuvre non qualifiée sous les ordres d'un personnel technique.

La commission rappelle qu'en vertu de la convention seuls les travaux d'un caractère purement militaire échappent à son champ d'application et prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les conscrits ne puissent être contraints à des travaux ou services d'un autre caractère, comme il est dit à l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention, sauf dans les cas de force majeure.

5. Liberté des personnes au service de l'Etat de quitter leur emploi. La commission avait prié le gouvernement de fournir copie des dispositions régissant la situation des militaires de carrière en ce qui concerne la liberté de quitter le service en temps de paix de leur propre initiative après une période raisonnable soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis.

La commission avait noté des informations communiquées par le gouvernement, selon lesquelles les officiers de l'armée, de la marine et des forces aériennes du Pérou peuvent démissionner après en avoir fait la demande aux termes des articles 33 d) et 41 f) du décret-loi no 20765 du 22 octobre 1974, avec les réserves temporaires prévues aux articles 28, 29, 38 et 41 de ce texte.

Quant aux techniciens, aux sous-officiers et aux officiers de marine, ils peuvent déposer une demande de démission en application du décret suprême no 003-82-CCFA du 22 avril 1982, avec les réserves temporaires établies aux articles 30, 31, 40 et 41 de ce décret.

La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir copie du décret-loi no 20765 du 22 octobre 1974 sur la situation militaire des officiers de l'armée, de la marine et des forces aériennes du Pérou, ainsi que du décret suprême no 003-82-CCFA du 22 avril 1982 sur la situation militaire des techniciens, sous-officiers et officiers de marine des forces armées du Pérou.

Observation (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

La commission prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement et de la discussion à la Commission de la Conférence en 1993 sur les problèmes concernant le respect de la convention quant à la situation des communautés indigènes d'Atalaya, des travailleurs des mines et des laveurs d'or de Madre de Dios.

1. Communautés indigènes d'Atalaya

Dans son observation précédente, la commission avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour supprimer les pratiques de servitude pour dettes, les procédés violents ou fallacieux d'embauche de la main-d'oeuvre, les conditions inhumaines de travail et l'exploitation du travail forcé des enfants dans les communautés d'Atalaya (dont la situation avait été reconnue dans le rapport final de la Commission multisectorielle sur la situation des communautés indigènes d'Atalaya créée par la résolution 083-88-PCM).

La commission avait pris note des recommandations formulées dans le rapport mentionné ci-dessus, au nombre desquelles figure la création d'une zone régionale de travail, à Atalaya, chargée de la prévention des conflits collectifs et de préserver les droits des travailleurs concernés, spécialement ceux des communautés indigènes. La création d'un service annexe du ministère du Travail dans cette zone avait déjà été considérée nécessaire par le rapport d'inspection spécial de la zone d'Atalaya (de 1988), dont copie avait été communiquée par le gouvernement. La commission a noté, par ailleurs, que l'Organisation indigène de la région d'Atalaya (OIRA) et le Front pour la défense des intérêts de la province d'Atalaya ont adressé en 1993 au ministère du Travail des communications soulignant l'importance de la création d'un bureau du ministère du Travail dans cette zone pour lutter contre l'injustice et l'exploitation dont les communautés indigènes sont victimes, et demandant que ce bureau soit installé sans retard, d'autant plus que les communautés en question n'ont pas accès, en raison du coût et des difficultés du transport, à la Direction régionale du travail pour défendre leurs droits. En outre, une réunion à laquelle ont participé les autorités publiques d'Atalaya, diverses personnalités et des représentants des organisations indigènes a souligné dans ses conclusions la nécessité d'une zone de travail et de promotion sociale à Atalaya, tout en exprimant l'espoir que les autorités supérieures, qui ont compétence pour la création légale d'une telle zone, aient pris connaissance de cette nécessité, afin qu'elle ne reste pas à l'état de projet.

La commission observe qu'il ressort du rapport du gouvernement, communiqué en novembre 1993, que la zone régionale de travail d'Atalaya n'a pas encore été créée.

Le gouvernement indique dans son rapport que la Direction générale du travail et de la promotion sociale d'Ucayali a mis sur pied une opération conjointe d'inspection, en coordination avec les autorités de la justice, de la police, ainsi que le procureur, le ministère de l'Agriculture et la préfecture. La commission prie le gouvernement d'en communiquer des rapports d'inspection portant en particulier sur le nombre et la nature des infractions constatées et les sanctions prononcées.

En ce qui concerne les communautés indigènes d'Atalaya, la commission observe que certaines démarches ont été entreprises, mais que les mesures recommandées par la commission multisectorielle n'ont pas été prises, pas plus que celles qui avaient été formulées dans le rapport d'inspection spécial de 1988, au nombre desquelles figurent non seulement la création d'une zone régionale de travail, mais également la création d'un tribunal mixte, l'établissement d'un procureur de la province et d'un conseil pour la promotion sociale ainsi que l'ouverture de voies de communication terrestres.

2. Travailleurs des mines et des laveries d'or de Madre de Dios

La commission avait prié le gouvernement de fournir le rapport de la commission multisectorielle, créée par la résolution no 275-90-PCM du 26 juin 1990 avec pour mission d'étudier la situation des travailleurs dans les laveries d'or de Madre de Dios. La commission avait pris note, en ce qui concerne ces travailleurs, des allégations présentées par la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou (FNTMMSP) sur les procédés fallacieux d'embauche auxquels recourent certains particuliers ou certaines agences qui pratiquent l'"enganche" en général à Puno et Cuzco, pour le compte d'entreprises minières auxquelles la Direction nationale des mines a octroyé des concessions. Les contrats sont généralement de 90 jours (ce qui explique l'appellation de "noventeros" donnée à ces travailleurs), à l'issue desquels l'employeur est censé couvrir les frais de retour, ce qu'il ne fait généralement pas, empêchant ainsi le retour du travailleur à son lieu d'origine. S'agissant des conditions de travail, l'organisation dénonce également les salaires trop bas, les horaires excessifs, l'assistance médicale inexistante et le risque élevé de contracter des maladies telles que la malaria, la tuberculose, la rage et le lupus (uta).

La commission note les informations sur les conditions inhumaines dans lesquelles travaillent les enfants contenues dans le rapport intitulé "Travail des mineurs dans les laveries de Madre de Dios", élaboré par la Coordination des droits de l'enfant de la région inka, dont une copie a été remise à la Commission de la Conférence en juin 1993 par un membre travailleur. Selon ce rapport, la presse nationale a révélé l'existence de fosses communes dans différentes zones du pays, dans lesquelles on a retrouvé, parmi les corps des laveurs d'or, ceux d'enfants, d'adolescents et de jeunes gens employés dans les mines, et morts par suite de maladies et d'accidents occasionnés par leur travail (comme la rage, le tétanos, diverses infections, les chutes), ou de contusions infligées par des patrons de mine abusifs et esclavagistes. On a même évoqué la possibilité de l'assassinat de certains enfants qui auraient tenté de s'enfuir ou auraient protesté contre leurs conditions de travail.

La commission note avec intérêt les indications du gouvernement selon lesquelles une opération a été menée, le 1er octobre 1993, dans la zone dite "Boca Colorado" (Madre de Dios) par le ministère du Travail avec la participation de représentants du pouvoir judiciaire. Cette opération a permis de libérer sept jeunes gens exploités comme esclaves dans l'une des laveries d'or. Dans une communication officielle no 016-93-RR.PP. du 4 octobre 1993, le ministère du Travail et de la Promotion sociale a décidé que le procureur général devait ouvrir une action pénale en vue d'établir la responsabilité des personnes qui ont obligé des mineurs à travailler et qui ont opéré en marge de la loi. Le témoignage de ces jeunes gens confirme que les "enganchadores" recourent à des procédés d'embauche trompeurs, qu'ils "vendent" les jeunes à des travailleurs plus âgés, et que des gardes armés surveillent les travailleurs.

La commission prend note des diverses mesures qui ont été prises en rapport avec la situation de ces travailleurs, notamment la mise à l'amende et la fermeture des agences de placement clandestines, les campagnes d'information auprès des travailleurs ruraux pour éviter qu'ils se laissent tromper par les "enganchadores", la création de la zone régionale de travail et de promotion sociale de Huaypetue et Colorado, ainsi que la possibilité de recours auprès de la zone en question, sans qu'il soit nécessaire de se déplacer à Madre de Dios, comme c'était le cas précédemment, ce qui prenait deux à trois jours par la voie fluviale.

La commission prend note par ailleurs que, d'après les indications du gouvernement, il a été décidé d'élaborer une directive sur les conditions requises pour le transport des travailleurs jusqu'à Madre de Dios et sur l'interdiction du travail des enfants. Cette directive devra être distribuée dans toutes les délégations de la police nationale. La commission prie le gouvernement de communiquer une copie de cette directive.

La commission observe que, bien que certaines mesures aient été prises en vue de faire disparaître les situations en cause pour les communautés indigènes d'Atalaya ainsi que dans les mines et laveries d'or de Madre de Dios, il subsiste des problèmes qui nécessitent une action énergique et soutenue de la part des autorités. La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour mettre fin aux pratiques visant à soumettre de nombreux travailleurs, y compris des enfants, au travail forcé. Il est nécessaire, en particulier, de donner effet à l'article 25 de la convention, qui prévoit que le fait d'exiger illégalement du travail forcé sera passible de sanctions pénales et que tout Etat Membre ratifiant la convention a l'obligation de s'assurer que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le déroulement et l'issue des procès intentés par le ministère public dans les cas de travail forcé constatés dans la zone de Boca Colorado (Madre de Dios).

Demande directe (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

La commission note que le rapport n'a pas été reçu. Elle espère qu'un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu'il contiendra des informations complètes sur les points suivants soulevés dans sa précédente demande directe:

1. Dans des commentaires antérieurs, la commission avait demandé des informations sur les travaux effectués par les personnes accomplissant leur service militaire obligatoire.

La commission avait noté les indications communiquées par le gouvernement, selon lesquelles, en application de l'article 53 de la loi sur le service militaire obligatoire, l'article 5 b) du décret-loi no 434 portant organisation du ministère de la Défense et de l'article no 280 de la Constitution politique de l'Etat, les personnels des forces armées, y compris les conscrits, participent aux programmes suivants de développement national: plan des voies nationales; aménagement rural; appui au développement régional, et actions civico-militaires. Les conscrits prennent part à ces activités en accomplissant des tâches auxiliaires en tant que main-d'oeuvre non qualifiée sous les ordres d'un personnel technique.

La commission rappelle qu'en vertu de la convention seuls les travaux d'un caractère purement militaire échappent à son champ d'application et prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les conscrits ne puissent être contraints à des travaux ou services d'un autre caractère, comme il est dit à l'article 2, paragraphe 2 a) de la convention, sauf dans les cas de force majeure.

2. Liberté des personnes au service de l'Etat de quitter leur emploi. La commission avait prié le gouvernement de fournir copie des dispositions régissant la situation des militaires de carrière en ce qui concerne la liberté de quitter le service en temps de paix de leur propre initiative après une période raisonnable soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis.

La commission avait noté des informations communiquées par le gouvernement, selon lesquelles les officiers de l'armée, de la marine et des forces aériennes du Pérou peuvent démissionner après en avoir fait la demande aux termes des articles 33 d) et 41 f) du décret-loi no 20765 du 22 octobre 1974, avec les réserves temporaires prévues aux articles 28, 29, 38 et 41 de ce texte.

Quant aux techniciens, aux sous-officiers et aux officiers de marine, ils peuvent déposer une demande de démission en application du décret suprême no 003-82-CCFA du 22 avril 1982, avec les réserves temporaires établies aux articles 30, 31, 40 et 41 de ce décret.

La commission prie le gouvernement de fournir copie du décret-loi no 20765 du 22 octobre 1974 sur la situation militaire des officiers de l'armée, de la marine et des forces aériennes du Pérou, ainsi que du décret suprême no 003-82-CCFA du 22 avril 1982 sur la situation militaire des techniciens, sous-officiers et officiers de marine des forces armées du Pérou.

3. Dans des commentaires antérieurs, la commission avait pris note de l'article 131 c) du décret suprême no 012-85 du 12 juin 1985 portant règlement du Code d'exécution des peines, en vertu duquel le travail des prisonniers peut être fourni à des particuliers par l'administration pénitentiaire.

La commission avait noté que le gouvernement se référait aux garanties en matière de salaire et de sécurité sociale prévues par ce règlement.

La commission a observé néanmoins que ni ce règlement, ni le Code d'exécution des peines ne prévoient le consentement exprès des détenus dans les cas où ils travaillent pour le compte de particuliers.

En ce qui concerne le salaire des détenus au service de particuliers, ledit règlement en établit à l'article 126 la forme de paiement, mais ne fait aucune référence à son mode de fixation.

La commission avait noté, d'après les informations communiquées par le gouvernement, que les détenus - ou leurs proches - négocient et concluent des contrats de travail avec des particuliers ou des entreprises privées pour pouvoir bénéficier d'un régime de semi-liberté et qu'il est veillé à ce qu'ils perçoivent le salaire minimum légal.

La commission a rappelé que, comme elle l'a indiqué aux paragraphes 97 à 99 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, l'emploi de prisonniers au service de particuliers n'est compatible avec la convention que lorsqu'il peut être assimilé à une relation de travail libre, c'est-à-dire quand l'intéressé y a donné son consentement et qu'il existe des garanties en matière de salaire et de sécurité sociale.

La commission prie le gouvernement de fournir des indications sur les mesures prises pour assurer totalement que les détenus au service de particuliers ou d'entreprises privées puissent donner leur consentement à cet effet, de même que sur les systèmes de fixation des salaires versés par ces particuliers ou entreprises à la main-d'oeuvre pénitentiaire.

La commission prie également le gouvernement de fournir copie des contrats de travail, approuvés par la Direction pénitentiaire, qui sont conclus entre les détenus et leurs employeurs.

4. Travail pénitentiaire obligatoire en exécution d'une peine. La commission avait relevé une différence entre l'article 132 du Code pénal (ancien), aux termes duquel le travail était obligatoire pour les condamnés et les personnes en détention provisoire, et le Code d'exécution des peines de 1985, promulgué par décret-loi no 330, qui établit le caractère facultatif du travail pénitentiaire pour ces derniers (art. 75).

La commission avait noté que l'article 132 précité ne figure pas dans le nouveau Code pénal, édicté par décret-loi no 635 du 25 avril 1991.

La commission note également la promulgation du Code d'exécution pénale, promulgué par décret-loi no 654 du 31 juillet 1991, qui abroge le décret-loi no 330 de 1985. En vertu de l'article 65 de ce nouveau code, le "travail est un droit et un devoir du détenu", et aucune disposition de son deuxième chapitre sur le travail ne précise le caractère volontaire du travail des détenus.

La commission rappelle qu'en vertu de la convention le travail ne peut être imposé qu'à des prisonniers condamnés, ce qui n'empêche pas que les personnes détenues dans l'attente d'un jugement ou d'une sentence acceptent de travailler sur une base purement volontaire.

La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou prévues pour établir le caractère volontaire du travail des prévenus.

Observation (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

La commission prend note des informations communiquées oralement et par écrit par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 1992 relatives aux allégations de la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou (FNTMMSP) sur la situation des travailleurs des mines et des laveries d'or de Madre de Dios et sur le travail sans rémunération de mineurs dans les entreprises d'épluchage de châtaignes de Puerto Maldonado. Ces informations concernent également la situation des communautés indigènes d'Atalaya, question qui avait déjà été soulevée par la commission dans ses précédents commentaires.

I. Communautés indigènes d'Atalaya

La commission prend note du rapport final de la Commission multisectorielle (créée par la résolution 083-88-PCM, constituée par différentes instances des ministères du Travail, de la Justice et de l'Agriculture et de l'Institut péruvien des questions indigènes) sur la situation des communautés indigènes d'Atalaya, communiqué par le gouvernement. Ledit rapport permet d'établir que "les communautés indigènes d'Atalaya qualifiées de "cautivas" (captives) sont réduites à un état de servitude à l'intérieur d'exploitations agricoles ou forestières grandes ou moyennes, constituant ainsi une main-d'oeuvre gratuite ou semi-gratuite par le jeu des mécanismes du système de l'"enganche": assujettissement en contrepartie de dotation en moyens de travail. Ledit système consiste, pour le patron, à fournir à l'indigène à titre d'avance des instruments de travail, des aliments ou de l'argent pour lui permettre d'extraire du bois grâce à quoi ensuite, en théorie, le travailleur efface sa dette initiale et se procure un revenu pour la subsistance de sa famille. Ainsi astreints à payer la dotation initiale plus les intérêts, les indigènes restent définitivement prisonniers du cercle vicieux de l'exploitation et de la misère. Selon le rapport, 17 exploitations ont été dénoncées pour n'avoir comme base de relations du travail que l'esclavage et la servitude".

Formes d'embauche de la main-d'oeuvre

Selon le rapport communiqué par le gouvernement, dans les exploitations ayant fait l'objet d'une inspection, "il existe une population qui, de génération en génération, hérite de la condition de servitude. Il est fréquent que les enfants soient enlevés de force, ou séquestrés sous couvert d'un parrainage par baptême, pour être retenus comme domestiques". Les autres formes de servitude sont celles qui résultent des mécanismes décrits ci-avant de l'"enganche". Le rapport déclare que "les indigènes, soumis par la force à des conditions de travail impliquant l'aliénation de leur libre volonté, sont plongés dans un système d'esclavage tel qu'ils se trouvent privés de toute liberté et de leurs droits constitutionnels".

S'agissant des conditions de travail, le rapport indique que les indigènes "travaillent de 10 à 12 heures par jour et, qui plus est, ne perçoivent pas un salaire leur assurant le minimum vital et sont encore moins rémunérés pour les heures supplémentaires effectuées, au mépris des dispositions de l'article 44 de la Constitution nationale. Ne sont pas non plus respectées en ce qui les concerne les dispositions de la législation du travail relatives aux congés, à la sécurité sociale et à la sécurité dans le milieu du travail". En outre, le rapport signale "la difficulté ou l'impossibilité (pour les indigènes) de se déplacer librement jusqu'à l'extérieur de l'exploitation ou du campement" et dénonce "l'emprisonnement pour dette dans des cellules improvisées dans l'enceinte des exploitations". Le rapport conclut en indiquant que la situation dans la région d'Atalaya "appelle une action urgente de la part de l'Etat".

La commission prend note des recommandations de la Commission multisectorielle auxquelles s'est référé le représentant gouvernemental, lors de la discussion devant la Commission de la Conférence, au sujet des tâches à accomplir par le ministère du Travail: 1) inspection préventive des exploitations et campements ayant fait l'objet d'une dénonciation; 2) création d'une "zone régionale de travail d'Atalaya" dont l'inspection doit être renforcée de manière adéquate; 3) coordination des organisations indigènes pour la formation permanente des dirigeants et des autorités communales en matière de travail. Il est prévu, entre autres recommandations, d'appliquer les sanctions qui s'imposent et de prolonger le mandat de la commission multisectorielle.

Dans sa déclaration devant la Commission de la Conférence, le représentant gouvernemental a déploré qu'il n'avait pas été possible de mettre en oeuvre les recommandations relatives à la création de la zone régionale de travail et à la formation des dirigeants et autorités communales. Il a également indiqué que les inspections du ministère du Travail n'avaient pas permis non plus d'examiner à fond la situation dans les exploitations dénoncées, en raison du manque de collaboration des autorités locales et des employeurs, et de la pénurie de ressources.

La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme aux pratiques de servitude pour dettes, aux procédés fallacieux ou violents d'embauche de la main-d'oeuvre, aux conditions inhumaines de travail et à l'exploitation du travail des mineurs dans des conditions de travail forcé dans les communautés indigènes d'Atalaya.

II. Travail sans rémunération des enfants dans les entreprises d'épluchage de châtaignes de Puerto Maldonado

La commission s'est référée antérieurement aux allégations de la FNTMMSP concernant la situation dans les entreprises d'épluchage de châtaignes de Puerto Maldonado. Dans ces entreprises, des centaines d'enfants travaillent avec leurs mères jusqu'à 12 heures par jour sans percevoir de rémunération de quelque nature que ce soit, étant donné que sont employées essentiellement des mères de famille, qui recourent à l'aide de leurs enfants pour parvenir à remplir le nombre de barils de châtaignes exigé chaque jour.

Dans sa déclaration devant la Commission de la Conférence, le représentant gouvernemental a fait état d'une augmentation de salaire en 1991 dans les entreprises d'épluchage de châtaignes, à l'issue d'une négociation collective. Il a indiqué en outre que, si la législation nationale péruvienne contient des dispositions tendant à prévenir l'exploitation des enfants, mais que le travail des enfants, lié à la pauvreté et à la nécessité d'une stratégie de survie familiale, ne saurait être éradiqué par un simple texte législatif. La commission prend note de la référence faite à l'article 128 du Code pénal qui sanctionne les parents qui, pour se procurer un plus grand revenu, astreignent leurs enfants à un régime de travail sans contrat. A cet égard, la commission prie le gouvernement d'indiquer les dispositions qui sanctionnent également ceux qui, sans avoir de lien familial avec les enfants, obtiennent d'eux, par des moyens indirects, un travail sans rémunération.

La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur la situation dans le secteur des entreprises d'épluchage de châtaignes, en ce qui concerne l'emploi des femmes et l'utilisation de la main-d'oeuvre infantile dans les conditions décrites, et de communiquer également copie des rapports d'inspection établis sur cette situation, avec des données statistiques permettant d'apprécier l'ampleur du problème.

La commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour empêcher que les enfants soient, de manière indirecte, contraints de travailler dans des conditions d'exploitation n'ayant aucun rapport avec une relation libre de travail et de faire connaître les progrès enregistrés à cette fin.

III. Travailleurs des mines et des laveries d'or de Madre de Dios

La commission avait pris note des commentaires de l'organisation syndicale susmentionnée concernant, en particulier, les procédés d'embauche auxquels recourent certains particuliers ou certaines agences, qui pratiquent l'"enganche" en général à Puno et Cuzco, pour le compte d'entreprises minières auxquelles la Direction nationale des mines a octroyé des concessions. Les contrats sont généralement de 90 jours (ce qui explique l'appellation de "noventeros" donnée à ces travailleurs) à l'issue desquels l'employeur est censé couvrir les frais de retour, ce qu'il ne fait généralement pas, empêchant ainsi le retour du travailleur à son lieu d'origine. S'agissant des conditions de travail, l'organisation dénonce également les salaires trop bas, les horaires excessifs, l'assistance médicale inexistante et le risque élevé de contracter des maladies telles que la malaria, la tuberculose, la rage et le lupus (uta).

La commission avait prié le gouvernement de communiquer le rapport de la commission multisectorielle, créée par la résolution ministérielle no 275-90-PCM du 26 juin 1990, avec pour mission d'étudier la situation des travailleurs dans les laveries d'or de Madre de Dios, les programmes d'inspection établis ainsi que les projets de normes tendant à assurer la protection de cette catégorie de travailleurs dont il avait fait état.

La commission prend note avec intérêt des informations communiquées par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence concernant les sanctions et les fermetures décidées à l'encontre de certaines agences clandestines de placement des travailleurs, ainsi que les mesures prises par l'autorité compétente en matière de travail de Cuzco afin que les contrats de travail soient élaborés et conclus sous son contrôle.

La commission prie le gouvernement de communiquer le rapport final de la commission multisectorielle, créée par la résolution ministérielle no 275-90-PCM du 26 juin 1990, ainsi que les programmes d'inspection et des informations sur toute autre mesure qui aurait été prise en vue d'assurer dans la pratique le respect de la convention.

La commission prend note du fait que, selon l'article 42 de la Constitution du pays, "est interdite dans toute relation de travail toute condition empêchant l'exercice des droits constitutionnels des travailleurs ou méconnaissant ou portant atteinte à leur dignité", que cet article ajoute que "nul ne peut être contraint de fournir son travail sans son libre consentement et sans juste rétribution". Par ailleurs, selon l'article 2, paragraphe 20 b), "sont abolis l'esclavage, la servitude et toute forme de traite quelle qu'elle soit" et, selon l'article 2, paragraphe 20 c), "l'emprisonnement pour dette est proscrit".

La commission prend note du fait que le représentant gouvernemental du Pérou a déclaré devant la Commission de la Conférence que les différentes situations évoquées plus haut sont illégales, interdites par la Constitution et tombent sous le coup des sanctions prévues par le nouveau Code pénal de 1991, et qu'il a indiqué en outre que, si le ministère du Travail n'est pas présent sur la totalité du territoire national, des inspections périodiques ont lieu.

La commission relève que les situations examinées constituent des violations graves des conventions nos 29 et 105: assujettissement des travailleurs, impossibilité de rompre la relation de travail, conditions de travail inqualifiables, autant de conditions contraires aux principes de la convention no 29 et aux dispositions de la législation nationale et contraires également à l'obligation inscrite à l'article 1 b) de la convention no 105 concernant l'abolition du travail forcé comme méthode d'utilisation de la main-d'oeuvre à des fins de développement économique. La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures énergiques qu'exige une situation aussi grave, afin d'assurer le respect des conventions nos 29 et 105 et de faire disparaître les procédés violents ou fallacieux d'embauche de la main-d'oeuvre, les mécanismes de la servitude pour dettes, les conditions inhumaines de travail dans les mines et dans les exploitations, la coercition exercée pour maintenir la relation de travail et le travail forcé des enfants, et de communiquer des informations sur toute mesure ou sanction prise, en application des dispositions pertinentes de la législation nationale et de l'article 25 de la convention no 29, à l'encontre de ceux qui imposent le travail forcé.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1992, publiée 79ème session CIT (1992)

1. Dans des commentaires antérieurs, la commission avait demandé des informations sur les travaux effectués par les personnes accomplissant leur service militaire obligatoire.

La commission prend note des indications contenues dans le rapport du gouvernement, selon lesquelles, en application de l'article 53 de la loi sur le service militaire obligatoire, l'article 5 b) du décret-loi no 434 portant organisation du ministère de la Défense et de l'article no 280 de la Constitution politique de l'Etat, les personnels des forces armées, y compris les conscrits, participent aux programmes suivants de développement national: plan des voies nationales; aménagement rural; appui au développement régional, et actions civico-militaires. Les conscrits prennent part à ces activités en accomplissant des tâches auxiliaires en tant que main-d'oeuvre non qualifiée sous les ordres d'un personnel technique.

La commission rappelle qu'en vertu de la convention seuls les travaux d'un caractère purement militaire échappent à son champ d'application et prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les conscrits ne puissent être contraints à des travaux ou services d'un autre caractère, comme il est dit à l'article 2, paragraphe 2 a) de la convention, sauf dans les cas de force majeure.

2. Liberté des personnes au service de l'Etat de quitter leur emploi. Dans une demande directe antérieure, la commission avait prié le gouvernement de fournir copie des dispositions régissant la situation des militaires de carrière en ce qui concerne la liberté de quitter le service en temps de paix de leur propre initiative dans des délais raisonnables, soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis.

La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement, selon lesquelles les officiers de l'armée, de la marine et des forces aériennes du Pérou peuvent démissionner après en avoir fait la demande aux termes des articles 33 d) et 41 f) du décret-loi no 20765 du 22 octobre 1974, avec les réserves temporaires prévues aux articles 28, 29, 38 et 41 de ce texte.

Quant aux techniciens, aux sous-officiers et aux officiers de marine, ils peuvent déposer une demande de démission en application du décret suprême no 003-82-CCFA du 22 avril 1982, avec les réserves temporaires établies aux articles 30, 31, 40 et 41 de ce décret.

La commission prie le gouvernement de fournir copie du décret-loi no 20765 du 22 octobre 1974 sur la situation militaire des officiers de l'armée, de la marine et des forces aériennes du Pérou, ainsi que du décret suprême no 003-82-CCFA du 22 avril 1982 sur la situation militaire des techniciens, sous-officiers et officiers de marine des forces armées du Pérou.

3. Dans des commentaires antérieurs, la commission avait pris note de l'article 131 c) du décret suprême no 012-85 du 12 juin 1985 portant règlement du Code d'exécution des peines, en vertu duquel le travail des prisonniers peut être fourni à des particuliers par l'administration pénitentiaire.

La commission avait noté que le gouvernement se référait aux garanties en matière de salaire et de sécurité sociale prévues par ce règlement.

La commission a observé néanmoins que ni ce règlement, ni le Code d'exécution des peines ne prévoient le consentement exprès des détenus dans les cas où ils travaillent pour le compte de particuliers.

En ce qui concerne le salaire des détenus au service de particuliers, ledit règlement en établit à l'article 126 la forme de paiement, mais ne fait aucune référence à son mode de fixation.

La commission note, d'après le rapport du gouvernement, que les détenus - ou leurs proches - négocient et concluent des contrats de travail avec des particuliers ou des entreprises privées pour pouvoir bénéficier d'un régime de semi-liberté et qu'il est veillé à ce qu'ils perçoivent le salaire minimum légal.

La commission a rappelé que, comme elle l'a indiqué aux paragraphes 97 à 99 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, l'emploi de prisonniers au service de particuliers n'est compatible avec la convention que lorsqu'il peut être assimilé à une relation de travail libre, c'est-à-dire quand l'intéressé y a donné son consentement et qu'il existe des garanties en matière de salaire et de sécurité sociale.

La commission prie le gouvernement de fournir des indications sur les mesures prises pour assurer totalement que les détenus au service de particuliers ou d'entreprises privées puissent donner leur consentement à cet effet, de même que sur les systèmes de fixation des salaires versés par ces particuliers ou entreprises à la main-d'oeuvre pénitentiaire.

La commission prie également le gouvernement de fournir copie des contrats de travail, approuvés par la Direction pénitentiaire, qui sont conclus entre les détenus et leurs employeurs.

4. Travail pénitentiaire obligatoire en exécution d'une peine. La commission avait relevé une différence entre l'article 132 du Code pénal (ancien), aux termes duquel le travail était obligatoire pour les condamnés et les personnes en détention provisoire, et le Code d'exécution des peines de 1985, promulgué par décret-loi no 330, qui établit le caractère facultatif du travail pénitentiaire pour ces derniers (art. 75).

La commission note que l'article 132 précité ne figure pas dans le nouveau Code pénal, édicté par décret-loi no 635 du 25 avril 1991.

La commission note également la promulgation du Code d'exécution pénale, promulgué par décret-loi no 654 du 31 juillet 1991, qui abroge le décret-loi no 330 de 1985. En vertu de l'article 65 de ce nouveau code, le "travail est un droit et un devoir du détenu", et aucune disposition de son deuxième chapitre sur le travail ne précise le caractère volontaire du travail des détenus.

La commission rappelle qu'en vertu de la convention le travail ne peut être imposé qu'à des prisonniers condamnés, ce qui n'empêche pas que les personnes détenues dans l'attente d'un jugement ou d'une sentence acceptent de travailler sur une base purement volontaire.

La commission prie le gouvernement de l'informer des mesures prises ou prévues pour établir le caractère volontaire du travail des prévenus.

Observation (CEACR) - adoptée 1992, publiée 79ème session CIT (1992)

Dans son observation antérieure, la commission a pris note des commentaires communiqués en 1990 par la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou (FNTMMSP), où celle-ci allègue l'existence de diverses violations de cette convention. Ces commentaires furent communiqués au gouvernement en avril 1990 afin que celui-ci puisse présenter les observations qu'il jugerait pertinentes.

1. Travailleurs des mines et de laveries d'or de Madre de Dios

Les allégations de la FNTMMSP se réfèrent aux moyens frauduleux de recrutement, connus sous le nom d'"enganche", généralement à Puno et à Cuzco, de la part de personnes privées ou d'agences agissant pour le compte d'entreprises minières auxquelles la Direction nationale des mines a octroyé des concessions. Les contrats offerts sont généralement de 90 jours (d'où le terme de "noventeros", employé pour désigner ces travailleurs), à l'échéance desquels l'employeur se serait engagé à payer aux intéressés les frais de leur retour à leur domicile, ce que généralement il ne fait pas, empêchant ainsi ce retour. La fédération ajoute, pour ce qui est des conditions de travail, que les salaires sont extrêmement bas, les horaires excessifs et les soins médicaux inexistants, en dépit du risque élevé que courent les travailleurs de contracter des maladies telles que le paludisme, la tuberculose, la rage et l'uta (maladie de la peau).

La commission note les informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles une commission multisectorielle, créée par résolution ministérielle no 275-90-PCM en date du 26 juin 1990, a été chargée d'examiner et analyser la situation des travailleurs susmentionnés. Le gouvernement évoque d'autre part les difficultés d'accès à la zone couverte de forêts de Madre de Dios et a indiqué qu'une fois sur place la mission multisectorielle mettra en oeuvre les programmes d'inspection prévus et proposera des projets de normes protégeant les travailleurs des laveries d'or.

La commission prie le gouvernement de communiquer le rapport de cette commission ainsi que les programmes d'inspection prévus et les projets de normes destinés, d'après le rapport du gouvernement, à assurer la protection de ces travailleurs.

La commission espère que le gouvernement fournira également des informations sur toutes autres mesures prises ou envisagées pour assurer dans la pratique le respect de la convention.

2. Travail sans rémunération des mineurs dans des entreprises d'épluchage de châtaignes à Puerto Maldonado

La commission relève également les allégations de la FNTMMSP sur la situation régnant dans les entreprises d'épluchage de châtaignes de Puerto Maldonado, où des centaines d'enfants travaillent avec leurs mères jusqu'à douze heures par jour sans percevoir aucune espèce de rémunération et où sont recrutées surtout des mères de famille qui recourent à l'aide de leurs enfants afin de pouvoir remplir le nombre de barils de châtaignes exigés chaque jour.

La commission constate que les rapports communiqués en mai et novembre 1991 ne comportent aucune information à ce sujet.

La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises ou envisagées pour empêcher que les enfants soient indirectement obligés de travailler dans des conditions d'exploitation qui ne peuvent pas être assimilées à une relation libre de travail et d'indiquer les progrès accomplis dans ce sens.

3. Communautés indigènes d'Atalaya

Dans des commentaires antérieurs, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les conditions d'emploi des personnes qui travaillent sous le régime connu sous le nom d'"enganche" ainsi que sur toutes mesures prises pour assurer le respect de la convention en ce domaine.

La commission a noté à cet égard que, selon les conclusions du rapport final de la commission multisectorielle (créée par la résolution no 083-88-PCM) sur la situation des communautés indigènes d'Atalaya, il existe "des communautés qui sont soumises à la servitude à l'intérieur de grandes ou moyennes exploitations agricoles et/ou sylvicoles, qui constituent une main-d'oeuvre gratuite ou semi-gratuite; cette servitude, par un système d'avances ou "enganche", revêt dans de nombreux cas les caractéristiques de l'esclavage".

La commission a pris également note des indications relatives à l'"enganche", qui consiste en un système d'exploitation de la main-d'oeuvre indigène, manipulée de façon à être endettée, moyennant la fourniture d'avances par le patron sous forme d'ustensiles de travail, de repas ou d'argent pour permettre aux travailleurs de couper du bois et, en théorie, éteindre de la sorte la dette initiale et assurer la subsistance de sa famille. Obligés dès lors à rembourser une avance initiale à laquelle s'ajoutent des intérêts, les travailleurs sont victimes du cercle vicieux de l'exploitation et de la misère, qui forment les conditions permanentes de leur existence. La commission a également noté les allégations de cas précis qui illustrent pareilles situations.

La commission constate que les rapports du gouvernement ne comportent aucune information à ce sujet.

La commission prie le gouvernement de fournir un exemplaire du rapport final de la commission multisectorielle (créée par la résolution précitée) sur la situation des communautés indigènes d'Atalaya et d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour assurer le respect de la convention dans la pratique.

La commission note, d'après les indications figurant dans le rapport du gouvernement, que celui-ci a demandé à l'Institut indigéniste péruvien de fournir des données relatives aux conditions d'emploi des personnes qui travaillent sous le régime d'"enganche" dans les régions rurales et les laveries d'or du département de Madre de Dios.

Elle prie le gouvernement de bien vouloir communiquer les informations rassemblées sur cette question par l'Institut indigéniste péruvien.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 79e session, et de communiquer un rapport détaillé pour la période se terminant le 30 juin 1992.]

Observation (CEACR) - adoptée 1991, publiée 78ème session CIT (1991)

La commission prend note des commentaires communiqués en avril 1990 par la Fédération nationale des travailleurs des mines, de la métallurgie et de la sidérurgie du Pérou (FNTMMSP) concernant l'application de cette convention, dont copie fut communiquée au gouvernement le même mois afin qu'il puisse présenter les observations qu'il jugerait pertinentes.

Dans ses commentaires, l'organisation syndicale allègue l'existence de violations de la convention no 29 en ce qui concerne la situation des travailleurs des laveries d'or et des entreprises d'épluchage de châtaignes.

Les documents annexes, communiqués par cette organisation, se réfèrent en particulier aux moyens frauduleux de recrutement, connus sous le nom d'enganche, généralement à Puno et à Cuzco, de la part de personnes privées ou d'agences agissant pour le compte d'entreprises minières auxquelles la Direction nationale des mines a octroyé des concessions. Les contrats offerts sont généralement de 9O jours (d'où le terme "noventeros" employé pour désigner ces travailleurs) à l'échéance desquels l'employeur se serait engagé à payer aux intéressés les frais de leur retour à leur domicile, ce que généralement il ne fait pas, ce qui empêche le retour du travailleur à son lieu d'origine.

Ces documents ajoutent, pour ce qui est des conditions de travail, que les salaires sont extrêmement bas, les horaires excessifs et les soins médicaux inexistants, en dépit du risque élevé que courent les travailleurs de contracter des maladies telles que le paludisme, la tuberculose et la uta (maladie de la peau).

Dans ses commentaires, la FNTMMSP allègue en outre que, dans les entreprises d'épluchage de châtaignes de Puerto Maldonado, des centaines d'enfants travaillent avec leur mère jusqu'à douze heures par jour sans percevoir aucune espèce de rémunération. Il y est indiqué que ces entreprises recrutent surtout des mères de famille, lesquelles recourent à l'aide de leurs enfants afin de pouvoir remplir les six barils de châtaignes exigés chaque jour.

La commission rappelle que cela fait plusieurs années qu'elle prie le gouvernement de communiquer des informations sur les conditions d'emploi des personnes qui travaillent sous le régime de l'enganche, ainsi que sur toutes mesures prises pour assurer le respect de la convention en ce domaine.

La commission note à cet égard que, selon les conclusions du rapport final de la Commission multisectorielle (créée par la résolution no 083-88-PCM) sur la situation des communautés indigènes d'Atalaya, il existe "des communautés qui sont soumises à la servitude à l'intérieur de grandes ou moyennes exploitations agricoles et/ou sylvicoles (habilitación o enganche) qui constituent une main-d'oeuvre gratuite ou semi-gratuite; cette servitude par un système d'avances ou "enganche" revêt dans de nombreux cas les caractéristiques de l'esclavage".

La commission note les indications relatives à ce régime selon lesquelles il consiste en un système d'exploitation de la main-d'oeuvre indigène manipulée de façon à être endettée moyennant la fourniture d'avances par le patron sous forme d'ustensiles de travail, de repas ou d'argent pour permettre au travailleur de couper le bois et, en théorie, s'en servir pour éteindre la dette initiale et assurer la subsistance de la famille. Obligés ainsi à rembourser une avance initiale, à laquelle s'ajoutent des intérêts, les travailleurs sont victimes du cercle vicieux de l'exploitation et de la misère, conditions de vie permanentes. La commission a également noté des allégations illustrant des cas concrets de pareille situation.

En l'absence d'informations de la part du gouvernement sur les questions soulevées et compte tenu des communications reçues de l'organisation syndicale susmentionnée, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour enquêter sur les diverses situations alléguées et, le cas échéant, imposera les sanctions appropriées, conformément à l'article 25 de la convention. Elle espère que le gouvernement fournira des informations détaillées concernant les mesures qu'il aura prises.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1990, publiée 77ème session CIT (1990)

La commission note que le rapport n'a pas été reçu. Elle espère qu'un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu'il contiendra des informations complètes sur les points suivants soulevés dans sa précédente demande directe:

1. Article 2, paragraphe 2 a), de la convention. Dans des commentaires antérieurs, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations au sujet des travaux de développement effectués par les militaires en casernes.

La commission a pris note du décret-loi no 246 du 8 novembre 1983 portant loi sur le service militaire obligatoire et du décret suprême no 072-84-PCM portant règlement de cette loi communiqués par le gouvernement.

La commission a noté que le rapport du gouvernement, pour la période se terminant le 30 juin 1987, ne contenait pas de renseignements sur les programmes de coopération des forces armées aux actions de développement du Système national de soutien à la mobilisation sociale, prévues au décret-loi no 19352 de 1972 auquel elle s'est référée dans des commentaires antérieurs.

Elle rappelle qu'en vertu de la convention seuls les travaux qui présentent un caractère purement militaire ne sont pas compris dans son champ d'application.

La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les travaux de développement réalisés par les personnes qui accomplissent leur service militaire obligatoire.

2. Liberté des personnes au service de l'Etat de quitter leur emploi. Dans sa demande directe précédente, la commission avait prié le gouvernement de fournir copie des dispositions régissant la situation des militaires de carrière en ce qui concerne la liberté de quitter le service en temps de paix de leur propre initiative dans des délais raisonnables, soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis.

La commission a noté les informations communiquées par le gouvernement dans son rapport, pour la période se terminant le 30 juin 1987, selon lesquelles un statut spécial réglemente les droits et obligations du personnel militaire, selon qu'il s'agit des forces de police ou des armées de l'air, de terre ou de mer.

Elle a prié à nouveau le gouvernement de communiquer ce statut spécial afin de pouvoir s'assurer de sa conformité avec la convention.

Elle a prié également le gouvernement de communiquer copie des règlements établissant les conditions auxquelles le personnel qui a bénéficié d'une instruction ou d'un perfectionnement professionnel à charge de l'Etat peut demander qu'il soit mis fin à son service, de façon temporaire ou définitive.

3. Dans sa demande directe antérieure, la commission avait pris note de l'article 131 c) du décret suprême no 012-85 du 12 juin 1985 portant règlement du Code d'exécution des peines, en vertu duquel le travail des prisonniers peut être demandé par des particuliers par l'intermédiaire de l'administration pénitentiaire.

La commission a noté que le gouvernement se référait aux garanties en matière de salaire et de sécurité sociale prévues par ce règlement.

La commission a observé, néanmoins, que ni ce règlement, ni le Code d'exécution des peines ne prévoient le consentement exprès des détenus dans les cas où du travail leur est fourni par des particuliers.

En ce qui concerne le salaire des détenus au service de particuliers, ledit règlement en établit à l'article 126 la forme de paiement, mais ne fait aucune référence à son mode de fixation.

La commission a rappelé que, comme elle l'a indiqué aux paragraphes 97 à 99 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, l'emploi de prisonniers au service de particuliers n'est compatible avec la convention que lorsqu'il peut être assimilé à une relation de travail libre, c'est-à-dire quand l'intéressé y a donné son consentement et qu'il existe des garanties en matière de salaire et de sécurité sociale.

La commission a prié le gouvernement de fournir des indications sur les mesures prises pour assurer que les détenus au service de particuliers ou d'entreprises privées puissent donner leur consentement, de même que sur les systèmes de fixation des salaires versés par ces particuliers ou entreprises à la main-d'oeuvre pénitentiaire.

4. La commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour modifier l'article 132 du Code pénal, aux termes duquel le travail est obligatoire pour les condamnés et les personnes en détention provisoire, étant donné que le Code d'exécution des peines de 1985 établit le caractère facultatif du travail pénitentiaire pour ces derniers.

La commission avait noté les indications du gouvernement dans son rapport, pour la période se terminant le 30 juin 1987, selon lesquelles ce problème a été porté à la connaissance du ministère de la Justice afin qu'il en soit tenu compte lorsqu'un nouveau Code pénal sera adopté. La commission prie le gouvernement d'indiquer les progrès accomplis en ce sens.

5. Dans sa demande directe antérieure, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les dispositions légales applicables au type de contrat connu sous le nom d'"enganche", qui avait été mentionné dans le rapport présenté au Groupe de travail des Nations Unies sur l'esclavage par la Société antiesclavagiste pour la protection des droits de l'homme, concernant la servitude pour dettes et le travail forcé au Pérou (E/CN.4/Sub.2/AC.2/1984/NGO/1), en date du 30 juillet 1984.

La commission avait noté les indications du gouvernement selon lesquelles l'article 42 de la Constitution interdit le travail forcé, et le décret suprême du 7 décembre 1921 interdit le recrutement d'ouvriers agricoles par ceux que l'on nomme "enganchadores" ou intermédiaires dans les négociations des vallées de Chicama et Santa Catalina, à moins qu'ils ne représentent les propriétaires parties au contrat. La commission a noté que, d'après le gouvernement, la législation ne connaît pas de contrat appelé "enganche".

La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les conditions d'emploi des personnes qui, dans la pratique, travaillent en étant soumis au régime connu sous le nom d'"enganche" dans les régions rurales et les laveries d'or du Département de Madre de Dios, ainsi que sur les mesures prises ou envisagées pour assurer le respect de la convention en la matière.

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