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Demande directe (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

La commission salue le premier rapport présenté par le gouvernement au titre de l’application du protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, qui a été ratifié par le Canada en 2019, ainsi que les informations détaillées fournies par le gouvernement à ce sujet. Elle prend également note des observations du Congrès du travail du Canada (CLC) reçues le 31 août 2021; des observations de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) reçues le 10 février 2022; et de la réponse du gouvernement aux observations de la FIQ.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention, et article 1, paragraphe 2, du protocole. Politique nationale et action systématique et coordonnée. Traite des personnes. La commission prend note des informations du gouvernement sur les résultats de l’évaluation horizontale du Plan d’action national de lutte contre la traite des êtres humains (PAN-HT) pour la période 2012-2016, à laquelle ont participé les neuf organisations fédérales. L’évaluation a conclu que: i) le PAN-HT a permis d’accroître la sensibilisation et la compréhension de la traite des êtres humains parmi les fonctionnaires fédéraux; ii) il n’a que peu contribué aux enquêtes et aux poursuites dans les affaires de traite des êtres humains; et iii) il est nécessaire de se concentrer davantage sur la traite à des fins d’exploitation au travail, d’améliorer la collecte de données, d’aligner les réponses fédérales et provinciales, et d’accroître le soutien aux populations à risque. Suite à cette évaluation, la Stratégie nationale de lutte contre la traite des êtres humains 2019-2024, a été lancée qui repose sur cinq piliers: i) l’autonomisation des victimes; ii) la prévention; iii) la protection; iv) les poursuites; et v) le partenariat. Selon le rapport annuel 2019-2020 de la stratégie nationale, un groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur la traite des personnes a été créé pour faciliter la coordination et le partage d’informations à tous les niveaux. La commission note en outre que le gouvernement provincial de l’Ontario a adopté la Stratégie ontarienne de lutte contre la traite des êtres humains, 2020-2025, qui prévoit des actions visant à renforcer les services destinés aux et dirigés par communautés indigènes pour soutenir les victimes indigènes de la traite. De même, le gouvernement provincial de l’Alberta a lancé un plan d’action pour lutter contre la traite des êtres humains, qui prévoit la création d’un groupe de travail sur la traite des êtres humains chargé de partager les informations et de coordonner les actions sur une base permanente. La commission salue les efforts continus du gouvernement pour renforcer l’action contre la traite des personnes, tant au niveau fédéral que provincial, et pour évaluer les résultats obtenus. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures adoptées dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre la traite des êtres humains et les résultats obtenus, en indiquant comment une action coordonnée et systématique entre le gouvernement fédéral et les provinces/territoires est assurée par le Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur la traite des personnes. Enfin, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures adoptées au niveau provincial pour lutter contre la traite des personnes, notamment dans le cadre de la Stratégie de lutte contre la traite des personnes de l’Ontario et du Plan d’action de l’Alberta pour lutter contre la traite des personnes.
Article 25 de la convention et article 1, paragraphe 3, du protocole. 1. Définition et criminalisation de la traite des personnes (Exploitation). La commission rappelle qu’en vertu de l’article 279.01 du Code pénal, toute personne qui recrute, transporte, transfère, reçoit, détient, cache ou héberge une personne, ou exerce un contrôle ou une influence sur les mouvements d’une personne, ou encore l’oriente, dans le but de l’exploiter ou de faciliter son exploitation, est coupable d’un acte criminel. L’article 279.04 (1) du Code pénal prévoit que, aux fins de l’article 279.01, une personne exploite une autre personne «si elle l’amène à fournir ou à offrir de fournir un travail ou un service en adoptant un comportement qui, quelques soient les circonstances, pourrait raisonnablement amener l’autre personne à croire que sa sécurité ou celle d’une personne qu’elle connaît pourrait être menacée si elle ne devait pas fournir ou offrir le travail ou le service». La commission note à cet égard le projet de loi S-224 portant modification du Code pénal (traite des personnes), qui révise l’article 279.04 (1) et propose une nouvelle définition de l’exploitation, selon laquelle: «une personne est considérée comme exploitant une autre personne si elle adopte un comportement qui a) amène l’autre personne à fournir ou à offrir de fournir un travail ou un service; et b) implique, à l’égard de toute personne, le recours ou la menace de recours à la force ou à une autre forme de contrainte, l’utilisation de la tromperie ou de la fraude, l’abus d’une situation de confiance, de pouvoir ou d’autorité, ou tout autre acte similaire».
La commission observe que le projet de loi S-224 a pour objectif d’éliminer de la définition de l’«exploitation» (figurant à l’article 279.01 du Code pénal) l’élément selon lequel la personne craint que sa sécurité ou celle d’une personne qu’elle connaît est menacée, comme condition de l’existence du crime de traite. La commission espère que le projet de loi S-224 sera adopté dans un avenir proche et que la nouvelle définition de l’«exploitation» contribuera à mieux définir l’infraction de traite des personnes, permettant ainsi des poursuites plus efficaces. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
2. Poursuites et imposition de sanctions. La commission note que, selon Statistics Canada, 511 cas de traite de personnes ont été signalés à la police en 2019: 67 pour cent au titre de l’article 279.01 du Code pénal, et 33 pour cent au titre de l’article 118 de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (traite transfrontalière). Sur un total de 104 affaires judiciaires portant sur 356 accusations de traite de personnes, la grande majorité (89 pour cent) des accusations de traite ont été suspendues, retirées, rejetées ou acquittées. Moins d’une accusation sur dix a donné lieu à un verdict de responsabilité. La commission observe que l’évaluation du PAN-HT souligne les difficultés à rassembler des preuves pour poursuivre les auteurs de traite des personnes, de même que la réticence des victimes à témoigner par crainte de représailles. La commission prend également note des informations fournies par le gouvernement concernant diverses mesures visant à renforcer les capacités des organes chargés de l’application des lois impliqués dans les enquêtes sur les affaires de traite. Au niveau provincial, l’Ontario a adopté la Loi sur les registres des clients du secteur de l’hébergement (qui fait partie de la loi de 2021 sur la lutte contre la traite des êtres humains), qui contient des règles sur la manière et le moment où les services de police peuvent accéder aux informations contenues dans les registres des clients des hôtels pour dissuader les actes de traite, identifier et localiser les victimes. En outre, une équipe de poursuite spécialisée dans la traite des personnes a été mise en place, qui compte aujourd’hui 14 procureurs spécialisés dans la traite des personnes dans chaque région de la province. En Alberta, le ministère du Travail et de l’Immigration a dispensé à son personnel une formation sur l’identification de la traite des êtres humains et le soutien aux victimes, ce qui a donné lieu à une augmentation du nombre d’enquêtes, qui est passé de 58 en 2019-2020 à 95 en 2020-2021. La commission prie le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour faire face aux difficultés rencontrées par les autorités chargées de faire appliquer la loi dans le déroulement des enquêtes dans les affaires de traite et lors des poursuites judiciaires. En outre, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le nombre de poursuites, de condamnations et de sanctions appliquées en vertu des articles 279.01 du Code pénal et 118 de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.
Article 2 du protocole. Mesures préventives. Alinéas c) et d).Protection des travailleurs migrants contre d’éventuelles pratiques abusives ou frauduleuses et renforcement des services d’inspection du travail. Travailleurs étrangers temporaires. La commission note qu’en 2021, le gouvernement a proposé des modifications au règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés dans le but de renforcer la protection des travailleurs étrangers temporaires en fixant de nouvelles prescriptions et conditions pour les employeurs. Il s’agit notamment de l’obligation pour les employeurs de fournir aux travailleurs les dernières informations sur leurs droits au Canada et de signer un contrat de travail avec leurs travailleurs. La proposition élargirait également la définition d’«abus» (contenue dans l’article 209.2 (1) du règlement) afin d’y faire figurer les représailles à l’encontre d’un travailleur étranger temporaire. Elle interdirait également aux employeurs et aux recruteurs agissant en leur nom de facturer ou de recouvrer les frais de recrutement auprès du travailleur. La commission note également que plusieurs règlements provinciaux concernant les travailleurs étrangers temporaires interdisent toute confiscation de la pièce d’identité d’un travailleur étranger.
La commission note que, dans ses observations, le CTC se réfère à la situation des travailleurs étrangers temporaires qui vivent dans la crainte d’être expulsés s’ils se plaignent de mauvaises conditions et de mauvais traitements. A cet égard, le gouvernement indique que, en 2019, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a instauré le permis de travail ouvert pour les travailleurs vulnérables, qui est prévu à l’article 207.1, paragraphe 1, du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés. Ce type de permis permet aux travailleurs étrangers temporaires, titulaires d’un permis de travail valable associé à un employeur, qui subissent des abus ou risquent d’en subir, de recevoir un permis de travail ouvert à durée limitée leur offrant la possibilité d’abandonner leur employeur tout en conservant l’autorisation de travailler au Canada.
La commission note en outre que l’article 209.5 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés définit les raisons susceptibles de déclencher une inspection en vue d’un contrôle de la conformité des employeurs. Il s’agit des raisons suivantes: de bonnes raisons de soupçonner que l’employeur ne respecte pas la législation; celui-ci a des antécédents en matière de non-respect; ou une sélection aléatoire. Entre 2018 et 2020, un total de 11 828 inspections ont été effectuées dans le cadre du programme de mobilité internationale et un pour cent des employeurs inspectés ont été trouvés en situation de non-conformité. En Alberta, 275 inspections ont été menées entre 2019 et 2021 par l’Unité des enquêtes spéciales, concernant des travailleurs étrangers temporaires. En Nouvelle-Écosse, 71 inspections ciblées ont été menées concernant des personnes employant des travailleurs étrangers temporaires. Parmi elles, 63 ont été effectuées dans le secteur agricole et 8 dans le secteur de la transformation du poisson. Aucune infraction n’a été détectée. En Ontario, une opération de contrôle à l’échelle de la province a eu lieu entre septembre 2019 et avril 2020. Elle visait principalement les récidivistes, les agences de placement temporaire et les lieux de travail employant des travailleurs étrangers temporaires. Dans le cadre de cette initiative, 831 inspections ont été menées, à la suite desquelles 277 employeurs ont été jugés comme étant défaillants. La commission salue les efforts déployés par le gouvernement pour contrôler les conditions de travail des travailleurs étrangers temporaires et le prie de continuer à fournir des informations sur les résultats des inspections menées concernant les personnes employant des travailleurs étrangers temporaires ou les agences d’emploi, y compris des informations sur le nombre d’infractions constatées et les sanctions appliquées.La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de travailleurs étrangers en situation de vulnérabilité qui ont bénéficié de permis de travail ouverts, ainsi que sur les progrès réalisés en ce qui concerne l’adoption des amendements au Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés.
Alinéa e). Appui à la diligence raisonnable dont doivent faire preuve les secteurs tant public que privé. La commission prend bonne note des diverses initiatives prises par le gouvernement pour prévenir les risques de travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement, par le biais, notamment, d’un appui à la diligence raisonnable. Parmi elles, on citera: i) la Politique d’éthique dans l’approvisionnement en vêtements, selon laquelle les fournisseurs de l’habillement doivent certifier qu’eux-mêmes et leurs fournisseurs directs, qu’ils soient canadiens ou étrangers, respectent les droits fondamentaux du travail, notamment l’interdiction de travail forcé; ii) les amendements à la loi sur les tarifs douaniers afin d’inclure l’interdiction d’importer des biens dont la production a été effectuée entièrement ou en partie avec le recours au travail forcé, quel que soit leur pays d’origine; iii) l’élaboration du projet de loi S211, en vue de la promulgation de la loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d’approvisionnement et porte modification des tarifs douaniers. La loi impose aux institutions gouvernementales qui produisent, achètent ou distribuent des biens au Canada ou ailleurs, ainsi qu’aux entités qui produisent des biens au Canada ou ailleurs ou qui importent des biens produits à l’extérieur du Canada, l’obligation faire annuellement rapport sur les processus de diligence raisonnable, y compris les mesures prises pour remédier à toute situation de travail forcé détectée. La commission prend bonne note des mesures susmentionnées et prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les autres initiatives visant à soutenir la diligence raisonnable par les secteurs public et privé, ainsi que sur toute évaluation de leur impact. Prière également de fournir des informations sur les progrès réalisés concernant l’adoption du projet de loi S-211 et, s’il a été adopté, sur son application.
Article 3 du protocole. Protection et réadaptation des victimes de travail forcé. La commission note que le gouvernement fournit des informations sur la mise en place d’une ligne d’assistance téléphonique pour les victimes de traite des êtres humains. Il s’agit d’un service multilingue et confidentiel, fonctionnant 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, dans le but de mettre en relation les victimes et les survivants avec les services sociaux, les forces de l’ordre et les services d’urgence, et pour leur permettre de recevoir des conseils du public. Elle prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, conformément à la Constitution canadienne, les provinces et les territoires sont responsables de l’administration de la justice, ce qui inclut la prestation de services aux victimes et que certaines provinces ont mis en place des services spéciaux de protection des victimes de la traite.
La commission note en outre l’indication du gouvernement selon laquelle les victimes de la traite de personnes peuvent obtenir sans frais un permis de séjour temporaire pour les victimes de la traite des personnes (PST VTP) d’une durée maximale de six mois, dont la délivrance n’est pas soumise à l’obligation pour la victime de coopérer avec les autorités politiques et judiciaires. Un ressortissant étranger qui reçoit un PST VTP valable pendant au moins six mois peut prétendre à un permis de travail ouvert et à une couverture médicale dans le cadre du Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI). Selon les informations statistiques fournies par le gouvernement, en 2019, 267 demandes de PST VTP ont été reçues, dont 92 pour cent ont été approuvées; en 2020, 131 demandes ont été approuvées (taux d’approbation de 88 pour cent); et entre janvier et avril 2021, 3  demandes ont été approuvées (ce qui correspond à un taux d’approbation de 90 pour cent). La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures de protection et de réadaptation accordées aux victimes de travail forcé. À cet égard, elle prie le gouvernement de fournir des informations statistiques sur le nombre de victimes de travail forcé qui ont obtenu un permis de séjour temporaire destiné aux victimes de la traite des personnes, et sur le nombre de victimes ayant bénéficié de services de réadaptation et de réintégration.
Article 4 du protocole. Accès à des mécanismes de recours appropriés et efficaces, tels que l’indemnisation. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, en vertu de la Charte canadienne des droits des victimes, toute victime a le droit de demander au tribunal d’envisager de rendre une ordonnance de dédommagement. Conformément au Code pénal, une ordonnance de dédommagement peut être prononcée, dans le cadre de leur condamnation, à l’encontre de personnes déclarées coupables de traite de personnes, obligeant l’auteur de l’infraction à verser une somme d’argent à la victime. Certaines provinces ont également adopté des lois qui donnent aux victimes la possibilité d’engager une action civile à l’encontre des auteurs de l’infraction qu’elles ont subie pour obtenir d’eux une réparation pécuniaire. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de victimes de travail forcé qui ont réclamé et obtenu une compensation ou toute autre forme de réparation. Prière d’indiquer comment les victimes peuvent obtenir une indemnisation en dehors des procédures judiciaires ou lorsque les auteurs n’ont pas été identifiés.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. 1. Liberté des fonctionnaires de quitter leur emploi. La commission rappelle qu’en vertu de la loi sur l’emploi dans la fonction publique (article 63) et de la loi sur la fonction publique du Nouveau-Brunswick (article 24), un fonctionnaire ne peut démissionner de la fonction publique qu’après avoir obtenu l’autorisation de l’administrateur général. Le gouvernement indique à cet égard qu’aucune disposition de la loi sur l’emploi dans la fonction publique n’empêche l’acceptation d’une démission et qu’il n’y a donc pas de statistiques disponibles concernant le nombre de refus. Il précise également que la révision de la loi sur la fonction publique du Nouveau-Brunswick est toujours en cours. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur tout progrès réalisé concernant la révision de la loi sur la fonction publique du Nouveau-Brunswick.
2. Obligation d’effectuer des heures supplémentaires. Personnel infirmier. La commission note que la FIQ se réfère, dans ses observations, à une pratique ancienne et courante qui consiste à imposer des heures supplémentaires au personnel infirmier des établissements de santé du Québec afin de faire face au manque de personnel. La FIQ indique notamment que, en vertu de l’article 59.01 de la loi sur les normes du travail du Québec, un salarié ne peut refuser d’effectuer des heures supplémentaires dans des situations où il existe un danger pour la vie, la santé ou la sécurité des employés ou de la population; lorsqu’il y a un risque de destruction ou de détérioration grave d’un bien meuble ou d’un immeuble, ou dans tout autre cas de force majeure; ou si le refus est incompatible avec le code d’éthique professionnelle du membre du personnel. La FIQ souligne que, dans la plupart des cas, les employeurs ne mentionnent pas l’existence d’une force majeure mais imposent des heures supplémentaires sur la base du code de déontologie (qui figure dans le contrat de travail), selon lequel le personnel infirmier n’est pas autorisé à quitter ses fonctions sans s’être assuré au préalable qu’un autre membre du personnel les reprendra. Ceux qui refusent d’effectuer des heures supplémentaires peuvent faire l’objet de plaintes devant les tribunaux du travail. La commission observe que, selon la FIQ, cette pratique a des conséquences néfastes sur la santé et le bien-être du personnel infirmier.
La commission prend note de la réponse détaillée du gouvernement à la FIQ, qui contient une description du cadre juridique qui s’applique aux heures supplémentaires des travailleurs de la santé au Québec, des statistiques actualisées, ainsi que des informations sur les nouvelles mesures prises pour diminuer le recours aux heures supplémentaires obligatoires du personnel infirmier. Le gouvernement indique que la convention collective entre la FIQ et le gouvernement du Québec, en vigueur jusqu’en mars 2023, ne régit pas spécifiquement les heures supplémentaires obligatoires. Toutefois, tant le Code déontologique des infirmiers que le Code déontologique des aides-soignants prévoient l’obligation de ne pas abandonner le patient et d’assurer la continuité du service qui leur est confié. Le gouvernement souligne que la décision d’une personne de travailler comme infirmier va de pair avec son acceptation de respecter les obligations énoncées dans les codes déontologiques pertinents. Il précise également que l’imposition d’heures supplémentaires au personnel infirmier est une mesure de dernier recours faisant l’objet d’une analyse au cas par cas. La commission note que le gouvernement cite plusieurs accords entre la FIQ et différents établissements de santé du Québec, qui garantissent que le recours au travail supplémentaire obligatoire ne constitue pas une pratique systématique pour pallier le déficit de main-d’œuvre, mais demeure une mesure exceptionnelle. Une jurisprudence a également été développée en la matière soulignant les principes selon lesquels le travail supplémentaire obligatoire du personnel infirmier ne doit être autorisé que dans des situations exceptionnelles et d’urgence, et non pas être utilisé de façon abusive, irrationnelle ou discriminatoire par l’employeur. Selon les statistiques fournies par le gouvernement, au cours de l’année 2021-2022, 30 pour cent du personnel infirmier du Québec a effectué des heures supplémentaires au moins à une occasion sur une période de paie de deux semaines (19 pour cent l’ont fait jusqu’à trois fois dans une année; 11 pour cent jusqu’à quatre fois ou plus; et 2,6 pour cent ont dépassé au moins quatre fois les 100 heures de temps de travail sur une période de deux semaines).
Enfin, la commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, en octobre 2021, le directeur chargé des conditions de travail du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec a publié une lettre à l’intention des établissements de santé indiquant différents moyens de limiter le recours aux heures supplémentaires obligatoires du personnel infirmier en place, parmi lesquels figurent: la tenue d’une liste du personnel disponible pour effectuer des heures supplémentaires sur la base du volontariat; la réorganisation des programmes de travail du personnel en place; et la possibilité éventuelle de faire appel à des services de professionnels indépendants ayant l’expertise requise. Elle note également que le gouvernement du Québec a mis en place un système de contrôle du recours aux heures supplémentaires obligatoires dans les services de santé.
Le gouvernement ajoute que l’imposition d’heures supplémentaires au personnel infirmier en raison d’un manque de personnel infirmier est un sujet important. C’est pourquoi le gouvernement du Québec a indiqué être prêt à continuer ses efforts pour limiter le recours à cette pratique, en apportant son appui au fonctionnement des établissements de santé et en améliorant les conditions de travail du personnel infirmier.
La commission prend bonne note de toutes ces informations et de l’engagement du gouvernement à maintenir comme une mesure de dernier recours l’imposition d’heures supplémentaires au personnel infirmier des établissements de santé du Québec. Tout en reconnaissant la nécessité d’assurer la continuité du service de santé, la commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour limiter le recours aux heures supplémentaires obligatoires du personnel infirmier à des circonstances exceptionnelles et à prendre des mesures pour résoudre la question de la pénurie de personnel infirmier, en consultation avec les organisations de travailleurs, de manière à assurer la continuité du service de santé. Prière de continuer à fournir des informations statistiques actualisées sur le nombre d’infirmiers ayant effectué des heures supplémentaires obligatoires et sur la fréquence à laquelle ces heures supplémentaires sont requises.
Article 2, paragraphe 2 c) de la convention. Travail obligatoire comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire. Travail pénitentiaire. La commission a précédemment noté qu’au Nunavut et à l’Ile-du- Prince-Édouard, le travail semblait être obligatoire pour les prisonniers. Elle a par conséquent prié le gouvernement d’indiquer si, dans un tel cas, les prisonniers pouvaient travailler pour des entités privées. Le gouvernement indique que la loi sur les services correctionnels du Nunavut a été remplacée dans son intégralité en 2019. En ce qui concerne l’Île-du-Prince-Édouard, il précise que le système pénitentiaire de cette province n’autorise pas que les prisonniers soient employés ou placés à l’extérieur, auprès de particuliers ou d’entreprises ou d’associations privées. En revanche, les détenus peuvent être autorisés à se rendre à leur travail pendant leur incarcération, généralement chez leur ancien employeur. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport copie de la loi sur les services correctionnels du Nunavut, y compris ses règlements.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

La commission prend note des observations du Congrès du travail du Canada (CLC), ainsi que des observations du Conseil du patronat du Québec (CPQ) communiquées avec le rapport du gouvernement.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. 1. Traite des personnes. Alinéa a). Cadre juridique et contrôle de l’application de la loi. La commission avait noté précédemment que l’article 279.01 du Code criminel interdit la traite des personnes (infraction passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans), tout comme l’article 118 de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. A cet égard, le gouvernement avait indiqué que des procédures judiciaires sur le fondement des dispositions légales incriminant la traite des personnes avaient été engagées dans 12 affaires relevant du travail forcé entre 2009 et mai 2014 et que des condamnations avaient été prononcées à l’encontre de 25 personnes physiques et d’une personne morale, avec des peines allant de six mois à neuf ans d’emprisonnement. Néanmoins, la commission avait noté que la Confédération des syndicats nationaux (CSN) avait mentionné un rapport de 2013 de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) relatif à la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle au Canada. Selon ce rapport, dans certaines parties du pays, les institutions investies de l’autorité publique et leurs fonctionnaires n’enquêteraient pas sur les affaires relevant de la traite des êtres humains, parce qu’ils ne connaissaient pas toujours la législation pertinente, n’appréhendaient pas pleinement cette forme de criminalité, manquaient de moyens ou encore avaient d’autres priorités.
La commission prend note des observations du CPQ selon lesquelles le gouvernement a pris des mesures pour éliminer le travail forcé dans le cadre du Plan national de lutte contre la traite de personnes. De plus, une équipe spéciale a été mise en place au sein de la Gendarmerie royale du Canada afin de lutter contre la traite et l’exploitation sexuelle.
La commission note aussi que, dans son rapport, le gouvernement indique que le gouvernement fédéral a pris plusieurs initiatives dans le cadre du Plan national de lutte contre la traite de personnes, par exemple la publication et la diffusion du manuel opérationnel à l’intention des policiers et des procureurs portant sur les affaires de traite de personnes, approuvé par les ministres chargés de la justice à l’échelle fédérale, provinciale et territoriale. Le gouvernement indique également que, en juin 2017, le Centre national de coordination contre la traite de personnes avait identifié 428 cas depuis 2005 dans lesquels des charges spécifiques ayant trait à la traite de personnes ont été retenues. La plupart des 408 cas de traite interne portaient sur l’exploitation sexuelle, et les 20 cas de traite internationale étaient principalement liés à l’exploitation au travail. De plus, la condamnation la plus lourde pour traite de personnes à des fins d’exploitation sexuelle a été assortie d’une peine d’emprisonnement de vingt-trois ans, alors qu’un cas de traite de personnes à des fins de travail forcé dans lequel l’inculpé avait plaidé coupable a donné lieu à une peine d’emprisonnement de neuf ans. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’application dans la pratique de l’article 279.01 du Code criminel et de l’article 118 de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, y compris sur le nombre de poursuites et de condamnations, et les sanctions appliquées. La commission prie aussi le gouvernement de communiquer copie des décisions de justice pertinentes.
Alinéa b). Prévention de la traite et protection des victimes. La commission avait noté précédemment que le gouvernement indiquait que le Plan d’action national de lutte contre la traite de personnes, lancé en juin 2012, propose des stratégies qui permettent d’appuyer les organisations fournissant une assistance aux victimes et de protéger les ressortissants étrangers contre tout travail illégal ou contre tout travail sans conditions de sécurité. Des permis de séjour temporaires peuvent être délivrés aux victimes de traite et, entre mai 2006 et décembre 2011, 73 ressortissants étrangers en ont bénéficié.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le plan d’action national est arrivé à son terme en mars 2016. Une évaluation du plan est en cours et devrait être finalisée à l’automne 2017. Ces conclusions contribueront à apporter des éclaircissements et à orienter l’action future. La commission note également que, en Alberta, les ressortissants étrangers qui sont munis d’un permis de séjour temporaire délivré en vertu de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, et qui sont considérés comme victimes de traite des personnes par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) peuvent bénéficier d’un soutien du revenu pendant la durée de leur permis, y compris d’une prolongation accordée par IRCC. Ces personnes ont également droit à des prestations de santé dans le cadre du programme «Alberta Works» s’ils ne bénéficient pas de prestations de soins de santé au titre du Programme fédéral de santé intérimaire. En Colombie britannique, une formation est dispensée aux fournisseurs de services, aux auxiliaires de vie et à leur réseau de soutien social. Des activités de sensibilisation sont également menées dans plusieurs provinces, par exemple la Nouvelle-Ecosse et l’Ontario. Néanmoins, la commission note que, dans ses observations finales du 25 novembre 2016, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) s’est dit préoccupé par le manque de mécanismes adéquats pour identifier et orienter les victimes de la traite qui ont besoin d’une protection, par l’absence de données suffisantes sur les victimes de la traite et par le manque de mesures systématiques de réadaptation et de réinsertion, y compris l’accès à des conseils, à des soins médicaux et à un soutien psychologique, ainsi qu’à des mesures de réparation, sous la forme d’une indemnisation, pour les victimes de la traite, qui n’ont pas automatiquement droit à des permis de résidence temporaires, à moins qu’elles ne coopèrent avec la police et les autorités judiciaires (CEDAW/C/CAN/CO/8-9, paragr. 32). La commission prie donc le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour améliorer l’identification des victimes de traite et veiller à ce que toutes ces victimes bénéficient d’une protection et d’une assistance appropriées. La commission prie aussi le gouvernement d’indiquer le nombre de victimes identifiées et de celles ayant bénéficié de services de réadaptation et de réinsertion. La commission prie également le gouvernement de donner des informations sur l’évaluation de la mise en œuvre du Plan national de lutte contre la traite de personnes 2012, et d’indiquer si un nouveau plan sera adopté pour la prochaine période.
2. Travailleurs étrangers temporaires. La commission avait pris note précédemment des allégations du CTC selon lesquelles les personnes qui entrent dans le pays au titre du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) risquent de travailler dans des conditions s’apparentant à du travail forcé. Les visas de travail délivrés aux travailleurs étrangers temporaires portent le nom de leur employeur et sont assortis de restrictions au travail pour un autre employeur. En outre, des restrictions importantes les empêchent de quitter leur travail lorsque leurs droits ne sont pas respectés. S’agissant du contrôle, le CTC avait affirmé que, bien que le PTET relève de la juridiction fédérale, la surveillance des conditions d’emploi des travailleurs concernés relève de la juridiction provinciale/territoriale et que, par conséquent, le contrôle des conditions de travail de ces travailleurs est limité.
La commission avait noté que le gouvernement, dans sa réponse à ces allégations, avait indiqué que les travailleurs étrangers temporaires bénéficiaient des mêmes protections que les travailleurs canadiens. Il avait indiqué aussi que les préoccupations spécifiques soulevées par le CTC avaient été levées par des modifications législatives et des modifications de politique à l’échelle fédérale et des provinces, et que plusieurs cas mentionnés par le CTC avaient abouti à des condamnations par les tribunaux et/ou les tribunaux des droits de l’homme. La commission avait noté que les documents mentionnés par le gouvernement dans sa réponse montraient que les travailleurs migrants peuvent changer d’employeur en demandant un nouveau permis de travail, que les employeurs peuvent faire l’objet d’une inspection pendant les six années qui suivent la date de délivrance d’un permis de travail pour un travailleur étranger temporaire, et que ces inspections peuvent prendre la forme de visites sur site sans mandat (sauf pour les résidences privées). Le gouvernement avait également indiqué que des changements dans le PTET et dans ses réglementations avaient été annoncés en juin 2014 et que ceux-ci se traduiraient par un accroissement du nombre et de la portée des contrôles des employeurs occupant des travailleurs temporaires étrangers, et par un durcissement des sanctions à l’égard de ceux qui ne seraient pas en règle, notamment par une interdiction d’employer des travailleurs étrangers temporaires pendant deux ans et des sanctions financières.
La commission prend note de l’information suivante du gouvernement: depuis 2014, le Département Emploi et Développement social Canada (ESDC) met à disposition un numéro d’appel antifraude qui permet aux travailleurs étrangers temporaires et à la population en général de dénoncer en toute confidentialité d’éventuels abus. Des modifications réglementaires ont été introduites en 2015 en vertu desquelles les employeurs qui ne respecteraient pas les conditions du programme sont passibles d’une sanction monétaire administrative d’un montant compris entre 500 et 100 000 dollars du Canada par infraction (1 million de dollars au maximum par an) et de mise à l’index d’une durée variable (un, deux, cinq ou dix ans) ou permanente dans les cas extrêmes de fraude. Le nom de ces employeurs est publié sur le site Internet du gouvernement. Entre juin 2014 et mai 2017, 7 363 inspections ont été effectuées.
La commission prend note aussi de l’indication du gouvernement selon laquelle, en Alberta, l’Unité des enquêtes spéciales (SIU) (exécution du Programme des normes d’emploi (ESPD)), qui inclut le Bureau consultatif pour les travailleurs étrangers temporaires, a été instituée en 2015 et est chargée d’examiner toutes les plaintes concernant des travailleurs vulnérables. En 2014, l’ESPD a également mis en place des lignes d’appel anonyme pour permettre aux travailleurs vulnérables de dénoncer des abus. Le gouvernement indique également que le Bureau consultatif pour les travailleurs étrangers temporaires a joué un rôle essentiel dans 34 enquêtes sur la traite de travailleurs, et participe actuellement à des enquêtes sur 13 autres cas. De plus, entre juin 2014 et mai 2017, 151 inspections concernant des travailleurs étrangers temporaires ont été menées et ont établi que 93 employeurs ne respectaient pas le Code des normes d’emploi. En Ontario, pendant la période 2014-2017, le Programme des normes d’emploi a permis de réaliser 184 inspections sur des lieux de travail qui étaient connus pour occuper des travailleurs étrangers temporaires. Elles ont permis de constater 18 infractions portant sur des retenues illégales sur les salaires et 6 sur le non-paiement des salaires. Le gouvernement indique en outre que, à cet égard, les gouvernements d’Alberta et d’Ontario ont conclu un accord de partage d’information avec le gouvernement fédéral en 2017 et en 2015, respectivement.
La commission prend également note des observations du CTC figurant dans le rapport du gouvernement. Se référant au rapport de 2017 sur le programme des travailleurs étrangers temporaires élaboré par le Bureau du vérificateur général du Canada, le CTC indique que, sur les milliers de contrôles réalisés par le gouvernement depuis 2015, la grande majorité sont d’ordre administratif. Seulement 13 inspections sur place ont été menées à bien sur 173 inspections. En outre, les employeurs avaient été avertis à l’avance des inspections sur site. Tout en prenant note des mesures prises par le gouvernement, la commission le prie de continuer à fournir des informations sur les autres mesures prises pour protéger les travailleurs étrangers temporaires contre les formes d’exploitation au travail relevant du travail forcé. La commission prie également le gouvernement de continuer à communiquer des informations sur le nombre d’inspections effectuées sur des lieux de travail occupant des travailleurs étrangers temporaires, sur les résultats de ces inspections et sur les sanctions spécifiques appliquées.
3. Aborigènes victimes de la traite. La commission avait pris note de la déclaration de la CSN selon laquelle le gouvernement ne prenait pas les mesures nécessaires pour éradiquer la traite des filles et femmes aborigènes. La CSN s’était référée à cet égard au rapport de 2013 de la Gendarmerie royale du Canada, d’après lequel, dans plusieurs affaires de traite d’êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle à l’intérieur du pays, les victimes étaient des aborigènes. Selon ce rapport, si le nombre de ces victimes aborigènes ne représentait pas une part importante du nombre total des victimes de toutes les affaires de traite ayant débouché sur des poursuites, dans la mesure où les aborigènes canadiens ne représentaient que 4 pour cent de l’ensemble de la population canadienne, le nombre des victimes aborigènes identifiées dans ces affaires démontrait une proportion élevée de victimes de traite dans cette population.
La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle plusieurs mesures ont été prises à l’échelle des provinces. En Alberta, Alberta Indigenous Relations se focalise sur l’amélioration des résultats socio économiques pour les femmes autochtones et leurs familles. Le gouvernement mène aussi des politiques de soutien du revenu pour aider les victimes autochtones de traite qui demandent une aide financière d’urgence. En Ontario, le gouvernement met en œuvre la Stratégie pour les enfants et les jeunes autochtones avec des partenaires autochtones. La loi sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille, qui devrait entrer en vigueur en avril 2018, se réfère à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. En Terre Neuve et Labrador, la phase II de l’Initiative de prévention de la violence a été présentée en octobre 2015 et s’inspire du plan d’action sur quatre ans (2015 2019) qui s’attaque notamment à la traite et à l’exploitation sexuelle. Le gouvernement de Terre Neuve et Labrador consacre chaque année des ressources au programme «Safe Harbour Outreach», créé par le Centre Saint John’s Women pour aider les personnes qui se livrent au commerce du sexe. Des provinces participent également à l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées qui a été établie en 2015, notamment l’Alberta et la Nouvelle-Ecosse.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1. 1. Liberté des fonctionnaires de quitter leur emploi. La commission avait noté précédemment que l’article 63 de la loi sur l’emploi dans la fonction publique prévoit qu’un fonctionnaire peut démissionner de la fonction publique en donnant préavis, par écrit, de son intention à l’administrateur général. Le service cesse, à la date précisée par écrit par l’administrateur général, indépendamment de la date d’acceptation. La commission avait noté également que, dans la province du Nouveau Brunswick (en vertu de l’art. 24 de la loi sur la fonction publique du Nouveau Brunswick), et sur le territoire du Nunavut (en vertu de la loi sur la fonction publique du Nunavut), les fonctionnaires ne peuvent démissionner que si cette démission est acceptée.
La commission prend note de l’absence d’information sur l’application de l’article 63 de la loi sur l’emploi dans la fonction publique à l’échelle fédérale. Néanmoins, le Conseil du Trésor du Nouveau-Brunswick indique qu’aucun cas de démission en vertu de l’article 24 de la loi sur la fonction publique n’a été rejeté. On envisage également de réviser la loi sur la fonction publique l’année prochaine, dans le cadre de l’élaboration d’une stratégie de gestion des personnes pour le Nouveau Brunswick. De plus, en application de l’article 19 de la loi sur la fonction publique du Nunavut (SNU 2013, C26), un fonctionnaire peut démissionner en donnant à l’administrateur général un préavis par écrit d’au moins deux semaines, et en indiquant le dernier jour où il exercera ses fonctions. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application de l’article 63 de la loi sur l’emploi dans la fonction publique à l’échelle fédérale, en indiquant les conditions dans lesquelles la démission d’un fonctionnaire peut être refusée, et sur le nombre d’acceptations et de refus et, le cas échéant, les motifs du refus. La commission prie aussi le gouvernement de communiquer des informations sur tout progrès accompli dans la révision de la loi sur la fonction publique au Nouveau Brunswick.
2. Liberté des militaires de carrière des forces armées de quitter le service. La commission avait noté précédemment que, d’après l’article 15.02 du chapitre 15 des ordonnances et règlements royaux applicables aux forces canadiennes, en ce qui concerne la libération, aucun officier ou militaire du rang ne peut demander sa libération de droit, sauf: i) un officier ou militaire du rang qui n’est pas en service actif, en raison d’un état d’urgence dont le service lui donne droit à une pension immédiate en vertu de la loi sur la pension de retraite des forces canadiennes; ii) un officier ou militaire du rang qui a terminé un engagement de durée intermédiaire de vingt ans ou de vingt-cinq ans; et iii) un officier qui a terminé sa période déterminée de service. L’article 15.18 dispose que les officiers et les militaires du rang peuvent demander une libération volontaire. Cette demande doit être présentée par écrit au Chef d’Etat-Major de la défense qui la transmet ensuite au quartier général de la défense nationale.
La commission prend note de l’information suivante du gouvernement: se référant à l’article 23 de la loi sur la défense nationale et à son annexe A, appendice 3 sur la libération volontaire, un membre des forces armées canadiennes doit donner un préavis de six mois avant la date souhaitée de libération. Des initiatives récentes ont permis de ramener ce délai à trente jours si aucune condition requise dans la réglementation applicable ne limite la libération, par exemple une situation d’urgence nationale ou de guerre, pendant un an après la situation d’urgence ou de guerre, un service obligatoire en cours ou une période pendant laquelle la possibilité de libération est restreinte. D’une manière générale, les demandes volontaires peuvent être refusées ou retardées en fonction des obligations de service obligatoire du militaire, ou jusqu’à ce que ces obligations de service arrivent à leur terme ou fassent l’objet d’une dérogation. Le gouvernement indique également que, en application de la directive et ordonnance administrative de la défense (DAOD 5049-1) sur les programmes d’études ou de formation subventionnés, on entend par service obligatoire une période spécifiée pendant laquelle un membre des forces armées doit servir, après avoir bénéficié d’études ou d’une formation subventionnée, lorsqu’il a reçu l’indemnité provisoire des pilotes ou l’indemnité de recrutement direct des officiers médecins et dentistes. Un membre accomplissant le service obligatoire peut également bénéficier d’une libération volontaire pour des raisons personnelles ou familiales. Une libération volontaire avant la fin d’une période de service obligatoire donne lieu au remboursement des frais liés aux études ou à la formation subventionnée. La commission prend note également des informations statistiques fournies par le gouvernement à cet égard selon lesquelles, entre avril 2015 et mars 2017, 10 298 personnes ont été libérées des forces régulières, et 298 demandes de libération ont été rejetées.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail obligatoire comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire. 1. Travail pénitentiaire. Alinéa a). Prisons fédérales. La commission avait noté précédemment que, selon le gouvernement, la législation fédérale ne contient pas de dispositions relatives au travail pénitentiaire obligatoire. Elle avait noté que, en vertu de la loi sur le système correctionnel et la liberté conditionnelle, le service correctionnel du Canada encourage les personnes condamnées à une peine fédérale à participer activement à des programmes, notamment aux programmes d’emploi et aux formations professionnelles. Selon le site Internet du service correctionnel du Canada, le service administre le programme CORCAN qui offre aux délinquants des possibilités d’emploi et de formation sur les compétences relatives à l’employabilité. Ces emplois leur permettent de travailler dans la communauté pour des organismes à but non lucratif et des entreprises du secteur privé.
La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle l’emploi de détenus est volontaire. Le gouvernement indique également que, tel qu’indiqué dans la directive 730 du Commissaire, le niveau de rétribution des détenus va de 5,25 à 6,90 dollars par jour pour ceux qui participent aux programmes. Les détenus qui ne sont pas en mesure de participer à une affectation à un programme pour des raisons indépendantes de leur volonté reçoivent une indemnité quotidienne de 2,50 dollars, et ceux qui refusent toute affectation reçoivent une indemnité quotidienne de base de 1 dollar. Une séance d’orientation au travail est proposée aux détenus avant qu’ils ne commencent une affectation à un emploi, y compris sur les procédures relatives à la santé et à la sécurité, ainsi que sur les règlements précis à respecter. Le service correctionnel du Canada aide également le détenu dont la libération est prévue à obtenir les documents utiles, y compris en ce qui concerne la couverture de soins de santé et le numéro d’assurance sociale.
Alinéa b). Prisons provinciales et territoriales. La commission avait noté précédemment que, dans trois provinces et territoires, le travail semble être obligatoire pour les prisonniers des prisons provinciales/territoriales, en particulier à Terre-Neuve (en vertu de l’art. 21 du règlement d’application de la loi sur les prisons), au Nunavut (art. 18 de la loi sur les services correctionnels du Nunavut) et à l’Ile-du-Prince-Edouard (art. 10 de la loi sur les services correctionnels de l’Ile-du-Prince-Edouard). La commission avait donc prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour veiller à ce que, dans les provinces et territoires où les prisonniers sont obligés d’exécuter un travail, celui ci soit accompli sous la supervision et le contrôle d’une autorité publique et à ce que ces prisonniers ne soient pas concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées.
La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle, à Terre-Neuve-et-Labrador, les détenus participant à un programme de travail ne sont pas concédés au secteur privé ou mis à sa disposition. Le gouvernement indique également que, dans la pratique, les détenus au Nunavut ne sont pas forcés à travailler ni pour une autorité ni pour des particuliers ou des entités privées. Des modifications à la loi sur le système correctionnel, dont l’abrogation de l’article 18, ont été introduites en mars 2017, et n’ont pas encore été approuvées par l’Assemblée législative. La commission prend note de l’absence d’information sur l’Ile-du-Prince-Edouard.
La commission prend note aussi de l’indication du gouvernement selon laquelle la législation et les règlements de l’Alberta obligent les détenus condamnés à travailler, et des sanctions peuvent être imposées à ceux qui refusent de travailler ou sont inactifs, insouciants ou négligents au travail. Il existe aussi des circonstances limitées dans lesquelles des détenus peuvent travailler pour des entités privées, par exemple pour le service de restauration de certaines institutions, dans le cadre du programme de travaux compensatoires. Dans ce programme, le travail est entièrement volontaire et les détenus peuvent demander d’y participer et y être acceptés. Ces travaux ne sont pas rémunérés, mais servent à obtenir des crédits pour compenser une sanction financière. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès accomplis dans l’adoption des amendements à la loi sur les services correctionnels du Nunavut. La commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer si des détenus sont autorisés à être recrutés ou mis à la disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées à l’Ile-du-Prince-Edouard.
La commission avait noté précédemment que, dans la majorité des provinces et des territoires, le travail pénitentiaire se fait sur la base du volontariat. Elle avait noté également que la législation de plusieurs provinces permet aux prisonniers de travailler à l’extérieur de la prison (en vertu de l’art. 23 de la loi sur les services correctionnels de la Colombie Britannique, de l’art. 25 de la loi sur les services correctionnels de l’Ontario, et de l’art. 76 de la loi sur le système correctionnel du Québec).
La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle, en Colombie Britannique, des centres correctionnels ont passé des contrats avec des entreprises privées pour occuper des détenus, lesquels travaillent sur une base volontaire et sont rémunérés selon un taux de salaire fixé pour le travail qu’ils ont effectué. Néanmoins, la législation sur l’emploi ne s’applique pas aux détenus en ce qui concerne leur participation à un programme de travail. Au Québec, les détenus travaillent sur une base volontaire et leur rémunération équivaut à un tiers du salaire minimum. Ils bénéficient aussi d’une protection en ce qui concerne la sécurité et la santé au travail, et cotisent à un système de sécurité sociale en fonction de leurs revenus. La commission note également que, en Ontario, aucune forme de travail obligatoire n’est prévue dans les lois, réglementations ou politiques du ministère de la Sécurité communautaire et des services correctionnels, et que ni des décisions judiciaires ou administratives ni des enquêtes n’ont permis de constater des situations préoccupantes.
2. Sanctions communautaires. La commission avait noté précédemment que le gouvernement avait indiqué que, en vertu du Code criminel, lorsqu’une personne est déclarée coupable d’une infraction, le tribunal peut sursoir au prononcé de la peine et ordonner que le délinquant soit libéré selon les conditions prévues dans une ordonnance de probation (si aucune peine de prison minimale n’est prévue). En vertu de l’article 742.3(2)(d) du Code criminel, le tribunal peut imposer au délinquant d’accomplir, au plus, deux cent quarante heures de service communautaire au cours d’une période maximale de dix-huit mois. La commission avait noté également que le gouvernement indiquait que toutes les provinces disposent également d’un type de sanctions communautaires. La commission avait prié le gouvernement de fournir des informations permettant d’établir si le travail exécuté dans le cadre de ces sanctions communautaires ou des programmes de service communautaire, peut être réalisé au profit d’entités privées.
La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle les services communautaires sont réalisés pour des entités publiques ou des organisations sans but lucratif en Alberta, en Terre Neuve-et-Labrador et au Québec. La commission prie le gouvernement d’indiquer si les services communautaires peuvent être effectués pour des entités privées dans les autres provinces.
Article 2, paragraphe 2 d). Force majeure. La commission avait noté précédemment que le gouvernement indiquait, dans son rapport, que la loi sur les mesures d’urgence autorise, en cas de sinistre (art. 8(1)(d)), d’état d’urgence (art. 19(1)(d)) ou de déclaration de crise internationale (art. 30(1)(e)), une personne à fournir des services essentiels et à recevoir une indemnité raisonnable pour ces services. L’article 3 de la loi sur les mesures d’urgence définit l’état de crise comme résultant d’un concours de circonstances critiques à caractère d’urgence et de nature temporaire qui met gravement en danger, la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens et échappe à la capacité ou aux pouvoirs d’intervention des provinces, ou menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays.
La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle la loi sur les mesures d’urgence n’a jamais été appliquée et qu’aucune déclaration d’urgence n’a été faite depuis son adoption en 1988. En vertu de la loi de l’Alberta sur la gestion des urgences, l’état d’urgence a été déclaré pendant les incendies survenus dans la municipalité régionale de Wood Buffalo du 4 mai au 30 juin 2016. Néanmoins, cette situation n’a pas donné lieu à l’obligation de travailler ou à un recrutement de force.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2014, publiée 104ème session CIT (2015)

La commission prend note des premier et deuxième rapports du gouvernement, reçus les 30 août 2013 et 10 octobre 2014. Elle prend également note des observations du Congrès du travail du Canada (CTC), reçues les 4 septembre 2013 et 10 octobre 2014, et de la réponse du gouvernement à ces observations. Elle prend note, en outre, des observations de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), reçues le 10 octobre 2014.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. 1. Traite des personnes. a) Cadre juridique et application de la loi. La commission note que l’article 279.01 du Code criminel interdit la traite des personnes (infraction passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans), tout comme l’article 118 de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. A cet égard, le gouvernement indique que des procédures judiciaires sur le fondement des dispositions légales incriminant la traite des personnes ont été engagées dans 12 affaires relevant du travail forcé entre 2009 et mai 2014, y compris dans trois affaires de traite à l’intérieur du pays et que, au cours de cette période, les tribunaux ont prononcé des condamnations dans quatre affaires relevant de la traite internationale des personnes, à l’encontre de 25 personnes physiques et une personne morale, avec des peines allant de six mois à neuf ans d’emprisonnement. La commission note que la CSN mentionne un rapport de 2013 de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) relatif à la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle au Canada, rapport selon lequel, malgré de nombreux succès, les enquêtes menées à ce jour dans ce domaine n’ont révélé qu’une infime partie de l’étendue de ce crime au Canada. Dans certaines parties du pays, les institutions investies de l’autorité publique et leurs fonctionnaires n’enquêteraient pas sur les affaires relevant de la traite parce qu’ils ne connaissent pas toujours la législation pertinente, n’appréhendent pas pleinement cette forme de criminalité, manquent de moyens ou encore ont d’autres priorités. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises pour renforcer les efforts de lutte contre la traite des personnes, notamment les mesures destinées à former les fonctionnaires chargés de faire appliquer la loi dans ce domaine. Elle le prie également de continuer à fournir des informations sur l’application de l’article 279.01 du Code criminel et de l’article 118 de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés dans la pratique, notamment le nombre de poursuites engagées, de condamnations prononcées et de sanctions appliquées, ainsi que copie des décisions de justice en la matière.
b) Prévention de la traite et protection des victimes. La commission note que le gouvernement indique que le Plan d’action national de lutte contre la traite de personnes, lancé en juin 2012, propose des stratégies qui permettent d’appuyer les organisations fournissant une assistance aux victimes et de protéger les ressortissants étrangers contre tout travail illégal ou sans conditions de sécurité. Le plan prévoit un fonds pour les victimes pour des projets qui visent à améliorer les services aux victimes de traite de personnes. En outre, des permis de séjour temporaire peuvent être délivrés aux victimes de traite. Ainsi, entre mai 2006 et décembre 2011, 73 ressortissants étrangers en ont bénéficié. La commission prend également note des informations fournies par le gouvernement sur les mesures prises au niveau provincial, par exemple la création, en Colombie-Britannique, du Bureau de lutte contre la traite des personnes en 2007 et l’adoption d’un plan d’action provincial. La commission prie le gouvernement de poursuivre les efforts qu’il déploie pour identifier les victimes de traite et veiller à ce qu’elles reçoivent une protection et une assistance adaptées. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises à cet égard, notamment celles prises dans le cadre du Plan d’action national de lutte contre la traite de personnes.
2. Travailleurs étrangers temporaires. La commission prend note des allégations du CTC selon lesquelles les personnes qui entrent dans le pays au titre du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) risquent de travailler dans des conditions s’apparentant à du travail forcé. Les visas de travail délivrés aux travailleurs étrangers temporaires portent le nom de leur employeur et sont assortis de restrictions au travail pour un autre employeur. En outre, des restrictions importantes les empêchent de quitter leur travail lorsque leurs droits ne sont pas respectés. Le CTC donne l’exemple de cas de travailleurs migrants qui se voient confisquer leur passeport, dont le contrat est substitué, qui vivent dans des conditions de logement inadaptées, qui perçoivent des salaires inférieurs au salaire minimum, dont les salaires sont retenus, dont les conditions de travail ne sont pas sûres, qui sont victimes d’intimidation et d’agression sexuelle. En outre, les recruteurs facturent des frais illégaux, et les travailleurs étrangers temporaires sont plus vulnérables aux infractions concernant les états de paie et l’emploi. S’agissant du contrôle, le CTC affirme que, bien que le PTET relève de la juridiction fédérale, la surveillance des conditions d’emploi des travailleurs concernés relève de la juridiction provinciale/territoriale et que, par conséquent, le contrôle des conditions de travail de ces travailleurs est limité. La seule façon pour les travailleurs concernés de demander réparation est de déposer plainte, ce qui met en péril leur possibilité de rester légalement au Canada. Les travailleurs qui demandent réparation ont peu d’options: s’opposer à un employeur peut entraîner l’expulsion, mais le dépôt d’une plainte auprès des organismes provinciaux chargés des relations professionnelles a peu de chances d’aboutir.
La commission note que le gouvernement, dans sa réponse à ces allégations, indique que les travailleurs étrangers temporaires bénéficient des mêmes protections que les travailleurs canadiens et que les préoccupations spécifiques soulevées par le CTC ont été levées par des modifications législatives concernant la traite, de nouvelles réglementations concernant le PTET et la législation, ainsi que les règlements et politiques adoptés par les provinces pour renforcer les protections et élargir les prestations pour les travailleurs étrangers temporaires. Le gouvernement indique qu’il prévoit de modifier le règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés afin de renforcer la vérification du respect, par l’employeur, des prescriptions du PTET et de prendre les mesures nécessaires en cas de non-respect, y compris l’inspection de tout lieu où travaille un ressortissant étranger. Le gouvernement indique que les travailleurs étrangers temporaires ne peuvent pas être pénalisés ou expulsés s’ils cherchent un autre travail et qu’ils ont le droit de changer d’employeur. A cet égard, la commission note que les documents mentionnés par le gouvernement dans sa réponse montrent que les travailleurs migrants peuvent changer d’employeur en demandant un nouveau permis de travail, que les employeurs peuvent faire l’objet d’une inspection pendant les six années qui suivent la date de délivrance d’un permis de travail pour un travailleur étranger temporaire et que ces inspections peuvent prendre la forme de visites sur site sans mandat (sauf pour les résidences privées) afin de vérifier le respect de la législation fédérale et provinciale/territoriale en matière d’emploi. Le gouvernement indique également que des changements dans le PTET ont été annoncés en juin 2014 et que ceux-ci se traduiront par un accroissement du nombre et de la portée des contrôles des employeurs occupant des travailleurs temporaires étrangers et par un durcissement des sanctions à l’égard de ceux qui ne seront pas en règle, notamment à travers une interdiction d’employer des travailleurs temporaires étrangers pendant deux ans et des sanctions financières. Le gouvernement s’emploie actuellement à l’élaboration de propositions de modifications du règlement du PTET. Enfin, la commission note que le gouvernement indique que plusieurs des cas mentionnés par le CTC ont abouti à des condamnations par les tribunaux et/ou les tribunaux des droits de la personne.
La commission prend note des informations qui figurent sur le site Internet du gouvernement d’après lesquelles, en 2011, le Canada comptait environ 192 000 travailleurs étrangers temporaires. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour protéger les travailleurs étrangers temporaires contre les conditions d’exploitation relevant du travail forcé, y compris les mesures visant à faciliter l’accès aux mécanismes de plainte. Notant que le gouvernement indique que la législation prévoira que le non-respect du règlement du PTET entraînera des sanctions financières, la commission prie également le gouvernement de prendre des mesures pour s’assurer que les personnes qui soumettent des travailleurs à des conditions relevant du travail forcé encourent des sanctions pénales suffisamment efficaces et dissuasives, conformément à l’article 25 de la convention. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’inspections effectuées dans les locaux où sont employés des travailleurs étrangers temporaires ainsi que sur leurs conclusions, y compris le nombre d’infractions relevées (confiscation de passeport, non-paiement du salaire, substitution de contrat, mauvaises conditions de travail et punition d’un travailleur qui aurait cherché un autre emploi) et les sanctions spécifiquement appliquées.
3. Aborigènes victimes de la traite. La CSN déclare que le gouvernement ne prend pas les mesures nécessaires pour éradiquer la traite des filles et femmes aborigènes. Elle se réfère à cet égard au rapport de la GRC de 2013, d’après lequel dans plusieurs affaires de traite d’êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle à l’intérieur du pays les victimes étaient des Aborigènes. Selon ce rapport, si le nombre de ces victimes aborigènes ne représentait pas une part importante du nombre total des victimes de toutes les affaires de traite ayant débouché sur des poursuites, dans la mesure où les Aborigènes canadiens ne représentent que 4 pour cent de l’ensemble de la population canadienne, le nombre des victimes aborigènes identifiées dans ces affaires démontre une proportion élevée de victimes de traite dans cette population. La commission prie le gouvernement de fournir de plus amples informations sur la situation décrite par la CSN, et sur les mesures prises pour lutter contre la vulnérabilité de certains membres de la population aborigène à des pratiques et à des conditions pouvant relever du travail forcé.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1. 1. Liberté des fonctionnaires de quitter leur emploi. La commission note que l’article 63 de la loi sur l’emploi dans la fonction publique prévoit qu’un fonctionnaire peut démissionner de la fonction publique en donnant préavis, par écrit, de son intention à l’administrateur général. Le service cesse à la date précisée par écrit par l’administrateur général, indépendamment de la date d’acceptation. La commission note qu’il semble que, dans la province du Nouveau-Brunswick (en vertu de l’article 24 de la loi sur la fonction publique du Nouveau-Brunswick) et sur le territoire du Nunavut (en vertu de la loi sur la fonction publique au Nunavut), les fonctionnaires ne peuvent démissionner que si cette démission est acceptée. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les conditions dans lesquelles la démission d’un fonctionnaire peut être refusée ainsi que sur le nombre d’acceptations et de refus et, le cas échéant, les motifs du refus, dans les juridictions concernées, en particulier en ce qui concerne les fonctionnaires fédéraux et ceux du Nouveau-Brunswick et du Nunavut.
2. Liberté des militaires de carrière des forces armées de quitter le service. La commission note que, d’après l’article 15.02 du chapitre 15 des ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, sur la libération, aucun officier ou militaire du rang ne peut demander sa libération de droit, sauf: i) un officier ou militaire du rang qui n’est pas en service actif en raison d’un état d’urgence dont le service lui donne droit à une pension immédiate en vertu de la loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes; ii) un officier ou militaire du rang qui a terminé un engagement de durée intermédiaire de vingt ans ou de vingt-cinq ans; et iii) un officier qui a terminé sa période déterminée de service. L’article 15.18 dispose que les officiers et les militaires du rang peuvent demander une libération volontaire. Cette demande doit être présentée par écrit au chef d’état-major de la défense qui la transmet ensuite au quartier général de la défense nationale. Rappelant que le personnel militaire de carrière qui s’est engagé volontairement devrait avoir le droit de quitter le service en temps de paix dans une période raisonnable, à des intervalles déterminés ou moyennant un préavis, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la façon dont les demandes de libération volontaire par les militaires de carrière des forces armées sont généralement traitées, notamment sur la période de préavis, le nombre d’acceptations et de refus et, le cas échéant, les motifs du refus.
Article 2, paragraphe 2 c). Travail obligatoire comme conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire. 1. Travail pénitentiaire. a) Prisons fédérales. La commission note que la législation fédérale ne contient pas de disposition relative au travail pénitentiaire obligatoire. Elle note que, en vertu de la loi sur le système correctionnel et la liberté conditionnelle, le service correctionnel du Canada encourage les personnes condamnées à une peine fédérale à participer activement à des programmes, notamment aux programmes d’emploi et aux formations professionnelles. Selon le site Internet du service correctionnel du Canada, le service administre le programme CORCAN qui offre aux délinquants des possibilités d’emploi et de formation sur les compétences relatives à l’employabilité. Ces emplois leur permettent de travailler dans la communauté pour des organismes à but non lucratif et des entreprises du secteur privé. Se référant à son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, la commission rappelle que le travail effectué par les détenus pour le compte d’entreprises privées peut être compatible avec la convention si les garanties nécessaires existent pour s’assurer que les détenus concernés acceptent volontairement un travail en donnant leur consentement libre et éclairé et sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque. Dans pareil cas, le travail de prisonniers pour le compte d’entités privées ne serait pas contraire à la convention puisqu’il n’y aurait pas d’obligation. En outre, la commission a considéré que, dans un contexte carcéral, l’indicateur le plus fiable du consentement au travail réside dans le fait que ce travail est exécuté dans des conditions se rapprochant de celles d’une relation de travail libre, y compris en termes de niveau de rémunération, de sécurité sociale et de sécurité et santé au travail. La commission prie le gouvernement de fournir des informations complémentaires sur la façon dont le consentement des détenus participant aux programmes d’emploi est obtenu, en particulier pour les entreprises du secteur privé dans le cadre du CORCAN, ainsi que des informations sur les salaires, les prestations de sécurité sociale et la sécurité et la santé au travail des prisonniers qui y participent.
b) Prisons provinciales et territoriales. La commission note que, dans trois provinces et territoires, le travail semble être obligatoire pour les prisonniers des prisons provinciales/territoriales, en particulier à Terre-Neuve (en vertu de l’article 21 du règlement d’application de la loi sur les prisons), au Nunavut (en vertu de l’article 18 de la loi sur les services correctionnels du Nunavut) et à l’Ile-du-Prince-Edouard (en vertu de l’article 10 de la loi sur les services correctionnels de l’Ile-du-Prince-Edouard). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour veiller à ce que, dans les provinces et territoires où les prisonniers sont obligés d’exécuter un travail, celui-ci soit accompli sous la supervision et le contrôle d’une autorité publique et à ce que ces prisonniers ne soient pas concédés ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées.
La commission note que, dans la majorité des provinces et des territoires, le travail pénitentiaire se fait sur la base du volontariat. Elle note également que la législation de plusieurs provinces permet aux prisonniers de travailler à l’extérieur de la prison (en vertu de l’article 23 de la loi sur les services correctionnels de la Colombie-Britannique, de l’article 25 de la loi sur les services correctionnels de l’Ontario et de l’article 76 de la loi sur le système correctionnel du Québec). La commission prie le gouvernement de fournir des informations permettant de déterminer si, dans les provinces où le travail pénitentiaire se fait sur la base du volontariat, ce travail peut être exécuté pour le compte d’entreprises privées, qu’il soit exécuté à l’intérieur ou à l’extérieur de la prison. Le cas échéant, la commission prie le gouvernement de fournir des informations, pour chaque province où le travail pénitentiaire peut être exécuté pour le compte d’entreprises privées, sur la façon dont le consentement libre et éclairé des prisonniers est formellement obtenu, ainsi que sur les salaires applicables, les prestations de sécurité sociale auxquelles ils ont droit et les mesures concernant la sécurité et la santé au travail.
2. Sanctions communautaires. La commission note que le gouvernement indique qu’en vertu du Code criminel, lorsqu’une personne est déclarée coupable d’une infraction, le tribunal peut surseoir au prononcé de la peine et ordonner que le délinquant soit libéré selon les conditions prévues dans une ordonnance de probation (si aucune peine de prison minimale n’est prévue). En vertu de l’article 742.3(2)(d) du Code criminel, le tribunal peut intimer au délinquant d’accomplir au plus deux cent quarante heures de service communautaire au cours d’une période maximale de dix-huit mois. La commission note également que le gouvernement indique que toutes les provinces disposent également d’un type de sanction communautaire. La commission prie le gouvernement de fournir des informations permettant d’établir si le travail exécuté dans le cadre de ces sanctions communautaires ou des programmes de service communautaire, aux niveaux fédéral et provincial, peut être réalisé au profit d’entités privées.
Article 2, paragraphe 2 d). Force majeure. La commission note que le gouvernement indique, dans son rapport, que la loi sur les mesures d’urgence autorise, en cas d’état d’urgence ou de déclaration de crise internationale, une personne à fournir des services essentiels et à recevoir une indemnité raisonnable pour ces services. En vertu de cette loi, le gouverneur en conseil peut prendre les décrets qu’il croit fondés en cas de sinistre (art. 8(1)(d)), d’état d’urgence (art. 19(1)(d)) et de crise internationale (art. 30(1)(e)) quant à l’habilitation ou l’ordre donnés à une personne ou à une personne d’une catégorie de personnes compétentes en l’espèce de fournir des services essentiels, ainsi que le versement d’une indemnité raisonnable pour ces services. La Partie III de la loi sur les mesures d’urgence définit l’état de crise comme résultant d’un concours de circonstances critiques à caractère d’urgence et de nature temporaire qui met gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens et échappe à la capacité ou aux pouvoirs d’intervention des provinces ou menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays. Rappelant que, en vertu de l’article 2, paragraphe 2 d), le pouvoir de mobiliser la main-d’œuvre en cas de force majeure est strictement limité aux circonstances qui l’exigent, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application de la loi sur les mesures d’urgence dans la pratique, en particulier sur toute déclaration de sinistre, d’état d’urgence et d’état de crise internationale.
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