National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
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Discussion par la commission
Représentant gouvernemental – L’actuel gouvernement civil élu démocratiquement s’applique à transformer le pays, pour le faire passer d’une union fédérale autoritaire à une union fédérale démocratique. Depuis trois ans, le Myanmar jouit d’une plus grande liberté et de plus de droits démocratiques, avec l’émergence du gouvernement civil. Bien que notre transition démocratique soit confrontée dans son processus et au sein du pays à de nombreux défis, y compris la contrainte constitutionnelle et les conflits armés qui se poursuivent dans certaines parties du Myanmar, des améliorations sont tangibles dans de nombreux domaines dont la santé, l’éducation et les secteurs socio-économiques. Les changements positifs seront renforcés par la mise en œuvre du plan de développement durable du Myanmar qui établit une feuille de route unificatrice et cohérente pour toutes les réformes à venir. Le plan de développement durable du Myanmar est conforme aux objectifs de développement durable (ODD), y compris l’objectif 8.
Dans un pays multi-ethnique tel que le Myanmar, réaliser l’unification à partir des diversités existantes est un immense défi. C’est pourquoi le gouvernement s’efforce de parvenir à une paix durable, à une véritable réconciliation et à un développement global, tout en respectant les pratiques démocratiques et les valeurs des droits de l’homme, ainsi que le principe d’inclusion. Dans le cadre de son programme pour la paix, le gouvernement a déjà convoqué trois sessions de la Conférence de paix de Panglong du XXIe siècle et a donné son accord sur 51 principes fondamentaux en vue de la construction d’une union fédérale démocratique qui garantisse la sécurité et la prospérité pour tous, pour une société vivant dans la paix et l’harmonie. Il est prévu d’organiser trois autres sessions d’ici à 2020 afin de finaliser lesdits principes fondamentaux.
Autre représentant gouvernemental – Le Myanmar s’associe à la déclaration conjointe de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) faite par la Thaïlande. La déclaration conjointe reflète les progrès, les actions et les mesures prises par le gouvernement du Myanmar dans ses efforts pour l’élimination du travail forcé. Comme nous avons besoin d’une Constitution qui puisse véritablement protéger les droits démocratiques du peuple, le parti au pouvoir a récemment pris l’initiative audacieuse de modifier les dispositions antidémocratiques de la Constitution de 2008. A cette fin, une commission parlementaire mixte a été créée et la modification de la Constitution est en cours. Notre combat démocratique reste très actif.
Dès lors que nous nous sommes engagés fermement à éliminer le travail forcé, le Département de l’administration générale, responsable de divers aspects et domaines liés au travail forcé, a été transféré du ministère de l’Intérieur, contrôlé par l’armée, au ministère civil du gouvernement de l’Union pour que des mesures contribuant à l’élimination du travail forcé soient entreprises de manière effective.
Nous sommes convaincus que tous les efforts tendant aux réformes démocratiques auront pour effet de promouvoir et de protéger les droits humains, y compris les droits du travail. Dans cet esprit, notre gouvernement encourage tous les partenaires concernés à intensifier le processus de réforme de la législation du travail, à continuer à renforcer la culture du dialogue social tripartite et à éduquer et former les personnes fortement engagées dans la promotion et la protection des droits au travail, en étroite coopération avec le Bureau international du Travail (BIT). Je saisis cette occasion pour remercier le BIT pour son assistance continue.
En tant qu’Etat démocratique naissant, le Myanmar fait face à de nombreux défis de taille. Notre gouvernement est néanmoins résolument décidé à surmonter ces défis pour le bénéfice et le bien-être de toute personne vivant dans le pays. Grâce aux efforts déployés pour réformer les institutions publiques et renforcer l’état de droit pour une société juste et équitable, des progrès significatifs ont été réalisés dans différents domaines, y compris dans celui de la promotion et de la protection des droits du travail, en progression constante.
Le gouvernement du Myanmar fait preuve d’une volonté politique ferme et inébranlable s’agissant de l’élimination du travail forcé. Cette année, dans son message du 1er mai, journée des travailleurs, le Président du Myanmar a souligné les efforts du gouvernement visant à créer un environnement et des conditions dans lesquels le peuple du Myanmar pourra jouir pleinement et en toute légalité des droits humains et de la démocratie. Le Président a souligné, entre autres, la promotion des droits des travailleurs et de l’éradication du travail des enfants et du travail forcé.
L’une des causes fondamentales du travail forcé au Myanmar est la persistance de conflits internes durant des décennies, et ce depuis l’acquisition de l’indépendance en janvier 1948. Conscient de ce que le développement, qu’il soit politique, économique, social ou culturel, ne peut être réalisé sans la paix et la stabilité, le gouvernement actuel déploie des efforts considérables afin de mettre fin aux conflits armés dans le pays, en réalisant une transformation sociale, économique et politique rapide au cours des dernières années.
Nous voulons remercier le BIT pour sa contribution à l’élimination du travail forcé au Myanmar tout au long de ces années. L’Organisation internationale du Travail (OIT) a adopté des résolutions relatives aux cas de travail forcé au Myanmar lors des sessions de la Conférence internationale du Travail de 1999 et 2000, respectivement. Il y a lieu de noter que, grâce aux initiatives efficaces du gouvernement, telles que des ateliers de sensibilisation, des séminaires et des formations, organisés en étroite coopération avec le BIT, les plaintes relatives au travail forcé ont significativement baissé. Nos efforts, combinés à notre engagement, ont donné de bons résultats, et toutes les sanctions imposées au Myanmar ont été levées à l’occasion de la 102e session de la Conférence en 2013. Grâce à notre ferme engagement pour l’élimination du travail forcé, les recrutements de personnes mineures sont en baisse et nous sommes déterminés à traiter tous les cas de recrutement de personnes mineures. Nous espérons continuer à recevoir une coopération constructive de nos partenaires à cet égard.
Depuis son établissement et sa signature en 2007 entre le gouvernement du Myanmar et l’OIT, le Protocole d’accord complémentaire a bien fonctionné et conformément à son objectif d’éradication du travail forcé au Myanmar. Il a été prolongé chaque année et est entré en vigueur jusqu’à décembre 2018. Depuis l’expiration du Protocole d’accord complémentaire, le Myanmar continue de travailler étroitement avec le BIT pour la mise en œuvre des activités et mesures visant l’élimination du travail forcé en vertu du programme par pays de promotion du travail décent (PPTD) récemment signé. En conséquence, le plan d’action assorti de délais est en cours de préparation pour instituer un mécanisme approprié des plaintes. Afin d’acquérir une connaissance plus approfondie et une meilleure approche et afin d’être informés des meilleures pratiques à cet égard, nous avons organisé un atelier en janvier 2019. Des membres du Parlement, le groupe de travail de haut niveau et le groupe de travail technique, des représentants du BIT, du gouvernement, des travailleurs et des employeurs ont participé activement à cet atelier. Nous développons le nouveau plan d’action en consultation et en coopération avec l’OIT et les constituants tripartites. La négociation en est au stade final et le projet sera soumis au Cabinet pour approbation.
Le nouveau plan d’action assorti de délais inclut quatre priorités: l’institutionnalisation d’un mécanisme national pour les plaintes relatives au travail forcé; la formation et la sensibilisation au travail forcé; le renforcement des capacités pour en finir avec le travail forcé; et la mobilisation des partenaires tripartites pour la prévention du travail forcé dans le secteur privé. Nous développons ce plan d’action dans le cadre du PPTD en vue de mettre en place les politiques pertinentes et la coordination entre les ministères concernés. Nous avons déjà préparé une note explicative afin de mettre en œuvre le mécanisme national des plaintes dès l’approbation du nouveau plan d’action par le Cabinet.
Je voudrais signaler que les membres du groupe de travail de haut niveau ont rencontré les représentants des organisations et des ministères intéressés en mars et mai 2019 et qu’ils ont eu des discussions fructueuses au sujet du mécanisme national des plaintes ainsi qu’au sujet des procédures provisoires de traitement des plaintes. En fait, avant même la mise en place du mécanisme national des plaintes, le groupe de travail de haut niveau traitera les plaintes relatives au travail forcé adressées par toute organisation ou toute personne, y compris l’OIT, en coopération et en coordination avec les ministères et organisations intéressés.
Outre le travail effectué avec l’OIT à cet égard, la question du recrutement des mineurs est examinée avec la collaboration de l’Equipe de pays des Nations Unies chargée de la surveillance et de la communication de l’information. En outre, le gouvernement du Myanmar coopère activement avec le Représentant spécial du Secrétaire général en ce qui concerne les enfants et les conflits armés pour prévenir et combattre les violations affectant des enfants à l’occasion des conflits.
En outre, en janvier 2019, le gouvernement a établi la Commission interministérielle pour la prévention de six graves violations durant les conflits armés. La commission s’est réunie deux fois, en avril et en mai 2019, et a discuté de la mise en œuvre du nouveau plan d’action.
Depuis mars 2019, les forces armées, Tatmadaw, ont déjà remis à leurs parents ou tuteurs 987 mineurs recrutés illégalement. Au total, 448 officiers de l’armée et autres militaires ont été sanctionnés par une mesure disciplinaire militaire, et un civil qui a aidé et encouragé le recrutement illégal a été condamné, en vertu de la loi civile, à un an d’emprisonnement. Afin de garantir l’intérêt supérieur de l’enfant, la loi relative aux droits de l’enfant (1993) a été révisée. De même, la loi sur les droits de l’enfant est examinée en relation avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Plusieurs chapitres ont été ajoutés à la loi en vigueur. Un des chapitres importants contient des dispositions interdisant à quiconque de commettre des infractions graves, notamment le recrutement et l’utilisation des enfants dans les conflits armés.
Permettez-moi, à présent, d’évoquer les activités de sensibilisation, un des facteurs essentiels de l’élimination du travail forcé. Bien que nous ayons réalisé de nombreux développements tangibles dans le domaine de la promotion et de la protection des droits du travail, grâce à nos efforts continus dans le domaine des activités et programmes de sensibilisation, il reste des défis à surmonter. Nous poursuivons en conséquence les ateliers de formation et de sensibilisation, y compris de formation de formateurs. Des séminaires de sensibilisation se tiennent à travers le pays, et des brochures sont distribuées dans plusieurs régions du pays et dans huit langues ethniques. En outre, les aspects saillants de la sensibilisation au travail forcé sont soulignés dans les journaux, à la radio, à la télévision et via les nouveaux médias, et des panneaux de sensibilisation sont affichés dans tout le pays en collaboration avec l’OIT. Au total, 9 221 activités, dont des ateliers de sensibilisation, des séminaires et des débats sur le travail forcé, ont été organisées avec la participation de plus de 360 000 personnes dans différentes communes des Etats et cantons, de juillet 2018 à mars 2019. Plus de 96 000 brochures ont été distribuées dans tout le pays. En janvier 2019, nous avons conduit, en étroite coopération avec l’OIT, des formations de formateurs sur l’élimination du travail forcé, avec la participation des membres du groupe de travail de haut niveau et du groupe de travail technique ainsi que des membres des forces armées et de la police. En outre, le BIT a conduit 34 ateliers, et des fonctionnaires ont mené dix autres sessions de formation et de sensibilisation sur le travail forcé à travers le pays. Il est indéniable que la culture du dialogue social tripartite s’est étendue au niveau national au Myanmar et qu’elle reflète une part significative de nos efforts tendant à l’élimination du travail forcé. Le Forum du dialogue tripartite national institué en 2014 s’est réuni trois fois par an. Il a donné lieu à des discussions, des décisions et des résolutions relatives aux questions liées au travail, y compris concernant les réformes législatives.
Nous saluons le rôle joué par l’Officier de liaison pour la promotion et la protection des droits du travail ainsi que pour l’élimination du travail forcé. Nous continuerons à coopérer étroitement avec l’OIT et les autres partenaires intéressés pour la promotion et la protection des droits du travail fondés sur la compréhension et la confiance mutuelle. Nous espérons vivement que l’OIT pourra maintenir son approche constructive et sa coopération efficace avec le Myanmar au profit du peuple du Myanmar. Nous voulons exprimer notre sincère reconnaissance au directeur actuel de l’officier de liaison, M. Rory Mungoven, pour son travail difficile et sa contribution inestimable au développement du secteur du travail au Myanmar. Nous espérons recevoir de son successeur une coopération de même niveau.
Nous sommes heureux de célébrer le 100e anniversaire de la création de l’OIT, et nos efforts inlassables pour l’élimination du travail forcé devraient être en conséquence salués. J’estime qu’il est temps de renforcer encore les relations entre l’OIT et le Myanmar. Nous souhaiterions vivement que le BIT promeuve l’actuel bureau de liaison en bureau national, compte tenu de la coopération durable entre le Myanmar et l’OIT.
En conclusion, je voudrais exprimer nos sincères remerciements aux pays qui soutiennent nos efforts pour l’élimination du travail forcé.
Membres employeurs – Nous venons de prendre note des commentaires du gouvernement. Certains de ces commentaires sont très utiles dans le contexte de ce cas. D’un point de vue historique, le Myanmar n’est pas un cas nouveau pour le BIT. Il a rejoint l’OIT en 1952 et a ratifié 24 conventions, dont trois conventions fondamentales et 21 conventions techniques. Cela signifie pour nous que le Myanmar connaît depuis longtemps ses différentes sortes d’obligations en vertu des instruments internationaux du travail et qu’il n’est pas question de confusion quant à ce qu’il doit faire.
Le Myanmar a ratifié la convention en 1955. Pourtant, un demi-siècle plus tard, le Myanmar est toujours malheureusement très loin de la pleine application de cette convention. Nous notons une assistance continue de la part du BIT et la coopération soutenue du gouvernement du Myanmar pour corriger la situation, en particulier l’établissement d’une commission d’enquête en 1997 et plusieurs protocoles d’accord signés en 2002, 2007 et, plus tard, en 2018. Nous notons également que la commission a discuté ce cas au total 15 fois, quoique pour la plupart de ces occasions sous le précédent régime. Un nombre relativement petit des instances concerne le régime civil démocratique récemment élu.
Nous notons que, aussi récemment que cette année par exemple, la commission d’experts a néanmoins émis une double note de bas de page sur ce cas, ce qui signifie qu’il demeure en haut de la liste des préoccupations de cette commission, année après année. La commission d’experts a fait des commentaires sur les obligations du Myanmar en vertu de l’article 1 de la convention de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible, et c’est pour cette raison que nous sommes ici, car la suppression du travail forcé prend trop de temps.
Nous notons que, pas plus tard qu’en mars 2019, le Conseil d’administration du BIT a discuté de la question du suivi de la résolution concernant les mesures qu’il reste à prendre au sujet du Myanmar, adoptée par cette Conférence en 2013. Nous constatons que, en mars 2019, le Conseil d’administration a exprimé de sérieuses préoccupations quant à la persistance du travail forcé, notant les observations de la commission d’experts relatives à la convention, et a instamment demandé au gouvernement d’intensifier sa coopération déjà étroite avec l’OIT pour l’élimination du travail forcé, y compris dans le cadre du PPTD, récemment signé, bien que le développement d’un plan d’action assorti de délai dont nous avons entendu le gouvernement dire qu’il était prêt à être soumis au Cabinet, et pour l’établissement de – et une transition vers – une procédure efficace de traitement des plaintes. Regardant à présent les observations de la commission d’experts, nous relevons quelques problèmes. D’abord, nous notons que la commission d’experts se concentre sur le travail forcé employé par les forces armées. Le rapport ne traite pas des instances ou pratiques dans l’économie en général. Il s’agit là d’une remarque importante parce qu’elle traite les questions qui nous intéressent aujourd’hui dans le sens de l’amélioration d’une situation, mais pas de celui de la détérioration d’une autre. En d’autres termes, nous en sommes maintenant aux dernières étapes, aussi difficiles soient-elles. Il est donc important de noter que, dans l’ensemble, le Myanmar peut être considéré comme un cas de progrès, avec quelques points, des points négatifs à régler.
Le rapport de la commission d’experts relève dans le rapport des conclusions détaillées de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Myanmar du 17 septembre 2018 que l’emploi du travail forcé par les forces armées persiste, en particulier dans les Etats de Kachin et de Shan, de même que parmi les ethnies rakhine et rohingya. La commission d’experts a également noté que la plupart du personnel militaire impliqué dans le travail forcé n’est passible que de sanctions disciplinaires, et là j’aimerais ajouter: notant le commentaire du gouvernement selon lequel un certain nombre de militaires ont été sanctionnés et qu’un civil, qui était également en infraction, a été condamné à une année d’emprisonnement, il me semble qu’il y a là une disparité entre les niveaux de sanction appliqués dans l’armée, d’une part, et dans la population civile, d’autre part. Et j’aimerais en outre ajouter cela à la liste des questions qu’il faut examiner. Il devrait y avoir un traitement équitable et transparent, quel que soit l’auteur des faits.
Nous réitérons le ferme engagement du groupe des employeurs en faveur de l’élimination totale du travail forcé, tel que défini à l’article 2 de la convention. Nous considérons toute forme de travail forcé comme étant inacceptable et condamnons sans équivoque le recours au travail forcé par l’armée dans ces régions. Le groupe des employeurs demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures urgentes et transparentes nécessaires pour accélérer l’accomplissement de ses obligations en vertu de la convention à cet égard.
En ce qui concerne les sanctions, selon l’article 25 de la convention, le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales; il oblige tout Membre qui ratifie la présente convention à veiller à ce que les sanctions imposées par la loi soient adéquates et strictement appliquées.
La commission d’experts a noté avec satisfaction l’adoption de la loi de 2012 sur l’administration des villages, qui abroge la loi de 1907 sur les villages et les villes et définit comme infraction pénale, punissable par emprisonnement ou amendes, le recours au travail forcé par quelque personne que ce soit. Cependant, la commission a noté qu’aucune mesure n’a été prise pour modifier l’article 359 de la Constitution du Myanmar, qui exclut de l’interdiction du travail forcé les «tâches assignées par l’Union, conformément à la loi dans l’intérêt du public» et pourrait être interprété de manière à permettre une imposition généralisée du travail forcé de la population dans un certain nombre de circonstances. Sur ce point, les employeurs notent que le pays n’a pas encore été en mesure de réviser la Constitution, mais le conseiller d’Etat a récemment annoncé son intention de procéder à une révision de la Constitution. Par conséquent, nous demandons au gouvernement de fournir des informations à ce sujet afin de permettre de comprendre les mesures qu’il a prises et qu’il envisage de prendre pour faire en sorte que la révision de la Constitution soit une réalité de toute urgence.
Bien que le Myanmar n’ait pas encore éradiqué le travail forcé, les mesures que je viens d’évoquer sont des étapes importantes vers cet objectif. Il y en a d’autres au sujet desquelles mes collègues du Myanmar ne manqueront pas d’intervenir. Nous apprécions les mesures prises et l’aide fournie par le BIT au gouvernement ainsi que les nombreuses observations et discussions de la présente commission, de la commission d’experts et du Conseil d’administration à ce jour. Cela étant, et compte tenu du fait qu’un nombre inacceptable de cas de travail forcé persistent, nous exhortons le gouvernement à intensifier sa coopération étroite avec le BIT pour en finir au plus vite avec le travail forcé, de la manière la plus efficace possible. Des efforts particuliers doivent être déployés pour finaliser le travail en cours relatif à l’établissement d’un mécanisme national efficace et fiable de traitement des plaintes relatives au travail forcé.
Le groupe des employeurs estime que la convention no 29 est importante non seulement parce qu’il s’agit d’une convention fondamentale, mais aussi et surtout parce que son essence même réside dans la nécessité de protéger la dignité humaine et la liberté contre l’oppression et l’esclavage. Il est donc essentiel que le Myanmar applique pleinement et mette en œuvre, à la fois en droit et en pratique, les dispositions de cette convention.
Nous notons que le Protocole d’accord sur un plan d’action pour l’élimination de toutes les formes de travail forcé et le Protocole d’accord complémentaire établissant le mécanisme du traitement des plaintes ont expiré en décembre 2018. Toutefois, le gouvernement nous a indiqué que ce travail a progressé et doit être soumis sous peu au Cabinet en ce qui concerne le plan d’action, et que cela prépare le terrain pour la fin des travaux sur le mécanisme de traitement des plaintes. Par conséquent, nous sommes prêts à croire que le nouveau PPTD, approuvé par le Forum de dialogue tripartite national de septembre 2018, qui s’aligne sur le plan de développement durable du Myanmar, se poursuivra et accentuera les efforts déployés jusqu’à présent pour éliminer le travail forcé et le travail des enfants au Myanmar.
Nous notons également qu’un nouveau projet de mécanisme des plaintes a été communiqué pour commentaires aux partenaires sociaux, et que des informations explicatives de support ont également été diffusées au cours des derniers jours. Les employeurs du Myanmar se sont engagés avec détermination à travailler de manière constructive avec le gouvernement pour y donner suite.
Nous souhaiterions par ailleurs vous faire savoir que le secteur privé lancera bientôt, par le biais de la Chambre de commerce et de l’Association des fabricants de vêtements du Myanmar (MGMA), un nouveau service d’audit du travail comprenant un chapitre spécial ciblant le travail forcé. Cette mesure vise à sensibiliser et à appuyer les entreprises dans l’évaluation de la présence de toute forme de pratique de travail forcé dans leurs activités. En outre, la Chambre de commerce a récemment organisé, avec le soutien du BIT et la participation de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), un vaste forum sur les entreprises responsables au Myanmar et les droits de l’homme, qui permettra de recenser les initiatives existantes et de sensibiliser le public sur l’importance de la mobilisation des entreprises en matière de prévention de toute forme de travail forcé ou obligatoire.
Une chose est sûre, les employeurs sont fermement résolus à supprimer le travail forcé au Myanmar, et nous travaillerons conjointement avec le groupe des travailleurs, le gouvernement et le BIT pour accomplir de réels progrès, mesurés à l’aune des principaux indicateurs que sont le nombre de cas de travail forcé, les cas communiqués au gouvernement et au BIT et qui auront été réglés, ainsi que le nombre de recrues mineures affranchies du travail forcé.
Grâce aux efforts du BIT et des partenaires tripartites, nous notons que le nombre de plaintes reçues en vertu du Protocole d’accord complémentaire a diminué. L’année dernière, 130 plaintes relevaient du mandat du Protocole d’accord complémentaire. La grande majorité de ces plaintes – 108 – concernaient des cas de recrutement de personnes mineures, et 76 plaintes ont été soumises au gouvernement. Au cours de cette année, le BIT a également clos 431 cas en suspens depuis des années. Bien que l’objectif d’éradication totale du travail forcé n’ait pas encore été atteint, ces chiffres sont encourageants. Nous sommes convaincus que ces efforts, combinés à l’engagement constant du gouvernement, conduiront finalement à l’éradication totale du travail forcé au Myanmar.
C’est pourquoi nous exhortons le gouvernement à poursuivre ses efforts pour assurer l’élimination du travail forcé sous toutes ses formes, tant en droit que dans la pratique. Nous exhortons en particulier le gouvernement à modifier toute législation nationale incompatible avec la convention no 29, en particulier la loi de 2019 portant modification de la loi sur les villages et les villes et le Code pénal, à imposer et appliquer des sanctions dissuasives à ceux qui ont recours au travail forcé et à veiller à ce qu’une telle dissuasion s’applique de manière uniforme et équitable aux forces armées et aux civils. S’agissant des activités de renforcement des capacités de prévention et de dissuasion du recours au travail forcé, nous notons là également que le pays doit absolument adapter ses efforts de manière à atteindre toutes les régions et tous les Etats.
Donc, ainsi que nous l’avons entendu dire, les conflits internes au Myanmar ont une longue histoire, et certains Etats sont beaucoup plus difficiles à sensibiliser simplement parce qu’ils sont moins accessibles à quelque voie de dialogue que ce soit. Cela représente un défi particulier. Néanmoins, des efforts supplémentaires devraient être déployés dans cette direction. Enfin, nous exhortons le gouvernement à rassembler et à fournir périodiquement au BIT, à cette Conférence, et plus largement à l’ensemble de la population, des informations sur les progrès réalisés, de manière à ce que la population du Myanmar soit confiante que les choses qu’elle redoute le plus ne se produiront pas à l’avenir.
Nous souhaitons par ailleurs souligner les progrès significatifs finalement accomplis en matière d’élimination des pratiques de travail forcé et noter que les cas actuels de plaintes visent principalement les forces armées. C’est donc la priorité pour combler définitivement l’écart. Reconnaissant les progrès accomplis, permettez-moi de conclure par le souhait que, la prochaine fois que la commission examinera le cas du Myanmar, elle le citera comme un cas de progrès.
Membres travailleurs – En 2013, la commission avait décidé de mettre fin à toutes les sanctions pendantes imposées au gouvernement du Myanmar en vertu de la résolution de la Conférence de 2000. Cette résolution avait autorisé les Etats Membres à prendre des mesures en vertu de l’article 33 de la Constitution de l’OIT pour contraindre le Myanmar à se conformer aux recommandations du Rapport de la commission d’enquête de 1998 sur les violations graves et systématiques de la convention. La décision de 2013 faisait suite à l’adoption par le gouvernement, en 2012, d’une stratégie commune élaborée avec le BIT pour l’élimination du travail forcé à la fin de 2015. Malheureusement, le gouvernement a échoué dans cette entreprise, aussi bien à la fin de 2015 qu’à la fin de 2018, délai fixé dans le cadre d’un plan d’action révisé. En effet, bon nombre des activités prévues dans les plans de 2012 et 2018 n’ont jamais été mises en œuvre ou ne l’ont pas été pleinement. En raison du manque de volonté politique suffisante, le travail forcé, y compris les recrutements par l’armée nationale, se poursuit, en particulier dans les zones de conflit au sein des communautés ethniques.
Aujourd’hui, les militaires responsables de la traite des personnes exploitent régulièrement des adultes et des enfants qui se retrouvent dans des situations de travail forcé dans les mines, la pêche et d’autres activités au Myanmar. D’autres font l’objet de trafic à l’étranger, y compris en Thaïlande et en Malaisie, pour le travail dans la pêche, l’agriculture, le bâtiment, les manufactures et autres travaux. Certains d’entre eux sont sauvagement assassinés par leurs trafiquants et abandonnés dans des fosses communes sur leur route. Malgré des réformes législatives menées pour sanctionner les exactions de travail forcé au Myanmar, rares sont ceux qui ont été sanctionnés, essentiellement des soldats de grade inférieur ayant été condamnés à de simples sanctions administratives, dérisoires au regard des crimes qu’ils ont perpétrés.
Au cours des dernières années, nous avons vu un gouvernement toujours hostile à la transparence, emprisonnant des reporters sous l’inculpation d’entrave au suivi international, y compris celui de l’ONU. Nous notons que le Protocole d’accord complémentaire, qui avait posé des engagements clairs en 2007, est maintenant devenu caduc sans avoir été remplacé par un système national opérationnel qui bénéficierait de la confiance des partenaires sociaux et des victimes. Bien que l’établissement d’un nouveau mécanisme géré par le gouvernement doive être développé en vertu du PPTD de 2018, il reste à voir si cela sera efficace, étant donné que le l’armée elle-même a recours au travail forcé et que le gouvernement n’a, à ce jour, pas démontré sa capacité ou sa volonté de prendre des mesures efficaces pour prévenir le travail forcé, tenir pour responsables ceux qui y recourent et leur appliquer des sanctions efficaces, et fournir aux survivants une réparation appropriée.
Nous sommes profondément préoccupés par le fait que, six ans à peine après la dernière séance spéciale de la commission sur le Myanmar, nous discutions une fois de plus des exactions de travail forcé généralisées. La commission d’experts a exprimé dans sa double note de bas de page concernant le cas du Myanmar sa profonde préoccupation devant la persistance du travail forcé imposé par l’armée nationale dans les Etats de Kachin et de Shan ainsi qu’au sein des ethnies rakhine et rohingya.
Le rapport de 2018 de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Myanmar fournit des informations abondantes et crédibles sur le recours au travail forcé au cours des dernières années, en particulier par l’armée nationale. En ce qui concerne le travail forcé dans les Etats de Kachin et de Shan, la mission a vérifié la tendance à la persistance d’un recours systématique au travail forcé par les forces armées. La mission a également signalé des atrocités dans l’Etat de Rakhine, y compris contre des enfants et des femmes.
La mission a également signalé des récits concordants d’hommes et de femmes tués par la Tatmadaw (armée nationale) dans un contexte de travail forcé, soit parce qu’ils ont refusé de travailler, essayé d’échapper aux soldats ou parce qu’ils étaient tout simplement incapables de continuer à travailler. Il est vrai que le gouvernement a déployé des efforts pour empêcher la conscription forcée d’enfants dans l’armée. Cependant, il existe des rapports crédibles selon lesquels une telle conscription se poursuivrait. Dans son rapport au Conseil d’administration de février 2019, le bureau de liaison de l’OIT a signalé 116 cas de recrutement forcé en 2018, tout en observant que le nombre de cas avait diminué. Le BIT a également signalé que 75 enfants recrutés ont été libérés en août 2018, dont 42 cas soumis par le BIT. Il existe malheureusement des rapports indiquant que le gouvernement a pris des mesures punitives contre d’anciens enfants soldats. Le rapport de 2018 sur la traite des personnes aux Etats-Unis explique par exemple que, plutôt que de les orienter vers des services de protection, la Tatmadaw a porté plainte pour fraude contre un groupe de mineurs accusés d’avoir menti sur leur âge.
Dans un autre cas, un ancien enfant soldat a été reconnu coupable de diffamation et condamné à deux ans de prison en avril 2018 pour s’être entretenu avec des médias internationaux. Comme le groupe des travailleurs l’a toujours souligné, les auteurs d’infractions en matière de travail forcé ne sont pas sanctionnés à la mesure de leur crime.
La commission d’experts souligne que, depuis 2007, seuls 377 soldats, dont seulement 17 pour cent étaient des officiers, ont été confrontés à des mesures de discipline militaires de divers degrés en vertu du mécanisme des plaintes. Cependant, des rapports antérieurs indiquent que de telles mesures disciplinaires peuvent consister, par exemple, en une suspension temporaire de fonction ou en une rétrogradation.
En outre, une seule personne a été sanctionnée en vertu du Code pénal et le rapport ne précise pas la sanction. Cela n’est tout simplement pas acceptable.
Nous nous souvenons d’un précédent rapport du bureau de liaison de l’OIT au sujet des plaintes qu’il avait reçues sur la pratique de travail forcé dans les camps de travaux forcés. Là, les prisonniers avaient été amenés à travailler dans des carrières et des plantations gérées par les autorités pénitentiaires à des fins privées, dans un but mercantile. Ou encore, des prisonniers étaient assignés au travail dans des plantations privées à proximité des centres de redressement au profit des autorités, sans être rémunérés.
Le Rapporteur spécial pour le Myanmar a également exprimé sa profonde préoccupation devant le recours à l’emploi pour des travaux pénitentiaires pénibles, comme l’enchaînement de prisonniers, à titre de sanction. D’autres sources ont signalé de graves abus de travail pénitentiaire. Ceci est déjà profondément troublant en soi, mais c’est d’autant plus troublant que le gouvernement a continué d’appréhender et d’emprisonner de nombreuses personnes ces dernières années, simplement parce qu’elles avaient exercé leur droit à la liberté d’expression, leur droit de réunion et leurs droits syndicaux.
En outre, le travail forcé est également persistant dans le secteur privé. En 2016, le BIT a mené une étude détaillée sur le travail des enfants dans l’agriculture, en particulier la pêche, la canne à sucre et les haricots, dans les régions de l’intérieur du pays. Les résultats de cette enquête sont alarmants et révèlent que, dans ces trois sous-secteurs, des enfants étaient soumis au travail forcé. Des rapports crédibles indiquent que des hommes, des femmes et des enfants se trouvaient dans des situations de travail forcé dans l’agriculture, la pêche et la prospection de jade et autres pierres précieuses.
L’emploi du travail forcé dans l’industrie du jade a suscité une attention particulière au cours des dernières années. Un rapport publié par Global Witness en 2015 fait état de violations des droits de l’homme dans l’industrie du jade dans l’Etat de Kachin. Les mines sont gardées par la Tatmadaw et leur présence, ainsi que la présence de groupes ethniques armés, a conduit à l’augmentation des abus, tels le viol et le travail forcé, autour des sites miniers. Ceux qui risquent leur vie pour extraire le jade dans cette industrie perçoivent des gains dérisoires au regard des énormes bénéfices récoltés par l’armée et les négociants.
Nous sommes par ailleurs préoccupés devant les politiques et pratiques discriminatoires de l’Etat contre la population rohingya. Les soi-disant opérations de dédouanement, qui ont commencé en 2017, ont eu pour conséquence une catastrophe humanitaire avec l’expulsion de plus de 700 000 personnes de l’Etat de Rakhine. L’extrême vulnérabilité des Rohingya a conduit, entre autres problèmes, à une exposition considérablement accrue au travail forcé de la part d’acteurs nationaux, mais aussi d’autres acteurs étrangers à l’Etat. Par exemple, beaucoup de femmes et de filles qui ont fui l’armée vers le pays voisin, le Bangladesh, ont été victimes de trafic sexuel tandis que d’autres sont victimes de la traite à des fins de travail domestique. Des enfants rohingya fuyant la violence ont également été enlevés en transit et vendus pour des mariages forcés en Indonésie, en Malaisie et en Inde. Ceux qui sont déplacés à l’intérieur du pays encourent également un risque accru de travail forcé.
Enfin, nous évoquerons ceux qui ont été exposés au travail forcé, notamment dans l’Etat de Rakhine, et qui ont été emprisonnés par les autorités. Par exemple, en octobre 2017, Kyaw Moe Tun, qui a signalé des cas de travail forcé dans l’Etat de Rakhine a été inculpé de diffamation et incitation en vertu de l’article 505 du Code pénal et condamné à dix-huit mois de prison. L’évolution de la situation au Myanmar exige une attention urgente du gouvernement et de la communauté internationale.
Membre employeuse, Myanmar – Je voudrais remercier la commission de nous avoir donné la possibilité de commenter les observations contenues dans le rapport et de donner un aperçu de la contribution de la Fédération des chambres de commerce et d’industrie du Myanmar en général pour assurer que le Myanmar respecte la convention.
Le PPTD signé en septembre 2018 produit des effets significatifs dans le domaine du renforcement de la protection contre les formes inacceptables de travail, en particulier le travail forcé et le travail des enfants. Les employeurs sont fermement résolus à éliminer le travail forcé dans le pays, et nous travaillons avec les partenaires sociaux, le gouvernement et le BIT à montrer les progrès accomplis en ce qui concerne les deux principaux indicateurs identifiés, à savoir le nombre de cas de travail forcé communiqué au gouvernement et au BIT qui ont été résolus et le nombre de recrues mineures libérées.
Grâce aux efforts du BIT et des partenaires tripartites, le nombre de plaintes reçues en vertu du Protocole d’accord complémentaire a fortement baissé. Bien que l’objectif d’éradication totale du travail forcé n’ait pas encore été atteint, les employeurs n’en ont pas moins noté les chiffres très encourageants, déjà connus.
Ces progrès doivent être salués. Il convient également de noter un certain nombre de réalisations récentes et de jalons posés au cours des dix derniers mois. Soixante-quinze recrues mineures, dont 42 cas soumis par le BIT, ont été affranchies et libérées de la Tatmadaw en septembre. Un consultant à durée déterminée a été chargé de fournir un appui pour le processus de soumission des plaintes pendant trois mois.
En ce qui concerne le Plan d’action sur le travail forcé, un manuel de formation sur les choses à faire et à ne pas faire, des directives et des programmes de formation ont été convenus, et la première session du TOT a eu lieu du 14 au 15 janvier de cette année. Plusieurs dialogues ont eu lieu tant au niveau de la direction que du responsable politique pour renforcer la collaboration.
Le Myanmar traverse en ce moment une phase cruciale car, après de nombreuses années de soutien par le BIT, il est essentiel d’établir un mécanisme national institutionnalisé de traitement des plaintes pour traiter les cas de travail forcé. Le système doit gagner la confiance de toutes les parties prenantes. A cet égard, l’appui du BIT reste indispensable.
En tant que partenaires sociaux et représentants du secteur privé, nous devons jouer notre rôle dans le plaidoyer pour un système absolument transparent, avec un rapport publié des données relatives aux cas. Nous sommes conscients que c’est extrêmement délicat et sensible – le travail forcé étant perpétré à la fois par des acteurs étatiques et non étatiques, dans des contextes de conflit ou exempts de conflit. Le ministère du Travail a récemment présenté, lors du dernier Forum national du dialogue tripartite – vers la fin du mois de mai 2019 –, un projet de schéma pour l’établissement du mécanisme national de traitement des plaintes. Les plaintes pourraient être reçues par les partenaires sociaux et de nombreuses organisations de la société civile. Le système devrait encore être affiné; des demandes de commentaires adressées par le gouvernement au sujet du mécanisme envisagé circulent actuellement et cela semble aller dans la bonne direction.
Pour renforcer le processus, un atelier de partage des connaissances sur les plaintes nationales et les mécanismes de règlement des griefs a été organisé par le BIT avec l’appui du Service des principes et droits fondamentaux au travail (FUNDAMENTALS) à Genève, mettant en lumière les modèles adoptés par plusieurs pays tels que le Royaume-Uni, le Brésil, le Qatar et l’Ouzbékistan.
En ce qui concerne l’absence d’action relative à la modification de l’article 359 de la Constitution, lequel exclut de l’interdiction des travaux forcés les tâches assignées par l’Union en conformité avec la loi – dans l’intérêt du public –, qui pourrait être interprétée comme une exemption généralisée du travail forcé, il n’a pas encore été possible de réexaminer la Constitution, mais le Conseiller d’Etat a récemment annoncé que le pays avait l’intention d’en entreprendre la révision. Si cette intention se concrétise, nous ferons en sorte d’attirer l’attention sur l’article 359.
S’agissant du rapport sur les conclusions détaillées de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits, nous réitérons l’engagement fort du secteur privé pour l’élimination totale du travail forcé et jugeons inacceptable le recours au travail forcé dans le pays. Le gouvernement devrait veiller à la pleine application de la législation nationale et du Code pénal, y compris des sanctions appropriées pour les auteurs.
En ce qui concerne la formation et le renforcement des capacités, le pays doit absolument adapter ses efforts de manière à atteindre toutes les régions et tous les Etats. A cet égard, une approche plus décentralisée serait très certainement utile.
L’UMFCCI, la Chambre de commerce et l’Association des fabricants de vêtements du Myanmar (MGMA) ont fortement développé, avec le soutien du projet OIT-ACT/EMP, les départements de relation de travail et des relations professionnelles. Le 23 mai 2019, un nouveau service d’audit du travail qui comporte un chapitre spécifique sur le travail forcé a été lancé: le service contribuera à sensibiliser et aider les entreprises à évaluer la présence de toute forme de travail forcé dans le contexte de leurs activités. Les premières visites sur les lieux de travail sont programmées dans la semaine du 24 au 28 juin. L’UMFCCI et la MGMA ont également dédié des lignes téléphoniques dédiées aux entreprises afin que leurs membres dispensent des conseils sur les bonnes pratiques en matière de travail supplémentaire et afin d’éviter toutes violations qui pourraient éventuellement aboutir à des formes de travail forcé ou obligatoire.
En outre, la chambre a organisé avec le soutien du BIT et la participation de l’OIE un grand forum sur les entreprises responsables au Myanmar et les droits de l’homme, les 30 et 31 mai, ce qui a encore une fois été utile pour mettre en lumière les initiatives et sensibiliser à l’importance de la mobilisation des entreprises pour prévenir toute forme de travail obligatoire ou forcé.
Je suis également heureuse d’annoncer que l’UMFCCI a adhéré officiellement en tant que partie prenante à l’OIE le 9 juin, un jour avant la Conférence. Faire partie de ce réseau mondial aidera la chambre dans ses travaux de conception des meilleurs plans et stratégies visant à éliminer définitivement le travail forcé dans toutes les pratiques industrielles et commerciales.
L’UMFCCI estime précieux le statut de figurer parmi les mandants tripartites. Avec confiance et respect, avec un seul objectif pour l’amélioration pour tous, nous avons établi une relation forte avec les organes tripartites.
Nous avons réussi à recevoir l’initiative Fonds Vision Zéro, attribué par le G20, en février 2017 à Hambourg, Allemagne. Mme Angela Merkel, Chancelière de l’Allemagne, l’a mentionné hier lors de son discours en séance plénière, et nous avons obtenu le financement pour la construction du Centre de formation à la sécurité et à la santé au travail, récemment achevé. Le centre commencera à dispenser des formations dans le domaine de la sécurité et santé au travail (SST), au bénéfice de tous les partenaires sociaux, ce qui n’aurait pas été possible sans les efforts des mandants tripartites. Bien qu’étant une jeune démocratie et une jeune économie, cette réalisation tripartite a été applaudie par le ministère allemand du Travail, à Berlin, en Allemagne, il y a une semaine lorsque nous nous sommes rencontrés pour faire le point sur l’avancement de l’initiative Fonds Vision Zéro.
Une autre réalisation importante de la chambre consiste dans le projet du Fonds mondial de partenariat public-privé bisannuel (2019-20) dédié à l’accès à la santé, avec la participation de deux ONG locales et une entreprise pharmaceutique internationale basée en Suisse, Novartis. L’UNOPS est notre principal interlocuteur. La candidature pour le projet a été lancée en mars 2018 et a été approuvée en août 2018 pour les zones affectées par des conflits et où l’infrastructure pour l’acheminement des médicaments en vue des traitements est insuffisante. Les zones ciblées sont Rakhine, Chin et Sagaing pour cette année, et Kachin, Shan, Mon et Mandalay pour l’année prochaine. L’objectif est d’utiliser un service rapide de transport des biens de consommation via le réseau de la Chambre de commerce fourni par des entreprises privées pour l’acheminement des médicaments nécessaires vers les zones isolées, reliant la source de médicaments aux zones qui en manquent.
Des activités se développeront en marge de ce projet: la promotion du Pacte mondial des Nations Unies auprès des entreprises, la sensibilisation au respect des droits du travail et des droits de l’homme, au travail forcé, au travail des enfants, à la sécurité et à la santé au travail, etc.
Je suis le point focal de l’UMFCCI pour ce projet. Je me suis rendue dans la région de Sagaing début mars pour le projet et pour promouvoir le Pacte mondial des Nations Unies. J’avais prévu d’effectuer deux visites à Rakhine entre la troisième semaine de mars et début avril, mais des événements imprévus se sont produits dans les zones à visiter, m’amenant à reprogrammer ces visites pour fin juin.
L’UMFCCI travaille en étroite collaboration avec le ministère de l’Education du Myanmar dans le cadre du développement du capital humain, fortement soutenu par le BIT, en vue de fournir une formation professionnelle de courte durée aux personnes déplacées dans les camps de Kachin et de Rakhine selon le principe d’inclusivité, de créer un accès à l’entrepreneuriat et aux emplois et d’empêcher l’exploitation, grâce au BIT. Nous avons participé aux travaux conjoints du BIT et du ministère de l’Education sur l’évaluation du marché du travail à Rakhine. Le rapport en a été officiellement présenté au public le 22 mai, le but étant de fournir des emplois décents aux nécessiteux, en rapprochant l’enseignement professionnel et les industries, et d’éviter le recours à l’exploitation.
Nous nous sommes réunis au Forum national de dialogue tripartite tous les quatre mois, en tout 13 fois déjà. Nous rencontrons souvent les partenaires sociaux à l’occasion du processus de réforme de la législation du travail, ce qui renforce encore notre partenariat.
Le développement continu du processus tripartite représente la garantie d’un engagement ferme de la part des partenaires sociaux à investir toute leur énergie et tout le temps nécessaire pour en finir avec le travail forcé au Myanmar. Nous allons continuer à œuvrer dans ce sens.
Alors que nous travaillons sans relâche au renforcement des partenariats, le surgissement de la double note de bas de page concernant ce cas est très décourageant. Il est possible que nous manquions d’informations; il se peut aussi que la commission n’ait pas été au fait des développements du processus. Quoiqu’il en soit, ce qui importe, c’est que nous gardions le bon cap.
Parions que le cas du Myanmar sur la convention no 29 sera entendu comme un cas de progrès la prochaine fois.
Membre travailleuse, Myanmar – Les travailleurs du Myanmar sont exposés à des violences et coercitions de toute nature au sein des communautés ou sur le lieu de travail. Nous luttons âprement pour l’instauration d’une société moderne fondée sur l’égalité pour toutes les ethnies et sur le dialogue social.
L’application de cette convention au Myanmar a été évoquée pour la première fois dans une réclamation en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT en 1994. La Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM), alors connue en tant que Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), documentait les cas de travail forcé et les atrocités de la junte militaire pour aider le BIT dans son examen des cas. A cette époque, l’accès aux zones contrôlées par l’armée birmane et les organisations ethniques armées était interdit. Ces zones sont en outre riches en ressources naturelles telles que le bois, l’or, les pierres précieuses, le pétrole et le gaz dans les Etats de Kachin, Shan, Karen et Rahkine, où se pratiquent des exactions de travail forcé.
Aujourd’hui, la libre circulation est acquise, même s’il existe des limites d’accès aux zones touchées. Des plaintes indiquent que des agriculteurs et des villageois sont encore contraints de construire des routes pour des projets non budgétés ou pour générer des bénéfices au profit d’entreprises appartenant au personnel de l’armée impliqué dans des infractions de travail forcé. Le Myanmar doit encore travailler plus dur pour devenir un pays où le travail forcé, sous toutes ses formes, aura été éradiqué.
L’application de la loi, l’inspection du travail et la liberté syndicale n’existent pas dans les zones sous contrôle militaire et dans les zones de conflit. Dans certains secteurs de l’industrie et de la confection, on trouve encore du temps supplémentaire de travail involontaire et non rémunéré. Nous avons eu quelques cas où les inspecteurs du travail interprètent souvent à tort la loi pour plafonner le nombre d’heures supplémentaires dont le paiement peut être réclamé.
Les syndicats sont profondément préoccupés de ce que le projet d’amendement de la loi sur l’organisation du travail continue d’exclure le secteur informel et le secteur public. Les projets d’amendements limitent toujours l’enregistrement des syndicats à des professions extrêmement restreintes et selon des procédures d’application intrusives. Ceci exposerait davantage les travailleurs au travail forcé.
La pauvreté, les conflits armés perpétuels et les déplacements forcés poussent des milliers d’agriculteurs dépossédés, de villageois et de travailleurs à accepter des conditions de travail forcé. Ils n’ont pas le choix. La Chambre haute du Parlement a estimé en 2016 à 2 millions d’acres les terres confisquées à travers le pays. Environ 11 000 acres de terres ont été restituées à des agriculteurs.
Une procédure de retour et de restitution des terres plus inclusive et plus transparente serait nécessaire au niveau des cantons. La procédure reste compliquée à cause des concessions commerciales complices, d’une mauvaise classification ainsi que du manque de documentation. Il reste encore beaucoup à faire pour restaurer les droits légitimes à la terre et l’indemnisation des agriculteurs et villageois dépossédés.
Avant tout, il incombe au gouvernement de veiller à ce que les villageois déplacés par les conflits armés ne perdent pas leurs terres. Aujourd’hui, environ 5 millions de travailleurs originaires du Myanmar sont employés à l’étranger. Ils sont exposés à des frais d’embauche illégaux, à une administration inefficace, à la corruption syndicale qui les soumet à des conditions de travail forcé, à la migration illégale et à la traite des êtres humains.
Bien que nos lois fixent un plafond d’environ 100 dollars des Etats-Unis (dollars E.-U.) aux travailleurs du Myanmar cherchant à obtenir un emploi à l’étranger, de nombreux travailleurs s’endettent après avoir payé un montant de 600 à 800 dollars E.-U. à des agences ou des courtiers. Les faux contrats et les contrats de substitution sont courants.
Par exemple, une travailleuse migrante citoyenne du Myanmar a été placée à Singapour pour un travail auprès de deux ménages, sans vacances ni congés. Elle n’a pas été autorisée à quitter son emploi ou à changer les conditions et lieux de travail, à moins de s’acquitter d’une indemnité de six mois de salaire auprès du courtier. Dans d’autres cas, des travailleurs envoyés en Thaïlande ont été rapatriés, aucun travail n’ayant été convenu. D’autres sont devenus des travailleurs sans papiers après avoir réalisé que le visa et le permis de travail délivrés par les courtiers étaient des faux.
La servitude domestique involontaire, les mariages forcés de l’autre côté de la frontière, en Chine, et le trafic de personnes à des fins sexuelles persistent et représentent 70 pour cent des cas signalés par la police de surveillance de la traite des êtres humains en 2018. Ces femmes victimes, estimées à plusieurs milliers, ne peuvent pas se plaindre et sont considérées comme des cas de dépassement de séjour dans le pays d’accueil, sans droit à une juste réparation et réintégration
Le Myanmar est un pays en transition. Les syndicats participent au conseil tripartite chargé d’examiner les plaintes avec les associations d’agences de recrutement de migrants et la police de la traite des êtres humains. A ce jour, 22 agences ont été mises sur liste noire, et des dédommagements ont été accordés aux plaignants. C’est un tout petit pas accompli par rapport à la gravité du problème. Nous avons besoin de l’appui du BIT.
Il est nécessaire de garantir la cohérence et la mise en œuvre effective de cette convention dans toute la législation nationale, et l’idéal serait que les règlements internes des organismes publics soient inclus dans les codes disciplinaires de l’armée.
Pour ce faire, nous demandons instamment la création d’une commission parlementaire sur le travail forcé. La commission devrait être dotée de pouvoirs d’investigation pour contrôler la mise en œuvre des recommandations formulées par les institutions internationales en ce qui concerne le travail forcé et la traite des êtres humains, y compris des conclusions de cette commission.
Membre gouvernemental, Thaïlande – J’ai l’honneur de prononcer cette déclaration au nom de l’ASEAN. L’ASEAN reconnaît que le processus de réformes démocratiques au Myanmar avance de manière dynamique et qu’il produit des résultats tangibles dans le domaine de la promotion et de la protection des droits du travail, y compris en vue de l’élimination du travail forcé.
L’ASEAN estime que la coopération durable entre le Myanmar et l’OIT contribue aux efforts du gouvernement pour éliminer le travail forcé. L’ASEAN se félicite de la signature par le Myanmar et l’OIT du PPTD en septembre 2018, car il en résultera des réformes plus positives et plus efficaces pour la promotion et la protection des droits du travail. L’ASEAN espère également que le plan d’action préparé dans le cadre du PPTD sera bientôt finalisé, en particulier la mise en place d’un mécanisme national de plainte du gouvernement du Myanmar pour mettre fin au travail forcé.
Tout en reconnaissant les mesures effectives prises par le Myanmar en coopération avec l’OIT pour éliminer le travail forcé, l’ASEAN souhaiterait proposer que des mesures plus innovantes soient prises pour renforcer les activités de sensibilisation dans l’ensemble du pays afin de prévenir l’exaction du travail forcé non seulement dans le secteur public, mais également dans le secteur privé. L’ASEAN demande à l’OIT et à la communauté internationale de continuer à travailler avec le Myanmar de manière constructive et à assister le gouvernement dans ses efforts pour éliminer le travail forcé.
Membre gouvernemental, Roumanie – Je m’exprime au nom du groupe de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres. Les pays candidats, la Macédoine du Nord et l’Albanie, le pays du processus de stabilisation et d’association, candidat potentiel, la Bosnie-Herzégovine, le pays candidat de l’Association européenne de libre-échange (AELE), la Norvège, membre de l’Espace économique européen, ainsi que la République de Moldova et la Géorgie s’associent à cette déclaration. L’UE et ses Etats membres se sont engagés à promouvoir, à protéger et à respecter les droits de l’homme et les droits du travail, y compris la liberté d’association, de réunion et l’abolition du travail forcé. Nous soutenons le rôle indispensable du BIT dans le développement, la promotion et la supervision de l’application des normes internationales du travail et des conventions fondamentales en particulier. L’UE et ses Etats membres se sont également engagés à promouvoir la ratification universelle et l’application et la mise en œuvre effective des normes fondamentales du travail. Nous souhaitons rappeler l’importance que nous attachons aux progrès en matière de droits de l’homme, de démocratie et d’état de droit au Myanmar. Le respect de la convention no 29 est essentiel à cet égard. Tout en reconnaissant les progrès accomplis ces dernières années, nous notons avec regret que ce cas est aujourd’hui examiné comme un cas grave pour ce qui touche à l’élimination de toutes les formes de travail forcé.
Sur la base du rapport de la commission d’experts, des cas de travail forcé, y compris des recrutements de mineurs par l’armée, la Tatmadaw, sont toujours signalés et sont confirmés par la Mission indépendante d’établissement des faits, créée par le Conseil des droits de l’homme, en particulier dans les Etats de Kachin et de Shan, ainsi qu’au sein des communautés ethniques rakhine et rohingya. Souvent, les victimes reçoivent une nourriture insuffisante, de mauvaise qualité, n’ont pas accès à l’eau et sont maintenues dans des logements impropres, certaines d’entre elles ont subi des violences en cas de résistance, si leur travail est jugé trop lent ou si elles sont surprises en train de se reposer. Les femmes victimes sont également exposées à des violences sexuelles.
Le travail forcé est un phénomène persistant dans le pays malgré l’engagement continu de l’OIT et des Etats Membres depuis plus de deux décennies. Le protocole d’accord sur une stratégie commune pour l’élimination du travail forcé a été signé en 2012, puis un autre protocole d’accord en janvier 2018, qui a approuvé un nouveau plan d’action pour l’élimination de toutes les formes de travail forcé la même année 2018, et a été suivi par la transition vers les PPTD en septembre 2018.
L’UE et ses Etats membres collaborent aussi activement avec le gouvernement pour améliorer les droits du travail dans le pays – y compris par le biais de l’initiative du Myanmar pour les droits du travail. Nous réaffirmons notre ferme engagement à apporter notre soutien au pays à cet égard. En octobre 2018 et février 2019, l’UE a effectué des missions de haut niveau dans le pays dans le contexte de l’engagement renforcé en vertu de l’Accord sur le régime général préférentiel à l’égard des pays les moins avancés (Tout sauf les armes). Le régime général européen préférentiel de l’UE impose aux pays de se conformer aux principes des conventions fondamentales du travail. Il fournit des opportunités de dialogue constructif avec les autorités nationales, notamment sur les questions relatives au travail. Les discussions se sont poursuivies pendant une rencontre de hauts fonctionnaires à Bruxelles à la mi-mai et se tiendront par ailleurs dans le pays à l’occasion du dialogue national sur les droits de l’homme, le 14 juin.
Dans le contexte de la discussion d’aujourd’hui sur la persistance du travail forcé, nous nous félicitons de ce que le gouvernement semble continuer à collaborer avec le BIT sur le mécanisme existant de traitement des plaintes dirigé par l’OIT sur le travail forcé jusqu’à la mise en place d’un mécanisme de traitement des plaintes et que le forum national de dialogue tripartite est consulté lors de la mise en place du mécanisme national des plaintes approprié. Cependant, nous voudrions exprimer notre profonde préoccupation sur un certain nombre de questions:
- Progrès accomplis dans l’établissement du mécanisme national des plaintes sur le travail forcé – Tout en notant la nouvelle version d’un plan d’action national pour la mise en place du mécanisme, approuvée par le ministre du Travail, de l’Immigration et de la Population, on constate que ce document n’a pas été approuvé par d’autres ministères, et en particulier par le ministère de la Défense, administrateur de la Tatmadaw. Une fois mis en place, il est absolument vital que ce mécanisme soit, en pratique, accessible en particulier aux victimes des zones de conflit, que les plaintes fassent l’objet d’enquêtes indépendantes et que les victimes soient protégées. Pendant ce temps, la coopération avec le système de dépôt des plaintes au BIT doit se poursuivre.
- Absence de poursuite pénale des contrevenants – Alors qu’un certain nombre de militaires ont été sanctionnés par une mesure disciplinaire, une seule personne a été condamnée en vertu du Code pénal. L’application stricte des dispositions du Règlement administratif de 2012 sur les comtés ou villages et du Code pénal est essentielle pour qualifier d’infraction pénale l’emploi du travail forcé et en dissuader les auteurs. De plus, les sanctions doivent être appropriées et strictement appliquées.
- L’article 359 de la Constitution reste inchangé malgré les promesses des gouvernements précédents – Cet article exclut de l’interdiction du travail forcé «les tâches assignées par l’Union, en conformité avec la loi, dans l’intérêt du public». Ceci peut être interprété comme une imposition généralisée du travail forcé à la population.
Nous observons que la discussion au sujet des modifications de la Constitution se poursuit au Parlement, et nous espérons que l’article 359 sera amendé à cette occasion. Toutefois, nous sommes préoccupés par le fait que, en dépit des progrès atteints au cours des dernières années sur les questions relatives au travail, nous soyons à présent à un tournant décisif. Nous demandons en conséquence instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, notamment de renforcer les capacités de divers acteurs, de donner des instructions précises aux militaires pour qu’ils cessent de recourir au travail forcé, de mener des enquêtes appropriées et d’appliquer des sanctions suffisamment dissuasives, ainsi que de finaliser le Plan d’action sur le travail forcé, actuellement en cours d’élaboration avec l’assistance du BIT, et de répondre rapidement aux préoccupations de la commission.
Bien que l’élimination du travail forcé soit au centre de cette discussion, nous exhortons en outre le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour:
- veiller à ce que les projets actuels de la loi sur l’organisation du travail et de la réglementation de la loi sur les conflits du travail soient conformes aux normes internationales du travail. Tout en notant que cette dernière loi a été adoptée en mai, même si elle n’a pas encore été pleinement évaluée, nous saluons quelques progrès, tels que l’élimination des sanctions d’emprisonnement. Cependant, plusieurs lacunes subsistent, notamment l’absence de couverture du secteur public. De plus, nous n’avons pas encore vu les progrès attendus du projet de loi sur l’organisation du travail. En fait, s’il était adopté, le projet actuel représenterait un pas en arrière. Nous demandons instamment au gouvernement de réviser le projet de manière tripartite et en faisant appel à l’assistance technique du BIT pour combler les lacunes actuelles par rapport aux normes internationales du travail;
- ratifier la convention (nº 138) sur l’âge minimum, 1973. Nous notons qu’un consensus tripartite s’est dégagé sur la question. Nous exhortons le gouvernement à ratifier rapidement la convention no 138, étape très importante vers la ratification de l’ensemble des cinq conventions fondamentales de l’OIT restantes;
- aligner le projet actuel de la loi sur les droits de l’enfant sur les normes internationales du travail. Nous notons que cela va être discuté au cours de la session parlementaire;
- adopter la liste finalisée des travaux dangereux pour lutter efficacement contre le travail des enfants;
- mettre en œuvre des mesures fondées sur la base du dialogue tripartite pour résoudre les problèmes qui restreignent la liberté d’association dans la pratique;
- prendre des mesures efficaces pour garantir le respect des libertés civiles des travailleurs, notamment en révisant la loi sur les réunions et les assemblées pacifiques, conformément aux recommandations de la mission de contacts directs de l’OIT d’octobre 2018. Ceci demeure vital compte tenu des accusations portées en février 2019 contre des syndicalistes à Mandalay;
- prendre de nouvelles mesures pour améliorer la sécurité et la santé au travail. Tout en reconnaissant l’amélioration récente de la loi comme un pas positif, nous demandons instamment au gouvernement d’appliquer de manière efficace la loi et de la réviser régulièrement, en particulier pour en élargir le champ d’application.
L’UE et ses Etats membres continueront d’aider le gouvernement à cet égard, et nous continuerons à suivre de près la situation dans le pays.
Membre gouvernementale, Chine – Nous notons qu’avec l’assistance du BIT le gouvernement du Myanmar a activement mené plusieurs activités visant à promouvoir l’élimination du travail forcé et formulé un certain nombre de règlements et de lois, et le travail forcé a diminué de manière substantielle. En 2018, le gouvernement du Myanmar a signé avec l’OIT le PPTD, le développement et la coopération étant très importants pour l’instauration du travail décent dans les pays Membres.
Le gouvernement chinois demande au BIT et à la communauté internationale d’aider le gouvernement du Myanmar à éradiquer le travail forcé et à accentuer son assistance au développement. Nous soutenons la demande du gouvernement du Myanmar d’élever le bureau de liaison de l’OIT au rang de bureau permanent du Myanmar et nous encourageons également le gouvernement du Myanmar à adopter de nouveaux plans d’action visant à mettre en place un mécanisme de plainte pour travail forcé.
Membre travailleuse, Japon – Tout en notant les efforts du gouvernement du Myanmar pour supprimer le travail forcé, au moyen de la prolongation du Protocole complémentaire et avec l’approbation du premier PPTD en 2018, nous aimerions partager notre préoccupation au sujet de la situation du travail forcé au Myanmar, décrite dans le rapport de la Mission indépendante d’établissement des faits du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et aux réfugiés de 2018.
Premièrement, s’agissant du cas du travail forcé imposé par la Tatmadaw du Myanmar et les organisations armées ethniques, pour les travaux publics, la mission a constaté l’emploi systématique d’hommes, de femmes et d’enfants pour du travail forcé dans les Etats de Kachin et de Shan au cours de la période de référence, y compris dans les zones des Etats non affectées par un conflit. Dans plusieurs cas, la Tatmadaw est arrivée dans un village et a arrêté de nombreuses personnes qui ont ensuite été détenues pour être soumises au travail forcé, et ce sans préavis ni consultation. Elles sont détenues aux abords des villages ou obligées de parcourir de longues distances, d’exécuter différents travaux tels que la cuisine pour l’armée, le portage, le creusage de tranchées, l’abattage d’arbres, la construction de routes ou sont chargées de marcher devant pour ouvrir la route ou utilisées en tant que détecteurs de mines antipersonnelles pour la Tatmadaw.
La période de recrutement forcé varie d’un jour à plusieurs mois. Le recrutement forcé s’applique aux femmes, aux enfants dès l’âge de 12 ans, ainsi qu’aux enseignants. En 2012, le gouvernement et les Nations Unies ont signé un plan d’action commun pour mettre fin au recrutement et à l’emploi d’enfants soldats. Il a été signalé en 2018 que plus de 924 enfants ont été libérés depuis la signature du plan. Ils étaient détenus dans des conditions inhumaines, sans nourriture appropriée, sans eau ou autres commodités. Leur travail ne donnait lieu à aucune rémunération. Des violences, des tortures, des violences sexuelles et des viols ont été signalés. De telles situations subsistent toujours dans les Etats de Kachin et Shan. Bien qu’il existe des cas graves de travail forcé, nous reconnaissons à nouveau les efforts du gouvernement pour éliminer le travail forcé.
Je saisis cette occasion pour rappeler la principale décision du dernier Conseil d’administration du BIT en mars sur le cas dans ces termes: «ayant examiné le rapport soumis par le Directeur général, le Conseil d’administration s’est déclaré gravement préoccupé par la persistance du travail forcé et demande instamment au gouvernement d’intensifier sa coopération étroite avec le BIT pour l’élimination du travail forcé. Il encourage par ailleurs le gouvernement à promouvoir le travail décent au moyen de politiques d’investissement responsables en conformité avec la Déclaration de principes tripartite concernant les entreprises multinationales et la politique sociale».
Nous espérons que le gouvernement redoublera d’efforts pour améliorer la situation en vue de l’élimination du travail forcé.
Membre gouvernementale, Etats-Unis – En mars 1997, le Conseil d’administration de l’OIT a institué une commission d’enquête chargée de l’examen des allégations sérieuses de travail forcé généralisé au Myanmar. Le BIT a, depuis, étroitement travaillé avec le gouvernement pour traiter les conclusions de l’enquête, en commençant par la conclusion d’un accord sur le recrutement d’un chargé de liaison de l’OIT en 2002. Des progrès significatifs ont été accomplis. Le Protocole d’entente complémentaire de 2007 a établi un mécanisme mixte des plaintes BIT/gouvernement pour les victimes de travail forcé. L’adoption en 2012 de la loi régissant les villes et villages a défini le recours au travail forcé par quelque personne que ce soit comme une infraction pénale susceptible de sanctions d’emprisonnement et d’amendes.
Malgré les progrès atteints au cours des années, des rapports récents, y compris le rapport de septembre 2018 sur les conclusions détaillées de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits pour le Myanmar, soulignent le recours continu par l’armée au travail forcé, en particulier dans les Etats de Kachin et de Shan, ainsi que parmi les ethnies rakhine et rohingya.
Le Protocole d’entente complémentaire, servant de base juridique au rôle du BIT, à savoir celui de recevoir les plaintes pour travail forcé et de les signaler, est devenu caduc en décembre 2018 en l’absence de mécanisme de plainte gouvernemental sur place. Alors que le gouvernement s’est réuni récemment avec le BIT sur les cas en suspens et qu’il élabore actuellement une proposition quant à son propre mécanisme des plaintes, la proposition actuelle n’apporte pas une protection suffisante aux victimes, pas plus qu’elle ne prévoit une procédure fiable pour des enquêtes indépendantes.
Des efforts significatifs sont nécessaires pour l’établissement de conditions propres à un mécanisme des plaintes sous contrôle du gouvernement qui soit efficace. A ce jour, presque tout le personnel militaire impliqué dans le travail forcé n’a écopé que de mesures disciplinaires internes. Un seul auteur a été condamné de manière appropriée en vertu de l’article 374 du Code pénal. Quel que soit le mécanisme des plaintes, une mauvaise application persistante de la loi constituera un obstacle à son efficacité. En outre, alors qu’un plan d’action a été négocié en 2019 avec le BIT, le gouvernement n’a toujours pas obtenu l’aval de tous les ministères et organismes intéressés, notamment de l’armée. Nous demandons instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour l’éradication totale de toutes les formes de travail forcé, notamment:
- de développer et de rendre opérationnel, en coopération étroite avec le BIT, un mécanisme accessible, crédible et efficace pour recevoir et résoudre les plaintes pour travail forcé;
- d’approuver et de mettre en œuvre le plan d’action de 2019;
- d’absorber tout l’arriéré des cas relevant du mécanisme du Protocole d’entente complémentaire;
- de poursuivre les coupables en vertu de l’article 374 du Code pénal;
- de modifier l’article 359 de la Constitution;
- de poursuivre le travail de sensibilisation et de renforcement des capacités dans le domaine du travail forcé, en particulier dans les régions où sévissent des violences persistantes, notamment en intensifiant les campagnes de sensibilisation du public.
Enfin, saluant l’acceptation d’une assistance technique par le gouvernement, nous exhortons le BIT à cibler en priorité le travail forcé, notamment dans le cadre du PPTD, et à solliciter activement le soutien des donateurs au besoin.
Membre employeur, Sri Lanka – La Fédération d’employeurs de Ceylan au Sri Lanka s’exprime en tant que membre du groupe des employeurs et s’associe aux déclarations faites par le porte-parole des employeurs ainsi que par notre homologue employeur du Myanmar, la Fédération des chambres de commerce et d’industrie du Myanmar.
Nous tenons à saluer les interventions de nos collègues plaidant pour la diminution et, dans l’idéal, l’éradication du travail forcé, en particulier les interventions axées sur le respect des lois et des normes internationales du travail, telle la référence à l’audit spécial qui cible en particulier l’élimination des pratiques liées au travail forcé. Il s’agit d’une contribution remarquable.
Les efforts déployés par des chambres de commerce du Myanmar, conjointement avec les partenaires tripartites et tendant à l’amélioration des conditions socio-économiques du pays, y compris au bien-être des travailleurs, sont constants et méritent une plus grande reconnaissance ainsi que des encouragements. Nous espérons que la prochaine fois, si une discussion sur le Myanmar a lieu au sein de cette commission, cela sera pour citer un cas de progrès.
Membre gouvernemental, République bolivarienne du Venezuela – Le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela salue la présentation des distingués représentants du Myanmar concernant l’application de la convention. Nous apprécions les progrès importants accomplis par le gouvernement du Myanmar en étroite collaboration avec le BIT pour éradiquer le travail forcé.
Nous soulignons à cet égard que le processus des réformes démocratiques produit des résultats tangibles au Myanmar dans le domaine de la promotion et de la protection des droits du travail, y compris en vue de l’élimination du travail forcé. Nous apprécions le PPTD, signé en septembre 2018 entre le Myanmar et l’OIT, conscients qu’il ne s’agit pas seulement d’une avancée significative dans l’Agenda du travail décent, mais également d’une contribution effective aux réformes visant à promouvoir et à protéger les droits du travail.
Nous sommes heureux que les cas de travail forcé aient diminué de manière significative et nous appelons le BIT et la communauté internationale à continuer d’accompagner le gouvernement du Myanmar dans la poursuite des efforts qu’il déploie pour éradiquer le travail forcé.
Le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela espère que les conclusions de la commission à l’issue des débats seront objectives et équilibrées et que le gouvernement du Myanmar pourra ainsi s’acheminer vers la pleine application de la convention.
Membre travailleur, Canada – Dans ses efforts pour parvenir à se conformer à la convention, le gouvernement du Myanmar doit remédier aux faiblesses des politiques foncières qui risquent de laisser des communautés entières exposées aux conditions et aux pratiques que la convention cherche à éliminer.
Le gouvernement classe environ le tiers de la superficie totale du pays comme terres vacantes, en jachère ou vierges. Une grande partie de ces terres est activement gérée par les communautés comme terres agricoles ou forêts productives, conformément au droit coutumier et à la pratique. Ceux qui exploitent ces terres manquent généralement de documents officiels pour cela.
En vertu de la loi sur la gestion des terres vacantes, en friche et vierges, modifiée en septembre 2018, toute personne occupant ou exploitant ces terres dispose d’un délai de six mois pour présenter sa demande de permis officiel d’exploitation de la terre, sous peine d’expulsion et d’emprisonnement jusqu’à deux ans, pour occupation abusive de terres sur lesquelles elle a vécu ou travaillé toute sa vie.
Un grand nombre de personnes au Myanmar ignorent ces amendements et les délais impartis et ne peuvent pas déposer de demandes. D’autres personnes déplacées par un conflit armé ne sont pas en mesure de demander de permis pour leurs terres.
Cette politique risque d’entraîner une escalade des conflits fonciers dans des régions telles que les Etats de Kachin et de Shan où il y a plus de 100 000 personnes déplacées. Il y a un risque important que de vastes étendues de terres désignées comme vacantes, en jachère ou vierges, mais appartenant à des personnes qui ont été déplacées à l’intérieur de leur propre pays ou sont devenues des réfugiés soient attribuées à des investisseurs.
Bien que la loi modifiée exclue «les terres coutumières désignées selon la culture traditionnelle des peuples ethniques», le régime foncier coutumier n’est toujours pas défini légalement, ni dans cette loi ni dans aucune autre, laissant les décisions sur ce qui est considéré comme «coutumier» aux fonctionnaires, qui peuvent eux-mêmes être impliqués dans l’accaparement des terres.
La loi incite les autorités à s’approprier des terres des communautés traditionnelles et ouvre des portes permettant à des compagnies privées de revendiquer ces terres. Par exemple, les revendications par les entreprises et les particuliers pour utiliser des terrains vacants déclenchent un délai d’opposition d’une période de trente jours, aux termes d’avis affichés à l’extérieur des bureaux du gouvernement local. Il est peu probable que ces avis soient vus par un grand nombre de résidents des camps, et encore moins probable que ces derniers puissent agir avec les «preuves» requises.
A Kachin, Etat marqué par des décennies de guerre civile, les terres vacantes se font rares et sont en voie d’être perdues pour l’extension des champs de bananes. Il est de plus en plus difficile de gagner sa vie. Il y a des cas documentés où la milice gouvernementale a obligé les agriculteurs à faire des cultures commerciales et à accepter ensuite de «louer» leurs terres à des entreprises pour des plantations de bananes. On promet aux locaux des compensations pour l’utilisation de leurs terres, mais les 36 dollars E.-U. perçus par acre comprenaient à la fois les cultures et tout leur travail. En outre, les entreprises utilisent des pesticides qui entraînent la contamination de l’eau, et les agriculteurs craignent un impact irréversible sur leurs terres, seule source de revenu.
Il est difficile de prendre des mesures contre les entreprises, car la majorité des sites de plantations sont dans des zones de conflit et elles opèrent sous la protection des forces armées.
Les politiques foncières doivent s’attaquer à ces problèmes et ne pas priver les populations de moyens de subsistance stables ou exposer des communautés entières aux pratiques d’exploitation auxquelles la convention cherche à remédier.
Membre gouvernementale, Canada – Le Canada remercie le gouvernement du Myanmar pour les informations fournies aujourd’hui. Rappelant la déclaration du Canada sur le Myanmar, prononcée lors de la 335e session du Conseil d’administration en mars 2019, le Canada prend note des efforts du gouvernement pour lutter contre le recours au travail forcé et pour l’éradiquer ainsi que des progrès accomplis dans le domaine de la réforme de la législation du travail à ce jour.
Cependant, il est clair qu’il reste encore beaucoup à faire pour mettre fin efficacement à l’emploi du travail forcé dans le pays. En particulier, le Canada reste profondément préoccupé par la persistance du travail forcé au Myanmar dans les conditions violentes et inhumaines imposées par la Tatmadaw dans les Etats de Kachin, de Shan et de Rakhine. Nous observons aussi avec dépit que les militaires qui imposent du travail forcé ne sont sanctionnés en majorité que par des mesures disciplinaires et non par des sanctions pénales telles que prévues par le Code pénal.
Nous notons qu’aucune mesure n’a encore été prise pour modifier l’article 359 de la Constitution du Myanmar, qui permet potentiellement une pratique arbitraire ou généralisée du travail forcé sur la population. Le Canada réitère également ses préoccupations quant à l’absence d’un mécanisme officiel indépendant pour traiter les plaintes relatives au travail forcé et fournir un soutien aux victimes.
En conséquence, nous demandons instamment au gouvernement du Myanmar de prendre des mesures immédiates pour: premièrement, intensifier ses efforts pour assurer l’élimination du travail forcé sous toutes ses formes, tant en droit qu’en pratique, conformément aux normes internationales, y compris le travail forcé imposé par les autorités militaires, publiques ou civiles; deuxièmement, redoubler d’efforts pour garantir que les auteurs seront poursuivis et qu’il sera mis fin à l’impunité, et veiller à ce que les sanctions prévues par la loi pour exaction de travail forcé soient appropriées et qu’elles soient strictement et uniformément appliquées contre les auteurs; troisièmement, modifier l’article 359 de la Constitution pour préciser que le travail forcé ne peut être imposé à la population en aucune circonstance; et enfin assurer, en coordination avec le BIT, la mise en place en temps utile d’un mécanisme de plainte indépendant, de portée nationale, accompagné d’un suivi diligent et efficace et de la protection des victimes.
Nous exhortons le gouvernement du Myanmar à veiller à ce que toutes les réformes soient conformes aux normes internationales du travail et qu’elles soient le résultat d’un dialogue tripartite authentique et effectif. Nous notons à cet égard l’extension du processus tripartite national et la tenue du Forum de dialogue tripartite national en mai 2019 et nous encourageons le gouvernement à prendre en compte les préoccupations et les commentaires des partenaires sociaux lors du processus de développement législatif et des politiques.
Enfin, nous encourageons le gouvernement du Myanmar à poursuivre une coopération étroite avec le BIT pour atteindre ces objectifs.
Observateur, Fédération internationale des transports (ITF) – Je veux parler de la question de la traite des êtres humains et du travail forcé dans les pêcheries dans le double contexte des migrations internes et externes. Le secteur de la pêche est l’une des composantes majeures de l’économie du Myanmar. Il emploie 3,3 millions de personnes. Un rapport du BIT de 2015 sur les migrations internes de la main-d’œuvre au Myanmar montre que les conditions de travail dans l’industrie de la pêche locale impliquent la violence physique, la servitude pour dettes, des salaires qui ne respectent pas les conditions initiales et le manque de nourriture. Environ 39 pour cent des personnes interrogées au cours de l’enquête du BIT dans le secteur de la pêche étaient dans une situation de travail forcé, contre 26 pour cent dans l’ensemble, et 26 pour cent se trouvaient en situation de trafic, contre 14 pour cent dans l’ensemble. Les décideurs feraient bien d’adopter une approche sectorielle dans la formulation des plans d’action pour lutter contre le trafic d’êtres humains et le travail forcé dans l’industrie de la pêche domestique.
J’en viens maintenant à la situation des pêcheurs birmans migrants. Les travailleurs migrants du Myanmar constituent une grande partie de la main-d’œuvre de la pêche en Thaïlande. Le réseau pour les droits des pêcheurs, une initiative de l’ITF visant à créer un syndicat indépendant des pêcheurs en Thaïlande, protège principalement les droits syndicaux des pêcheurs migrants. A l’heure actuelle, plus de 90 pour cent des pêcheurs birmans, que le FRN a interrogés au cours des douze derniers mois seulement, sont en servitude pour dettes pour plus de 20 000 baht, soit environ 600 dollars E.-U., ce qui représente une dette suffisamment importante pour qu’ils ne puissent pas la rembourser rapidement. L’exploitation des pêcheurs birmans est monnaie courante.
Le journal The Guardian a également signalé que des migrants rohingya, victimes de la traite dans des camps mortels de la jungle ont été vendus aux navires de pêche thaïlandais comme esclaves. Le recrutement trompeur et coercitif, impliquant des agents ou des courtiers peu scrupuleux, y compris le Myanmar lui-même, est une des causes principales de la mise des pêcheurs sous servitude.
Le gouvernement du Myanmar a pris quelques mesures positives pour remédier à ce problème. En 2018, la Thaïlande et le Myanmar ont signé un protocole d’accord pour une coopération en matière d’emploi de travailleurs, qui comprend des mesures concernant la traite. Le Myanmar est aussi membre du Forum de l’Asie du Sud-Est pour mettre fin au trafic et au travail forcé des pêcheurs, organisé par le BIT; et, depuis février de cette année, le BIT, en collaboration avec le ministère du Travail et l’ITF, a contribué au travail d’orientation des pêcheurs se rendant en Thaïlande pour travailler, avant leur départ. Toutefois, malgré ces initiatives, comme le suggèrent nos statistiques, il reste encore beaucoup à faire. Le gouvernement du Myanmar devrait, au minimum, ratifier et mettre en œuvre de manière effective la convention (nº 188) sur le travail dans la pêche, 2007, et se conformer strictement aux Principes généraux et directives opérationnelles concernant le recrutement équitable de l’OIT. Le gouvernement devrait également continuer à travailler avec le BIT et l’ITF sur la formation préalable au départ et sur les questions connexes.
Membre gouvernemental, Inde – Nous remercions la délégation du Myanmar pour sa communication sur ce point de l’ordre du jour ainsi que pour la mise à jour exhaustive fournie dans ce contexte. Nous prenons note avec satisfaction des progrès importants accomplis par le gouvernement du Myanmar pour, entre autres, promouvoir l’Agenda du travail décent de l’OIT, renforcer le dialogue social tripartite et entreprendre des réformes du travail tenant compte du contexte et des priorités nationales.
En tant que pays voisin ami, nous sommes pleinement conscients du contexte de l’agenda ambitieux de politique économique et sociale poursuivi par le gouvernement civil du Myanmar démocratiquement élu, et nous comprenons les défis auxquels ce dernier est confronté pour faire avancer le processus de paix, pour la mise en place d’institutions et le renforcement du rôle du droit, y compris pour la protection et la promotion du travail, afin de créer une société juste et équitable pour tous ses citoyens.
Nous apprécions sincèrement l’engagement soutenu du gouvernement du Myanmar à créer des emplois décents, promouvoir des investissements responsables, renforcer la culture du tripartisme et le partenariat social, y compris la liberté syndicale; à entreprendre des réformes du travail; et à éliminer le travail forcé sous les auspices du PPTD récemment signé.
Le développement d’un plan d’action actualisé, qui prévoit notamment la mise en place d’un mécanisme national de traitement des plaintes, en coopération étroite et en consultation avec les partenaires sociaux, ainsi que les efforts soutenus en matière de sensibilisation et de renforcement des capacités, par la formation, pour l’élimination du travail forcé constituent d’autres initiatives positives du gouvernement. La pratique du travail forcé a considérablement diminué au Myanmar et est clairement sur une tendance en baisse, du fait des mesures prises non seulement par le gouvernement du Myanmar, mais également par son Parlement, à travers une modification appropriée de la Constitution.
Nous soutenons la coopération et l’engagement constructif du Myanmar avec le BIT. L’OIT et la communauté internationale devraient s’engager de manière constructive avec le gouvernement du Myanmar et lui apporter une assistance technique renforcée dans ses efforts visant à réaliser ses objectifs nationaux en matière de politique économique et sociale, en passant par la promotion du travail décent et l’élimination du travail forcé. Nous souhaitons au gouvernement du Myanmar un plein succès dans ses entreprises.
Membre travailleuse, Malaisie – Le rapport The Global Slavery Index (GSI) sur le Myanmar estime à 575 000 le nombre de personnes vivant dans une situation d’esclavage moderne. Onze personnes sur 1 000 sont victimes d’esclavage au Myanmar. Selon le rapport GSI, les déplacements en masse, les enlèvements, les violences sexuelles et les meurtres commis contre la population rohingya sont les causes flagrantes de cette situation.
Il y a quatre mois, le secrétaire permanent du ministère du Travail, de l’Immigration et de la Population du Myanmar, M. U. Myo Aung, a déclaré aux médias que le nombre de travailleurs du Myanmar employés à l’étranger atteint 5 millions. Le chiffre réel est cependant, à mon avis, beaucoup plus important, parce que, seulement en Malaisie, il y avait déjà plus de 450 000 travailleurs du Myanmar en 2017. Un grand nombre de ces travailleurs avaient fui le pays pour se rendre dans des pays voisins comme la Thaïlande et la Malaisie, où l’herbe leur semblait plus verte, mais où ils n’ont trouvé que le harcèlement et la victimisation.
Au Myanmar, il existe un guichet unique pour le traitement des visas de sortie pour les travailleurs. Ce guichet unique se prétend le fournisseur exclusif de services pour tout ce qui concerne les visas et les services consulaires pour les ambassades du Myanmar en Chine, en France, en Italie, au Japon, en Malaisie et à Singapour. Les coûts des visas ont augmenté à plusieurs reprises, et les travailleurs doivent s’acquitter en plus des frais de visa, de la rémunération du service.
Des rapports indiquent qu’avant décembre 2015 les travailleurs du Myanmar se rendant en Malaisie payaient 6 dollars E.-U. pour le visa mais que, depuis 2016, les travailleurs paient 83 dollars E.-U. pour les frais de service, le système de redevance et les frais liés au droit d’immigration, en sus des frais de visa. Les frais de visa ont été multipliés par dix, et les contrôles de santé sont passés de 10 à 56 dollars E.-U. Ces sommes excluent les centaines de dollars versés aux agences de placement qui s’occupent des emplois. Très peu de travailleurs peuvent se permettre de payer ces nouveaux frais supplémentaires. Ils contractent alors des prêts à intérêt élevé, ou hypothèquent leurs biens ou les vendent en totalité pour payer le voyage à l’étranger à la recherche de meilleurs moyens de subsistance. Cela les conduit à la servitude pour dettes et ils vivent de leur revenu emprunté tout le reste de leur existence. Des corporations d’entreprises ou de futurs employeurs, dans certains cas, sont à l’origine de cette tendance à la servitude pour dettes. Ils agissent comme prêteurs ou facilitateurs de prêt. Une fois à l’étranger, les travailleurs perdent leur liberté et doivent travailler longtemps pour supporter et rembourser leurs dettes.
Malgré les efforts déployés par le BIT au moyen de divers programmes, la servitude pour dettes continue à se développer. C’est pourquoi le Myanmar, pays ayant ratifié la convention, devrait négocier un accord de gouvernement à gouvernement (G2G) avec la Malaisie, dès que possible, pour mettre fin à la servitude pour dettes et protéger les travailleurs migrants qui vont en Malaisie pour améliorer leurs moyens de subsistance.
Membre employeur, Singapour – Je pense que nous avons beaucoup entendu de commentaires de la commission et aussi de cas présentés, ou de cas passés, mais je pense que nous pouvons voir que les statistiques sont en baisse. C’est un bon signe, et je fais confiance aux employeurs et même aux syndicalistes qui travaillent en coopération très étroite avec le gouvernement. Nous devons aboutir ici à une déclaration juste, et je pense que ce qui est plus important est d’aller de l’avant. Quels sont les plans d’action qui seront mis en place par les partenaires sociaux avec l’aide du BIT? Je pense que ceux-ci sont importants. Nous devons mettre l’accent sur cela, travailler sur cela, et je pense que nous pourrons voir un peu de lumière au bout du tunnel.
Il y a quelques points sur lesquels je voudrais insister à nouveau. La formation des employeurs à propos de la question du travail forcé devrait se poursuivre. Il faut également créer des normes et directives à suivre par les employeurs dans le pays. Je pense que c’est important d’aller de l’avant. De même, les dirigeants syndicaux, vous qui êtes sur le terrain, vous devez conseiller les employeurs. Il faut aussi que des gens aillent sur le terrain pour alerter les employeurs.
Enfin, il ne faut pas oublier que le gouvernement du Myanmar joue un rôle important. Nous pouvons voir que le tripartisme s’est développé, même si le pays compte moins de trois années de démocratie, mais je pense que nous constatons un tripartisme en action, et c’est nécessaire pour résoudre, avec le BIT, ces questions nationales.
Membre gouvernementale, Nicaragua – Nous remercions les représentants du gouvernement pour le rapport présenté à cette commission, en ce qui concerne la convention. De même, nous apprécions les efforts déployés par le gouvernement pour appliquer la convention, démontrant ainsi son engagement à se conformer à toutes les obligations au titre de ladite convention.
Nous saluons par ailleurs le Protocole d’accord pour le plan d’action en vue de l’élimination du travail forcé, signé en 2018 entre le gouvernement et l’OIT, et nous encourageons l’Organisation à continuer à collaborer avec le gouvernement et à fournir toute la coopération et l’assistance technique nécessaires à la réalisation de progrès concrets dans le pays. Nous saluons le gouvernement du Myanmar pour ses efforts en vue de la mise en œuvre continue du plan de développement durable du Myanmar (2018-2030), conforme aux ODD, y compris l’ODD 8.
Nous nous félicitons de ce que le gouvernement, en étroite collaboration avec le BIT, intensifie et encourage le processus de réforme du droit du travail, renforce la culture du dialogue tripartite et fournisse une formation aux personnes principalement chargées de la protection et de la promotion des droits du travail. Nous encourageons le gouvernement à continuer à œuvrer en vue de la réalisation de progrès plus significatifs dans la voie de l’éradication du travail forcé et nous lui souhaitons le meilleur pour la réalisation de tous les objectifs à cet égard.
Membre gouvernemental, Bélarus – Le Bélarus est favorable à une approche universelle et équitable pour tous les pays, et nous voudrions remercier la délégation du Myanmar pour le rapport qu’elle a présenté. Nous saluons ses efforts pour améliorer la situation des travailleurs et le système législatif. Nous apprécions l’ouverture du Myanmar à la coopération avec l’OIT, y compris pour l’élaboration et l’application d’un plan d’action national. Nous soutenons les activités du gouvernement visant à promouvoir la paix, à poursuivre le dialogue social et à remplir ses obligations en vertu des principes de l’OIT; nous nous félicitons des efforts du gouvernement et encourageons la communauté internationale à intensifier son soutien au Myanmar.
Membre gouvernemental, Suisse – La Suisse soutient la déclaration faite par l’Union européenne et souhaite ajouter quelques points. La Suisse salue les diverses mesures prises par le gouvernement en collaboration avec l’OIT, ainsi que les progrès significatifs accomplis ces dernières années en ce qui concerne l’élimination du travail forcé. Cependant, la Suisse regrette profondément que, malgré les efforts faits par le gouvernement, des cas de recours au travail forcé perdurent au Myanmar.
Le recours au travail forcé par les forces armées du Myanmar (Tatmadaw) à l’encontre de certaines ethnies minoritaires est très préoccupant et doit être fortement condamné. Les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre toute forme de travail forcé sont positives, mais les efforts doivent continuer et être intensifiés afin d’éliminer le recours au travail forcé dans l’ensemble des Etats du Myanmar. En ce sens, la délégation suisse encourage le gouvernement à continuer ses actions de formation et de sensibilisation ainsi que la collaboration avec l’OIT.
Par ailleurs, l’efficacité de la mise en œuvre des lois et leur application stricte sont des éléments indispensables à une lutte pleine et entière contre le travail forcé. Des enquêtes approfondies doivent être menées, et les cas d’infractions pénales doivent faire l’objet de sanctions suffisamment dissuasives et strictement appliquées aux auteurs dans tous les cas. La Suisse invite donc le gouvernement du Myanmar à prendre les mesures nécessaires pour assurer la stricte application de la législation nationale.
Finalement, la Suisse invite le gouvernement du Myanmar à ratifier la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, ainsi que le protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930. La Suisse continuera de soutenir des programmes de l’OIT au Myanmar.
Membre gouvernemental, Fédération de Russie – Tout d’abord, nous souhaitons exprimer notre gratitude au gouvernement du Myanmar pour les explications détaillées qu’il a fournies aujourd’hui sur les mesures qui ont été prises pour remplir ses obligations découlant de la convention. Nous avons vu dans le rapport que le gouvernement accomplit un travail considérable en étroite coopération avec le BIT. Au Myanmar, des efforts sont faits pour mener à bien les réformes démocratiques. L’un des plus importants domaines est la protection des droits des travailleurs et, malgré les difficultés, un travail constant est en cours pour fournir des garanties contre le travail forcé. Nous prenons note en particulier des mesures qui ont été prises pour mettre en œuvre le PPTD signé en septembre 2018 et nous notons également les réformes qui ont été apportées à la législation du travail.
Nous saluons la contribution du BIT et sa coopération étroite avec le gouvernement du Myanmar. Nous saluons également l’élaboration, avec les partenaires sociaux, d’un nouveau plan d’action visant à créer un mécanisme national de traitement des plaintes. Toutes ces mesures, prises ensemble, ont déjà eu un effet positif à nos yeux. Le nombre de cas de travail forcé a été réduit et continue de chuter. Nous espérons que cette tendance se maintiendra.
Nous appelons l’OIT et la communauté internationale dans son ensemble à poursuivre leur coopération avec le gouvernement du Myanmar pour assurer le plein respect des obligations du pays en vertu de cette convention.
Représentant gouvernemental – Nous avons écouté toutes les interventions très attentivement. La délégation du Myanmar rapportera ces points de vue, conseils et préoccupations au Myanmar pour examen en vue de parvenir à une meilleure application de la convention. Je tiens à réaffirmer que l’établissement d’un mécanisme national des plaintes dans le cadre du PPTD est en phase finale d’approbation. Le consentement de tous les ministères, y compris le ministère de la Défense, à l’établissement de ce mécanisme est déjà acquis. Nous avons également les procédures provisoires pour recevoir en permanence les plaintes formulées par toute personne et par toute organisation. Nous poursuivrons une étroite coopération avec le BIT à cet égard.
Comme nous l’avons mentionné dans nos remarques introductives, nous avons en effet besoin d’une Constitution conforme aux principes démocratiques. La commission parlementaire mixte a été créée dans le but de modifier la Constitution. Elle s’est réunie presque 20 fois depuis sa création en février de cette année. Comme nous l’avons déjà mentionné, les contraintes constitutionnelles figurent parmi les défis auxquels nous sommes confrontés; c’est pourquoi le gouvernement actuel a inscrit la modification de la Constitution au plus haut rang des priorités pour le pays. Nos efforts visent à transformer le pays en une union fédérale démocratique. Comme l’a souligné le conseiller d’Etat, nous avancerons de manière progressive, et non révolutionnaire. Tout le monde au Myanmar a convenu que nous voulions vivre dans une union fédérale démocratique, et non sous un régime autoritaire. Une coopération constructive de la part de la communauté internationale est en effet nécessaire pour maintenir le Myanmar sur la bonne voie en matière de démocratisation. Par conséquent, nous prenons au sérieux toutes les allégations d’infractions au travail forcé. Nous sommes disposés, et en capacité, à résoudre ces problèmes. Le gouvernement est pleinement déterminé à engager des poursuites contre les auteurs s’il existe des preuves tangibles de toute infraction des droits de l’homme, y compris de travail forcé.
Certains intervenants ont évoqué le rapport de la Mission d’établissement des faits du HCR. En ce qui concerne cette mission, notre position est claire. Le Myanmar s’est formellement opposé à la mission d’enquête depuis sa création. Nous rejetons également son rapport basé sur des récits. Cependant, nous prenons au sérieux toutes les allégations, y compris celles contenues dans le rapport de la mission. Le gouvernement du Myanmar a déclaré à plusieurs reprises qu’il ne tolérera pas les violations des droits humains et qu’il engagera des poursuites judiciaires conformément à la loi si les allégations sont étayées par des preuves suffisantes. Par conséquent, le gouvernement du Myanmar a créé une commission d’enquête indépendante chargée d’enquêter sur toutes les allégations de violations des droits de l’homme à la suite de l’attaque terroriste de l’ARSA en août 2017 dans le nord de Rakhine. Le mandat de la commission est la recherche des responsabilités et de la réconciliation. La commission remplit son mandat en toute indépendance, impartialité et objectivité. La commission d’enquête indépendante enquêtera sur les allégations de violation des droits de l’homme fondées sur des preuves solides. Par conséquent, elle instituera une sous-commission à laquelle elle soumettra toutes les informations qu’elle aura rassemblées pour analyse. Elle recherchera le soutien technique d’experts externes dans des domaines tels que l’information et la communication, les enquêtes légales et criminelles. Chaque membre de la commission nommera ses propres collaborateurs et experts. La commission a lancé un appel public à soumettre des communications sur des allégations de violations de droits de l’homme. Elle a reçu 40 communications concernant des allégations d’abus en matière de droits de l’homme. La commission a par ailleurs exigé un accès aux camps de réfugiés de Cox’s Bazar au Bangladesh. Nous exhortons le gouvernement du Bangladesh à faciliter la visite de la commission dans les camps pour rencontrer les victimes d’abus présumées. Les travaux de la commission s’appuieront sur des preuves. La communauté internationale devrait les soutenir. La porte est ouverte à toutes les plaintes constructives. Les plaintes peuvent être déposées via différents canaux, ceux qui existent déjà, les médias sociaux, la commission nationale des droits de l’homme, le bureau du Président et le Parlement, pour n’en citer que quelques-uns. Nous voudrions réaffirmer notre engagement pour l’élimination du travail forcé. A cet égard, nous poursuivrons notre coopération avec l’OIT et nos partenaires. Par conséquent, nous voudrions demander à tous nos partenaires d’apporter leur aide et leur coopération constructives aux efforts du gouvernement pour l’élimination du travail forcé.
Membres travailleurs – Malheureusement, il semble que la communauté internationale soit trop pressée d’exiger la victoire s’agissant de l’éradication du travail forcé au Myanmar. Alors que des mesures ont été prises, l’omniprésence du travail forcé reste un sujet de grave préoccupation, compte tenu en particulier de l’implication d’acteurs étatiques. Ce cas mérite un suivi rigoureux de la part de l’OIT et de la communauté internationale. Nous exprimons à nouveau notre profonde préoccupation concernant la caducité du Protocole d’accord complémentaire, alors qu’aucun autre mécanisme crédible ne le remplace. Ce n’est pas le moment de perdre tout contrôle indépendant sur les exactions de travail forcé dans le pays.
En ce qui concerne la situation des Rohingya, cette question nécessite une attention urgente et un véritable leadership. Le travail forcé persistera tant qu’une population aussi nombreuse reste dans une situation hautement vulnérable – en tant que citoyens sans papiers dans leur propre pays. Plus de 700 000 personnes vivent actuellement de l’autre côté de la frontière, au Bangladesh, dans des camps sordides, sans aucune perspective de retour chez eux à court terme, dans des conditions qui garantiraient leur sécurité. Leur expulsion forcée du Myanmar a créé une crise des droits de l’homme, y compris une extrême exposition à la traite des êtres humains, compte tenu de leur situation désespérée. Ceux qui sont déplacés à l’intérieur du pays sont également exposés à un risque élevé d’exploitation brutale par l’armée et par les trafiquants d’êtres humains, en particulier pour l’extraction des ressources naturelles.
Evidemment, nos préoccupations concernant le travail forcé ne s’arrêtent pas là. Comme nous l’avons entendu, de nombreuses autres personnes, y compris des travailleurs d’autres régions ethniques, sont confrontées au travail forcé par l’armée ou par des particuliers, notamment dans l’agriculture, la pêche et les mines. En effet, le rapport sur le travail forcé et d’autres violations des droits de l’homme dans les mines de pierres précieuses est particulièrement sombre, évoquant notamment la dépendance des travailleurs à de puissants opiacés pour les empêcher de quitter l’exploitation.
Le recours au travail forcé, en tant que sanction dans les prisons, en particulier à des fins privées, est très préoccupant et doit cesser immédiatement. L’emprisonnement de dissidents pour exercice de libertés fondamentales doit également cesser. Je voudrais aussi faire écho aux préoccupations soulevées par le délégué des travailleurs du Myanmar à propos de la situation délétère en matière de liberté syndicale, en droit et en pratique. Comme l’a expliqué la commission d’experts, et la présente commission lui en a fait écho, il existe un lien direct entre l’absence de liberté syndicale et l’exaction de travail forcé. Nous sommes profondément troublés par la direction prise par le gouvernement en ce qui concerne la liberté syndicale, comme nous l’avons expliqué au sein de cette commission l’année dernière, et craignons que l’hostilité du gouvernement à l’égard des organisations de travailleurs n’expose ces derniers à un risque accru de travail forcé. Nous avons en outre entendu dire que la confiscation des terres a entraîné de gros risques d’expositions au travail forcé.
Nous craignons que le Myanmar redevienne un cas récurrent au sein de cette commission si les choses ne changent pas. En conséquence, nous demandons instamment au gouvernement du Myanmar de respecter les conclusions de cette commission et de les mettre en œuvre dans les meilleurs délais. Nous pensons en outre qu’une mission de contacts directs devrait être envoyée au Myanmar pour le suivi des conclusions de la commission et pour lui en faire rapport l’année prochaine. Nous encourageons vivement le secrétariat du BIT et le bureau de liaison à continuer de travailler de manière intensive avec le gouvernement pour s’attaquer à ces très graves violations et à continuer d’en faire rapport au Conseil d’administration.
Membres employeurs – Je pense, et ce que nous avons entendu de la part de nombreux gouvernements, que le Myanmar est en train d’émerger de ce qui était, de réputation mondiale, depuis de nombreuses années, un pays de répression et d’oppression et qu’on perçoit, ces dernières années, les premiers rayons de soleil de la démocratie; mais il est toujours en train d’émerger. Si vous voulez utiliser l’analogie d’une chrysalide se transformant en papillon, nous sommes encore loin du papillon, mais on va vers cet ultime but, qu’à mon avis le monde finira par reconnaître.
Cela dit, et je pense que personne ne dira le contraire, il y a encore beaucoup trop de choses qui ne vont pas bien. Les cas notamment, ceux que la commission d’experts a notés, de recrutement dans les forces armées restent l’aspect principal et le plus rapporté des préoccupations soulevées par cette commission, et je note que le gouvernement a déclaré qu’il agirait sur la base de preuves crédibles. Je pense que, tout au moins dans le cas des forces armées, c’est un ensemble de processus bien documenté, et un nombre significatif de personnes en possède des documents pertinents. Nous demandons donc au gouvernement de reconnaître sa propre responsabilité et de continuer à faire ce qu’il affirme être déjà en train de faire.
Toutefois, ce qui reste, ce sont les cas impliquant d’autres domaines que celui de l’armée, qui ne sont pas documentés, et nous avons entendu un certain nombre d’anecdotes et de faits partiellement avérés en référence à des problèmes concernant le travail dans d’autres domaines, tels que l’agriculture. J’observe qu’une grande partie des faits se produisent à l’extérieur du pays, mais certainement pas en dehors de la responsabilité du pays, uniquement au-delà de ses frontières physiques; et bien sûr ces faits donnent lieu à de nouveaux problèmes.
L’une des choses que les employeurs diraient, c’est que ces problèmes ne concernent pas le Myanmar seul, car lorsqu’ils se produisent hors du Myanmar, même s’ils touchent des citoyens du Myanmar, ils ont un impact à l’intérieur, dans et au vu des juridictions des autres pays. C’est pourquoi j’appelle tout le monde, et en particulier les voisins du Myanmar, à jouer également leur rôle pour identifier, supprimer ou, sinon, aider à l’élimination de ces types de pratiques. Par exemple, la pêche en mer au-delà du Myanmar relève de la responsabilité de nombreux autres pays. Donc tout le monde a un rôle à jouer en la matière, et nous appelons chacun à jouer son rôle.
L’autre chose par rapport à la portée de cet exercice, et j’ai mentionné juste avant que l’armée semble constituer la principale et la plus évidente source d’oppression, à mesure que nous avançons, est d’espérer que, lorsque ces faits sont dénoncés et des sanctions envisagées, l’examen sera abordé de manière équilibrée et équitable. Et nous avons eu vent de quelques inquiétudes, parfois preuve à l’appui, avançant que les sanctions appliquées aux militaires coupables d’emploi de travail forcé sont plutôt légères et de nature disciplinaire plutôt que punitives ou pénales, tandis qu’il existe des preuves selon lesquelles, par exemple, des civils impliqués dans le même type d’activités sont condamnés notamment à d’importantes peines d’emprisonnement. La préoccupation est légitime quant à ce déséquilibre en la matière, et les employeurs voudraient appeler le gouvernement à garantir que tout régime et toute institution de répression dissuasive de la traite et du travail forcé sont équitables et justes, dans toute l’économie, sans restriction.
Ce que nous pensons et que nous avons entendu, c’est que pour combattre le travail forcé il faut pouvoir l’identifier comme tel. Pour cela, le mécanisme le plus efficace dont nous avons entendu parler est le développement d’un mécanisme national des plaintes, et je dis, là encore, que nous en parlons au singulier, alors que nous avons entendu le gouvernement affirmer que le mécanisme proposé est en fait un ensemble hétéroclite de portes par lesquelles n’importe qui peut entrer et exposer ses préoccupations.
La création et l’achèvement de ce processus sont de la plus haute priorité, et nous notons que, selon le gouvernement, le plan d’action sera présenté au Cabinet, ce plan d’action étant le moyen par lequel le reste du processus de traitement des plaintes sera mis en avant. C’est, à notre avis, de la plus haute priorité possible. A côté de ça, il faut veiller à ce que la législation en vigueur dans le pays soit mise en harmonie. Nous avons entendu dire que la Constitution n’est pas en phase avec certaines des autres initiatives qui sont prises. Pour que l’alignement de la législation et de la Constitution fasse partie de cette priorité, il faut créer un mécanisme de traitement des plaintes
Pour ce faire, nous exhortons le gouvernement du Myanmar à poursuivre et à renforcer ses liens avec l’OIT qui, comme tout le monde l’a admis, a fourni un appui considérable au cours des dernières années. L’existence du bureau de liaison dans le passé et aujourd’hui a toujours été jugé grandement bénéfique. Ces mécanismes peuvent encore être renforcés, de même que les capacités en interne des employeurs, des travailleurs et du gouvernement et des organes chargés de ces questions au sein du gouvernement. C’est pourquoi nous insistons pour que le processus de coopération engagé au sein de l’OIT et avec les partenaires sociaux se concentre sur ce problème et le traite en priorité.
Cela résume le genre de choses que nous voudrions souligner. Premièrement, nous félicitons le gouvernement pour ses progrès; nous demeurons préoccupés par les questions en suspens; nous reconnaissons que ces questions sont de plus en plus ciblées dans certains domaines, ce qui laisse présumer que d’autres domaines seront traités avec le temps. Nous encourageons la continuité de ce processus. Nous recommandons au gouvernement de prendre des mesures immédiates pour réformer les programmes législatifs nationaux, y compris l’introduction du plan d’action sur la mise en conformité de la Constitution. Nous exhortons le gouvernement à communiquer régulièrement des rapports, pas seulement à l’OIT par le biais de l’un des mécanismes de rapport existants, mais à travers l’établissement de mécanismes de rapport transparents au sein de son propre pays afin que tous les citoyens puissent voir que ces problèmes sont soulevés ou que des plaintes sont déposées et traitées, et alors tout le pays pourra avoir une vision du processus et s’y fier, ce qui, je pense, est aussi un aspect extrêmement important de toute démocratie. Et, en dernier lieu, nous recommandons que le gouvernement continue à travailler en étroite collaboration avec ses partenaires sociaux pour établir un mécanisme national permanent et efficace de traitement des plaintes concernant le travail forcé dans le cadre d’un système de sanctions efficace et dissuasif.
Conclusions de la commission
La commission a pris note des informations fournies oralement par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.
La commission a pris note des efforts déclarés du gouvernement pour éliminer le travail forcé, s’est félicitée de ces efforts et a prié instamment le gouvernement de les poursuivre. Toutefois, la commission s’est déclarée préoccupée par le recours persistant au travail forcé.
Prenant en compte la discussion du cas, la commission prie instamment le gouvernement:
- de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que, dans la pratique, le travail forcé n’est plus imposé par les autorités militaires ou civiles;
- d’appliquer strictement la loi de 2012 portant modification de la loi concernant l’administration des circonscriptions et des villages ainsi que le Code pénal pour s’assurer que les responsables de travail forcé font l’objet d’enquêtes et de poursuites effectives et, que dans tous les cas, les peines infligées sont proportionnelles à leurs actes;
- de s’assurer que les victimes de travail forcé ont accès à des voies de recours efficaces et à un soutien complet, sans crainte de représailles;
- de s’abstenir d’imposer des sanctions à ceux qui ont dénoncé des cas de travail forcé ou qui en ont fait état;
- de faire mieux connaître au grand public et aux autorités administratives les activités de sensibilisation et de renforcement des capacités afin de dissuader le recours au travail forcé;
- de fournir des informations détaillées sur les progrès accomplis dans le cadre du programme par pays de promotion du travail décent;
- d’intensifier sa coopération avec le BIT en élaborant un plan d’action assorti de délais pour la mise en place d’une procédure efficace de traitement des plaintes et pour la transition vers cette procédure.
A cet égard, la commission encourage le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT pour donner suite aux recommandations.
Représentant gouvernemental – Nous prenons note de la recommandation formulée par la commission et souhaitons exprimer notre reconnaissance à l’Organisation internationale du Travail (OIT) et aux pays qui soutiennent le Myanmar dans ses efforts pour éliminer le travail forcé. Je souhaiterais réaffirmer notre engagement à éliminer le travail forcé. Je souhaiterais également demander à l’OIT et aux Etats Membres de continuer à aider le Myanmar à éliminer le travail forcé.
A. COMPTES RENDUS DE LA DISCUSSION DE LA COMMISSION DE L’APPLICATION DES NORMES
Un représentant gouvernemental du Myanmar a rappelé que le Conseil d’administration, lors de sa 310e session, s’était félicité des développements positifs au Myanmar ainsi que de la prolongation du Protocole d’entente complémentaire pour une période de douze mois. Il a expliqué que la prolongation a été décidée lors de la visite du Directeur exécutif en février 2011. Il a souligné qu’il est important de mentionner que la mission du BIT a été la seule mission étrangère accueillie par les autorités depuis que siège le nouveau Parlement, afin de prolonger ledit Protocole et d’obtenir des conseils sur le projet de législation concernant les organisations de travailleurs. Durant cette mission, les membres ont pu rencontrer le ministre du Travail, le groupe de travail gouvernemental sur l’élimination du travail forcé, celui sur la lutte contre le trafic d’êtres humains et l’organe gouvernemental sur les droits de l’homme. Ces discussions ont permis de renforcer la compréhension et la coopération mutuelle entre le Myanmar et le BIT. Le fait d’accueillir cette mission prouve l’engagement politique du gouvernement à coopérer avec le BIT.
Il a indiqué que la préparation d’un projet de loi pour amender la loi sur les villes et la loi sur les villages de 1907 par un comité présidé par le ministre de l’Intérieur représente une mesure concrète de mise en oeuvre de la convention no 29. Ce projet de loi interdit explicitement le travail forcé et inclut des exceptions dans les cas de catastrophes naturelles. Ce projet sera soumis au Pyidaugsu Hluttaw (Parlement), et des décrets et directives seront publiés le cas échéant. Un projet de loi sur la création d’organisations de travailleurs est également en cours d’élaboration en collaboration étroite avec le BIT. Ce projet devrait être promulgué par le Parlement prochainement. S’agissant de la Constitution de 2008, il rappelle que cette dernière a été approuvée par 92,48 pour cent de la population et qu’il est donc impossible à ce stade de la modifier. Toutefois, un projet de loi pourrait prévoir des dispositions interdisant explicitement la pratique du travail forcé, mettant ainsi le cadre juridique en conformité avec la convention no 29.
Le gouvernement estime que la sensibilisation et l’information jouent un rôle important dans l’élimination du travail forcé dans le pays. A cet égard, l’orateur a mentionné que dix séminaires régionaux se sont tenus depuis 2008. Il a insisté sur le fait qu’ils se sont tenus non seulement dans les régions centrales du Myanmar, mais également dans les régions où résident des minorités ethniques, telles que le Kachirt, Karen, Shan et Chin. Les autorités civiles et militaires et des membres des ministères régionaux concernés ont également pris part à ces séminaires. Depuis mai 2010, un total de 35 activités de formation et de sensibilisation se sont tenues avec succès avec les parties concernées.
Ces activités ont généré une meilleure prise de conscience de cette question auprès du grand public, ce qui a provoqué une augmentation du nombre de plaintes. Le Chargé de liaison a indiqué dans son rapport que cette tendance ne devrait pas être interprétée comme une augmentation du recours au travail forcé. Pour faire face à l’augmentation de la charge de travail, il a été précisé au bureau de liaison que ce dernier avait la liberté d’employer du personnel local.
Dans le cadre de l’approche volontariste, un budget pour couvrir les coûts des projets du gouvernement a été alloué à tous les ministères. Les fonds alloués ont été dépensés pour atténuer les risques du travail non rémunéré dans les projets du gouvernement.
Il a indiqué que les plaintes sur le recrutement de mineurs ont été traitées en priorité par le groupe de travail du gouvernement et ses commissions respectives. En ce qui concerne les plaintes reçues par le mécanisme de plaintes de l’OIT, un total de 120 recrues ont été autorisées à démissionner du service militaire et 13 ont été libérées de prisons. S’agissant de l’application des mesures de lutte contre le recrutement de mineurs, cinq officiers de l’armée et cinq autres de rangs différents ont été licenciés et condamnés à des peines de prison. Des mesures disciplinaires ont également été prononcées contre 20 officiers et 110 militaires de rangs différents dans l’armée. Il est évident que des mesures seront prises contre tout auteur, civil ou militaire, concernant le travail forcé et le recrutement de mineurs. Il a ajouté que certaines plaintes ont été déposées directement devant des autorités militaires et ont été traitées avec la même priorité et les mesures adéquates adoptées. Les autorités militaires locales ont également réglé 22 différends en matière de propriété foncière.
Le gouvernement est convaincu que des progrès ont été accomplis en matière de respect de la convention no 29, ce qui a été rendu possible grâce à l’étroite collaboration avec l’OIT, notamment avec le Chargé de liaison. Il a souligné que le Myanmar n’a jamais perdu de vue l’objectif d’éliminer toute forme de pratique du travail forcé, même durant la période importante de transition politique dans le pays. Il a indiqué que le gouvernement souhaite renforcer sa coopération avec le BIT pour atteindre cet objectif commun.
Les membres employeurs ont pris note des changements politiques survenus depuis la dernière fois que la commission a examiné ce cas. Ils espèrent que l’absence d’un gouvernement contrôlé par les militaires et que le nouveau Parlement, qui compte des représentants de partis ethniques et de partis non alignés sur le gouvernement précédent, généreront un contexte dans lequel le gouvernement pourra finalement mettre un terme au fléau du travail forcé. Depuis l’an dernier, des mesures positives modestes ont été prises, avec notamment la libération d’Aung San Suu Kyi, un relâchement de la censure, les comités présidentiels consultatifs sur les questions économiques, juridiques et de politique générale, et l’acceptation du principe du financement et de la planification des travaux publics. Toutefois, sur le fond, la situation reste inchangée, étant donné que le gouvernement n’a toujours pas mis en application les recommandations de la commission d’enquête de 1998. Il est particulièrement décevant que le récent changement de gouvernement n’ait pas produit de changements perceptibles laissant supposer que les tactiques dilatoires et d’enlisement de son prédécesseur perdurent. Les membres employeurs attendaient une déclaration plus longue du gouvernement du Myanmar, avec des informations plus concrètes, en particulier sur les amendements à la législation.
La preuve d’une volonté politique proactive et exempte de réserves devra être apportée par des actions concrètes, dont le calendrier et le caractère d’urgence revêtent autant d’importance que les actions proprement dites. Afin de faire la preuve que l’élimination du travail forcé est une réalité à portée de main, les membres employeurs invitent instamment le gouvernement à: 1) délivrer des visas à d’autres membres du personnel du BIT; 2) permettre à l’OIT de l’aider à s’attaquer au problème du travail forcé dans l’armée; et 3) ouvrir un large débat et convenir d’un plan d’action avec l’OIT sur la question des droits des travailleurs. Bien qu’ils se félicitent des activités du bureau du Chargé de liaison, ils constatent que son volume de travail a augmenté, et que l’effectif de ses services ne suffit plus en raison de la multiplication des plaintes. Or le gouvernement refuse toujours de délivrer le visa qui permettrait de renforcer la capacité du bureau de liaison. Les préoccupations restent d’actualité pour ce qui est de l’intimidation, du harcèlement et de l’emprisonnement des plaignants. Le recrutement de mineurs par l’armée est assimilable à du travail forcé et doit relever du mandat du Chargé de liaison et du mécanisme de plaintes. Les dernières communications en date de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK), répertoriant 94 lettres d’ordre d’autorités militaires et autres réquisitionnant de la main-d’oeuvre obligatoire et non rémunérée entre janvier 2009 et juin 2010, ainsi que la communication de l’an dernier à la commission d’experts semblent constituer des preuves irréfutables d’une imposition systématique et continue du travail forcé par les autorités civiles et militaires dans l’ensemble du pays.
Par le biais de son groupe de travail pour l’élimination du travail forcé, le gouvernement du Myanmar continue de réagir dans des délais raisonnables aux plaintes déposées dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire. Ce groupe de travail a réagi de manière positive à des propositions consistant à élargir la portée des activités de formation et de sensibilisation. Le gouvernement a indiqué que le groupe de travail a mené à terme 80 pour cent des amendements à la loi sur les villes et la loi sur les villages afin de la mettre en conformité avec la convention no 29. Toutefois, les membres employeurs prient le gouvernement de préciser ses propos, qui semblent indiquer l’existence d’un conflit entre ces amendements et la nouvelle Constitution. Ils demandent aussi quand les amendements législatifs entreront en vigueur. Les membres employeurs insistent sur l’importance d’une réunion conjointe en groupe de travail entre les ministères des Finances et du Plan afin de discuter des budgets et des affectations financières. Des politiques macroéconomiques et une budgétisation bien étudiées s’imposent pour garantir des fonds suffisants pour payer les salaires. Ils demandent au gouvernement à quelle date se tiendra cette réunion et si le Chargé de liaison du BIT pourra ajouter des points à son projet d’ordre du jour.
Les préoccupations des membres employeurs ne sont pas apaisées quant à la difficulté d’obtenir une issue satisfaisante pour les plaintes alléguant un travail forcé imposé par les militaires, mais aussi des allégations constantes de harcèlement des plaignants, en particulier de fermiers, de facilitateurs, de leurs conseillers juridiques et proches. Tout en se félicitant de la publication d’une brochure expliquant en termes simples et dans une langue vernaculaire la loi, le Protocole d’entente complémentaire et la procédure de dépôt des plaintes, les membres employeurs ont demandé quand elle sera disponible dans toutes les langues. Il semble qu’aucune poursuite n’ait encore été engagée contre des officiers militaires sur des questions de travail forcé, ce qui laisse supposer une absence de volonté réelle d’éliminer le travail forcé. Bien que 20 personnes emprisonnées pour des activités en rapport avec les procédures du Protocole d’entente complémentaire aient été remises en liberté, quatre autres sont toujours en prison tandis que deux juristes qui défendaient activement la procédure prévue par le Protocole d’entente complémentaire se sont vu retirer leur licence à leur sortie de prison.
A ce jour, les progrès restent limités. Pour l’essentiel, les membres employeurs constatent toujours un manque de libertés civiles fondamentales, en particulier le droit à la liberté et la sécurité de la personne, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion et la liberté syndicale, le droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial, et la protection de la propriété privée. Un climat de crainte et d’intimidation continue de peser sur les citoyens. C’est là que le travail forcé prend ses racines, mais aussi dans la traite et l’enrôlement de mineurs dans l’armée, le travail des enfants, les enfants soldats, la discrimination et l’absence de liberté syndicale. Les membres employeurs ont rappelé les trois domaines identifiés par la commission d’experts dans l’observation de cette année et de l’année dernière et pour lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour mettre en oeuvre les recommandations de la commission d’enquête. Le nombre des plaintes reste faible, ce qui pourrait indiquer des carences en matière d’accès ou des craintes des citoyens. Pour les membres employeurs, la question du travail forcé au Myanmar doit être abordée dans son ensemble. En conséquence, le groupe de travail du gouvernement devrait également traiter les plaintes pour traite des personnes à des fins de travail forcé plutôt que les déférer au ministère de l’Intérieur, comme cela s’est fait jusqu’à présent.
La nouvelle Constitution contient des articles spécifiques sur la liberté syndicale, la liberté d’expression et le droit d’organisation, mais le libellé de l’article interdisant le recours au travail forcé soulève des questions quant à sa conformité avec la convention no 29. Les mandants tripartites de l’OIT ont unanimement appelé le gouvernement du Myanmar à appliquer les dispositions de la convention no 29 en droit comme dans la pratique et mettre fin à un climat d’impunité intolérable. Les membres employeurs ont exhorté une fois pour toutes le gouvernement à fournir à la commission des informations complètes et détaillées pour démontrer de façon claire et non équivoque sa volonté de coopérer réellement avec les organes de contrôle. La transparence et la collaboration avec le Chargé de liaison et la commission d’experts sont essentielles pour remédier à la situation présente. Le Protocole d’entente complémentaire ne décharge en aucune manière le gouvernement de son obligation d’abolir le travail forcé. Les membres employeurs ont invité instamment le gouvernement à améliorer de manière tangible et substantielle sa législation nationale et à libérer des fonds suffisants pour que le travail forcé cède la place au travail rémunéré, tant dans l’administration civile que militaire, démontrant ainsi sans ambiguïté la volonté du gouvernement de lutter contre le travail forcé.
Les membres travailleurs ont regretté que, bien qu’un certain nombre de changements politiques soient intervenus dans le pays en novembre 2010, ces derniers n’ont en rien changé la situation du travail forcé en Birmanie/Myanmar. En effet, dans son rapport annuel, la CSI fait état d’encore plus de cas de travail forcé dans pratiquement tous les territoires et régions du pays. Ces travaux sont en lien direct avec l’armée (portage, construction et enrôlement forcé de mineurs) ou à caractères plus généraux dans l’agriculture, la construction, l’entretien de routes ou autres travaux d’infrastructures. Les rapports de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) et de la FTUK ajoutent également que, pour éviter d’éventuelles plaintes, des militaires ont parfois signé leur ordonnance de travail forcé sous un faux nom ou refusé simplement de les signer. L’augmentation des plaintes pour travail forcé, également signalée par le Chargé de liaison du BIT, est souvent associée à la confiscation de terres agricoles. En effet, certaines cultures sont imposées et les redevances augmentées au profit des militaires, d’autres intérêts commerciaux ou de grandes entreprises privées. Un nombre inacceptable de personnes ayant porté plainte sont toujours en prison.
Les membres travailleurs soulignent que le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme au Myanmar a déclaré que les violations des droits de l’homme, y compris le recours au travail forcé, impliquent les autorités à tous les niveaux, aussi bien politique, militaire que judiciaire. D’ailleurs, le nombre grandissant de personnes déplacées et de migrants en Thaïlande, en Malaisie et dans d’autres pays est une preuve supplémentaire de l’ampleur du travail forcé. En ce qui concerne le suivi apporté aux commentaires de la commission d’experts, les membres travailleurs notent que la révision des lois sur les villes et sur les villages serait en cours mais pas la modification de la plus récente Constitution, dont l’article 359, qui autorise «des travaux imposés par l’Etat dans l’intérêt du peuple, conformément à la législation». Egalement, bien que l’ampleur du travail forcé par les autorités civiles aurait diminué dans une certaine mesure, le recours à ce dernier par les militaires reste préoccupant dans tout le pays. En outre, une brochure simple expliquant le droit relatif au travail forcé et les voies de recours a été rédigée dans la langue officielle, mais pas la traduction dans toutes les langues locales. Enfin, les budgets pour remplacer la main-d’oeuvre forcée ne sont toujours pas prévus et les cas connus de travail forcé ne sont toujours pas punis pénalement, mais traités comme de simples questions administratives ou disciplinaires. En bref, ils déplorent que le gouvernement n’ait toujours pas mis en oeuvre les recommandations adoptées il y a treize ans par la commission d’enquête. Ils estiment donc opportun de redynamiser l’initiative et l’action de l’OIT dans le cadre de la résolution adoptée en 2000.
La membre gouvernementale de la Hongrie, s’exprimant au nom des gouvernements des Etats membres de l’Union européenne (UE) participant à la Conférence, ainsi que des payscandidats (la Turquie, la Croatie, l’ex-République yougoslave de Macédoine, le Monténégro et l’Islande) et des pays candidats potentiels (Albanie, Bosnie-Herzégovine et Serbie), l’Ukraine et la République de Moldova, a fait part de leur profonde préoccupation concernant la situation des droits de l’homme en Birmanie/Myanmar et a regretté que les élections qui ont eu lieu en 2010 n’aient pas été justes et libres, et que les autorités n’aient toujours pas apporté de preuves de changements positifs substantiels. Elle indique que l’UE est néanmoins prête à reconnaître certains progrès en Birmanie/Myanmar. A cet égard, elle s’est félicitée de la prolongation du Protocole d’entente complémentaire en février 2011. Elle a reconnu également les efforts du gouvernement notamment dans le domaine de la sensibilisation, de la coopération en ce qui concerne le fonctionnement du mécanisme de plaintes et de la libération de recrues mineurs dans l’armée. Toutefois, elle a relevé que, malgré ces développements positifs, les recommandations de la commission d’enquête n’ont toujours pas été mises en oeuvre pleinement et que l’utilisation du travail forcé reste pratique courante. Elle exprime l’espoir que la révision des lois sur les villes et sur les villages qui est en cours se traduira par l’amendement ou l’abrogation de ces lois le plus rapidement possible afin de mettre la législation nationale en pleine conformité avec la convention. Elle a prié également instamment le gouvernement d’amender l’article 359 du Chapitre VIII de la Constitution, qui prévoit une exception à l’interdiction du travail forcé pour «des travaux imposés par l’Etat dans l’intérêt du peuple, conformément à la législation».
En ce qui concerne le travail forcé et obligatoire qui continue d’être exigé des villageois par les autorités civiles et militaires à travers le pays, elle a prié instamment le gouvernement au nom de l’UE de continuer à accentuer ses activités de sensibilisation afin de garantir que l’interdiction du travail forcé soit connue de tous, et d’assurer que des sanctions strictes soient prises en vertu du Code pénal à l’encontre des autorités civiles et militaires ayant recours au travail forcé. S’agissant de l’engagement pris par le gouvernement d’établir un régime démocratique, le gouvernement est prié de relâcher sans condition tous les prisonniers politiques, de respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales et de mettre en place un dialogue inclusif réel avec tous les groupes ethniques et d’opposition, y compris Aung San Suu Kyi et la Ligue nationale démocratique.
S’agissant des mécanismes des Nations Unies, il est instamment demandé au gouvernement de respecter de façon prioritaire la résolution 16/24 du Conseil des droits de l’homme d’établir une enquête indépendante concernant les graves allégations de violations des droits de l’homme, y compris l’utilisation du travail forcé. Rappelant que l’implication des enfants dans des conflits armés constitue une des pires formes de travail des enfants, le gouvernement est encouragé à coopérer avec les Nations Unies afin de protéger les enfants du recrutement et de l’utilisation par les forces armées, et de veiller à la pleine réhabilitation et réintégration des enfants affectés par les conflits armés. Les conflits qui se poursuivent dans des régions ethniques telles que dans les Etats de Shan Sand et Karen sont particulièrement préoccupants et, à cet égard, les autorités sont instamment priées de faire preuve de retenue et de chercher une solution politique et de réconciliation nationale. Elle a regretté que, malgré la demande de M. Vijay Nambiar, Conseiller spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour le Myanmar, le Rapporteur spécial n’ait pas obtenu la permission de visiter le pays. Elle a donc demandé au gouvernement de fournir le plus tôt possible une opportunité au Rapporteur spécial de venir faire une évaluation des performances de la nouvelle administration.
Afin de résoudre le grave et persistant problème de travail forcé, elle a indiqué que l’UE demande instamment au gouvernement de prendre les mesures attendues de longue date afin de se conformer aux dispositions de la convention. Elle a exprimé son appréciation pour le travail infatigable du Chargé de liaison afin d’assister les autorités à mettre en oeuvre la convention et les encourage à renforcer davantage leur coopération avec le Chargé de liaison.
La membre travailleuse de la Suède a présenté un cas de confiscation des terres et de travail forcé. Elle a expliqué que, depuis décembre 2009, un certain nombre de sociétés ayant des liens avec le régime militaire ont confisqué les terres agricoles des fermiers locaux du village de Sis-sa Yan, sis dans la région de Kanma. Les agriculteurs avaient envoyé des plaintes aux autorités pour se pencher sur l’affaire, mais ils n’ont reçu aucune réponse. Au contraire, ils ont été attaqués et détenus par les responsables des sociétés aux mains des militaires et par les autorités locales. Les travailleurs des entreprises qui ont confisqué les terres agricoles ont commencé à construire une autoroute à travers les terres agricoles du village de Sis-sa Yan, ainsi que des bureaux pour une usine prévue. Les représentants des agriculteurs ont alors déposé une plainte devant le tribunal pénal de Kanma, mais elle a été rejetée. Plusieurs agriculteurs ayant déposé des plaintes ont été illégalement arrêtés et empêchés de voir leurs familles ou d’avoir accès à un traitement médical. Ils ont également été accusés par les autorités de délits montés de toutes pièces. En effet, cinq fermiers ont été condamnés par la Cour à des peines très lourdes de dix à douze ans de prison. La membre gouvernementale de la Nouvelle-Zélande, s’exprimant également au nom du gouvernement de l’Australie, a remercié le Chargé de liaison du BIT et son équipe pour leur engagement continu dans la promotion du respect de la convention no 29 par le gouvernement du Myanmar. L’activité accrue dans le cadre de la procédure de dépôt de plaintes représente une tendance positive. Elle a indiqué que l’approche volontariste de sensibilisation prise par l’équipe de liaison a bien fonctionné et a démontré la confiance croissante de la population du Myanmar dans l’exercice de leurs droits. L’oratrice a noté les récentes déclarations encourageantes faites par le gouvernement du Myanmar en ce qui concerne la nécessité d’une bonne gouvernance et de responsabilité visant les politiques nationales et l’engagement du gouvernement à éliminer le travail forcé. Les mesures pratiques prises, plus tôt cette année, ont inclus le renouvellement du Protocole d’entente complémentaire, ainsi que l’accord visant à élargir le champ des activités de sensibilisation, y compris la publication d’une brochure sur les droits des citoyens dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire dans les deux langues Myanmar et Shan. Bien que positives, ces mesures encourageantes ont bien mis en lumière la nécessité, pour le gouvernement du Myanmar, de poursuivre une action soutenue et volontariste en partenariat avec le bureau de liaison du BIT, pour traiter et éliminer le travail forcé. Ces nouveaux progrès ne sont toutefois pas suffisants et le travail forcé imposé par les militaires demeure un problème persistant. Il est essentiel de remédier aux faiblesses de la gouvernance macroéconomique et aux problèmes causés par l’application de la politique de l’autosuffisance économique par les militaires qui sont les causes essentielles du travail forcé. Le gouvernement a été exhorté à solliciter l’assistance technique du BIT pour améliorer ses cadres politiques et assurer une communication directe entre le groupe de travail du gouvernement, le BIT et les autorités compétentes sur les questions de travail forcé imposé par les militaires. Pour que le bureau de liaison puisse s’acquitter de son mandat, des ressources appropriées sont impératives. Le gouvernement a été appelé à faciliter la délivrance du visa nécessaire pour l’arrivée d’un nouveau membre du personnel pour pouvoir commencer son travail immédiatement. Des progrès concrets et significatifs en ce qui concerne le travail forcé ne peuvent être accomplis que si le problème très grave de l’incarcération et de représailles en lien avec le mécanisme de plaintes est réglé. Son gouvernement se félicite de la libération inconditionnelle de Aung San Suu Kyi, en novembre 2010, mais a appelé le gouvernement du Myanmar à libérer immédiatement tous les prisonniers politiques, y compris ceux qui sont incarcérés parce qu’ils ont fait recours au mécanisme de plaintes de l’OIT.
Le membre travailleur des Philippines a indiqué que des formes variées de violations des droits de l’homme, y compris du travail forcé et de l’extorsion, ont été largement pratiquées depuis janvier 2011 par les troupes militaires et les gardes-frontière de l’Etat de Karen afin de contraindre les villageois à transporter des rations et du matériel militaire pour renforcer des positions militaires dans le but de lancer une offensive dans les régions montagneuses pour prendre le contrôle de ces dernières. A l’heure actuelle, les populations du district de Toungoo et de Kler Lwee Htu sont victimes de travail forcé puisque cette région est proche de la capitale Nay Pyi Daw. L’orateur a cité par la suite des exemples de cas de travail forcé imposé par les militaires et les gardes-frontière en janvier 2011 dans des villages tels que Shwe O, Mae Pary Kee, Shan Zee Bo, Tan Ta Bin, Tha Pyi Nyut et Klor Mee Der. Il a indiqué également que le travail forcé est toujours présent dans la plupart des régions du pays et que seuls la reconnaissance de la liberté syndicale, la libération des militants des droits des travailleurs et autres prisonniers de conscience ainsi que le changement de la Constitution pourront paver la voie à une vraie démocratie et à l’éradication du travail forcé dans le pays. Il a demandé au gouvernement d’adopter des mesures immédiates pour mettre fin au travail forcé et autres violations des droits de l’homme. Il a également demandé aux autres gouvernements, aux employeurs et aux institutions internationales d’adopter des politiques strictes afin de promouvoir la démocratie, l’Etat de droit et la justice sociale dans le pays, et a prié le BIT de renforcer ses activités en collaboration avec d’autres organisations à cet égard.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a salué l’engagement sans faille et l’excellent travail du BIT, en particulier du Chargé de liaison et de son équipe, qui sont souvent confrontés à des circonstances difficiles dans l’exercice de leur important mandat. Ils ont prouvé, une fois de plus, la valeur ajoutée de la présence de l’OIT en Birmanie. Son gouvernement veut croire que le bureau de liaison sera bientôt suffisamment renforcé pour répondre à sa charge de travail toujours croissante. Elle a noté plusieurs changements en Birmanie depuis l’année dernière, en particulier le fait que le Protocole d’entente complémentaire avait été prolongé d’une année; le nombre de plaintes déposées en vertu de ce protocole a continué d’augmenter; des activités importantes de sensibilisation et de formation ont été entreprises, y compris des progrès dans la traduction de la brochure d’information sur le travail forcé dans les langues vernaculaires; et un projet de loi est apparemment en cours de préparation. Son gouvernement se félicite de cette évolution, et encourage les autorités à poursuivre et à intensifier leurs efforts dans ces domaines. Nonobstant ces points positifs, elle a également insisté sur le fait que le travail forcé était encore très répandu en Birmanie et que le gouvernement n’avait pas encore mis en oeuvre les recommandations de la commission d’enquête. Rappelant les recommandations claires et sans équivoque de la commission d’enquête, elle a noté qu’il restait encore beaucoup à faire et ce de façon urgente. Le gouvernement a l’obligation d’éliminer complètement et définitivement le travail forcé en développant et appliquant des lois et règlementations efficaces et en promouvant effectivement la sensibilité de l’ensemble de la population aux droits fondamentaux des travailleurs. Le gouvernement devrait donc solliciter l’assistance technique du BIT pour obtenir les résultats nécessaires. Elle a indiqué que le BIT pourrait fournir des conseils importants au gouvernement en ce qui concerne les moyens budgétaires adéquats pour remplacer le travail forcé ou le travail impayé. Enfin, elle a réitéré l’engagement de longue date de son gouvernement à défendre fermement le peuple birman qui aspire à vivre dans une nation pacifique, prospère et démocratique qui respecte les droits de l’homme et l’Etat de droit. Son gouvernement espère que les récents développements résulteront dans la mise en place d’un dialogue authentique, ouvert et inclusif permettant de parvenir à une solution durable au problème du travail forcé.
Un observateur représentant la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) a expliqué que, lorsqu’il assurait des cours de formation en Birmanie sur les droits syndicaux fondamentaux et sur les principes démocratiques, il a rencontré de nombreuses personnes qui ont été forcées de travailler comme porteurs pour l’armée en transportant des munitions et de la nourriture. Le 30 mai 2011, dix personnes ont été enrôlées de force comme porteurs pour l’armée par le bataillon d’infanterie légère no 563 en trois pagodes Pass, près de la frontière Thaïlande-Birmanie. La FTUK a signalé que, en mai de cette année, plus de 4 000 personnes ont été contraintes de travailler pour les gardes-frontière, l’armée irrégulière Karen de la junte militaire. Il ne s’agit pas de cas isolés, mais ces cas font partie de violations persistantes. Selon le BIT, 630 cas d’enfants soldats ont été signalés en 2010 et 157 victimes de recrutement de mineurs ont été renvoyées chez elles. Malgré les efforts déployés par le BIT, la conscription d’enfants soldats continue encore, et une politique au plus haut niveau est nécessaire pour modifier la pratique sur le terrain. La libération des enfants a encouragé les familles des enfants enrôlés de force à contacter le BIT, même si la crainte de représailles demeure perceptible. L’augmentation de la confiscation des terres par l’armée, soit pour de nouvelles garnisons ou pour des entreprises commerciales, a fait perdre leurs revenus à la population et a provoqué des affrontements. Nonobstant les déclarations du représentant du gouvernement sur des élections réussies et les changements intervenus dans le paysage politique, la situation réelle sur le terrain reste la même. L’orateur a personnellement été témoin qu’aucune élection n’a eu lieu dans 155 villages de l’Etat Karen et que des gens se sont vu refuser le droit de vote. De nombreuses régions de l’Etat Mon, l’Etat Shan (dix districts), l’Etat de Kachin (63 arrondissements ruraux) et de l’Etat de Kayah se sont vu refuser le droit de vote. La junte elle-même avait déclaré que les élections récentes n’avaient pas couvert l’ensemble du pays. Bien que certains puissent se réjouir du référendum, des élections, de la Constitution et du nouveau gouvernement, le refus du droit de vote aux citoyens, aux prisonniers, aux moines et à Aung San Suu Kyi et leur droit d’être élus doit être considéré par le monde entier comme une violation des normes électorales internationales. Le travail forcé persiste dans les zones où aucune élection n’a eu lieu. Le bureau de liaison du Bureau est invité à déployer plus d’efforts dans ces domaines. Le BIT devrait examiner avec les autres agences des Nations Unies qui ont participé aux 19 sessions de formation, la possibilité d’étendre son champ d’action. Les recommandations formulées par la commission d’enquête n’ont pas été mises en oeuvre. L’orateur évoque, en particulier, les mesures portant sur la diffusion d’instructions spécifiques et concrètes aux civils et autorités militaires afin d’assurer que l’interdiction du travail forcé soit largement rendue publique, tout en prévoyant des moyens budgétaires adéquats pour le remplacement du travail forcé ou le travail impayé, et pour assurer le respect de l’interdiction du travail forcé. Bien que positif, le Protocole d’entente complémentaire n’est pas suffisant pour satisfaire aux recommandations de la commission d’enquête. La junte ne devrait pas être autorisée à se cacher derrière ce Protocole mais devrait mettre en oeuvre les recommandations de la commission d’enquête ou faire face aux conséquences de son inaction lors de la prochaine session (novembre 2011) du Conseil d’administration.
Le membre gouvernemental du Japon a indiqué que son gouvernement félicite le BIT pour les efforts qu’il déploie afin d’améliorer la situation du travail forcé, et ce grâce à son engagement actif sur le terrain dont on peut voir les résultats positifs. Son gouvernement félicite les autorités du Myanmar qui poursuivent résolument leur action en vue d’éliminer le travail forcé, en collaboration avec le BIT, dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire. Il se félicite également de leur détermination à modifier les dispositions des lois de 1907 sur les villes et sur les villages, afin de se conformer pleinement à la convention no 29; le projet de modification devant être soumis au Parlement avant la fin de l’année. Le gouvernement du Myanmar est prié d’accepter l’assistance technique du BIT sur ce point. Son gouvernement se félicite également de ce que la distribution de brochures rédigées en termes simples, expliquant le mécanisme relatif aux plaintes, soit toujours aussi efficace, et que le gouvernement du Myanmar ait récemment décidé que ces brochures seraient traduites dans d’autres langues locales. Il prend note du point de vue de la commission d’enquête selon lequel l’utilisation du travail forcé tient en grande partie à la faiblesse de la gouvernance macroéconomique et de l’application des politiques, en particulier en ce qui concerne la budgétisation et les affectations des crédits correspondants. A cet égard, il exprime l’espoir que les autorités du Myanmar et le BIT tiendront des consultations étroites, notamment des discussions conjointes avec les ministères de la Planification et des Finances, comme cela a été proposé. Tout en observant les progrès constatés dans la lutte contre le recrutement dans les forces armées de personnes en dessous de l’âge légal, son gouvernement est préoccupé de voir que l’armée recourt toujours au travail forcé et que l’on continue à arrêter des individus en raison de leur participation au mécanisme relatif aux plaintes. Le gouvernement du Myanmar doit instamment prendre des mesures radicales pour veiller à ce que, en aucun cas, des individus soient désavantagés en raison de cette participation. Enfin, il a relevé que ce mécanisme de plaintes étant mieux connu, un nombre croissant de plaintes sont déposées. A ce sujet, il a instamment prié le gouvernement de répondre au plus vite et de façon positive aux demandes du BIT visant à alléger la charge de travail de plus en plus lourde du bureau du Chargé de liaison, en ce qui concerne notamment la délivrance de visas pour le personnel international supplémentaire.
La membre travailleuse de l’Italie a appelé le Bureau à mettre en oeuvre la recommandation de la commission d’enquête selon laquelle le gouvernement de la Birmanie devrait prévoir dans le budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d’oeuvre travaillant librement et rémunérée de manière adéquate. Cette recommandation cruciale pourrait être appliquée si le gouvernement birman avait la volonté politique, d’une part, d’éviter le détournement des investissements étrangers directs, de résoudre les problèmes d’extorsion fiscale, de manque de transparence, de corruption et d’exportations illicites de capitaux dénoncés par le Programme des Nations Unies pour le développement et, d’autre part, de transférer les dépenses publiques du secteur de la défense à celui des travaux publics. A cet égard, l’oratrice a dénoncé plusieurs projets de construction d’installations liées à l’armée et d’importation d’équipements militaires. Il convient de rappeler qu’en novembre 2010 le Conseil de sécurité des Nations Unies a dénoncé les transferts de technologie nucléaire et l’envoi d’équipements militaires depuis la Corée du Nord vers la Birmanie.
Les mesures de restriction récemment confirmées par l’Union européenne à l’encontre de la Birmanie devraient être accompagnées de procédures de contrôle adéquates. De plus, dénonçant plusieurs initiatives commerciales récentes de la part d’entreprises et de fonds de pension européens, l’oratrice a demandé à l’Union européenne et aux gouvernements concernés ainsi qu’aux entreprises de mettre en oeuvre les nouveaux Principes directeurs des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme. Les entreprises investissant en Birmanie devraient également respecter les Principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales et le Guide sur le devoir de diligence pour des chaînes d’approvisionnement responsables en minerais provenant de zones de conflit ou à haut risque, adoptés par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Les sanctions économiques ne devraient pas être assouplies tant qu’il n’y a pas de véritable amélioration de la situation des droits de l’homme ni de progrès vers la démocratie. Le Directeur général du BIT doit poursuivre son action en vue de mettre en oeuvre de manière cohérente la résolution de la CIT de 2000. Compte tenu de la persistance du recours au travail forcé dans le pays, il est nécessaire que l’OIT s’apprête à appliquer la décision de préparer une demande d’avis consultatif auprès de la Cour internationale de Justice sur la violation de la convention no 29.
Le membre gouvernemental de Singapour s’est félicité de la prolongation du Protocole d’entente complémentaire conclu entre le gouvernement du Myanmar et l’OIT pour une année supplémentaire, ainsi que des mesures concrètes prises par le gouvernement pour sensibiliser le public au mécanisme de plaintes relatives au travail forcé, adopter la loi sur les organisations de travailleurs et rédiger de nouvelles dispositions visant à mettre la loi sur les villes et la loi sur les villages en conformité avec la convention, conformément aux recommandations de la commission d’enquête. La rédaction des nouvelles dispositions serait pratiquement finalisée et le projet de législation qui en sera issu sera soumis au Parlement pour examen. En ce qui concerne le récent rapport du Chargé de liaison de l’OIT au Myanmar, l’orateur a insisté sur les efforts déployés par le gouvernement pour mener des activités de formation et de sensibilisation en vertu du Protocole d’entente de 2002 et a cité notamment les séminaires organisés dans la plupart des régions, y compris dans les zones où vivent différentes minorités ethniques, la publication et la diffusion à grande échelle de la brochure du BIT expliquant la législation, le Protocole d’entente complémentaire et le mécanisme de plaintes, ainsi que l’intention manifestée par le gouvernement de traduire cette brochure dans la langue Shan. Son gouvernement s’est également félicité des efforts déployés sur le plan de l’enrôlement des personnes n’ayant pas l’âge légal dans l’armée, en vertu desquels une formation sur la législation auprès du personnel des forces armées continue d’être dispensée par le ministère de la Défense, avec l’assistance technique du BIT et de l’UNICEF; 174 personnes qui avaient été enrôlées sans avoir l’âge légal ont été dégagées de leurs obligations et rendues à leur famille; des peines d’emprisonnement ont été imposées à des militaires (deux officiers et cinq autres personnes) pour avoir eu recours au travail forcé. En dépit des progrès visibles accomplis en ce qui concerne le recours au travail forcé par les autorités civiles, des progrès sont encore nécessaires concernant le travail forcé imposé par l’armée, en particulier au regard de la difficulté de parvenir à un règlement satisfaisant des plaintes alléguant le recours au travail forcé. Son gouvernement veut croire que les autorités du Myanmar renforceront et poursuivront leurs efforts pour régler la question, et encourage le gouvernement du Myanmar et la communauté internationale à poursuivre leur collaboration constructive pour améliorer la vie du peuple du Myanmar.
La membre travailleuse de la République de Corée s’est exprimée au sujet de l’incidence de certains projets d’exploitation d’énergie sur le travail forcé. Les investissements étrangers dans le secteur de l’énergie du pays ont connu un essor qui mérite d’être souligné. Les syndicats coréens, ainsi que les groupes concernés par les droits de l’homme, ont suivi la situation du projet gazier Shwe portant sur la construction d’un gazoduc, projet auquel des entreprises étrangères participent en tant que membres d’un consortium. Il convient de déplorer le fait qu’une plainte, déposée en 2009 par des syndicats et des organisations non gouvernementales pour violation par des entreprises coréennes des Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales sur plusieurs points, a été classée sans suite par les autorités coréennes et qu’aucune enquête sérieuse n’a été menée à ce sujet. Malgré des allégations de violations graves des droits de l’homme et de non-respect de l’environnement, la demande de suspension du projet n’a pas été suivie d’effet et le projet est actuellement en cours de réalisation; le travail forcé et d’autres formes de violation des droits de l’homme étant toujours une réalité. Il est préoccupant de constater que le travail forcé existe même dans des projets développés dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises menés par des entreprises impliquées dans des projets d’exploitation d’énergie. Elle a noté que l’armée birmane continue à avoir recours au travail forcé dans le cadre du projet gazier Shwe, ce qui prouve qu’il n’a pas été pleinement donné effet à la résolution de la CIT de 2000. Elle a appelé les Etats Membres de l’OIT et tous les mandants à s’acquitter de leurs obligations en vertu de cette résolution.
Le membre gouvernemental de la Norvège a déclaré que son gouvernement était particulièrement préoccupé par la situation des droits de l’homme au Myanmar et, tout en prenant acte de la libération de 47 prisonniers politiques le 17 mai 2011, a demandé que le gouvernement libère les autres prisonniers politiques. Son gouvernement se félicite de la prolongation du Protocole d’entente complémentaire, de la coopération entre l’OIT et le gouvernement du Myanmar en ce qui concerne le fonctionnement du mécanisme de plaintes, de la remise en liberté des personnes enrôlées par les militaires sans avoir l’âge légal, de la session de formation organisée récemment dans l’Etat de Chin à l’intention de hauts fonctionnaires et, enfin, de la traduction de la brochure du BIT sur le travail forcé dans la langue Shan. Le gouvernement est encouragé à appliquer et respecter la législation en vigueur contre le travail forcé et l’enrôlement dans l’armée de personnes n’ayant pas l’âge légal, à mettre en place une gestion économique et des règles budgétaires propres à éviter le recours au travail forcé et, enfin, à collaborer activement aux efforts de l’OIT visant l’élimination du travail forcé. Notant que le gouvernement est disposé à discuter d’une politique de l’emploi plus propice à la protection des droits des travailleurs, il convient d’encourager le BIT à prendre des mesures de renforcement des capacités dans certains domaines pour améliorer les droits des travailleurs au Myanmar, à collaborer de manière plus soutenue avec le gouvernement à propos de la loi sur la liberté syndicale et à fournir l’assistance nécessaire pour garantir la conformité d’une éventuelle future loi sur les syndicats aux exigences de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
La membre travailleuse du Japon a relevé qu’en Birmanie le travail forcé est un problème répandu et de longue date, les détenus étant utilisés comme porteurs ou détecteurs de mines humains par l’armée, les minorités ethniques étant victimes d’injustices et les enfants de traite et d’enlèvements en vue d’être utilisés comme soldats. Dans la résolution de la CIT de 2000, il est recommandé que l’ensemble des Etats Membres revoient leurs relations avec le gouvernement birman pour s’assurer que le recours persistant au travail forcé ne lui procure aucun avantage. Toutefois, cette résolution n’est pas correctement appliquée. D’après le rapport du ministère birman de la Planification nationale et du Développement économique, fin novembre 2010, le montant total des investissements étrangers directs annoncés dans le pays avait doublé en six mois – passant de 16 à 32 milliards de dollars E.-U. Cette augmentation est due en grande partie aux investissements dans les secteurs du pétrole et du gaz; les exportations de gaz naturel ne représentant pas moins de 40 pour cent des recettes d’exportations du pays. Etant donné que le gouvernement se sert de ce type d’activités économiques pour perpétuer le travail forcé et continuer à opprimer le peuple birman, l’oratrice a instamment prié les représentants des gouvernements et des employeurs des pays qui mènent des activités commerciales avec la Birmanie, ou qui y investissent, de revoir leurs relations avec ce pays afin de contribuer à éradiquer le travail forcé, conformément à la résolution de la CIT de 2000. Enfin, en l’absence de processus de démocratisation, il n’existera aucun véritable élément moteur pour éliminer le travail forcé. A cet égard, la formation d’un gouvernement «civil» ne représente pas un grand pas en avant vers la démocratie; en revanche, la libération immédiate de nombreux prisonniers politiques, y compris de militants syndicaux, constituerait une étape essentielle.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a déclaré partager la conviction selon laquelle l’éradication de toute forme de travail forcé dans le monde entier constitue une priorité absolue et s’est félicité de la coopération entre l’OIT et le gouvernement du Myanmar en la matière. A cet égard, le renouvellement pour une année du Protocole d’entente complémentaire, à l’occasion de la visite de la mission de haut niveau de l’OIT, est un élément positif. L’examen par la Commission de l’application des normes du respect de la convention no 29 par le Myanmar a eu lieu peu de temps après les élections qui se sont déroulées au mois d’octobre dernier et ont abouti à la mise en place d’un nouveau Parlement. Dans ce contexte, des projets de réforme de la législation du travail sont en cours. Ces initiatives doivent être saluées, particulièrement dans la mesure où des changements concernant le travail forcé sont prévus. L’orateur a exprimé l’espoir de son gouvernement que les autorités du Myanmar poursuivront leur chemin vers la démocratie.
Il convient également de souligner les efforts et l’immense travail accomplis par le Chargé de liaison de l’OIT, notamment la transmission des plaintes pour travail forcé aux autorités compétentes du Myanmar, notamment le ministère de la Défense, qui auraient abouti à l’imposition de sanctions à l’encontre des coupables. Les initiatives tendant à une plus grande sensibilisation de la population au mécanisme de plaintes et la diffusion de brochures d’information sur le travail forcé sont également utiles et constituent des signes encourageants. Il est à espérer que les difficultés relatives au renforcement du personnel du bureau de liaison de l’OIT au Myanmar seront rapidement résolues. Enfin, l’orateur a fait part de la conviction de son gouvernement selon laquelle les autorités du Myanmar continueront à prendre les mesures nécessaires pour obtenir l’élimination des situations de travail forcé. A cet égard, le renforcement de la coopération entre le gouvernement du Myanmar et l’OIT constitue sans aucun doute la voie la plus appropriée pour atteindre cet objectif.
Le membre travailleur de l’Indonésie a attiré l’attention de la commission sur le fait que le travail forcé et les violations des droits de l’homme se poursuivent au Myanmar et a souligné le nombre croissant de travailleurs migrants sans papiers qui fuient le Myanmar pour des raisons de sécurité et qui travaillent en Thaïlande, en Malaisie, en Inde et dans d’autres pays, pour des salaires misérables et dans des conditions de travail déplorables. Ce phénomène provoque des conflits sociaux, des pratiques xénophobes, une exploitation accrue et une aggravation de la pauvreté dans les pays d’accueil ainsi que dans la région asiatique. L’orateur a instamment prié le gouvernement de fournir des informations sur les efforts concrets qui sont déployés pour donner suite à la recommandation de la commission d’enquête, à savoir punir ceux qui imposent le travail forcé.
Etant donné l’intérêt qu’il manifeste pour prendre la présidence de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), le gouvernement du Myanmar n’a pas encore montré avec suffisamment de force qu’il est déterminé à éliminer le travail forcé et à s’engager sur la voie de la démocratie. Les Etats membres de l’ASEAN doivent discuter ouvertement des problèmes de démocratie et de droits de l’homme en Birmanie et ne plus considérer ces questions comme relevant des affaires internes du pays mais plutôt comme une responsabilité régionale. Récompenser la Birmanie en lui accordant la présidence de l’ASEAN en dépit d’élections fictives, d’un grand nombre de prisonniers politiques, de la persistance du travail forcé et de l’absence de démocratie et de liberté syndicale, serait une situation embarrassante pour la région. L’orateur a encouragé le BIT à collaborer étroitement avec la Commission des droits de l’homme de l’ASEAN, par le biais de ses mécanismes, afin d’accélérer l’éradication du travail forcé et de surveiller les pratiques des sociétés multinationales qui sont originaires des pays de l’ASEAN et qui violent les conventions de l’OIT.
Le membre gouvernemental de la Thaïlande a indiqué que le travail forcé est un défi de dimension mondiale et qu’il est par conséquent impératif que la communauté internationale soutienne les efforts de coopération avec le Myanmar pour l’éliminer, en particulier au vu de l’évolution politique majeure survenue récemment. L’actuelle coopération entre le gouvernement du Myanmar et l’OIT est encourageante, et son gouvernement veut croire que la prolongation de la période d’essai du Protocole d’entente complémentaire et la récente visite d’une mission de haut niveau de l’OIT au Myanmar inciteront à aller plus avant. Les autorités du Myanmar sont instamment invitées à continuer à prendre des mesures positives et à redoubler d’efforts pour mettre en oeuvre les recommandations de la commission d’enquête. Des évolutions positives sont survenues depuis la session du Conseil d’administration de mars 2011, comme par exemple la révision de la loi sur les villes et de la loi sur les villages adoptées en 1907, qui est maintenant achevée à 80 pour cent et devrait être déposée devant le Parlement d’ici à la fin de 2011, et la préparation d’un texte de loi sur les organisations de travailleurs. L’assistance technique du BIT au processus sera déterminante. L’orateur a exprimé l’espoir que des ressources supplémentaires seront allouées au bureau de liaison de l’OIT au Myanmar.
L’augmentation du nombre de plaintes reçues par le biais du mécanisme mis en place par le Protocole d’entente complémentaire – auquel le bureau de l’adjudant général a réagi de manière positive pour ce qui est de l’enrôlement de mineurs dans l’armée – reflète l’efficacité des ateliers de sensibilisation. Il convient de se féliciter également de la décision du groupe de travail gouvernemental de publier dans les langues locales une brochure expliquant la loi, le Protocole d’entente complémentaire et la procédure de plaintes et d’en assurer une large diffusion dans le pays. Son gouvernement exprime l’espoir que ces progrès constants donneront de la crédibilité ainsi qu’un nouvel élan au processus de démocratisation et de réconciliation nationale. Le paysage politique du Myanmar et un contexte international enclin à la coopération augurent bien de l’élimination du travail forcé. Enfin, l’orateur a donné l’assurance du soutien de la Thaïlande aux efforts déployés pour s’attaquer à ce problème grave.
La membre gouvernementale de Cuba a réaffirmé son adhésion aux principes de la convention no 29 et s’est félicitée de la présentation du rapport, qui fait le point sur les activités menées par le Bureau et le gouvernement du Myanmar et fait état des progrès réalisés en matière d’élimination du travail forcé. L’intervention du représentant gouvernemental du Myanmar montre les initiatives les plus récentes entreprises par son gouvernement pour appliquer la convention, notamment la procédure en cours visant à mettre la législation nationale en conformité avec la convention no 29. Il convient de reconnaître que les résultats obtenus sont le fruit de la coopération internationale; par conséquent, la poursuite de la coopération technique, d’un dialogue ouvert et sans condition et l’analyse de la situation nationale sont encouragées car c’est seulement ainsi que l’on contribuera à atteindre les objectifs fixés par la convention.
Le membre travailleur des Etats-Unis a réitéré les préoccupations exprimées lors des précédentes sessions et a condamné fermement le fait que, selon des informations issues de rapports crédibles, la pratique brutale et déshumanisante du travail forcé, y compris à l’encontre d’enfants, se poursuive avec autant de vigueur en Birmanie. Le gouvernement a une fois de plus manqué à ses obligations de mettre la législation applicable en conformité avec la convention et d’imposer les sanctions pénales prévues en cas de recours au travail forcé, ce qui témoigne d’un manque de volonté manifeste. Il prend note que la brochure du BIT sur le travail forcé est publiée et diffusée par le gouvernement, et que ce dernier a l’intention de la traduire dans d’autres langues, mais cette mesure ne suffit pas à se conformer à la demande du Conseil d’administration concernant la nécessité d’une déclaration solennelle des dirigeants du pays contre la persistance de travail forcé. En outre, si un plus grand nombre de plaintes a été déposé dernièrement, et si certaines plaintes ont débouché sur la libération d’enfants soldats, nombre de plaignants sont toujours harcelés, voire emprisonnés, pour avoir recouru à ce mécanisme et dénoncé des actes de travail forcé, tandis que les avocats représentant les victimes ont, eux, été radiés du barreau. Etant donné que le processus de réception et de traitement des plaintes ne sera jamais pleinement efficace tant que la possibilité de représailles existera, l’orateur a appelé une fois encore le gouvernement à libérer immédiatement tous les syndicalistes emprisonnés en raison de leur lien avec le mécanisme de plaintes et à restituer aux avocats leurs licences professionnelles.
Compte tenu de la charge de travail toujours plus lourde et des effectifs réduits auxquels fait face le bureau de liaison de l’OIT de Yangon, l’intransigeance du gouvernement a considérablement restreint l’efficacité de ce dernier. L’orateur a prié instamment le gouvernement d’accorder un visa au personnel dont le bureau a besoin pour contrôler les secteurs où la pratique du travail forcé est très répandue, notamment pour contrôler l’impact des travaux de construction de l’oléoduc, du gazoduc et des barrages sur le travail forcé, et s’assurer que le travail forcé n’est pas pratiqué dans les mines ni dans les projets internationaux. En outre, les Etats Membres de l’OIT devraient enjoindre leurs ambassades de coordonner étroitement leurs activités en collaboration avec le bureau de liaison de l’OIT et de lui accorder tout leur soutien. Il conviendrait également de continuer à améliorer la coordination entre les institutions des Nations Unies en Birmanie, de manière à assurer la complémentarité de leurs activités. Rappelant l’importante responsabilité qui incombe aux Etats Membres de l’OIT, en particulier aux gouvernements, au titre de la Constitution de l’OIT et des recommandations formulées par les organes de contrôle de l’OIT, d’éliminer le fléau du travail forcé, l’orateur a exhorté la commission à redoubler d’efforts à l’avenir.
La membre gouvernementale du Canada, étant donné que les signes de progrès sont peu importants et que le gouvernement du Myanmar s’est vu demander à plusieurs reprises d’adopter des mesures concrètes, a instamment prié les autorités de respecter leur engagement de mettre fin au travail forcé, tant dans la société civile que dans l’armée, et de mettre pleinement en oeuvre les recommandations de la commission d’enquête. Il convient de libérer les enfants utilisés comme soldats emprisonnés pour avoir déserté ou purgeant une peine pour avoir pris part au mécanisme de plaintes instauré par le Protocole d’entente complémentaire. Etant donné que le Chargé de liaison de l’OIT ne peut toujours pas obtenir de visa d’entrée pour un autre fonctionnaire international, il convient de souligner que le gouvernement donnerait un signe élémentaire de son engagement à éradiquer le travail forcé, en s’assurant que le Chargé de liaison dispose des moyens d’exercer ses fonctions essentielles. En principe, un accord a enfin été trouvé pour traduire la brochure en langue Shan, mais la publication de cette brochure dans d’autres langues se heurte toujours à des résistances alors que cette publication serait, elle aussi, un signe simple mais important montrant l’engagement du gouvernement. L’approche positive et efficace choisie par le gouvernement pour donner suite aux plaintes concernant le recrutement dans l’armée de personnes n’ayant pas l’âge légal devrait valoir pour tous les types de travail forcé. Le gouvernement devrait également faire appliquer la loi et veiller à ce que tous les contrevenants soient poursuivis en vertu du Code pénal. Enfin, l’oratrice a exprimé l’espoir de son gouvernement que la révision de la loi sur les villes et de la loi sur les villages de 1907, attendue depuis longtemps, soit achevée dans un proche avenir et a vivement préconisé de donner une suite positive à la proposition de réunion conjointe du groupe de travail/BIT avec les ministères des Finances et de la Planification et de réunion conjointe du groupe de travail/BIT avec le ministère de la Défense ainsi que des militaires haut gradés.
Le membre gouvernemental de l’Inde a exprimé la satisfaction de son gouvernement devant les progrès réalisés par les autorités du Myanmar en matière de respect de la convention et devant la coopération en cours entre l’OIT et le gouvernement à cet égard, comme l’illustre le dialogue constructif qu’ont entretenu la mission de haut niveau de l’OIT et le gouvernement en février de cette année. Il convient en outre de se féliciter du renouvellement du Protocole d’entente complémentaire pour une année supplémentaire à dater du 26 février 2011, des ateliers de sensibilisation organisés conjointement par le bureau de liaison de l’OIT et le ministère du Travail, de la publication d’une brochure sur la législation concernée et sur le Protocole d’entente complémentaire, du fonctionnement continu du mécanisme de plaintes et des dispositions prises pour mettre la loi sur les villes et la loi sur les villages de 1907 en conformité avec la convention. Tout en rappelant que son gouvernement a toujours été et reste opposé à la pratique du travail forcé, l’orateur a encouragé la poursuite du dialogue et de la coopération entre l’OIT et le gouvernement du Myanmar et a félicité le Directeur général du BIT et son équipe pour les efforts consentis pour aider le Myanmar à lutter contre le problème du travail forcé.
Le membre travailleur de l’Afrique du Sud, rappelant l’histoire de l’apartheid et la discrimination raciale qui a sévit dans son pays, a souligné que la solidarité mondiale, les sanctions commerciales au niveau international et l’isolement sont des outils puissants pour lutter en faveur du respect des droits de l’homme. Les recommandations de la commission d’enquête n’ont été respectées ni par la junte birmane ni par le nouveau régime civil autoritaire. L’une des recommandations de la commission avait trait à la budgétisation des travaux publics. Soulignant la contradiction entre l’argument du gouvernement selon lequel la Birmanie est un pays pauvre et la déclaration du parti d’opposition à propos du montant des recettes d’exportations de gaz, l’orateur a déploré le fait que ces recettes ne soient pas utilisées pour éliminer le travail forcé, la conscription des enfants ou la confiscation des terres. La non-application des recommandations de l’OIT est due au manque de volonté politique, et la réalité de la situation n’a pas changé après les élections. Le peuple birman est toujours victime du travail forcé, de la confiscation des terres et d’une fiscalité arbitraire, ce qui a une incidence sur leurs droits fondamentaux. Il convient de rappeler l’importance de concentrer les travaux de l’OIT sur ces questions, et une coopération plus large de la part d’autres institutions internationales présentes en Birmanie est nécessaire afin de construire un pays sans travail forcé dans lequel la démocratie et l’Etat de droit constitueraient les piliers du développement social.
Le membre gouvernemental de la Chine a indiqué que de nombreux orateurs ont reconnu que la coopération entre l’OIT et le gouvernement du Myanmar a été efficace. De nouveaux progrès ont été accomplis. Le Protocole d’entente complémentaire a été prolongé d’une année et des projets de loi sont en préparation afin de mettre la législation en conformité avec la convention no 29. De plus, de nombreuses activités de sensibilisation ont été menées et une brochure d’information sur la procédure de plaintes a été diffusée dans tout le pays. L’orateur a rappelé la position constante de son gouvernement selon laquelle le travail forcé constitue une violation des droits fondamentaux et doit être éliminé. Une assistance technique appropriée doit être fournie et la coopération entre l’OIT et le gouvernement du Myanmar poursuivie.
La membre gouvernementale de la Suisse a déclaré que son gouvernement s’associe à la déclaration faite au nom de l’Union européenne.
Le représentant gouvernemental a remercié la commission des discussions et de l’intérêt porté aux différentes mesures prises ou envisagées par le nouveau gouvernement du Myanmar. Certains orateurs ont parlé du pays en utilisant le nom incorrect de «Birmanie» alors que le nom correct officiel est «La République de l’Union du Myanmar» ou «Myanmar» sous sa forme abrégée. L’orateur a demandé qu’au cours des discussions à venir au sein de la commission tous les délégués désignent le pays par son nom officiel, de manière correcte, dans la mesure où le nom de «Myanmar» a été reconnu par l’ensemble du système des Nations Unies. En outre, il convient de rejeter les déclarations selon lesquelles des personnes ayant pris part au mécanisme du Protocole d’entente complémentaire sont aujourd’hui prisonniers politiques et que des militants syndicaux sont en détention. Ces arrestations n’ont eu lieu que parce qu’il y a eu violation des lois existantes et n’ont aucun rapport avec la liberté syndicale ni avec le mécanisme du Protocole d’entente complémentaire. De plus, le 16 mai 2011, le Président a accordé une amnistie à environ 14 000 prisonniers. Pour ce qui est des interventions faisant état d’une situation d’impunité au Myanmar, tous les cas de personnes ayant eu recours au travail forcé, qu’il s’agisse de civils ou de militaires, seront traités car nul n’est au-dessus des lois. Pour ce qui est des incidents signalés dans les zones frontalières, il est possible que des querelles ou des bagarres aient eu lieu, mais il convient de rejeter les interventions susmentionnées qui ont des motivations politiques et sont fondées sur de fausses informations. Enfin, bien que le gouvernement du Myanmar se dirige vers la voie de la démocratie, celle-ci ne saurait être instaurée instantanément. La transition peut prendre un certain temps. L’orateur a donc appelé la communauté internationale à la patience et a promis que son gouvernement ferait du mieux qu’il peut.
Les membres employeurs ont indiqué que les observations finales du gouvernement sont très décevantes. Ils s’attendaient à une attitude positive, une attitude qui aurait montré comment le gouvernement entend faire des progrès. Compte tenu de l’histoire de ce pays, ils ont exprimé leur scepticisme quant à la déclaration du gouvernement selon laquelle les gens sont incarcérés parce qu’ils ont enfreint la loi et non pour d’autres raisons. Quant à la question de l’impunité, il semble que l’armée se place au-dessus de la loi. L’indication du gouvernement selon laquelle la loi sur les villes et la loi sur les villages ont été révisées à 80 pour cent mais que rien ne peut être fait à propos de la Constitution constitue un problème juridique fondamental, et l’on peut se demander si les modifications apportées à ces lois auront un effet quelconque en droit ou dans la pratique. La situation est la même que les années précédentes et les membres employeurs ont recommandé que le point de départ des conclusions de la commission cette année soit les conclusions auxquelles elle est parvenue lors de la session de l’année dernière, étant donné que rien n’indique un changement significatif et tangible sur le terrain au Myanmar.
Les membres travailleurs ont déclaré qu’il y a à la fois urgence et opportunité à relancer l’action de l’OIT sur la base de la résolution de la CIT de 2000. Le gouvernement doit mettre en oeuvre intégralement et sans délai les trois recommandations de la commission d’enquête et, en premier lieu, prendre les mesures nécessaires pour réviser la Constitution afin de la mettre en conformité avec la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention no 29. Il doit aussi immédiatement prendre les mesures concrètes demandées par la commission d’enquête et, tout d’abord, ne plus poursuivre ni sanctionner ni emprisonner les plaignants, facilitateurs et autres personnes – suite au dépôt d’une plainte – et affecter les revenus du gaz et du pétrole à la rémunération du travail réalisé librement au lieu de recourir au travail forcé. Enfin, les détenus politiques et les syndicalistes doivent être immédiatement libérés.
Les membres travailleurs ont déclaré attendre des employeurs qu’ils s’abstiennent de recourir au travail forcé et d’investir dans le pays aussi longtemps qu’il s’agit d’une dictature militaire ou semi-militaire. Les employeurs doivent également respecter les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales et les droits de l’homme tels que définis par les Nations Unies. En outre, les gouvernements ne doivent pas assouplir leurs sanctions et ils doivent apporter leur soutien à une commission d’enquête des Nations Unies sur des crimes contre l’humanité. Il est également nécessaire que la communauté diplomatique sur place apporte son soutien et son expertise aux activités du Chargé de liaison de l’OIT et que toutes les institutions des Nations Unies coopèrent plus étroitement afin d’étendre leurs activités à l’ensemble du pays.
Les membres travailleurs ont précisé qu’ils attendent du Bureau qu’il ne se focalise pas seulement sur le Protocole d’entente complémentaire et le mécanisme de plaintes mais qu’il entreprenne les actions nécessaires pour éliminer le travail forcé: renforcement des ressources humaines et financières du bureau de liaison sur place pour pouvoir couvrir toutes les régions du pays, suivi de la question de la liberté syndicale par un chargé de liaison, surveillance du travail forcé dans les grands projets en cours (projets
miniers, grands barrages, etc.). S’il n’y a pas de progrès suffisant, le Conseil d’administration devrait pouvoir demander l’avis de la Cour internationale de Justice sur la violation de la convention no 29. Enfin, les membres travailleurs attendent également du Bureau qu’il interroge à nouveau les gouvernements et les employeurs sur les initiatives qu’ils ont prises dans le cadre de la résolution de la CIT de 2000.
Conclusions
La commission a pris note des observations de la commission d’experts sur l’application de la convention no 29 par le gouvernement du Myanmar, ainsi que du rapport du Chargé de liaison de l’OIT à Yangon relatant les faits les plus récents concernant la mise en oeuvre du mécanisme d’examen des plaintes relatives au travail forcé mis en place le 26 février 2007, mécanisme dont la période d’essai a été reconduite en février 2011 pour une nouvelle période de douze mois, soit jusqu’au 25 février 2012.
La commission a également pris note des discussions et décisions du Conseil d’administration de novembre 2010 et mars 2011. En outre, elle a dûment pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a fait suite. Elle a noté, en particulier, que le gouvernement s’est référé à la révision en cours de la loi sur les villes et de la loi sur les villages, indiquant que le projet de loi tend explicitement à interdire le travail forcé et inclut des réserves en ce qui concerne les circonstances relevant des catastrophes naturelles. Il a également fait état d’activités de sensibilisation actuellement en cours, y compris dans les régions peuplées de minorités ethniques, ainsi que de l’inscription adéquate de crédits au budget, afin de réduire le risque de recours du gouvernement à la main-d’oeuvre non rémunérée. S’agissant de plaintes relatives à l’enrôlement de mineurs dans l’armée, le gouvernement a déclaré que les enfants ont été libérés et que des sanctions disciplinaires ont été prises à l’égard du personnel militaire: des officiers ayant été limogés et condamnés à des peines de prison. Le représentant gouvernemental a enfin déclaré que des mesures seraient naturellement prises contre toute personne, civile ou militaire, qui recourrait au travail forcé ou à l’enrôlement dans l’armée de personnes n’ayant pas l’âge légal.
La commission s’est réjouie d’apprendre que, comme elle le demandait depuis plusieurs années, Daw Aung San Suu Kyi ne fait plus l’objet d’une mesure d’assignation à résidence. Elle a appelé à nouveau à la libération immédiate des autres prisonniers politiques et militants syndicaux.
Se référant aux restructurations politiques survenues depuis la dernière session et notant les premières déclarations de priorités politiques du Président nouvellement élu sur la nécessité d’un bon gouvernement et d’une bonne gouvernance, la commission exprime le ferme espoir que ces objectifs se traduiront par des actes concrets et positifs et des mesures proactives et préventives axées sur l’éradication de toutes les formes de travail forcé et sur la promotion des droits des travailleurs.
Malgré ce qui précède, la commission a le regret de noter qu’il n’a pas été enregistré de progrès substantiels quant à l’application des recommandations formulées par la commission d’enquête en 1998, à savoir:
1)rendre les textes législatifs conformes à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930;
2)assurer que, dans la pratique, il ne soit plus imposé de travail forcé par les autorités; et
3)appliquer strictement les sanctions pénales prévues en cas d’imposition de travail forcé.
La commission a rappelé que les décisions prises par la Conférence en 2000 et en 2006 concernant l’application par le Myanmar de la convention no 29 – et tous les éléments que ces décisions prévoient – restent d’actualité (Note_1). Elle a exprimé le ferme espoir que le gouvernement s’emploiera d’urgence à faire en sorte que toutes les mesures demandées soient mises en oeuvre à tous les niveaux de l’ensemble des autorités civiles et militaires. Elle a demandé instamment que le gouvernement donne suite intégralement aux recommandations de la commission d’enquête et aux commentaires et observations de la commission d’experts sans délai.
En particulier, le gouvernement devrait:
1)soumettre les projets de textes amendant la loi sur les villes et la loi sur les villages au BIT pour commentaires et conseils afin de garantir que ces instruments soient pleinement conformes à la convention no 29 et en assurer l’adoption rapide dans la législation et une prompte application dans la pratique;
2)prendre des mesures propres à garantir que le cadre constitutionnel et législatif interdise de manière effective l’imposition de travail forcé sous quelque forme que ce soit;
3)prendre toutes les mesures nécessaires afin de prévenir, réprimer et punir l’ensemble des pratiques de travail forcé, y compris l’enrôlement d’enfants dans les forces armées, l’enrôlement forcé dans le corps des pompiers et dans les unités de réserve de la milice, la réquisition pour le portage, pour la construction, pour l’entretien et l’approvisionnement des camps militaires, pour les travaux agricoles, et enfin la traite des personnes à des fins de travail forcé, pratiques qui ont encore cours et sont particulièrement étendues;
4)assurer rigoureusement que les personnes qui imposent du travail forcé, qu’elles appartiennent aux autorités civiles ou militaires, soient poursuivies sur les fondements du Code pénal et que des sanctions suffisamment dissuasives leur soient infligées;
5)engager sans délai les consultations envisagées entre le BIT et les ministères compétents en matière de finances et de planification afin d’assurer que les crédits nécessaires à l’engagement normal de travailleurs et à leur rémunération adéquate soient inscrits au budget;
6)prévoir des consultations sérieuses entre le BIT et le ministère de la Défense et, notamment, le plus haut niveau des forces armées, pour traiter les politiques et comportements conduisant les militaires à recourir au travail forcé;
7)mettre immédiatement un terme à tout harcèlement, toutes mesures de représailles et toute mesure d’emprisonnement contre les personnes qui recourent aux mécanismes de plaintes, sont associées à ce mécanisme ou en facilitent l’usage;
8)libérer immédiatement les personnes ayant porté plainte et les autres personnes associées à l’utilisation du mécanisme de plaintes qui sont actuellement emprisonnées et rapporter en conséquence toutes les mesures de suspension des licences d’exercice d’une profession prises dans ce cadre;
9)intensifier les activités de sensibilisation dans tout le pays, y compris dans le contexte des grands projets d’infrastructures et dans le cadre de la formation professionnelle du personnel de la police et des forces armées;
10)faciliter sans délai la production et la large diffusion de la brochure dans les autres langues vernaculaires;
11)rechercher activement un accord sur un plan d’action conjoint sérieux avec l’Equipe spéciale de pays des Nations Unies chargée de la surveillance et de la communication d’information sur les enfants et les conflits armés, dont le BIT est membre, en ce qui concerne notamment l’enrôlement de personnes n’ayant pas l’âge légal dans les forces armées.
Comme demandé dans la résolution de la Conférence internationale du Travail de 2000, la commission compte sur la collaboration de toutes les institutions du système des Nations Unies aux efforts visant l’élimination effective du travail forcé au Myanmar. Elle a de même appelé tous les investisseurs dans ce pays à s’assurer que les activités qu’ils y déploient ne servent pas à perpétuer ou étendre le recours au travail forcé mais apportent au contraire une contribution positive à son éradication complète.
La commission a appelé au renforcement des moyens dont dispose le Chargé de liaison de l’OIT pour aider le gouvernement à mettre en oeuvre toutes les recommandations de la commission d’enquête et pour assurer l’efficacité du fonctionnement du mécanisme de plaintes, ainsi que de toute autre mesure supplémentaire qui serait nécessaire pour l’éradication complète du travail forcé. En particulier, la commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement donnera sans délai des assurances pleines et entières concernant la délivrance de visas de séjour à des fonctionnaires internationaux supplémentaires, relevant de la catégorie professionnelle.
La commission a appelé le gouvernement à passer en revue avec le Chargé de liaison de l’OIT les références faites au cours de sa discussion à des ordonnances imposant du travail forcé, ainsi que les ordonnances et autres documents similaires qui ont été soumis à la commission d’experts, et elle a demandé que le Conseil d’administration soit saisi des progrès réalisés à cet égard à sa session de novembre prochain. Elle a incité le gouvernement à solliciter le concours du Bureau pour la mise en place d’un mécanisme permettant d’examiner et d’instruire immédiatement les allégations concernant ces ordonnances.
La commission a demandé instamment que le gouvernement fournisse à la commission d’experts des informations détaillées sur les mesures prises à propos de toutes les questions évoquées ci-dessus afin que celle-ci les examine à sa session de cette année, et elle veut croire qu’elle sera en mesure de prendre note de faits nouveaux significatifs lors de la prochaine session de la Conférence.
Documents non-reproduits:
Document D.5
B. Observation de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur l’exécution par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
C. Rapport du Chargé de liaison à la séance spéciale de la Commission de l’application des normes sur l’application par le Myanmar de la convention no 29
D. Conclusions adoptées par la Commission de l’application des normes lors de sa séance spéciale pour l’examen des faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (Conférence internationale du Travail, 98e session, juin 2010)
E. Document soumis au Conseil d’administration à sa 309e session (novembre 2010) et conclusions du Conseil d’administration
F. Document soumis au Conseil d’administration à sa 310e session (mars 2011) et conclusions du Conseil d’administration
Note 1
http://www.ilo.org/public/french/standards/relm/ilc/ilc88/resolutions.htm#I;
A. Comptes rendus de la discussion de la Commission de l'application des normes
Un représentant gouvernemental du Myanmar a de nouveau affirmé que l’élimination de la pratique du travail forcé dans son pays était un objectif important fixé par le gouvernement du Myanmar pour le peuple, et que cet objectif était aussi celui de l’OIT et de la communauté internationale. Des efforts sincères sont déployés à cette fin en coopération étroite avec le BIT, notamment avec le Chargé de liaison. Des progrès relatifs ont été réalisés, mais les conditions socio-économiques actuelles ne sont pas favorables à cet objectif. Il faut du temps pour obtenir le résultat escompté, et la situation doit être examinée de façon objective et constructive.
S’agissant de certains éléments nouveaux apparus depuis la session de la commission de juin 2009, le Protocole d’entente complémentaire entre le gouvernement du Myanmar et le BIT est à nouveau prolongé pour une année, suite à la visite de la délégation du BIT qui s’est déroulée du 17 au 24 janvier 2010. Cette prolongation montre que le gouvernement du Myanmar apprécie et soutient les activités du BIT, et qu’il s’est engagé à éradiquer le travail forcé dans le pays. En ce qui concerne le mécanisme de plaintes prévu par le Protocole d’entente complémentaire, le rapport du Chargé de liaison fait état de la pleine coopération du gouvernement en faveur du mécanisme de traitement des plaintes par le biais du Groupe de travail gouvernemental pour l’élimination du travail forcé (ci-après Groupe de travail). Sans l’engagement du gouvernement, il n’aurait pas été possible de donner suite en temps utile aux plaintes déposées dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire ni de faciliter les activités de formation et de sensibilisation, notamment de formation de personnel militaire. Les déplacements du Chargé de liaison ont également été facilités.
S’agissant de l’importance réelle du travail forcé dans le pays, seules 196 allégations de travail forcé ont été soumises au Groupe de travail entre février 2007 et mai 2010. Pour 125 cas, une enquête a été menée et des solutions ont été trouvées en rapport avec leur gravité. Les résultats d’enquête concernant 35 cas ont été transmis au Chargé de liaison. Le Myanmar comptant actuellement 58 millions d’habitants et le nombre de cas ayant été seulement de 196 sur une période de trois ans, on ne peut pas considérer que le travail forcé soit répandu. Sans vouloir sous-entendre que la pratique du travail forcé est acceptable ou tolérable, les statistiques et l’analyse des problèmes indiquent que le travail forcé n’est pas répandu dans le pays. Les problèmes restent localisés mais le gouvernement prend actuellement les mesures voulues pour les résoudre.
Quant à la nécessité de sensibiliser à la question du travail forcé et à son interdiction, 13 activités de sensibilisation au total ont été menées avec succès depuis juin 2009 pour les autorités d’Etat, de division et de village, pour les représentants d’unités militaires, ainsi que pour le personnel de terrain des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales internationales. Le dernier atelier a eu lieu à Pegu; les autorités administratives de 14 communes de la région, les forces de police communales et des représentants du ministère de la Défense, du ministère de l’Immigration et de la Population et du ministère du Travail y ont participé. D’autres activités vont être menées de sorte qu’un plus grand nombre d’habitants seront informés de leurs droits et obligations et des conséquences relatives au travail forcé. La brochure simple comprenant des explications relatives à la loi sur le travail forcé, le Protocole d’entente complémentaire et le mécanisme de plaintes est en cours d’impression et de distribution.
En ce qui concerne la question du recrutement d’enfants en dessous de l’âge légal, l’orateur a rappelé la déclaration que son gouvernement a faite lors de la 307e session du Conseil d’administration (document GB.307/6) selon laquelle les parents, tuteurs ou membres de la famille de ces enfants peuvent déposer une plainte pour recrutement en dessous de l’âge légal, et ce directement auprès de tout centre de recrutement ou de tout établissement militaire. Les autorités militaires sont pleinement préparées à recevoir de telles plaintes et à les traiter. Par ailleurs, les plaignants peuvent également avoir recours au mécanisme de plaintes prévu par le Protocole d’entente, les autorités ne posant aucune restriction à cet égard. Si quelques cas de recrutement en dessous de l’âge légal ont été relevés à l’échelle locale, ces cas ne sont ni répandus ni systématiques; il convient en conséquence de ne pas en faire une généralité. Le Comité pour la prévention du recrutement de mineurs dans l’armée prend part activement à des campagnes d’affichage, à la formation du personnel militaire, au contrôle du recrutement, tout en prenant des mesures contre les auteurs et, le plus important, en veillant à la libération rapide et ferme des enfants recrutés en dessous de l’âge légal. Il fournit régulièrement aux institutions des Nations Unies concernées des informations sur l’avancement de ses travaux et compte poursuivre ses objectifs, qui consistent notamment à mettre la dernière main au plan d’action, en collaboration étroite avec, notamment, l’UNICEF et le HCR.
Tout en félicitant le Chargé de liaison pour les efforts de transparence et de coopération dont il fait preuve dans le partage avec le gouvernement du projet de rapport à la présente commission, l’orateur a déclaré que certaines idées et certaines approches exprimées dans le rapport ne sont pas objectives, pas plus qu’elles ne sont acceptables. Certaines des informations contenues dans le rapport vont au-delà du mandat du Chargé de liaison et ne relèvent pas du Protocole d’entente complémentaire. Le Groupe de travail et le Chargé de liaison devront peut-être à l’avenir prévoir une meilleure interaction afin que le mode de fonctionnement du Chargé de liaison soit mieux compris.
En guise de conclusion, le représentant gouvernemental du Myanmar s’est dit convaincu que son gouvernement n’épargnera aucun effort en vue d’atteindre l’objectif d’élimination du travail forcé.
Les membres employeurs ont estimé que, malgré quelques mesures positives qui ont été prises, la situation au Myanmar est restée fondamentalement inchangée et que le gouvernement est loin d’avoir aboli le travail forcé. Répondant au gouvernement qui affirme que les changements prendront du temps à cause des conditions socio-économiques dans lesquelles se trouve le pays, ils ont indiqué que, étant donné que ces problèmes se posent depuis longtemps, il est temps de surmonter ces obstacles. Se félicitant du rapport du Chargé de liaison, ils ont considéré que ce dernier n’outrepassait pas son mandat. La quantité de son travail augmente et il ne dispose pas du personnel suffisant. Les membres employeurs ont noté avec regret que la demande de visa faite en vue du recrutement d’un membre du personnel supplémentaire n’a toujours pas été approuvée et ont prié instamment le gouvernement de faire le nécessaire dans ce sens.
En ce qui concerne l’élimination du travail forcé, dans la loi comme dans la pratique, les membres employeurs ont déclaré que des problèmes essentiels subsistent. Le travail forcé impliquant des militaires perdure à tous les échelons, et le nombre de plaintes relatives au recrutement de mineurs dans les forces armées, auxquelles s’ajoutent des mesures d’intimidation, de harcèlement et d’emprisonnement à l’encontre des personnes ayant déposé de telles plaintes, ne cessent d’augmenter. L’examen des plaintes relatives au recrutement des mineurs devrait être inscrit dans le mandat du Chargé de liaison. De plus, il semble qu’il existe des preuves irréfutables indiquant que le travail forcé est imposé de façon systématique par les autorités militaires et civiles, notamment au sein du document soumis par la Confédération syndicale internationale (CSI) à la commission d’experts en 2009, qui indiquait que plus de 100 «lettres ouvertes» de réquisition de travail forcé ont été transmises entre décembre 2008 et juin 2009. Les membres employeurs ont demandé quand la loi sur les villages et la loi sur les villes seraient abrogées.
Malgré la persistance de problèmes importants, le rapport du Chargé de liaison révèle quelques légers signes de progrès, dont notamment la troisième prolongation du Protocole d’entente complémentaire; la réponse positive du Groupe de travail aux activités de formation et de sensibilisation; la réponse dans des délais relativement courts aux plaintes transmises au Groupe de travail dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire; l’engagement du ministère de la Défense à fournir au personnel militaire la formation requise sur les lois relatives au recrutement en dessous de l’âge légal; le projet de publication d’une brochure sur le Protocole d’entente et sur les procédures à suivre pour le dépôt d’une plainte; les poursuites engagées à l’encontre de deux officiers de l’armée pour travail forcé (ce qui ne représente qu’une infime partie des poursuites nécessaires); et la libération de 14 des 20 personnes emprisonnées dans le cadre des procédures établies par le Protocole d’entente complémentaire (bien que les six autres n’aient pas encore été libérées). Malgré ces signes positifs, les libertés civiles font encore cruellement défaut au Myanmar, et en particulier le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté syndicale et de réunion, le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial, et la protection de la propriété privée. En outre, un climat de crainte et d’intimidation des citoyens persiste, et l’on peut citer à ce sujet l’assignation à résidence d’Aung San Suu Kyi. Ce sont là les causes profondes du travail forcé, du travail des enfants, du recrutement des enfants soldats, de la discrimination et de l’absence de liberté syndicale.
Quant à la déclaration du gouvernement selon laquelle le nombre de plaintes est faible par rapport à l’importance de la population du pays, les membres employeurs ont estimé que ce chiffre bas pouvait être induit par le manque d’accès au mécanisme de plaintes et par la pression faite sur la population de ne pas déposer plainte. Plusieurs plaintes relatives à la traite d’êtres humains aux fins de travail forcé ont été jugées non recevables par le Groupe de travail et transmises au ministère de l’Intérieur. La question du travail forcé au Myanmar doit être traitée dans sa globalité, et le gouvernement est prié instamment d’examiner sans délai les cas de traite d’êtres humains aux fins de travail forcé.
Pour ce qui est de la Constitution nouvellement adoptée, les membres employeurs ont fait remarquer que les réserves contenues dans l’article interdisant le travail forcé posent des problèmes de conformité avec la convention no 29. La convention doit être pleinement et entièrement appliquée en droit et dans la pratique. Le gouvernement est toujours loin d’appliquer les mesures recommandées par la commission d’enquête. Ainsi, par exemple, les textes législatifs (en particulier la loi sur les villages et celle sur les villes) devraient être mis en conformité avec la convention; les autorités devraient cesser d’imposer du travail forcé, et les sanctions prévues en cas d’imposition de travail forcé ou obligatoire devraient être appliquées rigoureusement. La mise en oeuvre de ces recommandations ne saurait être garantie que si le gouvernement prenait des mesures dans les quatre domaines définis par la commission d’experts dans son observation de 2009. Pourtant, les questions restant à régler persistent.
Les membres employeurs ont prié instamment le gouvernement de fournir des informations complètes et détaillées en signe de sa volonté réelle de coopérer avec la commission et les organes de contrôle. La transparence et la collaboration avec le Chargé de liaison sont essentielles. Il a rappelé au gouvernement que l’accord relatif au Protocole d’entente complémentaire et la mise en place d’un mécanisme de plaintes ne le libèrent pas de ses obligations en vertu de la convention no 29. Le gouvernement doit apporter des améliorations concrètes à sa législation nationale et fournir des fonds suffisants pour que le travail volontaire rémunéré puisse remplacer le travail forcé dans l’administration civile et militaire, afin de démontrer sans équivoque sa volonté de lutter contre le travail forcé et de mettre fin au climat d’impunité. La situation au Myanmar persiste depuis trop longtemps, d’autant plus que le gouvernement a ratifié la convention no 29 il y a plus de cinquante ans, et le gouvernement du Myanmar doit mettre fin au travail forcé.
Les membres travailleurs ont rappelé que cette discussion s’inscrivait dans le cadre du suivi des conclusions et recommandations de la commission d’enquête instituée en 1997 par le Conseil d’administration, laquelle avait conclu que le gouvernement du Myanmar violait de manière généralisée et systématique la convention no 29 et avait demandé au gouvernement de prendre trois séries de mesures. Premièrement, elle avait demandé que la législation soit mise en conformité avec la convention no 29. Sur ce point, le gouvernement n’est toujours pas disposé à abroger ni la loi sur les villages ni la loi sur les villes, même si, d’après le gouvernement, ces lois ne sont pas appliquées dans la pratique. En toute hypothèse, cette abrogation ne suffit plus puisque l’article 359 de la nouvelle Constitution, qui interdit le travail forcé, prévoit une exception pour les travaux imposés par l’Etat dans l’intérêt du peuple et que cette exception ouvre la porte à l’imposition de toute forme de travail forcé. Deuxièmement, la commission d’enquête avait demandé l’adoption de mesures concrètes pour assurer que les autorités, et en particulier les autorités militaires, n’imposent plus de travail forcé. La commission d’experts et cette commission ont répété qu’il fallait donner des instructions précises aux autorités civiles et militaires et à l’ensemble de la population à ce sujet. Un certain nombre d’activités ont été menées, ce qui constitue un progrès, mais le gouvernement doit s’engager à fournir plus d’informations et à mener des activités de sensibilisation de manière plus cohérente et systématique, distribuer des brochures dans toutes les langues locales et déclarer sans ambiguïté qu’il interdit toutes les formes de travail forcé. Les membres travailleurs ont également souligné que les moyens budgétaires mis en place pour engager des travailleurs salariés en remplacement des travailleurs forcés et non rémunérés restaient insuffisants ou mal utilisés. Par ailleurs, le mécanisme de traitement des plaintes est utile mais limité, en raison des facilités réduites dont dispose le Chargé de liaison et de son pouvoir d’action restreint, des représailles subies par les victimes qui portent plainte et du rejet de ce mécanisme par les autorités locales. En conséquence, les autorités civiles et militaires continuent d’imposer systématiquement du travail forcé dans tout le pays. La troisième demande de la commission d’enquête portait sur l’application de sanctions. Sur ce point, si le Code pénal prévoit des sanctions pour les personnes imposant du travail forcé, en 2009, aucune des plaintes présentées dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire n’a abouti à des poursuites, et les cas de recrutement de mineurs par des militaires n’ont fait l’objet que de sanctions administratives. Cette question reste préoccupante, en particulier lorsque des militaires sont impliqués. Le Chargé de liaison joue un rôle essentiel pour aider le gouvernement à éliminer le travail forcé, mais la coopération totale du gouvernement est nécessaire à cet égard. De nombreuses choses restent à faire pour assurer l’application de la convention.
Un autre porte-parole des travailleurs, intervenant au nom des membres travailleurs, a également estimé que ce cas ne devait pas être examiné en-dehors de tout contexte historique et a souhaité évaluer les progrès réalisés par le gouvernement par rapport aux conclusions de la Commission de la Conférence de 2009. Les sept conclusions n’ont pas été mises en oeuvre de manière effective ou significative par le gouvernement, à savoir: la mise en conformité des textes législatifs pertinents (notamment la loi sur les villes et la loi sur les villages) par rapport à la convention no 29; la modification du paragraphe 15 du chapitre VIII de la nouvelle Constitution; l’élimination totale des pratiques de travail forcé encore très répandues; la poursuite et la sanction, conformément au Code pénal, des personnes qui ont eu recours au travail forcé; la publication officielle et au plus haut niveau d’une proclamation claire confirmant la politique d’élimination du travail forcé du gouvernement et la volonté de ce dernier de poursuivre ceux qui y auraient recouru; l’approbation de la publication d’une brochure rédigée en termes simples et dans les langues vernaculaires présentant le fonctionnement du Protocole d’entente complémentaire; l’élimination des obstacles empêchant matériellement que les victimes de travail forcé ou les membres de leur famille portent plainte et l’arrêt immédiat de toutes les mesures de harcèlement, de représailles ou d’emprisonnement contre les personnes ayant eu recours au mécanisme de plaintes ou ayant facilité un tel recours. Des séances spéciales sur ce cas ont lieu depuis dix ans et, pour l’essentiel, les conclusions de la Commission et les recommandations de la commission d’enquête ne sont toujours pas respectées. Cela constitue un défi à la fonction de contrôle de l’OIT et à sa Constitution.
Renvoyant aux conclusions de la commission d’enquête, les membres travailleurs ont souligné que les sommes nécessaires doivent être prévues dans le budget pour assurer le recrutement de main-d’oeuvre volontaire. Dans son observation de 2009, la commission d’experts a déclaré que les sommes prévues dans le budget à cette fin n’étaient pas suffisantes ou étaient mal utilisées. En conséquence, l’absence de progrès est due à un manque de volonté politique et non à un manque de ressources. S’agissant de la nécessité d’engager des poursuites pénales à l’encontre des auteurs intellectuels ou matériels des infractions d’imposition de travail forcé, mentionnée dans les conclusions de la commission d’enquête, les membres travailleurs ont noté que, selon la commission d’experts dans son observation de 2009, aucune des plaintes évaluées et transmises par le Chargé de liaison au Groupe de travail n’avait abouti en 2009 à la décision d’engager des poursuites pénales à l’encontre des auteurs de travail forcé et de les condamner. Dans un cas, la recommandation explicite faite par le Chargé de liaison d’engager des poursuites pénales a même été rejetée. L’accord du gouvernement pour continuer à exécuter le Protocole d’entente complémentaire est, certes, un point positif, mais le gouvernement continue à entraver sa mise en oeuvre réelle. Selon la commission d’experts, le gouvernement continue d’emprisonner les personnes qui facilitent le recours au mécanisme de plaintes, et les plaignants sont détenus, harcelés et font l’objet de représailles judiciaires. Dans plusieurs cas, ils ont préféré retirer leur plainte par crainte de représailles.
En 2007, le Conseil d’administration a reporté sa décision de solliciter un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) au sujet de ce cas jusqu’à nouvel ordre, et estimé qu’il était possible de demander à la CIJ si la coopération du gouvernement concernant les recommandations de la commission d’enquête «atteignait le seuil voulu». Trois ans plus tard, le gouvernement est loin d’avoir atteint ce seuil, et cette commission devrait assumer le fait que le gouvernement birman sape le système de contrôle.
Le membre gouvernemental de l’Espagne a exprimé, au nom des membres gouvernementaux des Etats membres de l’Union européenne, membres de la commission, ainsi que de Saint-Marin, de la Suisse et de la Norvège, sa préoccupation quant à la situation critique des droits de la personne en Birmanie/Myanmar, telle que rapportée par le Chargé de liaison, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, ainsi que le Conseil des droits de l’homme et l’Assemblée générale des Nations Unies. Les autorités de la Birmanie/Myanmar doivent prendre des mesures pour assurer une transition pacifique vers un système de gouvernement démocratique et civil et faire en sorte que les élections prévues soient crédibles, transparentes et ouvertes à tous. Les défis politiques et socio-économiques auxquels fait face le pays ne peuvent être résolus que par un dialogue authentique entre toutes les parties prenantes, y compris les groupes ethniques et l’opposition. L’orateur a appelé le gouvernement à libérer tous les prisonniers et détenus politiques, y compris Aung San Suu Kyi, et exprimé de graves inquiétudes au sujet du non-respect par la Birmanie/Myanmar de la convention no 29.
L’orateur a loué certaines mesures positives prises par le gouvernement de la Birmanie/Myanmar, comme le renouvellement de la période d’essai du mécanisme de plaintes, dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire, la publication et la distribution de la brochure rédigée en termes simples et dans les langues locales, présentant la loi contre le travail forcé et le mécanisme de plaintes en vertu du Protocole d’entente complémentaire, et les propositions voulant que le Code pénal et les règlements militaires sur le travail forcé, y compris le recrutement de mineurs, prévoient l’emprisonnement pour le personnel militaire en cas de recrutement de mineurs. L’orateur a exhorté le gouvernement à s’appuyer sur ces mesures pour faire en sorte que les modifications proposées aux lois et règlements soient mises en pratique.
La pleine conformité avec la convention no 29 est loin d’être atteinte, il est profondément regrettable que des personnes qui ont utilisé le mécanisme de plaintes pour dénoncer le travail forcé soient emprisonnées. Cela est en contradiction avec l’engagement du gouvernement en vertu du Protocole d’entente complémentaire et, comme indiqué par le Conseil d’administration du BIT, cela sape les progrès réalisés à ce jour. Par conséquent, les plaignants emprisonnés doivent être libérés. Les autorités ont été instamment priées de mettre un terme à l’enrôlement et à l’utilisation d’enfants soldats, à poursuivre leur collaboration avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés. Il est profondément préoccupant que les plaintes contre les militaires en service soient difficiles à mener, en particulier à la lumière des rapports faisant état de leur recours au travail forcé pour le portage et le travail de sentinelle. L’orateur a conclu en invitant les autorités à respecter leurs engagements et a réaffirmé l’importance de la coopération entre les autorités de la Birmanie/Myanmar et le BIT.
Le membre travailleur de la Malaisie a expliqué combien la persistance du travail forcé en Birmanie/Myanmar a de répercussions négatives sur les pays membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), et plus particulièrement sur les travailleurs et les syndicats. L’émigration de ceux qui veulent éviter d’être soumis au travail forcé contribue largement à la présence de migrants birmans, qui sont plus de 2 millions en Thaïlande, près de 200 000 en Malaisie et un nombre indéterminé au Bangladesh. Les questions sociales et juridiques qui se posent et la situation complexe des travailleurs migrants birmans représentent une immense charge pour les gouvernements sur les plans financier et politique, et les organisations de travailleurs en Thaïlande et en Malaisie doivent gérer les conséquences des pratiques d’employeurs sans scrupules qui profitent de ces migrants. L’orateur a attiré l’attention sur la persistance des pratiques de travail forcé imposé dans le nord de l’Etat d’Arakan à des centaines de villageois Rohingyas de la municipalité de Maungdaw pour la construction d’une barrière et de postes de contrôle le long de la frontière avec le Bangladesh. Le travail forcé prive les pauvres de leur salaire, ce qui est la cause première de l’émigration vers le Bangladesh. Alors que l’OIT et, plus largement, la communauté internationale s’efforcent de mettre fin à la traite des personnes, le gouvernement de la Birmanie/Myanmar semble agir en sens contraire. La persistance du travail forcé et la négation des droits fondamentaux poussent les travailleurs à quitter la Birmanie en direction des pays de l’ANASE et de l’Asie du Sud, ce qui a pour conséquence de fragiliser la situation dans ces pays aux plans social, économique et de la sécurité. Si la Birmanie veut être respectée en tant que partenaire au sein de l’ANASE, son gouvernement doit introduire les changements nécessaires pour mettre fin au travail forcé.
La membre gouvernementale de la Thaïlande a loué la coopération et le dialogue qui se poursuivent entre le gouvernement du Myanmar et l’OIT. Les développements qui sont intervenus au cours de l’année écoulée, en ce qui concerne notamment le fonctionnement du mécanisme de plaintes, les activités de formation et de sensibilisation, les missions opérationnelles sur le terrain, les consultations entre le Chargé de liaison et le Groupe de travail, ainsi que la prolongation du Protocole d’entente complémentaire sont encourageants. Le gouvernement du Myanmar a répondu dans des délais raisonnables aux plaintes qui avaient été déposées en application de ce protocole, et des progrès ont été réalisés en ce qui concerne l’enrôlement de mineurs dans l’armée. Le gouvernement devrait être encouragé à poursuivre dans cette voie positive en partenariat avec le BIT afin d’assurer la protection des plaignants, des facilitateurs et des autres personnes impliquées dans la présentation de plaintes. La sensibilisation est un élément clé pour répondre au problème du travail forcé, et il est essentiel que les autorités étatiques et la population dans son ensemble soient pleinement informées des dispositions légales interdisant le travail forcé et du mécanisme de plaintes. L’accord du gouvernement à la version finale de la brochure présentant ce mécanisme et le fait que celle-ci sera bientôt disponible pour le public doivent être loués. Il est nécessaire d’en assurer une large distribution, tout particulièrement dans les zones rurales et dans les régions où de nombreuses plaintes sont enregistrées. Il est clair que le Myanmar a la volonté de travailler avec la communauté internationale, même s’il reste beaucoup à faire. Le gouvernement de la Thaïlande est prêt à appuyer les efforts du Myanmar et à coopérer avec lui dans ce domaine.
La membre gouvernementale de la Norvège a appuyé la déclaration faite par le membre gouvernemental de l’Espagne selon laquelle, si certains développements positifs ont été enregistrés, des préoccupations subsistent en ce qui concerne la situation des droits de la personne et le non-respect de la convention no 29. Les améliorations du cadre légal doivent s’accompagner de réels efforts sur le terrain, et le BIT devrait bénéficier d’un accès illimité pour effectuer des vérifications sur place. L’oratrice a appelé l’attention sur la situation dans les Etats dominés par des minorités ethniques, où les conflits armés et les tensions existantes rendent la population particulièrement vulnérable au travail forcé et au recrutement d’enfants soldats. Elle a exhorté le gouvernement à autoriser les experts internationaux à pénétrer dans ces zones afin qu’ils puissent vérifier l’application de la législation nationale et le respect des engagements internationaux du Myanmar.
Le membre travailleur du Japon s’est référé aux informations récoltées lors d’une mission d’investigation menée en février 2010 par une organisation non gouvernementale japonaise dans les camps de réfugiés le long de la frontière entre la Thaïlande et la Birmanie. Selon ces informations, tous les nouveaux réfugiés ont été victimes de travail forcé imposé par l’armée birmane. Elle a également évoqué la mort d’un enfant soldat de 15 ans à Pyontaza en mai 2010, qui a été tué pour avoir refusé de rejoindre les rangs de l’armée. Ce décès est une conséquence de la politique mise en oeuvre par l’armée, qui impose aux soldats de remplir des quotas de recrutement. La résolution adoptée en 2000 par la Conférence de l’OIT, qui recommande à tous les Etats Membres d’examiner leurs relations avec la Birmanie, n’a pas été mise en oeuvre de manière appropriée. Selon un rapport du ministère birman de la Planification nationale et du Développement économique, en mars 2010, les montants des investissements étrangers directs engagés dans le pays dépassaient les 16 milliards de dollars E.-U., ce qui représente une augmentation substantielle par rapport à l’année dernière. Cette augmentation est en grande partie due aux investissements dans les secteurs du pétrole et du gaz, et le gouvernement dépend fortement des exportations dans ces secteurs, qui représentent plus de 40 pour cent des revenus du pays: la Thaïlande, Singapour et la Chine sont les pays qui font le plus d’investissements directs en Birmanie. Ces investissements servent de soutien au gouvernement et contribuent au maintien du travail forcé. L’oratrice a exhorté les Etats Membres et les employeurs qui procèdent à des investissements en Birmanie à réexaminer leurs relations avec ce pays. Elle s’est référée aux conclusions adoptées par la Commission de proposition de la Conférence en 2006 et a demandé instamment que soit mis en place un système de rapports sur les mesures prises par les institutions internationales, les gouvernements, ainsi que les organisations d’employeurs et de travailleurs pour mettre en oeuvre la résolution adoptée en 2000 par la Conférence. Elle a également exhorté le gouvernement à libérer Aung San Suu Kyi et les autres prisonniers politiques.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a félicité le BIT, et en particulier son Chargé de liaison et son adjoint, pour l’excellent travail accompli en dépit des difficultés souvent rencontrées. Cela fait maintenant dix ans que la Conférence a adopté des mesures sans précédent en application de l’article 33 de la Constitution de l’OIT pour essayer d’assurer le respect par la Birmanie des recommandations de la commission d’enquête concernant les violations persistantes, méthodiques et grossières de la convention no 29. Rappelant les trois recommandations spécifiques et claires faites par la commission d’enquête, elle a noté, comme plusieurs orateurs avant elle, qu’un certain nombre de mesures avaient été adoptées depuis la dernière session de la Conférence. Elle a encouragé le gouvernement à poursuivre et à accroître ses efforts et lui a demandé instamment de veiller à ce que la brochure rédigée en termes simples sur le mécanisme de plaintes soit traduite dans les autres langues locales et fasse l’objet d’une large diffusion, en particulier dans les zones rurales. En dépit de ces développements positifs, des problèmes graves demeurent, comme des preuves de la persistance du travail forcé à travers le pays, la portée limitée du Protocole d’entente complémentaire, ainsi que les mesures visant à décourager les citoyens birmans de présenter des plaintes, ainsi que les mesures de représailles, y compris d’emprisonnement, à l’encontre des personnes ayant un lien avec le mécanisme de plaintes. Les textes législatifs n’ont toujours pas été amendés, et les sanctions en cas d’imposition de travail forcé restent inadéquates, en particulier dans les cas impliquant du personnel militaire. Il est profondément regrettable que les recommandations de la commission d’enquête n’aient toujours pas été mises en oeuvre et noté que bien des choses restent à faire de manière urgente. Une action soutenue à tous les niveaux est dès lors nécessaire pour éliminer le travail forcé en Birmanie. La commission d’experts a identifié les types d’actions concrètes que le gouvernement doit prendre à cette fin et le BIT souhaite et est en mesure de l’aider à atteindre les résultats requis. Il appartient au gouvernement de continuer à solliciter l’expertise et l’assistance du BIT et de prendre des mesures permettant d’augmenter les ressources en personnel afin que le Chargé de liaison du BIT puisse faire face convenablement au volume croissant des demandes. L’oratrice a exhorté le gouvernement à prendre des mesures pour permettre le recrutement de personnel, notamment en accordant sans plus tarder un visa pour un fonctionnaire international. Le bureau de liaison du BIT devrait en outre être autorisé à traiter de toutes les questions relevant du travail forcé au sens de la convention no 29. Seul un gouvernement véritablement démocratique peut effectivement garantir à ses citoyens le bénéfice des droits de la personne et des droits des travailleurs. L’oratrice a exhorté le gouvernement à libérer tous les prisonniers et détenus politiques, y compris Aung San Suu Kyi, et à entamer un dialogue véritable, ouvert et inclusif en vue d’identifier des solutions durables au problème du travail forcé en Birmanie.
Le membre gouvernemental du Japon a félicité le BIT, y compris son Chargé de liaison, pour les efforts menés en vue d’améliorer la situation au Myanmar en matière de travail forcé, et a relevé plusieurs résultats positifs. Il a particulièrement salué la volonté du gouvernement du Myanmar de coopérer avec le BIT en réponse aux allégations de travail forcé, ainsi que les efforts déployés par le gouvernement et les autorités militaires pour traiter le problème des enfants soldats. Il est cependant regrettable que des pratiques de travail forcé imposé par des militaires persistent et que des rapports continuent à faire état de cas de détention et de sanctions à l’encontre de plaignants et de facilitateurs. Le gouvernement doit accroître ses efforts, y compris au plus haut niveau, pour coopérer étroitement avec les autorités militaires afin d’assurer que la politique adoptée par le gouvernement central en vue de l’élimination du travail forcé soit effectivement mise en oeuvre, en profondeur, sur le terrain. L’orateur a exprimé l’espoir que le gouvernement du Myanmar continuera à mener des activités de sensibilisation, qui sont essentielles. Il a également exhorté le gouvernement à commencer dès que possible la distribution des brochures. Compte tenu de la charge de travail accrue sur le terrain, il a demandé au gouvernement de répondre positivement aux demandes de visa pour de nouveaux fonctionnaires internationaux. Le Japon réitère sa demande au gouvernement du Myanmar de libérer les personnes emprisonnées pour délit d’opinion, avant les élections nationales prévues cette année, et de faire en sorte que les élections se déroulent librement et de bonne foi avec la participation de toutes les parties concernées. Pour la réalisation de telles élections, il est essentiel que la liberté syndicale soit garantie. A cette fin, le gouvernement du Myanmar doit faire tout son possible, en coopération avec le BIT.
Le membre travailleur des Philippines a relevé que, dans son rapport, le Chargé de liaison avait mentionné un certain nombre de mesures positives prises par le gouvernement en ce qui concerne la mise en oeuvre du Protocole d’entente complémentaire et l’extension de sa validité, mais qu’il avait également noté qu’aucun progrès n’avait été accompli au sujet des principales recommandations de la commission d’enquête. La Commission de la Conférence discute de ce cas depuis plus d’une décennie, et il est regrettable que le gouvernement du Myanmar ne tienne toujours pas ses promesses. Le Myanmar est membre de l’ANASE, dont les principaux objectifs comprennent le renforcement de la démocratie, de la bonne gouvernance et de l’état de droit, ainsi que la promotion et la protection des droits de la personne et des libertés fondamentales. L’orateur a appuyé la déclaration du membre gouvernemental de la Thaïlande, appelant la tenue d’élections libres, justes et ouvertes à tous, tout en relevant qu’en aucun cas ces élections ne conduiront à l’éradication du travail forcé dans le pays. En conclusion, il est grand temps pour le gouvernement du Myanmar d’abroger la loi sur les villages et celle sur les villes, et d’amender la Constitution afin d’interdire toutes les formes de travail forcé, comme premier pas vers son éradication.
Le membre gouvernemental de Singapour a salué les efforts menés sans relâche par le gouvernement du Myanmar pour la mise en oeuvre de la convention no 29, en se référant plus particulièrement à la prolongation du Protocole d’entente complémentaire pour une année supplémentaire et au fonctionnement du mécanisme de plaintes. Il a également salué le rôle joué par le Chargé de liaison du BIT dans les activités de formation et de sensibilisation menées avec l’appui du gouvernement. Ces activités semblent avoir un impact sur l’application des dispositions légales interdisant le travail forcé. Il a également reconnu les efforts déployés par le Comité pour la prévention du recrutement de mineurs dans l’armée pour la formation du personnel militaire et des communautés, la démobilisation des soldats mineurs et l’organisation d’enquêtes faisant suite à des plaintes pour recrutement forcé dans l’armée. Tout ceci démontre que le gouvernement s’emploie sérieusement à mettre un terme à l’enrôlement de mineurs. C’est à présent un changement de mentalités au sein de l’armée qui apparaît nécessaire. L’amélioration des relations entre l’OIT et le gouvernement du Myanmar a permis à ce dernier de discuter de la question de la mise en place d’un cadre approprié pour la reconnaissance des principes de la liberté syndicale et du droit de négociation collective. Un projet de loi sur les syndicats sera soumis au parlement issu des prochaines élections. Enfin, l’orateur a exprimé l’espoir que le gouvernement du Myanmar facilitera le recrutement par le Bureau d’un fonctionnaire professionnel international supplémentaire afin d’aider le Chargé de liaison à assumer son immense charge de travail.
La membre travailleuse de la République de Corée a souligné que les opérations commerciales et les investissements aggravaient la situation en ce qui concerne le travail forcé et les droits de la personne en général en Birmanie. En effet, de nombreux pays continuent à commercer avec la Birmanie, ce qui contribue directement au financement du régime militaire et est contraire à la résolution adoptée en 2000 par la Conférence internationale du Travail. En outre, de nombreux projets réalisés par des sociétés étrangères impliquent l’utilisation de travail forcé, des déplacements forcés, et d’autres types de violations des droits de la personne. L’organisation dont l’oratrice est membre a appelé à maintes reprises le gouvernement de la République de Corée à cesser d’investir dans les secteurs du pétrole et du gaz en Birmanie et de commercer avec le régime militaire birman, sans succès cependant. L’oratrice a également rappelé que, pour le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, les activités extractives ont eu pour conséquence directe une augmentation des violations des droits de la personne commises par les militaires à l’encontre des gens vivant à proximité d’un projet de gazoduc, y compris l’imposition de travail forcé sous la supervision de l’armée birmane. Ce projet constitue également une source majeure de revenus pour la junte militaire et lui permet d’ignorer les pressions internationales et les demandes démocratiques du peuple birman. Les investissements dans de nouveaux projets s’intensifient, et l’oratrice a de nouveau demandé aux Etats Membres de l’OIT et aux mandants de se conformer à leurs obligations en vertu de la résolution de 2000 en vue de l’éradication du travail forcé et des violations des droits de la personne dans le pays.
La membre gouvernementale de la Nouvelle-Zélande, s’exprimant également au nom du gouvernement de l’Australie, a remercié le Chargé de liaison pour son rapport faisant état de certains développements positifs, y compris des indications selon lesquelles les autorités locales étant davantage familiarisées avec la convention no 29, le recours au travail forcé par les autorités civiles a diminué dans certaines régions. Tout en saluant l’approbation de la brochure sur le mécanisme de plaintes établi par le Protocole d’entente complémentaire, l’oratrice a estimé préoccupante la question de la volonté réelle du gouvernement du Myanmar de résoudre les problèmes persistants de travail forcé. Le Chargé de liaison a rencontré des difficultés dans ses efforts visant à obtenir des résultats positifs dans des cas de travail forcé imposé par des militaires. L’oratrice a appelé les autorités du Myanmar à agir afin de prévenir ces pratiques. Elle a estimé qu’il était important que le mandat du Chargé de liaison comprenne tous les aspects du travail forcé, et a appelé le gouvernement à accorder un visa au nouveau fonctionnaire pour montrer son engagement envers le travail du BIT. Comme de précédents orateurs, elle a exhorté les autorités du Myanmar à saisir l’occasion des élections à venir pour faire avancer le pays vers la démocratie. Enfin, elle a appelé le gouvernement à libérer tous les prisonniers politiques, y compris Aug San Suu Kyi, et les personnes détenues en raison de leur implication dans le mécanisme de plaintes prévu par le Protocole d’entente complémentaire.
Un observateur représentant la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), s’exprimant au nom de la CSI, a observé que, bien que les informations fournies dans le rapport du Chargé de liaison tendent à indiquer que le mécanisme du BIT fonctionne, les violations qui continuent de se produire sont des indicateurs du fait que le travail forcé et l’enrôlement forcé d’enfants soldats perdurent en Birmanie, et ce en violation de la convention no 29.
Le 20 mai 2010, la Voix démocratique de Birmanie a indiqué que moins de dix jours auparavant un enfant avait été tué pour avoir refusé de joindre l’armée. Tin Min Naing, âgé de 15 ans, fils de U Htay Win du village de San Phae, de l’unité de guerre Yone-kone, de la municipalité de Nyaunglaybin, division de Pegu, a été tué par des soldats. Cet enfant cherchait avec son ami des rats pour les manger et quand ils sont arrivés à un poste de sentinelle près d’un pont, ils ont été invités à joindre l’armée. Lorsque les deux amis ont refusé, le soldat Moe Win (TA 41 842) a tiré sur Tin Min Naing et a caché le corps sous les buissons dans le ruisseau. Il a été signalé que le poste ce jour-là était occupé par le caporal Kyaw Moe Khaing, les soldats Moe Win (TA 41 842) et San Ko Ko du 2e régiment, Division 586, de l’Infanterie légère. La famille a soumis le cas de meurtre au poste de police de Pyuntaza et le commandant de la police de la municipalité de Nyaunglaybin est immédiatement allé inspecter le poste de garde. En mars 2010, la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK) a signalé au bureau de liaison à Rangoon que du travail forcé était imposé dans l’Etat de Karen. Il a été entendu que le bureau de liaison commencerait à planifier une évaluation et une mission de sensibilisation aurait lieu dans cette zone.
Ces deux cas, l’un concernant le recrutement des enfants soldats et l’autre concernant le travail forcé impliquant de 1 à 200 personnes à la fois, se sont produits dans la région Taungoo de la division de Bago, alors que cette division est l’un des endroits où un séminaire de sensibilisation a été mené conjointement par le BIT et le ministère du Travail pour le personnel des autorités locales et des représentants des unités militaires, selon le rapport du Chargé de liaison. Les événements postérieurs à ce séminaire montrent que les stagiaires au niveau de l’autorité locale de Bago, lesquels devaient être personnellement en charge des troupes dans cette région, n’ont pas réussi à mettre en oeuvre ce qui avait été discuté lors des séminaires ou n’ont pas eu le pouvoir pour le faire. Cela pourrait vouloir dire que le Protocole d’entente complémentaire ne fonctionne pas efficacement dans la division de Bago et qu’il n’y a pas d’instruction au niveau politique visant à mettre en oeuvre ce qui a été discuté lors du séminaire. Cela signifie également qu’il n’y a pas de mécanisme de contrôle en place pour sanctionner les responsables.
Le 11 mars 2010, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en Birmanie a recommandé que les Nations Unies envisagent d’établir une commission d’enquête sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par le gouvernement birman. Les rapports du Conseil des droits de l’homme et du BIT ont révélé, en premier lieu, des abus systématiques sur des êtres humains en Birmanie au profit de la junte au pouvoir et, en second lieu, un manque de volonté politique pour changer le système.
Le gouvernement a indiqué qu’il y aurait bientôt une élection et que la situation changerait après cette élection. Toutefois, cette junte est celle qui a refusé d’honorer le résultat des élections qui se sont tenues en 1990. Ayant perdu la foi en la junte et les élections qu’elle organise, le peuple de la Birmanie, à moins qu’il n’y soit contraint, ne votera pas lors de cette élection. La Ligue nationale pour la démocratie qui a gagné l’élection de 1990 n’a pas participé à l’élection de 2010, qui était une farce. Le prochain gouvernement sera composé de la junte, sans les uniformes militaires. Cette élection et la nouvelle Constitution, qui autorise le travail forcé en vertu de son article 359, constituent encore un obstacle auquel l’OIT sera confrontée dans sa mission visant à éradiquer le travail forcé en Birmanie. Les violations de la convention no 29 continueront encore sous prétexte qu’il faut du temps au nouveau gouvernement pour s’installer. Il est clair que, pour un certain nombre de raisons, la junte elle-même et les délégations participant à la Conférence internationale du Travail, qui ont promis à l’OIT d’éradiquer le travail forcé sont incapables de tenir leur promesse. Puisque la junte est incapable de protéger son propre peuple, après plus d’une décennie à demander l’impossible et à perdre des ressources limitées, il est temps, au nom du peuple qui souffre, de veiller à ce que l’OIT réoriente son approche constructive et mette l’accent sur les responsabilités et la protection.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a déclaré que son gouvernement, convaincu de la nécessité d’éradiquer le travail forcé dans le monde, se félicitait de la prorogation pour douze mois de la période d’essai du Protocole d’entente complémentaire suite à la mission de haut niveau du BIT au Myanmar en janvier 2010. Le gouvernement de la Fédération de Russie félicite sincèrement le Chargé de liaison pour ses efforts constants et son dévouement en vue de faire appliquer ce Protocole. Grâce à ces efforts, plus d’une centaine de plaintes concernant des allégations de travail forcé ont été examinées par les organes compétents, notamment le ministère de la Défense et, dans plusieurs cas, des mesures efficaces ont été adoptées.
L’orateur a noté avec satisfaction que des séminaires et des visites conjoints ont lieu dans des régions reculées du pays, que le texte du Protocole d’entente complémentaire traduit dans la langue locale est diffusé, que des journaux importants font paraître des articles qui décrivent le mécanisme de plaintes et l’accord conclu avec les autorités concernant la publication d’une brochure spéciale sur le sujet. Toutefois, il est évident que le gouvernement doit prendre des mesures supplémentaires pour éradiquer le travail forcé, notamment au niveau local. La prolongation et le renforcement de la coopération constructive entre le BIT et le gouvernement constituent le dispositif le plus efficace pour aller de l’avant en vue de résoudre au plus vite le problème du travail forcé au Myanmar et d’appliquer la convention no 29.
Le membre travailleur de l’Italie a indiqué que l’initiative de recruter une nouvelle personne au bureau de liaison grâce à un financement du gouvernement allemand constitue une évolution positive, même si d’autres mesures demeurent nécessaires telles que l’ouverture de bureaux dans d’autres régions du pays. Toutefois, même si les fonds nécessaires existent et que le gouvernement a donné son accord pour éradiquer le travail forcé et s’est engagé à le faire, il continue à entraver tout progrès en vue de la nomination du nouveau responsable sous prétexte de la délivrance d’un visa. Les investisseurs n’ont jamais de problèmes de visas, mais les excuses données aux délégués à la Conférence année après année pour justifier le non-respect des engagements du gouvernement sont insultantes et évasives. Il ne s’agit là que d’un exemple des tactiques dilatoires du régime alors que les autorités ont promis à plusieurs reprises de faire preuve de coopération.
Même si elle représente un progrès, la brochure sur l’éradication du travail forcé n’a été publiée qu’en birman et non dans les langues des ethnies, comme l’a recommandé la commission d’experts, puisque le travail forcé existe principalement dans des régions où la majorité de la population lit et écrit dans une langue ethnique. Afin d’informer et d’aider les principales victimes des pratiques de travail forcé, les brochures d’information doivent être traduites dans les principales langues ethniques et comporter des illustrations pour les personnes qui ne savent pas lire, car ce sont les plus vulnérables à l’exploitation. Il serait intéressant de savoir quelles mesures seront prises pour que ces brochures soient diffusées le plus largement possible. Les tactiques dilatoires des autorités, y compris les retards pour la délivrance de visas, ne devraient plus être considérées comme des excuses légitimes expliquant la lenteur des progrès. Les délais accordés ont été largement suffisants. L’OIT et ses mandants devraient évaluer les intentions des autorités. En outre, la capacité du BIT à examiner la question du travail forcé et à contrôler ce phénomène devrait être renforcée.
Le membre gouvernemental de l’Inde a fait part de la satisfaction de son gouvernement pour les progrès qui ont été réalisés par le gouvernement du Myanmar en ce qui concerne le respect de la convention no 29, ainsi que pour la coopération entretenue entre le gouvernement et l’OIT sur la question. Parmi les progrès encourageants qui ont été accomplis récemment, les plus importants sont la prorogation du Protocole d’entente complémentaire pour une nouvelle période de douze mois et le dialogue constructif que la délégation du BIT qui s’est rendue au Myanmar en janvier 2010 a pu avoir avec le gouvernement. Ces progrès pourraient représenter une base solide permettant de renforcer encore la coopération en cours et de favoriser la mise en oeuvre des dispositions de la convention. Les ateliers de sensibilisation organisés conjointement par le bureau de liaison et le Département du travail, de même que la publication par le gouvernement du Protocole d’entente complémentaire et d’une brochure sur le travail forcé et la législation pertinente pourraient jouer un rôle important dans la limitation de la pratique du travail forcé. Enfin, les mécanismes ayant fait l’objet d’un accord mutuel, y compris le mécanisme relatif aux plaintes, fonctionnent convenablement.
Les débats au sein de cette commission devraient se dérouler de façon équitable et transparente et être axés sur les questions se rapportant au respect de la convention no 29. L’introduction de questions autres ou la politisation inutile des débats écarterait l’attention de la commission du problème de fond auquel elle doit faire face. L’Inde a continuellement encouragé le dialogue et la coopération entre l’OIT et les Etats Membres en vue de résoudre l’ensemble des problèmes en suspens. Elle a toujours été et elle continue à être fermement opposée à la pratique du travail forcé, laquelle est expressément interdite par sa Constitution. Pour conclure, l’orateur a félicité le Directeur général du BIT et son équipe pour les efforts qu’ils ont déployés afin d’aider le Myanmar à lutter contre le problème du travail forcé.
La membre travailleuse de la France a souhaité s’attarder sur une autre disposition de la législation nationale dont la modification est indispensable, à savoir l’article 359 de la Constitution. En effet, cet article prévoit un certain nombre d’exceptions à l’interdiction du travail forcé qui, de par leur rédaction, rendent sans effet ladite interdiction. En permettant «les travaux imposés par l’Etat dans l’intérêt du peuple» cette disposition réactive au niveau constitutionnel les lois sur les villes et les villages. L’oratrice a souligné que si la Constitution a été approuvée par plus de 92 pour cent des électeurs ayant participé au référendum, les conditions dans lesquelles le referendum s’est réalisé sont très controversées. Le recours général au travail forcé ne peut être isolé de la situation générale des droits de l’homme dans le pays, qui se caractérise par des violations systématiques des droits et libertés. Le travail forcé ne pourra donc être éradiqué que par l’avènement de la démocratie, et les élections législatives qui doivent avoir lieu prochainement serviront de test à cet égard. Or une série de lois électorales restrictives ont déjà été adoptées qui ne permettent pas à l’opposition de participer librement à ce processus. Il s’agit d’un moment crucial pour le Myanmar, qui ne doit pas être utilisé par les autorités comme une excuse pour maintenir une situation intolérable mais au contraire permettre de prouver la volonté politique d’éradiquer le travail forcé. La communauté internationale se doit de rester particulièrement attentive aux évolutions futures.
Le membre gouvernemental de la Chine a déclaré que, depuis la précédente session de cette commission de la Conférence, le gouvernement du Myanmar et l’OIT ont coopéré efficacement pour éliminer le travail forcé et certains progrès ont pu être constatés. Il s’est notamment référé au prolongement de la période d’essai du Protocole d’entente complémentaire, au traitement efficace des plaintes, à la publication d’une brochure sur l’élimination du travail forcé et la législation pertinente ainsi qu’à la diffusion dans la presse d’articles sur le même thème. Le gouvernement de la Chine continue à considérer que le travail forcé constitue une atteinte fondamentale aux droits de l’homme et il y a lieu d’espérer que le BIT pourra continuer à apporter son appui technique au Myanmar, notamment sous la forme de projets de coopération destinés à créer des emplois dans le pays et ainsi améliorer la qualité de la vie des citoyens. L’orateur a exprimé l’espoir que de nouveaux progrès pourraient être constatés à l’avenir en vue de l’élimination du travail forcé au Myanmar.
Le membre travailleur du Zimbabwe a comparé l’angoisse des travailleurs de la Birmanie à la situation vécue par les travailleurs de son pays, comme en attestent les deux commissions d’enquête qui se sont rendues dans ces pays. Il a expliqué que le travail forcé qui est imposé dans sa région résulte d’habitudes ancrées ou de situations de guerre ou de rébellion; il est en majorité imposé par des personnes privées et n’est pas pratiqué à une large échelle. En Birmanie, par contre, le travail forcé est systématique, largement répandu et mis en oeuvre et promu à tous les niveaux de l’Etat par les autorités militaires et civiles. Le travail forcé en Birmanie prend différentes formes: l’obligation des villageois, y compris les enfants, de cultiver les champs, de construire des routes et des ponts, de construire et entretenir des camps militaires, de construire des barrières de sécurité et de porter les équipements des militaires; le déplacement forcé des villageois de leurs terres vers des zones où sont construites et opèrent des infrastructures pétrolières et gazières; l’obligation des prisonniers de travailler, les fers aux pieds, sans salaires, sans accès aux soins médicaux ni aux biens de premières nécessité; le recrutement forcé d’enfants soldats dans le cadre de la pratique barbare consistant à les utiliser pour détecter les mines; l’obligation des citoyens de construire et d’entretenir des sites et infrastructures touristiques dans les grandes villes comme Mandalay et Rangoon pour enrichir les hauts responsables militaires alors que les soldats connaissent les pires difficultés économiques. Les militaires forcent les civils à travailler en recourant à l’intimidation, aux enlèvements, à la menace d’arrestation ou aux sévices corporels. Ces traitements dégradants, inhumains et harassants conduisent aussi les citoyens à perdre leurs salaires et leurs terres, et beaucoup souffrent de maladies, malnutrition ou d’épuisement sans bénéficier de soins médicaux. Les nombreuses preuves communiquées par la CSI au Bureau attestent de toutes ces violations, notamment les copies des 100 ordonnances adressées par le gouvernement aux chefs de village afin qu’ils rassemblent les travailleurs des communautés locales pour leur imposer du travail forcé. Comme la commission d’experts l’a conclu, ceci montre de manière irréfutable que le travail forcé continue d’être imposé de manière systématique, et le gouvernement birman n’a même pas pris la peine de répondre à cette communication. Il est grand temps que le gouvernement prenne réellement l’engagement de mettre fin à l’usage systématique et infâme du travail forcé et commence à mettre en oeuvre les recommandations des organes de contrôle de l’OIT. Une première mesure urgente serait de garantir par la législation l’interdiction du travail forcé.
Le membre gouvernemental de Cuba a déclaré que le rapport du Chargé de liaison met à jour les activités menées avec le gouvernement du Myanmar et reflète les progrès réalisés en vue de l’élimination du travail forcé dans ce pays ainsi que les difficultés qui persistent encore. Notant la déclaration du gouvernement qui présente un panorama des efforts réalisés pour éradiquer le travail forcé, l’orateur a considéré qu’il convient de reconnaître que les résultats obtenus jusqu’à maintenant sont le fruit de la coopération technique et du dialogue bilatéral entre le gouvernement et le BIT. Pour cette raison, il y a lieu de poursuivre la coopération technique, le dialogue ouvert et inconditionnel ainsi que l’analyse des conditions et de la conjoncture nationales. Ils constituent l’unique voie pour contribuer à la réalisation des objectifs établis dans la convention no 29.
Le membre travailleur du Pakistan a déclaré qu’il est particulièrement triste et décourageant de constater qu’au XXIe siècle, connu comme étant celui de la raison, du développement technologique et de la justice sociale, et après dix années de discussion de ce cas, les militaires ont toujours recours au travail forcé en Birmanie, ce qui constitue un crime contre l’humanité. Il n’est démontré nulle part que des sanctions ont été infligées aux auteurs du crime de travail forcé ou que ces derniers ont été présentés à la justice. Le paragraphe 8 du rapport du Chargé de liaison fait référence à la difficulté d’obtenir des preuves du recrutement de mineurs et aux difficultés auxquelles les familles sont confrontées lorsqu’elles retirent leurs enfants des régiments moyennant des dépenses exorbitantes qui les conduisent à vendre à l’avance leurs récoltes, à emprunter de l’argent ou à vendre leurs biens. Afin de répondre à l’augmentation de la charge de travail à laquelle il est confronté, les moyens mis à la disposition du Chargé de liaison doivent être renforcés. Toutefois, bien que le gouvernement allemand ait mis des fonds à disposition, le gouvernement n’a pas délivré de visa pour un fonctionnaire supplémentaire. Les personnes qui aident les victimes subissent des représailles. Le paragraphe 16 du rapport du Chargé de liaison précise que deux avocats qui avaient apporté leur soutien aux procédures du Protocole d’entente complémentaire ont perdu le droit d’exercer leur profession après être sortis de prison. Dans ces circonstances, l’orateur s’est rallié aux membres qui ont demandé à la communauté internationale de prendre de nouvelles mesures et le renforcement du bureau de liaison afin que des enquêtes de plus grande ampleur puissent être menées et que des sanctions appropriées soient infligées à l’encontre des auteurs du crime de travail forcé.
La membre gouvernementale du Canada a félicité le Chargé de liaison et son adjoint pour leur diligence continue et leur travail admirable. Chaque année, la commission est confrontée aux accomplissements modestes du gouvernement du Myanmar en vue du respect de ses engagements en ce qui concerne la question du travail forcé, y compris le recrutement de soldats mineurs. Malgré la signature d’un accord il y a huit ans et du Protocole d’entente complémentaire il y a trois ans, le rythme des progrès est désespérément lent. Même si certaines mesures positives, relevées dans le rapport du Chargé de liaison, doivent être saluées et encouragées, elles sont infimes et ne reflètent pas un engagement ferme du régime à éliminer le travail forcé. Des progrès plus importants doivent être réalisés de manière urgente.
Il subsiste des domaines où l’échec du gouvernement à respecter ses engagements est absolument inacceptable et doit être noté avec la plus grande préoccupation, notamment les allégations persistantes de harcèlement à l’égard des plaignants, des facilitateurs et de leurs conseillers juridiques, ainsi que le refus de recevoir des plaintes concernant la traite des personnes à des fins de travail forcé. Il convient de condamner les représailles contre les plaignants, en particulier l’emprisonnement, et de prier le gouvernement de respecter son engagement à combattre le travail forcé sous toutes ses formes et de fournir un appui pour la mise en oeuvre du mandat du Chargé de liaison du BIT. L’oratrice s’est également ralliée aux déclarations estimant que le rapport du Chargé de liaison relève entièrement du mandat de ce dernier. Enfin, l’oratrice a instamment prié le gouvernement du Myanmar d’accélérer la demande d’aide supplémentaire pour gérer la charge considérable de cas et répondre aux demandes, telles que la formation et la sensibilisation, de façon urgente. Il est regrettable et décourageant de constater que le gouvernement doit être invité à nouveau à émettre immédiatement le visa pour un membre du personnel supplémentaire, et une mise à jour sur l’état de cette question serait la bienvenue.
En conclusion, le gouvernement du Myanmar doit être instamment prié de prendre des mesures proactives et substantielles pour assurer le respect de la convention no 29 dans tout le pays, y compris par l’imposition de peines plus significatives aux personnes qui imposent du travail forcé. L’oratrice a également demandé aux autorités de libérer tous les prisonniers et détenus politiques, notamment Aung San Suu Kyi.
Le représentant gouvernemental a remercié les orateurs dont les interventions étaient faites de manière objective et a pris note de leurs observations. Certaines interventions reposent sur des informations sans fondement et ont des motifs politiques. En outre, certaines observations sont sans rapport avec les activités de l’OIT. Certains orateurs parlent du pays en n’utilisant pas son nom correct. Les communications officielles des Nations Unies et de leurs institutions utilisent le nom correct du pays – le Myanmar – lequel a été reconnu dans l’ensemble du système des Nations Unies. Les interventions doivent refléter l’importance et le sérieux des activités menées à l’OIT. L’emploi de termes inadéquats n’a aucun sens et relève de la malveillance. Il s’agit d’un manque de respect. A cet égard, un code de conduite devrait être appliqué pendant les délibérations.
Certaines observations n’ont pas de rapport avec les activités de l’OIT. Le gouvernement du Myanmar rejette tout commentaire et critique sans fondement concernant le processus politique du pays. Le destin du Myanmar doit être décidé par son peuple. Le processus de démocratisation suit son cours et des élections démocratiques auront lieu cette année; il s’agit de la cinquième étape de la feuille de route pour la démocratie. Les lois nécessaires à la tenue d’élections générales multipartites ont déjà été promulguées. Plus de 20 partis politiques ont été inscrits à ce jour en vue des élections. La Constitution, approuvée par 92,48 pour cent des électeurs du Myanmar, sera le point de départ de la société démocratique à venir. Cela reflète clairement la volonté politique du peuple.
La modification de la loi sur les villages et de la loi sur les villes a été expliquée à plusieurs reprises lors de précédentes sessions de la CIT. Dans le cadre du système juridique du Myanmar, les arrêtés de l’autorité législative ont force de loi. C’est le cas de l’arrêté 1/99 et de l’arrêté qui le complète. En conséquence, dans le système juridique du Myanmar, les dispositions incriminées des deux lois ont été mises en sommeil, voire même annulées, comme l’a reconnu la commission d’experts par le passé. A la plénière de la 98e session de la Conférence internationale du Travail (2009), le représentant gouvernemental du Myanmar avait indiqué que ces conclusions étaient dues à un malentendu concernant les faits. Il a réexaminé cette question avec le Bureau et a donné des explications aux fonctionnaires concernés.
L’orateur a conclu en ajoutant que le représentant de la FTUB et ses amis étaient responsables de la mise en danger et de l’atteinte à la sécurité du peuple du Myanmar. Le gouvernement avait des preuves concrètes indiquant qu’ils complotaient, et qu’ils finançaient et menaient diverses activités, y compris des attentats à la bombe dans le pays se soldant par des morts et de nombreux blessés. De tels terroristes n’ont pas leur place dans les activités de l’OIT.
Les membres employeurs ont constaté que le gouvernement du Myanmar n’avait pas l’air de réaliser qu’il demeurait loin d’avoir aboli le travail forcé. Le gouvernement ne devrait pas avoir la fausse impression que la procédure du Protocole d’entente complémentaire est en soi suffisante. Elle constitue au mieux une étape interne qui ne doit pas absoudre le gouvernement de son obligation de mettre pleinement en oeuvre des politiques et pratiques visant à abolir le travail forcé.
Les membres travailleurs ont conclu en demandant la libération immédiate de tous les militants syndicaux et des prisonniers politiques qui ont exercé leur liberté d’expression et luttent contre le travail forcé; l’arrêt immédiat du harcèlement et de la détention des personnes qui soumettent des plaintes pour travail forcé; et la fin de l’impunité dont jouissent les personnes qui imposent du travail forcé. Ils ont rappelé qu’il était primordial de mettre en oeuvre les recommandations de la commission d’enquête et de réviser les dispositions de la Constitution relatives au travail forcé. De même, les décisions prises dans le passé doivent être appliquées, à savoir: le réexamen de l’application de la résolution de la Conférence de 2000; la demande faite aux institutions internationales, aux gouvernements et aux organisations des employeurs et des travailleurs de faire rapport sur les démarches entreprises dans le cadre de cette résolution; l’organisation d’une conférence sur les meilleures pratiques visant à mettre en oeuvre cette résolution; et la mise en oeuvre d’autres dispositifs dans l’arsenal pénal international en vue de sanctionner ceux qui imposent du travail forcé. A cette fin, les membres travailleurs ont demandé au Chargé de liaison de se concentrer sur la mise en oeuvre des recommandations de la commission d’enquête et le renforcement des moyens de l’OIT: augmentation du nombre de bureaux et établissement d’un réseau de facilitateurs dans le pays. Finalement, les membres travailleurs ont condamné et rejeté les déclarations du représentant gouvernemental au sujet du représentant de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB).
La commission a pris note des observations de la commission d’experts ainsi que du rapport du Chargé de liaison de l’OIT à Yangoon qui relatent les plus récents développements concernant la mise en oeuvre du mécanisme de plaintes relatif au travail forcé établi le 26 février 2007, dont la période d’essai a été prorogée le 19 janvier 2010, pour une nouvelle période de douze mois, soit jusqu’au 25 février 2011.
Elle a également noté des discussions et les décisions du Conseil d’administration de novembre 2009 et mars 2010. La commission a de plus pris bonne note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.
La commission a noté certaines mesures limitées qui ont été prises par le gouvernement du Myanmar. Elle a noté la prorogation du Protocole d’entente complémentaire pour une nouvelle période d’un an, l’entente concernant la publication et la distribution d’une brochure d’information sur le travail forcé; certaines activités visant à accroître la sensibilisation au mécanisme de plaintes établi par le Protocole d’entente complémentaire, y compris des articles de journaux dans la langue nationale; et certaines améliorations de la situation concernant le recrutement de mineurs par les militaires. La commission a considéré que ces mesures demeurent tout à fait insuffisantes.
La commission a noté que, en dépit de ces séances spéciales, aucune des trois recommandations spécifiques et claires de la commission d’enquête n’a été mise en oeuvre. Ces recommandations exigent du gouvernement qu’il: 1) mette les textes législatifs en conformité avec la convention no 29; 2) veille à ce que la pratique du travail forcé ne soit plus imposée par les autorités; et 3) applique strictement les sanctions pénales pour l’imposition du travail forcé.
La commission a également noté que le mécanisme de plaintes ne couvre qu’une partie du pays, et que son fonctionnement ne permet pas de déterminer s’il y a eu une diminution significative du recours au travail forcé.
La commission a souligné l’importance des conclusions auxquelles elle est parvenue dans le cadre des séances spéciales qu’elle a tenues lors des 97e et 98e sessions de la Conférence (qui ont eu lieu, respectivement, en juin 2008 et en juin 2009). Elle a à nouveau souligné la nécessité pour le gouvernement du Myanmar de s’engager de manière résolue dans la mise en oeuvre pleine et entière des recommandations de la commission d’enquête établie par le Conseil d’administration en mars 1997, en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. Elle a également rappelé que les décisions prises par la Conférence en 2000 et en 2006 en ce qui concerne l’application par le Myanmar de la convention no 29 sont toujours d’actualité, et ce en tous leurs éléments constitutifs.
La commission a pleinement appuyé toutes les observations de la commission d’experts ainsi que les décisions susmentionnées du Conseil d’administration et elle a exprimé le ferme espoir que le gouvernement du Myanmar s’engage de toute urgence dans la mise en oeuvre de toutes les mesures demandées, à tous les niveaux et par l’ensemble des autorités civiles et militaires.
La commission a demandé instamment au gouvernement de mettre en oeuvre, pleinement et sans délai, les recommandations de la commission d’enquête et les observations de la commission d’experts et, en particulier:
1) qu’il prenne sans plus attendre les mesures nécessaires pour rendre les textes législatifs en cause, notamment la loi sur les villes et la loi sur les villages, pleinement conformes à la convention no 29;
2) qu’il veille à ce que la législation prévue au titre du paragraphe 15, chapitre VIII, de la nouvelle Constitution soit rédigée, adoptée et appliquée en pleine conformité avec la convention no 29;
3) qu’il s’assure de l’élimination totale de toute la série de pratiques de travail forcé encore très répandues et généralisées, y compris le recrutement d’enfants dans les forces armées et la traite des personnes aux fins de travail forcé;
4) qu’il assure que ceux, civils ou militaires, qui recourent au travail forcé soient poursuivis et sanctionnés conformément au Code pénal;
5) qu’il veille à ce que le gouvernement prévoie les affectations budgétaires nécessaires pour que les travailleurs bénéficient de contrats de travail et soient correctement rémunérés;
6) qu’il élimine les problèmes que les victimes de travail forcé ou leur famille rencontrent pour déposer une plainte et qu’il cesse immédiatement tout harcèlement, toute mesure de représailles et tout emprisonnement à l’encontre de personnes qui recourent au mécanisme de plaintes, y sont associées ou en facilitent l’usage;
7) qu’il libère immédiatement les plaignants et les autres personnes associées à l’utilisation du mécanisme de plaintes qui sont actuellement détenues;
8) qu’il facilite la production et la large diffusion de la brochure dans les langues ethniques;
9) qu’il intensifie les activités de sensibilisation dans tout le pays, y compris la formation du personnel militaire pour mettre fin au recrutement des mineurs; et
10) qu’il poursuive activement les démarches en vue de conclure un plan d’action conjoint avec le Groupe de travail chargé de la surveillance et de la communication d’informations sur les enfants et les conflits armés de l’équipe de pays, dont l’OIT est membre, afin de traiter, entre autres, du problème de recrutement de mineurs.
La commission a appelé au renforcement de la capacité du Chargé de liaison du BIT pour aider le gouvernement à mettre en oeuvre toutes les recommandations de la commission d’enquête et à garantir l’efficacité du fonctionnement du mécanisme de plaintes, en particulier en ce qui concerne la délivrance urgente d’un visa d’entrée pour un autre professionnel international en priorité et sans délai.
La commission a expressément demandé au gouvernement du Myanmar de saisir toutes les occasions, notamment par l’utilisation continue de tous les forums disponibles, pour sensibiliser davantage la population (les autorités civiles et militaires ainsi que le grand public) à la loi contre l’utilisation du travail forcé, à ses droits et responsabilités en vertu de cette loi et à la disponibilité du mécanisme de plaintes comme un moyen d’exercer ces droits. Une déclaration officielle au plus haut niveau serait une mesure importante à cet égard.
La commission a regretté avec une profonde préoccupation la poursuite des violations des droits au Myanmar, y compris la détention de Daw Aung San Suu Kyi. La commission a demandé instamment sa libération immédiate ainsi que celle des autres prisonniers politiques et militants syndicaux.
La commission a demandé au gouvernement d’enquêter, sans plus tarder, sur les allégations concernant les ordonnances de travail forcé et les autres documents similaires qui ont été soumis à la commission d’experts et a encouragé le gouvernement à communiquer à la commission d’experts, pour sa prochaine session, les résultats de ses investigations et les mesures concrètes prises en conséquence. La commission a exprimé le ferme espoir d’être en mesure de prendre note de progrès significatifs à la prochaine session de la Conférence.
C. Rapport du Chargé de liaison à la séance spéciale de la Commission de l’application des normes sur l’application par le Myanmar de la convention no 29 et registre des cas au 17 mai 2010
D. Conclusions adoptées par la Commission de l’application des normes lors de sa séance spéciale pour l’examen des faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (Conférence internationale du Travail, 98e session, juin 2009)
E. Document soumis au Conseil d’administration à sa 306e session (novembre 2009) et conclusions du Conseil d’administration
F. Document soumis au Conseil d’administration à sa 307e session (mars 2010) et conclusions du Conseil d’administration
A. Comptes rendus de la discussioin de la Commission de l'application des normes
Un représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré que sa délégation était heureuse de se joindre à la commémoration du 90e anniversaire de l’Organisation internationale du Travail dont le thème est «90 ans de travail en faveur de la justice sociale». Il a félicité le Directeur général du BIT pour son efficacité et sa bonne direction de l’Organisation internationale du Travail dans ces temps difficiles et pour le travail considérable que l’Organisation mène afin de répondre aux besoins de la crise financière et économique mondiale.
Il a fait remarquer que la 304e session du Conseil d’administration avait bien accueilli la prolongation du Protocole d’entente complémentaire pour une durée d’essai d’un an, comme cela a été indiqué dans le rapport du Chargé de liaison du BIT. Il a noté que le Directeur général, dans son rapport global de 2009 sur le coût de la coercition, a apprécié de façon «positive» la réponse donnée par le gouvernement du Myanmar concernant le mécanisme des plaintes. En réponse aux demandes exprimées par la 97e session de la Conférence internationale du Travail et la 303e session du Conseil d’administration, au sujet d’une déclaration du plus haut niveau du gouvernement sur le travail forcé, il a répété que la déclaration faite par le ministre du Travail suite à la prolongation du Protocole d’entente complémentaire constituait la plus haute déclaration du gouvernement sur le travail forcé. Il a ajouté que les dispositions de la Constitution ont clairement montré le haut niveau d’engagement pour ce qui est de l’éradication du travail forcé.
De plus, le représentant du Myanmar a informé la commission, en réponse aux demandes faites lors de la 97e session de la Conférence internationale du Travail et lors de la 303e session du Conseil d’administration, que le texte du Protocole d’entente complémentaire a été traduit en langue birmane. Il a annoncé que 10 000 exemplaires de la brochure avaient été distribués aux autorités civiles et militaires à travers tout le pays, aux organisations des Nations Unies (UN), aux organisations non gouvernementales (ONG), aux organisations intergouvernementales, aux partis politiques et au grand public. Un total de 20 000 exemplaires additionnels de la brochure ont été publiés pour distribution dans tout le pays.
En ce qui concerne les plaintes reçues par le Chargé de liaison du BIT, le représentant a déclaré que, sur les 87 affaires transférées au groupe de travail sur le travail forcé, 12 ont déjà reçu une réponse après l’enquête nécessaire conduite par les autorités; 64 affaires ont été classées sans suite. Seulement 11 font toujours l’objet d’une instruction menée en collaboration avec les départements concernés et seront conclues dans un futur proche. Il a ajouté que le ministère du Travail a coopéré avec le Chargé de liaison du BIT en prenant des dispositions pour les visites sur le terrain conformément au Protocole d’entente complémentaire. Le Chargé de liaison a pu voyager à travers le pays et a de ce fait pu observer la situation sur le terrain. Une mission conjointe a été faite par le ministre du Travail et le Chargé de liaison du BIT à Hpan-an, canton de l’Etat de Karen, le 27 avril 2009, et à Lashio, canton de l’Etat nord de Stan, le 7 mai 2009. Ces deux missions ont prouvé la bonne volonté du gouvernement de mettre en application le Protocole d’entente complémentaire. Pendant ces deux missions, des ateliers communs de sensibilisation sur l’éradication du recours au travail force se sont tenus. Le directeur général du Département du travail ainsi que le Chargé de liaison du BIT ont tenu une conférence sur la mise en application de la convention no 29 aux membres du district et le Conseil pour la paix et le développement au niveau des districts et cantons, aux fonctionnaires du Département des prisons, aux représentants des forces de police du Myanmar et du Département de l’immigration, aux fonctionnaires et employés du ministère de la Défense, ainsi qu’à neuf représentants de groupes «ethniques» ayant par ailleurs réintégré la légalité. En outre, le Chargé de liaison a également tenu une conférence le 2 avril 2009 sur le droit national et international et le travail forcé lors de la formation annuelle des juges adjoints des cantons.
Le représentant a souligné que le projet d’emploi à forte intensité de main d’œuvre, lancé par l’OIT dans les régions du Delta affectées par le cyclone, constitue une autre bonne illustration de la coopération entre le gouvernement et l’OIT. L’objectif du projet était de fournir temporairement un emploi décent aux victimes les plus nécessiteuses du cyclone en comptant aussi sur les interventions d’autres organisations internationales telles que l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture et le Programme des Nations Unies pour le développement. Le projet, qui inclut le développement de 60 villages dans la commune de Mawlayine Gyun Township, a été créé par le Département pour le développement international (DPID) du Royaume-Uni. La première phase du projet pilote comprenait la construction de près de 7 km de routes vicinales et de pistes entre les villages, de deux jetées, cinq petits ponts. Dans dix villages, 40 sanitaires ont fini d’être installés le 15 mars 2009. Tout ceci a permis la création d’emplois pour 7 802 travailleurs, dont 1 437 travailleurs qualifiés et 6 365 ouvriers. La deuxième phase du plan de travail du projet, qui couvre le développement de 20 villages et 12 routes/pistes, a débuté en février 2009 et comprend la construction de 50 ponts, 23 jetées, des sentiers bétonnés. En tout, 5 849 travailleurs qualifiés et 65 979 ouvriers ont été impliqués dans la deuxième phase du projet. Au total, 71 828 emplois ont été créés pour la population locale. Le représentant du Myanmar a en conséquence souhaité se saisir de cette opportunité pour renouveler ses remerciements à l’OIT pour les efforts qui ont été faits afin d’améliorer la vie de ceux qui ont été touchés par le cyclone.
En réponse au problème du recrutement en dessous de l’âge minimum mentionné au paragraphe 4 des conclusions de la 97e session de la Conférence internationale du Travail en 2008 et au paragraphe 3 des conclusions de la 303e session du Conseil d’administration en 2008, l’orateur a informé la Commission de la Conférence sur l’application des normes que le Myanmar attache une grande importance à la protection et la promotion des droits des enfants en rappelant en outre que son pays était depuis 1991 partie à la Convention relative aux droits de l’enfant. Le service militaire étant volontaire au Myanmar, un individu ne peut être enrôlé dans les forces armées avant 18 ans. Il a rappelé aussi que le gouvernement du Myanmar, dans le but de résoudre efficacement ce problème, avait institué un Haut Comité pour la prévention du recrutement militaire des mineurs, le 5 janvier 2004. Ce comité, qui a été rétabli le 14 décembre 2007, a adopté un plan d’action incluant des procédures de recrutement, des procédures de libération du service militaire, de réintégration dans la société, des mesures de sensibilisation du public, des actions punitives, des mesures de notification, de soumission aux recommandations, des mesures de consultation et coopération avec les organisations internationales. Un comité de travail a été établi en 2007 au sein du Groupe de travail sur le contrôle et le système de notification sur la prévention du recrutement des mineurs dans l’armée. Ce comité a coordonné des cours, dans le pays et dans la division de commandement, en matière de prévention du recrutement des enfants soldats. Ces cours ont été suivis par 1 308 officiers et autres gradés.
L’orateur a informé la Commission de l’application des normes de la Conférence que 83 mineurs rejetés de l’armée ont été repris en charge par leurs parents ou tuteurs. En outre, des mesures disciplinaires ont été prises à l’encontre de ceux qui ont enrôlé des mineurs dans les forces armées. Au total, 44 personnels des armées, soit dix officiers et 34 autres gradés, ont été poursuivis pour recrutement illégal. C’est dans ce contexte que le représentant du Myanmar a eu le plaisir d’annoncer à la Commission de l’application des normes qu’une cérémonie organisée par le Comité de travail pour la prévention contre le recrutement des mineurs s’est tenue le 2 juin 2009 à la station de Mingaladon. Lors de cette cérémonie, huit mineurs qui avaient volontairement rejoint les forces armées de Tatmadaw ont été remis à leurs parents.
L’orateur a conclu en disant que les développements mentionnés ci-dessus démontrent clairement la coopération sincère du gouvernement du Myanmar avec le BIT. Son gouvernement a montré sa volonté politique qui a été et sera de coopérer avec le BIT d’une façon constructive dans le but d’une éradication des pratiques du travail forcé dans le pays.
Les membres employeurs ont déclaré observer très peu de progrès en ce qui concerne les manquements persistants du Myanmar à mettre en œuvre la convention no 29. Le gouvernement continue à jouer le jeu diplomatique qui consiste à en faire juste assez pour créer une apparence de coopération, mais la commission n’est toujours pas convaincue. Malgré un apparent désir réel et durable pour mettre fin au travail forcé, il y a encore un manque fondamental de libertés civiles au Myanmar, en particulier le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de réunion et d’association, le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial et la protection de la propriété privée. En outre, il subsiste encore un climat de peur et d’intimidation des citoyens. Ce sont là les causes profondes du travail forcé, du travail des enfants, de l’existence d’enfants soldats, de la discrimination et de l’absence de la liberté d’association.
En 2008, la commission a discuté de deux événements qui ont eu un impact significatif sur le cadre de mise en œuvre dans lequel les activités de l’OIT ont été entreprises: les troubles civils et leur répression en septembre-octobre 2007 et les ravages causés par le cyclone Nargis au début du mois de mai 2008. La présente discussion a lieu dans un contexte qui a également mis en évidence le manque de libertés civiles, y compris le prétendu procès et l’assignation à domicile continue de Aung San Suu Kyi. Bien que U Thet Wai ait été relaxé d’une lourde peine de prison, U Zaw Htya, un facilitateur de plaintes en vertu du Protocole d’entente complémentaire, son avocat Phyu Ko Po, et d’autres personnes continuent à être détenus en prison. Toutes les personnes devraient avoir accès au mécanisme de plainte sans crainte de harcèlement ou de représailles.
De plus, chaque organe de l’OIT qui a examiné l’affaire a attiré l’attention sur les recommandations de la commission d’enquête. La commission d’experts, dans ses observations antérieures, a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures doivent être prises par le gouvernement afin de mettre en œuvre ces recommandations: notification d’instructions spécifiques et complètes aux autorités civiles et militaires; assurer une large diffusion de l’interdiction du travail forcé; assurer les moyens budgétaires adéquats pour le remplacement du travail forcé ou du travail non rémunéré; et assurer l’application effective de l’interdiction du travail forcé.
Les membres employeurs se sont félicités de la prorogation de la période d’essai du Protocole d’entente complémentaire. Le nombre de plaintes déposées par le biais du mécanisme mis en place a augmenté, mais des problèmes pratiques fondamentaux subsistent dans la capacité physique des victimes et de leurs familles de déposer des plaintes, ainsi que pour le Chargé de liaison et son équipe dans l’exercice de leurs fonctions. Le maintien en détention d’un certain nombre de personnes associées à l’application du mécanisme de plainte demeure un sujet gravement préoccupant. Le faible niveau de plaintes déposées par le biais du mécanisme de plainte indique que les citoyens n’y ont peut-être pas un accès adéquat ou qu’ils n’ont pas le sentiment d’avoir la liberté de déposer des plaintes. A la mi-mai 2009, 152 plaintes avaient été déposées. Cinq n’ont pas été traitées par crainte de représailles; 95 ont été soumises au gouvernement, dont seulement 23 ont donné des résultats concrets, et les 70 autres cas ont été réglés par le gouvernement, mais dans 13 d’entre eux la sanction du gouvernement a été considérée comme insuffisante ou des recommandations pour d’autres solutions ont été rejetées.
Les membres employeurs se sont félicités de l’approbation par le gouvernement de la traduction de l’accord de prorogation, la production de la brochure contenant les textes du Protocole d’entente complémentaire et les documents liés, des séminaires visant à sensibiliser les personnels civils et militaires et des missions conjointes par le ministère du Travail et le Chargé de liaison du BIT. Le travail effectué par le Chargé de liaison doit être salué, étant donné les circonstances difficiles dans le pays, notamment en ce qui a trait à la facilitation du dialogue entre le BIT et les autorités du Myanmar et au fonctionnement du mécanisme de plainte. Les séminaires de sensibilisation qui devaient avoir lieu régulièrement dans tout le pays sont de la plus haute importance.
Du point de vue des membres employeurs, le BIT a joué un rôle fructueux dans le projet de reconstruction du Delta après l’ouragan, démontrant ainsi comment de bonnes pratiques de travail et des efforts de reconstruction peuvent être réalisés sans le travail forcé. Ils ont encouragé le gouvernement à appuyer d’autres projets de reconstruction qui démontrent de bonnes pratiques de travail.
Le gouvernement du Myanmar doit faire des efforts supplémentaires dans un certain nombre de domaines. Il doit approuver une brochure sur le fonctionnement du Protocole d’entente complémentaire dans un langage accessible, sur la base d’un projet de texte du BIT. La persistance des problèmes dans la capacité des victimes de travail forcé et de leurs familles de déposer des plaintes doit être éliminée. Etant donné la taille du pays, la création d’un réseau pour faciliter les plaintes est nécessaire. Le gouvernement devrait publier une déclaration officielle au plus haut niveau confirmant sa politique pour l’élimination du travail forcé et son intention de poursuivre les auteurs. Les membres employeurs se félicitent de la déclaration du ministère du Travail mais considèrent que la déclaration au plus haut niveau par le président du Conseil d’Etat de la paix et du développement reste nécessaire. Les personnes responsables de travail forcé doivent être poursuivies en vertu du Code pénal, tel que demandé par la commission d’enquête. Depuis mars 2007, le Chargé de liaison n’a été informé d’aucune de ces poursuites.
La Constitution récemment adoptée contient des articles sur le droit à la liberté d’association, la liberté d’expression et le droit de se syndiquer. Un article interdit l’utilisation du travail forcé mais contient un certain nombre de qualifications qui soulèvent des doutes quant à sa conformité avec la convention no 29. La mise en œuvre de la Constitution doit être, dans la pratique, complètement conforme aux obligations du Myanmar en vertu de la convention no 29.
Le gouvernement est loin d’avoir appliqué les mesures recommandées par la commission d’enquête voulant, par exemple, que les textes législatifs, notamment la loi sur les villages et la loi sur les villes, doivent être mis en conformité avec la convention, que les autorités cessent d’imposer le travail forcé et que les sanctions prévues lorsque le travail est forcé ou obligatoire soient strictement appliquées. La mise en œuvre de ces recommandations serait garantie si le gouvernement prenait des mesures dans les quatre domaines identifiés par la commission d’experts; or, selon la dernière observation de la commission d’experts, les questions devant être traitées demeurent en suspens.
Les membres employeurs prient instamment le gouvernement de fournir des informations complètes et détaillées en signe de sa volonté réelle de coopérer avec la commission et les organes de contrôle. La transparence et la collaboration avec le Chargé de liaison sont essentielles. Le Protocole d’entente complémentaire et la création d’un mécanisme de plainte ne libèrent pas le gouvernement de ses obligations en vertu de la convention no 29. Le gouvernement doit apporter des améliorations concrètes dans sa législation nationale et fournir des fonds suffisants pour que le travail rémunéré puisse remplacer le travail forcé dans l’administration civile et militaire afin de démontrer sans équivoque sa volonté de lutter contre le travail forcé et de mettre fin au climat d’impunité. La situation au Myanmar persiste depuis trop longtemps, d’autant plus que le gouvernement a ratifié la convention no 29 il y a plus de cinquante ans. Le gouvernement du Myanmar doit démontrer un esprit d’humanité et mettre fin au travail forcé.
Les membres travailleurs ont regretté que la gravité et la persistance du travail forcé au Myanmar conduisent encore une fois la présente commission à tenir une séance spéciale sur cette question. Ils craignent que la commission ne soit à nouveau amenée à constater de modestes progrès mais aussi de grands pas en arrière. Ils ont rappelé qu’en 1997 une commission d’enquête a conclu sans ambiguïté que la convention no 29 faisait l’objet d’une violation généralisée et systématique en droit et dans la pratique par le gouvernement du Myanmar et a formulé trois recommandations: 1) que les textes législatifs pertinents soient mis en conformité avec la convention; 2) qu’aucun travail forcé ne soit plus imposé par les autorités dans la pratique, notamment de la part des militaires; 3) que les sanctions prévues contre les personnes ayant imposé du travail forcé soient strictement appliquées. La commission d’enquête prévoyait également quatre mesures concrètes à adopter sans délai: adresser des instructions expresses aux autorités civiles et militaires; assurer une large publicité à l’interdiction du travail forcé; inscrire dans les budgets nationaux les crédits nécessaires au remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; assurer et garantir le respect effectif de l’interdiction du travail forcé. En mars 2000, l’inaction du gouvernement a amené le Conseil d’administration du BIT à mettre en œuvre l’article 33 de la Constitution de l’OIT. Malgré cela, la commission d’experts et la Commission de la Conférence n’ont pu que constater, année après année, une persistance flagrante des violations de la convention no 29. Dix ans plus tard, il n’a toujours pas été donné suite de manière satisfaisante aux recommandations susmentionnées. En effet, dans le projet de nouvelle Constitution, la liberté d’association reste entièrement subordonnée aux lois sur la sécurité de l’Etat. En outre, l’article qui prévoit l’interdiction de «tout travail forcé» admet des exceptions en cas «d’obligations imposées par l’Etat dans l’intérêt du peuple», ce qui réduit à néant la finalité de cet article et le rend contraire à la convention no 29. Ignorant les demandes répétées du Conseil d’administration, le gouvernement n’a toujours pas proclamé officiellement sa volonté d’éliminer le travail forcé par une déclaration largement médiatisée. Les quelques cours de formation sur l’interdiction du travail forcé, dont l’organisation était prévue par les instructions adressées aux autorités civiles et militaires, n’ont visiblement pas eu de réel impact sur l’étendue du travail forcé. Le gouvernement déclare que des crédits ont été inscrits dans le budget de tous les ministères pour couvrir les coûts de main-d’œuvre, mais cette affirmation est contredite par la persistance du recours généralisé au travail forcé de la part des militaires et des administrations civiles locales.
S’agissant de la proclamation officielle de l’interdiction du travail forcé et du respect effectif de cette interdiction, les membres travailleurs ont estimé que le Protocole d’entente complémentaire de février 2007 constitue assurément un développement positif puisqu’il instaure un nouveau mécanisme d’examen des plaintes dans lequel intervient le Chargé de liaison, mais cette avancée présente des limites puisque le Chargé de liaison ne peut que recevoir des plaintes et non en soumettre lui-même. Du fait qu’il reste encore largement ignoré de la population, ce mécanisme est sous-utilisé, seules 152 plaintes ayant été reçues au 15 mai 2009. En effet, la junte a attendu deux ans avant d’approuver la traduction du Protocole d’entente, n’en a assuré la diffusion qu’à 30 000 exemplaires pour une population de 50 millions d’habitants et ne l’a toujours pas publié dans une langue comprise par la population. Dans la réalité, nombre de plaignants sont harcelés, voire emprisonnés, comme c’est actuellement le cas des anciens facilitateurs U Min Aung, Ma Su Su Sway et U Zaw Htay et de l’avocat Ko Po Phyu. De nombreuses plaintes restent en suspens et aucune sanction pénale n’a été prise depuis l’instauration de ce nouveau mécanisme. Les quelques militaires qui ont été reconnus coupables n’encourent que de légères sanctions administratives. Comme le souligne le Chargé de liaison, le faible nombre officiel de plaintes ne saurait être interprété comme un reflet de la situation réelle en matière de travail forcé. En tout état de cause, on ne saurait confondre un simple moyen – le mécanisme de plaintes – avec sa finalité – l’abolition effective du travail forcé – ni concevoir la mission du Chargé de liaison comme étant limitée à la mise en œuvre de ce mécanisme. L’objectif premier de cette mission reste d’assurer la mise en œuvre des trois recommandations de la commission d’enquête. En lui-même, ce mécanisme est révélateur de deux choses: la persistance du travail forcé et la négation de la démocratie et de la liberté d’expression. Les membres travailleurs ont rappelé à ce propos la répression impitoyable des manifestations pacifiques de septembre 2007, avec l’arrestation et l’emprisonnement de personnes ayant voulu exercer leurs droits fondamentaux d’expression et de liberté syndicale. Faisant référence aux conditions dans lesquelles s’est déroulé le référendum de 2008 sur le projet de nouvelle Constitution, ils ont rappelé que le gouvernement avait menacé d’une peine de trois ans de prison toute diffusion de tracts, tout discours ou autre forme de critique; que les moines, les nonnes, les dirigeants hindous ou chrétiens et Aung San Suu Kyi avaient été exclus du référendum, et que les militaires s’étaient vu attribuer 25 pour cent des sièges parlementaires et un droit de veto. Enfin, ils ont mentionné la nouvelle mesure de détention arbitraire et le nouveau procès dirigé à l’encontre de Aung San Suu Kyi. Tous ces faits confirment que le déficit de démocratie et le travail forcé vont de pair, et que le travail forcé ne peut être éradiqué que par le rétablissement des principes démocratiques, et notamment de la liberté syndicale.
Les membres travailleurs, estimant d’autre part que ce cas ne devait pas être examiné hors de tout contexte historique, ont souhaité rappeler les événements qui ont eu lieu depuis la dernière session de cette Commission de la Conférence. Peu après la session spéciale de juin 2008, un juge de la Cour suprême du Myanmar a rejeté les recours formés par six activistes syndicaux qui ont été condamnés à de lourdes peines de prison pour s’être réunis afin de discuter des droits du travail. En novembre 2008, la militante des droits du travail Su Su Nway, qui avait déposé une plainte pour travail forcé dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire et qui avait apporté un soutien pacifique à la Révolution Safran de 2007, a été condamnée à une peine d’emprisonnement. Il y a deux mois, les autorités ont arrêté plusieurs membres de la Fédération des syndicats du Myanmar (FTUB) pour avoir participé au congrès de leur organisation. Le régime militaire ne les a relâchés, ainsi que les membres de leurs familles, que sous la pression du mouvement syndical qui s’est exercée à l’échelle mondiale et celle de plusieurs gouvernements. Récemment, dans une manœuvre destinée à éviter tout risque pour les élections de 2010, la junte a soumis Aung San Suu Kyi à un procès spectacle grotesque dans lequel elle risque cinq années d’emprisonnement. Ces exemples récents illustrent une fois de plus la mauvaise foi chronique du gouvernement s’agissant de la démocratie, des droits de l’homme et des normes du travail fondamentales, notamment la convention no 29. Les membres travailleurs se sont déclarés convaincus que seule une réaction vigoureuse de l’OIT, de la Commission de la Conférence et de la communauté internationale dans son ensemble peut faire bouger les choses.
Dans ses conclusions de l’année dernière, la Commission de la Conférence a exprimé l’espoir que les travaux de réhabilitation et de reconstruction à la suite du cyclone Nargis seront entrepris sans aucun recours au travail forcé. Le rapport de la commission d’experts de cette année signalait toutefois que l’on a eu recours au travail forcé dans le cadre de la reconstruction pour travailler dans les carrières, pour l’abattage des arbres et la reconstruction de routes, et que des saisies de fonds ont eu lieu pour de soi-disant «donations». Les conclusions de l’année dernière indiquent également qu’une déclaration au plus haut niveau sur l’éradication du travail forcé et la poursuite des personnes qui y avaient recours est nécessaire. D’après le rapport du Chargé de liaison, le gouvernement n’y a toujours pas donné suite. Dans ses conclusions, la Commission de la Conférence s’est déclarée également préoccupée au sujet des dispositions relatives au travail forcé qui figurent dans la Constitution récemment adoptée. La commission d’experts déplore que la nouvelle Constitution autorise toujours le travail forcé dans le cadre de missions imposées par l’Etat, conformément au droit et dans l’intérêt du peuple. Qui plus est, les conclusions de la Commission de la Conférence condamnaient le recrutement généralisé d’enfants dans les forces armées. La commission d’experts n’a trouvé aucun élément prouvant que la formation des forces militaires revendiquée par le gouvernement avait bien eu lieu. Tout indiquait, au contraire, que l’enrôlement d’enfants s’est poursuivi l’année dernière dans de nombreux villages, sans parler de la pratique terrifiante de l’armée, dont le bataillon no 545, consistant à forcer des villageois à servir de démineurs humains. En outre, les conclusions de la Commission de la Conférence dénonçaient l’impunité dont jouissent toujours les militaires pour les violations de l’interdiction du travail forcé, ainsi que les ressources limitées dont dispose le Chargé de liaison du BIT, le besoin urgent d’un réseau renforcé de facilitateurs pour recueillir des informations et mener des enquêtes à propos de cas de travail forcé et d’actes de harcèlement dont sont victimes les auteurs de plaintes et des facilitateurs. Le rapport de 2009 de la commission d’experts ne fait état d’aucune évolution en la matière. En dépit des efforts admirables et sans relâche déployés par le Chargé de liaison, le BIT s’est vu refuser l’accès dans de nombreuses zones du pays pour y mener des enquêtes, et le nombre de cas manifestes de représailles à l’égard d’auteurs de plaintes ne cesse de croître. Enfin, les conclusions de la Commission de la Conférence demandaient la libération de plusieurs militants et de Aung San Suu Kyi, mais ces demandes sont restées lettre morte.
Les membres travailleurs ont estimé que ce mépris total manifesté à l’égard des conclusions de la Commission de la Conférence menace la légitimité même de cette enceinte et de l’OIT et est par conséquent intolérable. Même si le Conseil d’administration a décidé en mars 2007 de déférer la question d’un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) «jusqu’au moment opportun», une autre question fondamentale pourrait être de savoir si la coopération requise et les progrès nécessaires dans l’application des recommandations de la commission d’enquête «atteignaient le seuil requis». Aucune personne raisonnable ne peut répondre affirmativement à cette question, ont-ils estimé.
Le membre gouvernemental de la République tchèque, s’exprimant au nom des gouvernements des Etats membres de l’Union européenne, des pays candidats, à savoir la Croatie, l’ex-République yougoslave de Macédoine et la Turquie; des pays concernés par le processus de stabilisation et d’association et des candidats potentiels que sont l’Albanie et le Monténégro; de l’Islande et de la Norvège en tant que pays membres de l’Association européenne de libre-échange, des pays membres de l’Espace économique européen; ainsi que de l’Ukraine, de la République de Moldova et de Saint-Marin, a exprimé les inquiétudes qu’inspire la situation des droits de l’homme au Myanmar, qui reste à l’ordre du jour des organes compétents des Nations Unies et de l’OIT depuis de nombreuses années. Les arrestations arbitraires persistantes, les procédures judiciaires iniques et les peines de prison sévères qui frappent les activistes politiques et les défenseurs des droits de l’homme, y compris les dirigeants du mouvement syndical, constituent de graves atteintes aux droits fondamentaux de l’homme. Le représentant a exprimé son profond regret que Aung San Suu Kyi, dirigeante de la Ligue nationale pour la démocratie, et des membres de son entourage aient été arrêtés et accusés d’avoir enfreint les conditions de leur assignation à résidence, mesure que les organes compétents des Nations Unies estiment être une violation du droit international et de la législation nationale, et ce juste au moment où cette mesure d’assignation à résidence devait prendre fin. L’orateur a fait observer que ce point de vue est celui de presque tous les acteurs de la scène internationale. l’Union européenne a exprimé à de nombreuses reprises sa profonde inquiétude devant le non-respect de la convention no 29 par le Myanmar et le fait que ce cas particulièrement grave reste toujours inscrit à l’ordre du jour de la commission d’experts depuis plus de trente ans.
S’agissant de la mise en œuvre du Protocole d’entente complémentaire de 2007 conclu entre le BIT et le gouvernement du Myanmar, l’Union européenne s’est réjouie de la prorogation de la période d’essai de ce protocole dans le but d’instaurer un mécanisme de plainte effectif accessible aux victimes de travail forcé. S’il est positif d’apprendre par le Chargé de liaison que 30 000 exemplaires de la brochure contenant la traduction officielle du Protocole d’entente complémentaire et des documents connexes ont été diffusés, ce chiffre ne saurait être considéré comme suffisant eu égard à la superficie du pays et à la gravité du problème. Il faudrait donc que cette brochure soit diffusée sous une forme propre à garantir que l’interdiction du travail forcé soit largement publiée.
Dans le même ordre d’idées, il est regrettable que les appels répétés des organes de contrôle de l’OIT à une proclamation officielle au plus haut niveau confirmant formellement l’engagement du gouvernement du Myanmar à éliminer le travail forcé n’aient toujours pas été entendus. Tout en prenant acte des déclarations du ministère du Travail à l’occasion de la prorogation du Protocole d’entente, on ne saurait voir là une réponse suffisante aux conclusions du Conseil d’administration à sa 303e session, en novembre 2008. Il serait de la plus haute importance que les autorités du Myanmar réaffirment par une déclaration publique au plus haut niveau l’interdiction du travail forcé et les sanctions pénales prévues pour le réprimer, notamment lorsqu’il s’agit d’enfants enrôlés dans l’armée, et, comme le demande la commission d’experts, que les dispositions contraires au droit contenues dans la loi sur les villages et la loi sur les villes fassent place à un cadre législatif et réglementaire approprié qui réponde pleinement aux recommandations de la commission d’enquête et soit conforme à la convention no 29. Les autorités du Myanmar doivent adopter une approche plus résolue dans ce sens.
Comme l’a fait la commission d’experts, le représentant gouvernemental regrette que la nouvelle Constitution, qui devrait prendre effet l’an prochain, comporte une disposition pouvant être interprétée d’une manière qui autorise un recours généralisé au travail forcé de la population et qui est donc non conforme à la convention no 29. A défaut de progrès substantiels sur ce plan, les activités telles que les réunions, ateliers et séminaires constituent quelques aspects positifs. Néanmoins, rien n’indique que, dans la pratique, le recours au travail forcé par les autorités et, en particulier par les militaires, n’ait diminué suite aux instructions que le gouvernement prétend avoir adressées à ces autorités.
L’orateur s’est déclaré pleinement en accord avec l’action déployée par l’OIT et son Chargé de liaison dans son entreprise d’aide aux autorités du Myanmar pour l’abolition pratique du travail forcé dans le pays, et il a appelé les autorités à faciliter l’intensification des moyens du Chargé de liaison. Se référant au rapport présenté par le Bureau à la 304e session du Conseil d’administration, en mars 2009, il a souligné que la baisse du nombre des plaintes dont le Chargé de liaison est saisi ne saurait être interprétée comme un signe de recul du travail forcé dans le pays. Il a exprimé sa préoccupation quant au nombre des personnes qui sont aujourd’hui condamnées à de lourdes peines de prison pour avoir porté plainte ou pour avoir agi comme facilitateur. L’Union européenne continuera de suivre attentivement la situation de ces militants car il est inacceptable que l’on puisse être accusé ou condamné pour avoir eu des contacts avec des représentants du BIT.
Même des élections multipartites seraient dépourvues de toute crédibilité si les autorités du Myanmar ne libèrent pas tous les prisonniers politiques, y compris Aung San Suu Kyi, et ne s’engagent pas dans un dialogue sans exclusive avec l’opposition et les groupes ethniques. Seul un processus évoluant vers la participation pleine et entière de l’opposition et des groupes ethniques pourra aboutir à la réconciliation nationale et à la stabilité. Le représentant a enfin lancé un appel au respect des droits de l’homme, y compris des principes fondamentaux et les droits au travail, et notamment à l’interdiction universelle de toutes les formes de travail forcé.
La membre gouvernementale de la Nouvelle-Zélande, s’exprimant au nom des gouvernements de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie, a exprimé sa gratitude pour le dévouement continu du Chargé de liaison du BIT pour la promotion de l’observation de la convention no 29 par le gouvernement du Myanmar. Elle a tenu à rendre hommage aux réalisations du Chargé de liaison du BIT, qui a pu s’appuyer sur les solides bases laissées par son prédécesseur et contribuer à l’avancement de l’éradication du travail forcé dans le pays. De récentes mesures, quoique petites, ont été prises par le gouvernement du Myanmar vers cet objectif, y compris la poursuite des activités de sensibilisation entreprises par le Chargé de liaison du BIT.
Néanmoins, des préoccupations particulières persistent quant à la réelle volonté du gouvernement du Myanmar de faire face aux problèmes persistants de travail forcé sur son territoire. Elle exhorte le gouvernement à ne pas entraver le fonctionnement du mécanisme de plainte. Il est inacceptable que les personnes qui sont associées à des plaintes sur le travail forcé dans le cadre du mécanisme de plainte continuent d’être harcelées ou emprisonnées. Le gouvernement doit libérer toutes les personnes qui purgent actuellement des peines de prison à raison de leur association avec l’application du Protocole d’entente complémentaire. L’engagement absolu du gouvernement pour l’éradication du travail forcé – partout où il apparaît et sous toutes ses formes – demeure primordial. Le gouvernement doit aborder tous les cas qui lui sont transmis dans le cadre du mécanisme de plainte avec sérieux, bonne foi et objectivité. Il doit s’acquitter de ses obligations internationales en vertu de la convention no 29 et faire appliquer, de façon proactive, ses propres prescriptions législatives contre l’usage du travail forcé. Le gouvernement doit accroître et renforcer son dialogue avec le BIT afin de renforcer l’efficacité du mécanisme.
Abordant la situation générale des droits de l’homme dans le pays, l’oratrice a déploré que le gouvernement du Myanmar continue d’ignorer les droits de l’homme fondamentaux et déclaré que son pays et l’Australie sont gravement préoccupés par le récent procès et le maintien en détention de la militante pour la démocratie Aung San Suu Kyi, événement qui marque à nouveau l’échec de la réforme politique au Myanmar. La Nouvelle-Zélande et l’Australie, ainsi que l’ensemble de la communauté internationale, ont maintes fois exhorté le gouvernement du Myanmar à libérer Aung San Suu Kyi et à prendre des mesures significatives en vue de la réforme démocratique et de la réconciliation nationale. Les deux pays continueront à s’exprimer sur cette question à chaque occasion. En conclusion, elle demande instamment au gouvernement d’œuvrer pour la pleine mise en œuvre des recommandations de la commission d’experts.
Le membre gouvernemental du Nigéria, après avoir écouté attentivement la déclaration du gouvernement du Myanmar et les délibérations de la Commission de la Conférence, a estimé que des efforts considérables doivent encore être déployés par le gouvernement du Myanmar pour assurer la conformité avec la convention no 29. Il prie l’OIT de continuer à exercer de la pression et de fournir une assistance technique, de manière à ce que la pleine conformité puisse être atteinte dans un avenir proche.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a remercié le Bureau pour son rapport détaillé et sincère sur la situation au Myanmar et a félicité le Chargé de liaison pour le travail admirable qu’il continue à accomplir dans des conditions aussi difficiles. Le BIT est une fois de plus parvenu à maintenir le dialogue avec les autorités militaires, tout en les encourageant fermement à tenir les obligations juridiques auxquelles elles se sont engagées librement voilà cinquante-quatre ans, suite à la ratification de la convention no 29.
La Commission de la Conférence se réunit en séance spéciale pour la neuvième année consécutive car le régime du Myanmar persiste à ne pas mettre en œuvre les recommandations que lui a pourtant clairement énoncées la commission d’enquête. La commission continuera à étudier ce cas jusqu’à ce que: 1) les textes législatifs pertinents soient mis en conformité avec la convention no 29; 2) les autorités cessent d’imposer dans la pratique le travail forcé; et 3) les sanctions pénales prévues en cas de recours au travail forcé soient sévèrement renforcées.
Elle s’est félicitée de la décision prise de prolonger le Protocole d’entente complémentaire, ainsi que de certaines mesures positives qui ont été prises et que le Conseil d’administration a reconnues, principalement en matière de sensibilisation au mécanisme de traitement des plaintes. Le rapport du Chargé de liaison fait état également d’améliorations de la situation concernant le recrutement d’enfants mineurs et de la distribution de publications sur le Protocole d’entente complémentaire. Toutefois, ces améliorations bien modestes ne vont pas assez loin dans l’élimination du fléau que représente le travail forcé en Birmanie. Les pratiques de travail forcé sont toujours aussi persistantes et répandues. Les textes législatifs s’y rapportant, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, n’ont pas encore été amendés, et la nouvelle Constitution contient une disposition qui est contraire à la convention. Le travail forcé ne fait toujours pas l’objet d’une condamnation pénale. De plus, certaines personnes ayant recours au mécanisme ou en facilitant l’utilisation risquent toujours de subir harcèlements, représailles ou emprisonnement. La sensibilisation de la population au mécanisme de traitement des plaintes reste faible, en particulier dans les régions rurales. A cela s’ajoute l’attente persistante d’une déclaration officielle émanant des plus hautes instances gouvernementales, qui confirme l’interdiction du travail forcé. Enfin, le gouvernement continue à appliquer des politiques économiques et agricoles entraînant des pratiques de travail forcé.
En conclusion, la situation est toujours extrêmement grave et des mesures durables, plus que jamais nécessaires, doivent être prises d’urgence. Comme l’a indiqué la commission d’experts, la seule façon pour que le Myanmar progresse réellement dans l’élimination du travail forcé consiste à ce que les autorités de ce pays s’engagent sans ambiguïté dans ce sens en prenant les mesures qui s’imposent depuis longtemps afin de corriger, avec l’assistance du BIT, les cas de violation de la convention relevés par la commission d’enquête. L’oratrice a exprimé également l’espoir que le régime au pouvoir prendra les mesures nécessaires pour autoriser le Chargé de liaison à se faire aider par un personnel plus nombreux.
Regrettant sincèrement que le déroulement de la présente séance spéciale soit profondément assombri par les préoccupations sérieuses qui pèsent aujourd’hui au sujet du procès et de la détention de Aung San Suu Kyi, la représente gouvernementale a insisté sur le fait que seul un gouvernement réellement démocratique est en mesure de garantir les droits de l’homme et des travailleurs. Afin de passer de façon crédible à la démocratie, le régime militaire devrait de toute urgence libérer immédiatement et sans condition Aung San Suu Kyi ainsi que l’ensemble des prisonniers politiques et entreprendre un véritable dialogue ouvert avec la population birmane.
Le membre gouvernemental de la Chine s’est félicité de l’étroite collaboration entre le Myanmar et le BIT, qui a permis l’adoption de mesures concrètes telles que la prolongation d’une durée de douze mois du Protocole d’entente complémentaire, l’organisation de campagnes de sensibilisation sur l’élimination du travail forcé, la mise en place de formation s’adressant aux autorités locales et la visite de diverses localités par le Chargé de liaison du BIT et des hauts responsables du gouvernement. Il souligne également que la coopération du gouvernement du Myanmar avec d’autres organisations internationales telles que l’UNICEF démontre la volonté du gouvernement d’éliminer le travail forcé.
Le membre gouvernemental du Viet Nam a estimé que les informations communiquées oralement et par écrit par le gouvernement du Myanmar illustrent les progrès considérables réalisés depuis la dernière session du Conseil d’administration. Le Chargé de liaison du BIT et les représentants du ministère du Travail ont conjointement entrepris des visites sur le terrain et tenu des séminaires sur le travail forcé. Le Chargé de liaison a dispensé des cours aux représentants de divers organes, y compris à des juges, à la police et aux commandants des forces armées. Des projets de reconstruction et d’assainissement sont en cours dans de nombreux villages, et ils fournissent de l’emploi à la population locale. Le gouvernement a, dans le même temps, cherché à consolider la législation sur la prévention du recrutement des mineurs à des fins militaires et a organisé des cours de formation et de prise de conscience à cet égard. Ces faits témoignent de la volonté du gouvernement du Myanmar d’éliminer la pratique du travail forcé dans le pays.
L’orateur souligne que, pour son gouvernement, la stimulation du processus de dialogue et de l’étroite coopération existant entre le gouvernement du Myanmar et le BIT, accompagnée d’une implication plus grande de l’équipe locale des Nations Unies, pourrait permettre l’obtention d’un résultat positif dans un futur proche.
Il a conclu en déclarant que son gouvernement soutient par conséquent fermement la poursuite de la coopération et du dialogue entre le gouvernement du Myanmar et le BIT. Il a appelé dans le même temps les deux parties, y compris les parties intéressées impliquées, à intensifier leurs efforts et à construire ensemble une confiance mutuelle de manière à assurer l’éradication rapide du travail forcé au Myanmar.
Le membre gouvernemental du Japon a apprécié les progrès réalisés par le gouvernement du Myanmar en coopération avec le BIT et son bureau de liaison. Toutefois, il y a encore de la place pour intensifier les efforts vers la pleine mise en œuvre du Protocole d’entente complémentaire. Tout d’abord, les cas présumés de détention de plaignants contraints au travail et de facilitateurs doivent être dûment pris en compte. Deuxièmement, une simple brochure explicative concernant le Protocole d’entente complémentaire doit être approuvée et largement diffusée afin que le mécanisme de plainte puisse être pleinement utilisé. Troisièmement, les militaires et civils responsables de travail forcé et de recrutement de mineurs doivent être tenus responsables dans le cadre d’une procédure judiciaire équitable et rigoureuse. Il a demandé instamment au gouvernement du Myanmar de prendre des mesures pour remédier à ces problèmes et exprimé son soutien aux efforts du BIT visant à renforcer sa présence dans le pays par la mise en œuvre non seulement du mécanisme de plainte mais aussi de projets de réhabilitation dans les zones touchées par le cyclone. Son gouvernement espère fortement que d’autres améliorations seront réalisées par le gouvernement du Myanmar en coopération et dans le dialogue avec l’OIT et que la démocratisation sera encouragée grâce à la participation de toutes les parties concernées. A cet égard, l’orateur a indiqué que son gouvernement est profondément préoccupé par les récents développements dans le pays. Le gouvernement du Japon suivra la situation de près et espère sincèrement que le gouvernement du Myanmar abordera la situation de façon appropriée, écoutant la voix de la communauté internationale.
Le membre gouvernemental de Cuba a réaffirmé l’attachement de son gouvernement aux principes établis par la convention no 29. Sa délégation a remercié le gouvernement du Myanmar et le Chargé de liaison pour la présentation de leurs rapports qui rendent compte des activités mises en œuvre et programmées par le Bureau et le gouvernement du Myanmar, ainsi que des progrès effectués afin d’aboutir à l’élimination du travail forcé au Myanmar. Les résultats positifs atteints jusqu’à aujourd’hui sont le fruit de la coopération technique et du dialogue instauré entre le gouvernement et le BIT. La coopération technique, le recours à un dialogue ouvert et inconditionnel et l’analyse des conditions et de la conjoncture internes doivent, par conséquent, être poursuivis. Il s’agit de l’unique moyen d’atteindre les objectifs inscrits dans la convention no 29.
Le membre gouvernemental de Singapour a déclaré que son pays s’est réjoui de la reconduction, à la 304e session du Conseil d’administration, du Protocole d’entente complémentaire contenant le mécanisme de plainte en matière de travail forcé et de l’accord prévoyant l’organisation régulière de visites sur le terrain et de séminaires axés sur la sensibilisation au travail forcé au Myanmar et qu’il se félicite d’apprendre aujourd’hui que ces opérations de sensibilisation se poursuivent, qu’elles sont bien accueillies dans la plupart des régions du pays et que d’autres encore sont prévues. Il a fait l’éloge des efforts déployés par le Chargé de liaison du BIT dans la conduite de ces activités et l’organisation des conférences et des séances de formation.
L’orateur s’est félicité du succès du projet pilote lancé par le Royaume-Uni qui a été mis en œuvre dans la zone affectée par le cyclone Nargis. Ce projet incarne un modèle des meilleures pratiques en matière d’emploi permettant de faire obstacle au travail forcé, comme exposé dans le rapport du Chargé de liaison, et d’apporter aux participants de précieuses connaissances en matière de gouvernance et de développement communautaire, tout en apportant la preuve que des projets de cette nature peuvent se concrétiser sans aucun recours au travail forcé.
Une évolution est perceptible sur le plan de l’enrôlement des personnes n’ayant pas l’âge légal dans l’armée: à l’exception de deux d’entre eux, tous les enfants concernés ont été libérés de leurs obligations et rendus à leurs familles et, d’une manière générale, les autorités ont accepté le principe que tout enfant recruté par l’armée et dont le recrutement était par définition illégal ne saurait faire l’objet de poursuites en justice pour désertion et toutes poursuites de cet ordre engagées contre un enfant devraient être abandonnées, et toutes condamnations annulées. De plus, le gouvernement du Myanmar a convenu de réviser son règlement pénitentiaire dans un sens conforme à la convention no 29, sollicitant l’assistance du Chargé de liaison à cette fin.
Ces efforts positifs, conjugués à ceux du BIT, font progresser singulièrement la marche vers l’élimination des pratiques de travail forcé au Myanmar. Tout en incitant le BIT à poursuivre sa tâche, le gouvernement de Singapour rappelle à celui du Myanmar la nécessité d’intensifier et accélérer ses efforts tendant à une plus grande prise de conscience de la législation contre le travail forcé à tous les niveaux de l’administration et dans toutes les régions et, en conséquence, à une application pertinente de la loi.
En ne désignant pas le Myanmar par le nom qui est constitutionnellement le sien, certains intervenants se réfèrent implicitement à des conceptions ou intentions politiques qui se situent hors du champ des compétences de la présente commission et altèrent la crédibilité de celle-ci et de l’OIT dans son ensemble. Indépendamment de cela, l’orateur a exprimé ses préoccupations devant la tournure récente des événements au Myanmar et a souligné que le dialogue reste le meilleur moyen de progresser dans la voie de la reconstruction du pays.
La membre travailleuse du Japon a salué les efforts déployés par le BIT pour améliorer la situation dans le pays. Cela étant, les résultats sont maigres et il y a un manque de compréhension de la part des autorités birmanes s’agissant des mesures à prendre pour se mettre en conformité; pour preuve les dispositions de la nouvelle Constitution, qui consacrent une dérogation inacceptable à l’interdiction du travail forcé. Une révision de la nouvelle Constitution à cet égard est essentielle. De plus, des autorités locales ont récemment forcé des agriculteurs possédant plus d’un acre de terre à planter du jatropha. Les agriculteurs refusant de suivre ces instructions ont fait l’objet d’amendes, ont été frappés et arrêtés. Le recrutement d’enfants mineurs est un autre exemple de travail forcé.
L’oratrice a souligné que l’élimination du travail forcé est étroitement liée au processus démocratique. La toute première étape vers la démocratie devrait être la libération de Aung San Suu Kyi et de plus de 2 100 prisonniers politiques dont des militants activistes. La résolution adoptée en 2000 par la Conférence internationale du Travail a recommandé que les Etats Membres revoient leurs relations avec le gouvernement du Myanmar, de façon à ne pas avantager indûment un pays qui continue à recourir au travail forcé. Or la résolution est loin d’avoir été appliquée comme il se doit, étant donné que les investissements étrangers au Myanmar ont augmenté par rapport à 2007. Des ressources importantes ont été affectées récemment au secteur minier, la plupart par la Chine. Un total de 15 milliards de dollars américains ont été investis jusqu’à présent par 29 pays, la Thaïlande occupant le premier rang, suivie par le Royaume-Uni, Singapour et la Chine, le Japon venant en treizième position. Il ne fait aucun doute que ces activités économiques permettent au régime birman de continuer à opprimer la population et de recourir au travail forcé. L’oratrice a exhorté les Etats Membres qui investissent dans le pays à revoir leurs relations avec le gouvernement du Myanmar. Elle a invité le Bureau à prendre des dispositions en vue de demander éventuellement à la Cour internationale de Justice (CIJ) un avis consultatif concernant la violation de la convention no 29 et la non-application des recommandations de la commission d’enquête.
Le membre gouvernemental de la Thaïlande a déclaré que son gouvernement, qui partage les préoccupations exprimées en matière de travail forcé, se félicitait de la poursuite par le gouvernement du Myanmar et par l’OIT du processus de dialogue et de collaboration étroit en vue de résoudre le problème. Les progrès accomplis au Myanmar traduisent l’engagement du gouvernement à appliquer les conclusions de la 304e session du Conseil d’administration de mars 2009, et les visites menées sur le terrain conjointement par le Chargé de liaison du BIT et par le ministère du Travail sont encourageantes. Il est à espérer que la brochure contenant le texte du Protocole d’entente complémentaire, maintenant qu’elle a été distribuée, sera pleinement utilisée afin que les droits et responsabilités de chacune des parties prenantes et de l’ensemble de la population du Myanmar soient bien assimilés. De plus, son gouvernement constate avec grande satisfaction la collaboration étroite du gouvernement du Myanmar, des institutions des Nations Unies et de l’ensemble de la communauté internationale dans les efforts déployés afin de réparer les dégâts provoqués par le cyclone Nargis. Ceci montre clairement la volonté du gouvernement de répondre aux besoins des populations frappées par ce drame et de s’engager activement à la remise en état et à la reconstruction de la région du Delta. Le projet en faveur des communautés, axé sur l’emploi, a offert de nombreuses opportunités d’emploi. Son gouvernement espère que ces actions seront encore développées grâce à l’application efficace du mécanisme de traitement des plaintes décrit dans le Protocole d’entente complémentaire, le but étant de parvenir à l’éradication du travail forcé au Myanmar. Pour conclure, l’orateur a encouragé le Myanmar à travailler en étroite collaboration avec le BIT afin de s’acquitter pleinement de ses obligations en vertu de la convention no 29. Il exprime le souhait que ces efforts et cette collaboration apporteront des progrès positifs pour la situation du pays en général.
La membre travailleuse du Brésil a déclaré que cela faisait trente ans que des commentaires sur les graves violations de la convention no 29 par le Myanmar étaient émis par les organes de contrôle de l’OIT. En 1993, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté une réclamation en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT dénonçant le recrutement forcé de travailleurs par les militaires. En 1995 et 1996, le Myanmar a fait l’objet de paragraphes spéciaux dans le rapport de la Commission de l’application des normes.
En 1997, après une plainte déposée par 25 délégués lors de la 84e session de la Conférence internationale du Travail, une commission d’enquête a été créée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. Cette commission a conclu à la violation large et systématique de la convention no 29 et a formulé diverses recommandations. En 2000, sur la base des observations de la commission d’enquête, la Commission de la Conférence a recommandé que les mandants de l’Organisation cessent toute relation avec le gouvernement du Myanmar et a invité le Directeur général à prier les instances compétentes des organisations internationales d’examiner le maintien de toute coopération avec le Myanmar et, le cas échéant, de mettre fin à toute activité qui pourrait avoir pour effet de conforter le travail forcé ou obligatoire; et à demander l’inscription à l’ordre du jour de la session de juillet 2001 du Conseil économique et social (ECOSOC) de la question du non-respect par le Myanmar des recommandations figurant dans le rapport de la commission d’enquête. L’objectif était de voir adoptées ces recommandations par l’ECOSOC, l’Assemblée générale et les autres organismes spécialisés.
Par la suite, la commission d’experts a établi quatre domaines dans lesquels le gouvernement devait adopter des mesures afin de respecter lesdites recommandations. En mars 2007, le Conseil d’administration a prié le Bureau de solliciter l’avis consultatif de la CIJ sur les violations graves, permanentes et répétées par le Myanmar de la convention no 29 et des recommandations de la commission d’enquête et de la Commission de la Conférence. L’oratrice a déclaré que, selon la commission d’experts, aucun changement important ne s’est produit dernièrement dans la situation au Myanmar. La réaction de la communauté internationale ne doit pas se limiter aux organes de contrôle de l’OIT. Cette question doit également faire l’objet de débats au sein de plusieurs instances des Nations Unies.
En mars 2009, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a prié instamment de mettre fin aux condamnations à des peines de prison pour des motifs politiques, au recrutement et à l’utilisation d’enfants soldats et à toute forme de discrimination, et réalisé une série de recommandations. Le thème fut également abordé au Conseil de sécurité dont les membres ont réaffirmé l’importance de la libération des prisonniers politiques et ont mis l’accent sur les effets négatifs générés par la situation de la leader de l’opposition et prix Nobel de la paix Ang San Suu Kyi.
Il est donc opportun que le BIT sollicite l’avis consultatif de la CIJ. De cette façon, le gouvernement du Myanmar se retrouvera devant un tribunal international à la veille des élections prévues en 2010, ce qui pourrait aider à la démocratisation du pays. Le rôle de l’OIT serait en outre renforcé. En tenant compte de la quantité et de la qualité de la jurisprudence accumulée pendant ces années par la commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale mais aussi des décisions du Conseil d’administration, les possibilités de succès de l’OIT et de la CIJ sont significatives et renforceraient la crédibilité juridique et politique de l’OIT tout en lui donnant une plus grande visibilité.
Le membre gouvernemental du Cambodge s’est félicité de la prorogation du Protocole d’entente complémentaire pour une nouvelle année, signée le 26 février 2009 entre le gouvernement du Myanmar et le BIT, qui inclut un mécanisme de plainte. L’application de ce mécanisme durant la dernière année prouve les progrès accomplis en matière de coopération entre le gouvernement du Myanmar et le BIT. Il prouve également l’engagement mutuel des deux parties à poursuivre cette coopération dans le but d’éradiquer le travail forcé. Pour conclure, le représentant a exprimé son soutien pour une coopération forte et continue entre le Myanmar et le BIT.
La membre travailleuse de l’Italie a fait valoir que le travail forcé au Myanmar est un fléau qui sévit au quotidien contre la population du pays. Elle a déclaré que ceux qui perpétuent ce système sont des individus qui représentent les autorités et sont, la plupart du temps, les commandants des principales unités militaires présentes dans tout le pays. Les syndicats légitimes du Myanmar ont établi leur identité et ont largement documenté leurs agissements, comme par exemple dans les Etats de Shan et de Chin. Elle a présenté une longue liste de noms de commandants et identifié des bataillons d’infanterie légère responsables des cas de travail forcé contre lesquels aucune des sanctions prévues par le Code pénal n’a été prononcée. La persistance du travail forcé au Myanmar tient non seulement à la surdité du gouvernement de ce pays, mais aussi à la passivité ou l’inaction des institutions internationales, des gouvernements étrangers et des entreprises étrangères, comme en atteste l’ignorance générale de la résolution prise par l’OIT en 2000, ignorance qui permet au régime de continuer son œuvre funeste de réquisition de main-d’œuvre, de répression des plaignants, d’oppression des populations, femmes et enfants compris, de torture, de meurtre, de confiscation des terres, de déni des droits de propriété et d’enrôlement forcé d’enfants. C’est par ces procédés aussi que la junte militaire continue d’affermir son pouvoir, comme en témoignent les conditions dans lesquelles a été mené le référendum sur le projet de nouvelle Constitution, en 2008, instrument qui a pour but de légitimer ultérieurement des élections politiques par lesquelles la junte s’efforcera de changer d’apparence pour ne rien changer à sa conduite. Pour ces raisons, il faut aujourd’hui que les gouvernements et les institutions internationales cessent de s’en tenir à de simples déclarations politiques, de fermer les yeux sur l’utilisation généralisée des ressources nationales du Myanmar au renforcement de la répression et à l’acquisition d’armements ou la construction, par exemple d’une centrale nucléaire expérimentale, et qu’ils s’orientent vers des initiatives plus concrètes. Il faut que l’OIT procède à un bilan de la mise en œuvre de la résolution de 2000 et mette en place un mécanisme de rapport renforcé sur les mesures prises dans ce sens par les Etats Membres et les institutions internationales. Il faut sans plus attendre arrêter une nouvelle combinaison de mesures économiques, juridiques et diplomatiques pour amener les généraux à s’asseoir à la table de négociation. L’Union européenne doit intensifier ses actions ciblées dans les secteurs des finances et des assurances, et ses Etats membres doivent eux aussi agir dans ce sens, introduisant ainsi des mécanismes de contrôle appropriés. Des sanctions devraient faire partie des initiatives politiques et des missions de haut niveau en Birmanie des Nations Unies, de l’Union européenne et des envoyés spéciaux asiatiques pour exercer des pressions politiques et économiques. Enfin, il faudrait parvenir, au niveau international, à ce que des poursuites puissent être engagées contre la junte, à travers une action concertée de la Cour internationale de Justice, de la Cour pénale internationale et des tribunaux nationaux et, pour cela, que les employeurs et les gouvernements soient unanimes et résolus à soutenir cette démarche par des actions cohérentes et suivies, aujourd’hui sous l’égide de l’OIT.
Le membre gouvernemental de l’Inde a indiqué que son gouvernement est satisfait des progrès accomplis au Myanmar et du renforcement de la coopération entre le gouvernement du Myanmar et l’OIT. Il se félicite également de la prolongation du Protocole d’entente complémentaire pour une autre année à partir du 26 février 2009, et a noté les progrès accomplis dans le travail du Chargé de liaison, notamment en ce qui concerne les missions de terrain conjointes facilitées par le gouvernement du Myanmar. Un autre sujet de satisfaction est le fonctionnement efficace du mécanisme de plainte concernant le recrutement de mineurs, instauré d’un commun accord. Les améliorations mentionnées ci-dessus illustrent l’engagement du gouvernement du Myanmar à éradiquer le travail forcé. Le gouvernement de l’Inde a à maintes reprises encouragé la poursuite du dialogue et de la coopération entre le Myanmar et d’autres Etats Membres afin de résoudre toutes les questions en suspens, et tient à féliciter le Directeur général du BIT pour avoir aidé le Myanmar dans ses efforts. Tout en demeurant fermement opposé à la pratique du travail forcé, son gouvernement se félicite des progrès récents dans le domaine.
Le membre travailleur de la République de Corée a rappelé que tous les mandants de l’OIT sont tenus de respecter et mettre en œuvre la résolution de 2000 de la Conférence tendant à l’éradication du travail forcé en Birmanie. Deux années auparavant, il était intervenu à la commission concernant le projet gazier Shwe pour lancer aux entreprises concernées et à son gouvernement un appel au report de ce projet jusqu’à ce que les allégations d’abus des droits de l’homme aient été instruites. Le gouvernement est en fait en train d’aller dans la mauvaise direction sous le couvert de «l’intérêt national». Suite au Sommet commémoratif ANASE-République de Corée organisé début juin 2009, les gouvernements de la République de Corée et de la Birmanie ont signé un Protocole d’accord en matière de coopération sur les technologies agronomes. Cette coopération risque de bénéficier uniquement au régime militaire du Myanmar plutôt qu’au peuple.
La République de Corée, en tant que membre de l’OCDE et de l’OIT, devrait s’engager dans la promotion des Principes directeurs pour les entreprises multinationales de l’OCDE qui sont un ensemble de principes sur la responsabilité sociale des entreprises. L’orateur a déclaré avoir été trahi par son gouvernement qui a rejeté une plainte émanant d’un syndicat national et de l’organisation EarthRights International alléguant que certaines compagnies étaient en infraction avec les principes directeurs de l’OCDE du fait de leur implication dans le projet gazier Shwe. Le gouvernement a simplement repris les propos de ces compagnies niant les preuves selon lesquelles ces deux entreprises n’ont pas mis en œuvre les mesures nécessaires pour éviter que le projet gazier n’ait un impact négatif sur les droits du travail. L’orateur a appelé instamment son gouvernement à remplir ses obligations en tant que Membre de l’OIT et de l’OCDE, en commençant par intervenir pour que le projet gazier soit reporté et que toutes les allégations relatives aux abus perpétrés à l’encontre des droits du travail soient instruites.
Le devoir de tout gouvernement et de tout employeur est d’aider à l’éradication du travail forcé en Birmanie. La Chine et l’Inde, en particulier, ne sont pas disposées à mettre en œuvre la résolution de 2000 de l’OIT en raison de leurs intérêts propres, comme par exemple l’investissement chinois réalisé dans les secteurs hydraulique et minier en Birmanie. Des entreprises privées mais aussi publiques chinoises, indiennes, coréennes ou thaïlandaises sont impliquées dans des projets à grande échelle en Birmanie, démontrant peu de respect pour la résolution de 2000 de l’OIT ou la situation des droits du travail dans le pays. L’orateur a instamment prié les entreprises et les Etats concernés de respecter et mettre en œuvre la résolution de 2000 et de conduire des enquêtes sur l’impact sur les droits de l’homme avant de décider d’investir en Birmanie. Des actions sont nécessaires pour éviter la perte des ressources naturelles et les abus des droits de l’homme à grande échelle.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie, soulignant la nécessité d’éradiquer le travail forcé dans le monde entier, s’est félicité de la prorogation pour une durée de douze mois du Protocole d’entente complémentaire entre le BIT et le gouvernement du Myanmar, preuve du dialogue constructif qui s’est instauré entre les deux parties. Selon les informations fournies par le Bureau, le mécanisme de traitement des plaintes prévu dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire fonctionne bien et donne des résultats positifs. Des douzaines de plaintes ont été examinées par les autorités du Myanmar et des mesures pratiques ont été prises, telles que, par exemple, la mise en place au sein du ministère du Travail du Myanmar d’un groupe de travail chargé d’examiner les plaintes portant sur le travail forcé. Le fait que le Chargé de liaison du BIT ait visité diverses régions du pays pour juger de la situation sur le terrain est très positif et permet une meilleure efficacité des activités du BIT. Le représentant gouvernemental a salué les efforts personnels que le Chargé de liaison a déployés. Des travaux sont en cours pour sensibiliser la population au mécanisme de traitement des plaintes, et la participation du ministère de la Défense à ce mécanisme est un élément encourageant. Le BIT a participé à un projet pilote dans la région du Delta, destiné aux communautés frappées par le cyclone Nargis, et la Fédération de Russie voit en la poursuite d’une collaboration toujours plus constructive entre le BIT et le gouvernement du Myanmar le meilleur moyen de résoudre le problème du travail forcé dans ce pays et d’assurer l’application de la convention no 29.
Le membre travailleur du Pakistan s’est associé aux déclarations faites par les membres travailleurs et autres intervenants se rapportant à la préoccupation commune et à la condamnation du travail forcé en Birmanie, qui est une violation flagrante des droits de l’homme fondamentaux et de la convention no 29. L’Asie, en incluant la Birmanie, est un continent où le peuple a une riche tradition historique et de grandes valeurs humaines. Malheureusement, en dépit de la lutte continue de la communauté internationale, dont l’OIT, le gouvernement n’a pas été capable de répondre à l’appel de prendre des actions effectives en vue d’éliminer le travail forcé. Le rapport de la Commission d’expert pour l’application des conventions et des recommandations a encore une fois confirmé l’échec du gouvernement à réformer les lois pertinentes et punir les coupables responsables de travail forcé. Le travail forcé n’est pas condamnable selon la Constitution nationale, et les règles ont été utilisées de manière différenciée en faveur du personnel militaire coupable de travail forcé. Le représentant a apprécié le travail effectué par le Chargé de liaison du BIT et a incité à ce que le premier Protocole d’entente soit appliqué lorsque des cas de travail forcé perpétrés par le gouvernement sont portés à sa connaissance. Il a demandé que les pays de l’Asie ainsi que les employeurs usent de leurs influences sur le gouvernement du Myanmar pour qu’il élimine le travail forcé, établisse une démocratie et libère Mme Aung San Suu Kyi ainsi que les autres prisonniers politiques, retire immédiatement les poursuites infondées contre la direction de la Ligue nationale pour la démocratie. Il a rappelé que les droits de l’homme ne peuvent être respectés que là où existent les valeurs démocratiques et les libertés civiles, condition sine qua non de la promotion de la justice sociale.
Le membre gouvernemental du Canada a rappelé que douze ans se sont déjà écoulés depuis la commission d’enquête et neuf ans depuis que le Conseil d’administration a invoqué l’article 33 de la Constitution de l’OIT. La commission d’enquête avait fixé des étapes bien précises: 1) mettre en conformité la législation nationale pertinente avec la convention no 29; 2) faire en sorte que le travail forcé ne soit plus imposé dans la pratique par l’armée; et 3) veiller à ce que les sanctions infligées pour l’imposition du travail forcé soient appliquées à l’encontre des personnes y recourant. Malgré l’adoption du Protocole d’entente complémentaire, le rythme des progrès accomplis est terriblement lent. Rien n’indique encore que des mesures sont envisagées pour abroger la loi sur les villages et la loi sur les villes, et la nouvelle Constitution autorise le recours généralisé au travail forcé. Les militaires ne font l’objet d’aucune sanction pénale ou de sanctions ridicules. Le gouvernement du Myanmar continue à refuser de faire une déclaration au plus haut niveau contre le travail forcé. Les modestes progrès accomplis ne sont dus qu’à la ténacité de la Confédération internationale des syndicats (CIS), du BIT et des plaignants qui risquent de faire l’objet de représailles. L’orateur s’est dit d’accord avec la commission d’experts pour dire que la seule façon d’accomplir de réels progrès consiste pour les autorités birmanes à démontrer leur ferme volonté de réaliser l’objectif consistant à éradiquer le travail forcé. Son gouvernement a appelé les autorités birmanes à souscrire de sa propre initiative aux recommandations de la commission d’enquête.
Le membre travailleur de la Fédération de Russie a déclaré que, même s’il participe rarement aux débats sur cette question, les violations de la convention no 29 par le gouvernement du Myanmar sont un sujet de préoccupation pour le mouvement syndical russe. Les syndicats russes ont appuyé les conclusions du rapport de Vaclav Havel et Desmond Tutu sur le sujet et ont pris contact avec le ministre russe des Affaires étrangères en vue d’une clarification de la position du gouvernement russe. Il est évident que la seule façon de remédier à ce problème persistant consiste pour le gouvernement du Myanmar à observer sans réserve toutes les recommandations qui lui sont adressées par la commission d’experts et autres organes de l’OIT.
Il a attiré l’attention sur le fait que l’objectivité des rapports, et partant des recommandations, dépendait de la crédibilité et de l’impartialité des informations et des faits, et a déclaré avoir une totale confiance dans les informations et dans l’analyse que renferment les rapports de la commission d’experts et dans les conclusions de la commission d’enquête. Il a repris à son compte les appels lancés par d’autres orateurs à tous les gouvernements, sans exception, afin qu’ils prennent les mesures prévues dans la résolution de l’OIT adoptée en 2000. L’exécution des obligations découlant de l’adhésion à l’OIT et une coopération suivie entre le BIT et le gouvernement du Myanmar contribueraient grandement à trouver une solution positive à un problème de longue date et à favoriser l’élimination du travail forcé au Myanmar et dans le monde entier.
Un observateur représentant la Fédération des syndicats de Birmanie, parlant au nom de la Confédération syndicale internationale (CSI), a remercié la CSI, le BIT et le Chargé de liaison pour leurs efforts efficaces pour obtenir la libération immédiate des quatre membres de la FTUB arrêtés en avril 2009. Six personnes sont toujours en détention pour avoir tenté d’organiser un débat le jour de la fête du travail, et 22 autres activistes du travail purgent de longues peines de prison en raison de leurs efforts pour obtenir des droits aux travailleurs du Myanmar.
L’orateur a indiqué que le travail forcé persiste encore partout en Birmanie. Les auteurs, dont la majorité sont des militaires, continuent d’abuser, du fait de l’absence de sanctions sérieuses, des citoyens en recourant au travail forcé. Pour les militaires, la sanction la plus sévère pour recours au travail forcé est la suppression d’une année d’ancienneté. Ainsi, le bénéfice du recours au travail forcé est plus important que la menace de toutes les sanctions possibles. La population rurale continue de vivre dans la peur d’être soumise par la force à des «devoirs assignés par l’Etat» ou de se voir confisquer leurs terres pour des «raisons de sécurité». Le nombre croissant de rapports remis au bureau de liaison démontre que, malgré la lenteur de la junte, de nombreux programmes de sensibilisation et d’éducation ont porté leurs fruits auprès de la population. Ces programmes doivent être étendus pour que la majorité de la population puisse comprendre les droits fondamentaux des travailleurs.
Les juntes successives ont toujours affirmé que l’absence de fonds entravait la possibilité de changement au Myanmar. L’orateur a contesté cette affirmation en rappelant l’importation significative de technologie nucléaire et militaire et le récent transfert de capitale qui avait été une occasion pour s’équiper de nouveaux bâtiments et aéroport. Une part infime des fonds provenant du pétrole ou du gaz aurait suffi à remplacer le travail forcé ou obligatoire et à résoudre les problèmes économiques et sociaux de la population. Les entreprises multinationales travaillant avec la junte devraient être conscientes de l’impact négatif de leurs activités.
Dix ans après l’adoption de l’ordonnance no 1/99, qui prévoit qu’il ne doit pas être fait usage du travail forcé en vertu de la loi sur les villages et la loi sur les villes, la nouvelle Constitution permet dans son article 359 le recours au travail forcé. La FTUB en appelle à l’OIT, à tous les gouvernements et aux travailleurs et employeurs présents dans la salle de tout faire pour impulser le changement en Birmanie et demander la révision de la Constitution avant qu’elle ne soit imposée par la junte aux élections forcées de 2010. Enfin, il est demandé au BIT de solliciter un avis de la CIJ, en tant qu’élément clé du système des Nations Unies. Cela ferait non seulement savoir à la junte que la généralisation du recours au travail forcé ne passerait plus inaperçue et ne serait plus impunie, mais enverrait également le message fort aux activistes du travail en Birmanie que le monde se bat avec eux.
Un observateur représentant la Fédération internationale des syndicats de travailleurs de la chimie, de l’énergie, des mines et des industries diverses (ICEM) a exprimé ses inquiétudes devant les investissements étrangers et l’activité économique de certaines entreprises multinationales au Myanmar en dépit du travail forcé. Selon lui, sans de sérieux efforts déployés par l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), aucun processus de démocratisation ne s’engagera jamais au Myanmar. Il a considéré que l’ANASE, tout en étant consciente des carences du Myanmar sur le plan de la démocratie, fait néanmoins prévaloir ses intérêts économiques. De tous les gouvernements membres de l’ANASE Plus Three, seul le Japon a appuyé récemment la résolution présentée par l’ICEM. Enfin, étant donné que les progrès évoqués par les gouvernements de la Chine et du Viet Nam ont trait uniquement au travail forcé, l’orateur en a conclu que le manque de progrès en matière de démocratie a été généralement constaté par la Commission de la Conférence.
La membre gouvernementale de la République de Corée s’est réjouie des efforts déployés inlassablement par le BIT pour éliminer le travail forcé au Myanmar et a reconnu les améliorations de la situation, lentes mais significatives, depuis la signature entre le gouvernement du Myanmar et le BIT du Protocole d’entente complémentaire. L’éradication du travail forcé au Myanmar devrait être facilitée dans le long terme par le développement économique et social du pays.
Le représentant gouvernemental du Myanmar, répondant aux interventions formulées au sujet de son gouvernement, a rappelé que ce dernier a ratifié en 1955 la convention no 29, preuve que sa volonté politique d’éradiquer le travail forcé ne date pas d’aujourd’hui. En signant le Protocole d’entente complémentaire, le ministère du Travail a réaffirmé son engagement pour l’éradication du travail forcé. Le mécanisme de traitement des plaintes fonctionne normalement depuis sa mise en place en 1997, ce qui n’aurait pas été possible sans la bonne volonté et la bonne foi de son gouvernement. En ce qui concerne les charges à l’encontre de Mme Aung San Suu Kyi, celles-ci seront traitées dans le cadre de l’application du droit national et du respect du principe d’une justice équitable. Le représentant gouvernemental a demandé au Président de rappeler aux orateurs de désigner un Etat Membre souverain par son nom officiel, de manière correcte, au cours des discussions à venir au sein de cet auguste organe, ce qui est la pratique commune dans tous les forums et conférences des Nations Unies.
Les membres travailleurs, observant que l’analyse de ce cas a déjà été amplement faite, ont récapitulé leurs demandes, qui sont de trois ordres:
– la libération immédiate de Aung San Suu Kyi et de tous les militants syndicaux et prisonniers politiques emprisonnés pour avoir voulu exercer leur droit à la liberté d’expression et d’associations; la cessation immédiate du harcèlement et de l’emprisonnement des personnes qui soumettent des plaintes en rapport avec le travail forcé; la fin de l’impunité pénale des auteurs du recours au travail forcé;
– la mise en œuvre de toutes les recommandations de la commission d’enquête; la révision du projet de Constitution, notamment de ses articles relatifs au travail forcé et à la liberté d’association et, par suite, la reconnaissance légale de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB);
– un bilan de la mise en œuvre de la résolution de 2000; un bilan des démarches entreprises par les institutions internationales, les gouvernements, les organisations d’employeurs et les organisations de travailleurs en application de la résolution prise en juin 2000; la tenue d’une conférence qui réunirait toutes les parties concernées pour définir les meilleures pratiques susceptibles d’aboutir à la mise en œuvre de la résolution de 2000; la mise en action des autres dispositifs prévus par le droit international contre les auteurs d’actes de travail forcé.
Sur un plan pratique et immédiat, les membres travailleurs demandent en particulier que:
– le Chargé de liaison se consacre à la mise en œuvre de l’intégralité des recommandations de la commission d’enquête;
– les moyens dont dispose le BIT au Myanmar soient renforcés, à travers l’augmentation du nombre de ses bureaux et la création d’un réseau de facilitateurs dans le pays;
– que le secrétariat du BIT étudie, en concertation avec les organes compétents et avec les précautions juridiques nécessaires, la ou les questions qui pourraient être soumises pour avis consultatif à la Cour internationale de Justice, en vue d’une décision qui pourrait être prise à ce sujet par le Conseil d’administration à sa prochaine session.
Les membres employeurs ont déclaré que la ratification d’une convention n’était pas en soi une indication de volonté politique. La seule vraie indication est une application pleine et entière, en droit et dans la pratique, rien d’autre. Certains signes positifs ont été entendus au cours de cette séance mais, fondamentalement, on ne constate aucune volonté politique réelle, véritable ou durable de mettre un terme à la pratique du travail forcé. Le gouvernement n’a fait qu’effleurer la surface. Le travail forcé reste courant, mais il est de la compétence des autorités du Myanmar d’y mettre un terme immédiatement. Le gouvernement doit prendre les mesures qu’il sait nécessaires pour que cessent les violations des droits de l’homme, qui non seulement portent atteinte aux citoyens du Myanmar, mais font que le gouvernement perd toute autorité morale pour gouverner et toute crédibilité au sein de la communauté internationale. Le mépris des droits de l’homme fait obstacle au développement économique car rares seront les personnes désireuses d’investir dans un pays dénué de libertés civiles ou de démocratie et où le niveau de développement humain est faible.
Il est très préoccupant que le recours au travail forcé demeure très répandu, et des preuves concrètes d’amélioration dans ce domaine, aussi bien en droit que dans la pratique, sont nécessaires. Notamment, le gouvernement doit accueillir favorablement l’extension du mandat du Chargé de liaison du BIT afin d’étendre les projets de développement communautaires à d’autres zones du pays et doter le Chargé de liaison d’une plus grande compétence dans le cadre du mécanisme de plainte. Les membres employeurs ont vivement regretté qu’il n’ait pas encore été mis un terme au travail forcé et qu’il y ait peu de chances que la situation évolue dans un avenir proche. Le gouvernement doit prendre au sérieux l’avertissement que des mesures plus vigoureuses pourraient être demandées s’il ne fait pas rapidement des efforts supplémentaires pour mettre un terme à la pratique du travail forcé.
B. Observation de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'exécution par le Myanmar de la convention no 29
C. Rapport du Chargé de liaison à la séance spéciale de la Commission de l'application des normes sur l'application par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
D. Conclusions adoptées par la Commission de l'application des normes lors de sa séance spéciale pour l'examen des faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (Conférence internationale du Travail, 97e session, juin 2008)
E. Documents soumis au Conseil d'administration à sa 303e session
F. Documents soumis au Conseil d'administration à sa 304e session
Document D.6
G. Information reçue du gouvernement du Myanmar - Communication reçue par le Bureau le 1er juin 2009
La commission a pris note des observations de la commission d’experts et du rapport du Chargé de liaison du BIT à Yangoon, relatant les plus récents développements concernant la mise en œuvre du mécanisme de plainte en matière de travail forcé instauré le 26 février 2007 pour une période d’essai allant jusqu’au 26 février 2009 puis prorogé pour une nouvelle période de douze mois. Elle a également pris note des discussions du Conseil d’administration et des décisions prises par celui-ci à ses sessions de novembre 2008 et mars 2009. Enfin, elle a dûment pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a fait suite.
La commission a reconnu que, depuis sa dernière session, quelques mesures limitées ont été prises de la part du gouvernement du Myanmar: nouvelle prorogation d’un an du protocole d’entente complémentaire; certaines activités concernant l’information du public sur le mécanisme de plainte instauré par le protocole complémentaire; certaines améliorations en ce qui concerne l’enrôlement par les militaires de personnes n’ayant pas l’âge légal; et la diffusion de publications ayant trait au protocole d’entente.
La commission est cependant d’avis que ces mesures sont absolument insuffisantes. Rappelant les conclusions auxquelles elle était parvenue à sa séance spéciale de la 97e session de la Conférence (juin 2008), la commission a à nouveau souligné la nécessité que le gouvernement du Myanmar s’engage de manière résolue dans la mise en œuvre pleine et entière des recommandations de la commission d’enquête constituée par le Conseil d’administration en mars 1997 en application de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. Elle a également rappelé que les décisions prises par la Conférence en 2000 et en 2006 en ce qui concerne l’application par le Myanmar de la convention no 29 sont toujours d’actualité, et ce en tous leurs éléments constitutifs.
La commission a pleinement appuyé toutes les observations de la commission d’experts ainsi que les décisions susmentionnées du Conseil d’administration, et elle attend du gouvernement du Myanmar qu’il s’engage, de toute urgence, dans la mise en œuvre de toutes les mesures demandées.
La commission a demandé instamment que le gouvernement donne suite, pleinement et sans délai, aux recommandations de la commission d’enquête et aux observations de la commission d’experts et, en particulier:
2) qu’il modifie le paragraphe 15 du chapitre VIII de la nouvelle Constitution de manière à le rendre conforme à la convention no 29;
3) qu’il assure l’élimination totale des pratiques de travail forcé encore très diffuses et courantes;
4) qu’il assure que ceux, civils ou militaires, qui ont recouru au travail forcé soient poursuivis et sanctionnés conformément au Code pénal;
5) qu’il publie officiellement et au plus haut niveau une proclamation claire confirmant au peuple du Myanmar sa politique d’élimination du travail forcé et sa volonté de poursuivre ceux qui y auraient recours;
6) qu’il approuve la publication d’une brochure simple, dans les langues vernaculaires, présentant le fonctionnement du protocole complémentaire;
7) qu’il élimine les obstacles persistants empêchant matériellement que les victimes de travail forcé ou les membres de leur famille portent plainte et qu’il suspende immédiatement toutes les mesures de harcèlement, de représailles ou d’emprisonnement contre les personnes ayant eu recours au mécanisme de plainte ou ayant facilité un tel recours.
La commission a spécialement appelé le gouvernement du Myanmar à user de tous les moyens en son pouvoir, notamment des divers instruments de communication grand public, pour faire mieux connaître à la population la législation contre le recours au travail forcé, ses droits en vertu de cette législation et enfin sa faculté d’accéder, au besoin, à un mécanisme de plainte pour faire valoir ces droits.
La commission, tout en prenant acte de la poursuite de la pratique des ateliers ou séminaires conjoints de sensibilisation, a appelé le gouvernement et le Chargé de liaison du BIT à intensifier leurs efforts tendant à ce que tous les représentants de l’autorité (civile ou militaire) soient rendus pleinement conscients de leurs responsabilités au regard de la loi.
La commission a pris note avec une profonde préoccupation de la persistance des violations des droits de l’homme au Myanmar, notamment de l’arrestation de Aung San Suu Kyi. Elle a appelé à sa libération, à celle des autres prisonniers politiques et des militants syndicaux. Elle a appelé à la libération immédiate des personnes actuellement incarcérées pour avoir été liées au fonctionnement du mécanisme de plainte.
La commission a appelé à un renforcement des moyens dont dispose le Chargé de liaison du BIT pour aider le gouvernement à donner suite à toutes les recommandations de la commission d’enquête et assurer le fonctionnement effectif du mécanisme de plainte, attendant du gouvernement une coopération pleine et entière à cet égard.
A. COMPTES RENDUS DE LA DISCUSSION DE LA COMMISSION DE L'APPLICATION DES NORMES
Un représentant gouvernemental du Myanmar a indiqué que le Myanmar traverse actuellement une phase décisive de son histoire contemporaine. Le référendum national organisé en vue de l'adoption de la nouvelle Constitution de l'Etat s'est déroulé avec succès le 10 mai 2008 dans 278 des 325 cantons que compte le pays et, le 24 mai 2008, dans les autres cantons des districts de Yangon et Irrawaddy qui ont été frappés par le cyclone Nargis. D'après les résultats, plus de 26,8 millions d'électeurs inscrits se sont prononcés en faveur de la Constitution, ce qui représente 92,48 pour cent des voix exprimées. On peut donc dire que cette nouvelle Constitution est déjà approuvée par une écrasante majorité de la population du Myanmar. Le Conseil d'Etat pour la paix et le développement a publié, le 29 mai 2008, le communiqué no 7/2008 annonçant que la Constitution de l'Etat avait été ratifiée et promulguée par le référendum national. Le Myanmar a ainsi réalisé le quatrième point de la feuille de route qui en compte sept. Les élections générales démocratiques et pluralistes, qui constituent le cinquième point, auront lieu en 2010. Il s'agit en fait d'un jalon majeur sur la voie de la transition politique du Myanmar vers une société démocratique.
La visite effectuée conjointement, à des fins de sensibilisation, par le ministère du Travail et le chargé de liaison du BIT dans le canton de Nyaung Lay Bin du district de Bago, les 20 et 21 mai 2008, a démontré que ce dernier est libre de ses mouvements pour s'acquitter de ses responsabilités. Un autre domaine dans lequel des progrès significatifs ont été réalisés est celui de la sensibilisation et de l'éducation du public. Le ministère du Travail a organisé une conférence de presse spéciale le 26 mars 2007 à Nay Pyi Taw. Le directeur général du Département du travail y a expliqué en détail la teneur du Protocole d'entente complémentaire et a répondu aux questions des rapporteurs et des journalistes. Par ailleurs, le 31 mars 2007, le ministère du Travail a également publié dans la presse locale, à savoir le New Light of Myanmar, des informations à propos de l'interdiction du travail forcé dans le pays.
De plus, il faut indiquer que, en réponse à la demande du Conseil d'administration, le texte du Protocole d'entente complémentaire a été traduit en langue nationale et est disponible sur le site Internet du ministère du Travail; il a également été communiqué au chargé de liaison du BIT.
Depuis la 301e session du Conseil d'administration, le chargé de liaison a reçu 78 plaintes dont 45 ont été transmises au groupe de travail pour suite à donner après enquête préliminaire du chargé de liaison. Sur ces 45 cas, 29 ont été classés après enquête du ministère du Travail. Les 16 cas restants sont toujours à l'examen et les enquêtes correspondantes devraient aboutir incessamment. A la fin du mois de février 2008, le chargé de liaison a transmis au président du groupe de travail, le vice-ministre du Travail, 19 plaintes visant les autorités militaires. Le ministère du Travail les a soumises aux bureaux de l'adjudant général du ministère de la Défense. Des informations détaillées à propos de ces plaintes ont déjà été communiquées à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations en date du 28 février 2008. Par la suite, le ministère du Travail a encore reçu six autres plaintes du chargé de liaison, qu'il a aussi transmises au bureau de l'adjudant général pour qu'il leur réserve la suite nécessaire. Le nombre total des plaintes visant les militaires s'élève à 25, dont 16 sont déjà classées et neuf sont toujours en instance. Sur les neuf plaintes restantes, des réponses ont déjà été fournies au chargé de liaison pour quatre d'entre elles, les cinq autres étant toujours à l'enquête.
Le Myanmar attache beaucoup d'importance à la question de la protection et de la promotion des droits de l'enfant. Le pays est l'un des Etats signataires de la Convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant et a promulgué un Code de l'enfance ainsi que des lois et règlements sur le recrutement dans les forces armées qui interdisent de recruter des enfants mineurs de moins de 18 ans. De plus, l'équipe locale des Nations Unies au Myanmar a apporté sa coopération et son soutien aux efforts du gouvernement visant à empêcher le recrutement de mineurs. La coopération avec cette équipe ainsi qu'avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés se poursuivra.
S'agissant de Su Su Nway, il a indiqué qu'elle fait l'objet de deux chefs d'inculpation. Le premier en application des articles 124(a), 130(b) et 505(b) du Code pénal, le deuxième relève des articles 143 et 147 du Code pénal. Le procès, devant le tribunal du district de Yangon Ouest, est en cours. Dans les deux cas, les articles du Code pénal en vertu desquels elle a été inculpée sont sans rapport avec le Protocole d'entente complémentaire ou les droits des travailleurs.
Pour ce qui est du cas de Min Aung, il a été inculpé, en vertu de l'article 143 du Code pénal, du chef d'appartenance à une association illicite, en application de l'article 295 du même code pour outrage à l'encontre d'un groupe destiné à heurter ses sentiments religieux, sa religion ou ses convictions religieuses, ainsi qu'en application de l'article 505(b) pour des déclarations constitutives de délit contre l'ordre public. Il a été reconnu coupable des chefs d'inculpation précités et condamné en conséquence par le tribunal pénal du district de Thandwe. Sa peine a été réduite en appel par la Cour pénale de l'Etat de Rakhine. Les matières faisant l'objet de ces sections du Code pénal sont étrangères aux questions des travailleurs et ne relèvent pas du Protocole d'entente complémentaire. La Cour suprême a confirmé les arrêts de la Cour pénale de l'Etat de Rakhine. Dans une autre affaire, Min Aung a été inculpé par le tribunal pénal du district de Thandwe en application de l'article 6 de la loi sur la constitution d'associations et a été reconnu coupable et condamné. Sa peine a été réduite en appel par la Cour de l'Etat de Rakhine.
Il faut rappeler que le cas de Thet Wai n'est en aucune manière associé à des activités s'opposant au travail forcé. Il a été inculpé en application de l'article 353 du Code pénal, pour agression ou violence en vue d'empêcher un fonctionnaire public d'accomplir ses fonctions, et de l'article 189 du même code pour menaces ou insultes à l'adresse d'un fonctionnaire public. Son procès est toujours en cours.
Parmi les principes fondamentaux inscrits dans la nouvelle Constitution du Myanmar figure explicitement, au chapitre VIII, paragraphe 359, une disposition relative au travail forcé qui montre clairement que le gouvernement a mis en place un cadre d'ensemble de mesures législatives afin d'éliminer cette pratique dans le pays. S'agissant du violent cyclone tropical qui a durement frappé le pays, quelques informations sur la situation au Myanmar doivent être fournies. Au début du mois, le Myanmar a subi la catastrophe naturelle la plus grave de son histoire. Le cyclone Nargis a frappé les districts de Ayeyawady et Yangon les 2 et 3 mai avec des effets dévastateurs. Dans les deux jours précédents, la radio et la télévision nationales n'avaient cessé de mettre en garde les populations de la région. Cependant, le cyclone a été d'une extrême violence, avec une marée et des vents très forts qui ont empêché les habitants de fuir la région. C'est ainsi que la mort de 77 738 personnes a été confirmée, 55 917 personnes sont toujours portées disparues et 19 359 ont été blessées.
Le gouvernement, en collaboration avec la communauté internationale, a organisé l'aide et les secours d'urgence, notamment par l'établissement de camps de réfugiés et la distribution de nourriture aux victimes du cyclone. Par ailleurs, il collabore étroitement avec les pays voisins de l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE) et avec la communauté internationale. Le 19 mai, l'ANASE a institué un mécanisme de coordination placé sous sa direction et destiné à faciliter la distribution et l'utilisation efficaces de l'aide envoyée par la communauté internationale. Une équipe spéciale dirigée par le Secrétaire général de l'ANASE a été constituée pour assurer le fonctionnement du mécanisme de coordination. A la date du 25 mai 2008, le Myanmar avait reçu 3 273,20 tonnes de fournitures humanitaires acheminées par 221 vols cargos en provenance de divers pays et organisations. En outre, des secours alimentaires d'urgence arrivent chaque jour par mer et par terre. Ces provisions sont immédiatement distribuées aux victimes.
Le gouvernement a annoncé un deuil national de trois jours pour les victimes du cyclone, les 20, 21 et 22 mai 2008. Le président du Conseil d'Etat pour la paix et le développement s'est rendu en visite dans les régions sinistrées du 19 au 21 mai 2008 afin de réconforter les victimes du cyclone. Les 17, 21 et 22 mai 2008, le gouvernement a organisé une visite des camps de secours des districts de Yangon et de Ayeyawady pour les diplomates et les agences des Nations Unies ainsi que les représentants des pays donateurs et des organisations internationales. Le 22 mai, le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Kimoon, a visité des camps de réfugiés dans la zone la plus touchée, celle du delta, et les autorités locales lui ont expliqué les mesures prises en matière de remise en état, de services sanitaires et de réponse aux besoins des victimes. Il a été reçu par le Chef de l'Etat et le Premier ministre.
Le 25 mai 2008, s'est tenue à Yangon une Conférence internationale d'appel de fonds sous l'égide de l'ANASE et des Nations Unies. Cinquante et un pays et 24 organisations internationales ont participé, en présence de M. Ban Ki-moon, à cette conférence qui a surtout traité de la coopération pour l'apport d'aide aux victimes du cyclone.
En conclusion, le représentant gouvernemental a exprimé ses vifs remerciements aux gouvernements, aux Nations Unies, y compris l'Organisation internationale du Travail, aux organisations internationales, aux ONG, aux particuliers et aux sympathisants, ici et ailleurs, pour la sympathie et les condoléances qu'ils ont exprimées et pour la générosité des secours d'urgence et de l'aide financière et pour l'aide apportée à la réinstallation de victimes des régions frappées par le cyclone. Il a également exprimé sa gratitude à M. Marshall et au personnel du bureau de liaison de l'OIT qui, dans le cadre de l'équipe locale des Nations Unies, ont coopéré activement aux efforts du gouvernement. Les membres travailleurs ont souligné que, depuis de nombreuses années, la Commission de l'application des normes de la Conférence doit tenir une séance spéciale concernant ce cas grave et persistant qu'est celui du travail forcé ou obligatoire au Myanmar. Cette année toutefois, et contrairement aux années passées où la commission a dû se contenter de petits pas en avant ou en arrière, l'état des choses se trouve bouleversé par des événements aussi bien dramatiques, politiques qu'humanitaires.
Il convient de rappeler que la commission d'enquête, nommée en 1997, a conclu que la convention no 29 était violée dans le droit national et dans la pratique, et ce d'une manière généralisée et systématique. En juillet de cette année, cela fera dix ans que la commission d'enquête a formulé les trois recommandations suivantes:
1) que les textes législatifs pertinents soient mis en conformité avec la convention no 29;
2) que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités et, en particulier, par les militaires; et
3) que les sanctions prévues pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées.
De plus, pour assurer la mise en œuvre de ces trois recommandations, la commission d'experts a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures concrètes doivent être prises. En outre, le manquement continu du gouvernement à mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête a mené le Conseil d'administration à utiliser l'article 33 de la Constitution de l'OIT en mars 2000, une décision sans précédent. Toutefois, malgré cette décision et année après année, la commission d'experts ainsi que cette commission n'ont pu que constater la persistance flagrante des violations de la convention no 29 et la négation systématique des recommandations de la commission d'enquête. En effet, après dix ans aucune de ces recommandations n'a été mise en œuvre. Et pendant tout ce temps, un grand nombre de sociétés multinationales n'ont toutefois pas hésité à rester dans le pays.
Quelle est la situation aujourd'hui? Selon la dernière observation formulée par la commission d'experts ainsi que par le rapport du chargé de liaison et les faits nouveaux rapportés dans les documents D.5 et D.6 de cette commission, le gouvernement, bien qu'ayant élaboré un projet de nouvelle Constitution, n'y a pas inclus le principe de la liberté syndicale et l'interdiction claire de tout travail forcé. Ainsi, la liberté syndicale est toujours entièrement soumise aux lois sur la sécurité de l'Etat. La convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ne sera pas plus respectée à l'avenir que par le passé. De plus, la disposition incluse dans le projet de la nouvelle Constitution interdisant le recours au travail forcé contient de telles restrictions qu'elle est contraire à la convention no 29.
En outre, aucune déclaration de haut niveau sur le travail forcé n'a été faite de la part des autorités birmanes, et ce malgré le fait que le Conseil d'administration l'ait demandé à plusieurs reprises. S'agissant des moyens budgétaires adéquats pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée, le gouvernement a indiqué qu'une allocation budgétaire est prévue pour tous les ministères afin de couvrir les coûts de la main-d'œuvre. Cependant, tout comme la commission d'experts l'a mentionné dans son observation, il est difficile de comprendre pourquoi le recours à une main-d'œuvre forcée ou non rémunérée reste généralisé, en particulier de la part de militaires et des administrations civiles locaux.
Quant à la diffusion et au contrôle de l'interdiction du travail forcé, le Protocole d'entente complémentaire de février 2007 constitue un développement intéressant en ce qu'il contient une nouvelle procédure de plaintes par l'intermédiaire du chargé de liaison. Cette procédure est une avancée. Néanmoins, il s'agit d'une avancée très limitée en ce que le chargé de liaison ne peut que recevoir des plaintes et assister les plaignants, et non présenter luimême des cas d'infractions. De plus, cette procédure reste peu connue, pour au moins deux raisons. En premier lieu, même après quinze mois, il n'y a toujours pas de version compréhensible du protocole, à défaut d'une traduction approuvée par la Junte. En second lieu, les personnes ne vivant pas près de Rangoon ont des difficultés très pratiques à présenter des plaintes, à défaut d'un réseau de transmission couvrant tout le pays. Enfin, nombre de personnes relatant des plaintes et travaillant à l'application du protocole sont harcelées ou mises en détention.
Dans ce contexte, le nombre de plaintes reçues ne peut être considéré comme reflétant l'ampleur du travail forcé dans le pays. En outre, il ne faut pas confondre le moyen - c'est-à-dire la procédure de plaintes - avec l'objectif - à savoir l'abolition du travail forcé. Il ne faut également pas restreindre la mission du chargé de liaison à l'application du protocole. En effet, cette mission est d'œuvrer toujours et en priorité pour la mise en œuvre des trois recomman- dations formulées par la commission d'enquête.
La nouvelle procédure est néanmoins révélatrice de deux choses, à savoir la persistance du travail forcé et le déficit criant de démocratie et de liberté d'expression. En ce qui concerne la persistance du travail forcé, la Confédération syndicale internationale (CSI) a transmis une documentation abondante à la commission d'experts. S'agissant du degré de démocratie, certains faits et événements doivent être rappelés, tels:
- la dure répression par le gouvernement des manifestations pacifiques de septembre 2007, et un nombre de morts plus élevé qu'initialement rapporté;
- la détention et l'emprisonnement de personnes ayant exercé leurs droits fondamentaux d'expression, notamment Min Aung, Su Su Nway et les six militants syndicaux condamnés en septembre 2007, ainsi que l'inculpation de l'un des facilitateurs de la nouvelle procédure de plaintes, U Thet Wai, pour de simples contacts avec le BIT;
- l'arrestation cette semaine de 18 personnes manifestant pacifiquement contre la prolongation de l'assignation à résidence de Mme Aung San Suu Kyi, et ceci malgré le projet de la nouvelle Constitution garantissant la liberté d'expression;
- le référendum sur le projet de la nouvelle Constitution qui a été préparé et élaboré de manière autoritaire, sans aucun dialogue avec l'opposition, en excluant de toute participation les moines, nonnes, dirigeants hindous et chrétiens, ainsi que Aung San Suu Kyi et d'autres;
- l'imposition de trois ans d'emprisonnement pour diffusion de tracts, panneaux, discours et autres critiques contre le référendum; et finalement
- la réservation aux militaires de 25 pour cent des sièges au parlement et d'un droit de veto.
Cette restriction de la démocratie s'est manifestée de manière dramatique après le passage du cyclone Nargis. Les zones sinistrées ont été fermées à toute aide humanitaire extérieure. La population n'a pu faire état ni de ses souffrances ni de ses besoins urgents, de sorte que, d'après des estimations, au moins un tiers de la population sinistrée attend toujours une aide indispensable. Les membres travailleurs ont exprimé toute leur sympathie et leur solidarité au peuple birman.
Cette catastrophe humanitaire ne doit pas détourner l'attention de la question du travail forcé en Birmanie. En effet, la Junte pourrait très bien profiter de cette catastrophe pour recourir davantage au travail forcé et au travail des enfants dans la longue phase de reconstruction du pays. C'est pourquoi il incombe à toutes les organisations internationales et à tous les gouvernements de veiller à ce que leur aide respecte les droits fondamentaux des travailleurs en Birmanie. Dans un même temps, l'OIT doit faire en sorte que la reconstruction du pays puisse se faire dans le respect des droits des travailleurs et en prévoyant le travail décent.
Depuis bientôt dix ans, la commission organise des séances spéciales sur le Myanmar et le cas de ce pays y est examiné depuis plus de vingt-six ans. La cause des travailleurs birmans et leur combat contre le régime d'esclavage imposé dans leur pays sont aussi la cause et le combat du mouvement syndical international, en dépit des propos diffamatoires et inacceptables proférés par le régime, accusant la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) d'être une organisation terroriste. Il n'est pas possible d'examiner ce cas hors de tout contexte. Il faut donc rappeler la répression brutale de septembre 2007 contre le plus grand mouvement démocratique connu depuis 1988, pendant laquelle 110 personnes au moins ont été tuées et des milliers d'autres blessées, des peines de vingt à vingt-huit ans de prison prononcées l'an dernier contre six militants syndicaux - Thurein Aung, Kyaw Kyaw, Shwe Joe, Wai Lin, Aung Naing Tun et Nyi Nyi Zaw - pour s'être simplement réunis pour discuter des droits du travail, et l'écœurante opposition du régime à l'arrivée du personnel humanitaire international dans le pays et la confiscation de produits alimentaires et de médicaments vitaux en pleine tragédie nationale du cyclone Nargis. De plus, pas plus tard que la semaine précédente, le régime a été jusqu'à violer sa propre loi et sa Constitution en allongeant la peine de détention de Aung San Suu Kyi de cinq années supplémentaires et en arrêtant par la même occasion les manifestants pacifiques qui protestaient contre cette mesure. Ces événements ne font que s'ajouter aux preuves irréfutables de la mauvaise foi chronique du régime lorsqu'il s'agit des droits de l'homme internationalement reconnus et des conventions fondamentales de l'OIT, ainsi que de son mépris absolu pour la quasi-totalité de sa population.
Les membres travailleurs ont également rappelé leurs remarques de l'année précédente sur les mérites relatifs, mais aussi les limites du Protocole d'entente complémentaire, notamment la crainte de réelles représailles du Conseil d'Etat pour la paix et le développement; les entraves à la libre circulation des plaignants des régions reculées et des milliers de victimes birmanes vivant au Bangladesh, en Malaisie, en Thaïlande et dans d'autres pays et qui ne peuvent avoir accès au système. Le fondement même du Protocole d'entente complémentaire est qu'il ne doit plus y avoir de représailles contre les plaignants ou les plaignants potentiels. Or, malgré les protestations du représentant gouvernemental, il y a quelques mois à peine, U Thet Wei, de la Ligue nationale pour la démocratie, a été arrêté pour avoir été en possession de rapports sur le travail forcé qu'il devait remettre au chargé de liaison du BIT. Les médias ont également signalé que plus d'une trentaine d'activistes qui enquêtaient sur des questions liées au travail ont été arrêtés et sont toujours détenus.
Le mépris et l'impunité, en droit et en pratique, ont été la principale réponse du régime militaire aux recommandations de la commission d'enquête approuvées par le Conseil d'administration il y a plus de dix ans. Premièrement, s'agissant de la recommandation d'émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires, comme le note la commission d'experts, le gouvernement n'a toujours pas fourni ne fûtce que des détails minimes sur la teneur de ces instructions. En fait, au vu de la volumineuse documentation rassemblée par la CSI à propos de la persistance du travail forcé dans pratiquement chaque région, il est clair que de telles instructions n'ont pas été données. Deuxièmement, pour ce qui est de s'assurer que l'interdiction du travail forcé est largement rendue publique, et bien qu'il soit affirmé que de la publicité a été donnée au Protocole d'entente complémentaire, il n'y a toujours pas eu de déclaration publique univoque selon laquelle toutes les formes de travail forcé étaient interdites sur l'ensemble du territoire et seraient réprimées au plus haut niveau. Troisièmement, la recommandation demandant au gouvernement de prévoir les budgets adéquats pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée et non rémunérée reste sans suites. Quatrièmement, pour ce qui est d'assurer le respect de l'interdiction du travail forcé, la commission d'experts a conclu que le régime n'a toujours pas abrogé les clauses de la loi autorisant le travail forcé, alors qu'il promet de le faire depuis plus de quarante ans. Le régime n'a pas non plus adopté une législation positive interdisant le travail forcé et la servitude pour dettes des enfants, y compris dans les forces armées. La commission d'experts a en outre noté que les autorités n'ont intenté aucune action administrative ou pénale contre des militaires pour avoir imposé des conditions de travail forcé à la population. Suite aux 24 plaintes transmises par le chargé de liaison au gouvernement, seuls deux fonctionnaires civils ont fait l'objet de poursuites sérieuses et efficaces. C'est pourquoi les membres travailleurs réitèrent leurs vives préoccupations devant l'absence de responsabilité pénale.
Enfin, les membres travailleurs ont rappelé que le Conseil d'administration a décidé, en mars 2007, de différer au moment opportun la question d'un avis consultatif de la Cour internationale de Justice. Le dernier rapport de la commission d'experts montre à l'évidence que la coopération et les progrès effectivement réalisés pour satisfaire aux recommandations de la commission d'enquête ne répondent pas, même de loin, aux critères qui avaient été retenus comme une des conditions de base d'un examen par la Cour internationale de Justice.
Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental de s'être présenté une nouvelle fois devant la Commission de la Conférence à l'occasion de l'examen du manquement persistant de son pays à appliquer la convention no 29. Après les dévastations causées par le cyclone Nargis, la communauté internationale est de tout cœur avec la population du Myanmar. Toutefois, la réaction du pays devant cette tragédie, en particulier la lenteur à accepter l'aide de la communauté internationale et le manque de transparence, illustre certaines causes fondamentales du travail forcé, qui demeure une pratique courante. Parmi les causes du travail forcé figure l'absence de libertés civiles fondamentales, et en particulier le droit des personnes à la liberté et la sécurité, la liberté de pensée et d'expression, la liberté de réunion et d'association, le droit à un procès équitable devant une juridiction indépendante et impartiale et la protection de la propriété privée.
Deux événements ont eu un impact significatif sur le contexte dans lequel l'OIT travaille dans ce pays, à savoir l'agitation sociale et sa répression à l'automne 2007 et les dévastations causées par le cyclone Nargis. Lors de la discussion de son cas, les organes de contrôle de l'OIT se sont concentrés sur les recommandations de la commission d'enquête, au regard desquelles la commission d'experts a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires; assurer que l'interdiction du travail forcé est largement rendue publique; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le respect de l'interdiction du travail forcé.
Les membres employeurs se sont félicités de la proro- gation de la période d'essai du Protocole d'entente complémentaire et reconnaissent que le nombre des plaintes a augmenté. En revanche, des problèmes pratiques fondamentaux semblent persister s'agissant des possibilités matérielles données aux victimes et à leur famille de déposer plainte et au chargé de liaison et à son équipe de s'acquitter de leurs tâches. Il est vivement préoccupant que certaines personnes associées au fonctionnement du mécanisme de présentation des plaintes soient toujours en détention et les membres employeurs sont d'avis que le nombre peu élevé de plaintes indique que la population pourrait ne pas avoir suffisamment accès à ce mécanisme ou ne pas avoir le sentiment d'être autorisée à déposer plainte. De plus, évoquant les propos du représentant gouvernemental selon lesquels le droit pénal n'est pas du ressort du Protocole d'entente complémentaire, les membres employeurs ont insisté sur le fait que l'important est de garantir que le droit pénal n'outrepasse pas les droits de l'homme, viole la liberté d'association et facilite ou justifie le travail forcé.
Les membres employeurs se sont félicités de l'approbation par le gouvernement d'une traduction du Protocole d'entente complémentaire. Il semble que le texte proposé pour un projet de brochure est actuellement examiné par le gouvernement. Une publicité ininterrompue pour le mécanisme est vitale pour que l'interdiction du travail forcé et de sa pratique soit connue de tous, de façon à envoyer à ceux qui seraient tentés d'y recourir un message leur signifiant qu'ils ne peuvent agir impunément. Il est à espérer que le texte de l'OIT destiné à la brochure sera approuvé et diffusé dans tout le pays sans retard. Une formation ciblée et des missions conjointes en vue d'assurer le suivi de certaines plaintes en particulier auraient aussi leur utilité. Il faut toutefois souligner qu'une déclaration publique de haut niveau sur la politique du gouvernement quant à l'interdiction du travail forcé reste vitale si l'on veut témoigner d'une réelle volonté d'éradiquer le travail forcé.
Bien qu'il soit trop tôt pour évaluer les conséquences du cyclone Nargis, le travail forcé ne doit pas être utilisé et d'autres violations des droits de l'homme ne doivent pas être commises pendant la phase de reconstruction. A ce propos, le travail effectué par le chargé de liaison et d'autres institutions des Nations Unies dans des situations difficiles doit être souligné et le gouvernement doit être exhorté à leur faciliter la tâche.
La Constitution qui a été récemment adoptée contient des articles se rapportant à la liberté syndicale, à la liberté d'expression et au droit d'organisation. Toutefois, l'article interdisant le recours au travail forcé contient des dispositions qui amènent à s'interroger sur sa conformité avec la convention. L'avenir dira si et comment les droits inscrits dans les deux conventions fondamentales ratifiées par le Myanmar seront appliqués dans la pratique après l'adoption de la Constitution. Les mots ne suffisent pas. Une mise en pratique entière et totale s'impose conformément aux obligations contractées en vertu de la convention no 29.
L'OIT n'a cessé d'exhorter le gouvernement à appliquer la convention tant en droit que dans la pratique et à mettre un terme à un climat d'impunité intolérable. Le gouvernement est loin d'appliquer les mesures recom- mandées par la commission d'enquête ou de donner effet aux quatre mesures d'action définis par la commission d'experts. Il est préoccupant que le gouvernement n'ait pas répondu de manière détaillée à la demande d'information contenue dans la précédente observation de la commission d'experts ni à la dernière communication en date de la CSI. Les membres employeurs ont invité une fois pour toutes le gouvernement à fournir des informations complètes et détaillées à la commission d'experts en tant que preuve sans équivoque de sa volonté d'entamer une véritable coopération avec les organes de contrôle de l'OIT. Il faut rappeler au gouvernement que le Protocole d'entente complémentaire et la mise en place d'une procédure de plaintes ne le dispensent en rien de son obliga- tion d'éliminer le travail forcé aux termes de la convention.
En conclusion, les membres employeurs ont invité le gouvernement à apporter des améliorations tangibles à sa législation nationale et à prévoir des budgets suffisants pour faire en sorte qu'une main-d'œuvre rémunérée remplace le travail forcé dans les activités sous administration civile comme militaire en tant que preuve de sa volonté sans équivoque de lutter contre le travail forcé et contre le climat d'impunité inacceptable qui règne de longue date. Cette situation dure depuis trop longtemps. Il est temps que le gouvernement adopte un sens de l'humanité, mette un terme au travail forcé et reconstruise le pays sans recourir au travail forcé, comme le réclament ses ressortissants et le reste du monde.
Le membre gouvernemental de la Slovénie, s'exprimant au nom des membres gouvernementaux des Etats membres de l'Union européenne (UE), de pays candidats, à savoir la Croatie, l'ex-République yougoslave de Macédoine et la Turquie, ainsi qu'au nom de l'Arménie, de la Géorgie, de l'Islande, de la République de Moldova, du Monténégro, de la Norvège, de la Suisse et de l'Ukraine, a réaffirmé leur solidarité avec le peuple de la Birmanie/Myanmar, qui a été affecté par le cyclone Nargis, et a salué la Conférence internationale qui s'est tenue à Yangon le 25 mai 2008, organisée par les Nations Unies et l'ANASE, afin de répondre aux besoins urgents de ceux ayant été affectés par ce terrible désastre naturel. Les efforts déployés par les Nations Unies, les agences internationales et locales, les organisations non gouvernementales, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, les donateurs et tous les autres dans le but d'apporter l'aide essentielle au peuple de ce pays doivent être appuyés fermement. Il est urgent de permettre un accès libre et sans entrave aux bénévoles afin de prévenir une tragédie encore plus grande. Il faut rappeler aux autorités que les visas et permis de travail doivent être rapidement octroyés à tous les bénévoles travailleurs humanitaires internationaux et prendre note des avancées qui ont été faites jusqu'à maintenant. L'UE exprime le ferme espoir que les autorités n'auront pas recours au travail forcé ou au travail des enfants dans la phase de reconstruction du pays, comme cela a été le cas après le tsunami de décembre 2004.
Le présent cas est l'un des plus sérieux et des plus anciens que l'OIT a eu à traiter jusqu'à maintenant. Par conséquent, le travail accompli par le l'OIT et par le chargé de liaison dans le but d'aider le gouvernement à abolir la pratique du travail forcé doivent être appuyés fermement. A cet égard, il faut rappelé les conclusions de la commission d'enquête, la résolution adoptée lors de la 89e session de la Conférence internationale du Travail, les conclusions des sessions antérieures du Conseil d'administration et les quatre mesures identifiées par la commission d'experts et devant être prises par le gouvernement pour répondre aux recommandations de la commission d'enquête, à savoir: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires; assurer que l'interdiction du travail forcé est largement rendue publique; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le respect de l'interdiction du travail forcé. Les autorités doivent s'assurer que les enfants ne sont pas recrutés pour le service militaire, que tous ceux qui ont recours au travail forcé soient punis adéquatement et que les sanctions soient strictement appliquées.
Tout en saluant la conclusion entre l'OIT et les autorités nationales du Protocole d'entente complémentaire du 26 février 2007, dont le but est d'éliminer le travail forcé et de mettre en place une procédure efficace de plaintes pour les victimes du travail forcé afin d'obtenir réparation, sans crainte de harcèlement ou de représailles, il faut également noter avec intérêt que la période d'essai du Protocole d'entente complémentaire a été prolongée pour une autre année. Néanmoins, il faut indiquer qu'il est profondément préoccupant que la population vivant à l'extérieur de Yangon ne connaisse pas la procédure de plaintes mise en place par le Protocole d'entente complémentaire, en raison de l'absence de traduction, de diffusion et d'activités de sensibilisation. Les autorités doivent donc être à nouveau priées de faire en sorte que le Protocole d'entente complémentaire et les autres outils de sensibilisation soient pleinement mis en œuvre, qu'ils soient traduits dans d'autres langues locales et qu'ils soient compréhensibles et largement diffusés.
Le rapport de la commission d'experts conclut que la procédure de plaintes, bien qu'elle soit valable, ne traite pas des causes profondes du problème du travail forcé qui ont été identifiées par la commission d'enquête et l'équipe de haut niveau. En particulier, elle ne traite pas des relations gouvernementales de base qui prévalent dans le pays, du rôle de l'armée et de ses politiques d'autosuffisance, ainsi que de l'absence de liberté syndicale, et, de façon plus générale, de liberté de réunion.
Manifestement, la mise en œuvre du Protocole d'entente complémentaire n'est ni et ne peut être suffisante. Afin d'accomplir des progrès substantiels et durables en matière d'élimination du travail forcé, les autorités nationales doivent prendre de nombreuses mesures allant au-delà de la mise en œuvre du protocole, lequel ne constitue qu'une étape vers l'accomplissement de la conformité avec la convention no 29. Il est primordial que les autorités réaffirment, dans une déclaration publique et sans ambiguïté, l'interdiction et l'illégalité de toute forme de travail forcé, y inclus le recrutement des enfants soldats, et qu'elles remplacent les dispositions légales contradictoires par une structure législative et réglementaire appropriée afin de donner effet aux recommandations de la commission d'enquête. L'orateur a déclaré partager la préoccupation du chargé de liaison quant à l'article de la nouvelle Constitution portant interdiction du recours au travail forcé et contenant des restrictions qui pourraient soulever la question de sa conformité avec la convention no 29. Enfin, les pays voisins doivent être encouragés à poursuivre leurs efforts pour guider le pays vers la cessation de la pratique du travail forcé et encourager la réconciliation nationale.
La représentante gouvernementale de la Nouvelle-Zélande a exprimé l'appréciation sincère de son gouvernement du dévouement continu du bureau de liaison de Yangon pour la promotion du respect par le gouvernement de la convention no 29, particulièrement en dépit des défis additionnels suscités par les manifestations de septembre 2007 au Myanmar, le référendum sur l'adoption d'une nouvelle Constitution tenu en mai 2008, ainsi que le passage du cyclone Nargis, désastre naturel majeur. Le bureau de liaison a accompli un travail considérable et est même parvenu à élargir son champ d'activités, incluant une formation de formateurs portant sur le recrutement militaire.
Il faut accueillir favorablement la prolongation du Protocole d'entente complémentaire pour douze autres mois, en espérant que cela ait pour effet de continuer à produire des résultats et contribue à une meilleure compréhension du problème. Néanmoins, les besoins sont plus vastes. Dans cet objectif, le gouvernement doit mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête et s'engager de manière ferme à mettre fin à la pratique du travail forcé. L'approbation récente d'une traduction du Protocole d'entente complémentaire constitue une étape dans la bonne direction. Il est à souhaiter que le document en question ainsi que d'autres documents informatifs sous étude soient utilisés de manière efficace, incluant une brochure explicative, dans le cadre d'une campagne de sensibilisation portant sur ce qui constitue du travail forcé, expliquant quels sont les droits des citoyens en vertu de la loi et décrivant la manière dont sont faites les plaintes dans le cadre de la procédure de l'OIT.
L'oratrice a exprimé, au nom de son pays, ses sympathies au peuple du Myanmar à la suite des dévastations causées par le cyclone Nargis. Le risque de voir augmenter la traite des personnes et le recours au travail forcé à la suite du cyclone, est préoccupant. Le gouvernement doit donc être prié de travailler avec l'OIT et les autres intervenants qui participent dans les efforts de secours afin de s'assurer que la reconstruction du pays n'implique pas l'usage du travail forcé. L'engagement absolu du gouvernement dans ce processus est primordial. Une coopération plus profonde entre les autorités et l'OIT doit se développer dans les mois et les années à venir, dans le but d'éradiquer le travail forcé, et ce sous toutes ses formes.
La membre travailleuse du Japon s'est référée aux statistiques de diverses organisations s'agissant des conditions de vie en Birmanie. Selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), le taux de mortalité infantile demeure élevé, avec 1 décès pour 10 naissances. La malnutrition est très répandue chez les enfants, dont près d'un tiers accusent des retards de croissance ou des insuffisances pondérales modérées ou graves. Plus de 25 pour cent de la population n'ont pas accès à un approvisionnement en eau potable saine et la contamination par l'arsenic est une préoccupation majeure.
De plus, la mise en garde lancée par le directeur du Programme alimentaire mondial (PAM), en octobre 2007, selon laquelle 5 millions de personnes au moins étaient en situation de pénurie alimentaire et l'aide humanitaire ne suffisait pas à satisfaire leurs besoins. Le PAM a aussi indiqué dans une proposition de projet soumise à son conseil d'administration qu'un tiers des enfants souffrent de malnutrition et qu'un sur cinq accuse un poids insuffisant à la naissance. Le taux de mortalité maternelle est de 230 pour 10 000 naissances en vie.
Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a récemment effectué une enquête sur les ménages avec l'accord du gouvernement. Elle a montré que 95 pour cent de la population vivent avec moins de 1 dollar E.-U. par jour et 90 pour cent avec moins de 65 cents. Le ménage moyen consacre près de 75 pour cent de son revenu à l'alimentation.
Tout le monde doit s'inquiéter d'une situation dans laquelle, alors que le gouvernement n'alloue que 0,5 pour cent de son budget à la santé, 40 pour cent de celui-ci vont aux forces armées. De plus, le gouvernement aurait dépensé plus de 300 millions de dollars E.-U. pour la construction de sa nouvelle capitale, Naypyidaw.
La population du pays a besoin de l'aide internationale. Or, dans les faits, en raison du bilan déplorable du gouvernement dans le domaine des droits de l'homme, et en matière de droits des travailleurs et de travail forcé notamment, l'aide publique au développement en provenance de l'étranger stagnait à 147 millions en 2006, soit un léger recul de 2 millions de dollars E.-U. par rapport à l'année précédente. Le Japon était le premier donateur, avec une contribution de 25,49 millions de dollars E.-U., c'est-à-dire 33 pour cent de l'aide totale reçue par le pays. Pourtant, ces chiffres ne disent pas tout. D'après les statistiques de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les contributions des puissances économiques émergentes limitrophes restent incertaines.
Il ne faut pas négliger le rôle de la Banque asiatique de développement (BAsD). Dans son rapport annuel de 2007, on pouvait lire que la banque continuait à surveiller l'évolution économique et qu'elle énoncerait une stratégie opérationnelle le moment venu, et qu'aucun prêt ou projet d'assistance technique n'avait été approuvé depuis 1987. Ceci est en contradiction avec le fait que, dans l'élaboration de la Stratégie de l'énergie pour la sous- région du Grand Mékong - un programme de coopération régionale associant six pays, dont la Birmanie - la BAsD est l'élément moteur du programme depuis son lancement, en 1992. Dans bon nombre de projets de développement s'inscrivant dans son cadre, de nombreux problèmes ont été signalés s'agissant des études d'impact sur l'environnement, des moyens d'existence des populations affectées et des dégâts à la diversité biologique et culturelle. L'oratrice fait part des préoccupations de son pays quant aux déplacements forcés et au recours au travail forcé en Birmanie.
S'agissant des secours d'urgence qui ont suivi le cyclone Nargis, il n'est aucunement question de s'opposer à l'aide humanitaire fournie ou promise par de nombreux gouvernements étrangers pour répondre aux premiers besoins des victimes. Elle invite le gouvernement et les bailleurs de fonds à veiller à ce que l'aide arrive aux populations qui en ont cruellement besoin ainsi qu'aux organisations démocratiques du pays, et à ce que, lorsque l'aide d'urgence cèdera progressivement la place à la reconstruction dans les préoccupations, il ne soit pas fait recours au travail forcé.
Le gouvernement doit être instamment invité à revoir la répartition de son budget pour allouer plus à la santé, à l'alimentation, à l'eau et à l'éducation. L'oratrice a demandé aussi à d'autres gouvernements de respecter et d'appliquer la résolution adoptée par la 88e session de la CIT en 2000, de revoir leurs relations avec ce pays et de faire rapport au Conseil d'administration.
Le membre gouvernemental du Canada a exprimé la sympathie de son gouvernement à l'égard des milliers de Birmans qui ont perdu des êtres chers et dont la vie a été gravement affectée par le cyclone Nargis. La qualité des Nations Unies, y compris celle du Secrétaire général de mener, en matière de coordination des efforts de l'aide avec l'ANASE et les autorités nationales doit être recon- nue. De plus, le chargé de liaison de l'OIT et son équipe doivent être remerciés pour leur travail effectué dans des conditions difficiles. Bien que modeste, un nombre croissant de travailleurs d'aide internationale a pu avoir accès à des zones ravagées. Les défis rapportés par le personnel humanitaire sont préoccupants.
Le mois de mai 2008 n'a pas été un mois encourageant pour le peuple birman. Le régime réticent demeure lent pour offrir au personnel humanitaire un accès libre et total à la population touchée. Le régime doit offrir un tel accès sans délai. Une nouvelle constitution a été adoptée sans consultation crédible des citoyens et l'assignation à domicile d'Aung San Suu Kyi, qui a été détenue plus de douze ans ces derniers dix-huit ans, a été prolongée une fois de plus. Le Canada condamne cette décision. Cette situation est tellement décevante, entièrement prévisible. Elle offre néanmoins un contexte crucial et édifiant pour ce que le BIT doit faire dans le pays concernant le travail forcé.
Lors de sa 301e session, en mars 2008, le Conseil d'administration a formulé des conclusions appelant, entre autres, à ce que des mesures soient prises par les autorités pour communiquer à son peuple l'action convenue avec la communauté internationale, représentée par l'OIT. La mesure la plus simple est la reproduction et la diffusion du Protocole d'entente complémentaire dans les langues locales. Que le gouvernement fasse une déclaration sans ambiguïté, au plus haut niveau, en réaffirmant l'interdiction de toute forme de travail forcé et son actuel engagement de mettre en œuvre cette politique est autrement plus difficile. Le Protocole d'entente complémentaire est à présent traduit en langue birmane et des discussions sont en cours concernant sa promulgation effective. Bien que ce développement soit modeste, il doit être favorablement accueilli et il est à espérer que le Protocole d'entente complémentaire sera très bientôt diffusé dans tout le pays. Pour ce qui de la déclaration de haut niveau dépourvue de toute ambiguïté, elle n'a toujours pas été faite. Le gouvernement doit être prié de faire de cette déclaration la prochaine étape, et de mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête pour éradiquer le travail forcé.
La référence au travail forcé dans la nouvelle Constitution n'est pas seulement insuffisante, mais il semble qu'elle soit problématique et qu'elle soulève des questions sur sa conformité aux dispositions de la convention no 29. Il faut saluer le travail accompli par la commission d'experts et attirer particulièrement l'attention sur le dernier paragraphe de son rapport qui se lit comme suit: "la commission conserve l'espoir que, ayant souscrit au Protocole d'entente complémentaire, le gouvernement prenne enfin les mesures requises pour assurer l'application de la convention en droit et dans la pratique et permettre ainsi de résoudre l'un des cas les plus graves et les plus anciens que cette commission ait jamais eu à connaître".
La membre gouvernementale de la Chine a pris note de la déclaration faite par le membre gouvernemental et s'est dite enchantée que le gouvernement du Myanmar travaille étroitement avec l'OIT depuis la conclusion du Protocole d'entente complémentaire. Depuis l'examen de la situation par le Conseil d'administration en mars de cette année, le gouvernement a pris des mesures concrètes.
Un référendum a été organisé en mai concernant la nouvelle Constitution qui interdit clairement toute forme de travail forcé, résolvant ainsi le problème juridique. Le bureau de liaison de l'OIT travaille étroitement avec les points focaux qui sont sur place pour prévenir le recours au travail forcé. La procédure de présentation de plaintes fonctionne bien. Le Protocole d'entente complémentaire est traduit et diffusé par le ministère du Travail. De plus, des instructeurs sont formés, en collaboration avec l'UNICEF et avec d'autres agences. Tous ces efforts témoignent de la bonne volonté politique du gouvernement pour éradiquer le travail forcé.
La coopération entre le gouvernement et l'OIT montre une collaboration effective basée sur la confiance mutuelle pour le bien-être durable du peuple. Il faut espérer que l'OIT et la communauté internationale maintiendront leur engagement dans le dialogue constructif, encouragent et fournissent de l'assistance, notamment dans les domaines d'infrastructure. Ceci peut contribuer à éradiquer le travail forcé et à garantir les droits fondamentaux et l'égalité d'accès au développement et à ses avantages.
Le membre travailleur de la Malaisie s'est dit préoccupé de ce que parmi les Etats membres de l'ANASE, il existe des standards différents de pratique en matière de droits humains. La Charte de l'ANASE énonce que ses Etats membres adhèrent au principe de démocratie, à la primauté du droit et à la bonne gouvernance, au respect pour et à la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les droits de l'homme fondamentaux doivent être respectés, défendus et pratiqués, et il est à espérer que cela contribuera à établir les conditions nécessaires à la réalisation d'un travail décent pour tous les êtres humains, de manière à faire valoir l'équité et la dignité humaine dans le domaine de l'ANASE.
Depuis 1991, l'Assemblé générale des Nations Unies a adopté 16 résolutions sur la Birmanie portant directement sur une série de problèmes, incluant le déni des droits humains, le manque de progrès en matière de démocratie, ainsi que la détention continue de prisonniers politiques. Des déclarations percutantes ont été faites année après année, souligna la nature militaire du régime birman et le défaut par le Conseil national pour la paix et le développement (CNPD) d'aborder, de manière significative, les préoccupations exprimées par les Nations Unies. Depuis 1992, la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et le Conseil des droits de l'homme ont adopté 15 résolutions sur le refus par le CNPD de respecter les droits de l'homme, incluant le travail forcé et les déplacements forcés, ainsi que le respect des libertés fondamentales, incluant les libertés de réunion, d'association, d'expression et de mouvement.
Ces organes des droits de l'homme des Nations Unies reconnaissent que le respect des droits de l'homme, de la primauté du droit, de la démocratie et de la bonne gouvernance sont essentiels au développement durable et à la croissance économique, et soutiennent que l'établissement d'un gouvernement démocratique véritable est essentiel à la réalisation des droits humains et des libertés fondamentales. Le travail forcé ne peut être réellement éradiqué que lorsque la dignité de l'être humain et les droits humains sont garantis. Il faut également combattre l'impunité et, pour ce faire, il est nécessaire d'enquêter, de traduire en justice et de punir les militaires et les autres fonctionnaires qui commettent des violations, incluant le travail forcé, et ce, dans toutes les circonstances.
Malgré les tentatives par la communauté internationale de faire accélérer le processus visant à trouver une solution politique au problème, et alors qu'elle tentait d'aider en initiant un dialogue politique substantiel entre le CNPD et la Ligue nationale pour la démocratie (LND), le CNPD a établi, à titre de condition préalable au dialogue avec la dirigeante de la LND, Aung San Suu Kyi, que la LND laisse tomber son appel aux sanctions économiques, lequel perdure depuis longtemps. Bien que le Rapporteur spécial du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies pour le Myanmar ait été autorisé, pour la première fois en quatre ans, à visiter le pays afin d'accomplir son mandat, celui-ci énonce dans son rapport final, de mars 2008, que la bonne volonté démontrée initialement par le CNPD a par la suite disparu lorsque est venu le temps de traiter les problèmes relevant de son mandat et, malheureusement, plusieurs recommandations formulées n'ont pas été mises en application.
Le haut niveau d'engagement dont font preuve les principales institutions internationales démontre une ferme volonté de la part de la communauté d'appuyer un processus visant à restaurer la démocratie et la réconciliation nationale, ainsi que l'établissement du respect des droits humains. Cependant, malgré son support et ses initiatives, les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies ne sont pas parvenus à une entente concernant une résolution liant la Birmanie.
En décembre 2007, le Secrétaire général des Nations Unies a établi un "Groupe d'amis" constitué de pays particulièrement intéressés. A la suite des ravages causés par le cyclone Nargis en mai 2008, le Secrétaire général des Nations Unies et de l'ANASE sont intervenus pour négocier l'accès afin que soient délivrés les secours humanitaires et l'accès par les travailleurs humanitaires internationaux. Le membre travailleur a exprimé sa satisfaction face à cette réussite de l'équipe ONU-ANASE, laquelle a finalement permis de fournir les secours humanitaires dont la population avait un besoin urgent.
La communauté internationale a rencontré plusieurs frustrations au cours des années lors de ses tentatives visant à entraîner une réforme politique et le respect pour les droits de l'homme. Des mesures telles que des embargos sur les armes, le commerce et les investissements, des sanctions ciblées, des interdictions sur des visas et le gel d'actifs ont été prises par divers gouvernements et doivent être renforcées. Rappelant les conclusions des 300e et 301e sessions du Conseil d'administration et la séance spéciale de la Commission de la Conférence de 2007, le membre travailleur a souligné que le pays n'a fait aucun progrès en ce qui concerne l'accomplissement de ses obligations en vertu de la convention no 29 visant à éliminer la pratique répandue du travail forcé. Toutes les options disponibles en droit international afin d'assurer la mise en œuvre complète de la convention devraient être envisagées, incluant la possibilité de renvoyer le cas à la Cour internationale de Justice. La dignité et les droits du peuple birman ne demandent rien de moins.
Le membre gouvernemental du Japon a exprimé la profonde sympathie de son gouvernement pour la tragédie causée par le cyclone qui a fait tant de morts au début de ce mois.
Depuis la réussite de la conclusion du Protocole d'entente complémentaire l'année dernière, des progrès ont été réalisés pour son application, incluant l'approbation de sa traduction laquelle est indispensable à la sensibilisation des citoyens et des travailleurs à leurs droits octroyés par ce protocole. L'activité éducative entreprise conjointement par le ministère du Travail et le bureau de liaison de l'OIT doit être accueillie, laquelle a aussi été utile à l'accroissement de la conscience. L'engagement de principe du gouvernement de mener une seconde vague de formation bientôt doit également être salué. De plus, Il est à espérer que les efforts destinés à l'accroissement de la conscience mèneront à l'application effective du Protocole d'entente complémentaire.
Les explications détaillées du représentant gouvernemental sur la mise en œuvre des lois et règlements contre le travail forcé sont appréciables. En ce qui concerne l'application du Protocole d'entente complémentaire, il faut noter avec préoccupation que, selon le rapport du chargé de liaison, un certain nombre de plaintes concernant le travail forcé ont été reçues et soumises au gouvernement. Il est à espérer que le gouvernement examine sincèrement ces cas et prenne de bonnes et promptes mesures pour améliorer la situation.
Un référendum sur le projet de la nouvelle Constitution a eu lieu récemment. Tout en reconnaissant l'inclusion dans celle-ci d'un article interdisant l'utilisation du travail forcé, il est inquiétant de noter que, selon le chargé de liaison, cette disposition contient des restrictions qui pour- raient soulever un problème de conformité au regard la convention no 29. Il est à espérer que cette inquiétude sera dissipée le plus tôt possible.
En ce qui concerne le récent cyclone, bien qu'espérant sincèrement que le pays se relèvera aussi rapidement que possible de ce désastre et indiquant que le gouvernement japonais est prêt à maintenir son assistance, le gouvernement du Myanmar doit être prié d'assurer qu'il n'y ait aucun risque que l'utilisation du travail forcé, le travail des enfants, la traite des personnes et le travail des migrants augmentent lors du processus de redressement et de reconstruction du pays.
En conclusion, avec le renforcement de la présence et des activités du BIT au Myanmar, il est à espérer que le gouvernement et l'OIT, particulièrement par son chargé de liaison, continueront leur étroite collaboration et coopération pour traiter cette question et améliorer la situation.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a félicité le Bureau pour le rapport détaillé et le travail admirable effectué par le chargé de liaison malgré des circonstances très difficiles. En cherchant à maintenir le dialogue avec le régime militaire tout en le gardant au niveau élevé des droits du travail et de l'homme que soutient l'Organisation, l'OIT fait preuve d'un jugement exceptionnel.
Il y a dix ans maintenant que la commission d'enquête a formulé des recommandations claires et spécifiques aux autorités birmanes, à savoir: que la législation nationale soit mise en conformité avec la convention no 29; qu'aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités et, en particulier, par les militaires; et que les sanctions qui peuvent être imposées pour le fait d'exiger du travail forcé soient strictement appliquées. En outre, la commission d'experts a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par les autorités pour répondre aux recommandations de la commission d'enquête soit: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires; assurer que l'interdiction du travail forcé soit largement rendue publique; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le respect de l'interdiction du travail forcé.
A la lumière de ces recommandations, les mesures, bien que modestes, prises au cours des derniers mois en matière de traduction, diffusion et publication du Protocole d'entente complémentaire doivent être notées. Le manque de progrès significatifs est toutefois à regretter. Bien qu'un certain nombre de plaintes aient été enregistrées et examinées selon la procédure mise en place par le protocole, il ne fait aucun doute que le travail forcé demeure un problème sérieux et très répandu dans le pays, et que la possibilité de porter plainte sur l'imposition de travail forcé reste une activité à haut risque. De plus, selon le rapport du Bureau, il semble que les sanctions imposées aux militaires infligeant du travail forcé ne soient pas crédibles et que l'article du projet de la nouvelle Constitution interdisant le travail forcé contient des restrictions qui pourraient soulever la question de sa conformité avec la convention no 29. Il est également inquiétant de constater que des militants syndicaux soient encore détenus, que des enfants soient toujours victimes de recrutement forcé dans le service militaire et que les autorités n'aient toujours pas fait de déclaration publique de haut niveau visant à interdire le travail forcé.
Bien qu'il soit indéniable que le Protocole d'entente complémentaire soit une mesure importante, il existe des contraintes et des limites évidentes quant à la participation de celui-ci et de la procédure de plaintes à l'abolition du travail forcé dans le pays. En particulier, ils ne traitent pas de l'origine de ce problème. En outre, le régime doit une fois de plus être prié de mettre pleinement en œuvre et sans délai les recommandations de la commission d'enquête et de la commission d'experts.
Cette séance spéciale de la commission a lieu suite au tragique et dévastateur cyclone Nargis. A cet égard, l'oratrice a exprimé la plus profonde compassion de son gouvernement aux victimes et a indiqué que le Président de son pays a promis que tous les efforts seront faits pour aider le peuple birman à se relever de ce désastre. Toutefois, au vu des antécédents du régime, il est crucial d'assurer que le processus de reconstruction n'implique pas ou n'ait pas recours à l'utilisation du travail forcé sous toutes ses formes.
L'élimination du travail forcé est liée de manière inextricable au progrès accompli en ce qui concerne la garantie de la liberté syndicale et le rétablissement de la démocratie dans le pays. De plus, des inquiétudes profondes demeurent quant au manque général de respect des droits fondamentaux des travailleurs et de l'homme. En conséquence, au moyen de plusieurs mesures législatives et politiques, le gouvernement des Etats-Unis a imposé des sanctions variées contre le régime. La pertinence de ces mesures sera évaluée et d'autres seront considérées si le gouvernement ne met pas fin à la brutale répression de son propre peuple. Tous les prisonniers politiques doivent être remis en liberté et un vrai dialogue avec Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie et les autres groupes démocratiques et ethniques dans une transition vers la démocratie doit être établi. Un tel dialogue peut seulement avoir un effet positif sur l'élimination du fléau du travail forcé dans le pays.
Le membre travailleur de la République de Corée a appelé tous les mandants de l'OIT à prendre action conformément à la résolution de 2000. Il est regrettable que plus de 400 entreprises multinationales continuent d'appuyer directement ou indirectement la répression du peuple birman par le régime militaire, le recours au travail forcé, l'interdiction de la liberté syndicale et la violation d'autres droits humains en maintenant des relations économiques avec la Birmanie. Depuis les vingt dernières années, les investissements étrangers affluent en Birmanie, 98 pour cent d'entre eux se concentrant dans les secteurs du pétrole, du gaz et de l'énergie en 2007. Les exportations de gaz ont compté pour la moitié des exportations nationales en 2006, et les ventes à son principal acheteur, la Thaïlande, ont rapporté 2,16 milliards de dollars E.-U. Ces revenus renforcent la capacité de répression de la Junte puisque la majorité de ces affaires sont réalisées conjointement avec la participation des militaires ou directement par des compagnies appartenant et opérant sous la direction des militaires. Un contrat de partage de la production entre des compagnies étrangères, dont plusieurs sont partiellement ou entièrement des sociétés d'Etat, et la Myanmar Oil and Gas Enterprise (MOGE) précise les frais et taxes que la compagnie doit verser au régime.
A titre d'exemple, le gazoduc Yadana, un projet mené par la compagnie Chevron pour transporter du gaz en Thaïlande, constitue la source vitale de revenus pour le régime militaire. La production gazière du projet Yadana en 2007 totalisait environ 758 millions de pieds cube par jour, dont 650 millions ont été exportés. Le budget projeté des militaires birmans, qui doit notamment soutenir d'importantes forces armées comptant 428 000 troupes, pourrait être complètement financé par les revenus du projet Yadana (environ 972 millions de dollars E.-U. par année). De plus, plusieurs violations des droits humains se sont produites dans la région du gazoduc, incluant des meurtres, des viols commis par des soldats responsables de la sécurité du gazoduc, le recrutement forcé de porteurs pour la patrouille de sécurité, des confiscations de terres, des programmes de plantations forcées ainsi que des vols de biens à grande échelle. Un autre exemple est celui du projet gazier de Shwe qui a rapporté entre 600 et 850 millions de dollars E.-U. au régime militaire. Le consortium gazier Shwe est composé de la compagnie sud-coréenne Daewoo International et de sociétés d'Etat de l'Inde et de la République de Corée, ainsi que du MOGE.
L'économie birmane éprouve de nombreux problèmes parce que les investissements dans les secteurs gazier et pétrolier et les autres industries d'exploitation ne créent pas un nombre significatif d'emplois ni n'assure un transfert substantiel de savoir-faire ou de technologie à la population locale. Il en découle donc des bénéfices importants pour le régime mais très limités pour le peuple birman.
Alors que de plus en plus de gouvernements ont imposé des sanctions à la Birmanie, particulièrement à la suite des mesures brutales prises contre les manifestants birmans en septembre 2007, les pays voisins et d'autres puissances économiques dans la région semblent encore plus impatients de faire affaire avec le régime. La République de Corée, la Fédération de Russie et Singapour étaient quelques-uns des plus importants investisseurs dans le secteur du pétrole et du gaz en 2007, et la Chine était le principal investisseur étranger dans le secteur de l'énergie (281 milliards de dollars E.-U.). En ce qui concerne le commerce, les investissements, la coopération économique et l'influence politique pris comme un tout, les trois voisins immédiats de la Birmanie sont les principaux soutiens du régime et détiennent donc la clé de la liberté de son peuple.
Il est donc d'une importance capitale que tous les gouvernements, les institutions internationales et les organisations de travailleurs et d'employeurs appliquent pleinement la résolution de 2000, que des sanctions économiques largement ciblées soient imposées, en particulier en ce qui concerne l'importation et l'exportation de biens, afin de mettre un terme au financement du régime militaire et qu'un embargo total sur les armes soit mis en œuvre comme l'a suggéré l'Union européenne. Les conclusions de la commission devraient demander l'adoption d'un mécanisme de rapport renforcé ainsi que la tenue d'une conférence avec toutes les parties prenantes sous l'égide de l'OIT afin d'assurer la pleine application de la résolution de 2000.
Le membre gouvernemental de l'Inde a exprimé la satisfaction de son gouvernement au regard des progrès tangibles effectués, progrès qui se sont consolidés par la suite en une coopération entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT. Il s'est réjoui de la traduction du Protocole d'entente complémentaire et de sa publication sur le site Internet du ministère du Travail ainsi que des progrès réalisés avec le chargé de liaison dont le travail a été facilité par le gouvernement du Myanmar. La résolution de cas de travail forcé par le biais de mécanismes issus d'un accord mutuel entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT est un domaine de satisfaction. Le mécanisme institutionnel permettant d'aborder la question du recrutement des enfants soldats fonctionne en pratique. L'Inde a constamment encouragé le dialogue et la coopération entre l'OIT et les Etats Membres pour résoudre toutes les questions en suspens. Les efforts du Directeur général du BIT pour assister le Myanmar à éradiquer le travail forcé ont été rappelés. L'Inde reste fermement opposée au travail forcé, dont le recours est expressément interdit dans sa Constitution. Le gouvernement de l'Inde se réjouit par conséquent des récents développements et des progrès effectués sur la question de l'éradication du travail forcé au Myanmar.
La membre travailleuse de l'Italie a exprimé sa préoccupation au sujet de la mise en œuvre du Protocole d'entente complémentaire et de l'impact de la récente crise humanitaire sur le recours au travail forcé. Les personnes concernées par le mécanisme de plainte ont exprimé leurs inquiétudes au sujet d'informations sur des harcèlements et des détentions malgré le fait que le Conseil d'administration ait noté à sa session de novembre 2007 un certain progrès dans la mise en œuvre du Protocole. A la session de mars 2008, le groupe des travailleurs s'était félicité de la prorogation de la période d'essai du Protocole d'entente complémentaire et avait indiqué que des progrès rapides devraient être constatés à la présente session de la Conférence, ceci conformément aux décisions déjà prises par le Conseil d'administration. Malheureusement, ces décisions n'ont pas encore été suivies d'effet. Le gouvernement n'a approuvé la traduction du Protocole d'entente complémentaire et sa publication sur le site Web du ministère que le 2 mai 2008.
Les conclusions de la commission d'experts soulignent qu'il y a des contraintes et des limites évidentes à la contribution du mécanisme de plainte à l'éradication du travail forcé. Cela tient aux limites structurelles et au fait que "tout en étant très utile", il "n'aborde pas les causes profondes du problème du travail forcé". Les membres travailleurs partagent cette préoccupation. Le rapport du chargé de liaison indique que ses activités se concentrent sur la mise en œuvre du Protocole d'entente complémentaire alors que son travail devrait davantage se concentrer sur la mise en œuvre des recommandations de la commission d'enquête. Il y a lieu de souligner la nécessité de lui accorder des ressources humaines et financières supplémentaires de manière à surmonter ces obstacles.
A ce jour, et malgré l'augmentation du recours au travail forcé, seulement 89 plaintes ont été déposées, parmi lesquelles un grand nombre a été rejeté par les autorités au motif qu'il s'agissait de menus travaux communautaires ou qu'elles ne relevaient pas du mandat. Selon les travailleurs, le rejet de telles plaintes pourrait être contraire à la jurisprudence de la commission d'experts, notamment en ce qui concerne la confiscation des terres que cette dernière a toujours considérée comme étant une forme de travail forcé. De plus, si la Junte déclare recevables des plaintes pour le recrutement forcé d'enfants au travail, les militaires sont très peu sanctionnés et, s'ils le sont, les peines sont inappropriées.
Face à de telles situations, l'absence d'engagement politique, l'absence d'information et donc d'initiatives pour la sensibilisation, l'incapacité physique des victimes à porter plainte et la peur de représailles constituent des obstacles majeurs à la dénonciation. Par ailleurs, il est inacceptable que le chargé de liaison ne soit pas lui-même autorisé à communiquer des plaintes. En conséquence, les conclusions de la commission devraient réaffirmer les décisions antérieures suivantes: que le gouvernement publie dans toutes les langues locales une déclaration formelle au plus haut niveau selon laquelle toutes les formes de travail forcé sont interdites et qu'elles seront sévèrement punies; qu'un large réseau de facilitateurs chargés des plaintes soit rapidement mis en place, y compris dans les zones de combat; que le gouvernement assure de manière urgente la disponibilité du texte du Protocole d'entente complémentaire dans toutes les langues locales et s'assure de leur diffusion et de la publication de matériaux de sensibilisation; que le mécanisme du Protocole d'entente complémentaire demeure pleinement opérationnel sans détention ou harcèlement des facilitateurs ou autres, que des sanctions adéquates soient prononcées à l'encontre des coupables et que les victimes de travail forcé aient un accès facile au mécanisme de plainte; et que le chargé de liaison puisse librement circuler dans le pays et ait la capacité de soumettre des plaintes.
La population birmane vit aujourd'hui dans une nouvelle situation intolérable qui ne résulte pas seulement du cyclone mais aussi de l'action inhumaine de la Junte, de l'imposition d'un référendum aux résultats connus à l'avance, de son refus d'agir et de son obstruction à l'aide de la communauté internationale, causant une crise humanitaire encore plus grande.
Des informations ont été reçues sur le recours au travail forcé par les militaires et les autorités locales dans la région du delta d'Irrawaddy. Le cas du camp de déplacés de Maubin, où 1 500 hommes et femmes ont été forcés de travailler dans des carrières, en est un exemple. Dans le village de Ngabyama au sud de la ville de Bogale, les autorités ont forcé des survivants à couper des arbres et à reconstruire des routes. A Bogalay, les militaires ont forcé la population locale à travailler. Tous ces exemples confirment l'alerte lancée par le rapport du chargé de liaison qui souligne les risques accrus de travail forcé, de travail des enfants, de traite des personnes et de migration de main-d'œuvre dans la région du delta d'Irrawaddy. Le chargé de liaison est à louer pour son important travail, en particulier au regard de la situation, et également pour le rôle qu'il a joué dans l'organisation rapide avec les autres agences des Nations Unies présentes en Birmanie d'un groupe de travail de reconstruction.
A cet égard, les conclusions de cette commission devraient souligner la nécessité de promouvoir la convention sur le travail forcé et les bonnes pratiques de travail dans les activités de redressement et de reconstruction, à travers des procédures permettant au BIT de garantir le respect de la convention no 29 ainsi que la nécessité d'inclure les organisations démocratiques dans le processus de reconstruction. Des ressources humaines et financières supplémentaires devraient être allouées au BIT pour de telles activités. Il est inacceptable que la crise humanitaire serve d'alibi pour refuser à une population victime à la fois de la dictature et de la crise humanitaire le bénéfice des droits de l'homme fondamentaux.
La tragédie qui voit le peuple birman lutter pour sa survie, pour sa liberté et ses droits de l'homme nécessite une réponse constante et claire de la part de cette commission et de la Conférence en général. Comme la commission d'enquête l'a indiqué, le travail forcé en Birmanie est un crime contre l'humanité. Il y a lieu de toujours agir en utilisant tous les moyens disponibles dans le droit pénal international et à travers les décisions antérieures du Conseil d'administration. Le Bureau devrait préparer une demande d'avis consultatif à l'attention de la Cour internationale de Justice sur la violation de la convention no 29, car le peuple birman le mérite.
Le membre gouvernemental de l'Australie a exprimé la sympathie de son gouvernement et du peuple australien au peuple du Myanmar pour les souffrances, les pertes de vies humaines et les ravages causés par le cyclone Nargis. Son gouvernement reste prêt à apporter son aide au peuple du Myanmar en ces temps de besoins terribles et est heureuse d'avoir pu contribuer à cet effort. Les dommages causés par le cyclone sont étendus, et la reconstruction des régions affectées, et particulièrement celle du delta d'Irrawady, sera une énorme tâche. Il est important de ne pas avoir recours au travail forcé des enfants dans cet effort de reconstruction. La communauté internationale a d'ores et déjà apporté une contribution généreuse à l'effort d'aide dans les zones affectées. Si le gouvernement du Myanmar s'engage de manière constructive avec la communauté internationale et autorise le plein accès aux régions affectées aux agences chargées de distribuer l'aide, une assistance encore plus importante sera possible.
Il a exprimé les remerciements de son gouvernement pour les efforts constants de l'OIT pour pousser le gouvernement du Myanmar à respecter ses obligations internationales issues de la convention. A cet égard, son gouvernement aimerait rendre hommage aux efforts déployés par le Directeur exécutif, M. Kari Tapiola, le Conseiller spécial, M. Francis Maupin, et le chargé de liaison, M. Steve Marshall. Ils n'ont eu de cesse de chercher à obtenir des progrès sur cette question vitale pour le peuple du Myanmar. Son gouvernement souhaiterait leur apporter son soutien et l'encourager.
Le mécanisme mis en place par le Protocole d'entente complémentaire a joué un rôle dans la possibilité offerte à un nombre limité de personnes au Myanmar de dénoncer les violations de leur droit de ne pas être contraint au travail. Grâce au dévouement et à l'attention du chargé de liaison, plusieurs personnes ont bénéficié du fonctionnement de ce mécanisme. Toutefois, les résultats obtenus à ce jour sont au mieux modestes.
Le gouvernement australien reste préoccupé par le fait que le nombre limité de cas dénoncés traduit un manque de connaissance au Myanmar du fonctionnement du mécanisme mis en place par le Protocole d'entente complémentaire et du droit de chacun de déposer plainte ainsi que des difficultés logistiques auxquelles les personnes sont confrontées lors de l'enregistrement des plaintes et leur crainte de représailles. Le gouvernement est fortement inquiet du bien-être de six syndicalistes activistes, emprisonnés en 2007 pour sédition, et de celui de U Thet Wai, arrêté le 24 février 2008 pour avoir été en possession d'informations relatives au travail forcé. Les résultats de nombreux cas portés à l'attention de l'OIT sont par ailleurs loin d'être satisfaisants. Seul un cas a conduit à l'ouverture de poursuites par le gouvernement. Le fait que l'OIT estime que "des divergences de vues subsistent quant à la réparation qui doit être accordée aux plaignants et quant aux sanctions à infliger aux coupables" est inquiétant et indique un manque continu de volonté du gouvernement et des autorités du Myanmar à ce que justice soit faite.
Le gouvernement de l'Australie partage l'opinion de l'OIT selon laquelle le mécanisme établi dans le Protocole d'entente complémentaire pourrait jouer un rôle important pour aider la population du Myanmar et pour s'occuper du fléau que représente le travail forcé. Cependant, un engagement plus important du gouvernement du Myanmar est nécessaire pour atteindre ce but.
Comme preuve immédiate d'engagement, son gouvernement recommande instamment au gouvernement du Myanmar de rendre accessible à l'ensemble de ses citoyens une déclaration interdisant sans équivoque toute forme de travail forcé. Il recommande également au gouvernement du Myanmar de s'assurer qu'une publicité suffisante est donnée au Protocole d'entente complémentaire dans les langues appropriées. A cet égard, il est très important que le gouvernement rende disponible une traduction adéquate du Protocole dans les langues parlées au Myanmar, et ce dès que possible. Tout retard supplémentaire pour mettre en œuvre ces mesures ne pourra être interprété que de façon négative.
Il a noté pour conclure que le mécanisme établi par le Protocole d'entente complémentaire ne peut être qu'un élément d'une solution plus large, les recommandations de la commission d'enquête de 1998 montrent la voie à prendre au gouvernement pour satisfaire à ses obligations internationales. Pour rappel, la commission d'enquête avait recommandé au gouvernement du Myanmar de prendre des mesures sans délai pour:
- mettre sa législation en conformité avec la convention sur le travail forcé;
- ne plus imposer aucun travail forcé, en particulier de la part des militaires;
- assurer l'information du public quant à l'illégalité du travail forcé; et
- appliquer strictement les sanctions pénales prévues dans la législation pour le fait d'exiger du travail forcé.
Le membre travailleur du Bangladesh a exprimé sa solidarité à l'égard du peuple birman qui lutte pour la défense de ses droits légitimes et pour la démocratie. Récemment, le pays a été gravement touché par le cyclone Nargis et, malheureusement, le gouvernement du Myanmar a fait obstacle aux efforts que l'aide internationale a déployés pour secourir la population, tandis que les violations de la convention no 29 avaient toujours cours. Le Bangladesh, en tant que pays voisin, accueille aujourd'hui un grand nombre de réfugiés birmans. Cela fait peser une lourde charge sur les moyens de ce pays, qui figure lui-même parmi les moins avancés. Toutes les organisations syndicales, toutes les organisations d'employeurs, tous les gouvernements et le Directeur général du BIT sont appelés à prendre les mesures qui s'imposent pour qu'il soit mis un terme au travail forcé au Myanmar.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a exprimé la sympathie de son gouvernement envers le peuple du Myanmar pour les souffrances et les pertes de vies humaines causées par le cyclone et espère une reconstruction rapide des régions affectées. Il a noté avec satisfaction que le Protocole d'entente complémentaire a été prorogé pour un an et s'est réjoui des développements qui confirment l'instauration d'un dialogue constructif entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT: la création d'un groupe de travail au sein du ministère du Travail chargé d'examiner les plaintes concernant le travail forcé et l'implication du ministère de la Défense dans l'examen de ces plaintes; l'affectation au Myanmar de deux fonctionnaires du BIT, ce qui accroît l'effectivité des actions de l'OIT; la Constitution récemment adoptée, dans laquelle l'interdiction du travail forcé est expressément prévue, et la publication du texte du Protocole d'entente complémentaire sur le site Internet officiel du ministère du Travail. Le BIT et le gouvernement du Myanmar doivent toutefois poursuivre leur coopération dans le but d'assurer l'application de la convention no 29.
Le membre gouvernemental de Cuba a salué les progrès obtenus jusqu'à aujourd'hui pour atteindre les objectifs posés par la convention no 29. Il ressort que ces progrès sont uniquement dus à l'esprit de coopération entre l'OIT et les autorités du Myanmar. Les mesures coercitives, les condamnations publiques, les blocus et autres actions punitives, loin de contribuer à l'amélioration des conditions nécessaires pour atteindre les objectifs inscrits dans les conventions de l'OIT, ont un effet totalement contraire. Toute conclusion de cette commission devra avoir comme fondement la continuité de la coopération technique et le dialogue ouvert et inconditionnel avec les autorités du Myanmar.
Le membre travailleur de l'Indonésie a déclaré que le travail forcé demeure parmi les violations des droits humains les plus répandues en Birmanie et s'accompagne de harcèlement, de menaces et d'abus physiques. Le travail forcé sape les sources de survie de communautés entières et mène à l'effondrement complet de l'économie des villages, au déplacement à grande échelle de populations et à des afflux de réfugiés. L'armée et les autorités locales continuent de contraindre des milliers de personnes au travail forcé pour le transport de matériaux, la construction de routes et d'installations militaires et dans l'agriculture, notamment la plantation de biocarburants. Les services de porteurs à des fins militaires continuent également. De nombreux travailleurs forcés qui ont échappé à l'armée ont rapporté que des centaines de personnes ont été utilisées comme porteurs après avoir purgé des peines d'emprisonnement.
En octobre 2007, dans le district de Tangoo, le commandement militaire no 9 a contraint les villageois de Play Has Loh à conduire des opérations pour l'armée, notamment la coupe de tiges de bambous et le transport de terre. Le commandement militaire no 5 a forcé des centaines de villageois à transporter des stocks militaires, à déménager un campement militaire et à dégager les routes. Le 14 novembre 2007, le bataillon d'infanterie légère 599 a forcé des centaines de villageois à construire des bureaux et des campements militaires dans le district de Kler Law Htoo. D'autres cas de travail forcé ordonné par l'armée ont eu lieu en décembre 2007 dans les municipalités de Hakha et Mantaw dans l'Etat de Chin et, en janvier 2008, à Mong Hsat, dans l'Etat de Shan. Le travail forcé est vital pour le régime militaire, et une volonté politique sérieuse est nécessaire afin de mettre un terme à ce cercle vicieux.
En novembre 2007, l'armée a décidé d'implanter un nouveau village modèle à Nurullah, dans l'Etat d'Arkan. A la suite de la confiscation de terres, les villageois ont été forcés de préparer le terrain pour la construction et de transporter des matériaux de construction. En janvier 2008, on a ordonné aux villageois d'achever la construction de 120 maisons en un mois. A la fin d'avril 2008, 200 maisons avaient été construites. Aucun des 200 à 270 travailleurs provenant de neuf villages ayant participé à ce projet n'ont été payés.
L'approche de la saison de la mousson pourrait créer une situation catastrophique dans la région du delta. Les autorités ont ramené les victimes du cyclone dans leurs villages détruits sans aucun approvisionnement d'aide, et on a rapporté de nouveaux cas de travail forcé imposé par l'armée et les autorités locales dans les régions dévastées.
L'OIT et ses Membres sont instamment priés de prendre les mesures les plus efficaces pour assurer le respect immédiat et entier de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Le monde ne peut demeurer inactif pendant que le peuple birman souffre. Le gouvernement doit pleinement mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête. Les militaires, particulièrement les commandants régionaux et les autorités locales, doivent de manière urgente modifier les lois existantes, les comportements et les pratiques. Il est primordial que les autorités fassent une déclaration publique sans ambiguïté dans toutes les langues locales sur l'interdiction du travail forcé et que, en conséquence, un budget pour les travaux publics soit établi. De plus, le respect de la liberté syndicale doit être garanti pour tous les travailleurs afin de leur permettre de s'organiser et de dénoncer le travail forcé. Le gouvernement et les institutions internationales ont été sollicités afin de prendre part aux programmes de secours et de reconstruction. Tous les militants syndicaux et les prisonniers politiques, y compris Mme Aung San Suu Kyi, doivent être remis en liberté.
Le représentant gouvernemental du Myanmar a noté qu'un certain nombre d'intervenants reconnaissent les efforts des autorités et les progrès effectués jusqu'à aujourd'hui. Selon lui, ceux qui ont exprimé différents points de vue ont leur propre programme et tentent de saper les efforts du gouvernement. Il a exprimé l'espoir que les membres de la commission se réfèrent désormais à son pays sous le nom officiel inscrit dans la nouvelle Constitution approuvée par référendum.
Les membres travailleurs ont tenu à se concentrer sur les conclusions, qui devraient, à leur avis, inclure les points suivants: la libération de Mme Aung San Suu Kyi ainsi que des militants syndicaux et les prisonniers politiques qui ont exercé leurs droits à la liberté d'expression et d'association; la reconnaissance de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), qui ne devrait plus être considérée par les autorités comme une organisation terroriste; l'arrêt immédiat des harcèlements et la libération des personnes qui soumettent des plaintes liées au travail forcé. Enfin, les conclusions devraient déplorer le fait que les auteurs du recours au travail forcé n'encourent pas de sanction au titre de la responsabilité pénale.
Tout en rappelant la nécessité de mettre en œuvre urgemment les recommandations formulées par la commission d'enquête il y a de cela dix ans, les membres travailleurs ont souligné également que le gouvernement doit mettre en œuvre toutes les décisions déjà prises par le passé par les différents organes de l'OIT, y compris les conclusions de 2006 de la Commission de proposition, et réaffirmées à plusieurs reprises par le Conseil d'administration du BIT. Certains points rappelés doivent faire l'objet d'une attention particulière: le Bureau doit demander aux gouvernements, aux employeurs, aux organisations internationales, aux institutions financières ou banques internationales ou régionales de réviser ou de suspendre, en fonction de leurs mandats, les relations et programmes directs et indirects avec les entreprises du gouvernement, des militaires ou du secteur privé de Birmanie; un mécanisme de rapport doit être mis en place, sur la base d'un questionnaire simple d'usage, en ce qui concerne les mesures à mettre en œuvre conformément aux recommandations contenues dans la résolution de 2000; des conférences regroupant les différents acteurs doivent être convoquées pour discuter des meilleures pratiques pour mettre en œuvre la résolution de 2000; les mesures disponibles en vertu du droit pénal international doivent être appliquées pour sanctionner les coupables de recours au travail forcé; le BIT et les gouvernements devraient davantage informer l'opinion publique, notamment via une page spéciale sur le site Web de l'OIT; le gouvernement de Birmanie doit mettre en place un réseau de facilitateurs pour traiter les plaintes et ainsi assurer une mise en œuvre nationale élargie du Protocole d'entente complémentaire, y compris dans les zones de combat, en même temps qu'il doit assurer la diffusion du Protocole via sa traduction dans toutes les langues locales et des activités de sensibilisation; le chargé de liaison du BIT doit avoir la capacité de soumettre des cas d'infraction et à réellement diligenter les enquêtes nécessaires.
Les membres travailleurs ont demandé aux différents gouvernements de ne pas reconnaître la nouvelle Constitution et se sont réservé la possibilité de soumettre à la Cour internationale de Justice une demande d'avis consul- tatif quant à la question des conséquences en droit international de la violation par la Birmanie de la convention no 29.
A titre de conclusion, s'agissant de la situation humanitaire dramatique en Birmanie, les membres travailleurs ont demandé au Bureau de veiller, par des mesures de promotion et d'information sur les bonnes pratiques, au respect de la convention no 29 dans le cadre des activités de reconstruction du pays. A cet égard, le Bureau devrait disposer de ressources humaines et financières accrues en même temps que de la coopération des autres agences internationales pour le contrôle du respect de la convention no 29. Le gouvernement devrait permettre à toutes les organisations démocratiques de participer aux activités de reconstruction et informer le Conseil d'administration du BIT à sa prochaine session de novembre 2008 des mesures prises pour mettre en œuvre les conclusions de cette commission.
Les membres employeurs ont déclaré que la réponse du gouvernement ne montre pas d'engagement sérieux à éradiquer le travail forcé. Le gouvernement n'a pas pris les mesures nécessaires à cette fin. Le recours généralisé au travail forcé continue, et le droit à la liberté syndicale est violé impunément, contrairement aux obligations internationales du Myanmar. Le gouvernement ne semble pas comprendre les conséquences des violations des droits de l'homme. Ces violations ne sont pas seulement dommageables pour les citoyens du pays mais affectent aussi l'autorité morale du gouvernement à gouverner le pays ainsi que sa crédibilité internationale au sein de la communauté des nations. De plus, le non-respect des droits de l'homme empêche le développement économique car des investissements de grande envergure ne se font pas là où la démocratie et les libertés publiques sont inexistantes et où le développement humain demeure à un bas niveau. Les membres employeurs ont exprimé leur profonde préoccupation de voir le recours au travail forcé continuer au Myanmar comme par le passé. Il y a une nécessité urgente à démontrer par des preuves tangibles, concrètes et véri- fiables que la pratique du travail forcé est éradiquée.
Les membres travailleurs ont déclaré qu'en acceptant les conclusions ils croient aussi comprendre la référence dans les conclusions à la discussion et aux décisions du Conseil d'administration de mars 2007, novembre 2007 et mars 2008, ainsi qu'aux décisions adoptées par la Conférence en 2000 et 2006 concernant le respect par la Birmanie de la convention no 29, incorporent de manière effective les suggestions des membres travailleurs pour les conclusions de cette année, y compris au sujet de l'avis de la Cour internationale de Justice en temps utile. Les membres travailleurs ont également réitéré la nécessité pour le Chargé de liaison du BIT d'être habilité à soumettre les plaintes et à mener les investigations nécessaires.
Document D.5 B. Rapport du Chargé de liaison à la séance spéciale de la Commission de l'application des normes sur l'application par le Myanmar de la convention no 29
Document D.6 C. Séance spéciale pour l'examen des faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930
1. Observation de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'exécution par le Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930
2. Conclusions de la Commission de l'application des normes lors de sa séance spéciale pour l'examen des faits nouveaux concernant l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930 (Conférence internationale du Travail, 96e session, juin 2007)
3. Documents soumis au Conseil d'administration à sa 300e session (novembre 2007) (documents GB.300/8 et GB.300/8(Add.)) 4. Documents soumis au Conseil d'administration à sa 301e session (mars 2008) (documents GB.301/6/1, GB.301/6/2, GB.301/6, les annexes I, II, III et IV au document GB.301/6/2, ainsi que le document GB.301/6/3)
La commission a exprimé sa sympathie et ses condoléances à l'égard du peuple du Myanmar après le cyclone Nargis. Elle a exprimé l'espoir sincère que les besoins humanitaires seront couverts et que les travaux de reconstruction seront entrepris sans aucun recours au travail forcé, et dans un esprit de coopération et de dialogue constructif, dans le plein respect des droits civils et des normes internationales du travail.
La commission a pris note des observations de la commission d'experts ainsi que du rapport du chargé de liaison du BIT à Yangon, qui relate les plus récents développements concernant la mise en œuvre du mécanisme de plainte relatif au travail forcé mis en place le 26 février 2007, dont la période d'essai a été prorogée le 26 février 2008 pour une nouvelle période de douze mois. La commission a également pris note des discussions et décisions prises par le Conseil d'administration à ses sessions de mars et novembre 2007 et mars 2008. Elle a également pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.
La commission a pris note de certaines mesures qui ont été prises en application du Protocole d'entente complémentaire et de certaines mesures de sensibilisation du public qui ont été prises depuis sa dernière session en juin 2007. Cependant, elle s'est déclarée préoccupée par le fait que ces mesures sont très limitées et a estimé qu'il y a bien plus à faire, à la fois avec engagement et de manière urgente. En particulier, le gouvernement devrait, comme demandé par le Conseil d'administration, déclarer sans attendre, de manière non ambiguë et au plus haut niveau, que le recours au travail forcé est interdit, que les auteurs seront poursuivis et condamnés. Elle s'est déclarée également préoccupée par les dispositions restrictives de la Constitution nouvellement adoptée qui pourraient soulever des problèmes d'application au regard des conventions nos 29 et 87 ratifiées par le Myanmar.
La commission s'est déclarée profondément préoccupée par le fait que le travail forcé au Myanmar, y compris le recrutement d'enfants dans les forces armées, reste aussi largement répandu qu'il l'a été jusqu'à présent, comme en attestent les observations de la commission d'experts. Aucune des recommandations de la commission d'enquête n'a encore été mise en œuvre, et l'exaction de travail forcé reste largement répandue, notamment de la part de l'armée. Les instructions données pour qu'il soit mis un terme à la pratique du recours au travail forcé semblent être ignorées régulièrement, et ce dans l'impunité. En outre, même s'il y a maintenant près de quinze mois que le Protocole d'entente complémentaire est en vigueur, ce n'est que récemment que la traduction en a été approuvée pour diffusion. La commission reste préoccupée par la très faible conscience de l'existence des dispositions légales interdisant le travail forcé (ordonnance no 1/99) et des mécanismes de plainte prévus dans le cadre du Protocole d'entente complémentaire. Le gouvernement est notamment prié d'approuver rapidement, en vue de sa traduction dans toutes les langues locales, une brochure facile à comprendre destinée à être largement dif- fusée dans le public, expliquant la loi et la procédure de plainte prévues par le Protocole d'entente complémentaire.
La commission a noté que le mécanisme de plainte relatif au travail forcé continue de fonctionner et que les autorités continuent d'enquêter sur les cas dont elles sont saisies par le chargé de liaison. Elle a toutefois exprimé sa préoccupation persistante du fait que les sanctions à l'égard de ceux qui ont recouru à du travail forcé ne sont en général pas imposées sur la base du Code pénal. Il s'en est suivi qu'aucune condamnation pénale n'a été prononcée contre des membres des forces armées.
La commission a noté qu'un fonctionnaire international de la catégorie professionnelle a été nommé pour assister le chargé de liaison. Elle a souligné qu'il est crucial que le chargé de liaison dispose de ressources suffisantes pour faire face à ses responsabilités. La commission a souligné également qu'il existe un besoin urgent d'un réseau renforcé de facilitateurs pour traiter des plaintes dans l'ensemble du pays. Elle a noté avec préoccupation les cas signalés de représailles/harcèlement à l'égard de plaignants et de facilitateurs volontaires qui coopèrent avec le chargé de liaison. Une telle conduite constitue un manquement fondamental au Protocole d'entente complémentaire. La commission a demandé au gouvernement de garantir que tous les actes de harcèlement et de représailles, quelle qu'en soit la base juridique ou autre, cessent immédiatement et que leurs auteurs soient poursuivis en pleine application de la loi en vigueur.
La commission a noté avec une extrême préoccupation que de nombreuses personnes demeurent emprisonnées pour avoir exercé leurs droits à la liberté d'expression et à la liberté syndicale. La commission a appelé à la libération immédiate de ces personnes, et en particulier de Daw Su Su Nway, U Min Aung, U Thurein Aung et ses cinq associés: U Kyaw Kyaw, U Schwe Joe, U Wai Lin, U Aung Naing Tun et U Nyi Nyi Zaw. Toutes ces personnes avaient des liens avec l'OIT et sont des militants qui agissent légitimement pour la reconnaissance des normes internationales du travail et, en particulier, de celles qui ont été ratifiées par le gouvernement du Myanmar. La commission a souligné à nouveau que le Conseil d'administration attend qu'U Thet Wai ne fasse pas l'objet d'autres persécutions ou autre mesure d'arrestation.
La commission a également souligné la nécessité de permettre à tous les citoyens du Myanmar d'exercer pleinement leurs droits civils et de demander au gouvernement de mettre un terme à la mesure d'assignation à résidence frappant Daw Aung San Suu Kyi. Elle a rappelé en outre les recommandations faites par le Comité de la liberté syndicale en mars 2008 à propos de la reconnaissance des droits syndicaux dans ce pays, et de toutes les organisations syndicales, y compris la FTUB.
La commission a rappelé la pertinence constante des décisions prises par la Conférence en 2000 et en 2006 en ce qui concerne le respect par le Myanmar de la convention no 29.
La commission a appelé instamment le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour faire pleinement porter effet, sans retard, à toutes les recommandations de la commission d'enquête. Elle a insisté auprès du gouvernement pour qu'il fournisse en temps utile des informations complètes à la commission d'experts en vue de sa session de cette année, notamment des éléments concrets et vérifiables attestant des mesures prises pour mettre pleinement en œu- vre les recommandations de la commission d'enquête.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a noté les nombreux progrès accomplis depuis le dernier examen de ce cas, et ce grâce au ferme engagement du gouvernement ainsi qu'à la coopération soutenue et à la patience de l'OIT. Un protocole d'entente complémentaire établissant le mécanisme d'examen des plaintes pour les victimes du travail forcé a été conclu le 26 février 2007 et est entré en vigueur immédiatement. Le protocole a fait l'objet d'un communiqué de presse émis par le représentant permanent du Myanmar à Genève. Des explications ont été fournies par le directeur général du département du Travail aux journalistes étrangers qui se trouvaient au Myanmar. Enfin, un site Web portant sur les questions du travail, incluant le protocole d'entente complémentaire, a été créé par le ministère du Travail, le 3 avril 2007.
Faisant remarquer qu'une justice différée équivaut à une justice niée, le représentant gouvernemental a souligné que les cas de travail forcé qui ont été transmis par le chargé de liaison au groupe de travail dirigé par le ministre adjoint du Travail ont été immédiatement examinés et ont, par conséquent, rapidement été résolus. Une majorité des Etats Membres de l'OIT a reconnu que le Myanmar met effectivement en uvre le protocole d'entente complémentaire. L'existence d'un mécanisme d'examen des plaintes est connue du public, comme le démontre le nombre de plaintes reçues qui émanent de différentes régions du pays. Le gouvernement est confiant que ce mécanisme constituera un outil efficace dans un effort commun visant à éradiquer le travail forcé. De plus, les autorités ont rapidement entamé des procédures contre ceux qui ont eu recours au travail forcé et ces actions ont été relatées dans la presse nationale, augmentant ainsi la crédibilité du mécanisme.
Toutefois, si seulement neuf plaintes impliquant du travail forcé ont été reçues dans les trois mois qui ont suivi la mise en uvre du protocole d'entente complémentaire, il est regrettable que l'on ait tenté de faire augmenter le nombre de ces plaintes en utilisant la clause du protocole d'entente complémentaire, qui interdit de poursuivre un plaignant ou son représentant en raison de sa plainte. Le gouvernement considère que ces tentatives entravent le bon fonctionnement du mécanisme pour les victimes qui sont de bonne foi.
Suite à la 298e session du Conseil d'administration, au cours de laquelle il a été souligné qu'il importe que ce mécanisme continue de fonctionner de manière efficace et que l'on dispose des ressources en personnel nécessaires, le gouvernement a admis qu'il était dans l'intérêt des victimes du travail forcé que le mécanisme continue à fonctionner. Par conséquent, le ministre adjoint du Travail a rencontré le chargé de liaison par intérim de l'OIT le 8 avril 2007, et lui a assuré qu'il continuerait à coopérer lors de l'examen des futures plaintes. Il n'y a pas eu de désaccord entre les deux parties sur les mesures devant être prises afin de permettre au chargé de liaison ou son successeur de s'acquitter efficacement de ses nouvelles fonctions et responsabilités. Le mécanisme n'ayant été mis en place que depuis trois mois, les ajustements pertinents pourront être apportés en ce qui concerne le personnel nécessaire dans un délai raisonnable et après consultation, comme stipulé dans le paragraphe 8 du protocole d'entente complémentaire. Finalement, le gouvernement du Myanmar prendra en considération la demande formulée par le Conseil d'administration en faisant preuve de coopération et en mettant à disposition les facilités nécessaires.
Le représentant gouvernemental a réitéré la position de son gouvernement concernant la participation des membres de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), que le ministère des Affaires intérieures du Myanmar a désignés comme étant des terroristes, dans sa notification no 3/2005 et sa déclaration no 1/2006 émises respectivement le 28 août 2005 et le 12 avril 2006. Cette participation, loin de contribuer à l'intensification des efforts et à la coopération entre le Myanmar et l'OIT pour éliminer les pratiques de travail forcé, ne fait que compliquer la situation.
Suite à la décision de M. Richard Horsey de mettre un terme à sa mission de chargé de liaison par intérim de l'OIT, le Myanmar a réagi positivement à la nomination de M. Stephen Marshall à ce poste. Le gouvernement mettra à disposition les facilités nécessaires et fera preuve de la même courtoisie qu'envers son prédécesseur, dont le rôle essentiel dans les efforts pour éliminer les pratiques de travail forcé a été reconnu.
Enfin, le représentant gouvernemental a souligné que la conclusion du protocole d'entente complémentaire et la mise en uvre d'un mécanisme d'examen des plaintes constituent les progrès les plus significatifs dans toute l'histoire de la coopération entre le Myanmar et l'OIT. Ces accomplissements témoignent d'un véritable esprit de collaboration entre les deux parties, ce qui est essentiel pour que le mécanisme continue de fonctionner de manière efficace. Le représentant gouvernemental a finalement assuré la commission que tous les efforts seraient mis en uvre afin que le mécanisme continue de fonctionner efficacement et a déclaré que son gouvernement espérait vivement que l'OIT et ses Membres fassent preuve du même esprit de coopération et de conciliation.
Les membres employeurs ont rappelé que la discussion avait pour but d'examiner, conformément à la résolution de la Conférence internationale du Travail de 2000, le respect par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, sur la base du rapport de la commission d'experts, et en particulier la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête. Ce cas fait l'objet de discussions régulières depuis maintenant vingt-cinq ans sans réel progrès malgré les divers engagements et promesses du gouvernement. Même en tenant compte des faits récents, aucun véritable engagement n'a été pris par le gouvernement pour satisfaire aux obligations internationales qui lui incombent en vertu de la convention no 29, tant en droit que dans la pratique, et pour mettre fin à l'intolérable climat d'impunité qui règne dans le pays. Comme l'a clairement observé la commission d'experts dans sa dernière observation, le gouvernement n'a pas esquissé la moindre tentative de mise en uvre des mesures recommandées par la commission d'enquête, à savoir que les textes législatifs, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient mis en conformité avec la convention, que les autorités cessent d'imposer le travail forcé ou obligatoire qui existe actuellement et que les sanctions prévues en cas d'imposition du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées. La commission d'experts a également noté avec préoccupation l'insuffisance des informations fournies par le gouvernement sur presque toutes les questions soulevées dans son observation. Ces informations constitueraient pourtant un signe clair et sans équivoque de la volonté de coopérer réellement avec les organes de contrôle.
Les membres employeurs ont déclaré regretter le fait que, comme l'a souligné la commission d'experts, peu de choses semblent avoir changé concernant la nécessité d'amender les textes législatifs, alors que le gouvernement a depuis longtemps promis de le faire, et sans pour autant fournir de motifs convaincants pour justifier cette inaction. Or, en l'espèce, la seule solution viable consiste à abroger ces textes et des mesures devraient être prises immédiatement à cet effet.
Le gouvernement n'a fourni aucune copie de lettres et instructions précises aux autorités civiles et militaires leur indiquant que le travail forcé avait été déclaré illégal au Myanmar. Le gouvernement n'a pas pris de mesures non plus en ce qui concerne la nécessité de s'assurer que l'interdiction du travail forcé soit largement portée à la connaissance du public. Les membres employeurs ont déclaré partager l'avis de la commission d'experts selon lequel, pour mettre un terme au travail forcé, il faut commencer par adresser des instructions précises et concrètes aux autorités quant aux types de pratique constituant un travail forcé et lancer une vaste campagne de publicité sur ce sujet auprès de l'ensemble de la population. Il convient de souligner une fois encore combien il est important de s'engager dans une campagne d'information à grande échelle utilisant les médias tels que la presse écrite et audiovisuelle. Les membres employeurs se sont déclarés préoccupés par le manque de transparence et de coopération du gouvernement en ce qui concerne la communica-tion à la commission d'informations sur la budgétisation de moyens suffisants, afin que le travail rémunéré puisse remplacer le travail forcé ou non rémunéré. Il est indispensable que le gouvernement prouve qu'il entend s'engager véritablement et sérieusement en dégageant les allocations budgétaires nécessaires.
Les membres employeurs ont pris note de certains faits qui pourraient être encourageants, à savoir la libération de Aye Myint, la fin des poursuites engagées à Aunglan et la signature du protocole d'entente complémentaire établissant un mécanisme visant à faciliter des enquêtes sans entraves sur les plaintes de travail forcé tout en garantissant la protection des plaignants. Toutefois, étant donné que tant de promesses passées n'ont pas été tenues, ils ont de nouveau fait part de leurs doutes et de leur profond scepticisme, malgré leur souhait évident de voir dans ce mécanisme un moyen efficace de repérer et éliminer le travail forcé et de poursuivre les responsables en justice. Ils ont reconnu que ce mécanisme était entré en vigueur immédiatement et que trois mois seulement s'étaient écoulés depuis sa mise en uvre, avec certains résultats positifs. Le gouvernement doit s'assurer que toutes les mesures nécessaires seront prises dans un avenir très proche pour mieux faire connaître le protocole d'entente complémentaire et le fonctionnement du mécanisme.
Pour que ce mécanisme fonctionne à long terme et étant donné le volume de travail accru du chargé de liaison, la question de l'allocation de ressources doit être considérée comme un élément clé. Il est indispensable que le Bureau nomme rapidement les fonctionnaires internationaux compétents qui viendront aider le chargé de liaison et que le gouvernement coopère et fournisse les facilités nécessaires à cette fin.
Pour conclure, les membres employeurs ont souligné que le protocole d'entente complémentaire ne constitue aucunement la fin de la procédure, comme le gouvernement semble le considérer. Ils l'ont prié d'assurer le suivi indispensable en abrogeant les lois sur les villages et les villes, en s'assurant que l'interdiction du travail forcé soit largement portée à la connaissance du public et en dégageant les fonds nécessaires à l'élimination du travail forcé.
Les membres travailleurs ont observé qu'une journée de la Conférence internationale du Travail mériterait d'être consacrée "Journée mondiale pour la démocratie en Birmanie", tant cette question occupe les travaux de la Conférence depuis longtemps sans que la situation dans ce pays change véritablement. Cette année encore, la commission d'experts réitère les recommandations formulées par la commission d'enquête de 1997, à savoir: la nécessité de modifier la législation nationale, en particulier les lois dites sur les villages et sur les villes, le besoin que cessent les pratiques de travail forcé, en particulier par les militaires, et que les sanctions prévues soient effectivement appliquées. Le gouvernement du Myanmar doit à cet égard, notamment, donner des instructions aux autorités civiles et militaires, rendre publique l'interdiction du travail forcé, prévoir de l'argent pour rémunérer le travail actuellement forcé, et faire respecter l'interdiction. La commission d'experts dresse une nouvelle fois l'inventaire de l'évolution en la matière ou, devrait-on dire, des promesses faites et non tenues. Afin de lutter contre le découragement, la commission d'experts pourrait songer à étoffer un peu son rapport de faits figurant dans les communications des organisations syndicales et surtout des éléments du débat lors des séances spéciales de la Conférence. Elle pourrait ainsi éviter les silences et les refus continuels du gouvernement de fournir des informations sur les communications censées avoir été adressées aux militaires, les sensibilisations alléguées de l'opinion publique, ou encore les crédits budgétaires censés avoir été prévus pour le paiement de certains travaux.
On constate, en effet, que chaque avancée est neutralisée par un recul. Ainsi, s'il convient de saluer la signature en février 2007 de l'accord sur le mécanisme d'examen de plaintes ainsi que le travail accompli dans des circonstances parfois très difficiles par le chargé de liaison par intérim, il ne faudrait pas surestimer la portée d'un tel mécanisme. En effet, il ne saurait cacher que rien n'a progressé dans la mise en uvre des recommandations et des mesures à prendre. La réponse fournie par l'ambassadeur du Myanmar ne constitue d'ailleurs en rien une réponse satisfaisante à la résolution de 2000 appelant à la modification de la législation, à l'envoi d'instructions aux autorités civiles et militaires, à organiser la publicité de l'interdiction du travail forcé, à la prise de dispositions budgétaires afin de rémunérer le travail actuellement forcé et à l'application des sanctions prévues en la matière. Le mécanisme n'est par conséquent qu'un instrument, pas une mesure d'éradication du travail forcé comme en témoignent les 23 plaintes reçues depuis la conclusion de l'accord. La situation reste donc très préoccupante comme en témoigneront plusieurs autres membres du groupe des travailleurs.
Un autre porte-parole des membres travailleurs a rappelé que le cas examiné fait l'objet de commentaires de la commission d'experts depuis plus de vingt-cinq ans et constitue un sujet de profonde préoccupation pour le mouvement syndical de son pays, les Etats-Unis, où l'AFL-CIO a soutenu une législation adoptée en juillet 2003 interdisant les relations commerciales entre ce pays et le régime militaire birman. De telles mesures, fondées sur les commentaires de la commission d'experts et la réponse du gouvernement, y compris la référence faite une nouvelle fois par ce dernier à une organisation terroriste en évoquant l'organisation syndicale indépendante et démocratique, la FTUB, sont plus que justifiées. Cependant, de récentes informations faisant état d'entreprises multinationales américaines ayant des relations commerciales avec la Birmanie, sous couvert d'entreprises locales, en possible violation de la législation de 2003, ont suscité des inquiétudes.
Les membres travailleurs ont regretté que neuf années après les recommandations de la commission d'enquête ce cas constitue toujours un cas de violation grave et fondamentale de la convention no 29, comme en témoignent le rapport de la commission d'experts ainsi que la réponse fournie par le gouvernement. Bien que le Conseil d'administration ait pris la décision en mars 2007 de différer pour le moment la question d'un avis consultatif de la Cour internationale de Justice, le paragraphe 6 du document GB.298/5/2 prévoit qu'une question pourrait être soumise à la CIJ: celle de savoir si la coopération requise et les progrès réels dans la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête atteignent le seuil souhaité. Or ce seuil n'a guère été atteint ni même approché.
En ce qui concerne le protocole d'entente complémentaire signé par l'OIT et le gouvernement du Myanmar en février 2007, les membres travailleurs ont reconnu et salué le principe de l'interdiction des actions judiciaires et des mesures de représailles à l'encontre des plaignants ainsi que l'augmentation des moyens dont dispose le chargé de liaison. Il est cependant parfaitement inapproprié de conclure qu'une telle mesure signifie que les recommandations de la commission d'enquête ont été mises en uvre. En effet, cet accord a un objet limité et a été adopté pour une période probatoire de douze mois seulement. Sa limitation principale est qu'il est fondé sur les plaintes des victimes qui s'exposent ainsi aux risques du système judiciaire du régime. En tant que tel, l'accord reste à la surface d'un problème de violation structurel, chronique et omniprésent. Comme l'a indiqué la Fédération des syndicats du Kawthoolei (FTUK) à la Conférence de la Confédération syndicale internationale (CSI) sur la Birmanie, qui a eu lieu en avril 2007 à Katmandou, le nouveau mécanisme de rapport de l'OIT destiné aux victimes de travail forcé ne fonctionnera probablement pas en raison de l'impossibilité pour les villageois de se rendre à Yangon pour rapporter les cas d'abus dont ils sont victimes, même s'ils sont prêts à courir le risque de l'inévitable sanction du Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC). Les villageois de l'Etat de Karen ne peuvent pas se rendre facilement à Yangon car nombre d'entre eux font face à des restrictions dans leur liberté de mouvement, sont trop pauvres pour se déplacer ou travaillent dur pour leur survie. En ce qui concerne la situation dans le nord de l'Etat de Rakhine (Arakan), que l'OIT considère comme une des régions où le travail forcé prévaut le plus, l'ethnie Rohingya n'est pas libre de voyager et Yangon est complètement en dehors de sa portée, ce qui empêche le bureau de l'OIT de recevoir les plaintes. Par ailleurs, des milliers de victimes de travail forcé ont cherché refuge et asile au Bangladesh, en Thaïlande ou en Malaisie et ne disposent pas de moyens réels et efficaces pour déposer leur plainte dans le cadre du protocole d'entente complémentaire. Enfin, des informations communiquées par la FTUK, la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) et le Projet Arakan, se fondant sur des entretiens précis avec des témoins oculaires courageux, font état de recours généralisé au travail forcé dans l'Etat de Karen, dans le nord de l'Etat d'Arakan et dans d'autres régions du pays pas plus tard qu'à la fin 2006 et jusqu'en mai 2007. Le travail forcé inclut la culture de carburants biologiques, des arbres à caoutchouc et du riz, la construction d'équipements militaires, de ponts et de routes, le portage et les tours de garde comme sentinelle pour ne citer que quelques exemples.
Pour conclure, les membres travailleurs ont souligné que, sans un engagement sérieux en ce qui concerne des pouvoirs d'enquête et d'exécution élargis, comprenant entre autres la présence d'un chargé de liaison de l'OIT aux pouvoirs d'inspection étendus ne dépendant pas uniquement du courage, de la volonté et des moyens des plaignants, la Birmanie maintiendrait sûrement la distance qui la sépare de ce que le Conseil d'administration qualifie de seuil souhaité.
Le membre gouvernemental de l'Allemagne - intervenant au nom de l'Union européenne, des pays candidats: Turquie, Croatie, ex-République yougoslave de Macédoine; des pays également candidats potentiels et faisant partie du processus de stabilisation et d'association: Albanie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Serbie; de l'Islande et de la Norvège, membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE) et de l'Espace économique européen; ainsi que de l'Ukraine, de la République de Moldova et de la Suisse, qui s'associent à cette déclaration - a accueilli favorablement la signature, en février 2007, du protocole d'entente complémentaire sur l'établissement d'un mécanisme d'examen des plaintes crédible et efficace permettant aux victimes du travail forcé d'obtenir réparation ainsi que le fait que, en l'espace de trois mois, 23 plaintes ont été reçues par le chargé de liaison par intérim. L'Union européenne soutient fermement la demande du chargé de liaison en vue d'obtenir du personnel supplémentaire pour traiter de manière adéquate le nombre croissant de plaintes, comme indiqué au paragraphe 8 du protocole d'entente complémentaire. Même s'il est trop tôt pour procéder à une évaluation finale, il existe des signes positifs en ce qui concerne le mécanisme d'examen des plaintes. Cependant, les autorités de la Birmanie/Myanmar sont encouragées à faire preuve de bonne foi et de sincérité dans la future mise en uvre du protocole d'entente complémentaire afin d'en faire une réelle étape vers l'objectif final de l'éradication du travail forcé en Birmanie/Myanmar. Ceci est crucial pour une amélioration substantielle et permanente de la situation des droits de l'homme en Birmanie/Myanmar. Il y a également lieu d'espérer que les pays asiatiques soutiendront les efforts des autorités de la Birmanie/Myanmar pour mettre pleinement en uvre le protocole d'entente et contribuer ainsi à mettre fin au travail forcé. L'Union européenne appuie pleinement les conclusions du Conseil d'administration adoptées en mars 2007, qui tout en approuvant le recours à l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice reportent, pour le moment, cette option juridique. L'étroite surveillance de la situation des droits de l'homme en Birmanie/Myanmar, et en particulier du progrès réel dans la mise en uvre du protocole d'entente complémentaire, doit être poursuivie.
Le membre gouvernemental des Philippines a reconnu l'importance que revêt la présence de l'OIT au Myanmar et a remercié le chargé de liaison par intérim, M. Horsey, pour l'assistance qu'il a apportée aux autorités en vue d'assurer le respect de la convention no 29. Le gouvernement des Philippines est fermement opposé à toute pratique de travail forcé et considère qu'il convient d'encourager le gouvernement du Myanmar à déployer tous les efforts pour donner effet à cette convention et éradiquer les pratiques de travail forcé ayant cours dans le pays.
L'orateur a salué la conclusion, en février dernier, d'un protocole d'entente complémentaire entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT, qui établit un mécanisme permettant de traiter les plaintes pour travail forcé. Il convient également de noter les faits nouveaux survenus au Myanmar depuis mars 2007, notamment les progrès réalisés dans le traitement des plaintes, comme l'a indiqué le chargé de liaison de l'OIT. Cette évolution positive témoigne de l'importance du dialogue et de la coopération entre toutes les parties concernées. A cet égard, la décision du Conseil d'administration de reporter l'examen de la question de la demande d'un avis consultatif à la Cour internationale de Justice est appréciable. L'orateur a conclu en exprimant tout son soutien à M. Stephen Marshall, nommé chargé de liaison de l'OIT à Yangon.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a remercié le Bureau pour son résumé des faits nouveaux survenus depuis juin 2006 et pour sa mise à jour de la situation depuis le dernier examen de la question par le Conseil d'administration en mars 2007.
L'oratrice a noté avec intérêt que le mécanisme de plainte établi dans le cadre du protocole d'entente complémentaire était entré en vigueur, et a considéré encourageant le fait que, selon les dernières indications, le chargé de liaison par intérim avait reçu 23 plaintes. Toutefois, étant donné qu'un nombre relativement peu élevé de cas ont eu une issue que le chargé de liaison a été en mesure de confirmer, il est manifestement prématuré de juger si le mécanisme permet vraiment d'obtenir des résultats probants.
Le processus d'élimination du travail forcé exige des efforts soutenus. Il requiert un accès permanent et sans entraves des plaignants au chargé de liaison, la preuve que les plaignants ne font pas l'objet de harcèlement ou de sanctions pour avoir déposé une plainte, la preuve que ceux qui imposent le travail forcé ont été sanctionnés, et la preuve que les sanctions sont proportionnelles à la gravité des actes commis. Le renforcement des effectifs du bureau de liaison pour s'acquitter d'une charge de travail croissante est également indispensable. A cet égard, l'oratrice a noté avec préoccupation que, au moment où le rapport du Bureau était finalisé, la demande de l'OIT visant à assister le chargé de liaison par d'autres fonctionnaires internationaux compétents n'avait pas encore reçu de réponse. Il faut espérer qu'il ne s'agit pas là d'un retour aux pratiques dilatoires et autres artifices trop souvent vus dans le passé; les autorités devraient prendre rapidement des mesures pour faciliter l'accroissement des effectifs du Bureau de liaison du BIT, conformément aux engagements pris dans le protocole d'entente complémentaire.
Les faits nouveaux examinés dans le contexte du protocole d'entente complémentaire ne constituent que de petits pas en avant et des étapes préliminaires, et l'élimination complète du travail forcé au Myanmar reste un objectif lointain. Les mesures que les autorités doivent prendre ont été décrites par la commission d'enquête il y a près de dix ans, et elles doivent être mises en uvre; il faut en outre reconnaître que l'objectif de l'élimination du travail forcé dépend inextricablement des progrès accomplis en vue d'assurer à la population du pays des droits démocratiques - y compris la libération de Aung San Suu Kyi et d'autres personnalités de la société civile.
L'oratrice a souligné que les Membres de l'OIT ont également certaines responsabilités. Les Etats-Unis, pour leur part, ont pris des mesures pour prolonger d'une année encore les dures sanctions imposées au régime dans le domaine économique et celui des voyages. Elle a conclu en remerciant le chargé de liaison par intérim, M. Richard Horsey, pour le travail dévoué qu'il a accompli ces dernières années pour l'élimination du travail forcé, et elle a souhaité la bienvenue à son successeur au bureau de liaison de Yangon, M. Stephen Marshall.
Le membre gouvernemental du Japon a soutenu le protocole d'entente complémentaire, qui reflète les efforts inlassables à la fois de l'OIT et du gouvernement du Myanmar, pour parvenir à un accord. Il y a lieu de se réjouir de ces efforts et de prendre note du fait que le mécanisme établi par le protocole d'entente complémentaire fonctionne adéquatement. Face aux difficultés et aux frustrations des années précédentes, le protocole d'entente complémentaire fait naître de nouvelles attentes et de nouveaux espoirs pour une meilleure coopération entre l'OIT et le gouvernement.
Il a exprimé sa gratitude au chargé de liaison par intérim de l'OIT, M. Richard Horsey, pour le travail accompli au cours des cinq dernières années, et a accueilli favorablement la nomination de M. Stephen Marshall au bureau de liaison de Yangon. Compte tenu de l'accroissement de la charge de travail que le bureau de liaison devra assumer, le gouvernement devra impérativement répondre à la demande de l'OIT concernant la nomination de personnel supplémentaire.
La conclusion du protocole d'entente complémentaire n'est qu'un début. La signification véritable du protocole dépend du succès de sa mise en uvre et le gouvernement a fermement été prié de faire en sorte que cela fonctionne. En tant que période test, l'année prochaine sera une année critique. Il est important de demeurer vigilant sur la manière dont le gouvernement met en uvre les engagements qu'il a pris et sur la mesure dans laquelle les victimes du travail forcé peuvent, à travers les services du bureau de liaison de l'OIT, déposer des plaintes et obtenir réparation, sans être menacées d'actes de représailles.
Le gouvernement a fait des commentaires positifs; il a donné en particulier des indications favorables en ce qui concerne le renforcement du personnel du bureau de liaison de l'OIT. L'orateur a conclu en soulignant l'importance d'un esprit de coopération, sans lequel l'élimination du travail forcé ne peut effectivement avoir lieu, a proposé l'assistance de son gouvernement à cet égard.
Le membre gouvernemental de l'Australie a remercié le Bureau pour ses efforts avec le gouvernement du Myanmar et a fait part de son appréciation du travail effectué par le chargé de liaison par intérim M. Horsey ces dernières années. Il a salué la nomination de M. Marshall en tant que nouveau chargé de liaison et a voulu croire que le Myanmar lui assurerait toute la coopération nécessaire.
L'orateur a accueilli favorablement la dernière évaluation du chargé de liaison concluant au bon fonctionnement du mécanisme d'examen des plaintes. Il est encourageant de constater que plusieurs plaintes provenant de différentes régions du pays ont été reçues et que dans certains de ces cas des mesures ont été prises par les autorités. Cependant, il est préoccupant qu'à ce jour neuf des plaintes reçues aient été considérées comme relevant de pratiques de travail forcé, ce qui démontre la persistance du problème du travail forcé dans le pays.
Soulignant l'importance d'une pleine coopération et assistance du gouvernement, l'orateur a salué les assurances données par le vice-ministre du Travail le 8 avril 2007 que le Myanmar continuera à faire preuve d'une grande coopération dans le traitement des futures plaintes. La demande de l'OIT de bénéficier de ressources supplémentaires en personnel compte tenu du nombre croissant de plaintes doit également être soutenue.
La réussite du mécanisme d'examen des plaintes dépendra en grande partie de la confiance de la population soumise au travail forcé. Cette confiance dépendra d'actions concrètes, y compris de poursuites engagées avec succès, à l'encontre de ceux qui ont recours au travail forcé indépendamment de leur rang. Le gouvernement doit respecter son engagement de donner une publicité adéquate, dans les langues qu'il convient, au protocole d'entente complémentaire. Le fonctionnement du mécanisme est encourageant mais doit être replacé dans le contexte plus large de l'obligation du Myanmar d'éradiquer le travail forcé dans l'ensemble du pays. Ce but ultime ne pourra être atteint que lorsque le gouvernement mettra pleinement en uvre les recommandations de la commission d'enquête, ce qu'il est instamment prié de faire.
Le membre gouvernemental de l'Inde a déclaré que, depuis la dernière session du Conseil d'administration en mars 2007, le Myanmar a pris de nouvelles mesures afin de coopérer avec le bureau de liaison de l'OIT à Yangon - conformément aux recommandations du rapport de la Commission de l'application des normes - en établissant un mécanisme visant à éradiquer la pratique du travail forcé. Neuf plaintes de travail forcé sont actuellement examinées par les autorités.
Le gouvernement ayant accepté le remplacement de l'actuel chargé de liaison par un autre fonctionnaire de l'OIT, il devrait être félicité pour la coopération dont il a fait preuve en traitant du problème de la pratique du travail forcé; l'OIT doit aussi être félicitée pour les efforts qu'elle a fournis afin d'assister le Myanmar. Rappelant que l'Inde a été et reste profondément opposée au travail forcé, qui est expressément prohibé par la Constitution, l'orateur a soutenu les progrès accomplis en vue de l'éradication de ce problème, à travers l'action conjointe de l'OIT et du gouvernement du Myanmar.
La membre gouvernementale de la Nouvelle-Zélande a remercié le Bureau pour ses informations actualisées au sujet du respect de la convention no 29 par le Myanmar et a exprimé sa gratitude pour le travail entrepris par M. Horsey. Les progrès signalés sont encourageants, et notamment le fait que chacune des parties concernées a exprimé sa satisfaction initiale en ce qui concerne la phase de démarrage du mécanisme de plainte - son utilisation géographique étendue semble être un indicateur d'une bonne couverture nationale. L'oratrice a félicité les parties concernées pour ces résultats et a espéré que, dans les mois et les années à venir, une coopération plus approfondie permettrait d'éliminer le recours au travail forcé au Myanmar. Elle a incité le gouvernement à accepter la demande de l'OIT visant à renforcer le bureau de liaison en ressources humaines et a félicité M. Marshall pour sa nomination au poste de chargé de liaison.
Le membre gouvernemental du Canada a remercié le Bureau pour ses efforts en vue de mettre fin au travail forcé au Myanmar, et a plus particulièrement félicité M. Horsey pour son action. C'est cette semaine que tombe le 17e anniversaire des dernières élections démocratiques au Myanmar, qui avaient vu la victoire écrasante de la Ligue nationale pour la démocratie de Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix. Aung San Suu Kyi demeure en résidence surveillée, et le gouvernement viole constamment les droits de l'homme fondamentaux de sa population, comme l'a prouvé très récemment l'arrestation d'activistes qui demandaient la libération de Aung San Suu Kyi - dont le syndicaliste connu Su Su Nway - au mois de mai.
Le membre gouvernemental a expliqué qu'il était nécessaire de parler de ces violations des droits de l'homme pour décrire le contexte important dans lequel s'inscrit la question du travail forcé, vers l'élimination duquel le récent protocole d'entente complémentaire constitue un pas important. En application du protocole, le gouvernement va certainement autoriser le chargé de liaison à augmenter ses effectifs, et il est encourageant de constater que des plaintes sont reçues et font l'objet d'enquêtes, que des poursuites ont abouti et que des sanctions ont été infligées. Etant donné que la pratique et la publicité permettent d'accroître progressivement la confiance dans le nouveau mécanisme, il convient de prolonger indéfiniment la validité de l'accord.
En dépit de ces nouveaux faits, le contexte susmentionné de violations incessantes ne contribue guère à inspirer confiance; l'orateur a recommandé instamment au BIT de poursuivre son action avec vigueur tout en appelant le gouvernement du Myanmar à aller de l'avant et à mettre en uvre les recommandations de la commission d'enquête.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a affirmé que le travail forcé est inacceptable, partout où il existe, et qu'il doit être rapidement et complètement éliminé au Myanmar. Pour cela, le gouvernement doit s'impliquer activement. A cet égard, il convient d'accueillir favorablement la conclusion du protocole d'entente complémentaire entre le Myanmar et l'OIT, lequel donne des pouvoirs supplémentaires au bureau de liaison pour examiner les plaintes relatives au travail forcé.
Notant que tout semble indiquer que le mécanisme établi fonctionne, l'orateur a exprimé sa gratitude pour le travail considérable effectué par M. Horsey. Il convient de saluer le fait que, depuis la dernière Conférence internationale du Travail, le Myanmar a stoppé les poursuites et a libéré de nombreuses personnes accusées de propager de fausses informations relatives au travail forcé. En ce qui concerne la question de la demande d'avis à la Cour internationale de Justice (CIJ), il existe de sérieux doutes quant aux avantages qu'apporterait une telle mesure. Si une interprétation de la CIJ peut être appropriée lorsqu'il y a une divergence d'opinions en ce qui concerne la substance de la convention no 29, dans le cas présent, une telle divergence n'existe pas puisque le gouvernement admet rencontrer des problèmes dans la mise en uvre des dispositions de la convention. L'orateur a considéré que, par conséquent, son gouvernement n'était pas en mesure d'appuyer la demande d'un avis ayant un caractère obligatoire. Dans tous les cas, la conclusion du protocole d'entente complémentaire fait que le recours à l'avis consultatif de la CIJ n'est plus pertinent.
La membre travailleuse de Singapour a noté que la signature du protocole d'entente complémentaire est intervenue après que des solutions plus graves ont été envisagées, telles que la soumission du cas à la Cour internationale de Justice. Le protocole d'entente devait aborder un aspect très important des recommandations formulées en 1997 par la commission d'enquête, ainsi que le fait qu'il ne serait pas possible d'éradiquer le travail forcé sans un mécanisme de plainte.
L'oratrice a fait deux observations. Premièrement, le nombre de 23 plaintes paraît très faible en comparaison du nombre de cas de travail forcé rapportés. Les personnes désireuses de porter plainte rencontrent de graves difficultés tenant au fait qu'elles n'ont pas toujours conscience de pouvoir le faire et qu'elles ne peuvent pas facilement se déplacer pour déposer une plainte même quand elles ont conscience de pouvoir le faire. Le bureau de liaison de l'OIT manque aussi sérieusement de personnel et le gouvernement n'a pas répondu positivement aux demandes visant à obtenir des ressources supplémentaires. Deuxièmement, le petit nombre de 23 plaintes donne une impression trompeuse de l'ampleur du travail forcé dans le pays. En réalité, le travail forcé continue d'être perpétré en toute impunité. L'oratrice a fait allusion à des cas rapportés dans le rapport de la commission d'experts ainsi qu'à des communications de la Confédération syndicale internationale datant de 2005 et 2006. La situation globale est sombre; le travail forcé est répandu dans presque tous les Etats et circonscriptions du pays, dans des "projets de développement", de construction ou d'entretien d'infrastructures et dans les camps militaires. Le recours arbitraire au travail des enfants, y compris à travers leur conscription en tant que soldats, l'esclavage sexuel, les opérations de déminage par des civils ainsi que la confiscation de terres, de récoltes, de bétail et d'argent sont une réalité. Depuis la signature du protocole d'entente, la Fédération des syndicats de Birmanie a enregistré 3 405 cas de travail forcé dans plusieurs Etats et circonscriptions. Dans l'Etat d'Arakan, les minorités ethniques font l'objet d'une discrimination systématique. Les villageois sont même obligés de fournir les matériaux pour les travaux de construction. D'autres cas font état de recrutement pour portage, pour l'exécution de tours de garde dans les camps militaires ou l'utilisation de boucliers humains. Le recours au travail forcé est répandu dans les régions éloignées, près de la frontière avec le Bangladesh. De nouvelles formes de travail forcé voient le jour dans le cadre de la mise en uvre des projets de développement gouvernementaux, des taxes étant imposées en lieu et place du travail forcé. Des pâturages sont saisis. Jusqu'en mai 2007, des cas de recours au travail forcé ont été signalés dans le nord de l'Etat de Karen, dans le cadre de tentatives de la part des militaires de renforcer leur emprise sur la région.
Ainsi, il est clair que le travail forcé n'a pas diminué au Myanmar mais devient au contraire systématique et répandu. L'orateur a appelé le BIT à ne pas relâcher ses efforts. La réussite dans l'éradication du travail forcé au Myanmar ne doit pas se mesurer au nombre de plaintes reçues par le bureau de liaison.
Un observateur, représentant de la Confédération syndicale internationale (CSI), s'est référé au cas de U Saw Tun Nwe, emmené par l'armée pour être interrogé en février 1997 et déclaré mort deux jours plus tard par la BBC Birmanie, suite aux blessures infligées durant sa détention. Ces blessures étaient le résultat de coups violents et de travail forcé. La victime, âgée de 73 ans, faisait partie d'un groupe de 21 personnes choisies pour être soumises au travail forcé. Toutes les personnes arrêtées l'avaient été dans leurs foyers, puis interrogées avant d'être soumises au travail forcé. Une autre personne de ce groupe est décédée à la suite de blessures reçues durant sa détention. La première victime, U Saw Tun Nwe, était le père de l'orateur, qui s'est déclaré chanceux de ne pas avoir subi le même sort. Dix années après ces faits, le travail forcé existe toujours dans le pays. La Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), la Fédération des syndicats du Kawthoolei (FTUK), le RGWU et des organisations de droits de l'homme défendant l'ethnie Mon ont compilé un rapport conjoint sur le travail forcé en 2007. L'orateur a conclu en appelant l'OIT à transmettre les questions pertinentes à la Cour internationale de Justice afin qu'une action puisse être entreprise.
La membre travailleuse de la France a fait part de l'action déployée par le mouvement syndical international afin de donner suite à la résolution adoptée en 2000 par la Conférence dans le cadre de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. La Conférence internationale syndicale, qui s'est tenue au Népal, en avril 2007, a défini des actions précises afin de mettre en uvre les décisions de l'OIT concernant la Birmanie. Ainsi, dans sa déclaration finale, cette conférence a exprimé sa préoccupation face à l'augmentation des investissements dans les industries du pétrole, du gaz et dans les activités minières, face à l'augmentation des exportations illégales de bois et face au fait qu'une partie significative de l'économie birmane est dominée par les entreprises contrôlées par ou associées aux militaires.
La Conférence internationale syndicale a décidé de cibler ses campagnes envers les multinationales qui opèrent dans ce pays, en particulier dans les gros projets d'infrastructure, comme le barrage de Salween, financé par la Banque asiatique de développement, qui devait également participer à la mise en uvre de la Résolution de 2000, et comme les investissements à grande échelle dans l'exploitation pétrolière, minière et forestière ou du gaz, notamment le projet dirigé par une grande multinationale française, et qui investissent largement dans l'exploitation du gaz, du pétrole et du bois ou dans l'exploitation minière. Ces investisseurs doivent reconnaître qu'ils bénéficient, dans le cadre de leurs activités économiques dans ce pays, de l'infrastructure, notamment les routes, de la sécurité, ainsi que des services que l'Etat met à leur disposition en ayant potentiellement recours au travail forcé. Les entreprises doivent cesser de se compromettre en utilisant ces différentes infrastructures. Par ailleurs, l'augmentation des exportations provenant de Birmanie, grâce aux opérations de ces multinationales, contribue directement à l'enrichissement du régime et de l'armée, principale utilisatrice de travail forcé. Dans de nombreux pays, les travailleurs et les citoyens se sont mobilisés et ont interpelé leur gouvernement pour que les multinationales mettent en uvre les principes directeurs établis par l'OCDE à leur égard. A la demande des syndicats, les points de contact nationaux de la France et des Pays-Bas ont émis des recommandations à l'intention des entreprises multinationales issues de leurs pays, avec pour résultat en ce qui concerne les Pays-Bas, un changement vers une politique de découragement à l'égard des échanges économiques avec la Birmanie. A ce sujet, le champ limité de la position commune de l'Union européenne est regrettable. Ceci pourrait s'expliquer par le fait que les multinationales européennes continuent à investir et à opérer en Birmanie.
L'oratrice a souligné que les actions menées par les travailleurs en vue de la mise en uvre des décisions prises par l'OIT, dans le cadre de l'article 33 de sa Constitution, demeureront limitées tant que l'action des diplomates et l'activité des multinationales ne se conformeront pas aux obligations qui en découlent, à savoir: revoir les relations économiques qu'ils entretiennent avec le régime birman et en faire rapport à l'OIT.
Le membre travailleur de la République de Corée a soulevé la question des investissements étrangers directs au Myanmar et du recours accru au travail forcé que cela entraîne. Il a mentionné les noms de certaines sociétés étrangères impliquées.
Le président est intervenu pour rappeler à l'orateur que les noms de sociétés ne devaient pas être explicitement cités.
Les membres travailleurs ont fait remarquer que les noms des multinationales impliquées étaient pertinents pour la discussion.
Les membres employeurs ont rappelé que la commission ne discutait que des obligations du Myanmar au titre de la convention no 29. Le fait de citer des sociétés sans distinction laisse à penser qu'elles collaborent aux pratiques de travail forcé.
Les membres travailleurs ont rappelé à la commission que la résolution de la CIT 2000 demande aux mandants de prendre les mesures nécessaires pour mettre effectivement en uvre les recommandations de la commission d'enquête, et ils ont réaffirmé que l'intervention du membre travailleur de la République de Corée était pertinente.
Poursuivant son intervention, le membre travailleur de la République de Corée a déclaré que de nombreux rapports sur l'utilisation du travail forcé avaient été soumis durant la phase d'exploration gazière. Le pipeline de 2 380 km de long qu'il est prévu de construire entre la zone située au large de l'Arakan et Kunming, en Chine, va aggraver la situation en ce qui concerne les violations des droits de l'homme avec, notamment, l'imposition du travail forcé le long dudit pipeline, comme cela avait déjà été le cas lors d'un précédent projet. Ce projet, le pipeline de Yadana, construit entre le Myanmar et la Thaïlande, avait eu pour conséquence un recours sans précédent au travail forcé et de très importants transferts de populations. L'orateur a demandé aux sociétés et Etats impliqués de procéder à une étude d'impact sur les droits de l'homme avant de se lancer dans la construction du pipeline. Les gouvernements ont la responsabilité au titre de l'article 33 de la Constitution de l'OIT de mettre en uvre les mesures prévues dans la résolution de la CIT 2000.
La membre travailleuse du Japon a souligné que le commerce et les investissements ont fortement augmenté au Myanmar. Selon l'OCDE, en 2005, le Myanmar a reçu une aide de 145 millions de dollars des Etats-Unis, soit une augmentation de 17 pour cent par rapport à l'année précédente. Jusqu'à récemment, le gouvernement du Japon était un des donateurs principaux, mais il a en principe suspendu son aide. Les Etats-Unis ont décidé une interdiction totale en 2003.
Cependant, les gouvernements ont la responsabilité de contrôler si l'aide, même l'aide humanitaire, est réellement bénéfique à ceux dans le besoin. Il existe des rapports selon lesquels le Programme de coopération économique dans le Delta du Mekong, soutenu par la Banque asiatique de développement, a causé de sévères dommages au Myanmar, spécialement des déplacements forcés et la perte de terres agricoles. De nouveaux donateurs émergent dans les pays frontaliers du Myanmar, lesquels sont intéressés par les ressources énergétiques, la sécurité des frontières et les moyens de transport. Les récentes tendances en termes de développement officiel démontrent que l'adhésion à la résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail, à sa 88e session, en 2000 - résolution demandant aux mandants de revoir leurs relations avec le Myanmar -, n'a pas eu les effets escomptés. L'oratrice a prié instamment les gouvernements concernés de respecter et d'appliquer cette résolution et a, dans le même temps, demandé aux syndicats de rester vigilants quant au comportement des gouvernements dans leurs relations avec la Birmanie, particulièrement en ce qui concerne l'aide officielle au développement.
Le membre gouvernemental du Bélarus a déclaré que son gouvernement considère que le dialogue constructif et la coopération constituent le meilleur moyen pour parvenir à éliminer le travail forcé. Le gouvernement du Myanmar et l'OIT font des progrès dans leurs efforts et il y a des raisons de croire que le protocole d'entente complémentaire permettra d'obtenir des résultats, de même que des informations objectives sur la situation du travail forcé. Sur les 23 plaintes déposées, seulement neuf étaient justifiées. L'orateur a accueilli favorablement la déclaration du gouvernement du Myanmar concernant la coopération efficace, ainsi que la nomination du nouveau chargé de liaison; il a espéré que le travail forcé serait éradiqué au cours de son mandat.
Le membre gouvernemental de la Chine a remercié le Bureau pour ses efforts en ce qui concerne la situation de travail forcé au Myanmar et s'est réjoui de la nomination du nouveau chargé de liaison. Depuis la signature du protocole d'entente complémentaire, le Myanmar a fait des efforts et des mesures ont été prises pour mettre en uvre cet accord. Le mécanisme de plainte fonctionne et le gouvernement chinois espère que cette procédure aura le soutien de la commission. La Chine voit dans le dialogue et la coopération une approche efficace et réaliste permettant aux Etats Membres d'éradiquer le travail forcé. Le gouvernement du Myanmar doit réitérer son engagement à poursuivre sa coopération avec l'OIT pour éliminer le travail forcé. L'orateur a exprimé l'espoir que le gouvernement coopérerait étroitement avec l'OIT pour assurer le fonctionnement efficace du mécanisme de plainte.
Le membre gouvernemental de Cuba a indiqué, après avoir déclaré qu'il rejetait toute forme ou manifestation de travail forcé dans toute partie du monde et qu'il appuyait les mesures prises en vue de son éradication, que sa délégation croit fermement que le dialogue et la coopération constituent la voie adéquate pour la recherche d'une solution. En effet, l'application de mesures coercitives, plutôt que d'aboutir à un résultat, peut entraîner une spirale de confrontation préjudiciable au bien-être des personnes que l'on entend protéger. Le gouvernement de Cuba apprécie les efforts qui ont été déployés, tant par le gouvernement du Myanmar que par l'OIT, pour l'établissement d'un mécanisme destiné à recevoir et instruire les plaintes déposées en cas de situations relevant du travail forcé - mécanisme actuellement opérationnel.
Le membre gouvernemental de la République de Corée a soutenu le protocole d'entente complémentaire conclu entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT concernant l'établissement d'un mécanisme permettant d'instruire les plaintes relatives au travail forcé. Le gouvernement de la République de Corée a enquêté sur les allégations présentées par le membre travailleur de la Corée contre une entreprise coréenne. Il en ressort que l'entreprise n'est pas responsable de violations des droits de l'homme ni à l'origine d'arriérés de salaires envers les travailleurs birmans. Celle-ci a par ailleurs développé un réseau d'échange d'informations avec des entreprises étrangères afin de prévenir les violations des droits de l'homme.
La membre travailleuse de l'Allemagne a regretté qu'en Birmanie les travailleurs n'aient pas le droit de créer les organisations de leur choix, et que du fait que la pratique du travail forcé est tolérée, voire, dans une certaine mesure, promue par l'Etat, il ne soit pas possible d'exercer les droits syndicaux. On ne peut pas considérer que le gouvernement a fait, ne serait-ce que le minimum, pour élucider l'accusation de haute trahison portée à l'encontre du secrétaire de la FTUB, Maung Maung. Il est avéré que le secrétaire général de la FTUB était poursuivi en raison de ses activités syndicales. Les activités syndicales sont jugées comme terroristes, ainsi que cela ressort d'un article publié récemment, selon lequel la culture birmane serait sous l'influence de la communauté internationale, celle-ci étant elle-même influencée par l'"organisation terroriste" FTUB. La FTUB ferait rapport à la Confédération syndicale internationale, laquelle, à son tour, ferait rapport au BIT. Ceci est diffamatoire non seulement à l'égard de la FTUB et de l'ITUC, mais également à l'égard de l'OIT et de ses constituants. Par ailleurs, le régime n'a pas libéré Myo Aung Thant, condamné à vingt ans de prison après un procès secret fondé sur des allégations de haute trahison. Le 1er mai de cette année, six collègues ont été arrêtés pour avoir participé à une manifestation commémorant la fête du travail. Deux autres coordonnateurs syndicaux ont été arrêtés par la police à leur retour de la frontière thaïlandaise, où ils avaient attiré l'attention sur les événements du 1er mai.
L'oratrice a demandé instamment au gouvernement de la Birmanie de libérer Thurein Aung, Kyaw Kyaw, Wai Lin alias Wai Aung, Nyi Nyi Zaw, Kyaw Min alias Wann et Myo Min, cités au nom de tous les collègues détenus. Elle a exigé que le gouvernement fasse de même pour la lauréate du prix Nobel de la paix et vainqueur des élections de 1990 Aung San Suu Kyi, toujours en résidence surveillée. De combien de patience la population birmane doit-elle encore faire preuve avant de jouir des droits de l'homme universels, et de combien de patience aussi cette enceinte doit-elle s'armer avant que le régime militaire de Birmanie n'applique la convention no 87 et que le travail forcé appartienne enfin au passé?
Le représentant gouvernemental a indiqué avoir écouté avec attention les déclarations faites par les membres de la commission et avoir noté que la mise en uvre du mécanisme d'examen des plaintes en vertu du protocole d'entente complémentaire a suscité des réactions diverses. Il a regretté le scepticisme exprimé par certains membres en ce qui concerne l'efficacité de ce mécanisme dans l'éradication de la pratique du travail forcé. Le gouvernement s'engage à faire en sorte que ce mécanisme devienne un outil efficace, non seulement pour recevoir des plaintes, mais également pour punir ceux qui ont recours au travail forcé. Si le gouvernement agit rapidement pour traiter les plaintes, le mécanisme pourrait devenir un outil important de dissuasion. L'orateur a par conséquent invité les membres de la commission à continuer de coopérer avec le gouvernement du Myanmar et de lui fournir assistance dans ses efforts pour éradiquer la pratique du travail forcé.
Les membres travailleurs ont fait part de leur frustration face au manque de progrès enregistré dans ce cas et ont souligné la gravité de la question traitée qui donne lieu à une séance spéciale chaque année afin de rechercher et demander des avancées dans la mise en uvre de la résolution de 2000 et de la convention no 29, tant en droit que dans la pratique. La discussion a démontré que le travail forcé, qui constitue une violation fondamentale des droits de l'homme, demeure un phénomène répandu, systématique et généralisé à travers tout le pays. Les autorités civiles et militaires ont le devoir de ne pas recourir au travail forcé, et des mesures spécifiques sont nécessaires afin de s'attaquer à cette pratique en particulier lorsqu'elle est le fait de l'armée dans les zones frontalières.
Le mécanisme actuel de plainte institué par le protocole d'entente complémentaire constitue un important instrument, à condition que le bureau de liaison soit renforcé de manière substantielle. Le mécanisme de plainte n'aura qu'un effet minimal, à moins et jusqu'à ce que les plaignants bénéficient de garanties effectives leur permettant d'y avoir pleinement recours, notamment grâce à la protection des victimes ayant porté plainte et à la modification de la législation et du système judiciaire, de manière à ce que les responsables imposant le travail forcé soient sanctionnés et qu'il soit mis un terme à la situation générale d'impunité. En 2007, la commission d'experts a rappelé les mesures concrètes et pratiques nécessaires à l'éradication du travail forcé, y compris l'abandon de la politique consistant à poursuivre les personnes ayant porté plainte, l'abrogation des lois sur les villes et les villages, la communication d'informations concrètes et vérifiables concernant les instructions données aux autorités civiles et militaires visant à éliminer le travail forcé, la sensibilisation de l'ensemble de la population à la nécessité d'éliminer le travail forcé, ainsi que la dissémination d'informations relatives au recours au mécanisme de plainte et enfin la communication de preuves tangibles concernant les mesures prises afin d'engager des crédits budgétaires adéquats pour substituer au travail forcé ou impayé du travail rémunéré.
Pour conclure, les membres travailleurs ont estimé une nouvelle fois que la possibilité de soumettre à la CIJ une demande d'avis consultatif, quant à la question de savoir si la coopération du gouvernement du Myanmar et les progrès réalisés dans la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête atteignent le seuil souhaité, devrait demeurer une option.
Les membres employeurs ont souligné que le gouvernement doit mettre en uvre immédiatement les recommandations de la commission d'enquête. Sept ans après la résolution de la Conférence internationale du Travail, le protocole d'entente complémentaire constitue, au mieux, un petit pas qui, en soi, ne permettra certainement pas d'éradiquer le recours au travail forcé dans le pays. Il est par conséquent essentiel que la loi sur les villages et la loi sur les villes soient abrogées, que l'interdiction du travail forcé fasse l'objet d'une large publicité et que soit créé un environnement favorable, faisant en sorte que le travail forcé soit converti en travail rémunéré. Le gouvernement n'a pas indiqué au cours de la discussion s'il entend ou envisage de prendre de telles mesures. Aussi, tant que tout cela ne sera pas fait, le gouvernement sera loin de remplir ses obligations internationales.
Les membres travailleurs ont fait observer qu'ils avaient donné leur consentement aux conclusions sur ce cas, à condition qu'il soit bien entendu que des mesures concrètes et vérifiables sont absolument indispensables. S'agissant plus particulièrement des conclusions du conseil d'administration de mars 2007, un avis consultatif de la Cour internationale de Justice pourrait être envisagé.
Observation de la commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'exécution par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
Bref résumé des faits nouveaux survenus depuis juin 2006
Evolution depuis mars 2007
Faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
1. Document GB.297/8/1
2. Document GB.297/8/2
3. Document GB.298/5/1
4. Document GB.298/5/1(Add.)
5. Document GB.298/5/1(Add.2)
6. Document GB.298/5/2
7. Conclusions sur la cinquième question à l'ordre du jour (GB.298/5)
La commission a examiné l'observation de la commission d'experts ainsi que le rapport du chargé de liaison par intérim de l'OIT à Yangon exposant les derniers développements intervenus dans la mise en uvre du mécanisme d'examen des plaintes relatives au travail forcé, établi le 26 février 2007. La commission a pris note des décisions du Conseil d'administration de mars 2007. Elle a également entendu la déclaration du représentant gouvernemental. La commission s'est déclarée profondément préoccupée par la situation relative au travail forcé au Myanmar, telle qu'exposée dans l'observation de la commission d'experts. Elle a conclu qu'aucune des recommandations de la commission d'enquête n'avait encore été mise en uvre et que le travail forcé était toujours imposé de manière généralisée, particulièrement par les forces armées, auxquelles des instructions spécifiques devraient être données. La situation dans l'Etat de Kayin (Karen) et dans le nord de l'Etat de Rakhine (Arakan) reste particulièrement grave. La commission a instamment prié le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner effet aux recommandations de la commission d'enquête. La commission a dûment pris note du fait que le mécanisme d'examen des plaintes relatives au travail forcé continue de fonctionner, que les autorités mènent des enquêtes sur les cas qui leur sont rapportés par le chargé de liaison et qu'elles prennent des mesures contre les fonctionnaires dont il a été établi qu'ils ont eu recours de manière illégale au travail forcé. Il a toutefois été observé que, dans nombre de cas, les mesures prises s'étaient limitées à des mesures administratives et que les sanctions pénales requises n'avaient pas été appliquées. Il a également été observé que le mécanisme devait être évalué à l'aune de l'objectif ultime de l'éradication du travail forcé et que son impact devait encore être analysé, en particulier dans les régions frontalières. La commission a souligné que le chargé de liaison devait disposer d'un personnel suffisant, comme cela a été prévu par le protocole d'entente complémentaire et requis par le Conseil d'administration en mars 2007. Elle a noté avec préoccupation que le gouvernement n'avait pas encore donné son accord concernant la nomination d'un fonctionnaire international pour assister le chargé de liaison en dépit de l'augmentation constante de la charge de travail, et elle l'a instamment prié de coopérer et fournir les installations nécessaires sans tarder. La commission a demandé aux autorités du Myanmar de coopérer pleinement avec l'OIT et de mettre à la disposition du nouveau chargé de liaison l'ensemble des facilités nécessaires comme le prévoit l'accord dans le cadre prévu par la pratique diplomatique. Le gouvernement du Myanmar a été prié de fournir des informations complètes à la commission d'experts afin qu'elle puisse les examiner lors de sa prochaine session qui aura lieu plus tard cette année, comprenant notamment des preuves concrètes et vérifiables des mesures prises pour appliquer les recommandations de la commission d'enquête. Enfin, la commission s'est félicitée de la nomination de M. Stephen Marshall en qualité de nouveau chargé de liaison de l'OIT à Yangon et a exprimé sa profonde gratitude pour le travail effectué par le chargé de liaison par intérim sortant, M. Richard Horsey.
Le président de la commission, en plus des documents fournis à la commission, s'est référé aux faits nouveaux survenus récemment au Myanmar et communiqués par le chargé de liaison a.i. du BIT. Ce dernier a participé à une réunion avec le ministre du Travail du Myanmar au cours de laquelle il a recommandé: la suspension de la politique actuelle du Myanmar consistant à poursuivre les personnes portant plainte; la fin des poursuites contre les plaignants ainsi que leur libération; la mise en place, en vertu des engagements avec l'OIT, d'un mécanisme crédible de traitement des plaintes relatives au travail forcé. Lors de cette réunion, le ministre s'est engagé à présenter ces propositions aux plus hautes autorités nationales, tout en indiquant qu'il n'était pas en position de dire quand une réponse pourrait être donnée.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a indiqué qu'il souhaitait faire une déclaration portant uniquement sur le commentaire formulé par la commission d'experts, selon lequel le gouvernement doit prendre quatre types de mesure pour faire face au problème examiné, à savoir émettre des instructions spécifiques et concrètes aux autorités civiles et militaires; assurer que l'interdiction du travail forcé soit largement rendue publique; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'÷uvre forcée ou non rémunérée et assurer le respect de l'interdiction du travail forcé.
S'agissant des instructions données aux autorités civiles et militaires, la commission d'experts a reconnu que des instructions avaient effectivement été données par ces autorités. Dans la mesure du possible, des traductions anglaises ont été fournies à la commission. S'agissant des instructions et des courriers émanant du ministère de la Défense, en principe, tous ne sont pas mis à la disposition des autres ministères et départements du gouvernement car ils concernent la sécurité nationale. Par conséquent, il est impossible de fournir des exemplaires ou des traductions anglaises de ces courriers ou instructions à l'organe d'une organisation internationale.
Quant à la large publicité qui doit être faite à l'interdiction du travail forcé, il y a quelque temps, le chargé de liaison a.i. du BIT a été autorisé à participer à deux ateliers, l'un tenu dans la localité de Myeik (division de Tanintharyi), l'autre dans la localité de Kawhmu (division de Yangon). Le gouvernement fera son possible pour permettre au chargé de liaison d'assister, le cas échéant, à tout événement qui aurait lieu.
Enfin, s'agissant des inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'÷uvre forcée ou non rémunérée, les crédits nécessaires ont été prévus dans le budget de l'Etat. Le gouvernement transmettra à la commission d'experts les informations utiles sur l'allocation du budget en temps voulu.
Quant aux options visant à créer un mécanisme de contrôle en matière de travail forcé, en application des conclusions de la 294e session du Conseil d'administration, le gouvernement du Myanmar a invité une mission de l'OIT à examiner ces options. La mission a mené des discussions approfondies avec le gouvernement, lequel a indiqué qu'il souhaitait examiner l'option I, fondée sur l'actuelle structure du bureau du chargé de liaison a.i. à Yangon. Au cours de la mission, le gouvernement a également expliqué pourquoi le Myanmar ne pouvait accepter l'option II proposée par l'OIT. A cet égard, le gouvernement a souligné qu'il souhaite poursuivre l'examen de l'option I et que des discussions approfondies menées avec le Bureau allaient suivre.
Deux problèmes doivent encore être réglés d'une manière acceptable pour les deux parties après la mission de l'OIT au Myanmar. Le premier concerne le mandat donné par le Conseil d'administration pour assurer une protection aux plaignants ou à leurs représentants. Le deuxième concerne la recherche d'un mécanisme acceptable pour traiter les allégations de travail forcé et examiner les moyens de résoudre les problèmes de travail forcé dans le pays. S'agissant du premier problème, le gouvernement du Myanmar est disposé à donner suite aux demandes répétées de l'OIT de s'abstenir de prendre une action à rencontre des plaignants mais que, sur le terrain, cela est difficile. Les fausses plaintes intentionnelles aux motifs politiques se sont multipliées, et la plupart des plaintes reçues à ce jour ont un objectif politique, celui de porter atteinte à l'image du gouvernement. Par conséquent, il convient de prendre des mesures dissuasives pour mettre un terme à la prolifération de fausses plaintes, et le gouvernement ne peut admettre ces accusations sans fondement.
Le Myanmar a cependant revu sa position sur ce point et des éléments positifs ont été observés en la matière. Le 26 mai 2006, le ministre du Travail a reçu le chargé de liaison a.i. du BIT à Yangon. Ce dernier avait prié le ministre de revoir la position du Myanmar à propos des poursuites engagées contre les personnes déposant de "fausses" plaintes. A titre expérimental, les autorités du Myanmar vont suspendre ces poursuites pendant six mois. Au cours de cette période, les plaintes seront traitées par le directeur général du Département du travail et le chargé de liaison de l'OIT, ce qui constitue une mesure provisoire. Entre-temps, l'OIT et le gouvernement continueront à déterminer les modalités et le cadre juridique de l'option I afin de pouvoir instaurer un mécanisme acceptable pour les deux parties. Cet arrangement montre une fois de plus que le Myanmar est disposé à coopérer avec l'OIT.
Le gouvernement du Myanmar est fermement opposé à ce que Maung Maung assiste aux travaux de la présente commission et participe à ses délibérations. Il a déjà envoyé un courrier à ce sujet. Maung Maung a participé à des activités terroristes ces dernières années. Dans sa notification n° 3/2005 du 28 août 2005, le ministère de l'Intérieur a déclaré que la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) était une organisation illégale au sens de l'article 15 (2) de la loi sur les associations illégales. Maung Maung est le secrétaire général de la FTUB. De plus, d'après la déclaration n° 1/2006 du 12 avril 2006, qui émane du ministère de l'Intérieur et se fonde sur des informations concrètes, Maung Maung et Hla Oo sont des terroristes, et la FTUB est une organisation terroriste.
Evoquant les faits nouveaux intervenus depuis mars 2006, le représentant gouvernemental a ajouté que, dans le document D.5, le chargé de liaison indique avoir été informé que, dans le cas d'Aunglan, une des trois personnes (Aung Than Tun) avait été condamnée à deux ans de prison par le tribunal de comté le 19 mai 2006. Pourtant, d'après les informations dont dispose le gouvernement, personne n'a été condamné, et, faute de témoins, le tribunal a différé l'audience jusqu'au 20 juin 2006.
En conclusion, même si certains milieux ont une nouvelle fois mis le Myanmar sur le devant de la scène et menacé d'agir si le gouvernement ne respectait pas ses obligations, ce dernier va tout mettre en ÷uvre en tenant compte de la situation du pays et des limites qu'il rencontre. Ce ne sont pas les menaces et la confrontation qui permettront de régler le problème. Seules la coopération et la participation rendront un règlement possible.
Les membres travailleurs ont déploré le fait que, une fois de plus, la Commission de la Conférence doit traiter de ce cas particulièrement grave qui persiste depuis plus de trente ans. En 1997, la commission d'enquête, constituée par le Conseil d'administration, avait constaté que la convention n° 29 était violée dans le droit national et dans la pratique, et ce d'une manière généralisée et systématique. Elle avait alors formulé les recommandations suivantes: que les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient mis en conformité avec la convention; que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités et, en particulier, par les militaires; et que les sanctions prévues pour le fait d'avoir exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées. Afin d'assurer la mise en ÷uvre de ces recommandations, la commission d'experts avait identifié quatre domaines dans lesquels des mesures concrètes devaient être prises par le gouvernement pour mettre un terme à l'imposition du travail forcé dans le pays. Toutefois, cinq ans plus tard, en juin 2005, la Commission de la Conférence a dû constater la persistance flagrante des violations de la convention n° 29 et la négation systématique des recommandations. La commission avait alors demandé au Conseil d'administration de se pencher à nouveau sur le cas du Myanmar, ce qu'il a fait à deux reprises.
Cependant, malgré toutes les mesures prises par l'OIT, l'imposition du travail forcé persiste au Myanmar. La commission d'experts a donc dû, dans son dernier rapport, se pencher une fois de plus sur certains aspects pour lesquels le gouvernement devait fournir des informations, S'agissant des modifications à apporter à la législation nationale, le gouvernement devait émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires à l'effet que la réquisition de main-d'÷uvre forcée est illégale. Or la commission d'experts n'a toujours pas pu prendre connaissance du contenu de ces instructions et notamment des types de pratiques considérées comme du travail forcé. De plus, le gouvernement devait assurer que l'interdiction du travail forcé soit largement rendue publique. Bien qu'il mentionne qu'une série de réunions d'information et d'ateliers aient étés organisés, il ne précise pas la teneur de ces derniers. En qui concerne la question des inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'÷uvre forcée ou non rémunérée, la commission d'experts réaffirme qu'elle ne dispose pas d'informations détaillées sur une quelconque allocation de moyens budgétaires suffisants pour ne plus avoir à recourir au travail forcé. Finalement, en ce qui concerne les mesures à prendre pour assurer le respect de l'interdiction du travail forcé, la commission d'experts fait plusieurs constats. En premier lieu, les équipes d'observation sur le terrain ainsi que le centre de coordination mis en place par le bureau du commandant en chef des armées semblent manquer d'indépendance et de crédibilité. Deuxièmement, sur les 46 cas dont le Comité d'application de la convention n° 29 a été saisi en 2004, cinq seulement ont été retenus comme étant réellement constitutifs de travail forcé, et aucun ne concernait les forces armées. Troisièmement, les personnes qui portent plainte sont désormais poursuivies plutôt que celles qui imposent du travail forcé, ce qui a poussé le chargé de liaison ad intérim à ne plus soumettre de cas de travail forcé aux autorités. Finalement, le chargé de liaison a fait l'objet de menaces. La persécution des plaignants est une violation manifeste des articles 23 et 25 de la convention n° 29 et est contraire à l'obligation d'éliminer le travail forcé ou obligatoire prévue par la Déclaration de l'OIT de 1998.
Les membres travailleurs ont poursuivi en soulignant qu'un monde civilisé implique des engagements partagés par l'humanité. Les membres de la famille des Nations Unies sont responsables de l'établissement des droits de l'homme, y compris des droits des travailleurs, définis, encouragés et partagés par l'humanité. Lorsque des êtres humains se maltraitent et se rendent esclaves les uns des autres, il s'agit d'une violation contre l'humanité qui compte parmi les pires crimes. Lorsque cette violation est systématique et lorsque ses auteurs ne montrent aucun remord ou ne manifestent aucune volonté de changer leurs comportements, le monde doit agir. Tel est le cas au Myanmar. Les membres travailleurs ont attiré l'attention sur l'importance des preuves contenues aussi bien dans les nouveaux cas de travail forcé que dans ceux en cours. Ils ont souhaité faire part à la commission des rapports reçus sur le recours au travail forcé ces derniers mois. Ces rapports montrent la façon épouvantable dont les droits de l'homme sont traités au cours de ce siècle. Cette pratique continue, étendue et généralisée du travail forcé affecte des vies humaines. La commission d'experts prend acte dans son rapport de la communication de la CISL datée d'août 2005 s'accompagnant de quelque 1 100 pages de documents regroupant différentes sources et qui apporte la preuve du recours persistant au travail forcé au sein de presque tous les Etats et divisions du pays. Une réponse à ce sujet a été demandée au gouvernement par la commission d'experts. Or la déclaration faite aujourd'hui par le représentant du gouvernement est insuffisante et suggère une réponse politique qui n'inspire aucune confiance. Les membres travailleurs ont donné des exemples détaillés de cas récents de recours au travail forcé ou obligatoire, tout en soulignant que depuis quelques mois les unités et commandants de l'armée imposent le travail aux populations locales, particulièrement dans les Etats du Kayin, du Mon et de l'Arakan. Dans l'Etat de l'Arakan, ces cas incluent: 1) le recours au travail forcé, aux extorsions ainsi qu'à la confiscation de terres pour la culture du riz dans les champs militaires et locaux de NaSaKa pendant la saison des pluies, ce qui a un impact sur les fermiers qui doivent également s'occuper des cultures de leurs propres champs; 2) des exactions de travail forcé constantes et très répandues dans les activités telles que les usines de briques, la réparation et l'élargissement des camps militaires, la construction de routes, de ponts et de villages modèles dans le cadre des projets dits de développement; 3) la construction de nouveaux axes routiers et ponts reliant les bases militaires entre elles ou les villages et les camps militaires des municipalités de Buthidaung et Maungdaw dans lesquelles des villages entiers ont été contraints à travailler et à apporter leurs matériaux et où des enfants ont été vus en train de casser des pierres; 4) des rapports effectués par les villageois selon lesquels la construction et la production de matériaux de construction utilisés dans les projets de construction ou vendus pour générer des revenus au bénéfice des militaires et pour les autres autorités exigent plus de temps que le travail obligatoire dans les entreprises de briques; et 5) le recours au travail forcé tout au long de l'année pour maintenir et réparer les camps militaires ainsi que la prédominance des tours de garde et du travail obligatoires dans ces camps. Concernant les Etats du Kayin (Karen) et du Mon, les membres travailleurs ont fait mention de sérieuses préoccupations humanitaires liées à l'augmentation de l'activité militaire qui a engendré le portage forcé de fournitures et de nourriture militaire ainsi que le déminage forcé. Le gouvernement du Myanmar a étendu son réseau routier dans ces Etats, ce qui s'est accompagné de l'établissement de nouveaux camps militaires et de nouveaux cas de recours au travail forcé des villageois, l'augmentation du travail forcé étant directement liée à la campagne militaire actuelle dans les régions du Karen. Quatorze mille civils, dont certains membres d'organisations ÷uvrant dans les domaines de l'éducation, de la santé et de l'agriculture, ont été déplacés à l'intérieur du pays ces quatre derniers mois. Les membres travailleurs ont ajouté que la situation des réfugiés et des personnes déplacées est sérieuse et en voie de détérioration. Depuis octobre 2005, 540 000 personnes ont été déplacées dans la seule partie Est du pays. Une des causes à l'origine de ce déplacement est la fuite des personnes devant le traumatisme du travail forcé.
Les accusations contre la CISL et la FTUB sont des sources d'inquiétude pour les membres travailleurs. Ils dénoncent une fois encore les accusations scandaleuses lancées cette année par les leaders du régime lors de leur récente conférence de presse contre la CISL, selon laquelle le soutien de cette organisation à la FTUB s'apparente au soutien à une organisation terroriste. Les représentants travailleurs du Myanmar, en cherchant à protéger et à promouvoir les droits les plus fondamentaux des travailleurs, effectuent un travail d'une importance capitale, et dire que ces personnes, engagées dans le travail important et légitime de la représentation des travailleurs, sont impliquées dans des actes terroristes est une injure. Les membres travailleurs ont insisté sur le fait que leurs frères et s÷urs du Myanmar ne sont pas des terroristes et qu'ils sont très fiers de prendre part à la défense des droits des travailleurs. Maung Maung n'est pas un terroriste mais un activiste ÷uvrant pour la liberté, tout comme son adjoint présent à cette commission. Le gouvernement du Myanmar est prié instamment de souscrire aux principes de la démocratie au sein de l'OIT et de les faire respecter.
Le travail forcé et obligatoire est systématique et très répandu au Myanmar. Cette commission a appelé le gouvernement à entreprendre des actions sérieuses en vue d'éliminer le travail forcé, et les membres travailleurs ont offert leur assistance pour l'application des recommandations de la commission d'enquête. Il est cependant clair que le gouvernement n'a aucune intention d'appliquer ces recommandations, ce qui doit figurer dans les conclusions concernant ce cas. Il est à espérer que le représentant gouvernemental du Myanmar comprendra que les membres travailleurs sont quelque peu inquiets de la proposition formulée dans sa déclaration. Des informations détaillées sur les actions prises devront être fournies de manière à assurer que les promesses ne resteront pas lettre morte comme par le passé. L'OIT est la seule lueur d'espoir pour les travailleurs esclaves. La Commission de la Conférence doit adopter des conclusions fortes, tout comme la Commission de proposition. Il est à noter que la prochaine réunion du Conseil économique et social examinera ces problèmes extrêmement sérieux.
Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental du Myanmar d'avoir fourni des informations. Toutefois, ils ont fait remarquer qu'il n'était pas présent dans la salle lorsque les membres travailleurs ont fait leur déclaration, ce qui montre le manque de sérieux dont fait preuve le gouvernement à propos de ce cas. Depuis plusieurs années, la Commission de la Conférence examine le présent cas sur la base de la résolution adoptée par la Conférence en 2000. Ce cas va également être examiné par la Commission de proposition dans quelques jours. La question dont est saisie la Commission de la Conférence est celle de l'application, par le gouvernement, de la convention n° 29 et des recommandations de la commission d'enquête. Il convient d'observer que, depuis 1955, date à laquelle le pays a ratifié la convention, le gouvernement n'a pris absolument aucune mesure pour lui donner effet. On observe aussi un manque crucial de transparence, d'honnêteté et d'initiatives pour adopter une législation nouvelle et appropriée. A de nombreux égards, l'observation de la commission d'experts de 2006 se fonde sur un mythe que le gouvernement entretient depuis plus de cinquante ans. Pendant plus d'un demi-siècle, il a fait croire au monde qu'il allait mettre en ÷uvre la convention n° 29. Il est temps de mettre fin à cette hypocrisie.
Dans son observation de 2006, la commission d'experts souligne que, à la Conférence internationale du Travail de 2005 et à la session du Conseil d'administration de novembre 2005, le gouvernement s'était dit déterminé à coopérer avec TOIT. Le monde est las d'attendre. Les membres employeurs partagent l'avis de la commission d'experts selon lequel les déclarations du gouvernement doivent être suivies de mesures concrètes pour être crédibles. Le gouvernement serait crédible s'il mettait vraiment en ÷uvre les recommandations de la commission d'enquête. Les conclusions exposées par la commission d'experts cette année indiquent clairement que, dans tous les domaines, cela est loin d'être le cas et que les mesures prises par le gouvernement ne visent qu'à faire illusion, S'agissant de la mise en conformité des textes législatifs avec la convention, peu de choses semblent avoir changé. Les lois sur les villes et les villages, qui confèrent aux autorités locales une large compétence pour réquisitionner le travail d'autrui, n'ont pas été modifiées. La portée des "instructions" du gouvernement prescrivant aux autorités publiques de ne pas faire usage des pouvoirs conférés par certaines dispositions des lois a été limitée. On ne sait pas précisément si ces "instructions" ont valeur de loi et si elles occupent la même place que les lois sur les villes et les villages dans la hiérarchie juridique. Par conséquent, les autorités ne savent pas clairement si elles doivent appliquer les lois ou les "instructions". De plus, la situation juridique demeure instable puisque les "instructions" peuvent être abrogées à tout moment, auquel cas seules les lois sur les villes et les villages, contraires à la convention, s'appliqueraient. Enfin, aucun motif convaincant n'a été avancé pour expliquer pourquoi les dispositions de ces lois n'ont pas pu être modifiées. Il est donc indispensable que le gouvernement révise les lois sur les villes et les villages sans plus attendre pour les rendre conformes à la convention n° 29.
S'agissant de la nécessité d'assurer que l'interdiction du travail forcé soit largement rendue publique, le gouvernement a transmis à la commission d'experts des informations sur les différentes mesures adoptées (envoi de courriers, communications d'informations et ateliers). Toutefois, aucune information n'est donnée quant au contenu des communications et à l'objet des ateliers, ce qui pose la question de l'efficacité de ces mesures. De plus, d'après les informations du gouvernement, à peine plus de 1 pour cent de la population a eu connaissance de l'interdiction du travail forcé. Ces mesures ont une ampleur limitée et ne sauraient être considérées comme constituant une "large publicité". Les membres employeurs estiment, à cet égard, que le gouvernement aurait pu utiliser les mass média tels que la presse, la radio et la télévision.
Les membres employeurs ont partagé la conclusion de la commission d'experts selon laquelle les informations fournies par le gouvernement, afin de donner suite à la recommandation de la commission d'enquête sur la prévision des moyens appropriés pour remplacer la main-d'÷uvre exerçant un travail forcé, ne sont pas pertinentes.
Quant à l'instauration d'un mécanisme de contrôle destiné à assurer le respect de l'interdiction du travail forcé, les membres employeurs ont relevé que la commission d'experts a pris note des informations envoyées par le gouvernement et le chargé de liaison a.i. du BIT sur ce point. D'après ces informations, les mécanismes de contrôle actuels ne sont pas adaptés, et leur indépendance et leur fiabilité sont insuffisantes. De plus, les victimes du travail forcé déposant plainte auprès de l'OIT semblent faire l'objet de poursuites systématiques pour "fausses" plaintes. A juste titre, la commission d'experts a prié le gouvernement de mettre fin à cette pratique. Le gouvernement doit engager des poursuites contre les personnes qui ont recours au travail forcé et mettre en place des procédures d'enquête fiables, justes et plus efficaces pour examiner les allégations de travail forcé. La commission d'experts a également prié le gouvernement de collaborer plus étroitement avec le chargé de liaison a.i. du BIT en la matière, a souligné qu'il était indispensable de recourir à un facilitateur et que celui-ci constituait un moyen fiable pour traiter les plaintes. Les membres employeurs rappellent que les organes de contrôle de l'OIT doivent disposer d'informations utiles, vérifiables et fiables sur les mesures prises par le gouvernement. Le gouvernement doit transmettre ces informations de son propre chef, sans être constamment sollicité par ces organes.
En conclusion, les membres employeurs ont souligné que le chargé de liaison a.i. du BIT a joué un rôle essentiel dans le pays en facilitant les contacts et la coopération entre les organes de contrôle de l'OIT et les autorités. Le gouvernement devrait lui permettre de s'acquitter de ses fonctions, mais aussi le soutenir en amont et chercher à l'associer à ses initiatives. Au lieu de cela, le chargé de liaison a fait l'objet de pressions et d'intimidations diverses, alors que le gouvernement s'était engagé à coopérer à maintes reprises. Aucun progrès n'a été réalisé. Les membres employeurs ont déploré cet état de fait et se sont dit très préoccupés par l'absence d'améliorations concrètes à propos de ce cas extrêmement grave et inquiétant. D'après un examen d'ensemble, les mesures appropriées devraient être envisagées en appliquant l'article 33 de la Constitution de l'OIT. Il est temps de prendre des dispositions concrètes. Toute autre action reviendrait à instaurer un simulacre de justice internationale et à rendre caducs les droits des victimes du travail forcé au Myanmar. Le gouvernement doit faire ce qui s'impose: éliminer le travail forcé.
Le membre gouvernemental de l'Autriche s'exprimant au nom des membres gouvernementaux des Etats membres de l'Union européenne, et de l'Albanie, la Bosnie Herzégovine, la Bulgarie, la Croatie, l'ex-République yougoslave de Macédoine, l'Islande, la Norvège, la Roumanie et la Turquie ainsi que de la République de Moldova, de la Suisse et de l'Ukraine, qui se sont alignés sur sa déclaration, a rappelé que le cas extrêmement grave du Myanmar est inscrit à l'ordre du jour de la commission d'experts depuis plus de trente ans et a été critiqué et condamné par la Commission de la Conférence, le Conseil d'administration et la Conférence. Cette question a atteint son point culminant lors de l'application unique et sans précédent de l'article 33 de la Constitution de l'OIT par le Conseil d'administration qui a entraîné l'adoption de la résolution par la Conférence en 2000. Par conséquent, il n'est pas surprenant que le commentaire formulé par la commission d'experts sur le cas du Myanmar soit complet et détaillé, contenant un certain nombre d'attentes fortes et claires adressées aux autorités du pays.
L'orateur a exprimé le profond regret de l'Union européenne sur la décision prise par le gouvernement du Myanmar de prolonger l'assignation à domicile de Aung San Suu Kyi et a déploré le fait que les appels lancés, le 26 mai 2006, par la communauté internationale, y compris par l'Union européenne, soient restés sans réponse. Il s'agit d'un signe donné par le gouvernement qu'il n'entend pas faire de compromis, ni de se diriger vers une véritable démocratie. Dans ce contexte, l'Union européenne demande à nouveau au gouvernement de libérer Aung San Suu Kyi ainsi que tous les autres prisonniers politiques, et d'engager un véritable dialogue avec toutes les forces ethniques et politiques dans le pays, afin d'assurer une réconciliation nationale et d'instaurer la démocratie. A cet égard, il s'est référé à la plus récente déclaration formulée par l'Union européenne sur la Birmanie/Myanmar le 26 mai dernier, selon laquelle elle est disposée à aider le pays à instaurer la démocratie et à réaliser une véritable réconciliation.
L'orateur a salué la récente visite du Sous-secrétaire général des Nations Unies au Myanmar pendant laquelle il a rencontré les plus importants leaders du Conseil d'Etat pour la paix et le développement pour régler un vaste éventail de questions en suspens et qui intéressent la famille des Nations Unies aussi bien que la communauté internationale. Il a réitéré son appel aux autorités de coopérer avec les Nations Unies, en particulier avec l'OIT, et a exhorté les autorités à cesser de harceler les politiciens et les défenseurs des droits de l'homme et à lever les restrictions sur la liberté de réunion et d'expression, y compris le droit de porter plainte concernant le travail forcé, sans crainte de représailles ni poursuites. Le débat sur la Birmanie/ Myanmar n'est pas encore clos. L'Union européenne soutient le chargé de liaison a.i. du BIT, qui exerce ses fonctions dans un environnement extrêmement délicat. Cette question devrait être ultérieurement discutée au sein de la Commission de proposition pour décider des éventuelles mesures à prendre par l'OIT afin de s'assurer que le Myanmar respecte les recommandations de la commission d'enquête et de veiller à ce qu'aucune mesure répressive ne soit prise contre les plaignants et leurs représentants.
Le membre gouvernemental de l'Australie a accueilli avec prudence l'annonce du représentant gouvernemental au sujet du moratoire concernant les poursuites engagées à rencontre des personnes ayant déposé des plaintes, et a souligné qu'il devrait s'agir d'une mesure définitive. Il est à espérer que dé plus amples informations sur l'application pratique de cette mesure seront fournies. L'orateur a fait part de la préoccupation continue de son gouvernement face à la situation au Myanmar. Les perspectives de changement se présentent mal et aucun acte du régime ne répond à la nécessité de mener une réforme politique véritable, de respecter les droits de l'homme ou de mettre un terme au déclin économique continu. En outre, le fait que les prisonniers politiques continuent en détention est également préoccupant. L'orateur a prié instamment le gouvernement du Myanmar de s'attaquer au plus vite au problème du travail forcé en donnant effet aux recommandations de la commission d'enquête de l'OIT, et attendait à cet égard avec impatience les discussions à venir au sein de la Commission de proposition au sujet des deux options concernant les futures actions à prendre.
Le membre gouvernemental de la Chine a déclaré que le travail forcé constituait une violation des droits humains fondamentaux et que, pour cette raison, il devait être éliminé, ce qui est l'objet de la convention n° 29 adoptée par l'OIT en 1930. Depuis son adoption, les expériences de l'OIT ont montré qu'il fallait conclure une alliance mondiale pour éliminer le travail forcé, comme l'a souligné le Directeur général l'année dernière dans son rapport, en vertu du suivi de la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail. Il déclare que l'OIT aide le gouvernement du Myanmar à éliminer le travail forcé sur la base du dialogue et de la coopération. Le gouvernement a réalisé des progrès, même si, pour la communauté internationale, ils ne sont peut-être pas assez rapides. D'après le gouvernement chinois, de manière générale, le gouvernement du Myanmar va dans la bonne direction. Il déplore que la conclusion adoptée par la Commission de la Conférence l'année passée ait eu des effets négatifs sur la coopération entre l'OIT et le gouvernement, et espère que la coopération sera renforcée.
Le Myanmar subit les conséquences des conflits armés entre groupes ethniques dans les régions frontalières, du ralentissement du développement économique national et des carences de son système législatif; ce sont là les principales causes du travail forcé. La communauté internationale doit apporter une aide sur-ces questions. Actuellement, le Myanmar progresse vers le développement économique et élabore une nouvelle Constitution pour promouvoir la paix et la démocratie. Au lieu de condamner et de sanctionner le pays, la communauté internationale devrait l'encourager et l'aider, ce qui donnerait de meilleurs résultats. Il faut espérer que la commission et le gouvernement instaureront un dialogue sincère qui les mènera sur la voie de la coopération. C'est seulement en instaurant un dialogue, en mettant en place une coopération et en tenant compte des points de vue de tous les acteurs concernés que la communauté internationale pourra réaliser des progrès à propos du Myanmar.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a noté les remarques et les propositions formulées par le représentant gouvernemental et déclaré attendre la confirmation des progrès qui avaient été annoncés. C'est toutefois avec une grande tristesse et un profond désarroi qu'il faut noter une fois encore qu'aucune amélioration n'a été constatée dans les efforts du gouvernement birman à résoudre le problème du travail forcé. Le gouvernement n'a pas respecté ses engagements internationaux et, une année après la séance spéciale de cette commission consacrée à cette question, les violations continuent.
Dans son observation la plus récente, la commission d'experts a noté que ce cas fait l'objet de commentaires depuis plus de trente ans. Depuis le début des années quatre-vingt-dix, la question du travail forcé au Myanmar a été examinée par l'ensemble des mécanismes de contrôle existant dans l'Organisation: examen par le Conseil d'administration d'une réclamation adressée, conformément à l'article 24 de la Constitution, par une organisation de travailleurs ou d'employeurs au sujet de l'application d'une convention, examen par une commission d'enquête d'une plainte déposée en vertu de l'article 26 et, plus récemment, recours à une mesure sans précédent en vertu de l'article 33 de la Constitution. A chaque étape de la procédure de contrôle, les conclusions ont été constantes. Il n'y a aucun doute que le travail forcé existe au Myanmar et aucune mesure significative n'a été prise par le gouvernement pour y mettre fin. Dans sa dernière observation, la commission d'experts indique très clairement ce que le régime devait faire pour mettre en ÷uvre les recommandations faites par la commission d'enquête et satisfaire à ses obligations en vertu de la convention n° 29. Les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, doivent, en premier lieu, être mis en conformité avec la convention n° 29, ce que le gouvernement promet depuis longtemps mais n'a toujours pas réalisé. L'interdiction du recours au travail forcé doit, en second lieu, être largement rendue publique. Il ne s'agit pas là, comme l'a souligné la commission, d'un exercice extrêmement difficile et pourrait être mis en ÷uvre immédiatement. En troisième lieu, des inscriptions budgétaires adéquates doivent être prévues pour le remplacement de la main-d'÷uvre forcée ou non rémunérée. Il s'agit d'un moyen pour le gouvernement de montrer sa volonté réelle d'éliminer le travail forcé. Un mécanisme de contrôle du travail forcé doit enfin être établi. Il est absolument nécessaire, comme l'indique la commission d'experts, qu'une procédure "crédible, juste et plus efficace d'enquête sur les plaintes pour travail forcé, et notamment sur les plaintes mettant en cause l'armée" soit instaurée.
L'oratrice a insisté sur le fait que, malgré les indications claires de l'OIT sur les orientations possibles pour éliminer le travail forcé dans le pays, le gouvernement n'a mis en ÷uvre efficacement aucune des recommandations formulées par l'Organisation. L'OIT a instamment prié le gouvernement de poursuivre les personnes ayant recours au travail forcé. Or ce sont les plaignants et les victimes du travail forcé qui sont poursuivis. Le gouvernement a, par ailleurs, toujours refusé l'offre d'assistance et de coopération de l'OIT pour résoudre la situation. Le gouvernement a parfois exprimé sa volonté de mettre fin au travail forcé et de coopérer avec l'OIT ou nié l'existence même de ce type de travail. Il a même menacé de se retirer de l'OIT. Pendant ce temps, le recours au travail forcé continue avec la même vigueur et en toute impunité. La non-reconnaissance des résultats des élections législatives de 1990 par le gouvernement, remportées par une écrasante majorité par la Ligue nationale pour la démocratie et les autres partis d'opposition, est un autre fait préoccupant. La détention d'Aung San Suu Kyi a récemment été prolongée. Nonobstant les informations positives du représentant gouvernemental, en l'absence de mesures concrètes et vérifiables destinées à résoudre cette situation déplorable, d'autres mesures doivent être prises au sein de l'Organisation ou dans les autres organisations internationales et en collaboration avec d'autres acteurs, afin de mettre un terme une fois pour toutes au travail forcé dans le pays et assurer ainsi le respect complet de la convention n° 29.
La membre gouvernementale' de la Nouvelle-Zélande a
remercié le Bureau international du Travail pour les informations sur les faits nouveaux concernant la situation du travail forcé au Myanmar et pour les efforts continus déployés afin de réaliser des progrès sur ce problème. Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande attache une grande importance aux activités du bureau de l'OIT au Myanmar et sur la nécessité d'établir un dialogue entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar. Le cas du Myanmar n'est pas inconnu de la Conférence. Depuis plusieurs décennies, l'OIT somme le gouvernement du Myanmar d'éliminer le travail forcé. Ce dernier ne donne toutefois pas suite à cette demande ni ne met en ÷uvre les recommandations de la commission d'enquête. C'est pourquoi l'oratrice a soutenu la proposition de mettre cette question à l'ordre du jour de la Conférence, de manière à atteindre une application effective des mesures comprises à la résolution sur le Myanmar, adoptée par la Conférence en 2000.
La situation actuelle au Myanmar est fort regrettable, dans la mesure où les efforts déployés par l'OIT pour engager un dialogue de bonne foi ont rencontré l'intransigeance, et ce malgré l'engagement du gouvernement. Le refus du Myanmar d'accepter le principe selon lequel les personnes qui portent plainte ne doivent pas faire l'objet de poursuites judiciaires ou autres mesures punitives est inconséquent avec les obligations du Myanmar en vertu de la convention n° 29. Ce principe est fondamental pour la coopération future avec l'OIT. L'oratrice a prié instamment le gouvernement de remplir ses obligations internationales et appuyé fortement la demande faite par le BIT que le gouvernement cesse de poursuivre les victimes du travail forcé ou leurs représentants et, à la place, poursuive les personnes qui imposent cette pratique. Le gouvernement doit respecter les droits de l'homme, engager un dialogue effectif avec le BIT et la communauté internationale, et remplir ses obligations prises à la suite de la ratification de la convention n° 29, de manière à ce que la population ne souffre pas plus longtemps de l'injustice liée au travail forcé.
Le membre gouvernemental du Canada a indiqué que son pays avait clairement exprimé sa position par le passé et qu'il est profondément déçu par l'absence de toute amélioration significative concernant le recours au travail forcé, et tout particulièrement par la non-application par le gouvernement des recommandations formulées par la commission d'enquête et l'équipe de haut niveau. Le Canada regarde avec une inquiétude grandissante les développements défavorables qui se sont déroulés concernant le travail forcé. Ils font partie de la longue et vaste politique des autorités visant à ébranler les principes fondamentaux des droits de l'homme. L'assignation à résidence de la lauréate du prix Nobel Aung San Suu Kyi a une fois encore été prolongée. Elle représente ces nombreux citoyens birmans anonymes et malchanceux, y compris ceux contraints au travail forcé. L'orateur s'est dit par ailleurs préoccupé par l'offensive de l'armée dans l'est du pays qui cause tant de pertes en vies humaines, de souffrances et de déplacements parmi les civils innocents, ainsi qu'une grosse augmentation du travail forcé, tel que dénoncé par les membres travailleurs.
Le Canada appelle le gouvernement à relâcher immédiatement et sans conditions Aung San Suu Kyi ainsi que les autres leaders du mouvement démocratique prisonniers et à cesser toutes les hostilités armées contre les civils innocents; à prendre sans délai et en vertu des recommandations de l'OIT des mesures immédiates et efficaces pour éliminer le travail forcé; à poursuivre les personnes imposant le travail forcé; à cesser les poursuites prises contre les personnes victimes du travail forcé ou qui sont en contact avec le chargé de liaison a.i. du BIT; à faire preuve de sincérité dans le dialogue avec l'OIT et, par exemple, à profiter des services de médiation informelle offerts par le représentant du Centre Henry Dunant pour le dialogue humanitaire; et, enfin, à mettre en ÷uvre le plan d'action conjoint, conclu en mai 2003 par le gouvernement et l'OIT. Pour conclure, l'orateur a remercié le chargé de liaison a.i. du BIT pour son précieux travail dans une situation difficile et délicate.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a réaffirmé la position de son pays qui considère que le travail forcé est une situation inacceptable et a rappelé l'importance d'éliminer complètement le travail forcé au Myanmar le plus rapidement possible. Il a salué le consensus obtenu au sein de l'OIT sur cette question et l'engagement du gouvernement à cet égard. Il s'est également félicité des efforts considérables déployés par le bureau depuis la dernière Conférence pour résoudre le problème. L'orateur a rendu hommage au volume de travail réalisé par le Bureau qui a maintenu le niveau nécessaire d'assistance, malgré les circonstances assez difficiles. L'orateur a indiqué partager le point de vue exprimé dans les documents du Bureau, selon lequel un progrès ne peut se faire que par la coopération avec les autorités. Par conséquent, le dialogue doit être encouragé. Dans la mesure où elles peuvent donner un nouvel élan au dialogue, les propositions formulées par le représentant gouvernemental méritent d'être examinées soigneusement. Le gouvernement du Myanmar doit prendre des mesures en coopération avec l'OIT afin d'éliminer le travail forcé. Il est à espérer rappeler qu'un mécanisme mutuellement acceptable sera établi pour résoudre le problème.
Le membre gouvernemental du Japon a déclaré que le cas du Myanmar se trouve à un stade critique et important. Dix jours avant la session de la Commission de la Conférence, le 18 mai, la visite du Sous-secrétaire des Nations Unies aux affaires politiques, au gouvernement du Myanmar, avait pu susciter quelque espoir. L'optimisme lié à cette rencontre a toutefois été anéanti avec l'annonce du gouvernement de la prolongation de l'assignation à résidence de Aung San Suu Kyi, mesure qui bien qu'elle ne tombe pas sous le mandat de l'OIT est jugée inacceptable par le gouvernement du Japon. La situation change, par conséquent, rapidement. L'orateur s'est réjoui de la déclaration du représentant gouvernemental du Myanmar dans laquelle ce dernier indique que son gouvernement est prêt à considérer l'option I - à savoir, maintenir en place le chargé de liaison du BIT - mais également de la proposition d'établir un moratoire de six mois en ce qui concerne les poursuites des personnes ayant porté plainte pour travail forcé. Il s'agit de signes positifs et concrets pour le gouvernement du Japon.
Le gouvernement du Myanmar doit informer la population des informations et opinions exprimées par les membres de cette commission. Il doit également prendre des actions concrètes en relation avec les propositions effectuées par le représentant gouvernemental et élargir et étendre les mesures proposées par celui-ci. Il est à espérer que le Myanmar comprenne que les opinions exprimées ne sont pas seulement celles de l'OIT mais aussi celles de la majorité de la communauté internationale. Bien que des mots complaisants eussent été plus agréables, le gouvernement du Japon a fait le choix de s'exprimer et de faire des suggestions directes comme une marque réelle d'amitié avec le Myanmar.
La membre travailleuse de l'Allemagne a indiqué qu'en sa qualité de porte-parole des travailleurs au sein du Comité de la liberté syndicale elle souhaite faire des commentaires sur le cas alarmant du travail forcé au Myanmar et a exprimé sa grande préoccupation sur la manière dont les droits de l'homme sont bafoués et la liberté syndicale violée. Le pays a ratifié la convention n° 87. Dans ce contexte, la violation sans scrupule de la liberté des travailleurs et des droits de l'homme dans le pays est d'autant plus inquiétante en raison de l'obligation de respecter le droit d'organisation et de négociation collective. La violation flagrante du droit d'organisation et de la liberté syndicale dans le pays est clairement liée à l'existence du travail forcé et à la pression exercée par le gouvernement sur les syndicats. Une grande partie de la population a peur d'exercer ses droits. Le Comité de la liberté syndicale examine actuellement des cas soumis par la CISL impliquant des violations graves des droits de la liberté syndicale, étant donné que les autorités militaires et étatiques bafouent les libertés fondamentales de la population.
Il n'existe pas la moindre organisation de travailleurs légalement enregistrée dans le pays. La FTUB ne pouvait pas travailler ouvertement et son secrétaire général a été harcelé par une procédure pénale. Les leaders syndicaux ont fait l'objet de menaces, de torture et d'incarcération. Les gens de mer qui ont dénoncé leurs conditions de travail ont également subi des sanctions, y compris la perte de leur travail. Ils ont également été mis sur une liste noire. Dans ce contexte, la mort non élucidée jusqu'à présent de Saw Mya Than de la FTUB et du Syndicat de travailleurs de l'éducation catholique et la non-libération de Myo Auny Than à la suite de sa condamnation à vingt ans de réclusion sont à déplorer. Les sanctions infligées aux leaders des mouvements des travailleurs étaient très sévères et avaient pour but de limiter les activités syndicales. L'histoire de la violation des droits des travailleurs et des droits de l'homme remonte à une date très lointaine, et ce malgré la pression exercée par la communauté internationale, y compris l'OIT. Malgré les affirmations du représentant gouvernemental, il n'y a pas de volonté claire pour éliminer le travail forcé dans le pays. En outre, l'accusation selon laquelle Maung Maung est un terroriste doit être réfutée. Il fait d'ailleurs injustement l'objet de poursuite pénale. Ce dernier n'est pas présent dans la salle, mais il est représenté pas son adjoint.
Aussi longtemps que le régime militaire sera toléré et encouragera activement la violation des droits fondamentaux des travailleurs et des droits de l'homme, l'OIT et la communauté internationale devront maintenir la pression sur le pays. Le régime doit prendre des mesures effectives et les employeurs de tous les Etats Membres doivent imposer les sanctions efficaces nécessaires pour mettre fin au travail forcé au Myanmar.
Le membre travailleur des Etats-Unis a souligné que les syndicats jouent un rôle positif en exerçant une pression économique, commerciale et d'autres moyens de pression sur le régime militaire au Myanmar, conformément à la résolution de l'OIT. A cet égard, les syndicats s'emploient à appliquer les sanctions là où elles n'existent pas encore et à les maintenir là où elles existent déjà. Les importations doivent être interdites et un frein doit être mis aux investissements dans le pays, dans la mesure où il s'agit d'initiatives cruciales pour favoriser un développement durable du pays et l'amélioration de la vie de ses travailleurs à travers notamment l'élimination du travail forcé. Le rôle du gouvernement des Etats-Unis et celui des autres gouvernements sont essentiels pour le succès de ces efforts. Les syndicats continuent d'appeler les gouvernements à faire pression sur le régime militaire au sein de l'OMC en appelant pour interdire l'importation et l'exportation de biens de et vers ce pays, en vertu de l'article 20 du GATT, qui offre les moyens appropriés permettant d'exercer une pression et devrait être mis en ÷uvre de manière urgente et rigoureuse. Enfin, les syndicats continuent à faire pression sur leurs gouvernements et sur les membres du Conseil de sécurité pour mettre la question du Myanmar à l'ordre du jour du Conseil de sécurité de l'ONU. La CISL a demandé à ses organisations affiliées, notamment à celles dont les pays sont membres du Conseil de sécurité de poursuivre cette action. L'orateur a remercié les organisations affiliées qui ont fait de même, en particulier en Argentine, au Brésil, en Italie, dans la Fédération de Russie et aux Etats-Unis; certains de ces efforts ayant eu des effets positifs.
Le membre travailleur du Japon a indiqué que l'OIT avait réalisé des efforts considérables pour éliminer le travail forcé en Birmanie; elle a, entre autres, mis sur pied une équipe de haut niveau, créé un bureau de liaison et institué un Comité d'application de la convention n° 29. Par conséquent, il est très préoccupant que l'on n'ait observé dans le pays aucune amélioration concernant le travail forcé depuis l'adoption de la résolution de la CIT de 2000. Il est aussi très inquiétant que le gouvernement refuse d'instaurer un dialogue avec la communauté internationale. Comme cela a déjà été indiqué à plusieurs reprises, quelques pays et certaines multinationales ont accru leurs investissements directs dans le secteur de l'énergie en Birmanie, ce qui aide le régime militaire à maintenir le travail forcé. D'après le magazine The Economist Intelligence Unit, en 2005, le montant des investissements directs étrangers dans le secteur du gaz et du pétrole a triplé en une année, La Chine est le premier investisseur et réalise 89 pour cent des investissements directs étrangers dans ce secteur; ses investissements ont été multipliés par 10 entre 2003 et 2005. La Thaïlande est le deuxième investisseur, son rôle d'investisseur s'est renforcé il y a peu et continue d'exercer une influence capitale sur le régime militaire. L'année dernière, la Thaïlande a signé un projet de construction de quatre grands barrages, pour lequel des sociétés d'électricité japonaises ont fourni une assistance technique et mené des études de faisabilité à l'avance. Les barrages se trouvent dans une région habitée par trois des principaux groupes ethniques du pays, les Karen, les Karenni et les Shan qui ont déjà été largement affectés par l'exécution de projets d'infrastructures. On redoute que cela se reproduise. Depuis de nombreuses années, le régime militaire est en guerre contre les peuples de ces régions, ce qui a entraîné d'importants flux de réfugiés, le déplacement de centaines de milliers de personnes dans le pays et d'innombrables cas de tortures, de viols et d'assassinats. La mise en place de ces infrastructures semble toujours aller de pair avec le recours généralisé au travail forcé.
Se référant à la résolution de 2000 dans laquelle les Etats Membres de l'OIT sont invités à revoir leurs relations avec le gouvernement et à ne mener aucune activité susceptible de contribuer au maintien des pratiques de travail forcé, l'orateur a souligné que la résolution doit être respectée par tous les Etats Membres et institutions financières internationales comme la Banque asiatique de développement, qui apporte une assistance technique pour le projet sur la sous-région du Mékong. Les investissements directs étrangers peuvent aider les sociétés ouvertes à promouvoir le développement si les droits des travailleurs sont pleinement respectés, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Les bénéfices issus de ces investissements ne sont pas redistribués aux travailleurs; ils permettent de soutenir le gouvernement qui continue à faire preuve d'arrogance envers son peuple et les institutions internationales. Face à une situation qui ne change pas, il faudrait cesser immédiatement de réaliser des investissements et de fournir une assistance technique, y compris de mener des études de faisabilité, si cela risque d'encourager le travail forcé de manière indirecte. Par conséquent, le gouvernement est prié instamment de reprendre le dialogue avec la communauté internationale et de créer des dispositifs crédibles pour mettre un terme au travail forcé.
La membre travailleuse de la République de Corée a exprimé les inquiétudes que suscite la question du travail forcé au Myanmar. Les syndicats coréens sont particulièrement préoccupés, du fait que deux grandes entreprises coréennes participent à des projets d'exploitation de gaz dans ce pays. Daewoo International est le principal partenaire dans le projet de Shwe. Selon Earth Rights International, au Myanmar les grands projets de développement relèvent directement des décisions de la junte au pouvoir et leur exécution est supervisée directement par l'armée. Le projet d'exploitation de gaz de Shwe s'accompagnera immanquablement d'atteintes à l'environnement mais aussi d'atteintes aux droits de l'homme, à travers les expropriations foncières forcées, la réquisition forcée de main-d'÷uvre pour la réalisation des infrastructures et aussi pour les missions de transport intéressant l'armée. Devant la gravité de la situation, la Fédération des syndicats coréens (FKTU) et plusieurs ONG ont organisé des manifestations de protestation à deux reprises l'an dernier devant le siège de Daewoo International et fait paraître des déclarations conjointes. De plus, la FKTU a adressé au ministère du Travail et au ministère des Affaires étrangères et du commerce une lettre officielle de protestation exigeant que Daewoo International et KOGAS prennent immédiatement des mesures pour prévenir les atteintes aux droits de l'homme, et notamment au droit du travail, que leurs initiatives pourraient entraîner. La FKTU a également appelé le gouvernement de la République de Corée à reconsidérer la nature de ses relations avec le gouvernement du Myanmar et à prendre toutes les dispositions nécessaires pour donner suite à la résolution adoptée par l'OIT en 2000. La FKTU a en outre demandé au gouvernement de la République de Corée et aux deux grandes entreprises coréennes visées de donner toutes informations pertinentes sur le projet d'exploitation de gaz et de suivre les normes et les principes de la communauté internationale.
La membre travailleuse de l'Italie a signalé que d'autres membres travailleurs ont déjà souligné que la situation s'était détériorée depuis la dernière Conférence et depuis les sessions du Conseil d'administration de novembre et de mars. En novembre 2005, le Conseil d'administration avait incité le gouvernement à profiter du temps dont il disposait avant mars 2006 pour rétablir un dialogue effectif avec le Bureau. Malheureusement, cet appel est resté lettre morte. Il a été dûment pris acte de la détérioration de la situation politique, sociale et économique et de la persistance du travail forcé au Myanmar après la session de la Conférence de 2005, et aussi par d'autres institutions internationales, qui ont souligné, dans diverses déclarations, le manque de volonté du gouvernement d'initier un processus sérieux de démocratisation pour mettre fin à l'utilisation du travail forcé et aux violations des droits fondamentaux et des droits des travailleurs dans le pays. Le membre travailleur a évoqué les points suivants: en août 2005, le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme a dû mettre fin à ses subventions au Myanmar à cause des restrictions du gouvernement qui rendaient la mise en ÷uvre de ses projets impossible. D'autres organisations ont dû prendre des décisions similaires; en septembre 2005, le prix Nobel de la Paix Desmond Tutu et l'ancien Président de la République tchèque Vaclav Havel ont publié un rapport et lancé un appel à une nouvelle initiative diplomatique d'urgence du Conseil de sécurité des Nations Unies. Des facteurs déterminants voudraient que le Myanmar soit inscrit à l'ordre du jour du Conseil de sécurité: déplacements forcés de population, travail forcé et recrutement d'enfants dans l'armée dans des proportions beaucoup plus élevées que dans tout autre pays. Le rapport mentionne clairement que la situation interne du Myanmar constitue une menace pour la stabilité de toute la région et pour la communauté internationale, ce qui laisse ouverte la possibilité d'une intervention du Conseil de sécurité en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations-Unies.
L'ECOSOC a décidé, suite à la requête du Directeur général du BIT, de réactiver la discussion sur le travail forcé au Myanmar durant sa session du 27 juillet 2006. Le 16 décembre 2005, le Conseil de sécurité des Nations Unies a organisé une réunion sur la situation du Myanmar qui incluait la situation du travail forcé. Une nouvelle discussion a eu lieu quelques jours avant la présente session de la Conférence.
Le dernier rapport du Rapporteur spécial de Nations Unies sur la situation des droits de l'homme, daté du 7 février, souligne les pratiques répandues et systématiques de travail forcé ainsi que l'embauche forcée par des représentants de l'Etat, incluant des allégations de travail des enfants. Le rapport conclut que, malgré les indications du gouvernement à l'effet qu'il désirait résoudre ces problèmes, le Rapporteur spécial n'a pas été autorisé à visiter le pays. Le rapport regrette également que toute volonté d'agir en la matière semble avoir disparue et que les recommandations du Secrétaire général des Nations Unies n'ont pas été appliquées. Le Rapporteur spécial a fait une autre déclaration sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, mettant l'accent sur le mauvais traitement des prisonniers politiques qui reflète la situation des droits de l'homme et l'absence de progrès vers la démocratie. Il a déclaré qu'il était temps pour la communauté internationale de demander une enquête indépendante sur le nombre croissant de décès de prisonniers politiques afin que les responsables rendent compte de leurs actes.
En mars 2006, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a décidé de réduire drastiquement ses activités au Myanmar à cause du manque de volonté du gouvernement de coopérer. Le CICR n'était plus en mesure de visiter aucun prisonnier politique, incluant ceux qui étaient détenus pour avoir porté plainte pour travail forcé ou pour avoir exercé des activités syndicales. Du 18 au 20 mai 2006, le Sous-secrétaire général des Nations Unies mandaté par le Secrétaire général, a visité le pays afin d'établir un dialogue fructueux avec le gouvernement. Le membre travailleur s'est dit concerné par l'échec de ces discussions de haut niveau. Malgré la possibilité pour le représentant des Nations Unies de rencontrer Aung San Suu Kyi, le gouvernement a confirmé l'assignation à résidence de cette dernière pour une autre année. Néanmoins, la remise en liberté de la dirigeante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), si elle n'est pas accompagnée de réformes concrètes et d'actions telles que l'arrêt des poursuites contre les personnes ayant porté plainte pour travail forcé et la possibilité pour les syndicats et la LND d'opérer, ne constituerait qu'un moyen d'éviter une action internationale. Le 26 mai 2006, la présidence de l'Union européenne a exprimé sa vive préoccupation à l'égard de la pression croissante exercée sur les groupes ethniques. Lors d'une déclaration ultérieure, l'Autriche, s'ex-primant au nom de l'Union européenne, a condamné la décision du SPDC de prolonger l'assignation à résidence de Aung San Suu Kyi.
Considérant le manque de volonté constant du gouvernement d'aller au-delà des promesses d'adopter des mesures pour éliminer le travail forcé; considérant l'attitude de plusieurs gouvernements et multinationales, malgré l'appel du Directeur général de revoir leurs relations avec le Myanmar, l'oratrice a prié instamment les gouvernements, les institutions et les organisations financières régionales, telles que l'Union européenne, d'aborder la question des investissements étrangers directs d'une manière globale et cohérente. Il existe désormais 19 zones franches d'exportation comptant 8 000 industries privées, et une nouvelle zone est actuellement créée afin d'absorber l'arrivée de nouveaux investissements étrangers. L'oratrice a considéré que les conclusions de la commission devraient réitérer la demande au Directeur général d'appeler les gouvernements, les employeurs et les organisations internationales à réexaminer leur politique, notamment en ce qui concerne l'investissement étranger direct, de manière à éviter de coopérer avec des entreprises appartenant à l'Etat ou aux militaires et pour qu'une surveillance douanière s'exerce dans chaque pays au niveau national, ce qui permettrait aux gouvernements de prendre des mesures à l'égard des entreprises qui continueraient de passer outre les décisions prises par l'OIT. Elle a insisté afin que la Conférence charge le Conseil d'administration de porter cette question devant l'ECOSOC à sa prochaine session. En l'absence d'un engagement cohérent et concret de la part du gouvernement d'éliminer le travail forcé, le moment est venu pour l'OIT de saisir formellement de cette question le Conseil de sécurité et la Cour internationale de Justice pour un avis consultatif urgent. L'oratrice a réitéré que le recours au travail forcé, comme l'a souligné la commission d'enquête, s'assimile, dans la mesure où il est systématique, à un crime contre l'humanité et doit être traité en conséquence.
Un observateur représentant la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) membre de la Fédération des syndicats du Myanmar (FTUB), a rappelé que, depuis de nombreuses années, la FTUB a signalé par l'intermédiaire de la CISL un grand nombre d'affaires de travail forcé, et qu'elle en a dénoncé 96 autres commises par le régime l'année passée (47 dans l'Etat de Shin, 44 dans l'Etat de Rakhin et cinq dans la région sud du pays), affaires assez comparables à celles qui ont été signalées chaque année depuis le décret n° 1/99 du 14 mai 1999. Dans de nombreux cas, le travail forcé consistait en des réquisitions collectives de main-d'÷uvre dans les Etats de Rakhin et Shin alors que le gouvernement avait promis à la communauté internationale qu'il s'efforçait de mettre fin au travail forcé; en réalité, celui-ci sème toujours la terreur parmi la population, en particulier auprès de ceux qui ont fourni des informations sur le travail forcé à l'OIT. Par ailleurs, les travailleurs qui ont un lien avec la FTUB et ses dirigeants sont toujours sévèrement punis comme par exemple U Myo Aung Thant. Celui-ci a été arrêté en juin 1997 et a été condamné à la réclusion à perpétuité; il est en prison depuis dix-sept ans. Lorsqu'il a été arrêté, il a fait l'objet de torture, et n'a bénéficié ni d'un avocat ni des garanties d'une procédure régulière. Il est actuellement dans une cellule d'isolement à la prison de Myikyinar.
Dans une conférence de presse tenue le 28 août 2005, le régime a indiqué que 10 personnes avaient été arrêtées en raison de contacts avec la FTUB. Certaines d'entre elles auraient été condamnées, en novembre 2005, à des peines d'emprisonnement de sept à vingt-sept ans; parmi eux: U Thein Lwin Oo, U Win Myint (a) U Kyaw Aung, U Myint. Lwin, U Hla Myint Than, U Wai Lin, U Yae Myint, U Aung Myint Thein, Daw Yin Kyi, Daw Aye Chan and Daw Aye Thi Khain. U Aye Myint, un avocat qui avait déjà été condamné à mort pour haute trahison sur la base de liens présumés avec l'OIT mais qui a été relâché en janvier 2005, a été arrêté de nouveau en août 2005 et condamné à sept ans de prison. U Zaw Htay, U Thein Zan et U Aung Than Tun ont été arrêtés sur des accusations en rapport avec la mort d'un villageois, en 2004, survenue dans le cadre d'un travail forcé. Ces trois personnes avaient en effet aidé la famille du défunt à porter l'affaire à la connaissance de l'OIT. En avril 2006, le régime a porté d'autres accusations contre la FTUB et son secrétaire général M. Maung Maung. Si bien que, au Myanmar, toute personne qui aurait pris contact avec la FTUB aura été sévèrement punie. Si le gouvernement s'engage éner-giquement à mettre fin au travail forcé, il doit permettre aux individus de donner librement des informations concernant le travail forcé à l'OIT. Il découle aussi bien du bon sens que de l'expérience que l'élimination effective du travail forcé au Myanmar ne pourra se faire sans la coopération des autorités. Toutefois, le régime n'a pas démontré un véritable engagement de sa part. Pour sa part, l'OIT a toujours démontré la volonté de poursuivre la coopération en la matière. Lors d'une séance d'information qui s'est récemment tenue au Conseil de sécurité des Nations Unies, il a été suggéré qu'il serait temps d'agir. Malgré cela, le régime a refusé de coopérer et les options qui seront présentées prochainement à la Commission de proposition doivent être adoptées et soutenues énergiquement. Il serait souhaitable que les travailleurs, les employeurs et les gouvernements poursuivent leurs efforts communs pour faire cesser ces violations flagrantes et persistantes, ce dont la population du Myanmar sera profondément reconnaissante à l'OIT.
Un observateur représentant l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a rappelé que le travail forcé est toujours un traitement cruel, inhumain et dégradant, qui peut être considéré comme un acte de torture en soi. Selon ce qui ressort des rapports précédents, le travail forcé en Birmanie s'accompagne presque toujours d'autres actes de torture et de mauvais traitements. Ce qui caractérise la situation du Myanmar aujourd'hui, ce sont les déplacements forcés, les viols, l'exploitation sexuelle, les privations de nourriture et de soins médicaux ainsi que le travail forcé des enfants. Toute résistance au travail forcé entraîne une aggravation des mauvais traitements, détentions et exécutions extrajudiciaires. L'OMCT est particulièrement préoccupée par les nombreux rapports d'abus de femmes et d'enfants ainsi que par l'exil forcé des hommes laissant les femmes et les enfants se débrouiller seuls dans un environnement très hostile. En Birmanie, le travail forcé augmente. La décision du gouvernement de forcer les fermiers à pratiquer des cultures dont on extrait un substitut de carburant diesel a déjà causé de nouvelles difficultés à la population forcée de travailler sur ces projets. De plus, les activités de construction croissantes mènent à l'augmentation de l'utilisation du travail forcé dans la fabrication de briques, la construction de routes et de ponts, la construction d'installations militaires et dans d'autres projets. Ceci a lieu en concomitance avec l'utilisation usuelle du travail forcé pour les missions de sentinelle, le transport forcé de biens et l'approvisionnement forcé de riz et d'autres aliments.
Le travail forcé n'est pas confiné à la Birmanie. La pauvreté et la violence s'étendent souvent à des sphères plus larges. La vulnérabilité des pauvres croît sérieusement. La hausse du travail forcé, les demandes d'approvisionnement de nourriture et de matériaux de construction sans rétribution ainsi que le manque de nourriture sont à l'origine de mouvements transfrontaliers vers le Bangladesh, qui pourra, le cas échéant, faire face à un nombre significatif de réfugiés affamés dans l'année qui vient. Selon le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, la présente offensive contre les Karen a déjà causé l'arrivée de plus de 2 000 réfugiés en Thaïlande. Ceci pourrait mener à des tensions au Bangladesh et en Thaïlande et à la déstabilisation des régions frontalières. Le travail forcé et les autres nombreuses violations des droits de l'homme en Birmanie figurent depuis trop longtemps sur l'agenda international. L'an dernier, le Conseil de sécurité des Nations Unies a fait un pas dans la bonne direction, mais beaucoup reste à faire. Plusieurs bonnes recommandations sont contenues dans les rapports présentés à la présente commission. Celles-ci sont adressées aux gouvernements, aux syndicats, aux employeurs, au Conseil de sécurité des Nations Unies, aux autorités birmanes, aux ONG et aux organisations internationales. L'orateur a prié instamment cette commission d'adopter des mesures d'action concrètes pour mettre fin au travail forcé en Birmanie.
Le membre gouvernemental de Cuba a pris note de l'annonce faite par le gouvernement du Myanmar concernant le projet de moratoire, ainsi que d'autres mesures concrètes qui devraient rendre possibles la reprise de la collaboration entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT. Il a exprimé l'espoir que l'adoption de ces mesures permettra de renouer cette coopération et d'avancer sur la voie du dialogue et de la compréhension. Il a appelé les parties concernées à faire tout ce qui est en leur pouvoir afin d'éviter que l'on s'éloigne davantage de l'application des normes internationales du travail.
Le représentant gouvernemental a déclaré que sa délégation a pris note de la teneur des discussions, mais que bon nombre des questions soulevées dépassaient largement les attributions de la présente commission, laquelle n'était pas le lieu approprié pour en débattre. Il a fait valoir que le gouvernement du Myanmar a déjà exprimé son point de vue sur ces questions et qu'il le fera encore si le besoin s'en faisait sentir, devant les instances appropriées. Le représentant gouvernemental a exprimé à l'adresse de la commission l'assurance que son gouvernement entend coopérer avec elle dans toute la mesure possible sur les questions relevant de sa compétence. Il s'est référé aux déclarations des membres gouvernementaux de l'Australie, du Japon et d'autres pays, et a indiqué que son gouvernement ne manquera pas d'accorder toute l'attention qu'elle mérite à leur manifestation de bonne volonté.
Les membres employeurs ont déclaré que la présente discussion et les faits relatifs à ce cas constituent une reconnaissance flagrante du manquement du gouvernement à ses obligations et à éradiquer le travail forcé. Depuis un demi-siècle que dure la situation, le gouvernement est toujours incapable d'indiquer à la commission une stratégie durable visant à éliminer le travail forcé. En outre, le gouvernement croit toujours que quelques petites mesures suffiraient à faire évoluer la situation. A l'évidence, le gouvernement n'a démontré aucune volonté ni engagement politiques pour éliminer le travail forcé. Il est donc difficile de comprendre pourquoi le gouvernement a conduit la communauté internationale à examiner des mesures renforcées et exceptionnelles qui ne feront que marginaliser davantage le pays. Le gouvernement n'a pas encore compris que le bien-être de ses citoyens et que l'économie nationale dépendent du reste du monde. Les membres employeurs demandent une fois encore au gouvernement d'éliminer le travail forcé et de se conformer pleinement aux recommandations de l'QIT.
Les membres travailleurs ont fait observer que la volonté de dialogue avec l'OIT proclamée par le gouvernement du Myanmar est difficilement conciliable avec le départ ostensible du représentant gouvernemental de la salle au moment où les membres travailleurs ont commencé à s'exprimer. Sur les faits, ils ont relevé que la commission d'experts a établi que le recours au travail forcé, principalement par l'armée, reste un phénomène généralisé et que les personnes qui dénoncent cette situation sont systématiquement poursuivies. Ils ont relevé en particulier que les quatre recommandations principales de la commission d'enquête devaient toujours être mises en ÷uvre, et ils ont appelé le gouvernement à démontrer sans délai sa volonté de mettre un terme au travail forcé; cesser de poursuivre les personnes qui portent plainte pour travail forcé; libérer celles qui ont été emprisonnées pour cette raison; abroger les mesures d'assignation à résidence frappant Aung San Suu Kyi et convenir avec l'OIT d'une procédure effective de répression du recours au travail forcé, y compris au sein de l'armée. Les membres travailleurs ont déclaré que, si d'ici au 13 juin 2006 le gouvernement du Myanmar n'a pas démontré par des faits tangibles et concrets sa volonté sincère de mettre un terme aux pratiques de travail forcé au Myanmar, ils saisiront la Commission de proposition de la Conférence afin que soient prises au niveau international les mesures prévues concernant la suspension de toutes importations, exportations, tous prêts, crédits et tout projet économique mixte et autres projets internationaux concernant le Myanmar. Enfin, ils ont demandé que les conclusions de la présente commission soient portées à la connaissance d'autres instances internationales suivant la procédure habituelle et que l'OIT porte la question devant l'ECOSOC à la prochaine session de cet organe.
Bref résumé des faits nouveaux survenus depuis juin 2005
Evolution depuis mars 2006
1. Document GB.294/6/1
2. Document GB.294/6/1(Add.)
3. Document GB.294/6/2
4. Document GB.294/6/2(Add.)
5. Document GB.295/7 et conclusions relatives au document GB.295/7
La commission a été saisie de l'observation de la commission d'experts et du rapport du Bureau sur les derniers développements, tels que rapportés par le chargé de liaison a.i. du BIT dont l'action et le dévouement ont été salués de tous côtés. Elle a également entendu la déclaration du représentant du gouvernement, l'Ambassadeur Nyunt Maung Shein. Il a été noté, cependant, qu'il était absent de la salle pendant les commentaires du porte-parole des travailleurs.
En ce qui concerne l'observation de la commission d'experts, la commission a noté sa profonde préoccupation du fait que les recommandations de la commission d'enquête n'ont toujours pas été appliquées, et elle a déploré que le travail forcé continue à être largement pratiqué, en particulier par les forces armées. Ceci a été souligné par les récents rapports qui font état d'un recours massif au travail forcé dans le contexte d'une activité militaire accrue donnant lieu à un déplacement interne significatif dans l'Etat de Kayin (Karen). La situation dans le nord de l'Etat de Rakhine (Arakan) reste particulièrement sérieuse.
La commission a rappelé que, suite aux préoccupations exprimées tant en son sein qu'au Conseil d'administration, la question a été placée, pour la première fois depuis 2000, à l'ordre du jour de la Conférence elle-même. La commission a conclu que l'inclusion de ce point à l'ordre du jour était plus que justifiée. La Conférence aura donc l'occasion d'examiner de façon approfondie les mesures que l'OIT devrait à présent adopter. Dans ses conclusions, la commission traitera donc de la question du respect, par le Myanmar, de ses obligations.
La commission a souligné que huit années se sont à présent écoulées depuis que la commission d'enquête a publié son rapport et ses recommandations. Si, selon quelques interventions, le Myanmar fait quoique lentement quelques progrès dans la bonne direction, le fait est qu'aucune de ces recommandations n'a à ce jour été mise en ÷uvre par le Myanmar. En réalité, au lieu d'un progrès dans l'élimination du travail forcé et de mesures prises à ('encontre des personnes qui en portent la responsabilité, des personnes risquent d'être poursuivies en justice et emprisonnées pour avoir dénoncé le travail forcé; auquel cas, les victimes le sont alors doublement. La politique qui consiste à poursuivre les plaignants en justice est incompatible avec les articles 23 et 25 de la convention n° 29, et le Myanmar ne saurait prétendre s'engager à éliminer le travail forcé ou à coopérer avec l'OIT tout en continuant à appliquer une telle politique.
Dans ce contexte, la commission a noté les commentaires présentés par l'ambassadeur du Myanmar indiquant que son gouvernement était disposé à explorer l'option -1 mais qu'il rejetait l'option - II. Il a indiqué que les autorités du Myanmar étaient prêtes à appliquer un moratoire de six mois sur les poursuites des plaignants. La commission a souligné cependant que, bien qu'en apparence positif, cela venait tardivement et restait de portée limitée. Les paroles doivent être confirmées et complétées de toute urgence par des actions concrètes dans tous les domaines pertinents, en particulier l'acquittement et la libération des personnes qui ont déjà été poursuivies (en particulier Su Su Nwe et U Aye Myint) et la cessation des poursuites en cours. Une telle action est particulièrement importante, étant donné que la Conférence va discuter des mesures supplémentaires à prendre par l'OIT et d'autres organisations, y compris l'ECOSOC, et que ses décisions devront être basées sur des informations crédibles et des engagements confirmés au plus haut niveau, quant aux intentions du gouvernement. Les autorités doivent à présent entamer immédiatement des discussions avec l'OIT afin d'établir aussitôt que possible un mécanisme crédible pour traiter des questions des plaintes sur le travail forcé.
Il sera très important que l'ensemble des délibérations de la Conférence sur cette question soit porté dés que possible à l'attention de l'ECOSOC et des autres organisations concernées. La commission a également demandé au gouvernement du Myanmar de fournir un rapport complet à la Commission d'experts sur l'application de la convention et de la recommandation dans les délais requis pour la session de cette année.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré que, dans leur détermination à éliminer le travail forcé et à faire en sorte que le Myanmar poursuive sa coopération avec l'OIT, les autorités de son pays avaient pris d'importantes mesures en réponse aux conclusions et à l'aide-mémoire de la mission de très haut niveau qui s'est rendue au Myanmar en février. La mission de très haut niveau a été reçue le 22 février 2005 par le Premier ministre du gouvernement de l'Union du Myanmar, au nom du Conseil national pour la paix et le développement. Le Premier ministre, dans sa lettre du 10 mars 2005 à la mission de très haut niveau, a réitéré l'engagement du Myanmar à éliminer les vestiges du travail forcé en étroite coopération avec l'OIT.
S'agissant du cas de Shwe Mahn, il rappelle que M. Mahn a été initialement condamné à la peine capitale pour haute trahison, sanction ultérieurement commuée en une peine de détention à vie, puis ramenée à cinq années d'emprisonnement. Il n'y a guère de pays qui relâcheraient quelqu'un ayant commis un crime si grave. Or les autorités du Myanmar l'ont relâché, comme l'avait demandé le Conseil d'administration, comme gage de leur volonté de consolider la confiance et en témoignage de leur coopération positive avec le BIT. Cette décision, en tant que telle, a représenté une importante concession de la part du gouvernement du Myanmar. Un point focal pour la convention no 29 a été créé au sein des forces armées le 1er mars 2005. Il est dirigé par le colonel Khin Soe, vice-adjudant général, qui est assisté de sept officiers supérieurs de grade 1. Le colonel Khin Soe et deux membres de son équipe ont eu un entretien, le 12 mai, avec le chargé de liaison a.i. du BIT, au ministère du Travail, à la demande du chargé de liaison. Ils pourraient se rencontrer de nouveau si nécessaire.
Bien entendu, le ministre du Travail a déjà informé le Directeur général du BIT des mesures susmentionnées et lui a donné ces assurances par lettre datée du 21 mai 2005. Il a également souligné que le Myanmar était prêt à envisager l'adoption d'une nouvelle approche pour éliminer le travail forcé et à entamer des discussions au moment voulu et à un niveau qui reste à déterminer entre les deux parties. Le gouvernement du Myanmar a pleinement coopéré avec le chargé de liaison a.i. pour le traitement des plaintes liées à des réquisitions de main-d'œuvre. Les cinquante plaintes de 2004 et les huit autres cas notifiés en 2005 par le chargé de liaison a.i. ont tous été traités.
En ce qui concerne les trois cas de plaintes pour imposition de travail forcé mentionnées dans le rapport du chargé de liaison a.i. daté de juin 2005 (document C.App./D.6), l'orateur a fait remarquer que ce document indiquait qu'aucun fait nouveau n'était survenu concernant les cas de Toungup et Hinthada et que, dans le cas d'Aunglan, les intéressés avaient retiré leur plainte sous la contrainte. En fait, dans le cas de Taungup, des mesures ont été prises à l'encontre des responsables et l'affaire est déjà close. Dans le cas de Hinthada, les plaintes contre le chef du Conseil du village pour la paix et le développement ont été rejetées par le tribunal local car il n'y avait aucune preuve de travail forcé. Le chef du Conseil du village pour la paix et le développement, en son nom personnel, a ensuite attaqué les plaignants en justice pour fausses déclarations et diffamation. Les plaignants ont alors été jugés coupables et ont été sanctionnés en conséquence. Ils ont ensuite été relâchés après avoir payé l'amende. Quant au cas d'Aunglan, l'équipe d'observation sur le terrain a indiqué dans un rapport que la route du village de Nga-pyin était reconstruite chaque année par les villageois à titre bénévole et qu'il n'y a eu ni travail forcé ni imposition d'une contribution en espèces. En fait, U Win Lwin, la personne décédée accidentellement lorsqu'un monticule de latérite s'est écroulé sur elle, était le principal bénéficiaire de la route puisqu'il était le seul propriétaire d'un véhicule à moteur dans le village. Ses proches ont été trompés par une tierce personne qui leur a dit qu'ils pourraient obtenir une réparation financière. Ils ont par la suite retiré leur plainte de leur plein gré. Ils n'ont subi aucune pression injustifiée de la part des autorités pour les contraindre à retirer leur plainte. Ces derniers temps, les pouvoirs publics se sont trouvés confrontés à un nombre croissant de fausses plaintes. Ils sont prêts à en discuter avec le BIT en temps opportun et au niveau approprié afin de trouver une solution à ce problème.
Le chargé de liaison a.i. a joui de la même liberté de mouvement que celle accordée aux diplomates et au personnel des Nations Unies dans le cadre des procédures en vigueur. Il a indiqué dans son rapport qu'il a pu voyager librement, conformément à la pratique établie antérieurement, et qu'il a pu se rendre dans diverses parties de l'État Mon et dans la partie méridionale de l'État de Kayin en ayant averti les autorités très peu de temps à l'avance. Les décisions susmentionnées du gouvernement du Myanmar témoignent clairement de sa volonté de poursuivre sa coopération avec le BIT.
L'orateur a protesté contre la participation aux travaux de la commission de M. Maung Maung, que son gouvernement considère comme un fonctionnaire devenu traître, comme un criminel, un fugitif cherchant à échapper à la justice et un terroriste. Le Myanmar a été placé sous pression constante du BIT en ce qui concerne la question du travail forcé, sur la base des informations fausses, distordues et exagérées que Maung Maung lui a fournies. L'orateur a conclu en déclarant que son gouvernement est fermement décidé à éradiquer le travail forcé au Myanmar.
Les membres travailleurs ont fait valoir qu'une fois de plus force est de constater que la situation au Myanmar s'est aggravée. Le travail forcé continue de sévir encore plus brutalement, et le gouvernement fait preuve d'une mauvaise volonté caractérisée, comme en attestent de nombreuses sources, à commencer par deux sources au dessus de tout soupçon: le rapport des experts et les documents 6 et 7 du Bureau, pour ce qui est des développements ultérieurs.
La commission d'experts a examiné une fois de plus les suites données aux trois recommandations de la commission d'enquête datant de 1998, à savoir: 1) une recommandation d'ordre législatif: modifier les lois de base de 1907 et 1908 pour les rendre conformes à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, en supprimant toute possibilité de réquisitionner de la main-d'œuvre; 2) une recommandation d'ordre administratif: que, dans la pratique, aucun travail forcé ne puisse plus être imposé, ni par l'armée, ni par les autres autorités; et 3) une recommandation d'ordre judiciaire: que les sanctions prévues contre l'imposition du travail forcé soient appliquées effectivement.
Le constat de la commission d'experts est implacable: les lois incriminées n'ont toujours pas été abrogées ou amendées, malgré des promesses depuis plus de trente ans. Les ordonnances qui ont été prises laissent naturellement les lois inchangées et s'avèrent naturellement inefficaces, vu la persistance massive du travail forcé. Elles auraient dû être au moins accompagnées de mesures concrètes pour que, dans la pratique, aucun travail ne puisse plus être imposé. Pour cela, la commission d'experts avait préconisé quatre types d'action: 1) que des instructions spécifiques et concrètes soient données aux autorités civiles et militaires. Or, si elles ont bel et bien été émises, rien, dans la réalité, ne précise ou n'identifie les diverses formes de travail interdites. Les autorités visées peuvent parfaitement les ignorer; 2) qu'une publicité soit faite à ces ordonnances. Or elles ont été traduites dans toutes les langues ethniques, mais n'ont été apparemment ni diffusées ni affichées dans les zones ethniques, là où le travail forcé est le plus pratiqué; 3) que les crédits nécessaires soient dégagés pour payer les travailleurs libres qui accompliront les travaux actuellement effectués de manière forcée. Le gouvernement n'en touche pas un mot dans son dernier rapport; et 4) que des mécanismes de contrôle soient établis. La commission d'experts constate que le Comité d'application de la convention no 29, aussi bien que les équipes d'observation récemment installées sur le terrain manquent de crédibilité. Les allégations de travail forcé sont examinées par ceux-là mêmes qui imposent le travail forcé: l'administration et l'armée et sont dès lors systématiquement rejetées. Et celles qui parviennent jusqu'à des tribunaux sont systématiquement déclarées irrecevables. Cela signifie, simultanément, que la troisième recommandation - sanctions adéquates contre les coupables - n'a pas non plus été suivie. Pour la première fois des plaintes ont été portées devant les juridictions, mais aucune des six plaintes déposées en 2004 n'a jusqu'à présent été jugée recevable. Pire même, certaines victimes ont été arrêtées après des contacts avec le chargé de liaison a.i. du BIT ou carrément emprisonnées pour, soi-disant, diffamation.
Ce constat de la commission d'experts se trouve largement corroboré par des informations plus récentes émanant du bureau du chargé de liaison a.i. et de la CISL et par des précisions quant aux lieux et dates des faits et quant aux noms des officiers de l'armée impliqués. Ainsi, le prochain rapport de la CISL abonde d'ores et déjà de multiples faits de travail et de recrutement forcé relatés par les victimes: d'autres documents d'ONG font état d'autres cas d'exactions subies par des civils et des minorités ethniques. Le contexte politique s'est détérioré. Le gouvernement a changé de visage mais pas de politique. Le représentant permanent du gouvernement à Genève n'a pas pu poursuivre ses fonctions, et Mme Aung San Suu Kyi est toujours assignée à résidence stricte chez elle, où elle est pratiquement coupée du monde.
L'absence totale de coopération avec le BIT s'est manifestée à plusieurs reprises: la mission de très haut niveau s'est vu refuser tout entretien sérieux et le chargé de liaison a.i. ne dispose plus de la liberté de mouvement initialement acceptée. Certes, on relève deux ou trois faits positifs: la libération de Shwe Mann - qui reste néanmoins accusé de terrorisme et de haute trahison; le fait que la Cour suprême ait statué que des contacts avec le BIT ne constituent pas un délit; quelques poursuites ont été engagées contre quelques coupables, des civils et non des militaires qui, eux, sont les principaux coupables du travail forcé.
Après avoir passé en revue, une fois de plus, le cas du Myanmar, la conclusion reste limpide, le sentiment est hélas que le travail forcé est "loin d'être une pratique en voie de disparition", que le gouvernement n'est pas du tout disposé à éliminer le travail forcé dans le pays et en outre que, désormais, des poursuites seront engagées à l'encontre de plaignants qui porteraient plainte sur des motifs qui seraient jugés infondés.
Les membres travailleurs ont protesté contre les accusations du gouvernement contre les personnes qui œuvrent pour la liberté syndicale et la liberté de parole, procédé familier de gouvernements tristement célèbres dans l'Histoire.
Les membres travailleurs ont indiqué que, selon les conclusions de la commission de 2004, "le Conseil d'administration, lors de sa prochaine session, devrait se préparer à tirer les conclusions appropriées, y compris à réactiver et réexaminer les mesures et actions entreprises, notamment en ce qui concerne les investissements étrangers directs, prévus par la résolution de la Conférence internationale du Travail de 2000, à moins qu'entre-temps la situation ait manifestement évolué".
Les membres travailleurs constatent que le Conseil d'administration a discuté du cas du Myanmar et de la convention no 29, en novembre 2004 et mars 2005 et que, en l'absence d'évolution significative de la situation, il en a tiré les conclusions appropriées. La situation s'est détériorée tant au niveau politique qu'au niveau de la coopération du gouvernement avec l'OIT.
Les membres travailleurs soulignent que des doutes subsistent, tant au niveau national qu'international, sur les progrès réalisés dans l'adoption d'une nouvelle constitution dans la mesure où la participation de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) est interdite et que sa présidente est assignée à résidence. Ils croient comprendre que cette dernière n'a pu être approchée depuis plusieurs mois et que sa santé fait l'objet d'une inquiétude grandissante.
De nouvelles répressions, arrestations et troubles ont eu lieu dans de nombreuses zones ethniques, telles que l'État de Shan et l'État d'Arakan. Selon les indications fournies par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), le recours au travail forcé dans ces zones est en augmentation. Il ne s'agit pas ici de discuter du degré de coopération entre le gouvernement et l'OIT mais plutôt des actions pouvant être entreprises par l'OIT au nom des victimes du travail forcé. Les membres travailleurs indiquent que l'inefficacité des actions prises depuis plusieurs années a entraîné de nombreuses violations des droits fondamentaux de l'homme.
Les membres travailleurs, citant le document du Directeur général, soulignent qu'un grand nombre de membres du Conseil d'administration estiment qu'il serait justifié de réactiver les mesures devant être prises en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT conformément à la résolution adoptée par la Conférence en 2000. La mission de très haut niveau a dû interrompre sa mission après deux jours seulement, faute d'avoir réussi à obtenir les entretiens qui lui étaient nécessaires au plus haut niveau.
Le Conseil d'administration, lors de sa session de mars 2005, a tenté d'identifier les progrès qui ont eu lieu et a reconnu que certains développements n'étaient pas sans intérêt. Toutefois, le travail forcé continue d'être imposé, et ce en toute impunité. En effet, aucune poursuite judiciaire n'a été engagée à l'encontre des officiers militaires. En outre, la plupart des mesures concrètes prévues dans l'aide-mémoire de la mission de très haut niveau n'ont pas été mises en œuvre. La patience de l'OIT touche à sa fin. Le Conseil d'administration a accepté, lors de sa session de mars 2005, de réactiver les mesures prises en vertu de l'article 33 de la Constitution; le Directeur général a pris, en avril, les mesures nécessaires à cette fin. Les mesures ont été réactivées en douceur dans l'espoir que la présence de l'OIT soit renforcée.
Malgré la libération tardive de M. Shwe Mahn, ce dernier resterait accusé de haute trahison pour avoir fourni à l'OIT des informations concernant le travail forcé et pour avoir collaboré avec la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB). Ceci n'est pas acceptable. Il faut noter, en outre, une évolution négative de la situation ces dernières semaines. En effet, le renforcement de la présence de l'OIT a été entravé du fait de la non-délivrance d'un visa pour un membre supplémentaire de la mission, et des restrictions ont été portées à la liberté de circulation du chargé de liaison a.i. Ce dernier doit désormais communiquer son itinéraire 14 jours à l'avance.
Enfin, plus grave encore, le chargé de liaison a.i. a été informé que "les plaintes non fondées concernant le travail forcé exerçaient une lourde charge sur les ressources gouvernementales et mettaient en cause la dignité de l'État... et qu'il était donc nécessaire de prendre des mesures pour mettre fin à cette pratique". Considérant la gravité de ces propos, le BIT a appelé le chargé de liaison a.i. à cesser tout contact en vue de traiter les nouvelles allégations de travail forcé.
Selon le rapport du chargé de liaison a.i., aucun des cas de travail forcé qu'il a porté à l'attention des autorités depuis mars 2005 n'a été jugé recevable. Les personnes ayant fourni des informations au chargé de liaison font désormais l'objet de poursuites judiciaires en vertu de la nouvelle politique du gouvernement. Les membres travailleurs souhaitent que le gouvernement lui garantisse que de telles poursuites n'auront pas lieu.
Les membres travailleurs estiment qu'il est de mauvais présage que la notion de travail volontaire figure dans la réponse fournie par le gouvernement au Comité de mise en œuvre pour justifier les allégations.
Les membres travailleurs estiment que le gouvernement a délibérément entrepris d'affaiblir la présence de l'OIT et de neutraliser la capacité du chargé de liaison a.i. à recevoir des plaintes ou même de s'entretenir avec la population.
Au vu de ce qui précède, les membres travailleurs formulent quelques propositions. Tout d'abord, les mandants devraient s'assurer que l'État ou les entreprises détenues par les militaires, y compris celles opérant avec des fonds internationaux privés, ne bénéficient pas d'investissements étrangers, d'importations ou d'exportations, de subventions, de prêts ou de crédits qui contribueraient de manière directe ou indirecte à perpétuer ou étendre le travail forcé ou obligatoire. Plusieurs États et organisations ont déjà pris des mesures à cet effet. Les membres travailleurs proposent, en deuxième lieu, que les mandants envoient régulièrement un rapport concernant les mesures prises afin que le Conseil d'administration, à l'occasion de sa session de novembre, puisse examiner la situation et l'OIT adopter un plan d'action.
Les membres travailleurs appellent la Commission de la Conférence à demander au Directeur général d'inviter toutes les organisations internationales mentionnées dans la résolution de 2000 de considérer à nouveau la possibilité de coopérer avec le gouvernement, d'examiner et d'indiquer toutes les formes d'assistances matérielles ou financières qui sont accordées au pays et qui pourraient avoir un impact direct ou indirect sur le recours au travail forcé. Une demande devrait également être adressée aux institutions financières internationales et régionales, aux agences de développement multilatéral et aux agences internationales de prêt.
Les membres travailleurs proposent également que le Directeur général soit invité à renouveler la demande de l'OIT concernant l'inscription d'un point à l'ordre du jour de la session de juillet 2006 de l'ECOSOC concernant les manquements persistants du Myanmar à mettre en œuvre les recommandations contenues dans le rapport de la commission d'enquête de l'OIT.
Les membres travailleurs proposent en outre que la commission adopte le même point de vue que la mission de très haut niveau et que le Conseil d'administration concernant la nécessité de renforcer les pouvoirs du bureau de liaison, et notamment le pouvoir d'enquête. Un point de vue similaire devrait également être retenu concernant la nécessité pour le bureau de liaison de renforcer la politique de dialogue avec les autorités nationales, y compris avec les membres du SPDC et les militaires à tous les niveaux, en tirant avantage de l'engagement des autorités à "coopérer de manière constructive avec l'OIT", comme l'a indiqué le ministre du Travail dans sa lettre en date du 21 mai 2005.
Les membres travailleurs proposent enfin que les activités de surveillance de l'OIT relatives au travail forcé soient développées, notamment dans les zones ethniques. Ils demandent au gouvernement de garantir la totale liberté de circulation du chargé de liaison a.i. et de délivrer dans les plus brefs délais les visas nécessaires à la venue du personnel supplémentaire. En outre, ils demandent au gouvernement d'acquitter les personnes condamnées en raison des contacts qu'elles ont établis avec l'OIT et le FTUB, et de mettre fin à la nouvelle politique visant à poursuivre ceux qui auraient fourni à l'OIT de fausses informations concernant le travail forcé.
La crédibilité de l'OIT étant en question, celle-ci doit continuer à insister auprès du gouvernement pour qu'il se mette en conformité avec la convention no 29 et doit montrer à tous ceux qui sont victimes du travail forcé que la communauté internationale, et notamment l'OIT, appuie leurs aspirations à une vie meilleure.
Les membres employeurs ont déclaré partager les préoccupations exprimées par les membres travailleurs concernant ce cas difficile qui dure depuis de nombreuses années. Ils ont fait observer que le mandat de la commission, qui consiste à examiner les recommandations de la Commission d'enquête et l'application de la convention no 29, est clair. Le gouvernement du Myanmar manque gravement aux obligations internationales auxquelles il s'est soumis volontairement il y a cinquante ans pour éliminer le travail forcé.
Les membres employeurs estiment que le manquement du gouvernement d'appliquer la convention no 29 est tellement évident que cela rend incompréhensible son absence de volonté à changer la situation. L'institution légale du travail forcé existe toujours, de même que la loi sur les villages et la loi sur les villes, qui confèrent de larges pouvoirs aux autorités locales pour réquisitionner de la main-d'œuvre en violation de la convention no 29. Les membres employeurs ont noté que le représentant gouvernemental fait état de difficultés à ce sujet. Or, pour les membres employeurs, la seule difficulté identifiable est l'absence de volonté politique. Outre le fait que la loi sur les villages et la loi sur les villes n'ont toujours pas été abrogées, aucune mesure concrète n'a été prise pour mettre fin de manière immédiate au travail forcé dans la pratique, notamment par les militaires, comme l'ont pourtant demandé la commission d'enquête et la commission d'experts. La commission d'experts, au paragraphe 6 de son observation qui traite le cœur du problème, a identifié quatre domaines dans lesquels le gouvernement doit prendre des mesures: élaboration d'instructions précises et concrètes destinées aux autorités civiles et militaires afin d'éradiquer le travail forcé, mesures visant à assurer que l'interdiction du travail forcé fasse l'objet de publicité, mise en place de moyens financiers pour remplacer le travail forcé et enfin des mesures visant à assurer l'application de l'interdiction du travail forcé. Le gouvernement n'ayant jamais indiqué qu'il ne pouvait pas éradiquer le travail forcé, les membres employeurs estiment qu'il s'agit là d'une absence de volonté manifeste de la part du gouvernement.
Les membres employeurs constatent que, contrairement aux années précédentes où le gouvernement avait l'habitude de prendre quelques mesures avant la tenue de la Conférence, la situation cette année révèle un retour en arrière de la part du nouveau gouvernement. Suite à une discussion ayant eu lieu lors du Conseil d'administration de novembre 2004, la mission de très haut niveau s'est rendue à Yangon, où elle n'a pas pu rencontrer les hautes autorités du Myanmar alors même que le gouvernement avait été informé des raisons de sa visite. De plus, la Commission de la Conférence a été informée que le chargé de liaison a.i. de l'OIT a vu sa liberté de circulation restreinte. Le fait que le Conseil d'administration ait décidé de transmettre la résolution adoptée par la Conférence en 2000 en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT aux États Membres de l'OIT et aux organisations internationales afin que les uns et les autres prennent les mesures appropriées montre que l'OIT ne veut plus être attentiste et perd patience.
Les membres employeurs estiment que l'attitude réticente du gouvernement concernant la libération de prisonniers et sa proposition minimaliste pour "une nouvelle approche de la situation" n'inspire guère confiance. Ils considèrent que l'essentiel n'est pas le processus utilisé mais l'obtention de résultats substantiels en matière d'éradication du travail forcé. Il est temps que des mesures concrètes soient prises, toute autre mesure serait une parodie de justice internationale et des droits des victimes du travail forcé au Myanmar. Les membres employeurs ont conclu en invitant le gouvernement du Myanmar à prendre la bonne décision en éliminant le travail forcé de manière effective.
Le membre gouvernemental du Luxembourg, s'exprimant au nom des États membres de l'Union européenne, ainsi que de la Bulgarie et de la Roumanie en tant que pays en voie d'accession; de la Turquie et de la Croatie en tant que pays candidats; de l'Albanie, de l'ex-République yougoslave de Macédoine, de la Bosnie-Herzégovine, de la Serbie et du Monténégro en tant que pays candidats potentiels visés par l'Accord de stabilisation et d'association; de la Norvège en tant que membre de l'Association européenne de libre échange (AELE) et de l'Espace économique européen; de la Suisse et du Liechtenstein en tant que membres de l'AELE, a fait valoir qu'aucune mesure convaincante n'a été prise par les autorités du Myanmar pour donner suite à l'aide-mémoire de la mission de très haut niveau qui s'est rendue dans le pays en février 2005 ou à la lettre du Directeur général du BIT. Cela va à l'encontre des demandes adressées par le Conseil d'administration à sa session de mars 2005 aux autorités du Myanmar afin que celles-ci prennent d'urgence des mesures spécifiques pour éradiquer le travail forcé, et cela va à l'encontre de la demande de l'Union européenne tendant à ce que des mesures soient prises "largement avant la Conférence internationale du Travail de juin 2005". L'Union européenne partage les profondes préoccupations de la commission d'experts devant le défaut de mise en œuvre, de la part des autorités du Myanmar, des recommandations prises en 1998 par la commission d'enquête tendant à ce que la législation soit rendue conforme à la convention no 29 et à ce que les autorités locales, notamment les autorités militaires, cessent d'imposer du travail forcé et que les coupables d'imposition de travail forcé soient traduits en justice. Même si ces recommandations ont été formulées voici sept ans, elles restent encore valides et aucune mesure significative n'a été prise pour les mettre en œuvre.
L'Union européenne, tout en continuant d'attacher une grande importance au Plan d'action conjoint conçu pour éradiquer le travail forcé, partage les préoccupations de la mission de très haut niveau quant à l'avenir de ce plan, dès lors que les autorités du Myanmar remettent en question leur engagement à ce titre. L'attitude persistante des autorités ainsi que ses atermoiements sont l'expression de son absence de volonté, qui se trouve confirmée par le fait qu'elles n'ont toujours pas mis en place les conditions dans lesquelles les victimes de travail forcé puissent être protégées contre les représailles que pourraient leur valoir leur coopération avec l'OIT. A cet égard, l'Union européenne a appelé les autorités du Myanmar au plus niveau à garantir qu'aucune poursuite ne soit exercée contre des personnes ayant porté plainte pour travail forcé.
L'Union européenne et d'autres délégations ont constaté que, en dépit des assurances réitérées de bonnes intentions de la part des autorités du Myanmar, dans la pratique, le travail forcé se poursuit sur une vaste échelle dans de nombreuses régions du pays, à l'initiative en particulier des militaires et parfois dans des circonstances d'une cruauté et d'une brutalité inouïes, que la commission d'experts n'a pas manqué de relever. S'il est vrai que le changement ne peut pas intervenir d'un jour à l'autre, cela fait quand même neuf ans que l'OIT se penche sur ce problème. Une commission d'enquête a formulé une série de recommandations, des équipes de haut niveau et une équipe de très haut niveau se sont rendues dans le pays et un aide mémoire énonçant des mesures concrètes d'éradication effective du travail forcé a été présenté aux autorités, sans parler du plan d'action conjoint. Un délai de neuf ans aurait dû être plus que suffisant pour que les autorités du Myanmar réforment leurs pratiques, conformément aux recommandations de l'OIT. Or les mesures qui ont été prises sont bien trop dérisoires pour apporter une réponse à la persistance du travail forcé dans le pays.
L'Union européenne, comme d'autres délégations, a accueilli favorablement la libération de U Shwe Mahn. Elle considère néanmoins que ni cette personne ni les deux autres qui avaient été condamnées en même temps n'auraient dû l'être pour avoir eu des contacts avec l'OIT et que les charges retenues contre ces trois personnes devraient être purement et simplement abandonnées. De plus, tout en accueillant favorablement l'annonce que le chargé de liaison a.i. ait pu rencontrer le ministre des Affaires étrangères qui lui a promis une "interaction" avec le point focal militaire, elle estime que des éléments convaincants d'un changement substantiel de la démarche et de la volonté politique, illustré par des actes concrets, font encore défaut. Elle persiste à considérer que l'OIT devrait avoir accès aux autorités au plus haut niveau, et ce de manière régulière.
L'Union européenne est donc parvenue aux conclusions suivantes. Premièrement, elle demande que les mesures prévues au titre de l'article 33 de la Constitution de l'OIT soient revues dans la perspective de leur renforcement, estimant qu'une attitude d'expectative n'est plus de mise dès lors que le travail forcé persiste, se traduisant même dans certains cas par la mort des victimes. Deuxièmement, l'Union européenne exige que les autorités du Myanmar prennent des mesures immédiates et concrètes d'éradication du travail forcé, suivant les indications du rapport de la commission d'enquête de 1998 et suivant l'aide-mémoire de la mission de très haut niveau effectuée en février 2005 et, enfin, elle demande qu'une référence explicite soit introduite dans le projet de Constitution dans le but d'interdire la pratique du travail forcé, conformément aux engagements pris par le Myanmar devant l'OIT. Troisièmement, l'Union européenne appuie fermement le maintien et le renforcement de la présence de l'OIT au Myanmar pour parvenir à ce résultat. La mise en œuvre d'un mécanisme de facilitation, tel que prévu par le plan d'action conjoint, constituerait une avancée dans la bonne direction.
La membre gouvernementale des États-Unis a fait ressortir que, une fois de plus, le rapport présenté devant la Commission sur l'application des conventions et recommandations dresse un portrait mitigé de l'évolution de la situation concernant le respect de la convention no 29 par le gouvernement du Myanmar. Elle indique que, en février, les autorités ont informé le chargé de liaison a.i. du BIT qu'un tribunal local a condamné, dans trois affaires distinctes, quatre fonctionnaires locaux en vertu de l'article 374 du Code pénal. Même s'il n'est pas avéré que ces fonctionnaires purgent effectivement leur peine, il convient de noter que c'est la première fois que des pour-suites sont exercées sur le fondement de cet article du code, et l'une des recommandations de la commission d'enquête était effectivement que les sanctions prévues par cet article du code soient appliquées rigoureusement. Même si trois affaires traitées par un tribunal ne suffisent pas pour constituer une "application rigoureuse" dans un pays où le travail forcé est aussi répandu qu'au Myanmar, le gouvernement des États-Unis ne néglige pas cette évolution. Également, même si U Shwe Mahn n'aurait jamais du être emprisonné, sa libération en avril et la rencontre du chargé de liaison a.i. avec le représentant de l'armée responsable du travail forcé représentent une avancée dans la bonne direction.
Mais cette avancée se trouve atténuée par nombre d'autres éléments qui portent à croire que les déclarations du gouvernement concernant son engagement à éliminer le travail forcé relèvent de la pure rhétorique. La mission de très haut niveau n'a pas été reçue par des instances gouvernementales appropriées à Rangoon et a dû écourter sa visite. Le gouvernement n'a pas accédé à la requête du BIT d'envoyer un nouveau fonctionnaire au Myanmar pour assister le chargé de liaison a.i. Les réactions de la Commission de mise en œuvre de la convention no 29 aux nombreuses plaintes dont le chargé de liaison a.i. l'avait saisie ont été inadéquates et, en avril, le gouvernement a informé le chargé de liaison a.i. que des poursuites seraient engagées à l'encontre des auteurs de plaintes jugées infondées qui bafouent les principes mêmes du plan d'action que le gouvernement s'était engagé à mettre en œuvre. Enfin, il n'a été fait suite à aucune des trois recommandations de la commission d'enquête. Tous les éléments disponibles démontrent que le recours au travail forcé, surtout par l'armée, se poursuit avec la même intensité et s'accompagne parfois d'actes d'une extrême violence.
En conclusion, la membre gouvernementale a déclaré que, vu les circonstances, la proposition faite par le ministre du Travail au Directeur général d'étudier une nouvelle approche pour l'élimination du travail forcé n'apparaît que comme une manœuvre dilatoire de plus. Les autorités avaient largement la possibilité de discuter de cette nouvelle approche lorsque la mission de très haut niveau s'est rendue à Rangoon en février, mais elles n'ont pas voulu le faire. Le gouvernement doit démontrer par des actes que son engagement à mettre en œuvre le plan d'action est véritable et qu'il est prêt à créer les conditions permettant de faciliter cette même mise en œuvre. Il doit agir de manière pleinement conforme aux propositions que la mission de très haut niveau a faites dans son aide-mémoire. Faute d'éléments concrets démontrant la sincérité de l'engagement affirmé par le gouvernement, le temps où le BIT pouvait se satisfaire de discussions sur de nouvelles approches en vue de l'élimination du travail forcé est depuis longtemps révolu. Au nom des travailleurs du Myanmar comme de ceux d'autres pays dans le monde, le gouvernement des États-Unis réitère son ferme appel à ce que les promesses fassent désormais place aux actes.
La membre travailleuse de Singapour a déploré que la question du travail forcé au Myanmar soit toujours à l'ordre du jour, après onze ans de discussion, sans qu'aucun progrès ne puisse être constaté, ce qui démontre le mépris dans lequel le gouvernement tient les organes de contrôle de l'OIT. Les maigres explications avancées à chaque fois pour tenter de détourner l'attention des réalités n'inspirent qu'une consternation croissante. La Commission de la Conférence ne doit plus rester dans l'expectative, alors que la population du Myanmar se trouve réduite en servitude et s'expose à des violences lorsqu'elle s'y refuse ou qu'elle s'oppose à ce que les enfants soient recrutés de force par l'armée. La Commission de la Conférence ne doit pas oublier que chacune des nombreuses plaintes pour travail forcé reçues par le chargé de liaison a.i. et chacun des milliers de cas documentés par la CISL, la FSM et d'autres organisations de défense des droits de l'homme correspond à des vies humaines qui ont été soumises aux traitements les plus cruels, notamment au déni de leur liberté de travailler ou de ne pas le faire.
L'intervenante a fait valoir que, selon le chargé de liaison a.i., les traitements les plus durs sont réservés aux minorités ethniques vivant principalement dans les zones les plus reculées, où la présence militaire est particulièrement forte. Le forum pour les droits de l'homme et le développement en Asie dénonce la persistance du travail forcé, des extorsions et des exactions contre les populations musulmanes Rohyngia, de l'État du Nord Rakhine. Ces malheureux sont contraints de servir de sentinelles et de construire des clôtures défensives en bambou autour des villages du Maungdaw sous prétexte de protéger les villageois, mais ils sont tenus de fournir des matériaux de construction et aussi d'assurer la garde aux entrées. Deux cent cinquante villageois musulmans Rohyngia ont été contraints de construire un village modèle pour des personnes qui avaient été déplacées d'autres régions du Myanmar. Selon les termes mêmes de l'un de ces malheureux, "les populations vivent comme des esclaves à l'intérieur de leur propre pays. Les gens n'ont aucun droit. On peut leur confisquer leur terre à tout moment. Ils peuvent être réquisitionnés comme main-d'œuvre n'importe quand." Il faudrait que le gouvernement du Myanmar fasse quelque chose pour mettre un terme à cette situation.
L'intervenante a évoqué les mesures d'intimidation et de harcèlement dont ceux qui portent plainte pour travail forcé, y compris par les voies légales, font immanquablement l'objet. La faculté d'user des voies de recours légales sans crainte de représailles est absolument essentielle pour la viabilité du système. Il se trouve que trois plaintes pour travail forcé ont été déclarées irrecevables faute de preuves. Qui plus est, deux des trois plaignants ont été poursuivis pour diffamation et condamnés à six mois de prison. Le chargé de liaison a.i. a signalé dans un entretien avec le Directeur général du département du Travail le 26 avril 2005 que des menaces de poursuite pèsent désormais contre tous ceux dont les plaintes sont jugées infondées. De plus, le 9 mars 2004, trois personnes avaient été condamnées pour haute trahison au motif notamment d'avoir eu des contacts avec le chargé de liaison a.i. de l'OIT. Même si, finalement, la Cour suprême a déclaré que ces contacts étaient légaux, il n'en reste pas moins que l'OIT apparaît implicitement comme une sorte d'organisme illégal ou clandestin, qui justifierait une procédure spéciale. Cette conception altère fondamentalement la mission du bureau de liaison. Par ailleurs, malgré les innombrables plaintes de travail forcé, une seule condamnation sur le fondement de l'article 374 du Code pénal a été prononcée. Et les nombreuses plaintes portées à l'attention du Comité d'application de la convention no 29 sont systématiquement rejetées. Enfin, le chargé de liaison a.i. a indiqué dans son rapport que deux personnes ont été arrêtées en rentrant dans leur village après s'être rendues à Yangon pour porter plainte. Ce fait, parmi tant d'autres, illustre à la fois le mépris systématique des plaintes pour travail forcé et soulève de sérieuses interrogations sur la crédibilité du système. La membre travailleuse, pour conclure, a appelé instamment le gouvernement à mettre un terme aux persécutions des minorités à travers le recours au travail forcé, l'enrôlement de force d'enfants dans les forces armées et le harcèlement des personnes qui portent plainte. Elle a préconisé un renforcement de la présence de l'OIT au Myanmar et a appuyé la proposition du chargé de liaison a.i. tendant à ce qu'un deuxième fonctionnaire du BIT lui soit adjoint à Yangon.
Le membre gouvernemental de l'Australie a exprimé son soutien au rôle joué par la mission de très haut niveau et par le chargé de liaison a.i. de l'OIT à Yangon pour assister les autorités birmanes à appliquer la convention no 29. Il soutient également la volonté d'agrandir le bureau de liaison afin de développer la coopération technique, et incite à cette fin le gouvernement à délivrer les accréditations nécessaires au membre supplémentaire de l'OIT pour qu'il puisse rejoindre le bureau. Considérant que, selon l'engagement pris par le gouvernement, l'éradication du travail forcé dans le pays doit être prioritaire, l'intervenant regrette profondément que la mission de très haut niveau n'ait pas pu accomplir son mandat et demande à nouveau au gouvernement de coopérer pleinement avec l'OIT, montrant ainsi sa volonté d'éradiquer le travail forcé. Il est important que des mesures urgentes soient prises concernant les quatre points soulevés par la mission de très haut niveau dans son aide-mémoire du 23 février 2005. La décision de libérer U Shwe Mann est louable; toutefois il est décevant que celui-ci fasse toujours l'objet de poursuites judiciaires. Prenant note de la volonté du gouvernement de déterminer une nouvelle approche pour éradiquer le travail forcé, l'intervenant recommande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires avec l'OIT pour que cet engagement soit suivi de mesures concrètes. Malgré l'engagement du gouvernement, la Commission de la Conférence attend toujours des résultats concrets; le Conseil d'administration devrait donc, lors de sa session de novembre 2005, examiner avec attention la nouvelle approche mise en œuvre par le gouvernement.
Un point focal sur le travail forcé chez les militaires a été mis en place pour traiter du sérieux problème de la réquisition forcée de la main-d'œuvre par le Tatmadaw; l'intervenant prie instamment le gouvernement de s'assurer que ce point focal coopère pleinement et de manière effective avec l'OIT. A cet égard, un premier pas important consisterait à définir avec précision un protocole de coopération avec le chargé de liaison a.i., ce qui suppose des contacts réguliers et une volonté de coopérer. Il demande également au gouvernement de prendre des mesures concrètes pour permettre aux citoyens birmans de coopérer avec l'OIT sans qu'ils fassent l'objet de poursuites judiciaires. Le fait de pouvoir librement contacter le chargé de liaison ou toute autre personne désignée à cette fin est essentiel dans le cadre de la coopération entre l'OIT et le Myanmar, et constitue un point essentiel pour la future mise en œuvre du plan d'action.
L'intervenant conclut en soulignant que son pays est gravement préoccupé par la situation au Myanmar. Le gouvernement n'a fourni aucune information concernant les inquiétantes questions posées au sein de l'OIT ainsi que dans d'autres forums internationaux concernant le travail forcé, et ne respecte pas ses obligations internationales en la matière. Il ajoute que son pays demeure particulièrement préoccupé par l'absence de progrès dans la mise en œuvre d'une réforme politique, l'absence de réconciliation nationale au Myanmar, ainsi que par l'emprisonnement de prisonniers politiques incluant Aung San Suu Kyi.
La membre travailleuse de l'Italie a souligné que le gouvernement militaire n'a pas fourni d'informations sur les problèmes fondamentaux suivants: la prise de décisions au niveau central, les importantes limitations aux activités commerciales privées, les dépenses militaires disproportionnées (49,9 pour cent du budget national) qui font de cette armée la plus grande de l'Asie du Sud-Est. Sur 145 pays, la corruption relègue le Myanmar au 142e rang. C'est aujourd'hui le premier producteur d'amphétamines et le second producteur d'opium du monde. Le blanchiment d'argent et l'exportation clandestine de stupéfiants se font sous couvert de l'industrie du textile et de l'habillement, procédé qui serait impossible sans la participation de la junte, en vertu d'une loi de 1989. La firme Union of Myanmar Economic Holdings et son unité Myanmar Economic Corporation détiennent le monopole de la production. Les investissements étrangers directs (IED) de l'Union européenne représentent 30,37 pour cent du total des IED, ils concernent notamment le secteur du pétrole et du gaz, d'où le régime militaire tire ses principales ressources financières. La part des importations de textiles de l'Union européenne en provenance du Myanmar représente 66 pour cent. Cinq pays membres de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) avaient investi, en mars 2004, 3,9 milliards de dollars américains représentant 51,08 pour cent de l'IED total.
L'intervenante a indiqué que les quinze années d'engagement et les menaces de sanctions politiques n'ont pas permis d'aboutir à la mise en œuvre d'une seule réforme démocratique ayant pour objectif d'éradiquer le travail forcé. Le fait que les discussions relatives aux violations de la convention no 29 ont toujours lieu prouve que le gouvernement ne fait aucun compromis. Seule une action internationale coordonnée peut contribuer à de réels changements. Il est temps pour les mandants de l'OIT, les institutions financières internationales, y compris la Banque asiatique de développement, la sous-région du Mékong et le Programme de commerce et d'investissement, de prendre des mesures effectives. Les organisations internationales et les organisations non gouvernementales qui ont eu des liens avec la junte devraient également envisager de coopérer à nouveau. Les gouvernements, les employeurs et les travailleurs devraient reconsidérer leurs relations avec le Myanmar et prendre les mesures appropriées, y compris envisager le recours à la Cour internationale de Justice afin de s'assurer que cesse le travail forcé. L'intervenante leur demande de s'assurer qu'aucun investissement étranger, direct ou indirect, aucune importation ou exportation, subvention, prêt ou crédit, destiné au Myanmar ne favorise la perpétuation du travail forcé. L'intervenante demande également au gouvernement et à l'Union européenne de mettre en œuvre l'article XX du GATT qui concerne les mesures relatives à la protection de la santé et la production émanant du travail effectué par des détenus. Les membres travailleurs demandent en outre au gouvernement et aux entreprises de contribuer aux changements nécessaires pour l'adoption de mesures démocratiques et la mise en place d'une économie stable.
Un membre gouvernemental du Canada a exprimé les profondes préoccupations de son pays devant l'absence d'amélioration de la situation en Birmanie. Le Canada est reconnaissant à la mission de très haut niveau, au chargé de liaison a.i. de l'OIT ainsi qu'au BIT des efforts déployés auprès des autorités de la Birmanie, et il regrette que l'absence de coopération de la part des autorités n'ait pas permis que cette mission aboutisse. Le Canada s'est réjoui de la libération de U Schwe Mahn et a pris note du fait qu'en date du 21 mai 2005, le ministère du Travail a fait savoir au Directeur général du BIT que la Birmanie est prête à étudier une nouvelle approche de l'élimination du travail forcé. Cependant, l'absence de toute amélioration sensible et, en particulier, le fait que les autorités n'ont fait droit à aucune des recommandations formulées à l'issue de la commission d'enquête ou dans l'aide-mémoire de la mission de très haut niveau inspirent de profondes préoccupations. Le Canada constate avec un malaise croissant la tournure toujours plus négative que prennent les événements en Birmanie. Il a fait savoir à plusieurs reprises que Aung San Suu Kyi et d'autres dirigeants du mouvement démocratique devraient être libérés immédiatement et sans condition, et il a relevé que le processus actuel de convention nationale est dénué de toute crédibilité. Le Canada reste préoccupé par les violations des droits de l'homme perpétrées dans l'ensemble du pays, notamment par les situations de conflit, qui s'ajoutent au travail forcé, aux exécutions extrajudiciaires et aux actes de torture et de viol ainsi qu'aux déplacements internes de populations et aux destructions de villages et d'existences entières.
Le Canada appelle les autorités de la Birmanie: 1) à prendre immédiatement des mesures effectives d'élimination du travail forcé, comme exposé dans le rapport de la commission d'enquête de 1998 et dans l'aide-mémoire de la mission de très haut niveau de février 2005; 2) à accepter l'accroissement des effectifs du BIT au bureau de liaison; 3) à rétablir la liberté de mouvement nécessaire au chargé de liaison pour l'accomplissement de ses fonctions; 4) à permettre l'établissement d'un mécanisme facilitateur et à assurer qu'aucune poursuite ne puisse être exercée contre des personnes ayant porté plainte pour travail forcé; 5) à entretenir un dialogue avec l'OIT au plus haut niveau pour élaborer une nouvelle approche d'élimination du travail forcé. En dernier lieu, l'intervenant a fait savoir qu'en l'absence de résultats concrets quant à l'éradication du travail forcé, le Canada est favorable au renforcement de la mise en œuvre des mesures énumérées dans la résolution prise par la CIT en 2000.
Le membre travailleur des Pays-Bas a appelé l'attention de la commission sur le rôle des Principes directeurs pour les entreprises multinationales, publiés par l'OCDE, dans le contexte de la mise en œuvre de la résolution de la Conférence de 2000 et des rapports qui ont suivi. La décision de la commission d'investissement de l'OCDE, en 2004, de limiter la portée d'application des Principes directeurs aux investissements étrangers directs (IED) et aux échanges liés aux IDE a considérablement restreint la possibilité d'utiliser ces mêmes Principes directeurs dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution de 2000. Il en est ainsi de même dans un pays comme les Pays-Bas, où le gouvernement a auparavant suggéré que les syndicats abordent toutes les relations économiques des entreprises conformément aux Principes directeurs de l'OCDE. Comme le BIT a intensifié ses efforts pour assurer la mise en œuvre de la résolution de 2000, il est important de revoir le rôle de ces Principes directeurs. L'orateur rappelle que les points de contacts nationaux, mis sur pied par les États membres de l'OCDE, ont la responsabilité d'accroître la notoriété des Principes directeurs de l'OCDE, ce qui, pour ce qui concerne la question de la Birmanie, peut signifier une plus grande publicité accordée aux relations économiques révisées d'un gouvernement donné avec la Birmanie. Les points de contact peuvent également mettre en lumière que, en vertu des Principes directeurs, les entreprises doivent contribuer à l'élimination du travail forcé et respecter les politiques établies par les gouvernements: par exemple, dans le cas des Pays-Bas, une politique visant à décourager les relations économiques. Pour une telle campagne d'accroissement de la notoriété, les points de contact nationaux doivent rechercher le support d'organisations d'employeurs alors que les syndicats doivent jouer leur rôle tant au niveau de l'entreprise qu'aux niveaux national et international, ce qui inclut les comités d'entreprise européens. La Commission syndicale consultative auprès de l'OCDE a tenu deux ateliers en 2005 en vue d'attirer l'attention des comités d'entreprise européens sur les Principes directeurs de l'OCDE. Pour les cas d'IDE et d'échanges liés aux IDE dans le cadre desquels les entreprises refusent de se conformer à la résolution de 2000 et aux Principes directeurs de l'OCDE, les syndicats doivent continuer à porter plainte aux différents points de contact nationaux. Dans le passé, plusieurs plaintes similaires ont mené à des changements dans le comportement de certaines compagnies. Lorsque des plaintes se trouvent exclues de la portée des Principes directeurs de l'OCDE, le gouvernement doit mettre en place des recours alternatifs pouvant lui permettre d'y remédier. Aux Pays-Bas, des efforts ont été entrepris pour remédier au fait que les entreprises néerlandaises continuaient à importer du bois d'œuvre en provenance de la Birmanie. Suite à des recours du Centre birman des Pays-Bas, certaines firmes ont accepté de mettre fin à leurs importations de bois d'œuvre, tandis que quatre entreprises ont refusé, c'est-à-dire Worldwood, Bruijnzeel, Boogaerdt et Van der Stadt.
Le membre gouvernemental de l'Indonésie, prenant la parole au nom des membres gouvernementaux des pays membres de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN), a exprimé l'appréciation de son gouvernement à l'OIT pour l'aide et la coopération constantes qu'elle apporte au gouvernement du Myanmar pour éliminer la pratique du travail forcé dans ce pays. L'ASEAN reconnaît l'importance de la présence de l'OIT au Myanmar et le rôle joué par le chargé de liaison a.i. afin d'assister les autorités du Myanmar pour l'application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. L'engagement du gouvernement du Myanmar à respecter la convention et à éliminer la pratique du travail forcé dans le pays est bien accueilli. Les développements positifs auxquels font référence la lettre du ministre du Travail du Myanmar, en date du 21 mai 2005, sont notés avec intérêt, en particulier la volonté du gouvernement d'envisager une nouvelle approche du problème, la liberté de mouvement étendue du chargé de liaison a.i., la libération de Shwe Mann en réponse à l'aide-mémoire présenté par la mission de très haut niveau et aux conclusions adoptées par le Conseil d'administration en mars 2005, de même que la rencontre récente du chargé de liaison a.i. avec le ministre du Travail et le responsable de l'armée, en conformité avec les demandes du BIT. Il est important de poursuivre le processus de dialogue et de coopération, plutôt que d'adopter des mesures alternatives. A cet égard, le gouvernement du Myanmar a exprimé son désir de continuer de coopérer avec l'OIT. L'ASEAN demande donc au gouvernement du Myanmar et à l'OIT de poursuivre leur dialogue et espère que la Commission de la Conférence continuera à jouer un rôle constructif à cet effet.
La membre gouvernementale de la Nouvelle-Zélande rappelle que son pays a appelé à plusieurs reprises le gouvernement du Myanmar à prendre des mesures immédiates pour mettre fin à la pratique déplorable du travail forcé, permettre aux victimes de travail forcé de faire valoir leurs droits et mettre en place des mesures claires et tangibles pour punir les responsables. Elle note avec préoccupation et frustration que, malgré ces appels, une fois de plus, peu d'améliorations tangibles peuvent être constatées. Elle regrette profondément que le Myanmar continue à mettre à l'épreuve la patience de la communauté internationale, que les minces concessions faites soient insuffisantes et, plus significativement, que les violations flagrantes des droits de l'homme au Myanmar se poursuivent sans que le gouvernement ne s'en soucie réellement.
S'agissant de la coopération avec le BIT, en particulier à travers la présence d'un résident à Yangon - qui était un élément essentiel de la réponse du gouvernement du Myanmar devant la gravité de la situation -, l'intervenante demeure préoccupée par le fait que le chargé de liaison a.i. n'ait pas recouvré toute la liberté de déplacement qui lui avait été reconnue initialement et que le gouvernement n'ait pas jugé possible de lever les obstacles administratifs s'opposant au renforcement du bureau de liaison. Des explications plausibles dans un proche avenir en même temps que des mesures correctives seraient souhaitables. La communauté internationale demande des preuves concrètes de l'engagement du gouvernement du Myanmar à mettre fin au travail forcé. Elle prend note de la rencontre du chargé de liaison a.i. avec le responsable de l'armée et espère que d'autres rencontres similaires pourront être tenues dans l'avenir afin que des progrès identifiables puissent être réalisés. Elle note également avec intérêt la libération de Shwe Mahn et veut croire que ce dernier ne sera plus victime de harcèlement pour mener pacifiquement ses activités politiques légitimes.
L'intervenante s'est déclarée préoccupée d'apprendre que les personnes qui s'adressent au chargé de liaison a.i. pour se plaindre de travail forcé soient victimes d'intimidation. La Nouvelle-Zélande est favorable au plan d'action, dont la concrétisation dépend nécessairement de la création d'un environnement politique dans lequel les individus peuvent porter plainte sans craindre des représailles. Le fait que de telles conditions n'existent pas encore et que le bureau de l'OIT au Myanmar soit en conséquence, et tel qu'il ressort du rapport du Directeur général, placé dans une situation extrêmement difficile doit être une source de graves préoccupations pour la Commission de la Conférence. La Nouvelle-Zélande attend avec intérêt de connaître les détails de la "nouvelle approche" mentionnée par le gouvernement dans sa lettre au Directeur général en date du 21 mai 2005 et appelle instamment le gouvernement à ce que cette approche soit fondée sur une politique de tolérance zéro concernant l'utilisation du travail forcé et mette fin immédiatement à la culture d'impunité qui sévit actuellement.
En conclusion, l'intervenante note que, en dépit du fait que l'OIT, à travers les séances spéciales de la Commission de la Conférence et les discussions au Conseil d'administration, ait exprimé encore et encore ses graves préoccupations quant à la situation qui prévaut au Myanmar, le gouvernement du Myanmar ne semble pas comprendre entièrement la gravité de ces préoccupations ou ne partager l'avis des mandants de l'OIT. Il serait plus que temps de voir des mesures tangibles et concrètes se préciser enfin.
Le membre travailleur du Japon a fait valoir que, malgré les promesses du gouvernement, le travail forcé reste une pratique largement répandue au Myanmar, comme le montrent les rapports de la commission d'experts. Le soutien politique et financier accordé par certains pays au gouvernement du Myanmar à travers des projets financés par la Banque asiatique de développement (BASD) est l'une des raisons de la survie du régime militaire et du travail forcé dans ce pays, où l'investissement étranger s'est paradoxalement accru depuis la résolution prise par la CIT en 2000, un tiers de cette aide étant concentré dans le secteur du pétrole et du gaz. La BASD a soutenu le régime militaire à travers son programme de coopération économique dans la sous-région du Mékong (Programme GSM) lancé en 1992. En novembre 2001, la 10e Conférence ministérielle de la sous-région du Mékong a adopté un cadre stratégique d'intégration économique de la région, sélectionnant dans ce cadre des programmes pilotes comme, par exemple, la création de corridors de transport et de corridors économiques, l'interconnexion des réseaux de télécommunications et d'énergie, et les échanges commerciaux et les investissements transfrontières. Ces programmes ont largement contribué à inciter des pays et des entreprises multinationales appartenant à l'ANASE à investir dans le secteur énergétique du Myanmar. La BASD a débloqué 887 millions de dollars pour des projets, notamment pour la création du port de mer en eaux profondes de Mawlamyine et du tronçon routier du même nom. Il est infiniment regrettable que le régime militaire bénéficie d'un tel soutien financier et politique, qui lui permet de survivre et de perpétuer ainsi le travail forcé. Non seulement tous les États Membres de l'OIT mais aussi tous les États membres de la BASD ont une responsabilité à assumer dans l'éradication du travail forcé au Myanmar. Pour conclure, l'intervenant a appelé instamment les gouvernements et les employeurs à ne plus accorder le moindre avantage au régime militaire de ce pays.
Le membre gouvernemental de l'Inde a noté que, depuis la session de mars 2005 du Conseil d'administration, le chargé de liaison a.i. a pu se rendre dans certaines parties de l'État de Mon et dans le sud de l'État de Kayin et rencontrer le ministre du Travail. Il a également noté que le gouvernement du Myanmar a réaffirmé sa volonté de coopérer avec l'OIT et qu'une nouvelle approche a été fixée pour éliminer le travail forcé, comme l'indique la lettre du ministre du Travail du 21 mai 2005, adressée au Directeur général du BIT. L'intervenant a indiqué que son pays estime que ces nouveaux développements sont positifs et que le gouvernement du Myanmar doit être encouragé dans ses efforts pour éliminer le travail forcé. Il espère que la discussion ayant lieu à la Commission de la Conférence permettra d'aider le gouvernement du Myanmar à prendre les bonnes décisions pour accroître la coopération avec l'OIT.
Le membre travailleur de la République de Corée, s'exprimant au nom de la Confédération coréenne des syndicats, a soulevé la question du projet de gaz naturel de Shwe, dans l'État d'Arakan, projet dans lequel sont impliquées la compagnie Daewoo International et la Corporation coréenne de gaz. De vives préoccupations ont été exprimées concernant ce projet et ses potentiels effets graves sur les populations locales des États d'Arakan et de Chin, notamment à cause du déploiement accru de l'armée sur le terrain sous prétexte de surveiller le pipeline. On a parlé de déplacements de populations, de travail forcé, d'exécutions sommaires, de torture et d'autres violations des droits de l'homme en lien avec les compagnies Unlocal et Total. Selon Nyi Nyi Win, qui a participé à un atelier de travail tenu à Séoul et dont le thème était: "Quels sont les problèmes liés au projet de gaz naturel de Shwe", ces allégations semblent tout à fait fondées. Alors que des pêcheurs locaux qui étaient entrés dans ce périmètre se sont fait confisquer leurs bateaux et ont été torturés, des populations locales ont été réquisitionnées pour les travaux de déboisement nécessaires à l'installation du "bureau de projet" de Daewoo International. L'intervenant demande au gouvernement de s'assurer que des mesures soient prises pour que les cas de Total et d'Unlocal ne se répètent plus. Il demande aussi le report du début de l'extraction de gaz naturel dans le périmètre de Shwe jusqu'à ce que les habitants du Myanmar occidental puissent, sans craindre d'être persécutés ou forcés à travailler, participer directement aux décisions concernant l'utilisation de leurs ressources et le développement d'infrastructures. L'intervenant appelle également le gouvernement à fournir davantage d'informations détaillées concernant le projet de gaz naturel de Shwe et à surveiller son évolution de plus près. Finalement, l'intervenant prie instamment le gouvernement de la République de Corée de suspendre le projet, de fournir des informations à la commission, et de prendre toutes les mesures nécessaires prévues par la résolution de 2000, notamment en ce qui concerne le projet de gaz naturel de Shwe, et qui appelle tous les mandants de l'OIT, les Nations Unies et d'autres organisations multilatérales à revoir leurs relations avec le Myanmar et cesser, à ce titre, toute relation susceptible de contribuer à ce que la junte militaire continue d'avoir recours au travail forcé.
Le membre gouvernemental du Bélarus a déclaré que son pays suit avec attention l'évolution de la situation au Myanmar, telle qu'elle ressort des documents présentés par le BIT et des informations présentées par le représentant gouvernemental du Myanmar. Le Bélarus prend acte des progrès qui ont été enregistrés dans le court délai qui a fait suite à la session du Conseil d'administration de mars 2005. Il constate qu'une dynamique positive s'en dégage, qui annonce un dialogue constructif avec les autorités. Plusieurs faits en attestent: l'extension du dialogue entre le représentant du BIT et les autorités; la confirmation de la liberté de déplacement de celui-ci dans le pays; la libération de Shwe Maun; la suite donnée à 56 plaintes pour travail forcé sur un total de 58; la continuation des progrès dans diverses directions prévues par le plan d'action. Le gouvernement du Myanmar démontre par les faits son engagement à s'attaquer sincèrement au problème du travail forcé dans le pays, phénomène qui, d'après le document intitulé "Alliance contre le travail forcé dans le monde", frappe aujourd'hui plus de 12 millions d'individus dans toutes les parties de la planète. La délégation du Bélarus fait observer que les progrès dans ce domaine ne sont possibles qu'à travers un dialogue constructif et à travers la coopération avec l'OIT. L'éradication du travail forcé exige du temps, et l'Histoire enseigne que, lorsque l'on veut résoudre par la force des problèmes complexes, surtout des problèmes sociaux, ce sont les populations innocentes qui sont les premières à en souffrir, et il arrive même que l'objectif ne soit pas atteint au final.
Le membre travailleur du Pakistan rappelle que la question du travail forcé au Myanmar fait l'objet de discussions à l'OIT depuis 1964 et qu'il est aujourd'hui urgent de réaliser des progrès en vue de l'élimination de cette pratique dans ce pays. Comme souligné en 2005 dans le rapport global en vertu du suivi de la Déclaration de l'OIT, le travail forcé constitue une violation fondamentale des droits de l'homme et de la dignité humaine. En dépit des recommandations de la commission d'enquête, le gouvernement du Myanmar n'a toujours pas modifié les dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages qui autorisent le travail forcé. L'argument du gouvernement selon lequel l'absence de corps législatif a empêché que les modifications demandées soient apportées est fallacieux, des modifications législatives ayant été apportées dans d'autres secteurs. L'intervenant rappelle également qu'il a été instamment demandé au gouvernement de mettre en vigueur toutes les autres recommandations de la commission d'enquête et de la mission de très haut niveau.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a déclaré qu'à l'instar des autres participants à cette discussion, la Fédération de Russie est profondément attachée à l'objectif de l'éradication du travail forcé au Myanmar. L'action énergique engagée à cette fin par le Bureau mérite d'être saluée. En fait, il y a eu récemment quelques faits nouveaux positifs, tels que la libération de la troisième personne initialement accusée de haute trahison. De nombreux membres de la commission n'ont pas considéré ces développements comme suffisants. La façon la plus efficace de progresser dans le cas présent consiste à poursuivre le dialogue avec les autorités du Myanmar, afin de préserver et développer davantage les mécanismes de coopération existant entre le BIT et le gouvernement de ce pays.
Une observatrice, représentant l'Organisation mondiale contre la torture, a déclaré que son organisation était extrêmement préoccupée par le recours permanent au travail forcé de centaines de milliers de personnes au Myanmar, souvent associé à la torture et à d'autres types de mauvais traitements physiques et psychologiques. La commission d'experts a fait part de ses inquiétudes quant à l'utilisation du travail forcé au Myanmar et à l'existence, depuis 1964, d'une législation en contradiction avec la convention no 29. Or aucune mesure concrète n'a été prise par le gouvernement pour interdire le travail forcé. Comme l'a relevé le Directeur général du BIT dans son rapport global de 2005, il n'y a toujours aucune volonté politique, au Myanmar, en faveur de l'adoption de mesures énergiques contre les autorités militaires et locales qui tirent économiquement profit du travail forcé.
L'oratrice a souligné le fait que le travail forcé est toujours cruel, inhumain et dégradant, et qu'en tant que tel il pourrait être considéré comme un acte de torture. Au Myanmar, il s'accompagne souvent d'autres formes de torture, au nombre desquelles, entre autres, les déplacements forcés, les viols, la privation de nourriture et de soins de santé ou autres mauvais traitements mortels. En cas de résistance au travail forcé, d'autres mauvais traitements, emprisonnements et exécutions extrajudiciaires s'ensuivent. Qui plus est, le travail forcé implique souvent l'exploitation sexuelle, le travail des enfants, le déminage manuel, l'extorsion et l'éviction forcée de civils, ainsi que des conditions de travail extrêmement dures. De récents rapports en provenance du terrain font état de cas où des responsables gouvernementaux ont contraint des civils à risquer leur vie pour accomplir un service de sentinelle, et où un commandant a battu un civil à mort parce qu'il avait refusé de mettre son véhicule à sa disposition pour un travail forcé dans la province de Shan. Forum-Asia a apporté les preuves d'un recours accru au travail forcé dans l'État septentrional d'Arakan, dans les travaux de construction, la cueillette, le portage et d'autres tâches pour les militaires. L'incorporation forcée des enfants dans l'armée, sous la menace d'un emprisonnement, est également une pratique courante dans l'ensemble du pays. Au Myanmar, la torture ne se limite absolument pas aux cas où elle est directement associée au travail forcé, elle est souvent pratiquée à l'encontre de militants pour la démocratie, de moines ou de femmes sous forme d'abus sexuels.
L'oratrice a conclu en demandant instamment que toutes les mesures nécessaires soient adoptées pour assurer le respect, par le Myanmar, de l'interdiction absolue du travail forcé et des autres violations des droits de l'homme qui lui sont associées, et que la Conférence internationale du Travail engage une action concrète et énergique pour garantir l'application pleine et entière de la convention no 29 et des dispositions de la résolution de juin 2000.
Le membre gouvernemental du Japon a déclaré qu'il ressortait clairement de la discussion que de nombreux Membres étaient loin d'être satisfaits par la situation du travail forcé au Myanmar. La question que doit par conséquent se poser cette commission est de savoir s'il convient de poursuivre les mesures punitives ou bien insister davantage auprès du gouvernement du Myanmar sur la nécessité de s'engager dans la voie du dialogue et de la coopération avec l'OIT. Après avoir mûrement réfléchi, sa délégation a décidé que la meilleure solution était d'encourager les autorités du Myanmar à entamer un dialogue avec la communauté internationale. Un certain nombre de mesures positives ont été constatées, notamment la libération de Shwe Mahn qui, selon l'orateur, ne peut être coupable de trahison pour avoir eu des contacts avec l'OIT, ainsi que la mise en place d'un point focal dans l'armée chargé des relations avec l'OIT. Indubitablement, ces mesures positives doivent se poursuivre.
Toutes les mesures positives prises par le Myanmar résultent de la poursuite du dialogue avec la communauté internationale. Cet aspect ne doit pas être sous-estimé ni sapé. L'OIT est et restera un contact important dans le pays. Concernant le résultat à atteindre, il est important d'assurer une amélioration de la situation dans le pays, la seule démonstration d'une volonté politique ne suffit pas.
En même temps, aucune excuse ne doit être accordée au gouvernement du Myanmar. En effet, il est regrettable que cette amélioration n'ait eu lieu que sous la pression de la communauté internationale. L'orateur a précisé que son gouvernement n'était pas favorable à la poursuite d'une attitude attentiste. Au contraire, il convient de demander instamment au gouvernement du Myanmar d'adopter des mesures concrètes afin de faciliter les contacts entre le point focal dans l'armée et l'OIT concernant la convention no 29, au niveau élevé qui est approprié, et de garantir la totale liberté de mouvement du chargé de liaison a.i. Il a également appelé les Membres à profiter de toutes les rencontres multilatérales ou bilatérales auxquelles participera le Myanmar pour lui rappeler ses obligations. L'examen de la situation du pays devra être poursuivi lors des prochaines sessions du Conseil d'administration.
La membre travailleuse de l'Allemagne a rappelé que le Conseil d'administration se penche depuis des années sur le cas du travail forcé au Myanmar - une tragédie sans fin: des centaines de milliers de personnes sont soumises au travail obligatoire pour la construction de routes, la réalisation d'autres projets d'infrastructures et la fourniture de services pour les militaires, des enfants sont recrutés par les forces armées et, plus récemment, des personnes font l'objet de poursuites judiciaires pour avoir eu des contacts avec le BIT. Pendant des années, le gouvernement du Myanmar a assuré qu'il était en train d'éliminer le travail forcé et de coopérer avec le BIT. Or, si tel était le cas, pourquoi des cas de travail forcé continuent-ils d'être signalés, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas apporté de preuves des mesures prises en réponse à ces plaintes, pourquoi n'a-t-on pas engagé de poursuites judiciaires contre les autorités qui ont eu recours au travail forcé, pourquoi le chargé de liaison a.i. n'a-t-il pas pu se déplacer librement dans le pays, pourquoi la mission de très haut niveau n'a-t-elle pas été en mesure de mener à terme sa mission, et pourquoi le BIT a-t-il été dénigré lors d'une conférence de presse tenue par les autorités à Yangon? Dans cette affaire, la patience a des limites, et la crédibilité de l'OIT et de ses Membres est en jeu. L'OIT a déjà tracé les grandes lignes d'un cadre d'action dans sa résolution de la Conférence internationale du Travail de 2000, et il est temps de prendre ces mesures en collaboration avec d'autres organisations internationales.
La membre gouvernementale de Cuba a souligné que sa délégation avait suivi la question de l'application de la convention no 29 par le Myanmar depuis l'adoption en 2000 de la résolution de la Conférence. Depuis lors, certaines actions menées conjointement par l'OIT et le Myanmar ont permis d'aboutir à des résultats positifs, comme cela ressort du rapport. La présence du chargé de liaison a.i., disposant du même statut que le personnel diplomatique et celui des Nations Unies, a constitué un élément important pour le maintien du dialogue et de la coopération.
La récente réunion entre le ministre du Travail et le chargé de liaison a.i. ainsi que la réunion entre ce dernier et le point focal de l'armée constituent un bon exemple de la volonté de dialogue et de coopération du gouvernement. La lettre du ministre du Travail du 21 mai 2005 adressée au Directeur général du BIT est un élément positif. En ce qui concerne la question de la poursuite du dialogue constructif et de la coopération avec le gouvernement du Myanmar, le gouvernement de Cuba estime que les mesures coercitives visant le commerce et les investissements étrangers ne constituent pas le mécanisme indiqué pour obtenir des progrès à l'intérieur d'un pays, bien au contraire ces mesures engendrent les plus grandes difficultés pour la population qu'elles visent à protéger.
Enfin, l'oratrice a encouragé le gouvernement du Myanmar et l'OIT à trouver des solutions aux problèmes complexes examinés dans le cadre d'un engagement réciproque de collaboration constructive.
Le membre gouvernemental de la République de Corée a déclaré que sa délégation avait examiné attentivement les récents développements dont a fait part le représentant gouvernemental du Myanmar. Sa délégation est d'avis que la mise en place du point focal dans l'armée, les rencontres postérieures entre le point focal et le chargé de liaison a.i. de l'OIT, et la libération de Shwe Mahn constituent des développement positifs. L'OIT doit maintenir une présence solide et un engagement actif au Myanmar. Par ailleurs, l'orateur s'est associé à l'inquiétude exprimée par les autres délégations concernant la situation actuelle au Myanmar et a demandé que le pays démontre sa volonté politique d'éliminer le travail forcé par des actions concrètes et immédiates. C'est au plus haut niveau que le gouvernement du Myanmar doit clairement faire part de son intention d'éliminer le travail forcé.
La membre gouvernementale de la Chine a déclaré que les cas de progrès mentionnés par le représentant gouvernemental du Myanmar montraient pleinement l'engagement de ce gouvernement à éradiquer le travail forcé. Ces avancées positives sont le fruit de la coopération et du dialogue existant entre l'OIT et le Myanmar. Il y a lieu d'encourager le dialogue et la coopération et d'éviter la confrontation. La délégation chinoise se rallie à la déclaration du membre gouvernemental de l'Indonésie qui a parlé au nom de l'ASEAN. L'oratrice a espéré que l'OIT et le gouvernement du Myanmar renforceront leur coopération.
Un représentant de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), s'exprimant avec l'autorisation du bureau de la commission, a observé que, depuis la séance spéciale consacrée à ce cas par la Conférence de 2004, la situation politique et sociale de la population birmane s'est aggravée. Suite au coup d'État ayant destitué le général Kyn Nyunt ainsi que la plupart des membres des services secrets militaires, la répression à travers l'ensemble du pays s'est aggravée de façon dramatique, particulièrement dans les zones ethniques et frontalières où l'on peut observer un regain de violence de la part de l'armée. Mme Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix, demeure assignée à résidence et coupée de tout moyen de communication alors que M. Shwe Mahn, bien que finalement libéré à la demande de l'OIT, reste inculpé de haute trahison, tel que mentionné par le ministre du Travail dans sa récente lettre au Directeur général du BIT.
Au cours des derniers mois, des preuves de centaines de cas de recours au travail forcé ont été recueillies, et cela non seulement dans les régions frontalières où l'armée a recours à des travailleurs forcés comme porteurs ou démineurs, mais également à travers l'ensemble du pays. Il a évoqué le fait que le président du Conseil d'État à la paix et au développement (SPDC) de la localité de Myawaddi dans la province de Karen avait donné des instructions obligeant six villages et plus de 2 000 personnes à participer à la récolte du riz pendant la saison estivale. Le travail forcé est également pratiqué aux fins de la construction de la route commerciale frontalière entre le Myanmar et l'Inde dans la province de Chin. L'armée utilise également le travail des prisonniers pour la construction de routes.
En outre, lors de la session du Conseil d'administration en mars dernier, la junte a organisé une conférence de presse à Yangon au cours de laquelle l'OIT a été accusée d'exercer des pressions unilatérales sur le Myanmar en prenant fait et cause pour les destructeurs expatriés, et l'imposition du travail forcé a été présentée comme une tradition culturelle de ce pays.
L'orateur s'est déclaré très préoccupé par le nombre de personnes venues témoigner au chargé de liaison a.i. de cas de travail forcé qui ont été arrêtées et détenues, et par le fait que la grande majorité des cas de travail forcé soulevés par celui-ci ont été déclarés sans fondement. La commission devrait dès lors prendre des mesures immédiates afin de mettre au point une procédure permettant aux victimes de travail forcé de faire respecter leurs droits, tout en ayant la garantie de ne pas faire l'objet de représailles, ceci afin de contribuer au combat contre l'impunité. Il a instamment prié tant le gouvernement que les employeurs d'assurer le suivi des décisions adoptées par le Conseil d'administration en novembre dernier en ce qui concerne les investissements étrangers directs sous toutes leurs formes afin d'interrompre immédiatement tout investissement privé et toute autre activité économique avec le régime qui pourraient contribuer à le stabiliser et perpétuer ainsi le travail forcé. Par ailleurs, les capacités opérationnelles du Bureau sur le terrain devraient être renforcées afin de parvenir à une totale liberté de mouvement ainsi qu'à l'accès à la population à l'extérieur de Yangon. L'orateur a instamment prié la commission de prendre les mesures nécessaires pour permettre à l'OIT, ses mandants ainsi qu'à d'autres organisations internationales de forcer la junte au pouvoir à respecter le droit fondamental de ne pas être astreint au travail forcé.
La membre travailleuse de l'Australie a déclaré que dans ce cas, il s'agissait d'une question de volonté politique - le choix de défendre une population oppressée et abusée par le travail forcé au sein d'un pays sans droits démocratiques ou système judiciaire équitable reposant sur le respect de la règle de droit. A cet égard, le rapport de Earth Rights International contient des informations préoccupantes concernant les prisonniers-porteurs, le recours à l'agriculture forcée, l'esclavage sexuel, le vol de denrées alimentaires ainsi que le harcèlement de dirigeants locaux et de villages entiers. Ces faits sont invraisemblables au XXIe siècle.
L'oratrice a souligné que le régime au pouvoir au Myanmar est bien connu des gouvernements, des employeurs et des travailleurs siégeant dans cette commission. Ce régime a poussé leur diplomatie dans ses derniers retranchements et voilà qu'à présent il se moque de cette commission en ne se contentant pas seulement de réduire en esclavage ses citoyens en les assujettissant au travail forcé, mais également en emprisonnant des dirigeants démocratiquement élus. Malgré cela, le représentant gouvernemental a de nouveau présenté une série d'excuses pour justifier certains des pires crimes contre l'humanité, le tout accompagné d'une série de nouvelles promesses trompeuses. M. Shwe Mahn a été relâché, alors que son seul crime a été de défendre les droits de ses concitoyens. Au même moment, un autre syndicaliste, membre du syndicat des marins birmans, M. Moe Naung, a été assassiné pour avoir fait simplement son travail. En outre, d'autres informations font état d'au moins un autre meurtre sur la personne d'un syndicaliste.
Bien que travailleurs et employeurs siégeant dans cette commission soient d'accord sur ce cas, le soutien des gouvernements est nécessaire. L'oratrice a, de ce fait, instamment prié ces derniers d'accroître leurs efforts en vue de mettre un terme au commerce ainsi qu'aux investissements étrangers directs, et appelé les institutions financières internationales, y compris les banques régionales, à retirer leurs prêts, leur assistance financière et leurs services bancaires du Myanmar afin de soumettre toutes nouvelles relations économiques et diplomatiques avec ce régime, conditionnelles à l'élimination du travail forcé et du lancement d'un véritable processus démocratique dans le pays.
L'oratrice a exprimé ses remerciements aux gouvernements de l'Union européenne, des États-Unis, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, de l'Inde, du Japon, de la République de Corée et de l'Australie pour leur engagement et exprimé l'espoir de voir l'ensemble des gouvernements de la région Asie-Pacifique prendre le parti de l'humanité et des droits de l'homme, et adopter l'attitude la plus ferme possible à l'encontre de ce régime. Ceci est d'autant plus important qu'en 2006 les gouvernements des pays de l'ASEAN et ceux d'autres États entameront des négociations portant sur un nouvel ensemble commercial important. Le commerce n'est pas acceptable lorsqu'il s'agit d'un État s'étant rendu coupable de certaines des pires violations des droits de l'homme et des travailleurs. L'oratrice a exprimé sa déception quant à la déclaration du gouvernement indonésien, compte tenu du fait que le parlement de ce pays a récemment adopté une résolution priant instamment le gouvernement de boycotter le Sommet de l'ASEAN si la présidence tournante devait en revenir à la junte militaire au pouvoir au Myanmar. Aux termes de cette résolution, le combat du peuple du Myanmar pour améliorer le processus démocratique dans le pays devrait également être soutenu par les entreprises du Sud-Est asiatique, y compris les entreprises indonésiennes.
Tout en étant consciente des préoccupations exprimées par les gouvernements de Singapour, de la Malaisie et des Philippines sur cette question, elle a instamment prié ces derniers d'adopter une attitude plus ferme et appelé la majorité des membres de la commission à prendre les mesures les plus fermes possibles dans le cadre de l'article 33 de la Constitution.
Le membre gouvernemental de l'Ukraine a déclaré que sa délégation soutenait entièrement la déclaration du membre gouvernemental du Luxembourg, qui a parlé au nom de l'Union européenne.
Le membre gouvernemental de la Jamahiriya arabe libyenne a souligné que cette importante question devrait être examinée à la lumière de l'application de la convention. Le gouvernement du Myanmar doit tenir compte des observations formulées et prendre toutes les mesures pour mettre en œuvre les résolutions de l'OIT.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a rappelé que, dans ses dernières interventions au Conseil d'administration, il avait exprimé sa crainte que la discussion de ce cas ne soit politisée par certaines nations. Malheureusement cette crainte était justifiée puisque de nombreux orateurs ont abordé des faits politiques qui ne sont pas liés à la convention no 29. Il s'est opposé fermement à cette attitude.
Les membres employeurs ont fait part de leur déception quant à la déclaration finale du membre gouvernemental du Myanmar. Ils s'attendaient à ce que le Myanmar indique les mesures positives qu'il adopterait en réponse à la discussion de ce cas. Cela ne fait que confirmer leur point de vue selon lequel il n'y a pas de volonté politique de résoudre ce problème. La question discutée est d'ordre juridique et a été abordée en tant que telle dans la plupart des interventions. Les sujets abordés sont relativement simples. Les membres employeurs attendaient une indication permettant de penser que le Myanmar amenderait ou abrogerait la loi sur les villages et les villes, et diffuserait largement l'interdiction du travail forcé. Cependant le gouvernement n'a pas abordé ces problèmes, ce qui est extrêmement décevant.
Les membres travailleurs ont rappelé qu'il était de tradition que l'on examine objectivement les faits qui, en l'espèce, sont clairs: il n'existe aucune preuve tendant à démontrer une diminution des pratiques de travail forcé au Myanmar. Ce dernier continue d'être imposé à la population par les dirigeants militaires du pays. La situation, telle qu'elle ressort des documents D.6 et D.7, n'est pas positive, dans la mesure où selon ces documents la coopération avec l'OIT est difficile. L'absence de réponse du gouvernement remet en cause l'autorité de cette commission. Les faits ne sauraient être ignorés pour des raisons d'ordre politique ou économique.
Les membres travailleurs se sont également déclarés plus que déçus par les déclarations du représentant gouvernemental face à une situation qui pourtant était claire. Il serait dès lors contre-productif de continuer à attendre puisque le gouvernement ne prendra aucune mesure concrète. A l'instar des membres employeurs et de la plupart des gouvernements, les membres travailleurs ont demandé au gouvernement d'agir sans délai. Ils ont également demandé que les propositions concrètes qu'ils venaient de faire soient reprises dans les conclusions. Ces propositions qui ne sont pas des mesures punitives ont pour but d'orienter l'économie et le travail au Myanmar vers le respect des normes de l'OIT. Il y a donc lieu de réactiver les mesures qui ont été prises en vertu de l'article 33 de la Constitution.
Rapport du Directeur Général
Rapport du chargé de liaison par intérim
Document D.7
1. Document GB.291/5/1
2. Document GB.291/5/1(Add.)
3. Document GB.291/5/2
4. Document GB.291/7/1
5. Document GB.291/7/2
6. Document GB.291/7/2(Add.)
7. Document GB.291/7/3
8. Conclusions du Conseil d'administration à sa 292e session (mars 2005)
Après avoir pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental, la commission a noté avec une profonde préoccupation les observations de la commission d'experts qui a examiné les mesures adoptées par le gouvernement pour donner effet aux recommandations de la commission d'enquête. Dans son observation, la commission d'experts a noté que les recommandations de la commission d'enquête n'avaient toujours pas été mises en œuvre. La commission d'experts et la vaste majorité des orateurs au sein de cette commission ont exprimé leur plus ferme condamnation et ont demandé instamment au gouvernement de faire preuve de sa détermination déclarée d'éliminer le travail forcé et de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention. L'étendue du travail forcé n'a pas changé de manière significative dans la plupart des régions, y compris dans les zones ethniques, et ses pires formes - y compris le travail forcé pour les militaires et le recrutement forcé des enfants dans l'armée - persistent.
A cet égard, la commission a pris note des faits nouveaux les plus récents dont le Directeur général et le chargé de liaison ad intérim lui ont fait rapport. Tout en se félicitant de la libération de la troisième personne condamnée dans le cas de haute trahison, elle a regretté cependant le maintien des charges. La commission n'a pu que déplorer que le gouvernement ne soit pas parvenu à démontrer un véritable engagement pour l'élimination du travail forcé, comme l'ont montré tant son attitude à l'égard de la mission de très haut niveau que sa réponse aux mesures concrètes recommandées par la mission de très haut niveau et par le Conseil d'administration. La commission s'est déclarée gravement préoccupée en particulier de l'intention déclarée du gouvernement d'engager des poursuites à l'encontre des personnes qu'il accuse de soumettre des plaintes fallacieuses pour travail forcé et du recours apparent à des mesures d'intimidation employées à l'encontre des plaignants.
De l'avis de la commission, les développements récents n'ont, en outre, fait que confirmer les conclusions du Conseil d'administration à sa session de mars 2005, selon lesquelles l'attitude "d'expectative" qui prévalait parmi ses membres depuis 2001 avait perdu sa raison d'être et ne pouvait se poursuivre. De l'avis général de la commission, les gouvernements, les employeurs et les travailleurs, ainsi que d'autres organisations internationales, devraient dès maintenant activer et intensifier l'examen de leurs relations avec le Myanmar, tels qu'ils étaient appelés à le faire en vertu de la résolution de 2000, et adopter de manière urgente les mesures appropriées, y compris en ce qui concerne l'investissement direct étranger sous toutes ses différentes formes et les relations avec les entreprises étatiques ou militaires au Myanmar. Conformément aux conclusions du Conseil d'administration de mars, les présentes conclusions devraient être communiquées à tous ceux à qui la résolution de 2000 était destinée. Les résultats de tels examens devraient dans leur intégralité faire l'objet d'un rapport au Directeur général afin que le Conseil d'administration puisse disposer d'un tableau complet de la situation en novembre. Pour ce qui est du Conseil économique et social (ECOSOC), l'on devrait lui demander de réactiver son examen de la question placée à son ordre du jour en 2001, et les membres de l'ECOSOC devraient être prêts à appuyer une telle démarche.
La commission a noté qu'un certain nombre de graves questions, dont certaines avaient déjà été identifiées par la mission de très haut niveau dans son aide-mémoire, devaient être résolues de manière urgente:
1. Le gouvernement devrait donner des assurances claires qu'aucune action ne sera entreprise à l'encontre des personnes, ou de leurs représentants, soumettant des plaintes pour travail forcé, afin que le chargé de liaison a.i. puisse pleinement continuer à accepter et transmettre lesdites plaintes aux autorités compétentes, et des discussions urgentes devraient avoir lieu afin que les garanties et la protection prévues dans le mécanisme du facilitateur soient rendues disponibles.
2. Un certain nombre de sérieuses allégations de travail forcé toujours en instance, y compris celles concernant l'armée, devraient être résolues de manière crédible.
3. La présence de l'OIT au Myanmar devrait être renforcée afin de consolider sa capacité à remplir toutes ses fonctions et le gouvernement devrait émettre tous les visas nécessaires sans délai.
4. La liberté de mouvement reconnue en vertu de l'accord pertinent au chargé de liaison a.i., et qui est nécessaire à la bonne exécution de ses fonctions, devrait être pleinement respectée.
La commission a été d'avis que le test de l'authenticité de l'engagement des autorités était et restait leur volonté de discuter de manière urgente de toutes les questions en instance au plus haut niveau et de s'engager dans un dialogue politique de fond pouvant aborder de manière crédible le problème du travail forcé. Cet engagement devrait par ailleurs se traduire par la modification de la loi ainsi que dans une future constitution. Sous réserve de faits nouveaux à cet égard, l'avis général a été que le Conseil d'administration ne devrait pas se limiter, à sa prochaine session, à examiner les mesures prises en vertu de la résolution de 2000, mais devrait être aussi prêt à envisager d'autres mesures.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a informé la commission que la Cour suprême de l'Union du Myanmar avait révisé et commué les condamnations à mort des trois individus comme suit: 1) la condamnation de Shwe Mann (a) Zeyar Oo a été commuée en relégation à vie en vertu de l'article 122 (1) du Code pénal du Myanmar; 2) la condamnation de Min Kyi (a) Naing Min Kyi a été commuée en trois années d'emprisonnement en vertu de l'article 123 du Code pénal du Myanmar; et 3) la condamnation de Aye Myint (a) Myint Aye Maung a été commuée en trois années d'emprisonnement en vertu de l'article 123 du Code pénal du Myanmar. Outre ces trois personnes, six autres ont également bénéficié de commutations de peines. Sur un total de neuf individus, quatre ont vu leur peine commuée en trois années d'emprisonnement, et cinq en relégation à vie. L'orateur a rappelé le contenu de sa lettre du 3 juin 2004 à l'attention du Directeur général du Bureau international du Travail qui a été insérée dans le document C.App/D.5 (Add.2).
En ce qui concerne le Facilitateur, bien que le plan d'action conjoint ne soit pas encore en vigueur, les autorités du Myanmar l'appliquent déjà de bonne foi et de leur propre initiative. A cet égard, les autorités du Myanmar reconnaissent le Facilitateur désigné par le BIT, tel que prévu par le plan d'action conjoint, et ont collaboré avec lui dans l'accomplissement de ses fonctions. Dans ce contexte, il est également pertinent de noter le paragraphe 10 du rapport du Conseiller spécial du Directeur général du BIT (GB.289/8/1) qui a visité le Myanmar du 3 au 8 mars 2004. Le mécanisme du Facilitateur constitue un nouveau concept et le mandat de celui-ci est clairement établi par le plan d'action conjoint; ce mécanisme fonctionnant déjà de manière effective.
L'orateur s'est référé également à d'autres mesures prises par le gouvernement. Celles-ci incluent des équipes d'observation sur le terrain. Les sept équipes d'observation sur le terrain (FOT) chapeautées par les directeurs généraux et les chefs de département du ministère du Travail poursuivent les missions d'observation sur le terrain dans diverses régions du pays. Ces équipes supervisent la mise en oeuvre des mesures sur le terrain et, le cas échéant, diligentent des enquêtes sur les allégations de recours au travail forcé. Leurs conclusions ont été soumises au Comité d'application de la convention no 29 afin de prendre des mesures appropriées et nécessaires. Le ministère du Travail, sous l'étroite supervision du Comité d'application de la convention no 29, et en collaboration avec le chargé de liaison de l'OIT par intérim, a compilé ces conclusions et mesures et les a soumises régulièrement au Directeur général du BIT ainsi qu'à la commission d'experts. De plus, l'orateur a indiqué que le chargé de liaison de l'OIT par intérim avait bénéficié de la liberté de mouvement à l'intérieur du pays. Celui-ci a voyagé dans tout le Myanmar, y compris dans des régions reculées comme les collines de l'Etat de Chin, l'Etat de Kachin et l'Etat de Kayah.
L'orateur a souligné également la tenue d'un atelier sur la mise en oeuvre de la convention no 29. Parmi les 120 participants à cet atelier, on dénombrait des hauts fonctionnaires des conseils pour la paix et le développement provenant du niveau des lotissements de division, district, canton et village, des hauts fonctionnaires de divers départements gouvernementaux ainsi que des représentants d'ONG. Les sujets abordés incluaient notamment la coopération entre le Myanmar et l'OIT, l'ordonnance no 1/99 et l'ordonnance complétant l'ordonnance no 1/99, le Code de procédures criminelles, les droits des ressortissants du Myanmar, le rôle des forces policières dans l'élimination du travail forcé ainsi que les plaintes concernant la région. L'atelier a été très utile et on élabore des plans afin d'organiser davantage d'ateliers similaires et de séminaires.
La magistrature du Myanmar et les divers ministères et départements concernés prennent également les mesures de mise en oeuvre nécessaires et engagent des actions judiciaires lorsque les cas présentent prima facie des preuves suffisantes. Les poursuites judiciaires engagées en vertu de l'article 374 du Code pénal du Myanmar contre deux prévenus sur la base d'allégations de recours au travail forcé dans le village de Htanmanaing dans le canton de Kawhmu constituent une avancée significative. Dans le passé, un certain nombre de représentants, incluant les membres travailleurs, ont insisté sur le besoin d'invoquer l'article 374 du Code pénal du Myanmar. Ce cas constitue le premier instruit en vertu de l'article 374. Des mesures nécessaires sont également prises contre ceux qui ont été trouvés coupables d'avoir violé l'ordonnance no 1/99 et l'ordonnance complétant l'ordonnance no 1/99.
En ce qui concerne le respect par le Myanmar de la convention no 87, l'orateur a noté que la Convention nationale, qui a été investie de la tâche de rédiger une nouvelle Constitution, siège actuellement. En conclusion, les mesures susmentionnées témoignent de la détermination, du dévouement et de l'engagement des autorités du Myanmar à éradiquer le travail forcé dans le pays. L'orateur a réitéré une nouvelle fois qu'aucun lien entre l'affaire dont est saisie l'OIT et la politique ou la situation interne du pays ne sera accepté.
Les membres travailleurs ont souligné qu'une nouvelle fois une session spéciale était consacrée à l'application de la convention no 29 sur le travail forcé au Myanmar. Il y a plusieurs années déjà, la commission d'enquête recommandait au gouvernement: a) de modifier les lois relatives au travail forcé; b) de mettre fin à toute pratique de travail forcé, notamment par l'armée; et c) de faire en sorte que des sanctions pénales soient effectivement appliquées en cas de travail forcé. Sur la base de ces recommandations, la commission d'experts a constaté que les lois datant de 1907 n'avaient toujours pas été modifiées. Le gouvernement continue à cet égard à répéter que les ordonnances de 1999 ont amendé ces lois. Mais pourquoi alors ne pas modifier lesdites lois si, comme le gouvernement l'indique, elles ne s'appliquent plus? S'agissant de la deuxième recommandation de la commission d'enquête, le gouvernement n'a pris aucun des quatre types d'action qui lui étaient demandés en vue de faire cesser les pratiques de travail forcé. Ainsi, le gouvernement n'a pas fourni copie des instructions spécifiques et concrètes adressées à cette fin aux autorités locales et à l'armée; il n'a pas donné de définition des travaux forcés ni indiqué la manière dont ces travaux pourraient être exécutés dorénavant sans recourir au travail forcé. Des instructions ne semblent pas avoir été données à l'armée et rien n'indique que les traductions dans les langues ethniques des instructions ont été effectivement diffusées. De même, si des allocations budgétaires ont été prévues, elles n'ont pas été utilisées pour que les travaux soient réalisés autrement. De plus, il est curieux de constater que toutes les investigations faites par le Comité d'application de la convention no 29 ont abouti à des non-lieux. En ce qui concerne la troisième recommandation, aucune sanction n'a été à ce jour prononcée à l'encontre des auteurs de pratiques de travail forcé même si une plainte vient pour la première fois d'être déposée auprès d'une instance judiciaire. Force est de constater que la situation reste extrêmement grave et préoccupante, surtout dans la partie périphérique du pays, régions ethniques où il y a une forte présence de l'armée. Cette situation est plus que déprimante et concerne un nombre impressionnant de personnes. Les membres travailleurs ont souligné l'importance de continuer, en plus de la discussion au sein du Conseil d'administration qui tend davantage à se concentrer sur les questions de procédure sur le fond, la discussion au sein de la commission jusqu'à ce qu'un progrès substantiel soit démontré en vue de l'élimination complète du travail forcé en Birmanie.
C'est la quatrième année consécutive que ce cas est discuté dans une session spéciale conformément à la résolution de la Conférence sous l'article 33 de la Constitution de l'OIT. L'année dernière, la discussion sur l'accord concernant le plan d'action, alors récemment conclu, se déroulait dans le contexte de l'attaque de Aung San Suu Ky par les forces associées au régime militaire, quelques jours seulement avant le début de la Conférence internationale du Travail. Nombreux de ses partisans ont été massacrés. De plus, Daw Suu et plusieurs de ses partisans ont été arrêtés et sont toujours en détention à ce jour et toutes les activités de la Ligue nationale pour la démocratie sont suspendues. Le climat de peur et de répression, résultant du massacre, soulevait de graves inquiétudes sur la capacité de mettre en oeuvre le plan d'action récemment conclu, surtout en raison du fait que le travail du Facilitateur dépendait de la possibilité pour les victimes de travail forcé de venir le consulter, lui et le chargé de liaison, en toute confiance, sans peur de représailles de la part du régime. Tenant compte de ces faits, cette commission a conclu qu'il n'était pas possible à cette époque de mettre en oeuvre le plan d'action. Le Conseil d'administration a réexaminé la situation non seulement lors de sa session de novembre, mais aussi à celle de mars. A ces deux occasions, le Conseil d'administration a décidé que le climat régnant dans le pays n'était pas propice à la mise en oeuvre du plan d'action.
Ils ont rappelé que le Conseil d'administration a demandé en mars à cette commission de revoir les développements à la lumière de cette circonstance et que les conclusions du Conseil d'administration "doivent s'entendre sans préjudice des vues exprimées par certains, à savoir que l'absence de progrès notable exigerait de réexaminer les relations entre les mandants de l'OIT et le Myanmar, conformément à l'article 33 de la Constitution". En mars, le Conseil d'administration a exprimé trois préoccupations fondamentales concernant la condamnation à mort de neuf personnes pour haute trahison, particulièrement de Shwe Mahn, Naing Min Kyi et Aye Myint. Il doit être souligné que le Facilitateur désigné par le BIT a considéré que "l'affaire n'a pas fait l'objet d'une procédure correcte et crédible et que l'inculpation pour haute trahison n'est pas fondée et devrait être revue". La première préoccupation exprimée par le Conseil d'administration en mars est que des contacts ou l'échange d'informations avec l'OIT pourraient avoir, d'une façon ou d'une autre, des conséquences judiciaires en Birmanie. Le deuxième sujet de préoccupation est que des contacts avec des tiers à propos des questions qui intéressent l'OIT peuvent faire l'objet de sanctions. Le troisième point est la question de savoir si, étant donné l'arrêt de la cour de justice, le plan d'action, et plus particulièrement la fonction du Facilitateur, peuvent être mis en oeuvre de façon crédible.
Cette commission a pris connaissance du fait que deux lettres ont été envoyées au ministère du Travail depuis la session du Conseil d'administration de mars dernier, l'une par le chargé de liaison, et l'autre par le Directeur général lui-même. Ces lettres se trouvent dans le document D.5. Une autre lettre envoyée par l'ambassadeur, il y a quelques jours, semble répondre à la lettre du Directeur général, datée du 2 juin. Dans cette lettre, l'ambassadeur indique d'abord que les trois défendeurs ont le droit de faire un second appel devant la Cour suprême. Il a ajouté que la cour de première instance avait, par inadvertance et incorrectement, fait référence à l'OIT dans sa décision originale. Troisièmement, il a assuré le Directeur général qu'en aucune circonstance des contacts ou la coopération avec l'OIT n'avaient constitué une infraction à la loi existante. La discussion de cette année a lieu dans un contexte similaire à celui de l'an dernier. Aung San Suu Kyi est toujours assignée à résidence et est tenue au secret. Le Rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l'homme en Birmanie, qui s'est vu refuser un visa pour entrer dans le pays, a qualifié la Convention nationale sur la Constitution, qui a eu lieu dans un endroit sécuritaire à l'extérieur de Rangoon, "d'un énorme effort pour un exercice futile et non démocratique". Il a accusé le gouvernement de condamner à l'assignation à résidence les 1 088 personnes soigneusement sélectionnées pour assister à la Convention. Il a également déclaré publiquement que la transition démocratique ne serait pas possible à moins que les généraux du Myanmar laissent place à la discussion libre et ouverte lors de la Convention. Les groupes ethniques participant à la Convention ont menacé de se retirer si leurs demandes concernant des changements fondamentaux dans des documents rédigés il y a presque une décennie, et ressortis à l'occasion de cette Convention nationale, n'étaient pas acceptées.
Les membres travailleurs ont déclaré que l'esprit de coopération se dégageant des remarques du représentant gouvernemental contrastait de manière flagrante avec la réalité qui a lieu en Birmanie aujourd'hui, ce qui peut être décrit comme la victoire des militaires les plus résistants aux réformes de toutes sortes. A l'OIT, le gouvernement apparaît sous les traits d'un diplomate civil alors que, face au peuple birman, il apparaît comme un soldat avec son fusil. Tenant compte de ce qui est mentionné ci-dessus, ils ont fait état de quatre points en réaction aux développements récents. Premièrement, les membres travailleurs soutiennent pleinement l'opinion exprimée par le Facilitateur désigné par le BIT à l'effet que les condamnations de Shwe Mahn, Naing Min Kyi et Aye Myint sont sans fondement. Le seul crime qui leur est reproché semble être leur association avec des groupes prodémocratiques opposés au régime, particulièrement la Fédération des syndicats de Birmanie. Cette association leur a valu d'être qualifiés de terroristes et condamnés pour haute trahison. Tout en exprimant leur soulagement de la réduction des sentences de Naing Min Kyi et Aye Myint, les membres travailleurs ont demandé la remise en liberté immédiate des trois détenus. De plus, ils ont demandé la remise en liberté de six autres défendeurs, dont cinq sont condamnés à la prison à perpétuité. Ils ont exprimé l'espoir que le second examen par la Cour suprême interviendrait rapidement et que les défendeurs seraient acquittés. Deuxièmement, concernant la question de savoir si des contacts et la coopération avec l'OIT constituent un crime en Birmanie, les assurances données par le représentant gouvernemental dans sa lettre du 4 juin, bien qu'appréciées, sont insuffisantes. Ils ont exprimé l'espoir qu'un deuxième jugement de la Cour suprême statuerait clairement sur le fait que les contacts avec l'OIT ne constituent pas un crime et devraient au contraire être encouragés. Ceci doit être communiqué clairement à travers le pays dans toutes les langues appropriées. Troisièmement, la question concernant les contacts avec des tiers à propos de questions qui intéressent l'OIT doit aussi faire l'objet d'éclaircissements. Les décisions des tribunaux ont établi clairement que ce qui était entendu par "tiers" est la Fédération des syndicats de Birmanie et son secrétaire général, M. Maung Maung, qui s'est adressé à la commission précédemment et qui a été condamné par contumace pour haute trahison. En l'absence de clarifications à ce sujet, la mise en oeuvre du plan d'action, plus particulièrement le travail du Facilitateur, serait fondamentalement compromise.
Etant donné le climat politique actuel à l'intérieur du pays, les membres travailleurs ne sont pas d'avis que le plan d'action peut effectivement être appliqué en ce moment. Ils ont souligné qu'ils ont réagi positivement au plan d'action, particulièrement au mécanisme du Facilitateur, au sein de cette commission l'année dernière et lors du Conseil d'administration. Ils attendaient avec impatience le jour où le climat permettrait au plan d'action d'être testé et où l'on pourrait déterminer la façon dont il a contribué à l'élimination du travail forcé en Birmanie. A cet égard, ils ont noté avec intérêt les informations fournies dans le document D.5 concernant les activités du chargé de liaison, plus particulièrement le fait qu'il a reçu à ce jour 40 plaintes depuis le début de 2004. Ils ont déploré le fait que le régime n'ait reconnu comme victimes de travail forcé que trois des 40 personnes concernées et que les autorités ne semblent avoir pris aucune mesure jusqu'à ce jour. Néanmoins, ils ont reconnu la valeur du travail du chargé de liaison et se sont dits ouverts à explorer les voies pour l'étendre et le rendre plus efficace, si les circonstances s'y prêtaient.
Les membres travailleurs ont rappelé que le rapport de la commission d'enquête avait noté que "toutes les informations et les preuves devant la commission montrent le total mépris que manifestent les autorités pour la sécurité et la santé ainsi que pour les besoins essentiels des personnes qui effectuent du travail forcé ou obligatoire ... les travailleurs forcés, y compris ceux qui sont malades ou blessés, sont fréquemment battus ou brutalisés par les soldats, leur causant de graves blessures; certains sont tués, et des femmes exécutant un travail forcé sont violées ou victimes d'autres abus sexuels de la part des soldats..." Les membres travailleurs sont obligés de souligner que, malgré l'engagement continu entre le Bureau et le gouvernement, peu de progrès ont été accomplis concernant l'utilisation répandue du travail forcé, particulièrement par les militaires, et sur les projets d'infrastructure. Ceci est confirmé, une fois de plus cette année, dans les commentaires de la commission d'experts et conforté par le flux continuel d'informations provenant de la Birmanie. A moins qu'un progrès significatif ne soit accompli au cours des prochains mois en vue de l'application des trois recommandations de la commission d'enquête, le Conseil d'administration n'aurait pas d'autre choix que d'appeler le Directeur général à demander aux mandants de l'OIT, en vertu de l'article 33 de la Constitution, à revoir leurs relations avec le Myanmar afin d'assurer que celles-ci ne perpétuent pas ou n'étendent pas le système de travail forcé ou obligatoire dans ce pays.
Les membres employeurs ont déclaré que le gouvernement du Myanmar refuse toujours d'honorer les obligations qu'il a acceptées de plein gré conformément au droit international. Cet enfermement du gouvernement sur lui-même porte préjudice à l'économie du pays et à son peuple et, s'il persiste, ne gagnera à ce régime que l'ostracisme de la communauté internationale. Malgré tout, il est trop tôt pour se résigner. Les membres employeurs ont rappelé que la commission a pour mandat d'examiner les mesures prises pour mettre en oeuvre la résolution adoptée par la Conférence en 2000, résolution qui elle-même se fonde sur l'observation de la commission d'experts de 1998. Les violations de la convention no 29 restent massives et la base légale de ces violations continue d'exister puisque la loi sur les villages et la loi sur les villes restent en vigueur. L'abolition du travail forcé n'est possible que si le gouvernement est disposé à agir. Or, si le représentant gouvernemental manifeste, dans sa déclaration, une volonté d'action, le contenu des documents D.5 et D.6 montre que dans les faits on ne décèle en tout et pour tout que bien peu de progrès. Les membres employeurs ont ensuite évoqué des aspects précis concernant le travail forcé dans le pays. Les directives sur l'interdiction du travail forcé qui émanent des autorités militaires doivent encore être diffusées et traduites dans les langues ethniques. Les lois dont il est question plus haut qui autorisent le travail forcé doivent encore être abrogées. La brochure sur le travail forcé mentionnée au paragraphe 14 de l'observation de la commission d'experts n'a toujours pas été éditée. Les ressources financières indispensables au développement doivent encore être dégagées pour assurer l'abolition du travail forcé, puisque de nombreux projets présupposent encore le recours au travail forcé pour leur exécution. Enfin, les sanctions en cas de recours au travail forcé n'existent que sur le papier et, dans la pratique, aucun élément ne permet d'établir que de telles sanctions aient jamais été prises.
Les membres employeurs ont rappelé combien ce cas est ancien, puisqu'il a donné lieu à diverses missions, qui ont abouti à la nomination d'un chargé de liaison au Myanmar en mai 2002. Le gouvernement ne réagit que lentement et sous la pression. Qui plus est, comme indiqué dans le document D.5, il n'a même pas été possible au chargé de liaison de confronter à la réalité les allégations de travail forcé qui ont été portées à son attention. Selon de nouvelles informations, le travail forcé sévit également dans les régions frontalières et se pratique dans le cadre du service militaire. Plus précisément, il a été rapporté que des jeunes de moins de 18 ans ont été enrôlés de force par l'armée pour subir une formation militaire obligatoire. Les membres employeurs ont en outre fait observer que, lorsque le gouvernement répond à ce genre d'allégations, les réponses parviennent toujours juste avant la Conférence. S'agissant du plan d'action de mai 2003, les membres employeurs ont relevé qu'un facilitateur indépendant est investi de certaines missions mentionnées aux paragraphes 38 à 45 de l'observation de la commission d'experts de cette année. Ce sera au Directeur général de déterminer la date de lancement du plan d'action. Jusqu'à présent, rien ne s'est produit. En mars 2004, le Conseil d'administration du BIT est parvenu à la conclusion que la situation au Myanmar n'était pas suffisamment convaincante pour aller de l'avant avec la mise en oeuvre de ce plan d'action.
Les membres employeurs ont relevé quelques éléments positifs. Le chargé de liaison a été saisi d'un nombre considérable de plaintes concernant le travail forcé, qu'il a transmises pour investigation et suites à donner au Comité d'application de la convention no 29. Ces cas, qui ont trait notamment à l'enrôlement forcé de personnes de moins de 18 ans dans le service militaire, n'ont pour la plupart pas encore donné lieu à enquête. Les membres employeurs ont appelé spécialement l'attention sur la situation des neuf personnes condamnées à mort pour haute trahison, dont trois notamment pour avoir eu des contacts avec l'OIT. Ces sentences donnent à croire que des contacts avec des tierces parties sur des questions intéressant l'OIT sont matière à répression. Malgré tout, dans une lettre du 3 juin 2004 adressée au Directeur général et se référant au jugement du 28 novembre 2003, l'ambassadeur du Myanmar déclare que des contacts ou une coopération d'un citoyen du Myanmar avec l'OIT ne constituent pas au regard du droit national un acte répréhensible.
Les membres employeurs ont estimé que l'exposé préliminaire de ce cas suscite de profondes préoccupations. Le plan d'action envisagé voici un an n'a toujours pas été mis en oeuvre. Or, ce plan d'action, s'il ne prévoit guère que quelques mesures qui changeraient radicalement la situation, serait un bon commencement. La mise en oeuvre de ce plan d'action est également indispensable pour donner un sens aux contacts entre l'OIT et le gouvernement. Des mesures plus efficaces doivent maintenant être prises. Les membres employeurs ont exprimé l'espoir que le gouvernement cesse de ne fournir des informations sur l'évolution de la situation que juste avant le début de la Conférence.
Le membre gouvernemental de l'Indonésie, s'exprimant au nom des pays de l'ANASE, a remercié le Directeur général du BIT pour son soutien et sa coopération continus avec le gouvernement du Myanmar dans ses efforts pour éliminer les pratiques du travail forcé dans le pays. Il a aussi reconnu le rôle du chargé de liaison du BIT par intérim au Myanmar, qui assiste les autorités du Myanmar dans l'application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, de l'OIT. Sa délégation s'est réjouie de l'engagement du gouvernement du Myanmar à respecter cette convention et à éliminer les pratiques de travail forcé dans le pays. Il y a lieu de noter l'accord sur le plan d'action conjoint, conclu entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT, le 27 mai 2003, et de demander instamment aux deux parties de l'appliquer le plus vite possible. A cet égard, l'orateur s'est réjoui de la visite de la mission du BIT au Myanmar menée par le Conseiller spécial du Directeur général du BIT, du 4 au 6 mars 2004. Le Myanmar et l'OIT devraient commencer à mettre en oeuvre le plan d'action conjoint et poursuivre leur collaboration. Il faut croire qu'une approche de collaboration permettra à la Conférence internationale du Travail de jouer un rôle constructif à ce sujet. Le gouvernement de l'Union du Myanmar et l'OIT doivent être encouragés à continuer leur coopération amicale jusqu'à ce que la question soit complètement résolue.
La membre gouvernementale de l'Irlande s'est exprimée au nom des pays de l'Union européenne. Elle a indiqué que les pays candidats (Bulgarie, Roumanie, Turquie), des pays du Pacte de stabilisation et du processus d'association, des pays candidats potentiels à l'UE (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Serbie-et-Monténégro, ex-République yougoslave de Macédoine) et des pays de l'AELE (Islande, Norvège et Suisse) se sont ralliés à sa déclaration. L'Union européenne a tenu à souligner son appui et son appréciation du travail fait par le Bureau international du Travail, ainsi que du travail de l'ancienne chargée de liaison et du chargé de liaison intérimaire dans leur travail en Birmanie/Myanmar. Elle a rappelé qu'en mars le Conseil d'administration avait conclu que, bien que des changements positifs avaient été réalisés à partir du novembre 2003, les jugements des tribunaux contre certaines personnes, en raison de contacts ou échanges d'informations avec le BIT, avaient miné la crédibilité et les perspectives de la coopération pour l'avenir. Trois préoccupations distinctes avaient été exprimées dans les conclusions. Le Bureau devait examiner cette question en profondeur, à la lumière des résultats du réexamen des cas récents et des assurances supplémentaires données par le gouvernement. Il devait faire rapport aux membres du Conseil d'administration sur les résultats d'un tel examen et procéder à la mise en oeuvre du plan d'action à la condition préalable que ces résultats aient été considérés suffisamment convaincants. Elle a déclaré que l'UE n'a pas trouvé les informations supplémentaires suffisamment convaincantes pour permettre la mise en oeuvre du plan d'action.
L'Union européenne était sérieusement préoccupée par le fait que les trois personnes condamnées à cause de leurs contacts avec l'OIT restaient détenues en prison, l'une d'entre elles étant condamnée à perpétuité. Elle s'est dite préoccupée par le fait que la possibilité d'accès à leurs avocats leur ait été refusée. Il a été annoncé qu'une possibilité de deuxième appel avait été octroyée, mais cet appel doit maintenant mener pour le moins à un résultat satisfaisant dans les conditions exprimées dans les deux lettres, à savoir celle du Directeur général et celle de l'Ambassadeur de Birmanie/Myanmar. Ce n'est qu'alors que de nouvelles mesures pourraient être envisagées, qu'elles soient positives ou, en cas de résultats décevants, qu'elles entraînent des mesures assurant le respect de la convention no 29 par la Birmanie/Myanmar. L'UE a noté que le chargé de liaison par intérim de l'OIT avait poursuivi ses activités parmi lesquelles des discussions avec le ministre du Travail et le directeur général de son département, qu'il avait été en mesure d'effectuer, en toute indépendance, une visite à l'Etat Chin. L'UE reconnaît que le chargé de liaison par intérim de l'OIT était en mesure de voyager dans les zones qu'il voulait, sans restrictions ni escorte, et était capable de rencontrer librement tout un groupe de personnes ainsi que les membres du Conseil de la paix et du développement de l'Etat Chin, y compris son secrétaire. Néanmoins, elle a noté que, malgré le nombre croissant d'allégations reçues par le chargé de liaison par intérim de l'OIT, le Comité d'application de la convention no 29 n'avait considéré comme justifiées aucune des allégations portées à sa connaissance. L'UE est préoccupée par le fait que ce Comité n'avait pas trouvé de cas de travail forcé bien que leur existence fut évidente. L'UE partage l'opinion du chargé de liaison par intérim selon laquelle, si la position officielle du Comité d'application de la convention no 29 était que les allégations n'étaient pas fondées, cela jetterait un doute sur la crédibilité et le travail de celui-ci.
L'Union européenne est préoccupée et profondément déçue par le fait que les autorités de la Birmanie/Myanmar, malgré leurs promesses précédentes, n'aient pas libéré Daw Aung San Suu Kyi ou son adjoint, U tin Oo, et n'aient pas permis à la Ligue nationale pour la démocratie (LND) de rouvrir ses bureaux. L'UE a regretté que les autorités de la Birmanie/Myanmar n'aient pas réussi à créer les conditions permettant à la LND de prendre part à la convention nationale. Elle s'est en outre dite préoccupée par les restrictions pesant sur les participants à ladite convention nationale. Elle a regretté que les autorités de la Birmanie/Myanmar n'aient pas profité de l'occasion pour entamer le processus réel de la réconciliation nationale ainsi que celui de la transition pacifique à la démocratie. Il était aussi préoccupant que le Rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l'homme en Birmanie/Myanmar n'ait pas été en mesure d'entrer au pays. L'UE a rappelé son attachement aux changements démocratiques en Birmanie/Myanmar ainsi qu'à l'assistance humanitaire continue en faveur du peuple de la Birmanie/Myanmar. Elle s'engage à continuer de travailler avec ses partenaires asiatiques et autres dans ce but.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a déclaré que son gouvernement avait soigneusement étudié la documentation préparée pour cette commission sur les progrès concernant l'observation par la Birmanie de la convention (no 29) sur le travail forcé. Elle a aussi écouté avec un grand intérêt la présentation faite devant cette commission par le gouvernement de la Birmanie. La conclusion inévitable est que le travail forcé continue d'exister en Birmanie. La commission d'experts a constaté, dans son dernier rapport, que "si, depuis l'époque où la commission d'enquête a rendu son rapport, en 1998, il peut y avoir eu une certaine diminution du travail forcé, notamment dans le cadre de travaux de génie civil, du travail forcé continue néanmoins d'être imposé dans de nombreuses parties du pays". Le chargé de liaison par intérim de l'OIT a fourni un témoignage vraisemblable complémentaire relatif à l'utilisation continue du travail forcé et du recrutement forcé des enfants dans l'armée. Certains Birmans ont fait preuve d'un courage remarquable en contactant le bureau de liaison de l'OIT afin de signaler des cas de travail forcé. Deux individus ont même déposé plainte devant un tribunal birman, en conformité avec l'article 374 du Code pénal de Birmanie, ce qui est une première. Le peuple birman continue pourtant à vivre dans un climat de peur. Son gouvernement a été consterné d'apprendre qu'en mars trois personnes ont été condamnées à mort pour avoir pris contact avec le BIT. Les autorités birmanes ont rassuré le Conseil d'administration que les cas en question devraient être réexaminés. Mais la récente décision de la Cour suprême a été de seulement réduire leur peine. Cela est inacceptable. Nul ne devrait être puni, ni avoir peur de l'être pour avoir contacté le BIT. Elle a instamment demandé aux autorités birmanes de garantir que la Cour suprême revienne sur ces jugements et que les trois personnes aient accès à une assistance juridique réelle en vue de préparer leurs appels. Dans le cas contraire, comme le Conseil d'administration l'a antérieurement noté, la confiance et les perspectives de coopération future en seraient ébranlées. Elle s'est ralliée aux conclusions des membres du Conseil d'administration selon lesquelles les dernières évolutions de la situation en Birmanie n'étaient pas suffisamment convaincantes pour procéder à la mise en oeuvre du plan d'action. En effet, elle a recommandé instamment à l'OIT de différer la signature du plan d'action jusqu'à ce que les perspectives pour la mise en oeuvre se soient suffisamment améliorées. Si la situation ne s'améliorait pas d'une manière significative et rapide, le Conseil d'administration serait obligé, lors de sa session de novembre, d'examiner les mesures de mise en oeuvre en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. Cela fait presque cinquante ans que la Birmanie s'était engagée à "supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes", comme prévu dans la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Les autorités birmanes doivent observer leurs obligations et faire cesser cette pratique intolérable. Les actions concrètes, montrant la volonté de mettre en oeuvre les trois recommandations de la commission d'enquête, constituent la seule voie par laquelle le plan pourrait se réaliser.
Le membre gouvernemental de l'Australie, s'exprimant aussi au nom du gouvernement du Canada, a déclaré que la position des deux pays sur le travail forcé en Birmanie avait été clairement exprimée, tant à l'OIT que dans leur soutien aux résolutions des Nations Unies sur la Birmanie. Ils ont reconnu le rôle joué par le chargé de liaison par intérim de l'OIT à Yangon, particulièrement ses efforts pour assister les autorités birmanes à appliquer la convention no 29 de l'OIT. Le Canada et l'Australie soutiennent fortement le plan d'action conjoint et sont profondément déçus par l'absence de progrès en Birmanie pour éliminer le travail forcé depuis la Conférence internationale du Travail de juin dernier. Il est temps pour la Birmanie de démontrer son engagement à éliminer le travail forcé en coopérant pleinement avec l'OIT afin de mettre en oeuvre le plan d'action. En principe, l'Australie et le Canada sont en faveur de la signature du plan d'action. Le Canada et l'Australie demeurent convaincus que des mesures urgentes sont requises pour aider les citoyens de la Birmanie, forcés à travailler ou menacés de travail forcé. La coopération du peuple birman avec l'OIT, en toute confiance et sans peur de représailles, constitue une composante fondamentale du plan d'action. Ils ont réclamé un engagement clair du gouvernement birman, à l'effet que des contacts avec l'OIT ne constituent pas un délit. Tant que cela ne sera pas effectivement le cas, ils seraient opposés, bien qu'avec réticence, à la signature et à la mise en oeuvre du plan d'action. Bien qu'il ne soit pas approprié pour cette commission de s'impliquer dans de larges débats politiques, elle devrait clairement signaler au gouvernement birman que les événements passés remettent en question ses intentions au sujet de la mise en oeuvre du plan d'action. L'Australie et le Canada ont signalé clairement, à plusieurs occasions, que tous les détenus politiques, incluant la secrétaire générale de la LND, Aung San Suu Kyi, devraient être libérés immédiatement et sans condition. Cela fait plus de douze mois que Aung San Suu Kyi est détenue en Birmanie où elle demeure assignée à résidence. Rien ne justifie sa détention continue et sa remise en liberté est nécessaire pour la démocratisation de la Birmanie, tel qu'indiqué dans la feuille de route. La Birmanie doit mettre en oeuvre la feuille de route pour la démocratie, et notamment rédiger une nouvelle Constitution. A cet effet, un débat public et de larges consultations doivent avoir lieu. La Convention nationale du 17 mai 2004 n'est pas crédible car elle ne répond pas à ces exigences. Il appartient au gouvernement birman de créer un climat de confiance encourageant les parties à participer à la Convention nationale.
Le membre travailleur de Malaisie a déclaré que depuis que ce cas est examiné aucun progrès n'a été constaté, et ce malgré les promesses du contraire répétées chaque année par le gouvernement du Myanmar. Il a suggéré que le représentant gouvernemental du Myanmar devrait voyager dans le pays afin de se rendre directement compte des faits et que la junte militaire devrait assister à la prochaine session de la commission. Les rapports indiquent que le travail forcé est pratiqué quotidiennement. A cet égard, des réfugiés, majoritairement musulmans, qui fuient ces pratiques de travail forcé se sont présentés à la frontière malaisienne. En ce qui concerne le paragraphe 28 de l'observation de la Commission d'experts sur l'application par le Myanmar de la convention (no 29), il existe des preuves du recrutement par l'armée de personnes âgées de moins de 18 ans. Concernant les questions relatives à la liberté syndicale, il a insisté pour que le gouvernement du Myanmar écoute son peuple et fasse en sorte que la liberté syndicale devienne réalité.
Un observateur représentant la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), s'exprimant avec l'autorisation du Bureau, a indiqué qu'il était le secrétaire général de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), organisation de travailleurs indépendante qui travaille clandestinement en Birmanie et a des bureaux et des structures de formation dans les pays voisins. La FTUB a reçu des informations concernant le travail forcé et autres violations des droits fondamentaux des travailleurs de la part de Shwe Man, Min Kyi et Aye Myint, qui sont détenus en Birmanie depuis juillet 2003, et dont les cas ont amplement été décrits dans la documentation mise à la disposition de cette commission. Ces informations n'ont absolument rien de subversif, révolutionnaire ou anti-étatique. Un dossier contenant des rapports qui lui ont été envoyés depuis 2001 par ses collègues emprisonnés sera mis à la disposition du BIT. Loin de constituer un motif justifiant la peine de mort, ou même une seule journée de prison, ces documents contiennent des preuves indiscutables de travail forcé, d'exploitation et d'extorsion par les autorités militaires birmanes.
Le rapport le plus récent sur le travail forcé, envoyé par la FTUB à la CISL il y a moins de trois semaines, couvre la période allant de septembre 2003 à avril 2004. Ce dernier contient des détails sur au moins 3 000 villageois forcés à construire des routes, livrer de la nourriture à l'armée, monter la garde, construire des casernes militaires, fournir du matériel de construction, creuser des canaux, fournir des bateaux, des camions, des boeufs et même des éléphants, labourer des champs pour l'armée ou donner de l'argent en échange du travail qu'ils ne peuvent pas accomplir. Dans la municipalité de Tan-tabin, en décembre dernier, le commandant Khin Soe a ordonné à 254 villageois de Baw-gali d'enlever la broussaille et les mines terrestres le long des routes. Dans la municipalité de Lashee, au sein de la division de Sagaing, plus de 900 foyers ont dû fournir des travailleurs pour construire une route du 18 au 24 avril 2004. Ils devaient broyer du gravier, abattre des arbres, enlever de lourdes roches et construire un pont. Le rapport de la FTUB est corroboré par 17 ordonnances de travail forcé, toutes identiques en contenu et en forme au millier d'ordonnances qui ont été fournies au BIT pendant des années et considérées comme authentiques par la commission d'experts. Elles ont été émises dans la division de Sagaing, la division de Pegu, dans l'Etat de Karen et dans plusieurs autres endroits. Elles contiennent les dates, les lieux, les numéros de bataillon, le nom et le rang des officiers de l'armée, ainsi que des descriptions des autorités civiles.
La poursuite du travail forcé dans l'Etat d'Arakan est confirmée par Forum Asie, une ONG de défense des droits de l'homme, basée à Bangkok, dont les rapports sur la Birmanie sont bien connus du BIT. Son dernier rapport, daté du 1er juin, donne des détails sur le travail forcé effectué dans le cadre d'un projet de construction de routes reliant Maungdaw du sud avec la municipalité de Rathedaung. L'armée a d'abord utilisé un bulldozer pour effectuer le travail, mais celui-ci s'est interrompu lorsque ce dernier a atteint une colline rocheuse dans les montagnes de Manyu. En mars 2004, des travailleurs provenant des villages de cette zone ont été forcés à continuer le projet. En mars et avril, deux d'entre eux sont morts touchés par des roches tombant des falaises. Cela démontre clairement non seulement que l'armée utilise encore le travail forcé à grande échelle, mais qu'elle le fait dans le cadre de projets majeurs d'infrastructures, contrairement aux assurances de la junte militaire à la communauté internationale. Il devrait être noté que le travail forcé a cessé dans cette zone en 2002 et 2003 puis a recommencé lorsqu'un bataillon de l'armée a, de nouveau, été déployé dans cette zone. En d'autres termes, le travail forcé est encore imposé selon la volonté de l'armée. Les autorités centrales ne semblent pas avoir la volonté, ou sont incapables, de contrôler efficacement les décisions des commandants locaux.
La FTUB, les travailleurs et le peuple de Birmanie sont reconnaissants envers le BIT pour ses efforts sur le terrain en vue d'éliminer le travail forcé. Ils sont encouragés par l'ouverture du bureau de Rangoon et estiment qu'au moins deux autres bureaux du BIT devraient être ouverts, un en Haute Birmanie et l'autre en Birmanie du Sud, afin de faciliter l'accès des résidents des zones rurales au BIT. Ils se sont toutefois dits fort préoccupés par le fait qu'au cours des dernières semaines plusieurs personnes voulant rapporter des cas de travail forcé au BIT ont été repoussées par les gardes de sécurité de l'hôtel de Rangoon où se situe le bureau du chargé de liaison par intérim. Il a souhaité que les assurances données par le gouvernement à l'effet que les contacts avec l'OIT ne constituent pas un crime soient annoncées publiquement. Ce message devrait être traduit dans les langues ethniques et diffusé par le biais des médias, tels que la radio et la télévision. De telles assurances devraient également être données aux travailleurs birmans qui souhaitent contacter les syndicats indépendants, y compris la FTUB. Ces exigences, ainsi que la remise en liberté immédiate et sans condition des détenus jugés pour haute trahison en novembre dernier, constituent les conditions minimales à la poursuite des activités du BIT dans le pays, telles que la mise en oeuvre du plan d'action. En l'absence de progrès véritables et tangibles, le BIT devrait appliquer les mesures prévues par la résolution adoptée en 2000 par la Conférence internationale du Travail en vertu de l'article 33 de la Constitution.
Le membre travailleur des Pays-Bas a déclaré qu'il entendait formuler deux remarques afin de revoir certaines questions qu'il avait soulevées l'an dernier lors de la séance spéciale sur le Myanmar. La première remarque concerne les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales en tant qu'instrument pouvant aider les gouvernements, les employeurs et les syndicats à contribuer à l'élimination du travail forcé. Au cours de la dernière année, cet instrument non contraignant, a perdu beaucoup de son potentiel à la suite d'une décision des Etats membres de l'OCDE d'en limiter le champ d'application aux investissements directs et aux cas exceptionnels - déterminés de manière ad hoc - relatifs au commerce lié aux investissements. Les gouvernements ont pris cette décision alors que des plaintes déposées aux Pays-Bas contre des compagnies poursuivant des activités économiques en Birmanie autres que des investissements directs, comme des agences de voyage, étaient en cours et avaient été jugées recevables par le Point de contact national. Plus tôt cette année, le gouvernement a avisé les agences de voyage qu'il estimait préférable qu'elles cessent d'organiser des voyages en Birmanie et qu'il prendrait certaines mesures à l'encontre de leurs clients si elles choisissaient d'ignorer cette politique gouvernementale de cesser leurs relations d'affaires avec la Birmanie ce qui, dans une certaine mesure, a donné satisfaction aux syndicats. Entre-temps, à la suite d'une campagne menée par des ONG et des syndicats, plusieurs agences de voyage ont mis un terme à leurs activités en Birmanie alors que d'autres les poursuivent. De plus, les efforts déployés par les syndicats ont porté leurs fruits dans un cas examiné dans le cadre des Principes directeurs de l'OCDE et relatif à la politique d'un investisseur néerlandais majeur - l'entreprise de dragage, de construction navale et d'ingénierie IHC CALAND - qui menait des activités en Birmanie conjointement avec Premier Oil Inc. et, depuis septembre de l'an dernier, avec son successeur au sein de l'exploitation conjointe, l'entreprise Petronas de Malaisie. Au terme de deux années de discussions, l'entreprise néerlandaise a décidé de modifier sa politique et s'est engagée à ne pas participer à des investissements futurs (tout en manifestant l'intention de demeurer liée par ses obligations contractuelles nées dans le cadre d'exploitations conjointes conclues précédemment). Les confédérations syndicales néerlandaises FNV et CNV ont interpellé également l'entreprise Petronas de Malaisie, la priant instamment de respecter les Principes directeurs et les règles sur le travail forcé de l'OCDE, ce que l'entreprise malaisienne s'est récemment engagée à faire.
La seconde remarque porte sur la résolution adoptée en l'an 2000 en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. L'an dernier, il a plaidé en faveur d'un nouveau cycle de rapports sur la mise en oeuvre de la résolution ce qui aurait donné un aperçu de la manière dont les mandants de l'OIT ont revu en pratique leurs relations avec la Birmanie. En réalité, la commission ne détient aucune information à cet égard puisque les premiers rapports ont été présentés quelques mois seulement après l'adoption de la résolution, et la période de temps couverte était si courte que nul ne pouvait s'attendre de manière réaliste à ce que les gouvernements, les employeurs et les syndicats aient déjà adapté leurs lignes de conduite à ce moment-là. Depuis, toutefois, la commission devrait être en mesure d'apprécier l'impact que la résolution a eu en pratique en examinant son respect et sa mise en oeuvre par ceux qui l'ont adoptée. L'orateur s'est demandé si les termes "réactiver la résolution" signifiaient qu'il y ait une entente tacite selon laquelle personne ne devrait la mettre en oeuvre et que l'OIT devrait demeurer silencieuse à ce sujet. Si tel était le cas, l'orateur a estimé décevant que, dans un domaine où l'OIT jouit d'une réputation solide et bien méritée, c'est-à-dire en ce qui concerne le contrôle minutieux de la mise en oeuvre de politiques, l'Organisation ait pu agir avec un tel manque de transparence et de manière si hésitante. Il a donc réitéré son ferme appui à un suivi de la résolution grâce à une procédure régulière de rapports ayant pour objet son application en pratique par les mandants tripartites de l'Organisation.
Le membre travailleur du Japon, intervenant au nom de la Confédération des syndicats japonais, RENGO, a indiqué que, malgré les promesses du gouvernement, le travail forcé restait largement répandu en Birmanie, comme l'a souligné la commission d'experts dans son rapport. Compte tenu des nombreux efforts déployés par l'OIT pour éliminer le travail forcé en Birmanie, il est à espérer que le gouvernement prendra les mesures nécessaires en vue de la mise en oeuvre du plan d'action conjoint dans les plus brefs délais. La résolution concernant le Myanmar, adoptée en 2000 en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, a appelé les gouvernements à revoir les relations qu'ils entretenaient avec le gouvernement de la Birmanie et demandé aux mandants que de telles relations ne puissent être mises à profit par ce gouvernement. L'orateur a considéré que cette résolution pourrait se révéler efficace dans la pratique si tous les Etats Membres se rassemblaient pour faire pression sur le gouvernement de la Birmanie, tout en reconnaissant la nécessité pour la communauté internationale d'apporter en même temps l'assistance nécessaire en vue de l'éradication du travail forcé. A cet égard, il est regrettable de constater que certains pays et multinationales soutiennent financièrement et politiquement le gouvernement de la Birmanie. Même si, parfois, l'investissement international peut ouvrir les sociétés et amener des changements démocratiques, tel n'est pas le cas en Birmanie. Par exemple, la loi nationale exige que l'investissement direct étranger (IDE) se fasse par l'intermédiaire de compagnies conjointes auxquelles participe le régime militaire de telle sorte que les frais et les profits résultant des investissements reviennent directement aux militaires. D'après le rapport annuel de la société économique de l'Union du Myanmar (Union of Myanmar Economic Holding) 1990-2002, qui appartient totalement au régime militaire birman, l'investissement direct étranger a augmenté significativement et les plus grands investisseurs en Birmanie sont des pays appartenant à l'ANASE tels que Singapour, la Thaïlande, la Malaisie et l'Indonésie. Le tiers de l'investissement direct étranger se fait dans les secteurs du pétrole et du gaz. Les pays qui ont le plus investi en Birmanie entre 1990 et 2002 sont Singapour, le Royaume-Uni, la Thaïlande, la Malaisie, la France et le Japon. Les compagnies les plus présentes dans les secteurs du pétrole et du gaz sont: 1) Daewoo Corporation de la Corée; 2) TotalFinaElf; 3) Uncoal des Etats-Unis; 4) Petroleum Inc. du Canada; 5) TGWorld Energy Ltd. du Canada. Plus important, l'investissement a rapidement augmenté après l'adoption de la résolution de l'OIT de 2000. Il ne fait aucun doute que ce type de soutien a aidé le régime militaire à survivre et à oppresser le peuple birman et a finalement conduit au maintien du travail forcé en Birmanie. En conclusion, l'orateur a instamment prié les représentants des gouvernements et des employeurs de ces pays d'arrêter de favoriser le régime militaire. Il s'agit en effet de la manière la plus rapide et efficace d'arrêter le travail forcé en Birmanie.
La membre travailleuse de l'Italie a fait observer que, malgré les promesses faites par le régime militaire birman au cours des dernières années, la situation concernant les violations massives de la convention ne s'améliore pas en réalité et qu'il est urgent d'évaluer la cohérence du gouvernement. Bien que certaines mesures aient été prises, celles-ci sont superficielles et ne s'attaquent pas au coeur du problème. Les cas de neuf personnes accusées de haute trahison dont la Cour suprême était saisie récemment confirment tristement cette évaluation de la situation. Alors que dans la foulée de la session de mars du Conseil d'administration, la Cour suprême a commué la condamnation à mort, toutes les personnes trouvées coupables de haute trahison pour avoir simplement contacté un syndicat sont néanmoins demeurées en prison. Elles devraient être libérées immédiatement et leurs sentences, incluant celle qualifiée par l'euphémisme de "travail rigoureux", devraient être annulées comme condition préalable à toute autre action. L'oratrice a observé que les points principaux identifiés par la commission d'enquête n'avaient pas été mis en oeuvre. A cet égard, la loi sur les villages et la loi sur les villes n'ont pas été amendées bien que l'ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire ont été adoptées et qu'elles pourraient constituer une base juridique suffisante pour éliminer le travail forcé à condition d'être rigoureusement appliquées. Des instructions concrètes de mettre un terme au travail forcé, tel que demandé depuis un certain nombre d'années par la commission d'experts, n'ont toujours pas été adoptées et rien ne justifie ce retard de la part du gouvernement. Le seul cas où des mesures ont été effectivement prises concerne la publicité donnée aux deux ordonnances, bien que l'efficacité de celle-ci ait été presque nulle. L'oratrice a souligné que le peuple aura le courage de résister au travail forcé lorsqu'il sera conscient que cela constitue un crime, et des mesures de publicité de grande envergure devraient viser la population, les autorités civiles et les militaires. Toutefois, aucune campagne d'information visant les militaires n'a encore été entreprise alors que le Comité d'application de la convention no 29 n'a pas encore atteint les autorités civiles dans tous les seize Etats et divisions et la plupart de la population birmane n'a jamais eu connaissance de ces ordonnances.
Elle a également souligné l'urgence fondamentale de transférer l'important budget alloué présentement à l'armée et à l'armement à l'élimination du travail forcé et la promotion de conditions sociales équitables. En ce qui concerne le mécanisme de contrôle, le dialogue entre le Comité d'application de la convention no 29 et le chargé de liaison de l'OIT devrait conduire à la réalisation de résultats tangibles, par exemple, en établissant à la suite de chaque réunion une liste des tâches entreprises et des personnes responsables de leur mise en oeuvre de façon à ce que le Conseil d'administration puisse mieux évaluer les progrès. De plus, elle a estimé que les méthodes d'enquête du Comité d'application n'étaient clairement pas adéquates et elle a exprimé sa vive préoccupation puisque toutes les allégations de travail forcé transmises par le chargé de liaison aux fins d'enquête ont été soit jugées sans fondement ou n'ont pas été suivies d'une enquête. Le gouvernement doit comprendre que l'Etat de droit requiert non seulement la création de dispositifs d'application mais également des garanties de procédures équitables, transparentes et effectives, ce qui est loin d'être le cas. En ce qui concerne la question du contrôle de la mise en oeuvre, bien que la commission d'enquête ait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les sanctions qui pourraient être imposées en vertu de l'article 374 du Code pénal en cas de recours au travail forcé soient rigoureusement appliquées, jusqu'à présent aucune sanction n'a été imposée et aucune plainte n'a été déposée, à l'exception des deux cas rapportés récemment par le chargé de liaison. Ceci ne signifie pas qu'il n'y a pas de travail forcé mais constitue plutôt une preuve du fait que les victimes n'ont pas confiance en ce mécanisme. L'oratrice a estimé toutefois que la présence du chargé de liaison compensait dans une certaine mesure ce défaut sérieux puisqu'il a rapporté avoir reçu des allégations détaillées de la part de victimes de travail forcé, ce qui était un signe encourageant. A cet égard, elle note que la nature provisoire de la fonction du chargé de liaison devrait être surmontée par la création, dans l'éventualité de l'absence du plan d'action conjoint, d'un bureau de liaison doté d'importantes ressources humaines et de moyens et dirigé de manière à séparer, d'une part, les relations politiques avec les autorités nationales et, d'autre part, le travail pratique effectué sur le terrain, les activités de suivi et les évaluations. Elle a conclu en suggérant que d'ici au mois de novembre les structures du bureau de liaison soient élargies sur le terrain, en commençant par Mandalay et la ville de Moulmein, au sud.
La membre gouvernementale de la Nouvelle-Zélande a rappelé que son gouvernement a prié de façon répétée le gouvernement du Myanmar d'instaurer les conditions qui permettraient d'éliminer la pratique odieuse du travail forcé dans le pays et a réaffirmé le soutien ferme de son gouvernement au plan d'action conjoint qui offre des perspectives pour l'avenir. L'an dernier, lors de la séance spéciale, cette commission a exprimé sa vive préoccupation concernant les obstacles existant au Myanmar à la mise en oeuvre du plan conjoint d'action. L'année dernière, le Conseil d'administration a fait écho à deux reprises à ces préoccupations en citant d'autres cas alarmants qui allaient à l'encontre des objectifs du plan d'action. Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande s'est réjouit de certaines mesures prises pour régler en partie certains problèmes particuliers, mais il est consterné devant les rares signes de progrès ou de volonté politique manifestés afin d'agir concrètement en créant les conditions permettant la mise en oeuvre du plan d'action conjoint. L'oratrice a souligné que son gouvernement demeurait profondément inquiet de la situation au Myanmar, incluant la détention continue de prisonniers politiques, les restrictions au droit à la liberté d'opinion et d'expression ainsi qu'à la liberté syndicale et que cette pratique déplorable se poursuivait depuis bien trop longtemps. En conclusion, elle a estimé qu'outre le plan d'action conjoint il existe encore plusieurs mesures concrètes que le gouvernement du Myanmar peut prendre afin de mettre un terme à ces pratiques et que la réalisation de progrès significatifs devrait constituer sa plus haute priorité.
Le membre gouvernemental de Sri Lanka s'est réjoui des efforts déployés par le gouvernement du Myanmar, en coopération avec l'OIT, en vue de l'élimination du travail forcé. Les autorités du Myanmar ont réexaminé les décisions de justice pour les commuer en peines plus légères, ceci en réponse aux déclarations et préoccupations exprimées par le Conseil d'administration. Il convient d'encourager le Myanmar et l'OIT à continuer à travailler ensemble en vue de résoudre cette question et de retirer les mesures prises par la Conférence internationale du Travail contre le Myanmar.
Le membre travailleur du Burundi a déclaré qu'il traiterait de deux variantes abjectes du travail forcé, tel qu'il est toujours pratiqué en Birmanie: le recrutement forcé d'enfants soldats et l'utilisation forcée de travailleurs comme détecteurs de mines. Deux exemples illustrent ces pratiques largement répandues. Premièrement, le 6 mai 2004, un jeune garçon de 16 ans appelé Wai Zim a été arrêté proche de son logis familial, dans le bourg de Hlaing Thaya. C'était un jeune déserteur du bataillon d'infanterie légère no 215. Il avait été recruté de force en décembre 2003, à l'âge de 13 ans, et son nom avait été changé par l'armée afin qu'il soit plus difficile à retrouver par ses parents. Son arrestation pour désertion, le mois passé, est doublement ironique. D'une part, le mandat d'arrêt indique qu'il doit être arrêté pour être officiellement démobilisé de l'armée. D'autre part, le mandat d'arrêt est signé par le lieutenant général Tayn Sayn, par ailleurs secrétaire du Comité gouvernemental pour la prévention de l'utilisation d'enfants soldats. Le jeune Way Zim serait ainsi l'un des 70 000 enfants soldats actuellement recrutés de force par l'armée birmane. Deuxièmement, l'utilisation de détecteurs humains de mines par l'armée birmane constitue une pratique largement connue de l'OIT et de cette commission. Elle demeure assurément très répandue aujourd'hui. Ainsi lors de l'offensive militaire contre les insurgés de l'Etat de Karen en octobre 2003, au moins 300 travailleurs ont été forcés de travailler comme porteurs et comme détecteurs humains de mines. Au moins trois d'entre eux sont morts déchiquetés par les mines sur lesquelles ils ont posé leurs pieds. En conclusion, il est à espérer que cette commission aura à coeur de condamner sévèrement ces pratiques abominables de l'armée birmane.
Le membre employeur de l'Inde a observé que le problème du Myanmar continue à être au coeur du débat malgré le temps qui s'est écoulé depuis le rapport de la commission d'enquête et le recours, pour la première fois dans l'histoire de l'OIT, de l'article 33 de sa Constitution. L'objectif de cette commission devrait être, non seulement de punir toute partie responsable, mais aussi de s'assurer que l'action de l'OIT est effective et produit des résultats définitifs. L'orateur a donc fait certaines suggestions afin d'améliorer l'efficacité de l'OIT à cet égard. Premièrement, la mise en oeuvre du plan d'action conjoint ne doit pas dépendre du respect préalable de certaines conditions. Cela engendrerait un cercle vicieux, la situation ne pouvant précisément pas s'améliorer parce que le plan d'action conjoint n'aurait pas été mis en oeuvre. Deuxièmement, les programmes de coopération technique devraient être multipliés afin de sensibiliser le pays, particulièrement grâce à des programmes d'éducation à grande échelle. Troisièmement, la surveillance et le contrôle de la situation devraient se poursuivre et cette commission ne devrait pas tenir une séance spéciale dédiée à ce cas chaque année mais plutôt tous les deux ou trois ans après que l'OIT ait mené des activités dans le pays et que la situation se soit considérablement améliorée.
Le membre gouvernemental de l'Inde a déclaré que sa délégation a soigneusement noté les informations fournies par le Bureau, en particulier celles relatives aux événements qui ont eu lieu à partir du moment où la question de l'observation par le Myanmar de la convention no 29 a été examinée par le Conseil d'administration, en mars de cette année. Des changements positifs avaient alors été notés ainsi que la volonté du gouvernement du Myanmar de coopérer. Le membre gouvernemental a considéré que l'élaboration du plan d'action conjoint, en mai de l'année dernière, a constitué un pas important. Celle-ci a marqué le commencement du processus de coopération entre l'OIT et les autorités du Myanmar. Il a recommandé instamment que les deux parties aillent de l'avant dans la mise en oeuvre de ce plan d'action. Il a noté avec satisfaction que les deux parties délibèrent sur les démarches nécessaires pour cette mise en oeuvre, en particulier sur la possibilité du chargé de liaison de voyager dans différentes zones, selon ses souhaits, sans restrictions ni escorte pendant la période du 10 au 15 mai et de rencontrer librement un grand nombre de personnes. De tels progrès doivent être vus d'une manière positive par la commission car ils incitent l'OIT et le gouvernement du Myanmar à améliorer la situation. Le gouvernement de l'Inde considère qu'une assistance adéquate visant des changements nécessaires, sans liaison avec le processus politique interne dans le pays, doit être fournie au Myanmar. Il convient d'éviter les démarches qui pourraient faire dérailler ce processus.
Le membre gouvernemental du Japon a souligné l'importance que le gouvernement du Japon attachait à une élimination rapide et effective du travail forcé au Myanmar. Ceci est réalisable si le gouvernement prend les mesures appropriées en accord avec les recommandations de la commission d'enquête. Il y a lieu d'espérer que de solides progrès seront réalisés à cette fin par le biais du dialogue et de la coopération entre l'OIT et le Myanmar. La clé de la mise en oeuvre du plan d'action conjoint se trouve dans la promotion de l'initiation des activités du Facilitateur et des projets pilotes. Cela permettrait d'accroître la confiance entre l'OIT et le gouvernement et d'encourager le Myanmar à prendre de nouvelles mesures positives. L'orateur a exprimé l'espoir que des progrès seraient réalisés à cet égard.
Le membre gouvernemental de la Chine a déclaré qu'il avait attentivement écouté les diverses opinions exprimées au cours de la discussion et a exprimé l'espoir qu'elles seront toutes reflétées dans les procès-verbaux. Il a observé que le Myanmar avait fait des efforts afin d'améliorer l'application de la convention, et a exprimé l'espoir que le dialogue et la coopération entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT faciliteraient la mise en oeuvre rapide du plan d'action conjoint.
Le membre gouvernemental du Bangladesh a affirmé que le travail forcé, où qu'il ait lieu et sous quelque forme que ce soit, devrait être éradiqué et qu'aucun effort ne devrait être épargné dans la poursuite de cet objectif. Il exprime sa reconnaissance au Directeur général de l'OIT pour la coopération constante entre l'OIT et le Myanmar. Il a également exprimé sa reconnaissance pour le travail effectué par le bureau de liaison de l'OIT. La mise en oeuvre du plan d'action conjoint est d'une importance cruciale et les deux parties doivent être instamment priées de faire des efforts sincères à cette fin. A cet égard, l'orateur a appelé le gouvernement du Myanmar de faire preuve de la plus grande coopération possible avec l'OIT et a invité le Bureau à demeurer engagé de manière constructive avec le gouvernement du Myanmar en vue d'un prompt règlement de ce cas.
Le membre gouvernemental du Pakistan a remercié le représentant du Myanmar pour les informations qu'il a données sur les mesures prises afin de régler la question du travail forcé dans son pays. Il a noté, en particulier, que, pour la première fois dans le pays, les tribunaux avaient révisé et commué des décisions judiciaires en réponse aux vues et préoccupations exprimées par une organisation internationale. Ainsi, comme cela avait été promis au cours de la dernière session du Conseil d'administration, la Cour d'appel a révisé les cas de neuf personnes accusées dans son jugement du 12 mai 2004. Le membre gouvernemental a salué ce progrès et considéré qu'il devrait être apprécié. En outre, il a salué le fait qu'il avait été permis au chargé de liaison de l'OIT de voyager dans le pays et d'avoir accès aux accusés. Il a demandé à ce qu'une assistance technique soit fournie au gouvernement du Myanmar en réponse à ce progrès.
Le représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré qu'il répondrait brièvement aux points soulevés durant la discussion. En ce qui concerne les questions soulevées par quelques membres au sujet de la Convention nationale, il a expliqué que le Myanmar est un pays en transition, qui s'efforce d'instituer un Etat moderne, développé et démocratique. Dans cette optique, le Premier ministre, le Général Khin Nyunt, a rendu publique, le 30 août 2003, une feuille de route en sept points qui a été bien reçue par les pays de la région et au-delà. Lors du neuvième sommet de l'ANASE et du septième sommet de l'ANASE + 3 qui s'est tenue à Bali en octobre 2003, la feuille de route a été accueillie comme une approche pragmatique et un programme important. La première étape de la feuille de route, c'est-à-dire la nouvelle convocation de la Convention nationale, a été mise en oeuvre. La Convention nationale est présentement en session. Le 20 mai 2004, la Convention nationale a procédé à des clarifications et conduit des délibérations au sujet des principes fondateurs du secteur social, y compris les droits des travailleurs. Les délibérations ont aussi porté sur le principe fondamental de la formation d'organisations de travailleurs, une question dont cette commission sera saisie à un stade ultérieur.
En ce qui concerne les questions relatives à la procédure criminelle et aux procédures judiciaires visant trois personnes dont les condamnations pour haute trahison étaient liées à l'OIT, le Myanmar dispose d'un système judiciaire très complet et élaboré ainsi que d'un code de procédures criminelles. Le Code pénal du Myanmar, le Code de procédures criminelles du Myanmar, la loi sur la preuve et le Code de procédure civile du Myanmar ont été rédigés sous l'empire colonial. Enquêtes, saisies, collectes de preuve et procédures judiciaires, notamment d'appel, sont conduites en conformité avec les lois précitées. Sur un total de neuf personnes condamnées pour haute trahison dans ce cas, la Cour a jugé que cinq d'entre eux avaient été impliqués dans la commission d'actes criminels et quatre avaient aidé les criminels. Leur droit à un second appel a d'ailleurs été expliqué par l'orateur lors de sa première intervention.
En ce qui concerne l'amendement de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, le gouvernement envisage les divers moyens de modifier certaines de leurs dispositions et il a consulté certaines parties à ce sujet. Le gouvernement a promulgué l'ordonnance no 1/99 modifiée par "l'ordonnance complétant l'ordonnance no 1/99" qui ont force de loi et qui, comme l'a reconnu la commission d'experts, pourraient constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention no 29. Cela démontre que le gouvernement a pris les mesures nécessaires afin d'établir une base juridique complète pour l'élimination du travail forcé. En ce qui concerne les commentaires sur le Code pénal, pour la première fois des procédures judiciaires ont été engagées sur la base de l'article 374 du Code pénal et les mesures nécessaires seront prises contre les personnes trouvées coupables d'avoir violé la loi. Le représentant gouvernemental a dénoncé l'abus par M. Maung Maung du forum de la Commission de l'application des normes et a rappelé que la veille il a adressé une lettre à cet effet à la Présidente.
En ce qui concerne les commentaires formulés par certains Membres selon lesquels les progrès des mesures de mise en oeuvre et la coopération avec l'OIT étaient plutôt lents, il a répété que, selon lui, les dispositions prises par les autorités du Myanmar, particulièrement au cours des derniers mois, ont été à tout le moins rapides, adéquates et transparentes. Le gouvernement fait tout son possible afin de faire avancer le processus de coopération avec l'OIT dans sa démarche de mise en oeuvre des dispositions de la convention no 29. En ce qui concerne l'application du plan d'action conjoint, les autorités du Myanmar sont en avance sur sa signature officielle et son entrée en vigueur parce qu'elles ont déjà amorcé la mise en oeuvre de certaines dispositions. Toutefois, compte tenu de la nature délicate et sensible des questions et de contraintes, le gouvernement se devait d'adopter une approche étape par étape. Cette approche judicieuse et prudente ne signifie pas que l'exécution se fera nécessairement lentement mais plutôt que les progrès doivent se réaliser étape par étape et systématiquement. En conclusion, l'orateur a observé que le processus de dialogue et de coopération entre le Myanmar et l'OIT a très bien fonctionné jusqu'à maintenant et il a assuré la commission que le gouvernement poursuivra ce processus de dialogue et de coopération.
Les membres employeurs ont noté qu'au cours des quatre dernières années la commission a eu une discussion sereine sur un sujet qui pouvait susciter des inquiétudes puisqu'il concerne l'importante question des droits de l'homme. Ils ont observé que le gouvernement n'a jamais nié l'existence du travail forcé dans le pays et a promis d'entreprendre des démarches au cours de nombreuses discussions à ce sujet. Cependant, la mise en oeuvre effective de ces promesses dépend du gouvernement. Dans la discussion de cette année, les membres employeurs ont noté des progrès mais aussi des reculs inquiétants. Par exemple, la déclaration du représentant gouvernemental à l'effet que l'ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire ont force de loi peut signifier qu'il n'est pas nécessaire d'amender les lois sur les villages et les villes. Une telle affirmation est douteuse puisque ces ordonnances contredisent d'autres lois plus anciennes permettant et encourageant même le travail forcé. Ces ordonnances devraient être abrogées afin de clarifier la législation à ce sujet. La Conférence a décidé que la commission devait examiner ce cas chaque année en vertu de la résolution adoptée en 2000 qui lie la commission. Concernant la conduite des autres gouvernements, les membres employeurs ont observé que les sanctions adoptées il y a seize ans n'ont pas eu de résultats, et les effets néfastes qu'ils auraient pu avoir s'étaient répercutés sur le peuple du Myanmar. Il semble que les gouvernements n'ont pas de plan clair concernant ce qui doit être fait à ce sujet. Les membres employeurs ont donc considéré que le BIT doit continuer seul, en l'absence de partenaires stratégiques. Ils ont souligné que le BIT a accompli des résultats remarquables dans ce cas mais que beaucoup reste à accomplir. Le plan d'action constitue un grand accomplissement et son application est nécessaire. Les membres employeurs ont exprimé l'espoir que les autorités du Myanmar réalisent que l'abolition du travail forcé est bénéfique pour tous et en particulier pour le pays et son peuple.
Les membres travailleurs ont tenu à souligner qu'ils n'acceptaient pas les critiques formulées par le représentant gouvernemental au sujet de l'intervention de M. Maung Maung. Ils ont déclaré que les débats qui avaient eu lieu ont confirmé, voire renforcé, leurs constatations initiales sur la gravité de la situation et le non-respect persistant du gouvernement des recommandations de la commission d'enquête et de la commission d'experts. La gravité des pratiques de travail forcé imposées à la population, y compris en matière de construction d'infrastructures et d'utilisation d'enfants soldats et de civils comme détecteurs de mines, est profondément touchante et préoccupante. Les recommandations de la commission d'enquête doivent être enfin respectées. Le gouvernement de la Birmanie doit revoir les lois incriminées; préciser ce qu'il entend par "travaux forcés" et diffuser cette précision auprès des autorités civiles et militaires et auprès de la population; prévoir les lignes budgétaires nécessaires pour que les travaux soient exécutés autrement qu'en recourant au travail forcé. En outre, le Comité d'application de la convention no 29, mis en place par le gouvernement, doit rendre compte de la manière dont il examine les plaintes qui lui sont présentées. Le chargé de liaison devrait pouvoir suivre le déroulement de ces examens, soumettre des cas aux tribunaux et proposer des solutions - compétences initialement attribuées au Facilitateur prévu dans le plan d'action élaboré l'année dernière. Or la mise en oeuvre de ce plan est tributaire des événements politiques et judiciaires. Dans ces conditions, les membres travailleurs ont exigé du gouvernement une déclaration officielle affirmant, d'une part, que les contacts avec l'OIT ou la possession d'informations provenant de l'OIT ne constituent pas des actes criminels et, d'autre part, que les contacts avec des tiers sur des questions qui intéressent l'OIT ne sont pas passibles de sanctions - déclaration qui devra être publiée et diffusée par tous les moyens appropriés. Ils ont également exigé un jugement en bonne et due forme de la Cour suprême statuant sur le sort des neuf condamnés et, avant tout, la libération immédiate des travailleurs condamnés pour avoir eu des contacts avec l'OIT et avec les organisations syndicales. Le gouvernement devrait également clarifier la notion de "relégation à vie".
En conclusion, afin de créer un climat politique propice à la mise en oeuvre du plan d'action conjoint, le gouvernement doit impérativement libérer Mme Aung San Suu Kyi, rouvrir les bureaux de la Ligue nationale pour la démocratie et abroger les restrictions imposées aux participants de la Convention nationale. Si le gouvernement ne donne pas suite à ces demandes avant novembre, les membres travailleurs demanderont au Conseil d'administration de renforcer l'appel qui avait été fait aux Etats Membres sur la base de l'article 33 de la Constitution de l'OIT.
Documents D.5, D.5 (Add.) et D.5 (Add.2)
Bref résumé des faits nouveaux survenus depuis juin 2003
Faits nouveaux intervenus depuis la 289e session du Conseil d'administration (mars 2004)
Annexes
1. Document GB.288/5
2. Document GB.288/5/1
3. Document GB.289/8
4. Documents GB.289/8/1 et GB.289/8/2
Après avoir pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental, la commission a noté avec une profonde préoccupation l'observation de la commission d'experts qui a examiné les mesures adoptées par le gouvernement pour donner effet aux recommandations de la commission d'enquête. Dans son observation, la commission d'experts a noté que les trois recommandations principales de la commission d'enquête n'avaient toujours pas été mises en oeuvre. Malgré les assurances réitérées du gouvernement sur ses bonnes intentions, les mesures prises jusqu'à présent ne se sont pas traduites par des progrès sensibles dans la pratique, et le travail forcé continue à être imposé dans de nombreuses régions du pays. Aucune personne responsable d'imposition de travail forcé n'a fait l'objet de poursuites ni de condamnation en vertu des dispositions pertinentes du Code pénal. Compte tenu de la lenteur des progrès, la commission d'experts a exprimé l'espoir que le processus de dialogue et de coopération qui s'est instauré entre l'OIT et le gouvernement pourrait offrir une chance réelle de parvenir plus rapidement à des résultats tangibles, en particulier à travers la mise en oeuvre du plan d'action.
A cet égard, la commission s'est déclarée gravement préoccupée par le fait que trois personnes aient été condamnées pour haute trahison pour des motifs incluant des contacts avec l'OIT. En outre, la commission s'est déclarée profondément préoccupée par le fait que, malgré les assurances données antérieurement par le gouvernement selon lesquelles les contacts avec l'OIT ne pouvaient être considérés comme un acte illégal au Myanmar, la Cour suprême n'avait pas apporté de clarification sur ce point crucial, même si elle avait commué la peine de mort. La commission a également exprimé sa préoccupation face aux questions concernant la liberté syndicale soulevées par les conclusions de la Cour suprême. Comme le Conseil d'administration, la commission a souscrit aux recommandations formulées par le facilitateur informel au sujet des motifs de condamnation de ces trois personnes et de la nécessité de les libérer. La commission a convenu qu'il ne s'agissait manifestement pas d'une situation dans laquelle le plan d'action conjoint pouvait être mis en oeuvre de manière crédible.
La commission a également pris note des informations fournies par le chargé de liaison ad intérim sur ses activités. Elle a noté avec intérêt la coopération continue apportée par le gouvernement au chargé de liaison et la liberté de mouvement dont il avait bénéficié. La commission a considéré que le nombre toujours plus important de plaintes déposées par les particuliers auprès du chargé de liaison démontrait l'utilité de la présence de l'OIT. Cependant, la commission s'est vue dans l'obligation de constater avec préoccupation que la réponse apportée à ces allégations individuelles n'était pas appropriée, que jusqu'à maintenant aucune de ces allégations n'avait été vérifiée par les autorités et qu'aucune personne n'avait été jugée pour imposition illégale de travail forcé. Ces circonstances laissent planer de sérieux doutes sur la volonté des autorités d'adopter les mesures nécessaires pour garantir l'élimination du travail forcé dans la pratique.
A cet égard, il a été fait référence au fait que certaines formes de travail forcé, que la commission d'enquête avait mentionnées, telles que la réalisation de projets d'infrastructure recourant au travail forcé, le recrutement forcé de mineurs et même l'utilisation de personnes pour détecter les mines, demeuraient largement répandues. La diffusion d'informations dans les langues pertinentes laissait encore beaucoup à désirer.
La commission a pris dûment note des assurances données par le représentant gouvernemental selon lesquelles un nouvel examen par la Cour suprême pourrait avoir lieu, ce qui pourrait notamment clarifier la question de la légalité des contacts avec l'OIT. La commission a considéré que le gouvernement disposait maintenant d'une dernière opportunité pour mettre en pratique ces assurances et donner effet aux recommandations du facilitateur informel. La commission a considéré qu'à sa prochaine session, le Conseil d'administration devrait se préparer à tirer les conclusions appropriées, y compris à réactiver et réexaminer les mesures et les actions entreprises, notamment en ce qui concerne les investissements directs étrangers, prévues par la résolution de la Conférence internationale du Travail de 2000, à moins qu'entre-temps la situation ait manifestement évolué.
Enfin, la commission a rappelé que le gouvernement devrait présenter un rapport détaillé, aux fins d'examen par la commission d'experts à sa prochaine session, sur toutes les mesures prises pour assurer le respect de la convention en droit et en pratique.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a félicité le Directeur général du BIT pour sa direction énergique et efficace et pour sa contribution substantielle à la promotion de la dignité, du travail décent et du bien-être des travailleurs. Il a déclaré que l'officier de liaison du BIT avait mené de longues et difficiles négociations conduisant à la conclusion d'un plan d'action conjoint pour l'élimination des pratiques de travail forcé au Myanmar. Ses activités officielles jusqu'à la fin du mois de mai 2003 comprenaient, entre autres, une réunion avec le général Khin Nyunt, premier secrétaire du Conseil d'Etat pour la paix et le développement, le 29 mai 2003, au cours de laquelle a été soulignée l'importance attachée par le Myanmar à la coopération avec l'OIT. Il a noté que la Commission de l'application des normes avait devant elle un rapport complet et positif sur la coopération qui se poursuit entre le Myanmar et l'OIT. L'accord entre le gouvernement et l'OIT sur le Plan d'action collectif pour l'élimination du travail forcé dans le pays est une avancée, un point de repère. C'est l'aboutissement d'un long processus de négociations continues et intensives.
Comme il a été dit dans le passé, compte tenu de la nature délicate et sensible de la question, une approche progressive doit être adoptée dans les efforts pour éliminer le travail forcé dans le pays. Le gouvernement s'est engagé dans l'élimination du travail forcé et, à cette fin, prend de bonne foi les mesures nécessaires. Lorsque l'on compare la situation de 1999 à celle d'aujourd'hui, personne ne peut nier le fait que des progrès substantiels ont été accomplis. Il existe au Myanmar des mesures législatives, administratives et réglementaires. L'ordonnance no 1/99 et l'ordonnance du 27 octobre 2000 complétant l'ordonnance no 1/99 fournissent une base légale pour l'application de la convention no 29. Ces ordonnances disposent clairement que l'imposition du travail forcé est illégale et condamnent de telles pratiques. Elles posent aussi clairement les conséquences légales de leur violation. Ces ordonnances ont force de loi. De plus, des instructions nécessaires ont été données à tous les ministères, y compris au ministère de la Défense, et à tous les départements et conseils pour la paix et le développement à différents niveaux. Les mesures administratives et réglementaires prises par le gouvernement comprennent l'établissement d'une Commission de travail sur les affaires liées à l'OIT, de niveau ministériel, présidée par le ministre du Travail, et la Commission pour l'application de la convention no 29 de l'OIT, présidée par le vice-ministre des Affaires intérieures. Ces autorités fournissent l'orientation nécessaire, et contrôlent l'application de la convention no 29. Sept équipes d'observation sur le terrain sont opérationnelles, et effectuent de nombreuses visites dans toutes les régions du pays pour contrôler l'application des mesures et conditions qui prévalent. La coopération étroite entre le gouvernement et l'OIT remonte à l'an 2000. Quatre missions de coopération technique ont eu lieu en mai et octobre 2000, mai 2001 et février 2002. De plus, une équipe de haut niveau (EHN), dirigée par Sir Ninian Stephen, l'ancien gouverneur général de l'Australie, a visité ce pays en septembre-octobre 2001. Les visites de ces équipes ont produit des résultats tangibles. Le point culminant a été la visite de l'EHN de l'OIT, qui a été un succès significatif. Dans son rapport détaillé, l'EHN a fait un certain nombre de recommandations et de suggestions pour réaliser des avancées importantes, notamment la présence de l'OIT sous une forme quelconque, un plan d'action pour l'élimination des pratiques de travail forcé dans le pays et un mécanisme pour recevoir les plaintes conformément à la procédure fixée. Les avancées qui sont actuellement entreprises en coopération avec l'OIT découlent des recommandations et suggestions de l'EHN. Un officier de liaison de l'OIT, en la personne de Mme Hong-Trang Perret-Nguyen, est entré en fonctions en octobre 2002 et travaille pleinement et efficacement. Un accord a maintenant été conclu avec l'OIT sur le plan d'action conjoint couvrant toute une série d'actions en vue de l'élimination des pratiques de travail forcé, comme cela a été recommandé par l'EHN. Le plan détermine, entre autres, le rôle du facilitateur dans la réception des plaintes conformément à la procédure fixée, une campagne d'information publique, des programmes de sensibilisation, la traduction des ordonnances dans les langues ethniques, la désignation d'une région pour le projet pilote du district de Myeik, le projet de construction pilote dans le district de Myeik, l'extension du transport par les animaux, et les fonctions des équipes d'observation sur le terrain. Le plan d'action collectif s'étend sur une période de 18 mois à compter du 1er juillet 2003.
Par le passé, le gouvernement a fait l'objet de critiques en vertu desquelles il faisait "trop peu, trop tard" et que les mesures qu'il adoptait n'étaient que procédurales et non substantielles. L'adoption du plan d'action conjoint réfute ces critiques. Des consultations informelles avec l'OIT sur le plan ont commencé en mars 2003 à l'issue de la 286e session du Conseil d'administration et ont été conclues dans le cadre de l'agenda fixé par celui-ci. Personne ne peut nier que ce plan est substantiel et non procédural. Ses conclusions marquent une nouvelle phase de coopération avec l'OIT. Son application effective est en effet essentielle et aucun effort ne sera ménagé à cette fin. Le gouvernement demeure engagé et déterminé à poursuivre sa coopération avec l'OIT pour résoudre ce problème.
L'orateur a exprimé l'espoir que la bonne volonté et l'engagement du Myanmar soient pris en compte par la Conférence et la présente commission et qu'à la lumière des progrès substantiels et des avancées majeures introduites par les autorités, cette commission répondrait positivement de façon à ce que les résultats soient constructifs, tournés vers le futur et positifs.
Les membres travailleurs ont indiqué que le travail forcé sévit au Myanmar depuis de nombreuses années. Jusqu'à tout récemment, et notamment grâce aux efforts de l'OIT, il y avait un espoir de voir s'améliorer la situation. Toutefois, depuis une semaine, nous assistons à une détérioration des progrès accomplis. Pour la seconde fois, la commission tient une session spéciale sur le cas du Myanmar et les événements récents sont une raison de plus pour que cette session ait lieu.
Les membres travailleurs ont rappelé que les discussions de la commission s'appuient en premier lieu sur le rapport de la commission d'experts, complété par l'information contenue dans les documents D.5 et D.6. Les violations de la convention no 29 sont graves, généralisées, systématiques et structurées dans la législation comme dans la pratique. Le gouvernement avait été prié de mettre en œuvre les trois recommandations de la commission d'enquête, à savoir: 1) modifier la législation de façon à la rendre conforme à la convention no 29 et ainsi abroger toute législation qui rend le travail forcé possible; 2) mettre fin, dans la pratique, à l'imposition du travail forcé; 3) appliquer les sanctions prévues au Code pénal à l'encontre des personnes reconnues coupables d'avoir imposé du travail forcé. Or les conclusions de la commission d'experts sont claires.
S'agissant de la modification de la législation, les lois en cause n'ont pas encore été modifiées, et ce malgré les promesses réitérées par le gouvernement depuis plus de trente ans. A ce sujet, le gouvernement indique que ces lois sont anciennes et intouchables. Mais, en 2001 et 2002, il a adopté et réformé d'autres lois. L'ordonnance no 1/99 pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique, à condition toutefois d'être traduit dans les actes des autorités civiles et militaires. Concernant l'imposition, dans la pratique, du travail forcé, les membres travailleurs constatent que les mesures prises par le gouvernement du Myanmar n'ont pas permis d'y mettre un terme, ce dont témoignent de nombreux documents. A ce sujet, la commission d'experts indique dans son rapport que les instructions du gouvernement aux autorités civiles et militaires ne sont pas assez spécifiques et concrètes, et que la publicité entourant les ordonnances n'est pas assez généralisée pour mettre fin à l'imposition du travail forcé. De plus, même si le gouvernement a créé un comité de surveillance de l'application de la législation et envoyé sur le terrain une équipe d'observation ayant pour fonction, d'une part, d'examiner dans quelle mesure la population est au courant des ordonnances et, d'autre part, de vérifier si des plaintes ont été déposées, aucune information n'a été donnée quant aux progrès réalisés jusqu'à maintenant. S'agissant des sanctions pénales, la commission d'experts relève que le gouvernement n'a pas pris de mesures pour que les responsables de l'imposition du travail forcé soient poursuivis. Ainsi, malgré les promesses du gouvernement, aucune des trois recommandations que la commission d'enquête avait formulées n'ont été suivies d'effet à ce jour.
Certes, suite aux démarches du Bureau, des changements ont pu être constatés. Mais ces changements se situent principalement, sinon uniquement, au niveau de la procédure. Sur les instances de la commission, le BIT a envoyé en septembre 2001 une Mission de haut niveau au Myanmar et dans les régions frontalières, pour se rendre compte de la situation sur place. Sur la base du rapport de cette mission, le Conseil d'administration a adopté des conclusions tendant notamment à ce que le Directeur général "poursuive le dialogue en vue de mettre au point avec les autorités les modalités et paramètres d'une représentation continue et efficace de l'OIT au Myanmar". Aux termes d'un protocole d'entente entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar, une chargée de liaison a été nommée en mai 2002.
Les documents D.5 et D.6 font état des derniers développements au Myanmar. Un plan d'action conjoint du gouvernement du Myanmar et de l'OIT pour l'élimination des pratiques de travail forcé au Myanmar a été arrêté juste à temps pour le début de la Conférence mais trop tard au regard des récents événements dramatiques. Face à ces événements, les membres travailleurs sont sceptiques au sujet de la viabilité des nouveaux accords et initiatives pris entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT, dans la mesure où l'attitude du gouvernement s'avère trompeuse. En effet, malgré l'indication du gouvernement selon laquelle l'élimination du travail forcé serait sa principale préoccupation, un fait demeure: rien ne change vraiment. Avant les événements de la semaine dernière, on pouvait être optimiste et parler de progrès. Les événements en cours, à savoir la mise au secret de la direction de la Ligue nationale pour la démocratie et en particulier de Mme Daw Aung San Suu Kyi, font toutefois régresser la situation, dans la mesure où ils ressemblent aux événements de 1995-1997. Bien que des progrès politiques aient été réalisés ces deux dernières années, ces événements jettent un doute sur l'accomplissement du plan d'action conjoint.
Les membres travailleurs ont indiqué qu'ils mettent beaucoup d'espoir dans la visite de M. Razali, envoyé spécial de M. Kofi Annan au Myanmar. Le Conseil d'administration a clairement recommandé au gouvernement du Myanmar de prendre des mesures pour éliminer les pratiques de travail forcé, veiller à ce que les personnes imposant le travail forcé soient traduites en justice et modifier la procédure juridique de façon à donner effet aux mesures prises. Ces trois recommandations doivent être réunies. Les membres travailleurs ont déclaré qu'aussi longtemps que ces recommandations ne sont pas réunies, il n'y a pas lieu de revoir les mesures qui ont été prévues en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT.
Les membres travailleurs ont aussi rappelé que, selon le rapport de la commission d'enquête de 1998, l'impunité avec laquelle les fonctionnaires du gouvernement, et en particulier les membres des forces armées, traitent la population civile comme une réserve illimitée de travailleurs forcés non rémunérés et de serviteurs à leur disposition, fait partie d'un système politique fondé sur l'utilisation de la force et de l'intimidation pour dénier au peuple du Myanmar la démocratie et le respect du droit, conditions indispensables à l'élimination du travail forcé au Myanmar. Ils ont aussi exprimé leur préoccupation devant les développements extrêmement choquants de la semaine précédente, qui ont affecté la capacité du BIT de poursuivre sa coopération avec le gouvernement du Myanmar. Contrairement à ce que le régime mentionne, le flot croissant d'informations en provenance du pays indique que des mesures de répression massives sont en cours contre la Ligue nationale pour la démocratie (LND), entraînant des massacres, des blessures et des disparitions qui semblent avoir lieu non seulement dans la région où Aung San Suu Kyi a été enlevée mais également dans beaucoup d'autres régions du pays. Il y a des informations fiables selon lesquelles Aung San Suu Kyi a été blessée et le fait que les autorités n'aient pas autorisé le CICR ni même son médecin personnel à la voir, ce qui est profondément choquant. Les discussions sur le travail forcé au cours des dernières années, à la fois au sein de cette commission et au sein du Conseil d'administration, ont été menées dans le contexte d'un climat de réconciliation politique et ce n'est pas un hasard si la levée de l'assignation à résidence imposée à Aung San Suu Kyi et le début des discussions de rapprochement entre le régime et la LND ont coïncidé avec l'adoption de la résolution prise en vertu de l'article 33. Cependant, les événements de la semaine dernière font planer un voile sombre sur les discussions. Si le gouvernement veut renforcer sa crédibilité, il doit informer la commission sur: le moment où Aung San Suu Kyi sera libérée et en mesure de recevoir des soins médicaux; le sort de dizaines de militants disparus de la LND; le moment où ces mesures répressives prendront fin; et la possibilité d'une reprise du processus de réconciliation politique. Jusqu'à ce que ces événements cessent, les membres travailleurs voient difficilement comment la coopération entre le BIT et le régime pourrait aller de l'avant.
En ce qui concerne la tentative de parvenir à un accord entre le gouvernement et le BIT sur un plan d'action comprenant un accord formel sur un facilitateur et un projet pilote, il n'est pas surprenant, compte tenu de la longue histoire de ce cas, qu'à peine une semaine avant le début de cette Conférence un accord ait été conclu sur un plan d'action. La commission a pu observer ce scénario à de nombreuses reprises déjà. A peine quelques jours avant une réunion du Conseil d'administration ou le début de la Conférence, le gouvernement parvient à un accord avec le BIT, après des mois de manœuvres dilatoires et de subterfuges, et présente ensuite cet accord comme une avancée importante. Comme l'a fait observer la commission d'experts, il n'y a aucune preuve que ces accords aient conduit à une diminution perceptible du travail forcé. La Fédération des syndicats du Myanmar vient juste de publier un rapport faisant état de 71 nouveaux cas de travail forcé. Des ONG internationales réputées telles que EarthRights International et Forum Asia ont également publié des rapports récemment. Qui plus est, l'officier de liaison elle-même a informé le Conseil d'administration que le travail forcé demeure pratique courante dans de nombreuses régions du pays, en particulier dans les zones ethniques et dans les régions à forte présence militaire. Bien que l'officier de liaison ait rapporté des allégations de travail forcé au gouvernement, ce dernier n'a confirmé aucune de ces allégations. Les membres travailleurs n'ont pas oublié le cas des sept villageois de l'Etat de Shan qui auraient été assassinés pour s'être plaints du travail forcé, un cas qui a été discuté à de nombreuses reprises au Conseil d'administration et qui reste ouvert. La proposition du Conseil d'administration en faveur d'une enquête indépendante a été rejetée catégoriquement par le gouvernement. Le fait est que dans les villages, dans les villes, et dans de vastes régions du pays, le travail forcé est non seulement pratiqué mais est une manière de vivre pour des milliers de gens.
Le dernier accord provisoire sur un plan d'action comprend sept programmes de travail, tels que la diffusion d'informations, les programmes de sensibilisation, le projet pilote pour la construction de routes locales, l'amélioration de la publicité du mécanisme de plainte et bien sûr le rôle du facilitateur, qui traitent de différentes questions en rapport avec l'élimination des pratiques de travail forcé dans le pays. Les membres travailleurs considèrent que, bien que le projet pilote soit vu comme l'expression concrète de la volonté politique du gouvernement d'entreprendre activement l'élimination du travail forcé, il ne s'agit que d'un point de départ. Cet engagement de la part du gouvernement d'éliminer le travail forcé en pratique doit s'appliquer à l'ensemble du pays et pas seulement à la région concernée par le projet pilote. Le gouvernement a l'obligation d'appliquer ces programmes, notamment la diffusion d'informations, les programmes de sensibilisation et l'amélioration de la publicité du mécanisme de plainte, dans toutes les régions et pas seulement dans la région concernée par le projet pilote. De même, il est clair que le rôle du facilitateur consistant à améliorer l'accès à la justice des victimes présumées du travail forcé s'étend au-delà de la région concernée par le projet pilote. Il est important de souligner qu'un objectif fondamental de ces activités est d'augmenter la confiance de la population, en général et des victimes du travail forcé en particulier, dans la possibilité d'une réparation juridique sans récrimination. Jusqu'à maintenant, il n'y a eu aucune confiance dans la possibilité d'un recours étant donné que cette pratique s'est poursuivie sans discontinuer, que les militaires sont les principaux coupables et que la plupart du temps ce sont les victimes qui ont eu le courage de porter plainte qui ont été punies plutôt que les personnes responsables. Le fait qu'il n'y ait eu pratiquement aucune poursuite n'est pas passé inaperçu. Le facilitateur demandera en particulier aux victimes de lui faire confiance pour qu'il puisse les aider à obtenir réparation. La campagne de sensibilisation prévue constitue une tentative délibérée de susciter l'espoir que quelque chose peut et sera fait. Comment tout ceci pourra-t-il se faire dans le climat actuel de peur et d'intimidation. Le facilitateur peut-il garantir que d'aucune manière ceux qui viendraient à lui ne seront inquiétés après les développements déplorables de la semaine dernière? L'OIT peut-elle susciter des espoirs compte tenu de ce qui vient de se produire? Les membres travailleurs considèrent que la réponse à ces questions ne peut être qu'un non retentissant. Ils ne peuvent envisager aucune manière d'appliquer le plan d'action sans le retour à une certaine normalité et à un processus de réconciliation politique renouvelé et renforcé.
Tout en considérant le plan d'action avec scepticisme, les membres travailleurs en ont pris note avec intérêt. Ils ont déclaré attendre le jour où le processus d'application pourra commencer et où ils pourront contribuer au contrôle étroit de ce processus. Cependant, ils ont estimé que celui-ci ne pourra pas démarrer dans un tel climat de répression. En ce qui concerne les mesures à prendre, un projet de loi intitulé "Loi sur la liberté et la démocratie au Myanmar" vient d'être introduit devant le Congrès américain sur une base bipartite pour interdire toute exportation du Myanmar à destination des Etats-Unis. Le projet de loi se base spécifiquement sur l'appel du Directeur général consécutif à la résolution prise en vertu de l'article 33 pour que tous les Etats Membres et constituants revoient leurs relations avec le régime afin de s'assurer qu'ils ne contribuent pas directement ou indirectement au travail forcé. Beaucoup d'autres pays envisagent des actions similaires. Au vu de l'absence de progrès dans l'élimination actuelle du travail forcé après tant d'années et des développements récents à l'intérieur du pays, il est temps pour le Directeur général de renouveler et de renforcer cet appel. Les membres travailleurs ont exprimé l'espoir que cette fois-ci les gouvernements répondront plus sérieusement.
Le paragraphe final du rapport de la commission d'enquête rappelle que le rapport met en lumière une longue saga de misères et de souffrances inouïes, d'oppression et d'exploitation de vastes catégories de la population du Myanmar perpétrées par le gouvernement, les membres des forces armées et d'autres fonctionnaires publics; une histoire de violations grossières des droits de l'homme dont ont été victimes les habitants du Myanmar depuis 1988. Le rapport exprime l'espoir que dans un proche avenir la situation actuelle changera, laissant la place à un ordre nouveau où toute personne au Myanmar aura la possibilité de vivre dans la dignité et de développer pleinement son potentiel en toute liberté et que personne n'y sera asservi par d'autres. Ce changement ne pourra se produire qu'à travers la restauration de la démocratie. Les événements qui se déroulent actuellement dans le pays semblent montrer que le peuple du Myanmar est aujourd'hui aussi éloigné de cet objectif sinon davantage que lorsque ce rapport a été écrit il y a cinq ans.
Les membres employeurs ont fait observer que la question du recours au travail forcé au Myanmar revêt un caractère exceptionnel, puisque depuis des décennies cette pratique est une réalité qui sévit dans tous les domaines de la vie courante et qui trouve même ses fondements dans la législation nationale et dans des traditions ancestrales. Des efforts soutenus ont été déployés depuis une dizaine d'années pour parvenir à des mesures efficaces, propres à mettre un terme à cette grave violation de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, convention fondamentale la plus largement ratifiée. Jusqu'à présent, tous les efforts se sont heurtés à de fortes résistances. Comme il ressort du volume d'informations dont la commission est saisie, au fil des ans, des petits pas en avant ont été accomplis mais aussi de nombreux reculs se sont produits. Pendant longtemps, la position du gouvernement a été caractérisée par le silence, puisqu'il restait sourd aux dénonciations et contestait la réalité du travail forcé dans ce pays. Une coopération formelle s'est fait jour récemment. Les activités entreprises par le BIT de juillet 1998 à mai 2002 ont fait apparaître à quel point le travail forcé a des racines juridiques et pratiques profondément ancrées. Elles ont débouché sur une période de coopération difficile mais aussi intense, même si cette coopération se heurtait sans cesse à des atermoiements et ne procédait que sous la pression.
Pour en venir aux événements récents, et en particulier au plan conjoint d'action conclu entre le gouvernement et le BIT, il convient de noter que cet accord a été seulement paraphé et non pas signé. Il est le résultat des efforts intenses déployés par le facilitateur du BIT. Il a été approuvé par le Conseil d'administration à sa session de novembre 2002 et mars 2003, le mérite en revenant pour une bonne part à la direction du BIT. Cet accord porte sur les mêmes exigences fondamentales que celles qui sont formulées depuis un certain temps. A savoir, premièrement, que la loi sur les villages et la loi sur les villes, fondement légal du travail forcé, soient abolies et, deuxièmement, que de nouvelles dispositions abolissant formellement le travail forcé soient adoptées, publiées dans toutes les langues nécessaires et diffusées de manière à en assurer la publicité. Les décrets virtuellement secrets qui ont été pris jusqu'à présent se sont révélés inadéquats. Les mesures contenues dans le plan d'action doivent être mises en œuvre à partir du mois de juillet, notamment dans une région pilote. En fournissant son assistance technique, le BIT fournit une aide précieuse au gouvernement. Cependant, il reste impératif que des dispositions légales non ambiguës interdisant le travail forcé dans l'ensemble du pays soient prises. Les infractions à de telles dispositions doivent être assorties de sanctions et ces sanctions doivent être effectives et appliquées de manière impartiale, surtout si l'on considère que ceux qui les commettent sont souvent des personnes occupant un rang élevé dans l'administration ou dans l'armée. Les victimes de travail forcé doivent être en mesure d'agir en justice sans craindre des représailles. Sur ce plan, le rôle du facilitateur sera particulièrement décisif. Pour ce qui est du projet pilote, les membres employeurs s'interrogent sur les moyens financiers que le gouvernement prévoit pour remplacer le travail forcé par du travail rémunéré régulier.
Pour conclure, les membres employeurs ont fait valoir que ce cas conserve, comme par le passé, une image ambiguë. D'une part, le gouvernement affiche une coopération formelle avec l'OIT sur la base de certains accords. De ce point de vue, la situation se présente favorablement. Mais, d'un autre côté, le bilan réel de la question plus importante que constitue les progrès, sur un plan pratique, dans le sens de l'abolition du travail forcé, n'est pas satisfaisant. Au Myanmar, le travail forcé n'est pas ancré uniquement dans la législation. Ce n'est pas non plus une pratique ayant échappé à tout contrôle mais au contraire une composante de tout un système d'Etat. C'est un phénomène systémique dont toute la population est victime. L'accord conclu récemment offre une lueur d'espoir mais il n'est pour l'heure qu'un texte sur le papier, qui n'a pas encore trouvé son expression dans la réalité. Les membres employeurs sont profondément préoccupés par les événements récents. Ils estiment qu'il y a eu suffisamment de discussions et qu'il est essentiel d'obtenir des résultats concrets le plus vite possible, pour le bien de la population du Myanmar.
Les membres employeurs ont ajouté qu'ils sont conscients de la gravité de la situation qui justifie la présente session. Le cas du Myanmar concernant les violations de la convention no 29 sur le travail forcé est l'un des plus graves de l'histoire de l'OIT. Les membres employeurs adhèrent aux principes du droit du travail qui comportent notamment l'abolition du travail forcé. Il n'y a pas de coexistence productive qui ne se base pas sur le respect de ce droit. Les Etats doivent contribuer à la recherche de solutions, et l'application des instruments de l'OIT peut aider à parvenir à cette fin. Les membres employeurs n'ont jamais douté de l'application de l'article 33 de la Constitution, et ce même s'il n'avait jamais été utilisé dans l'histoire de l'OIT. Depuis le début, ils ont suivi les discussions qui ont eu lieu au sein du Conseil d'administration et à la Conférence internationale du Travail, et ont pris connaissance des avancées réalisées, manifestant leurs doutes et observations. Les membres employeurs se réjouissent de ces avancées qui constituent une ouverture vers le dialogue. Ces avancées ne sont évidemment pas la solution mais sont simplement des étapes vers celle-ci. La solution demeure dans l'application de la convention, en ayant comme finalité l'abolition effective du travail forcé. Il doit exister une conviction, et pas seulement une présomption, que le travail forcé est complètement éliminé. Ce constat doit être le résultat d'une consultation tripartite. De plus, il ne doit y avoir aucun doute que les victimes du travail forcé peuvent avoir accès à la justice. Le facilitateur aura d'ailleurs un rôle important à jouer à ce sujet. Les membres employeurs manifestent leur reconnaissance à la chargée de liaison et se félicitent de la nomination du facilitateur, ainsi que de la signature du plan d'action. Ces mesures doivent immédiatement être mises en œuvre sur le terrain, dans la mesure où des violations aux droits de l'homme sont perpétrées. Entre la présente réunion de la Conférence internationale du Travail et la prochaine session du Conseil d'administration de novembre, les membres employeurs espèrent recevoir des informations suffisantes qui serviront à mettre de côté les doutes. Il est important de distinguer entre l'instrument qui sert d'arme à la constatation des violations et la réalité. Les événements des derniers jours ont un impact négatif sur la réalité du pays, tout comme sur l'abolition du travail forcé. L'orateur a manifesté l'espoir que le plan d'action se mettra en marche de manière effective et qu'il permettra au gouvernement de changer d'attitude.
Le membre gouvernemental du Viet Nam, s'exprimant au nom des Etats Membres de l'OIT qui sont aussi membres de l'ANASE, a manifesté son appréciation au Directeur général pour ses efforts visant à promouvoir la coopération avec le gouvernement. Il s'est réjouit de la volonté politique et de l'engagement de la part du gouvernement du Myanmar à respecter la convention no 29, ainsi que sa détermination constante à éradiquer le travail forcé dans son pays. Il s'est également réjouit du plan d'action conjoint pour l'élimination des pratiques du travail forcé au Myanmar conclu entre le gouvernement et l'OIT. Cet accord important apportera une aide considérable au gouvernement dans ses efforts visant à résoudre ce problème. Le plan d'action conjoint et les efforts du chargé de liaison de l'OIT au Myanmar permettront de renforcer la coopération entre l'OIT et le Myanmar. Il est donc extrêmement important que la discussion sur ce sujet au sein de la Commission de l'application des normes soit menée de manière constructive et en vue de l'avenir. L'orateur a exprimé l'espoir qu'une mise en application efficace du plan d'action apporte une amélioration des conditions au Myanmar et mènera à une situation qui permettra à la Conférence de lever, sur recommandation du Conseil d'administration, l'application des mesures prises contre le Myanmar en vertu de l'article 33 de la Constitution. Il a finalement encouragé le gouvernement et l'OIT à continuer leur coopération jusqu'à ce que le problème soit complètement résolu.
Le membre gouvernemental de la Grèce s'est exprimé au nom des pays membres de l'Union européenne, alors que les pays candidats (Chypre, République tchèque, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Slovaquie, Slovénie), les Etats associés (Bulgarie, Roumanie et Turquie), l'Islande et la Norvège se sont ralliés à sa déclaration. Il a souligné que l'instauration de véritables procédures démocratiques en Birmanie/Myanmar est essentielle pour que la population puisse exprimer sa volonté et pour son bien-être, et que l'Union européenne supporte pleinement la population dans son effort visant à introduire la justice et l'avancement social dans le pays, et à s'attaquer à l'impunité, aux violations des droits de l'homme et aux pratiques du travail forcé. Il a également exprimé son soutien au travail de l'OIT et à celui de son chargé de liaison dans leurs efforts visant à mettre en application le plan d'action, qui constitue un pas en avant, mais que sa mise en application constituera le problème essentiel. Il a déclaré son soutien à la désignation de M. Léon de Riedmatten en qualité de facilitateur, autorisé à agir librement en vue d'aider les victimes de travail forcé à obtenir réparation. Il sera important de mettre en place un bureau local dans la région pilote afin de réviser et de recueillir les plaintes. Si la mise en application du plan d'action au cours des dix-huit premiers mois s'avère être un succès, celui-ci devra être étendu au-delà de la région pilote.
Cependant, l'Union européenne a déploré les décisions récemment prises par les autorités de la Birmanie/Myanmar, et en particulier la détention de Mme Daw Aung San Suu Kyi et des officiels de la LND, la fermeture des bureaux de la LND et la suspension des activités des universités à travers le pays. Elle a lancé un appel aux autorités afin que soit immédiatement libérés Mme Suu Kyi, son député U Tin Oo ainsi que les officiels de son parti, et que soit permise l'ouverture des universités et des bureaux de la LND. L'Union européenne a également exprimé le souhait que des démarches constructives soient entreprises avec le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies, M. Razali. Les événements qui se sont produits ont soulevé une grave inquiétude au sein de l'Union européenne et ont sérieusement sapé l'engagement qui avait été pris par les autorités. Cet engagement consistait à entreprendre un processus de réconciliation nationale et à créer un environnement convenable, afin de faciliter la mise en application du plan d'action. Ces événements témoignent du manque de volonté politique de la part du gouvernement à vouloir rétablir la démocratie dans le pays. Une action crédible pour contrer le travail forcé s'avérera très difficile en l'absence d'un engagement total de la part des autorités de poursuivre une réforme économique, sociale et politique. L'Union européenne est vivement préoccupée par le fait que les récents développements politiques soient le reflet du déclin de l'intérêt porté par les autorités à la poursuite de la réconciliation nationale et au rétablissement de la démocratie dans le pays, comme le démontrent la stagnation du processus de réforme politique et l'absence persistante de politiques crédibles qui visent à s'attaquer à la situation économique qui se détériore. La question de la réconciliation nationale revêtira une importance cruciale si le recours au travail forcé est éradiqué. Le refus persistant du gouvernement d'entreprendre un véritable dialogue démocratique avec Daw Aung San Suu Kyi soulève également une grande inquiétude. De plus, la structure et la taille des forces armées, ainsi que leur utilisation pour des raisons de sécurité interne, contribuent à l'incidence générale du travail forcé et au signalement d'actes de violence associés. Il est également clair que les forces armées offrent la plus grande résistance à la coopération avec l'OIT.
La situation devra faire l'objet d'une révision étroite et continue, et l'Union européenne répondra rapidement et de façon proportionnelle aux développements sur le terrain, qu'ils soient positifs ou négatifs. Compte tenu du peu de progrès enregistrés à ce jour, il ne serait inapproprié pour aucune considération de lever les mesures imposées en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. Avant qu'une telle décision ne soit prise, la Conférence et le Conseil d'administration devront avoir entre les mains des preuves substantielles de ce que les autorités ont rempli les conditions fixées par la commission d'enquête et que des actions durables ont été entreprises afin d'éliminer le travail forcé. Dans l'intervalle, ce problème requiert une surveillance étroite de la part de l'OIT.
La membre gouvernementale de la Suisse a déclaré que son gouvernement fait sienne la déclaration du délégué gouvernemental grec qui a parlé au nom des Etats membres de l'Union européenne.
Le membre gouvernemental de la Jamahiriya arabe libyenne a déclaré que suite à l'adoption, en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, de la résolution relative au recours au travail forcé au Myanmar, maints efforts ont été déployés pour permettre au gouvernement du Myanmar d'appliquer la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Ainsi, plusieurs réunions ont été organisées, des missions ont été envoyées dans le pays, un chargé de liaison a été nommé, des mesures administratives et d'arrêtés spéciaux qui, après avoir été transmis dans les ministères, ont fait l'objet de publications pour permettre à la population de prendre connaissance de l'interdiction du travail forcé et pour déposer leurs réclamations ont été adoptés. Un plan d'action a été adopté et sa mise en œuvre requiert des efforts concertés. Tant que le Myanmar fera preuve de la volonté politique qu'il a souvent réaffirmée, le BIT doit s'engager à poursuivre sa coopération technique pour atteindre l'objectif premier qui est d'éliminer le travail forcé et de réduire les souffrances de la population du Myanmar. Afin de prouver la volonté commune des parties de mettre un terme au travail forcé dans le pays, il serait souhaitable de suspendre l'application de la résolution sur le Myanmar adoptée en vertu de l'article 33 de la Constitution.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a rappelé que la commission d'experts, après avoir passé en revue toutes les informations disponibles au terme de l'année écoulée, avait à nouveau conclu qu'aucune des trois recommandations formulées par la commission d'enquête en 1998 n'avait été mise en œuvre. La loi sur les villages et la loi sur les villes n'ont pas été modifiées. Les ordonnances administratives concernant le travail forcé n'ont pas bénéficié d'une publicité suffisante et leur diffusion n'a pas mis un frein aux réquisitions de main-d'œuvre et aux brutalités dont elles sont souvent assorties, en particulier de la part des militaires. Enfin, rien ne permet d'établir que des poursuites aient été engagées, en application de la législation, à l'encontre de personnes ayant imposé un travail forcé.
Contrastant avec un bilan aussi décourageant, le plan d'action se présente comme une initiative nouvelle et heureuse. Le gouvernement reconnaît que le travail forcé est une ignominie et déclare qu'il poursuivra ses efforts sans relâche pour éradiquer cette pratique. Les divers programmes de travail, s'ils sont mis en œuvre de bonne foi, devraient contribuer à une prise de conscience des réalités dans l'administration, chez les militaires et dans la population au sens large, et à une meilleure connaissance des voies de recours ouvertes. L'accord relatif au rôle du facilitateur et à la région pilote sont des éléments qui viennent compléter utilement ce qui manquait au plan d'action lors de son examen par le Conseil d'administration, en mars. Un mérite particulier revient au Bureau, notamment à la chargée de liaison et à son assistant, pour avoir négocié avec succès ces accords, et aussi à M. de Riedmatten, pour avoir bien voulu servir de facilitateur.
La mise en œuvre du plan d'action revêt une importance particulière. Au cours des prochains dix-huit mois, il faudra se montrer attentif pour déceler les signes d'un engagement sincère du gouvernement de faire respecter strictement l'interdiction du travail forcé dans la région pilote et dans le pays dans son ensemble. Le plan, selon ses diverses composantes, notamment en ce qui concerne le rôle du facilitateur, doit être mis en œuvre avec la coopération pleine et entière du gouvernement et sans délai. S'il est vrai que, comme indiqué dans les conclusions de ce plan, l'élimination du travail forcé ne peut pas se faire du jour au lendemain, il n'en reste pas moins que des progrès mesurables devraient pouvoir être constatés dans les dix-huit mois. La réalité de l'engagement du gouvernement se mesurera à sa bonne foi dans la mise en œuvre de ce plan.
Dans cette perspective, il est impossible d'ignorer la violence des événements qui se sont produits au Myanmar le 30 mai 2003. Il a été donné de constater aux membres de l'ambassade des Etats-Unis à Rangoon qui se sont rendus sur les lieux qu'une attaque préméditée, fomentée par les autorités, avait été lancée contre Aung San Suu Kyi, l'une des plus courageuses militantes des droits de l'homme que l'humanité ait connue. La version donnée par les autorités n'est pas crédible et les initiatives qu'elles ont prises jusqu'à présent portent à croire qu'elles ont décidé de mettre un terme aux efforts de réconciliation nationale. Le gouvernement ne s'est pas montré à la hauteur des engagements qu'il a pris par le passé, et l'on ne peut qu'espérer qu'il démontrera par des mesures concrètes de mise en œuvre du plan d'action sa capacité et sa volonté de remplir les engagements qu'il avait pris à propos du travail forcé.
Le membre gouvernemental de l'Australie a déclaré que la position du gouvernement australien sur le travail forcé en Birmanie était connue, non seulement dans le contexte de l'OIT, mais également par rapport à son soutien aux résolutions des Nations Unies sur la Birmanie. Il a indiqué que son gouvernement avait porté une attention particulière aux observations faites par la commission d'experts, au rapport additionnel fourni à la Commission de la Conférence par le Bureau, ainsi qu'aux déclarations faites par le représentant gouvernemental quant au respect de ses obligations découlant de la convention no 29.
Dans son rapport, la commission d'experts fait référence au manque de développements concrets depuis plus de huit années, y compris ceux relatifs à la rédaction d'une nouvelle constitution et la refonte des vieilles lois du travail. A plusieurs occasions, l'Australie a exprimé son désappointement quant au taux de progrès peu élevé concernant le problème du travail forcé. Dans ce contexte, l'entente portant sur le plan d'action constitue un développement méritant un support international. Ce plan d'action contient plusieurs éléments positifs. En particulier, l'Australie offrira son support quant à la nomination du facilitateur, à la création d'équipes d'observation sur le terrain, ainsi qu'à la mise sur pied d'un projet pilote. Ces éléments constituent des avancées dans la bonne direction. Le gouvernement devra étendre l'application de ses activités au niveau national.
Il n'est pas approprié pour la présente commission d'être impliquée dans un débat politique plus large. Il est néanmoins approprié pour les membres de la commission de faire clairement savoir au gouvernement que les récents événements ont soulevé un doute sérieux sur ses intentions de mettre en œuvre le plan d'action. Bien qu'il ait été bien accueilli, le plan d'action constitue une avancée modeste, comparé au travail qui doit encore être effectué dans le pays afin de mettre fin aux abus des droits de l'homme. La mise au secret de Aung San Suu Kyi, du Secrétaire général de la National League for Democracy, ainsi que celle des partisans, a été placée au premier plan la semaine dernière. Le gouvernement australien a demandé que soit immédiatement libérée Daw Aung San Suu Kyi et a exprimé son inquiétude relativement à son bien-être. Aucune justification ne peut justifier sa mise au secret et le gouvernement doit la libérer sans délai. Il a exprimé sa gratitude au Bureau, et en particulier au chargé de liaison ainsi qu'à son assistant pour leurs efforts continus visant à aider l'élimination du travail forcé en Birmanie.
La membre gouvernementale de la Nouvelle-Zélande a souligné que son gouvernement n'a cessé de demander au gouvernement du Myanmar de déployer des efforts soutenus et effectifs pour s'acquitter de ses obligations découlant de la convention no 29. Son gouvernement se félicite de l'existence d'un plan d'action crédible, lequel inclut un accord sur la désignation d'un facilitateur indépendant et d'une région pilote.
Toutefois, des motifs de préoccupation subsistent devant l'absence de signe tangible tendant à l'élimination du travail forcé au Myanmar. L'adoption d'un plan d'action marque une étape très positive dans la bonne direction, l'essentiel demeurant toutefois l'obtention de résultats sensibles pour ceux qui souffrent ou sont menacés de travail forcé. Seule une réelle volonté politique peut mettre un terme à ces odieuses pratiques. Le gouvernement doit accorder plus d'importance à cette question. La mise en œuvre du plan d'action se fera de manière progressive, et le gouvernement devra dépasser les objectifs fixés, de façon à tenir compte de la durée des négociations et des nombreux antécédents de violations des droits de l'homme à l'origine de cet accord.
Tout en soulignant que son pays considère depuis longtemps que des organismes techniques tels que l'OIT ne doivent pas se lancer dans un débat politique qui les éloignerait de leur mandat de départ, on ne peut que constater que l'élimination du travail forcé au Myanmar est peu probable, alors que la liberté d'expression est supprimée et que règne un climat de peur. Dans ce contexte, elle réitère sa condamnation de la nouvelle arrestation de Aung San Suu Kyi et de ses partisans, et demande sa libération immédiate.
Le membre gouvernemental de Sri Lanka s'est félicité des efforts déployés par le gouvernement du Myanmar en coopération avec l'OIT, visant l'élimination du travail forcé. Il a exprimé sa confiance dans la volonté du Myanmar de respecter ses obligations au titre de la convention no 29. En outre, il estime que la signature du plan d'action entre le gouvernement et l'OIT à Yangon en mai dernier constitue une étape dans la réalisation de cet objectif. Les éléments concrets détaillés dans le plan d'action constituent une bonne base à cet effet. Le Myanmar et l'OIT doivent continuer à travailler de concert. La mise en œuvre effective de ce plan d'action permettra à l'avenir des discussions constructives à cet égard et, par la suite, aboutira à l'élimination des mesures prises par la Conférence contre le Myanmar.
Le membre gouvernemental de l'Inde a indiqué qu'il se réjouissait de voir cette question, qui attire l'attention de la Commission de la Conférence et du Conseil d'administration depuis quelque temps, sur la voie d'une résolution satisfaisante. A cet égard, la commission devrait exprimer sa reconnaissance pour l'accueil et la flexibilité manifestés par le gouvernement du Myanmar.
Il a rappelé qu'à l'occasion de la dernière session du Conseil d'administration, le Président avait indiqué les éléments complémentaires nécessaires pour répondre à l'inquiétude exprimée par certains Membres. C'est pour répondre à cette inquiétude qu'a été conclu l'accord daté du 27 mai 2003 entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT. Outre l'accord formel relatif au facilitateur, le plan d'action comprend un projet de construction de route dans une région pilote, des alternatives à l'utilisation du travail forcé, des informations et campagnes de sensibilisation à ce problème.
L'Inde a constamment défendu la voie d'un dialogue constructif entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar, lequel a porté ses fruits. Il s'est référé à des demandes précédentes ayant pour objet d'apporter au Myanmar l'aide nécessaire aux changements voulus, sans pour autant la faire dépendre d'un processus impliquant des réformes politiques et économiques.
L'Inde se fait un devoir de favoriser une approche non conflictuelle pour aborder les sujets qui relèvent de la compétence de l'OIT. La nomination d'une chargée de liaison de l'OIT l'année dernière, avec le plein appui et la collaboration du gouvernement, représente un pas important dans la bonne direction. Le plan d'action conjoint entre l'OIT et le Myanmar, dont la mise en œuvre s'étalera sur une période de dix-huit mois à partir du 1er juillet 2003, est logiquement la prochaine étape. L'OIT apporte son assistance technique et son soutien au Myanmar pour les projets identifiés dans le plan d'action. Ces mesures positives vont dans la bonne direction et impliquent un engagement de l'OIT et du gouvernement. Rien ne devrait être fait qui puisse mettre en danger cette évolution positive. La Commission de la Conférence devrait encourager l'OIT et le gouvernement à aller de l'avant dans cette direction. En conséquence, le plan d'action mérite un soutien complet.
Un observateur représentant la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), intervenant sur autorisation du Bureau, a déclaré que, en dépit des dénégations du régime militaire, le travail forcé a toujours cours au Myanmar car le régime n'a pas la volonté politique de changer d'attitude vis-à-vis de la population. Après tout le temps et tous les efforts que l'OIT a consacré à cette question, les autorités sont venues à bout de sa confiance et de celle de la communauté internationale, notamment par leur attitude vis-à-vis de Aung San Suu Kyi. Tout cela prouve que le régime militaire ne connaît que la force pour résoudre les problèmes, que ceux-ci soient financiers, politiques ou ethniques. Avant que la mission de l'OIT ne se rende dans le pays, et durant cette mission, un vaste plan a été mis en œuvre pour assurer que toute la population, y compris dans les zones rurales, nie l'existence de travail forcé. Cette manœuvre démontrait que les autorités étaient inquiètes des répercussions possibles de l'initiative de l'OIT. Par contre, elles n'ont pas manifesté les mêmes inquiétudes vis-à-vis des représentants de l'Union européenne, des Nations Unies ou de la Croix-Rouge, qui n'ont pas eu de contact avec la population et ne pouvaient être abordés. L'OIT, au contraire, était accessible, et ce n'est que l'initiative de cette Organisation qui peut avoir des répercussions sur le plan de l'éradication du travail forcé, des déplacements forcés et des violations des droits des travailleurs dans le pays. Dans le cadre du projet pilote, il conviendrait que des visites de contrôle soient menées par l'OIT dans chaque agglomération de manière à renforcer l'espoir de la population. Il est un fait que Aung San Suu Kyi est séquestrée et que les représentants des Nations Unies se sont vu refuser tout contact avec elle. Il conviendrait donc que l'OIT et ses Membres prennent une initiative puissante et concrète pour parvenir à une solution dans ce pays.
Le membre travailleur des Pays-Bas a rappelé que, peu de temps après l'adoption de la résolution sur le Myanmar par la Conférence en l'an 2000, le BIT a fait un premier effort pour contrôler son suivi par les constituants tripartites. A la fin de l'an 2000, le Bureau a demandé aux gouvernements et aux organisations d'employeurs et de travailleurs des Etats Membres d'indiquer ce qu'ils avaient fait pour appliquer la résolution et revoir leurs relations avec le Myanmar.
Les syndicats dans son pays ont accueilli ces mesures comme un appel au réveil et un encouragement à effectuer des changements. Ils ont fait bon usage du premier rapport pour faire pression sur le gouvernement des Pays-Bas de façon à ce qu'il change sa politique. De plus, cette action a été efficace et bien qu'en février 2001 le gouvernement ait déclaré au BIT que sa politique était neutre à cet égard, il avait changé sa politique trois mois plus tard en une politique visant de nouveau à décourager tous contacts avec le Myanmar. Toutefois, trois ans après l'adoption de la résolution par la Conférence, il est surprenant que le BIT n'ait fait aucun effort pour réitérer cette action. L'orateur a exprimé ses regrets devant ce manque d'activité et a demandé s'il y avait des projets pour un nouveau rapport et, si oui, quand il aurait lieu. Il a suggéré que, lorsque le Bureau préparera un nouveau cycle de rapport sur l'application de la résolution, il devra inclure des questions relatives non seulement aux activités des trois constituants, mais aussi aux activités tripartites au niveau national. Il a ajouté que le Bureau devra aussi encourager l'utilisation des instruments pertinents existants autres que ceux de l'OIT pour l'application de la résolution, dans un effort de sensibilisation parmi les gouvernements, le monde des affaires et les syndicats. Il a renvoyé en particulier au Pacte mondial des Nations Unies et aux Directives aux entreprises multinationales de l'OCDE. Ces dernières ont été utilisées dans son pays pour encourager les entreprises à apporter leur contribution à l'élimination du travail forcé en Birmanie, à la fois directement et en demandant à leurs partenaires commerciaux dans le pays d'accueil de respecter le paragraphe concernant le travail forcé contenu dans les Directives. Il a renvoyé aux plaintes déposées par les syndicats aux Pays-Bas, en vertu des Directives de l'OCDE aux entreprises multinationales, contre une agence de dragage et un certain nombre d'agences de voyages qui continuent d'opérer au Myanmar. Une autre plainte contre une entreprise importatrice de bois du Myanmar est en préparation. Conjointement avec la centrale syndicale autrichienne, les syndicats des Pays-Bas envisagent la possibilité de présenter une plainte, en vertu des Directives de l'OCDE aux entreprises multinationales, contre la compagnie aérienne autrichienne Lauda Air. Dans tous ces cas, les syndicats travaillent étroitement avec le Comité pour la Birmanie aux Pays-Bas, et les possibilités d'une action conjointe avec des syndicats dans d'autres pays sont explorées. L'orateur a ainsi appelé les gouvernements, les employeurs et les syndicats à revoir leurs relations commerciales avec le Myanmar.
La membre travailleuse de l'Italie a déploré le fait que Mme Aung San Suu Kyi a été blessée et arrêtée et que des mesures sévères ont été prises à travers tout le pays contre le mouvement démocratique, ce qui rend très difficile de croire en la bonne volonté du gouvernement quant à la mise en application du plan d'action. Le problème clé est malheureusement l'absence constatée d'une réelle volonté politique d'éliminer ce qui pourrait être appelé les piliers de la survie de la junte.
L'ambassadeur de la Birmanie a déclaré, lors du Conseil d'administration de novembre 2002, que son pays était en transition, qu'il s'efforçait de devenir moderne, pacifique, prospère et démocratique, et que cette transition devait s'effectuer de façon graduelle. A cette fin, le gouvernement devrait orienter son budget et sa politique macroéconomique vers le développement social de sa population et refuser ainsi le travail forcé et les comportements antidémocratiques.
Par conséquent, il est difficile de comprendre pourquoi, au lieu d'investir dans l'élimination du travail forcé et dans la promotion d'emplois décents, le gouvernement a doublé la taille de son armée depuis 1988 avec environ 470 667 soldats dont 77 000 sont des enfants âgés de moins de 18 ans recrutés par force et menacés d'aller en prison ou battus brutalement lorsqu'ils refusent de joindre l'armée ou s'ils tentent de s'échapper. Il faut garder à l'esprit que l'armée birmane possède maintenant l'une des plus grandes forces militaires du Sud-Est asiatique, et que 49,9 pour cent du budget de l'Etat est consacré à des dépenses militaires. Une grande quantité d'armes est importée de la Chine, de la Fédération de Russie et d'autres pays. Il est évident que le travail forcé est essentiel à la survie de l'armée et que le pays ne peut d'aucune façon se sortir du cercle vicieux, à moins qu'il n'y ait un engagement politique sérieux visant à renverser complètement la situation. Pour ces raisons, il est important que le plan d'action mette l'accent sur ce sujet de la plus haute importance que sont les forces militaires, et particulièrement sur les commandants régionaux, afin de les obliger à modifier leur comportement et leurs moyens de travail. Une autre façon importante d'éradiquer le travail forcé consiste à procéder à un changement radical dans la structure du budget national. La situation économique déjà difficile ne fait que s'aggraver, en raison de la militarisation de l'économie rurale. Le travail forcé, la politique de confiscation des terres, l'approvisionnement en riz pour l'exportation et pour l'approvisionnement des fonctionnaires à des prix subventionnés forcent les fermiers à vendre la majorité de leur récolte au gouvernement à un prix quatre à cinq fois moins élevé que celui du marché. Cette situation, en combinaison avec la politique orientée vers l'exportation en vue de rentrées de devises, explique la pénurie de riz et la détérioration des conditions de santé des fermiers.
Dans le but de développer l'Union of Myanmar Economic Holdings et sa division, la Myanmar Economic Corporation, qui sont en fait des moyens d'avoir recours à la pratique du travail forcé, le gouvernement fait la promotion d'agences de voyages et d'usines d'exportation vers l'Europe, les Etats-Unis et le Canada. Les entreprises conjointes ("joint ventures") sont devenues les principaux supports logistiques et économiques des organisations militaires birmanes. Depuis l'interdiction de la pleine propriété étrangère des compagnies, tous les investissements dans le pays se développent par le biais des entreprises conjointes ("joint ventures").
La résolution de l'OIT qui a mis en œuvre l'article 33 de la Constitution a donné naissance à d'importantes actions, telles que la Position commune de l'Union européenne. L'orateur a remercié les compagnies qui se sont retirées du pays, mais a déploré le fait que plusieurs autres possèdent toujours des investissements significatifs dans le pays. Selon l'Eurostat, depuis 1996, l'Union européenne a augmenté de plus de 500 pour cent ses importations de la Birmanie. Le Danemark est le premier sur la liste avec 3,75 pour cent par habitant, suivi par les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Belgique et la France.
D'autres mesures urgentes sont nécessaires afin de rendre efficace la résolution de l'OIT. Les banques de développements multilatéraux telles que ADB et les gouvernements qui financent de telles institutions, comme le gouvernement italien, doivent également être cohérents, et réviser leurs politiques et leurs ententes, en mettant fin à leur participation et à leur support technique et financier du pays par le biais de programmes tels que le Programme de coopération économique de Great Mekon Subregion. Il a également invité le Fonds mondial de lutte contre le VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme à retirer le projet de 17 millions de dollars approuvé lors du G8 à Gênes, directement en faveur du régime militaire, et regrette qu'un programme qui aurait été mis en application par des organisations démocratiques birmanes ait été refusé.
Les gouvernements européens et l'Union européenne doivent aller au-delà des mesures qui ont déjà été prises. L'Union européenne doit adopter des mesures économiques et imposer une interdiction sur les investissements et les échanges avec la Birmanie, puisque tous les liens commerciaux et économiques aideront le régime à recourir à la pratique du travail forcé. De plus, les gouvernements et l'Union européenne doivent mettre en application l'article XX de l'Entente du GATT sur les mesures relatives à la protection de la santé humaine et aux articles fabriqués dans les prisons. Selon la réplique formulée par l'OMC, à la demande de la CISL sur ce sujet, les gouvernements doivent prendre des mesures commerciales contre le gouvernement de la Birmanie sans craindre de représailles.
Le membre gouvernemental du Japon a souligné que son gouvernement a toujours cherché à trouver, par le biais du dialogue et de la coopération, une solution à la question du travail forcé au Myanmar. A cet égard, le gouvernement du Japon, en coopération avec la communauté internationale, souhaite continuer de coopérer avec les parties concernées dans le cadre d'une approche globale incluant les dimensions sociale, économique et politique. Evoquant le récent incident relatif à la détention de Aung San Suu Kyi et d'autres membres de la LND par le gouvernement, l'orateur a déclaré que le gouvernement du Japon juge cet incident profondément regrettable. Par ses contacts réguliers avec le gouvernement du Myanmar, le Japon a demandé avec persistance leur libération immédiate, des assurances quant à leur liberté politique et un changement rapide quant à la situation au Myanmar.
S'agissant de la question du travail forcé au Myanmar, l'orateur a exprimé son appréciation au Directeur général et au personnel de l'OIT pour leurs efforts dans le renforcement du dialogue et de la coopération avec le gouvernement du Myanmar. Il s'est également félicité du travail de la chargée de liaison depuis sa nomination à Yangon.
Il est de la plus grande importance pour le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour se conformer aux recommandations de la commission d'enquête. L'OIT et le gouvernement du Myanmar ont négocié le plan d'action pour l'élimination du travail forcé, conformément à l'avis du Conseil d'administration en novembre 2002. L'objectif principal de ce plan est de soutenir les autorités dans leurs efforts relatifs à l'élimination effective et rapide du travail forcé.
L'orateur s'est félicité de la conclusion d'un accord formel sur le facilitateur à Genève en mai 2003 et de ce que, sur les autres aspects du plan d'action, un accord a pu être atteint à Yangon fin mai 2003.
L'orateur a exprimé l'espoir que la mise en œuvre du plan d'action, tout d'abord dans les régions pilotes puis au niveau national, permettra au gouvernement de s'acquitter de ses obligations au titre de la convention no 29 en réalisant des progrès substantiels pour éradiquer le travail forcé dans le pays.
Il a encouragé le gouvernement à redoubler d'efforts et à démontrer sa volonté politique par la mise en œuvre progressive du plan d'action. L'OIT devrait présenter un rapport sur l'application du plan d'action à l'occasion du prochain Conseil d'administration en novembre 2003. Si ce rapport s'avérait positif, on peut envisager un renforcement de la coopération entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar dans d'autres domaines que celui de l'élimination du travail forcé.
Le membre travailleur du Sénégal a fait observer que la récurrence avec laquelle le cas de la Birmanie est présenté démontre que, malgré les quelques améliorations observées, le gouvernement birman refuse de donner effet aux recommandations qui lui sont faites. Ce refus du gouvernement de respecter ses engagements est la principale cause de l'inefficacité des procédures et de l'immunité dont bénéficient particulièrement les militaires. Aucune instruction spécifique et concrète n'est adressée aux autorités civiles et militaires. Le sens donné aux expressions birmanes, telles que "travail bénévole ou offert" par les autorités militaires est une manière de contourner l'ordonnance 01/99 prise par le ministre de l'Intérieur. Cette ordonnance, bien qu'ayant été promulguée, ne prescrit pas les types d'activité pour lesquels la réquisition de la main-d'œuvre est prohibée. La frontière entre le travail obligatoire et le travail volontaire est ténue et se résume à une question de paiement de salaires.
Les équipes d'observation sur le terrain ont constaté que les documents distribués sont imprimés en anglais et en birman. Toutefois, malgré les promesses faites, aucune explication n'est fournie dans les différentes langues ethniques, en raison du peu de respect manifesté à l'égard des populations concernées. De plus, les villageois doivent souvent supporter les frais des réunions d'information ainsi que les frais de voyage des fonctionnaires du Conseil d'Etat pour la paix et le développement. Les villageois interrogés ont affirmé n'être pas informés des mesures prises pour mettre fin au travail forcé. La confusion qui règne aujourd'hui ainsi que le terrorisme dont est victime la population ne prédisposent pas à la soumission des plaintes contre les pratiques de travail forcé. Par ailleurs, les autorités n'ont prévu aucune allocation budgétaire pour recruter une main-d'œuvre salariée. Les modifications budgétaires sollicitées par la mission sont restées lettre morte. A cet égard, le manque d'engagement des autorités risque de porter un coup sérieux à la crédibilité de l'accord officiel sur la région pilote.
Enfin, l'approche adoptée par les autorités pour l'élimination des pratiques du travail forcé porte sérieusement atteinte à la confiance qui semblait naître des accords officiels concernant le facilitateur et la région pilote.
Le membre travailleur du Pakistan a déclaré que, tout en accueillant la déclaration du gouvernement quant à son engagement dans l'élimination du travail forcé, il ne pouvait qu'être consterné par les développements récents, et particulièrement par la détention de Aung San Suu Kyi. Il a insisté à nouveau sur le fait que l'élimination du travail forcé ne peut se réaliser que lorsque les libertés civiles sont respectées, tel que réaffirmé par la Déclaration de Philadelphie. Le problème du travail forcé dans le pays a fait l'objet de nombreuses discussions au sein de la Commission de la Conférence et du Conseil d'administration depuis plusieurs années. L'orateur a prié instamment le gouvernement de tenir compte des signaux très forts émis par tous les Etats Membres par le biais de l'OIT. En s'abstenant de prendre les mesures adéquates pour amender les dispositions pertinentes de sa législation, le gouvernement enfreint la convention. Les ordonnances qui ont été rendues n'ont pas été pleinement diffusées et n'ont pas été comprises ou observées dans le pays de façon générale. Le gouvernement doit mettre en application les recommandations de la commission d'enquête, de la mission de haut niveau et des autres organes de l'OIT en amendant sa législation qui permet l'utilisation des pratiques du travail forcé, et en adoptant des sanctions contre toutes ces personnes, incluant les membres des forces armées, qui sont responsables de son utilisation. Tout en se félicitant de l'adoption du plan d'action, l'intervenant a prévenu qu'une surveillance serait nécessaire pour que sa mise en application soit efficace. Compte tenu de la nécessité primordiale de poursuivre un développement social en matière de liberté, il a demandé au gouvernement de se conformer à ses obligations quant aux droits des travailleurs.
Le membre travailleur de la Grèce a rappelé que la condition d'esclavage à laquelle est réduite le peuple birman depuis une trentaine d'années est à l'ordre du jour de la présente commission depuis maintenant douze ans. Malgré cela, on ne constate de progrès que sur le papier et encore, pour cela faudrait-il que les ordonnances que le gouvernement a acceptées de prendre aient été traduites dans les langues ethniques et qu'elles aient été diffusées, comme cela aurait dû être fait au premier trimestre 2003. Encore faudrait-il aussi que les brochures d'information sur le travail forcé aient été publiées dans le pays dans les langues ethniques, comme le gouvernement s'était engagé à le faire pour le premier trimestre 2003. Encore faudrait-il, enfin, que les victimes de travail forcé puissent agir en justice. Aujourd'hui, en effet, alors que les autorités prétendent que cette possibilité existe, l'absence de tout élément concernant des plaintes, des poursuites et des sanctions illustre le véritable fossé entre la réalité sur le terrain et le tableau présenté par les autorités du Myanmar. Cette contradiction ressort encore davantage devant les propos tenus par le gouvernement devant le Conseil d'administration en novembre 2002, selon lesquels "le Myanmar est un pays en transition qui s'efforce de devenir un Etat démocratique moderne, prospère et pacifique". Pour conclure, l'orateur a déclaré que l'histoire démontre que les régimes tyranniques ne sont pas éternels et que le fracas de la chute des tyrans a toujours été à la mesure de leur cruauté.
Un observateur représentant la Confédération mondiale du travail (CFT), s'exprimant avec l'autorisation du bureau de la commission, a déclaré que, jusqu'à maintenant, l'utilisation du travail forcé se poursuit sous la coordination de hauts dirigeants militaires, dans certaines régions de la Birmanie. Dans la plupart des villages, la construction et la réparation des routes sont effectuées par les villageois eux-mêmes, sous les ordres du commandant militaire, par le biais du président du village. Les villageois sont sommés d'effectuer du travail ardu et doivent fournir leurs propres outils et leur nourriture. Ils doivent travailler sans salaire durant un certain nombre de jours, et des amendes sont imposées lorsqu'ils n'effectuent pas ce travail. Ce type de travail est également exigé pour la construction de camps militaires. Les prisonniers doivent également effectuer des travaux ardus, tels le transport de milliers de seaux d'eau par jour, servir de porteurs pour les bataillons de soldats, transporter du riz et des bouteilles de rhum pesant environ 30 kg et transporter les réserves militaires ainsi que les munitions. Mal nourris, les prisonniers ont du mal à transporter les poids lourds et sont, en conséquence, battus par les soldats.
Les fermiers qui labourent habituellement leurs propres champs sont forcés de travailler dans les champs de riz du gouvernement, leurs terres restant improductives et l'opportunité d'avoir leur propre récolte étant perdue. N'ayant plus rien pour survivre, on peut noter l'augmentation du nombre de réfugiés birmans vers la Thaïlande, un pays voisin.
L'observateur s'est référé à la convention no 87 et a indiqué qu'un grand nombre de violations des droits de l'homme est lié à la liberté d'association. Il existe une flagrante négation de la liberté de réunion, d'association et d'expression. La structure légale en Birmanie dissuade et va jusqu'à bannir toute action légitime visant à établir une organisation fonctionnelle, indépendante et représentative des organisations de travailleurs dans le pays. Quiconque invoque la loi pour défier le pouvoir arbitraire risque d'être arrêté, violenté et éventuellement tué.
La situation en Birmanie affecte grandement la région. Il est inhumain et injuste de priver la population birmane de ses droits fondamentaux et de sa liberté. Alors que la plupart des pays de la région évoluent vers un système démocratique, la Birmanie n'a pas connu d'amélioration économique depuis la crise asiatique et la propagation du SRAS dans la région. Les problèmes de migration illégale des travailleurs et l'augmentation des réfugiés provenant du pays ont sensiblement aggravé la situation.
L'orateur a insisté sur le fait que, si les autorités veulent assumer leurs responsabilités vis-à-vis des citoyens, elles doivent fournir davantage d'opportunités d'emploi à la population en détournant l'affectation du budget vers des activités qui génèrent un revenu, plutôt que d'allouer une grande partie des finances aux forces armées. De cette façon, les Birmans n'auront plus à se diriger vers les pays voisins pour trouver des emplois, et les problèmes de migration illégale seront maîtrisés.
Le membre travailleur du Japon a énoncé qu'en dépit de la promesse du gouvernement de la Birmanie, le travail forcé est encore très répandu dans le pays. Il a prié instamment le gouvernement de la Birmanie de mettre en œuvre les recommandations faites au paragraphe 47 du rapport de la commission d'experts, incluant l'amendement de la loi sur les villages, la loi sur les villes, arrêté nº 1/99 et son arrêté complémentaire.
Selon la résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail en 2000, les Etats Membres doivent revoir leurs relations avec le gouvernement de la Birmanie et s'abstenir de donner tout avantage au pays en vue d'empêcher la persistance de l'usage du travail forcé. Les sanctions constituent les actions les plus efficaces si tous les Etats Membres se mettent ensemble pour exercer une pression sur la Birmanie. Malheureusement, en réalité, il y a plusieurs pays et certaines compagnies multinationales qui soutiennent le gouvernement financièrement et politiquement. L'investissement international peut aider à ouvrir les sociétés et apporter des changements démocratiques dans certains pays. Cependant, ce n'est pas le cas de la Birmanie. L'investissement direct étranger dans ce pays doit être mené par le biais d'entreprises conjointes ("joint ventures") avec ce régime militaire. Selon la loi, les frais et les bénéfices des investissements doivent aller directement aux généraux du régime militaire. Selon le rapport de l'Economist Intelligence Unit et à part au moment de la crise financière asiatique, l'investissement direct étranger en Birmanie, de 1988 à 2000, a augmenté régulièrement de 56 millions à 1 352 millions de dollars E.-U. Ceci est dû principalement au fait que la majeure partie des investisseurs principaux en Birmanie sont des pays de l'ANASE comme Singapour, la Thaïlande, la Malaisie et l'Indonésie. A la fin de mars 2001, les investisseurs étrangers de 25 pays se sont engagés dans 322 projets dans 11 secteurs de l'économie pour un total de 7 395 millions de dollars E.-U. L'aspect le plus important est que le montant investi augmente grandement, même aujourd'hui, en dépit de la résolution de l'OIT.
Les dix principaux investisseurs étrangers, la plupart étant des compagnies multinationales, sont originaires de Singapour, du Royaume-Uni, de la Thaïlande, de la Malaisie, des Etats-Unis, de la France, de l'Indonésie, des Pays-Bas, du Japon et de la Corée du Sud. Le Japon, en tant qu'un des pays supportant la Birmanie économiquement et politiquement, n'a pas rempli ses responsabilités à l'égard de la démocratisation du pays. La Chine est classée quinzième avec 61 millions de dollars des Etats-Unis et ne peut être exonérée de la responsabilité politique du soutien au régime militaire de la Birmanie. Il n'y a pas de doute que cette sorte de soutien financier et politique aide le régime à survivre et à oppresser son peuple. Le membre travailleur a instamment prié les représentants des gouvernements et les groupes d'employeurs de ne plus donner aucun avantage au régime militaire de Birmanie.
Le membre travailleur de la Malaisie a rappelé avoir déjà parlé de la question du travail forcé au Myanmar à plusieurs occasions au sein du Conseil d'administration. Se référant aux promesses faites par le représentant du gouvernement au Conseil d'administration, il a souligné qu'en réalité rien n'a été fait au cours des cinq dernières années. Malgré cela, le représentant du gouvernement fait à nouveau des promesses. Aucune réponse n'a été fournie aux nombreuses questions soulevées par le Conseil d'administration en novembre 2002, en particulier en ce qui concerne l'assassinat de sept personnes et l'action entreprise pour trouver et punir les responsables. Se référant aux questions relatives aux droits humains, l'orateur a indiqué que le peuple de Birmanie a attendu plusieurs années pour voir la lumière au bout du tunnel. Il n'y a pas de raison pour écouter encore des promesses vides. Il est temps pour le gouvernement d'accepter sa responsabilité et de mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête. Aucun amendement n'a encore été adopté à la loi sur les villages et à la loi sur les villes. Le Conseil d'administration devrait constituer une commission pour suivre la mise en œuvre des recommandations de la commission d'enquête.
Le membre travailleur du Canada a exprimé son sentiment de frustration et d'indignation devant la persistance intolérable du travail forcé au Myanmar. Il s'est référé aux développements survenus depuis la dernière session de la Conférence, tel qu'il ressort du document D.5. Ce n'est que très récemment qu'un agent de liaison a été nommé et qu'un plan d'action prévoyant un projet pilote et un mécanisme de facilitation destiné à aider les victimes de travail forcé à accéder à des voies de recours a été mis en place. Ce n'est que le 29 mai 2003, tel qu'indiqué dans le rapport, que l'on a pu se féliciter de la concrétisation de ces initiatives. Malheureusement, les récentes attaques près d'une mine de cuivre, quelques heures seulement après la rencontre du chargé de liaison avec le général Khin Nyunt, montrent bien quels défis doivent être relevés pour la mise en œuvre de ce plan d'action. D'abord, il doit être mis en œuvre sur une période de dix-huit mois. On peut se demander quelles assurances la Commission de la Conférence peut bien avoir que les autorités birmanes ne mettront pas ce délai à profit pour poursuivre leurs offensives contre l'opposition démocratique, compromettant ainsi la mise en œuvre dans les délais prévus, tout en prétendant le mettre en œuvre et en prolongeant les délais. Deuxièmement, s'agissant du mécanisme devant permettre aux victimes de travail forcé ou d'atteinte aux droits fondamentaux d'agir en justice, dans les circonstances présentes, il est douteux que ces personnes puissent obtenir gain de cause, ce qui risque de réduire à néant la campagne de sensibilisation du public. Troisièmement, tandis que le mandat, la composition et le champ d'action des équipes d'observation sur le terrain ont été mis au point de manière détaillée, le rôle précis du facilitateur reste essentiellement flou. Il est impensable que dans de telles circonstances, et en l'absence d'une indépendance clairement reconnue du facilitateur, un mécanisme efficace puisse se mettre en place.
L'intervenant a accueilli favorablement les efforts déployés par le Directeur général du BIT et le chargé de liaison. Cependant, les événements survenus la semaine précédente sont là pour rappeler durement qu'il est exclu, dans le contexte actuel, de parvenir à des résultats concrets dans ce sens. Les violences qui ont fait rage la semaine précédente se sont produites aux abords d'une grosse exploitation de minerai de cuivre, aux mains de la société minière canadienne Mines Ivanhoe plutôt controversée qui cherche à tout prix à accroître ses investissements au Myanmar et continue de profiter directement ou indirectement de la persistance du travail forcé dans ce pays. En fait, le Canada vient au troisième rang mondial des investisseurs dans ce pays.
Le plan d'action conjoint doit malheureusement être suspendu tant que la commission n'aura pas acquis la certitude de la volonté sincère des autorités birmanes d'honorer leurs engagements internationaux. Dans cette attente, les visites régulières menées par les membres de la commission et/ou du Conseil d'administration devront être considérées comme un moyen d'observation de la situation.
Le membre travailleur de l'Inde s'est félicité de l'adoption, par le Directeur général et par le Bureau, d'une politique réfléchie, équilibrée et persuasive d'élimination du travail forcé et du travail en servitude dans le pays et a salué l'attitude coopérative du gouvernement. Il a souligné que le travail forcé et le travail en servitude, où que ce soit dans le monde, sont une injure à l'humanité et qu'il doit y être mis un terme aussi rapidement que possible. La question doit néanmoins être replacée dans le contexte du passé colonial des pays en question. Le Myanmar a perdu ses vocations traditionnelles, son système commercial traditionnel, sa culture et ses valeurs, ainsi que d'énormes richesses, et il lutte pour sa survie. C'est l'essence même de la démocratie que de surmonter la diversité pour parvenir à l'unité. La survie du plus fort est l'expression de la loi de la jungle. Dans un monde civilisé, les lois doivent faire en sorte que la survie du plus faible devienne la responsabilité du plus fort. Il incombe à l'OIT de mettre tous les moyens en son pouvoir pour éveiller les consciences, éduquer les populations et aider les autorités du Myanmar en vue de l'élimination du travail forcé et du travail en servitude. Ce processus nécessitera cependant un changement dans les attitudes, changement qui ne pourra être obtenu qu'au prix d'efforts assidus.
Le membre gouvernemental du Bangladesh s'est félicité des efforts constructifs déployés par l'OIT en coopération avec le gouvernement pour faire face à la situation du travail forcé. Le plan d'action et l'attachement exprimé par le gouvernement à l'éradication du travail forcé, avec l'engagement constructif de celui-ci vis-à-vis de l'OIT, constituent les moyens les plus efficaces devant cette situation. Les mesures qui ont été convenues devraient, faut-il l'espérer, créer un élan décisif pour la poursuite d'une coopération constructive.
Le membre gouvernemental du Brésil a indiqué l'importance accordée par son pays à l'élimination du travail forcé et au respect des droits de l'homme. La question du travail forcé au Myanmar doit se résoudre dans un esprit de coopération, et la signature du plan d'action entre le gouvernement et l'OIT est une avancée. Les mesures prévues, notamment la désignation d'un facilitateur, peuvent mener à la promotion d'un climat de dialogue et de coopération. Il faut espérer que cela fasse place à une meilleure relation entre le pays et l'Organisation et que les événements récents n'entraîneront pas d'effets négatifs sur l'application des dispositions visant l'élimination du travail forcé.
Le membre gouvernemental du Canada a regretté qu'à un moment tragique et douloureux de l'histoire de la Birmanie il soit nécessaire de douter de la volonté du gouvernement de respecter les droits de l'homme internationalement reconnus, incluant les droits des travailleurs et plus particulièrement le droit de ne pas être soumis au travail forcé. Lors du Conseil d'administration en mars, le gouvernement du Canada a accueilli prudemment l'annonce d'un engagement renouvelé par les autorités relativement à la nomination d'un facilitateur pour aider les victimes du travail forcé à soumettre des plaintes dans un environnement garantissant leur sécurité, tel que prévu dans le plan d'action développé par le gouvernement et l'OIT. Il a remercié le Bureau, et plus particulièrement la chargée de liaison, pour leurs efforts énormes dans le développement d'un plan d'action plus significatif que celui soumis précédemment par les autorités. Le plan d'action prévoit des alternatives concrètes à l'utilisation du travail forcé dans le pays et met l'accent sur le besoin d'éliminer cette odieuse pratique. Plus précisément, l'orateur s'est félicité de la nomination de M. de Riedmatten comme facilitateur et a souligné la nécessaire liberté d'action de ce dernier pour aider les victimes du travail forcé à obtenir réparation. Il est essentiel que les autorités coopèrent pleinement et fassent tous les efforts nécessaires pour assurer que le plan d'action soit appliqué le plus rapidement et efficacement possible.
Cependant, malgré des condamnations répétées relatives au travail forcé de la part de la communauté internationale et les mesures prises par l'OIT, le gouvernement n'a pas entrepris des actions appropriées pour arriver à des résultats concrets. Le rapport de la commission d'experts fournit très peu de raisons d'être optimiste et rappelle que les promesses faites par le passé n'ont pas été respectées. Aucune des recommandations principales faites par la commission d'enquête n'a été suivie d'effet jusqu'à ce jour. En l'absence d'action, comment est-il possible d'être sûr que le plan d'action soit la voie appropriée à suivre? Les graves doutes concernant la volonté politique des autorités sont renforcés par le manque absolu de preuves que les autorités s'engagent véritablement à la réconciliation nationale et à la transition démocratique. Le gouvernement doit toujours établir un environnement favorable pour l'application du plan d'action. L'orateur a appelé à cet effet les autorités à engager immédiatement un dialogue substantiel sur la réconciliation nationale, à prendre les mesures qu'elles ont déjà approuvées par le passé et à appliquer pleinement le plan d'action. Finalement, il s'est joint aux autres membres pour demander la libération immédiate de Mme Aung San Suu Kyi et des autres représentants officiels de la Ligue nationale pour la démocratie.
La représentante gouvernementale de la République de Corée a exprimé son appréciation quant aux progrès accomplis par le gouvernement du Myanmar, y compris la nomination de la chargée de liaison, l'adoption du plan d'action ainsi que les accords concernant le facilitateur et la région pilote. Elle a souligné le rôle significatif du facilitateur dans la recherche de solutions pour toutes victimes qui sont ou ont été soumises au travail forcé. Elle a également exprimé l'espoir que le gouvernement continuera de fournir un support total et de coopérer avec l'OIT et qu'il adoptera des mesures efficaces en réponse aux recommandations de l'OIT. Elle en a appelé à l'OIT pour une aide au gouvernement dans ses efforts visant à accomplir des progrès concrets.
Tous les droits de l'homme sont liés entre eux et indivisibles. La commission a reconnu la nécessité d'aborder les questions importantes qui font partie du mandat de l'OIT de façon intégrée. L'instauration d'un véritable gouvernement démocratique au Myanmar est essentielle au respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'oratrice a exprimé son inquiétude quant à la récente détention de Mme Aung San Suu Kyi et de ses collègues de la LND, ainsi que de la fermeture des quartiers généraux de la LND. Elle a lancé un appel pour leur libération immédiate et pour que les activités de la LND reviennent rapidement à la normale. Finalement, elle a exprimé l'espoir que le gouvernement respectera pleinement les droits de l'homme et les principes démocratiques, ce qui améliorera grandement sa coopération avec la communauté internationale dans ses efforts visant à améliorer la situation dans le pays, incluant l'élimination des pratiques du travail forcé.
Le membre gouvernemental de la Namibie a rappelé que la situation du travail forcé au Myanmar est sans aucun doute un sujet sérieux et controversé, inscrit à l'agenda de l'OIT depuis un certain temps. Une action positive a été entreprise afin de fournir une assistance technique au pays de manière structurée, responsable et objective. Il a exprimé sa satisfaction quant à la désignation de la chargée de liaison et du facilitateur ainsi qu'à l'adoption du plan d'action. Il a prié instamment l'OIT de poursuivre son travail précieux. Toutefois, il a souligné que le travail le plus difficile, c'est-à-dire la mise en application du plan d'action, reste à faire et a demandé au gouvernement de fournir une assistance et une coopération dans ce but.
Un observateur de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a indiqué que son organisation, connue en tant que réseau d'organisations non gouvernementales, nationales et internationales, est fondée à agir à propos du travail forcé au Myanmar du fait que les moyens utilisés pour imposer cette forme de servitude sont notoirement les tortures physiques et morales, le viol des femmes et les exécutions sommaires. La Commission de la Conférence a évoqué l'an passé des faits d'assassinats de victimes de travail forcé dans l'Etat de Shan, sur lesquels aucune enquête sérieuse n'a été menée. Le rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies lui-même a qualifié de peu convaincantes et de peu crédibles les suites données par le gouvernement à cette affaire.
S'il est vrai que, sur un plan formel, des progrès sont constatés, avec l'abolition - dans les textes - du travail forcé, l'établissement d'un plan d'action conjoint et aussi l'installation d'un facilitateur, ce qu'il convient de ne pas perdre de vue, c'est la traduction véritable de ces intentions dans les faits. L'actualité récente est marquée par une nouvelle vague de répression politique, d'arrestations d'opposants et de massacres, qui survient juste après certains signes d'ouverture à l'adresse de la communauté internationale. Devant de tels revirements, il est évident que le facilitateur devra s'entourer de toutes les précautions possibles et que l'on peut s'interroger sur les garanties offertes aux victimes qui voudraient dénoncer des actes répréhensibles. Un rapport d'enquête de l'organisation EarthRights International et aussi une expérience faite par la Commission des droits de l'homme montrent bien à quel point de telles garanties peuvent être minces.
L'ampleur du phénomène du travail forcé au Myanmar n'est ignorée de personne. Un organe du gouvernement des Etats-Unis évalue à un chiffre se situant entre 100 000 et peut-être des millions le nombre de personnes victimes de ces pratiques. On peut douter qu'un régime fondé sur la réduction en servitude de la population puisse sincèrement vouloir réformer son système. On peut douter aussi qu'il serait élu s'il y avait des élections libres. A ce propos, la Commission des droits de l'homme des Nations Unies a rappelé que la volonté du peuple du Myanmar s'était clairement exprimée lors des élections de 1990. Les objectifs poursuivis par l'OIT (élimination du travail forcé) et par les Nations Unies (rétablissement des droits de l'homme) passent nécessairement par le retour à la démocratie dans ce pays.
Le membre gouvernemental du Japon exerçant son droit de réplique aux critiques soulevées à l'égard de l'assistance économique fournie par son pays au Myanmar, a insisté sur le fait qu'une telle assistance est offerte uniquement dans le but de pourvoir aux réels besoins de la population dans les domaines de la santé, de l'éducation et du développement humain. Il a déclaré qu'il est important que les objectifs réels de cette assistance ne soient pas mal compris. Il a également exprimé sa surprise relativement aux critiques portant sur la participation de son gouvernement dans le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme. Il a insisté sur le fait que des mesures contre ces maladies devaient être prises dans les endroits où elles se déclarent.
Le Directeur exécutif du Secteur des Normes et principes et droits fondamentaux au travail, répondant à une question posée par le membre travailleur des Pays-Bas demandant si le Directeur général avait, ou n'avait pas, écrit aux Etats Membres à propos du recensement des mesures prises par ces derniers par rapport au Myanmar, a rappelé que le Directeur général a pris des mesures de cette nature, sur les instructions du Conseil d'administration. C'est ainsi qu'il a écrit aux Etats Membres, suite à la décision prise par le Conseil d'administration en novembre 2000, et a transmis au Conseil d'administration à sa session de mars 2001 les informations communiquées en réponse. La possibilité de renouveler cette mesure conformément à la résolution prise en application de l'article 33 de la Constitution de l'OIT a été soulevée par le Conseil d'administration à sa session de mars 2003, encore que le Président du Conseil d'administration ait alors noté que le Conseil d'administration n'était pas parvenu à s'accorder sur le point de savoir si le Directeur général devrait ou non prendre une telle initiative à ce stade.
Le représentant gouvernemental a déclaré avoir écouté avec un grand intérêt les discours et les commentaires faits et remercié les orateurs qui ont approuvé le plan d'action arrêté entre le gouvernement et l'OIT. Plus particulièrement, il a exprimé sa profonde gratitude envers les pays de l'ANASE et les autres membres gouvernementaux qui ont fait des commentaires positifs soutenant son gouvernement. Il a donc conclu qu'en dépit de quelques critiques sur des sujets superflus la commission approuvait de manière générale le plan d'action et la coopération qui a lieu présentement entre son gouvernement et l'OIT. Il a rappelé aux orateurs qui ont exprimé des opinions pessimistes que le plan d'action constitue une avancée, un repère qui n'aurait pas été envisageable six mois plus tôt. Il s'agit de la meilleure chose qui puisse être accomplie et il réunit les critères énoncés par le Conseil d'administration. Son application est d'une importance cruciale et le gouvernement du Myanmar s'engage à ce qu'il soit appliqué efficacement en vue de créer des conditions positives qui mèneront éventuellement à l'élimination du travail forcé dans le pays.
L'orateur a cependant regretté que M. Maung Maung (observateur représentant la CISL) se soit adressé à ce forum de manière abusive. Son passé composé d'activités illégales, incluant le terrorisme, fait en sorte qu'il n'est pas adéquat qu'il intervienne à la Conférence. Il a également déclaré que Maung Maung (a) Pyi thit Niunt Wai n'est qu'un criminel, un fugitif et un terroriste. Il a par exemple participé à un acte terroriste manqué à Yangon en 1997. Il a aussi regretté le fait que certains orateurs se soient référés aux récents développements politiques dans son pays, ce qui a seulement servi à détourner les discussions du sujet principal. A son avis, il n'y a pas de lien entre les mesures politiques et l'observation de la convention par son pays. L'OIT traite des questions relatives au travail et non des questions politiques et relatives aux droits de l'homme. Cependant, le sujet ayant été soulevé, le représentant gouvernemental a estimé nécessaire de répondre aux commentaires formulés. A cet égard, il a rappelé que son gouvernement s'est engagé dans des efforts de réconciliation nationale depuis l'avènement du Conseil d'Etat pour la paix et le développement. Ces efforts ont porté leurs fruits et, comme élément de la transition systématique vers la démocratie, le gouvernement permet aux partis politiques licites, dont la Ligue nationale pour la démocratie (LND), d'étendre leurs activités politiques. Depuis la levée des restrictions en mai 2002, Aung San Suu Kyi a eu la permission de voyager librement à travers le pays et de s'engager dans plusieurs types d'activités politiques, incluant des réunions avec les gens, les diplomates étrangers, les médias internationaux et l'ouverture de bureaux de la LND à travers le pays. A cet égard, il y a eu un accord selon lequel les membres de la ligue ne s'engageraient dans aucune activité pouvant rompre la paix existante et la stabilité du pays. Bien que Aung San Suu Kyi ait eu le droit de s'engager dans des activités politiques normales, il avait aussi été convenu que des consultations devraient avoir lieu avant la planification de ses voyages. Cependant, les membres militants de la ligue sont récemment devenus illégaux et leurs activités ont donné lieu à des troubles et à des perturbations. La démocratie devrait être disciplinée et les pratiques des membres militants de la LND étaient très éloignées des pratiques démocratiques normales, provoquant des troubles et même des blessures causées par le cortège d'automobiles d'Aung San Suu Kyi. L'orateur a souligné que si Daw Aung San Suu Kyi s'était montrée suffisamment prudente et intelligente, elle aurait résolu tous les problèmes. Il est par conséquent évident qu'il y a eu préméditation de sa part et non de la part du gouvernement. Tenant compte de ces événements, les autorités ont été obligées de contrôler la situation et de prendre des mesures temporaires pour protéger Aung San Suu Kyi et certains membres militants de son parti. Ces mesures sont temporaires et Aung San Suu Kyi est saine et sauve. Elle n'a pas même un bleu.
L'orateur a réaffirmé que son gouvernement continuerait sa politique nationale de réconciliation et de transition vers la démocratie de manière systématique et étape par étape. Il a aussi rappelé la détermination et l'engagement de son gouvernement à résoudre la question du travail forcé et à appliquer le plan d'action.
Les membres travailleurs ont protesté fermement contre les accusations portées à l'égard de M. Maung Maung par l'Ambassadeur du Myanmar. Ces déclarations sont fausses et d'autres autorités, notamment les autorités thaïlandaises, avaient reconnu leur caractère erroné. La méthode utilisée n'est pas nouvelle et est souvent utilisée pour empêcher l'application de la convention no 87. Enfin, on peut se demander, après les événements de la semaine dernière, qui sont les terroristes.
Les membres employeurs ont souligné la longueur, le sérieux et l'utilité de la discussion et observé qu'un rare degré de consensus avait été atteint. Le gouvernement doit prendre note de ceci et s'assurer que ses efforts iront plus loin que par le passé. Une action urgente est nécessaire pour appliquer le plan d'action. En pratique, cela demanderait des mesures presque révolutionnaires puisque le travail forcé fait partie du système du pays et qu'il n'y a pas de séparation des pouvoirs dans l'Etat. Un effort extraordinaire est donc requis du gouvernement pour s'assurer que son peuple jouit du droit fondamental à la liberté. Cependant, si les étapes pratiques récemment convenues n'étaient pas prises, cela résulterait en un échec majeur. Il est à espérer que le gouvernement réalise qu'il est à une croisée des chemins cruciale et qu'un pays qui refuse de remplir ses obligations internationales fait face à l'isolement par rapport à la communauté internationale avec toutes les conséquences que cela entraîne pour son peuple. Le gouvernement doit en être conscient et adopter une approche responsable en prenant des actions concrètes.
Les membres travailleurs ont déclaré qu'ils ne souhaitaient pas répéter l'analyse du cas ni les constatations des experts, qui ont apporté beaucoup d'arguments non discutables. Ils ont réitéré leur constat principal que le gouvernement du Myanmar ne donne jamais suite à ses déclarations de bonnes intentions par des actes concrets. Le plan d'action commun pourrait témoigner de ces bonnes intentions mais l'exécution de celui-ci est complètement minée d'avance par les actes de la semaine passée. Afin de rendre crédible ce plan d'action, positif en soi, il faut réunir au moins trois conditions. Le gouvernement doit: libérer immédiatement Mme Aung San Suu Kyi et tous les autres qui l'ont soutenue; permettre une vie démocratique dans le pays et mener un dialogue constructif avec les représentants du BIT.
Enfin, les membres travailleurs en ont appelé au BIT et au Directeur général pour réitérer et renforcer l'appel de 2000 demandant aux mandants de l'Organisation d'informer le Bureau des mesures prises pour aider à éradiquer le travail forcé au Myanmar.
Le représentant gouvernemental a déclaré regretter que certaines conclusions de la commission soient incorrectes. Il a affirmé que les récents développements politiques dans le pays ne sont pas pertinents pour les discussions et émis une réserve à ce sujet.
Le membre travailleur des Pays-Bas a déclaré adhérer pleinement à la position constructive adoptée par les membres travailleurs au sujet des conclusions et a souligné leur faiblesse en ce qui concerne la question du rapport sur l'application de la résolution de l'OIT de juin 2000.
(Texte non reproduit:
Observations de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'exécution par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
BREF RÉSUMÉ DES FAITS NOUVEAUX SURVENUS DEPUIS JUIN 2002
FAITS NOUVEAUX SURVENUS DEPUIS LA 286e SESSION (MARS 2003) DU CONSEIL D'ADMINISTRATION
Appendice: Plan d'action conjoint du gouvernement de l'Union du Myanmar et de l'OIT pour l'élimination des pratiques de travail forcé au Myanmar
Faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (documents du Conseil d'administration GB.285/4, GB.282/4(Add) et GB.282/4(Add.2)
Extrait du document GB.285/PV: Procès-verbaux de la discussion à la 285e session (novembre 2002) du Conseil d'administration des faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930
Faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 1930 (documents du Conseil d'administration GB.286/6, GB.286/6/1, GB.286/1/(Add.) et 286/6/1/Add.2)
Extrait du document GB.286/PV: Procès-verbaux de la discussion à la 286e session (novembre 2002) du Conseil d'administration des faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930
Les débats de la commission ont lieu à un moment où la communauté internationale est gravement préoccupée par les événements qui se produisent au Myanmar, à savoir la mise au secret de la direction de la Ligue nationale pour la démocratie et en particulier de sa secrétaire générale, Daw Aung San Suu Kyi, et l'assassinat et la disparition allégués d'un nombre indéterminé de personnes. A cet égard, de nombreux orateurs ont exprimé leur inquiétude au sujet de la situation personnelle de Daw Aung San Suu Kyi et ont demandé qu'elle soit remise en liberté immédiatement. Ces événements et le climat d'incertitude et de crainte qui en résulte mettent gravement en doute la volonté et la capacité des autorités de réaliser des progrès significatifs dans l'élimination du travail forcé. La commission a prié le représentant du gouvernement de transmettre à celui-ci sa profonde préoccupation.
Dans son observation, la commission d'experts a signalé que les trois recommandations de la commission d'enquête n'ont toujours pas été suivies d'effet: la loi sur les villes et la loi sur les villages n'ont pas été modifiées, alors que l'arrêté no 1 de 1999 et son arrêté complémentaire pourraient fournir un fondement juridique suffisant pour assurer le respect de la convention s'ils sont appliqués de bonne foi; des mesures n'ont pas été prises pour mettre fin à l'imposition du travail forcé dans la pratique, telles que des instructions spécifiques et concrètes aux autorités civiles et militaires et des dotations budgétaires permettant de remplacer de manière efficace le recours au travail forcé et non payé; et aucune poursuite judiciaire n'a été engagée ni aucune sanction pénale prononcée à l'encontre de personnes ayant imposé du travail forcé.
La commission a pris note de la déclaration du représentant du gouvernement ainsi que des autres informations et documents mis à sa disposition. Elle a apprécié la coopération du gouvernement avec la chargée de liaison du BIT au Myanmar depuis que celle-ci a pris ses fonctions en octobre 2002. Elle a toutefois dû constater que les mesures prises par le gouvernement pour faire largement connaître l'arrêté no 1 de 1999 et son arrêté complémentaire, y compris la traduction de ces textes dans six langues des minorités nationales, et les visites sur le terrain effectuées par les équipes d'observation du comité d'application de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, n'ont toujours pas permis de réaliser des progrès tangibles dans l'application de la convention. Il ressort des informations disponibles de diverses sources, y compris des impressions de la chargée de liaison, telles que reflétées dans son rapport à la 286e session du Conseil d'administration, que le recours au travail forcé continue dans la pratique et que la situation est particulièrement grave et semble avoir peu évolué dans certaines zones où l'on note une présence forte de l'armée. La commission a noté également qu'en dépit du dialogue qui s'est établi entre les autorités et la chargée de liaison au sein du comité d'application de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, toutes les enquêtes menées par ce comité au sujet des allégations de recours au travail forcé transmises par la chargée de liaison ont abouti à la conclusion que ces allégations sont sans fondement.
Etant donné la nécessité urgente, rappelée de manière répétée par la commission d'experts, le Conseil d'administration et la présente commission, de passer des progrès formels à des progrès réels pour mettre fin efficacement au travail forcé, la commission s'est félicitée de ce que le gouvernement et le BIT se soient mis d'accord, le 27 mai 2003, sur un plan d'action conjoint pour l'élimination du travail forcé et a exprimé son soutien à ce plan. La commission a noté avec intérêt que, tenant compte de la suggestion faite par la mission de haut niveau, le plan prévoit la nomination d'un facilitateur indépendant chargé d'aider les personnes victimes de travail forcé à obtenir réparation en vertu de la législation nationale. Elle a noté que le facilitateur exercera ses fonctions dans l'ensemble du pays. En vertu du plan d'action, le gouvernement s'est engagé à respecter strictement l'interdiction du travail forcé dans la région pilote. Tout en soulignant que la mise en œuvre du plan d'action ne dispense pas le gouvernement de l'obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au travail forcé dans l'ensemble du pays, la commission a estimé que ce plan d'action, s'il est appliqué de bonne foi, pourrait permettre de réaliser un progrès tangible dans l'élimination du travail forcé et ouvrir la voie à des progrès plus substantiels. Elle a engagé fermement le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires en ce sens. Les rapports du facilitateur au Conseil d'administration ainsi que le rapport d'évaluation sur la mise en œuvre du plan d'action doivent permettre d'apprécier les résultats obtenus.
Dans ces conditions, la commission ne peut que regretter la situation créée par les événements récents au Myanmar. Un climat d'incertitude et d'intimidation ne constitue pas un environnement favorable à la mise en œuvre, de manière crédible, du plan d'action, et en particulier du mécanisme du facilitateur qu'il établit. La commission a exprimé l'espoir que le gouvernement prendra les mesures immédiates qui s'imposent pour mettre fin à cette situation et que le Directeur général pourra aller de l'avant rapidement avec la mise en œuvre du plan d'action, dès qu'il jugera les conditions réunies pour le faire de manière effective. Le Directeur général devra informer le Conseil d'administration sur l'évolution de la situation à la session de novembre 2003, à la lumière des discussions de la présente commission.
Scéance spéciale pour l'examen des faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no. 29) sur le travail forcé, 1930.
Comptes rendus de la discussion de la Commission de l'application des normes
Le président a indiqué que la présente séance spéciale a pour objet d'examiner dans quelle mesure le Myanmar remplit ses obligations relativement à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Ce point est inscrit à l'ordre du jour de la commission, conformément au paragraphe 1 a) de la résolution adoptée par la Conférence à sa session de 2000 relative à l'adoption, en application de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, de mesures visant à assurer l'exécution des recommandations de la commission d'enquête chargée d'examiner le respect par le Myanmar de ses obligations au titre de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. La Conférence a décidé que "la question de la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête et de l'application de la convention no 29 par le Myanmar ferait l'objet d'une séance spéciale de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations lors des futures sessions de la Conférence internationale du Travail, tant qu'il ne serait pas avéré que ce Membre s'acquitte de ses obligations".
Pour l'examen de ce cas, la commission est saisie des documents suivants: 1) l'observation de la commission d'experts sur l'application de la convention no 29 par le Myanmar reproduite sous B ci-dessous; et 2) le document C.App./D.6(Corr.) sur les autres faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, qui contient le rapport du chargé de liaison ad interim (reproduit sous C ci-dessous) et le document C.App./D.7, contenant les documents du Conseil d'administration GB.282/4 (rapport de la Mission de haut niveau), GB.282/PV (procès-verbaux de la discussion à la 282e session du Conseil d'administration), GB.283/5/2 (rapport de la mission de coopération technique du BIT au Myanmar) et GB.283/5/3 (autres faits nouveaux depuis le retour de la mission de coopération technique du BIT) (reproduits sous D à G ci-dessous).
Un représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré que son pays connaît une série de changements politiques, économiques et sociaux dont les récents développements sont bien accueillis par la communauté internationale. Le gouvernement a pris, entre la 89e et la présente session de la Conférence internationale du Travail, diverses mesures significatives et soutenues.
L'un des développements importants depuis la 89e session de la CIT a été la visite d'une Mission de haut niveau de l'OIT au Myanmar du 17 septembre au 6 octobre 2001. La mission a reconnu dans son rapport une certaine diminution des cas de travail forcé et, contrairement à la situation rapportée en 1998 par la commission d'enquête, n'a relevé aucun indice de recours actuel au travail forcé pour des projets d'infrastructure civile. La mission a également fait des recommandations sur la manière de résoudre le problème.
Un autre développement significatif a été la nomination d'un chargé de liaison ad interim du BIT au Myanmar suite au protocole d'entente signé entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT au mois de mars 2002, protocole que le gouvernement a veillé à appliquer. Le Directeur général a proposé au gouvernement de nommer un chargé de liaison ad interim le temps de désigner le titulaire permanent de ce poste, et c'est ainsi que M. Leon de Riedmatten, directeur du Centre pour le dialogue humanitaire, a été nommé comme chargé de liaison ad interim à compter du 6 mai 2002. Il a tenu depuis un total de 24 entretiens avec les autorités et un grand nombre de personnes, notamment avec le lieutenant général Khin Nyunt, secrétaire du Conseil d'Etat pour la paix et le développement, le ministre du Travail, le ministre de l'Intérieur, le représentant du Cabinet du Premier ministre, le ministre attaché aux Affaires étrangères, ainsi que de hauts fonctionnaires appartenant à divers autres ministères et départements, des personnalités politiques, des représentants des minorités ethniques, les cercles diplomatiques et les représentants des institutions spécialisées des Nations Unies et des ONG du Myanmar. Il a, en outre, eu des discussions approfondies sur des questions cruciales quant au respect de la convention no 29 avec la Commission d'application de la convention dirigée par le vice-ministre de l'Intérieur. Des équipes d'observation dirigées par les membres de la Commission d'application de la convention ont voyagé à plusieurs reprises vers différentes parties du pays, l'objectif de ces voyages étant de vérifier si les arrêtés interdisant le travail forcé sont respectés et si le cadre législatif, administratif et exécutif mis en place par le gouvernement fonctionne sur le terrain.
L'orateur a précisé que ces mesures significatives prises par le gouvernement du Myanmar ne constituent pas une liste exhaustive et que les progrès importants faits par le gouvernement du Myanmar et l'OIT à cet égard ont été dûment rapportés par M. de Riedmatten dans le document no D.6(Corr.). Le rapport de M. de Riedmatten est dans son ensemble positif, factuel et assez bien nuancé. Les développements significatifs et les mesures positives prises par le gouvernement du Myanmar, tels qu'esquissés dans ce rapport, démontrent clairement la volonté politique cohérente et l'engagement ferme des autorités du Myanmar de poursuivre leurs efforts pour l'élimination du travail forcé dans le pays. A cette fin, le gouvernement du Myanmar fait tout ce qui est en son pouvoir en prenant des mesures efficaces de manière systématique et pas à pas. Certaines choses doivent être accomplies par le Myanmar et d'autres par la communauté internationale, ce que la Mission de haut niveau a justement souligné dans la partie 6 de son rapport. La Mission de haut niveau a mis l'accent sur l'importance d'une modernisation économique, une volonté politique cohérente des autorités et l'engagement de la communauté internationale. Elle avait également souligné que la communauté internationale devrait prêter assistance à ce processus. Puisque les efforts sérieux du gouvernement ont encore progressé, la communauté internationale devrait répondre de manière positive à ces mesures significatives. L'orateur espère que ces mesures prépareront le terrain pour un réexamen de la question de retirer toutes les mesures prises contre le Myanmar en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. Le gouvernement du Myanmar attache une grande importance au processus de dialogue et de coopération avec l'OIT qui a bien fonctionné et a donné des résultats concrets. L'orateur a exprimé son souhait de poursuivre sur cette lancée afin de résoudre le problème et d'atteindre les objectifs mentionnés précédemment.
Les membres travailleurs ont pris note de la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle la situation se serait améliorée. Ils exhortent le gouvernement à comprendre que les initiatives et changements évoqués doivent être évalués par l'OIT et que l'Organisation doit pouvoir évaluer l'application de la convention no 29, et notamment examiner, de façon objective et impartiale, la mise en uvre et l'impact réel des mesures prises sur le travail forcé au Myanmar. Les éléments actuellement disponibles ne permettent pas de conclure que la situation s'améliore. Le travail forcé sévit au Myanmar depuis de nombreuses années, et la recherche d'une solution est très difficile aussi bien à l'OIT que dans d'autres organisations internationales. Cette session spéciale s'inscrit dans l'approche globale adoptée par l'OIT devant la situation.
Les membres travailleurs ont rappelé que, indépendamment des documents D.6(Corr.) et D.7, la Commission de la Conférence s'appuie en premier lieu sur le rapport de la commission d'experts, sans exclure pour autant toutes informations nouvelles.
Les membres travailleurs tiennent à ce que ce cas soit maintenu à l'examen tant que la situation du travail forcé ne s'améliorera pas au Myanmar. La gravité, la persistance et le caractère systématique des violations de la convention no 29 au Myanmar ne sont plus contestés, mais le problème est complexe, de par sa nature, la diversité de ses formes et son étendue. Il pèse sur l'ensemble de la population et ses conséquences sont effroyables. Il est néfaste pour l'emploi, puisque les réquisitions en masse de main-d' uvre par les autorités empêchent le travail "normal", ce qui est préjudiciable pour l'économie entière du pays.
Constatant que les violations de la convention no 29 sont généralisées, systématiques et structurées dans la législation comme dans la pratique, les membres travailleurs demandent que le gouvernement mette enfin en uvre les recommandations de la commission d'enquête et du Conseil d'administration, à savoir: 1) que la législation soit rendue conforme à la convention no 29 et qu'ainsi toute législation qui rend le travail forcé possible soit abrogée; 2) que, dans la pratique, il soit effectivement mis fin au recours au travail forcé dans tout le pays et notamment dans les régions reculées; 3) que les sanctions prévues à l'encontre des personnes reconnues coupables d'avoir imposé du travail forcé soient effectivement appliquées.
Certes, suite aux démarches du Bureau, des changements ont pu être constatés. Mais ces changements se situent principalement, sinon uniquement, au niveau de la procédure. Sur les instances de la commission, le BIT a envoyé en 2001 une Mission de haut niveau au Myanmar et dans les régions frontalières, pour se rendre compte de la situation sur place. Sur la base du rapport de cette mission, le Conseil d'administration a adopté des conclusions tendant notamment à ce que le Directeur général "poursuive le dialogue en vue de mettre au point avec les autorités les modalités et paramètres d'une représentation continue et efficace de l'OIT au Myanmar qui devrait être en place dans les plus brefs délais".
Une mission de coopération technique a fait suite, en février 2002, pour convenir des conditions et modalités possibles d'une représentation efficace de l'OIT dans le pays. Aux termes d'un protocole d'entente entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar, M. de Riedmatten a été nommé chargé de liaison ad interim le 6 mai pour une période de deux mois.
Mais tous ces événements ne concernent que les procédures. La situation concrète, elle, n'a pas changé, en tout cas pas de manière significative. Dans les trois domaines susmentionnés, le gouvernement doit faire le nécessaire pour que la situation change fondamentalement, car il n'y a aujourd'hui aucune amélioration, comme l'a relevé la commission d'experts au paragraphe 29 de son observation, où elle note "qu'aucune des trois recommandations formulées par la commission d'enquête et acceptées par le gouvernement n'a encore été mise en uvre".
Tant qu'il n'y aura pas de preuves irréfutables et surtout convaincantes que la situation au Myanmar s'améliore, les membres travailleurs ne sauraient même envisager de changer leur position quant aux mesures qui ont été décidées sur la base de l'article 33 de la Constitution de l'OIT.
Enfin, les membres travailleurs ont signalé que, pour la suite des discussions, chacun des aspects incidents de ce cas particulièrement complexe serait abordé, au nom du groupe des travailleurs, par d'autres orateurs: les preuves de la persistance du travail forcé au Myanmar, par le membre travailleur du Pakistan; les aspects concernant les infrastructures, par le membre travailleur de la France; les aspects concernant la diversité ethnique, par le membre travailleur de l'Indonésie; les relations sociales et du travail, par le membre travailleur de la Suède; l'attitude de l'armée et les atteintes aux droits de l'homme, par le membre travailleur de la République de Corée; l'attitude du gouvernement japonais et l'aide étrangère au développement, par le membre travailleur du Japon; l'implication des multinationales, par le membre travailleur des Pays-Bas; les migrations transfrontalières par le membre travailleur de la Thaïlande; et les informations recueillies par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) dans le pays, par M. Maung-Maung, secrétaire général de la Fédération des syndicats de Birmanie.
Le membre travailleur des Etats-Unis, s'exprimant au nom des membres travailleurs, a relevé que bien des choses se sont passées depuis la session spéciale de l'année passée concernant ce cas très difficile. Nonobstant les derniers développements, la base de la discussion au sein de la Commission de la Conférence est le rapport de la commission d'experts. Il s'appuiera donc principalement sur les observations des experts relatives aux manquements persistants de la Birmanie à ses obligations aux termes de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Toutefois, il fera également des commentaires sur les informations contenues dans les documents D.6(Corr.) et D.7. Les commentaires de la commission d'experts se divisent en trois parties: les amendements législatifs, la pratique actuelle et l'application de sanctions pénales pour l'imposition du travail forcé.
Beaucoup a été dit à la Commission de la Conférence et au Conseil d'administration sur les arrêtés administratifs enjoignant les autorités de ne plus se prévaloir des dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages permettant de réquisitionner la main-d' uvre. La commission d'experts a indiqué au paragraphe 5 de son observation que l'adoption de mesures supplémentaires telles qu'indiquées au paragraphe 539-b) du rapport de la commission d'enquête s'avère nécessaire. Ces mesures ont d'ailleurs déjà été discutées dans le passé à la Commission de la Conférence et au Conseil d'administration. La commission d'experts fait remarquer au paragraphe 4 de son observation que la Mission de haut niveau a noté que des pouvoirs législatifs ont été exercés par le gouvernement à deux reprises, en juin 2000 et février 2001, lors de l'adoption de la "loi judiciaire, 2000" et de la "loi du ministère de la Justice, 2001". Par conséquent, les arguments présentés par le gouvernement dans le passé pour expliquer son refus d'amender la loi sur les villes et la loi sur les villages semblent tomber et les membres travailleurs s'interrogent sur les raisons pour lesquelles le gouvernement refuse toujours obstinément de se conformer aux demandes de la commission d'enquête et de la commission d'experts d'amender les lois. En fin de compte, du point de vue des victimes, un simple retrait des arrêtés administratifs, peut-être par la seule signature d'un militaire haut gradé, rétablirait la justification "légale" pour imposer un travail forcé. De plus, diverses interrogations continuent de se poser quant à la volonté et au sérieux des efforts déployés par le gouvernement pour diffuser l'information au peuple birman et aux responsables de l'imposition de travail forcé, les chefs militaires locaux et régionaux. Tel que souligné au paragraphe 9 de l'observation de la commission d'experts, des instructions claires demeurent nécessaires afin d'indiquer à toutes les autorités concernées, y compris aux militaires de tous rangs, les tâches pour lesquelles le travail forcé est prohibé de même que la manière de les effectuer.
Concernant la façon dont les arrêtés administratifs ont été portés à la connaissance du public, le chargé de liaison intérimaire a signalé à la commission (paragr. 25 du document D.6(Corr.)) que cette information avait notamment été diffusée par des crieurs publics. Cela semble quelque peu insuffisant. Les travailleurs s'inquiètent du fait que peu d'efforts semblent avoir été déployés afin de faire connaître ces arrêtés administratifs dans les différents dialectes et se demandent pourquoi la radio et les autres médias ne semblent pas avoir été utilisés. Le informations contenues dans le rapport de la commission d'experts montrent que le gouvernement est toujours réticent à entreprendre une véritable campagne pour que les gens sachent que le travail forcé ne sera pas toléré et que ceux responsables d'avoir imposé le travail forcé seront punis. De récents entretiens auprès de victimes réfugiées en Thaïlande confirment cette description. D'ailleurs, très peu de ces témoins étaient au courant que le travail forcé était maintenant illégal en Birmanie.
En ce qui concerne la poursuite de pratiques de travail forcé en Birmanie, l'orateur a insisté sur le récent rapport émis par la Fédération des syndicats du Myanmar, ainsi que par une ONG de réputation internationale, EarthRights International, qui fait état de la persistance du travail forcé dans trois Etats ethniques et deux Divisions, sur la base d'entretiens menés avec 77 victimes. Il est important de noter que le recours au travail forcé continue à être associé à d'autres violations graves des droits de l'homme. De nombreuses victimes interrogées par EarthRights avaient été battues, frappées et/ou torturées. De nombreux rapports font état d'exécutions et d'incidents résultant dans des décès multiples. Et il y a eu six cas de viol dont certains ont conduit à la mort de la victime. Ces informations sont un rappel de la réalité concrète dont il s'agit dans ce cas. Pour ce qui est de l'application des sanctions, les experts relèvent que rien n'indique que des personnes responsables de l'exaction de travail forcé et de crimes concomitants aient été condamnées ou du moins inculpées en vertu du Code pénal et conformément à l'article 25 de la convention no 29. Le rapport du chargé de liaison intérimaire confirme (paragr. 25 du document D.6(Corr.)) que, jusque-là, aucune poursuite n'a été exercée sur la base de l'article 374 du Code pénal. Cet aspect semble d'ailleurs avoir été confirmé par le représentant du gouvernement dans son intervention. En résumé donc, les experts ont conclu une fois de plus, comme depuis plusieurs années, qu'aucune des trois recommandations formulées par la commission d'enquête et acceptées par le gouvernement n'a encore été mise en uvre.
En ce qui a trait aux informations contenues dans les documents D.6(Corr.) et D.7, tout en reconnaissant que l'établissement d'un bureau de liaison intérimaire indique un certain mouvement, les membres travailleurs estiment qu'il s'agit uniquement de la première étape d'une longue démarche et non pas d'une percée historique, comme l'a laissé entendre le représentant du gouvernement. Plusieurs conditions doivent être satisfaites pour que le bureau de liaison soit crédible et contribue de manière significative à l'élimination du travail forcé. Les membres travailleurs souhaitent qu'un chargé de liaison permanent soit nommé rapidement et rappellent, comme le Conseil d'administration l'a fait à sa session de mars 2002, que cette nomination n'est que le premier pas vers l'établissement d'un bureau de représentation permanent efficace et complet. Dans l'intérim, un personnel suffisant devrait être engagé rapidement pour le bureau de liaison qui, comme cela avait été souligné dans les discussions au Conseil d'administration, devrait pouvoir entreprendre son travail en toute liberté et dans tout le pays. Un doute subsiste quant à savoir s'il incombera au bureau de représentation/liaison permanent de vérifier si des progrès dans l'élimination du travail forcé ont réellement lieu. Considérant l'ampleur du problème partout au Myanmar, cela représenterait une tâche extrêmement difficile pour le bureau et requerrait un personnel suffisamment nombreux et compétent. Pour cette raison, la nomination sans délai d'un chargé de liaison adjoint s'impose. De même, afin de garantir que le bureau de liaison uvre de manière efficace, une continuité entre son travail et celui de la commission d'enquête, de la Mission de haut niveau et d'autres missions passées doit être assurée. Ce besoin de continuité devra être un facteur lors de la nomination du chargé de liaison, de son adjoint et du personnel supplémentaire. Les membres travailleurs sont sérieusement préoccupés par la formulation du paragraphe 24 du document D.6(Corr.) concernant l'importance du respect de la confidentialité afin de faciliter le travail du bureau de liaison. Ils présument que le chargé de liaison sera tenu de faire rapport au Conseil d'administration sur tous les aspects de son travail incluant tout progrès constaté ou, le cas échéant, l'absence de progrès dans l'élimination du travail forcé. Dans le cas où le besoin de confidentialité compromettrait cet aspect du travail du chargé de liaison, le gouvernement devra consentir à l'établissement d'autres mécanismes, tels que des missions régulières afin de relever les progrès effectués ou non. L'entière coopération et le consentement du gouvernement sont donc requis. Une telle information constante et crédible est extrêmement importante afin d'écarter toute fausse impression de progrès alors qu'en réalité il n'y en a pas, qui pourrait être causée par la confidentialité exigée du bureau.
Il existe bien entendu d'autres moyens, plus efficaces, pour vérifier dans quelle mesure les autorités continuent à avoir recours au travail forcé, de même que pour donner aux victimes potentielles collectivement les moyens d'y résister Comme indiqué par la mission de haut niveau au paragraphe 68 du document GB.282/4, s'il existait de véritables organisations de la société civile, et en particulier des organisations de travailleurs fortes et indépendantes - comme prévu par la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ratifiée par la Birmanie -, les victimes du travail forcé bénéficieraient d'un cadre et d'un soutien collectif qui pourraient les aider à utiliser au mieux les recours existants pour défendre leurs droits reconnus. Malheureusement, il n'existe aucune liberté d'association en Birmanie. Il n'existe aucun syndicat indépendant et toute tentative d'en établir un est sévèrement réprimée. Les travailleurs demandent à nouveau au gouvernement, comme la Commission de la Conférence l'a fait depuis de nombreuses années, de respecter ses obligations en vertu de la convention no 87. Comme l'a rappelé la Mission de haut niveau, il s'agit d'une composante essentielle de tout effort sincère et effectif du gouvernement pour l'élimination du travail forcé.
Les travailleurs sont extrêmement déçus du refus du gouvernement (paragr. 21 du document D.6(Corr.)) de nommer un ombudsman qui pourrait traiter les plaintes relatives au travail forcé. En l'absence de toute instance judiciaire indépendante, il y a un urgent besoin pour une telle institution, qui constituerait la seule autorité légale potentiellement effective qui serait accessible aux victimes pour mettre fin à la pratique du travail forcé et faire prévaloir leurs droits. Le défaut du gouvernement de donner suite à cette recommandation de la Mission de haut niveau permet de douter de sa volonté d'assurer la mise en uvre des changements législatifs prétendument apportés. Les membres travailleurs n'y voient que de petits changements et une résistance constante de la part du gouvernement plutôt qu'un réel engagement à mettre un terme au travail forcé. Ils sont une fois de plus extrêmement déçus des commentaires du ministre du Travail contenus au paragraphe 21 du document D.6(Corr.) relatifs aux allégations du meurtre, par les militaires, de sept villageois de l'Etat de Shan qui se seraient plaints du travail forcé. Le refus persistant du gouvernement d'admettre une enquête indépendante alimente l'impression que les allégations doivent être fondées. Si le gouvernement croit réellement que tel n'est pas le cas, le représentant gouvernemental devrait expliquer pour quelles raisons le gouvernement continue de refuser une enquête indépendante, notamment sous les auspices du président de la Mission de haut niveau, Sir Ninian Stephen, comme proposé à la dernière session du Conseil d'administration. L'établissement des faits au terme d'une enquête indépendante et l'engagement de poursuites judiciaires contre les responsables de ces meurtres démontreraient en termes très concrets la sincère volonté du gouvernement de coopérer avec l'OIT. A défaut, le gouvernement ne fera qu'entamer davantage sa crédibilité, pour ce qui est de sa volonté et capacité de punir les responsables du travail forcé, y compris les membres des forces armées.
Compte tenu de la gravité de ce cas, les travailleurs sont de plus en plus déçus de ne noter au fil des ans que de petits mouvements. Ils ont besoin de voir de véritables progrès vers l'élimination du travail forcé, au nom des victimes passées et futures. Le gouvernement a été une fois de plus incapable de fournir des preuves contredisant les conclusions de la commission d'experts à l'effet qu'aucune des trois recommandations de la commission d'enquête n'a été respectée à ce jour. Ils souhaitent donc et attendent que les conclusions de cette commission reflètent la réalité actuelle du travail forcé en Birmanie et l'attente urgente de cette commission que le gouvernement agisse beaucoup plus rapidement et résolument pour mettre un terme au travail forcé tant en droit qu'en pratique. Le représentant gouvernemental de la Birmanie a commencé sa déclaration en indiquant les progrès réalisés par le pays. Lorsque, par le passé, les membres travailleurs se référaient à la situation politique en Birmanie, on leur opposait que la question politique était hors sujet, le cas concernant exclusivement le travail forcé. L'orateur s'est dit d'accord avec le représentant gouvernemental lorsque celui-ci affirme que les développements politiques ont un impact sur l'élimination du travail forcé. Il a souligné comme l'a noté la commission d'enquête dans le passé, que la situation en Birmanie ne pourra s'améliorer que lorsque seront rétablis la normalisation politique, l'Etat de droit et la démocratie.
Les membres employeurs ont rappelé que ce cas peu commun porte sur des violations sérieuses et prolongées de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. La population du Myanmar souffre depuis longtemps du travail forcé qui lui est imposé par les militaires pour la construction de routes, lignes de chemin de fer et autres infrastructures. Cette situation fait l'objet d'observations de la part de la commission d'experts depuis maintenant plus de dix ans et cela fait plus de trente ans que l'OIT réclame l'abolition immédiate du travail forcé et que le gouvernement ne cesse de la promettre, alors que la présente commission s a examiné ce cas à plusieurs reprises en notant la violation des droits consacrés par la convention no 29 dans des paragraphes spéciaux.
C'est à juste titre que la convention no 29, qui a recueilli le plus grand nombre de ratifications, est considérée comme une convention fondamentale de l'OIT, puisqu'elle touche à un droit fondamental de l'être humain. Bien que le gouvernement ait d'abord rejeté toutes allégations concernant l'existence du travail forcé dans le pays, celle-ci a été amplement documentée dans le rapport de la commission d'enquête de 1998. Cette pratique s'est appuyée sur deux lois, la loi sur les villes et la loi sur les villages, dont la commission d'experts a demandé la révision, en même temps que l'abolition de cette pratique dans les faits et la poursuite des coupables. Toutes ces demandes ont été fortement appuyées aussi bien par le Conseil d'administration que par la Commission de la Conférence. Devant l'absence de progrès au fil des ans, la Conférence a adopté, à sa 88e session (mai-juin 2000), une résolution aux termes de laquelle la Commission de l'application des normes de la Conférence examinera cette question chaque année jusqu'à complète satisfaction. Il a été conclu en mai 2000, entre le représentant du Directeur général du BIT et le gouvernement du Myanmar, un "Protocole d'entente sur une évaluation objective par l'OIT" ayant pour objet de permettre la conduite d'une telle évaluation quant à la mise en uvre pratique et à l'impact réel du dispositif législatif, gouvernemental et administratif dont le gouvernement a fait état. Ultérieurement, en automne 2001, une Equipe de haut niveau s'est rendue dans le pays et son rapport a été soumis au Conseil d'administration à sa session de novembre 2001. Une autre mission a été menée en février 2002. Les faits démontrent qu'il existe encore au Myanmar des bases légales permettant d'imposer un travail forcé. Les deux lois qui le permettent n'ont toujours pas été abrogées et la pratique reste inchangée. Certes, le gouvernement a pris un certain arrêté no 1/99 et son arrêté complémentaire tendant à instaurer un correctif dans le cadre de la législation en vigueur en vue de donner effet, dans la pratique, à la convention. Si cette mesure n'est pas négligeable, il n'en reste pas moins que la législation en vigueur doit être modifiée et que cela n'a toujours pas été fait.
D'une manière générale, l'évolution de ce cas présente deux aspects. L'un concerne les discussions entre le BIT et le Myanmar. Après une attitude initiale de rejet, ce dernier a bien voulu progressivement se montrer coopératif avec l'OIT, acceptant qu'une Mission de haut niveau se rende dans le pays et que diverses autres missions aient lieu. Depuis mai 2002, un chargé de liaison ad interim est nommé. Au cours de ces diverses missions, le gouvernement a tenu ses engagements et s'est montré coopératif, comme les rapports le montrent. Mais, pour parvenir à ce résultat, il a fallu maintenir une pression permanente. Si l'on constate une volonté apparemment croissante de coopération de la part du gouvernement, cette volonté aurait pu se manifester plus tôt. Il se dégage néanmoins de l'ensemble de ces éléments une impression positive.
Par contre, sur le fond, c'est-à-dire sur la question même de l'abolition définitive du travail forcé, les employeurs insistent sur le point que le seul moyen de progresser est d'abolir dans le droit et dans la pratique le travail forcé qui a prévalu au Myanmar et qui continue de le faire dans une mesure certaine. Or, si les deux arrêtés susmentionnés pourraient constituer un point de départ pour assurer le respect de la convention dans la pratique, un problème majeur qui se pose encore est la diffusion de leur teneur. Cela est naturellement indispensable à leur application. Le gouvernement a excipé à plusieurs reprises des obstacles que constitueraient sur ce plan l'étendue du territoire et la difficulté d'accès de certaines régions. Il est important d'assurer la diffusion de l'information concernant ces arrêtés de manière plus intensive, en recourant à tous les moyens de communication disponibles, notamment les mass media. A l'évidence, s'en remettre pour cela aux autorités locales ou à l'armée n'est pas la meilleure solution puisqu'il s'agit des principaux acteurs qui imposent du travail forcé. En outre, au vu du grand nombre de langues parlées dans le pays, les dispositions de ces arrêtés devraient être traduites et publiées dans toutes ces langues, afin que leur teneur ne soit plus ignorée nulle part. Or aucun progrès n'a été constaté sur ce plan. Sur un autre plan, et compte tenu de l'ampleur des programmes de développement s'effectuant en recourant au travail forcé, l'abolition de cette pratique aurait nécessairement des implications financières qui ne manqueraient pas de se manifester sur le plan budgétaire. Or, l'absence de tout élément de cet ordre constitue un indice de ce que le travail forcé n'est pas entièrement aboli. Il en est de même en ce qui concerne l'application de sanctions, alors que les instructions interdisant la réquisition de main-d' uvre pour du travail forcé semblent être rarement appliquées. Il faut donc que la charge de la preuve soit inversée. Il appartient au gouvernement de démontrer que la réquisition de travail forcé n'a plus lieu. Quant à l'affirmation du gouvernement que le travail obligatoire correspond à une tradition dans le pays, on ne peut que craindre la persistance d'une "zone grise" entre ce qui constitue du travail forcé et ce qui est du travail volontaire. Cependant, la réalité fournit certains indices. L'armée, en tant que principale autorité imposant le travail forcé, a vu ses effectifs croître. Il n'y a pas eu de plaintes concernant le recours au travail forcé parce que, dans la plupart des cas, ceux qui osent se plaindre sont réprimés. Le gouvernement refuse que des observateurs indépendants viennent dans le pays cependant que, comme indiqué dans le document D.6(Corr.), le chargé de liaison ad interim déclare avoir des raisons d'être pessimiste quant à l'installation d'un médiateur. A cela s'ajoute qu'aucune enquête n'a été ouverte à propos des allégations d'imposition de travail forcé qui ont causé la mort de sept villageois et que la mise en uvre d'une interdiction du travail forcé dépend des autorités locales et notamment des commandants militaires.
Tous ces éléments démontrent qu'il reste encore beaucoup de chemin à faire avant que le travail forcé ne soit aboli. Il conviendrait que la commission presse instamment le gouvernement de hâter le processus d'abolition du travail forcé dans le pays. Quelques mesures ont été prises dans le bon sens mais elles devraient aller plus vite et plus loin. Les progrès ne doivent surtout pas rester sur le papier, l'enjeu porte en effet sur des vies humaines et des droits fondamentaux. Le but de la présente commission doit être de faire des droits inscrits dans la convention no 29 une réalité sociale pour la population du Myanmar. Les membres employeurs, imprégnés de réalisme, resteront attentifs à l'évolution de cette situation, dans un esprit critique et rationnel, avec en ligne de mire les droits des populations du Myanmar.
Le membre gouvernemental de l'Espagne a fait une déclaration au nom des membres gouvernementaux de l'Union européenne, à laquelle se rallient les membres gouvernementaux de la Bulgarie, de l'Estonie, de la Hongrie, de la Lettonie, de la Lituanie, de la Pologne, de la Roumanie, de la Slovaquie, de la Slovénie et de la République tchèque - Etats d'Europe centrale et orientale associés à l'Union européenne -, les membres gouvernementaux de Chypre, de Malte et de la Turquie - Etats associés - et les membres gouvernementaux de la Suisse, de la Norvège et de l'Islande. L'Union européenne continue d'encourager la restauration de la démocratie, la poursuite de la réconciliation nationale, la protection des droits de l'homme et l'élimination du travail forcé en Birmanie/Myanmar. L'Union européenne a également pris note du dernier rapport de l'OIT et, à cet égard, a accueilli avec satisfaction les progrès accomplis dans l'établissement d'un bureau de liaison à Rangoon comme un premier pas vers l'objectif d'une représentation effective de l'OIT en Birmanie/Myanmar. L'Union européenne a appelé les autorités de la Birmanie/Myanmar à faire en sorte que le Bureau dispose d'un personnel suffisant et bénéficie du soutien technique de façon à accomplir ses obligations, ainsi que la liberté de mouvement et le degré de collaboration requis pour s'acquitter de ses obligations en pratique.
L'Union européenne a de nouveau vivement recommandé aux autorités du Myanmar de nommer un médiateur permanent, qui pourrait jouer un rôle très important dans la poursuite de l'élimination du travail forcé. Des consultations dans ce sens devraient avoir lieu entre le Bureau et les autorités du Myanmar. L'Union européenne a également recommandé avec insistance aux autorités de donner suite à la proposition faite au Conseil d'administration de mars 2002 tendant à ce que les enquêtes sur les allégations concernant le meurtre de sept personnes dans l'Etat de Shan soient examinées par une autorité extérieure indépendante acceptable par toutes les parties. L'Union européenne est préoccupée de constater que, malgré la coopération avec l'OIT, aucun progrès significatif n'a été fait vers l'éradication du travail forcé, mais qu'au contraire, selon certaines informations, le travail forcé et des contributions forcées seraient en recrudescence dans certaines régions. De plus, l'Union européenne a appelé les autorités de la Birmanie/Myanmar à prendre d'urgence des mesures immédiates pour l'éradication totale du travail forcé dans le pays. Compte tenu de ce qui précède et des progrès encore très modestes qui ont pu être atteints par les autorités de la Birmanie/Myanmar dans la lutte contre le travail forcé dans ce pays, l'Union européenne estime que les mesures décidées en application de l'article 33 de la Constitution de l'OIT ne peuvent pas être levées pour le moment. L'Union européenne continuera à suivre la situation de près dans les mois précédant la session du Conseil d'administration de novembre 2002.
Le membre gouvernemental de l'Indonésie, prenant la parole au nom des pays membres de l'OIT appartenant aussi à l'ANASE, a remercié le Directeur général pour ses efforts de coopération avec le gouvernement du Myanmar. L'Indonésie accueille favorablement la signature du protocole d'entente signé le 19 mars 2002 entre le gouvernement du Myanmar et le BIT sur la nomination du chargé de liaison au Myanmar au plus tard au mois de juin 2002. L'Indonésie ajoute que la sélection du chargé de liaison est extrêmement importante et devait être faite de façon consciencieuse, après consultation des parties concernées, et il se félicite de l'accord sur la nomination de M. Leon de Riedmatten en tant que chargé de liaison ad interim à compter du 6 mai 2002, dans l'attente de la nomination du titulaire à titre permanent d'un chargé de liaison. La nomination de ce chargé de liaison ad interim est le signe d'une évolution positive de la coopération entre le BIT et le gouvernement du Myanmar, et l'Indonésie souhaite ardemment que les discussions sur cette question devant la commission soient conduites de manière constructive et que le gouvernement et le BIT poursuivent leur coopération jusqu'à ce que ces questions soient complètement résolues.
Le membre gouvernemental de l'Australie, s'exprimant aussi au nom du membre gouvernemental de la Nouvelle-Zélande, a exprimé son intérêt profond et continu pour ce cas et a noté les progrès modestes qui ont été réalisés depuis l'année dernière, notamment la visite et le rapport de la Mission de haut niveau et, plus récemment, la désignation du chargé de liaison ad interim. Soulignant la coopération continue entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar et reconnaissant les efforts passés et présents du Myanmar pour éliminer le recours au travail forcé, l'orateur a souligné que les différentes visites qui ont eu lieu et la présence de l'OIT au Myanmar ne sont que des étapes pour atteindre l'objectif. Toutefois, les progrès constatés au niveau du processus ne signifient pas des progrès sur le fond de la question elle-même, soit l'éradication du travail forcé. Malgré une légère amélioration, la mission de haut niveau a constaté au cours de l'année 2001 que la pratique du travail forcé était toujours répandue. Tout en saluant les progrès modestes qui ont été réalisés depuis 1998, l'orateur a estimé qu'il reste encore beaucoup de chemin à faire et a encouragé le gouvernement à redoubler d'efforts pour éradiquer le recours au travail forcé.
L'orateur a exprimé son soutien à l'action continue de l'OIT sur le terrain et encouragé le gouvernement à coopérer avec l'OIT afin de désigner rapidement un chargé de liaison permanent, à plein temps, jouissant de la liberté de mouvement et d'accès afin de garantir une présence plus substantielle de l'OIT dans le pays. A cet égard, un véritable bureau de l'OIT bénéficiant des ressources nécessaires et du personnel adéquat devrait être établi dès que possible. L'orateur a prié instamment le gouvernement de mettre en uvre les recommandations de la mission de haut niveau, particulièrement en nommant un médiateur qui, de par sa fonction, pourra enquêter et combattre le travail forcé. L'orateur a aussi insisté sur la nécessité pour le gouvernement de mener des investigations plus poussées ou de consentir à ce qu'une autorité indépendante et impartiale acceptée par toutes les parties enquête sur les allégations de meurtre de sept villageois dans l'Etat de Shan. Il a exprimé l'espoir qu'un rapport à la Conférence de 2003 fera état de progrès significatifs et substantiels dans l'éradication du travail forcé.
Le membre gouvernemental du Canada a déclaré que le Canada se félicite de plusieurs développements positifs récents au Myanmar: la libération de Mme Daw Aung San Suu Kyi, dans l'optique de la réconciliation nationale; la nomination d'un chargé de l'OIT ad interim (M. de Riedmatten). Le Canada appelle le BIT et le gouvernement du Myanmar à s'entendre sur la nomination permanente du chargé de liaison de l'OIT à Yangon, afin que ce dernier soit en mesure d'assumer pleinement ses fonctions d'ici à la fin de ce mois, comme convenu à la dernière session du Conseil d'administration. Mais, si ces développements augurent favorablement de la coopération future entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar, l'objectif premier reste celui de l'abolition du travail forcé au Myanmar. Sur ce point, la nomination d'un chargé de liaison de l'OIT n'est qu'une première étape en attendant la mise en place d'une présence permanente de l'OIT au Myanmar. Comme cela a été dit lors de la 283e session du Conseil d'administration, le chargé de liaison de l'OIT ne pourra s'acquitter de son mandat que s'il bénéficie d'une totale liberté de mouvement et de contact, notamment avec la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), les populations ethniques et les autorités militaires.
Le chargé de liaison peut jouer un rôle important dans la diffusion des arrêtés modifiant la loi sur les villes et la loi sur les villages, et le Canada juge encourageants les efforts du gouvernement à cet égard. Il exhorte néanmoins le gouvernement du Myanmar à enquêter sur les allégations de travail forcé, à entamer des poursuites et à sanctionner les coupables en vertu de l'article 373 du Code pénal. Le gouvernement du Canada continue de croire que la nomination d'un médiateur est un outil non négligeable pour les victimes de travail forcé. Le Canada demande, à nouveau, que soit ouverte une enquête indépendante sur le sort de sept villageois de l'Etat de Shan, qui auraient été abattus après avoir porté plainte pour contrainte au travail forcé devant les autorités militaires. Le gouvernement du Canada souhaite que le BIT et le gouvernement du Myanmar continuent de coopérer afin d'établir une présence efficace de l'OIT pour aider le gouvernement à mettre en uvre les recommandations de la commission d'enquête et les recommandations et conclusions du Conseil d'administration du BIT tendant à l'élimination définitive du travail forcé au Myanmar.
Le représentant de la Confédération internationale des syndicats libres, secrétaire général de la Fédération des syndicats de Birmanie, s'est félicité du retour à la liberté de la dirigeante de la LND, Mme Daw Aung San Suu Kyi, après 19 mois d'assignation à résidence. Cependant, bien que les médias internationaux aient fait état de cette libération, les médias birmans, contrôlés par les militaires, n'en ont aucunement fait mention. Les médias de cet Etat n'ont pas non plus répercuté les instructions du général Khin Nyunt interdisant le travail forcé, alors que celui-ci avait informé l'OIT qu'un ordre avait été adopté après l'adoption de la résolution sur le travail forcé dans le pays. Cela montre que, même si cela est contesté en public, le régime craint la pression internationale et man uvre discrètement pour l'alléger.
Le travail forcé continue à exister dans ce pays bien que la convention no 29 ait été ratifiée depuis 1955. C'est-à-dire que des fermiers, des enseignants, des travailleurs de santé, sans distinction d'âge, d'ethnie ou de religion, sont contraints par les militaires de travailler sans être payés pendant des semaines, même quelquefois jusqu'à six mois. Ces personnes ne sont pas autorisées à rentrer et informer leurs familles ou ne sont autorisées à partir que lorsqu'elles sont malades. Ainsi, réquisitionné par les militaires, un agriculteur ne peut pas moissonner sa récolte, non plus qu'un pêcheur réquisitionné pour le portage ne peut pêcher et gagner sa vie; des villages entiers doivent travailler pendant des mois à débroussailler et faire du terrassement pour l'installation d'un gazoduc par des entreprises multinationales. Malgré l'action de l'OIT, la population est toujours forcée de travailler contre sa volonté et sans contrepartie. Un document signalait, par exemple, en mai 2002, le cas d'une fillette de 13 ans qui devait débroussailler et planter des arbres pour les militaires. Ce document décrit comment, depuis 1962, le régime militaire a si mal mené le pays qu'un pays qui était l'un des plus riches du Sud-Est asiatique est devenu en 1987 un des pays les moins développé (PMD), et ce bien avant qu'il n'ait été fait mention d'aucune sanction; ce ne sont donc pas les sanctions imposées par la communauté internationale suite aux élections de 1990 qui ont fait du tort au pays mais l'isolement auto-imposé et la mauvaise gestion par les juntes militaires qui ont épuisé les ressources du pays et provoqué des difficultés telles que les gens ont dû quitter le pays. Voilà pourquoi la Thaïlande accueille plus de 1 million de travailleurs birmans migrants illégaux, la Malaisie plus de 30 000 et le Bangladesh et l'Inde plus de 50 000.
En observant comment les choses se passent dans le pays, le groupe de sympathisants a donné deux exemples qui montrent comment, après un refus prononcé de coopérer selon la voie des discussions diplomatiques traditionnelles, le régime a lentement réagi à l'action directe. Depuis plus de 40 ans, l'OIT demande aux régimes successifs d'arrêter de recourir au travail forcé; alors qu'ils continuaient à y avoir recours, les régimes ont toujours nié les violations qu'ils commettaient et ont répondu que la législation était en cours de modification. Ce n'est qu'après que l'OIT a fait des actions concrètes, en 2000, que le régime, afin de minimiser la pression internationale, a réduit le travail forcé, mais seulement dans les régions qui pouvaient être facilement accessibles par la communauté internationale. Le régime était ainsi parvenu à faire signer par les marins un papier déclarant qu'ils ne devaient en aucun cas contacter la Fédération internationale des travailleurs des transports (ITF) sous peine que leurs passeports et certificats de navigation soient révoqués. Ce n'est que lorsque l'ITF a fait campagne à travers les syndicats pour que cette pratique illégale cesse que le régime a cessé d'obliger les marins à signer ces papiers.
Pour conclure, le combat pour la démocratie au Myanmar a fait de grands progrès. L'action directe a montré des résultats; il est temps à présent qu'un nombre croissant d'actions directes soient entreprises afin de pousser le régime vers un système démocratique transparent.
Le membre travailleur du Japon, s'exprimant au nom des membres travailleurs, a accueilli avec enthousiasme la libération de Mme Aung San Suu Kyi qui constitue une première étape dans la démocratisation du pays. Il a appelé à la mise en uvre rapide des recommandations de la Mission de haut niveau. Cependant, il regrette que, même après la libération de Mme Aung San Suu Kyi, il y ait toujours des prisonniers en détention depuis plusieurs années relativement à leurs activités politiques et à leur implication pacifique dans des organisations de travailleurs; il fait notamment référence au cas du Dr Salai Tun Than, qui a été arrêté pour avoir conduit une manifestation pacifique au mois de novembre 2001 en distribuant des copies d'une pétition demandant une élection générale. Son arrestation est contraire aux principes démocratiques tels que le droit à la liberté d'association. L'orateur a souligné que l'élimination du travail forcé est étroitement liée au processus de démocratisation et, par conséquent, à la reconnaissance de la liberté d'association. Il a exhorté le gouvernement à garantir la liberté d'association de toute la population du pays et de libérer rapidement les prisonniers politiques suivants: Dr Zaw Myint Maung, Jimmy, Soe Myint, Ba Myo Thein, Dr Myint Maung, Thet Min Aung, U Tin Win, Phyo Min Thein, Htay Win Aung, Zaw Min, Zaw Tun, Nyunt Zaw, Myat Tun, Soe Htet Khine, Tun Win, Win Thein, Sein Hlaing, Kyi Pe Kyaw, Aung Myo Tint, Ko Ko Oo, Aung Kyaw Oo, Hla Than et Yin Htwe. La restauration de leurs droits politiques contribuerait au développement de la démocratie dans le pays.
L'orateur a souligné que le gouvernement japonais détient une responsabilité spéciale quant à la démocratisation du Myanmar, étant son plus grand donateur étranger, et a demandé au gouvernement japonais de faire pression sur le gouvernement du Myanmar afin qu'il n'utilise pas le travail forcé dans les projets d'aide au développement sous supervision japonaise qui doivent être strictement limités aux fins humanitaires. Le gouvernement du Japon doit s'assurer que de tels projets ne profitent pas au régime militaire et que les organisations internationales des travailleurs continuent à porter une attention spéciale à l'utilisation du travail forcé dans le projet Baluchaung Hydropower Station financé par le Japon. Les organisations de travailleurs japonaises soutiennent ceux qui ont dû quitter le pays et venir s'établir au Japon à cause de leur participation au processus de démocratisation de leur pays. Toutefois, le gouvernement du Japon continue à détenir sept réfugiés dans un centre de détention, soit Aye Thant Kyu, Win Kyaw, Soe Lwin, Maw Thin, Maung-Maung, Win Myint Oo et Khin Maung Lat. L'ambassade du Myanmar fait toujours payer des impôts à ses ressortissants qui habitent au Japon, totalisant 10 pour cent de leur salaire mensuel ou un minimum de 12 000 yen japonais et, s'ils refusent de payer cet impôt, leur passeport n'est pas renouvelé. L'orateur a demandé que cette pratique n'ait plus lieu, car elle est contraire aux règles du droit international.
Le membre travailleur de la Suède, s'exprimant également au nom des membres travailleurs, a exprimé la profonde préoccupation du mouvement syndical suédois et nordique sur les graves violations des droits de l'homme au Myanmar. Sa délégation est l'une de celles qui ont été à l'origine de l'action de l'OIT en la matière, estimant qu'on ne peut pas laisser un Etat Membre continuer de violer les droits humains fondamentaux, en particulier quand les violations se sont poursuivies pendant plus de quarante ans comme c'est le cas en l'espèce. Au cours des dernières années, le gouvernement a soit refusé de coopérer avec l'OIT, soit agi au dernier moment pour éviter que le Conseil d'administration ne prenne des décisions à son encontre. Le fait que des missions de l'OIT aient été autorisées à visiter le pays récemment ne change rien à l'impression générale selon laquelle le régime militaire n'agit que lorsqu'il est confronté à une véritable pression. Les difficultés rencontrées dans l'établissement d'une représentation de l'OIT dans le pays illustrent ce problème. Aucune volonté réelle n'a encore été démontrée par le pays pour coopérer avec l'OIT et pour suivre ses recommandations. En effet, la commission d'experts a conclu qu'en permettant aux exploiteurs du travail forcé d'être perçus comme représentant l'autorité de l'Etat le gouvernement a confirmé les conclusions de la commission d'enquête selon lesquelles l'impunité dont bénéficient les membres du gouvernement, en particulier les militaires, dans leur façon de traiter la population civile comme un réservoir illimité de travailleurs forcés non rémunérés et comme des serviteurs à leur disposition, fait partie intégrante d'un système politique fondé sur l'utilisation de la force et sur l'intimidation pour dénier au peuple la démocratie et l'Etat de droit. Il a exprimé son accord total avec le principe exprimé par le professeur Amartya Sen lors de son intervention devant la commission lors de la 87e session de la Conférence (juin 1999), selon lequel un travail décent ne constitue pas seulement une exigence du droit du travail et de la réalité du travail mais également la nécessité d'une société ouverte et de la promotion du dialogue social. Le professeur Sen a ajouté que la vie des travailleurs dépend directement des règles et des conventions qui régissent leur emploi et leur travail. Mais elle est aussi influencée par leurs libertés de citoyens avec une voix susceptible d'influencer les politiques ainsi que les choix institutionnels.
L'orateur a souligné qu'il n'existe pas de syndicats libres au Myanmar et que toute tentative de les instaurer est brutalement réprimée. L'inexistence totale de syndicats distingue le Myanmar d'autres Etats à parti unique. En effet, il n'existe aucune possibilité véritable de dialogue tripartite dans un pays où les syndicats n'ont pas le droit d'exister. La démocratie et la liberté syndicale sont des éléments indispensables à un véritable dialogue social et à l'élimination des pratiques de travail forcé dans le pays. Pour finir, il a noté que les représentants démocratiquement élus du pays réunis à Bommersvik dans son pays un peu plus tôt dans l'année avaient exprimé leur appréciation aux syndicats, aux employeurs et aux gouvernements pour leur rôle dans la Conférence internationale du Travail et leur a vivement recommandé d'appliquer les recommandations du Conseil d'administration jusqu'à ce qu'il soit mis un terme aux pratiques de travail forcé dans le pays. Il a ainsi fait appel à tous les membres de la commission pour qu'ils prennent la responsabilité de mettre en uvre les mesures nécessaires pour atteindre cet objectif.
Le membre travailleur de l'Espagne a déclaré que le travail forcé constitue une grave atteinte à la liberté individuelle et signifie un retour au Moyen Age et aux droits des seigneurs féodaux sur leurs serfs.
L'orateur a signalé qu'on peut déduire de l'observation de la commission d'experts qu'avant que l'OIT n'exerce de pressions le gouvernement a édicté l'arrêté no 1/99 prohibant le recours au travail forcé pour les travaux publics. Néanmoins, les militaires ont continué à recourir au travail forcé, démontrant ainsi le manque de volonté du gouvernement de mettre un terme au travail forcé. Ce cas représente un défi pour l'OIT pour trois raisons: 1) la gravité de ce cas qui implique le déni du droit de travailler librement et constitue un obstacle à l'intégration de la personne au sein de la société; 2) le gouvernement du Myanmar édicte des arrêtés administratifs afin d'éviter de se faire accuser d'immobilisme mais sans volonté de régler définitivement ce grave problème; et 3) le fait qu'il est inadmissible que dans le contexte de la mondialisation certains pays continuent d'avoir recours au travail forcé. L'orateur rappelle que la Commission de la Conférence doit à l'occasion de ce cas démontrer clairement son efficacité.
Le membre travailleur des Pays-Bas, s'exprimant au nom des membres travailleurs, approuvant les positions des précédents intervenants, a souligné le rôle des directives de l'OCDE pour les entreprises multinationales dans la mise en uvre de la résolution de l'OIT de juin 2000. Bien que les directives aient été adoptées en 1976, elles ont été révisées en 2000 et comprennent maintenant des orientations relatives au travail forcé qui recommandent aux sociétés de s'efforcer de contribuer à son élimination. De plus, une partie de la révision porte sur le système de mise en uvre qui, très léger dans le passé, a été renforcé. En plus de ces orientations sur le travail forcé, les directives contiennent des éléments supplémentaires pertinents. L'orientation en matière de politique générale selon laquelle les entreprises doivent respecter les politiques des pays dans lesquels elles opèrent et tenir compte des vues des autres parties impliquées est le premier de ces éléments. Le second est une référence aux responsabilités des sociétés dans la chaîne d'approvisionnement. Il est donc clair que les entreprises basées dans les pays de l'OCDE, mais qui opèrent dans les pays tiers, sont censées se conformer aux directives de l'OCDE dans ces pays. En outre, il est très clair que les directives ne recommandent pas aux entreprises de se conformer aux politiques des gouvernements qui sont contraires à leurs obligations internationales.
Prenant l'exemple de son propre pays, l'orateur a expliqué comment les directives de l'OCDE peuvent être utilisées par les Membres de l'OIT pour la mise en uvre de la résolution. En 2001, lorsque le gouvernement néerlandais a fait rapport au Directeur général de la mise en uvre de la résolution, il a indiqué avoir ni encouragé ni découragé les activités économiques par les entreprises néerlandaises au ou avec le Myanmar. Quelques mois après, à la suite du dialogue avec les syndicats, la politique a changé et le gouvernement a décidé de décourager les transactions économiques avec le pays. De plus, le gouvernement a recommandé aux syndicats de prendre en compte les activités des multinationales néerlandaises et des autres entreprises faisant des affaires au Myanmar. Dans le Point de contact national des directives de l'OCDE, les syndicats ont consigné une plainte contre un très important investisseur néerlandais au Myanmar sur la base de son non-respect de la résolution de l'OIT qui fait partie de la politique du gouvernement néerlandais. Les syndicats ont également accusé l'entreprise de n'avoir pas tenu compte des autres parties impliquées dans le pays et de n'avoir rien fait pour mettre en uvre les directives de l'OCDE telles que celles relatives au travail forcé. Suivant cette procédure, les syndicats sont actuellement engagés dans un dialogue avec l'entreprise afin qu'elle parvienne à se conformer aux directives de l'OCDE. En outre, l'action engagée a débouché sur des mesures parallèles concernant les partenaires commerciaux de ladite entreprise au Royaume-Uni. Les syndicats néerlandais, en coopération avec le Centre birman des Pays-Bas, ont pris des mesures similaires par rapport à diverses agences de voyage. Prenant pour référence l'action menée dans son propre pays, l'orateur a appelé les gouvernements à s'assurer que les entreprises commerçant avec le Myanmar sont mieux informées des directives de l'OCDE et les Etats membres de l'Union européenne à promouvoir activement les directives de l'OCDE comme un moyen de mise en uvre de la résolution de l'OIT. Les fédérations d'employeurs devraient tenir leurs membres mieux informés de leur soutien à la résolution de l'OIT; les syndicats dans les pays de l'OCDE pourraient faire meilleur usage des directives de l'OCDE comme canal pour prendre en compte les activités des entreprises multinationales qui sont basées ou opèrent dans leur pays. Ils pourraient également recommander instamment à leurs membres dans les comités de travail européens de prendre des mesures similaires.
Le membre travailleur du Sénégal a rappelé que la régularité avec laquelle ce cas revient devant la commission résulte indéniablement de la persistance des autorités du Myanmar dans leur attitude. Comme rappelé par un rapport de la CISL, le recours au travail forcé dans ce pays est une pratique généralisée, notamment dans les zones de conflit, et la controverse à propos du meurtre de villageois dans l'Etat de Shan est suffisamment révélatrice de la sujétion à laquelle la population est réduite par les autorités et du sort qui attend les individus qui se hasarderaient à faire valoir leurs droits. Telle est en effet la réalité, en dépit des affirmations contraires du gouvernement. Le manque de sincérité de ce dernier est d'ailleurs suffisamment illustré par la façon dont il assure l'information du public sur le caractère illégal du travail forcé. Cet ensemble d'éléments a pour conséquence qu'à l'avenir la crédibilité du gouvernement ne pourra pas s'appuyer seulement sur quelques signes de bonne volonté sur le plan des procédures mais, au contraire, sur la réalité d'efforts véritables, attestés par des instances impartiales.
Le membre travailleur de la Thaïlande, s'exprimant au nom des membres travailleurs, a déclaré que son pays a constaté une hausse marquée du nombre d'immigrants illégaux provenant du Myanmar. On estimait leur nombre à 500 000 en 1991, comparé à près de 2 millions en 2000. Le gouvernement de la Thaïlande procède à l'enregistrement de ces immigrants illégaux dont 500 000 sont maintenant enregistrés, ce qui permet d'éviter qu'ils soient exploités par les employeurs. L'orateur a demandé au gouvernement du Myanmar de modifier ses politiques générale et économique qui, avec le travail forcé et les relocalisations forcées de la population, causent l'exode de celle-ci. Si de tels changements n'interviennent pas rapidement, le nombre d'immigrants continuera à augmenter. L'orateur a ajouté que le gouvernement et le peuple de la Thaïlande ont soutenu la candidature du Myanmar au sein de l'ANASE dans l'espoir que, en devenant membre, le Myanmar améliorerait les conditions de vie de son peuple. Néanmoins, les violations continuent et, en conséquence, l'orateur a demandé que la résolution de l'OIT soit maintenue et qu'un contrôle plus ferme soit effectué afin de prévenir les violations continues des droits des travailleurs.
Le membre travailleur de la France, s'exprimant au nom des membres travailleurs, a fait référence à l'observation de la commission d'experts, dans laquelle on signale que le travail forcé généralisé prévaut toujours en l'absence de clarté de la directive du 1er novembre 2000 et des instructions qui ont suivi, qui ne font pas de distinction claire entre travail obligatoire et travail volontaire. La législation du Myanmar ne prohibe toujours pas clairement le recours au travail forcé et la pratique se poursuit. La population n'est généralement pas informée de ses droits et ne peut se soustraire aux exactions des militaires qui lui extorquent travail, fournitures, nourriture et argent. Aucun indice budgétaire, aucune indication concrète du gouvernement du Myanmar ne vient corroborer une diminution et encore moins une disparition du travail forcé. Tous les témoignages recueillis par la Mission de haut niveau montrent au contraire que l'armée continue ses pratiques au niveau local, ses effectifs ayant plus que doublé au cours des dix dernières années, ce qui laisse supposer un recours toujours accru aux pratiques d'extorsion de travail et de confiscation des biens des villageois. L'armée étant chargée de développer des infrastructures telles que chemins de fer, routes et ponts, elle recourt au travail forcé pour les réaliser, sous la menace des armes. Les arrêtés pris par la junte n'auraient véritablement de valeur que dans un Etat de droit, démocratique, mais un tel Etat a été aboli par ceux-là mêmes qui gouvernent le pays.
L'orateur a souligné qu'un travail non payé, ou dont le salaire est confisqué par l'Etat ou dans l'intérêt privé des militaires, est un travail forcé. Les salaires, même dans les cas où ils sont versés par des compagnies étrangères, sont le plus souvent confisqués: les travailleurs sont rassemblés dans les villages et contraints de rétrocéder leurs gains aux militaires de la base la plus proche. L'extorsion du salaire pour le travail accompli pour une compagnie étrangère ou l'extorsion d'un travail forcé et non rémunéré pour la conduite de travaux publics reviennent finalement à une contrainte au travail sans contrepartie équitable, en violation de la convention no 29. Il en va de même pour le travail forcé dans les prisons, où l'exploitation est si dure que des détenus meurent d'épuisement.
En ce qui concerne les travaux forcés à "titre gratuit" et soi-disant volontaires dans les infrastructures civiles, les témoignages abondent sur le caractère généralisé et les actes de barbarie qui les accompagnent. L'orateur a cité deux témoignages de victimes réquisitionnées en 2002 pour la construction d'infrastructures civiles routières, l'une d'elles au profit d'une compagnie pétrolière internationale, dont des représentants avaient inspecté le début des travaux. De telles pratiques constituent non seulement une violation de la convention no 29, mais également de toutes les normes fondamentales ainsi que de toutes les libertés civiles, économiques et sociales. Les droits humains sont interdépendants; la violation d'un droit fondamental tel que le droit à un travail librement choisi et équitablement rémunéré ne peut qu'accompagner d'autres violations graves de toutes les conventions fondamentales et des pactes de l'ONU. Le pays ne connaîtra pas un développement durable sur ces bases d'oppression et d'exaction.
Les villageois appartenant aux ethnies des Etats frontaliers sont de plus victimes de discrimination ethnique. Les travailleurs agricoles et ceux des plantations ne jouissent pas de la liberté d'association, bien que le Myanmar ait ratifié les conventions nos 11 et 87.
Toute action internationale doit avoir pour but d'aider le peuple du Myanmar, soumis, dans un pays où la démocratie a été confisquée, à un régime sous lequel le travail forcé constitue une pratique généralisée de l'Etat militaire. Aucun progrès réel et durable ne s'étant encore manifesté du côté des dirigeants militaires du pays, l'action de l'OIT doit se poursuivre.
Le membre travailleur du Pakistan, s'exprimant au nom des membres travailleurs, a accueilli tous les discours condamnant le travail forcé. Au début du XXIe siècle, qui devait être un âge de connaissances, de raison et de valeurs humanitaires, et alors que tous croient aux valeurs démocratiques, il est honteux que des crimes contre l'humanité et les valeurs fondamentales et la dignité humaine soient toujours commis. Bien que le membre gouvernemental ait indiqué que la nomination du chargé de liaison est une mesure prise dans un processus par étapes de l'abolition du travail forcé, tous les membres de la Commission de la Conférence reconnaissent que le travail forcé est une violation des droits humains et de la convention no 29. N'est-il pas possible pour le gouvernement de punir sévèrement ceux qui ont commis ces crimes afin de prévenir des violations futures? Rien n'indique que des poursuites judiciaires aient été engagées ou des sanctions prises conformément aux recommandations de la Mission de haut niveau. Dans la pratique, telle que relevée par la commission d'experts, les progrès faits semblent incohérents d'une région à l'autre, avec des taux de travail forcé plus élevés dans les régions isolées. Des problèmes particuliers quant à la prévention de l'utilisation du travail forcé par les autorités militaires, notamment dans les régions frontalières, subsistent. Le problème s'est également aggravé par les représailles contre ceux qui ont dénoncé les pratiques de travail forcé et le manque de confiance dans la police et dans le système judiciaire. Des violations des droits fondamentaux se poursuivent dans le pays et les personnes qui se risquent à utiliser leurs organisations de travailleurs sont emprisonnées et, de surcroît, l'imposition du travail forcé par les autorités militaires est particulièrement répandue. Le membre travailleur du Pakistan a demandé au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour l'abolition des pratiques du travail forcé et de donner une protection complète à ceux qui se sont plaints d'être victimes de ces pratiques. Tous ceux qui ont imposé le travail forcé doivent être amenés devant les tribunaux et ceux jugés coupables punis. Finalement, ces mesures doivent être prises le plus rapidement possible et non dans le cadre d'un processus extrêmement lent par étape.
Le membre travailleur de la République de Corée, s'exprimant au nom des membres travailleurs, citant les constatations de la Mission de haut niveau, une communication de la CISL concernant le cas du Myanmar ainsi que les conclusions de la commission d'experts, a noté plusieurs violations des droits de l'homme par les militaires birmans. Il a déclaré que quelques-unes des violations les plus sérieuses des droits de l'homme se sont produites dans un contexte de portage forcé, où des civils, y compris des enfants, âgés de 15 à 60 ans auraient été enlevés et forcés à se mettre au service des militaires. Il a noté que, bien qu'habituellement chargés de l'approvisionnement des soldats en patrouille, les porteurs ont également été placés en tête des colonnes pour faire exploser les mines et éviter les embuscades, et ont également été utilisés comme "boucliers humains" au combat. Il a souligné que les porteurs faisaient l'objet d'abus physiques permanents et que beaucoup d'entre eux ont été témoins de meurtres d'autres porteurs par les troupes qu'ils servaient.
Il s'est référé aux observations faites par les ONG indiquant qu'un total de quatre jours par famille et par mois constitue plus un plancher qu'un plafond et que, pendant la saison sèche, les Rohingyas ont été forcés à travailler en moyenne environ une semaine par mois, parfois dix jours, voire deux semaines. En ce qui concerne les projets liés au développement concernant le travail forcé, il a noté que les passages à tabac, la torture et les exécutions sommaires sont des violations des droits de l'homme courantes, citant en particulier des informations selon lesquelles des femmes auraient été violées par les soldats ou le cas d'une femme tuée pour avoir cessé son travail afin de nourrir son enfant. Il a en outre cité le rapport annuel des violations des droits syndicaux de la CISL indiquant la persistance des atteintes aux droits sociaux et aux droits de l'homme.
Pour conclure, il a déclaré que le gouvernement du Myanmar doit fournir une preuve véritable et crédible de progrès en ce qui concerne la question du travail forcé comme une condition préalable absolue pour envisager un retrait des mesures prises en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, et a réaffirmé son soutien à la Ligue nationale pour la démocratie.
Le membre travailleur de l'Inde a exprimé son indignation et son anxiété en ce qui concerne la violation continue de la convention no 29 par le gouvernement militaire du Myanmar. Il a noté que les lois sur les villes et les villages de 1907, habilitant les autorités à réquisitionner des personnes pour effectuer un travail non rémunéré, font partie de l'héritage colonial du Myanmar, et a exprimé le regret que ce pays ait décidé de maintenir ces lois - au détriment de son peuple et des droits de l'homme de celui-ci. Il a noté que le problème du travail forcé persiste à ce jour, ce malgré les modifications des lois sur les villes et les villages, et recommande instamment au BIT de poursuivre ses discussions avec le gouvernement pour parvenir à mettre un terme à ce problème. Il a cependant insisté, à cet égard, sur le fait que la promotion des normes internationales du travail ne devrait pas être liée à la question du maintien du commerce avec le Myanmar, cela pouvant s'avérer contre-productif et jouer contre les intérêts des travailleurs de ce pays. Il a conclu en déclarant que toute action entreprise dans ce domaine ne devrait subir aucune ingérence du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale ou de l'Organisation mondiale du commerce.
Le membre travailleur de l'Indonésie, s'exprimant au nom des membres travailleurs, a déclaré, à la lumière des rapports de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), de l'ONG EarthRights International ainsi que d'autres documents, regretter que le gouvernement du Myanmar n'ait pas accompli de progrès significatifs dans l'abolition du travail forcé.
L'orateur a insisté sur la question de l'appartenance ethnique dans le cadre du problème du travail forcé puisqu'il est surtout pratiqué dans les Etats frontaliers du Myanmar tels que l'Etat de Karen, l'Etat Mon, l'Etat Chin et la commune de Tavoy à la frontière de l'Inde. Les militaires forcent souvent les gens à travailler sans rémunération comme porteurs ou pour d'autres travaux militaires. L'orateur a cité en exemple le cas d'un civil de l'ethnie Karen qui a été forcé à travailler à maintes reprises pour les militaires - notamment le transport d'équipement militaire très lourd - durant une période prolongée, avec peu de repos et aucune provision d'eau ou de nourriture. Il a décrit aussi les perturbations et traumatismes infligés à l'ensemble des villageois par la fuite des jeunes hommes en vue d'éviter d'être réquisitionnés pour du travail forcé. Bien que les villageois aient pris connaissance de l'ordonnance du général Khin Nyunt prohibant le travail forcé, ils n'ont pas cru que cela s'appliquait à leur région puisque l'armée a continué d'y avoir recours comme d'habitude. Bien que le Conseil d'administration à sa 282e session en novembre 2001 ait requis que l'arrêté complétant l'arrêté no 1/99 soit diffusé dans les principaux dialectes afin de permettre au peuple de comprendre les efforts continus déployés par la Mission de haut niveau, on constate que ces arrêtés n'ont pas été diffusés dans les mass media et n'ont été distribués qu'en anglais et en birman, ce qui a causé des malentendus.
En conclusion, l'orateur a déclaré qu'il n'y a aucune preuve que le gouvernement du Myanmar a pris des mesures spécifiques et sérieuses. Par conséquent, il a insisté pour que le gouvernement du Myanmar donne une explication raisonnable sur les mesures entreprises jusqu'à maintenant afin d'appliquer les recommandations de la commission d'enquête qu'il a d'ailleurs acceptées. Il demande de plus aux mandants de l'OIT de continuer à prendre des mesures concrètes afin de cesser le commerce et l'assistance qui pourraient contribuer à maintenir les pratiques discriminatoires de travail forcé à l'encontre des minorités ethniques.
Le membre gouvernemental du Japon a exprimé son appréciation au Directeur général pour ses efforts dans le renforcement du dialogue et la coopération avec le gouvernement du Myanmar et s'est félicité de l'accord entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar portant sur l'établissement d'un officier de liaison de l'OIT. Il s'est aussi félicité de la nomination de M. Leon de Riedmatten, du Centre pour le dialogue humanitaire, au poste d'officier de liaison par intérim, et a exprimé sa satisfaction pour son rapport.
L'orateur a considéré qu'il est de la plus haute importance pour le gouvernement du Myanmar de prendre les mesures nécessaires en réponse aux recommandations de la commission d'enquête, de façon à satisfaire aux attentes des Membres de l'OIT exprimées depuis deux ans. Il a espéré que le premier pas du gouvernement du Myanmar serait une pierre angulaire pour travailler à l'établissement d'une représentation effective et permanente de l'OIT au Myanmar. Il a encouragé les autorités dans leurs efforts pour assurer une élimination rapide et effective du travail forcé et a fait référence à la levée des restrictions imposées au mouvement de Daw Aung San Suu Kyi le 6 mai 2002 qui pourrait créer un environnement favorable en vue de faciliter la démocratisation et la réconciliation nationale et contribuer à l'élimination du travail forcé. Enfin, l'orateur a espéré qu'il serait possible au gouvernement du Myanmar et à l'OIT de travailler ensemble de façon résolue et a fermement espéré qu'un chargé de liaison serait prochainement nommé et qu'il s'acquitterait de sa tâche de coopération soutenue aux fins d'éliminer le travail forcé.
L'orateur a déclaré que les relations entre le Japon et le Myanmar ne contiennent et ne contiendraient aucun élément induisant directement ou indirectement le travail forcé. Par ailleurs, aucun projet d'assistance élaboré par le Japon dans le domaine des besoins humains fondamentaux, y compris la réhabilitation de l'usine hydroélectrique no 2 de Baluchaung, qui produit 24 pour cent de l'électricité totale dans le pays et qui nécessite une réfection, n'implique le recours au travail forcé. L'orateur a rappelé que le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies a fait état d'un besoin d'assistance humanitaire supplémentaire au Myanmar, particulièrement dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'énergie électrique et de l'aide alimentaire. L'orateur a enfin déclaré que, si le processus de démocratisation devait effectivement se poursuivre, le gouvernement du Japon soutiendrait plus activement les efforts vers la construction de la nation.
En réponse aux commentaires du membre travailleur du Japon, l'orateur a déclaré que le gouvernement du Japon respecte strictement ses obligations en vertu des instruments internationaux applicables et des lois et règlements japonais dans le traitement des étrangers au Japon.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis a déclaré que la situation du travail forcé au Myanmar est une préoccupation constante pour son gouvernement. Des initiatives dans le bon sens ont été prises par les autorités du Myanmar depuis la session spéciale de la commission l'année dernière, notamment dans les semaines suivant le Conseil d'administration du mois de mars. Plusieurs indications de bonne volonté et un nombre important de mesures touchant aux procédures ont vu le jour. Toutefois, à ce jour, les recommandations de la commission d'enquête sont toujours loin d'être intégralement mises en uvre: la loi sur les villes et la loi sur les villages doivent toujours être rendues conformes à la convention no 29, et les arrêtés pris à ce jour sont loin d'être suffisants; des instructions claires, détaillées et adéquatement divulguées sont toujours nécessaires afin d'assurer que le travail forcé n'est pas imposé en pratique, particulièrement par les autorités militaires, et les peines sanctionnant l'imposition du travail forcé doivent être appliquées de façon stricte sur la base d'enquêtes approfondies, de poursuites et de la condamnation judiciaire de ceux reconnus coupables.
La commission d'experts, la Mission de haut niveau et, plus récemment, le chargé de liaison ad interim de l'OIT ont soumis des suggestions détaillées quant à l'application des recommandations de la commission d'enquête. Les autorités du Myanmar doivent y donner suite sans délai. Il serait notamment urgent de mettre en place sans délai une représentation permanente de l'OIT au Myanmar. De plus, un médiateur indépendant et impartial, qui serait chargé d'enquêter sur les allégations de travail forcé, compléterait les autres mécanismes de contrôle et de sanction déjà en place. La controverse quant au meurtre de sept villageois de l'Etat de Shan démontre la nécessité de ce type d'enquête indépendante et externe.
Enfin, l'oratrice a souligné que l'objectif de l'OIT n'est pas de punir le Myanmar mais de l'aider, de façon constructive, à l'éradication d'une pratique qui est une offense à la dignité humaine et que tous les Membres de l'OIT s'entendent à ne pas tolérer. Tant que les trois recommandations de la commission d'enquête n'auront pas été appliquées, l'Organisation internationale du Travail devra maintenir les mesures qu'elle a adoptées à la 88e session de la Conférence, conformément à l'article 33 de sa Constitution.
Le membre gouvernemental de l'Inde a déclaré qu'après avoir attentivement examiné l'ordre du jour et l'information disponible devant la commission il a accueilli avec enthousiasme la nomination de M. Leon de Riedmatten comme chargé de liaison de l'OIT ad interim en attendant la nomination d'un chargé de liaison à plein temps, conformément au protocole d'entente entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT. L'Inde note avec satisfaction les activités entreprises par le chargé de liaison à ce jour ainsi que la coopération du gouvernement du Myanmar. L'Inde, par principe, a toujours appuyé la démarche promotionnelle suivie par l'OIT pour les questions relevant de sa compétence et s'oppose, en conséquence, à toute démarche tendant à faire avancer ses objectifs par la sanction. L'Inde est convaincue que les objectifs de l'OIT peuvent être mieux promus par le dialogue, la coopération et l'assistance technique. L'orateur espère la continuation de la collaboration complète du gouvernement du Myanmar. L'Inde encourage les deux parties à continuer leur dialogue afin de résoudre les questions pendantes tout en gardant à l'esprit de supprimer les mesures prises à l'encontre du Myanmar.
Le membre employeur du Japon a réitéré que les employeurs étaient optimistes tout en demeurant réalistes, et il a exprimé le ferme espoir que la pratique du travail forcé soit éliminée le plus tôt possible au Myanmar. Il a félicité le Directeur général et le personnel du BIT pour les efforts déployés. Il a cité le paragraphe 28 du document D.6(Corr.) qui fait état de diverses mesures qui pourraient être entreprises par le chargé de liaison et a déclaré que l'OIT était compétente pour s'acquitter de cette tâche. Enfin, il a souligné l'importance d'une large participation tripartite de même que de la coopération technique afin de mettre un terme au travail forcé au Myanmar.
Les membres employeurs ont pris note du débat sérieux et approfondi qui était nécessaire en raison des problèmes concernés. L'orateur a noté des signes de progrès tels que les procédures établies pour la coopération entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT ainsi que diverses mesures administratives. La coopération technique est très importante dans la recherche du progrès. Toutefois, en ce qui concerne le fond de l'affaire, de petits pas ont été accomplis mais de plus grands pas sont nécessaires. De nombreux obstacles existent toujours tels que la taille du pays, sa nature fermée, l'implication des autorités à différents niveaux et le fait que le travail forcé est une pratique de longue date et qui prendra du temps à disparaître.
Une présence permanente de l'OIT au Myanmar est cruciale jusqu'à la résolution du problème. Les mesures mentionnées dans le rapport de l'officier de liaison, telles que la promotion de l'emploi, doivent aussi être prises. Le gouvernement doit réaliser que le travail forcé ne nuit pas seulement aux victimes mais également au pays tout entier par les opportunités perdues et une mauvaise image au sein de la communauté internationale. En général, même si la situation présente une lueur d'espoir, elle comporte encore une grande part d'obscurité. Les conclusions de la Commission de la Conférence doivent refléter à la fois les progrès déjà réalisés et les problèmes importants qui persistent dans l'abolition du travail forcé de façon à stimuler davantage le dialogue avec le gouvernement du Myanmar en vue d'une résolution du problème.
Le membre gouvernemental du Myanmar a déclaré avoir écouté la discussion avec beaucoup d'intérêt et a apprécié les déclarations des orateurs, en particulier celles de l'Association des Nations du Sud-Est asiatique (ANSEA), qui s'est félicitée des changements mis en uvre.
En ce qui concerne la nomination d'un médiateur, l'orateur a déclaré que le Myanmar dispose déjà d'un système pour traiter les plaintes: la division des affaires juridiques du ministère de la Justice. Cette autorité est chargée de porter les plaintes à l'attention des autorités compétentes pour protéger les intérêts des gens. Les fonctionnaires doivent examiner les plaintes en conformité avec les directives du ministre de la Justice. L'orateur a également noté l'existence de 28 nouvelles sous-communes avec des officiers assistants de commune compétents pour traiter les différends, y compris les plaintes pour travail forcé. Un tel système est plus efficace qu'un médiateur, en raison de l'isolement de nombreuses régions du pays. De plus, l'officier de liaison par intérim a tenu de larges discussions sur le sujet.
L'orateur a déclaré que l'affaire des sept villageois assassinés a fait l'objet d'une enquête et qu'il s'est avéré que les responsables sont des terroristes; de plus, l'affaire ne concerne pas le travail forcé. Les discussions avec M. de Riedmatten ont traité la question.
L'orateur a soulevé une objection au fait que M. Maung-Maung, de la Fédération des syndicats de Birmanie, ait été autorisé à prendre la parole. L'orateur a affirmé que M. Maung-Maung est un terroriste et un criminel, et qu'en conséquence lui laisser prendre la parole constitue un abus de cette tribune de l'OIT.
L'orateur a exprimé son désir de continuer le dialogue et la coopération entre le Myanmar et l'OIT, qui s'est révélée fructueuse. Il a souligné que l'OIT devrait encourager le gouvernement à faire le maximum, mais il ne serait pas positif que les efforts accomplis ne soient pas reconnus. Il attend de la Commission de la Conférence qu'elle réponde positivement à la bonne volonté manifestée par le gouvernement.
Les membres travailleurs ont fait observer que le très vif intérêt suscité par ce débat de la part des membres des trois composantes de cette commission démontre suffisamment que la situation au Myanmar devra être maintenue à l'examen encore longtemps et, en tout état de cause, tant que des progrès réels n'auront pas été constatés, sur les trois plans évoqués par la commission d'enquête et la Mission de haut niveau. Ainsi, tant que la législation du Myanmar n'aura pas été rendue conforme à la convention no 29, que la pratique du travail forcé n'aura pas disparu et enfin que les personnes reconnues coupables d'imposer du travail forcé ne seront pas effectivement poursuivies, la pression sur ce pays devra être maintenue. Pour les membres travailleurs, s'il existait au Myanmar de véritables organisations de la société civile et, en particulier, des organisations de travailleurs fortes et indépendantes, comme le prévoit la convention no 87, ratifiée par le Myanmar, de telles organisations pourraient offrir aux victimes de travail forcé le soutien dont elles ont besoin pour pouvoir user des voies de recours qui leur sont ouvertes afin de défendre leurs droits reconnus.
Enfin, devant certains propos du représentant gouvernemental du Myanmar à l'adresse d'un représentant d'une organisation syndicale, M. Maung-Maung, les membres travailleurs ont rappelé qu'en vertu de cette même convention no 87, ratifiée par le Myanmar, les organisations de travailleurs sont libres de désigner leurs représentants et ont attiré solennellement l'attention de la commission sur des menaces contre la sécurité individuelle d'un représentant syndical ainsi désigné.
(non reproduit:
Observation de la commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'exécution par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930,
Autres faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930,
Rapport de la Mission de haut niveau (documents du Conseil d'administration GB.282/4 et GB.282/4/Appendices),
Procès-verbaux de la discussion à la 282e session du Conseil d'administration des faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (document du Conseil d'administration GB.282/PV),
Rapport de la mission de coopération technique du BIT au Myanmar (19-25 février 2002) (document du Conseil d'administration GB.283/5/2),
Autres faits nouveaux depuis le retour de la mission de coopération technique du BIT (document du Conseil d'administration GB.283/5/3(Rev.))
Après avoir pris connaissance des informations fournies par le représentant du gouvernement, la commission a pris note avec une profonde préoccupation de l'observation de la commission d'experts évaluant la suite donnée aux trois recommandations de la commission d'enquête en tenant compte des informations contenues dans le rapport de la Mission de haut niveau. En ce qui concerne en premier lieu la loi sur les villes et la loi sur les villages, qui n'ont pas encore fait l'objet de modifications, la commission d'experts a noté que l'arrêté no1/99, tel que complété, a reçu une large publicité et peut momentanément avoir affecté certains projets d'infrastructure civile, mais n'a pas mis un terme aux exactions de travail forcé, notamment par les militaires. Les instructions spécifiques et concrètes et les dispositions budgétaires qui font défaut n'ont pas encore été adoptées, ou du moins préparées, en vue de remplacer effectivement le recours au travail forcé par une offre de salaires et de conditions d'emploi décente, permettant d'attirer librement la main-d' uvre nécessaire. Enfin, aucune sanction n'a été imposée en vertu de l'article 374 du Code pénal ou de toute autre disposition, conformément à l'article 25 de la convention, aux personnes responsables des exactions de travail forcé, et les voies de recours offertes aux plaignants ne sont pas effectives.
La commission s'est par ailleurs penchée sur les informations relatives à la Mission de haut niveau et aux suites qui lui ont été données contenues dans le rapport supplémentaire soumis à la commission. Elle a relevé que, grâce à la coopération des autorités, il a été possible de disposer pour la première fois, à travers ce rapport, d'une évaluation conduite librement sur place ainsi que de l'autre côté de la frontière quant à l'impact de la nouvelle réglementation sur les réalités de la situation du travail forcé à travers le pays. Elle salue également le fait que l'une des recommandations de la Mission de haut niveau visant à assurer une présence de l'OIT au Myanmar ait fait l'objet d'un suivi et que la présence de l'OIT se soit déjà utilement concrétisée à travers la désignation du chargé de liaison ad interim et le rapport qu'il a été déjà en mesure d'établir. Elle souligne cependant que cette présence n'est qu'un moyen et ne peut avoir de sens que si le futur chargé de liaison dispose au plus vite de la capacité et du soutien administratif, ainsi que des facilités qui lui permettront de conduire les différentes activités pouvant contribuer à la mise en uvre effective de l'interdiction du travail forcé. Ces facilités doivent inclure notamment la liberté de mouvement et de contact et exigent la coopération de toutes les autorités, y compris militaires. La commission regrette par ailleurs qu'aucune suite concrète n'ait été donnée jusqu'ici aux autres importantes suggestions présentées par la Mission de haut niveau en ce qui concerne, d'une part, les allégations relatives à l'assassinat de victimes du travail forcé dans l'Etat de Shan et, d'autre part, l'institution d'une forme de médiation indépendante et crédible qui pourrait offrir une voie de recours à laquelle les futures victimes puissent faire confiance. Une telle institution est d'autant plus nécessaire, en l'absence de la liberté syndicale, dont le lien avec la situation du travail forcé a été souligné par la Mission de haut niveau. La commission regrette aussi que la meilleure diffusion des dispositions interdisant le travail forcé par tous les moyens et dans toutes les langues appropriées, qui avait été réclamée par la Mission de haut niveau, n'ait pas été suivie d'effet. De manière générale, la commission souligne la nécessité d'un progrès réel, rapide et vérifiable non seulement sur le plan des procédures, mais aussi et surtout sur la réalité persistante du travail forcé et l'impunité générale des responsables, notamment militaires. Elle encourage le Bureau et le Directeur général à poursuivre résolument leurs efforts sur l'ensemble de ces questions, et le dialogue avec le gouvernement et toutes les parties concernées, ainsi qu'à faire rapport au Conseil, auquel il appartiendra d'examiner, selon le cas, les conséquences qu'il conviendrait de tirer des progrès ou de l'absence de progrès à sa session du mois de novembre 2002.
La commission a pris note à cet égard que le représentant du Myanmar, au terme du débat, a exprimé la volonté de son gouvernement de s'acquitter de ses obligations internationales et de poursuivre le dialogue avec l'OIT.
Elle rappelle enfin que le gouvernement devra soumettre, pour examen par la commission d'experts, à sa prochaine session, un rapport détaillé sur toutes les mesures adoptées pour assurer le respect de la convention dans la législation et dans la pratique.
Séance spéciale concernant l'application par le Myanmar de la convention (no. 29) sur le travail forcé, 1930, en application de la résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 88e session (2000)
A. Comptes rendus de la Commission d'application des normes
Le président a déclaré que le point examiné s'inscrit à l'ordre du jour de la commission, conformément au paragraphe 1 a) de la résolution adoptée par la Conférence à sa dernière session concernant l'adoption, en application de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, de mesures visant à assurer l'exécution des recommandations de la commission d'enquête établie pour examiner le respect par le Myanmar de ses obligations aux termes de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. La Conférence a décidé "que la question de la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête et de l'application de la convention no 29 par le Myanmar fasse l'objet d'une séance spéciale consacrée à cet effet de la Commission de l'application des conventions et recommandations lors des futures sessions de la Conférence internationale du Travail et tant qu'il n'est pas avéré que ce membre se soit acquitté de ses obligations".
Pour l'examen de ce point, la commission est saisie des documents suivants: 1) de l'observation de la commission d'experts sur l'application de la convention no 29 par le Myanmar; et 2) d'une part, le document D.6 (contenant les documents soumis au Conseil d'administration (GB.280/6, GB.280/6 (Add.1) et GB.280/6 (Add.2) pour l'examen à sa 280e session (mars 2001) de la sixième question à l'ordre du jour: "Faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et le procès verbal provisoire de l'examen par le Conseil d'administration à sa 280e session (mars 2001) de la même question à son ordre du jour) et, d'autre part, le document D.7 (sur les Arrangements relatifs à une évaluation objective de la situation en matière de travail forcé suite aux mesures adoptées par les autorités du Myanmar) soumis à la demande du Conseil d'administration. L'annexe 5 du document D.7 contient le texte du protocole d'entente sur une évaluation objective de la mise en uvre pratique des mesures législatives, gouvernementales et administratives adoptées par le gouvernement. Ce protocole d'entente se réfère directement à l'observation de la commission d'experts.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a accueilli avec satisfaction le changement radical de l'opinion générale sur la situation du Myanmar ainsi que l'évolution de l'attitude régnant au sein de la commission par rapport à celle qui prévalait lors de sa 88e session (juin 2000) et lors de la 279e session du Conseil d'administration (novembre 2000). Il y règne maintenant plus d'optimisme et de perspectives positives de la part des Etats Membres et délégués de la commission. Cette nouvelle atmosphère a été suscitée par un développement très important, à savoir la conclusion du protocole d'entente entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT sur les "modalités d'une évaluation objective". Cette entente fait suite à la mission de l'OIT qui s'est rendue au Myanmar le mois dernier.
L'orateur a informé la commission sur le processus qui a abouti aux modalités d'évaluation objective. Le gouvernement du Myanmar a déjà mis sur pied un dispositif complet de mesures législatives, gouvernementales et administratives pour garantir l'absence du travail forcé dans la pratique au Myanmar. De plus, l'arrêté complétant l'arrêté no 1-99, daté d'octobre 2000, indique clairement que l'utilisation du travail forcé est illégale et qu'elle constitue une infraction aux lois en vigueur dans l'Union du Myanmar. Il est interdit aux personnes responsables, y compris les membres des autorités locales, des forces armées, des forces de la police et d'autres branches du service public, de réquisitionner des personnes pour un travail forcé ou un service non volontaire. Il énonce également clairement les conséquences légales, pour les personnes se rendant coupables de telles pratiques, en stipulant que toute personne - y compris les autorités locales, les membres des forces armées, des forces de la police et d'autres branches du service public - qui ne respectera pas l'arrêté sera poursuivie en vertu de l'article 374 du Code pénal. De plus, le Secrétaire du Conseil d'Etat pour la paix et le développement a publié une instruction (datée du 1er novembre 2000) interdisant la réquisition du travail forcé et adressée à tous les présidents de tous les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions de toutes les régions du pays. Des mesures d'application et des activités nationales de contrôle ont également été poursuivies.
L'intervenant a mis l'accent sur le fait que la plupart des Etats Membres et des délégués ont reconnu, lors de la 279e session du Conseil d'administration, que des mesures concrètes avaient été entreprises par le gouvernement du Myanmar. Cependant, la question d'une "évaluation objective" s'est alors avérée litigieuse. Le gouvernement du Myanmar a alors généreusement offert de recevoir le représentant du BIT basé au bureau régional à Bangkok ou à Genève. cette question a suscité, à ce moment, diverses prises de position. Le représentant gouvernemental a déploré ce qui s'est passé à la 279e session du conseil d'administration. Cependant, il a réaffirmé sa confiance dans le processus de dialogue et de coopération engagé en vue de résoudre les problèmes. Pour cette raison, le Myanmar a conclu un accord avec le Directeur général du BIT. Le 22 mars 2001, l'honorable ministre adjoint des affaires étrangères du Myanmar a rendu visite au directeur général du BIT, alors qu'il se rendait à une conférence internationale en Amérique du Sud, et a discuté des modalités de l'évaluation objective. Lors de cette discussion, le ministre adjoint a informé le directeur général du BIT que le gouvernement du Myanmar avait désigné le représentant permanent du Myanmar à Genève comme personne chargée d'engager les discussions avec le BIT sur les modalités de l'évaluation objective. De plus, le représentant du gouvernement a lui-même engagé des discussions de vaste portée avec le directeur général du BIT sur ce même sujet. Par la suite, le 4 juin 2001, le ministre au sein du bureau du Premier ministre, présent à la 89e session de la Conférence, a eu de fructueuses discussions avec le directeur général du BIT sur des sujets d'intérêt mutuel.
L'orateur a rappelé que le document D.7 fournit une information détaillée sur la mission de l'OIT du mois dernier. La mission de l'OIT a visité le Myanmar du 17 au 19 mai 2001. Le résultat de cette mission a été la conclusion importante du Protocole d'entente entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT sur "les modalités de l'évaluation objective". Selon ce protocole d'entente, une équipe de haut niveau, dirigée par une personne respectée, se rendra au Myanmar pour réaliser une évaluation objective en septembre 2001.
L'intervenant a exprimé la conviction que les mesures prises par le gouvernement du Myanmar sont concrètes, étendues et efficaces. Il a rappelé que l'OIT considère qu'il doit y avoir une évaluation objective de ces mesures pour leur donner de la crédibilité et assurer la confiance au niveau international. Il a, à cet effet, réaffirmé que le gouvernement du Myanmar n'avait pas seulement mis en place un dispositif de mesures législatives, gouvernementales et administratives, mais qu'il avait également accepté de recevoir une évaluation objective d'une équipe de haut niveau. Les choses vont donc dans la bonne direction.
L'orateur a par ailleurs sérieusement mis en doute la valeur de l'application des sanctions. Il a émis l'avis que les meilleures sanctions sont celles qui ne sont jamais utilisées et jamais appliquées. Les sanctions sont comme des armes nucléaires, leur valeur réside dans leur effet dissuasif et non dans leur utilisation réelle. Son gouvernement s'oppose, par principe, à l'application de sanctions contre les Etats Membres pour résoudre un problème. Etant donné qu'il existe désormais un protocole d'entente entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT sur les modalités de l'évaluation objective, les difficultés auxquelles il a fait référence n'existent plus.
L'orateur a donc invité instamment la commission à ne pas se tourner vers le passé mais à regarder vers l'avenir et à avancer pour résoudre ce problème étape par étape. La plupart des Etats Membres et des délégués ont reconnu qu'il existe au sein du gouvernement du Myanmar une véritable volonté politique et qu'il s'est engagé à résoudre le problème allégué d'utilisation du travail forcé. Personne ne peut nier que le protocole d'entente sur les modalités d'une évaluation objective de la situation constitue une étape importante. Il s'agit en fait d'une véritable percée. Compte tenu de ce développement positif très important, il a exhorté instamment la commission à recommander à la 282e session du Conseil d'administration la révision des mesures prises en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, à la lumière des résultats de la visite de l'équipe de haut niveau.
Les membres travailleurs ont déclaré que la situation du travail forcé en Birmanie est une situation qui préoccupe tellement de gens que la commission pourrait discuter de ce cas pendant trois jours ou même une semaine. Il est primordial que ce cas soit, tout comme les autres cas d'ailleurs, examiné de façon sérieuse et selon les procédures propres à la Commission de l'application des normes. Ils ont déclaré que, tout comme pour la discussion sur les cas individuels, il est important de connaître la position des employeurs même s'ils sont convaincus que dans cette situation particulière les employeurs seront sur la même ligne qu'eux.
Les membres travailleurs ont déploré que la commission soit à nouveau saisie de ce cas. C'est un cas qui connaît malheureusement déjà une longue histoire et qui a nécessité pour la première fois dans l'histoire de l'OIT l'utilisation d'une procédure très spéciale (art. 33 de la Constitution de l'OIT). Ils ont regretté fortement cette situation qui n'est que le résultat de la persistance de pratiques inacceptables de travail forcé dans ce pays. Ils ont déclaré qu'ils continueraient à mettre ce cas à l'ordre du jour des organes de l'OIT tant que les recommandations de la commission d'enquête ne seront pas mises en uvre. Ils ont rappelé qu'aux termes de cette commission d'enquête le gouvernement du Myanmar est exhorté à s'assurer que: a) la législation soit mise en conformité avec les dispositions de la convention no 29; b) la pratique soit mise en conformité avec les dispositions de la convention no 29, c'est-à-dire qu'aucun travail forcé ou obligatoire ne peut être imposé par les autorités; et c) des sanctions soient prévues et appliquées à ceux qui se rendent coupables de violations de l'interdiction d'imposer du travail forcé.
Les membres travailleurs ont indiqué qu'ils n'entendent pas refaire l'historique de ce cas mais ont tenu à rappeler les violations graves, continues et systématiques de la convention no 29 sur le travail forcé en Birmanie. Ils ont souligné qu'ils n'ont pas inventé ces violations et rappelé qu'il existe une multitude de preuves de ces pratiques.
Les membres travailleurs ont relevé que la commission examine de nouveau le cas très grave du travail forcé en Birmanie, après une interruption de deux ans. Pendant cette période, la gravité de la situation et l'absence chronique de coopération du gouvernement ainsi que son inobservation de la convention ont fait que jamais les mécanismes de contrôle de l'OIT n'ont été autant mis à contribution. La commission donne suite aux recommandations adoptées en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT lors de la session précédente de la Conférence, laquelle l'a chargée de continuer à examiner la pratique du travail forcé en Birmanie. La séance spéciale d'aujourd'hui est un élément essentiel des efforts que l'OIT déploie pour obliger le gouvernement en question à satisfaire à ses obligations au titre de la convention no 29 et à mettre un terme aux souffrances de dizaines de milliers de victimes du travail forcé. Ils ont estimé que c'était là une lourde responsabilité. Les membres travailleurs ont souligné d'emblée que, malgré les commentaires du représentant gouvernemental, il y a encore quelques mois, ce pays continuait de nier l'existence du travail forcé. Le 9 mars 2001, le représentant de la Mission permanente de la Birmanie à Genève a déclaré à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies que les citoyens du Myanmar estiment que le travail est méritoire et contribue au bien-être mental et physique, que les populations locales contribuent avec leur travail aux activités communautaires, que les populations semblent heureuses et joyeuses, qu'elles n'ont donc pas l'air malheureux, pas plus qu'elles ne semblent être forcées à travailler. Les membres travailleurs ont fait observer que ces déclarations du gouvernement avaient été les principaux sujets des discussions de la commission à la session précédente. Par ailleurs, malgré son ton conciliant, le représentant gouvernemental n'admet en aucune façon l'existence de ce problème, ni qu'il ait jamais existé.
Comme on pouvait s'y attendre, la commission d'experts a articulé ses commentaires, assez longs, autour des trois recommandations de la commission d'enquête. La première partie de ces commentaires est axée sur les aspects juridiques du cas, à savoir que, pour mettre un terme au travail forcé en Birmanie, il faut modifier la législation. La deuxième partie porte sur les mesures à prendre, qui en fait n'ont pas été prises, pour en finir avec cette pratique, ainsi que sur les informations disponibles sur la pratique actuelle. Enfin, la troisième partie porte sur ce qui permettra de déterminer que des mesures ont été prises pour que les personnes ayant recours au travail forcé soient sanctionnées pénalement. Selon la commission d'experts, de telles mesures n'ont pas été prises.
Les membres travailleurs ont souligné que les trois aspects des recommandations de la commission d'enquête doivent être pleinement mis en uvre avant d'envisager la levée des mesures prises par la Conférence à sa dernière session, au titre de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. Le cadre juridique qui permet de recourir amplement au travail forcé doit être éliminé. Il doit être démontré que cette pratique a bien été éliminée et les coupables doivent être sanctionnés. Tant que cela ne sera pas le cas, il faut faire prendre conscience au régime en place que l'OIT restera vigilante.
L'OIT a montré qu'elle est disposée à aider le gouvernement, autant que possible, à appliquer pleinement les recommandations de la commission d'enquête. En tout état de cause, la seule possibilité qu'ait le gouvernement de ne plus être soumis à la pression de la communauté internationale et à l'ostracisme, c'est de mettre un terme au système de travail forcé, en droit et dans la pratique, et de sanctionner les responsables. La commission d'experts a indiqué qu'il y a encore beaucoup de chemin à faire.
Dans la première section de son rapport, la commission d'experts a une nouvelle fois examiné les mesures juridiques que le régime a prises, en particulier l'arrêté prescrivant aux autorités compétentes de ne pas exercer les pouvoirs qui leur sont conférés par des dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes qui autorisent le travail forcé. L'analyse de cet arrêté par la commission d'experts est assez claire. Au paragraphe 4 de son rapport, elle indique que cet arrêté maintient ses pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages qui restent incompatibles avec les exigences de la convention. Au paragraphe 6, la commission observe que la modification des lois susmentionnées, que la commission d'enquête et elle-même ont demandée et que le gouvernement promet depuis des années, n'a pas été encore effectuée.
En outre, dans la première partie de la deuxième section de son rapport, la commission d'experts se dit préoccupée par le fait que les premiers responsables du travail forcé, c'est-à-dire les militaires, ne semblent pas concernés par cet arrêté. Selon le représentant du gouvernement, les autorités militaires n'ont plus recours au travail forcé. En fait, les militaires restent au-dessus de la loi. Telle est la réalité en Birmanie depuis des décennies. Tant que cette situation n'aura pas été corrigée, le travail forcé demeurera.
Le rapport consacre quelques paragraphes succincts mais extrêmement importants aux informations disponibles à ce sujet. Le paragraphe 20 rappelle que la CISL a joint à sa communication plus de mille pages de documents émanant de plus de vingt sources différentes et que ces documents comprennent des rapports, des témoignages de victimes, plus de 300 ordres imposant du travail forcé, des photographies, des enregistrements vidéo et d'autres pièces. De plus, le rapport indique que la plus grande partie des documents porte sur la période juin-novembre 2000. En d'autres termes, cela couvre la période au cours de laquelle des mesures ont été adoptées en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT lors de la Conférence de l'année dernière. C'est au cours de cette même période que le régime et ses supporters ont exercé des fortes pressions sur les membres du Conseil d'administration de novembre 2000 pour éviter que ces mesures n'entrent en vigueur. Le rapport a mis l'accent sur le fait qu'une section importante de la communication de la CISL consiste en des centaines "d'ordres de travail forcé" émis principalement par les forces armées, qui sont d'un type, d'une forme et d'un contenu semblables aux ordres que la commission d'enquête a déjà examinés et considérés comme authentiques.
La CISL a soumis un deuxième rapport à la session de mars 2001 du Conseil d'administration, qui comporte 300 pages de documents analogues, lesquelles montrent que, sans conteste, la pratique du travail forcé se poursuit. Comme l'indique le paragraphe 66 du document D.6, le rapport de la CISL précise qu'un grand nombre de moyens sont utilisés par les autorités pour masquer le recours au travail forcé. Le procédé consiste, par exemple, à enjoindre aux villageois, toujours par voie d'ordonnance, d'assister à des réunions aux camps militaires d'où ils sont réquisitionnés, de manière qu'il ne ressort pas explicitement des ordonnances qu'il s'agissait d'une réquisition. La man uvre consiste également à émettre des ordonnances qui ne sont ni datées, ni signées, ni revêtues d'un timbre, ou encore à exiger qu'elles doivent être rapportées à l'autorité militaire qui les a édictées. Les autres tactiques consistent, pour les militaires, à utiliser les autorités civiles pour réquisitionner de la main-d' uvre; ou encore à arrêter arbitrairement des personnes jeunes et en bonne santé qui, après quelques jours de prison, sont utilisées comme porteurs pour le compte de militaires après avoir été vêtues d'uniformes usagés.
D'autres informations crédibles existent, notamment le rapport qu'Amnesty International devrait présenter dans deux jours. Ce rapport contient des entretiens avec des personnes victimes cette année de travail forcé. Les membres travailleurs ont souligné que, lorsqu'on prend le temps d'enquêter de façon indépendante sur le travail forcé, en particulier à proximité des frontières entre zones ethniques, il en ressort que le travail forcé reste une réalité tragique. Les membres travailleurs ont rappelé que, selon la commission d'enquête et la commission d'experts, cette pratique touche particulièrement les exploitants agricoles et les personnes les plus démunies, ainsi que les communautés qui ne sont pas de souche birmane. Cette pratique est cruelle, inhumaine, surtout à l'égard des femmes, victimes de viols et d'autres actes barbares, et des enfants. Des personnes, dont des femmes et des enfants, sont utilisées pour des travaux de déminage pour le compte de militaires, lesquels harcèlent sans relâche certaines communautés ethniques.
De nombreux orateurs ont rappelé au cours de la discussion générale que le rôle de la commission est d'aller au-delà de l'analyse juridique de la commission d'experts et de donner aux situations examinées une dimension réelle. Voilà la réalité actuelle en Birmanie, tragédie qui dure depuis des décennies, qui affecte presque toutes les communautés et toutes les familles de certaines régions du pays, une réalité qui persiste malgré les efforts que l'OIT déploie pour que la situation change.
A propos des communications du Directeur général adressées aux mandants de l'OIT et des réponses qui ont été apportées au sujet de sa demande (voir document D.6), les membres travailleurs se sont dits extrêmement déçus par l'insuffisance des mesures prises par certains Etats Membres. Se référant au gouvernement japonais, les membres travailleurs ont indiqué que certains gouvernements ont répondu au Directeur général en faisant exactement l'inverse de ce qu'il demandait, c'est-à-dire qu'ils ont approfondi leurs relations avec le régime militaire en reprenant l'assistance pour le développement. Les membres travailleurs ont estimé que ces initiatives sont malheureuses, pire, déplorables. Ces gouvernements, pour défendre ces initiatives, ont estimé que l'OIT est le vent du nord et eux le soleil, et que le vent du nord et le soleil sont nécessaires au changement. Les membres travailleurs, eux, ont estimé que, de fait, pour les responsables du travail forcé en Birmanie, ces gouvernements représentent le soleil mais, pour les dizaines de milliers de victimes du travail forcé, pour les citoyens de la Birmanie, ces gouvernements sont le vent du nord et l'OIT le soleil.
Certains gouvernements, dont les Etats-Unis, ont expliqué au Directeur général leur manque d'initiatives. Peu de temps après la session de novembre 2000 du Conseil d'administration, le régime de la Birmanie a engagé un dialogue avec Mme Daw Aung San Suu Kyi, laquelle est virtuellement assignée à résidence depuis près de dix ans, et continue de l'être. Les membres travailleurs ont estimé que le début de ces entretiens secrets n'est pas dû au hasard et que les initiatives de l'OIT, en particulier l'adoption de mesures au titre de l'article 33, ont amené le régime à faire ce qu'il avait obstinément refusé depuis plus de dix ans. L'OIT doit en être félicitée.
Se référant aux Etats-Unis, les membres travailleurs se sont dits persuadés que, à la fin de 2000, le gouvernement des Etats-Unis, en réponse à la demande du Directeur général, était prêt à imposer un embargo sur les importations en provenance de la Birmanie. Les entretiens susmentionnés ont retardé cet embargo. Toutefois, un projet de loi a été soumis par les deux parties au Sénat des Etats-Unis en vue d'interdire toutes les importations de la Birmanie. Cette loi fait mention des mesures demandées par l'OIT. En outre, une coalition de groupes aux Etats-Unis a demandé à de grandes entreprises de distribution de ne pas autoriser dans leurs magasins la vente de produits en provenance de la Birmanie. Les initiatives de l'OIT sont citées dans les lettres adressées à ces entreprises. A ce jour, neuf entreprises, dont plusieurs entreprises importantes et bien connues aux Etats-Unis, se sont publiquement engagées à ne pas vendre de produits en provenance de la Birmanie ou ont réitéré leur engagement. Malheureusement, beaucoup d'entreprises minières opèrent depuis de nombreuses années en Birmanie. Néanmoins, récemment, des résolutions ont été prises lors de réunions d'actionnaires en vue de cesser d'investir dans ce pays au motif de la pratique répandue du travail forcé. L'une de ces résolutions a été appuyée par 22 pour cent des actionnaires, soit une proportion élevée et, semble-t-il, en hausse.
Les membres travailleurs ont fait observer que toutes les personnes présentes, à l'exception peut-être des représentants du régime militaire, souhaitent que le dialogue aboutisse afin que l'on revienne à un gouvernement civil et à un Etat de droit. Mais ce dialogue, engagé il y a neuf mois, n'a pas donné de résultats apparents. A n'en pas douter, il ne s'agit pas d'une réconciliation puisque Mme Daw Aung San Suu Kyi reste virtuellement assignée à son domicile. Elle ne peut pas se déplacer et ne peut pas s'entretenir avec ses nombreux partisans. Les membres travailleurs ont donc demandé combien de temps les Etats Membres continueront d'attendre, sous prétexte du dialogue susmentionné, pour donner suite à la demande du Directeur général. Faudra-t-il une année de plus ou attendre jusqu'à la session de novembre 2001 du Conseil d'administration et inscrire de nouveau cette question à l'ordre du jour? Au bout de quelle "période décente" considérera-t-on que cette attente devient "indécente" et qu'elle n'est qu'un prétexte pour ne pas agir? Les membres travailleurs ont estimé qu'il faut continuer de faire pression sur le régime car ce qui peut apparaître comme un relâchement de la communauté internationale conduira à l'échec.
Les membres travailleurs ont rappelé aux gouvernements que ce qui est à l'examen, depuis près de 40 ans, ce n'est pas une question de normalisation politique mais c'est l'élimination du travail forcé en Birmanie. C'est la seule mesure que la commission puisse prendre pour évaluer l'efficacité des mesures que le régime prend et, tant que le travail forcé sera une réalité, les mesures au titre de l'article 33 devront se poursuivre. Atténuer, voire éliminer ces mesures prématurément, pourrait causer un tort irréparable à l'OIT, car la capacité de l'Organisation à mettre en uvre ces normes sera alors remise en cause.
Les membres travailleurs ont pris note que, récemment, le régime a accepté de recevoir une équipe de haut niveau en septembre 2001, laquelle sera chargée d'évaluer la mesure dans laquelle le travail forcé a été éliminé. Les membres travailleurs ont estimé que cette mission constitue une première étape qui, si elle reste imparfaite, est potentiellement positive. Ils ont formulé l'espoir qu'elle débouche à terme sur un programme effectif, visant à éliminer une fois pour toutes le recours généralisé au travail forcé en Birmanie. Il ne s'agit que d'une première étape, modeste, et non d'un changement radical, comme l'a dit le gouvernement de la Birmanie. Les membres travailleurs ont rappelé les rumeurs infondées, qui ont circulé l'année passée, lors de la Conférence et de la session du Conseil d'administration, selon lesquelles, pour éviter les mesures au titre de l'article 33, le régime était prêt à accepter que l'OIT soit présente en Birmanie pour contrôler les mesures d'élimination du travail forcé. Le temps manque maintenant pour débattre des avantages et des inconvénients de cette idée mais les membres travailleurs ont souligné que ce qui est proposé aujourd'hui reste très éloigné de ce qui avait été suggéré l'année passée.
Les membres travailleurs suivront de près les conclusions de l'équipe de haut niveau et espèrent qu'elle débouchera sur quelque chose de positif mais, manifestement, ce geste du régime n'est qu'un tout petit premier pas. D'ailleurs, des éléments indiquent que le régime a demandé à la population de nier l'existence du travail forcé. Les membres travailleurs ont eu connaissance d'informations selon lesquelles la semaine passée, dans un village de l'Etat de Mon, le responsable du Secrétariat du Conseil d'Etat pour la paix et le développement a rassemblé les villageois pour leur dire qu'il se pouvait que des étrangers viennent bientôt pour leur poser des questions sur le travail forcé. Ces villageois auraient eu pour instruction de nier que le travail forcé existe et ils paieraient les militaires pour échapper au travail forcé. Ces éléments d'information seront communiqués à l'OIT. L'efficacité de l'action de l'OIT en ce qui concerne ce cas, qui n'a que trop duré, ne doit pas être mesurée à l'aune de ces mesures modestes. Elle ne peut être mesurée qu'à sa capacité d'obliger l'Etat Membre à l'examen à faire ce que manifestement il n'a jamais voulu faire, c'est-à-dire respecter ses obligations au titre de la convention no 29. Si certains gouvernements semblent se contenter encore de ces gestes du régime, la réalité tragique est que, aujourd'hui encore, des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants continuent d'être victimes en Birmanie de la forme la plus exécrable de travail forcé. Voilà la réalité à laquelle la commission est confrontée.
A la lumière des développements qui précèdent, les membres travailleurs ont indiqué que le problème du travail forcé en Birmanie est complexe, du fait de sa nature, de sa diversité, de son étendue et de son immensité. C'est une situation qui pèse lourd sur l'ensemble de la population de la Birmanie/Myanmar. Elle a des conséquences terribles sur les habitants de ce pays et sur leur vie sociale. Elle est néfaste pour l'emploi puisque les gens ne sont pas dans la possibilité d'avoir un travail "normal" tant qu'ils sont réquisitionnés en masse par les autorités. La situation est par conséquent funeste pour l'ensemble de l'économie du pays.
Les violations de la convention no 29 de l'OIT dans la législation et dans la pratique sont généralisées, systématiques et structurées. Les autorités civiles et militaires recourent de façon structurelle au travail forcé pour toute une série de travaux et services. Des milliers de personnes sont réquisitionnées par les autorités pour effectuer ces travaux. Du point de vue juridique, ce sont les lois sur les villages et sur les villes qui concentrent les plus graves violations de la convention. Comme indiqué précédemment, le travail forcé ou obligatoire est imposé par les autorités à tous les niveaux et notamment par les militaires.
Les membres travailleurs ont estimé qu'après avoir exposé le problème il convenait de travailler à la recherche de solutions possibles. Ils ont pris note des promesses faites par le gouvernement. Ils ont bien entendu les déclarations du représentant gouvernemental selon lesquelles des progrès seraient réalisés et des améliorations de la situation auraient lieu. Ils ont souhaité rappeler au gouvernement que ces initiatives et modifications dont il parle doivent être évaluées par l'OIT. Il faut que l'Organisation puisse évaluer de façon objective et impartiale la mise en uvre pratique et l'impact réel de mesures prises par le gouvernement pour lutter contre le travail forcé.
Pour les membres travailleurs, il est indispensable que l'OIT puisse envoyer régulièrement sur place une mission afin de garantir une évaluation objective de la situation. Ils ont indiqué que, lorsque cette première condition sera remplie, il faudra ensuite que cette mission soit composée de personnalités de haut niveau et reconnues, possédant une expertise remarquable en la matière, donc des personnes qui connaissent très bien la région et la situation du pays. Un des membres de la commission d'enquête devrait également faire partie de cette mission.
Les membres travailleurs ont souligné que, la Birmanie étant un pays très étendu, il n'est pas possible de visiter toutes les régions du pays en peu de temps et si les membres de la mission ne sont pas assez nombreux. Ils ont donc souhaité que la composition de la mission soit assez large pour pouvoir se répartir le travail au niveau géographique. Il est d'ailleurs indispensable que la mission ait des contacts non seulement dans le pays même mais également dans les régions frontalières. Ils ont souligné que le problème même du travail forcé est très large car il existe différentes sortes de travail forcé en Birmanie. La commission doit pouvoir examiner toutes les formes de travail forcé, ce qui est un autre élément plaidant en faveur d'une large délégation.
Les membres travailleurs ont estimé que, pour garantir un résultat effectif, il est crucial que les membres de la mission aient accès à toutes les informations, toutes les régions et toutes les personnes ils jugent nécessaire de consulter. Cette condition sera probablement le plus grand problème auquel la mission sera confrontée. Ils ont souhaité que tous les moyens soient mis en uvre pour éviter le plus possible que des limites soient imposées à ce que la commission peut examiner. La sécurité ne doit pas être un prétexte pour tenir la mission à l'écart des régions qui sont en conflit. Il est important que des interprètes soient mis à la disposition de la mission, mais si ces interprètes sont utiles pour la traduction de la langue birmane il convient de s'assurer également de l'interprétation des langues parlées par les minorités ethniques. Ce sont en effet ces minorités ethniques qui sont les principales victimes de la pratique du travail forcé dans ce pays. Mais, à leurs yeux, la condition la plus importante concerne la protection des témoins. Il est en effet primordial de garantir une protection efficace des personnes qui disposent d'informations pertinentes avec lesquelles la mission pourra avoir des contacts. Cette protection doit être garantie non seulement lors de la prise de contact mais également et surtout après. Il s'agit de faire preuve de créativité pour trouver les moyens de garantir cette protection. Enfin, ils ont souhaité que l'on réfléchisse bien sur le meilleur moment pour la mission de se rendre sur place, soulignant qu'il fallait prendre en compte également les conditions climatiques.
Le gouvernement de la Birmanie souhaite convaincre la Commission de la Conférence de sa volonté d'améliorer la situation en vue de faire disparaître le travail forcé. Le groupe des travailleurs a exprimé l'espoir qu'en acceptant une mission avec le mandat décrit ci-dessous cette volonté politique puisse se confirmer. En tout état de cause, cette mission ne saurait être considérée comme la fin de ce cas. Elle constitue seulement le début d'un processus, un pas vers une amélioration de la situation en matière de travail forcé dans ce pays. Les membres travailleurs ont rappelé les propos d'un des leurs lors de la discussion générale, à savoir que la Commission de l'application des normes de la Conférence est une commission qui est très patiente. Par conséquent, ils se sont engagés à suivre de près l'évolution de ce cas et à demander régulièrement que des mesures soient prises auprès du gouvernement afin que les choses bougent. La commission insistera sur ce point jusqu'au moment où les recommandations de la commission d'enquête seront appliquées et le travail forcé en Birmanie aboli. Ils ont informé la commission que les membres travailleurs exigeront l'envoi de missions pour visiter le pays à différentes périodes de l'année jusqu'à ce que cet objectif soit atteint.
Les membres travailleurs ont pris bonne note du document D.9 (Mémorandum relatif au Protocole d'entente entre le gouvernement du Myanmar et le Bureau international du Travail sur les modalités d'une évaluation objective de l'application par le gouvernement du Myanmar de la convention no 29 (travail forcé)) et de la déclaration du représentant gouvernemental. Ils se sont opposés aux conclusions figurant dans ledit document. Les membres travailleurs insistent pour que l'OIT continue sur la même voie, c'est-à-dire que l'objectif reste le même: la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête. La situation doit être évaluée de façon objective et permanente par l'OIT. C'est seulement sur la base de cette évaluation objective que des conclusions pourront être tirées par l'OIT à propos de ce cas.
Les membres employeurs ont remercié le représentant du gouvernement du Myanmar de sa déclaration et ont relevé que celui-ci se montrait d'ores et déjà optimiste. L'avenir dira toutefois si cet optimisme est ou non prématuré.
Les membres employeurs considèrent que le cas à l'étude est inhabituel non pas en raison du contexte ni de l'intérêt suscité, mais plutôt en raison de la gravité des violations de l'une des conventions les plus ratifiées, de la persistance de la situation, des mesures prises par l'OIT et du refus obstiné du gouvernement d'honorer les obligations qu'il a contractées en vertu de la convention no 29. Les organes de contrôle de l'OIT se penchent sur ce cas depuis plusieurs années. Les membres employeurs ont indiqué que le système normatif de l'OIT est à juste titre considéré comme le plus efficace de l'Organisation des Nations Unies et ont rappelé que l'instauration de ce système de double contrôle remonte à soixante-quinze ans exactement. Comme à l'accoutumée, la commission est appelée à délibérer sur la base du rapport de la commission d'experts. Ce rapport contient à nouveau une description précise de la situation du Myanmar et de l'évolution enregistrée au cours des trois dernières années. La commission d'experts a examiné ce cas pratiquement chaque année depuis 1991 et a maintes fois conclu à de très graves violations de la convention. Parallèlement, la Commission de la Conférence a examiné cette question à quatre reprises depuis 1992 et a maintes fois exprimé la préoccupation que lui inspire la gravité des infractions à la convention, dans des paragraphes spéciaux intitulés "défaut continu d'application" en 1995, 1996 et 1997.
Les membres employeurs ont rappelé qu'au Myanmar de nombreuses personnes - femmes, jeunes et personnes âgées - sont astreintes à des travaux forcés. Ainsi, aux échelons local et national, les autorités militaires et civiles les soumettent à un dur labeur, en les obligeant, par exemple, à porter du matériel pour les forces armées, à construire des camps militaires et des routes, des bâtiments, ou encore à participer à des projets industriels et agricoles. Durant de nombreuses années, le gouvernement a nié l'existence de ces violations de la convention, invoquant notamment la tradition en vertu de laquelle ce type de travaux a un caractère communautaire et est effectué de façon volontaire.
Les membres employeurs ont fait observer que, dans son rapport de juillet 1998, la commission d'enquête instituée par l'OIT avait constaté que le travail forcé est une pratique généralisée au Myanmar et que cette pratique constitue une grave violation de la convention fondée essentiellement sur la loi sur les villes et la loi sur les villages et sur le fait que la modification de la loi est demandée depuis longtemps. La commission d'enquête a exigé que cette modification intervienne avant le 1er mai 1999. Une ordonnance gouvernementale du 14 mai 1999 ne comporte pas les modifications requises. Parallèlement, de profonds changements devraient être apportés à la pratique et par le biais de directives claires et spécifiques (et non secrètes) adressées à toutes les autorités, y compris les militaires. Enfin, l'article 374 du Code pénal doit être strictement appliqué dans la pratique. Si l'article 374 du Code pénal prévoit en effet des sanctions pour la réquisition de travail forcé, il n'a jamais été appliqué.
Les membres employeurs ont rappelé que le Conseil d'administration et la Commission de la Conférence ont repris les recommandations de la commission d'enquête et que ces deux organes ont à maintes reprises demandé au gouvernement d'appliquer pleinement ces recommandations. Toutefois, en l'absence de progrès remarquables, la Conférence internationale du Travail, sur proposition du Conseil d'administration, a adopté, en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, une résolution exigeant que le Myanmar applique pleinement les recommandations de la commission d'enquête. En vertu de cette résolution, tous les organes de l'OIT ainsi que les Etats Membres ont été priés d'examiner les relations qu'ils entretiennent avec le Myanmar. La même demande a été adressée aux organes des Nations Unies, y compris les institutions spécialisées. Il appartient à la Commission de la Conférence d'examiner les faits survenus par la suite.
Les mesures mentionnées dans la résolution sont entrées en vigueur le 30 novembre 2000, après que le Conseil d'administration eut déterminé que les mesures prises ou annoncées par le gouvernement jusqu'à cette date étaient insuffisantes. Lors de sa session de novembre 2000, le Conseil d'administration a examiné l'ordonnance gouvernementale du 27 octobre 2000, qui complète celle de mai 1999 dans le but d'éradiquer le travail forcé. Une équipe de coopération technique s'est rendue dans le pays et a recommandé que cette ordonnance soit complétée par des arrêts et directives spéciaux. Dans son rapport de cette année, la commission d'experts a invité le gouvernement à adopter de tels arrêts ou directives. C'est le seul moyen de s'assurer que l'interdiction du travail forcé est respectée dans la pratique. A la faveur d'un échange de correspondance entre le Directeur général et le gouvernement du Myanmar, celui-ci a fait part de sa volonté d'appliquer les recommandations de la commission d'enquête. Les membres employeurs se sont référés aux documents D.6 et D.7 qui contiennent des précisions sur ce point.
Les membres employeurs ont indiqué que le groupe des employeurs suit avec préoccupation le cas du Myanmar depuis plusieurs années. Ils ont insisté sur la gravité du travail forcé et ajouté qu'on ne peut douter du fait que le groupe des employeurs estime essentiel de respecter les normes fondamentales, en particulier les principes de la convention no 29.
Ils ont rappelé qu'en novembre 2000, en vertu du mandat donné par la Conférence internationale du Travail, le Conseil d'administration a décidé que la résolution fondée sur l'article 33 de la Constitution devait prendre effet. En même temps, la commission a demandé au Directeur général que soit poursuivie avec le gouvernement du Myanmar la coopération qui vise à promouvoir la pleine application des recommandations de la commission d'enquête. Les membres employeurs ont déclaré que, à l'évidence, leur groupe estime que la procédure au titre de l'article 33 n'est pas la seule, mais que l'OIT s'efforce de trouver une solution à la situation qui a donné lieu à cette procédure, cette solution étant de mettre un terme au travail forcé. Les membres employeurs ont ajouté qu'il ressort des contacts avec le gouvernement du Myanmar que les mesures adoptées devraient être vérifiables et vérifiées par l'OIT en vue de déterminer si elles sont appliquées dans la pratique et pour connaître la situation actuelle.
Les membres employeurs ont rappelé qu'une mission s'est rendue du 17 au 19 mai à Yangon pour établir les modalités de fonctionnement de la mission de l'équipe de haut niveau. Il a été convenu que cette équipe se rendrait au Myanmar en septembre, que ses membres seraient nommés par le Directeur général eu égard à leurs qualifications reconnues, à leur impartialité et à leur connaissance de la région, qu'elle aurait toute latitude pour établir et mener à bien son programme de travail, ses réunions et ses visites, et pour se déplacer sur le territoire du Myanmar avec toutes les garanties que la procédure applicable prévoit, et que, enfin, son rapport serait communiqué au Directeur général qui le soumettra à l'examen du Conseil d'administration à sa session de novembre.
L'intervenant a aussi souligné que la commission d'experts a considéré que la modification en date du 27 octobre 2000 de la loi sur les villages et de la loi sur les villes pourrait constituer une base pour que la convention soit respectée. Il a souligné que les membres employeurs estiment que des mesures doivent être prises pour garantir dans la pratique l'élimination du travail forcé qu'imposent les autorités, et en particulier les militaires. Il s'agit là de droits fondamentaux consacrés dans des conventions fondamentales que le Myanmar a ratifiées. Les membres employeurs sont convaincus que le travail forcé exigé par les autorités, y compris par les militaires, doit être interdit en droit comme dans la pratique.
Les membres employeurs ont dit avoir écouté attentivement les éclaircissements du représentant du gouvernement du Myanmar et tenu compte des observations des membres travailleurs. Ils ont demandé que le gouvernement du Myanmar donne à l'équipe de haut niveau tout l'appui nécessaire pour qu'elle s'acquitte de ses fonctions et qu'elle s'assure, sur place, que le travail forcé n'a plus cours. Le Conseil d'administration devra recevoir son rapport en novembre afin qu'il puisse soumettre à la Conférence internationale du Travail les recommandations qu'elle jugera utiles.
Enfin, les membres employeurs ont indiqué que les progrès doivent pouvoir clairement être démontrés, que la collaboration doit être ample, et que l'équipe doit bénéficier de moyens importants pour procéder aux vérifications utiles. Ils ont formé l'espoir de pouvoir constater, à l'avenir, que la situation qui a donné lieu à l'application de l'article 33 de la Constitution n'existe plus.
Le membre gouvernemental de la Suède, s'exprimant au nom des Etats membres de l'Union européenne, des Etats d'Europe centrale et orientale associés à l'Union européenne (à savoir la République tchèque, la Bulgarie, l'Estonie, la Lituanie, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie, les autres Etats associés - Chypre, Malte et Turquie - ainsi que la Croatie et la Norvège), a déclaré que, compte tenu de la vive inquiétude suscitée par la situation relative au travail forcé au Myanmar, l'Union européenne appuie la résolution adoptée en juin 2000 par la Conférence, qui a abouti en novembre 2000 à l'application de mesures prises en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. Il a rappelé que, il y a quatre ans, la commission d'enquête sur le travail forcé en Birmanie/Myanmar a formulé une série de recommandations précises aux termes desquelles le Myanmar devait mettre en conformité les textes législatifs pertinents avec la convention no 29, les autorités ne devaient plus imposer dans la pratique de travail forcé ni obligatoire, et ceux qui imposent du travail forcé devaient être confrontés avec leur responsabilité pénale. Le gouvernement est donc dans l'obligation d'appliquer pleinement ces recommandations.
L'Union européenne a précisé à plusieurs reprises que, pour lever les mesures prises en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, la Conférence devait avoir l'assurance que le travail forcé était éradiqué. L'OIT est seule habilitée à procéder à une telle évaluation. L'Union européenne a exhorté le gouvernement à reprendre ses relations de coopération avec l'OIT et à autoriser une présence permanente de l'OIT dans le pays afin que celle-ci puisse vérifier que le gouvernement a effectivement mis fin à la pratique du travail forcé et puisse lui apporter une assistance technique dans ce but. Dans ce contexte, l'orateur s'est félicité de la décision prise par le gouvernement de coopérer à nouveau avec l'OIT et a pris note de l'accord concernant les modalités d'une évaluation objective de l'application concrète des recommandations de la commission d'enquête. L'équipe de haut niveau doit jouir d'une complète liberté de circulation sur tout le territoire et les autorités doivent prendre toutes les mesures de sécurité nécessaires. L'équipe devra également avoir la liberté de s'entretenir avec toutes les personnes qu'elle souhaitera rencontrer, y compris Mme Daw Aung San Suu Kyi et d'autres dirigeants de la LND. L'équipe organisera elle-même le programme de ses activités et de ses rencontres. Enfin, le Directeur général devra avoir toute liberté pour décider de la composition de l'équipe de haut niveau. L'orateur a relevé les engagements pris à cet égard par le gouvernement.
En dernier lieu, il a souligné qu'une mission de trois semaines ne serait pas suffisante et que des mesures complémentaires devaient être prises. Il s'est déclaré convaincu qu'une présence permanente de l'OIT dans le pays est nécessaire pour aider le gouvernement à appliquer les mesures législatives qu'il a prises et pour en vérifier la mise en uvre. Il prendra connaissance avec intérêt du rapport que l'équipe de haut niveau soumettra au retour de sa mission du mois de septembre, afin d'examiner les conséquences à en tirer pour l'action à venir lors de la session du Conseil d'administration, en novembre 2001.
Le membre gouvernemental de l'Australie, s'exprimant au nom des membres du Groupe Asie-Pacifique, a pris note avec intérêt du rapport de la commission sur les faits nouveaux survenus depuis la dernière session du Conseil d'administration. Le Groupe Asie-Pacifique se félicite de la décision prise par le gouvernement de recevoir, au mois de septembre, une équipe de haut niveau désignée par le Directeur général pour procéder à une évaluation objective, pendant une période pouvant aller jusqu'à trois semaines, de la question du travail forcé. Il s'agit là d'une évolution très positive. L'orateur s'est félicité en particulier du fait que le gouvernement ait accepté que l'équipe de l'OIT ait toute latitude pour fixer et réaliser son programme d'activités et de rencontres. Il apprécie les efforts constants de toutes les parties concernées, et notamment du Directeur général et du personnel du Bureau. Il exhorte le gouvernement à continuer de coopérer avec l'OIT et l'équipe de haut niveau lorsqu'elle se rendra dans le pays au mois de septembre. Il a instamment invité les membres de la Conférence à attendre le rapport de l'équipe et l'examen de celui-ci par le Conseil d'administration, au mois de novembre, avant de décider des mesures à prendre par la suite.
Le membre gouvernemental de la Malaisie, s'exprimant au nom des Etats Membres de l'OIT qui font partie de l'ANASE, a remercié le Directeur général de ses efforts de coopération avec le gouvernement du Myanmar. Il a pris note avec satisfaction de la visite que le représentant du Directeur général et son équipe ont effectuée au Myanmar en mai 2001 ainsi que du rapport de la mission, et en particulier de l'accord conclu entre l'OIT et le gouvernement sur les modalités d'une évaluation objective de l'application de la convention no 29. Il a déclaré encourageante l'assurance donnée par le gouvernement qu'il mettrait en conformité son dispositif législatif, gouvernemental et administratif, ainsi que les mesures et les activités de suivi à l'échelon national, avec les dispositions de la convention no 29 et qu'il était disposé à coopérer avec l'OIT. Il a pris acte de la volonté politique dont fait preuve le gouvernement pour résoudre cette question et recevoir une équipe de haut niveau de l'OIT en septembre 2001, qui procédera à l'évaluation objective susmentionnée.
L'orateur a conclu que, lors de sa 282e session, en novembre 2001, le Conseil d'administration devra réexaminer les mesures prises par l'OIT en vertu de l'article 33 de la Constitution à la lumière des résultats de cette évaluation, dans le but de supprimer ces mesures. En outre, il a invité le gouvernement et l'OIT à poursuivre leur coopération jusqu'à ce que la question soit complètement résolue.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis a rappelé que l'année précédente la Conférence avait adopté les mesures recommandées par le Conseil d'administration en vertu de l'article 33 de la Constitution, pour obtenir que le Myanmar se conforme aux recommandations de la commission d'enquête. La persistance du travail forcé, sous ses formes les plus brutales, était tellement flagrante que la Conférence a reconnu ne pouvoir agir autrement sans manquer à sa responsabilité à l'égard des travailleurs de ce pays et à la mission historique de l'OIT. La délégation des Etats-Unis avait affirmé à cette occasion qu'il était impossible de faire moins, de détourner le regard sous peine de renier les valeurs qui sont les siennes. En novembre 2000, le Conseil d'administration a décidé qu'il n'y avait aucune raison de retarder l'application de la résolution bien que les autorités aient pris un certain nombre de mesures administratives à la suite d'une mission de coopération technique de dernière minute effectuée par le BIT dans ce pays en octobre 2000.
La commission d'experts a procédé à une analyse minutieuse des mesures prises ainsi que de l'abondante information émanant d'autres sources sur la situation réelle du pays. Elle a conclu que le gouvernement devait modifier les textes législatifs pertinents; veiller à ce que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités et notamment par les militaires, et appliquer strictement les sanctions prévues pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire. Des preuves supplémentaires de la persistance du recours au travail forcé sur une grande échelle ont été présentées en mars 2001 au Conseil d'administration. Il s'agissait notamment de rapports faisant état des efforts déployés par les autorités militaires et civiles, à tous les niveaux, pour dissimuler l'ampleur et la nature du travail forcé, pour affaiblir ou annuler les effets de toutes ordonnances que la haute hiérarchie a pu promulguer pour prévenir le travail forcé et pour contrer par voie de propagande et de désinformation les mesures préconisées par la résolution de la Conférence.
L'oratrice a rappelé que, bien que le gouvernement ait rejeté la résolution de la Conférence, le Directeur général a continué à coopérer avec le gouvernement dans le contexte de la convention no 29, comme le lui avaient demandé la Conférence et le Conseil d'administration. Elle l'a félicité pour de tels efforts. L'objectif de l'OIT n'est pas de sanctionner ce pays mais d'aider le gouvernement à éliminer une pratique dont tous les Membres de l'OIT, qu'ils aient ou non ratifié la convention no 29, ont reconnu qu'elle devrait être supprimée. Grâce aux efforts du Directeur général, le gouvernement a finalement décidé de recevoir une équipe de haut niveau pour une durée pouvant aller jusqu'à trois semaines en septembre 2001 pour procéder à une évaluation objective de la situation concernant le travail forcé. Tout en se félicitant d'un tel accord, elle a attiré l'attention sur le fait qu'il fallait être réaliste quant à la tâche que pourrait accomplir l'équipe de haut niveau en une si courte période. Le Protocole d'entente signé en mai 2001 avec le gouvernement constitue un pas dans la bonne direction. Toutefois, l'utilité et l'efficacité de l'équipe de haut niveau dépendront de la mesure dans laquelle le gouvernement respectera les engagements qu'il a pris. Celui-ci a accepté d'accorder son entière coopération à l'équipe. Une telle coopération doit comprendre au minimum le droit pour l'équipe de rencontrer les personnes de son choix, dans des séances à huis clos et confidentielles si elles le désirent, et le droit de toutes les personnes qui souhaitent rencontrer l'équipe de le faire sans crainte de représailles contre elles-mêmes ou leurs familles. Si tel n'était pas le cas, la crédibilité de l'équipe serait mise en doute, ce qui ne servirait ni les intérêts du pays ni ceux du BIT.
L'oratrice a noté que le Conseil d'administration prêterait une attention particulière au rapport de l'équipe de haut niveau, en novembre 2001, à la lumière de la totalité des informations qui lui auront été fournies par d'autres sources. C'est à ce moment-là que seront décidées les éventuelles mesures complémentaires que devrait prendre l'OIT pour donner effet à la résolution de la Conférence. Entre-temps, toutes les dispositions de cette résolution demeurent en vigueur et devraient être appliquées, y compris celles visant à soumettre la question à la prochaine session du Conseil économique et social des Nations Unies. Le gouvernement des Etats-Unis restera vigilant quant aux relations qu'il entretient avec ce pays et invite les autres pays à faire de même. Les Etats-Unis ont déjà mis en place un ensemble de sanctions strictes contre le Myanmar , y compris l'interdiction de nouveaux investissements et de toute assistance au régime militaire, la suppression des préférences commerciales et l'interdiction de visa pour les hauts responsables gouvernementaux. Ces mesures resteront en vigueur et l'adoption d'autres mesures n'est pas pour le moment exclue.
Le membre gouvernemental de l'Afrique du Sud a fait état de la conviction de son pays selon laquelle la situation existant au Myanmar ne peut évoluer que si des éléments nouveaux interviennent et qu'ils puissent être évalués objectivement par l'OIT. Il a rappelé que son gouvernement a apporté son soutien indéfectible et sans ambiguïté pour le maintien de mesures à l'encontre du gouvernement du Myanmar aussi longtemps que celui-ci ne démontrera pas sa volonté de modifier sa position sur le travail forcé. C'est pourquoi son gouvernement est encouragé par la lecture du rapport dont est saisie la commission, qui montre que certains actes positifs ont été accomplis en vue de la réalisation de l'objectif de l'élimination du travail forcé au Myanmar. Le rapport de la mission menée par le représentant du Directeur général est encourageant, et l'orateur a félicité les différentes parties pour leurs efforts respectifs en vue de la résolution de cette question.
Le membre gouvernemental de l'Afrique du Sud a cependant exhorté le Bureau à rester vigilant et a appuyé l'envoi d'une équipe de haut niveau, laquelle devra disposer d'une complète discrétion en ce qui concernera ses activités durant ses travaux. Il a instamment invité le gouvernement du Myanmar à continuer sur cette voie positive qui, selon lui, conduira à terme à la création d'un environnement de travail favorable. L'orateur a déclaré que son gouvernement attendait donc avec impatience de lire le rapport de l'équipe de haut niveau en novembre prochain.
Le membre travailleur du Pakistan a rappelé que la résolution adoptée par la Conférence l'année dernière en vertu de l'article 33 de la Constitution de l'OIT est le résultat d'un processus qui date des années soixante. La commission d'experts a soulevé la question de l'utilisation du travail forcé dans le pays dès 1964, 1966 et 1967. Faisant suite à la réclamation de la CISL de 1993, soumise en vertu de l'article 24 de la Constitution, et aux tentatives persistantes du gouvernement visant à nier la preuve du travail forcé, la commission d'enquête a été mise sur pied en 1997. Dans son rapport, suivant une série d'auditions auxquelles le gouvernement a refusé de participer, tout en refusant de laisser entrer la commission dans le pays, trois points ont été traités. Pour chacun de ces points, des mesures ont été exigées pour assurer la conformité avec la convention no 29: l'amendement de la législation conformément à la convention; l'adoption de mesures pour arrêter la pratique de réquisitions du travail forcé et obligatoire; et l'imposition de sanctions à ceux qui commettent des délits. La date limite qui a été fixée par la commission afin de se conformer aux recommandations était le 1er mai 1999.
La revue historique met en évidence le fait que la série de mesures envisagées par la Conférence l'année passée était très clairement basée sur l'application des trois larges recommandations de la commission d'enquête. La résolution, adoptée en juin 2000, a été le facteur décisif qui a incité le gouvernement à entrer en discussion avec le leader NLD Mme Daw Aung San Suu Kyi et à accepter la mission de l'OIT. Néanmoins, les mesures envisagées dans la résolution doivent être maintenues et leur application renforcée en tant que principal instrument de pression sur le régime jusqu'à ce qu'une évolution irréversible se produise dans les trois domaines couverts par la commission d'enquête en entreprenant des actions pour réimplanter la démocratie et mettre fin au travail forcé. L'orateur a félicité le Directeur général pour l'action entreprise et a exprimé le souhait que le travail de l'OIT apporte du soulagement à ceux qui souffrent dans ce pays. Il a recommandé instamment au gouvernement d'appliquer la lettre et l'esprit des recommandations de la commission d'enquête et de coopérer et de soutenir l'action de l'OIT.
Le membre gouvernemental des Pays-Bas a approuvé la déclaration faite au nom de l'Union européenne. Il a ajouté que, depuis la décision prise en novembre 2000 par le Conseil d'administration de donner effet aux mesures prévues dans le cadre de la résolution adoptée conformément à l'article 33 de la Constitution de l'OIT, son pays a tenu des consultations tripartites et réexaminé ses relations avec le gouvernement de la Birmanie. Depuis sa première réponse à la demande d'information du Directeur général, son pays a pris d'autres mesures et a l'intention de décourager les opérations commerciales et les investissements au Myanmar . Son pays a pris acte de la décision prise par le gouvernement d'accueillir l'équipe de haut niveau du BIT et examinera avec intérêt les conclusions de celle-ci, qui seront présentées en novembre 2001 au Conseil d'administration. Les Pays-Bas continueront de suivre la situation du travail forcé au Myanmar et sont convaincus qu'en l'absence de progrès concrets et manifestes il est trop tôt pour exclure la possibilité de mesures supplémentaires.
Le membre travailleur du Japon s'est félicité de l'accord conclu en mai 2001 entre l'OIT et le gouvernement concernant la visite de l'équipe de haut niveau et a enjoint aux deux parties de l'appliquer avec sincérité. Il a formulé le v u que toutes les formes de travail forcé et obligatoire soient éliminées dès que possible tant en droit qu'en pratique. Il a cependant pris note de l'information selon laquelle le régime militaire avait menacé les villageois de plusieurs régions afin qu'ils ne disent pas la vérité sur le travail forcé. Il s'est donc prononcé pour que l'OIT et le gouvernement donnent à l'équipe de haut niveau les pleins pouvoirs pour enquêter sur la situation actuelle. Il espère que les travaux de l'équipe permettront à la communauté internationale de comprendre ce qui se passe dans le pays. Il a apprécié les efforts déployés par les Nations Unies et les pays asiatiques, y compris son propre gouvernement, pour rétablir le dialogue entre l'OIT et le gouvernement.
Il a souligné que la démocratisation du pays constitue une autre question importante dont dépend dans une large mesure l'amélioration de la situation en ce qui concerne le travail forcé. Les droits de l'homme et les droits syndicaux sont d'une très grande importance pour la démocratie mais sont incompatibles avec un régime militaire. La Confédération japonaise des syndicats (RENGO) appuie les activités de ceux qui ont été contraints de quitter la Birmanie pour avoir voulu démocratiser le pays. Un bureau birman a été établi à Tokyo pour promouvoir la démocratie dans ce pays. L'orateur a exhorté le gouvernement à autoriser les activités de promotion de la démocratie sans aucune restriction dans le pays. Il a également demandé au gouvernement du Japon de faire pression sur le gouvernement de la Birmanie pour que celui-ci libère sa population de l'oppression et restaure la démocratie.
A l'occasion d'une importante réunion sur l'action des syndicats en faveur de la Birmanie, qui a eu lieu au début de l'année à Tokyo, il a été décidé de mettre en uvre un programme d'action consistant à promouvoir et à renforcer la résolution de l'OIT ainsi qu'à demander au gouvernement du Japon de réexaminer ses relations avec la Birmanie. Les représentants syndicaux ont proposé que l'aide au développement du Japon soit strictement limitée à des objectifs humanitaires et dispensée avec prudence afin de garantir qu'elle ne favorise pas le travail forcé en Birmanie. Ils ont en outre prié le gouvernement japonais d'exiger du gouvernement de la Birmanie qu'il ne recoure pas au travail forcé pour les activités relevant de l'aide au développement du Japon et d'accepter qu'une équipe internationale enquête sur ce sujet.
L'orateur s'est déclaré très inquiet de la reprise de l'aide au développement du Japon destinée à la Birmanie, qui avait été suspendue en 1988 après l'arrivée du régime militaire au pouvoir, notamment en ce qui concerne le financement de la remise en état de la centrale électrique de Baluchaung. La reprise de cette aide est prématurée. A part l'assistance humanitaire, le Japon ne devrait fournir aucune aide dont puisse bénéficier le régime militaire. Le gouvernement japonais a une grande responsabilité dans la question du travail forcé, car en 1997 l'aide fournie par son pays a représenté 62,7 pour cent du volume total de l'aide extérieure. Si la situation actuelle concernant le travail forcé ne s'améliore pas, cette aide devra immédiatement cesser. Au besoin, une action concrète devrait être entreprise avec la communauté internationale pour supprimer toutes les formes de travail forcé et obligatoire dans le pays.
Le membre gouvernemental du Canada s'est félicité de la récente signature du Protocole d'entente sur les modalités d'une évaluation objective à laquelle l'OIT procédera et qui portera sur l'application concrète et les résultats du dispositif législatif, gouvernemental et administratif contre le travail forcé, que le gouvernement a dit avoir mis sur pied depuis octobre 2000. Il a déclaré que, sous réserve de cette évaluation, les mesures prises par l'OIT devaient être maintenues et a souligné que seule l'OIT est en mesure de réaliser une telle évaluation avec l'autorité voulue pour qu'elle ait des effets juridiques, politiques et pratiques sur le plan international.
Compte tenu de l'extrême importance des normes en cause, il espère que le gouvernement respectera pleinement les modalités convenues et offrira sa pleine et entière coopération afin de garantir que l'évaluation soit à la fois objective et crédible. Il a souligné que, pour ce faire, l'équipe de haut niveau devra jouir d'une complète liberté de circulation et de décision quant à l'organisation et à la réalisation de son programme d'activités et de rencontres, conformément à l'accord signé le 19 mai 2000. Il a rappelé, comme il l'avait fait devant le Conseil d'administration en novembre 2000, que le Canada ne cherchait pas querelle au peuple birman mais voulait seulement mettre fin à la violation de ses droits. Il a souligné que le travail forcé est contraire au travail décent et qu'il est donc indigne d'un Etat Membre de l'OIT.
Le membre travailleur de la Colombie a déploré que les membres de la commission aient, une fois de plus, à traiter de la question du travail forcé au Myanmar, situation qui est due à l'obstination du gouvernement de ce pays à ne pas respecter les conventions et recommandations de l'OIT et, de façon inexplicable, à ne pas tenir compte des résolutions adoptées par l'Organisation.
L'intervenant a ajouté que la conduite inacceptable du gouvernement du Myanmar a obligé la Commission de l'application des normes à décider, en 1997, de consigner ses commentaires dans un paragraphe spécial, et que, à ce jour, il n'y a toujours pas eu de changement radical de la part du gouvernement. L'absence d'une politique d'observation par le gouvernement des mécanismes de contrôle de l'OIT attire l'attention des travailleurs du monde entier, et l'intervenant a manifesté sa solidarité avec les travailleurs du Myanmar, en particulier avec leur combat pour faire respecter les conventions fondamentales et les recommandations de l'OIT, notamment la convention no 29 sur le travail forcé.
Rien ne permet à un gouvernement, où que ce soit dans le monde, de justifier le travail forcé dans des conditions d'esclavage. L'intervenant a estimé, comme le gouvernement du Myanmar, que la meilleure sanction est celle qui ne s'applique pas, mais que, lorsqu'un gouvernement refuse de respecter des règles adoptées par tous, les sanctions sont le seul moyen qui reste, même si la mise en uvre de ces mesures ne se fait pas sans réticence.
Au nom des travailleurs de l'Amérique latine et des Caraïbes, l'intervenant a enjoint le gouvernement du Myanmar de respecter les conventions et recommandations de l'OIT, en particulier la convention no 29, et de mettre ainsi un terme aux souffrances des travailleurs soumis au travail forcé et de sanctionner de façon exemplaire les responsables de ces violations des droits de l'homme.
L'intervenant a invité avec véhémence le gouvernement du Myanmar à coopérer avec l'OIT pour que celle-ci puisse agir directement sur place. Si le gouvernement est convaincu que son attitude et son comportement sont démocratiques, il ne verra pas d'inconvénient à accepter la mission de l'équipe de haut niveau de l'OIT.
Le membre travailleur de l'Italie, se référant aux problèmes majeurs et aux activités des entreprises, en vertu du paragraphe 1 b) de la résolution de la Conférence, a mentionné que le rapport soumis au Conseil d'administration montre que peu d'organisa-tions d'employeurs ont répondu à la demande d'information du Directeur général. Les réponses proviennent notamment de la Confédération finlandaise de l'industrie et des employeurs, de la Confédération norvégienne du commerce et de l'industrie, de la Confédération de l'industrie britannique ainsi que de l'Organisation internationale des employeurs. Elle a apprécié le fait que plusieurs entreprises ont cessé de faire des affaires avec ce pays. Cependant, des entreprises importantes basées dans d'autres pays continuent d'importer des biens produits en Birmanie. Malgré l'action de l'OIT contre la Birmanie, on note une explosion de l'exportation de vêtements, y compris vers les Etats-Unis et l'Union européenne. Des biens, tels que le riz et les fèves, sont exportés par le biais de pays tels que la Malaisie et Singapour. Lors de la dernière session du Conseil d'administration, la CISL a présenté à l'OIT une série de rapports de grande portée indiquant que plusieurs entreprises impliquées dans les industries du gaz, du bois, du riz, de l'agriculture, de la pêche, des textiles, des finances et du tourisme faisaient toujours des affaires avec ce pays et avaient établi d'autres contacts commerciaux avec le régime depuis novembre 2000. Il y est fait mention des activités d'environ 300 compagnies provenant de plus de 30 pays.
Le rapport de la CISL contient également des informations sur plus de 580 cas de travail forcé. Une partie de la preuve du travail forcé est directement liée à l'opération des gazoducs reliant la Birmanie à la Thaïlande (impliquant des multinationales françaises et américaines) et à la construction d'une infrastructure touristique, dans laquelle les dirigeants militaires du pays sont directement impliqués. Une compagnie britannique est aussi très impliquée dans les opérations relatives aux gazoducs dans le pays. De plus, une installation hydroélectrique sera construite suite à une subvention de 29 millions de dollars du gouvernement japonais visant à récompenser l'ouverture du dialogue avec le leader de l'opposition, Mme Daw Aung San Suu Kyi. D'autres gouvernements et industries se cachent derrière ces prétendus nouveaux développements pour continuer à commercer avec ce pays comme si de rien n'était. A cet égard, l'intervenante a rappelé que, par le passé, des discussions similaires n'avaient mené à aucun résultat.
Elle a mentionné qu'une large partie des revenus générés par l'investissement étranger est utilisée par la junte militaire pour acheter des armes qui sont utilisées contre ses propres citoyens. La Chine est l'un de ses principaux fournisseurs d'armes. La CISL et les différents secrétariats des syndicats internationaux ont déjà planifié une action afin de faire pression sur ces entreprises, dont quelques multinationales qui ont été identifiées au Canada, en France, en Malaisie, aux Pays-Bas, en Norvège, à Singapour, en Espagne et aux Etats-Unis. Des syndicats de l'industrie de l'énergie se sont rencontrés récemment à Bangkok et ont demandé aux entreprises produisant du pétrole et du gaz de cesser leurs investissements en Birmanie tant qu'il y aura du travail forcé. La campagne des syndicats commence également à viser les actionnaires et les investisseurs institutionnels dans les entreprises multinationales investissant en Birmanie. Un des plus importants fonds de pension dans le monde a annoncé, lors de son assemblée générale annuelle, qu'il allait proposer l'adoption d'une résolution demandant à l'entreprise de se retirer de la Birmanie. Dans un cas aux Etats-Unis, un juge a émis l'opinion que l'entreprise poursuivie savait que le travail forcé était utilisé et que ses partenaires bénéficiaient de cette pratique. Par le passé, les gouvernements et les entreprises se cachaient derrière l'absence d'une décision mondiale liant la Birmanie pour justifier leur inaction. Désormais, il existe une décision mondiale d'une institution spécialisée des Nations Unies qui leur donne une base légitime pour entreprendre des actions, ce que certains d'entre eux ont déjà fait. L'intervenante a donc recommandé instamment aux organisations d'employeurs et aux entreprises de se conformer, en consultation avec les organisations syndicales, à l'ensemble des dispositions de la résolution. Elle a aussi demandé aux organisations financières régionales et internationales de vérifier attentivement les projets indirects et les investissements directs étrangers en Birmanie menés par le biais d'autres pays et organisations. Toute hésitation à ce stade-ci dans l'application des mesures convenues pourrait mettre en péril les efforts consentis pour éliminer le travail forcé et la reprise de discussions pour la démocratie.
Le membre gouvernemental de la Suisse a déclaré avoir écouté avec attention les explications données par le gouvernement du Myanmar ainsi que les points de vue exprimés par les employeurs et les travailleurs.
Elle a mentionné que le rapport de la dernière mission qui s'est rendue au Myanmar fait état d'éléments positifs. Elle a ajouté que la mission d'évaluation de trois semaines, qui aura lieu en septembre prochain, doit notamment examiner la mise en uvre effective et de bonne foi des modifications législatives demandées. Il est important que cette mission dispose d'une totale liberté d'action, notamment pour pouvoir elle-même définir son programme. Ces derniers développements constituent un pas important vers un engagement constructif du gouvernement du Myanmar pour répondre aux demandes de la commission d'enquête. Le gouvernement suisse attend donc avec espoir le rapport que l'équipe de haut niveau livrera au Conseil d'administration de novembre 2001 et évaluera à ce moment la réelle volonté politique des autorités birmanes.
Le membre travailleur du Swaziland a souligné que le travail forcé constitue une violation sérieuse ainsi qu'un manque de respect flagrant de la dignité humaine et que cette violation ne saurait être pardonnée aussi longtemps qu'elle a cours. Tout effort pour éliminer le fléau que représente le travail forcé doit être soutenu par tous les avocats de la dignité humaine et de la justice sociale. Le cas présent est un test pour l'OIT tant en ce qui concerne son mandat que les obligations qui découlent du fait d'en être Membre. L'OIT doit répondre à la question de savoir quel est le résultat attendu et acceptable d'une ratification. Est-ce qu'il s'agit simplement d'adopter des textes qui soient conformes aux engagements pris ou s'agit-il également de les appliquer dans la pratique? Le rapport de la CISL démontre que, sur le terrain, le travail forcé existe toujours. Le membre travailleur a affirmé qu'une loi qui n'existe que sur le papier et qui n'est pas appliquée dans la pratique ne vaut même pas le papier sur lequel elle est rédigée. Tant que le gouvernement ne reconnaît pas qu'il contrevient aux dispositions de la convention no 29 qu'il a ratifiée il y a maintenant 46 ans, il lui sera impossible de corriger les violations qu'il commet. Toutefois, comme le document D.6 l'indique, le gouvernement a écrit au Secrétaire général des Nations Unies pour condamner la décision du Conseil d'administration qu'il qualifie de "grave injustice" et pour mettre en cause le mandat du Directeur général et de la Conférence sur cette question.
L'orateur a réaffirmé sa conviction selon laquelle la ratification d'un instrument international par n'importe quel gouvernement constitue un engagement direct de ce gouvernement de mettre en uvre en droit et en pratique les dispositions de cet instrument et d'accepter le contrôle éventuel de l'application de cet instrument, si la question de la violation de cet instrument est soulevée. La convention no 29 est l'une des conventions fondamentales de l'OIT, laquelle, lorsqu'elle est réellement appliquée, assure la dignité du travailleur. Sans cette dignité, il ne peut exister de travail décent. L'orateur a en outre déclaré que le travail forcé, c'est de l'esclavage et qu'il constitue un crime contre la dignité humaine. En tant que tel, il est absolument contraire à l'exigence de justice sociale. Il est du devoir de cette commission d'éradiquer le fléau du travail forcé afin de restaurer la dignité des travailleurs et du peuple de ce pays. Elle ne devrait pas sous-estimer la gravité de cette violation de la dignité humaine.
L'intervenant a déclaré que les gouvernements qui sont prompts à commettre des crimes contre l'humanité ne renoncent pas à ces pratiques sans pressions internationales. Si des sanctions n'avaient pas été imposées contre le régime de l'apartheid en Afrique du Sud, le peuple sud-africain n'aurait pas pu obtenir la démocratie. C'est pourquoi l'orateur a imploré tous les pays de soutenir la justice sociale et de maintenir les sanctions jusqu'au jour où le peuple birman vivra dans un environnement exempt de travail forcé, dans lequel le respect de la démocratie, des droits de l'homme, de la liberté syndicale et de la règle de droit est garanti. Les sanctions ne doivent être levées que si la procédure d'évaluation effectuée par l'OIT démontre que la convention no 29 est appliquée en droit comme dans la pratique.
Le membre travailleur de la Thaïlande a indiqué que plus d'un million d'immigrants illégaux et près de 20 000 réfugiés en provenance du Myanmar vivent dans son pays. Ces migrations ont eu lieu sur plusieurs années. Ces personnes vivent dans des conditions sociales et économiques très précaires et ont immigré vers la Thaïlande pour fuir la pauvreté et le travail forcé qui prévalent au Myanmar. Ces immigrants sont désemparés, vulnérables et durement exploités par leurs employeurs. De leur côté les employeurs utilisent ces immigrants illégaux pour remplacer les travailleurs thaïlandais qui ont ainsi des difficultés à maintenir leurs conditions de travail, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de l'hygiène et qui demandent que les normes de l'OIT soient appliquées. Les conditions politiques, économiques et sociales des travailleurs thaïlandais sont affectées par ces immigrants illégaux et ces réfugiés qui sont la conséquence des conditions politiques, économiques et sociales du Myanmar. Tant que règnera l'instabilité dans ce pays voisin, la Thaïlande continuera d'en subir les conséquences négatives. Enfin, l'orateur s'est félicité de la décision d'envoyer une équipe de haut niveau de l'OIT qui évaluera la situation de travail forcé au Myanmar. Pour mieux connaître la situation, cette équipe devrait se rendre à la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar afin de s'entretenir avec les réfugiés et les immigrants. L'orateur a également suggéré que, conformément à l'article 33 de la Constitution de l'OIT, la résolution de l'OIT relative au Myanmar soit maintenue jusqu'à ce que le travail forcé soit complètement éradiqué de ce pays.
Le membre gouvernemental de la Namibie a déclaré que son gouvernement est extrêmement inquiet et préoccupé par la pratique du travail forcé qui continue dans plusieurs parties du monde et, en particulier, par la situation critique qui perdure au Myanmar. Tout en se félicitant de l'engagement et de la promesse formelle faits par le représentant du gouvernement du Myanmar, il recommande vivement que cette promesse s'accompagne de mesures concrètes. De plus, l'orateur a appuyé sans réserve la proposition d'envoyer une équipe de haut niveau de l'OIT au Myanmar afin d'évaluer la situation dès que cela sera possible. Il est impératif que ce sujet reste à l'ordre du jour de l'OIT jusqu'à ce que le gouvernement du Myanmar respecte pleinement la convention no 29.
Le membre gouvernemental de l'Inde a souligné que son gouvernement est vivement opposé à la pratique du travail forcé et que les pays qui adhèrent volontairement aux conventions de l'OIT doivent les appliquer pleinement. En ce qui concerne le cas examiné devant cette commission, les objectifs de l'OIT seraient mieux promus par le biais du dialogue et de la coopération et non par des mesures punitives ou par la menace de les employer. Le gouvernement de l'Inde défend donc la voie du dialogue constructif et de la coopération entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar. Se référant au document D.7, il convient de noter la mission de l'OIT effectuée au Myanmar le mois dernier. L'oratrice a également noté les informations fournies par le gouvernement du Myanmar dans le document D.9 (informations écrites, communiquées par le gouvernement du Myanmar et relatives au Protocole d'entente entre le gouvernement de Myanmar et le BIT sur les modalités d'une évaluation objective de l'application de la convention no 29). La visite de l'équipe de haut niveau de l'OIT au Myanmar en septembre de cette année constitue un pas dans la bonne direction. La souplesse et l'approche constructives dont font preuve le gouvernement du Myanmar et l'OIT doivent être appréciées. Cette évolution met une fois encore en évidence la nécessité de renoncer à l'approche punitive et de poursuivre la voie du dialogue et de la coopération technique.
Le membre travailleur de la Suède a indiqué que son intervention porterait essentiellement sur la réponse des gouvernements et des institutions des Nations Unies aux quelque 200 lettres envoyées par le Directeur général pour leur demander d'agir en tenant compte de la résolution de l'OIT et de tenir l'Organisation informée des mesures spécifiques qu'ils auraient prises. Dans certains pays, la classe politique a réagi. C'est ainsi que, le 22 mai 2001, les sénateurs américains Tom Harkin et Jesse Helms ont déposé un projet de loi tendant à l'interdiction de toutes les importations en provenance du Myanmar, expressément en réponse à l'appel de l'OIT. Ce texte a recueilli le soutien des deux grandes formations des deux chambres. En Norvège, le gouvernement s'est engagé dans de sérieuses discussions avec les groupes d'opposition à la junte en vue d'un retrait des investissements. Il ne convient néanmoins pas d'en rester là, les pressions sur le régime devant au contraire être maintenues par tous. Une évolution regrettable a fait suite à quelques timides ouvertures de la part de la junte. Ainsi, après une visite de sa "troïka" à Yangon, fin janvier, l'Union européenne a considérablement relâché son engagement dans le sens de la condamnation de la situation au Myanmar. Elle semble s'être contentée du simple espoir que les contacts continuent de se développer en s'élargissant et en s'approfondissant en vue d'une réconciliation nationale, de la démocratie et des droits de l'homme. La décision de l'Union européenne d'accorder un visa au haut représentant du gouvernement pour sa participation à un forum international en mai dernier à Bruxelles semble très mal inspirée. Du côté du commerce et des investissements, la situation est encore plus préoccupante. Les échanges commerciaux du Myanmar aussi bien avec les Etats-Unis qu'avec l'Union européenne se sont intensifiés récemment, les Etats-Unis restant néanmoins le principal marché d'exportation de ce pays. Ainsi, depuis 1997, les exportations du Myanmar aux Etats-Unis ont augmenté de près de 400 pour cent, et à destination de la Norvège, de près de 200 pour cent. Quant aux échanges bilatéraux entre le Myanmar et les trois pays d'Asie du Nord-Est (Chine, Japon et République de Corée), ils ont atteint 187,69 millions de dollars pour les deux premiers mois de l'année, soit une augmentation de 36,3 pour cent par rapport à la même période de l'an dernier. La Chine, qui a une frontière commune avec le Myanmar, devient ainsi son troisième partenaire commercial après la Thaïlande et Singapour, tandis que le Japon et la République de Corée conservent respectivement leur quatrième et cinquième rang. On relève en particulier que le gouvernement du Japon a l'intention d'octroyer une subvention de 3,53 milliards de yen pour la remise en état des installations hydroélectriques de Baluchaung, projet intéressant l'Etat de Karenni, région du Myanmar également touchée par la guerre civile, qui contribuera probablement à augmenter, directement ou indirectement, le recours au travail forcé. Cela est contraire à l'esprit de la résolution adoptée par l'OIT qui aujourd'hui plus que jamais requiert la participation de tous les Etats Membres.
Le membre gouvernemental du Royaume-Uni a indiqué soutenir pleinement la déclaration du membre gouvernemental de la Suède au nom de l'Union européenne. Il a rappelé que l'Union européenne a exprimé sans réserve sa préoccupation au sujet de la pratique du travail forcé en Birmanie et a positivement insisté sur l'application des mesures de l'article 33 à l'occasion de la dernière Conférence internationale du Travail et de la réunion du Conseil d'administration en novembre. Il a déclaré ne pas reconnaître la position européenne telle que décrite par le membre travailleur de la Suède dans son intervention. La question essentielle qui est posée à la commission n'est pas une question technique relative aux procédures bureaucratiques adoptées par le régime birman. Il s'agit pour la commission de décider comment et quand la pratique de travail forcé, odieuse du point du vue moral, pourra cesser en Birmanie. La visite de l'équipe de haut niveau en Birmanie au mois de septembre constituera un premier pas dans le processus d'évaluation, bien que trois semaines représentent un temps trop court pour affirmer avec certitude que le travail forcé a diminué ou cessé en Birmanie. L'orateur a insisté sur l'importance de la liberté d'accès de l'équipe de haut niveau aux témoins. Il a en outre souligné qu'il est important que tous les entretiens soient menés dans des conditions telles que les intérêts des témoins soient protégés. L'équipe de haut niveau devrait pouvoir visiter toutes les régions du pays, y compris les régions frontalières difficiles comme Rakhine, Chin, Kayïn et Kayah. L'équipe de haut niveau devrait également avoir toute latitude pour décider de l'opportunité du moment où elle effectuera sa visite en Birmanie et le Directeur général devrait avoir le pouvoir de désigner de manière discrétionnaire les membres de l'équipe. Dans ce contexte, l'orateur s'est déclaré séduit par la suggestion que les membres de la commission d'enquête initiale participent à l'équipe. Une chose doit être claire: si, en novembre, l'équipe de haut niveau est en mesure d'affirmer dans son rapport que le travail forcé en Birmanie a cessé, alors les mesures de l'article 33 seront levées. Mais, si l'équipe de haut niveau constate que la pratique de travail forcé perdure, ou rapporte qu'elle a été empêchée de procéder à son évaluation, alors le gouvernement du Royaume-Uni, tout comme celui des Pays-Bas, seront contraints de considérer quelles mesures supplémentaires pourront être prises contre la Birmanie.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a considéré, comme son propre gouvernement, que la visite de l'équipe de haut niveau en septembre de cette année constituait un pas dans la bonne direction, mais il a cependant tenu à soulever quelques points. Tout d'abord, il a demandé s'il ne vaudrait pas mieux que cette équipe effectue sa mission un peu plus tard, une fois passée la saison des moussons. De plus, pour que l'équipe puisse s'acquitter de sa tâche de manière efficace en visitant diverses régions du pays en trois semaines, il pourrait être préférable de désigner cinq membres plutôt que trois. A cela s'ajoute qu'une mission unique de trois semaines peut se révéler insuffisante pour dresser un tableau clair et complet de la situation au regard du travail forcé dans le pays. En conséquence, des visites de suivi pourront s'avérer nécessaires. Une présence permanente de l'OIT dans le pays serait préférable et pourrait se révéler nécessaire pour garantir que le Myanmar reste exempt de travail forcé. Un autre élément important concerne la nécessité d'une coopération pleine et entière de la part du gouvernement du Myanmar pour que l'équipe dispose d'un accès plus facile aux zones frontalières. La protection des témoins demeure elle aussi un problème important étant donné que les personnes qui seront accusées seront tentées d'exercer des représailles. A cet égard, les membres travailleurs ont été informés, et cela a été confirmé par Amnesty International, qu'une douzaine de personnes qui s'étaient entretenues avec un représentant des Nations Unies avaient été emprisonnées, torturées et condamnées à de longues peines de prison. Il appartiendra donc à toutes les parties concernées, le gouvernement du Myanmar, le Bureau, l'équipe de haut niveau, ainsi qu'aux pays ayant conservé une représentation dans le pays de veiller à ce que les personnes qui ont témoigné ne subissent pas de représailles. Enfin, il serait souhaitable que des personnes n'appartenant pas au gouvernement actuel, notamment des membres de l'opposition démocratique, soient associées aux travaux de l'équipe.
Le membre gouvernemental du Japon a indiqué que le gouvernement du Myanmar a pris un grand nombre de mesures législatives et administratives afin d'éradiquer le travail forcé. S'il est vrai que la mise en uvre de ces mesures reste à vérifier, seule une approche constructive avec le gouvernement du Myanmar peut résoudre le problème existant dans ce pays. La coopération entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar doit être saluée. Le gouvernement du Japon est constamment en relation avec le Myanmar, et ce à plusieurs niveaux, afin de lui rappeler la nécessité de coopérer avec l'OIT. L'orateur a souligné que la relation entre le gouvernement du Japon et le Myanmar, y compris sous forme d'assistance au développement, n'a pas favorisé et ne favorisera pas, de quelque manière que ce soit, directe ou indirecte, le travail forcé dans ce pays. A cet égard, il convient d'insister sur le fait que l'assistance du gouvernement du Japon pour réparer la centrale hydroélectrique de Baluchaung a uniquement pour but d'éviter que la détérioration dudit barrage ne cause à l'avenir d'autres dommages à la population. En ce qui concerne l'assistance, il a souligné que le gouvernement japonais tient compte de la demande formulée par le représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies.
Le membre gouvernemental du Portugal s'est associé aux déclarations faites par le membre gouvernemental de la Suède au nom de l'Union européenne ainsi qu'à celles du membre gouvernemental du Royaume-Uni en ce qui concerne les mesures prises par l'Union européenne dans le cadre de la mise en uvre de l'article 33 de la Constitution de l'OIT. La commission d'enquête avait recommandé l'adoption d'une série de mesures législatives, réglementaires et administratives tendant à mettre fin à la pratique du travail forcé et à assurer l'application de la convention no 29. Le Conseil d'administration et la Conférence internationale du Travail ont constaté l'année dernière que ces mesures n'avaient pas été mises en uvre, et ont eu recours pour la première fois à l'article 33 de la Constitution. Cette décision a été perçue comme renforçant le rôle et la crédibilité de l'OIT en matière de promotion des droits fondamentaux au travail. Dans ce contexte, il y a lieu de soutenir l'envoi de l'équipe de haut niveau, même s'il aurait été préférable d'avoir une présence permanente dans le pays. Un pas en avant pourrait être franchi grâce à cette équipe. Pour cela, trois conditions devront être remplies: la mission devra avoir toute liberté de mouvement; il faudra qu'elle puisse accéder à tous les endroits souhaités et, enfin, le Directeur général devra avoir toute latitude dans le choix de sa composition. Le Portugal, en tant que membre du Conseil d'administration, aurait particulièrement à c ur de participer, lors de la prochaine session du Conseil, à une discussion tripartite constructive à cet égard.
Le membre gouvernemental du Brésil s'est félicité des discussions fructueuses et de la coopération qui constituent des voies pour trouver une solution au problème du travail forcé au Myanmar. Il y a lieu de souligner l'importance de la présence de l'OIT sur le terrain comme moyen de s'assurer de la crédibilité et de l'efficacité des mesures législatives et administratives mises en uvre par le gouvernement. Il s'est félicité de la proposition d'envoyer une équipe de haut niveau au Myanmar afin de réaliser une évaluation objective des mesures adoptées. Cette évaluation permettra au Conseil d'administration, à sa réunion de novembre, de recommander de manière impartiale et objective les mesures qui devront être prises dans le futur.
Le représentant du Directeur général a indiqué qu'il pouvait d'ores et déjà apporter quelques éclaircissements sur certains points soulevés. S'agissant de l'information apportée aux acteurs autres que les autorités gouvernementales, et de leur participation au processus ayant abouti au protocole d'entente ainsi qu'à l'équipe de haut niveau, l'orateur a souligné que, d'une part, Mme Aung San Suu Kyi avait été tenue informée de la teneur et de la signification du protocole d'entente. A cet égard, elle avait exprimé le souhait d'entrer en contact avec l'équipe de haut niveau. D'autre part, s'agissant des représentants de la société civile, une liste des ONG présentes au Myanmar avait déjà été établie. En ce qui concerne la période durant laquelle l'équipe de haut niveau se rendrait au Myanmar, le mois de septembre avait été choisi en tenant compte des conditions climatiques et de la nécessité de disposer en temps utile d'un rapport pour le Conseil d'administration de novembre. Il s'agit là de considérations pratiques et la date exacte pourra être revue ultérieurement.
Les membres employeurs ont rappelé, après une discussion sérieuse et exhaustive, que la position qu'ils avaient présentée au début de cette discussion était tout à fait en ligne avec les mesures prises jusqu'à présent par les différents organes de l'OIT. Il semble qu'actuellement les différents membres de la commission, en exprimant un espoir prudent, ont plutôt la même appréciation des divers aspects de ce cas. Le gouvernement du Myanmar a fait un premier pas dans la bonne direction. Cependant, les résultats escomptés ne se sont guère réalisés. D'importants efforts sont encore nécessaires pour surmonter de nombreuses difficultés telles que la taille du pays; la persistance du travail forcé dans la pratique; et le fait que dans bien des régions du Myanmar, au fil des ans, plusieurs autorités se sont habituées à la pratique du travail forcé - en particulier, les autorités civiles et militaires profitant du travail forcé - ce qui constitue un obstacle à tout changement. Compte tenu de ces éléments, les résultats à atteindre représentent une tâche difficile et un défi pour toutes les parties impliquées. Les accords conclus jusqu'à maintenant ne peuvent encore rien garantir: ils contiennent des promesses et des arrangements formels en vue de répondre au problème. Sans une réelle bonne volonté, rien ne pourra réussir - pas même une évaluation objective de la situation dans la pratique. Dans ces circonstances, il est nécessaire de se tenir au plus près des décisions prises jusqu'alors par les organes de l'OIT. A cet égard, les membres employeurs ne peuvent soutenir la proposition du gouvernement du Myanmar, contenue dans le Mémorandum relatif au Protocole d'entente entre le gouvernement du Myanmar et le Bureau international du Travail sur les modalités d'une évaluation objective de l'application par le gouvernement du Myanmar de la convention no 29 (document D.9), d'assouplir les mesures prises à son égard en vertu de l'article 33 de la Constitution. Jusqu'à maintenant, chaque petite mesure annoncée reste sur le papier. L'objectif de cette commission est que les normes internationales du travail aient une influence sur la réalité sociale. Où cela serait-il le plus nécessaire si ce n'est dans le domaine des droits de l'homme? Devenus optimistes par expérience, voir réalistes, les membres employeurs ont considéré que tout nouveau développement dans ce cas devra faire l'objet d'un examen critique et sérieux dans l'espoir que la situation de la population du Myanmar s'améliore.
Les membres travailleurs ont déclaré avoir écouté avec attention les différentes déclarations. Malgré les informations communiquées par le représentant gouvernemental du Myanmar, les graves violations de la convention no 29 se poursuivent. Le cas examiné est extrêmement important en raison de la gravité des violations constatées et des pratiques continues, systématiques, voire structurelles, du travail forcé. L'objectif de l'Organisation demeure la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête. Le gouvernement doit pour cela s'assurer que la législation et la pratique nationales soient mises en conformité avec la convention no 29, aucun travail forcé ou obligatoire ne pouvant être imposé par les autorités, et que des sanctions soient appliquées aux personnes qui enfreignent l'interdiction du recours au travail forcé. L'OIT est la seule instance qui puisse évaluer de manière objective si les recommandations ont été mises en uvre. L'équipe de haut niveau constitue ainsi un premier pas dans cette évaluation. Les membres travailleurs considèrent toutefois que la composition et le fonctionnement de cette équipe devront respecter certains critères: être composée de personnes expertes en la matière avec au moins un des membres de la commission d'enquête et la participation du Département des normes; être assez large pour couvrir les différentes régions du pays et les différents types de travail forcé constatés; avoir accès à toutes les informations, personnes et endroits souhaités, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays; avoir à sa disposition des interprètes; avoir la garantie que les témoins bénéficieront d'une protection effective et avoir le choix d'une période appropriée pour la réalisation de sa mission. Les membres travailleurs ont tenu à souligner que la mission à effectuer par cette équipe ne doit en aucun cas être considérée comme la fin mais bien le début d'un processus. L'Organisation doit poursuivre très attentivement l'examen de ce cas et procéder à l'évaluation objective de la mise en uvre des trois recommandations de la commission d'enquête. A cet effet, d'autres missions seront nécessaires. En conclusion, il convient d'appuyer la déclaration du représentant gouvernemental qui est intervenu au nom de l'Union européenne selon laquelle les mesures prises dans le cadre de l'application de l'article 33 de la Constitution ne pourront être levées que si le travail forcé est réellement aboli et les recommandations de la commission d'enquête effectivement mises en uvre.
Le représentant gouvernemental de Myanmar a relevé que les délégations d'un certain nombre d'Etats Membres se sont félicitées de l'entente entre son gouvernement et l'OIT sur les modalités de l'évaluation objective que cette dernière doit mener. Il a exprimé sa reconnaissance à l'égard des Etats Membres de l'ANASE et, d'une manière générale, des pays de la région Asie/Pacifique, pour leur déclaration conjointe à ce sujet. Pour ce qui est de la programmation de la visite de l'équipe de haut niveau, l'orateur a rappelé que le mois de septembre été retenu en raison de considérations climatiques. A cette période, les moussons seront pratiquement finies et l'équipe devrait pouvoir effectuer ses déplacements sans aucun problème. D'autres dates restent néanmoins possibles - le mois d'octobre, comme on l'a suggéré. Pour ce qui est de l'effectif de l'équipe, si rien n'a encore été décidé, il conviendrait cependant que celui-ci ne soit pas trop nombreux. Des mesures ont d'ores et déjà été prises à ce sujet. Ainsi, la commission nationale de mise en uvre a constitué cinq équipes depuis avril 2001. S'agissant des textes de loi, il faut bien considérer que leur application prend un certain temps, raison pour laquelle aucun résultat n'a encore pu être observé. Pour ce qui est des personnes témoignant, leur protection est garantie par les dispositions en vigueur du Code pénal. Sur ce point, le système juridique du pays est entièrement hérité du système britannique et présente donc des garanties indiscutables. Les membres qui constitueront l'équipe de haut niveau disposeront d'une liberté de mouvement leur permettant d'avoir librement accès à toutes les régions, y compris celles dans lesquelles, selon certaines allégations, il serait recouru au travail forcé. Leur liberté de mouvement ne sera limitée que par le souci de leur sécurité devant les risques constitués par les agissements insurrectionnels. Cette question a d'ailleurs été prise en considération dans les modalités de l'entente. L'orateur a fait valoir que l'heure était désormais à l'instauration de la confiance, à travers la mission d'évaluation objective que cette équipe de haut niveau doit accomplir dans le courant de l'année. Le gouvernement du Myanmar est prêt à lui fournir son concours, dans le respect de ce qui a été convenu. L'intervenant a demandé en dernier lieu que les remarques finales du Président reflètent les commentaires favorables formulés par plusieurs personnes dans le cadre de la séance. Enfin, il a demandé que les remarques finales reflètent également l'opinion de certains Etats Membres tendant à ce que le Conseil d'administration réexamine, sur la base des résultats de la future mission de l'équipe de haut niveau, les mesures prises contre le Myanmar en application de l'article 33 de la Constitution de l'OIT en vue de leur levée.
Les membres travailleurs, se référant à leurs déclarations antérieures, ont indiqué qu'ils n'avaient pas été convaincus par les arguments du gouvernement.
Les membres employeurs ont rappelé que leurs espoirs, leurs attentes et leurs demandes avaient été résumés dans leurs précédentes déclarations; des résultats positifs sont encore attendus et ne peuvent être considérés comme acquis.
Le représentant gouvernemental du Myanmar a demandé que les remarques finales du Président rendent compte des commentaires positifs émis par les délégués, notamment un certain nombre de délégués travailleurs, sur le protocole d'entente conclu par le gouvernement avec l'OIT sur les modalités de l'évaluation objective, de manière à introduire un meilleur équilibre dans le texte. Il a suggéré en conséquence que, dans les conclusions, la phrase commençant par "à cet égard, elle a noté avec intérêt..." soit remplacée par "à cet égard, elle s'est félicitée de constater...". Il a également suggéré que la phrase concernant l'arrêté no 1/99 reflète la formulation employée initialement par la commission d'experts et se lise comme suit: "... pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique..." (paragraphe 7). Il convient de noter que les experts, dont l'indépendance est internationalement reconnue, ont procédé à une évaluation objective, en des termes pondérés, qu'il convient de reprendre.
Le président a précisé en réponse à quelques questions, que dans les conclusions la phrase concernant l'arrêté no 1/99 auquel le gouvernement s'est référé reprend, dans des termes différents, sans les modifier, les conclusions relatives au même objet dans le paragraphe 7 de l'observation de la commission d'experts et qu'elle respecte pleinement l'idée exprimée par la commission d'experts. Cette précision figurera au rapport de la discussion dans le rapport de la commission.
Les membres employeurs ont proposé d'insérer un paragraphe dans la partie générale du rapport de la Commission de la Conférence afin d'indiquer que la commission a tenu une séance spéciale sur la question du travail forcé au Myanmar. Le compte rendu de cette séance devrait figurer dans une troisième partie spéciale du rapport. Les membres travailleurs ont soutenu cette proposition.
B. Observation de la Commission d'Experts
Convention no 29: Travail forcé, 1930
Observation 2000
(Non reproduite)
C. Documents GB.280/6 et (add.1) et (add. 2)
GB.280/6
SIXIEME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR
Introduction
1. A sa 279e session (novembre 2000), le Conseil d'administration était saisi du rapport de la mission de coopération technique du BIT qui s'est rendue au Myanmar du 20 au 26 octobre 2000 et de documents fournis ultérieurement par le gouvernement (Note 1). Le Conseil d'administration a conclu que les conditions énoncées au paragraphe 2 de la résolution de la Conférence n'étaient pas remplies et qu'il fallait donc donner effet aux dispositions du paragraphe 1 de la résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 88e session (juin 2000). Les mesures prévues au paragraphe 1 de cette résolution sont donc entrées en vigueur le 30 novembre 2000 (Note 2). A la lumière de la discussion, il a toutefois été noté que le Directeur général devrait poursuivre la coopération avec le gouvernement du Myanmar pour promouvoir la pleine application des recommandations de la commission d'enquête (Note 3).
2. Conformément à la résolution de la Conférence, dans une lettre datée du 8 décembre 2000, le Directeur général a porté l'alinéa b) du paragraphe 1 du dispositif de la résolution à l'attention des gouvernements des Etats Membres de l'OIT et les a priés de l'informer des mesures prises ou envisagées à cet égard. Le Directeur général a également demandé que les recommandations figurant dans la résolution soient portées à l'attention des organisations d'employeurs et de travailleurs du pays, afin que celles-ci puissent prendre les mesures appropriées et l'informer soit directement, soit par l'intermédiaire de leur gouvernement. Un exemplaire de cette lettre a également été envoyé aux organisations nationales d'employeurs et de travailleurs intéressées.
3. En outre, les organisations internationales d'employeurs et de travailleurs et d'autres organisations non gouvernementales jouissant du statut consultatif auprès de l'OIT ont aussi été informées des mesures prises par le Conseil d'administration.
4. Conformément à la résolution de la Conférence, dans une lettre en date du 8 décembre 2000, le Directeur général a informé les organisations internationales, visées à l'article 12, paragraphe 1, de la Constitution de la non-application par le Myanmar des recommandations de la commission d'enquête, et a invité les organes compétents de ces organisations à réexaminer, dans le cadre de leur mandat et à la lumière des conclusions de la commission d'enquête, toute activité de coopération qu'ils auraient pu engager avec le Myanmar et, le cas échéant, à envisager de cesser dès que possible toute activité susceptible d'encourager directement ou indirectement la pratique du travail forcé ou obligatoire (Note 4). Le Directeur général a également invité ces organisations à l'informer de toute mesure prise à cet égard par leurs organes compétents. En outre, le Directeur général a été en contact étroit avec l'Ambassadeur Razali Ismail, envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies au Myanmar, à l'occasion des deux visites qu'il a récemment effectuées dans ce pays du 9 au 12 octobre 2000 et du 5 au 9 janvier 2001. Le Bureau a également examiné la question avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, M. Paulo Pinheiro,
5. En ce qui concerne l'alinéa d) du paragraphe 1 du dispositif de la résolution de la Conférence, le Directeur général, après des consultations approfondies avec le secrétariat des Nations Unies, a engagé les procédures nécessaires pour que la question de la non-application par le Myanmar des recommandations de la commission d'enquête soit inscrite à l'ordre du jour de la session de juillet 2001 du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC), afin que l'ECOSOC ou l'Assemblée générale, ou l'une et l'autre, adoptent des recommandations à l'intention des gouvernements et des autres institutions spécialisées contenant des demandes semblables à celles qui figurent aux alinéas b) et c) du paragraphe 1 de la résolution de la Conférence.
6. Outre les informations communiquées conformément à la résolution de la Conférence, un volume important d'informations est parvenu d'autres sources du fait, notamment, de la publicité faite autour de l'entrée en vigueur des mesures figurant dans la résolution de la Conférence. Un certain nombre d'ONG et de particuliers ont fourni spontanément des informations au Bureau sur les mesures prises et les autres activités à l'appui de la résolution de la Conférence, ainsi que des informations sur la pratique actuelle du travail forcé au Myanmar.
7. Les informations reçues sur les mesures prises en rapport avec la résolution de la Conférence seront présentées sous quatre rubriques: i) faits nouveaux concernant le gouvernement du Myanmar; ii) mesures prises par les mandants de l'Organisation; iii) mesures prises par des organisations internationales; iv) autres informations pertinentes parvenues au Bureau.
Faits nouveaux concernant le gouvernement du Myanmar
8. La 279e session du Conseil d'administration s'étant terminée un peu plus tôt que prévu, une lettre de la mission permanente du Myanmar, adressée au Président du Conseil d'administration, et expliquant la position du gouvernement face aux conclusions du Conseil d'administration, est parvenue au bureau du Conseil trop tard pour pouvoir être portée à l'attention de ce dernier. Cette lettre est reproduite pour information à l'annexe 1 du présent document.
9. Dans une lettre datée du 6 décembre 2000, adressée au Président de la 279e session du Conseil d'administration, le représentant permanent de la mission du Myanmar revient sur les problèmes soulevés dans la lettre dont il est question au paragraphe précédent. A cette lettre est annexé un document intitulé "Résumé des mesures concrètes prises par le gouvernement du Myanmar" qui contient des informations sur la position du gouvernement préalablement aux conclusions du Conseil d'administration. Ce document est reproduit à l'annexe 2 pour information.
10. Dans une lettre en date du 22 décembre 2000 adressée au gouvernement du Myanmar et reproduite à l'annexe 3, le Directeur général fait savoir au gouvernement qu'il a informé les Membres de l'OIT et les organisations internationales de la décision du Conseil d'administration, comme prévu dans le paragraphe pertinent de la résolution, tout en soulignant qu'il poursuit la coopération avec le gouvernement afin de promouvoir la pleine application des recommandations de la commission d'enquête. Il exprime le sincère espoir que les mesures en vigueur deviendront bientôt inutiles en raison de la pleine application de ces recommandations par le gouvernement.
11. En réponse à la lettre du Directeur général du 22 décembre 2000, le gouvernement a envoyé une lettre datée du 11 février 2000, reproduite à l'annexe 4, dans laquelle il rappelle qu'il a reçu deux missions de coopération technique du BIT pour l'aider à mettre la législation nationale en conformité avec la convention no 29. Il a mis en place un dispositif législatif, gouvernemental et administratif visant à rendre le travail forcé illégal tant en droit qu'en pratique. Toutefois, "de puissantes influences au sein du Conseil d'administration du BIT ont totalement ignoré les mesures concrètes prises par le Myanmar ainsi que sa volonté manifeste de coopérer avec l'OIT". La lettre indique en outre que le Myanmar n'en demeure pas moins résolu à appliquer le dispositif qu'il a mis en place. La commission chargée de l'application de la convention no 29 se réunit régulièrement pour examiner la situation. Le mécanisme national de suivi qui a été institué fonctionne également sans heurts. Quelques cas de violation de la dernière ordonnance législative ont été signalés. Ils ont donné lieu à une enquête et des poursuites ont été engagées contre les coupables. Le gouvernement remercie le Directeur général de sa volonté de coopérer avec le Myanmar et reconnaît que les efforts engagés au niveau national seront mieux acceptés par ses détracteurs si l'OIT y participe. Toutefois, tant que le Myanmar ne bénéficiera pas d'un traitement équitable et juste, il lui faudra poursuivre lui-même ses efforts en vue de l'éradication de la pratique du travail forcé dans le pays. Le gouvernement donne l'assurance qu'il continuera à prendre des mesures pour rendre le travail forcé illégal au Myanmar et que le dispositif mis en place sera résolument appliqué.
12. Le Directeur général a répondu à cette lettre par une communication en date du 1er mars 2001, reproduite à l'annexe 5. Il informera le Conseil d'administration de tous les faits nouveaux éventuels.
Mesures prises par les mandants de l'Organisation
Mesures prises par les Etats Membres
13. Au 5 mars 2001, 39 Etats Membres ainsi qu'un certain nombre d'organisations nationales d'employeurs et de travailleurs avaient fait parvenir leurs réponses dont on trouvera un résumé ci-après. Etant donné que certaines des mesures évoquées sont encore en cours d'application, elles feront, le cas échéant, l'objet d'un complément d'information au présent rapport avant qu'il soit soumis à la Conférence internationale du Travail, comme indiqué au paragraphe 67. Les Etats Membres ayant communiqué aux organisations nationales d'employeurs et de travailleurs des informations relatives à la résolution adoptée par la Conférence, celles-ci ont envoyé séparément un volume considérable de réponses concernant les actions qu'elles avaient prises pour donner suite à cette résolution.
14. Dans une lettre datée du 19 janvier 2001, le gouvernement des Etats-Unis a fait savoir qu'il avait uvré sans relâche avec un soutien bipartisan pour favoriser le retour à la démocratie et un meilleur respect des droits de l'homme au Myanmar, y compris la fin du travail forcé. A cet effet, il a imposé au cours des dernières années une série de sanctions diplomatiques et économiques contre ce pays, notamment la suspension de l'aide économique, l'abaissement de la représentation diplomatique au niveau de chargé d'affaires, un embargo sur les armes, la suspension du bénéfice des préférences tarifaires généralisées, une opposition aux programmes de soutien des institutions financières internationales, une restriction des visas accordés aux ressortissants du Myanmar parties prenantes dans l'abolition de la démocratie et la violation des droits de l'homme et une interdiction des investissements américains au Myanmar. Le gouvernement a également soutenu un certain nombre d'actions entreprises par l'OIT pour lutter contre le travail forcé au Myanmar, notamment la déclaration du Conseil d'administration en novembre 2000 selon laquelle les progrès accomplis étaient insuffisants pour justifier une suspension des mesures adoptées par la Conférence. En même temps, le gouvernement a pris note de ce que les autorités du Myanmar et Daw Aung San Suu Kyi de la Ligue nationale pour la démocratie avaient confirmé avoir engagé un dialogue. Le gouvernement espère que cela traduit un effort sincère dans la voie d'une réconciliation nationale et que cela représente un progrès concret et longtemps attendu vers l'élimination du travail forcé et des violations d'autres droits de l'homme au Myanmar. Tout en espérant que ces mesures seront couronnées de succès, il pense qu'en l'absence de progrès importants et mesurables les Membres de l'OIT, notamment les Etats-Unis, doivent être prêts à envisager d'autres mesures, y compris des sanctions commerciales, pour donner suite à la décision prise par la Conférence sur le fondement de l'article 33. Le gouvernement souligne que ni le Conseil d'administration ni la Conférence n'ont à ce jour en main la preuve que les recommandations suggérées par la commission d'enquête ont été pleinement appliquées. Pour finir, le gouvernement continue à juger inopportune la présence de l'OIT au Myanmar.
15. Dans une lettre datée du 15 février 2001, le gouvernement de la Thaïlande a déclaré que, pour prendre des mesures conformes à la résolution de la Conférence, le ministère du Travail et de la Protection sociale a tenu une réunion le 10 janvier 2001 avec des agences gouvernementales concernées, des organisations d'employeurs et de travailleurs et d'autres organisations intéressées, et que le gouvernement pouvait désormais garantir qu'aucun investissement thaïlandais au Myanmar ne contribuait directement ou indirectement à l'exploitation d'une forme quelconque de travail forcé. Tous les efforts possibles seront mis en oeuvre pour décourager la pratique du travail forcé si le gouvernement a connaissance de son existence sous une forme quelconque. Afin de résoudre le premier problème de manière effective et pour renforcer la coopération avec l'OIT, un accord a été conclu afin de mettre en place un comité directeur chargé de suivre cette affaire.
16. Les gouvernements de l'Allemagne, du Danemark, de la Finlande, de la France, de l'Irlande, de l'Italie, des Pays-Bas, du Royaume-Uni et de la Suède ont indiqué que la question de savoir quelle était la meilleure manière de donner effet aux recommandations figurant dans la résolution de la Conférence avait fait l'objet d'une discussion avec des organisations d'employeurs et de travailleurs, entre les Etats membres de l'Union européenne et avec la Commission européenne. Ils partagent l'inquiétude de la communauté internationale face à la pratique du travail forcé au Myanmar, pratique qui, craignent-ils, persiste encore. L'Union européenne a retiré temporairement le bénéfice des préférences tarifaires généralisées à l'Union du Myanmar en 1997 en raison de cette pratique. Elle a également pris un certain nombre d'autres mesures au cours des quatre dernières années, énoncées dans sa position commune, en réaction contre la situation politique au Myanmar. Le régime du Myanmar a pris certaines mesures en vue de mettre un terme à la pratique du travail forcé, mais celui-ci doit être interdit par la loi, éliminé dans la pratique et toute personne qui continuerait à y recourir doit être sanctionnée. L'Union européenne suit la situation de très près et, si les autorités du Myanmar ne prennent pas les mesures qui s'imposent à cet effet, est prête à prendre d'autres mesures. Elle a exprimé clairement sa préoccupation face au travail forcé au cours d'une visite de la troïka européenne au Myanmar en janvier 2001. Elle espère sincèrement que des contacts seront renouvelés entre l'OIT et le Myanmar et qu'une présence de l'OIT pourra être établie dans le pays afin de vérifier que la pratique du travail forcé a définitivement cessé. Le gouvernement de l'Irlande a ajouté qu'il avait l'intention d'écrire à toutes les entreprises ayant des liens commerciaux ou financiers avec le Myanmar pour leur faire part de son soutien à la résolution de l'OIT. Le gouvernement du Danemark a ajouté que son Comité permanent pour les questions relatives à l'OIT avait recommandé que les entreprises danoises revoient leurs relations avec le Myanmar. Le gouvernement de la France a ajouté qu'il avait entrepris une évaluation exhaustive de sa coopération avec le Myanmar et de l'aide qu'il apportait à ce pays, limitée à l'heure actuelle au domaine humanitaire, afin de veiller à ce que ces relations ne puissent en aucune manière faire perdurer ou élargir la pratique du travail forcé dans le pays. Un recensement des entreprises françaises travaillant au Myanmar est également en cours pour leur communiquer la résolution de l'OIT. Le gouvernement de l'Italie a ajouté qu'il avait entrepris un examen approfondi des relations bilatérales avec le Myanmar pour vérifier qu'il ne pouvait pas en être tiré parti pour faire perdurer le système du travail forcé dans ce pays. Les relations commerciales entre l'Italie et le Myanmar ont été réduites à un minimum après la détérioration de la situation politique et des droits de l'homme. Entre janvier et octobre 2000, la dernière période pour laquelle des chiffres sont disponibles, le volume total du commerce avec le Myanmar a été de 32 millions d'euros et il n'existe aucun investissement italien au Myanmar, aucun n'étant non plus envisagé. Le nombre de touristes italiens s'étant rendus au Myanmar entre 1999 et 2000 est très peu important. Le gouvernement des Pays-Bas a ajouté qu'il avait pour politique ni d'encourager les entreprises néerlandaises à ouvrir des opérations au Myanmar ni de les en décourager. Les échanges commerciaux se chiffrent annuellement aux alentours de 19 millions de dollars E.-U. Le gouvernement de la Suède a ajouté que ses relations avec le Myanmar étaient limitées. Ses relations économiques avec ce pays sont négligeables, avec des importations - essentiellement de produits ligneux et textiles - pour la période janvier-octobre 2000 se chiffrant à environ 20 millions de couronnes suédoises, et des exportations se chiffrant pour la même période à 1,2 million de couronnes suédoises. Le gouvernement s'est dit prêt à prendre des mesures pour que le commerce de la Suède avec le Myanmar ne favorise pas le système du travail forcé. L'une de ces mesures consistera à informer officiellement les importateurs suédois de la résolution adoptée par la Conférence et des recommandations de la commission d'enquête.
17. Dans une communication datée du 28 février 2001, le gouvernement de la Suisse a déclaré qu'en raison du manque de progrès dans le processus de démocratisation et de la violation systématique des droits de l'homme au Myanmar (y compris des droits des travailleurs) il a édicté, dès le 2 octobre 2000, une ordonnance instituant des mesures à l'encontre de ce pays. Cette ordonnance, dont il joint une copie, interdit la livraison de matériel de guerre et de matériel susceptible d'être utilisé à des fins de répression au Myanmar. De plus, les membres du gouvernement du Myanmar et leurs familles ont vu leurs avoirs en Suisse gelés et ont interdiction d'entrer ou de transiter par le territoire suisse. Des consultations ont permis d'établir que les relations entre la Suisse et le Myanmar sont d'importance mineure, les exportations pour la période de janvier à novembre 2000 s'étant élevées à 2,2 millions de francs suisses et les importations à 3,5 millions de francs suisses. Le nombre de touristes suisses se rendant au Myanmar est également faible. Par ailleurs, le gouvernement signale que la campagne internationale "Clean Clothes" a particulièrement ciblé une entreprise de sous-vêtements dont le siège est en Suisse. La Commission fédérale tripartite a pris connaissance avec satisfaction des changements juridiques réalisés par le gouvernement du Myanmar mais elle espère qu'ils seront traduits dans les faits. Elle espère en outre que le Myanmar se déclarera prêt à recevoir sur son territoire une présence permanente de l'OIT, qui devrait vérifier la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête et, de cette manière, faciliter une normalisation des relations entre le Myanmar et la communauté internationale. Compte tenu du fait que les relations économiques sont marginales au plan bilatéral, et des premiers pas entrepris par le gouvernement du Myanmar vers une ouverture politique, il n'est pas envisagé pour le moment que le gouvernement prenne des mesures supplémentaires contre le Myanmar.
18. Dans une communication datée du 26 janvier 2001, le gouvernement de la Norvège a confirmé qu'il continuait à soutenir la position commune de l'Union européenne sur le Myanmar. Il n'apporte aucune aide humanitaire aux organisations ou activités contribuant d'une manière quelconque au travail forcé au Myanmar. La moitié de l'aide apportée par la Norvège au Myanmar va au soutien de mesures en faveur des droits de l'homme et de la démocratie. En 1998, le gouvernement a lancé un appel, demeuré sans effet, aux firmes norvégiennes afin qu'elles ne commercent pas avec le Myanmar. Les échanges commerciaux actuels avec le Myanmar sont marginaux. En décembre 2000, le gouvernement a rencontré les représentants de la Fédération norvégienne des syndicats afin de discuter l'éventualité d'un boycott.
19. Dans une communication datée du 1er mars 2001, le gouvernement de l'Australie a indiqué qu'il avait procédé à un examen des relations avec le Myanmar qui avait établi qu'aucun programme ni activité d'assistance financé par le gouvernement ne soutenait ni ne permettait la perpétuation de la pratique du travail forcé. A la connaissance du gouvernement, aucune firme australienne ayant des activités au Myanmar ne fait appel au travail forcé, mais l'ambassade australienne dans le pays a informé les entreprises australiennes connues pour leurs opérations ou leurs investissements dans ce pays de l'enquête menée par le gouvernement, leur recommandant de veiller à respecter la résolution de la Conférence. En outre, le gouvernement australien a pris des mesures positives dans d'autres domaines pour encourager les autorités du Myanmar à éliminer le travail forcé. Il a financé une série d'ateliers de formation sur les droits de l'homme organisés à Yangon en 2000 destinés à une cinquantaine de cadres moyens, l'un deux portant sur une "Introduction au droit international" au cours duquel les participants ont discuté ouvertement de questions sensibles, notamment celle du travail forcé.
20. Les gouvernements de l'Arabie saoudite, de l'Autriche, de la Croatie, de l'Equateur, du Nicaragua, de la Trinité-et-Tobago et de l'Ukraine ont déclaré qu'ils avaient communiqué le texte de la résolution de la Conférence à leurs organisations d'employeurs et de travailleurs mais n'avaient reçu encore aucune réponse.
21. Les gouvernements du Chili, de Cuba, de la République tchèque, de la République islamique d'Iran, de l'Islande, de la Jordanie, du Kenya, de la Lituanie, de la Malaisie, du Mali, du Maroc, de Panama, des Philippines, de la Roumanie, de Singapour, du Suriname et du Togo ont déclaré qu'ils n'entretenaient aucune relation avec le Myanmar pouvant donner lieu à une perpétuation ou à un élargissement de la pratique du travail forcé ou obligatoire évoquée par la commission d'enquête. Le gouvernement de Singapour a également rappelé que l'adoption de mesures incitatives plutôt que de sanctions serait mieux appropriée et plus efficace pour résoudre le problème du travail forcé au Myanmar. Le gouvernement de la République tchèque a également déclaré qu'il souscrivait à la position commune de l'Union européenne adoptée en 1996 et élargie par la suite. Il s'est également joint à l'embargo instauré par l'Union européenne sur les exportations d'armes, de munitions et d'équipements militaires à destination du Myanmar, a annulé l'aide n'ayant pas un caractère manifestement humanitaire ainsi que des programmes d'aide au développement. Les relations bilatérales ont été également interrompues, y compris celles des partenaires sociaux. Le gouvernement de la Malaisie a également indiqué qu'il continuerait, avec les autres membres de l'ANASE, à demander instamment aux autorités du Myanmar de mettre en uvre des mesures susceptibles de faire cesser toutes les pratiques qualifiées de travail forcé par la commission d'enquête. Il espère que le problème pourra être résolu de manière efficace grâce à une solution amiable.
Mesures prises par des organisations nationales d'employeurs et de travailleurs
22. La Confédération des syndicats libres de la République slovaque a noté que la République slovaque a suivi la position de l'Union européenne en ce qui concerne le Myanmar. Elle n'a entretenu aucune relation politique bilatérale avec le Myanmar, mais elle a maintenu des contacts commerciaux, dans les limites des restrictions de l'Union européenne. Il ne semble pas que des entreprises slovaques aient effectué des investissements au Myanmar, mais une enquête sur les types de produits importés du Myanmar a révélé que la majorité de ces produits provenaient de secteurs où des violations des droits fondamentaux au travail ont été constatées. Une liste des entreprises slovaques ayant des activités d'échange avec le Myanmar était jointe à la lettre; la répartition de ces échanges par secteur était indiquée, et il était précisé pour chaque secteur s'il on pouvait y rencontrer des cas de travail forcé.
23. Dans une communication en date du 20 février 2001, la Confédération générale du travail Force ouvrière a indiqué qu'elle avait demandé au gouvernement français de lui fournir une liste des entreprises françaises ayant des liens commerciaux avec le Myanmar, de même que les détails et le montant des marchés avec ce pays. En outre, l'organisation a adressé une lettre à une entreprise française opérant dans l'hôtellerie et le tourisme en lui demandant de reconsidérer ses activités au Myanmar. La confédération n'a pas été convaincue par la réponse de l'entreprise, selon laquelle sa présence aurait des effets positifs. La confédération, en outre, a fait pression à plusieurs reprises sur le gouvernement français pour qu'il intervienne dans la question de la présence au Myanmar d'une entreprise multinationale française. La confédération a également demandé qu'une séance spéciale de la commission de consultation pour les questions relatives à l'OIT ait lieu et soit consacrée exclusivement à la question du Myanmar.
24. Les communications des organisations d'employeurs et de travailleurs norvégiennes ont été transmises par le gouvernement de la Norvège. La Confédération norvégienne des syndicats a déclaré qu'elle a joué, conjointement avec d'autres organisations norvégiennes bénévoles, un rôle actif pour essayer d'instaurer un boycottage économique du Myanmar par la Norvège. La Confédération des syndicats professionnels a déclaré qu'elle a exhorté le gouvernement à décréter un tel boycottage. La Confédération norvégienne du commerce et de l'industrie s'est félicitée de la position du gouvernement demandant de s'abstenir de toute coopération économique avec le Myanmar et est disposée à encourager les entreprises membres à suivre cette consigne. Dans une communication séparée, la Confédération norvégienne des syndicats a fait parvenir la traduction d'une correspondance échangée entre le gouvernement de la Norvège et elle-même concernant l'appel de la confédération à un boycottage économique du Myanmar par la Norvège.
25. La Confédération suédoise des syndicats a indiqué qu'elle a demandé au gouvernement de la Suède de prendre des mesures supplémentaires contre le Myanmar, y compris d'interdire les investissements au Myanmar et les importations en provenance de ce pays. Ses syndicats nationaux affiliés mèneront une enquête pour s'assurer qu'aucune entreprise ou aucun organisme officiel suédois n'est économiquement actif au Myanmar, qu'il s'agisse d'importations ou d'exportations, d'investissements ou d'échanges. L'organisation a également demandé à la Suède, en tant que présidente de l'Union européenne, d'obtenir une décision du Conseil des ministres de l'Union européenne interdisant les investissements à toutes les entreprises basées dans l'UE et prohibant les importations de tous produits en provenance du Myanmar.
26. Les informations fournies par les organisations de travailleurs allemandes ont été transmises par le gouvernement de l'Allemagne. Un rapport sur l'élimination du travail forcé au Myanmar établi par la Confédération allemande des syndicats a examiné la question et constaté que les relations économiques avec le Myanmar s'appuient en grande partie sur des infrastructures créées en ayant recours au travail forcé. Toutes les entreprises allemandes ont été priées de jeter un regard critique sur leurs liens économiques avec leurs partenaires commerciaux du Myanmar. Les comités d'entreprises des sociétés entretenant des relations avec le Myanmar devraient exiger de la direction des informations détaillées sur la nature de ces liens et lui enjoindre de rompre tous liens ne pouvant être maintenus sans utiliser des infrastructures construites en faisant appel au travail forcé. Ces demandes s'appuient sur la loi constitutionnelle sur les usines car les entreprises risquent d'être complices de violations considérées comme graves par la communauté internationale. Dans une lettre adressée au gouvernement de l'Allemagne, le Syndicat allemand des travailleurs salariés a déclaré son soutien à toute mesure que le gouvernement prendrait concernant la situation au Myanmar, y compris des déclarations adressées au gouvernement du Myanmar par l'intermédiaire de son ambassade.
27. L'Union syndicale suisse a fourni des informations sur l'étendue des relations commerciales entre le Myanmar et la Suisse, donné des détails des sanctions adoptées par le gouvernement de la Suisse à l'encontre du Myanmar le 2 octobre 2000 et fait remarquer qu'une entreprise textile suisse a été l'objet de la campagne "Clean Clothes". Le gouvernement de la Suisse a fourni des informations similaires qui sont abordées plus en détail dans le paragraphe 17 ci-dessus.
28. Les informations fournies par la Confédération de l'industrie britannique (CBI) ont été transmises par le gouvernement du Royaume-Uni. Dans une lettre datée du 8 février 2001 adressée au gouvernement, la confédération a indiqué que l'attention de ses organisations membres avait été attirée sur la politique du gouvernement à l'égard du Myanmar. La CBI est l'un des plus fermes partisans de mesures rigoureuses à l'encontre du Myanmar et continuera d'appuyer l'action de l'OIT.
29. Le gouvernement de la Finlande a transmis les informations fournies par la Confédération de l'industrie et des employeurs de Finlande. La confédération indique qu'elle n'entretient aucune relation avec le Myanmar ni avec les entreprises de ce pays. Elle soutient la position de l'UE et informe régulièrement ses membres (qui représentent 85 pour cent des employeurs de Finlande) des recommandations de l'OIT. Aucune entreprise finlandaise ne mène d'activités au Myanmar ni n'effectue d'investissements dans l'industrie ou dans les réseaux de ce pays. Les échanges entre la Finlande et le Myanmar sont de faible importance, les exportations au cours de la période allant de janvier à novembre 2000 se chiffrant à 248 000 euros et les importations (essentiellement de vêtements) au cours de la même période à deux millions d'euros.
30. Le Syndicat des travailleurs de la Barbade et la Confédération nationale des syndicats libres de Roumanie ont indiqué qu'ils n'entretenaient aucune relation avec le Myanmar pouvant être mise à profit pour perpétuer ou développer le système de travail forcé ou obligatoire visé par la commission d'enquête.
31. L'Organisation internationale des employeurs a informé toutes ses fédérations membres ayant participé au débat du Conseil d'administration à sa session de novembre et a fait ressortir la position des employeurs; elle a clarifié le sens de la résolution et les mesures qu'elle préconise et a fait savoir qu'une de ces mesures serait de demander à leurs mandants de revoir leurs relations avec le Myanmar. Les employeurs ont participé aux discussions avec les gouvernements à l'échelon national sur l'action des pays pour donner suite à la résolution.
Mesures prises par des organisations internationales
32. Le 5 mars 2001, 20 organisations internationales avaient communiqué des réponses. Celles-ci émanent des secrétariats de ces organisations et aucun renseignement n'a été fourni à ce stade au sujet de débats qui auraient lieu au sein des organes compétents de ces organisations, en ce qui concerne une éventuelle procédure de réexamen des activités de coopération menées avec l'Etat membre concerné.
33. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies a indiqué que la question a été portée à l'attention de tous les services concernés de l'Organisation. Ni l'ONU ni ses programmes ou ses fonds ne peuvent participer à des activités qui pourraient avoir pour effet de conforter, directement ou indirectement, le travail forcé ou obligatoire, puisque cela serait contraire à l'article 1 de la Charte des Nations Unies.
34. La Commission européenne a déclaré qu'elle soutient sans réserve la position ferme adoptée par l'OIT à l'égard du Myanmar et qu'elle a, en conséquence, engagé des discussions avec les Etats membres de l'Union européenne au sujet de la mise en uvre des dispositions de la résolution adoptée par la Conférence. Des mesures ont déjà été prises en 1997, à la suite d'une enquête qui avait été menée lorsque des allégations de travail forcé au Myanmar avaient été formulées par des organisations syndicales européennes. A la suite de cette enquête, le Myanmar s'est vu refuser l'accès au système généralisé de préférences de l'Union européenne. L'Union européenne a aussi pris, au cours des quatre dernières années, un certain nombre d'autres mesures, qui sont énoncées dans la position commune qu'elle a arrêtée pour la première fois en 1996 et qui a été renforcée depuis à un certain nombre d'occasions. La commission considère que les autorités du Myanmar doivent prendre des mesures rapides pour se conformer pleinement aux recommandations de l'OIT sur l'élimination du travail forcé. Elle suit la situation de près, de concert avec les Etats membres de l'Union européenne, et serait disposée, si les autorités refusent de prendre les mesures nécessaires, à proposer de nouvelles mesures au Conseil, y compris dans le domaine des relations commerciales et des investissements.
35. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a indiqué qu'il a procédé à une évaluation de ses activités au Myanmar qui lui a permis de conclure qu'aucune d'entre elles ne pouvait être considérée comme ayant pour effet de conforter, directement ou indirectement, le travail forcé. La communication comportait en annexe une "note sur les activités du HCR concernant le Myanmar et le travail obligatoire" qui décrit la nature des opérations du HCR au Myanmar dans le cadre de ses six domaines d'intervention et examine les conséquences que cette assistance pourrait avoir en termes de travail forcé. Cette note figure à l'annexe 9.
36. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a indiqué que son bureau au Myanmar a récemment procédé à une étude approfondie des activités de projet menées dans ce pays à la lumière de la résolution adoptée par la Conférence et a confirmé qu'aucune des activités financées par le PNUD ne conforte, directement ou indirectement, le travail forcé ou obligatoire. Le PNUD continuera à suivre la situation de très près dans le cadre de la mise en uvre de ses activités de projet. La communication comportait en annexe une "note sur les activités du PNUD au Myanmar à la lumière de la résolution de l'OIT", qui contient des précisions sur l'assistance fournie par le PNUD au Myanmar et examine les conséquences que cette assistance pourrait avoir en termes de travail forcé. Cette note figure à l'annexe 10.
37. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a indiqué qu'il a évalué les conséquences que ses activités pourraient avoir en termes de travail forcé et qu'il a conclu que, par définition mais aussi dans la pratique, son programme au Myanmar ne peut avoir pour effet de conforter, directement ou indirectement, le travail forcé ou obligatoire. Un nouveau programme de pays vient de prendre effet et, au cours de sa conception, grand soin a été pris d'éviter toute association avec des parties impliquées dans le travail forcé. La participation des communautés aux projets de l'UNICEF se fait sur une base strictement volontaire et toutes les précautions possibles sont prises dans le cadre des opérations de l'organisation, à tous les niveaux, pour éviter de conforter le travail forcé.
38. L'ONUSIDA a indiqué que, s'agissant de ses activités au Myanmar, ses coparrains ont noué d'étroites relations de travail avec le ministère de la Santé, ainsi qu'avec des organisations non gouvernementales internationales, nationales et locales. L'ONUSIDA a examiné les modalités de mise en uvre de ses activités à la lumière de l'article 1 du dispositif de la résolution adoptée par la Conférence et n'a aucune raison de penser que le ministère de la Santé a violé cette disposition. L'ONUSIDA fait également observer que tous les organismes des Nations Unies qui opèrent au Myanmar voient leurs programmes examinés par leurs conseils d'administration respectifs, qui veillent au respect des conventions internationales. Les partenariats mis en place avec des ONG internationales ont toujours été fondés sur des protocoles qui ont fait leurs preuves dans le domaine humanitaire. De plus, ces organisations ont signé un code de conduite qui garantit le respect de hautes considérations éthiques dans le cadre des programmes et des opérations mis en uvre.
39. Le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) a indiqué que, bien que le Myanmar soit l'un des pays prioritaires dans le cadre de son programme d'affectation de ressources, un programme de pays à part entière n'y a pas encore été mis en uvre, en grande partie à cause de la situation politique qui prévaut dans ce pays. L'organisation y affecte moins d'un million de dollars par an aux activités liées à la santé génésique. Les activités financées par le FNUAP ne bénéficient pas de l'une ou autre forme de travail forcé, que ce soit directement ou indirectement, et n'y contribuent en aucune manière.
40. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a déclaré qu'il opère exclusivement dans le nord de l'Etat de Rakhine, qui est une région en déficit vivrier. Il y mène depuis 1994, en collaboration avec le HCR, des opérations de secours et des opérations visant à distribuer de la nourriture en contrepartie d'activités éducatives et d'activités visant à la création d'actifs communautaires. Les travailleurs reçoivent une ration alimentaire journalière de 3,5 kg de riz pour une famille de cinq personnes. Les opérations visant à distribuer de la nourriture en contrepartie d'activités visant à la création d'actifs communautaires sont des opérations communautaires et bénévoles, qui ont principalement pour objectif de construire des barrages d'irrigation et des voies d'accès aux villages, ainsi que d'améliorer les voies municipales.
41. L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a déclaré qu'elle mène des activités de coopération technique au Myanmar visant à améliorer la sécurité et l'efficacité de l'aviation civile dans le pays et à faciliter la circulation en toute sécurité de l'aviation civile internationale qui survole l'espace aérien du Myanmar. Ces activités permanentes de coopération technique ont trait à la fourniture des matériels essentiels dans le domaine des communications et de la navigation et au renforcement des capacités dans le domaine de la surveillance de la sécurité des vols. Une assistance technique a aussi été proposée au Département de l'aviation civile du Myanmar pour renforcer les capacités du Centre de formation de l'aviation civile et agrandir l'aéroport international Hanthawadi à Yangon. L'OACI souligne que, à sa connaissance, ses activités de coopération technique au Myanmar ne confortent pas, directement ou indirectement, le travail forcé ou obligatoire.
42. L'Organisation maritime internationale (OMI) a indiqué que le Myanmar a été choisi pour participer à quatre projets régionaux en Asie qui sont toujours en cours. Ces projets ont pour objectif de promouvoir l'inspection des navires par l'Etat du port, la sécurité des navires non soumis aux conventions et la formation des instructeurs et des examinateurs maritimes, ainsi que des fonctionnaires chargés du contrôle des navires par l'Etat du port. De plus, l'OMI a fourni des cours et des publications au Myanmar en 2000, à la suite d'une évaluation des besoins des établissements de formation maritime du pays. En conséquence, l'assistance technique de l'OMI, qui consiste à améliorer les compétences du personnel maritime, n'a pas pour effet de conforter, directement ou indirectement, le travail forcé ou obligatoire au Myanmar.
43. L'Organisation mondiale du commerce (OMC) a indiqué que la question sera examinée par le Président du Conseil général. Les règles de l'OMC ne permettent pas au secrétariat d'adopter une ligne de conduite indépendante dans des questions de cette nature. Il appartient aux membres de l'OMC de prendre les décisions concernant d'éventuelles mesures en la matière.
44. L'Union postale universelle (UPU) a déclaré qu'elle a examiné la question et qu'elle n'a pas connaissance de pratiques relevant du travail forcé ou obligatoire dans le secteur postal au Myanmar. Si de telles pratiques existent, c'est très probablement dans des régions rurales reculées. Le Myanmar n'est pas membre des organes électifs de l'UPU et la coopération entre l'organisation et le Myanmar au niveau ministériel est relativement limitée. Cela étant, l'Union postale sait que les services postaux sont toujours sous le contrôle direct des pouvoirs publics, ce qui signifie qu'il est très probable que les droits fondamentaux de l'homme sont pleinement respectés dans ce secteur. C'est pourquoi, elle estime qu'il n'y a pas de raison, juridique ou autre, de mettre un terme aux relations postales officielles avec le Myanmar.
45. L'Union interparlementaire (UIP) a déclaré que, compte tenu du fait que le Myanmar n'a pas de Parlement, l'organisation n'a aucun contact avec les autorités du pays. Les seuls contacts qui ont été pris avec le Myanmar s'inscrivent dans le contexte des travaux du Comité des droits de l'homme des parlementaires de l'UIP, qui examine depuis 1991 le cas de parlementaires de Myanmar qui ont été élus en 1990 et qui ont été, jusqu'à présent, empêchés d'exercer le mandat qui leur a été confié, et notamment le cas de parlementaires qui ont été détenus et qui ont pu, en conséquence, être astreints à du travail forcé. L'Union interparlementaire a fourni le texte de sa résolution la plus récente sur le Myanmar, adoptée en octobre 2000, dans laquelle le Conseil interparlementaire "demande à nouveau aux Parlements membres d'appeler au respect des principes démocratiques au Myanmar et de se montrer solidaires de leurs collègues du Pyithu Hluttaw (Parlement du Myanmar) élus..., par tous les moyens qu'ils jugeront appropriés...".
46. Le Groupe de la Banque africaine de développement, l'Union internationale des télécommunications, le Conseil nordique, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l'Organisation panaméricaine de la santé et l'Organisation arabe du travail ont déclaré qu'elles n'ont avec le Myanmar aucune relation dont ce pays pourrait tirer avantage pour conforter ou étendre la pratique du travail forcé ou obligatoire évoquée par la commission d'enquête. La Banque asiatique de développement a déclaré qu'elle ne mène à l'heure actuelle aucune opération au Myanmar, que le dernier prêt qu'elle a consenti à ce pays date de 1987 et que la dernière assistance technique qu'elle lui a fournie date de 1988.
Autres informations pertinentes parvenues au Bureau
Echange de correspondance entre le gouvernement du Myanmar et les Nations Unies
47. L'ONU a communiqué au Bureau le double de la correspondance échangée par le gouvernement du Myanmar et le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Dans une communication en date du 8 janvier 2001, le gouvernement du Myanmar informait le Secrétaire général de certaines mesures qu'il avait prises pour mettre en uvre les recommandations de la commission d'enquête et déclarait que la décision du Conseil d'administration était "une grave injustice". Le gouvernement y exprimait également que les mesures contenues dans la résolution prise par la Conférence appelant les autres organisations internationales à "imposer des sanctions" à l'égard du Myanmar "excèdent manifestement les prérogatives que sa Constitution confère à l'OIT". Le gouvernement appelait le Secrétaire général (à user), en sa qualité de chef exécutif de l'ensemble du système des Nations Unies, de ses bons offices pour empêcher que les mesures en question ne soient prises et se déclarait profondément préoccupé à l'idée que des mesures aussi extrêmes n'aient d'autre conséquence que de constituer pour ce système un dangereux précédent. Le Secrétaire général a répondu par une lettre en date du 24 janvier 2001 faisant observer que la résolution de la Conférence était la décision d'un organe intergouvernemental et que le Directeur général du BIT avait pour mission de la mettre en uvre. Il suggérait en outre que le gouvernement étudie la possibilité d'écrire au Directeur général du BIT en se déclarant prêt à recevoir avant la prochaine réunion du Conseil d'administration une mission qui constaterait et évaluerait les progrès accomplis au regard du travail forcé.
Communications émanant de groupes établis au Myanmar à propos des conclusions du Conseil d'administration
48. Le Directeur général a reçu une "lettre ouverte concernant la décision de l'OIT à l'égard du Myanmar" en date du 29 novembre 2000 dont les signataires apparaissent comme étant les "Travailleurs du Myanmar". Cette lettre, qui se présente comme exprimant l'opinion de 18 millions de travailleurs d'entreprises publiques et privées, affirme que les conclusions du Conseil d'administration ont des conséquences négatives directes et immédiates pour les travailleurs, que le gouvernement du Myanmar a adopté des lois pénales rigoureuses pour interdire le travail forcé et que les travailleurs estiment que l'OIT a d'ores et déjà réussi à améliorer les conditions de travail au Myanmar. Pour cette raison, les signataires s'adressent à l'OIT en lui demandant de reconsidérer ses décisions et de maintenir un partenariat constructif avec le Myanmar.
49. Une lettre ouverte portant la même en-tête et la même date a également été reçue de la "Communauté internationale des entreprises établies au Myanmar". Les auteurs de cette lettre se déclarent profondément déçus par les conclusions du Conseil d'administration. Ils disent représenter un large éventail d'entreprises qui emploient au total plus d'un demi-million de travailleurs au Myanmar et procurent indirectement un emploi à bien d'autres. Ils font entendre que des "sanctions" ne feraient que porter préjudice à la majorité des travailleurs de ce pays plutôt que de leur venir en aide. L'OIT a obtenu que les autorités du Myanmar prennent un certain nombre d'ordonnances rendant illégal le travail forcé et elle devrait maintenir un dialogue constructif avec ces autorités dans le cadre du contrôle de l'application des ordonnances en question. Les signataires appellent instamment les Etats Membres de l'OIT et les organisations d'employeurs et de travailleurs à reconsidérer avec soin leur position attendu que, ce qui est en jeu, ce sont les intérêts réels des travailleurs du Myanmar. De même, ils appellent instamment le gouvernement du Myanmar à maintenir lui aussi de son côté un dialogue constructif avec l'OIT.
Informations sur les mesures prises à l'appui de la résolution de la Conférence
50. Il a été communiqué copie au Bureau de lettres qu'un certain nombre d'organisations nationales de travailleurs avaient adressées à leurs gouvernements respectifs à propos de la résolution de la Conférence.
51. Le Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada (TCA - Canada) a appelé son gouvernement à tirer sans délai les conséquences de la résolution prise par la Conférence, à commencer par l'arrêt immédiat de l'implication de tous intérêts économiques ou commerciaux canadiens au Myanmar, notamment l'interdiction de toutes importations en provenance de ce pays, en attendant que la situation ait fait l'objet d'une analyse exhaustive. Ce n'est en effet qu'au terme d'une telle démarche que l'on établira sans doute possible si les activités en question ne concourent pas à perpétuer ou à encourager de quelque manière que ce soit la pratique du travail forcé. La Confédération des syndicats nationaux, quant à elle, a prié le gouvernement canadien de l'informer des dispositions qu'il aura prises afin que le Myanmar applique les recommandations de la commission d'enquête. Elle insiste sur le point que le Canada devrait mettre en uvre tous les moyens en son pouvoir pour peser dans ce sens. Le Congrès du travail du Canada (CTC) a envoyé au gouvernement canadien le texte d'une déclaration sur le Myanmar devant être adopté par son comité exécutif et son conseil. Lui-même continuera d'exercer un droit de regard sur l'implication d'intérêts économiques canadiens qui auraient directement ou indirectement rapport avec le travail forcé au Myanmar. Il encourage par ailleurs ses adhérents à boycotter les produits en provenance de ce pays. Il estime que le gouvernement canadien devrait dès à présent prendre un certain nombre de mesures concrètes vis-à-vis du Myanmar, notamment qu'il devrait établir, observer et faire rapport sur les investissements dans ce pays et les importations qui en proviennent, revoir la loi sur les mesures économiques spéciales dans un sens permettant de prendre des mesures concrètes et spécifiques et convoquer une réunion à laquelle lui-même et le groupe de travail gouvernemental sur la responsabilité sociale des entreprises participeraient, en vue de répondre à la situation par des mesures concertées.
52. La Centrale des syndicats des travailleurs du Rwanda et la Ligue Jatio Sramik du Bangladesh ont l'une et l'autre incité leurs gouvernements à prendre les mesures qu'appelle la résolution de la Conférence.
53. Le Syndicat des travailleurs de Lanka Jathika a invité le gouvernement sri lankais à se mettre en rapport avec celui du Myanmar à propos de la résolution de la Conférence pour l'exhorter à donner effet aux recommandations de la commission d'enquête. Il suggère également que le Syndicat de l'administration, du fait de son rôle de premier plan, assure, avec l'assistance éventuelle du ministère du Travail, la coordination d'une démarche concertée de l'ensemble des syndicats auprès du gouvernement du Myanmar et qu'il serait judicieux de la part de la Fédération des employeurs d'organiser une protestation ou un appel similaire.
54. Le Bureau a également reçu de deux organisations internationales de travailleurs des informations concernant certaines mesures destinées à appuyer la résolution prise par la Conférence.
55. Par communication en date du 26 janvier 2001, Union Network International (UNI) a transmis le rapport d'une mission effectuée conjointement avec la CISL à la frontière de la Thaïlande avec le Myanmar en janvier 2001. Les membres de cette mission se sont rendus en deux lieux différents de la frontière et ont pu rencontrer nombre de réfugiés et aussi de militants syndicaux actifs dans les Etats de Mon et de Karen. Ces personnes leur ont indiqué que la résolution prise par la Conférence et la pression internationale qui en est résultée ont produit dans une certaine mesure leurs effets mais que le travail forcé ou la perception de sommes d'argent à titre d'exonération ont toujours cours. Les meurtres de villageois, comme les destructions de rizières, restent nombreux, ce qui explique les déplacements de milliers de personnes, en particulier dans l'Etat de Karen. La faim ou la maladie sont le lot de la plupart de ces malheureux. Toutes les personnes rencontrées par les membres de la mission, y compris des centaines de réfugiés, se sont exprimées en faveur de l'imposition par la communauté internationale de sanctions plus complètes à l'égard du Myanmar et, tout en concédant que ce sont les personnes les plus modestes qui en souffriront, elles restent ardemment convaincues de la nécessité de forcer les autorités du Myanmar à rétablir la démocratie et à mettre un terme au recours au travail forcé. Les membres de la mission ont recommandé que les syndicats continuent de soutenir moralement et financièrement la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), que l'UNI agisse en étroite collaboration avec l'ensemble des organisations du secteur financier qui lui sont affiliées afin de déployer une stratégie concertée de dissuasion de tout investissement ou offre de services financiers portant sur des activités économiques intéressant le Myanmar, étudie la possibilité d'agir en étroite collaboration avec ses affiliées des autres secteurs stratégiques de manière à accentuer les pressions économiques sur les autorités du Myanmar, et enfin offre à la FTUB et à d'autres syndicats sa contribution sous forme de formation et d'assistance, et même d'aide humanitaire en faveur des civils déplacés et des réfugiés. Les membres de la mission ont en outre estimé que la Conférence CISL/Global Unions (Syndicats du monde) sur le Myanmar, prévue à Tokyo les 28 février et 1er mars 2001, serait une occasion particulièrement favorable d'exprimer l'engagement pour le combat en faveur de la restauration de la démocratie et du respect des droits de l'homme et des droits syndicaux au Myanmar.
56. Une communication de la CISL en date du 16 février 2001 fournit d'abondantes informations sur les pratiques actuelles de travail forcé au Myanmar (se reporter à la partie suivante du présent document), de même que sur les initiatives prises par cette confédération pour appuyer la résolution prise par la Conférence. Sur ce deuxième aspect, la CISL indique avoir procédé à un tour d'horizon des relations que ses affiliées conservent avec le Myanmar, afin de déterminer lesquelles risqueraient d'avoir pour effet d'aider le Myanmar à perpétuer le système de travail forcé. Au terme de ce processus, il est apparu à la CISL que ni elle-même, ni ses secrétariats professionnels internationaux, ni ses organisations régionales, ni encore aucune de ses affiliées n'aurait la moindre relation avec le régime mis en place au Myanmar, si ce n'est - et cela exclusivement - pour la défense des droits fondamentaux des travailleurs et des autres droits de l'homme. En janvier 2001, la CISL a diffusé une circulaire à l'ensemble des 221 centrales syndicales nationales qui lui sont affiliées dans quelque 148 pays, à ses organisations régionales et à tous les membres de son conseil exécutif et de ses secrétariats professionnels internationaux leur demandant de prendre un certain nombre de mesures pour faire suite à la résolution de la Conférence. Il s'agirait notamment de demander à chaque gouvernement et à chaque organisation nationale d'employeurs de fournir la liste complète des entreprises basées sur le territoire de leurs pays qui maintiennent des relations commerciales avec le Myanmar. Il s'agirait aussi de demander à chaque gouvernement de fournir des informations complètes sur la valeur globale des échanges commerciaux du pays avec le Myanmar, en se référant à une liste de produits qu'elle communique, dont la fabrication est susceptible de faire appel au travail forcé. Un document d'information en annexe à la circulaire évoque des mesures assez ambitieuses, notamment une interdiction des échanges commerciaux et des investissements qui se fondent sur le principe qu'un engagement économique soutient le régime militaire.
57. La communication de la CISL contient également des informations sur d'autres mesures prises par cette confédération et ses affiliées. Avant que l'Union européenne n'envoie récemment une délégation au Myanmar, la CISL avait exposé ses positions à l'un des membres de cette délégation. Une organisation affiliée, LO-Suède, en avait fait de même auprès de son gouvernement, lequel, assurant à ce moment-là la présidence de l'Union européenne, devait mener la délégation. En février 2001, la CISL a fait connaître ses positions lors de diverses réunions d'ONG européennes ou de la Commission du développement du Parlement européen. Un certain nombre d'organisations affiliées à la CISL ont signalé qu'elles prenaient diverses mesures allant dans le sens de la résolution adoptée par la Conférence et consistant notamment à presser leurs gouvernements de prendre une position plus ferme à l'égard du Myanmar (à travers l'adoption par exemple d'une interdiction des échanges commerciaux et des investissements) et à appeler à un boycottage des produits fabriqués au Myanmar ou bien par des entreprises qui persisteraient à entretenir des relations économiques avec ce pays. Un certain nombre d'autres initiatives ont également été prises au niveau régional ou sous-régional.
58. La CISL a fait observer dans sa communication que plusieurs gouvernements de l'Union européenne se montrent toujours réticents à l'idée d'un renforcement de la position commune lorsqu'il sera question de la revoir en avril 2001 et que plusieurs semblent notamment espérer du "dialogue secret" entre le gouvernement du Myanmar et Daw Aung San Suu Kyi une amélioration sensible de la situation. Ces gouvernements semblent ne pas vouloir se rendre compte du fait que par le passé des entretiens similaires n'ont produit aucun résultat et que les autorités procèdent souvent, juste avant d'importantes visites diplomatiques, à la remise en liberté de membres de l'opposition qui n'auraient jamais dû être arrêtés. De l'avis de certains analystes, les mesures préconisées par l'OIT ont largement contribué à l'ouverture du dialogue entre le gouvernement et la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), tant et si bien que, maintenant, toute hésitation dans leur mise en uvre risquerait de compromettre les pourparlers eux-mêmes.
59. La CISL a signalé qu'une stratégie syndicale d'ensemble serait discutée lors d'une conférence devant se tenir à Tokyo fin février. Le Bureau a été représenté à cette conférence qui a réuni des syndicalistes et des représentants de secrétariats professionnels internationaux de la région Asie-Pacifique, d'Europe et des Etats-Unis. La Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) était également représentée. La conférence a adopté une déclaration, ainsi qu'un plan d'action qui figure dans l'annexe 11.
Informations concernant les pratiques actuelles de travail forcé au Myanmar
60. Une somme considérable d'informations concernant la réalité actuelle sur le plan du travail forcé au Myanmar est parvenue d'un certain nombre d'organisations internationales de travailleurs et d'autres organisations non gouvernementales. Les informations concernant la situation depuis novembre 2000 sont résumées succinctement ci-après (Note 5).
61. Dans sa communication en date du 26 janvier 2001, Union Network International indiquait que, d'après les personnes rencontrées lors de sa mission conjointe, il est apparu que la résolution de la Conférence et les pressions internationales qui en ont résulté ont été suivies de certains effets, notamment en ce qu'elles ont contribué à l'ouverture du dialogue entre les autorités du Myanmar et Daw Aung San Suu Kyi. Malgré tout, le recours au travail forcé ou la perception de sommes d'argent à titre d'exonération perdurent.
62. Dans sa communication en date du 16 février 2001, la CISL fournit d'abondantes informations sur la pratique actuelle en matière de travail forcé au Myanmar. La CISL constate que la junte militaire n'a pris aucune disposition témoignant d'une véritable volonté de mettre un terme à ces pratiques ou seulement de les infléchir. Les militaires et les différents niveaux de l'administration s'ingénient au contraire à dissimuler l'ampleur et la nature du travail forcé auquel ils soumettent les populations civiles, à affaiblir ou réduire à néant les effets de toutes les ordonnances que la haute hiérarchie a pu promulguer pour prévenir le travail forcé et à prévenir et contrer par voie de propagande et de désinformation les mesures préconisées par la résolution de la Conférence. Ces man uvres se traduisent notamment par une campagne massive de lettres et de recueil de pétitions par des agents présentés comme des représentants des travailleurs. Se référant à la lettre ouverte dont il est question au paragraphe 48, la CISL indique qu'elle y voit pour sa part l'un des volets d'une campagne du gouvernement tendant à contrer la résolution de la Conférence.
63. La communication de la CISL comporte en annexe 21 documents offrant plus de 300 pages d'informations détaillées sur la réalité présente du travail forcé au Myanmar. Pour la CISL, ces informations démontrent que les pratiques en question n'ont rien perdu de leur vigueur. Cette documentation réunit des témoignages précis, des articles et des photographies attestant la réalité du travail forcé dans diverses zones. La CISL estime que, en se fondant ne serait-ce que sur un seul de ces rapports, on peut estimer à au moins 80 000 le nombre des personnes - femmes, enfants et personnes âgées compris -contraintes dans quatre districts de l'Etat de Karen à l'accomplissement d'un travail au cours de la période allant de novembre 2000 à janvier 2001. Deux officiers de l'armée sont nommément désignés dans le rapport comme ayant ordonné et organisé le travail forcé pour la construction de routes.
64. Une partie essentielle de la communication de la CISL consiste en traductions et en nombreuses reproductions d'originaux d'ordonnances imposant un travail forcé, édictées par les militaires ou par des groupes paramilitaires agissant sous leur contrôle, par l'administration locale et par la police. On recense non moins de 500 ordonnances de cette nature depuis mai 1999, dont un grand nombre ne sont pas antérieures à novembre 2000. Elles sont semblables par leur style, leur présentation et leur contenu à celles qui ont d'ores et déjà été examinées par la commission d'enquête et par les mécanismes de contrôle réguliers de l'OIT et dont l'authenticité n'est pas contestée.
65. La communication de la CISL apporte des précisions sur un grand nombre de cas spécifiques de travail forcé: portage pour des patrouilles ou autres opérations militaires courantes, construction de routes, de ponts et de clôtures, construction et services ancillaires de camps militaires, notamment approvisionnement en matériaux de construction pour ces camps, prestations de transport pour l'armée, collecte de bois de combustion pour les camps militaires ou les briqueteries appartenant à l'armée, travail dans les rizières appartenant à l'armée, prestations de services, en tant que sentinelles ou messagers - sans armes - pour l'armée. L'une de ces ordonnances, émanant d'un bataillon, avise les chefs de villages que les porteurs et les chars ne seront réquisitionnés que pour les opérations militaires et non à des fins administratives. D'une manière générale, les contraintes contributives de travail forcé paraissent pour l'essentiel coïncider en tous points avec les pratiques déjà signalées par la commission d'enquête. Le grand nombre et la diversité des unités militaires ou autres autorités qui ont recours à ce type de contraintes permettent de penser que la pratique est restée très répandue.
66. Un document établi par la Fédération des syndicats de Birmanie, qui est incorporé à la communication de la CISL, précise qu'un grand nombre de moyens sont utilisés par les autorités pour masquer le recours au travail forcé. Le procédé consiste, par exemple, à enjoindre aux villageois, toujours par voie d'ordonnance, d'assister à des réunions au camp militaire, d'où ils sont réquisitionnés, de manière qu'il ne ressorte pas explicitement des ordonnances qu'il s'agissait d'une réquisition. Il peut aussi consister à émettre des ordonnances qui ne sont ni datées, ni signées, ni revêtues d'un timbre, ou encore à prescrire qu'elles doivent être rapportées à l'autorité militaire qui les a édictées. Une autre tactique consiste, pour les militaires, à utiliser les autorités civiles pour réquisitionner de la main-d' uvre pour leur compte. Une autre encore consiste à arrêter arbitrairement des personnes jeunes et en bonne santé qui, après quelques jours de prison, sont utilisées comme porteurs pour le compte des militaires après avoir été vêtues d'uniformes usagés (elles restent néanmoins reconnaissables au fait qu'elles sont pieds nus).
Conclusion
67. Compte tenu de ce qui précède et du paragraphe 1 a) de la résolution de la Conférence, la question de la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête relatives à l'application de la convention no 29 par le Myanmar sera examinée par la Conférence internationale du Travail à sa 89e session, dans le cadre d'une séance que la Commission de l'application des conventions et recommandations de la Conférence réservera à cette fin après avoir été saisie du rapport de la CEACR ainsi que toute autre information pertinente. A cet égard, le Conseil d'administration voudra sans doute prier le Directeur général de communiquer à la commission de la Conférence le présent rapport ainsi que le compte rendu de son examen, avec toute autre information susceptible d'éclairer ses discussions. La Commission de la Conférence sera saisie du rapport de la CEACR ainsi que de toute autre information pertinente.
Genève, le 9 mars 2001.
Annexe 1
Déclaration de Son Excellence U Mya Than, chef de la délégation d'observateurs du Myanmar, à l'assemblée plénière de la 279e session du Conseil d'administration après l'adoption de la décision concernant la situation au Myanmar (Note 6)
(Genève, 16 novembre 2000)
Monsieur le Président,
Ce jour est assurément un jour grave et triste pour l'OIT. Il restera dans l'histoire comme le jour le plus déplorable pour cette Organisation.
Aujourd'hui, le Myanmar est la cible d'une action punitive. Demain, ce pourrait être un autre pays en développement. Comme chacun de nous le sait, l'appréciation du respect ou du non-respect des normes du travail est le plus souvent subjective et arbitraire voire, dans certains cas, sous-tendue par des motivations politiques.
Dans le cas du Myanmar, le problème est issu d'un jugement arbitraire, fondé sur une désinformation. Cette désinformation est le fait de certains éléments hostiles au gouvernement du Myanmar, comme certains groupes insurrectionnels ou certaines organisations autoproclamées de travailleurs, qui sont mus beaucoup plus par des considérations politiques que par le désir de défendre les intérêts des travailleurs. L'une de ces prétendues organisations de travailleurs ne compte d'ailleurs qu'une poignée de membres, qui ne représentent guère qu'eux-mêmes.
Cette situation est d'autant plus triste et lamentable que ceux qui ont uvré en faveur de la décision d'appliquer des sanctions au Myanmar ont choisi d'ignorer complètement les mesures concrètes et positives prises par le gouvernement de ce pays.
Ils ne veulent pas voir le cadre exhaustif, concret et solide de mesures législatives, exécutives et administratives mises en place au Myanmar. Ils ne veulent pas entendre non plus que le gouvernement de ce pays s'est offert à recevoir un représentant du BIT, basé soit au bureau régional de l'OIT à Bangkok soit à Genève, pour assister le mécanisme national de contrôle dans la mise en uvre de la recommandation de la CIT.
Malgré l'approche plus prudente préconisée par nombre de ses Etats Membres, le Conseil d'administration a choisi, en décidant l'application de sanctions conformément à l'article 33, la voie de la confrontation et de la coercition. Les pays membres de l'ANASE, et d'autres qui partagent leurs vues, ont exprimé des réserves vis-à-vis des mesures prises par le Conseil d'administration. Le Myanmar apprécie la position de principe de ces pays, à savoir que l'article 33 de la Constitution de l'OIT ne devrait jamais être invoqué et que des sanctions ne devraient pas être appliquées à un Etat Membre.
Il est hautement regrettable qu'une décision draconienne, contraire à l'intime conviction de nombreux Membres, ait été prise par le Conseil d'administration. Il est évident qu'en agissant de manière aussi infondée et injustifiée le Conseil d'administration ne poursuit d'autres buts que celui d'exercer des pressions sur le Myanmar.
La décision que le Conseil d'administration vient de prendre rend indubitablement sujettes à caution sa crédibilité, son intégrité et sa réputation ainsi que celles de l'OIT. Elle pénalise un Etat Membre qui a volontairement coopéré avec l'Organisation et qui a mis en place, conformément à la résolution de la CIT, un dispositif d'ensemble, concret et solide, d'ordre législatif, gouvernemental et administratif.
Elle est tout à fait inéquitable, déraisonnable et injuste.
Elle est totalement inacceptable pour ma délégation.
Pour ces raisons, ma délégation la rejette totalement et catégoriquement et s'en dissocie, comme elle se dissocie de toute action qui y ferait suite ou de tout effet qui en résultera.
Cela étant, le Myanmar entend suspendre toute coopération avec l'Organisation internationale du Travail pour ce qui concerne la convention no 29 de l'OIT et tout ce qui peut s'y rapporter.
Je vous remercie, Monsieur le Président.
Annexe 2
Résumé des mesures concrètes prises par le gouvernement du Myanmar (Note 7)
-- Depuis la 88e session de la Conférence internationale du Travail qui a adopté la résolution sur le Myanmar, les dispositions suivantes ont été prises pour mettre en place un dispositif législatif, gouvernemental et administratif en vue de donner suite à la résolution de la Conférence.
-- Initialement, des consultations intensives ont été menées auprès de tous les ministères et organismes concernés au sujet des mesures nécessaires pour appliquer les conclusions du rapport de la Mission de coopération technique et la résolution de la Conférence.
-- Un groupe d'étude indépendant dirigé par le Baron Walter von Marschall, ancien ambassadeur de la République fédérale d'Allemagne au Myanmar, a été invité à formuler un avis indépendant sur ce qui constitue des mesures satisfaisantes concernant le dispositif visé par la résolution de la Conférence. Ce groupe s'est rendu au Myanmar du 25 septembre au 6 octobre 2000 et a présenté diverses options qui, selon lui, correspondraient aux mesures requises aux termes de la résolution de la Conférence.
-- En outre, à l'invitation du gouvernement du Myanmar, une mission de coopération technique de cinq membres s'est rendue au Myanmar du 20 au 26 octobre 2000. Sur la base des conseils et des suggestions de cette mission de coopération technique, une nouvelle ordonnance législative a été prise le 27 octobre 2000. Cette ordonnance dispose clairement que la réquisition est illégale et constitue une infraction en vertu de la législation en vigueur de l'Union du Myanmar. Elle précise aussi les conséquences de toute infraction à l'ordonnance législative en énonçant expressément que tout contrevenant, y compris les membres des forces armées, sera poursuivi en vertu des dispositions de l'article 374 du Code pénal ou de toute autre loi en vigueur. Selon les termes de la mission de coopération technique, cette ordonnance est d'application générale.
-- Cette ordonnance a été complétée par une directive du Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC), l'organe suprême de l'Etat au Myanmar. Le SPDC est l'autorité législative et, ainsi que la mission de coopération technique l'a souligné, la plus haute autorité militaire et la plus haute autorité civile du pays. Ce document, selon la mission de coopération technique, "confirme qu'il existe au plus haut niveau la volonté politique d'aboutir à une solution".
-- Outre cette mesure législative, un dispositif administratif et gouvernemental concret et détaillé a été institué.
-- Il se compose de la Commission ministérielle, présidée par le ministre du Travail, et de la Commission de l'application de la convention no 29, ainsi que d'un mécanisme national de contrôle chargé de veiller au respect des dispositions.
-- Le Myanmar a ainsi mis en place un dispositif législatif, administratif et gouvernemental pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de travail forcé ni en droit ni en pratique.
-- En ce qui concerne la présence de l'OIT, le Myanmar est également prêt à accepter un représentant du BIT, basé soit au Bureau régional de Bangkok soit à Genève, chargé d'observer, d'évaluer ou d'assister le mécanisme national de contrôle en vue de l'application de la convention no 29. Le représentant du BIT bénéficiera d'une coopération sans réserve pour s'acquitter efficacement de ses responsabilités. Il jouira, à ces fins et pendant la durée de sa mission, de la protection et du statut juridiques accordés aux fonctionnaires des Nations Unies de rang comparable. Ce représentant, basé soit au Bureau régional de l'OIT à Bangkok soit à Genève, pourra se rendre fréquemment au Myanmar, en tant que de besoin.
-- Etant donné ce dispositif législatif et gouvernemental et la volonté du Myanmar d'accepter la présence de l'OIT, les mesures envisagées par la Conférence internationale du Travail ne sont plus requises ni nécessaires. Nous prions instamment les membres du Conseil d'administration de prendre la décision voulue pour que les mesures envisagées par la Conférence ne prennent pas effet le 30 novembre 2000.
Annexe 3
Communication en date du 22 décembre 2000 du Directeur général au ministre du Travail du gouvernement du Myanmar
Monsieur le Ministre,
Le 16 novembre, lors de sa 278e session, le Conseil d'administration a pris des mesures concernant la suite donnée par le gouvernement du Myanmar aux recommandations de la commission d'enquête chargée d'examiner l'exécution par le Myanmar de la convention no 29. Le Conseil était saisi à cette occasion du rapport de la deuxième mission de coopération technique du BIT au Myanmar qui s'est rendue dans votre pays du 20 au 26 octobre.
Tout en reconnaissant une certaine évolution positive de la situation décrite dans le rapport de la mission de coopération technique et dans des documents ultérieurement présentés par les autorités, le Conseil d'administration, comme vous le savez, n'a pas estimé que les conditions pour la non-application des mesures énoncées au paragraphe 1 de la résolution de la Conférence étaient réunies. Ces mesures prennent effet le 30 novembre et j'en ai informé les Membres de l'OIT et les organisations internationales concernées comme prévu dans la résolution.
En même temps, le sentiment prévalent parmi les membres du Conseil d'administration était, comme l'a rappelé son Président, que le Directeur général devait continuer à apporter sa coopération au gouvernement du Myanmar afin de promouvoir la pleine application par celui-ci des recommandations de la commission d'enquête. Cette conclusion est, de fait, conforme au mandat que j'ai reçu de la Conférence elle-même.
Les débats du Conseil d'administration ont mis en relief, une fois de plus, que l'objectif de l'OIT a toujours été, et demeure, la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête. J'espère donc sincèrement que les mesures actuellement en vigueur deviendront bientôt inutiles en raison de la pleine application par votre gouvernement desdites recommandations.
A cet égard, j'ai noté que, d'après une déclaration communiquée peu après la clôture du débat par son ministre des Affaires étrangères, le Myanmar a l'intention de respecter et de mettre en uvre les mesures positives prises à l'issue de la visite de la mission de coopération technique. Soyez assurés, que pour sa part, le Bureau reste disposé à apporter sa coopération aux fins de garantir la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête de telle manière qu'à sa prochaine session le Conseil d'administration puisse être informé d'une évolution de la situation à la fois positive et crédible.
Je vous prie d'agréer ...
(Signé) Juan Somavia.
Annexe 4
Communication en date du 11 février 2001 du gouvernement du Myanmar au Directeur général, transmise par la mission permanente du Myanmar
Monsieur le Directeur général,
J'accuse réception de votre lettre du 22 décembre 2000 dans laquelle vous avez l'obligeance de m'informer que le Bureau est disposé à apporter sa coopération au Myanmar.
Dans le cadre des efforts déployés pour mettre sa législation nationale en conformité avec la convention no 29, le Myanmar a reçu deux missions de coopération technique du BIT. Avec l'aide de celle qui s'est rendue au Myanmar du 20 au 26 octobre 2000, nous avions défini un dispositif législatif, gouvernemental et administratif visant à rendre le travail forcé illégal, tant en droit qu'en pratique. Toutefois, de puissantes influences au sein du Conseil d'administration du BIT ont totalement ignoré les mesures concrètes prises par le Myanmar ainsi que sa volonté manifeste de coopérer avec l'OIT. Je suis au regret de dire que la manière dont les débats ont été conduits lors de la 279e session du Conseil d'administration fut une parodie déplorable des règles de procédure de l'OIT. Il en est résulté que la proposition présentée par la Malaisie au nom des pays de l'ANASE, et appuyée par l'Inde et la Chine, qui visait à reporter l'application des mesures énoncées dans la résolution de la CIT, n'a pas été mise aux voix. Les discussions du Conseil d'administration sur la question n'ont donc débouché sur aucune conclusion. Il s'en est suivi l'entrée en vigueur des mesures envisagées dans la résolution de la CIT. Le Myanmar qui s'était, de bonne foi, acquitté de ses obligations au titre de la convention no 29 a donc été victime d'une grave injustice.
Nous n'en demeurons pas moins résolus à appliquer le dispositif législatif, gouvernemental et administratif que nous avons mis en place. La commission chargée de l'application de la convention no 29 se réunit régulièrement pour examiner la situation. Le mécanisme national de suivi que nous avons institué fonctionne également sans heurts. Quelques cas de violation de la dernière ordonnance législative ont été signalés. Ils ont donné lieu à une enquête et des poursuites ont été engagées contre les coupables.
Je tiens à vous remercier de la volonté que vous manifestez d'apporter votre coopération au Myanmar. J'ai pleinement conscience que la participation de l'OIT aux efforts que nous avons engagés au niveau national permettrait de mieux les faire accepter par nos détracteurs.
Toutefois, dans la conjoncture actuelle, tant que le Myanmar ne bénéficiera pas du traitement juste et équitable que sont en droit d'attendre tous les Membres de l'OIT, il nous faut poursuivre nous-mêmes nos efforts nationaux en vue de l'éradication de la pratique du travail forcé dans le pays.
Je tiens à vous assurer que nous continuerons à prendre des mesures pour rendre le travail forcé illégal au Myanmar tant en droit qu'en pratique. Je souhaite également vous assurer que nous appliquerons résolument le dispositif législatif, gouvernemental et administratif que nous avons mis en place.
(Signé) Major Général Tin Ngwe,
Ministre du Travail,
Union du Myanmar.
Annexe 5
Communication en date du 1er mars 2001 du Directeur général au ministre du Travail du gouvernement du Myanmar
J'accuse réception de votre lettre datée du 11 février 2001 répondant à mon courrier du 22 décembre 2000 et je souhaite vous faire part des observations suivantes.
En ce qui concerne le deuxième paragraphe de votre lettre, je puis vous assurer que vos vues ainsi que le texte de la déclaration que votre ambassadeur avait l'intention de faire et qui n'est parvenue au bureau du Président qu'après la clôture de la session seront dûment reflétés dans la documentation dont le Conseil d'administration sera saisi à sa prochaine session.
J'ai pris note de votre déclaration selon laquelle le Myanmar est "résolu à appliquer le dispositif législatif, gouvernemental et administratif" qu'il a mis en place en vue d'éradiquer la pratique du travail forcé au Myanmar, et en particulier de l'information selon laquelle des sanctions ont déjà été prises contre les personnes qui se rendent coupables de telles pratiques.
Il est toutefois clair que le Myanmar ne peut espérer se voir reconnaître le mérite de ces efforts en l'absence d'une évaluation objective de leur application et de leurs résultats dans la pratique. Seule l'OIT est en mesure de réaliser une telle évaluation avec l'autorité voulue pour qu'elle ait des conséquences juridiques, pratiques et politiques au plan international. Cela est d'autant plus important si l'on tient compte du flot continu d'informations provenant de sources variées concernant les problèmes en question.
Pour ces raisons, je souhaiterais réaffirmer que le Bureau est disposé à engager des discussions sur la forme et les modalités selon lesquelles une telle évaluation objective pourrait être conduite. A mon avis, il serait hautement désirable que ces discussions aient lieu avant la prochaine session du Conseil d'administration. Il convient en effet de rappeler que, conformément au paragraphe 1 a) de sa résolution, la Conférence internationale du Travail examinera la situation lors de sa prochaine session en juin, en s'appuyant sur toutes les informations pertinentes qui seront alors disponibles.
Annexe 6
Résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 88e session (juin 2000)
La Conférence générale de l'Organisation internationale du Travail,
Réunie en sa quatre-vingt-huitième session à Genève du 30 mai au 15 juin 2000,
Considérant les propositions dont elle est saisie par le Conseil d'administration dans le cadre de la huitième question à son ordre du jour (Compte rendu provisoire no 4) en vue de l'adoption, en application de l'article 33 de la Constitution de l'OIT, de mesures visant à assurer l'exécution des recommandations de la commission d'enquête établie pour examiner le respect par le Myanmar de ses obligations aux termes de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930;
Ayant pris connaissance des éléments additionnels d'information contenus dans le rapport de la mission de coopération technique du BIT dépêchée à Yangon du 23 au 27 mai 2000 (Compte rendu provisoire no 8) et, en particulier, de la lettre du 27 mai 2000 du ministre du Travail au Directeur général qui en est le résultat;
Considérant que, si cette lettre contient des éléments qui semblent refléter des intentions encourageantes des autorités du Myanmar de prendre des mesures en vue de donner effet aux recommandations de la commission d'enquête, la situation de fait sur laquelle s'est fondé le Conseil d'administration pour formuler ses recommandations n'en demeure pas moins inchangée à ce jour;
Estimant que la Conférence ne saurait, sans manquer à ses responsabilités à l'égard des travailleurs victimes des diverses formes de travail forcé ou obligatoire, renoncer à l'application immédiate des mesures recommandées par le Conseil d'administration, à moins qu'une action prompte et concrète des autorités du Myanmar pour établir le dispositif nécessaire à la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête donne la garantie qu'il sera porté remède de manière plus rapide, et dans des conditions globalement plus satisfaisantes pour tous, à la situation desdits travailleurs,
1. Approuve, en principe, sous réserve des conditions énoncées au point 2 ci-dessous, les mesures recommandées par le Conseil d'administration, à savoir:
a) décider que la question de la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête et de l'application de la convention no 29 par le Myanmar fasse l'objet d'une séance spécialement consacrée à cet effet de la Commission de l'application des conventions et recommandations lors des futures sessions de la Conférence internationale du Travail et tant qu'il n'est pas avéré que ce Membre se soit acquitté de ses obligations;
b) recommander à l'ensemble des mandants de l'Organisation, gouvernements, employeurs et travailleurs: i) d'examiner, à la lumière des conclusions de la commission d'enquête, les relations qu'ils peuvent entretenir avec l'Etat Membre concerné et de prendre les mesures appropriées afin que ces relations ne puissent être mises à profit par ledit Membre pour perpétuer ou développer le système de travail forcé ou obligatoire visé par la commission d'enquête et afin de contribuer dans toute la mesure possible à la mise en uvre de ses recommandations; ii) de faire rapport au Conseil d'administration de manière et à intervalles appropriés;
c) concernant les organisations internationales, inviter le Directeur général: i) à informer les organisations internationales visées à l'article 12, paragraphe 1, de la Constitution, du manquement constaté; ii) à prier les instances compétentes de ces organisations d'examiner, dans le cadre de leur mandat et à la lumière des conclusions de la commission d'enquête, la coopération qu'elles peuvent entretenir avec le Membre concerné et, le cas échéant, de mettre fin le plus rapidement possible à toute activité qui pourrait avoir pour effet de conforter, directement ou indirectement, le travail forcé ou obligatoire;
d) concernant plus spécifiquement l'Organisation des Nations Unies, inviter le Directeur général à demander l'inscription d'une question à l'ordre du jour de la session de juillet 2001 du Conseil économique et social (ECOSOC), qui concernerait le non-respect par le Myanmar des recommandations contenues dans le rapport de la commission d'enquête et viserait l'adoption de recommandations adressées soit par l'ECOSOC, soit par l'Assemblée générale, soit par les deux, aux gouvernements et aux autres institutions spécialisées et incluant des demandes analogues à celles proposées aux alinéas b) et c) ci-avant;
e) inviter le Directeur général à présenter de manière et à intervalles appropriés un rapport au Conseil d'administration sur les actions entreprises suite aux démarches visées aux alinéas c) et d) précédents et à informer les organisations internationales concernées de tout développement survenu dans la mise en uvre des recommandations de la commission d'enquête par le Myanmar.
2. Décide que ces mesures prendront effet le 30 novembre 2000 sauf si, avant cette date, le Conseil d'administration a pu se convaincre que les intentions manifestées par le ministre du Travail du Myanmar dans sa lettre du 27 mai se sont traduites en un dispositif d'ensemble législatif, gouvernemental et administratif suffisamment concret et détaillé pour montrer que les recommandations de la commission d'enquête ont été mises en uvre, et que l'application de l'une ou de plusieurs de ces mesures devienne de ce fait inappropriée.
3. Autorise le Directeur général à répondre positivement à toute demande du Myanmar qui aurait pour seul objet de mettre sur pied, dans les délais voulus, le dispositif évoqué dans les conclusions de la mission de coopération technique du BIT (points i), ii), iii), Compte rendu provisoire no 8, p. 8/12), avec l'appui d'une présence durable de l'OIT sur place si le Conseil d'administration confirme que les conditions se trouvent réunies pour qu'une telle présence puisse être réellement utile et efficace.
Annexe 7
Recommandations de la commission d'enquête
Au paragraphe 539 de son rapport, la commission d'enquête exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer:
a) que les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient mis en conformité avec la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, comme l'a déjà demandé la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations et comme le gouvernement le promet depuis plus de trente ans et l'annonce de nouveau dans ses observations sur la plainte. Ceci devrait être effectué sans délai et achevé au plus tard le 1er mai 1999;
b) que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires. Ceci est d'autant plus important que le pouvoir d'imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis, sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. En conséquence, au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 (du rapport de la commission d'enquête) afin d'arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un Etat de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l'ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d'un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d' uvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré;
c) que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l'article 374 du Code pénal pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l'article 25 de la convention. Ceci demande de la rigueur dans les enquêtes et poursuites et l'application de sanctions efficaces à ceux reconnus coupables. Comme l'a relevé en 1994 le comité du Conseil d'administration créé pour examiner la plainte présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, les poursuites pénales engagées à l'encontre de ceux qui recourent à la coercition paraissent d'autant plus importantes que l'absence de délimitations nettes entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque encore de marquer le recrutement effectué par les responsables locaux ou militaires. Le pouvoir d'imposer du travail obligatoire ne cessera d'être tenu pour acquis que lorsque ceux qui sont habitués à exercer ce pouvoir seront réellement confrontés avec leur responsabilité pénale (Note 8).
Annexe 8
Observations de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (rapport III(1A), 2001)
Myanmar (ratification: 1955)
1. La commission note que le gouvernement n'a pas communiqué de rapport sur l'application de la convention. A la suite des recommandations de la Commission d'enquête chargée d'examiner l'exécution par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, la commission a toutefois pris note:
-- des informations que le gouvernement a données au Directeur général du BIT dans des communications en date des 21 janvier, 20 mars, 27 mai, 29 octobre (telles que complétées par la suite), et 3, 15 et 17 novembre 2000;
-- des informations soumises au Conseil d'administration à ses 277e et 279e sessions en mars et en novembre 2000 et des débats qui ont suivi;
-- des informations données à la Conférence internationale du Travail à sa 88e session (mai-juin 2000) et des débats qui ont suivi;
-- de la résolution que la Conférence internationale du Travail a adoptée à sa 88e session au sujet des mesures recommandées par le Conseil d'administration au titre de l'article 33 de la Constitution de l'OIT en ce qui concerne le Myanmar, mesures qui visent à assurer l'exécution des recommandations de la commission d'enquête et qui ont pris effet le 30 novembre 2000 à la suite de l'examen de cette question par le Conseil d'administration à sa 279e session (novembre 2000);
-- des résolutions adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies à sa 54e session (17 décembre 1999) et par la Commission de l'ONU des droits de l'homme à sa 56e session (mars-avril 2000) sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (des extraits de ces résolutions figurent dans le Compte rendu provisoire no 4, annexe III, de la Conférence internationale du Travail, 88e session, Genève, 2000);
-- du deuxième rapport du Directeur général du BIT soumis aux membres du Conseil d'administration sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar, daté du 25 février 2000;
-- du rapport intérimaire, en date du 22 août 2000, élaboré par Rajsoomer Lallah, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (Note 9), et de la note du 20 octobre 2000 du Secrétaire général de l'ONU sur le même sujet (Note 10);
-- des rapports des missions de coopération technique du BIT qui se sont rendues au Myanmar en mai 2000 (Note 11) et octobre 2000 (Note 12);
-- d'une communication en date du 15 novembre 2000 dans laquelle la Confédération internationale des syndicats libres a communiqué au BIT une documentation abondante faisant état de travail forcé au Myanmar pendant la période juin-novembre 2000 et dont copie a été adressée au gouvernement pour qu'il puisse, s'il le souhaite, présenter ses commentaires;
-- d'un communiqué de presse en date du 17 novembre 2000 du ministère des Affaires étrangères de l'Union du Myanmar à Yangon, et d'une fiche de renseignements émanant de la Commission d'information du Myanmar à Yangon à propos d'une conférence de presse tenue par le gouvernement le 18 novembre 2000 sur la décision du Conseil d'administration du BIT de laisser des mesures au sujet du Myanmar prendre effet.
2. Les informations disponibles sur l'exécution de la convention par le gouvernement du Myanmar sont exposées en trois parties: i) l'amendement de la législation; ii) toutes mesures prises par le gouvernement pour mettre un terme à l'imposition, dans la pratique, du travail forcé ou obligatoire, et les informations disponibles sur la pratique actuelle; et iii) l'application de sanctions qui peuvent être imposées en vertu du Code pénal pour le fait d'exiger un travail forcé ou obligatoire.
I. Amendement de la législation
3. Au paragraphe 470 de son rapport du 2 juillet 1998, la commission d'enquête avait noté:
... qu'aux termes de l'article 11 d), lu conjointement avec l'article 8, paragraphe 1 g), n) et o), de la loi sur les villages, ainsi que de l'article 9 b) de la loi sur les villes, du travail ou des services peuvent être imposés à toute personne résidant dans un arrondissement rural ou urbain, c'est-à-dire un travail ou des services pour lesquels l'intéressé ne s'est pas offert de plein gré et que la non-obtempération à une réquisition faite en application de l'article 11 d) de la loi sur les villages ou de l'article 9 b) de la loi sur les villes est passible des sanctions pénales prévues à l'article 12 de la loi sur les villages ou de l'article 9 a) de la loi sur les villes. Ainsi, ces lois prévoient l'imposition d'un "travail forcé ou obligatoire" relevant de la définition de l'article 2, paragraphe 1, de la convention.
La commission d'enquête avait noté en outre que les larges pouvoirs de réquisition de main-d' uvre pour du travail et des services énoncés dans ces lois ne sont pas compris dans les exceptions énumérées à l'article 2, paragraphe 2, de la convention et qu'ils sont entièrement incompatibles avec la convention. Rappelant que le gouvernement promettait depuis plus de trente ans de modifier les dispositions de ces lois, la commission avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer que la loi sur les villages et la loi sur les villes soient mises sans délai en conformité avec la convention, au plus tard le 1er mai 1999 (paragr. 539 a) du rapport de la commission).
4. Dans son observation précédente, la commission avait noté que, à la fin de novembre 1999, ni la loi sur les villages ni la loi sur les villes n'avaient été modifiées, et qu'aucun projet de loi proposé ou envisagé à cet effet n'avait été porté à la connaissance de la commission. Toutefois, le gouvernement avait pris, le 14 mai 1999, un "arrêté (no 1/99) ordonnant de ne pas exercer les pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages". En fait, cette ordonnance réservait l'exercice des pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages qui restent incompatibles avec les exigences de la convention.
5. La commission note, à la lecture du rapport de la mission de coopération technique du BIT qui s'est rendue en octobre 2000 au Myanmar (doc. GB.279/6/1, paragr. 9 et 10, annexes 13 et 19), qu'un projet de texte prévoyant l'amendement de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, par le biais d'une modification de l'ordonnance no 1/99, n'a pas été retenu par le gouvernement. Toutefois, le même rapport, dans son annexe 19, reproduit le texte d'un "arrêté complétant l'arrêté no 1/99" pris le 27 octobre 2000 par le ministère de l'Intérieur, sur instruction du Conseil d'Etat pour la paix et le développement, qui modifie l'arrêté no 1/99 de façon à interdire aux "responsables, y compris aux membres des autorités locales, membres des forces armées" de "réquisitionner des personnes pour un travail ou un service, nonobstant toutes dispositions figurant" dans les articles pertinents de la loi sur les villes et de la loi sur les villages, sauf dans les cas de force majeure tels que définis à l'article 2, paragraphe 2 d), de la convention (doc. GB.279/6/1, annexe 19). Le texte en langue birmane de cet arrêté du 27 octobre, qui devait être publié dans le Journal officiel du Myanmar, n'a pas encore été fourni au BIT.
6. La commission observe que la modification de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, que la commission d'enquête et elle-même ont demandée et que le gouvernement promet depuis des années, n'a pas encore été effectuée. Elle exprime de nouveau l'espoir que la loi sur les villages et la loi sur les villes seront enfin rendues conformes à la convention.
7. La commission note toutefois que l'arrêté no 1/99, tel que complété par l'arrêté du 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique s'il était de bonne foi traduit dans les actes non seulement par les autorités locales habilitées à réquisitionner des personnes pour un travail au titre de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, mais aussi par les autorités civiles et militaires habilitées à demander l'assistance des autorités locales en vertu des lois susmentionnées. De l'avis de la commission, cela demande l'adoption de mesures supplémentaires telles qu'indiquées par la commission d'enquête dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539 b) de son rapport.
II. Mesures prises pour mettre un terme à l'imposition du travail forcé ou obligatoire, et informations disponibles sur les pratiques existantes
A. Mesures visant à mettre un terme à l'imposition dans la pratique du travail forcé ou obligatoire
8. Dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539 b) de son rapport, la commission d'enquête avait indiqué que les mesures nécessaires pour assurer que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires, étaient:
... d'autant plus important(es) que le pouvoir d'imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. En conséquence, au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 (du rapport de la commission), afin d'arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un état de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l'ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d'un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d' uvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré...
9. La commission note, à la lecture du rapport de la mission de coopération technique du BIT qui s'est rendue au Myanmar en octobre 2000, que la mission a suggéré un texte complémentaire sous forme d'ordonnance, arrêté ou directive du bureau du président du Conseil d'Etat pour la paix et le développement concernant la réquisition de travail ou de services (doc. GB.279/6/1, annexe 13). Le texte suggéré visait à ordonner à toutes les autorités de l'Etat, y compris les autorités militaires, policières et civiles et leurs responsables, de ne pas réquisitionner des personnes pour des travaux ou des services, à quelque fin que ce soit, et de ne pas donner l'ordre à d'autres personnes de procéder à de telles réquisitions, que ces travaux ou services soient ou non rémunérés, sauf dans les cas de force majeure tels que définis à l'article 2, paragraphe 2 d), de la convention. Cette interdiction visait, sans s'y limiter, la réquisition de personnes pour du travail ou des services aux fins suivantes:
a) portage pour les militaires (ou d'autres groupes paramilitaires/militaires, pour des campagnes militaires ou pour des patrouilles régulières);
b) construction ou réparation d'installations/camps militaires;
c) autres formes d'appui à ces camps (guides, estafettes, cuisiniers, nettoyeurs, etc.);
d) génération de revenus par des particuliers ou des groupes (y compris travail dans des projets agricoles ou industriels dont l'armée est propriétaire);
e) projets d'infrastructure nationaux ou locaux (routes, voies ferrées, barrages, etc.);
f) nettoyage/embellissement des zones rurales ou urbaines.
Des interdictions analogues devaient s'appliquer à la réquisition de matériaux ou fournitures, de quelque nature qu'ils soient, et aux demandes d'argent, sauf s'il s'agissait d'argent dû à l'Etat ou à une municipalité, aux termes d'une loi pertinente. En outre, le texte suggéré prévoyait que toute autorité de l'Etat ou tout représentant de cette autorité qui a besoin d'un travail, de services, de matériaux ou de fournitures, de quelque nature que ce soit et à quelque fin que ce soit, devait d'abord prendre des dispositions budgétaires appropriées pour les obtenir par un appel d'offre public ou en offrant une rémunération conforme aux taux du marché aux personnes souhaitant fournir ces services, matériaux ou fournitures volontairement ou souhaitant offrir leur travail.
10. La commission note que le texte suggéré par la mission n'a pas été adopté mais que le texte anglais de plusieurs instructions, datées des 27 et 28 octobre et 1er novembre 2000, a été adressé au BIT après le départ de la mission et reproduit dans des addenda au rapport de la mission (doc. GB.279/6/1 (Add.1) (Rev.1) et (Add.2)).
11. L'instruction datée du 27 octobre 2000, "Interdisant la réquisition de travail forcé", est signée par le directeur général des forces de police et adressée à toutes les unités des forces de police. L'instruction datée du 28 octobre 2000 sur le même sujet est adressée par le directeur général du Département de l'administration générale du ministère de l'Intérieur à tous les commissaires d'Etat et de division et à tous les départements de l'administration générale des Etats et des divisions. Elle demande, entre autres, que l'arrêté no 1/99 et l'arrêté le complétant soient affichés séparément sur les panneaux d'affichage à tous les niveaux des conseils pour la paix et le développement et départements de l'administration générale.
12. L'instruction datée du 1er novembre 2000, "Interdisant la réquisition de travail forcé", est signée au plus haut niveau par le Secrétaire-1 du Conseil d'Etat pour la paix et le développement et adressée aux présidents de tous les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions. La portée de cette instruction dépasse donc les institutions placées sous l'autorité du ministère de l'Intérieur. Toutefois, elle a en premier lieu pour objet de faire appliquer l'arrêté no 1/99 et l'arrêté supplémentaire du 27 octobre 2000, dont le champ d'application est limité à la réquisition de travail forcé au titre de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, c'est-à-dire non par des personnes exerçant l'autorité de l'Etat, en tant que fonctionnaires civils ou officiers militaires, mais par des autorités locales, qui peuvent réquisitionner du travail aux termes des lois susmentionnées, lorsqu'elles sont appelées à fournir une assistance aux autorités civiles de l'Etat et aux membres des forces armées. Néanmoins, l'instruction datée du 1er novembre interprète comme suit l'arrêté supplémentaire du 27 octobre 2000:
2. (...) Cet arrêté rend illégale la réquisition de travail forcé et précise qu'une telle réquisition est une infraction à la législation actuelle de l'Union du Myanmar. Les responsables, y compris les autorités locales et les membres des forces armées, des forces de police et d'autres branches du service public, ont l'interdiction de réquisitionner des personnes pour un travail forcé et ont l'instruction de veiller à ce qu'il n'y ait pas de travail forcé.
Il semblerait à la commission que, si cette interdiction est appliquée de bonne foi, elle devrait s'étendre aux cas typiques de membres des forces armées qui ordonnent aux autorités locales de fournir de la main-d' uvre, même si la manière de donner suite à cet ordre - par la réquisition ou l'embauche de travailleurs ou de toute autre façon - est laissée à l'initiative des autorités locales.
13. L'instruction en date du 1er novembre 2000 continue comme suit:
3. Il est donné ordre (...) aux conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions de donner les instructions nécessaires aux conseils pour la paix et le développement des districts et des circonscriptions pour qu'ils respectent rigoureusement les interdictions indiquées dans l'arrêté no 1/99 et dans l'arrêté du ministère de l'Intérieur qui le complète et aussi pour qu'ils veillent à assurer effectivement qu'il n'y ait pas de travail forcé dans les zones de leur ressort.
4. Les responsables, y compris les membres des autorités locales, des forces armées, des forces de police et d'autres branches du service public, qui ne respecteront pas l'arrêté no 1/99 et l'arrêté supplémentaire, seront poursuivis en vertu de l'article 374 du Code pénal ou de toute autre loi en vigueur.
Il semblerait à la commission que, de nouveau, comme elle l'a indiqué au paragraphe 12 précédent, une mise en uvre de bonne foi de l'instruction devrait inclure dans le champ d'application de son point 4 les membres des forces armées qui ordonnent aux autorités locales de fournir de la main-d' uvre.
14. Reste à savoir si les "instructions nécessaires" que doivent encore prendre les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions, conformément au point 3 de l'instruction du 1er novembre, contiendront les dispositions détaillées nécessaires pour que leur application soit réalisable dans la pratique. Les dispositions détaillées nécessaires ont été signalées par la commission d'enquête au paragraphe 539 b) de son rapport, et la mission de coopération technique d'octobre 2000 en a tenu compte dans sa suggestion qui est mentionnée au paragraphe 9 ci-dessus.
15. Les trois instructions qui, à ce jour, ont été transmises au BIT ne contiennent encore aucune indication concrète sur la manière dont les autorités qui avaient l'habitude de compter sur les contributions de travail forcé et non rémunéré de la population devront à l'avenir prévoir de manière réaliste des ressources suffisantes pour le travail et les services dont elles pourront avoir besoin.
16. En outre, ces trois instructions n'évoquent pas les diverses formes de travail forcé relevées par la commission d'enquête et la présente commission comme étant le plus souvent imposées dans la pratique et dont la liste peut être trouvée au paragraphe 9 ci-dessus. A cet égard, la commission rappelle que la plupart des formes de travail ou de service forcé qui ont été réquisitionnées sont le fait des forces armées. La commission note que "les membres des forces armées" figurent parmi les responsables énumérés au point 4 de l'instruction en date du 1er novembre 2000 (voir paragr. 13 ci-dessus). Toutefois, au point 3 de cette instruction, l'ordre de donner les instructions supplémentaires - et, on l'espère plus détaillées - est adressé aux conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions (qui, en fait, comprennent des officiers des forces armées), mais non pas aux commandants de région des forces armées en leur qualité de militaires.
17. En l'absence d'instructions spécifiques et concrètes adressées aux autorités civiles et militaires et décrivant les diverses formes et modalités de réquisition de travail forcé, l'application des dispositions adoptées jusqu'à maintenant dépend de l'interprétation de la notion de "travail forcé". Cette notion ne va pas de soi, comme le montrent les divers termes birmans utilisés de cas en cas pour qualifier un travail exigé de la population - entre autres, "loh ah pay", travail "bénévole" ou "offert". Le manque de clarté sur ce point est aggravé par les tentatives périodiques du gouvernement d'expliquer le recours généralisé à l'exaction de travail et de services, notamment par les autorités militaires, par le mérite qui peut être acquis dans la religion bouddhiste à ceux qui offrent spontanément une aide. La commission d'enquête a rappelé, au paragraphe 539 c) de son rapport, que "l'absence de délimitations nettes entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement" risquait "encore de marquer le recrutement effectué par les responsables locaux ou militaires".
18. Par conséquent, il reste encore le besoin d'instructions claires indiquant à tous les fonctionnaires intéressés, y compris les militaires à tous les niveaux des forces armées, les types de tâches pour lesquelles il est interdit de réquisitionner des personnes, ainsi que la manière dont ces tâches doivent être effectuées à l'avenir. La commission espère que les instructions détaillées nécessaires seront bientôt émises et que, comme il est indiqué au paragraphe 539 b) du rapport de la commission d'enquête, des mesures seront également prises pour "prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d' uvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré".
B. Informations disponibles sur la pratique
a) Pratique d'août 1998 à décembre 1999
19. Dans ses rapports en date des 21 mai 1999 et 25 février 2000 adressés aux membres du Conseil d'administration, le Directeur général a indiqué que toutes les informations sur la pratique actuelle qu'il a reçues en réponse à ses demandes (d'organisations d'employeurs et de travailleurs, d'organisations intergouvernementales et de gouvernements d'Etats Membres de l'OIT) relèvent la persistance du recours généralisé au travail forcé par les autorités et en particulier par l'armée.
b) Informations sur la pratique jusqu'à novembre 2000
20. Dans une communication en date du 15 novembre 2000, la CISL indique que les autorités militaires continuent d'enfreindre gravement la convention. La CISL a joint à sa communication plus de 1 000 pages de documents émanant de plus de 20 sources différentes; ces documents comprennent des rapports, des témoignages de victimes, plus de 300 ordres imposant du travail forcé, des photographies, des enregistrements vidéo et d'autres pièces. Quelques-uns des événements qui y sont décrits ont eu lieu pendant le premier semestre 2000; la plus grande partie des documents porte sur la période juin-novembre 2000.
21. Une partie essentielle de la communication de la CISL consiste en des centaines "d'ordres de travail forcé" émis principalement par les forces armées, mais aussi par des groupes armés placés sous son contrôle et par des agents de l'administration locale. Comme l'indique la CISL, ces ordres sont d'un type, d'une forme et d'un contenu semblables aux ordres que la commission d'enquête et les mécanismes réguliers de contrôle de l'OIT ont déjà examinés et considérés comme authentiques. Certaines pièces de la documentation soumise font état de la persistance, à une grande échelle, du portage forcé, y compris par des femmes, et du meurtre de porteurs forcés qui n'étaient plus capables de porter leur charge. Outre le portage forcé, il est fait état, pour la période juin-novembre 2000, de toutes les autres pratiques de travail forcé que la commission d'enquête avait précédemment identifiées. Un grand nombre de cas spécifiques rapportés comprennent du travail forcé pour la construction et l'entretien de routes, ponts, voies ferrées, canaux, digues, barrages et bassins, ainsi que pour la construction, la réparation, l'entretien et les services aux camps militaires; et la réquisition de main-d' uvre aussi bien que de graines, d'engrais, de matériaux et d'équipements pour des cultures, des forêts et des installations occupées par l'armée.
22. Comme il a été indiqué ci-dessus, copie de la communication de la CISL du 15 novembre 2000, y compris de la documentation volumineuse qui y était jointe, a été adressée au gouvernement pour tout commentaire qu'il souhaiterait formuler à ce sujet.
III. Application de sanctions
23. Au paragraphe 539 c) de ses recommandations, la commission d'enquête a exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer:
... que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l'article 374 du Code pénal pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l'article 25 de la convention. Ceci demande de la rigueur dans les enquêtes et poursuites et l'application de sanctions efficaces à ceux reconnus coupables.
24. Dans les faits, aucune action au titre de l'article 374 du Code pénal n'a jusqu'à présent été portée à la connaissance de la commission.
25. La commission note que le point 4 de l'instruction datée du 1er novembre 2000 du Conseil d'Etat pour la paix et le développement, qui est adressée à tous les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions (voir paragr. 13), prévoit que les "responsables" de réquisition de travail forcé seront poursuivis en vertu de l'article 374 du Code pénal. Des dispositions analogues figurent au point 3 de l'instruction datée du 27 octobre et du point 6 de l'instruction datée du 28 octobre (voir paragr. 11). De plus, les points 4 à 6 de l'instruction datée du 27 octobre 2000, adressée par le directeur général des forces de police à toutes les unités des forces de police, prévoient ce qui suit:
4. Si une personne porte plainte auprès de la police, oralement ou par écrit, parce qu'elle a été forcée de fournir un travail, la police enregistrera sa plainte sur les formulaires A et B et fera poursuivre l'accusé en vertu de l'article 374 du Code pénal.
5. Il est demandé par la présente que les commissariats et autres unités de police concernés, aux différents niveaux, reçoivent l'instruction d'assurer la stricte application de l'ordonnance précitée et de veiller à ce que personne ne soit réquisitionné pour un travail forcé. Le texte de l'arrêté complétant l'arrêté no 1/99, prise par le ministre de l'Intérieur le 27 octobre 2000, figure en annexe.
6. Les destinataires de cette directive sont priés d'en accuser réception et de rendre compte des mesures prises dans le domaine considéré.
26. Se référant au point 4 de cette dernière instruction (datée du 27 octobre 2000), la commission espère que les poursuites en vertu de l'article 374 du Code pénal seront engagées d'office par les autorités compétentes à leur propre initiative, sans attendre le dépôt d'une plainte, les victimes pouvant trouver imprudent de dénoncer les "responsables" à la police. La commission espère que le gouvernement, en commentant les indications selon lesquelles l'exaction de travail forcé a continué au-delà d'octobre 2000, fera également état de toute action concrète engagée au titre de l'article 374 du Code pénal.
27. La commission a noté que le gouvernement, dans sa lettre au Directeur général du BIT en date du 29 octobre, a donné l'assurance de sa "volonté politique de veiller à ce qu'il n'y ait pas de travail forcé au Myanmar, tant en droit que dans la pratique". La commission a également pris bonne note de l'arrêté complétant l'arrêté no 1/99 et des trois instructions émises entre le 27 octobre et le 1er novembre 2000 ainsi que de l'avis exprimé par les membres employeurs du Conseil d'administration, à sa 279e session (novembre 2000) selon lequel ces mesures étaient "trop faibles et trop tardives". Lors d'une conférence de presse tenue le 18 novembre 2000 à Yangon sur la décision du Conseil d'administration du BIT de laisser des mesures au sujet du Myanmar prendre effet, le gouvernement a indiqué qu'il n'allait plus coopérer avec le BIT en ce qui concerne la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, mais qu'il continuerait de prendre des mesures pour prévenir le travail forcé, conformément à sa politique. La commission espère qu'en conséquence le gouvernement prendra enfin les mesures nécessaires pour assurer le respect, tant en droit que dans la pratique, de la convention, instrument de droits fondamentaux que le Myanmar a ratifié librement. Elle espère également que le gouvernement, qui a manqué de prendre part aux procédures devant la commission d'enquête, saisira l'occasion de présenter ses vues et faire état de progrès en faisant rapport sur l'application de la convention, conformément à ses obligations aux termes de l'article 22 de la Constitution de l'OIT.
(Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 2001.)
Annexe 9
Note sur les activités du HCR au Myanmar et le travail forcé
Le HCR est opérationnel dans deux circonscriptions au Myanmar depuis 1994, et il a rapatrié environ 230 000 Musulmans réfugiés au Bangladesh dans l'Etat du Rakhine septentrional. Ses activités sont orientées vers la réintégration et la stabilisation de quelque 800 000 Musulmans, dont les rapatriés des circonscriptions de Maungdaw et Buthiadaung. Le HCR et ses partenaires d'exécution assurent une assistance dans divers secteurs clés afin d'améliorer et de stabiliser le milieu économique et social dans l'Etat du Rakhine septentrional. Le HCR assure une surveillance sur les lieux relative à plusieurs questions touchant à la protection de la population musulmane, y compris le travail forcé, et il milite en faveur d'un statut juridique plus sûr pour cette population. Quant au travail forcé, il lance des campagnes visant à le décourager, en particulier par le dialogue et l'engagement auprès des fonctionnaires de niveau local.
Domaines d'intervention
Agriculture
Compte tenu de la pénurie chronique de riz dans la zone des opérations, les efforts visant à accroître la production de cette céréale sont prioritaires. L'assistance antérieure du PAM a permis d'atténuer la pénurie. Par ailleurs, des digues seront construites pour produire une deuxième récolte dans des zones ciblées de trois circonscriptions. Parallèlement, on développe des projets d'aquaculture et d'élevage associés à des cours de formation pour améliorer la capacité de la population locale. Dans ce domaine d'intervention, le recours au travail forcé est inexistant et tout le travail nécessaire à la construction est sous-traité ou payé, comme il convient.
Santé
Le HCR reconnaît que la santé et le bien-être physique sont indissociables de la stabilité économique et sociale. Comparée à d'autres parties du Myanmar, la zone d'opération du HCR se caractérise par son isolement, son inhospitalité et la densité de sa population, dont le taux d'alphabétisation est très bas. Ces facteurs contribuent à l'inaccessibilité et à la sous-utilisation apparentes des services existants, qui se manifestent par des taux de mortalité et de morbidité maternelles et infantiles élevés, et par une forte incidence de malnutrition, de paludisme, de tuberculose et de d'infections diarrhéiques. Ces problèmes de santé sont d'autant plus difficiles à résoudre que les établissements de santé sont sous-équipés et manquent de personnel.
Le HCR a lancé ses projets d'aide sanitaire en 1995. Il a investi non seulement dans l'amélioration des établissements de santé publique, mais aussi dans le renforcement du système de soins de santé traditionnel dont il s'est efforcé d'améliorer la planification et la gestion; il a introduit des changements dans la fourniture et l'utilisation des services de santé en ciblant un impact immédiat au niveau communautaire. Cette stratégie permet un recentrage sur la promotion d'initiatives de développement intégré participatives, qui associent la santé à l'éducation, à la formation, aux activités génératrices de revenus, à l'assainissement de l'environnement et à d'autres secteurs connexes.
Les activités sanitaires permettent à la population de produire davantage au quotidien. En effet, sa mauvaise santé empêche l'activité économique et elle entraîne donc la pauvreté. Dans ce domaine d'intervention, le recours au travail forcé est inexistant.
Education
Par le truchement de diverses activités éducatives, le HCR tente de renforcer les liens qui existent entre les rapatriés, les résidents locaux musulmans et les autres communautés de l'Etat du Rakhine septentrional. Cet effort se fonde sur l'hypothèse que l'éducation est un facteur de sensibilisation pour les rapatriés. Les activités éducatives favorisent l'alphabétisation de la population; elles améliorent les mécanismes d'adaptation, y compris la communication avec les autorités ainsi qu'avec la communauté non musulmane; les activités de la vie quotidienne s'en trouvent facilitées. Dans ce domaine d'intervention, le recours au travail forcé est inexistant.
Activités génératrices de revenus
Etant donné que la majorité des plus pauvres parmi les pauvres - tant les rapatriés que les locaux - sont dépourvus de terres et dépendent d'emplois occasionnels, le HCR s'efforce de promouvoir parmi eux des activités génératrices de revenus. Selon les rapports, ces activités ont souvent des effets positifs tels qu'une autonomie accrue qui permet aux familles d'envoyer parfois leurs enfants à l'école.
Il s'agit d'aider la population à s'installer et à s'intégrer dans la zone, à devenir autonome et à trouver son créneau dans l'économie locale. Pour atteindre cet objectif, depuis 1995, on applique un programme extensif d'aide financière, de formation et d'activités agricoles. Ainsi, la population en général dispose désormais de davantage d'argent. Pour être exemptés d'impôt, les villageois doivent participer au développement de l'Etat du Rakhine septentrional. Par le passé, on estimait que c'était là une contribution directe sous forme de travail dénommé travail forcé ou obligatoire. Désormais, les villageois sont plus nombreux à pouvoir payer une petite contribution en argent de sorte que, s'il faut réparer un pont, leurs versements sont utilisés pour engager des journaliers occasionnels.
Infrastructure rurale
Mis à part les travaux de construction en cours (écoles, centres de santé, étangs, puits et digues), le HCR, le BAJ (Bridge Aid Japon) et le gouvernement du Myanmar coopèrent pour construire un lien routier permanent entre la circonscription de Maungdaw et l'extrême sud de la province dans la perspective de construire une route qui relie Maungdaw à Sittwe. Cette nouvelle artère permettra d'accélérer le développement de la zone, de créer des possibilités économiques et de fournir une assistance immédiate, par le biais de projets utilisés "Formation et argent contre travail" ou "Vivres contre travail" (PAM), aux villageois les plus pauvres qui vivent le long de cette route. Lorsqu'ils ont entrepris ces activités de construction, le HCR et le BAJ se sont assurés que tout le travail serait rémunéré, y compris par le projet "Vivres contre travail".
En outre, les travaux d'infrastructure ont un impact immédiat. En édifiant des ponts et en améliorant l'infrastructure en général, on décourage le recours au travail obligatoire.
Services sociaux communautaires
On estime que près de 10 pour cent de la population rapatriée appartient à la catégorie des personnes extrêmement vulnérables (PEV). Il s'agit de familles dirigées par des femmes, de veuves, d'orphelins, d'handicapés physiques ou mentaux ou de personnes âgées. On a recensé quelque 7 213 personnes extrêmement vulnérables et diverses institutions, dont le HCR, ciblent activement ces groupes et leur offrent une assistance, car elles reconnaissent que les services sociaux et les possibilités d'acquérir une autonomie sont très insuffisants. L'objectif ultime est de concevoir et de mener à bien des activités visant à aider ces personnes et leurs familles à devenir autonomes. La Croix-Rouge du Myanmar dispense formation et assistance dans ce domaine d'intervention, en tant que partenaire d'exécution du HCR.
"Community and Family Services International" aide les personnes extrêmement vulnérables qui ne sont pas assujetties au travail obligatoire à devenir autonomes. Cette organisation encourage également la participation communautaire et sensibilise les membres de la communauté à l'égard de leurs obligations et de leurs responsabilités. Dans certains cas, cela permet de transformer le "travail forcé" en du "travail communautaire volontaire". Le HCR encourage cette tendance car les villageois doivent entretenir de toutes façons ce que construit le HCR au service du développement de la société.
Outre toutes les activités mentionnées ci-dessus, qui sont d'ailleurs interconnectées, le HCR mène une campagne de sensibilisation générale et tente de convaincre les autorités de ne pas imposer le travail forcé. Le Haut Commissariat n'encourage absolument pas cette pratique mais au contraire il s'efforce de réduire sa fréquence et de promouvoir la rémunération des travailleurs.
Le HCR a observé que, grâce en partie à ses efforts de sensibilisation, les pratiques du travail forcé ont diminué ces dernières années. La situation s'est améliorée pour ce qui est de la fréquence des réquisitions, du nombre de travailleurs réquisitionnés et de celui des journées de travail. Il semble également que les tentatives de rémunérer les travailleurs en espèces ou en nature aient été plus nombreuses, bien que les sommes versées soient généralement bien inférieures au taux du marché. Cependant, le HCR a également observé que les pratiques de travail forcé se poursuivent dans les zones où la présence militaire est importante, et ou le portage entraîne des réquisitions de travailleurs par l'armée. Le HCR prévoit de maintenir sa présence et ses activités dans cette zone pour consolider les progrès accomplis. Ses activités humanitaires sont orientées vers la réduction des pratiques telles que le travail forcé.
Le 21 décembre 2000.
Annexe 10
Note sur les activités du PNUD au Myanmar sous l'angle de la résolution de l'OIT
Historique
Depuis 1993, l'aide du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) au Myanmar a été octroyée au titre de la décision no 93/21 de juin 1993 du Conseil d'administration du PNUD qui stipule que "l'assistance du Programme des Nations Unies pour le développement au Myanmar et les fonds correspondants doivent être clairement axés sur des programmes ayant un impact durable à l'échelon local, notamment dans les domaines des soins de santé primaires, de l'environnement, de la lutte contre le VIH/SIDA, de la formation et de l'éducation et de la sécurité alimentaire". Un ensemble de projets individuels connu sous le nom de Initiative pour le développement humain ou HDI a donc été mis en uvre depuis 1994.
En janvier 1996, et une nouvelle fois en juillet 1998, le Conseil d'administration du PNUD, a réaffirmé le mandat no 93/21 susmentionné par ses décisions nos 96/01 et 98/14, respectivement.
L'Initiative pour le développement humain visait trois objectifs primordiaux:
-- aider les communautés à répondre à leurs besoins humanitaires essentiels;
-- faire participer les populations locales aux activités de planification et de mise en uvre dont elles seront les bénéficiaires;
-- renforcer les capacités locales pour les activités d'autoassistance.
Alors que le bureau de pays du PNUD et les projets HDI et leurs organismes d'exécution cherchent en permanence à améliorer et à perfectionner la diffusion et les avantages du HDI, les décisions du Conseil d'administration continuent à fournir les paramètres permettant de planifier, de mettre en uvre et d'évaluer toutes les activités relatives à l'Initiative pour le développement humain.
A ce jour, onze projets fonctionnent de manière intégrée entre eux et avec les communautés locales pour répondre à leurs besoins élémentaires et atténuer la pauvreté dans 23 circonscriptions (townships), avec plus de 10 000 groupes communautaires et organisations situés dans la zone aride, le Delta de l'Ayeyarwaddy, et les Etats du Shan, du Chin, du Kachin et du Rakhine au Myanmar. Seule exception, le projet VIH/SIDA, qui couvre les zones à forte prévalence de HIV dans l'ensemble du pays. L'Initiative pour le développement humain est maintenant dans sa troisième phase, qui prendra fin en 2001.
Analyse par projet
Trois parmi les onze projets HDI se concentrent sur l'agriculture et la sécurité alimentaire. Ils visent à aider les fermiers démunis et les sans-terre à améliorer leur production et à accroître leurs revenus issus de la foresterie, de l'agriculture, de l'aquaculture et de l'élevage. Ces projets sont mis en uvre par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) dans la zone aride, l'Etat du Shan et le Delta.
Le projet sur les soins de santé primaires vise à aider les populations locales à répondre à leurs besoins élémentaires de soins de santé et à améliorer leur accès aux services de santé de base. Ce projet est centré sur les principales menaces que sont la malaria, la lèpre, la carence en iode et la tuberculose. Il organise la formation de sages-femmes et de travailleurs auxiliaires et encourage le planning familial. Ce projet est exécuté par le Bureau des services d'appui aux projets des Nations Unies (UNOPS).
Le projet d'approvisionnement en eau et d'assainissement permet de créer des systèmes d'approvisionnement en eau pour les villages insuffisamment ravitaillés en eau propre ou souvent totalement privés d'eau pendant la saison sèche. Il permet également d'améliorer l'assainissement, par exemple en favorisant l'installation de latrines à fosse simple, et aide la population à édifier des ponts de taille réduite et d'autres installations qu'ils déterminent eux-mêmes. Ce projet est géré par le Centre des Nations Unies pour les établissements humains (CNUEH (HABITAT)).
Le projet VIH/SIDA, exécuté par l'UNOPS, enseigne aux populations comment éviter une infection par le virus mortel du SIDA et prendre soin des personnes malades. Ses groupes cibles les plus exposés à une infection: les travailleurs de la prostitution et leurs clients, les travailleurs des transports et des mines, les pêcheurs et les réfugiés.
Le projet d'enseignement primaire vise à améliorer l'accès à l'enseignement primaire et sa qualité, par exemple en créant et en rénovant des écoles dans les zones défavorisées, en prêtant des livres aux enfants les plus dans le besoin et en formant des enseignants. Le projet cherche également à donner la capacité de lire, par des activités éducatives informelles destinées aux enfants et aux adultes n'ayant pas la possibilité de suivre régulièrement des cours. Le projet est exécuté par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO).
Le projet de microcrédit permet de prêter de faibles sommes d'argent à des villageois pour les aider à lancer de petites entreprises. La mise en uvre de ce projet est confiée à des organisations non gouvernementales (ONG): Private agencies collaborating together (PACT) dans les zones arides, Groupe de recherches et d'échanges technologiques (GRET) dans l'Etat du Shan, et Grameen Trust dans le Delta. Ce projet est géré par le Bureau des services d'appui aux projets des Nations Unies (UNOPS).
Le projet concernant les townships reculées offre des services intégrés de développement communautaire (recouvrant le développement social, la création de revenus et le renforcement des capacités locales dans l'agriculture, la santé, l'éducation, l'approvisionnement en eau et le crédit) dans dix townships - dans les Etats du Rakhine, du Kachin et du Chin. Ce projet est exécuté par le Bureau des services d'appui aux projets des Nations Unies (UNOPS).
Le projet d'appui aux activités complémentaires de l'Initiative pour le développement humain offre un soutien opérationnel et technique aux projets HDI. Il s'occupe également d'activités déterminantes, y compris la mobilisation sociale, la planification et la gestion du développement intégré. Enfin, un projet d'assistance préparatoire prépare le terrain à un programme d'aide pour les besoins élémentaires dans l'Etat du Rakhine septentrional.
Les activités liées au projet de l'Initiative pour le développement humain et le travail obligatoire
Les projets liés à l'Initiative pour le développement humain, tant dans leur conception que dans la pratique, ne sont ni guidés par des apports physiques ni orientés vers la construction. Ils s'appuient davantage sur des améliorations conceptuelles que sur des améliorations physiques dans des communautés rurales locales.
Les améliorations physiques limitées apportées par les projets (par exemple, rénovation et construction de centres de soins de santé primaires dans les villages, systèmes localisés de ravitaillement en eau tels que étangs, puits creusés à la bêche, citernes d'eau de pluie, centres de formation communautaires et écoles primaires, routes d'accès aux villages et ponts en bambou/bois, murs de protection du sol pour les fermes, aérateurs pour les sols, pépinières communautaires, etc.) sont invariablement de taille réduite, limitées dans leur étendue, claires dans leurs intentions et axées directement vers les besoins d'une seule communauté. Les projets liés à l'Initiative pour le développement humain soutiennent et favorisent ces activités en tant que points d'entrée stratégiques pour lancer la mobilisation sociale des communautés rurales concernées.
Tant sur le plan théorique que pratique, la stratégie de l'Initiative pour le développement humain est l'antithèse de la compulsion. Cette initiative repose strictement sur la participation volontaire. Toutes les activités HDI, à la base, sont planifiées, mises en uvre, contrôlées, opérées et gérées par les communautés bénéficiaires elles-mêmes. S'il doit y avoir des apports quelconques, volontairement proposés par les bénéficiaires, le type, la quantité et la nature de ces apports sont proposés et décidés par consensus par la communauté concernée. L'Initiative pour le développement humain inculque donc une approche plus durable du développement communautaire sur la base du volontariat en tant qu'alternative à la méthode administrative non volontaire de mise en uvre des activités de développement.
Ainsi, si et lorsque des projets HDI viennent en aide à des activités qui pourraient impliquer des travaux de construction ou des interventions sur des sols réclamant de la main-d' uvre, la nature de la contribution en main-d' uvre (quantité, calendrier, mode de rémunération, etc.) doit être proposée, discutée et convenue, puis contrôlée par les communautés concernées elles-mêmes, tout cela sur une stricte base volontaire. Les projets HDI n'obligent jamais (et ces projets ne détiennent aucune autorité pour la mise en uvre) les communautés à apporter une contribution quelconque (y compris de la main-d' uvre) dans l'une quelconque de ses activités.
En réponse au mandat du Conseil d'administration, l'Initiative pour le développement humain a été conçu pour que ses activités de projets soient exécutées par des organismes d'exécution des Nations Unies et non pas par les départements gouvernementaux responsables. Les institutions gouvernementales concernées, de l'institution centrale au village, sont informées des activités HDI. Le pouvoir de décision appartient cependant strictement à la direction du projet, et n'est pas partagé avec le gouvernement. Les projets HDI sont mis en uvre par leurs propres canaux indépendants et distincts gérés par leur propre personnel de projet, et cela jusqu'au niveau des communautés bénéficiaires et il n'y a aucune bureaucratie gouvernementale.
Comme cela a été demandé dans les mandats successifs du Conseil d'administration, des missions indépendantes ont régulièrement évalué les résultats du HDI. Dans sa décision no 98/14, le Conseil d'administration a demandé à l'Administrateur de continuer à lui présenter chaque année un rapport sur les progrès accomplis et les problèmes rencontrés dans la mise en uvre des activités au titre de l'Initiative pour le développement humain. Conformément à cette demande, la dernière mission d'évaluation indépendante a eu lieu du 27 mai au 15 juillet 2000. Après avoir étudié de près la documentation concernant chacun des onze projets HDI et visité des villages-projets, et après avoir mené des consultations approfondies avec les bénéficiaires des villages dans les zones de projet, la mission a conclu que le contenu et les objectifs de tous les projets HDI étaient pleinement conformes aux dispositions pertinentes des décisions du Conseil d'administration.
Compte tenu de l'analyse susmentionnée, nous sommes convaincus que les activités en cours déployées au titre des projets HDI (le seul programme financé par le PNUD dans le pays) n'ont pas et ne risquent pas d'avoir l'effet d'encourager la pratique du travail forcé ou obligatoire au Myanmar.
Annexe 11
Conférence internationale CISL/CISL-ORAP/SPI
Plan d'action du mouvement syndical mondial sur la Birmanie (adopté à Tokyo le 1er mars 2001)
1. Renforcer l'aide matérielle à la Fédération des syndicats de Birmanie.
2. Agir en faveur de la mise en uvre de la résolution de juin 2000 de l'OIT sur la Birmanie et, notamment:
-- examiner les relations bilatérales que votre gouvernement peut avoir avec la junte;
-- appuyer la tenue d'une séance extraordinaire sur la Birmanie au cours de la session de 2001 de la Conférence internationale du Travail;
-- militer pour l'inclusion de cette question dans l'ordre du jour de la prochaine session du Conseil économique et social de l'ONU;
-- chercher à établir avec votre gouvernement des consultations sur les mesures concernant la Birmanie, en application de la convention no 144 de l'OIT sur les consultations tripartites;
-- tendre à l'amélioration de la coordination parmi l'ensemble des institutions spécialisées et programmes des Nations Unies afin de garantir que ni les uns ni les autres n'aident ou n'encouragent les pratiques de travail forcé.
3. Exercer, dans ce même objectif, une pression plus forte auprès des institutions financières internationales.
4. Intervenir en concertation avec la Confédération européenne des syndicats auprès de la présidence de l'Union européenne et des Etats membres en faveur d'un renforcement des sanctions actuellement en vigueur contre la Birmanie.
5. Intervenir auprès les Etats membres de l'ANASE pour la suppression du travail forcé et l'établissement de la démocratie dans le pays.
6. Ouvrir sans plus attendre des discussions avec les entreprises qui persistent à entretenir des relations d'affaires avec la Birmanie, afin de les persuader d'en retirer leurs investissements et de renoncer à toute relation commerciale avec lui, sous peine de s'exposer à être désignées à l'opprobre, à un boycott des mouvements de consommateurs et à diverses autres formes de pression.
7. Etendre et renforcer le militantisme des travailleurs contre l'actionnariat des entreprises exerçant leurs activités en Birmanie ou entretenant des relations commerciales avec ce pays.
8. Assurer une meilleure information de la base syndicale, et du public en général, sur la réalité de la situation.
9. Faire du 1er mai 2001 la Journée mondiale d'action syndicale pour la Birmanie et, à cette occasion:
-- faire campagne auprès des gouvernements;
-- interpeller les entreprises;
-- sensibiliser le grand public;
-- manifester devant les ambassades de Birmanie;
-- dénoncer l'injure à la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail que représente la situation en Birmanie;
en concertation avec les mouvements civiques et religieux, les ONG et d'autres organismes.
10. Veiller à ce que le plan d'action sur la Birmanie reste inscrit dans les grandes questions syndicales et informer les adhérents des progrès constatés.
GB.280/6 (Add.1)
Faits nouveaux concernant la question du respect par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
Addendum
1. Depuis l'achèvement du document GB.280/6, le Bureau a reçu un certain nombre d'autres communications de la part d'Etats Membres, d'organisations d'employeurs et de travailleurs nationales, d'une organisation internationale ainsi que d'organisations non gouvernementales pour permettre au Conseil d'administration d'avoir un aperçu aussi complet que possible des commentaires reçus, le contenu de ces communications est résumé ci-après.
2. Le gouvernement du Canada a fait savoir que des exemplaires de la résolution de la Conférence ont été envoyés aux gouvernements provinciaux et territoriaux canadiens ainsi qu'aux organisations nationales de travailleurs et d'employeurs. Le gouvernement a également envoyé une note à de grandes associations commerciales canadiennes pour les informer de la résolution de la Conférence et de la politique du Canada vis-à-vis du Myanmar. En 1988, le Canada a suspendu ses relations diplomatiques et commerciales avec le Myanmar ainsi que son soutien aux entreprises canadiennes entretenant des relations commerciales avec ce pays, y compris les programmes d'exportation et de promotion commerciale. Le Canada a également interrompu son soutien à l'aide multilatérale octroyée par l'intermédiaire des institutions financières internationales ainsi que toute aide bilatérale. En août 1997, le gouvernement canadien avait annoncé des mesures économiques sélectives à l'encontre du Myanmar, qui demeurent en vigueur. Elles recouvrent notamment le retrait des préférences commerciales et l'introduction de contrôles à l'exportation qui, de fait, restreignent les exportations à celles ayant un caractère humanitaire. Le gouvernement a par ailleurs fait une déclaration demandant instamment aux entrepreneurs canadiens de ne plus conclure d'autres accords d'investissement et de ne plus entreprendre de projets commerciaux au Myanmar tant que des progrès manifestes n'auront pas été accomplis.
3. Le gouvernement du Japon a transmis les observations suivantes par l'intermédiaire de sa mission permanente. Les rapports entre le Japon et le Myanmar ne comportent aucun élément de nature à contribuer directement ou indirectement au maintien du travail forcé au Myanmar, et aucune de ses aides au développement n'est susceptible d'avoir cet effet. Le Japon espère que le problème du travail forcé au Myanmar sera rapidement résolu et qu'un dialogue constructif sera très prochainement engagé à cet effet entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT.
4. Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande indique qu'il a récemment passé en revue les rapports bilatéraux que le pays entretient avec le Myanmar et qu'aucun aspect de ces relations n'a été identifié comme étant susceptible de perpétuer ou d'étendre le système du travail forcé au Myanmar. Le gouvernement a l'intention de vérifier régulièrement les rapports qu'il entretient avec ce pays. Il a transmis les copies de la résolution de la Conférence au Conseil néo-zélandais des syndicats ainsi qu'à la Fédération néo-zélandaise des employeurs.
5. Le gouvernement du Portugal a fait savoir que ses relations commerciales avec le Myanmar s'inscrivent dans le cadre des règles de l'OMC et de l'UE. Il est difficile dans le cadre de l'OMC de prendre des mesures contre un autre Etat membre sur le fondement de violations des droits fondamentaux des travailleurs. L'Union européenne a pour sa part exclu temporairement le Myanmar de son système de préférences commerciales en raison du travail forcé pratiqué dans ce pays. L'Union européenne continue à observer la situation au Myanmar qu'elle juge très préoccupante, et la question du travail forcé dans ce pays ainsi que la résolution de la Conférence feront l'objet d'un débat lors d'une réunion du Conseil de l'Union européenne au mois de mars.
6. Le gouvernement de la Belgique a fait savoir que, bien que ses relations bilatérales avec le Myanmar soient extrêmement limitées, il a invité les ministres dont les départements pourraient entretenir des relations avec ce pays à examiner les mesures qui pourraient être prises pour soutenir la démarche de l'OIT afin que ces relations ne puissent être mises à profit pour entretenir le recours au travail forcé. Les possibilités de sanctions économiques sont limitées car, d'une part, le commerce bilatéral avec ce pays est faible et, d'autre part, la politique commerciale de la Belgique relève pour l'essentiel de l'Union européenne. En juillet de l'année dernière, le gouvernement a fait savoir au président d'un groupe pétrolier ses plus vives réserves vis-à-vis de la politique menée par ce groupe qui poursuit ses objectifs sans tenir compte du contexte politique et humain dans lequel son action s'inscrit au Myanmar. Pour des raisons éthiques, le gouvernement a mis fin à un contrat pour la fourniture de carburant avec ce même groupe. Il a par ailleurs introduit une clause éthique faisant interdiction aux fournisseurs de l'Etat belge d'exercer des activités commerciales dans les Etats dont les autorités se rendent coupables de certaines violations des droits de l'homme, mais l'introduction de cette clause doit encore recevoir l'approbation de la Commission européenne. Le gouvernement a la ferme volonté de veiller, sous sa future présidence de l'Union européenne au second semestre de cette année, à ce que la position de l'Union européenne fasse l'objet d'un examen attentif en fonction de la situation au Myanmar.
7. Le gouvernement du Koweït a déclaré qu'il n'entretenait aucune coopération directe ou indirecte avec le gouvernement du Myanmar et qu'il avait transmis la résolution de la Conférence aux organisations d'employeurs et de travailleurs nationales. Le gouvernement des Seychelles a indiqué qu'il étudiait la situation et répondrait en temps opportun.
8. La Confédération syndicale des Pays-Bas, Federatie Nederlandse Vakbeweging (FNV), a indiqué qu'elle n'entretenait aucun rapport avec le régime du Myanmar. Elle a demandé au gouvernement néerlandais de lui fournir des informations sur les entreprises néerlandaises ayant des intérêts commerciaux au Myanmar, sur la valeur totale des échanges commerciaux entre les deux pays ainsi que des détails sur les importations provenant de ce pays ayant fait intervenir de la main-d' uvre forcée. D'autres mesures seront prises dès que les informations reçues auront été analysées. La confédération a également demandé au gouvernement néerlandais d'élaborer des propositions concrètes en vue du réexamen des relations que le pays et/ou l'Union européenne entretiennent avec le Myanmar à l'occasion de la prochaine discussion qui se tiendra au niveau de l'Union européenne sur ces relations. Elle a demandé au gouvernement néerlandais de la tenir informée de ces propositions et en discutera avec lui si nécessaire.
9. Le Congrès des syndicats de Fidji (FTUC) a indiqué qu'il partageait la position de la CISL mais n'avait pas d'autres informations à fournir à ce stade.
10. La Confédération des syndicats du Pakistan (APFTU) a fait savoir qu'elle avait demandé instamment au gouvernement du Pakistan de respecter l'esprit de la résolution de la Conférence et avait diffusé largement la résolution auprès des médias afin d'informer l'opinion publique sur la situation au Myanmar.
11. La Confédération patronale suédoise (SAF) a indiqué que la teneur et les implications de la résolution de la Conférence avaient fait l'objet d'un débat lors d'une réunion du Conseil consultatif pour l'Asie du Sud-Est du Conseil international de l'industrie suédoise. Toutes les entreprises adhérentes à la confédération qui sont au nombre de 45 000 ont été informées par la voie de son bulletin de son soutien à la résolution de la Conférence, et les sociétés entretenant des relations commerciales avec le Myanmar ont été priées de les reconsidérer. Le Conseil international de l'industrie suédoise a communiqué la teneur de la résolution de la Conférence aux associations d'entreprises concernées.
12. L'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) a fait savoir qu'en ce qui concernait ses activités au Myanmar elle n'avait connaissance d'aucune violation de la résolution de la Conférence.
13. L'organisation non gouvernementale Images Asia, dont l'un des représentants a témoigné devant la Commission d'enquête et qui a coopéré étroitement avec la commission lors de sa visite dans la région en 1998, a communiqué un rapport daté du 3 mars 2001 sur le travail forcé dans l'Etat de Rakhine au Myanmar. Ce rapport fait état de la situation au nord de cet Etat en décembre 2000. Il révèle que le gouvernement du Myanmar à donné l'ordre de cesser d'employer de la main-d' uvre forcée aux autorités publiques civiles et que les chefs de village avaient été invités à organiser des réunions publiques pour annoncer le changement de politique. Ces informations ont également été apposées sur les panneaux d'affichage officiels, et il a été déclaré que ni les autorités civiles ni les autorités militaires n'étaient en droit d'exiger la fourniture de travail obligatoire et qu'en cas de non-respect de cet ordre des plaintes devaient être introduites auprès du tribunal, lequel prendrait les mesures nécessaires. Le rapport fait état toutefois de ce que les militaires du Myanmar, en particulier les bataillons locaux, ne montrent aucun empressement à mettre en uvre ces instructions. L'armée continue à réquisitionner de la main-d' uvre sous la menace de "conséquences fâcheuses". Il s'ensuit que, bien qu'il y ait une diminution provisoire de la demande de travail forcé dans certaines régions, celle-ci n'est que légère et selon certaines allégations cette tendance s'est accompagnée d'une augmentation des extorsions et de prélèvements d'impôts arbitraires.
Genève, le 22 mars 2001.
GB.280/6 (Add.2)
Addendum 2
Dans une lettre en date du 14 mars, le gouvernement du Mexique a indiqué que les échanges commerciaux bilatéraux et le dialogue politique avec le gouvernement du Myanmar sont minimes et qu'il n'existe aucun mécanisme bilatéral, instrument juridique ou projet de coopération en cours, ni en voie de négociation entre le Mexique et le Myanmar. Le gouvernement a également communiqué les recommandations contenues dans la résolution de la Conférence aux organisations d'employeurs et de travailleurs du pays les plus représentatives. Parmi ces dernières, la Confédération des travailleurs du Mexique a lancé des actions syndicales à ce sujet, par l'intermédiaire de son représentant au Conseil d'administration du BIT.
Genève, le 27 mars 2001.
GB.280/pv
D. Procès-verbal provisoire de la discussion de ce point
CONSEIL D'ADMINISTRATION
PROCÈS-VERBAL PROVISOIRE DE LA 280e SESSION
(Sera soumis à l'approbation du Conseil d'administration à sa 282e session (novembre 2001).)
DEUXIEME SÉANCE
Extrait
Mercredi 28 mars 2001, matin
La séance est ouverte à 10 h 50 sous la présidence de M. Amorim.
Sixième question à l'ordre du jour
FAITS NOUVEAUX CONCERNANT LA QUESTION DE L'EXECUTION PAR LE GOUVERNEMENT DU MYANMAR DE LA CONVENTION (NO 29) SUR LE TRAVAIL FORCE, 1930
Le Président rappelle que, à sa 279e session (novembre 2000), le Conseil d'administration a conclu que les conditions fixées par la Conférence au paragraphe 2 de sa résolution de juin 2000 concernant l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention no 29 n'avaient pas été remplies et que, par conséquent, les dispositions énoncées au paragraphe 1 de la résolution prendraient effet le 30 novembre 2000. Il a aussi décidé qu'il ne fallait pas renoncer à exploiter les possibilités de coopération entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar. Le Directeur général a par la suite pris les mesures nécessaires pour que les dispositions en question soient appliquées.
Le Conseil d'administration est maintenant saisi d'un rapport qui présente les faits nouveaux concernant le gouvernement du Myanmar ainsi que les mesures prises par les mandants de l'OIT et diverses organisations internationales. Ce rapport comporte 11 annexes qui contiennent des éléments détaillés et s'accompagne de deux documents complémentaires qui rendront compte des dernières informations reçues ultérieurement des gouvernements ainsi que des organisations d'employeurs et de travailleurs.
Au paragraphe 67 du rapport, le Conseil d'administration est invité à prier le Directeur général de communiquer à la Commission de l'application des normes, qui examinera la question en juin 2001, le rapport lui-même, le compte rendu des discussions du Conseil d'administration et toute autre information pertinente.
Le Directeur général fait observer qu'il ressort des réponses reçues des mandants de l'OIT que la résolution de la Conférence a conduit plusieurs gouvernements a réexaminer de très près leurs relations avec le Myanmar, en consultation avec les organisations d'employeurs et de travailleurs, et que, dans certains cas, ce réexamen a fait une grande place à la situation des entreprises opérant au Myanmar. Certains gouvernements signalent qu'ils ont pris des mesures concrètes, et plusieurs syndicats ont fait campagne en faveur d'un boycottage, mais, dans l'ensemble, la réaction à la résolution de la Conférence reflète une attitude attentiste.
Conformément aux conclusions auxquelles est parvenu le Conseil d'administration en novembre 2000 et au mandat qui lui était confié par la Conférence, le Bureau a été autorisé à proposer au gouvernement du Myanmar de coopérer avec lui afin de promouvoir la pleine application des recommandations de la commission d'enquête. En vertu de ce mandat et malgré le refus de coopérer exprimé par le ministère des Affaires étrangères du Myanmar, le Directeur général a écrit au ministre du Travail le 22 décembre 2000. La réponse du ministre, en date du 11 février 2001, dénotait en général une attitude de non-coopération, mais insistait aussi sur les mesures prises pour mettre en uvre le dispositif législatif, gouvernemental et administratif annoncé, y compris des mesures contre les contrevenants. Dans sa lettre du 1er mars 2001, le Directeur général a souligné que le Myanmar ne pouvait espérer se voir reconnaître le mérite de ces efforts en l'absence d'une évaluation objective de leur application et de leurs résultats dans la pratique, évaluation que seule l'OIT était en mesure de réaliser. A la suite de cette lettre, le vice-ministre des Affaires étrangères a demandé à rencontrer le Directeur général.
Etant bien entendu que cette réunion visait à apporter une réponse positive à sa lettre du mois de mars, le Directeur général a reçu le vice-ministre des Affaires étrangères le 22 mars et a eu avec lui une discussion très franche et directe. Son objectif était de déterminer si le gouvernement du Myanmar était disposé à ce que l'OIT procède à une évaluation objective de l'impact concret des mesures annoncées. En ce qui concerne les modalités, il a souligné qu'elles devraient être de nature à garantir l'objectivité et la pertinence du résultat. Il a aussi insisté sur l'urgence de la question compte tenu des discussions devant avoir lieu à la session de juin 2001 de la Conférence. Sur cette base, la visite du vice-ministre a confirmé la volonté des autorités d'engager rapidement des discussions en vue d'une évaluation objective des différentes mesures qu'elles ont adoptées à la fin de l'an 2000.
Finalement, l'utilité de ces échanges se mesurera à la rapidité avec laquelle on parviendra éventuellement à se mettre d'accord sur les modalités de l'évaluation objective. On saura alors si on va dans la bonne direction ou si l'on se trouve dans une impasse. L'orateur ajoute qu'il associera étroitement le bureau du Conseil d'administration au progrès des discussions ou à leur interruption, selon le cas.
M. Brett (travailleur, Royaume-Uni; vice-président travailleur) remercie le Directeur général de son rapport détaillé. Toutefois, en ce qui concerne les travailleurs, plutôt que de parler d'attentisme des mandants de l'OIT, il faudrait parler d'expectative. Les travailleurs espéraient que le recours sans précédent à l'article 33 de la Constitution de l'OIT conduirait les autorités birmanes à comprendre qu'il était logique de coopérer avec l'OIT pour s'acquitter de leurs obligations. Ils espéraient aussi que, si le gouvernement birman n'agissait pas ainsi, la communauté internationale prendrait des mesures appropriées pour qu'il honore ses obligations. Il a été clairement indiqué à l'époque que l'article 33 n'est pas une disposition que l'on peut invoquer à la légère et que le recours à cet article ne vise pas à mettre sur le banc des accusés un gouvernement qui a constamment refusé de respecter les obligations qui lui incombent en vertu de la convention no 29, mais que c'est une grave mise en cause d'un gouvernement qui, depuis longtemps déjà, n'honore pas ses obligations. Après avoir constamment nié l'existence du travail forcé en Birmanie, le ministre du Travail, dans sa lettre du 21 février 2001, reconnaît implicitement que le travail forcé a bel et bien été pratiqué et qu'il continue à l'être. Le gouvernement admet désormais quelques cas isolés de non-respect de la législation et indique que des mesures ont été prises contre les auteurs de ces infractions, mais il ne fournit aucune information précise à ce sujet. Or il ressort des rapports des ONG et du mouvement syndical international que le travail forcé reste généralisé en Birmanie. Dans ces conditions, il est bien dommage que le ministre du Travail ait rejeté l'aide proposée par l'OIT sous le prétexte que son gouvernement est parfaitement capable de prendre les mesures nécessaires sans assistance extérieure. Or il est essentiel, dans l'intérêt de l'OIT et du gouvernement de la Birmanie, que les mesures prises pour mettre un terme au travail forcé soient dûment vérifiées par un organe extérieur impartial. Tant que cela ne sera pas fait, il n'y aura aucun moyen de vérifier les progrès éventuellement accomplis. Dans sa lettre du 1er mars, le Directeur général souligne que seule l'OIT est en mesure de réaliser une telle évaluation "avec l'autorité voulue pour qu'elle ait des conséquences juridiques, pratiques et politiques au plan international", ce qui est un avis très sage que le gouvernement de la Birmanie serait bien inspiré de prendre en compte.
En ce qui concerne l'opinion en Birmanie, les paragraphes 48 et 49 du rapport font état d'une "lettre ouverte concernant la décision de l'OIT à l'égard du Myanmar", qui est censée émaner de 18 millions de travailleurs d'entreprises publiques et privées, ainsi que d'une autre lettre ouverte, portant la même en-tête et la même date, reçue de la "communauté internationale des entreprises établies au Myanmar". Ces communications n'ont pas la moindre crédibilité et donnent à penser que les signatures ont été obtenues sous la contrainte.
Il est également décevant qu'un certain nombre d'Etats Membres se montrent extrêmement vagues dans leurs réponses au sujet des efforts qu'ils pourraient envisager. Dans sa résolution, la Conférence a demandé aux Etats Membres de prendre les mesures appropriées pour que les autorités birmanes ne puissent pas mettre à profit les relations qu'elles entretiennent avec tels ou tels Etats pour perpétuer ou étendre le système de travail forcé. Il est certain que l'attentisme que l'on observe est dû en partie à des rapports qui indiquent que la junte militaire birmane a récemment engagé des discussions secrètes avec le leader de l'opposition démocratique. Aussi souhaitable que soit le retour à la démocratie, telle n'est pas la question dont est actuellement saisi le Conseil d'administration; la question dont il est saisi est très simple: mettre un terme au travail forcé qui porte atteinte à l'une des conventions fondamentales de l'OIT.
Un certain nombre de syndicats ont réagi d'une manière très concrète. En particulier, la CISL - qui représente quelque 200 millions de travailleurs dans le monde entier - a adopté, lors d'une réunion à Tokyo, un plan mondial d'action qui prévoit un certain nombre de mesures concrètes visant à persuader les gouvernements, les milieux d'affaires et les organismes internationaux d'agir pour mettre un terme au travail forcé en Birmanie. A ce sujet, il est regrettable que l'Organisation des Nations Unies et d'autres organisations internationales ne se soient pas sérieusement saisies du problème et qu'elles se soient contentées de prendre note de la communication de l'OIT. Il n'est pas non plus acceptable que des gouvernements qui, à l'OIT, ont approuvé l'adoption de mesures en vertu de l'article 33 omettent de soulever la question dans d'autres organismes internationaux. Les travailleurs approuvent la proposition du Directeur général d'inscrire cette question à l'ordre du jour de la session de juillet 2001 du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC). Il faut espérer que tout cela contribuera à créer un climat qui convaincra le gouvernement de la Birmanie de la nécessité d'agir et de retrouver une certaine crédibilité en demandant à l'OIT de valider le processus. En tout état de cause, les travailleurs poursuivront leur campagne jusqu'à ce que le gouvernement de la Birmanie honore ses obligations.
M. Thüsing (employeur, Allemagne; vice-président employeur) juge qu'il ne sert à rien d'exacerber la situation par des déclarations ou des gestes exclusifs. La Conférence a décidé en juin 2000 que certaines mesures devaient être prises en application de l'article 33 de la Constitution de l'OIT et, en novembre 2000, le Conseil d'administration n'a pas pu conclure que l'évolution de la situation justifiait la non-application de ces mesures. Les employeurs estiment que cette décision, bien que regrettable, était la bonne compte tenu des circonstances. Une situation ne peut changer que si de nouveaux éléments entrent en jeu et, dans le cas d'espèce, des éléments nouveaux ne pourront apparaître que si, sur la base d'une évaluation objective effectuée par le Bureau, la Conférence ou le Conseil d'administration sont saisis d'un rapport qui leur permette de conclure que la situation a changé dans la bonne direction. Il est donc nécessaire d'attendre une telle évolution et toutes les parties concernées devraient coopérer de bonne foi à la réalisation de cet objectif.
Mme Adler (gouvernement, Danemark) prend la parole au nom des gouvernements de l'Union européenne (UE) ainsi que des gouvernements des pays d'Europe centrale et orientale associés à l'UE, en précisant que les autres pays associés - Chypre, Malte et la Turquie - ainsi que la Croatie et la Norvège souscrivent à sa déclaration.
L'Union européenne a appuyé la résolution adoptée par la Conférence internationale du Travail en juin 2000 et s'est félicitée de l'entrée en vigueur, le 30 novembre 2000, des mesures recommandées dans cette résolution car le travail forcé en Birmanie la préoccupe énormément, comme en témoignent les réponses des Etats membres de l'UE et de la Commission européenne à la lettre du 22 décembre 2000 du Directeur général.
En 1997, la commission d'enquête instituée par l'OIT a adressé des recommandations précises au gouvernement de la Birmanie: la législation nationale devait être mise en conformité avec la convention no 29 de l'OIT; aucun travail forcé ou obligatoire ne devait plus être imposé dans la pratique par les autorités; les personnes imposant du travail forcé devaient faire l'objet de sanctions pénales. Ces recommandations restent valables et la Birmanie doit les appliquer en tous points.
En novembre 2000, le gouvernement de la Birmanie a commencé à prendre quelques mesures pour régler le problème et a notamment adopté des mesures législatives, selon ce qu'indique le rapport de la mission du BIT. En revanche, en ce qui concerne les mesures d'application et leur suivi, la situation est beaucoup moins claire et l'UE s'inquiète des rapports qui continuent à signaler l'existence de travail forcé en Birmanie.
Depuis, la Birmanie a informé le Bureau qu'elle poursuivra ses efforts en vue de l'élimination du travail forcé - ce qui est en soi encourageant - mais sans la coopération de l'OIT - ce qui est regrettable. La Conférence internationale du Travail ne pourra lever les mesures qu'elle a prises que si elle a l'assurance que le travail forcé a complètement disparu en Birmanie, et seul le BIT peut lui fournir cette information. L'Union européenne exhorte donc la Birmanie à renouer sa coopération avec l'OIT et à permettre au BIT, par une présence permanente dans le pays, de l'aider à mettre définitivement fin, dans des conditions vérifiables, à la pratique du travail forcé. Si la Birmanie fait suffisamment de progrès d'ici la session de juin 2001 de la Conférence internationale du Travail, les Membres souhaiteront peut-être examiner quelles autres mesures pourraient être prises.
M. Spring (gouvernement, Etats-Unis) note que, dans sa lettre du 22 décembre 2000, le Directeur général rappelle que le BIT est prêt à aider le gouvernement de la Birmanie à appliquer les recommandations de la commission d'enquête, ce qui est conforme aux dispositions de la résolution de juin 2000 de la Conférence et à la discussion que le Conseil d'administration a consacrée à cette question en novembre 2000. Il est regrettable que le gouvernement de la Birmanie n'ait pas accepté l'aide proposée par le BIT, mais cette offre tient toujours.
Dans sa lettre du 1er mars 2001, le Directeur général fait valoir que seule l'OIT est à même de procéder avec l'autorité voulue à une évaluation objective des mesures prises par le gouvernement pour appliquer les recommandations de la commission d'enquête. L'orateur déclare que, même s'il est d'accord sur le principe, il craint que, en l'absence de réformes démocratiques en Birmanie, il soit dans la pratique difficile au BIT de s'assurer sur place que le travail forcé a été éliminé dans tout le pays. Dans ces conditions, une présence du BIT risquerait de nuire à la crédibilité de l'OIT et non de la renforcer.
Le document du Bureau contient des preuves décourageantes que la pratique du travail forcé persiste en Birmanie. On signale que le gouvernement et les militaires, à tous les niveaux, ont pris des mesures pour dissimuler cette pratique et pour affaiblir ou annuler l'effet des ordonnances que le gouvernement a communiquées au Conseil d'administration en novembre 2000 comme preuve de sa détermination d'éliminer le travail forcé. En outre, une campagne de propagande et de désinformation a été lancée pour essayer de contrer les mesures prévues par la Conférence dans sa résolution. On signale que des dizaines de milliers de personnes, dont des femmes, des enfants et des vieillards, ont été assujetties à un travail forcé au cours de la courte période de temps qui s'est écoulée depuis novembre 2000. L'orateur déclare approuver pleinement la proposition énoncée au paragraphe 67, à savoir que le Directeur général transmette le document à la Conférence pour discussion en juin 2001.
En janvier 2001, la communauté internationale s'est généralement réjouie de l'annonce de l'ouverture d'un dialogue entre le gouvernement de la Birmanie et l'opposition démocratique. Plus de deux mois se sont écoulés et elle attend toujours des signes qui indiqueraient que cela reflète une volonté réelle de promouvoir la réconciliation nationale et de faire des progrès concrets sur la voie de l'élimination des atteintes aux droits de l'homme. Le travail forcé a peu de chances de prendre fin en Birmanie tant qu'il n'y aura pas un régime démocratique. Le gouvernement des Etats-Unis est favorable à ce que l'on donne au dialogue une chance d'aboutir. Toutefois, si aucun progrès réel n'est réalisé, il est prêt à envisager des mesures supplémentaires en application de la décision de la Conférence.
M. Haraguchi (gouvernement, Japon) fait observer que, selon le rapport de la mission du BIT dont le Conseil d'administration a été saisi en novembre 2000, le gouvernement du Myanmar a incontestablement pris différentes mesures législatives et administratives en vue d'éliminer le travail forcé. Certes, il reste à voir comment ces mesures sont appliquées. Il n'en demeure pas moins que des progrès ont été faits, et il faudrait encourager par toutes les manières le gouvernement du Myanmar à aller rapidement de l'avant dans la direction souhaitée. L'orateur déclare qu'il continue à croire que c'est la bonne méthode si l'on veut obtenir sans heurts les résultats escomptés.
L'orateur rend hommage au Bureau pour les efforts qu'il a faits en vue de rétablir le dialogue et la coopération avec le gouvernement du Myanmar. Pour sa part, le gouvernement du Japon est resté en contact avec le gouvernement du Myanmar à différents niveaux, officiellement et officieusement, afin de le convaincre de la nécessité de coopérer avec l'OIT, en particulier pour l'évaluation objective des mesures prises. Le gouvernement du Japon poursuivra ses efforts et il espère qu'il sera possible à toutes les parties intéressées de coopérer sans réserves afin que ces efforts soient pleinement récompensés le plus tôt possible.
M. Chung (gouvernement, République de Corée) indique que son gouvernement a transmis la résolution de la Conférence aux principales organisations d'employeurs et de travailleurs de son pays et leur a demandé de prendre des mesures appropriées pour appliquer les recommandations et réexaminer si nécessaire leurs relations avec le Myanmar. Son gouvernement informera le BIT de tous les faits nouveaux dans ce domaine. Il espère qu'une solution pourra rapidement être trouvée grâce à l'assistance technique de la communauté internationale, dont l'OIT, et à des efforts plus actifs du gouvernement du Myanmar.
M. Mladlana (gouvernement, Afrique du Sud) se félicite de la manière dont les mandants de l'OIT ont réagi aux décisions adoptées par le Conseil d'administration et de déclare solidaire des travailleurs du Myanmar dans leur lutte contre le travail forcé. Le gouvernement de l'Afrique du Sud est entièrement favorable au maintien des mesures qui ont été prises aussi longtemps que le Myanmar restera intransigeant et refusera de renoncer au comportement abject qui a conduit à leur adoption. Par souci de justice, les droits des travailleurs doivent être protégés car il font partie intégrante des droits de l'homme. L'orateur demande à l'OIT de maintenir les mesures adoptées à l'encontre du gouvernement du Myanmar et, en même temps, de redoubler d'efforts pour aider ce gouvernement à adopter une attitude qui conduise au rétablissement de l'état de droit.
M. Rimkunas (gouvernement, Lituanie) indique qu'il approuve sans réserve la déclaration faite au nom des gouvernements de l'Union européenne. Il se félicite des efforts entrepris par le gouvernement du Myanmar pour éliminer le travail forcé, efforts qui devraient se poursuivre en étroite coopération avec l'OIT.
M. Hendrasmoro (gouvernement, Indonésie) souligne que son gouvernement ne trouve aucune excuse aux pratiques qui favorisent ou encouragent le travail forcé au Myanmar, telles qu'elles ont été décrites par la commission d'enquête. Toutefois, il est également convaincu que des mesures promotionnelles et un effort de coopération sont bien préférables à des sanctions pour régler ce problème. Les sanctions se sont en effet à plusieurs reprises révélées inefficaces pour garantir le respect d'une convention ou d'une recommandation de l'OIT; elles ont eu pour seul effet de créer des divisions et des conflits au sein de l'Organisation.
L'orateur se félicite donc que les voies de communication entre le Directeur général et le gouvernement du Myanmar n'aient pas été coupées. Ces échanges démontrent que l'OIT et le gouvernement du Myanmar sont l'un et l'autre conscients de l'importance de préserver des possibilités de dialogue et de coopération pour régler le problème. L'orateur félicite le Directeur général qui a montré qu'il est prêt à coopérer avec le gouvernement du Myanmar en vue d'assurer l'application des recommandations de la commission d'enquête.
Le gouvernement de l'Indonésie a été encouragé par les assurances données par le gouvernement du Myanmar qu'il poursuivrait ses efforts pour éliminer le travail forcé et promulguer une législation qui rende cette pratique illégale. L'orateur estime que, si le dispositif mis en place par le gouvernement est appliqué, la situation du Myanmar sera nettement meilleure en ce qui concerne le travail forcé.
M. Vaish (gouvernement, Inde) souligne que son gouvernement a toujours été résolument opposé à la pratique du travail forcé et qu'il estime que les pays qui adhèrent de leur plein gré à des conventions de l'OIT doivent les appliquer. Il a aussi toujours souligné que la meilleure manière de promouvoir les objectifs de l'OIT passe par le dialogue et la coopération technique et non par des mesures punitives ou par la menace de leur utilisation. Il a donc prôné un dialogue constructif, assorti d'une assistance technique, entre l'OIT et le gouvernement du Myanmar. Convaincu des vertus du dialogue et de la persuasion, le gouvernement de l'Inde félicite le Directeur général d'avoir repris langue avec le gouvernement du Myanmar et souhaite que ses efforts soient couronnés de succès.
L'orateur fait observer que le Bureau indique au paragraphe 4 de son document que le Directeur général a écrit à 59 organisations internationales, dont le FMI, la Banque mondiale et l'OMC. A son avis, cette communication n'aurait dû être adressée qu'aux organisations avec lesquelles l'OIT a noué des relations conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l'article 12 de la Constitution, et avec l'accord du Conseil d'administration. L'orateur demande donc au Bureau d'expliquer les critères utilisés pour choisir les organisations auxquelles les informations ont été communiquées. Il importe que ces critères soient bien clairs afin d'éviter tout risque de controverse ou de confusion à l'avenir.
Le représentant du Directeur général (M. Tapiola, Directeur général adjoint) souligne que le paragraphe 1 de l'article 12 de la Constitution, qui dispose que l'OIT "collaborera ... avec toute organisation internationale générale chargée de coordonner les activités d'organisations de droit international public ayant des tâches spécialisées", ne limite pas cette coopération aux organisations avec lesquelles l'OIT a conclu des accords spécifiques. Dans le cas d'espèce, les informations ont été adressées à toutes les organisations internationales invitées à la Conférence internationale du Travail et aux réunions régionales de l'OIT.
Le Président indique que la seule chose que le Conseil d'administration est appelé à faire est de prier le Directeur général de transmettre le rapport du Bureau à la Commission de l'application des normes de la Conférence, ainsi qu'il est proposé au paragraphe 67. Personne ne s'est déclaré en désaccord avec cette proposition. Durant les débats, une grande importance a été accordée à la question de l'évaluation et de la vérification, et le Directeur général devrait donc poursuivre dans cette voie. Ce sera probablement l'un des aspects cruciaux examinés à la Conférence.
M. Brett (travailleur, Royaume-Uni; Vice-président travailleur) déclare s'attendre à ce que le rapport qui sera transmis à la Conférence soit une version à jour qui tienne compte des faits nouveaux qui auront lieu entre maintenant et l'ouverture de la Conférence.
Les travailleurs ont noté qu'il ressort des réponses de certains gouvernements que ces derniers se sont contentés de transmettre la communication du Directeur général aux organisations nationales d'employeurs et de travailleurs, en escomptant qu'elles prendraient les mesures nécessaires. Cela traduit apparemment un malentendu fondamental de leur part. Il est bien entendu souhaitable que les partenaires sociaux soient associés à toute mesure collective ou individuelle qui pourrait être prise, mais, aux termes de la résolution de la Conférence, ce sont les gouvernements qui sont au premier chef responsables de réexaminer leurs relations avec le Myanmar et de prendre des mesures concrètes. L'orateur indique qu'il souhaiterait donc entendre des gouvernements concernés qu'ils agissent par eux-mêmes et qu'ils ne se contentent pas de penser que des mesures seront prises par les seules organisations d'employeurs et de travailleurs.
Le Conseil d'administration prend note du rapport et des addenda 1 et 2. Il prie le Directeur général de transmettre à la Commission de l'application des normes de la Conférence le rapport ainsi que le compte rendu de son examen, avec toute autre information susceptible d'éclairer ses discussions. La Commission de la Conférence sera saisie du rapport du CEACR ainsi que de toute autre information pertinente.
C. App./D.7
E. Développements intervenus depuis la 280e session du Conseil d'administration: Arrangements relatifs à une évaluation objective de la situation en matière de travail forcé suite aux mesures adoptées par les autorités du Myanmar
(Mission à Yangon, 17-19 mai 2001)
Tout en considérant que les conditions n'étaient pas réunies pour décider que l'application des mesures prévues par la Conférence dans sa résolution du mois de juin dernier était inappropriée, le Conseil d'administration avait noté, lors de sa 279e session (novembre 2000), que le Directeur général devrait néanmoins continuer à accorder la coopération du BIT au gouvernement du Myanmar à seule fin de promouvoir la mise en uvre complète des recommandations de la commission d'enquête.
Lors de la 280e session du Conseil d'administration en mars 2001, le Directeur général a, en ouvrant le débat sur le rapport relatif à la mise en uvre des mesures décidées par la Conférence (document GB.280/6), informé le Conseil d'administration des efforts qu'il avait déployés auprès des autorités du Myanmar pour s'acquitter de ce deuxième volet de son mandat. Dans une lettre qu'il avait adressée le 1er mars au ministre du Travail (annexe 1), il avait ainsi exprimé sa conviction que lesdites autorités ne sauraient s'attendre à obtenir un quelconque crédit pour le dispositif et les mesures subséquentes qu'elles assuraient avoir prises en l'absence d'une évaluation objective par l'OIT de leur mise en uvre pratique et de leur impact réel sur la situation du travail forcé. A la suite de cette lettre, il avait reçu la visite du ministre adjoint des Affaires étrangères du Myanmar, M. Khin Maung Win, le 22 mars 2001. Au terme d'une discussion très franche, le ministre avait indiqué que les autorités étaient disposées à engager rapidement les discussions au sujet des modalités d'une telle évaluation.
Ces informations ont été accueillies avec intérêt, et le Conseil d'administration a décidé que tout développement qui pourrait intervenir à ce sujet devrait être reflété dans le rapport dont la Commission de l'application des conventions et recommandations de la Conférence internationale du Travail doit être saisie à sa session de 2001, conformément au paragraphe 1 (a) de la résolution adoptée en juin 2000. Le présent rapport donne suite à cette décision. Il a pour objet de rendre compte des développements intervenus depuis la dernière session du Conseil, et en particulier de l'origine et des résultats de la mission qui s'est rendue à Yangon du 17 au 19 mai dernier en vue d'arrêter les modalités d'une évaluation objective de la mise en uvre et de l'impact du dispositif introduit depuis le mois d'octobre 2000.
L'origine de la visite
Lors de son entretien avec le Directeur général, le 22 mars dernier, M. Khin Maung Win avait précisé que le représentant permanent du Myanmar à Genève, Monsieur l'ambassadeur U Mya Than, serait chargé d'engager les discussions avec le Bureau au sujet de ces modalités. Au cours de ces discussions préliminaires, il est rapidement apparu irréaliste d'espérer que les deux phases successives de la mise en uvre (définition des modalités concrètes et, en cas d'accord, conduite de l'évaluation proprement dite) puissent être franchies avant la Conférence compte tenu des contraintes logistiques et des délais inhérents à la seconde phase. Les deux parties se sont donc fixé pour objectif de parvenir, avant la Conférence internationale du Travail, à un engagement ferme et précis des autorités au sujet des modalités, étant entendu que cet engagement serait suivi dès que possible de l'évaluation proprement dite de sorte que le Conseil d'administration puisse lui-même être saisi de ses résultats lors de sa session de novembre 2001. La lettre du ministre du Travail du 26 avril (annexe 2) et la réponse du Directeur général en date du 10 mai (annexe 3) fournissent les deux jalons principaux de l'évolution des discussions à ce sujet.
Il résulte en fait de la lettre du Directeur général en date du 10 mai que pour finaliser en temps utile, c'est-à-dire avant la Conférence, les modalités en question et obtenir un engagement précis et définitif à partir des paramètres préalablement discutés avec l'Ambassadeur (qui serait chargé de l'évaluation?; quand et pour combien de temps?; avec quelles garanties pratiques et juridiques?) il serait indispensable de tenir des discussions sur place à Yangon avec l'ensemble des ministères concernés.
C'est ainsi qu'une nouvelle mission s'est rendue à Yangon du 17 au 19 mai 2001. Elle était composée comme suit:
-- M. Francis Maupain, Représentant du Directeur général
-- M. Dominick Devlin, Conseiller juridique
-- M. Rueben Dudley, Directeur adjoint du bureau régional pour l'Asie et le Pacifique
-- M. Richard Horsey, secrétaire
Déroulement de la mission et résultats
Comme les deux précédentes, cette mission a suscité un intérêt certain au sein de la communauté diplomatique de Yangon ainsi que parmi les agences des Nations Unies. Pour répondre à cet intérêt, la mission a, malgré le peu de temps disponible, tenu à organiser avec l'assistance du Représentant du PNUD plusieurs séances d'information. Le programme détaillé de la visite figure en annexe 4.
Lors de la première séance de travail après l'arrivée de la mission à Yangon, les représentants des divers ministères concernés ont informé cette dernière qu'ils avaient pris diverses mesures depuis l'adoption du dispositif législatif, exécutif et administratif. Pour illustrer ces efforts, le secrétaire du "Comité de mise en uvre de la convention no 29", U. Soe Nyunt, a mentionné les actions entreprises pour faire connaître les mesures dans le public ainsi que les visites qui avaient été organisées dans différentes parties du pays pour examiner les réalités de la situation à la lumière des allégations antérieures.
La mission a pour sa part souligné que l'objet de la présente visite était tout à fait distinct de celui des précédentes. Il ne s'agit pas de revenir sur les questions de fond qui avaient fait l'objet du rapport de la commission d'enquête. Bien qu'il soit loisible au gouvernement de le demander conformément à l'article 34 de la Constitution de l'OIT, il ne s'agit pas non plus de mettre sur pied une nouvelle commission d'enquête. Comme cela était indiqué dans la lettre du 1er mars du Directeur général ainsi que dans sa présentation orale au Conseil d'administration du mois de mars, l'objet de l'évaluation objective dont il est maintenant question est plus spécifique: il s'agit d'apprécier l'effectivité de la mise en uvre du dispositif législatif, exécutif et administratif susvisé ainsi que son impact réel sur la situation du travail forcé dans le pays.
La mission a attiré l'attention à cet égard sur le fait que la Commission d'experts pour l'application des conventions avait eu l'occasion de se pencher sur ce dispositif lors de sa dernière réunion en décembre, et l'observation qu'elle a formulée dans le rapport dont se trouvera saisie la Conférence offre des indications précieuses quant aux points qui mériteraient de retenir l'attention à l'occasion d'une telle évaluation. La commission d'experts, tout en exprimant le regret que les avis de la mission de coopération technique d'octobre 2000 n'aient pas été intégralement pris en compte, a en effet noté que le dispositif pourrait "constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique s'il était de bonne foi traduit dans les actes non seulement par les autorités locales habilitées à réquisitionner des personnes pour un travail au titre de la loi sur les villages et sur les villes, mais aussi par les autorités civiles et militaires habilitées à demander l'assistance des autorités locales en vertu des lois susmentionnées". La commission avait dans cette perspective fourni diverses indications quant aux mesures supplémentaires qui paraîtraient appropriées (rapport III (1A), 2001, p. 163).
L'objet et le champ de l'évaluation étant ainsi précisés, la mission a souligné que ses modalités étaient en fait nécessairement et étroitement dictées par la nature de la tâche à accomplir: elles devaient offrir toutes garanties quant à l'objectivité et à la crédibilité de l'évaluation. En conséquence, les membres de l'équipe chargée de cette évaluation devraient être désignés par le Directeur général en se fondant exclusivement sur leurs qualifications reconnues d'impartialité, d'expérience et de compétence techniques, y compris la connaissance des réalités de la région; la durée de la mission devrait être suffisante pour leur permettre de se forger une opinion sans méconnaître les limites inhérentes à la disponibilité de personnalités susceptibles d'être très sollicitées; et, enfin, la mission devrait se voir reconnaître une discrétion complète quant à l'organisation de son programme d'activités et de rencontres. La mission a exprimé l'espoir que ces paramètres puissent, au terme de la visite, se traduire dans un texte précis.
Ces indications ont donné lieu à un débat au terme duquel la mission a préparé un premier projet de protocole d'entente ("Understanding"). Ce projet a fait l'objet de multiples propositions d'amendements et de contre-amendements jusqu'à une heure assez avancée dans l'après-midi du samedi 19 mai. Deux difficultés principales se sont présentées. La première se rapportait à la désignation par le Directeur général des membres de la Mission de haut niveau (MHN), à laquelle les autorités souhaitaient donner leur accord préalable. Cette revendication n'a pas été acceptée. Il a toutefois été indiqué que l'expression "qualifications reconnues" figurant au point 1 du texte signifiait que les qualifications requises des membres de la MHN sont censées être reconnues de tous, y compris les autorités du Myanmar. Cette interprétation a été ultérieurement confirmée par écrit à la demande des autorités.
La deuxième difficulté se rapportait à la discrétion reconnue à la MHN de fixer le programme qu'elle jugerait convenable pour conduire son évaluation. La solution retenue, si elle reconnaît que cette discrétion peut être limitée par des considérations de sécurité - y compris dans l'intérêt des membres de l'équipe -, précise que ces considérations doivent être "valides" et prévoit un mécanisme pour régler les difficultés qui pourraient se présenter à cet égard: elle évoque en effet l'intervention d'un "facilitateur" reconnu comme objectif et bien informé par les deux parties. Sur cette base, le texte complet d'un protocole d'entente a finalement pu être arrêté.
Avant de quitter Yangon, la mission a encore été reçue par le ministre adjoint des Affaires étrangères, M. Khin Maung Win. Ce dernier qui avait été tenu régulièrement informé des discussions, s'est félicité d'apprendre qu'elles avaient finalement abouti à un protocole d'entente. Il a exprimé la volonté du gouvernement de faire de cette évaluation un succès et a chargé la mission de transmettre au Directeur général son désir d'aider autant que possible la MHN à atteindre ses objectifs. Si des difficultés devaient se présenter, elles seraient discutées ouvertement. Le gouvernement a la ferme volonté de régler ce problème.
Le texte final tel qu'il a été paraphé par les deux parties à l'aéroport après avoir été entre-temps mis au point figure en annexe 5. Avant de prendre congé, le Représentant du Directeur général a encore fait part de sa préoccupation que la teneur du protocole d'entente et sa signification soient portées à la connaissance de la Secrétaire générale du NLD. A défaut d'avoir pu le faire directement compte tenu des diverses contraintes auxquelles elle avait dû faire face, la mission en avait chargé, de la part du Directeur général, M. Léon de Riedmatten, ancien délégué du CICR, actuellement représentant du Centre pour le dialogue humanitaire.
La mission ne saurait conclure son rapport sans remercier M. Patrice C ur-Bizot, Coordonnateur résident des Nations Unies, et son assistante, Mme Jeanne Lennkh, pour le précieux appui qu'ils ont apporté à l'organisation du programme et au bon déroulement de la mission, ainsi que M. Léon de Riedmatten, pour les avis très utiles dont il a fait bénéficier la mission grâce à l'expérience et au rôle uniques qui sont les siens. La mission s'est aussi sentie encouragée par les contacts qu'elle a eus auprès des organisations internationales représentées à Yangon ainsi qu'avec l'actuel délégué du CICR, M. Michel Ducraux. Il en résulte que dans l'ensemble ces organisations sont très désireuses de contribuer de manière concrète au succès de cette entreprise, et en particulier de faciliter, dans la mesure de leur connaissance et de leurs moyens, la mise au point et la réalisation du programme de la future Mission de haut niveau.
Genève, le 31 mai 2001.
Il est toutefois clair que le Myanmar ne peut espérer obtenir de crédit pour ces efforts en l'absence d'une évaluation objective de leur application et de leurs résultats dans la pratique. Seule l'OIT est en mesure de réaliser une telle évaluation avec l'autorité voulue pour qu'elle ait des conséquences juridiques, pratiques et politiques au plan international. Cela est d'autant plus important si l'on tient compte du flot continu d'informations provenant de sources variées concernant les problèmes en question.
Communication en date du 26 avril 2001 du ministre du Travail du gouvernement du Myanmar au Directeur général
J'accuse réception de votre lettre du 1er mars 2001 répondant à mon courrier du 11 février 2001.
Je note avec satisfaction que, comme vous me l'assurez dans votre lettre, le texte de la déclaration de mon ambassadeur ainsi que nos vues sur la question du travail forcé au Myanmar se reflètent dans la documentation dont le Conseil d'administration du BIT a été saisi le mois dernier. Je me félicite que le BIT réaffirme sa volonté d'engager des discussions sur la forme et les modalités selon lesquelles une évaluation objective de l'application et des résultats du dispositif législatif, gouvernemental et administratif que nous avons mis en place pour éliminer le travail forcé au Myanmar. A cet égard, je souhaite souligner à nouveau que le Myanmar est disposé à accepter occasionnellement un représentant de l'OIT basé au bureau régional à Bangkok ou à Genève ainsi qu'une personne mutuellement acceptable. Nous sommes convaincus que ce représentant serait capable d'évaluer objectivement la mise en uvre des mesures susmentionnées ainsi que leur impact. Pour que cette évaluation soit généralement effective, il faudrait, de notre point de vue, qu'y soit associée une entité indépendante et objective.
J'espère que les discussions continuent entre vous et notre représentant permanent, Monsieur l'ambassadeur U Mya Than, notre point de contact désigné dans cette affaire, et déboucheront sur des résultats significatifs avant la 89e session de la Conférence internationale du Travail (CIT) dans notre recherche d'une forme ou de modalités qui soit acceptable pour les deux parties.
Je peux vous assurer que, quel que soit le résultat de cet effort conjoint, nous continuerons à prendre des mesures pour que le travail forcé cesse d'exister au Myanmar tant en droit qu'en pratique et pour appliquer le dispositif que nous avons mis en place.
Je vous prie d'agréer, ...
(Signé) Major général Tin Ngwe,
Communication en date du 10 mai 2001 du Directeur général au ministre du Travail du gouvernement du Myanmar
Je vous remercie de votre lettre du 26 avril répondant à mon courrier du 1er mars à la lumière des événements ultérieurs, et notamment des débats à la 280e session du Conseil d'administration.
Comme il est envisagé dans votre lettre, les discussions se sont poursuivies avec M. l'ambassadeur Mya Than en vue de préciser le processus par lequel l'évaluation objective que je mentionne dans ma lettre pourrait être concrètement menée.
Il apparaît clair maintenant des deux côtés que ce processus interviendrait en deux étapes. La première consisterait à obtenir un engagement clair et ferme sur les modalités d'une telle évaluation sur la base des paramètres qui ont été exposés à l'ambassadeur. Il est tout à fait urgent de mettre au point cet engagement de sorte que, comme cela est envisagé des deux côtés, il puisse en être rendu compte à la Conférence en juin. Pour y arriver aussi rapidement que possible, mes représentants - dont les noms étaient communiqués à l'ambassadeur - sont disposés à se rendre à Yangon dès que les autorités compétentes auront confirmé leur intérêt, mais pas plus tard qu'au début de la semaine prochaine.
Si cette première étape arrive à son terme, la deuxième consisterait à appliquer l'évaluation objective elle-même, conformément aux modalités susmentionnées. Cette évaluation devrait se dérouler au plus tard à la fin de l'été de manière qu'un rapport puisse être préparé pour le Conseil d'administration en novembre. J'espère que ces éclaircissements aideront les autorités à déterminer rapidement leur position sur cette question.
Je vous prie d'agréer...
Liste des réunions organisées
La mission a tenu 16 réunions à Yangon en trois jours. Elle a rencontré le vice-ministre des Affaires étrangères, de hauts fonctionnaires de trois ministères (Affaires étrangères, Intérieur, Travail), du bureau du Procureur général et du bureau des études stratégiques, des représentants de 26 missions diplomatiques et de 7 organismes des Nations Unies, un représentant du Centre pour le dialogue humanitaire qui se trouve à Genève, et un représentant du CICR.
Jeudi 17 mai 2001
9 h 40, arrivée à Yangon
10 h 30 - 11 heures, Traders Hotel
Patrice C ur-Bizot Coordonnateur résident des Nations Unies
Jeanne Lennkh Assistante du Coordonnateur résident
des Nations Unies
Léon de Riedmatten Centre pour le dialogue humanitaire
11 heures - 13 heures, Traders Hotel
Soe Nyunt Directeur général, Département du travail
Win Mya Directeur général, Département des
organisations internationales et de
l'économie, ministère des Affaires
étrangères
Tun Shin Directeur général, bureau du Procureur
général
Lt-Col. Hla Min Chef adjoint, Département des affaires
internationales, bureau des études
stratégiques
Aung Thein Directeur général, Département de
l'administration générale, ministère
de l'Intérieur
Zaw Win Chef d'Etat major, Forces de police
14 h 30 - 16 h 30, Traders Hotel
internationales, bureau des
études stratégiques
Aung Thein Directeur général, Département
de l'administration générale, ministère
17 heures - 18 heures, Ambassade du Japon
Shigeru Tsumori Ambassadeur du Japon
Kiyoshi Koinuma Chef de mission adjoint
Chef de la section politique
Naoki Ito Conseiller
Vendredi 18 mai 2001
8 heures - 9 heures, Traders Hotel
Trevor Wilson Ambassadeur d'Australie
John Jenkins Ambassadeur du Royaume-Uni
Bernard Lelarge Deuxième secrétaire, ambassade de France
Hauke Kracht Troisième secrétaire, ambassade
d'Allemagne
Francesco Fedeli Chargé d'affaires a.i., Italie
Karl Wycoff Chargé d'affaires a.i., Etats-Unis
10 heures - 10 h 30, Traders Hotel
12 h 15 - 13 h 15, bureau du PNUD
Membres de l'équipe de pays des Nations Unies:
Francis Rinville Représentant de la FAO
Guillaume Le Hegarat Représentant assistant du PNUCID
Rajiv Kapur Chef de mission du HCR
Dr Rosella Morelli Fonctionnaire, UNICEF
Jos Vandelear Fonctionnaire, OMS
Bradley Guerrant Coordonnateur pour les situations
d'urgence, PAM
Renata Dessallien Représentante résidente adjointe, PNUD
13 h 15 - 14 h 15, bureau du PNUD
Janeh Sukaimi Premier secrétaire, ambassade du Brunei
In May Conseiller, ambassade du Cambodge
Nasaruddin
Mochtar Koro Ambassadeur d'Indonésie
Ly Bounkham Ambassadeur de la République démocratique
populaire lao
Dato Mohammad Bin Noh Ambassadeur de Malaisie
Pablito Mendoza Troisième secrétaire, ambassade
des Philippines
Simon de Cruz Ambassadeur de Singapour
Buskorn Prugsapongse Conseiller, ambassade de Thaïlande
Nguyen Van Thanh Deuxième secrétaire, ambassade du Viet Nam
Wang Zongying Premier secrétaire, ambassade de Chine
Shyam Saran Ambassadeur de l'Inde
Naoki Ito Conseiller, ambassade du Japon
Chung Jung-Gum Ambassadeur de la République de Corée
14 h 30 - 16 heures, Traders Hotel
18 heures - 20 heures, Traders Hotel
Samedi 19 mai 2001
8 heures - 9 heures, bureau du PNUD
Mahfuzur Rahman Premier secrétaire, ambassade
du Bangladesh
Harishchandra Ghimire Chargé d'affaires a.i., Népal
Yusuf Shah Ambassadeur du Pakistan
Ubayasekara Mapa Ambassadeur de Sri Lanka
Farouk Riad
Hassan Mabrouk Ambassadeur d'Egypte
Dimitry Darchenkov Deuxième secrétaire, ambassade de
la Fédération de Russie
Vladimir Stamenovic Attaché, ambassade de Yougoslavie
(L'ambassadeur d'Israël s'était fait excuser.)
10 h 45 - 13 h 30, Traders Hotel
16 h 15 - 17 h 15, Traders Hotel
17 h 30 - 17 h 45, ministère des Affaires étrangères
Khin Maung Win Vice-ministre des Affaires étrangères
Fonctionnaires du ministère
18 heures - 18 h 30, Traders Hotel
Michel Ducraux Chef de délégation, CICR
19 heures - 19 h 30, aéroport de Yangon
(réunion pour parapher le protocole d'entente)
Protocole d'entente sur une évaluation objective par l'OIT
Ayant à l'esprit les discussions antérieures, dont il a été rendu compte au Conseil d'administration à sa session de mars 2001, sur la possibilité que l'OIT procède à une évaluation objective de la mise en uvre pratique et de l'impact réel du dispositif législatif, gouvernemental et administratif dont le gouvernement a fait état, dans le cadre de l'objectif global d'éradication du travail forcé, en droit et dans la pratique;
Considérant qu'il est maintenant souhaitable que cette évaluation soit effectuée dès que possible;
Notant l'importance à cet égard de l'observation faite par la Commission d'experts du BIT pour l'application des conventions et recommandations dans son rapport de 2001;
Conscient de la nécessité de respecter la souveraineté du pays ainsi que l'indépendance de l'Organisation dans l'accomplissement de ses fonctions,
Le gouvernement du Myanmar accepte de recevoir une mission de haut niveau pour qu'elle réalise cette évaluation objective, les conditions suivantes devant être respectées pour en garantir la crédibilité:
1. La mission de haut niveau sera composée de personnalités éminentes nommées par le Directeur général du BIT eu égard à leurs qualifications reconnues, à leur impartialité et à leur connaissance de la région.
2. Compte tenu des conditions climatiques saisonnières, l'évaluation sera réalisée en septembre 2001. Le temps nécessaire pour l'effectuer au Myanmar pourrait aller jusqu'à trois semaines.
3. Les membres de la mission de haut niveau bénéficieront, aux fins et pendant la durée celle-ci, de la protection et du statut accordés aux fonctionnaires des Nations Unies d'un rang comparable.
4. La mission de haut niveau aura toute latitude pour établir et mener à bien son programme de travail, ses réunions et ses visites, en tenant compte notamment des indications qui figurent dans l'observation susmentionnée de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations et sous la seule réserve de considérations valides de sécurité. A cette fin, la mission bénéficiera de la pleine collaboration des autorités compétentes du Myanmar. Au cours de l'établissement et de la mise en uvre du programme de la mission, celle-ci et le gouvernement pourront faire appel à un facilitateur reconnu par toutes les parties intéressées comme étant un intermédiaire bien informé et équitable.
5. A partir des résultats de l'évaluation, la mission de haut niveau pourra formuler les avis et commentaires qu'elle jugera appropriés.
6. Le rapport de la mission de haut niveau sera communiqué dans les meilleurs délais au Directeur général et au gouvernement, et transmis au Conseil d'administration pour qu'il l'examine à sa session de novembre 2001.
19 mai 2001.
(Visas) U Soe Nyunt, (Président de l'équipe de négociation du Myanmar).
Francis Maupain.
Document GB.279/6/1 et ses trois addenda.
Note 2
Le texte de la résolution est reproduit à l'annexe 6.
Note 3
Les recommandations de la commission d'enquête sont reproduites à l'annexe 7.
Note 4
Cette lettre a été envoyée aux 59 organisations suivantes: Organisation des Nations Unies, HCR, UNICEF, PNUD, FNUAP, HCADH, CNUCED, PAM, PNUE, Office pour le contrôle des drogues et la prévention du crime, UNRWA, ONUSIDA, Commission économique pour l'Afrique, CEE, Commission sociale et économique pour l'Asie et le Pacifique, Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes, Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie occidentale, FAO, OMS, UNESCO, ONUDI, AIEA, OMPI, OACI, UPU, OMI, OMC, UIT, FIDA, OPS, FMI, Banque mondiale, OMC, OCDE, Commission européenne, Conseil de l'Europe, Banque africaine de développement, Banque asiatique de développement, Banque interaméricaine de développement, Banque européenne pour la reconstruction et le développement, Banque de développement des Caraïbes, Ligue des Etats arabes, Organisation de l'unité africaine, CARICOM, Organisation des Etats américains, ANASE, ASACR, Communauté andine, SELA, ALADI, Conseil nordique, OCI, CERN, CEDEAO, Organisation arabe du travail, Organisation mondiale du tourisme, OIM, Organisation asiatique de productivité et Union interparlementaire.
Note 5
Des informations sur la pratique du travail forcé jusqu'en novembre 2001 figurent dans le rapport 2001 de la CEACR. L'observation concernant spécifiquement l'application de la convention no 29 au Myanmar est reproduite à l'annexe 8.
Note 6
Cette déclaration à la 279e session du Conseil d'administration n'a pu être prononcée et est reproduite ici à titre d'information.
Note 7
Annexé à la lettre en date du 6 décembre 2000 du représentant permanent de la mission du Myanmar.
Note 8
Paragraphe 539 du rapport de la Commission d'enquête instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Bulletin officiel, vol. LXXXI, 1998, série B, supplément spécial. Le texte intégral de ce rapport peut être consulté sur le site de l'OIT (http://www.ilo.org/public/french/standards/relm/gb/docs/gb273/Myanma r.html).
Note 9
Document de l'ONU A/55/359.
Note 10
Document de l'ONU A/55/509.
Note 11
CIT, 88e session, Genève, 2000, Compte rendu provisoire no 8.
Note 12
Document GB.279/6/1 et Add.1.
La commission a consacré une session spéciale à l'application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, au Myanmar, à la suite de la résolution relative à l'application de l'article 33 de la Constitution que la Conférence internationale du travail avait adoptée à sa 88e session. La commission a pris note des informations orales et écrites présentées par le gouvernement ainsi que des discussions ayant eu lieu en son sein. Elle a rappelé qu'elle a discuté de ce cas à de nombreuses reprises, avant que ne soit constituée une commission d'enquête, en application de l'article 26 de la Constitution, et elle a déploré l'absence de progrès dans l'élimination du travail forcé et obligatoire. Elle a pris note de l'effet donné aux appels lancés par le Directeur général aux mandants de l'Organisation - gouvernements, organisations d'employeurs et de travailleurs - ainsi qu'à d'autres organisations internationales afin qu'ils examinent les relations qu'ils peuvent entretenir avec le gouvernement du Myanmar pour s'assurer que ce gouvernement ne puisse mettre à profit lesdites relations pour perpétuer ou développer le système de travail forcé ou obligatoire visé par la commission d'enquête. Elle a également noté que, selon les informations soumises au Conseil d'administration en mars 2001 et à la présente commission, le travail forcé ou obligatoire continue d'être imposé aux citoyens du pays. Elle a rappelé que la commission d'enquête avait exhorté le gouvernement à: mettre un terme à tout recours au travail forcé ou obligatoire; modifier sa législation de manière à rendre ces pratiques illégales et sanctionner tous ceux qui auraient imposé un tel travail. La commission a noté que l'arrêté no 1/99, complété par l'arrêté du 27 octobre 2000, constitue une base pertinente mais insuffisante d'amélioration de la législation. Les conditions énoncées par la commission d'experts devraient être appliquées de bonne foi et des mesures complémentaires seraient nécessaires pour garantir qu'elles soient effectivement suivies d'effets. La commission s'est félicitée de la décision du gouvernement de rétablir sa coopération avec l'OIT. A cet égard, elle a noté avec intérêt qu'une récente mission de représentants du Directeur général (17-19 mai 2001) s'est conclue par une entente sur les modalités d'une évaluation objective de la situation du travail forcé à la suite des mesures énoncées par le gouvernement du Myanmar, évaluation dont les conclusions seront soumises au Conseil d'administration à sa session de novembre 2001. Relevant qu'il ne s'agit là que d'un premier pas, la commission a lancé à nouveau un appel au gouvernement afin que celui-ci: prenne de toute urgence les mesures en son pouvoir pour éliminer le travail forcé et obligatoire sous toutes ses formes, en suivant les recommandations de la commission d'enquête; sanctionne les responsables de l'imposition du travail forcé et coopère pleinement avec l'équipe de haut niveau qui doit procéder à l'évaluation objective susmentionnée. La commission a souligné que, compte tenu des discussions ayant eu lieu en son sein, l'équipe de haut niveau devra: i) être maître de l'organisation de son action; ii) avoir une composition appropriée lui permettant de répartir la tâche entre ses membres; iii) être composée de membres désignés à la seule discrétion du Directeur général; iv) pouvoir mener ses investigations dans tous les lieux du pays qu'elle jugera nécessaire de visiter et, v) avoir accès sans restriction à toutes les sources d'information nécessaires. Toutes les personnes fournissant des informations à l'équipe devront jouir d'une protection complète. La commission a noté qu'il a été demandé au Conseil économique et social des Nations Unies de discuter de la situation à sa session de juillet 2001. La commission a prié le Conseil d'administration d'examiner à sa session de novembre 2001 le rapport de l'équipe de haut niveau afin d'étudier à ce stade les nouvelles mesures qui pourraient se révéler nécessaires de la part du gouvernement ou de l'OIT, et elle a rappelé que le gouvernement devra soumettre à la commission d'experts, en vue de sa prochaine session, un rapport détaillé sur toutes les mesures adoptées pour assurer le respect de la convention dans la législation et dans la pratique.
Le gouvernement a communiqué par écrit les informations suivantes:
La mission permanente de l'Union du Myanmar auprès de l'Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève présente ses compliments au BIT et, se référant au rapport du Directeur général aux membres du Conseil d'administration sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar suite aux recommandations de la commission d'enquête instituée pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, en date du 21 mai 1999, a l'honneur de faire parvenir ci-joint un mémorandum en réponse au rapport susmentionné.
La mission permanente de l'Union du Myanmar demande que ce mémorandum soit considéré comme un document officiel en réponse au rapport du Directeur général pour être utilisé dans toute procédure devant le Conseil d'administration et d'autres réunions appropriées.
Le Myanmar est devenu Membre de l'OIT quelques mois après avoir accédé à l'indépendance, en 1948. Membre responsable, ce pays entretient de longue date des liens de coopération avec l'OIT et a réglé plusieurs questions dans le meilleur esprit de coopération.
Les gouvernements successifs du Myanmar ont eu, de manière constante, une politique de promotion du bien-être des travailleurs. Ce pays est déterminé à bâtir une société placée sous le signe de la paix et de la prospérité et assurant la promotion et la protection pleine et entière des droits des femmes et des enfants.
Depuis le début des années quatre-vingt-dix, des allégations tendent à faire croire que le Myanmar recourt au travail forcé. Le Myanmar est intimement convaincu que ces allégations sont essentiellement la conséquence de conceptions erronées et d'une incompréhension à l'égard de la situation de ce pays et de la mentalité de son peuple.
Comme une bonne infrastructure est essentielle pour le développement économique, le gouvernement du Myanmar a mis un accent particulier sur ce secteur. De là, un effort substantiel a été entrepris pour améliorer l'infrastructure de l'économie du pays par la construction de routes, ponts, barrages et retenues. Consciente des bienfaits que ces projets apportent au pays, la population fournit traditionnellement son travail à titre de contribution afin que ces projets puissent être menés à bien le plus rapidement possible. A cela s'ajoute que, dans la pensée de ce peuple, "chacun récolte ce qu'il a semé avant sa mort dans le monde d'ici-bas ou au cours des cycles à venir de son existence".
Il s'agit là du fond de la pensée de notre peuple, et celui qui ne comprend pas ces éléments est porté à formuler toutes sortes d'allégations erronées.
Les organisations internationales ne devraient pas servir de tribune pour soumettre des Etats Membres aux pressions de groupes puissants et influents animés par des objectifs politiques.
Or, comme il vient d'être dit, depuis les années quatre-vingt-dix, le Myanmar fait l'objet de pressions politiques de la part de certains groupes, qui ne comprennent pas la réalité du pays. Ceux-ci se fondent essentiellement sur des informations émanant d'éléments antigouvernementaux. Ils avancent ces allégations à motivation politique dans le but de ternir l'image du gouvernement, en exploitant chaque occasion de le faire, notamment dans diverses instances internationales.
Agissant dans le but d'exercer continuellement sur le Myanmar des pressions politiques, les éléments antigouvernementaux ont réussi, par des allégations mensongères, à persuader quelques membres du groupe des travailleurs à engager une procédure de plainte contre le Myanmar sur le fondement de l'article 26 de la Constitution de l'OIT. Cette initiative a entraîné la mise en place en 1996 d'une commission d'enquête. Mais le Myanmar a tenu bon face à ces allégations. Malgré cela, la commission, se fondant sur des rapports émanant de certaines organisations terroristes, opérant à l'intérieur comme à l'extérieur du Myanmar, ou sur des informations émanant de certaines autres sources, a formulé en juillet 1998 des recommandations tendant à ce que:
1) le Myanmar rende la loi de 1907 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes conformes à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Certaines dispositions de cette loi devraient également être rendues conformes avec la convention;
2) des mesures soient prises pour mettre un terme aux pratiques en vigueur, par la voie d'instruments publics devant être rendus publics et non de directives secrètes;
3) des sanctions soient prises à l'égard de ceux qui se seront rendus coupables d'avoir imposé un travail forcé ou obligatoire.
Comme nous l'avons dit précédemment, le Myanmar bâtit une nation moderne et une société qui sera placée sous le signe de la paix et de la prospérité. Dans ce contexte, il était pleinement conscient que les recommandations qui précèdent étaient fondées sur des allégations erronées. Cependant, dans un esprit de coopération, de bonne volonté et de sincérité à l'égard de l'OIT, il n'a jamais rejeté ces recommandations. De plus, mû par son droit souverain et indépendant, il a entrepris de réviser les anciennes lois qui ne sont pas conformes avec la situation actuelle. Conformément au droit international public, le Myanmar est parfaitement fondé à mener cette tâche de son propre chef.
Le Myanmar a jugé qu'il ne lui serait pas trop difficile de faire droit à ces recommandations. Dans le même temps, il convient de ne pas perdre de vue que le Myanmar compte non moins de 135 ethnies différentes et que son système économique est en voie de transformation.
Lorsque le Myanmar a reçu les recommandations et le rapport de la commission, il a adressé au BIT plusieurs communications démontrant que ces recommandations n'avaient pas été négligées. Ces communications sont, en l'occurrence, les lettres datées des 23 septembre 1998, 4 et 18 février 1999, 12 et 18 mai 1999.
Comme on peut le constater, au besoin, le ministère du Travail a déclaré dans sa lettre datée du 23 septembre 1998: "Nous ne voyons aucune difficulté à mettre en oeuvre les recommandations contenues dans le paragraphe 539 du rapport...".
Fidèle à sa parole, le Myanmar a pris résolument ses dispositions, conformément à son système juridique, et a agi conformément au droit du pays.
Les recommandations de la commission tendaient à ce que, tout d'abord, la loi sur les villages et la loi sur les villes soient rendues conformes à la convention no 29. La teneur de la recommandation avec laquelle cette "conformité" doit s'opérer rentre dans le domaine de la convention no 29. En revanche, c'est dans le champ d'application de la législation nationale ou de la législation municipale que rentrent les modalités d'application des dispositions de la convention qui ne sont pas du domaine de la convention. A ce stade, il convient de souligner que, dans le monde, les systèmes juridiques diffèrent d'un Etat à l'autre. Un système juridique d'un Etat ne peut pas être identique à celui d'un autre. Le modus operandi selon lequel la teneur de la convention s'applique en droit national peut être différent d'un Etat à l'autre.
Sur la base de son propre système juridique, le Myanmar a dû, le 14 mai 1999, mettre un terme aux dispositions mises en cause des deux lois précitées par la voie d'une ordonnance du législatif enjoignant le ministère compétent de ne pas exercer les pouvoirs qui lui sont conférés par lesdites dispositions de ces deux lois. Dans le système juridique du Myanmar, le Conseil d'Etat pour la paix et le développement est le législatif. Comme dans tous les autres pays où s'applique le droit constitutionnel, ce conseil est au-dessus de l'exécutif. L'exécutif englobe plusieurs ministères, dont celui des affaires intérieures, de la compétence duquel relève l'application de ces deux lois. Le 14 mai 1999, le Conseil d'Etat pour la paix et le développement a publié un mémorandum en application duquel le ministère des Affaires intérieures a pris, le même jour, l'ordonnance no 1/99 enjoignant toutes les autorités exécutives de ne pas exercer les pouvoirs que leur confèrent l'article 7, alinéa l) l) et m), l'article 9 et l'article 9A de la loi sur les villes. La même consigne s'applique en ce qui concerne l'article 8, alinéa 1) g), n) et o), l'article 11 d) et l'article 12 de la loi sur les villages. Cette ordonnance a force de loi pour empêcher toutes les autorités exécutives d'exercer les pouvoirs litigieux de ces dispositions.
Ainsi, selon notre système juridique, cette mesure est prise en conformité avec la recommandation y relative de la commission d'enquête.
La deuxième recommandation de la commission d'enquête stipule que la décision doit être rendue publique. L'ordonnance a été rendue publique et communiquée immédiatement à 16 autorités. En outre, elle sera publiée dans la Gazette officielle du Myanmar, comme le sont toutes les lois. Il existe une transparence absolue. Pour information, nous signalons que l'ordonnance a été communiquée pour action aux seize autorités suivantes:
1) Le bureau du président du Conseil d'Etat pour la paix et le développement.
2) Le bureau du Conseil d'Etat pour la paix et le développement.
3) Le bureau du gouvernement.
4) La Cour suprême.
5) Le bureau du Procureur général.
6) Le bureau du commissaire aux comptes.
7) Le Conseil de sélection et de formation des services publics.
8) Tous les ministères.
9) Le directeur général du département de l'administration générale (notifié pour information puis diffusion de cette ordonnance aux fonctionnaires de l'administration qui lui sont subordonnés aux niveaux de l'Etat, de la division, du district et de la localité urbaine).
10) Le commandant en chef de la police du Myanmar (notifié pour information puis diffusion de cette ordonnance aux départements et organismes compétents relevant de son autorité).
11) Le directeur général du Bureau of Special Investigation.
12) Le directeur général du département des prisons.
13) Les différents conseils pour la paix et le développement aux niveaux de l'Etat et des divisions.
14) Tous les conseils pour la paix et le développement du niveau du district.
15) Tous les conseils pour la paix et le développement du niveau de la localité urbaine (notifiés pour information puis diffusion de cette ordonnance aux chefs des conseils pour la paix et le développement du niveau des villages relevant de leur compétence).
16) Le directeur général de l'Office de l'impression et des publications (avec demande de publication dans la Gazette officielle du Myanmar).
Le Myanmar est donc intimement convaincu que la deuxième recommandation se trouve pleinement appliquée.
La troisième recommandation tend à ce que des sanctions soient prises contre les personnes reconnues coupables d'infraction à l'article 374 du Code pénal. Il y a lieu d'appeler l'attention sur le paragraphe 6 de l'ordonnance susmentionnée, qui dispose: "Toute personne qui ne se conforme pas à la présente ordonnance s'expose à ce que des sanctions soient prises à son égard sur la base de la législation en vigueur.". Cela veut dire sans aucune équivoque que les contrevenants seront punis conformément à l'article 374 du Code pénal, qui a la teneur suivante:
"Imposition illégale de travail obligatoire
374. Quiconque contraint illégalement une personne, quelle qu'elle soit, à travailler contre sa volonté sera puni d'une peine d'emprisonnement de l'une ou l'autre nature pour une durée pouvant atteindre un an, d'une amende, ou des deux peines."
Malgré ces dispositions et mesures positives prises résolument et de manière effective par le gouvernement, le BIT déclare dans son "Rapport du Directeur général aux membres du Conseil d'administration sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar pour mettre en oeuvre les recommandations de la commission d'enquête chargée d'examiner la plainte concernant l'exécution de de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930", en date du 21 mai 1999:
1) La loi sur les villages et la loi sur les villes n'ont pas été "modifiées".
2) Dans la pratique, le travail forcé ou obligatoire continue d'être imposé de manière généralisée.
3) Aucune mesure ne semble avoir été prise sur la base de l'article 374 du Code pénal pour punir ceux qui ont imposé du travail forcé.
Les éléments sur lesquels le rapport se fonde sont inexacts. Les faits allégués dans le rapport reposent sur les allégations visant des événements antérieurs au 14 mai 1999. Il n'est pas une seule allégation qui porte sur des éléments postérieurs à l'ordonnance du 14 mai 1999. Ainsi, en termes juridiques, on peut donc dire de cette situation que "les faits parlent d'eux-mêmes". Si l'un quelconque des faits allégués était censé être postérieur au 14 mai 1999, les autorités auraient dû en être directement informées.
Le Myanmar, au contraire, continue d'être à la fois objectif et résolu dans son processus de construction d'une nation moderne, placée sous le signe de la paix et de la prospérité, en tenant compte des circonstances telles qu'elles se présentent aujourd'hui. De plus, il est actuellement en train de se doter d'une nouvelle Constitution, qui permettra, une fois achevée, d'ajuster toutes les lois pour répondre aux nécessités d'une nation moderne.
Dans le même temps, le Myanmar se donne pour règle d'avoir "de la charité à l'égard de chacun et de la malice à l'égard de personne". Il existe, en droit, une maxime selon laquelle la justice doit non seulement être faite mais aussi être vue dans son accomplissement. La justice doit également être équitable. Le Myanmar appelle donc tous les Membres de l'OIT à comprendre les faits réels et leur demande leur soutien dans ses discussions au sein de la CIT.
Observations et conclusions
L'observation la plus pertinente qu'il convienne de faire au sujet du rapport du BIT daté du 21 mai 1999 concerne les trois points négatifs contenus dans le paragraphe 61.
Bien que ces trois points se trouvent abordés et contrefaits comme il convient par l'ordonnance no 1/99 du 14 mai 1999 prise par le ministère des Affaires intérieures du gouvernement de l'Union du Myanmar, c'est-à-dire l'ordonnance enjoignant de ne pas exercer les pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages, le rapport du Directeur général reste muet quant aux explications que contient cette ordonnance, laquelle est simplement annexée audit rapport en tant qu'annexe III.
Il convient de rappeler que, dans une communication antérieure du Directeur général du BIT, plusieurs échéances ont été mentionnées en ce qui concerne la réponse attendue de la part du Myanmar. Il convient de noter que l'ordonnance no 1/99 a été publiée le 14 mai 1999, que ce texte contient notamment des dispositions explicites prévoyant que les paragraphes critiqués de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages ne doivent pas être appliquées; qu'il doit être mis un terme immédiatement à tout travail non rémunéré ou obligatoire; que toute personne qui ne s'y conformerait pas s'exposerait à ce que des mesures soient prises à son encontre; que cette ordonnance n'est pas une ordonnance secrète mais qu'elle est diffusée, entre autres, à tous les ministères; qu'elle sera publiée ouvertement et publiquement dans la Gazette officielle du Myanmar afin que chacun puisse en prendre connaissance et qu'enfin elle fait droit à toutes les recommandations de la commission d'enquête.
Par conséquent, on peut constater que le Myanmar a pris des mesures spécifiques et adéquates pour répondre et rectifier les dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages et qu'il a également pris les autres mesures préconisées dans les recommandations de la commission d'enquête. Toutes ces dispositions ont été prises en temps opportun.
Mais la question qui se pose est de savoir pourquoi les mesures prises par les autorités du Myanmar n'ont pas été mentionnées dans le rapport du Directeur général, lequel comporte en conséquence les trois observations négatives visées au paragraphe 61 du rapport.
La réponse à cette question réside apparemment dans le fait que l'ordonnance no 1/99 n'a été publiée que le 14 mai, soit cinq jours ouvrables seulement avant l'échéance du 21 mai. On peut conclure que des contraintes de temps se sont opposées à un examen de cette ordonnance et ont conduit les auteurs de ce rapport à se borner à y joindre cette ordonnance en tant qu'annexe III.
Néanmoins, cette contrainte de temps ne peut être invoquée comme un argument selon lequel le Myanmar n'aurait pas fait droit aux recommandations.
Le rapport en question contient les erreurs et omissions que nous venons de signaler.
En outre, il y a lieu de formuler les observations et conclusions suivantes: le rapport est tissé d'accusations infondées et partiales dirigées délibérément contre le Myanmar et son gouvernement.
Les faits allégués dans ce rapport sont à l'évidence des accusations mensongères concoctées dans l'intention maligne d'amener la destruction du Myanmar par des organismes d'expatriés du Myanmar à l'étranger et des groupes renégats qui sont opposés à toutes les mesures prises par le gouvernement du Myanmar. Ces allégations reposent également sur des accusations manifestement mensongères, formulées oralement, par écrit et sous la forme d'annonces par la Ligue nationale pour la démocratie (LND), dont le seul objectif est de susciter des difficultés au gouvernement pour le mettre dans une position intenable.
Aujourd'hui, le gouvernement mène à bien des projets d'équipement en procédant à une planification systématique et à des allocations budgétaires appropriées. De plus, l'essentiel des travaux accomplis dans le cadre de ces projets l'est en ayant recours à des moyens et équipements mécanisés. Tout projet dans le cadre duquel de la main-d'oeuvre doit nécessairement être employée comporte un volet budgétaire consacré au paiement des salaires des ouvriers. Tout ouvrier ainsi employé perçoit un salaire équitable et il n'existe pas un seul cas ni le moindre commencement de preuve que du travail forcé serait pratiqué dans le cadre de ces projets.
Le travail nécessité par la construction des grands axes routiers dans diverses régions, notamment de l'axe routier dans l'Etat de Shan, ainsi que par la construction des voies ferrées, est accompli par des membres des forces armées. Pas un seul civil n'est employé dans ce cadre.
Les seuls travaux auxquels la population soit associée se limitent au creusement de petits canaux d'irrigation destinés à acheminer l'eau jusqu'à leurs lopins privés. Les grands projets poursuivis par l'Etat pour la réalisation de canaux d'irrigation et de barrages ne font pas appel à des civils qui seraient soumis à un travail forcé ou qui seraient réquisitionnés. Comme indiqué, lorsque des personnes travaillent, elles le font dans leur propre intérêt et conformément à leurs intentions et à leurs horaires propres, sur leurs lopins de terre particuliers.
Les projets d'équipement de l'Etat ne font appel qu'à des membres des forces armées. Ainsi, l'accusation selon laquelle le gouvernement aurait recours au travail forcé dans le cadre de ces projets est à la fois sans fondement et manifestement erronée. Comme seuls des membres des forces armées sont employés dans le cadre de la réalisation des axes ferroviaires et routiers, prétendre que l'on a recours au travail forcé est absolument insensé.
Les autres projets en cours, tels que ceux concernant la bonification des terres incultes ainsi que la construction de logements et d'hôtels, correspondent tous à des opérations réalisées par des entreprises privées, qui y ont investi leurs capitaux. Le recours à du travail forcé dans ces cas est absolument exclu. En fait, lorsque des conflits du travail surviennent, le gouvernement prend fermement position en faveur des travailleurs en vue du règlement de ces conflits.
Pour ce qui est de l'accusation selon laquelle l'armée réquisitionne des porteurs dans le cadre de ses opérations militaires, on peut dire que telle était autrefois la pratique, lorsque les mouvements de rébellion étaient chroniques. Mais le fait demeure que ces porteurs étaient toujours rémunérés et que le budget de la défense a toujours comporté une imputation de crédits pour le paiement de ces salaires. Ces porteurs jouissaient des mêmes droits que les soldats. Ils percevaient les mêmes rations ainsi que la même solde. En outre, un porteur victime d'une blessure obtenait une indemnisation égale à celle d'un soldat en service et avait droit aux mêmes indemnités de compensation pour la dureté de la mission. Mais cette question des porteurs servant l'armée n'a plus lieu d'être et ne se pose plus depuis que les opérations militaires ne constituent plus une nécessité impérieuse.
Le gouvernement du Myanmar rejette toutes les informations mensongères délibérément fabriquées par la LND.
Une organisation respectée telle que l'OIT ne devrait aucunement ajouter foi aux fausses nouvelles et mensonges fabriqués de toutes pièces par ceux qui n'ont qu'hostilité et ressentiments pour le Myanmar et son gouvernement actuel et qui ne sont animés que par la volonté de détruire ce pays et mettre à mal son gouvernement.
Enfin, il y a lieu de répéter que le Myanmar, en tant que Membre responsable de l'OIT, entretient de longue date des relations de coopération avec cette organisation et a, par le passé, réglé les questions dans un esprit de coopération. Cet esprit de coopération demeurera à l'avenir.
Le nombre considérable de conventions notamment de conventions fondamentales de l'OIT que le Myanmar a ratifiées atteste de cette coopération.
Aujourd'hui, l'OIT s'emploie à inciter et persuader les pays qui ne l'ont pas encore fait à ratifier ou autrement accéder aux conventions auxquelles ils ne sont pas encore devenus parties.
Dans ce climat favorable qui a été créé par les Membres de l'OIT, il serait assurément malencontreux, voire contre-productif, qu'un nombre croissant de Membres de l'Organisation deviennent parties aux conventions fondamentales alors qu'un Membre, en l'occurrence l'Union du Myanmar, ayant ratifié une convention fondamentale, se trouve injustement désigné et critiqué.
Cette attitude contribuera assurément à inciter ceux qui n'ont pas encore signé de conventions fondamentales à laisser les choses en l'état et même à les dissuader de signer de telles conventions, au détriment de l'ensemble des Membres de l'OIT.
En outre, un représentant gouvernemental a réitéré devant la commission l'information écrite complète fournie par son gouvernement sur le cas figurant ci-dessous.
Les membres travailleurs ont rappelé qu'au cours de la discussion générale le membre gouvernemental indien a indiqué que la procédure constitutionnelle basée sur l'article 26 constitue une mesure extrême, conçue pour des situations extrêmes qui n'existent que lorsqu'un Etat Membre omet sciemment et délibérément de prendre des mesures pour faire droit aux suggestions et recommandations des organes de contrôle. Il a conclu que l'article 26 ne devrait être appliqué qu'en dernier recours. De ce fait, le gouvernement du Myanmar justifie expressément les mesures les plus fortes dont disposent les organes de contrôle, en raison de son refus persistant de satisfaire à ses obligations en vertu de la convention.
Depuis plus de trente-cinq ans, la commission d'experts dénonce les méfaits du travail forcé en Birmanie. Cependant, aucune mesure quelle qu'elle soit n'a été prise par le gouvernement pour mettre un terme à cette pratique. Au contraire, ces dernières années, ce fléau s'est aggravé. Aujourd'hui, pour la quatrième fois en huit ans, la Commission de la Conférence examine ce cas. Dans le même temps, une réclamation sur la base de l'article 24 a été déclarée recevable par le Conseil d'administration; ce dernier a adopté de manière tripartite, en 1994, des conclusions confirmant que le Myanmar est en situation de violation fondamentale de la convention et a appelé celui-ci à procéder aux changements nécessaires de sa législation, à faire respecter la loi et à punir ceux qui se sont rendus coupables d'une exploitation continuelle du travail forcé dans l'ensemble du pays. A nouveau, aucune mesure n'a été prise par le gouvernement, que ce soit en droit ou dans la pratique.
La Commission de la Conférence s'est déclarée profondément préoccupée par la gravité de la situation du pays en 1995 et en 1996. Elle a repris dans des termes encore plus vifs son exhortation au gouvernement d'abolir toute les dispositions juridiques et de renoncer immédiatement à toutes les pratiques contraires à la convention. Pour souligner ses préoccupations, elle a fait mention de ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport et a cité, en 1996, ce cas comme un cas de défaillance persistante dans la mise en oeuvre d'une convention ratifiée. Il n'en est toujours résulté aucune réaction de la part du gouvernement, si ce ne sont de nouvelles dénégations, de nouvelles temporisations et de nouveaux faux-fuyants. Enfin, après que l'on eut tenté, pendant de nombreuses années, de persuader le gouvernement de satisfaire à ses obligations contractuelles et mettre un terme au calvaire de centaines de milliers de victimes de ces pratiques innommables, une plainte a été présentée, sur le fondement de l'article 26 de la Constitution, puis rapidement déclarée recevable par le Conseil d'administration. En mars 1997, une commission d'enquête a été constituée, qui a siégé à huis clos en novembre 1997 avant d'effectuer une mission dans la région au début de 1998. Le régime militaire aurait pu participer aux audiences et présenter ses propres témoins. Il aurait pu coopérer avec la commission d'enquête lorsque celle-ci s'est rendue dans la région. Mais il a choisi de ne pas le faire et a même empêché la commission d'enquête de pénétrer sur le territoire.
Malgré cette absence totale de coopération, la commission d'enquête a mené ses travaux à bien et constitué un dossier de près de 400 pages. Elle a conclu que les faits démontrent amplement le recours généralisé au travail forcé imposé à la population civile dans l'ensemble du Myanmar par les autorités et les forces armées dans un grand nombre de domaines: portage, travaux d'infrastructure, entretien et services auxiliaires de camps militaires, autres tâches d'appui de l'armée, travaux agricoles et autres opérations de production dirigés par les autorités ou par l'armée, parfois pour le compte de particuliers, ou encore construction et entretien d'axes routiers, de voies ferrées, de ponts ou autres ouvrages d'infrastructure. La commission d'enquête a également conclu que le travail forcé dans le pays est largement accompli par des femmes, des enfants et des personnes âgées, le fardeau de cette tâche pesant plus particulièrement sur les groupes ethniques non birmans, notamment dans les zones marquées par une forte présence militaire.
Les recommandations de la commission d'enquête ont été reprises par la commission d'experts. Ces recommandations appelaient instamment le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour que les textes législatifs pertinents, notamment la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient rendus conformes à la convention, comme le gouvernement promet de le faire depuis plus de 30 ans. La commission d'enquête a également insisté pour qu'il ne soit plus imposé de travail forcé par les autorités, en particulier par l'armée. Enfin, la commission d'enquête a insisté sur le fait que la faculté d'imposer du travail obligatoire serait réputée persister tant que des sanctions pénales n'auraient pas été prises à l'égard des responsables. Des informations étaient donc demandées quant à savoir si d'éventuels coupables avaient effectivement été sanctionnés.
A sa session de mars 1999, les membres du Conseil d'administration, organe tripartite, ont appelé le gouvernement à procéder aux modifications nécessaires de sa législation afin de la rendre conforme à la convention avant le 1er mai 1999. Ils ont également prié le Directeur général d'établir, pour le 21 mai 1999, un rapport concernant les mesures prises par le gouvernement pour faire suite aux recommandations de la commission d'enquête. Il y a lieu de féliciter le Directeur général du Bureau d'avoir pu établir dans un délai aussi court un rapport aussi exhaustif et aussi bien documenté.
Le Directeur général avait invité le gouvernement à lui faire connaître de manière détaillée pour le 3 mai 1999 au plus tard toutes mesures prises en réponse à chacune des recommandations de la commission d'enquête. Il avait également invité les Etats Membres et les organisations de travailleurs et d'employeurs à fournir des informations. Quatorze gouvernements, ainsi que la FAO, le HCR, l'ONUDI, le FMI et la Banque mondiale, de nombreuses organisations de travailleurs et d'employeurs, de nombreuses organisations s'occupant des droits de l'homme, ainsi que la Fédération en exil des syndicats de la Birmanie ont répondu à cet appel. Le rapport du Directeur général contenait de nouveaux éléments étayant les conclusions de la commission d'enquête en démontrant que diverses formes de travail forcé continuent de sévir dans l'ensemble du pays. Il apportait en outre des éléments démontrant le recours persistant au travail forcé dans pratiquement chacun des Etats à composante ethnique du pays comme moyen de réprimer les aspirations de ces minorités. Il contenait enfin des éléments concernant la persistance du recours au travail forcé dans les zones birmanes. La portée et l'étendue des informations contenues dans le rapport de la commission d'enquête et dans celui du Directeur général sont impressionnantes.
Les informations qui précèdent mettent en perspective les éléments fournis par le gouvernement. Celui-ci indique dans une lettre du 18 mai 1999 adressée au Directeur général que l'ordonnance no 1/99 enjoint aux autorités compétentes de ne pas se prévaloir des pouvoirs que leur confèrent la loi sur les villes et la loi sur les villages. Cette lettre est la reconnaissance implicite par le gouvernement qu'il n'avait pas modifié sa législation au 1er mai 1999, comme le Conseil d'administration lui avait demandé de le faire. Le fait est que le Directeur général constate dans son rapport que cette ordonnance ne correspond pas à une modification de ces deux lois, comme la commission d'enquête l'avait recommandé. Il s'ajoute à cela que cette ordonnance est susceptible d'être annulée à tout moment.
Le représentant gouvernemental n'a pas fourni non plus d'information nouvelle permettant de penser que les autres recommandations auraient été appliquées. Le seul élément nouveau avancé par le représentant du gouvernement est d'avoir suggéré que tous les éléments précédemment constatés sont antérieurs au 14 mai 1999 et que l'entrée en vigueur de la nouvelle ordonnance aurait radicalement changé la situation.
Les membres travailleurs rappellent que, pas plus tard que le 1er mai 1999, le général Than Shwe, président du Conseil d'Etat pour la paix et le développement, a incité les travailleurs à se défier des nouveaux colonialistes qui s'ingèrent dans les organisations internationales et les manipulent sous couvert d'oeuvrer pour la sauvegarde des droits de l'homme et des droits des travailleurs. Deux semaines plus tard, lors d'une conférence de presse tenue dans le cadre de la treizième réunion des ministres du travail de l'ANASE, le régime militaire a encore réitéré son déni total de l'existence de travail forcé en Birmanie, arguant à nouveau que c'est l'une des plus nobles traditions du peuple birman que de faire don librement de son travail, dans la conviction que ce travail bénévole vaut à chacun des bienfaits, ici bas comme dans une existence future. Ces commentaires démontrent la véritable nature de la coopération du régime avec l'OIT.
Pour conclure, les membres travailleurs ont cité les conclusions de la commission d'enquête, laquelle a considéré que "l'impunité avec laquelle les fonctionnaires du gouvernement, et en particulier les membres des forces armées, traitent la population civile comme une réserve illimitée de travailleurs forcés non rémunérés et de serviteurs à leur disposition fait partie d'un système politique fondé sur l'utilisation de la force et de l'intimidation pour dénier au peuple du Myanmar la démocratie et le respect du droit. L'expérience de ces dernières années tend à prouver que l'établissement d'un gouvernement librement choisi par le peuple et la soumission de toute autorité publique au droit sont, en pratique, des conditions indispensables à l'élimination du travail forcé au Myanmar." La commission d'enquête exprimait l'espoir que, dans un proche avenir, l'ordre ancien ferait place à une ère nouvelle, dans laquelle toute personne aurait la possibilité de vivre dans la dignité et de s'épanouir pleinement et en toute liberté et où nul ne serait asservi. Elle concluait que cela ne pourrait advenir que si la démocratie était rétablie et que si le peuple dans son ensemble pouvait exercer le pouvoir pour le bien de tous. Les membres travailleurs réaffirment que, à moins que des changements fondamentaux ne se produisent, il restera illusoire de penser délivrer le pays de plusieurs décennies de travail forcé.
Les membres employeurs ont noté que la commission d'experts a commencé à formuler des observations à ce sujet au début des années quatre-vingt-dix et que ce cas n'est pas nouveau pour la Commission de la Conférence, ce qui a été indiqué par le passé dans des paragraphes spéciaux. Entre-temps, une procédure de réclamation a été entreprise sur la base de l'article 24 de la Constitution, de même qu'une procédure de plainte sur la base de l'article 26. Les membres employeurs ont fait ressortir que l'ensemble des informations portées à leur connaissance ne font que confirmer les appréhensions quant à la gravité de la situation au Myanmar. Ils constatent que cette situation est hélas fort simple et que, conformément à ce que fait ressortir le rapport de la commission d'enquête: "De très nombreux éléments montrent que les autorités civiles et militaires recourent de manière généralisée au travail forcé, y soumettant la population civile dans tout le Myanmar, pour des missions telles que le portage, les travaux d'infrastructure, l'entretien et les services auxiliaires des camps militaires, d'autres missions d'appui de l'armée, des travaux agricoles et forestiers, et d'autres opérations de production menées sous la direction des autorités civiles ou militaires, parfois pour le compte de particuliers, de même que dans le cadre de la construction et de l'entretien de routes, voies ferrées ou ponts, pour d'autres travaux d'infrastructure ou pour toute une série d'autres tâches... Le travail forcé au Myanmar est fréquemment accompli par des femmes, des enfants et des personnes âgées, ainsi que par des personnes qui seraient normalement inaptes au travail... Toutes les informations et tous les éléments dont la commission a été saisie démontrent le mépris total des autorités pour la sécurité, la santé ainsi que les besoins essentiels des personnes accomplissant un travail forcé ou obligatoire... De nombreuses personnes sont ainsi blessées ou y laissent la vie...".
Les membres employeurs ont rappelé que les préoccupations soulevées découlent de certaines dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes et, plus spécifiquement, sur les problèmes de pratique. S'il existe une législation prévoyant des sanctions à l'encontre de ceux qui auront imposé du travail à autrui contre sa volonté (article 374 du Code pénal), cette disposition, convient-il de souligner, n'a pas été appliquée et ce sont les autorités qui ordonnent et organisent le travail forcé.
Les membres employeurs ont souligné qu'une commission d'enquête emploie rarement des termes aussi vifs que ceux du rapport sur le travail forcé au Myanmar, lequel fait état d'un recours "généralisé et systématique" au travail forcé ou obligatoire "dans un mépris total de la dignité humaine, de la sécurité, de la santé et des besoins essentiels de la population du Myanmar". Ils ont souligné les trois principales recommandations de la commission d'enquête: i) que les textes législatifs pertinents soient modifiés comme le demande la commission d'experts et comme le gouvernement le promet depuis plus de trente ans; ii) que, dans la pratique, il ne soit effectivement plus fait recours, par les autorités, notamment par l'armée, au travail forcé ou obligatoire; iii) que les sanctions pouvant être prises en vertu du Code pénal soient strictement appliquées, étant donné que la faculté d'imposer du travail obligatoire sera réputée n'avoir pas cessé tant que ceux qui y recourent n'auront pas fait l'objet d'une procédure pénale. De l'avis des membres employeurs, du fait que, pour le gouvernement, la distinction entre travail ordinaire et travail forcé soit devenue si floue, comme en atteste la déclaration du représentant gouvernemental, selon laquelle la population fait traditionnellement don de son travail afin que l'amélioration des infrastructures du pays puisse s'accomplir plus rapidement, des efforts considérables devront être entrepris pour changer les comportements et faire connaître les changements de pratique à la population. Ils ont ensuite évoqué les déclarations du représentant gouvernemental selon lesquelles le rapport de la commission d'enquête serait un tissu d'accusations infondées et partiales et les faits allégués constitueraient des accusations manifestement erronées, à motivation politique.
Les membres employeurs ont estimé que cela illustrait l'attitude du gouvernement pour qui aucun changement n'était nécessaire ni ne serait entrepris. Cependant, le gouvernement a également fait part de son intention de coopérer avec l'OIT en vue de se conformer aux recommandations. La réponse du gouvernement illustre une fois de plus son attitude contradictoire et son manque de crédibilité. Se référant à l'ordonnance no 1/99 du 14 mai 1999, les membres employeurs se sont demandé si un tel instrument pouvait modifier une loi et si le gouvernement avait vraiment l'intention de se conformer aux recommandations. L'ordonnance dispose que toute loi en vigueur doit être appliquée si les dispositions de l'ordonnance elle-même ne sont pas exécutées. Cela démontre clairement que le gouvernement n'a pas l'intention d'abroger ni d'amender la législation en question.
En ce qui concerne la recommandation que des mesures concrètes soient prises pour mettre un terme aux pratiques en vigueur par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l'ensemble de la population, le représentant gouvernemental a indiqué que la nouvelle ordonnance avait été communiquée à 16 autorités et qu'il s'était donc conformé à cette exigence. Le représentant gouvernemental a également déclaré que toute personne ne respectant pas la nouvelle ordonnance s'exposerait à des sanctions. Toutefois, de telles déclarations prouvent le refus persistant du gouvernement d'amender la législation et d'imposer des sanctions en application des lois existantes.
Les membres employeurs ont exprimé le regret que la déclaration du représentant gouvernemental n'indique pas clairement une volonté politique de modifier la législation et la pratique nationales. Ils ont invité la commission à prendre note avec un profond regret du recours persistant au travail forcé au Myanmar et à exhorter le gouvernement de la manière la plus ferme possible à respecter ses obligations.
Le membre gouvernemental de la Chine a déclaré souhaiter que la commission prenne note des nouveaux progrès accom- plis par le gouvernement dans le sens de l'application de la convention, comme fait état par le représentant gouvernemental de ce pays.
S'exprimant également au nom des membres gouvernementaux de l'Allemagne, de l'Autriche, de la Belgique, du Canada, du Danemark, de l'Espagne, de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège, des Pays-Bas, du Portugal et de la Suède, le membre gouvernemental du Royaume-Uni a déclaré que le rapport de la commission d'experts apporte une fois de plus des preuves accablantes du recours au travail forcé et d'autres violations des droits de l'homme en Birmanie. A de nombreuses reprises, tant au sein de la Commission de la Conférence que dans d'autres enceintes, les gouvernements au nom desquels il s'est exprimé ont fait part de leur sérieuse préoccupation face à cette situation déplorable.
La commission d'enquête a conclu que le régime militaire de Birmanie a le pouvoir absolu d'exploiter le travail forcé sous la menace de torture, de viols et de meurtres et que la charge du travail forcé dans le pays est supportée de manière disproportionnée par les minorités ethniques et d'autres groupes vulnérables, y compris les femmes, les enfants et les personnes âgées. La commission d'enquête a recommandé que le recours au travail forcé cesse immédiatement et que les autorités mettent leur législation en conformité avec la convention et appliquent les sanctions pénales existantes. En dépit des assurances répétées du représentant gouvernemental selon lesquelles le régime prend des mesures en vue de mettre fin au travail forcé, le rapport récent du Directeur général démontre, une fois de plus, que les recommandations de la commission d'enquête n'ont pas été suivies d'effet et que le peuple birman continue à être victime de violations des droits de l'homme graves et systématiques.
En adoptant la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail, les 174 Etats Membres de l'OIT ont réaffirmé leur engagement envers les principes essentiels de l'Organisation relatifs aux droits de l'homme, y compris l'abolition du travail forcé. L'Organisation tout entière et son système de contrôle risquent d'être discrédités si des mesures décisives ne sont pas prises pour assurer que les autorités birmanes respectent sans délai leurs obligations vis-à-vis de l'OIT. Il convient d'examiner toutes les options existantes pour garantir le respect par les autorités de Birmanie de leurs obligations envers l'Organisation, et la Commission de la Conférence devrait donner un mandat le plus clair possible pour l'adoption de telles mesures.
Le membre gouvernemental du Canada a noté une fois de plus que la situation en Birmanie reste inchangée. La liberté d'association n'est pas respectée, le recours au travail forcé et au travail des enfants est largement répandu. La Birmanie viole de la manière la plus continue et la plus grave les droits fondamentaux des travailleurs et les normes internationales du travail et continue à manifester son plus profond mépris à l'égard des procédures de l'OIT et de l'opinion de la communauté internationale, comme le démontre la totale absence de sincérité et de fondement de la déclaration du représentant gouvernemental.
Ce cas a été discuté au sein de l'OIT depuis 1987, mais les autorités birmanes n'ont pris aucune mesure concrète afin de se conformer aux recommandations de la commission d'enquête. Les autorités birmanes sont par conséquent instamment priées de prendre des mesures concrètes et immédiates afin de mettre un terme à la situation inacceptable qui prévaut dans le pays. L'oratrice a partagé l'opinion du membre gouvernemental du Royaume-Uni selon laquelle l'Organisation tout entière et son système de contrôle risquent d'être discrédités si des mesures décisives ne sont pas prises pour assurer que les autorités birmanes respectent sans délai leurs obligations vis-à-vis de l'OIT. Il convient d'examiner toutes les options existantes pour garantir le respect par les autorités de Birmanie de leurs obligations envers l'Organisation.
Le membre travailleur de la Colombie a déclaré qu'il paraît incroyable qu'à la fin du XXe siècle il existe encore, au Myanmar, des conditions de travail forcé et d'esclavage. L'intervenant a rappelé que, depuis des années, la commission d'experts, la commission d'enquête et les membres de la Commission de l'application des normes de la Conférence insistent sur la nécessité impérieuse d'une solution au problème, le gouvernement de ce pays se bornant constamment à formuler des promesses qui restent sans suite. Il a rappelé que la commission d'enquête a conclu que, malgré les dénégations du gouvernement, le travail forcé existe au Myanmar et que ce travail s'étend aussi bien aux femmes et aux enfants qu'aux hommes. A son avis, il conviendrait de demander au représentant du gouvernement du Myanmar quel est le type de société qu'il entend bâtir en bafouant comme il le fait la dignité de l'être humain et jusqu'à quand les membres de la présente commission devront entendre des justifications qui n'apportent aucune solution. Pour conclure, il a invité instamment le gouvernement à renoncer à ses prises de position purement rhétoriques consistant notamment à évoquer des instruments juridiques pour prendre enfin des mesures concrètes tendant à mettre un terme au travail forcé.
Le membre travailleur de l'Irlande a déclaré que l'attitude adoptée par les autorités birmanes à l'égard de la communauté internationale en général et de l'OIT en particulier se caractérise par le subterfuge et le double langage, comme le démontre sans l'ombre d'un doute la question du travail forcé et de la non-application de la convention. La situation a été amplement décrite dans les rapports de la commission d'enquête et de la commission d'experts. La persistance du travail forcé sur une grande échelle a été largement démontrée, comme l'ont été les responsabilités personnelles et individuelles de ceux qui se sont rendus coupables de ce crime contre l'humanité. La commission d'enquête avait demandé que la loi sur les villes et la loi sur les villages soient modifiées, qu'il soit mis un terme au recours au travail forcé ou obligatoire et que des sanctions pénales soient prises en application de l'article 374 du Code pénal à l'encontre de ceux qui ont imposé du travail forcé. Comme il ressort du rapport adressé par le Directeur général au Conseil d'administration en mai 1999, ces conditions n'ont pas été satisfaites et les autorités ont une fois de plus recouru à des faux-fuyants. Dans une lettre adressée au Directeur général, elles ont déclaré que les dispositions mises en cause des deux lois susmentionnées avaient été suspendues, comme demandé par le BIT, et que cette mesure avait été largement annoncée. Or, il s'est avéré, comme l'a fait apparaître le rapport suivant du BIT, que cette mesure n'entraînait aucune conséquence pratique et qu'en outre l'annonce de ces changements avait été passée sous silence par la radio, la télévision et la presse du pays. Il ne s'agissait, donc, à l'évidence, de rien d'autre qu'un effet d'apparence, conçu pour abuser l'OIT et la communauté internationale.
L'intervenante a déclaré que ni le mouvement international des travailleurs, ni la communauté internationale ne se laisseront cependant abuser par une autre promesse. Le problème du travail forcé ne se résume pas à celui que posent la loi sur les villes et la loi sur les villages, mais au contraire ses causes profondes résultent du fait que c'est le régime lui-même qui y a recours. Le régime serait donc à même, s'il le voulait, de mettre immédiatement un terme à cette pratique.
Pour conclure, l'intervenante a déclaré que toutes les mesures possibles devront être prises par l'OIT pour que disparaisse cette pratique inqualifiable. Les constatations et conclusions de la commission d'enquête devront être largement diffusées dans l'ensemble du système des Nations Unies et, notamment, auprès des institutions actives en Birmanie. Il appartiendra à l'OIT de continuer à exercer un contrôle étroit sur cette situation tant qu'elle persistera. A cela s'ajoute que les éléments rassemblés par le BIT pourraient un jour être transmis au Tribunal pénal international. Bien au-delà de la pure violation de la convention, le travail forcé et l'esclavage constituent des crimes contre l'humanité qui doivent être condamnés en tant que tels. De plus, l'OIT devrait envisager l'annulation ou la restriction des privilèges que lui confère la qualité de Membre de l'Organisation jusqu'à ce que ce pays fasse droit aux recommandations de la commission d'enquête et respecte les normes internationales fondamentales de bienséance et de respect de l'humanité.
Le membre travailleur du Pakistan s'est rallié aux déclarations des orateurs précédents selon lesquelles la situation dans ce pays était très préoccupante. La différence ente la liberté et l'esclavage repose sur le droit de choisir librement un emploi rémunéré et productif. L'esclavage consiste à imposer un travail aux personnes concernées contre leur volonté. Tous ceux qui croient en la dignité humaine et au respect des hommes condamnent le travail forcé et l'esclavage. L'un des objectifs fondamentaux du mouvement des travailleurs dans son ensemble est justement de combattre ces fléaux qui anéantissent la dignité de l'humanité dans tous les pays. Ces principes sont à juste titre fixés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies, la Déclaration adoptée lors du Sommet social et la Déclaration de l'OIT relative aux principes fondamentaux et droits au travail. Le travail forcé est un crime contre l'humanité et doit être éliminé là où il sévit. La commission d'enquête a conclu, sans le moindre doute, que la population du Myanmar, y compris les femmes, les enfants, les personnes malades ou blessées, est forcée à exécuter un travail contre sa volonté, sous la menace de mauvais traitements, de tortures et de viols.
Bien que la commission d'enquête ait clairement indiqué que la législation devait être amendée, les autorités se sont contentées d'adopter une ordonnance qui n'a pas l'autorité juridique pour suspendre les deux lois en question. De même, aucune information n'a été fournie sur le nombre de personnes ayant été condamnées pour avoir imposé le travail forcé ni sur les autres mesures adoptées. La commission devrait exprimer sa grande préoccupation face à cette situation et demander à ce pays de prendre des mesures concrètes en vue de respecter ses obligations vis-à-vis de la communauté internationale et de donner effet aux recommandations de la commission d'enquête plutôt que de se contenter de belles paroles sur les principes en question.
Le membre travailleur du Canada a déclaré avec force que les éléments démontrent le caractère criminel d'une situation inqualifiable. Les travailleurs du Canada sont profondément indignés par l'absence de coopération du gouvernement à l'égard de l'OIT et par la persistance du travail forcé dans le pays. Dans ses informations écrites, le gouvernement a affirmé que des courants hostiles sont parvenus, par des accusations mensongères, à persuader certains membres du groupe des travailleurs d'engager une procédure de plainte sur le fondement de l'article 26 de la Constitution de l'OIT. En réalité, la plainte a été présentée à la 83e session de la CIT par 25 délégués travailleurs ayant tous été membres ou membres suppléants du Conseil d'administration. Le Conseil d'administration, organe tripartite, a quant à lui décidé à l'unanimité de déclarer la plainte recevable et d'instituer une commission d'enquête.
Conformément aux conclusions et recommandations de la commission d'enquête, le Conseil d'administration avait demandé au gouvernement de modifier la législation mise en cause avant le 1er mai 1999. Le gouvernement non seulement n'a rien fait de tel mais, selon ce qu'il ressort de ses informations écrites, semble traiter ces recommandations par le mépris. L'intervenant s'est déclaré favorable à ce que la commission adopte, pour ce cas, qui se présente comme le pire de tous, des conclusions dans les termes les plus vifs.
Le membre travailleur du Zimbabwe a rappelé que les conclusions de la commission d'enquête démontrent amplement que les autorités gouvernementales et les forces armées soumettent largement la population civile au travail forcé. Cette forme d'exploitation est utilisée à des fins diverses activités forestières, travaux agricoles, travaux d'infrastructure, entretien des voies ferrées, des axes routiers et des ponts , parfois pour le compte de particuliers. Le pire, c'est que ce travail forcé est accompli par des femmes, des enfants, des personnes âgées, y compris des personnes normalement inaptes au travail. Cette situation est absolument inacceptable, de quelque point de vue que ce soit. La commission d'enquête a également conclu que le gouvernement n'a absolument aucun égard pour la sécurité, la santé et les besoins élémentaires des personnes soumises au travail forcé. A cela s'ajoute que certaines de ces victimes du travail forcé sont en outre l'objet de sévices corporels. Contrairement aux assertions du représentant gouvernemental selon lesquelles la dénonciation de cette situation reposerait sur des allégations mensongères à motivation politique, force est de reconnaître que ce cas constitue incontestablement un cas extrême de sévices, de tortures et d'esclavage auquel le gouvernement soumet ses propres ressortissants.
L'intervenant a appelé instamment le gouvernement à prendre sans délai les mesures nécessaires pour faire droit à l'ensemble des recommandations formulées par la commission d'enquête. Il a appelé la commission à formuler ses conclusions dans les termes les plus vifs, dans l'espoir que le gouvernement finira par satisfaire à ses obligations.
Le membre travailleur de la Grèce a rappelé que tout près de Genève sévit une guerre dans laquelle la communauté internationale a décidé de défendre une minorité ethnique dont les droits étaient bafoués. Après avoir lu l'observation de la commission d'experts, il convient de s'interroger sur l'action que doit mener la communauté internationale pour défendre les ethnies dont les droits sont bafoués au Myanmar et dont la vie dépend d'une oligarchie. La commission doit-elle s'en tenir aux changements annoncés ou prendre des mesures concrètes pour que le calvaire du peuple birman cesse? Tout en soulignant que la commission n'est pas un tribunal, il a indiqué que, si elle l'était, le gouvernement serait condamné à la peine maximale. Le peuple birman a déjà souffert trop longtemps et il doit être mis fin à ces souffrances.
L'orateur a interrogé le représentant gouvernemental du Myanmar sur la situation de deux syndicalistes en lui demandant de confirmer si, et pour quels motifs, Myo Aung Thant et Khin Kyaw avaient été condamnés le 13 juin 1997 respectivement à la prison à vie plus 7 ans et à 17 années d'emprisonnement.
Le membre gouvernemental de l'Indonésie a déclaré qu'il avait suivi avec grand intérêt l'examen de ce cas devant le Conseil d'administration et la Commission de la Conférence et qu'il partageait les préoccupations exprimées par les membres employeurs et travailleurs et certains membres gouvernementaux. En mars 1999, sa délégation s'est jointe à celle de nombreux autres gouvernements pour demander au Conseil d'administration de donner du temps au gouvernement afin qu'il puisse répondre aux conclusions de la commission d'enquête. Il déclare que les préoccupations du Conseil d'administration seront également transmises au gouvernement. En mai 1999, lors d'une visite au Myanmar, il a rencontré les représentants du gouvernement et a ainsi été informé de la constitution de deux équipes nationales, l'une constituée de hauts fonctionnaires et l'autre constituée au niveau ministériel, qui sont chargées de préparer les réponses et communications relatives à ce cas, adressées à l'OIT. Ces deux équipes ont pris de nombreuses mesures en rapport avec les conclusions du Conseil d'administration et de la commission d'enquête. Avant que l'orateur ne quitte le pays, le gouvernement a pris l'ordonnance no 1/99 interdisant aux autorités exécutives d'exercer les pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi sur les villes et la loi sur les villages. Cette mesure importante semble montrer que le gouvernement prend la voie d'une action concrète. D'après les discussions informelles qu'il a eues avec les fonctionnaires du gouvernement et d'après la déclaration faite par le représentant gouvernemental, il semble que le gouvernement s'engage à revoir ces deux lois.
L'orateur est convaincu qu'après l'écoulement d'un certain laps de temps le gouvernement devrait être capable de respecter les recommandations de la commission d'enquête ainsi que la convention. Il convient toutefois de signaler que l'amendement d'une législation requiert plusieurs années. La commission devrait, en conséquence, apporter son assistance au gouvernement afin qu'il puisse poursuivre les mesures qu'il a prises.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis s'est rallié sans réserve aux déclarations des membres gouvernementaux du Royaume-Uni et du Canada et a rappelé que la commission formule depuis un certain nombre d'années des commentaires particulièrement énergiques sur cette violation flagrante de la convention par le Myanmar. Les accusations de recours généralisé, par les autorités et par les forces armées, au travail forcé imposé à la population civile sont étayées par plusieurs milliers de pages de dossiers. Ce sont des femmes, des enfants et des personnes âgées qui sont soumis à des sévices, à des viols ou qui sont assassinés.
A chacune des sessions de la Commission de la Conférence et du Conseil d'administration, les autorités promettent des changements, sans que rien ne se produise. La commission d'enquête a demandé, dans ses recommandations, qu'il soit mis immédiatement un terme à ces pratiques inavouables et elle avait fixé comme échéance pour modifier la législation le 1er mai 1999. Pour faire suite à une demande du Conseil d'administration, le Directeur général a fait paraître un rapport sur les suites données aux recommandations de la commission d'enquête. Non moins de 10 organisations internationales et 14 Etats Membres ont apporté des informations pour l'établissement de ce rapport. Le Directeur général a conclu que, malgré la promulgation de l'ordonnance du 14 mai 1999, rien n'indique que les recommandations de la commission d'enquête aient été suivies. La loi sur les villages et la loi sur les villes n'ont pas été modifiées; la pratique du travail forcé et du travail obligataire reste généralisée; aucune sanction ne semble avoir été prise sur la base de l'article 374 du Code pénal à l'encontre de ceux qui ont imposé du travail forcé. L'existence de milliers de personnes reste en péril. Les réserves de patience sont épuisées. L'heure est venue, pour l'Organisation, d'entreprendre les mesures les plus énergiques pour obtenir le respect des obligations que le gouvernement a acceptées de lui-même en ratifiant la convention.
Le membre travailleur de l'Allemagne a déclaré que, s'il fallait d'autres éléments pour prouver le manque de volonté politique du gouvernement du Myanmar pour améliorer la situation, la réaction de ce dernier face aux recommandations formulées par la commission d'enquête en avait fourni en abondance. Les informations écrites communiquées par le gouvernement montrent qu'il considère avoir donné déjà effet à la deuxième recommandation de la commission d'enquête en prenant l'ordonnance no 1/99 du 14 mai 1999. La commission d'enquête avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour s'assurer qu'aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités. Le gouvernement semble croire qu'il a résolu le problème en procédant à l'adoption d'un texte et en le transmettant à 16 autorités officielles. L'orateur se rallie à l'opinion des précédents intervenants selon laquelle la commission devrait dans ses conclusions sur ce cas recommander l'adoption des mesures les plus fermes.
En réponse, le représentant gouvernemental a déclaré qu'il avait écouté très patiemment tous les orateurs. Il faut garder à l'esprit la situation particulière des différents pays ainsi que les caractéristiques de leurs systèmes législatifs respectifs. Une convention est un traité international relevant du droit international. Cependant, chaque pays dispose de son propre système juridique national ou local par l'intermédiaire duquel sont mises en oeuvre les dispositions de la convention. Il n'existe par conséquent pas de pratique uniforme en ce qui concerne l'exécution de traités au niveau national. Le Myanmar a son propre système d'application et d'amendement de la législation. Si une volonté politique n'avait pas existé, aucune mesure n'aurait été prise.
Selon le point de vue des juristes internationaux, il n'existe pas de pratique uniforme concernant l'application au niveau local, chaque pas ayant ses propres particularités en matière de publication des traités, de reconnaissance des traités, etc. Quant à la manière dont les lois locales sont élaborées, il s'agit là d'une question interne relevant du pouvoir discrétionnaire de l'Etat et dans laquelle aucun autre Etat n'a le droit d'interférer dans la mesure où il est fait porter effet à toutes les obligations internationales de l'Etat. Le point de vue des juristes internationaux, ainsi que la pratique internationale en la matière, constituent une source du droit international.
L'arrêté 1/99 est une mesure législative d'ordre strictement interne adoptée conformément à la pratique susmentionnée: dans le système législatif du Myanmar, l'autorité législative est autorisée à amender les lois par voie d'arrêté. Elle transmet ensuite l'arrêté au ministère de l'Intérieur dans un mémorandum en vue de l'adoption d'un arrêté tendant à faire cesser l'application de la disposition incriminée contenue dans la loi sur les villages et dans la loi sur les villes. Les dispositions non conformes à la convention no 29 sont abrogées de cette manière. En vertu du modus operandi du Myanmar, certaines lois peuvent être abrogées par voie d'arrêté afin d'en assurer la conformité avec la convention. Ce droit est reconnu par la législation internationale et le Myanmar en a respecté les conditions.
Comme cela a déjà été indiqué, le Myanmar, en vertu de ses droits souverains, ainsi que du droit international, a abrogé les dispositions non conformes d'une manière admise par le droit international. L'autorité législative en a donné l'instruction et l'autorité exécutive a pris l'arrêté approprié.
Cependant, l'adoption de l'ordonnance no 1/99 constitue un progrès. L'instruction a été donnée par le pouvoir législatif et l'ordonnance a été adoptée par le pouvoir exécutif. Elle a pour effet de supprimer les dispositions litigieuses de la loi sur les villages et de la loi sur les villes. A cet égard, lors d'une conférence de presse tenue le 15 mai 1999 à l'occasion de la réunion des ministres du Travail de l'ASEAN, il a été dit que des mesures avaient été prises pour faire cesser l'application des dispositions litigieuses, en application du système juridique national. Chaque Etat est libre de donner effet aux mesures nécessaires conformément à son propre système.
En réponse aux questions du membre travailleur de la Grèce, l'orateur a affirmé que, s'il était prouvé qu'une personne a violé la loi, cette personne se verrait imposer les sanctions correspondantes. Il a déclaré qu'au Myanmar nul n'est au-dessus de la loi. Toute personne qui viole celle-ci encourt une sanction. Les personnes visées par la loi pénale sont sanctionnées en raison de la violation de celle-ci et non en tant que travailleur. Au cas où, après l'adoption de la loi, une quelconque personne aurait violé la loi sur le travail forcé, quand bien même cela ne se serait produit qu'une seule fois, les autorités du Myanmar dûment informées prendront des sanctions légales. Il a souligné que la paix règne actuellement dans le pays et que celui-ci ne mène aucune guerre, situation sans précédent depuis l'Indépendance. Si une demande officielle est faite par écrit en vue d'obtenir des informations sur ces cas, elle sera traitée avec toute l'attention requise.
L'orateur a souligné, une fois encore, les différences existant entre les systèmes juridiques et les circonstances propres à chaque pays et a réaffirmé que, en l'absence de volonté politique, l'ordonnance no 1/99 n'aurait pas été adoptée. Le Myanmar a entamé un processus d'élaboration d'une nouvelle Constitution. Après l'adoption de la Constitution, toutes les lois seront réexaminées. Les membres de la commission doivent faire preuve de compréhension face à la situation du pays. Le respect des conclusions de la commission d'enquête nécessite des modifications législatives. A cet égard, l'ordonnance no 1/99 a été rendue publique.
Au vu des mesures prises par le gouvernement pour modifier la législation, le membre gouvernemental de Sri Lanka a proposé à la commission de considérer la possibilité de fixer un délai au gouvernement pour qu'il donne effet aux recommandations de la commission d'enquête.
Le membre travailleur de la Grèce a déclaré que le représentant gouvernemental du Myanmar n'avait pas donné de réponse aux questions concernant la condamnation des deux personnes précédemment mentionnées et a souhaité que cet élément soit consigné au procès-verbal. Il s'est par ailleurs interrogé sur la nature de la paix que le gouvernement affirme vouloir instaurer dans le pays.
Les membres travailleurs, tenant compte du défaut continu de mise en oeuvre des conclusions de la commission d'enquête par le gouvernement, ont souhaité que ce cas soit mentionné dans un paragraphe spécial du rapport de la commission comme un cas de défaut continu d'application d'une convention ratifiée.
Les membres employeurs ont indiqué que ce cas était particulièrement grave, que la commission l'avait déjà traité à plusieurs reprises dans le passé et qu'elle avait exprimé sa profonde préoccupation dans un paragraphe spécial de son rapport. Par conséquent, il serait cohérent et approprié de mentionner à nouveau ce cas dans un paragraphe spécial comme un cas de défaut continu d'application d'une convention ratifiée.
La commission a décidé d'inclure ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport et de le mentionner comme un cas de défaut continu d'application d'une convention ratifiée.
La commission a pris note des informations écrites et orales communiquées par le gouvernement ainsi que de la discussion qui a suivi. En particulier, elle a pris note de l'opinion du gouvernement selon laquelle les conclusions de la commission d'enquête et de la commission d'experts sont dénuées de fondement, et le rapport du Directeur général aux membres du Conseil d'administration sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar suite aux recommandations de la commission d'enquête, daté du 21 mai 1999, est fondé sur des allégations erronées. La commission a également pris note de l'adoption de l'ordonnance no 1/99 du 14 mai 1999, laquelle enjoint les autorités compétentes de ne pas exercer les pouvoirs qui leur sont conférés par la loi sur les villes et la loi sur les villages de 1907.
La commission a rappelé la longue histoire de ce cas et l'ensemble des mesures prises par les organes de contrôle de l'OIT, y compris les recommandations de la commission d'enquête établie par le Conseil d'administration. Elle a estimé que les explications fournies par le gouvernement ne répondaient pas aux conclusions et recommandations détaillées et étayées par des preuves de la commission d'enquête et de la commission d'experts. Elle a noté avec une profonde préoccupation les conclusions de la commission d'enquête selon lesquelles des informations fiables révèlent que le travail forcé et obligatoire est toujours utilisé à une très large échelle au Myanmar. La commission a exprimé le regret que le gouvernement n'ait pas permis à la commission d'enquête de pénétrer sur son territoire afin de vérifier la situation par elle-même. Cela aurait permis au gouvernement d'exposer son point de vue d'une manière très objective et impartiale devant la commission. Elle a exprimé le regret que le gouvernement n'ait pas fait preuve de sa volonté de coopérer avec l'OIT à cet égard.
Elle a prié le Conseil d'administration, la commission d'experts et le Bureau de continuer à prendre toutes les mesures possibles afin de veiller au respect par le Myanmar des recommandations de la commission d'enquête, qui confirment et élargissent les conclusions précédentes de la commission d'experts.
Un représentant gouvernemental du Myanmar a évoqué le rapport présenté l'année précédente par le gouvernement à la Commission de la Conférence, dans lequel il était indiqué qu'un conseil avait été constitué pour suivre les progrès du réexamen de la loi de 1908 sur les villages et de celle de 1907 sur les villes. Au cours du premier semestre de 1996, ce conseil a tenu trois réunions au terme desquelles un projet de nouvelle loi unifiée a été soumis pour approbation à l'organe central de contrôle de la législation.
En ce qui concerne l'application de la convention dans la pratique, l'orateur a déclaré que le recours à des porteurs est la conséquence d'un conflit armé de plusieurs décennies entre le gouvernement et des groupes d'insurgés. Aujourd'hui, quinze des seize groupes insurgés ont abandonné la lutte armée pour se rallier au gouvernement. Cette situation encourageante a contribué à réduire considérablement les opérations militaires, ce qui permet d'envisager la fin du recours à des porteurs. Des mesures concrètes ont été prises par le gouvernement à cette fin. Des instructions spécifiques ont été données depuis 1995 aux autorités locales, aux gouverneurs régionaux et aux ministères compétents pour interdire le recrutement, sans rémunération ou compensation appropriée et équitable, de la population locale pour la réalisation de projets de développement national tels que la construction de ponts, routes et chemins de fer et de barrages et installations portuaires. En conséquence, les membres des forces armées participeront à ces projets pour servir les intérêts du peuple, en plus de leur attribution première, la défense du pays. L'orateur croit sincèrement que des progrès substantiels ont été réalisés dans le sens du respect des dispositions de la convention no 29.
Les membres travailleurs ont souligné que le gouvernement du Myanmar recourt depuis longtemps au travail forcé, sans qu'aucune amélioration n'ait été constatée à ce jour. En fait, ce gouvernement nie l'existence du problème. En outre, il ne témoigne d'aucun effort de coopération sincère avec l'OIT, refusant tout accès aux fonctionnaires de l'OIT ayant tenté de se rendre dans ce pays.
Les membres travailleurs ont rappelé que c'est la troisième fois que l'application de cette convention no 29 est discutée depuis 1992. En 1993, une réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT avait conduit le Conseil d'administration à demander instamment au gouvernement de modifier les lois sur les villes et les campagnes et d'abroger formellement la possibilité de recourir, dans la pratique, au travail obligatoire. En outre, en 1993, les experts ont pris note du rapport du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies exprimant le témoignage de personnes ayant été contraintes de fournir leur travail pour la construction de routes et de voies ferrées ou le déboisement de la jungle pour l'armée. La situation de crise économique engendrée par la politique du régime a déclenché un besoin impérieux de devises à l'origine d'un recours massif et constant au travail forcé.
L'un des aspects les plus insidieux de cette situation est qu'elle sert les intérêts de certaines multinationales occidentales. L'année 1996 a été l'"année du tourisme" au Myanmar. Pour cette raison, il a spécialement été fait recours au travail forcé pour construire routes et hôtels à l'intention des touristes et pour rénover les temples. Plus précisément, ce sont des travailleurs réquisitionnés qui ont construit à mains nues le canal de Mandalay. Les habitations sur le tracé ont été démolies et la population locale, ajoutée à quelque 2 000 "volontaires", a été contrainte de travailler de manière ininterrompue; 30 000 travailleurs ont été affectés à la construction de l'aéroport de Basang. Des pipelines ont été construits pour Unocal et son homologue français Total sur des terres prises à des villages. En tout, environ 800 000 personnes ont fourni "volontairement" leurs services pour la réalisation de cette infrastructure, moyennant une rémunération minime ou nulle.
A ce jour, il n'a été apporté aucune réponse à la demande formulée par les experts pour que des mesures législatives et pratiques soient prises afin de garantir le respect de la convention no 29. Cette indifférence pour les normes et procédures de l'OIT appelle, de la part de la commission, des conclusions dans les termes les plus vifs.
Les membres employeurs ont rappelé que ce cas a été traité à plusieurs reprises. Ils tiennent à mentionner incidemment que le propos de cette commission n'est pas de discuter du comportement de sociétés ou entreprises mais de la conduite de gouvernements ayant ratifié des conventions et étant tenus, à ce titre, de faire appliquer une législation.
Alors que le Myanmar a ratifié la convention no 29 depuis plus de quarante ans, la situation ne cesse d'empirer: population réquisitionnée pour du portage et des travaux publics et astreinte à un travail forcé.
Modifiant quelque peu son argumentation, le gouvernement prétend toujours qu'il s'agit d'un travail volontaire, conforme à des traditions millénaires, sans pouvoir nier les réquisitions de main-d'oeuvre sous peine d'amende ou autre sanction. Bien que le comité tripartite créé par le Conseil d'administration ait demandé une révision immédiate de la législation en cause et l'élimination de toute possibilité de recours au travail forcé, la situation reste inchangée.
Antérieurement, le gouvernement a prétendu que cette pratique de travail forcé, héritée de l'ère coloniale, n'existait plus et que la législation obsolète s'y rapportant serait abrogée. Aujourd'hui, il affirme qu'il n'y a plus de travail forcé et que c'est l'armée qui réalisera les travaux en question. Le rapport des experts montre cependant que c'est plutôt pour le compte de l'armée que ces travaux sont réalisés. Le gouvernement ne dit pas non plus que la législation sera modifiée ni que les choses changeront dans la pratique. En revanche, il a rejeté les propositions d'assistance technique de l'OIT.
Les membres employeurs estiment par conséquent que rien ne permet d'être optimiste. Ils expriment leur très profonde préoccupation et insistent une fois de plus pour que le Myanmar renonce au travail forcé en droit comme en pratique.
Le membre travailleur du Japon a souligné que ce cas est le plus ancien et le plus extrême de ceux dont la commission est saisie. Bien qu'il ait été discuté à de nombreuses reprises au sein de la commission, aucun progrès n'a été enregistré. Le gouvernement a pratiquement épuisé tous ses arguments pour défendre un système notoire de portage obligatoire et de réquisition de main-d'oeuvre pour des travaux publics. Dans son rapport, la commission d'experts a rappelé une fois de plus que les lois sur les villes et sur les villages permettent "d'imposer aux habitants qui ne se sont pas proposés volontairement l'exécution de travaux et de services, sous peine de sanctions". Le gouvernement a réitéré les promesses antérieures selon lesquelles cette législation serait en cours d'examen pour modification éventuelle. Le fait est que cette législation reste en vigueur. L'orateur considère que la commission devrait appuyer le Conseil d'administration en demandant au gouvernement de procéder sans autre délai aux réformes fondamentales recommandées.
Le membre travailleur du Brésil a déclaré que la situation du travail forcé au Myanmar est plus grave qu'au Brésil, si l'on veut bien considérer que, dans ce deuxième pays, l'information sur les violations de la convention no 29 et des droits de l'homme est ouverte. L'orateur, relevant l'absence de toute représentation des travailleurs du Myanmar à la Conférence, rappelle que l'organisation syndicale dans ce pays n'existe pas et que ceux qui tentent d'organiser les travailleurs le font en s'exposant à des risques ou en se sachant finalement condamnés à l'exil.
L'orateur a souligné que les violations des droits de l'homme et des normes du travail sont directement proportionnelles à l'absence de forces organisées dans la société civile, notamment de syndicats. Le Myanmar, qui ne connaît pas la démocratie, applique le travail forcé comme une politique de l'Etat lui-même. Dans ce pays, des populations construisent des routes, des voies ferrées et des ponts sous la menace des baïonnettes, triste répétition, en cette fin du XXe siècle, d'un épisode tel que la construction des pyramides.
L'orateur déplore que le gouvernement du Myanmar cherche à compliquer l'analyse de la situation en ne donnant pas de réponse aux questions de la commission d'experts, démarche qui témoigne également de l'absence de tout égard pour la Commission de la Conférence. La démocratie doit être rétablie au Myanmar. La convention no 29 et les autres droits de l'homme et des travailleurs doivent y être respectés. Devant la mauvaise volonté caractérisée du gouvernement, la commission ne peut que faire mention à nouveau de ce cas dans un paragraphe spécial.
Le membre travailleur des Etats-Unis a rappelé que la commission a été saisie deux fois, ces dernières années, de cette violation généralisée et systématique de la convention no 29 par le régime militaire de la Birmanie. A ces deux reprises, le débat s'est déroulé de la même façon car le régime militaire a nié que des centaines de milliers de citoyens de la Birmanie étaient mobilisés pour reconstruire l'infrastructure du pays contre une rémunération minime ou nulle. Confronté à cette évidence écrasante et incontestable, le gouvernement prétend que la prestation de main-d'oeuvre est une "tradition birmane" noble et que nombre des travailleurs réquisitionnés sont des criminels qui se sont "portés volontaires" pour des travaux de plein air. L'orateur rappelle qu'aujourd'hui en Birmanie le terme de "criminel" peut s'appliquer à une personne coupable d'avoir été élue à une charge publique, d'avoir distribué des tracts appelant à la démocratie ou d'avoir tenté d'exercer son droit fondamental de liberté d'association. Ce vaste système de travail forcé, dans lequel pratiquement chaque famille de Birmanie se trouve captive, s'est aggravé au cours de cette "année du tourisme". Bien que la commission ait demandé de manière réitérée et dans les termes les plus fermes que le régime militaire mette immédiatement fin à cette utilisation généralisée de main-d'oeuvre forcée, celui-ci se borne à afficher devant cette démarche le dédain le plus absolu. L'orateur ne voit pas d'autre conclusion à ce cas que d'exprimer une fois de plus le mécontentement extrême de la commission devant le défaut continu du gouvernement d'appliquer la convention no 29.
Le membre travailleur de la Grèce, évoquant la comparaison faite entre la situation au Myanmar et celle du Brésil, constate une différence fondamentale. Comme avec le régime de l'apartheid, si chacun sait que des pratiques racistes existent dans pratiquement tous les pays, l'Afrique du Sud avait été désignée à l'opprobre général parce qu'elle avait érigé cette pratique en système. De même, dans le cas du Myanmar, à la lecture du rapport de la commission d'experts et après avoir écouté le représentant gouvernemental, l'impression est que ce gouvernement n'a pas la moindre considération pour l'opinion de la communauté internationale. Il prétend ne plus recourir au travail forcé mais il reste muet devant les preuves que son armée réquisitionne hommes, femmes et enfants dans de telles conditions et il ne fait état d'aucun changement sur le plan législatif. L'orateur, faisant incidemment allusion à l'implication, dans ce contexte, de sociétés multinationales, invite la Commission de la Conférence à prendre toute la mesure de cette situation dramatique en se reportant également au rapport de la Commission des droits de l'homme à sa session du 24 avril 1996 ainsi qu'au rapport de l'UNICEF sur la situation des enfants dans le monde, notamment au Myanmar.
Les membres employeurs ont souligné que les discussions au sein de cette commission se limitent à examiner la mesure dans laquelle les gouvernements satisfont à leurs obligations. La législation d'un pays s'applique à toute entité se trouvant sur le territoire de celui-ci, qu'il s'agisse d'une entreprise nationale ou d'une multinationale. Il serait donc inopportun de mentionner expressément des entreprises par leur nom en dirigeant des critiques spécifiques contre elles. Si l'on devait en arriver là, la nature de cette commission s'en trouverait changée. Dans une telle éventualité, les syndicats devraient eux aussi être expressément nommés. Or cette commission, à l'instar de la commission d'experts, a pour mandat d'examiner ce que les gouvernements font ou devraient faire. Jusqu'à maintenant, il n'a pas été d'usage de citer nommément des entreprises au sein de cette commission.
Les membres travailleurs ont fait valoir qu'étant donné que la commission traite d'un problème inhérent à un système il est parfaitement logique de relever certains des éléments du système en cause. Le fait est que les experts ont relevé ces éléments dans leur rapport sur l'application de la convention no 29 au Brésil. Il existe indéniablement une relation de synergie entre les sociétés tirant avantage des pratiques répressives d'un pays et le pays lui-même. Cela ne veut pas dire que ces sociétés favorisent une législation répressive mais, du fait qu'elles sont présentes dans le système, il est parfaitement légitime d'en prendre note. Les membres travailleurs ne sauraient accepter de restriction à leur faculté de prendre note des éléments d'un problème inhérent à un système.
Les membres travailleurs ont exprimé leurs plus grandes réserves quant à l'idée qu'ils ne puissent pas mentionner des éléments constitutifs d'un problème inhérent à un système. Ne voulant pas engager davantage le débat sur cet aspect, ils expriment le souhait d'en discuter avec les membres employeurs en vue de parvenir à une certaine entente.
Les membres employeurs se sont déclarés prêts à discuter de cette question. Ils estiment néanmoins que des changements considérables interviendraient dans cette commission si le point de vue qu'ils ont fait valoir jusque-là, qui a été la pratique suivie par la commission, devait ne pas être confirmé.
Les membres travailleurs ont réaffirmé qu'il ne s'agissait pas, en l'espèce, d'une nouvelle procédure qui viendrait juste d'être mise en oeuvre.
Le membre travailleur de l'Allemagne, à l'appui des interventions précédentes, appelle l'attention de la commission sur le contenu du paragraphe 7 du rapport de la commission d'experts, qui fait ressortir le camouflet infligé par ce gouvernement à la commission. Alors que, l'an dernier, ces très graves violations avaient fait l'objet d'un paragraphe spécial, le gouvernement se borne aujourd'hui à réitérer ses dénégations alors que des sources incontestables prouvent qu'aujourd'hui encore l'armée persiste à recourir au travail forcé, à des menaces, directes et indirectes, et d'autres atrocités. L'orateur invite donc la commission à condamner dans les termes les plus fermes cette situation.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis a déclaré qu'il s'agit d'un cas désespérément simple. D'une part, il existe une législation manifestement non conforme à la convention no 29. D'autre part, il existe une somme considérable de preuves d'un travail forcé imposé sur une échelle massive, notamment pour la réalisation de projets de construction axés sur le tourisme, la réalisation de voies ferrées et le portage pour l'armée. Ce travail forcé est pratiqué dans les conditions les plus cruelles. Il a entraîné la mort de nombreuses personnes par manque de nourriture et de soins médicaux, par manque d'hygiène et par châtiments corporels. Ces violations des droits de l'homme ont en outre été évoqués non seulement à l'OIT, mais devant d'autres instances, comme la Commission des droits de l'homme des Nations Unies.
Cependant, le gouvernement se borne à affirmer qu'il ne s'agit pas de travail forcé mais d'un travail volontaire au service de la collectivité. En 1995, il déclarait avoir engagé un processus de modification de la législation en cause. La commission avait alors essayé d'encourager le gouvernement en adoptant dans son rapport un paragraphe spécial faisant valoir que celui-ci devait, de toute urgence, prendre les mesures nécessaires sur les plans juridique et pratique. Or, cette année, les experts constatent à nouveau que le rapport sommaire du gouvernement ne comporte aucune indication quelle qu'elle soit de mesures concrètes. Il est devenu patent que cette situation n'est rien de moins qu'une violation délibérée, flagrante et persistante d'une convention librement ratifiée de l'OIT. En vérité, il devient de plus en plus manifeste que le gouvernement ne cherche qu'à soulever un écran de fumée pour dissimuler le fait que, peu à peu, la situation du Myanmar évolue vers un état d'illégalité absolue. Son gouvernement appuie la condamnation, par la commission, de la carence continue du gouvernement du Myanmar à prendre des mesures positives pour que sa législation et sa pratique soient conformes à la convention no 29. L'oratrice souhaite que cette condamnation soit exprimée dans les termes les plus énergiques. Son gouvernement soutient également toute autre action que l'Organisation internationale du Travail pourrait initier pour mettre en relief ce sérieux et persistant problème.
Le représentant gouvernemental du Myanmar a réaffirmé qu'une loi unifiée sur les villes et les villages a été élaborée et que le projet en est soumis à l'organe central de contrôle de la législation. Cet organe central a été constitué en 1991 dans le but déclaré d'examiner la législation nécessitant une modification. A ce jour, il a déjà examiné au total plus de 200 lois et il examinera le projet de loi unifiée dès que possible. S'agissant de l'application de la convention no 29 en pratique, comme indiqué antérieurement, la prestation de main-d'oeuvre pour le profit de la collectivité répond à une tradition ancienne du Myanmar. Désormais, quinze des groupes qui avaient été en insurrection contre le gouvernement ont finalement rejoint le cadre de la légalité. De ce fait, les forces armées emploient aujourd'hui leurs membres à de grands projets de développement d'intérêt commun. Cela a notamment pour conséquence que seuls des membres des forces armées participeront désormais à la réalisation de ces projets. De plus, le Myanmar s'est engagé dans la voie de l'économie de marché depuis 1988, et des entreprises privées sont maintenant invitées à construire les principaux axes routiers et certaines voies ferrées. Cette évolution fera disparaître ce que l'on désigne comme "du travail forcé" et créera de nouvelles possibilités d'emploi pour la population locale. Il ressort assez clairement des éléments précités qu'il existe au Myanmar une évolution favorable sur le plan de l'application pratique de la convention no 29.
Les membres travailleurs ont déclaré que la réponse du représentant gouvernemental ne leur donne aucune raison de modifier leur point de vue initial. Aucun doute n'existe quant à la gravité des violations commises jusqu'à ce jour et qui persistent encore. Du fait que l'on ne relève aucune réponse réelle aux recommandations contenues dans le paragraphe spécial du rapport de la commission de l'année précédente, les membres travailleurs sont intimement convaincus de la nécessité, cette année encore, d'un paragraphe spécial mentionnant le Myanmar en raison du défaut continu d'application de la convention.
Les membres employeurs ont déploré que la deuxième intervention du représentant gouvernemental ne fasse ressortir aucun progrès. Un projet de loi datant de 1991, dont on ne connaît pas le contenu, serait soumis à l'examen d'une instance elle-même imprécise. Constatant l'absence de tout réel progrès, les membres employeurs appuient la démarche des membres travailleurs tendant à ce que les préoccupations de la commission soient mentionnées dans un paragraphe spécial.
La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. Elle est profondément préoccupée par la grave situation qui sévit au Myanmar depuis de très nombreuses années, où l'on recourt systématiquement au travail forcé. Elle demande, une nouvelle fois, fermement au gouvernement d'abroger formellement et de toute urgence les dispositions légales et d'abandonner toutes les pratiques qui sont contraires à la convention. Elle demande au gouvernement de prescrire des sanctions véritablement dissuasives contre tous ceux qui recourent au travail forcé. Elle espère vivement que le gouvernement prendra sans délai toutes les mesures nécessaires pour supprimer le recours au travail forcé et qu'il fournira, dès l'année prochaine, toutes les informations nécessaires et détaillées sur les mesures concrètes prises ou envisagées pour abolir, dans la législation, et supprimer, dans la pratique, le pouvoir d'imposer un travail obligatoire. La commission a décidé de mentionner ce cas dans son rapport comme un cas de défaut continu d'application de la convention no 29, étant donné que, depuis de très nombreuses années et malgré de nombreuses incitations, il existe des divergences très sérieuses et continues en fait comme en droit.
Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:
La loi sur les villages et la loi sur les villes, dont l'application est de la compétence du Département de l'administration générale du ministère de l'Intérieur, font partie de la liste des lois qui ont été réexaminées le 29 janvier 1995 puis le 16 mai 1995 par la commission ayant pour président le ministre adjoint du Travail et, comme membres, des représentants du Cabinet du Premier ministre, du ministère des Affaires étrangères, du bureau du Procureur général et du Département de l'administration générale.
Cette commission a conclu que ces deux lois n'étaient plus en conformité avec les conditions prévalant dans le pays, outre qu'elles n'étaient pas conformes aux dispositions de la convention no 29. Cette conclusion rejoint celles du comité tripartite institué par le Conseil d'administration du BIT pour examiner la réclamation présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution par Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930.
En conséquence, le gouvernement de Myanmar, conformément à la demande du Conseil d'administration "de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les textes législatifs en question, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient rendus conformes à la convention" et "pour assurer que l'abrogation formelle du pouvoir de recourir au travail obligatoire soit respectée dans la pratique, et que ceux qui font usage de la coercition dans le recrutement de la main-d'oeuvre soient punis", a entrepris la procédure de modification des lois visées.
En outre, un membre gouvernemental s'est référé aux informations écrites.
Les membres travailleurs ont indiqué que ce cas a été retenu en raison de la gravité des violations de la convention et parce que les développements récents inspirent des inquiétudes qui ne sauraient être apaisées par les éléments fournis par le gouvernement. Depuis plus de trente ans, la commission d'experts dénonce le travail forcé dans ce pays. Ce cas a été discuté en 1992. Par la suite, le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité constitué pour examiner la réclamation présentée par la CISL au titre de l'article 24 de la Constitution de l'OIT. En dépit des faits dénoncés dans le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, le gouvernement se borne à déclarer qu'il entend modifier la loi sur les villages et la loi sur les villes, sans produire pour autant d'éléments tangibles d'amélioration. La situation sur le plan du travail forcé continue de s'aggraver puisque les autorités y recourent pour réaliser, notamment, une infrastructure touristique, en invoquant le prétexte fallacieux que ces réalisations sont conçues pour répondre aux besoins de la population. Contrairement à ce qu'elles prétendent, il n'est nullement question ici de travail volontaire au sens de l'exception prévue à l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention, qui vise des travaux légers d'entretien dans l'intérêt direct de la communauté concernée, comme le fait observer la commission d'experts. Celle-ci relève en outre que la loi sur les villages et la loi sur les villes permettent de réquisitionner les habitants. Dans ce pays, l'armée réquisitionne, pour de longues périodes, hommes, femmes ou enfants à des tâches militaires auxiliaires, dans des conditions effarantes. On peut craindre que le gouvernement n'entreprenne aucune modification de la législation tant qu'il n'estimera pas avoir achevé ses ambitieux projets. Aussi serait-il souhaitable que la Commission de la Conférence, comme la commission d'experts, demande dans ses conclusions que la législation soit modifiée, que le recours au travail forcé soit abandonné, tant dans le cadre des travaux publics d'infrastructure que des services de portage pour l'armée, et que le gouvernement fournisse des informations détaillées à la commission d'experts.
Les membres employeurs se sont entièrement ralliés aux considérations développées par les membres travailleurs. Ils ont rappelé que le gouvernement a ratifié cet instrument voici près de quarante ans. Ils sont préoccupés par le grave problème du portage obligatoire qu'autorisent la loi sur les villages et la loi sur les villes, et sur celui du travail forcé dans les travaux publics. Tout en déclarant depuis 1967 qu'il n'applique plus les dispositions sur le portage obligatoire, le gouvernement entretient la confusion entre ce qu'il considère comme un travail obligatoire et ce qui constitue un travail bénévole, en voulant faire croire à la commission que le travail fourni dans le cadre des grands travaux publics relève du deuxième cas. Les experts ont noté dans leur observation que des centaines de porteurs ont été tués par les militaires, que les conditions de travail sont effarantes et que nombre des grands projets de travaux publics ont été réalisés en recourant à un travail manifestement loin d'être volontaire. Les membres employeurs sont donc sceptiques lorsque le gouvernement déclare que la législation est en cours de modification. S'ils appellent instamment celui-ci à modifier effectivement la législation dès que possible, ils ne croient pas devoir attendre de réel progrès tant que le gouvernement n'admettra pas qu'un travail obligatoire sous le contrôle des autorités publiques et militaires n'est pas un travail volontaire. La persistance de la politique gouvernementale en matière de travail forcé constitue, à l'évidence, une violation flagrante de la convention no 29, à laquelle il faut remédier dès que possible.
Un membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que, bien que le représentant du gouvernement dise qu'il n'y a pas de travail forcé au Myanmar, les faits prouvent le contraire, comme l'atteste la volumineuse documentation examinée par la commission d'experts et d'autres instances internationales, comme la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. Alors que le représentant du gouvernement affirme que la loi sur les villages et la loi sur les villes sont en cours de modification, à peine deux jours plus tôt, selon une dépêche de Reuter, les autorités militaires du sud-est du Myanmar ont à nouveau réquisitionné des civils pour le portage en prévision de nouvelles offensives contre une minorité ethnique rebelle de la région. Des cas de recours au travail forcé de ce genre sont signalés au Myanmar presque chaque semaine. Si, comme l'indique l'observation des experts, le gouvernement prétend que près de 800 000 personnes se sont portées volontaires pour construire des routes et des chemins de fer moyennant une rémunération modeste ou inexistante, la réalité, attestée par des documents photographiques, montrent des travailleurs enchaînés construisant ce que l'on appelle désormais le "chemin de fer de la mort". Des informations nouvelles font en outre état d'un projet gouvernemental d'un milliard de dollars pour la construction d'un gazoduc avec le financement de la société américaine UNOCAL et de son partenaire français TOTAL. Les villageois ont ainsi non seulement été dépossédés de leurs terres, mais ils ont en outre été contraints raser leurs villages pour réaliser les travaux préalables à l'installation du gazoduc. La main-d'oeuvre a ainsi été réquisitionnée village après village, dans le cadre d'une vaste entreprise de travail forcé qui a touché, à des degrés divers, pratiquement toutes les familles du pays. Le refus persistant du gouvernement d'abolir le système de travail forcé, selon ce que prévoit la convention no 29, est un cas extrêmement grave.
Un membre travailleur de l'Australie a souligné l'adoption récente d'une résolution de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, qui dénonce la persistance de la violation des droits de l'homme au Myanmar, et en particulier du travail forcé. Cet instrument, appuyé par 27 gouvernements, a été adopté à l'unanimité par les 53 gouvernements constituant cette commission. Il importe donc que la Commission de la Conférence se rallie aux autres instances internationales en ajoutant le poids de sa condamnation du travail forcé en violation de la convention no 29. En second lieu, les efforts déployés actuellement par le gouvernement pour promouvoir le tourisme d'ici 1996 nécessitent naturellement un développement des infrastructures - hôtels, restaurants, stations balnéaires, transports - qui l'incite à recourir encore au travail forcé. C'est ainsi que des travailleurs sont réquisitionnés pour accomplir à mains nues le dragage du canal de Mandalay, ouvrage de 10 km de long et de 3 m de profondeur. Dans le cadre de ce chantier, les habitations avoisinantes ont été démolies et la population locale contrainte par les militaires de travailler 24 heures sur 24, avec le renfort de 2 000 prisonniers enchaînés. Un récent reportage de la BBC a montré des légions d'hommes et de femmes de Mandalay nettoyant les rues et les monuments historiques sous le contrôle de gardes armés. Quelque 30 000 travailleurs ont réalisé sans rémunération le nouvel aéroport de Basang. Ces cas ne constituent que quelques exemples d'un déni des droits fondamentaux du travail par le pouvoir militaire du Myanmar, en violation flagrante de la convention no 29.
Un membre gouvernemental des Etats-Unis a exprimé la grave préoccupation de son gouvernement devant la non-application de la convention no 29 au Myanmar. Tout en concédant qu'une tradition de travail bénévole dans le cadre d'une communauté puisse exister au Myanmar, l'oratrice a fait valoir que les cas évoqués ne relèvent pas d'un travail volontaire, mais bien d'une réquisition forcée de villageois et de paysans, contraints de travailler, souvent sans rémunération et sans nourriture, sous la menace de lourdes amendes ou de graves sévices. Certains ont succombé aux mauvais traitements, d'autres ont simplement été tués. Le recours généralisé au travail forcé dans ce pays est largement documenté par la communauté internationale. Il est particulièrement inacceptable et alarmant que le gouvernement favorise manifestement l'extension de cette pratique. Puisque celui-ci reconnaît que la loi sur les villes et la loi sur les villages ne sont pas conformes à la convention no 29 et qu'il envisage une modification de ces textes, la commission doit insister pour que le gouvernement donne les consignes nécessaires aux officiels militaires pour mettre fin au portage obligatoire et au travail forcé dans les travaux publics. Les violations dénoncées doivent faire rapidement l'objet d'enquêtes approfondies, et les coupables doivent être poursuivis et punis. Le gouvernement doit prendre sans délai toutes les mesures nécessaires pour rendre sa législation et sa pratique conformes à la convention no 29. Il peut solliciter, dans cette démarche, l'assistance technique de l'OIT.
Un membre travailleur de la Grèce a relevé les divergences entre, d'une part, la déclaration du gouvernement selon laquelle il n'existe pas de travail forcé dans le pays et les gens travaillent volontairement et, d'autre part, la réalité telle qu'attestée par de nombreux témoignages, dont le rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme au Myanmar. Tous ces constats accablants dénoncent les conditions dans lesquelles des milliers d'individus sont effectivement obligés de travailler. Devant la gravité de la situation, la Commission de la Conférence doit s'affranchir de sa modération coutumière pour dénoncer dans les termes les plus fermes une situation qui ne constitue hélas pas un cas isolé.
Un membre travailleur de l'Italie a considéré que les transformations politiques évoquées par le gouvernement doivent être comprises comme des aspects négatifs si l'on veut bien reconnaître la réalité de la situation. Dans ce pays, où des personnalités incarnant l'opposition, comme le prix Nobel de la paix, Mme Aung San Suu Kyi, sont emprisonnées, le pouvoir militaire exploite les travailleurs à la réalisation de grands travaux (comme ceux de Mandalay) qui ont coûté d'innombrables vies humaines, comme le confirme le Rapporteur sur la situation des droits de l'homme dans ce pays. Il convient de noter, incidemment, que des enfants sont employés dans le cadre de ces travaux et que la situation scolaire trahit une régression considérable, avec 40 pour cent des enfants qui n'accomplissent pas la scolarité obligatoire. Pour conclure, l'orateur en appelle à l'opinion, aux entreprises privées et même aux Etats pour exercer des pressions sur ce pays afin que la situation change.
Un membre gouvernemental de l'Australie s'est rallié aux orateurs précédents pour exprimer sa grave préoccupation devant les violations des droits de l'homme au Myanmar. Jugeant particulièrement inquiétants les cas de travail forcé dans les travaux publics et les services de portage obligatoire pour l'armée, il a appelé instamment le gouvernement à assurer le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et à satisfaire sans délai aux prescriptions de la convention no 29.
Le membre gouvernemental a fait valoir qu'étant donné que le Myanmar est un pays en développement, et que près de 70 pour cent de sa population vit dans les campagnes le gouvernement développe l'infrastructure du pays pour éliminer la pauvreté et améliorer les conditions économiques et sociales de la population. De nombreux projets, comme la construction de routes, chemins de fer, ponts, barrages, réservoirs, sont en cours de réalisation dans l'ensemble du pays, notamment dans les régions limitrophes où opèrent des rebelles armés. Si le gouvernement forçait la population à travailler, comme on le prétend, comment se ferait-il que de nombreux groupes armés ayant combattu les gouvernements précédents pendant des décennies aient choisi de se rallier à celui-ci pour le développement de leur région? La réponse ne peut être que parce que les projets entrepris par le gouvernement visent le bien de la population et non pas les intérêts du gouvernement ou de l'armée. Dans chaque région, il est de tradition de recourir au travail volontaire pour le profit de la communauté, et les militaires en garnison ont toujours participé à ces travaux. Les employés du ministère compétent y participent eux aussi.
Evoquant la mission du Rapporteur spécial des Nations Unies, mentionnée dans l'observation des experts, l'orateur déclare que ce haut fonctionnaire, qui a visité un chantier de lignes de chemin de fer, indique dans son rapport que les travailleurs employés à ce chantier étaient rémunérés à la tâche plutôt qu'à la journée, que la journée de travail obéissait à l'horaire de 8 à 11 heures et de 13 à 16 heures et que chaque période de service ne durait normalement qu'une à deux semaines. Les travailleurs sont payés chacun 30 Kyats par mètre cube, ce qui signifie un jour de travail pour une ou deux personnes. Les salaires sont payés par le gouvernement à tout le village à la fin de la contribution. Ce rapporteur spécial a même visité un dispensaire construit sur le chantier pour répondre aux besoins des travailleurs. En cas de maladie ou d'accident grave, les autorités envoient les travailleurs concernés à l'hôpital. Durant sa visite au Myanmar en novembre de l'année dernière, le rapporteur spécial a visité, dans l'Etat de Magwe, la toute nouvelle station de Pakokku-Myaing-Myo Soe, de la ligne de chemin de fer Pakokku-Gangaw-Kalay. Il a eu l'occasion de parler aux personnes présentes à la gare où le train s'était arrêté. Le rapporteur spécial a rendu compte à la commission selon les termes suivants: "apparemment, la population locale semblait se réjouir de l'ouverture officielle et était contente de bénéficier de ces nouvelles installations". L'orateur a déclaré qu'une rémunération était accordée par le gouvernement aux travailleurs volontaires, en rétribution des services accomplis pour la collectivité, soit sur la base de la tâche effectuée soit selon les barèmes en vigueur. Dans certains cas, les autorités ont réparti une somme forfaitaire entre toute la communauté. Elles ont ainsi versé à ce jour 133,47 millions de kyats aux populations locales ayant contribué à la réalisation de divers projets ferroviaires.
Un médecin a été affecté à chaque station par les chemins de fer du Myanmar durant la construction des lignes ferroviaires et le médecin-chef de service effectuait des tournées dans la région au moins une fois par mois, dans le but de prodiguer des soins de santé à la population locale. En cas de blessures ou d'accidents survenant à l'occasion des travaux de construction, des indemnités sont payées par les chemins de fer du Myanmar aux personnes concernées. En ce qui concerne le recours au portage par l'armée, la raison pour laquelle les forces de sécurité doivent utiliser des travailleurs civils tient au fait que le gouvernement doit faire face à des groupes armés qui terrorisent la population. Il a toutefois appelé ces groupes armés à se rallier à lui pour le développement des régions et 14 d'entre eux ont répondu à cet appel, rendant ainsi inutile le recours par l'armée au portage par des civils dans ces régions. Il est inexact que les porteurs soient traités de façon inhumaine. Ceux-ci sont recrutés sur la base de trois critères: ils doivent être chômeurs et physiquement aptes et doivent percevoir d'avance un certain salaire. Outre leur ration journalière et leur salaire, ils ont droit à un bon de transport par train ou bateau ou à une somme d'argent pour leur rapatriement et chaque unité militaire doit assurer leur hébergement et leur couverture sanitaire. En cas de lésions corporelles ou de décès, la victime ou ses ayants droit bénéficient d'une indemnisation conformément à la loi sur la compensation des accidents du travail.
En ce qui concerne le travail dans les prisons, dans un grand nombre de pays les tribunaux prononcent des sentences comportant un travail obligatoire dans les cas de crime grave prévus par la législation. Au Myanmar, ces peines s'inscrivent dans un processus de réinsertion. Les prisonniers jouissent en outre d'une remise de peine à raison de leur contribution au travail. C'est ainsi que le 25 mars 1995 le ministère de l'Intérieur a pris un arrêté, conformément à l'article 401 1) du Code pénal, réduisant d'un tiers la peine de prisonniers ayant travaillé de manière satisfaisante dans différents camps de travail pour le développement régional. En avril 1995, plus de 5 600 prisonniers ont été libérés. Le rapporteur spécial a visité l'un de ces sites de travail volontaire lors de sa mission au Myanmar, l'année dernière, et en a rendu compte à la 51e session de la Commission des droits de l'homme dans les termes suivants:
Près de 200 prisonniers non enchaînés étaient en train de construire un fossé en empilant et en transportant des rochers. Ils paraissaient en bonne santé. Les prisonniers ont été vus travaillant main dans la main avec les forces armées et les populations civiles locales. En règle générale, les prisonniers aussi bien que les soldats travaillent huit heures par jour sur une base volontaire. Une fois leur part déterminée de travail achevée, un salaire est distribué aux prisonniers concernés. De la nourriture est fournie gratuitement et ils ont droit à trois repas par jour.
Par ailleurs, des mesures disciplinaires ont été prises à l'encontre des membres des forces de sécurité ayant enfreint la législation. L'orateur a enfin fait valoir que le Myanmar a ratifié la Convention des Nations Unies sur les droits des enfants le 16 juillet 1991, avant d'adopter, le 14 juillet 1993, une loi en la matière. Des commissions ont été constituées, au niveau national, des Etats et des districts, pour s'occuper des droits des enfants et aucune plainte n'a été reçue à ce jour concernant le travail forcé d'enfants. Des écoles ont été ouvertes au Myanmar et les enfants fréquentent l'école comme habituellement. Il n'y a pas de preuve de diminution des inscriptions. Tout individu convaincu d'avoir contraint un enfant à travailler dans des conditions dangereuses ou constituant une menace pour la santé est passible d'une peine de six mois d'emprisonnement et d'une amende.
Les membres travailleurs ont proposé que les conclusions qui seront adoptées par la commission fassent l'objet d'un paragraphe spécial dans son rapport afin d'avoir plus d'impact en raison de la gravité de la situation sur le terrain et de l'absence de tout progrès sur le plan du travail forcé.
Les membres employeurs ont déclaré que pour résumer ce cas, on peut dire que, pour le gouvernement, la fin justifie les moyens. A ses yeux, en effet, le développement de l'économie et des infrastructures justifie le recours au travail forcé, même si le pays a ratifié la convention no 29 voici quelque 40 ans et a l'obligation internationale de respecter cet instrument. Cette commission a pour habitude de mentionner les cas graves dans un paragraphe spécial. Le cas d'espèce, qui concerne le travail forcé, justifierait que les conclusions de la commission sur ce cas fassent l'objet d'un tel paragraphe spécial dans son rapport.
La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle des mesures sont actuellement prises en vue de modifier la loi sur les villages et la loi sur les villes, qui comportent des dispositions contraires à la convention no 29. Elle rappelle que le gouvernement est prié de le faire depuis près de trente ans. Elle rappelle en outre l'adoption, en 1994, par le Conseil d'administration des recommandations du comité tripartite tendant à l'abrogation des dispositions incriminées. La commission n'a pas pu accepter la position du gouvernement, telle que présentée à la commission d'experts, selon laquelle ce qui est présenté comme un travail forcé est en réalité un travail volontaire. Elle a rappelé en outre le rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, qui condamne la situation au Myanmar. Dans ces conditions, la commission a prié le gouvernement d'abroger sans délai les dispositions juridiques incriminées de la loi sur les villages et de la loi sur les villes afin de rendre ces instruments conformes, tant à la lettre qu'à l'esprit de la convention no 29, de mettre un terme aux pratiques de travail forcé sur le terrain, de prévoir et appliquer des sanctions exemplaires contre le recours à cette pratique et de fournir un rapport détaillé à la commission d'experts sur les mesures législatives et pratiques adoptées dans un souci de conformité avec la convention no 29. La commission a en outre décidé de mentionner cette conclusion dans un paragraphe spécial de son rapport général.
Se référant aux commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) relatifs à la pratique du partage obligatoire, le gouvernement souhaite indiquer qu'il est exact que les forces armées sont amenées à employer des porteurs pour le transport d'équipements et d'objets à travers des terrains accidentés dans les jungles et les montagnes reculées proches de la frontière où sont menées les campagnes contre l'insurrection armée. Dans les endroits inaccessibles en voiture ou autre véhicule à moteur, l'armée de Myanmar doit recourir à des porteurs pour le transport de fournitures et d'équipements. Toutefois, il n'est pas exact que les porteurs soient traités durement et de façon inhumaine par les forces armées de Myanmar. Toutes ces allégations sur le traitement des porteurs par les forces armées sont inexactes. Elles émanent principalement de sources extérieures motivées par des arrière-pensées politiques.
En vérité, il existe des porteurs bénévoles et des porteurs professionnels qui proposent de travailler comme porteurs pour le compte de tiers afin de gagner leur vie. Les porteurs sont recrutés et employés par les forces armées après consultation des autorités locales, selon la pratique utilisée depuis que Myanmar a recouvré son indépendance en 1948. Leur recrutement et leur emploi sont conformes à l'article 8, paragraphe 1 (N), de la loi de 1908 sur les villages et à l'article 7, paragraphe 1 (M), de la loi de 1907 sur les villes. Leur recrutement repose sur les trois critères suivants:
a) ils doivent être au chômage;
b) leur condition physique doit leur permettre de travailler comme porteurs;
c) un salaire d'un montant raisonnable doit être fixé et accepté au préalable.
Il n'est jamais exigé des porteurs ainsi recrutés qu'ils accompagnent les troupes sur le lieu proprement dit des affrontements; ils ne sont pas non plus exposés au danger. Ils sont renvoyés dès que leur tâche est terminée. Ils sont payés de façon équitable et, dans l'éventualité improbable où ils perdraient la vie ou un membre pour des raisons indépendantes d'un quelconque conflit armé, ils seraient indemnisés, ou leurs familles seraient indemnisées, conformément à la loi de 1925 sur l'indemnisation des accidents du travail. Ils ont droit aux soins médicaux au même titre que les soldats en vertu de la loi sur les forces armées. Ils sont placés dans des endroits sûrs au cours des opérations.
En outre, un représentant gouvernemental s'est référé aux informations écrites fournies par son gouvernement et il a souligné que dans son pays il n'y avait pas de coercition en ce qui concerne l'emploi des travailleurs. Des lois complètes et détaillées empêchent le recours au travail forcé. En réponse aux allégations faites contre son gouvernement assimilant la pratique du portage par des forces armées de Myanmar au travail forcé, il a signalé que l'utilisation des porteurs différait du recours au travail forcé. Il a déclaré que ces allégations provenaient de sources extérieures ayant des arrière-pensées politiques.
Les membres travailleurs ont déclaré qu'ils regrettaient que le représentant gouvernemental ait affirmé qu'il n'y a pas de travail forcé à Myanmar. Ils se sont référés au rapport de la commission d'experts, lequel avait pris note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) concernant l'application de la convention à Myanmar. La CISL avait alors indiqué que la pratique du portage obligatoire était largement répandue dans le pays et intéressait plusieurs milliers de travailleurs, lesquels étaient recrutés par la force et durement exploités. Ces porteurs sont rarement payés et forcés à porter des charges excessives et à endurer des privations et des dangers. Certains meurent en exécutant ce travail ou sont tués, quelquefois au cours d'actions militaires. Ils ont fait remarquer que les commentaires de la CISL étaient détaillés et spécifiques et qu'il était dans l'habitude de la commission de se fier à la précision des rapports de la commission d'experts. Cependant, ils étaient conscients qu'il y avait une contradiction entre les faits mentionnés dans le rapport et la déclaration du représentant gouvernemental. Ils ont exprimé l'espoir que la commission d'experts recevra un rapport détaillé à ce sujet.
Les membres employeurs ont déclaré qu'actuellement ils n'iraient pas aussi loin que les membres travailleurs dans leur appréciation de la situation. Les commentaires de la commission d'experts résumaient les allégations graves portées contre le gouvernement et celui-ci n'avait fait que répondre aux demandes des commentaires de sa part. Après examen, la commission d'experts pourrait décider que des informations supplémentaires doivent être fournies, et se prononcer d'une manière explicite en fonction des éléments à sa disposition concernant la plainte. Ils ont déclaré qu'ils appréciaient la coopération du gouvernement en envoyant des informations et lui ont demandé d'envoyer toute autre information pertinente à la commission d'experts afin que celle-ci puisse conclure si la convention est violée ou non.
Un membre travailleur de la France a déclaré qu'il était membre de l'organisation qui avait formulé les commentaires et qu'il était surpris de la réaction du représentant gouvernemental. Il a souligné que la CISL avait fourni tous les éléments de preuves pour ce cas très grave. A son avis, les conclusions de la commission devraient être pertinentes et intransigeantes en ce qui concerne la nécessité d'apporter des preuves tant de la volonté du gouvernement comme des mesures pratiques qu'il aurait prises pour remédier à une situation dont il est absolument sûr qu'elle persiste.
Le représentant gouvernemental a réitéré que le portage n'était pas du travail forcé et que celui-ci n'existait pas dans son pays. Il a déclaré que, même si l'emploi des porteurs par les forces armées était considéré comme du travail forcé, de toute façon le gouvernement n'entreprenait plus d'actions militaires et n'employait plus de tels porteurs. Il a insisté sur le fait que le gouvernement souhaitait établir l'unité nationale et la paix et supprimer toutes les différences par la discussion à l'amiable plutôt que par la lutte entre les différentes ethnies de son pays.
Les membres travailleurs ont exprimé leur désaccord avec les observations formulées par les membres employeurs car, à leur avis, il y avait une présomption découlant des faits tels qu'ils ont été exposés par la commission d'experts dans son rapport et ce du fait que celle-ci a exprimé son espoir que des mesures correctives soient prises. Bien qu'une réponse écrite ait été fournie par le gouvernement elle n'a pas pu être incluse dans le rapport, étant donné qu'elle est arrivée après la date limite prévue, ils constataient que son contenu était similaire, quoique plus complet, à ce que le représentant gouvernemental avait rapporté. Ils ont suggéré que les déclarations faites à la commission et la réponse écrite soient communiquées à la commission d'experts pour que celle-ci l'examine et en fasse rapport.
La commission a noté que le gouvernement n'a pas envoyé un rapport dans le délai prescrit. Elle a également pris note des informations écrites et orales fournies par le gouvernement. En vue du caractère sérieux des allégations mentionnées par la commission d'experts, d'une part, et de l'absence de rapport du gouvernement, d'autre part, elle prie instamment celui-ci pour qu'il envoie un rapport complet au BIT dans un très proche avenir.
Suivi des recommandations de la commission d’enquête (plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT)
Rappel historique
Dans ses commentaires précédents, la commission a examiné en détail l’historique de ce cas extrêmement grave portant sur la violation caractérisée et persistante de la convention par le gouvernement et son manquement à mettre en œuvre les recommandations de la commission d’enquête établie par le Conseil d’administration en mars 1997 en application de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. Ce défaut persistant du gouvernement de suivre lesdites recommandations ainsi que les observations de la commission d’experts et de tenir compte des autres questions découlant de la discussion menée dans d’autres instances de l’OIT a conduit, fait sans précédent, à la décision prise par le Conseil d’administration, à sa 277e session en mars 2000, de mettre en œuvre l’article 33 de la Constitution de l’Organisation puis à l’adoption d’une résolution par la Conférence, à sa session de juin 2000.
La commission rappelle que la commission d’enquête, dans ses conclusions, a souligné que la convention était violée en droit et en pratique de manière généralisée et systématique. Dans ses recommandations (paragr. 539(a) du rapport de la commission d’enquête du 2 juillet 1998), la commission a instamment demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour:
1) que les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient mis en conformité avec la convention;
3) que les sanctions prévues à l’article 374 du Code pénal pour le fait d’imposer du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, ce qui nécessite des enquêtes, des poursuites et de l’application de sanctions appropriées à l’encontre des personnes reconnues coupables.
La commission d’enquête a souligné que, outre la modification de la législation, des mesures concrètes devaient être prises immédiatement pour mettre un terme à l’imposition de travail forcé dans la pratique, ces mesures devant revêtir la forme d’actes publics que l’Exécutif promulguerait et dont il assurerait la divulgation à tous les niveaux de l’armée et à l’ensemble de la population. Dans ses précédents commentaires, la commission d’experts a identifié quatre domaines dans lesquels des «mesures concrètes» devaient être prises par le gouvernement pour mettre en œuvre les recommandations de la commission d’enquête. En particulier, la commission a mentionné les mesures suivantes:
– diffuser auprès des autorités civiles et militaires des instructions spécifiques et concrètes;
– assurer qu’une large publicité soit faite à l’interdiction du travail forcé;
– prévoir les ressources budgétaires adéquates pour remplacer la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; et
– assurer l’application de l’interdiction du travail forcé.
Derniers développements depuis l’observation précédente de la commission
La commission a examiné les discussions ayant eu lieu au sein des organes de l’OIT sur ce cas et les conclusions qu’ils ont formulées ainsi que les nouveaux documents reçus au Bureau. En particulier, la commission prend note des éléments suivants:
– le rapport du Chargé de liaison soumis à la séance spéciale de la Commission de l’application des normes tenue pendant la 99e session de la Conférence internationale du Travail, en juin 2010, ainsi que les discussions et conclusions de cette commission (CIT, 99e session, Compte rendu provisoire no 16, partie III A, et document D.5D);
– les documents soumis au Conseil d’administration à ses 307e et 309e sessions (mars et novembre 2010) ainsi que les discussions et conclusions du Conseil d’administration lors de ses sessions;
– la communication de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçue en août 2010, accompagnée de plus de 1 400 pages d’annexes détaillées;
– la communication de la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK) reçue en septembre 2010 avec ses annexes; et
– les rapports du gouvernement du Myanmar reçus les 16 décembre 2009, 4 janvier, 4 février, 12 et 18 mars, 6 avril, 19 mai, 19 août, 8 septembre et 6 octobre 2010.
Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007 – Extension du mécanisme de traitement des plaintes
Dans ses commentaires précédents, la commission a examiné la portée du Protocole d’entente complémentaire (PEC) du 26 février 2007 conclu entre le gouvernement et l’OIT, qui complète le Protocole du 19 mars 2002 portant sur la nomination d’un Chargé de liaison de l’OIT au Myanmar. Comme la commission l’a relevé précédemment, le PEC instaure un mécanisme dont l’objectif est de «donner officiellement aux victimes du travail forcé la possibilité de recourir aux services du Chargé de liaison pour adresser leurs plaintes par son intermédiaire aux autorités compétentes en vue d’obtenir réparation, conformément à la législation applicable et à la convention». La commission note que, le 19 janvier 2010, la période d’essai du PEC a été prolongée pour la troisième fois pour une nouvelle période de douze mois, allant du 26 février 2010 au 25 février 2011 (CIT, 99e session, Compte rendu provisoire no 16, partie III, document D.5F). La commission examine plus avant les informations concernant le fonctionnement du PEC dans le contexte de ses commentaires relatifs aux autres documents, discussions et conclusions concernant ce cas.
Discussion et conclusions de la Commission de l’application des normes de la Conférence
La Commission de l’application des normes a examiné à nouveau ce cas à sa séance spéciale pendant la 99e session de la Conférence, en juin 2010. La Commission de la Conférence a reconnu l’adoption de certaines mesures de caractère limité de la part du gouvernement, et notamment: le renouvellement pour une nouvelle année du Protocole d’entente; l’accord pour la publication et la diffusion d’une brochure informative sur le travail forcé; certaines activités destinées à porter le mécanisme de plaintes établi par le PEC à la connaissance de la population, notamment par des articles de journaux dans la langue nationale; certaines améliorations dans le traitement de l’enrôlement par l’armée de personnes n’ayant pas l’âge légal. Cependant, la Commission de la Conférence a considéré que ces mesures étaient toujours totalement inadéquates. Elle a relevé qu’aucune des trois recommandations spécifiques et claires de la commission d’enquête n’a été mise en œuvre et elle a demandé instamment au gouvernement de les mettre en œuvre intégralement et sans plus attendre et, en particulier: qu’il prenne les mesures nécessaires pour que les textes législatifs pertinents soient mis en conformité avec la convention; qu’il assure l’élimination totale de l’ensemble des pratiques de travail forcé, y compris celles du recrutement d’enfants dans les forces armées et de la traite des personnes à des fins de travail forcé, pratiques généralisées qui ont toujours cours; qu’il assure de manière stricte que les personnes qui imposent du travail forcé, qu’il s’agisse de civils ou de militaires, soient poursuivies et punies conformément au Code pénal; qu’il assure la libération immédiate des personnes ayant porté plainte et des autres personnes associées au mécanisme de plaintes actuellement emprisonnées; etc. La Commission de la Conférence a également demandé le renforcement des moyens à la disposition du Chargé de liaison de l’OIT pour aider le gouvernement à donner suite à toutes les recommandations de la commission d’enquête et assurer l’efficacité du fonctionnement du système d’instruction des plaintes.
Discussions au sein du Conseil d’administration
Le Conseil d’administration a poursuivi ses discussions sur ce cas à ses 307e et 309e sessions, en mars et novembre 2010 (documents GB.307/6 et GB.309/6). La commission note que, suite aux discussions de novembre 2010, le Conseil d’administration a à nouveau confirmé la totalité de ses conclusions antérieures ainsi que celles de la Conférence internationale du Travail et a appelé le gouvernement et le Bureau à agir résolument dans le sens de leur concrétisation. Compte tenu des engagements pris par le Représentant permanent du gouvernement, le Conseil d’administration a appelé à ce que le nouveau Parlement procède sans plus attendre à la mise en harmonie de la législation avec la convention. Tout en notant que le nombre des plaintes reçues dans le cadre du mécanisme de plaintes prévu par le PEC a augmenté, le Conseil d’administration a estimé essentiel que le mouvement devant mener à un environnement exempt de harcèlement ou de crainte de représailles se poursuive et il a appelé le gouvernement à coopérer avec le Chargé de liaison sur les cas qu’il soulève. Nonobstant les progrès signalés dans le domaine de la sensibilisation des autorités et de la population au sens large, en ce qui concerne les droits et responsabilités respectifs des uns et des autres au regard de la loi, la poursuite d’une action résolue reste nécessaire pour mettre un terme à toutes les formes de travail forcé, notamment à l’enrôlement dans l’armée de personnes n’ayant pas l’âge légal et à la traite des personnes ainsi que pour une application stricte du Code pénal à l’égard de tous ceux qui recourent à de telles pratiques, de manière à mettre un terme à l’impunité en la matière. Le Conseil d’administration a également appelé à la poursuite et à l’intensification des activités de sensibilisation entreprises conjointement ou séparément par le gouvernement et le Chargé de liaison de l’OIT en direction du personnel du gouvernement, de celui de l’armée et de la société civile. Enfin, le gouvernement a salué la remise en liberté de Daw Aung San Suu Kyi et a demandé instamment que les autres personnes toujours en détention, y compris les militants syndicaux et les personnes associées au mécanisme de plaintes du PEC, soient elles aussi remises en liberté aussi rapidement que possible.
Communications reçues des organisations de travailleurs
La commission prend note des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue en août 2010. Ont été joints à cette communication 51 documents représentant un total de 1 400 pages contenant une documentation extensive et détaillée se référant à la persistance de pratiques généralisées de travail forcé imposé par les autorités civiles et militaires dans pratiquement tous les Etats et divisions du pays. Pour de nombreux cas, les documents précisent les dates, lieux, circonstances, organismes civils, unités militaires et fonctionnaires. Les faits spécifiques auxquels les documents produits par la CSI se réfèrent portent sur un large éventail de travaux et services imposés par les autorités, consistant à la fois en travaux ayant un lien direct avec l’armée (portage, construction, enrôlement forcé d’enfants) et en travaux de caractère plus général, notamment dans l’agriculture, la construction et l’entretien des routes et autres infrastructures. Les documents de la CSI incluent, entre autres, des rapports communiqués par la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) et son affiliée, la Fédération des syndicats Kawthoolei (FTUK), reproduisant les allégations de victimes de travail forcé qui avaient été encouragées par ces organisations à s’adresser à l’OIT et qui pour cela ont été poursuivies en justice et emprisonnées. Les documents de la CSI comprennent également des traductions de nombreux ordres écrits («documents d’ordre» ou «lettres d’ordre») émanant, apparemment, de l’armée et d’autres autorités et adressés aux autorités des villages des Etats de Karen et de Chin et d’autres Etats et divisions. Ces documents contiennent toute une série d’exigences, impliquant dans la plupart des cas la réquisition obligatoire d’une main-d’œuvre (non rémunérée). Ainsi, le rapport soumis par la FTUK, qui a également été directement communiqué au BIT dans une communication reçue en septembre 2010 mentionnée ci-dessus, contient une traduction de 94 documents d’ordre émanant de l’armée adressés aux chefs de village de l’Etat de Karen entre janvier 2009 et juin 2010. Les tâches et services exigés dans ces documents recouvrent notamment le portage pour l’armée; la réparation de ponts; la collecte de matières premières; la production et la livraison de végétaux de couverture et de tiges de bambou; la présence à des réunions; la collecte d’argent, de denrées alimentaires et autres fournitures; la livraison d’informations sur des personnes et des foyers; etc. Selon ce rapport, les ordres susvisés illustrent la persistance de l’imposition de travail forcé par les militaires dans l’Etat rural de Karen, pratiques qui contribuent largement à entretenir la pauvreté, la précarité de l’existence, l’insécurité alimentaire et les déplacements massifs de villageois. Les communications de la CSI et de la FTUK et de leurs annexes ont été transmises au gouvernement en septembre 2010 afin que celui-ci formule les commentaires qu’il souhaiterait à cet égard.
Rapports du gouvernement
La commission prend note des rapports du gouvernement mentionnés au paragraphe 4 ci-avant, qui comportent des réponses à l’observation précédente de la commission. Elle note en particulier que le gouvernement indique qu’il poursuit sa coopération avec le Chargé de liaison de l’OIT dans le cadre de ses diverses fonctions, y compris en ce qui concerne le suivi et l’investigation des situations de travail forcé et le fonctionnement du mécanisme de plaintes du PEC. Le gouvernement indique également qu’il poursuit ses efforts en matière de sensibilisation et de formation sur le travail forcé, notamment à travers la présentation conjointe OIT/ministère du Travail faite dans le cadre du cours de formation des magistrats des villes, qui s’est tenu à Yangon en mars 2010, et avec la distribution de brochures sur le PEC et de brochures d’information simples sur le travail forcé. La commission prend également note des indications du gouvernement concernant les mesures prises pour prévenir l’enrôlement d’enfants n’ayant pas l’âge légal et organiser la libération des personnes enrôlées de septembre 2009 à août 2010 alors qu’elles n’avaient pas l’âge légal. S’agissant de la modification de la législation, le gouvernement indique que le ministère des Affaires intérieures travaille avec les départements concernés en vue de la révision de la loi sur les villages et de la loi sur les villes. Cependant, aucune mesure n’a été prise ou n’est envisagée pour modifier l’article 359 de la Constitution. La commission note également que le gouvernement n’a pas non plus communiqué ses commentaires au sujet des allégations nombreuses et précises contenues dans les communications susmentionnées de la CSI et de la FTUK, de même que dans la communication de la CSI reçue en septembre 2009. La commission prie instamment le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des réponses détaillées aux allégations nombreuses et précises d’imposition persistante et généralisée de travail forcé ou obligatoire par les autorités militaires et civiles dans l’ensemble du pays – allégations documentées dans les communications susmentionnées de la CSI et de la FTUK qui font notamment état de «documents d’ordre» constituant en soi une preuve concluante de l’imposition systématique du travail forcé par les militaires.
Evaluation de la situation
L’évaluation des informations disponibles sur la situation du travail forcé au Myanmar en 2010 et en ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations de la commission d’enquête et l’application de la convention par le gouvernement sera étudiée en trois parties, qui traiteront respectivement: i) de la modification de la législation; ii) des mesures visant à mettre fin à l’imposition de travail forcé ou obligatoire dans la pratique; iii) de l’application effective des sanctions prévues par le Code pénal et les autres dispositions pertinentes de la loi.
i) Modification de la législation
La commission a précédemment noté que le gouvernement avait déclaré, dans son rapport reçu le 27 août 2009, que la loi sur les villages et la loi sur les villes avaient été «mises en sommeil [sic] sur le plan légal et dans la pratique» par l’ordonnance no 1/99 (donnant instruction de ne pas exercer les pouvoirs prévus par certaines dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages de 1907), complétée par l’ordonnance du 27 octobre 2000. La commission a observé qu’il reste encore à donner effet, et ce de bonne foi, à ces deux ordonnances et que celles-ci ne font pas disparaître la nécessité, distincte, d’éliminer le fondement législatif servant à imposer du travail forcé. Notant que le gouvernement indique dans son rapport reçu le 19 août 2010 que le ministère des Affaires intérieures agit en concertation avec les départements concernés en vue de la révision de ces lois, la commission exprime le ferme espoir que les dispositions visant à modifier ou abroger ces instruments attendues depuis longtemps seront prises prochainement et que la législation sera ainsi mise en conformité avec la convention sur ce plan. La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
Dans ses commentaires précédents, la commission s’est référée à l’article 359 de la nouvelle Constitution (chap. VIII, citoyenneté, droits et devoirs fondamentaux des citoyens), qui exclut de l’interdiction du travail forcé «les travaux imposés par l’Etat dans l’intérêt du peuple, conformément à la législation». La commission a observé que cette exception permet certaines formes de travail forcé qui dépassent le champ des exceptions au travail forcé spécifiquement prévues à l’article 2, paragraphe 2, de la convention et qu’elle pourrait être interprétée de manière à permettre d’imposer du travail forcé à la population d’une manière généralisée. La commission note avec regret que le gouvernement déclare dans son rapport reçu le 19 août 2010 qu’«il est totalement impossible de modifier la Constitution … étant donné que celle-ci a été approuvée par référendum en mai 2008 avec 92,48 pour cent de votes favorables». La commission demande à nouveau instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de modifier l’article 359 du chapitre VIII de la Constitution de manière à mettre cet article en conformité avec la convention.
ii) Mesures visant à mettre fin à l’imposition de travail forcé ou obligatoire dans la pratique
Informations disponibles sur la pratique actuelle. Au paragraphe 8 de la présente observation, la commission se réfère de manière détaillée aux communications reçues de la CSI et de la FTUK contenant des allégations bien étayées relatives à la persistance, en 2010, de l’imposition de travail forcé et obligatoire à des villageois par les autorités militaires et civiles dans presque tous les Etats et divisions du pays. Les informations contenues dans les nombreuses annexes se réfèrent aux dates, lieux et circonstances spécifiques de cas de telles pratiques, de même qu’à des organismes civils, unités militaires et fonctionnaires spécifiques comme étant responsables de ces pratiques. Selon ces rapports, de la main-d’œuvre forcée a été réquisitionnée tant par les autorités militaires que par les autorités civiles, et cette réquisition a revêtu des formes et porté sur des tâches très diverses.
La commission note que, d’après le rapport du Chargé de liaison de l’OIT soumis à la Commission de la Conférence, en juin 2010 (CIT, 99e session, Compte rendu provisoire no 16, partie III, document D.5C), si le mécanisme de plaintes prévu par le PEC continue de fonctionner et que les activités de formation et de sensibilisation proposées dans ce cadre se poursuivent, des plaintes pour imposition de travail forcé par les autorités tant militaires que civiles continuent d’être déposées (paragr. 5 et 6). Le Chargé de liaison se réfère également à de nombreuses demandes adressées aux autorités pour obtenir la libération de victimes identifiées enrôlées avant l’âge légal dans l’armée, et il déclare que l’action concernant l’enrôlement de ces personnes qui a été déployée en application du PEC renforce l’activité de l’Equipe de pays des Nations Unies chargée de la surveillance et de la communication de l’information sur les enfants et les conflits armés en application de la résolution 1612 du Conseil de sécurité sur la protection des enfants touchés par les conflits armés (paragr. 8 et 12). Selon ce même rapport, un certain nombre de plaintes relatives à des cas de traite de personnes à des fins de travail forcé ont été enregistrées; trois affaires de cette nature, qui ont été transmises aux organes chargés des projets de lutte contre la traite des personnes de l’OIT basés à l’extérieur du pays, ont abouti à la libération de 56 personnes réduites à des situations de travail forcé dans des pays voisins. Le Chargé de liaison déclare en outre que «les éléments non vérifiables dont on dispose portent à croire que les autorités civiles recourent moins fréquemment au travail forcé, du moins dans certains lieux et dans certaines parties du pays» et que cela s’explique très probablement par les activités d’information qui ont été activement menées dans ce domaine ainsi que par la sensibilisation accrue du personnel des autorités locales (paragr. 7 et 11). Cependant, d’après le document soumis au Conseil d’administration à sa 307e session, en mars 2010, «si, selon des indications provenant de certaines régions du pays, l’ampleur réelle du travail forcé imposé par les autorités civiles a diminué dans une certaine mesure, cette tendance n’expliquerait pas à elle seule la réduction du nombre de plaintes. Le recours au travail forcé, en particulier par les militaires, reste préoccupant dans tout le pays.» (Document GB.307/6, paragr. 5.)
Diffusion d’instructions spécifiques et concrètes aux autorités civiles et militaires. Dans ses précédents commentaires, la commission a souligné que des instructions spécifiques devaient être effectivement données aux autorités civiles et militaires et à la population dans son ensemble afin que toutes les pratiques relevant du travail forcé soient identifiées et afin d’expliquer concrètement comment et par quels moyens, pour chaque pratique, les tâches et services doivent être réalisés sans recourir au travail forcé. Elle a précédemment noté que, dans son rapport reçu le 1er juin 2009, le gouvernement a déclaré d’une manière générale que «les différents niveaux de l’autorité administrative ont pleinement connaissance des ordonnances et instructions interdisant le travail forcé qui émanent des niveaux hiérarchiques plus élevés». La commission note cependant que le gouvernement n’a pas communiqué de nouvelles informations sur cette question importante dans ses rapports suivants. Considérant que les informations sur cette question restent rares, la commission n’est toujours pas en mesure d’établir avec certitude que des instructions claires ont effectivement été adressées à toutes les autorités civiles et militaires et qu’il leur est donné effet de bonne foi. Elle souligne à nouveau la nécessité qui s’attache à ce que, d’une part, des instructions concrètes soient adressées à tous les niveaux de l’armée ainsi qu’à l’ensemble de la population, qui identifient les domaines et toutes les pratiques de travail forcé et donnent des orientations concrètes sur les moyens et la manière de réaliser dans chaque domaine ces tâches ou services sans recourir au travail forcé et, d’autre part, à ce que des mesures soient prises pour faire connaître largement ces instructions et pour en assurer une supervision effective. Considérant qu’il est vital que des instructions relatives à l’interdiction du travail forcé et obligatoire soient adressées aux autorités civiles et militaires et que les mesures à cette fin doivent être intensifiées, la commission exprime le ferme espoir que le gouvernement communiquera, dans son prochain rapport, des informations sur les mesures prises à cet égard, incluant le texte traduit des instructions qui ont été émises afin de confirmer à nouveau l’interdiction du travail forcé.
Assurer une large publicité de l’interdiction du travail forcé. S’agissant de la nécessité d’assurer une large publicité à l’interdiction du travail forcé, la commission note que, d’après le rapport du Chargé de liaison de l’OIT mentionné ci-dessus, les documents soumis au Conseil d’administration et à la Commission de la Conférence ainsi que les rapports du gouvernement, un certain nombre d’activités de sensibilisation concernant le travail forcé, les interdictions légales du travail forcé et les voies de recours ouvertes aux victimes ont été menées en 2010. Il y a lieu de mentionner notamment trois séminaires de sensibilisation menés conjointement par l’OIT et le ministère du Travail pour le personnel civil et militaire du niveau de l’Etat/de la division dans l’Etat de Rhakine, la division de Magway et la division de Bago; deux présentations conjointes de l’OIT/ministère du Travail sur le droit et la pratique en matière de travail forcé et des cours de perfectionnement pour les juges et assesseurs des villes; trois séminaires/présentations pour le personnel des forces armées, de la police et des prisons sur la loi et la pratique concernant l’enrôlement dans l’armée de personnes n’ayant pas l’âge légal. Lorsque la mission de l’OIT a rencontré le ministre du Travail (en janvier 2010), le gouvernement a convenu de la publication d’une brochure rédigée simplement, dans la langue vernaculaire, expliquant le droit relatif au travail forcé, y compris à l’enrôlement en deçà de l’âge légal, et les voies de recours ouvertes aux victimes souhaitant porter plainte (document GB.307/6, paragr. 9). Le Conseil d’administration, tout en appelant, à sa session de novembre 2010, à la poursuite des activités de sensibilisation et à leur intensification, a prié le gouvernement de continuer de soutenir activement la diffusion la plus large de la brochure et sa traduction dans toutes les langues locales (document GB.309/6, paragr. 4). La commission réaffirme que de telles activités sont, à son avis, déterminantes pour contribuer à assurer que l’interdiction du travail forcé est largement connue et respectée dans la pratique et qu’elles doivent se poursuivre et s’étendre.
La commission note que, d’après le document soumis au Conseil d’administration à sa 309e session, en novembre 2010 (document GB.309/6), le nombre de plaintes déposées en application du mécanisme établi dans le PEC continue d’augmenter: entre le 1er juin et le 21 octobre 2010, 160 plaintes ont été reçues. A titre de comparaison, pour la même période, 65 plaintes ont été déposées en 2009, 25 en 2008 (paragr. 18). Au 21 octobre 2010, un total de 503 plaintes avait été enregistré par le mécanisme établi en application du PEC; 288 cas (rentrant dans le mandat de l’OIT) ont été soumis au groupe de travail gouvernemental pour enquête, dont 132 ont été résolus avec des résultats plus ou moins satisfaisants; 127 personnes enrôlées de force et/ou avant l’âge légal ont été libérées par l’armée suite à des plaintes déposées dans le cadre du mécanisme prévu par le PEC (paragr. 14 et 15). La commission réitère qu’à son avis le mécanisme de plaintes prévu par le PEC constitue, en soi, une opportunité pour les autorités de démontrer que le recours persistant à de telles pratiques est illégal et sera puni en tant que délit pénal, comme exigé par la convention. La commission exprime donc l’espoir que le gouvernement intensifiera et étendra la portée de ses efforts tendant à assurer une large publicité à l’interdiction du travail forcé et à sensibiliser la population à cette interdiction ainsi qu’à la possibilité de recourir au mécanisme prévu dans le cadre du PEC. Elle espère qu’il déploiera ces activités de sensibilisation d’une manière plus cohérente et systématique et qu’il fournira, dans son prochain rapport, des informations sur les mesures prises ou envisagées à cet égard. La commission espère en outre que le gouvernement fournira des informations sur l’impact de ces mesures de sensibilisation sur l’application effective des sanctions pénales prévues par la loi à l’égard de ceux qui imposent du travail forcé et sur l’imposition, dans la pratique, de travail forcé ou obligatoire, notamment par les militaires.
Garantir les ressources budgétaires adéquates pour remplacer le travail forcé ou le travail non rémunéré. Dans ses commentaires précédents, la commission a souligné la nécessité de prévoir dans les budgets les ressources nécessaires au remplacement de la main-d’œuvre forcée, laquelle n’est en général pas rémunérée, pour parvenir à mettre un terme à cette pratique. Elle rappelle à cet égard que, dans ses recommandations, la commission d’enquête a indiqué que «les mesures de cet ordre ne doivent pas se limiter au versement de salaires; elles doivent aussi assurer que nul ne sera contraint de travailler contre sa volonté. L’inscription au budget des ressources adéquates pour l’engagement d’une main-d’œuvre salariée et libre qui accomplira les activités publiques accomplies aujourd’hui par une main-d’œuvre forcée et non rémunérée est également nécessaire.» Le gouvernement a indiqué de manière répétée dans ses rapports, y compris dans le rapport reçu le 19 août 2010, qu’il a été attribué à tous les ministères, pour la mise en œuvre de leurs projets, des crédits budgétaires couvrant les dépenses en main-d’œuvre. Notant qu’aucune autre information n’a été fournie par le gouvernement sur cette question particulièrement importante, la commission prie à nouveau le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations précises et détaillées sur les mesures prises au niveau budgétaire afin que les ressources permettant de remplacer la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée soient assurées.
iii) Assurer l’application effective de l’interdiction du travail forcé
La commission a noté précédemment que l’article 374 du Code pénal prévoit une peine d’emprisonnement allant jusqu’à un an à l’égard de toute personne qui contraint illégalement une personne à travailler contre sa volonté. Elle a également noté que l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire du 27 octobre 2000, ainsi qu’une série d’instructions et de lettres émises par les autorités gouvernementales de 2000 à 2005 afin d’assurer l’application de ces ordonnances, prévoient que les personnes «responsables» de travail forcé, y compris les membres des forces armées, feront l’objet des poursuites prévues à l’article 374 du Code pénal. La commission note que, d’après le document soumis au Conseil d’administration à sa 309e session, en novembre 2010 (document GB.309/6), en ce qui concerne les cas de travail forcé imposé par les militaires, le BIT n’a reçu aucune information relative à des poursuites judiciaires exercées sur la base de cette disposition du Code pénal. Dans quatre cas, le Bureau a été informé que des mesures disciplinaires avaient été prises dans le cadre de procédures militaires après examen des plaintes déposées au titre du Protocole d’entente complémentaire et que, dans certains cas, la solution a consisté à émettre des ordres imposant un changement de comportement (paragr. 11). S’agissant des cas de travail forcé imposé par les autorités civiles, il n’a été question de poursuites des auteurs sur la base du Code pénal que dans le cas no 1, cas dont la commission avait déjà pris note dans ses précédents commentaires et qui avait abouti à la traduction en justice de deux fonctionnaires civils, qui ont été condamnés à des peines d’emprisonnement. Dans d’autres cas, la solution a consisté en des sanctions administratives, revêtant la forme d’un licenciement ou d’un transfert. Dans la plupart des cas, la situation a été résolue par un examen de la situation des plaignants sans qu’aucune mesure coercitive ne soit prise à l’égard des responsables (paragr. 12). S’agissant des cas d’enrôlement forcé et/ou avant l’âge légal, les procédures disciplinaires assorties de sanctions ont été plus nombreuses, et des militaires responsables de telles pratiques ont été jugés dans le cadre d’une procédure accélérée en application de règlements militaires, et trois d’entre eux ont été condamnés à l’emprisonnement. Les autres sanctions qui semblent être couramment appliquées dans ce cadre sont la perte des bénéfices de l’ancienneté, la perte des droits à pension ou la suspension de la solde pendant plusieurs jours ainsi que des réprimandes officielles de divers niveaux (paragr. 13).
La commission note avec regret qu’aucune nouvelle information n’a été fournie par le gouvernement dans ses rapports de 2010 en ce qui concerne les poursuites initiées sur la base de l’article 374 du Code pénal à l’égard des auteurs de telles formes de travail forcé. La commission souligne une nouvelle fois que l’imposition illégale de travail forcé doit être punie en tant que délit pénal plutôt que d’être traitée comme une question administrative et elle exprime le ferme espoir que des mesures appropriées seront prises dans un proche avenir pour assurer que les sanctions prévues par l’article 374 du Code pénal en cas d’imposition de travail forcé ou obligatoire sont strictement appliquées, conformément à l’article 25 de la convention. Elle demande au gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
Remarques finales
La commission fait entièrement siennes les conclusions concernant le Myanmar formulées par la Commission de la Conférence et le Conseil d’administration ainsi que l’évaluation générale de la situation du travail forcé faite par le Chargé de liaison de l’OIT. Elle observe qu’en dépit des efforts déployés, notamment dans le domaine de la sensibilisation, de la coopération pour le fonctionnement du mécanisme de plaintes du PEC et de la libération des personnes enrôlées par l’armée avant l’âge légal, le gouvernement n’a toujours pas mis en œuvre les recommandations de la commission d’enquête: il n’a pas modifié ou abrogé la loi sur les villes et la loi sur les villages; il n’a pas assuré, dans la pratique, que le travail forcé ne soit plus imposé par les autorités, notamment par les autorités militaires; il n’a pas assuré que les peines prévues par le Code pénal en cas d’imposition illégale de travail forcé soient strictement appliquées à l’égard des autorités civiles et militaires. La commission continue de croire que, pour parvenir à des progrès réels et durables en vue de l’élimination du travail forcé, les autorités du Myanmar doivent démontrer sans ambiguïté leur engagement à atteindre ce but. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de faire la preuve de son engagement à agir pour réparer les violations de la convention identifiées par la commission d’enquête en mettant en œuvre les demandes concrètes et pratiques qu’elle lui a adressées et de prendre enfin les mesures attendues depuis si longtemps pour parvenir à l’application de la convention, en droit et dans la pratique, afin de mettre un terme à ces pratiques de travail forcé des plus graves et des plus anciennes.
1. Dans ses commentaires précédents, la commission a examiné en détail l’historique de ce cas extrêmement grave de violation massive systématique et persistante de la convention depuis de nombreuses années et dans lequel le gouvernement n’a toujours pas donner suite aux recommandations de la commission d’enquête, qui a été établie en mars 1997 par le Conseil d’administration, en vertu de l’article 26 de la Constitution.
2. La commission rappelle que la commission d’enquête, dans ses conclusions, a indiqué que le Myanmar viole, de manière généralisée et systématique, son obligation découlant de la convention de mettre un terme à l’utilisation du travail forcé ou obligatoire tant en droit qu’en pratique. Dans ses recommandations (paragr. 539(a) du rapport de la commission d’enquête du 2 juillet 1998), la commission d’enquête avait demandé instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour:
– que les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient mis en conformité avec la convention;
– que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et en particulier par les militaires; il fallait pour cela prendre immédiatement des mesures concrètes dans chacun des nombreux domaines du travail forcé, et prévoir des dispositions du pouvoir exécutif, promulguées et diffusées à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l’ensemble de la population; et
– que les sanctions prévues à l’article 374 du Code pénal pour le fait d’exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, ce qui nécessitait des enquêtes, des poursuites et des sanctions appropriées à l’encontre des personnes déclarées coupables.
Faits nouveaux depuis la dernière observation de la commission
3. La commission a examiné plusieurs discussions et conclusions des organes de l’OIT, ainsi que d’autres documents reçus par le BIT. Il s’agit entre autres des documents suivants:
– le rapport du chargé de liaison de l’OIT (CIT, 98e session, Compte rendu provisoire no 16, Partie III, doc. D.5.C) soumis à la Commission de l’application des normes à la 98e session de la Conférence internationale du Travail en juin 2009, ainsi que les discussions et les conclusions de la Commission de la Conférence (CIT, 98e session, Compte rendu provisoire no 16, Partie III A, et doc. D.5.B);
– les documents soumis au Conseil d’administration à ses 304e et 306e sessions (mars et nov. 2009), et les discussions et conclusions du Conseil d’administration à ses sessions;
– la communication de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçue en septembre 2009, qui contient en annexe 574 documents représentant plus de 1 000 pages, dont copie a été transmise au gouvernement pour commentaires sur les questions soulevées dans ces documents;
– l’accord du 26 février 2009 visant à prolonger la période d’essai du Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007; et
– les rapports du gouvernement du Myanmar reçus les 10 et 24 mars, 1er et 4 juin, 27 août, et 6 et 21 octobre 2009.
4. Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007 – Extension du mécanisme de traitement des plaintes. La commission note que la période d’essai du mécanisme de traitement des plaintes, dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007 conclu par le gouvernement et l’OIT, a été prolongée d’un an le 26 février 2009, c’est-à-dire jusqu’au 25 févier 2010 (CIT, 98e session, Compte rendu provisoire no 16, Partie III, doc. D.5.F, annexe II). Le Protocole d’entente complète le Protocole du 29 mars 2002 qui porte sur la nomination d’un chargé de liaison de l’OIT au Myanmar et dont l’objectif est de «donner officiellement aux victimes du travail forcé la possibilité de recourir aux services du chargé de liaison pour adresser leurs plaintes par son intermédiaire aux autorités compétentes en vue d’obtenir réparation, conformément à la législation applicable et à la convention». Les informations sur le fonctionnement de ce mécanisme important sont examinées ci-après, dans les sections concernant le contrôle et la mise en œuvre de l’interdiction du recours au travail forcé.
5. Discussion et conclusions de la Commission de l’application des normes de la Conférence. La Commission de l’application des normes a examiné à nouveau ce cas à sa séance spéciale pendant la 98e session de la Conférence en juin 2009. La Commission de la Conférence, entre autres, a constaté que le gouvernement du Myanmar avait pris un nombre limité de mesures: le renouvellement du Protocole d’entente pour une année; certaines activités visant à sensibiliser au mécanisme de traitement des plaintes établi par le Protocole d’entente; certaines améliorations pour lutter contre le recrutement de mineurs par les militaires; et la diffusion de publications ayant trait au Protocole d’entente. Néanmoins, la Commission de la Conférence a estimé que ces mesures étaient tout à fait inappropriées, et elle a demandé instamment au gouvernement de donner pleinement suite et sans délai aux recommandations de la commission d’enquête.
6. Discussions au sein du Conseil d’administration. Le Conseil d’administration a poursuivi son examen du cas à ses 303e et 306e sessions en mars et novembre 2009 (documents GB.304/5(Rev.) et GB.306/6). Poursuivant la discussion en novembre 2009, le Conseil d’administration, entre autres, a affirmé de nouveau que ses conclusions précédentes et celles de la Conférence internationale du Travail restaient d’actualité. Il a pris note de la coopération du gouvernement en ce qui concerne les plaintes pour travail forcé soumises en vertu du Protocole d’entente complémentaire, ainsi que des activités conjointes de sensibilisation du gouvernement et de l’OIT. Toutefois, il a demandé au gouvernement de renforcer la capacité de l’OIT, dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire, afin de traiter les plaintes partout dans le pays et, en particulier, de contribuer à adapter la capacité en personnel des services du chargé de liaison, comme prévu à l’article 8 du Protocole d’entente complémentaire, afin de pouvoir faire face au surcroît de travail. Le Conseil a aussi demandé que soient libérées immédiatement toutes les personnes actuellement détenues, qu’il s’agisse de plaignants, de facilitateurs ou d’autres personnes participant au mécanisme de traitement des plaintes du Protocole. Le Conseil a demandé également de rendre accessibles les documents de sensibilisation particulièrement dans les langues locales, et il a souligné de nouveau la nécessité d’une déclaration au plus haut niveau faisant autorité contre le recours persistant au travail forcé, et la nécessité de respecter la liberté d’association.
7. Communication de la Confédération syndicale internationale (CSI). Les informations contenues dans la communication de la CSI, reçues en septembre 2009 et dont il est fait mention au paragraphe 3, sont examinées ci-après dans la section sur la pratique actuelle.
8. Rapports du gouvernement. Les rapports reçus du gouvernement, dont il est fait mention au paragraphe 3, contiennent des réponses à l’observation précédente de la commission. Ils contiennent aussi des informations sur: les activités conjointes de l’OIT et du ministère du Travail destinées à former et à sensibiliser à la question du travail forcé; la coopération en cours du gouvernement avec les différentes activités du chargé de liaison, y compris pour contrôler la situation du travail forcé et enquêter à ce sujet; le fonctionnement du mécanisme de traitement des plaintes; la mise en œuvre de projets techniques; l’action que le gouvernement mène actuellement pour mettre en œuvre l’interdiction du travail forcé. Dans ses rapports, le gouvernement, répondant au sujet de la communication de la CSI de septembre 2008, nie catégoriquement les cas de travail forcé allégués dans cette communication. Le gouvernement indique également qu’aucune mesure n’est envisagée pour modifier ou abroger la loi sur les villages ou la loi sur les villes, ou pour modifier l’article 359 de la nouvelle Constitution de l’Etat. Il est fait aussi référence aux rapports du gouvernement dans les sections suivantes du présent document.
9. L’évaluation des informations disponibles sur la situation du travail forcé au Myanmar en 2009, sur la suite donnée aux recommandations de la commission d’enquête et sur l’application de la convention par le gouvernement sera examinée en trois parties: i) modification de la législation; ii) mesures pour mettre un terme à l’imposition de travail forcé ou obligatoire dans la pratique; et iii) application des sanctions prévues dans le Code pénal et d’autres dispositions législatives.
I. Modification de la législation
10. Au sujet de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, dont il est fait mention au paragraphe 2, la commission prend note de l’indication qui figure dans le rapport du gouvernement reçu le 27 août 2009, selon laquelle ces lois ne sont pas appliquées dans la pratique, et ce en vertu de l’ordonnance no 1/99 (ordonnance interdisant d’exercer certaines facultés prévues par certaines des dispositions de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages), qui a été complétée par l’ordonnance du 27 octobre 2000. Dans ses commentaires précédents, la commission avait observé que ces ordonnances devaient être appliquées de bonne foi et que les dispositions susmentionnées ne dispensaient pas de la nécessité d’éliminer la base légale qui permet d’exiger du travail forcé. Prenant note de l’indication du représentant gouvernemental lors de la discussion qui s’est tenue au sein du Conseil d’administration à sa 306e session en novembre 2009, selon laquelle le ministère de l’Intérieur examine actuellement ces lois, la commission demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires et attendues depuis longtemps, pour modifier ou abroger ces lois et, par conséquent, de rendre la législation conforme à la convention. La commission espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement confirmera que ces mesures ont été prises.
11. Dans son observation précédente, la commission avait noté que le gouvernement a inclus dans l’article 359 de la nouvelle Constitution (chap. VIII – Citoyenneté, droits et devoirs fondamentaux des citoyens) une disposition qui interdit le travail forcé, à l’exception des travaux imposés par l’Etat dans l’intérêt du peuple, conformément à la législation. La commission avait noté que cette exception permet certaines formes de travail forcé qui dépassent le champ des exceptions au travail forcé spécifiquement prévues à l’article 2, paragraphe 2, de la convention, et que l’on peut considérer que cette exception permet d’exiger d’une façon généralisée du travail forcé. La commission note avec regret la déclaration du gouvernement qui figure dans son rapport du 27 août 2009, selon laquelle l’article 359 de la nouvelle Constitution de l’Etat «tient dûment compte de l’esprit» de la convention. De nouveau, la commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures pour modifier l’article 359 du chapitre VIII de la nouvelle Constitution afin de rendre la législation conforme à la convention.
II. Mesures pour mettre un terme à l’imposition de travail forcé ou obligatoire dans la pratique
12. Informations disponibles sur la pratique actuelle. La commission prend note, à la lecture de la communication de la CSI, des allégations largement documentées selon lesquelles les autorités civiles et militaires ont continué d’exiger du travail forcé ou obligatoire des villageois en 2009, et que ces pratiques ont eu lieu dans tous les Etats et divisions du pays, à une seule exception. Les informations jointes en annexe font mention des dates, lieux et circonstances de ces actes, des organismes civils spécifiques, des unités militaires et de fonctionnaires déterminés. Selon ces informations, le travail forcé a été imposé tant par le personnel militaire que par les autorités civiles, comme par exemple les chefs de village. Il a pris différentes formes et consisté en un large éventail de travaux, y compris la construction de ponts et de routes, le portage forcé au profit des militaires, le travail pénitentiaire, la construction, le maintien de camps militaires, la confiscation de nourriture et l’extorsion d’argent, le recrutement forcé d’enfants soldats, les tours de garde comme sentinelles et le déminage effectué par des personnes. Les annexes contiennent aussi la traduction de plus de 100 ordonnances et «lettres» ordonnant la réquisition de personnes pour du travail forcé (et non rémunéré) entre décembre 2008 et juin 2009, et qui visaient des villageois et des chefs de village dans les Etats de Chin, Karen, Mon et Rakhaing, et dans les divisions de Irrawaddy, Pegu et Tenasserim. Les tâches et services exigés dans ces ordonnances étaient entre autres les suivants: opérations de portage pour l’armée; réparation de routes et d’autres projets d’infrastructure; travail dans des rizières; production et livraison de bardeaux et de poteaux en bambou; recrutement d’enfants en tant que soldats; présence à des réunions; fourniture d’argent et d’alcool; fourniture d’informations sur des particuliers et des familles; enregistrement de villageois dans des organisations non gouvernementales sous la tutelle de l’Etat; et restriction aux déplacements et à l’utilisation de mousquets. Notant l’absence suspecte de tout commentaire du gouvernement au sujet de ces lettres d’ordonnance communiquées depuis plusieurs années par la CSI, la commission prie le gouvernement de répondre en détail, dans son prochain rapport, sur l’ensemble des informations contenues dans la communication de septembre 2009 de la CSI, et en particulier au sujet des lettres d’ordonnance susmentionnées qui indiquent de manière irréfutable que les autorités militaires et civiles ont continué d’imposer systématiquement du travail forcé dans tout le pays en 2009.
13. La commission note que le chargé de liaison indique que le mécanisme du Protocole facultatif continue à fonctionner «mais la situation d’ensemble en ce qui concerne le travail forcé n’en demeure pas moins grave dans le pays» (document GB.304/1(Rev.), paragr. 2). Des mineurs recrutés par les militaires sont démobilisés lorsque des plaintes fondées sont formulées, mais le fait que des «militaires continuent à enrôler illégalement des enfants, de manière répétée» est aussi confirmé (document GB.306/6, paragr. 5 et 7). En ce qui concerne les leçons tirées du mécanisme de traitement des plaintes, le chargé de liaison fait mention des mesures prises par les autorités pour «garantir que cette pratique cesse et qu’aucune nouvelle plainte ne soit reçue de la zone concernée» (document GB.306/6, paragr. 5). Toutefois, le chargé de liaison se réfère au comportement des autorités locales, tant civiles que militaires et judiciaires, qui refusent de reconnaître la validité des accords conclus dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire, continuent à imposer des pratiques de travail forcé et harcèlent ceux qui tentent d’exercer les droits consacrés dans la législation (document GB.306/6, paragr. 15).
14. Dans ses observations précédentes, la commission, rappelant qu’elle avait souligné la nécessité de prendre immédiatement des mesures concrètes dans chacun des nombreux domaines du travail forcé, avait identifié quatre types d’«actions concrètes» que le gouvernement devait mener, et sans lesquelles il serait impossible de mettre un terme au travail forcé dans la pratique: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l’adresse des autorités civiles et militaires; assurer une large publicité à l’interdiction du travail forcé; prévoir les moyens budgétaires adéquats pour remplacer la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le suivi de l’interdiction du travail forcé et des initiatives prises pour faire appliquer les interdictions.
15. Donner des instructions spécifiques et concrètes. Dans ses observations précédentes, la commission avait souligné qu’il fallait donner des instructions spécifiques et effectives aux autorités civiles et militaires et à l’ensemble de la population afin d’identifier tous les domaines de travail forcé, et que ces instructions devaient expliquer comment et par quels moyens, dans chaque domaine, les tâches et services devaient être réalisés sans recourir au travail forcé. La commission avait noté que, à une seule exception – «l’instruction supplémentaire» émise par le Département de l’administration générale du ministère des Affaires intérieures, sous le no 200/108/0o, en date du 2 juin 2005, dont la commission fait mention dans son observation de 2005 –, les instructions et lettres des autorités gouvernementales de 2000, 2004 et 2005, qui visaient à garantir l’observation des dispositions interdisant le travail forcé au titre de l’ordonnance no 1/99 et de l’ordonnance supplémentaire du 27 octobre 2000, ne semblaient pas avoir satisfait à ces critères.
16. La commission note que, dans son rapport reçu le 1er juin 2009, le gouvernement indique que les divers niveaux de l’autorité administrative ont pleinement connaissance des ordonnances et instructions interdisant le travail forcé qui proviennent des niveaux hiérarchiques plus élevés. Le document soumis au Conseil d’administration en mars 2009 (document GB.304/5/1(Rev.)) indique, sans préciser la date, que le Département de l’administration générale a reconfirmé, par la voie des structures administratives des Etats et des divisions, l’ordre d’interdiction du recours au travail forcé, et que cet ordre a été transmis aux communes et arrondissements ruraux (paragr. 6). Le gouvernement indique, dans son rapport reçu le 27 août 2009, que toutes les instructions et directives décrivent en détail les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les ordonnances. La commission note également que le chargé de liaison indique que plusieurs plaintes pour travail forcé, en particulier celles concernant la confiscation de récoltes d’exploitations agricoles, résultent de l’application inappropriée de politiques économiques et agricoles qui ne sont pas directement liées à la pratique du travail forcé. Le gouvernement n’a cependant pas accepté d’envisager de dispenser des formations sur l’application de ces politiques de manière à empêcher que leur mise en œuvre ne se traduise par l’imposition de travail forcé (rapport à la Commission de la Conférence, paragr. 14; document GB.304/5/1(Rev.), paragr. 9). La commission note une nouvelle fois que les informations fournies par le gouvernement sont insuffisantes dans l’ensemble. La commission souligne de nouveau la nécessité de donner des instructions concrètes à tous les niveaux des forces militaires et à l’ensemble de la population au sujet de tous les domaines et toutes les pratiques de travail forcé; de donner des orientations concrètes sur les moyens et la manière de réaliser, dans chaque domaine, ces tâches ou services; de mettre en œuvre les autres politiques du gouvernement, sans recourir au travail forcé ou à des contributions forcées de la population; et d’indiquer les mesures prises pour faire connaître largement ces instructions et pour les superviser effectivement. La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les mesures de ce type qu’il prend, dont le texte traduit et daté des instructions qui, selon lui, ont été données à nouveau pour confirmer l’interdiction du travail forcé. Prière aussi de fournir des informations sur les «éléments nécessaires» qui, selon le gouvernement, sont contenus dans ses directives et instructions.
17. Assurer les moyens budgétaires adéquats pour remplacer le travail forcé ou le travail non rémunéré. La commission rappelle que, dans ses recommandations, la commission d’enquête a attiré l’attention sur la nécessité de prévoir les ressources budgétaires nécessaires pour engager une main-d’œuvre salariée aux fins des activités publiques qui sont actuellement réalisées au moyen du travail forcé et non rémunéré. Dans son rapport reçu le 27 août 2009, le gouvernement indique de nouveau qu’une allocation budgétaire, couvrant les coûts de main-d’œuvre, est prévue pour tous les ministères afin qu’ils mettent en œuvre leurs projets respectifs. Dans des observations précédentes, la commission, prenant note des informations disponibles sur la pratique actuelle, qui indiquent que le travail forcé continue d’être imposé dans beaucoup de régions du pays, en particulier dans celles où il y a de nombreux militaires, avait considéré que, manifestement, les allocations budgétaires destinées spécifiquement à mettre un terme au recrutement de main-d’œuvre gratuite n’étaient ni suffisantes ni utilisées convenablement. De nouveau, la commission prie instamment le gouvernement d’utiliser les ressources budgétaires de l’Etat pour donner aux autorités civiles et militaires, à tous les niveaux, les moyens financiers pour utiliser une main-d’œuvre volontaire rémunérée pour les tâches et services nécessaires, et de s’assurer que ces ressources permettent d’éliminer les éléments matériels qui incitent à recourir à la main-d’œuvre forcée et non rémunérée. Prière aussi de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cette fin et sur l’effet de ces mesures dans la pratique.
18. Assurer la publicité de l’interdiction du travail forcé et sensibiliser à ce sujet. La commission note, à la lecture des rapports du gouvernement et des documents soumis au Conseil d’administration et à la Commission de la Conférence, qu’en 2009 plusieurs activités ont été menées pour sensibiliser aux pratiques de travail forcé, aux dispositions de la loi qui interdisent le travail forcé et aux voies de recours dont les victimes disposent – entre autres: séminaire de sensibilisation OIT-ministère du Travail à l’intention du personnel civil et militaire, qui s’est tenu dans l’Etat de Karen et dans l’Etat du Nord de Shan, en avril et en mai 2009; séminaire conjoint dans l’Etat de Rakhine, auquel ont participé des représentants des autorités civiles et militaires; présentation conjointe d’un programme actualisé pour les juges supérieurs des agglomérations. Une brochure, contenant le texte du Protocole d’entente complémentaire et des documents afférents, a été traduite en birman (document GB.304/5/1(Rev.), paragr. 4) et distribuée dans l’ensemble du pays aux autorités civiles et militaires, à des groupes de la société civile et à la population afin de les sensibiliser à ces problèmes (rapport du chargé de liaison à la Commission de la Conférence, paragr. 18). En novembre 2009, quelque 16 000 exemplaires de la version traduite du Protocole d’entente complémentaire ont été distribués. Néanmoins, le gouvernement n’a pas encore accepté la production d’une brochure rédigée en termes simples, traduite dans les langues locales, et présentant la législation contre le travail forcé et les procédures en vigueur pour que les victimes fassent valoir leurs droits (document GB.306/6, paragr. 10). Le gouvernement, dans ses rapports reçus les 6 et 21 octobre 2009, fait mention de plusieurs activités menées en mai et août 2009 par le Comité du gouvernement pour la prévention de l’enrôlement des mineurs – entre autres, cours sur la législation dispensés aux élèves officiers dans les camps militaires; supervision de la formation sur les procédures de recrutement dans les écoles militaires et les unités de formation de base; et visites d’information dans de nombreux régiments et centres de recrutement. Un projet d’infrastructure rurale, dans la zone du delta d’Irrawaddy qui a été touchée par le cyclone, a été mis en œuvre par les services du chargé de liaison, en coopération avec le ministère du Travail. La seconde phase de ce projet a été menée à bien en septembre 2009, mais le gouvernement a annoncé qu’il n’était pas en mesure de prolonger la durée du projet. Des séminaires de sensibilisation se sont tenus (document GB.306/6, paragr. 22) et auraient joué un rôle utile de sensibilisation, dans la zone touchée par le cyclone, aux droits et responsabilités en matière d’emploi, en particulier ceux ayant trait à l’interdiction du travail forcé (document GB.304/5/1(Rev.), paragr. 23). La commission note que le chargé de liaison a indiqué en novembre 2009 que le nombre de plaintes soumises dans le cadre du mécanisme de traitement des plaintes du Protocole d’entente s’est accru entre la mi-mai et le 28 octobre 2009. Le chargé de liaison a estimé que cela est dû au fait que, d’une manière générale, les citoyens sont mieux informés des droits que leur garantit la législation, que le réseau de facilitateurs se renforce et se développe, et que la population est davantage disposée à déposer des plaintes. Il a également fait observer que la population reste cependant mal informée, en particulier dans les zones rurales (document GB.306/6, paragr. 4). Le gouvernement doit encore formuler une déclaration au plus haut niveau faisant autorité, comme l’ont demandé les organes de contrôle de l’OIT, pour reconfirmer clairement au peuple sa politique destinée à interdire toutes les formes de travail forcé partout dans le pays, et son intention de poursuivre en justice ceux qui y ont recours, qu’ils soient civils ou militaires (rapport à la Commission de la Conférence, paragr. 24, document GB.306/6, Conclusions).
19. La commission estime que les activités d’information et de sensibilisation susmentionnées constituent un progrès et que l’accroissement récent du nombre de plaintes reçues dans la cadre du Protocole d’entente, accroissement qui est dû en partie à ces activités, est un signe positif; toutefois, ces mesures continuent d’être ponctuelles pour l’essentiel, partielles et parcellaires. La commission souligne de nouveau qu’il est nécessaire que le gouvernement s’engage davantage à mener des activités d’information et de sensibilisation, à les élaborer et à les mener d’une façon plus cohérente et plus systématique, afin qu’elles aient des effets plus tangibles sur le respect, par les autorités et les effectifs civils et militaires à tous les niveaux, et dans toutes les régions du pays, de l’obligation légale qu’ils ont de ne pas imposer du travail forcé dans la pratique, et afin que ces activités aient une incidence sur les efforts que les victimes de travail forcé, partout dans le pays, déploient pour obtenir réparation. La commission espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement fournira des informations sur les mesures de cette nature prises ou envisagées, y compris des informations sur leurs effets, constatés ou prévus, dans la pratique.
20. Contrôler la situation du travail forcé, y compris les mesures prises pour l’interdire. La commission souligne qu’il est important d’aider le gouvernement à contrôler la situation du travail forcé au Myanmar, et d’enquêter à ce sujet, y compris la mise en œuvre des droits et obligations découlant de l’interdiction du travail forcé. C’est la mission du chargé de liaison, tant dans le cadre ample du Protocole d’entente de 2002, que dans celui du mécanisme de traitement des plaintes du Protocole d’entente complémentaire. La commission note que plusieurs missions d’enquête spéciales et visites d’inspection ont été effectuées par le chargé de liaison et le ministère du Travail à la fin de 2008 et au début de 2009. Le mécanisme de traitement des plaintes a été présenté à des organisations non gouvernementales et à des groupes de représentants de la société civile, entre autres, pour recueillir leur soutien, afin qu’ils fassent rapport sur les cas de travail forcé et informent à ce sujet (document GB/304/5/1(Rev.), paragr. 5 et 6). Une petite sous-unité chargée de traiter les cas de recrutement de mineurs et d’assurer la surveillance et la communication de l’information en ce qui concerne la situation des enfants soldats dans tout le pays a été créée (document GB.306/6, paragr. 21). La commission estime qu’il s’agit là de progrès positifs. Néanmoins, la portée du mécanisme du traitement des plaintes dans un pays de la taille du Myanmar demeure encore très limitée (document GB.304/5/1(Rev.), paragr. 10); le chargé de liaison se trouve à Yangon et dispose de facilités modestes et d’effectifs réduits (document GB.306/6, paragr. 12). Le chargé de liaison n’est pas habilité à engager une procédure de plainte sur le seul fondement de ses propres observations ou des informations dont il dispose (document GB.306/6, paragr. 6), ou sur la base de ses enquêtes sur le recrutement de mineurs par les militaires (document GB.304/5/1(Rev.), paragr. 7). La capacité physique des victimes de travail forcé ou de leurs familles de porter plainte continue d’être entravée dans la pratique et un réseau de facilitateurs du traitement des plaintes reste nécessaire (rapport à la Commission de la Conférence, paragr. 12). Le mécanisme de traitement des plaintes du Protocole d’entente complémentaire est compromis (document GB.306/6, paragr. 4) par le fait que des militants des droits au travail continuent d’être détenus – ils avaient facilité le traitement de plaintes dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire (document GB.306/6, paragr. 14 et 16). De plus, il est fait état de cas graves de harcèlement et de représailles exercées sur le plan judiciaire contre des victimes qui portent plainte, contre des facilitateurs et d’autres personnes participant à la soumission de plaintes à l’OIT (document GB.306/6, paragr. 11 à 14; rapport soumis à la Commission de la Conférence, paragr. 10). De plus, le mécanisme de traitement des plaintes est aussi compromis par le refus des autorités locales civiles et militaires, et des tribunaux locaux, de respecter les décisions prononcées officiellement au sujet de plaintes, notamment les accords prévoyant la restitution de terres confisquées auxquels ont permis d’aboutir les missions d’enquête de l’OIT et du ministère du Travail qui ont été effectuées en décembre 2008 et en mars 2009 dans la division de Magwe (document GB.306/6, paragr. 13 et 15). A cet égard, le registre des cas traités dans le cadre du mécanisme du protocole facultatif fait apparaître un certain nombre de cas, dont les cas nos 149, 150, 151, 204, 205 et 206, dans lesquels les plaignants ont choisi de ne pas poursuivre la procédure de dépôt de plainte par crainte de représailles (document GB.306/6, annexe IV). Le chargé de liaison a proposé officiellement au groupe de travail de prendre des mesures conjointes afin d’examiner toutes ces questions collectivement pour trouver des solutions durables, mais le gouvernement n’a pas accepté cette proposition (document GB.306/6, paragr. 15). Tout en attirant l’attention du gouvernement sur l’obligation que ce dernier a, en vertu du Protocole d’entente de 2002 et du Protocole d’entente complémentaire de 2007, de prendre les mesures appropriées pour permettre au chargé de liaison de s’acquitter effectivement de ses tâches et des responsabilités qui y sont liées, y compris d’assurer aux services du chargé de liaison les facilités et le soutien nécessaires, la commission prie instamment et fermement le gouvernement de prendre les mesures immédiates nécessaires pour remédier aux graves problèmes susmentionnés. Elle prie le gouvernement de fournir des informations dans son prochain rapport sur les progrès accomplis à cet égard. D’une manière plus générale, la commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures pour garantir les conditions nécessaires afin que les procédures de contrôle et d’enquête soient efficaces, qu’elles aient une portée et une ampleur nationales et qu’elles soient pleinement respectées par tous les groupes de la société à tous les niveaux. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les progrès des mesures prises ou envisagées dans ce sens.
III. Application des sanctions
21. La commission rappelle que l’article 374 du Code pénal prévoit une peine d’emprisonnement allant jusqu’à un an à l’encontre de quiconque oblige illicitement autrui à travailler contre sa volonté. En outre, l’ordonnance no 1/99, et l’ordonnance complémentaire du 27 octobre 2000, ainsi que plusieurs instructions et lettres émises par les autorités du gouvernement en 2000, 2004 et 2005, qui visent à faire appliquer ces ordonnances, prévoient pour les personnes «responsables» de travail forcé, y compris des membres des forces armées, des sanctions au titre de l’article 374 du Code pénal ou des autres dispositions applicables de la législation. La commission note qu’aucune des plaintes traitées grâce au mécanisme du Protocole complémentaire, qui ont été évaluées puis transmises par le chargé de liaison au groupe de travail pour qu’il enquête et prenne les mesures nécessaires, n’a abouti en 2009 à la décision de poursuivre les auteurs de travail forcé. Le registre des cas établis en vertu du mécanisme de traitement des plaintes indique qu’au 23 octobre 2009, dans au moins 14 des cas considérés comme clos, le chargé de liaison a estimé que les sanctions infligées ou les mesures disciplinaires prises étaient inappropriées, et que le groupe de travail a rejeté par routine les recommandations qui avaient été faites d’infliger des sanctions plus lourdes (document GB.306/6, annexe IV). Les récents cas portant sur des plaintes pour recrutement de mineurs par des militaires ont débouché sur la démobilisation des enfants qui en étaient victimes mais seulement sur des sanctions administratives, lorsque cela a été le cas, qui ont été infligées aux auteurs; aucun de ces cas n’a abouti à des poursuites au pénal (document GB.304/5/1, paragr. 7). Dans le cas no 127, le chargé de liaison avait recommandé expressément que des poursuites pénales soient intentées mais sa recommandation a été rejetée. La commission note que le chargé de liaison indique qu’il est nécessaire d’infliger des sanctions exemplaires à l’encontre des coupables, mais que ce point reste «préoccupant, en particulier dans les cas impliquant des militaires» (document GB.306/6, paragr. 7), et que, dans la plupart des cas graves de recrutement de mineurs par des militaires, les sanctions restent insuffisantes (rapport soumis à la Commission de la Conférence, paragr. 15). De nouveau, la commission prie instamment le gouvernement de prendre des mesures pour que les sanctions infligées, conformément à la loi, aux auteurs d’imposition illicite de travail forcé ou obligatoire soient appropriées et strictement appliquées, comme l’exige l’article 25 de la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations dans son prochain rapport sur les progrès des mesures prises à cette fin. La commission espère que le gouvernement respectera mieux les engagements qu’il a pris dans le cadre du Protocole complémentaire en ce qui concerne le traitement des cas transmis par le chargé de liaison au groupe de travail, qu’il sera accordé plus d’importance aux évaluations préliminaires du chargé de liaison et que davantage d’enquêtes déboucheront sur des poursuites, sur des condamnations et sur l’imposition de sanctions pénales, et non sur la clôture de cas. La commission demande des informations sur les progrès accomplis dans ce sens.
22. En résumé, la commission note que le gouvernement n’a toujours pas mis en œuvre les recommandations de la commission d’enquête: il n’a pas modifié ou abrogé la loi sur les villes et la loi sur les villages; il n’a pas pris de mesures concrètes susceptibles d’avoir un effet significatif et durable pour mettre un terme à l’imposition de travail forcé dans la pratique; il n’a pas veillé à ce que des sanctions strictes soient prises contre les auteurs de travail forcé, dans le cadre du Code pénal ou d’autres dispositions pertinentes de la législation contre les autorités et les effectifs civils et militaires qui sont responsables de ces actes. Les services du chargé de liaison, grâce au mandat ample que lui confie le Protocole du 19 mars 2002 et aux procédures et mécanismes prévus dans le Protocole complémentaire, jouent un rôle essentiel pour aider le gouvernement à mener à bien son action pour éliminer le travail forcé. Toutefois, la coopération, ferme et totale du gouvernement est essentielle pour que le chargé de liaison puisse remplir son rôle. Notamment, le gouvernement doit contribuer à fournir au chargé de liaison les facilités et le soutien nécessaires et veiller à ce que l’ensemble de la société respecte pleinement ces procédures et mécanismes spéciaux et à ce qu’elle lui fasse confiance. Dans ce domaine, beaucoup reste à faire. De nouveau, la commission prie instamment le gouvernement de confirmer l’engagement qu’il a pris d’éliminer le recours au travail forcé au Myanmar, et de prendre les mesures, attendues depuis longtemps, qui sont nécessaires pour mettre en œuvre les recommandations de la commission d’enquête et assurer le respect de la convention en droit et dans la pratique.
1. Dans ses commentaires précédents, la commission a examiné en détail l’historique de ce cas extrêmement grave qui implique pour le gouvernement la violation systématique et persistante de la convention et le refus de donner suite aux recommandations formulées par la commission d’enquête instituée en mars 1997 en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT par le Conseil d’administration. Le manquement continu du gouvernement à mettre en œuvre ces recommandations et les observations de la commission d’experts, d’une part, et les autres questions qui ont été soulevées lors de la discussion de ce cas au sein des autres organes de l’OIT, d’autre part, ont conduit le Conseil d’administration, à sa 277e session en mars 2000, à recourir à l’article 33 de la Constitution, décision sans précédent qui a été suivie par l’adoption d’une résolution par la Conférence à sa session de juin 2000.
2. La commission rappelle que la commission d’enquête, dans ses conclusions sur le cas, a souligné que la convention était violée, en droit et en pratique, d’une manière généralisée et systématique. Dans ses recommandations, la commission a demandé instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour:
2) que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités et en particulier par les militaires; et
3) que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l’article 374 du Code pénal pour le fait d’exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées.
La commission d’enquête a souligné que, outre les modifications de la législation, des mesures concrètes devaient être prises immédiatement pour mettre un terme à l’imposition de travail forcé dans la pratique, notamment par l’armée.
3. Dans ses commentaires précédents, la commission d’experts a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour répondre à ces recommandations. La commission a indiqué en particulier les mesures suivantes:
– émettre des instructions spécifiques et concrètes à l’égard des autorités civiles et militaires;
– s’assurer de la large diffusion auprès de la population de l’interdiction du travail forcé;
– prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; et
– s’assurer du respect de l’interdiction du travail forcé.
4. La commission a examiné plusieurs discussions et conclusions des organes de l’OIT ainsi que de nouveaux documents reçus par le BIT. La commission note en particulier:
– la discussion et les conclusions de la Commission de l’application des normes de la Conférence au cours de la 97e session de la Conférence internationale du Travail en juin 2008;
– les documents soumis au Conseil d’administration à ses 301e et 303esessions (mars et novembre 2008) ainsi que les discussions et conclusions du Conseil d’administration au cours de ces sessions;
– les commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue en septembre 2008, accompagnée de plus de 600 pages d’annexes détaillées; et
– les rapports du gouvernement du Myanmar reçus les 4 et 20 mars, 2 et 19 juin, 26 septembre et 31 octobre 2008.
Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007 – prolongation du mécanisme de traitement des plaintes
5. Dans son observation précédente, la commission a examiné la portée du Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007, qui complétait le protocole précédent du 19 mars 2002 concernant la nomination d’un chargé de liaison de l’OIT au Myanmar ainsi que son rôle dans la mise en œuvre du Protocole d’entente complémentaire. La commission a estimé que le Protocole d’entente complémentaire représentait un fait nouveau important et qu’il serait examiné plus en détail au sein des organes de l’OIT. Comme la commission l’a noté précédemment, le Protocole d’entente complémentaire prévoit l’établissement et la mise en œuvre d’un nouveau mécanisme de traitement des plaintes, dont l’objectif principal est de donner officiellement aux victimes du travail forcé la possibilité de recourir aux services du Chargé de liaison pour adresser leurs plaintes par son intermédiaire aux autorités compétentes en vue d’obtenir réparation, conformément à la législation applicable. La commission note que ce mécanisme a été prolongé le 26 février 2008 à titre d’essai pour un an, c’est-à-dire jusqu’au 25 février 2009 (CIT, 97e session, Compte rendu provisoire no 19, troisième partie, document D.5). La commission examine plus en détail ci-après le Protocole d’entente complémentaire, dans le cadre de ses commentaires sur les autres documents, discussions et conclusions portant sur ce cas.
6. La Commission de l’application des normes de la Conférence a examiné de nouveau ce cas lors d’une séance spéciale, à la 97e session de la Conférence en juin 2008 (CIT, 97e session, Compte rendu provisoire no 19, troisième partie). La Commission de la Conférence a observé que, bien que certaines mesures aient été prises pour appliquer le Protocole d’entente complémentaire, «il y a bien plus à faire, à la fois avec engagement et de manière urgente». La Commission de la Conférence a fait part de sa préoccupation face à la très faible connaissance de l’existence du mécanisme de traitement des plaintes prévu dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire et a instamment prié le gouvernement d’approuver rapidement la traduction dans toutes les langues locales d’une brochure facile à comprendre et largement diffusée auprès de la population, expliquant la loi et la procédure de présentation de plaintes prévue par le Protocole d’entente complémentaire. La Commission de la Conférence a noté que, même si le mécanisme de présentation de plaintes continuait de fonctionner, les sanctions n’étaient pas imposées sur la base du Code pénal et, par conséquent, aucune condamnation n’avait été prononcée contre les membres des forces armées. La Commission de la Conférence a aussi souligné qu’il est crucial que le Chargé de liaison de l’OIT dispose de ressources suffisantes pour faire face à ses responsabilités et a insisté sur le fait qu’il est urgent que le gouvernement accepte un réseau renforcé de facilitateurs pour traiter des plaintes dans l’ensemble du pays. La Commission de la Conférence a également noté avec préoccupation les cas signalés de représailles et de harcèlement à l’égard de plaignants et de facilitateurs volontaires qui coopéraient avec le Chargé de liaison et a demandé au gouvernement de s’assurer que tous les actes de harcèlement et de représailles, quelle qu’en soit la base juridique ou autre, cessent immédiatement et que leurs auteurs soient poursuivis en application de la loi en vigueur.
7. La commission note, d’après le rapport soumis à la 303e session du Conseil d’administration en novembre 2008 (document GB.303/8/2) sur les progrès du mécanisme du Protocole d’entente complémentaire pour le traitement des plaintes, qu’au 6 novembre 2008 le Chargé de liaison avait reçu 121 plaintes (document GB.303/8/2, paragr. 3). Soixante-dix d’entre elles ont été portées officiellement à l’attention du Groupe de travail du gouvernement sur le travail forcé pour enquête et action. Sur ces 70 plaintes, 50 ont donné lieu à une réponse jugée satisfaisante et ont été classées; 20 cas sont encore dans l’attente d’une réponse du gouvernement ou sont en instance, la procédure suivant son cours. Trente-neuf des cas qui ont été soumis concernaient des plaintes individuelles pour recrutement dans l’armée en dessous de l’âge légal (document GB.303/8/2, paragr. 3).
8. La commission note que dans le même rapport du Conseil d’administration le Chargé de liaison indique qu’il est clair que la grande majorité de la population est mal informée de son droit et de la possibilité de porter plainte; que cette méconnaissance, à laquelle s’ajoutent les difficultés matérielles rencontrées pour porter plainte, a pour conséquence que le mécanisme de traitement des plaintes ne touche guère, à l’heure actuelle, la population au-delà de Yangon et des agglomérations voisines (paragr. 9); que la traduction du Protocole d’entente complémentaire et du Protocole d’entente de 2002 a fait l’objet de «longues négociations», et l’approbation définitive n’a pas encore été obtenue (paragr. 8); et que le gouvernement, à ce jour, n’a ni examiné ni approuvé le texte d’une brochure vulgarisatrice, qui doit être traduite dans les langues locales afin d’être diffusée amplement et d’expliquer les dispositions légales et la procédure pour porter plainte conformément au Protocole d’entente complémentaire (paragr. 9).
9. Dans ses conclusions (document GB.303/8), le Conseil d’administration a souligné, entre autres, la nécessité de donner de toute urgence plein effet aux recommandations de la commission d’enquête ainsi qu’aux décisions ultérieures de la Conférence internationale du Travail (paragr. 1). Tout en reconnaissant un certain degré de coopération pour assurer le fonctionnement du mécanisme de traitement des plaintes dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire, le Conseil d’administration a fait part de sa préoccupation face à la lenteur des progrès et à l’urgente nécessité de faire avancer le dossier (paragr. 2). Le Conseil d’administration a souligné l’impérieuse nécessité de sensibiliser les autorités militaires et civiles ainsi que l’opinion publique à la législation interdisant le travail forcé et aux droits inscrits dans le Protocole d’entente complémentaire. Il a aussi souligné que ceux qui recourent au travail forcé et enrôlent dans l’armée des recrues n’ayant pas l’âge légal doivent être poursuivis et sévèrement punis, et que les victimes doivent obtenir réparation (paragr. 3). En outre, le Chargé de liaison doit pouvoir librement exercer ses fonctions dans l’ensemble du pays et la population entrer en contact avec l’OIT sans entraves et sans crainte de représailles (paragr. 4). Enfin, le Conseil d’administration a demandé que cesse le harcèlement et la détention de personnes exerçant leurs droits en vertu du Protocole d’entente complémentaire (paragr. 5).
Communication de la Confédération syndicale internationale
10. La commission prend note des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue en septembre 2008. Cette communication était accompagnée de 49 documents, représentant plus de 600 pages et contenant une série de textes détaillés relatifs à la persistance des pratiques généralisées de travail forcé imposées par les autorités civiles et militaires. Dans de nombreux cas, cette documentation mentionne des dates précises, des lieux et des circonstances concrètes et des organismes civils spécifiques tout comme des unités militaires et des fonctionnaires déterminés. Elle comprend des allégations de travail obligatoire imposé par le gouvernement, dans l’ensemble des 14 Etats et divisions du pays, à une exception près. Certains cas spécifiques mentionnés contiennent des allégations de mobilisation de travailleurs par les autorités pour une large gamme de travaux et de services, y compris des travaux réalisés au profit de groupes militaires ou paramilitaires (portage, construction et entretien de camps militaires, autres travaux pour les militaires, par exemple déminage effectué par des personnes/fonctions de sentinelle/sécurité, recrutement forcé d’enfants et de prisonniers, dès l’achèvement de leur peine) ainsi que des travaux d’ordre plus général, notamment dans l’agriculture (culture de graines de ricin), la construction et l’entretien de routes, de ponts et de barrages et d’autres travaux d’infrastructure.
11. Les documents communiqués par la CSI comprennent la traduction de 59 ordonnances écrites, émanant d’autorités militaires et autres, adressées aux autorités de villages dans les Etats de Karen et de Chin, qui comportent toute une série de demandes, aboutissant le plus souvent à la réquisition de personnes à des fins de travail obligatoire (et non rémunéré). La documentation contient également des allégations selon lesquelles les personnes qui s’adressent au Chargé de liaison pour présenter des plaintes de travail forcé font souvent l’objet de représailles et de harcèlement. L’un de ces cas concerne 20 villageois de Pwint Phyu, dans la division de Magwe, qui, après avoir présenté une plainte pour travail forcé auprès de l’OIT, ont été interrogés par les autorités locales cinq fois en un mois. Dans un autre cas, 70 résidents de l’Etat d’Arakan ont été interrogés par des fonctionnaires du Département de la sécurité des affaires militaires, qui dépend du ministère du Travail, après avoir présenté à l’OIT une plainte pour travail forcé. Ces derniers ont été contraints de signer un document indiquant qu’ils avaient été obligés de porter plainte. La communication de la CSI contient également des informations faisant état d’imposition de travail forcé par les autorités militaires et locales de la région du delta de Irrawaddy pour la reconstruction après le passage du cyclone Nargis en mai 2008. Ainsi, par exemple, dans le camp de déplacés de Maubin, 1 500 hommes et femmes ont été forcés à travailler dans des carrières; dans le village de Ngabyama, dans le sud de Bogale, les autorités ont forcé les survivants à abattre des arbres et à reconstruire des routes; et, à Bogalay, des soldats ont forcé les villageois à travailler. Les documents contiennent aussi des témoignages selon lesquels les commandants militaires de villages situés dans des zones contrôlées par le Conseil d’Etat pour la paix et le développement (SPDC) ont extorqué de l’argent en prétendant qu’il s’agissait de «dons» collectés pour être distribués aux personnes ayant survécu au cyclone. Une copie de la communication de la CSI et de ses annexes a été transmise au gouvernement le 22 septembre 2008 pour qu’il formule les commentaires qu’il estimerait utiles.
12. La commission prend note des rapports du gouvernement qui sont mentionnés au paragraphe 4 précédent. Elle apprécie le rapport très détaillé reçu le 31 octobre 2008, qui reprend en grande partie les informations que le gouvernement avait déjà fournies et inclut également un résumé détaillé de l’historique du cas, du point de vue du gouvernement, qui met l’accent sur l’histoire de la coopération avec le BIT. Le rapport contient aussi plusieurs pages d’informations récentes sur les mesures qui, selon le gouvernement, sont prises pour donner suite aux conclusions de juin 2008 de la Commission de la Conférence et aux observations de la commission d’experts. La commission note toutefois que, dans ses derniers rapports, le gouvernement n’a pas répondu de manière détaillée aux nombreuses allégations concrètes contenues dans la communication susmentionnée de la CSI, mais a fourni des renseignements sur l’état d’avancement de plusieurs procédures judiciaires concernant les poursuites pénales et les sanctions dont ont fait l’objet des personnes agissant en tant que facilitateurs volontaires dans le cadre du mécanisme de traitement des plaintes du Protocole d’entente complémentaire, des défenseurs des droits des travailleurs ayant des liens avec l’OIT ou les personnes participant à des activités associatives visant à promouvoir les droits au travail. Les organes de contrôle de l’OIT ont été particulièrement préoccupés par ces cas. La commission note que les informations sur ces cas contenues dans le dernier rapport du gouvernement reprennent les informations fournies dans les rapports reçus le 19 juin 2008 et avant. La commission note les nouvelles informations sur ces cas qui figurent dans le rapport du Chargé de liaison du 7 novembre 2008, soumis au Conseil d’administration à sa 303e session (document GB.303/8/2). La commission prie instamment le gouvernement de répondre en détail dans son prochain rapport aux allégations spécifiques et nombreuses selon lesquelles les autorités militaires et civiles continuent d’imposer du travail forcé ou obligatoire dans tout le pays, allégations qui sont développées dans la communication récente de la CSI.
Notification d’instructions spécifiques et complètes aux autorités civiles et militaires
13. La commission note tout d’abord que, dans ses derniers rapports, le gouvernement n’a pas indiqué avoir pris des mesures pour abroger formellement les dispositions pertinentes de la loi sur les villages et de la loi sur les villes. En ce qui concerne l’ordonnance no 1/99, telle que complétée par l’ordonnance du 27 octobre 2000, qui interdit le travail forcé, le gouvernement fait de nouveau référence aux instructions qui, affirme-t-il, ont déjà été notifiées, sans en expliciter le contenu. La commission note que le gouvernement se réfère à un exposé présenté par le Directeur général du Département du travail et le Chargé de liaison de l’OIT aux juges adjoints de villages le 18 février 2008, pendant le «cours no 18 de formation professionnelle». Cet exposé visait à sensibiliser les participants à la pratique du travail forcé et à leur permettre de prendre les bonnes décisions. La commission note également que le rapport du Chargé de liaison soumis à la Commission de la Conférence en juin 2008 se réfère au premier des deux cours de formation de formateurs de cinq jours. Ce cours a été mené par l’assistant du Chargé de liaison, en collaboration avec l’UNICEF et le CICR, et, selon lui, s’est déroulé de manière satisfaisante. Les 37 participants étaient des officiers et sous-officiers du régiment de recrutement et des camps de formation de base ainsi que des agents du Département de la protection sociale. Le second cours, prévu pour la dernière semaine de juin, devait être suivi par les personnes qui conduisent des cours de formation ayant un effet multiplicateur dans tout le pays (CIT, 97e session, Compte rendu provisoire no 19, troisième partie, document D.5, paragr. 7). La commission prend note des informations contenues dans les rapports du gouvernement reçus les 20 mars et 26 septembre 2008 sur les activités menées par la Commission pour la prévention du recrutement militaire de mineurs. Ces informations mentionnent un programme de cours à effet multiplicateur consacrés aux mesures visant à prévenir le recrutement d’enfants dans les forces armées. Il sera dispensé à des officiers et à des stagiaires d’un grade inférieur dans plusieurs centres de formation militaires en 2008. Le gouvernement indique entre autres que, en juin 2008, des représentants de la Commission pour la prévention du recrutement militaire de mineurs et du ministère de la Défense ont publié un «guide» pour les assistants des avocats généraux, les chefs de département des commandements de division et de région et les écoles de formation militaires, destiné à servir de support aux cours de formation juridique sur la prévention du recrutement d’enfants dans les forces armées, qui ont été dispensés aux officiers militaires et effectifs de grade inférieur dans plusieurs régiments et unités. La commission note que, dans ses derniers rapports, le gouvernement n’a pas fourni de nouvelles informations sur les programmes des cours à effet multiplicateur ou des cours de formation juridique susmentionnés.
14. La commission estime que les mesures prises pour émettre des instructions aux autorités civiles et militaires sur l’interdiction du travail forcé et obligatoire, telles que celles qui sont susmentionnées, sont essentielles et doivent être renforcées. Toutefois, étant donné le manque continue d’informations sur ces mesures, et notamment sur le contenu détaillé des matériels susmentionnés, la commission demeure dans l’impossibilité d’évaluer si des instructions claires ont été effectivement données à l’ensemble des autorités civiles et des unités militaires et s’il a été donné effet aux ordonnances de bonne foi. Le gouvernement n’a pas fourni d’informations qui permettraient d’appuyer l’observation selon laquelle, dans la pratique, grâce aux instructions sur l’interdiction du travail forcé qui, selon le gouvernement, leur ont été notifiées, les autorités, et en particulier les forces armées, ont aujourd’hui moins recours au travail forcé ou obligatoire. La commission souligne que, pour que le gouvernement éradique le travail forcé, les activités susmentionnées sont essentielles et doivent être menées à plus grande échelle et de façon plus systématique. La commission prie le gouvernement de fournir des informations plus détaillées sur ces activités, y compris sur le contenu des matériels et programmes de cours, ainsi que sur leur efficacité pour faire reculer, dans la pratique, l’imposition du travail forcé ou obligatoire.
15. Dans son observation précédente, la commission avait exprimé l’espoir que le gouvernement clarifierait les dispositions constitutionnelles concernant l’interdiction du travail forcé. Dans son dernier rapport, le gouvernement indique que l’application de la convention «a été inscrite dans la nouvelle Constitution de l’Etat», qui a été approuvée en mai 2008 par référendum constitutionnel et doit prendre effet en 2010. Le gouvernement se réfère à son article 359 (paragr. 15 du chapitre VIII – «Citoyenneté, droits et devoirs fondamentaux des citoyens») selon lequel «l’Etat interdit toute forme de travail forcé, à l’exception des travaux forcés imposés aux personnes condamnées pour des crimes dûment établis et des obligations imposées par l’Etat dans l’intérêt du peuple, conformément à la législation». La commission, se référant aussi au paragraphe 42 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiquer le travail forcé, rappelle que, aux fins de la convention, certaines formes de travail ou service obligatoires, qui auraient normalement relevé de la définition générale du «travail forcé ou obligatoire», sont expressément exclues du champ d’application de la convention par l’article 2, paragraphe 2. Ces dérogations sont subordonnées au respect de certaines conditions qui définissent leur portée. La commission note avec regret que la dérogation à l’interdiction du travail forcé prévue dans la nouvelle Constitution pour les «obligations imposées par l’Etat dans l’intérêt du peuple, conformément à la législation» comprend des formes permissibles de travail forcé qui vont au-delà de la portée des dérogations spécifiquement définies à l’article 2, paragraphe 2. La commission est également profondément préoccupée par le fait que non seulement le gouvernement n’a pas abrogé les textes législatifs qui ont été identifiés par la commission d’enquête et par elle-même mais a, en outre, inclus dans le texte de la Constitution une disposition qui peut être interprétée de telle sorte qu’elle permettrait d’imposer de façon généralisée du travail forcé à la population. De plus, comme la commission l’a souligné au paragraphe 67 de son étude d’ensemble susmentionnée, même les dispositions constitutionnelles qui interdisent expressément le travail forcé ou obligatoire peuvent devenir inopérantes si la législation elle-même impose le travail forcé ou obligatoire. Par conséquent, la commission veut croire que le gouvernement prendra enfin les mesures nécessaires pour modifier ou abroger les textes législatifs en question, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, et qu’il modifiera également le paragraphe 15 du chapitre VIII de la nouvelle Constitution afin de mettre sa législation en conformité avec la convention.
Assurer une large diffusion de l’interdiction du travail forcé
16. Pour ce qui est d’assurer une large diffusion de l’interdiction du travail forcé, la commission note que le Chargé de liaison indique dans son rapport du 7 novembre 2008, qui a été soumis au Conseil d’administration à sa 303e session, que depuis mars 2008 il a effectué deux missions de sensibilisation avec des hauts fonctionnaires du ministère du Travail (document GB.303/8/2, paragr. 6). Le gouvernement semble se référer dans son rapport reçu le 31 octobre 2008 aux mêmes activités, en indiquant que des missions conjointes sur le terrain, à Myitkyinar et Monywa, ont été prévues par le Directeur général du ministère du Travail et par le Chargé de liaison pour la fin octobre 2008 afin d’organiser des ateliers de sensibilisation. Comme elle l’a déjà souligné, la commission considère que ces activités sont essentielles pour contribuer à diffuser largement et à respecter dans la pratique l’interdiction du travail forcé et qu’elles devraient se poursuivre et être élargies. La commission note que dans le rapport qu’il a soumis au Conseil d’administration (document GB.303/8/2) le Chargé de liaison indique qu’il n’a pas encore été donné suite aux appels répétés des organes de contrôle de l’OIT, demandant au gouvernement de reconfirmer par une déclaration fortement médiatisée sa volonté d’éliminer le travail forcé (paragr. 10).
17. Dans son observation précédente, la commission avait noté que le mécanisme de traitement des plaintes du Protocole d’entente complémentaire offrait l’opportunité aux autorités de démontrer que le recours continu au travail forcé est illégal et serait puni en tant qu’infraction pénale, comme l’exige la convention. A cet égard, la commission note avec préoccupation les déclarations du Chargé de liaison qui, dans son dernier rapport au Conseil d’administration (document GB.303/8/2), font état des déficiences persistantes du Protocole d’entente complémentaire, point développé précédemment dans la discussion sur les travaux du Conseil d’administration. La commission espère que le gouvernement prendra sans plus tarder les mesures pour intensifier et amplifier ses efforts afin de diffuser largement auprès de la population et de la sensibiliser à l’interdiction du travail forcé, y compris à l’utilisation du mécanisme de traitement des plaintes prévu par le Protocole d’entente complémentaire. La commission espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement fournira des informations sur ces mesures et leur impact sur l’application de sanctions pénales à l’encontre des auteurs de travail forcé. Prière également de fournir des informations sur l’imposition dans la pratique de travail forcé ou obligatoire, en particulier par les militaires.
Assurer les moyens budgétaires adéquats pour le remplacement du travail forcé ou du travail non rémunéré
18. A cet égard, la commission rappelle que, dans ses recommandations, la commission d’enquête a indiqué que: «les mesures […] ne doivent pas se limiter à la question du versement d’un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d’œuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré.» La commission, dans ses observations précédentes, avait aussi souligné que, pour mettre fin à ces pratiques, il était indispensable de prévoir des moyens budgétaires adéquats pour remplacer la main-d’œuvre forcée, laquelle n’est en général pas rémunérée. La commission note que, dans ses derniers rapports, le gouvernement ne fournit pas de nouvelles informations à ce sujet, indiquant comme précédemment qu’une allocation budgétaire est prévue pour tous les ministères couvrant les coûts de main-d’œuvre du développement de leurs projets respectifs et que des mesures sont prises pour confirmer que l’allocation budgétaire pour les travailleurs a déjà été versée aux ministères respectifs. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer dans son prochain rapport des informations précises et détaillées sur les mesures prises pour prévoir dans le budget des allocations adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée.
Application effective de l’interdiction du travail forcé
19. En ce qui concerne le respect de l’interdiction du travail forcé, la commission note l’évaluation du Chargé de liaison dans son rapport présenté au Conseil d’administration en novembre 2008, selon laquelle «pour l’essentiel, les plaintes déposées (au titre du Protocole d’entente complémentaire) ont été traitées avec diligence par le groupe de travail du gouvernement» (document GB.303/8/2, paragr. 5) et «les autorités, au plus haut niveau, collaborent de façon relativement satisfaisante avec le mécanisme pour le traitement des plaintes» (document GB.303/8/2, paragr. 20). Toutefois, dans son observation précédente, la commission s’était dite préoccupée par le fait que, parmi les plaintes transmises par le Chargé de liaison aux autorités pour enquête et action appropriée, une seule avait abouti à la poursuite des auteurs des faits (affaire no 001, qui a donné lieu à l’ouverture de poursuites contre deux fonctionnaires civils), et par le fait que rien n’indiquait que, dans les cas transmis concernant des allégations allant à l’encontre d’effectifs militaires, des mesures pénales, voire administratives, (et non des réprimandes), avaient été prises contre des militaires. La commission note que, pour l’essentiel, cette situation n’a pas changé en 2008, mises à part trois plaintes déposées contre des militaires. Mentionnées dans le rapport du 7 novembre 2008 soumis au Conseil d’administration à sa 303e session, ces plaintes ont donné lieu à des amendes (équivalant à 28 jours de solde dans un cas, et à 14 jours de solde dans un autre et à une sanction aux termes de laquelle un officier s’est vu décompter une année d’ancienneté) plutôt qu’à des simples réprimandes (document GB.303/8/2, paragr. 16). La commission note que, dans le même rapport, le Chargé de liaison indique que les sanctions administratives à l’encontre du personnel militaire demeurent proportionnellement plus légères que celles infligées à leurs homologues civils. Le Chargé de liaison précise également qu’aucune poursuite contre des auteurs présumés de délits relevant du Code pénal ou du règlement militaire, et passibles d’une peine d’emprisonnement, n’a été engagée depuis les précédents rapports soumis aux organes de contrôle de l’OIT (document GB.303/8/2, paragr. 7).
20. Dans ses derniers rapports, le gouvernement n’a pas fourni d’autres informations sur d’éventuelles poursuites engagées devant les juridictions contre les auteurs de travail forcé, c’est-à-dire en dehors du cadre du mécanisme de traitement des plaintes du Protocole d’entente complémentaire. La commission note que, dans son rapport reçu le 31 octobre 2008, le gouvernement se réfère, comme les années précédentes, à un mécanisme qui a été mis en place pour la population afin que les plaintes soient enregistrées directement par les autorités chargées de faire appliquer la loi. Le gouvernement, comme il l’a fait précédemment, fait mention d’une annexe contenant un tableau de cas avec des notes indiquant qu’en 2003 et 2004 dix cas de plaintes pour travail forcé ont été adressés directement aux tribunaux du Myanmar et que plusieurs de ces cas ont abouti en janvier et en février 2005 à des condamnations et au prononcé de peines d’emprisonnement au titre de l’article 374 du Code pénal. La commission avait pris note précédemment de ces cas dans son observation publiée dans son rapport de 2005. La commission note que trois de ces cas ont été classés et que, dans les autres, les condamnés étaient tous des fonctionnaires de l’administration, alors qu’au moins deux de ces cas impliquaient du personnel militaire.
21. La commission souligne une nouvelle fois que l’exaction illégale de travail forcé doit être punie en tant qu’infraction pénale et ne pas être traitée comme une question administrative. Ainsi, les sanctions prévues à l’article 374 du Code pénal pour l’imposition de travail forcé ou obligatoire doivent être strictement appliquées, conformément à l’article 25 de la convention. Comme l’a souligné la commission d’enquête, ceci exige que des enquêtes approfondies soient menées, des poursuites engagées et des sanctions appropriées prononcées à l’encontre des personnes déclarées coupables, y compris dans les cas impliquant du personnel militaire.
22. La commission partage pleinement les conclusions du Conseil d’administration au sujet de la situation du travail forcé au Myanmar, ainsi que l’évaluation générale du Chargé de liaison. Au vu de ces conclusions et de cette évaluation, la commission continue de croire que le seul moyen de parvenir à des progrès véritables et durables dans l’élimination du travail forcé est pour les autorités du Myanmar de démontrer sans ambiguïté leur volonté d’atteindre cet objectif. Ceci requiert de la part des autorités, en plus du Protocole d’entente complémentaire, de redoubler d’efforts pour créer les conditions nécessaires au fonctionnement efficace du mécanisme de traitement des plaintes, et également de prendre sans délai, comme cela aurait dû être fait depuis longtemps, des mesures pour abroger les dispositions en cause de la législation nationale et adopter un cadre législatif et réglementaire propre à donner effet aux recommandations de la commission d’enquête. La commission veut croire que le gouvernement démontrera son engagement à mettre fin aux violations de la convention identifiée par la commission d’enquête en donnant effet aux demandes concrètes et explicites que la commission a adressées au gouvernement. La commission veut croire que toutes les mesures nécessaires seront prises pour assurer l’application de la convention en droit et en pratique pour résoudre enfin le cas de travail forcé le plus grave et le plus ancien.
Rappel chronologique
1. Dans ses commentaires antérieurs, la commission a attiré l’attention sur les violations graves de la convention de la part du gouvernement du Myanmar et sur le fait que celui-ci n’a pas mis en œuvre les recommandations de la commission d’enquête constituée par le Conseil d’administration en mars 1997.
2. La commission d’enquête constituée en 1997 conformément à l’article 26 de la Constitution a conclu que la convention était violée dans le droit national et dans la pratique, et ce d’une manière généralisée et systématique, et elle avait formulé les recommandations suivantes:
La commission d’enquête avait souligné que, outre les modifications de la législation, des mesures concrètes devaient être prises immédiatement pour mettre un terme à l’imposition de travail forcé dans la pratique, notamment par l’armée.
3. Le manquement continu du gouvernement à mettre en œuvre les recommandations de la commission d’enquête et à se conformer aux observations de la commission d’experts ainsi qu’aux autres questions soulevées par les autres organes de l’OIT a abouti, fait sans précédent, à ce que le Conseil d’administration décide, à sa 277e session (en mars 2000), de mettre en œuvre l’article 33 de la Constitution de l’OIT et que la Conférence adopte une résolution en juin 2000. Le rappel chronologique de ce cas extrêmement grave est présenté en détail dans les observations antérieures formulées par la commission au cours des dernières années.
4. Chacun des organes de l’OIT a attiré l’attention, à l’occasion de la discussion de ce cas, sur les recommandations de la commission d’enquête. La commission d’experts a identifié, dans ses observations antérieures, quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour répondre à ces recommandations. La commission a indiqué en particulier les mesures suivantes:
– émettre des instructions spécifiques et concrètes à l’adresse des autorités civiles et militaires;
– assurer que l’interdiction du travail forcé est largement rendue publique;
– assurer le respect de l’interdiction du travail forcé.
5. La commission a examiné, aux fins de la présente observation, plusieurs discussions et conclusions des organes de l’OIT ainsi que de nouveaux documents reçus par la commission. La commission prend note en particulier:
– des discussions et des conclusions de la Commission de l’application des normes de la Conférence au cours de la 96e session de la Conférence internationale du Travail en juin 2007;
– des documents soumis au Conseil d’administration à ses 298e et 300e sessions (mars et novembre 2007) ainsi que des discussions et conclusions du Conseil d’administration au cours de ces sessions;
– des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue le 31 août 2007, accompagnée de 740 pages d’annexes détaillées;
– des rapports du gouvernement du Myanmar reçus les 17 et 20 août, le 10 septembre, les 12 et 23 octobre et le 3 décembre 2007; et
– du Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007 au Protocole initial du 19 mars 2003 relatif à la nomination d’un fonctionnaire de liaison de l’OIT au Myanmar.
Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007
6. La commission note à ce stade que le Protocole d’entente complémentaire représente un développement très important et que sa signification sera examinée plus en détail vers la fin de l’observation. Il est important que le Protocole d’entente complémentaire soit examiné dans le cadre des autres documents, discussions et conclusions susmentionnés.
7. Le Protocole d’entente complémentaire porte sur la nomination et le rôle d’un fonctionnaire de liaison de l’OIT au Myanmar et a été conclu à l’issue de longues négociations entre l’OIT et le gouvernement du Myanmar. Le Protocole d’entente complémentaire prévoit l’établissement et la mise en œuvre d’un nouveau mécanisme de plaintes, dont l’objectif principal est «de donner officiellement aux victimes du travail forcé la possibilité de recourir aux services du chargé de liaison pour adresser leurs plaintes par son intermédiaire aux autorités compétentes en vue d’obtenir réparation». Le dispositif prévu sera mis en place à titre d’essai pour une période de douze mois qui pourra être prolongée d’un commun accord (document GB.298/5/1, annexe).
8. Le rôle du fonctionnaire de liaison dans le cadre du Protocole d’entente complémentaire et l’impact de son travail dans les circonstances dans lesquelles il était tenu d’accomplir ses fonctions dans le pays ont été le sujet principal des discussions engagées ultérieurement dans les organes de l’OIT.
Discussions et conclusions de la Commission de l’application des normes de la Conférence
9. La Commission de la Conférence a conclu, au cours de la 96e session en juin 2007, que le mécanisme des plaintes établi conformément au Protocole d’entente complémentaire devait, tout en continuant à fonctionner, être évalué par rapport à l’objectif ultime de l’élimination du travail forcé.
10. La commission note à ce propos que la Commission de l’application des normes constate, dans ses conclusions formulées en juin 2007 (CIT, 96e session, Compte rendu provisoire no 22, Partie III), qu’«il a été également observé que le mécanisme devait être évalué à l’aune de l’objectif ultime de l’éradication du travail forcé et que son impact devait encore être analysé»; et que d’après les documents récents soumis au Conseil d’administration «les personnes touchées par le travail forcé et leurs proches ont les plus grandes difficultés, pour des raisons matérielles aussi bien que financières, à présenter des plaintes si elles ne vivent pas à Yangon même», tout en notant que «des réseaux informels ont été instaurés» et que, «malgré leur apport précieux, ils ne couvrent pas l’ensemble du territoire» (document GB.300/8, paragr. 9). La commission note par ailleurs, d’après les documents soumis que, «en ce qui concerne le mécanisme mis en place en vertu du protocole, il n’est pas possible aujourd’hui de dire s’il est pleinement opérationnel après les troubles civils et leur répression, et donc si l’on peut en tirer des enseignements» (document GB.300/8(Add.), paragr. 9).
11. La commission note que les rapports soumis au Conseil d’administration à sa 300e session en novembre 2007, concernant les progrès obtenus dans le cadre du mécanisme des plaintes, montrent qu’à la date du 7 novembre 2007 le chargé de liaison avait reçu 56 plaintes (document GB.300/8(Add.), paragr. 3). Parmi ces plaintes, 19 ont été considérées comme ne relevant pas de la compétence du chargé de liaison et 24 ont été soumises au vice-ministre du Travail en sa qualité de président du groupe de travail gouvernemental sur le travail forcé pour qu’il procède à une enquête et prenne les mesures nécessaires. Quatre plaintes ont été classées, l’évaluation ayant montré que les éléments réunis ne justifiaient pas un examen plus approfondi et, dans le cas de neuf plaintes, l’examen préliminaire n’a pas encore abouti ou est en suspens dans l’attente de renseignements complémentaires de la part des plaignants (documents GB.300/8, paragr. 5, et GB.300/8(Add.), paragr. 5).
12. Par ailleurs, le Conseil d’administration a appelé le gouvernement à veiller à ce que le mécanisme établi par le protocole demeure pleinement opérationnel, à ce que les plaignants, facilitateurs ou autres personnes concernées ne soient plus détenus ou harcelés et à ce qu’il soit pleinement appliqué aux autorités militaires. Il a estimé qu’il est nécessaire que toutes les mesures soient prises pour empêcher à tout prix le recrutement des enfants en tant que soldats (paragr. 5). Le Conseil d’administration a surtout insisté sur la nécessité de mettre en place un réseau approprié destiné à assurer l’application du protocole dans la totalité du pays, et notamment dans les zones de combat, et de veiller à ce que les victimes du travail forcé puissent accéder facilement au mécanisme de plaintes (paragr. 6).
Communication reçue de la part de la Confédération syndicale internationale
13. La commission prend note des commentaires formulés par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication reçue le 31 août 2007. Cette communication était accompagnée de 45 documents de plus de 740 pages, contenant une série de textes détaillés relatifs à des pratiques de travail forcé imposées par les autorités civiles et militaires. Cette documentation se réfère, dans beaucoup de cas, à des dates particulières, des lieux et circonstances présentés de manière détaillée, et des organismes civils, des unités militaires et des fonctionnaires déteminés. Elle couvre une grande superficie du pays (et notamment plusieurs parties des Etats de Chin, Kayah, Kayin, Mon du sud, Rakhine du nord, et Shan, ainsi que les localités de Ayeyarwady, Bago, Mandalay et Tanintharyi) au cours de la période à partir de la seconde moitié de 2006 et jusqu’à la première moitié de 2007. Les cas signalés se réfèrent à la réquisition présumée de travailleurs pour toute une série de tâches identifiées par la commission d’enquête:
– les opérations de portage pour l’armée (ou d’autres groupes militaires ou paramilitaires pour des opérations ou pour des patrouilles de routine);
– la construction ou la remise en état de camps et autres installations militaires;
– les autres fonctions de soutien logistique fournies à l’armée (guides, messagers, cuisiniers, nettoyeurs, etc.);
– les activités génératrices de revenu effectuées par des personnes ou des groupes de personnes (notamment le travail réalisé dans des établissements agricoles ou industriels appartenant à l’armée);
– différents projets d’infrastructure;
– les travaux de nettoyage et d’embellissement de zones rurales ou urbaines.
14. La documentation susmentionnée comporte des copies de 145 décisions écrites qui semblent provenir des autorités militaires et d’autres autorités destinées aux villages de l’Etat de Kayin, prévoyant dans la plupart des cas l’exigence d’effectuer un travail (non rémunéré). Elle comporte aussi des photographies représentant des personnes de l’Etat de Mon forcées de travailler dans des projets de développement militaire, comme expliqué dans le rapport les accompagnant. Le document comporte également une vidéo mettant en scène cinq hommes qui déclarent avoir été forcés par l’armée du Myanmar à travailler depuis avril 2007 en tant que porteurs ou sentinelles ou dans les projets du bâtiment, la construction des clôtures et à différentes tâches dans les camps de l’armée, ainsi qu’à fournir des chars à bœufs et des tracteurs à l’armée. Une copie de la communication de la CSI et de ses annexes a été transmise au gouvernement aux fins de tout commentaire qu’il souhaite formuler.
15. La commission prend note des rapports du gouvernement reçus les 17 et 20 août, le 10 septembre, les 12 et 23 octobre, et le 3 décembre 2007. Ces rapports se réfèrent à des informations contenues dans la communication en date du 31 août 2006 de la CSI adressée à la commission et transmise au gouvernement, et à laquelle la commission s’est référée dans son observation antérieure. Le gouvernement n’a pas répondu en détail aux informations contenues dans la communication de la CSI, sauf pour exprimer son point de vue selon lequel «la plupart des questions soulevées par la [CSI] ne sont pas du tout fondées» et pour noter que de tels cas «seraient soumis au mécanisme qui traite des plaintes de travail forcé conformément au Protocole d’entente complémentaire» conclu entre l’OIT et le Myanmar le 26 février 2007.
16. La commission est tenue de noter à cet égard que le Protocole d’entente complémentaire et l’établissement du mécanisme de traitement des plaintes qu’il prévoit ne libèrent en aucun cas le gouvernement de son obligation qui découle de la convention d’éliminer le recours au travail forcé. Ils constituent plutôt un moyen mis à la disposition du gouvernement pour remplir cette obligation, à travers la pleine application des recommandations de la commission d’enquête.
17. La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport une réponse détaillée aux nombreuses allégations particulières figurant dans la communication la plus récente de la CSI ainsi que dans celle de l’année précédente.
Notification d’instructions complètes et spécifiques aux autorités civiles et militaires
18. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement se réfère à nouveau à une série de lettres, directives, télégrammes et instructions émanant de diverses autorités civiles et militaires qui se rapportent aux Ordonnances sur l’interdiction du travail forcé. Cependant, comme relevé dans l’observation précédente, étant donné que le gouvernement n’a donné que très peu de détails quant au contenu de ces diverses instructions et que tout indique que l’imposition du travail forcé reste généralisée, la commission demande à être convaincue que des instructions claires ont effectivement été données à toutes les autorités civiles et unités militaires. La commission insiste à nouveau sur la nécessité de donner une publicité appropriée à ces ordonnances.
19. La commission doit également souligner que, si les ordonnances offrent en pratique une base légale qui pourrait assurer l’application de la convention, cela est loin de constituer l’abrogation formelle des dispositions de la législation pertinente demandée par la commission d’enquête. En conséquence, la commission exprime l’espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour modifier ces dispositions dès que possible, ce qu’il promet de faire depuis quarante ans. La commission exprime également l’espoir que le gouvernement saisira cette opportunité pour apporter, sur le plan constitutionnel, de la clarté en ce qui concerne l’interdiction du travail forcé.
Assurer qu’une large publicité soit faite à l’interdiction du travail forcé
20. Pour ce qui est d’assurer qu’une large publicité soit faite à l’interdiction du travail forcé, la commission renvoie aux commentaires qui précèdent. Elle prend également note du Protocole d’entente complémentaire du 26 février 2007 entre l’OIT et le gouvernement, qui est un élément positif. Le mécanisme instauré par cet instrument pour connaître des plaintes pour travail forcé offre l’opportunité aux autorités de démontrer que la persistance du recours à cette pratique est illégale et sera punie en tant qu’infraction pénale, comme le requiert la convention. Le fait que l’ordonnance no 1/99, telle que complétée par l’ordonnance du 27 octobre 2000, a servi de base légale pour condamner au pénal des représentants de l’autorité publique pour imposition de travail forcé étaye la conclusion à laquelle la commission était parvenue dans son observation de 2001, conclusion selon laquelle ces ordonnances «pourraient constituer une base légale pouvant servir à assurer le respect de la convention dans la pratique, dans la mesure où elles seraient appliquées de bonne foi non seulement par les autorités locales ayant pouvoir de réquisition de main-d’œuvre en vertu des lois sur les villages et les villes, mais aussi de la part des autorités civiles et militaires que ces lois habilitent à demander l’assistance des autorités locales».
21. La commission note également qu’une certaine publicité a été faite autour de la signature du Protocole d’entente complémentaire et des poursuites qui ont été engagées subséquemment pour imposition de travail forcé contre deux représentants de l’autorité (un bulletin de presse le 26 février 2007; une conférence de presse du Directeur général du Département du travail le 26 mars 2007; un article sur les poursuites dans le New Light of Myanmar du 31 mars 2007). La commission note également que, d’après le rapport soumis au Conseil d’administration à sa 300e session, le gouvernement «a lancé un vaste programme de formation auprès des membres de l’administration, qui doit permettre de rappeler l’Etat de droit et de présenter la procédure prévue par le Protocole d’entente complémentaire», que «l’organisation par l’OIT et le ministère du Travail d’un nouveau cycle de séminaires est en discussion» et enfin que «le gouvernement a terminé la version préliminaire d’un fascicule à paraître sous le titre Elimination du travail forcé – Document d’information no 1». Des consultations sont encore en cours sur le détail du contenu et de la présentation du document qui sera diffusé dans toute l’administration (document GB.300/8, paragr. 8).
22. La commission estime qu’une telle publicité est vitale en vue d’assurer que l’interdiction du travail forcé est largement connue et appliquée dans la pratique, et elle estime que cette publicité devrait se poursuivre et s’étendre. La commission partage l’avis du Conseil d’administration selon lequel il serait extrêmement utile que le gouvernement «déclare publiquement au plus haut niveau, sans ambiguïté possible, que toutes les formes de travail forcé sont interdites sur tout le territoire national et qu’elles seront dûment punies» (document GB.300/8, Conclusions).
23. La commission souligne l’importance de la demande qu’elle a faite régulièrement à cet égard dans ses précédentes observations et qui a été soulignée dans les récentes conclusions de la Commission de l’application des normes de la Conférence, conclusions qui tendent à ce que des instructions spécifiques soient données à toutes les unités militaires pour signifier clairement que le travail forcé est interdit et que cette interdiction sera strictement appliquée. En vue de mettre fin à ces pratiques, il est indispensable de prévoir des moyens budgétaires adéquats pour remplacer la main-d’œuvre forcée, laquelle n’est en général pas payée.
24. De même, la commission note que, dans son rapport du 17 août 2007, le gouvernement indique qu’une allocation budgétaire couvrant les coûts de main-d’œuvre «à tous les ministères, pour la mise en œuvre de leurs projets respectifs» est prévue, et qu’une déclaration signée du ministère de la Construction indiquant la somme en question figure dans l’annexe au rapport. A nouveau, la commission ne comprend toujours pas pourquoi, si des ressources adéquates sont réellement attribuées aux autorités civiles et militaires, le recours à une main-d’œuvre forcée et non rémunérée reste manifestement généralisé, en particulier de la part des administrations militaires et des administrations civiles locales. La commission demande à nouveau, comme elle l’a fait précédemment, que le gouvernement communique dans son rapport des informations détaillées sur les mesures prises afin que les moyens adéquats pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée soient prévus dans le budget.
Assurer le renforcement de l’interdiction du travail forcé
25. La commission est conduite à exprimer ses préoccupations devant le fait que, comme signalé dans les rapports susmentionnés dont le Bureau a saisi le Conseil d’administration et dans les éléments communiqués par le gouvernement, sur 24 plaintes (au 7 novembre) transmises par le chargé de liaison aux autorités, pour enquête et suites appropriées, une seule à ce jour a abouti à l’ouverture de poursuites à l’égard des auteurs des faits (affaire no 001, qui s’est traduite par l’ouverture de poursuites contre deux fonctionnaires civils). Un certain nombre d’autres affaires ont abouti à une action contre des fonctionnaires civils devant les instances administratives (par exemple, licenciement des fonctionnaires concernés ou avertissements). Alors que le chargé de liaison a saisi les autorités de sept affaires mettant en cause des personnels militaires (pour enrôlement forcé d’enfants dans l’armée et pour imposition de travail forcé à des villageois), aucun élément n’indique à ce jour qu’une quelconque action, pénale ou même administrative, a été engagée à l’égard d’un quelconque membre des forces armées. La commission note que, dans les informations reçues le 3 décembre 2007, le gouvernement indique avoir pris des mesures concrètes pour empêcher l’enrôlement d’enfants dans l’armée en mettant en place une commission centrale et des comités de travail, avec des ateliers de suivi.
26. La commission note que, d’après le chargé de liaison, «les travaux du groupe de travail du gouvernement sont plus rapides et productifs dans les affaires relatives à l’action d’administrations civiles. Il semble plus difficile en effet d’obtenir des procédures rapides et adéquates dans le cas des plaintes mettant en cause des militaires» (document GB.300/8, paragr. 6). La commission estime que cela est d’autant plus préoccupant qu’elle avait fait observer antérieurement que le travail forcé est un problème qui touche plus particulièrement les zones du pays dans lesquelles la présence de l’armée est forte.
27. La commission souligne une fois de plus que l’imposition illégale de travail forcé doit, comme le requiert l’article 25 de la convention, continuer d’être punie en tant qu’infraction pénale et non être traitée comme un problème administratif. Tout en prenant acte des mesures prises par le gouvernement s’agissant de l’enrôlement d’enfants, la commission estime essentiel que les sanctions pénales soient strictement appliquées dans le cas des affaires mettant en cause des personnels militaires, notamment dans celles qui ont trait à l’enrôlement forcé d’enfants dans les forces armées.
28. La commission considère qu’il existe des contraintes et des limites évidentes à la contribution que le mécanisme de plaintes peut apporter à l’éradication du travail forcé. Cela tient aux limites structurelles du mécanisme, et cela est amplifié par les incertitudes quant à la situation actuelle dans le pays. Le mécanisme peut assurément procurer un soulagement bienvenu pour les victimes en offrant une voie objective et sûre d’enregistrement et d’examen des plaintes et, au-delà de cette mission première, il peut envoyer un signal fort à l’adresse de ceux qui seraient tentés d’enfreindre la loi, en leur faisant comprendre qu’ils ne peuvent agir en toute impunité. Cependant, le mécanisme n’est manifestement pas adapté pour traiter certaines des violations les plus extrêmes et les plus répandues qui ont cours dans les zones éloignées et qui présentent les caractéristiques exposées dans les documents soumis par la CSI.
29. Le plus important est que le mécanisme de plaintes, tout en étant très utile, n’aborde pas les causes profondes du problème du travail forcé telles qu’elles ont été identifiées par la commission d’enquête et par l’équipe de haut niveau (document GB.282/4). Plus spécifiquement, ce mécanisme n’aborde pas les relations fondamentales par lesquelles est assurée la conduite des affaires publiques dans le pays ni le rôle de l’armée et sa politique d’autonomie, l’absence de liberté syndicale et, d’une manière générale, de liberté d’assemblée, ce que les événements récents ont illustré de manière spectaculaire. La situation au Myanmar, dix ans après la désignation de la commission d’enquête, paraît hélas renforcer l’idée qu’il reste encore à s’attaquer à ces causes profondes et ce, de manière indispensable.
30. Sur la base de ce constat, la commission estime que le seul moyen de parvenir à des progrès véritables et durables en termes d’élimination du travail forcé serait que les autorités du Myanmar démontrent sans ambiguïté leur volonté d’y parvenir. Cela requiert de la part des autorités, outre de souscrire au Protocole d’entente complémentaire, d’instaurer les conditions nécessaires au fonctionnement efficace du mécanisme de plaintes, mais aussi de procéder, comme cela aurait dû se faire depuis très longtemps, à l’abrogation des dispositions pertinentes de la législation et à l’adoption d’un cadre législatif et réglementaire propre à donner effet aux recommandations de la commission d’enquête. La commission conserve l’espoir que, ayant souscrit au Protocole d’entente complémentaire, le gouvernement prenne enfin les mesures requises pour assurer l’application de la convention en droit et dans la pratique et permettre ainsi de résoudre l’un des cas les plus graves et les plus anciens que cette commission ait jamais eu à connaître.
I. Rappel chronologique
1. Comme signalé dans sa précédente observation, la commission formule des commentaires sur ce cas particulièrement grave depuis sa première observation qui remonte à plus de trente ans. La situation au Myanmar a également fait l’objet de critiques et de condamnations massives dans le cadre de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail à dix reprises entre 1992 et 2006, dans le cadre plus général de la Conférence internationale du Travail à sa 88e session, en juin 2000, et de nouveau à sa 95e session, en 2006, et enfin au sein du Conseil d’administration du BIT, de la part aussi bien des gouvernements que des partenaires sociaux. Les observations formulées précédemment par la présente commission ces dernières années, en particulier depuis 1999, retracent l’historique détaillé de ce cas.
2. L’objet central des critiques émanant des différents organes de l’OIT est lié aux conclusions d’une commission d’enquête constituée en mars 1997 par le Conseil d’administration suite à une plainte déposée en juin 1996 sur la base de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. La commission d’enquête avait conclu que la convention était violée dans le droit national et dans la pratique et ce, d’une manière généralisée et systématique, et elle avait formulé les recommandations suivantes:
3. Dans ses observations précédentes, la commission d’experts avait identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour parvenir à un tel résultat:
– assurer que l’interdiction du travail forcé soit largement rendue publique;
4. La persistance flagrante des violations de la convention par le gouvernement et le fait que celui-ci a ignoré les recommandations de la commission d’enquête et les observations de la commission d’experts ainsi que les autres questions soulevées par les autres organes de l’OIT ont abouti, fait sans précédent, à ce que le Conseil d’administration décide à sa 277e session, en mars 2000, de mettre en œuvre l’article 33 de la Constitution de l’OIT et que la Conférence adopte une résolution en juin 2000.
II. Faits nouveaux depuis la dernière observation de la commission
5. La commission prend note des documents dont le Conseil d’administration a été saisi à ses 295e et 297e sessions (mars et novembre 2006) sur les faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, des débats consacrés à cette question par le Conseil d’administration lors de ces sessions et des conclusions auxquelles il est parvenu, et enfin des débats et conclusions de la Commission de l’application des normes et de la Commission de proposition de la Conférence, lors de la 95e session de la Conférence internationale du Travail en juin 2006.
6. La commission prend note du rapport du gouvernement, reçu par des communications des 29 septembre et 23 octobre 2006, ainsi que des commentaires de l’ex-Confédération internationale des syndicats libres (CISL) (devenue entre-temps la Confédération syndicale internationale (CSI)) contenus dans une communication datée du 31 août 2006, reçue le 5 septembre 2006, à laquelle étaient joints un certain nombre de rapports faisant état de la persistance en 2006 du recours au travail forcé au Myanmar. Dans sa synthèse des documents envoyés, la CISL explique qu’en 2006:
la situation dans son ensemble reste particulièrement consternante. Les éléments recueillis démontrent la persistance d’un travail forcé imposé par le gouvernement dans pratiquement chacun des Etats et chacune des divisions du pays, qu’il s’agisse de portage, de «projets de développement», de la construction ou de l’entretien d’infrastructures ou de camps militaires, de patrouilles et de tours de garde comme sentinelle, de débroussaillage ou d’embellissement de certains sites, de travail forcé d’enfants, y compris à travers leur conscription en tant que soldat, d’esclavage sexuel ou encore d’opérations de déminage par des civils, ou encore de confiscation de terres, récoltes, bétail et/ou argent.
La communication de la CISL a été transmise au gouvernement par lettre datée du 31 août 2006, avec cette précision que, conformément à la pratique établie, elle serait portée à l’attention de la commission en même temps que tout commentaire que le gouvernement souhaiterait faire à ce propos. Le gouvernement n’a pas répondu à ces informations très préoccupantes dans son dernier rapport, par conséquent, la commission demande au gouvernement d’y répondre dans son prochain rapport.
7. Dans sa précédente observation, la commission avait pris note d’une communication de la CISL datée du 31 août 2005, reçue le 12 septembre 2005, à laquelle étaient jointes non moins de 1 100 pages de documents provenant de sources diverses et faisant état de la persistance en 2005 du recours au travail forcé au Myanmar. La commission avait demandé au gouvernement de répondre à ces informations dans le rapport qu’il devait soumettre en 2006. La commission note que le dernier rapport reçu du gouvernement ne contient pas les réponses attendues, et la commission est donc conduite une fois de plus à demander au gouvernement de répondre dans son prochain rapport aux informations communiquées antérieurement, de même qu’à celles qui ont été communiquées par la CISL en 2006.
III. Faire suite aux recommandations de la commission d’enquête
8. Comme mentionné plus haut, la commission a exposé dans sa précédente observation les problèmes que le gouvernement devait résoudre, suite aux constatations et recommandations de la commission d’enquête. La commission note que ces problèmes n’ont toujours pas été traités et elle est donc conduite à les rappeler de manière détaillée.
1) Assurer le respect de l’interdiction du travail forcé – mécanisme de contrôle et d’examen des plaintes
9. La commission avait noté précédemment que les mesures prises par le gouvernement pour assurer le respect de l’interdiction du travail forcé incluaient le déploiement sur le terrain de sept équipes d’observation, habilitées à enquêter sur toute allégation de recours au travail forcé et à saisir de leurs conclusions un organe appelé le Comité de l’application de la convention no 29. Elle avait également noté que le 1er mars 2005 le bureau du Commandant en chef des armées a mis en place un «point focal militaire», sous la direction d’un «vice-adjudant général» assisté de sept officiers d’état-major de grade 1, point focal que le gouvernement a présenté au chargé de liaison par intérim comme étant destiné «à faciliter la coopération avec l’OIT pour les affaires de travail forcé concernant l’armée» (document GB.292/7/2(Add.), paragr. 3). Dans sa précédente observation, au vu des rapports du chargé de liaison par intérim et d’autres informations, la commission s’était déclarée extrêmement préoccupée de constater que les évaluations faites par les organes désignés ci-dessus manquaient visiblement d’indépendance et de crédibilité.
10. Dans sa précédente observation, la commission avait également noté avec préoccupation que, d’après le rapport soumis pour discussion au Conseil d’administration à sa 294e session, en novembre 2005 (document GB.294/6/2), les événements récents «ont gravement compromis la faculté du chargé de liaison par intérim de s’acquitter de ses fonctions» (paragr. 7) et, bien qu’il continue de recevoir des plaintes de la part des victimes ou de leurs représentants, dénonçant la persistance du travail forcé ou du recrutement forcé, le chargé de liaison se trouve dans l’impossibilité de soumettre ces cas aux autorités compétentes pour examen comme il le faisait par le passé, en partie parce que le gouvernement a désormais pour politique d’ordonner des poursuites contre toute personne qui dépose ce que les autorités qualifient de «plainte infondée» pour travail forcé (paragr. 8).
11. La commission prend note des éléments suivants:
– d’après un récent rapport des activités du chargé de liaison par intérim, soumis «pour discussion et orientation» au Conseil d’administration à sa 295e session, en mars 2006, le chargé de liaison a écrit le 7 décembre 2005 au «point focal militaire» désigné pour l’OIT pour lui demander un entretien, et cette demande est restée sans réponse (document GB.295/7, paragr. 8);
– en novembre 2005, le gouvernement, par l’entremise du ministre du Travail à Yangon et du Représentant permanent à Genève, a rejeté la proposition du Bureau international du Travail (ci-après dénommé le «Bureau») tendant à la mise en place d’un mécanisme de traitement des plaintes faisant intervenir un facilitateur (document GB.295/7, paragr. 15), et il a depuis lors réaffirmé son rejet d’une telle proposition;
– le Bureau a ensuite élaboré deux options possibles: l’une, désignée Option-I, consisterait à renforcer la capacité du bureau du chargé de liaison de l’OIT par intérim et à prévoir des garanties légales suffisantes pour un traitement crédible des plaintes enregistrées, ainsi que des moyens et des ressources en personnel suffisants pour faire face au surcroît de responsabilités (document GB.297/8/1, paragr. 16, et annexe III). La deuxième, désignée Option-II, consiste en un «groupe paritaire», qui serait un organe composé de deux membres devant être accrédités par les deux parties, et d’une troisième personne désignée par une institution irrécusable, pour arbitrer dans les cas éventuels de désaccord, et ce groupe paritaire examinerait confidentiellement les plaintes dont il serait saisi par les présumées victimes, en tranchant préalablement sur leur recevabilité;
– le gouvernement a rejeté la proposition du Bureau consistant en un groupe paritaire – proposition dite Option-II – lors de discussions entre les représentants du Bureau et du ministère du Travail, à Yangon, en mars 2006 (document GB.295/7, paragr. 22), et il a réaffirmé son rejet de cette proposition devant la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2006;
– le représentant gouvernemental a annoncé, lors de la séance spéciale de la Commission de la Conférence, en juin 2006, que les autorités du Myanmar étaient disposées à instaurer «à titre expérimental» un moratoire de six mois sur sa politique consistant à exercer des poursuites contre les personnes qui soutiennent des «allégations fausses» de travail forcé. En outre, au cours de cette période moratoire, le gouvernement coopérera avec le Bureau en vue de mettre en place le mécanisme dit Option-I, qui consisterait en un système construit à partir du cadre actuel du bureau du chargé de liaison par intérim;
– toujours en juin 2006, la Commission de la Conférence a déclaré dans ses conclusions que cette proposition de moratoire «venait tardivement et restait de portée limitée» et que «les paroles doivent être confirmées et complétées de toute urgence par des actions concrètes», notamment par la cessation des poursuites en cours et que «les autorités doivent à présent entamer immédiatement des discussions avec l’OIT afin d’établir aussitôt que possible un mécanisme crédible pour traiter des questions de plaintes sur le travail forcé»;
– la Commission de proposition, que la Conférence avait saisie de la question pour un examen séparé, a indiqué que le gouvernement apporterait la preuve tangible de sa volonté de coopérer en prenant les mesures suivantes: engagement immédiat de discussions avec l’OIT en vue de convenir aussi rapidement que possible de la mise en place d’un mécanisme crédible pour traiter les plaintes relatives au travail forcé. En outre, s’agissant du moratoire sur les poursuites contre les plaignants, le gouvernement devrait donner de plus amples informations sur la manière dont ce moratoire sera appliqué, annoncer clairement que toute personne déposant une plainte pendant le moratoire sera prémunie contre toute poursuite ultérieure et démontrer que ce moratoire sera considéré comme absolument contraignant (document GB.297/8/1, annexe I);
– trois affaires particulièrement marquantes de poursuites exercées par les autorités ont connu certaines suites: Su Su Nway a été libéré le 6 juin 2006; Aye Myint a été libéré de prison le 8 juillet 2006 après suspension de sa sentence sous condition; et trois personnes originaires de la localité de Aunglan (division de Magway) ont été acquittées le 20 septembre 2006 des charges de plaintes mensongères pour travail forcé, suite à l’abandon des poursuites engagées par les autorités. Comme signalé dans le rapport soumis par le Bureau «pour discussion et orientation» au Conseil d’administration à sa 297e session, en novembre 2006 (document GB.297/8/1, paragr. 5), le chargé de liaison par intérim a signalé qu’à sa connaissance ces faits nouveaux mettent un terme à toutes les affaires de poursuites ou de mesures d’emprisonnement de personnes ayant eu un rapport avec l’OIT (document GB.297/8/1, paragr. 5);
– au cours de discussions ayant eu lieu à Yangon en octobre 2006 entre, d’une part, le ministre du Travail et un groupe de travail spécialement désigné et, d’autre part, des représentants du BIT, il est apparu clairement que le gouvernement n’était pas prêt à accepter la formule dite Option-I, à travers laquelle le Bureau proposait un mécanisme de traitement des plaintes qui impliquerait un renforcement du bureau du chargé de liaison de l’OIT par intérim par des moyens adéquats en matériels et en personnel. Ensuite, contrairement à la volonté précédemment exprimée d’étudier l’Option-I et malgré la proposition de compromis avancée par le Bureau lors des discussions d’octobre, le gouvernement a signalé qu’il était prêt à accepter guère plus que la continuation du fonctionnement actuel du bureau du chargé de liaison de l’OIT par intérim, tel que ce mécanisme a été initialement conçu et structuré.
12. La commission se rallie pleinement au point de vue exprimé par le Conseil d’administration puis par la Commission de l’application des normes de la Conférence et par la Commission de proposition de la Conférence, selon lequel il est impératif que le gouvernement mette en place un mécanisme efficace de traitement des plaintes, tel que l’un quelconque des trois mécanismes déjà proposés par le Bureau, en tant que moyen de traitement des plaintes qui assure la protection des victimes et, simultanément, aboutisse à des poursuites et des sanctions contre ceux qui sont responsables de l’imposition de travail forcé, de manière à assurer pleinement le respect de l’article 25 de la convention. Cela suppose en outre que le gouvernement renonce à sa politique consistant à exercer des poursuites contre des personnes qui portent plainte pour avoir été victimes de travail forcé, politique qui a purement et simplement pour effet de réduire à néant l’objectif même du mécanisme de plainte, dont l’efficacité dépend en partie de la faculté pour les victimes d’un travail forcé de porter plainte sans crainte de représailles, et cela suppose qu’à la place le gouvernement agisse davantage dans un sens propre à ce que les auteurs du travail forcé soient poursuivis. A cet égard, la commission prie également le gouvernement de coopérer plus étroitement et de bonne foi avec le chargé de liaison par intérim et le Bureau. Elle estime qu’en s’orientant dans cette voie le gouvernement démontrera par là même qu’il a la volonté d’aborder sérieusement les autres problèmes exposés de manière détaillée ci-dessous, qui restent à résoudre conformément aux recommandations de la commission d’enquête.
2) Mettre en conformité avec la convention les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes
13. Ceci reste la position de la commission. Dans le même temps, la commission a pris note d’une «ordonnance prescrivant de ne pas faire usage des pouvoirs conférés par certaines dispositions des lois de 1907 sur les villes et de 1908 sur les villages» (ordonnance no 1/99 telle que modifiée par l’ordonnance du 27 octobre 2000 complétant l’ordonnance no 1/99), et elle a accepté que ces dispositions pourraient constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique. Elle a néanmoins fait valoir clairement qu’il faudrait pour cela que les autorités locales et les fonctionnaires civils et militaires habilités par lesdites lois à requérir le concours des autorités locales appliquent l’une et l’autre ordonnances de bonne foi.
14. La commission avait indiqué que cela présupposait deux choses:
– d’adresser des instructions précises et concrètes aux autorités civiles et militaires; et
– d’assurer que l’interdiction du travail forcé soit largement portée à la connaissance du public.
3) Adresser des instructions précises et concrètes aux autorités civiles et militaires
15. Sur ce plan, la commission a pris note, dans ses précédents commentaires, d’une série de textes, d’instructions et de lettres auxquels le gouvernement se référait dans son rapport de cette année-là. Elle avait reconnu que ces communications apparaissaient comme constituant en partie une réponse à ses demandes précédentes tendant à ce que des instructions soient adressées aux autorités militaires pour faire savoir que le travail forcé a été déclaré illégal au Myanmar. La commission avait cependant noté qu’elle n’avait été mise en possession que de bien peu d’informations, voire aucune, quant au contenu de ces communications. Elle avait jugé cet aspect particulièrement préoccupant, considérant qu’elle avait fait valoir que des instructions claires, transmises de manière effective, étaient nécessaires pour faire connaître les types de pratiques qui constituent du travail forcé et pour lesquels la réquisition de main-d’œuvre est interdite, et pour faire connaître de quelle manière les tâches en question peuvent être accomplies sans recourir au travail forcé. La commission avait énuméré un certain nombre de tâches et de pratiques qui devaient être reconnues officiellement comme étant étroitement liées à l’imposition de travail forcé. Elle les rappelle ici:
– les opérations de portage pour l’armée (ou d’autres groupes militaires ou paramilitaires, pour des opérations ou pour des patrouilles de routine);
– les activités génératrices de revenus exercées par des personnes ou des groupes de personnes (notamment le travail effectué dans des établissements agricoles ou industriels appartenant à l’armée);
– la réalisation de projets d’infrastructures nationales ou locales (routes, voies ferrées, barrages, etc.);
– les travaux de nettoyage et d’embellissement de zones rurales ou urbaines;
– la réquisition de matières ou provisions de toutes sortes, qui doit être interdite au même titre que les collectes de fonds, à l’exception des sommes dues à l’Etat ou à une collectivité territoriale conformément à la législation pertinente, étant donné que, dans la pratique, les réquisitions de services imposés par l’armée sont souvent interchangeables avec le versement d’une somme d’argent.
16. Dans sa précédente observation, la commission avait considéré que le point de départ de l’éradication du travail forcé serait de donner des instructions concrètes et très claires aux autorités quant aux types de pratiques qui constituent du travail forcé. Or l’absence d’informations, à la seule exception du contenu d’une communication, donne à entendre qu’il n’en a rien été. La commission considère pourtant qu’il ne devrait pas être difficile de déterminer le contenu des instructions écrites qui prendraient ces préoccupations en compte et incluraient tous les éléments susmentionnés.
17. Attendu que le gouvernement s’était montré disposé à poursuivre la coopération avec l’OIT, la commission avait suggéré que l’élaboration de telles instructions pourrait être une question à suivre dans le cadre de cette coopération, et cela pourrait se faire par exemple par le canal du chargé de liaison par intérim ou de tout autre mécanisme de liaison de l’OIT similaire. La commission avait demandé au gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les mesures prises à ce sujet, et de communiquer copie du texte exact des lettres et autres instructions auxquelles il s’était référé, avec une traduction pour chacune d’elles.
18. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement n’a communiqué aucune des informations demandées et qu’il n’a pas non plus répondu aux préoccupations exprimées par la commission à ce sujet. Elle note que, d’après le procès-verbal des discussions ayant eu lieu lors de la 95e session de la Conférence, en juin 2006, et aussi d’après les discussions de la Commission de l’application des normes de la Conférence, le représentant gouvernemental a répondu brièvement aux préoccupations soulevées par la commission, indiquant à propos de la communication d’instructions aux autorités civiles et militaires:
Dans la mesure du possible, une traduction en anglais du texte de ces instructions a été communiquée à la commission d’experts. S’agissant des instructions et de la correspondance émanant du ministère de la Défense, le représentant gouvernemental a souligné que celles-ci n’ont pas toutes été portées à la connaissance des autres ministères et départements du gouvernement pour une question de principe, parce qu’elles touchent aux intérêts de la sécurité nationale du pays. C’est pour cette raison qu’il a été impossible de communiquer à un organe d’une organisation internationale le texte original ou la traduction en anglais de cette correspondance et de ces instructions.
La commission demande une fois de plus au gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les mesures qu’il a prises à ce sujet et de communiquer copies des textes exacts des lettres et instructions auxquelles il se réfère, avec la traduction de chacune d’elles.
4) Assurer que l’interdiction du travail forcé soit largement portée à la connaissance du public
19. Sur cette question, la commission avait noté dans sa précédente observation que le gouvernement faisait état dans son rapport de toute une série de lettres, de briefings et de séminaires de «sensibilisation de l’opinion publique» pour illustrer les efforts déployés par les autorités publiques afin de faire connaître les interdictions relatives au travail forcé. La commission, accueillant telles qu’elles étaient présentées les informations données par le gouvernement, avait admis que des efforts semblaient avoir été accomplis par celui-ci pour diffuser l’information selon laquelle le travail forcé a été déclaré illégal au Myanmar. Néanmoins, comme pour les communications mentionnées plus haut, la commission n’a disposé d’aucune information sur le contenu des briefings et ateliers en question. Cela a suscité à nouveau de réelles préoccupations, étant donné que la commission n’a pas eu la certitude que les briefings et ateliers en question aient vraiment été un instrument efficace de diffusion de l’information. Comme dit précédemment, de tels briefings et ateliers doivent servir à diffuser clairement et de manière effective des instructions sur les types de pratiques qui constituent du travail forcé et pour lesquels la réquisition de main-d’œuvre est interdite, de même que sur la manière dont les tâches envisagées peuvent être accomplies sans recourir au travail forcé. La commission avait considéré que, dans la mesure où l’on prend la peine d’organiser de telles activités, il ne semble pas, là encore, qu’il soit difficile de développer leur contenu pour prendre en compte ces préoccupations.
20. La commission a à nouveau suggéré que l’élaboration de telles communications en vue de répondre à ses préoccupations et d’éviter ainsi qu’elle n’ait à répéter ce point pourrait être une question à suivre dans le cadre de la coopération avec l’OIT. De plus, puisque le chargé de liaison par intérim a eu l’opportunité d’assister à l’une de ces manifestations par le passé, la commission demande que celui-ci soit informé par avance de la tenue de ces briefings et ateliers et qu’il ait l’opportunité d’y assister. La commission estime qu’en lui permettant de faire cela le gouvernement démontrerait réellement son engagement par rapport à l’objectif général d’éradication du travail forcé au Myanmar.
21. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement n’a pas communiqué les informations demandées ni abordé autrement les préoccupations soulevées par la commission sur ce point. Elle note que, devant la Commission de la Conférence en juin 2006, le représentant gouvernemental a déclaré:
Quant à la large publicité qui doit être faite à l’interdiction du travail forcé, il y a quelque temps le chargé de liaison par intérim de l’OIT a été autorisé à participer à deux ateliers, l’un dans la localité de Myeik (division de Tanintharyi), l’autre dans la localité de Kawhmu (division de Yangon). Le gouvernement fera son possible pour permettre au chargé de liaison d’assister, le cas échéant, à toute réunion qui pourrait avoir lieu.
La commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations décrivant la teneur des communications faites dans le cadre des briefings, ateliers et séminaires sur l’interdiction du travail forcé, de même qu’un exemplaire de tout document établi en vue de ces briefings et ateliers. En outre, elle le prie à nouveau de fournir des informations sur les mesures prises pour assurer que le chargé de liaison par intérim soit informé par avance de la tenue de ces briefings et ateliers et qu’il ait l’opportunité d’y assister.
5) Prévoir les crédits budgétaires adéquats pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée
22. Dans ses recommandations, la commission d’enquête a souligné qu’il était nécessaire d’inscrire au budget les sommes nécessaires pour pouvoir engager de la main-d’œuvre rémunérée pour poursuivre les projets publics dont la réalisation était jusque-là fondée sur le recours à une main-d’œuvre forcée et non rémunérée. Dans ses précédentes observations, la commission avait suivi cette question, cherchant à obtenir des éléments prouvant concrètement que les crédits nécessaires pour engager une main-d’œuvre rémunérée et libre avaient été prévus au budget. Le gouvernement a toujours traité cette question en déclarant constamment qu’à tout projet correspond toujours une allocation budgétaire, laquelle recouvre le coût des matériaux et du travail. La commission avait cependant observé que, dans la pratique, le travail forcé continuait d’être imposé dans de nombreuses parties du pays, en particulier dans celles où il y a une forte présence de l’armée, et que les allocations budgétaires qui peuvent exister ne sont pas d’un montant suffisant pour ne plus avoir à recourir au travail forcé.
23. La commission rappelle que, dans son rapport précédent, le gouvernement a déclaré qu’il avait donné instruction aux différents ministères de fournir une estimation des coûts en main-d’œuvre des projets relevant de leur compétence. Dans sa précédente observation, la commission a noté qu’il était fait mention d’une «allocation budgétaire» prévue par la police du Myanmar pour le paiement des salaires des travailleurs «appelés à fournir leur travail en fonction des besoins». Tout en prenant note de ces éléments, la commission avait demandé au gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations détaillées sur les mesures prises pour que soient inscrites au budget des ressources suffisantes pour remplacer le travail forcé ou non rémunéré, estimant qu’un tel élément d’information prouverait réellement l’engagement du gouvernement pour l’élimination du travail forcé au Myanmar.
24. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement n’a pas donné les informations attendues à ce sujet. Elle note qu’en juin 2006, devant la Commission de la Conférence, le représentant du gouvernement a déclaré: «S’agissant des inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée, les crédits nécessaires ont été prévus dans le budget de l’Etat. Le gouvernement transmettra en temps voulu à la commission d’experts les informations utiles sur les allocations budgétaires.» La commission est donc conduite à demander à nouveau que le gouvernement fournisse dans son prochain rapport des informations détaillées sur les mesures prises pour que soient inscrits au budget des crédits suffisants pour remplacer le travail forcé ou non rémunéré.
IV. Remarques finales
25. Outre la communication de la CISL datée du 31 août 2006 et des rapports joints à cette communication, auxquels elle s’est référée plus haut, la commission prend note de l’appréciation générale donnée par le chargé de liaison par intérim sur la situation concernant le travail forcé, telle que reproduite sous la rubrique intitulée «Faits nouveaux depuis mars 2006» dans le rapport de la Commission de la Conférence pour la 95e session, en juin 2006:
Le chargé de liaison par intérim continue de recevoir des allégations de travail forcé. Bien qu’il ne soit pas en position de vérifier lui-même ces allégations, il est particulièrement préoccupé par les dénonciations récurrentes et détaillées – provenant de sources établies au Myanmar ou de l’autre côté de la frontière, en Thaïlande – de l’imposition de travail forcé par l’armée, ces derniers mois, dans le cadre d’opérations militaires menées dans le nord de l’Etat de Kayin (Karen). Dans ce cadre, non seulement des villageois (de même que des condamnés de droit commun choisis dans les prisons) ont été forcés d’accompagner des unités militaires pour leur servir de porteurs, et des paysans ayant des charrettes auraient été réquisitionnés pour transporter les vivres et d’autres fournitures pour les troupes de première ligne. (C.App./D.5, paragr. 10)
26. La commission note également qu’à sa 297e session, en novembre 2006, dans ses conclusions, le Conseil d’administration s’est déclaré profondément déçu de constater que les autorités n’aient pas été en mesure de convenir d’un mécanisme propre à traiter les plaintes pour travail forcé, dans le cadre du mandat sans équivoque exposé dans les conclusions de la Conférence; qu’elles n’aient pas saisi l’occasion unique qui leur était offerte (lors des discussions d’octobre 2006) de démontrer leur engagement réel à coopérer avec l’OIT pour résoudre le problème du travail forcé; et enfin de constater que, dans le même temps, demeure la préoccupation profonde et généralisée que le travail forcé a toujours cours au Myanmar. Le Conseil d’administration a conclu notamment que les autorités du Myanmar devraient s’efforcer de conclure, de toute urgence et de bonne foi, un accord avec le Bureau sur un mécanisme crédible de traitement des plaintes pour travail forcé, sur les bases spécifiques du texte de compromis proposé par l’OIT en octobre 2006, et que, quel que soit le degré d’application du moratoire sur les poursuites à l’égard des plaignants annoncé par le gouvernement, toute nouvelle initiative consistant en poursuites à l’égard de plaignants ouvrirait la voie à des mesures légales d’ampleur internationale, sur les bases de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, conformément aux conclusions de la Commission de proposition de la Conférence en juin 2006. Le Conseil d’administration a ajouté qu’un point spécial serait inscrit à l’ordre du jour de sa session de mars 2007, en vue d’étudier les options légales, y compris la possibilité de demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice sur certaines questions légales, et aussi qu’il reverrait (en mars 2007) la question de l’inscription d’un point spécifique à l’ordre du jour de la session de 2007 de la Conférence, afin que cette dernière puisse examiner quelles autres mesures pourraient être prises.
27. La commission se rallie pleinement à la position du Conseil d’administration, et elle veut croire qu’en donnant suite aux demandes pratiques très explicites qu’elle lui a adressées le gouvernement saura démontrer son attachement véritable à mettre un terme aux violations de la convention identifiées par la commission d’enquête et à résoudre ce problème très ancien de travail forcé, pour lequel il existe une solution.
1. La commission formule des commentaires sur ce cas particulièrement grave depuis sa première observation sur la convention il y a plus de trente ans. La situation au Myanmar a également suscité des critiques et des condamnations massives dans le cadre de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail à neuf reprises entre 1992 et 2005, dans le cadre plus général de la Conférence internationale du Travail à sa 88e session en juin 2000 et enfin, au sein du Conseil d’administration, aussi bien de la part des gouvernements que des partenaires sociaux. On en trouve l’historique détaillé dans les observations formulées précédemment par la présente commission ces dernières années, en particulier depuis 1999.
2. Le principal faisceau de critiques émanant des organes de l’OIT concerne principalement les résultats d’une commission d’enquête constituée en mars 1997 par le Conseil d’administration suite à une plainte déposée en juin 1996 sur la base de l’article 26 de la Constitution de l’Organisation. Cette commission d’enquête avait conclu que la convention était violée dans le droit national et dans la pratique et ce, d’une manière généralisée et systématique, et elle avait formulé les recommandations suivantes:
3. Dans ses observations précédentes de 2002 à 2005, la commission d’experts avait identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour parvenir à un tel résultat:
- émettre des instructions spécifiques et concrètes à l’adresse des autorités civiles et militaires;
- assurer que l’interdiction du travail forcé soit largement rendue publique;
- prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; et
- assurer le respect de l’interdiction du travail forcé.
4. La persistance flagrante des violations de la convention par le gouvernement, et le fait que celui-ci a systématiquement ignoré les recommandations de la commission d’enquête, les observations de la commission d’experts et les autres questions soulevées par les autres organes de l’OIT a abouti, fait sans précédent, à ce que le Conseil d’administration décide à sa 277e session, en mars 2000, de mettre en œuvre l’article 33 de la Constitution de l’OIT et que la Conférence adopte une résolution en juin 2000.
5. La commission prend note des documents dont le Conseil d’administration a été saisi à ses 292e et 294e sessions (mars et novembre 2005) sur les faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, des débats consacrés à cette question par le Conseil d’administration lors de ces sessions et des conclusions auxquelles il est parvenu et enfin des débats et conclusions de la Commission de l’application des normes de la Conférence, en juin 2005.
6. La commission prend note du rapport du gouvernement reçu dans une série de communications en date des 9 juin, 19 août, 22 août et 2 septembre 2005, ainsi que des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) contenus dans une communication en date du 31 août 2005, reçue le 12 septembre 2005, à laquelle étaient jointes non moins de 1 100 pages de documents provenant de sources diverses et faisant état de la persistance en 2005 du recours au travail forcé au Myanmar. Les documents transmis sont présentés comme venant «de pratiquement chacun des Etats constitutifs de l’Union du Myanmar et des subdivisions de ceux-ci» et font état de plusieurs centaines de situations de travail forcé consistant notamment en opérations de portage, d’entretien et réparation de camps militaires et de villages destinés aux populations déplacées, de culture de riz «paddy» et d’autres végétaux, de construction de routes, de défrichement de zones de jungle, de «déminage humain», de patrouilles et de surveillance. Par lettre du 3 octobre 2005, il a été envoyé au gouvernement un synopsis de la communication émanant de la CISL, en indiquant simultanément que, conformément à la pratique établie, la communication de la CISL serait portée à l’attention de la commission en même temps que tout commentaire que le gouvernement souhaiterait faire à ce propos. Aucune réponse n’a été reçue à ce jour de la part du gouvernement sur ces informations très préoccupantes mais la commission conçoit qu’un délai aussi court n’ait pas permis au gouvernement de répondre à une communication aussi détaillée; elle lui demande de le faire dans son prochain rapport.
7. Avant d’aborder ses préoccupations spécifiques, la commission note que, dans divers documents et diverses interventions faites devant les organes de l’OIT et lors de réunions avec diverses équipes de haut niveau, le gouvernement a déclaré explicitement son engagement à éradiquer le travail forcé du pays. Plus récemment, cette même volonté a été exprimée publiquement devant la Commission de l’application des normes de la Conférence, dont le compte rendu des travaux reproduit la déclaration du représentant gouvernemental aux termes de laquelle, dans leur détermination d’éradiquer le travail forcé et de poursuivre la coopération du Myanmar avec l’OIT, les autorités de ce pays ont pris des mesures significatives pour faire suite aux conclusions et à l’aide-mémoire établi par la Mission de très haut niveau qui s’était rendue dans le pays en février 2005.
8. A la session du Conseil d’administration de novembre 2005, l’ambassadeur du Myanmar a à nouveau exprimé, au nom de son gouvernement, sa volonté de coopérer avec l’OIT. De son côté, le Conseil d’administration a indiqué que le gouvernement devrait saisir l’opportunité offerte d’ici sa prochaine session, en mars 2006, pour reprendre un dialogue effectif avec le Bureau sur les problèmes de travail forcé et que, en attendant la reprise d’un tel dialogue, le gouvernement devrait cesser d’exercer des poursuites contre les personnes qui se déclarent victimes de travail forcé ou celles qui les représentent et s’employer plutôt à prendre des mesures contre ceux qui ont imposé du travail forcé.
9. La commission présume et espère que ces manifestations positives de la part du gouvernement ont été faites de bonne foi. Comme les autres instances de l’OIT, son souci est de voir les déclarations suivies d’effets et elle mesurera la crédibilité et l’engagement du gouvernement à la volonté dont il fera preuve en prenant les mesures qui avaient été précisées par la commission d’enquête et par la présente commission puis, plus récemment, par le Conseil d’administration.
10. Compte tenu de l’ampleur des commentaires qui ont été formulés dans chacune des instances de l’OIT depuis la commission d’enquête, la commission estime important d’énoncer avec une clarté absolue les aspects sur lesquels une réponse est attendue de la part du gouvernement en conséquence de la commission d’enquête.
1) Rendre les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, conformes à la convention.
11. Dans son observation de 2001, la commission avait fait observer que la loi sur les villages et la loi sur les villes devaient toujours être modifiées, et cette position reste aujourd’hui la sienne. Dans le même temps, la commission a accepté qu’une «ordonnance prescrivant de ne pas faire usage des pouvoirs conférés par certaines dispositions des lois de 1907 sur les villes et de 1908 sur les villages» (ordonnance no 1/99), modifiée par l’«ordonnance complétant l’ordonnance no 1/99», en date du 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique dès lors que les autorités locales et les fonctionnaires civils et militaires habilités par lesdites lois à requérir le concours des autorités locales les appliqueraient de bonne foi.
12. Comme mentionné plus haut, la commission avait indiqué que cela présupposait deux choses:
- adresser des instructions précises et concrètes aux autorités civiles et militaires;
- assurer que l’interdiction du travail forcé soit largement rendue publique.
Adresser des instructions précises et concrètes aux autorités civiles et militaires
13. Sur ce plan, la commission prend note des éléments suivants communiqués par le gouvernement:
- La traduction d’une instruction émise par la direction de la police du Myanmar, qui relève du ministère des Affaires intérieures, sous le no 1002(23)/202/Oo 4, en date du 26 mai 2005, qui se réfère à l’ordonnance no 1/99 et à celle qui la complète. Selon la traduction en anglais de cette instruction, «la réquisition de main-d’œuvre forcée étant déclarée illégale et sujette à une action législative, toutes les autorités régionales, le personnel des forces armées, le personnel des forces de police et les autres autorités civiles ont l’interdiction d’imposer du travail forcé». Le texte prévoit en outre que «le personnel des forces de police a instruction … de se conformer strictement aux ordonnances [no 1/99 et à l’ordonnance complétant celle-ci]».
- La traduction d’une «instruction supplémentaire» émise par le Département de l’administration générale du ministère des Affaires intérieures, sous le no 200/108/Oo, en date du 2 juin 2005, qui complète l’instruction no 1/2004, en date du 19 août 2004, du Département de l’administration générale. Cette instruction supplémentaire précise que l’interdiction de la réquisition de main-d’œuvre forcée prévue par l’instruction no 1/2004 s’applique aux travaux de construction (de routes, de voies de chemin de fer, de levées/barrages, comme de tous autres ouvrages d’infrastructure d’importance nationale ou régionale) et au défrichement des abords des localités et aux autres ouvrages concernant les zones rurales et urbaines. Elle enjoint également aux fonctionnaires de ne pas collecter ou demander de l’argent sans autorisation.
- Une référence à plusieurs nouvelles instructions émises en 2004 et 2005 par le ministère des Affaires intérieures: no Pa Hta Ya (Ah Hta Au)/Oo-3, en date du 12 décembre 2004, (sur la réquisition de main-d’œuvre forcée) et par le Département de l’administration générale, qui relève du ministère des Affaires intérieures: no 100/108-1/Oo-1 en date du 18 janvier 2005 (instruction des plaintes pour imposition de travail forcé) et no 100/108-1/Oo-1, en date du 10 février 2005 (ordonnances concernant l’interdiction de la réquisition).
- Une référence à la lettre no 31 BA (Na Nga Kha-2) 2000 (2), en date du 11 juillet 2000, émanant du bureau du ministre du ministère de la Défense; à une lettre no 1865/18/Oo(3), en date du 15 mai 1999; une lettre no 1865/15/Oo(3), en date du 6 novembre 2000; et un télégramme no (55-Oo) émanant du bureau du commandant en chef des armées.
- Une référence aux instructions adressées par le commandement militaire de Yangon aux divisions, aux commandements stratégiques, aux régiments et aux autres unités, leur enjoignant de «se conformer strictement à la loi».
- Une référence à une lettre no 18-3/11-Oo, en date du 10 novembre 2000, ordonnant qu’un «rapport complet des discussions» soit soumis au commandement militaire de Yangon. Le gouvernement déclare qu’«au niveau des régiments, le comité organisateur a expliqué la législation pertinente aux officiers encadrant les sections et aux officiers d’autres rangs», tous ayant été «tenus de signer qu’ils avaient compris les ordres». Le gouvernement déclare que ces documents ont été soumis à l’état-major qui, à son tour, les a transmis au commandant en chef des armées «avec les autres documents pertinents» indiquant que l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire «avaient désormais été expliquées jusqu’à l’échelon le plus élémentaire de la hiérarchie».
- Une référence à des «discussions … menées dans le cadre des réunions du comité organisateur».
- Une référence à une instruction concernant le représentant du ministère de la Défense siégeant dans le Comité d’application de la convention no 29, émanant du bureau du commandant en chef des armées et revêtant la forme d’une lettre no 4/305/3 (Kha) 18/Oo-1, en date du 27 novembre 2002.
14. La commission prend note des textes et des références à diverses instructions et lettres susmentionnées. Elle reconnaît que ces communications apparaissent comme constituant en partie une réponse à ses demandes précédentes tendant à ce que des instructions soient adressées aux autorités militaires pour faire savoir que le travail forcé a été déclaré illégal au Myanmar. Cependant, la commission n’a été mise en possession que de bien peu d’informations, voire aucune, quant au contenu de ces communications. Cet aspect est particulièrement préoccupant, considérant que la commission avait fait valoir que des instructions claires, transmises de manière effective, étaient nécessaires pour faire connaître les types de pratiques qui constituent du travail forcé et pour lesquelles la réquisition de main-d’œuvre est interdite, de même que la manière dont les tâches en question peuvent être accomplies sans recourir au travail forcé. Dans une précédente observation, la commission avait énuméré un certain nombre de tâches et de pratiques qui devaient être reconnues officiellement comme étant étroitement liées à l’imposition de travail forcé, à savoir:
- les opérations de portage pour l’armée (ou d’autres groupes militaires ou paramilitaires, pour des opérations ou pour des patrouilles de routine);
- la construction ou la remise en état de camps et autres installations militaires;
- les autres fonctions de soutien logistique fournies à l’armée (guides, messagers, cuisiniers, nettoyeurs, etc.);
- les activités génératrices de revenus exercées par des personnes ou des groupes de personnes (notamment le travail effectué dans des établissements agricoles ou industriels appartenant à l’armée);
- la réalisation de projets d’infrastructures nationales ou locales (routes, voies ferrées, barrages, etc.);
- les travaux de nettoyage et d’embellissement de zones rurales ou urbaines;
- la réquisition de matières ou provisions de toutes sortes, qui doit être interdite au même titre que les collectes de fonds, à l’exception des sommes dues à l’Etat ou à une collectivité territoriale conformément à la législation pertinente, étant donné que, dans la pratique, les réquisitions de services imposés par l’armée sont souvent interchangeables avec le versement d’une somme d’argent.
15. Le point de départ de l’éradication du travail forcé est de donner des instructions concrètes et très claires aux autorités quant aux types de pratiques qui constituent du travail forcé. Or, par leur effet conjugué, l’absence d’informations et le seul exemple de contenu d’une communication (l’instruction supplémentaire no 200/108/Oo du 2 juin 2005) donnent à entendre qu’il n’en a rien été. Il ne semble pas à la commission qu’il soit difficile de déterminer le contenu de la communication écrite qui prendrait ces préoccupations en compte et inclurait tous les éléments susmentionnés.
16. Attendu que le gouvernement se montre disposé à poursuivre la coopération avec l’OIT, la commission suggère que l’élaboration de telles communications, dans le but de faire suite aux préoccupations exprimées par la commission et lui éviter ainsi de continuer de répéter ce point, pourrait être la matière d’une telle coopération. Cela pourrait se faire par exemple par l’intermédiaire du chargé de liaison par intérim ou de tout autre mécanisme de liaison similaire de l’OIT. La commission demande au gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les mesures qu’il a prises à ce sujet et de communiquer copie des textes exacts des lettres et instructions auxquelles il s’est référé ainsi qu’une version traduite.
2) Assurer que l’interdiction du travail forcé a été largement portée à la connaissance du public
17. Sur cette question, la commission note que, dans son dernier rapport (annexe C), le gouvernement fait état des éléments suivants:
- les lettres no 31, no 1865/18/Oo (3) et no 1865/15/Oo (3) et le télégramme no 55-Oo, spécifiquement mentionnés ci-dessus, ont été adressés au Bureau du commandant en chef des armées et «ont également été transmis à tous les quartiers généraux de commandement de division pour expliquer complètement et clairement et donner ordre strict à tous les Tatmadawmen de ne pas recourir au travail forcé et aux réquisitions de main-d’œuvre»;
- une série de «briefings» ont été organisés entre 1999 et 2004 dans 14 Etats et divisions, aux niveaux du district, de l’agglomération, du village et du secteur, par des représentants officiels du Département de l’administration générale, briefings dans le cadre desquels a été présentée une «explication» de l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire;
- un tableau de données chiffrées ayant pour objet de montrer le nombre de participants ayant assisté à ces briefings: un total de 21 505 personnes pour 65 briefings au niveau du district; un total de 240 500 personnes pour 5 briefings dans chacune des 325 agglomérations; un total de 263 427 personnes ayant assisté à un briefing unique dans 1 648 secteurs et villages; et un total global de 525 432 personnes ayant assisté à 18 172 briefings;
- une série de séminaires, de deux jours, de «sensibilisation de l’opinion publique» sur l’application de la convention no 29, organisés par les équipes d’observation sur le terrain et qui auraient eu lieu entre mai et décembre 2004.
18. La commission, acceptant telle qu’elles sont présentées les informations fournies par le gouvernement, reconnaît que des efforts semblent avoir été accomplis par celui-ci pour diffuser l’information selon laquelle le travail forcé a été déclaré illégal au Myanmar. Néanmoins, comme pour les communications visées ci-dessus, la commission n’est en possession d’aucun élément concernant la teneur des briefings et des ateliers. Cela suscite à nouveau de réelles préoccupations, étant donné que la commission n’a pas la certitude que les briefings et ateliers en question aient été un instrument efficace de diffusion de l’information. Comme dit précédemment, de tels briefings et ateliers doivent servir à diffuser clairement et de manière effective des instructions sur les types de pratiques qui constituent du travail forcé et pour lesquelles la réquisition de main-d’œuvre est interdite, de même que sur la manière dont les tâches envisagées peuvent être accomplies sans recourir au travail forcé. Dans la mesure où l’on prend la peine d’organiser de telles activités, il ne semble pas, là encore, à la commission qu’il soit difficile de développer leur contenu pour prendre en compte ces préoccupations.
19. La commission suggère que l’élaboration de telles communications en vue de répondre à ses préoccupations et d’éviter ainsi qu’elle n’ait à répéter ce point pourrait être une question à suivre dans le cadre de la coopération avec l’OIT. La commission prie le gouvernement de communiquer, dans son prochain rapport, des informations exposant le contenu des communications faites dans le cadre des briefings et ateliers sur l’interdiction du travail forcé, de même qu’un exemplaire de tout document établi en vue de ces briefings et ateliers. De plus, puisque le chargé de liaison par intérim a eu l’opportunité d’assister à l’une de ces manifestations par le passé, la commission demande que celui-ci soit informé par avance de la tenue de ces briefings ou ateliers et qu’il ait l’opportunité d’y assister. En lui permettant de faire cela, le gouvernement démontrerait réellement son engagement par rapport à l’objectif général d’éradication du travail forcé du Myanmar.
3) Prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée.
20. Dans ses recommandations, la commission d’enquête a souligné qu’il était nécessaire de budgéter les sommes permettant d’engager de la main-d’œuvre rémunérée pour la réalisation des projets publics dont l’exécution est fondée aujourd’hui sur le recours à un travail forcé et non rémunéré. Dans son rapport, l’Equipe de haut niveau déclarait (en 2001) n’avoir été mise en possession d’aucun élément lui permettant de conclure que les autorités auraient effectivement prévues une réelle solution de rechange leur permettant de ne plus recourir à une main-d’œuvre non rémunérée travaillant sous la contrainte pour la réalisation des projets militaires ou d’infrastructure publique.
21. Dans ses précédentes observations, la commission avait poursuivi la question et cherché à obtenir des preuves concrètes que les moyens adéquats d’engager une main-d’œuvre rémunérée et libre avaient été budgétés. En réponse, le gouvernement a réitéré ses précédentes déclarations, selon lesquelles à tout projet correspond toujours une allocation budgétaire, laquelle recouvre le coût des matériaux et du travail. La commission a cependant observé que, dans la pratique, le travail forcé continue d’être imposé dans de nombreuses parties du pays, en particulier dans celles où il y a une forte présence de l’armée, et que les allocations budgétaires qui peuvent exister ne sont pas d’un montant suffisant pour ne plus avoir à recourir au travail forcé.
22. Dans son dernier rapport, le gouvernement déclare qu’il a donné instruction aux différents ministères de fournir une estimation des coûts en main-d’œuvre des projets relevant de leurs compétences. La commission note également qu’il est fait mention d’une «allocation budgétaire» établie par la police du Myanmar pour le paiement des salaires des travailleurs «appelés à fournir leur travail en fonction des besoins» (annexe A au rapport du gouvernement).
23. Tout en prenant note de ces éléments, la commission, considérant le caractère généralisé des pratiques de travail forcé qui restent de manière persistante l’objet des préoccupations de la commission d’enquête et de chacun des organes de l’OIT, y compris de la présente commission jusqu’à ce jour, prie à nouveau le gouvernement de donner dans son prochain rapport des informations détaillées sur les mesures prises pour que soient budgétés des moyens suffisants pour remplacer le travail forcé ou non rémunéré. Elle insiste sur le point que, en répondant à cette demande, le gouvernement démontrerait réellement son engagement par rapport à l’objectif général d’éradication du travail forcé du Myanmar.
4) Assurer le respect de l’interdiction du travail forcé - mécanisme de contrôle
24. La commission avait noté précédemment que les mesures prises par le gouvernement pour assurer le respect de l’interdiction du travail forcé incluaient le déploiement de sept équipes d’observation sur le terrain, habilitées à enquêter sur toute allégation de recours au travail forcé et à saisir de leurs conclusions le Comité de l’application de la convention no 29.
25. La commission prend également note des éléments suivants:
- le rapport soumis par le chargé de liaison par intérim au Conseil d’administration en mars 2005, dont il ressort que, sur les quarante-six cas dont le Comité d’application de la convention no 29 a été saisi en 2004, cinq seulement ont été retenus comme étant réellement constitutifs de travail forcé (document GB.292/7/2, paragr. 11);
- de l’avis du chargé de liaison par intérim, selon lequel «le mécanisme mis en place par les autorités pour traiter les allégations de travail forcé, mécanisme qui consiste à envoyer une équipe spéciale composée de hauts fonctionnaires gouvernementaux dans la région afin d’y mener une enquête, n’est pas vraiment adapté, si l’on veut bien considérer que le nombre de cas est allé en augmentant. De plus, au fur et à mesure de cette augmentation du nombre des allégations de travail forcé, il est apparu que leur instruction revêtait de plus en plus la forme d’une procédure interne menée par le Département de l’administration générale ou par le ministère de la Défense» (document GB.292/7/2, paragr. 12);
- le chargé de liaison par intérim a continué d’être saisi, en décembre 2004, de nouvelles plaintes relatives au travail forcé et à la réquisition de main-d’œuvre, qui ont donné lieu le même mois à cinq interventions de sa part auprès du Comité d’application de la convention no 29 et, au 18 février 2005, il était saisi de 14 nouvelles affaires, qui ont donné lieu à cinq autres interventions de sa part le même mois (document GB.292/7/2, paragr. 9 et 13);
- selon un rapport réactualisé soumis à la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2005, le chargé de liaison par intérim a fait cinq autres interventions en mars et en avril 2005 (CIT, 93e session, document C.APP/D.6/D, paragr. 11);
- d’après le plus récent rapport du gouvernement (annexe F) et les rapports du chargé de liaison par intérim (CIT, 93e session, C.APP/D.6/D.III, paragr. 13; document GB.292/7/2, paragr. 14; document GB.292/7/2(Add.), paragr. 4), s’agissant des suites données en mars, avril et mai 2005 par le Comité d’application de la convention no 29 aux interventions du chargé de liaison par intérim, dans trois affaires seulement les investigations menées par les équipes d’observation déployées sur le terrain ont abouti à des poursuites et des sanctions à l’égard de personnalités officielles locales. A cela s’ajoute que, dans toutes les affaires mettant en cause les forces armées ou des fonctionnaires de police, les allégations ont soit été déclarées sans fondement, suite à des enquêtes internes, soit classées sans suite;
- il ressort du rapport soumis par le chargé de liaison par intérim à la Commission de la Conférence en juin 2005 (C.APP/D.6/D.III, paragr. 12 et 14), de même que de l’intervention du représentant gouvernemental devant cette même commission, que le gouvernement a commencé à exercer systématiquement des poursuites contre les victimes de travail forcé qui déposent ce que le gouvernement présente comme des «plaintes infondées» et que, face à cette situation, le BIT a donné instruction au chargé de liaison par intérim de suspendre temporairement le traitement de toute nouvelle allégation de travail forcé;
- le 1er mars 2005, le bureau du commandant en chef des armées a mis en place un «centre de coordination», sous la direction d’un «vice-adjudant général» assisté de sept officiers d’état-major de grade 1, centre de coordination que le gouvernement a présenté au chargé de liaison par intérim comme étant destiné «à faciliter la coopération avec l’OIT pour les affaires [de travail forcé] concernant l’armée» (document GB.292/7/2(Add.), paragr. 3). En avril 2005, deux des interventions du chargé de liaison par intérim, qui concernaient des allégations de recrutement forcé de personnes mineures dans l’armée, ont été adressées à ce nouveau centre de coordination (C.APP/D.6/D.III, paragr. 11). La commission note également que le gouvernement indique dans son rapport que le centre de coordination de l’armée a enquêté, à ce jour, sur trois des cinq cas de présomption de recrutement forcé, à la suite de quoi il a classé l’une des affaires sans suite et, dans les deux autres, «deux personnes ont été restituées à la garde de leurs parents», sans qu’aucune poursuite n’ait manifestement été exercée à l’égard des responsables. Le gouvernement indique qu’une enquête a été ouverte au sujet des deux autres cas de recrutement forcé et que le seul cas présumé de travail forcé imposé par l’armée fait actuellement l’objet d’une enquête interne, dont les résultats doivent être communiqués au chargé de liaison par intérim;
- le gouvernement déclare dans son dernier rapport que, parmi les 50 (cinquante) plaintes pour travail forcé ou recrutement forcé déposées en 2004, 23 mettaient en cause les forces armées et, dans deux des quinze cas de recrutement forcé par l’armée, «des dispositions … ont été prises à l’encontre de ceux qui avaient pratiqué un recrutement contraire à la législation et au règlement en vigueur»;
- certains éléments contenus dans le rapport du gouvernement et les tableaux qui y sont joints (annexes E et G) tendent à démontrer que «des mesures ont été prises» à l’encontre d’officiers et d’autres membres de l’armée dans 17 affaires de recrutement forcé en 2002 et dans cinq affaires de travail forcé en 2003.
26. Compte tenu de ce qui précède, la commission est extrêmement préoccupée de constater que les évaluations faites par les équipes d’observation sur le terrain et le Comité d’application de la convention no 29, de même que celles faites jusqu’à présent par le Centre de coordination des armées, semblent visiblement manquer d’indépendance et de crédibilité. La commission note avec préoccupation que, d’après le rapport soumis pour discussion au Conseil d’administration à sa 294e session, en novembre 2005 (document GB.294/6/2), les événements récents «ont gravement compromis la faculté du chargé de liaison par intérim de s’acquitter de ses fonctions» (paragr. 7) et, bien qu’il continue de recevoir des plaintes de la part des victimes ou de leurs représentants, dénonçant la persistance du travail forcé ou du recrutement forcé, le chargé de liaison se trouve dans l’impossibilité de soumettre ces cas aux autorités compétentes pour examen comme il le faisait par le passé parce que le -gouvernement a désormais pour politique d’exercer des poursuites contre toute personne qui dépose ce que les autorités qualifient de «plainte infondée» pour travail forcé (paragr. 8).
27. La commission se rallie pleinement au point de vue exprimé par le Conseil d’administration, selon lequel il est impératif que le gouvernement cesse de poursuivre les personnes qui portent plainte pour avoir été victime de travail forcé et qu’il s’emploie plutôt à prendre des mesures plus énergiques afin que ce soit les auteurs de ces pratiques qui soient poursuivis. Cela suppose que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour mettre en place des procédures crédibles, équitables et plus efficaces d’investigation des allégations de travail forcé, en particulier celles qui mettent en cause l’armée. A cet égard, la commission prie également le gouvernement de coopérer plus étroitement avec le chargé de liaison par intérim et le Bureau. Elle réaffirme l’importance qu’il y a d’instituer un mécanisme, comme celui du Facilitateur, en tant qu’organe crédible pour traiter des plaintes, protéger les victimes et imposer des sanctions à l’égard de ceux qui ont imposé du travail forcé.
28. Outre la communication de la CISL datée du 31 août 2005, à laquelle elle s’est référée plus haut, la commission prend note de l’appréciation générale du chargé de liaison par intérim sur la situation concernant le travail forcé, appréciation selon laquelle «se fondant sur les informations dont il dispose, le chargé de liaison estime que, malgré certaines améliorations constatées depuis que la commission d’enquête a eu lieu, … le travail forcé … reste largement répandu dans tout le pays, particulièrement dans les zones frontalières ou l’armée est fortement présente» (document GB.292/7/2, paragr. 8).
29. La commission prend également note des conclusions concernant le Myanmar adoptées par le Conseil d’administration à sa 294e session, en novembre 2005. Dans ses conclusions, le Conseil d’administration déclare que le sentiment général qui prévaut est celui d’une grave préoccupation devant la dégradation de la situation. Les membres du Conseil d’administration ont exprimé en particulier leur inquiétude et leurs critiques suite aux menaces dont le chargé de liaison par intérim et le Facilitateur informel ont fait l’objet et qui ont eu pour effet de paralyser son action et l’empêcher de s’acquitter de ses fonctions. Plusieurs membres du Conseil d’administration ont estimé que le seul moyen qui reste à l’Organisation, compte tenu des nouveaux développements extrêmement inquiétants, est de charger la Conférence elle-même de revoir les mesures qu’elle a adoptées dans sa résolution de 2000 sur la base de l’article 33 de la Constitution, en inscrivant spécifiquement un point à cette fin à l’ordre du jour de la Conférence de 2006 en vue de revoir ces mesures et, le cas échéant, les renforcer. Toutefois, compte tenu de la volonté exprimée par le représentant du gouvernement de coopérer, et du fait que toute initiative visant à faire adopter des mesures par la Conférence devra en tout état de cause être confirmée à sa prochaine session, le Conseil d’administration a demandé entre autres choses que les instances gouvernementales du Myanmar à leurs différents niveaux, y compris au niveau le plus élevé, mettent à profit le temps qui reste jusqu’en mars 2006 pour rétablir un dialogue effectif avec le Bureau international du Travail.
30. La commission se rallie pleinement au point de vue exprimé par le Conseil d’administration et veut croire que, en déférant aux demandes d’ordre pratique très explicites qu’elle lui adresse, le gouvernement démontrera son engagement sincère en faveur d’une solution - qui existe indéniablement - à ce problème particulièrement ancien de travail forcé.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 95e session.]
1. La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des observations de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) contenues dans des communications en date du 14 juin, 31 août, 1er septembre, 7 octobre et 10 novembre 2004. Ces observations, auxquelles sont joints de nombreux documents faisant état de la persistance du recours au travail forcé au Myanmar, ont été communiquées au gouvernement pour tout commentaire que celui-ci souhaiterait formuler à ce propos. La commission prend note également des documents soumis au Conseil d’administration à ses 289e et 291e sessions (mars et novembre 2004) relatifs aux faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention no 29, ainsi que des débats qui ont eu lieu au Conseil d’administration au cours de ces mêmes sessions et à la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2004.
2. Cette année encore, la commission examine les mesures prises par le gouvernement pour donner effet aux recommandations de la commission d’enquête instituée par le Conseil d’administration en mars 1997 suite à une plainte déposée en juin 1996 en vertu de l’article 26 de la Constitution. Dans le rapport qu’elle a publié en juillet 1998, la commission d’enquête a conclu que la convention était violée dans la législation nationale et dans la pratique de façon généralisée et systématique, et a adopté les recommandations suivantes:
a) que les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient mis en conformité avec la convention;
b) que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires;
c) que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l’article 374 du Code pénal pour le fait d’exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées.
Modification de la législation, paragraphe 539 a) du rapport de la commission d’enquête
Bref rappel des faits
3. La commission a déjà exposé l’historique de cette situation en détail dans des observations antérieures. En bref, la commission rappelle que, dans son rapport, la commission d’enquête priait instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les lois de 1907 sur les villes et de 1908 sur les villages, qui confèrent aux autorités locales de larges pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre, en violation de la convention, soient sans délai rendues conformes à la convention. En résumé, aux termes de certaines dispositions de ces lois, du travail ou des services non volontaires peuvent être imposés à toute personne résidant dans un arrondissement rural ou urbain et la non-obtempération à une réquisition faite en application de la législation est passible de sanctions pénales. La commission d’enquête a ainsi constaté que ces lois prévoient l’imposition d’un «travail forcé ou obligatoire» relevant de la définition de l’article 2, paragraphe 1, de la convention.
4. Dans son observation de 2001, la commission notait que, si la loi sur les villages et la loi sur les villes n’avaient toujours pas été modifiées, «une ordonnance prescrivant de ne pas faire usage des pouvoirs conférés par certaines dispositions des lois de 1907 et 1908, sur les villes et sur les villages», ordonnance no 1/99, modifiée par «l’ordonnance complétant l’ordonnance no 1/99» datée du 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique dès lors que les autorités locales et les fonctionnaires civils et militaires habilités par lesdites lois à requérir le concours des autorités locales, appliqueraient ces ordonnances de bonne foi. En effet, l’ordonnance prévoit la possibilité de pouvoir imposer du travail obligatoire exceptionnellement, en raison d’un intérêt direct et important pour la collectivité et la population en général et d’une nécessité actuelle ou imminente, pour lesquels il a été impossible de se procurer une main-d’œuvre volontaire malgré l’offre d’un salaire normal. Elle prévoit également la possibilité d’émettre des instructions qui peuvent annuler les restrictions aux pouvoirs de réquisition. La commission avait dès lors précisé qu’une application de bonne foi de cette ordonnance impliquait l’adoption des mesures indiquées, tant par la commission d’enquête dans les recommandations figurant au paragraphe 539 b) de son rapport que par cette commission dans ses précédents commentaires (en ce qui concerne les instructions spécifiques et les prévisions budgétaires nécessaires pour engager une main-d’œuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunérées).
5. La commission observe que, comme il est établi dans les paragraphes suivants, les mesures demandées n’ont pas été prises ou ne l’ont été que partiellement et que le recours au travail forcé persiste à une grande échelle. Il apparaît que les ordonnances n’ont pas été efficaces et qu’il devient encore plus impératif de procéder sans délai à la modification ou à l’abrogation des lois sur les villes et les villages afin d’éliminer, à la base, le fondement législatif du recours au travail forcé et l’incompatibilité de ces textes avec la convention. La commission note que, dans son allocution devant la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2004, le représentant gouvernemental du Myanmar a déclaré que «en ce qui concerne l’amendement de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, le gouvernement envisage les divers moyens de modifier certaines de leurs dispositions et il a consulté certaines parties à ce sujet». Rappelant que la commission d’enquête avait recommandé que ces modifications devraient être effectuées sans délai et achevées au plus tard le 1er mai 1999, la commission espère que le gouvernement prendra enfin les mesures nécessaires pour modifier dans les plus brefs délais les dispositions en cause des lois de 1907 sur les villes et de 1908 sur les villages, comme il le promet depuis plus de trente ans.
Mesures tendant à mettre un terme à l’imposition de travail forcé dans la pratique (paragr. 539 b) du rapport de la commission d’enquête) et informations disponibles sur la pratique existante
6. La commission rappelle que, dans ses recommandations, la commission d’enquête avait souligné qu’outre la modification de la législation des mesures concrètes devaient être prises immédiatement pour mettre un terme à l’imposition du travail forcé dans la pratique, en particulier par l’armée. Dans ses précédentes observations, cette commission avait identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour parvenir à un tel résultat: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l’adresse des autorités civiles et militaires; assurer une large publicitéà l’interdiction du travail forcé; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le suivi de l’interdiction du travail forcé.
7. Instructions spécifiques et concrètes. Dans ses observations précédentes, la commission avait attiré l’attention du gouvernement sur le fait que, en l’absence d’instructions spécifiques et concrètes permettant aux autorités civiles et militaires d’identifier les diverses formes et modalités d’imposition du travail forcé, il était difficile de mettre fin au travail forcé dans la pratique. La commission avait observé que, bien que des «explications», «instructions» et «directives» aient étéémises par les bureaux des conseils pour la paix et le développement à différents niveaux et par les services du département de l’Administration générale, du département de la Justice, de la Police et des Tribunaux locaux, et malgré les orientations données par les équipes d’observation sur le terrain à l’occasion de leurs déplacements dans le pays, le gouvernement n’avait donné aucune précision quant à la teneur desdites explications, instructions, directives ou orientations, ni communiqué aucun texte d’instruction ou directive donnant le détail des travaux pour lesquels la réquisition de main-d’œuvre était interdite ou spécifiant la manière dont certains travaux devaient être accomplis sans recourir au travail forcé.
8. La commission note que, dans son dernier rapport, le gouvernement affirme avoir fait tous les efforts pour garantir l’interdiction de l’utilisation du travail forcé prévue par l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire. Le gouvernement communique par ailleurs trois documents censés appuyer ses dires (les instructions nos 1/2004 du 19 août 2004 du département de l’Administration générale, en langue birmane; la directive de la Cour suprême adressée aux juridictions des Etats, divisions, districts et circonscriptions par lettre en date du 2 novembre 2000 et la lettre no 1002(3)/202/G4 «tendant à prévenir la réquisition illicite de travail forcé», signée du directeur de la police, déjà communiquée au BIT). La commission observe qu’aucun de ces documents ne permettrait aux autorités concernées d’identifier les pratiques qui constituent du travail forcé.
9. La commission note également, dans le dernier rapport du gouvernement, ainsi que dans l’allocution du représentant du gouvernement devant la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2004, la référence à la tenue d’ateliers d’information sur la mise en œuvre de la convention no 29 dans différentes régions du pays au cours de l’année 2004. La commission considère que ces ateliers ne semblent pas avoir produit les effets escomptés et que, tant que n’auront pas été prises des mesures efficaces permettant aux autorités civiles et militaires d’identifier les diverses formes et modalités d’imposition du travail forcé qui doivent être interdites, il ne pourra pas être mis un terme à celui-ci dans la pratique.
10. En résumé sur ce point, il ressort une fois de plus des informations communiquées par le gouvernement que des instructions claires et efficacement transmises sont encore requises pour faire connaître à tous les représentants de l’autorité, y compris aux membres des forces armées, la nature des pratiques qui constituent du travail forcé et pour lesquelles la réquisition de main-d’œuvre est interdite ainsi que la manière dont ces mêmes tâches doivent dorénavant être exécutées. Dans une précédente observation, la commission énumérait un certain nombre d’activités et de pratiques ayant un rapport étroit avec l’imposition de travail forcé, à savoir:
- le portage pour les militaires (ou d’autres groupes paramilitaires/militaires, pour des campagnes militaires ou pour des patrouilles régulières);
- la construction ou réparation d’installations/camps militaires;
- les autres formes d’appui à ces camps (guides, estafettes, cuisiniers, nettoyeurs, etc.);
- la génération de revenus par des particuliers ou des groupes (y compris travail dans des projets agricoles ou industriels dont l’armée est propriétaire);
- les projets d’infrastructure nationaux ou locaux (routes, voies ferrées, barrages, etc.);
- le nettoyage/embellissement des zones rurales ou urbaines;
- la réquisition de matériaux ou de fournitures, de quelque nature qu’ils soient, doit être interdite, de même que les demandes d’argent, sauf s’il s’agit de sommes dues à l’Etat ou à une municipalité, aux termes de la législation applicable, étant donné qu’en pratique les demandes, par les militaires, d’argent ou de services sont souvent interchangeables.
La commission demande encore une fois au gouvernement de s’attaquer à ces problèmes de toute urgence.
11. Publicité faite aux ordonnances. La commission avait noté précédemment, à la lecture des informations communiquées par le gouvernement, que des mesures continuaient d’être prises en vue de rendre l’interdiction du travail forcé, prévue dans l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire, largement connue de toutes les autorités concernées de même que du grand public. Elle avait noté que ces mesures incluaient la diffusion d’informations au moyen de bulletins et de brochures, la distribution des traductions des ordonnances dans les langues ethniques et le travail des équipes d’observation sur le terrain.
12. Dans son dernier rapport, le gouvernement réaffirme que des copies de l’ordonnance no 1/99 et de son ordonnance complémentaire ont été largement diffusées dans l’ensemble du pays. La commission comprend, d’après les informations communiquées par le gouvernement, qui semblent confirmées par le chargé de liaison par intérim, que la traduction des ordonnances dans les quatre dialectes chin a été effectuée. A ce propos, la commission note que, selon le chargé de liaison par intérim, «bien que toutes les traductions soient achevées, il ne les a vues affichées dans aucune des régions ethniques qu’il a visitées et il n’a rencontré personne dans ces régions qui les ait vues; il n’est donc toujours pas convaincu qu’elles ont été largement distribuées par les autorités» (document GB.289/8 soumis à la 289e session du Conseil d’administration en mars 2004, paragr. 10).
13. La commission espère que le gouvernement communiquera copie des ordres adressés aux forces armées ainsi que des informations sur les réunions, ateliers et séminaires organisés pour assurer la diffusion de ces ordres au sein des forces armées. Elle renouvelle l’espoir que des mesures seront prises pour assurer que des textes dûment traduits soient diffusés et affichés dans les zones ethniques, qui sont celles où les pratiques de travail forcé ont le plus souvent cours.
14. Inscription au budget des crédits adéquats. Dans ses recommandations, la commission d’enquête a insisté sur la nécessité d’inscrire au budget de l’Etat les crédits nécessaires pour rémunérer les travailleurs libres qui seront chargés d’accomplir le travail effectué jusqu’à présent par une main-d’œuvre forcée et non rémunérée. Dans son rapport, la Mission de haut niveau (2001) avait indiqué qu’aucun élément ne lui permettait de conclure que les autorités ont bien prévu le remplacement de la main-d’œuvre forcée et gratuite réquisitionnée pour aider l’armée ou pour réaliser les projets de travaux publics.
15. Dans des observations précédentes, la commission a abordé cette question, recherchant des éléments tangibles permettant d’établir que des crédits budgétaires adéquats ont été prévus pour recruter de la main-d’œuvre volontaire et rémunérée. En réponse, le gouvernement réitérait ses déclarations antérieures, selon lesquelles il existe toujours une inscription budgétaire afférente à chaque projet, cette inscription couvrant le coût des matériaux et celui de la main-d’œuvre. Elle a observé cependant que, dans la pratique, le travail forcé continue d’être imposé aujourd’hui dans de nombreuses régions du pays, notamment dans celles où l’armée est fortement présente, et que par conséquent les allocations budgétaires pouvant exister n’étaient pas suffisantes pour éviter le recours au travail forcé. Le gouvernement n’a communiqué aucune information sur ce point dans son dernier rapport. La commission demande de nouveau que des ressources budgétaires adéquates soient allouées aux autorités civiles et militaires afin que celles-ci puissent s’acquitter de leurs tâches sans recourir à du travail forcé et que le prochain rapport fasse état des mesures prises en ce sens.
16. Mécanismes de contrôle. En ce qui concerne les mesures prises par le gouvernement pour assurer le suivi de l’interdiction du travail forcé, la commission prend note des informations communiquées par le représentant gouvernemental à la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2004. Elle note que parmi ces mesures figure la mise en place de sept équipes d’observation sur le terrain habilitées à diligenter des enquêtes sur les allégations de recours au travail forcé, et dont les conclusions sont soumises au Comité d’application de la convention no 29. En ce qui concerne les activités de ce comité, la commission note, selon les informations figurant dans le document soumis au Conseil d’administration en novembre 2004 (document GB.291/5/2, paragr. 13) que: «la récente expérience du chargé de liaison par intérim a montré que les plaintes spécifiques pour travail forcé portées à l’attention du Comité d’application de la convention no 29 sont systématiquement rejetées et que celles qui sont portées directement devant les tribunaux sont déclarées irrecevables. On est ainsi amenéà constater un manque de crédibilité de la réaction des autorités face à de telles plaintes, ce qui est particulièrement préoccupant compte tenu de la nature des affaires en question. En effet, si un certain nombre des allégations soumises aux autorités portent sur des cas d’une extrême gravité et mettent en cause l’armée, notamment dans les zones reculées, il en est d’autres qui concernent des cas de travail forcé comparativement mineurs et mettent en cause des responsables locaux dans le centre du Myanmar. Dans ces derniers cas, il devrait être facile de prendre des mesures, compte tenu de la nature des délits et du lieu où ils ont été commis. Par conséquent, le fait que les autorités n’aient pris aucune disposition pour y mettre bon ordre ne peut qu’éveiller des doutes sérieux quant aux perspectives de progrès réels dans les zones sous le contrôle de l’armée, où tout semble indiquer que la situation en matière de travail forcé est d’un tout autre degré de gravité, tant par les formes de réquisition que par leur ampleur.»
17. La commission note également que, «de l’avis du chargé de liaison par intérim, le mécanisme mis en place par les autorités pour traiter les allégations de travail forcé, et qui consiste à envoyer une équipe spéciale composée de hauts fonctionnaires gouvernementaux dans la région afin d’y mener une enquête, n’est pas bien adapté compte tenu de l’augmentation du nombre de cas» (document GB.291/5/1, paragr. 12). Le chargé de liaison par intérim indique que les allégations de travail forcé font généralement l’objet d’une enquête interne au sein du ministère de l’Administration générale. Les cas concernant l’armée (recrutement forcé ou travail forcé prétendument imposé par l’armée) sont soumis par le Comité d’application de la convention no 29 au représentant du ministère de la Défense. Ces cas font également l’objet d’une enquête interne de l’armée. La commission note que «sur les 38 cas soumis au Comité d’application de la convention no 29, des réponses ont été reçues pour 18. Dans tous les cas, l’allégation de travail forcé a été rejetée. Sur les six cas où les plaignants se sont adressés directement à la justice, trois ont été rejetés au motif qu’il n’y avait pas d’indices probants de travail forcé (…).»
18. La commission observe, comme le chargé de liaison par intérim, que les contrôles effectués par les équipes d’observation sur le terrain et par le Comité d’application de la convention no 29 semblent manquer de crédibilité, en particulier compte tenu du fait que le BIT continue de recevoir des preuves dignes de foi que cette pratique se perpétue à une grande échelle. Elle réitère l’espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour instaurer une procédure crédible, juste et plus efficace d’enquête sur les plaintes pour travail forcé, notamment sur les plaintes mettant en cause l’armée, et qu’il coopérera de façon plus étroite à l’avenir avec le chargé de liaison.
Informations disponibles sur la pratique existante
19. La commission note que l’évaluation générale de la situation concernant le travail forcé, effectuée par le chargé de liaison par intérim sur la base de l’ensemble des informations dont il disposait, est que, «même s’il y a eu certaines améliorations depuis la commission d’enquête, la pratique du travail forcé est toujours répandue dans l’ensemble du pays, et qu’elle est particulièrement sévère dans les zones frontalières où l’armée est très présente» (rapport du chargé de liaison par intérim, document GB.291/5/1, paragr. 9). La commission note qu’à la date de son rapport (22 octobre 2004) le chargé de liaison par intérim avait reçu 72 plaintes au total pour l’année 2004, et que les autorités sont intervenues dans 38 cas. Sur ces 38 cas, 18 concernaient diverses formes de travail forcé (autres que le recrutement forcé); 13 touchaient à l’enrôlement forcé de mineurs dans les forces armées; un cas relevait du harcèlement à l’égard d’un plaignant; et dans six cas les plaignants s’étaient adressés directement à des tribunaux du Myanmar en vertu de l’article 374 du Code pénal, en communiquant copie de leurs plaintes au chargé de liaison.
Informations récentes
20. Dans des communications en date du 14 juin, 31 août, 1er septembre et 7 octobre 2004, la CISL a adressé au BIT de nombreux documents attestant de la persistance du recours systématique au travail forcé par les autorités militaires à une très grande échelle. Les cas de travail forcé présentés dans ces documents couvrent de nombreuses régions du Myanmar (Etats de Chin, Kachin, Kayin, Mon, Rakhine et Shan et divisions d’Ayeyarwady, Magway, Bago, Sagaing, Tenasserim et Yangon), sur la période s’étendant de septembre 2003 à septembre 2004, et sont étayés par des informations précises mentionnant les lieux et dates des faits rapportés ainsi que les unités de l’armée et les noms des officiers impliqués.
21. Parmi les documents communiqués figure un rapport de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) de plus de 100 pages intitulé«Travail forcé en Birmanie (Myanmar): travail forcé après la Conférence internationale du Travail 2003». Ce rapport contient des dizaines de témoignages de victimes de travail forcé pour le compte de l’armée. Les témoins étaient pour la plupart utilisés comme porteurs (d’armes, de munitions, de bois, de vivres, etc.), sur des chantiers de construction ou d’entretien de routes ou de ponts, ou exploités dans des camps de travail et dans des rizières contrôlés par l’armée. Parmi les faits évoqués par les témoins figuraient:
- le fait d’être réquisitionnés suite à des ordres donnés par les militaires aux chefs de village dans des régions rurales pour qu’ils mettent à leur disposition des villageois, utilisés comme main-d’œuvre non rémunérée pour le portage, pour participer à des chantiers de construction ou pour l’entretien des casernes (de nombreuses copies d’ordres de réquisition de main-d’œuvre ont été jointes au rapport);
- le fait d’être forcés de participer à des programmes d’entraînement militaire, d’accomplir un service de sentinelle ou de servir de guides;
- le fait d’être forcés par les chefs militaires de se soumettre à un système de rotation de main-d’œuvre forcée aux termes duquel chaque famille d’un même village doit mettre quotidiennement à leur disposition un certain nombre de ses membres, sous la menace de représailles ou de l’imposition d’une amende. Les travailleurs réquisitionnés doivent se munir de leurs propres outils et prévoir la nourriture nécessaire à leur subsistance pour toute la durée des travaux, durée qu’ils ignorent généralement.
De plus, les témoins ont rapporté les mauvais traitements dont ils ont été victimes, au nombre desquels:
- la privation de nourriture;
- le fait d’être systématiquement battus pour avoir cédéà l’épuisement ou pour avoir demandé la permission de se reposer;
- dans les cas les plus graves, il a été rapporté que des porteurs incapables de marcher en raison d’une blessure ou d’une fatigue extrême avaient été purement et simplement assassinés;
- les mutilations et les morts violentes survenues au cours d’opérations de déminage, les personnes concernées étant équipées de simples râteaux.
Par ailleurs, il a été rapporté que les militaires se rendaient coupables d’autres exactions, parmi lesquelles: homicides, viols, tortures, pillages, incendies volontaires d’habitations, destructions de plantations et de biens de consommation, expropriations forcées et expulsions, ainsi que confiscations et extorsions d’argent et de biens au prétexte de taxes diverses.
22. La CISL a communiqué un document du Asian Legal Resource Centre, une ONG dotée du statut consultatif général auprès du Conseil économique et social des Nations Unies, basée à Hong-kong, qui évoque deux cas de travail forcé imposéà des civils par les autorités. Il illustre la manière dont celles-ci tentent de se retourner contre ceux qui refusent de se soumettre aux ordres de réquisition. Le premier cas concerne deux habitants de la circonscription de Henzada (ancien nom de Hinthada), dans la division d’Ayeyarwady, qui avaient refusé, en juillet 2003, d’accomplir un service de sentinelle au monastère bouddhiste du village d’Oatpone. Condamnés, respectivement, à un mois et à six mois d’emprisonnement en application des dispositions du Code pénal qui punissent la non-assistance caractérisée à un agent dépositaire de l’autorité publique (art. 187) et la menace à l’intégrité physique d’un agent dépositaire de l’autorité publique (art. 189). Ils ont porté plainte au titre de l’article 374 du Code pénal (qui réprime l’imposition de travail obligatoire illicite), mais tous deux ont été déboutés par le tribunal de Henzada. Les autorités ont alors porté plainte en diffamation (art. 499 et 500 du Code pénal) et les deux plaignants ont tous deux été condamnés à six mois d’emprisonnement le 7 octobre 2004. Le second cas concerne une habitante de la circonscription de Kawmhu, dans la division de Yangon, qui a intenté, en avril 2004, une procédure judiciaire contre les autorités locales au titre de l’article 374 du Code pénal, elle-même ayant été préalablement menacée d’une procédure judiciaire pour avoir refusé de participer à un chantier de construction routière des environs. Les autorités locales ont alors fait en sorte de faire témoigner les autres habitants de son village dans le sens que personne n’avait été forcéà travailler sur le chantier et que le travail en question avait été accompli volontairement. La CISL a émis la crainte de voir la procédure se retourner contre la plaignante comme cela avait été le cas dans la première affaire.
23. Les autres documents communiqués par la CISL comprennent:
- trois autres rapports de la FTUB, intitulés: «La violence et la pauvreté imputables à l’Etat en Birmanie» daté de juin 2004; «Impact des sanctions imposées par les Etats-Unis sur l’industrie textile et du vêtement en Birmanie» et «Répercussions globales de la promotion du tourisme sur l’ensemble de la communauté de la région de Ngwe Saung (division d’Ayeyarwady)» datés de 2004, ainsi que le témoignage d’un enfant soldat daté du 2 janvier 2004;
- des articles de différentes agences de presse et d’organisations de défense des droits de l’homme évoquant des dizaines de cas de travail forcé, dont l’utilisation de quelque 250 villageois appartenant à la minorité musulmane Rohingya de la circonscription de Maung-Daw (Etat de Rakhine) pour la construction d’habitations pour 130 familles de colons bouddhistes venus du centre du pays, quelque 500 autres villageois ayant été réquisitionnés en juin 2004 pour la construction d’un pont, sous la direction de la NaSaKa (forces de sécurité frontalières). Ces articles évoquent d’autres cas d’exploitation de minorités ethniques par les autorités, par exemple le travail forcé imposé aux villageois Nagas pour la construction de logements touristiques en prévision du Nouvel An Naga à Layshee (division de Sagaing) ou l’exploitation touristique de certains Salons (aussi appelés Mokens), forcés d’effectuer des danses traditionnelles (division de Tenasserim). D’autres exactions sont rapportées comme l’enlèvement de civils en vue de leur utilisation comme boucliers humains pendant une opération militaire menée contre des groupes armés dans le sud de l’Etat de Mon et dans le nord de la division de Tenasserim, au cours de la période décembre 2003 - janvier 2004, et le viol d’habitantes de villages du sud de la circonscription de Ye (Etat de Mon), au cours de la même période;
- la traduction authentique du jugement rendu dans le procès pénal ordinaire no 111/2003 par la cour du district nord de Yangon le 28 novembre 2003, condamnant neuf personnes à la peine capitale pour haute trahison, faisant état d’éléments de preuve à charge selon lesquels certaines d’entre elles auraient eu des contacts avec l’OIT et reçu ou communiqué des informations ayant trait aux activités de l’Organisation;
- la traduction authentique de l’arrêt rendu en appel par la Cour suprême dans la même affaire, et réduisant les peines des accusés, pour cinq d’entre eux, à l’emprisonnement à vie et, pour les quatre autres, à un emprisonnement de trois ans sous le régime des travaux forcés (procès no 457/2003 opposant Nay Win, Shwe Mann, Naing Tun et consorts à l’Union du Myanmar). Le BIT a reçu par la suite, le 21 octobre 2004, la traduction authentique de l’arrêt rendu le 14 octobre 2004 par la Cour suprême statuant en appel spécial dans cette même affaire. Les peines des quatre accusés condamnés en appel à trois ans d’emprisonnement sous le régime des travaux forcés sont réduites à deux ans d’emprisonnement sous le régime des travaux forcés, tandis que celle de Shwe Mann, condamné en appel à l’emprisonnement à vie, est réduite à cinq ans d’emprisonnement sous le régime des travaux forcés. Par ailleurs, la Cour suprême a jugé que les références aux contacts avec l’OIT contenues dans le jugement de la cour du district nord de Yangon devaient être supprimées, la Cour suprême précisant qu’«un acte de communication ou de coopération avec le BIT ne saurait être constitutif d’un délit en vertu de la législation en vigueur au Myanmar»;
- le second rapport préliminaire de la commission ad hoc sur le massacre de Depayin, daté de mai 2004;
- deux documents de la Fédération des syndicats du Kawthoolei (FTUK) évoquant des dizaines d’autres cas de travail forcé, y compris deux entretiens avec des victimes de travail forcé datés du 19 juin 2004.
24. La commission prend note des nouvelles allégations de recrutement forcé d’enfants par les forces armées contenues dans les documents communiqués par la CISL ainsi que dans le document sur les activités du chargé de liaison par intérim soumis au Conseil d’administration en novembre 2004 (document GB.291/5/1). Parmi les cas portés à la connaissance du chargé de liaison par intérim, figure celui d’un adolescent de 15 ans qui, selon les allégations, a été recruté dans l’armée, puis s’est échappé avant d’être arrêté et condamné par une cour martiale à quatre ans d’emprisonnement pour désertion.
25. La commission rappelle à ce propos qu’elle avait prié le gouvernement de fournir des informations sur toute enquête qui aurait été menée pour vérifier que dans la pratique aucune personne de moins de 18 ans n’a été recrutée dans les forces armées. Elle avait exprimé l’espoir que le gouvernement, avec l’aide de l’OIT, ferait tout ce qui est en son pouvoir pour procéder à une évaluation approfondie de l’ampleur de cette pratique et prendrait les mesures nécessaires pour y mettre un terme.
26. S’agissant des programmes d’entraînement et de service militaire, le gouvernement indique dans son dernier rapport avoir créé une commission pour la prévention contre le recrutement de mineurs, présidée par le secrétaire 2 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement. Tout en notant cette information, la commission constate, à la lecture des nombreux documents joints au dossier, que le recrutement d’enfants pour servir dans les unités de l’armée est toujours de mise, et que certains enfants ont été condamnés par des juridictions militaires à des peines d’emprisonnement pour désertion. La commission prie instamment le gouvernement de mettre un terme à ces pratiques et d’apporter une pleine et entière collaboration au chargé de liaison par intérim dans le traitement des plaintes qui sont portées à son attention, et de s’assurer que les enfants victimes de tels abus ne puissent faire l’objet à l’avenir de condamnations devant des juridictions militaires.
27. Pour conclure sur ce point, la commission note que le travail forcé ou obligatoire continue de prévaloir dans de nombreuses régions du pays, en particulier dans les régions frontalières habitées par des minorités ethniques, marquées par une forte présence militaire. Elle prend note avec préoccupation des nombreux documents portés à sa connaissance par la CISL et des cas suivis par le chargé de liaison par intérim, qui démontrent avec force que l’imposition de travail forcé est loin d’être une pratique en voie de disparition. Elle prend note des déclarations du gouvernement concernant sa détermination àéliminer le travail forcé dans le pays; cependant, la commission considère que cette détermination n’a pas jusqu’à présent permis d’atteindre les résultats escomptés. La commission veut croire que le gouvernement, conformément à son intention déclarée, renforcera de manière significative ses efforts pour mettre un terme définitif au problème du travail forcé et lui demande instamment de poursuivre sa coopération avec le BIT dans cette optique. La commission espère que le gouvernement répondra en détail sur tous les cas de travail forcé présentés par la CISL.
Application des sanctions prévues par le Code pénal en cas d’imposition illégale de travail forcé ou obligatoire
28. La commission rappelle que, dans son rapport, la commission d’enquête avait demandé instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les sanctions prévues par l’article 374 du Code pénal en cas d’imposition de travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l’article 25 de la convention. De l’avis de la commission d’enquête, il faudrait pour cela que des enquêtes soient menées de manière approfondie, que des poursuites soient engagées et que des sanctions adéquates soient prises contre les coupables.
29. La commission note, à la lecture du rapport soumis par le chargé de liaison par intérim au Conseil d’administration en novembre 2004 (document GB.291/5/1, paragr. 13, et annexe II), que pour la première fois des plaintes ont été déposées devant des juridictions du Myanmar pour imposition illégale de travail forcé en vertu de l’article 374 du Code pénal. Elle note cependant qu’aucune des six plaintes déposées au cours de l’année 2004 n’a abouti à l’engagement de poursuites ni même à la reconnaissance d’une situation de travail forcé. Dans trois cas, la juridiction saisie a déclaré la plainte irrecevable au motif qu’il n’existait pas de présomption suffisante d’un recours au travail forcé. De plus, dans deux des trois cas où la procédure est parvenue à son terme, les plaignants ont été condamnés à six mois de prison pour diffamation alors même qu’ils avaient déjàété emprisonnés pour avoir refusé d’accomplir du travail forcé. Les trois autres cas étaient toujours en cours d’instance à la date du rapport (22 octobre 2004). Par ailleurs, le chargé de liaison par intérim indique dans son rapport que «deux personnes qu’il avait rencontrées à Yangon avaient été arrêtées à leur retour dans leur village. Au cours de ces rencontres, l’une d’elles avait fourni des détails sur la plainte dont elle avait saisi directement un tribunal au titre de l’article 374 du Code pénal concernant l’imposition de travail forcé dans la circonscription de Kawhmu (division de Yangon).» (document GB.291/5/1, paragr. 17).
30. La commission note que, si pour la première fois des plaintes ont été déposées par des personnes se déclarant victimes de l’imposition de travail forcé au titre de l’article 374 du Code pénal, aucune de ces plaintes n’a jusqu’à présent été jugée recevable. Elle note que le fait que certaines victimes aient été arrêtées après qu’elles soient entrées en contact avec le chargé de liaison par intérim, ou condamnées à une peine d’emprisonnement pour diffamation après avoir déposé une plainte au titre de l’article 374 du Code pénal, crée un climat de crainte susceptible de dissuader les victimes de recourir à la justice. La commission espère que le gouvernement mettra tout en œuvre pour que les victimes de travail forcé puissent effectivement se prévaloir de l’article 374 du Code pénal sans risquer d’être elles-mêmes poursuivies en diffamation et qu’elles puissent librement entrer en contact avec le chargé de liaison par intérim sans risquer d’être arrêtées ou interrogées par les forces de police. Elle espère que le gouvernement pourra faire état dans son prochain rapport des progrès accomplis dans ce domaine.
Plan d’action conjoint
31. Dans sa dernière observation, la commission avait noté avec intérêt qu’un plan d’action conjoint pour l’éradication des pratiques de travail forcé au Myanmar avait été conclu le 27 mai 2003 entre l’OIT et le gouvernement. Bien que le plan d’action conjoint ait été accueilli favorablement par la Commission de l’application des normes de la Conférence lors de la discussion à la 91e session de la Conférence internationale du Travail, celle-ci avait observé que ses discussions «coïncidaient avec un climat d’incertitude et d’intimidation dans le pays, suite aux événements récents mettant gravement en question la volonté et la capacité des autorités de progresser sensiblement en vue de l’éradication du travail forcé». La commission note que la situation ne s’est guère améliorée ensuite, notamment depuis que trois personnes ont été condamnées pour haute trahison pour des motifs incluant des contacts avec l’OIT. Si la Cour suprême statuant en appel spécial a commué la peine capitale, qui avait été prononcée contre ces personnes en novembre 2003 par une cour de justice du Myanmar, en peines d’emprisonnement de deux et cinq ans et reconnu la légalité des contacts avec le BIT, la commission note que le groupe des travailleurs, le groupe des employeurs et une majorité des gouvernements membres du Conseil d’administration ont déploré le maintien en détention des intéressés et demandé leur libération ou leur amnistie immédiate. La situation de ces personnes constitue un sujet de grave préoccupation pour la commission. La commission regrette que, dans ces conditions, le plan d’action conjoint ne puisse être mis en œuvre comme prévu. Elle prend note de la décision du Conseil d’administration de constituer une mission de très haut niveau en vue d’évaluer l’attitude des autorités et leur volonté de poursuivre avec l’OIT leur coopération (document GB.291/5, Conclusions).
Observations finales
32. La commission constate une nouvelle fois avec une profonde préoccupation que les recommandations de la commission d’enquête n’ont toujours pas été mises en œuvre: les dispositions des lois de 1907 sur les villes et de 1908 sur les villages permettant la réquisition de main-d’œuvre en violation de la convention n’ont pas été abrogées; du travail forcé continue d’être imposé dans de nombreuses régions du pays, dans des conditions de cruauté et de brutalité très dures; et aucune personne responsable d’imposition de travail forcé n’a fait l’objet de poursuites ni de condamnation sur la base des dispositions pertinentes du Code pénal. La commission exprime sa plus ferme condamnation et demande instamment au gouvernement de faire la preuve de la détermination d’éliminer le travail forcé qu’il a déclarée et de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention.
1. Depuis 1999, la commission examine les mesures prises par le gouvernement pour donner effet aux recommandations de la commission d’enquête qui avait été désignée par le Conseil d’administration pour examiner le respect par le Myanmar de la convention. En 1999 et 2000, deux ordonnances rendant toute réquisition de travail forcé illégale et passible de sanctions pénales ont été prises. Depuis lors, et suite aux recommandations de la commission d’enquête, l’OIT a participéà un certain nombre d’activités. Entre mai 2000 et février 2002, plusieurs missions de coopération au Myanmar ont été assurées par un représentant du Directeur général; en septembre-octobre 2001, une Mission de haut niveau a été effectuée au Myanmar pour procéder à une évaluation des mesures prises par le gouvernement au regard de l’application de la convention. En mars 2002, comme cette Mission de haut niveau l’avait recommandé, le gouvernement a accepté la nomination dans le pays d’un chargé de liaison du BIT pour l’aider à assurer l’éradication rapide et effective du travail forcé. Un chargé de liaison ad interim a été nommé en mai 2002. A partir d’octobre 2002, une chargée de liaison permanente est entrée en fonction et des rapports sur ses activités, y compris sur ses déplacements dans le pays et sur ses entretiens avec les autorités, sont présentés à chacune des sessions du Conseil d’administration. Le 27 mai 2003, le gouvernement et l’OIT sont parvenus à un accord sur un plan d’action conjoint pour l’élimination des pratiques de travail forcé au Myanmar.
2. En 2002, la commission a conclu son observation en notant que certaines mesures avaient été prises par le gouvernement pour faire connaître l’interdiction du travail forcé et que des discussions sur un plan d’action étaient en cours entre l’OIT et le gouvernement. Elle avait cependant constaté que, en dépit des déclarations et des effets de rhétorique du gouvernement, aucune suite n’avait encore été donnée par le gouvernement aux trois recommandations de la commission d’enquête, à savoir: que les textes législatifs pertinents soient modifiés; qu’il ne soit plus imposé dans la pratique de travail forcé ou obligatoire par les autorités, notamment par les militaires; que les sanctions prévues par le Code pénal pour punir l’imposition illégale de travail forcé soient strictement appliquées.
3. La commission prend note des discussions consacrées à cette question en juin 2003 par la Commission de l’application des normes de la Conférence (Compte rendu provisoire no 24, troisième partie). Elle prend également note des déclarations faites par le représentant gouvernemental au Conseil d’administration et à la commission de la conférence, ainsi que des rapports et des informations fournis par la suite par le gouvernement détaillés ci-après:
- nouveau rapport en date du 4 février 2003 sur l’évolution de la situation concernant la mise en œuvre de la convention no 29;
- faits nouveaux concernant la convention no 29, en date du 24 mars 2003;
- réponses aux commentaires de la commission d’experts en date du 30 mai 2003 (reçues le 6 juin 2003);
- rapport sur l’application de la convention no 29, reçu le 2 octobre 2003;
- cinq lettres répondant à des questions abordées par le comité d’application de la convention no 29 adressées en octobre et novembre 2003 à la chargée de liaison par des représentants du gouvernement siégeant à ce comité, dont le représentant du ministère de la Défense.
4. La commission a également pris note des informations suivantes:
- les documents intitulés: «Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930», soumis au Conseil d’administration à ses 285e (novembre 2002), 286e (mars 2003) et 287e (novembre 2003) sessions, documents qui incluent les rapports de la chargée de liaison;
- les discussions et conclusions du Conseil d’administration sur ces rapports (document GB.288/PV);
- une communication en date du 20 novembre 2003 par laquelle la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) soumet des documents nouveaux faisant état de la persistance du recours au travail forcé au Myanmar. Il a été communiqué copie de cette communication au gouvernement le 30 novembre 2003 pour tout commentaire que celui-ci souhaiterait formuler à ce propos.
5. Comme les années précédentes, la commission examinera la question de l’application de la convention par le gouvernement sous trois angles: i) modification de la législation; ii) mesures prises pour mettre un terme à l’imposition, dans la pratique, du travail forcé et obligatoire et informations disponibles sur la pratique existante; et iii) application des sanctions prévues par le Code pénal en cas d’imposition illégale de travail forcé ou obligatoire. La commission passera ensuite en revue les mesures prises au regard du plan d’action conjoint (iv).
6. Dans son rapport, la commission d’enquête priait instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les lois de 1907 sur les villes et sur les villages, qui confèrent aux autorités locales de larges pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre, en violation de la convention, soient sans délai rendues conformes à la convention. Dans son observation de 2001, la commission notait que, si la loi sur les villages et la loi sur les villes n’avaient toujours pas été modifiées, «une ordonnance prescrivant de ne pas faire usage des pouvoirs conférés par certaines dispositions des lois de 1907 sur les villes et sur les villages» (ordonnance no 1/99), modifiée par «l’ordonnance complétant l’ordonnance no 1/99» datée du 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique dès lors que les autorités locales ayant pouvoir de réquisition en vertu des lois sur les villes et villages et également les fonctionnaires civils et militaires habilités par lesdites lois à requérir à cette fin le concours des autorités locales appliqueraient ces ordonnances de bonne foi.
7. La commission constate qu’à la fin de novembre 2003 les lois de 1907 sur les villages et sur les villes n’ont toujours pas été modifiées. Notant que le gouvernement déclare, dans sa réponse en date du 30 mai 2003 aux commentaires de la commission, que l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire ont force de loi et que la loi sur les villes et la loi sur les villages ne sont plus invoquées, la commission veut croire que le gouvernement ne verra par conséquent aucune difficultéà abroger les dispositions pertinentes de ces lois, de manière à rendre la législation pleinement conforme à la convention. Dans cette attente, la commission veut croire que le gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour assurer que l’interdiction du travail forcé prévue par l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire soit rigoureusement respectée et appliquée.
8. Dans ses recommandations, la commission d’enquête avait souligné qu’outre la modification de la législation des mesures concrètes devaient être prises immédiatement pour mettre un terme à l’imposition du travail forcé dans la pratique, en particulier par l’armée. De l’avis de cette commission, cela était d’autant plus important que le pouvoir d’imposer un travail obligatoire semblait tenu pour acquis, sans que les lois sur les villages et sur les villes n’aient apparemment àêtre invoquées. Dans ses précédentes observations, la commission avait identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour parvenir à un tel résultat: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l’adresse des autorités civiles et militaires; assurer une large publicitéà l’interdiction du travail forcé; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; assurer le suivi de l’interdiction du travail forcé.
9. Instructions spécifiques et concrètes. Dans ses observations de 2001 et 2002, la commission avait noté que, faute d’avoir adressé aux autorités civiles et militaires des instructions spécifiques et concrètes contenant une description des diverses formes et modalités d’imposition du travail forcé, l’application des dispositions adoptées jusque-là tourne autour de l’interprétation dans la pratique de la notion de «travail forcé». Néanmoins, la pratique elle-même ne va pas de soi, en témoigne la diversité des expressions employées en birman quand il s’agit d’imposer du travail à la population: «loh-ah-pay», travail «volontaire», ou encore travail «donné».
10. Dans son observation de 2002, la commission prenait note d’une directive émise le 1er novembre 2000 par le secrétaire 1 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement (SPDC), (lettre no 4/Na ya ka U/Ma Nya) ordonnant aux conseils pour la paix et le développement de l’Etat d’adresser les instructions nécessaires aux conseils pour la paix et le développement des districts et localités pour que ces derniers respectent les interdictions prévues par l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire. La commission note que les rapports du gouvernement et les déclarations faites par des représentants gouvernementaux contiennent de nombreuses références à des «explications», «instructions» et «directives»émises par les bureaux des conseils pour la paix et le développement à divers niveaux et par les services du département de l’Administration générale, du département de la Justice, de la Police et des Tribunaux locaux, de même que de nombreuses références aux orientations données par les équipes d’observation sur le terrain à l’occasion de leurs déplacements dans le pays. Toutefois, le gouvernement ne donne aucune précision quant à la teneur desdites explications, instructions, directives ou orientations; il ne communique pas non plus le texte de la moindre instruction ou directive donnant le détail des travaux pour lesquels la réquisition de main-d’œuvre est interdite ou spécifiant la manière dont certains travaux doivent être accomplis sans recourir au travail forcé.
11. Dans sa réponse à l’observation de la commission en date du 30 mai 2003, le gouvernement indique que les forces de police du Myanmar ont émis de nouvelles directives et circulaires explicatives concernant l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire, par lesquelles le personnel est rendu plus attentif à ses obligations à l’égard de la population s’agissant du «sens plein et entier de l’utilisation du travail forcé». Le gouvernement communique copie d’une lettre no 1002(3)/202/G4 en date du 27 octobre 2000 «tendant à prévenir la réquisition illicite de travail forcé», signée du directeur général de la police. La commission note que cette lettre attire à nouveau l’attention sur la teneur de l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire et indique la procédure à suivre par les fonctionnaires de police pour le traitement des plaintes pour imposition de travail forcé, mais sans expliquer, cependant, la nature des tâches constituant du travail forcé ni de quelle manière ces tâches doivent être accomplies.
12. S’agissant des forces de défense, la commission prend note, à la lecture de la réponse écrite remise à la chargée de liaison par le représentant du ministère de la Défense siégeant au Comité d’application de la convention no 29, de la mention d’une lettre de 2001 émanant du bureau du ministère de la Défense «ordonnant que les ordres englobent le personnel des niveaux subalternes de ces principaux bureaux et directions», de même que de deux lettres de 1999 et 2000 et d’un télégramme de 2001 émanant du bureau du chef d’état-major «tendant à garantir que le personnel subalterne suive expressément les ordres». La commission prie le gouvernement de communiquer copie de ces lettres et télégrammes dans son prochain rapport.
13. Sur la base des informations dont la commission dispose, il apparaît que des instructions claires sont encore requises pour faire connaître à tous les représentants de l’autorité, y compris aux membres des forces armées, la nature des pratiques qui constituent du travail forcé et pour lesquelles la réquisition de main-d’œuvre est interdite ainsi que la manière dont ces mêmes tâches doivent dorénavant être exécutées. La commission note qu’à la réunion de septembre 2003 du Comité d’application de la convention no 29 il a été signaléà la chargée de liaison qu’il pourrait y avoir des divergences sur la définition de certaines pratiques en tant que travail forcé et qu’il est important de tenir compte des us et coutumes du pays. La chargée de liaison a proposé de rencontrer un petit groupe du comité d’application afin de mettre au point des concepts communs en vue de l’application de la convention no 29 dans le contexte du Myanmar, les résultats de cette démarche pourraient être exposés dans une brochure destinée àêtre largement diffusée. La commission exprime l’espoir qu’avec l’aide de la chargée de liaison les instructions détaillées nécessaires seront émises sans délai et que ces instructions engloberont, entre autres, chacune des tâches énumérées au paragraphe 13 de son observation de 2002.
14. Publicité faite aux ordonnances. La commission note, à la lecture des informations communiquées par le gouvernement, que des mesures continuent d’être prises en vue de rendre l’interdiction du travail forcé prévue dans l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire largement connue de tous les représentants de l’autorité de même que du grand public. Ces mesures incluent:
- la diffusion et l’affichage des ordonnances aux différents niveaux administratifs de l’ensemble du pays;
- l’inclusion d’informations sur la convention no 29 dans le bulletin mensuel du ministère du Travail, qui connaît une large diffusion;
- l’établissement d’une brochure sur le travail forcé et sur la convention no 29;
- l’envoi d’équipes d’observation sur le terrain, sous la direction de membres du Comité d’application de la convention no 29, dans diverses parties du pays pour faire connaître les ordonnances aux autorités locales et à la population; et enfin la traduction des ordonnances dans les langues ethniques.
15. La commission rappelle que, dans son observation de 2001, elle se référait à des allégations de la CISL, selon lesquelles des villageois étaient contraints d’acheter le «livre vert» contenant le texte des ordonnances ou bien étaient contraints d’acheter les panneaux sur lesquels les ordonnances étaient placardées. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle, d’après le département de l’Administration générale, les «livres verts» ont été distribués gratuitement, sans aucun frais pour qui que ce soit.
16. Dans la communication de la CISL reçue en novembre 2002, cette organisation allègue également que, «dans certaines zones, les villageois n’ont jamais entendu parler des ordonnances émises par Yangon en vertu desquelles le travail forcé est désormais interdit» et que «beaucoup de villageois interrogés dans les Etats de Shan, de Karenni, de Karen et dans les divisions de Pegu et de Mandalay n’ont encore jamais entendu d’annonces ou de proclamations selon lesquelles il devait être mis fin aux pratiques de travail forcé». Le gouvernement n’a fourni aucune réponse à ces allégations.
17. S’agissant de la traduction des ordonnances dans les langues ethniques, la commission note que, fin novembre 2003, ces ordonnances avaient été traduites et publiées dans deux dialectes de la langue kayin, de même que dans les langues de Kayah, Mon, Shan et Kachin, un exemplaire de ces traductions ayant été transmis au BIT. Elle exprime l’espoir que le gouvernement communiquera copie, avec son prochain rapport, des traductions dans les quatre dialectes chin.
18. La commission note la déclaration de la chargée de liaison contenue dans son premier rapport présentéà la session de novembre 2003 du Conseil d’administration, selon laquelle «rien n’indique à ce jour que le texte traduit desdites ordonnances ait été effectivement distribué ou diffusé dans les zones où vivent des minorités ethniques».
19. La commission exprime l’espoir que le gouvernement poursuivra ses efforts pour assurer la plus large publicitéà l’interdiction du travail forcé dans l’ensemble du pays, y compris dans les zones les plus reculées auxquelles se réfèrent les allégations de persistance de travail forcé. En particulier:
a) Comme il apparaît que les mesures prises jusqu’à présent s’adressent principalement sinon exclusivement aux autorités civiles, la commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les mesures prises ou envisagées afin que les membres des forces armées, à tous les niveaux de celles-ci, aient pleinement connaissance de l’existence des ordonnances et des sanctions prévues en cas de violation. Le gouvernement est prié de communiquer copie des ordres adressés aux forces armées ainsi que des informations sur les réunions, ateliers et séminaires organisés pour assurer la diffusion de ces ordres dans les forces armées.
b) Comme les équipes d’observation sur le terrain relevant du Comité d’application de la convention no 29 ne couvrent pas l’ensemble des 16 Etats et divisions du pays, la commission exprime l’espoir que la juridiction de ce comité d’application sera étendue à l’ensemble du pays et que le prochain rapport contiendra des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
c) La commission espère que la brochure qui est en préparation depuis l’an dernier sera achevée prochainement, que la chargée de liaison en sera avisée et qu’un exemplaire en sera communiqué avec le prochain rapport.
d) La commission veut croire que des mesures seront prises pour assurer que des textes dûment traduits soient diffusés et affichés dans les zones ethniques, qui sont celles où apparemment les pratiques de travail forcé ont le plus souvent cours.
20. Inscription au budget des crédits adéquats. Dans ses recommandations, la commission d’enquête a attiré l’attention sur la nécessité d’inscrire au budget de l’Etat les crédits nécessaires pour rémunérer les travailleurs libres qui seront chargés d’accomplir le travail effectué jusqu’à présent par une main-d’œuvre forcée et non rémunérée. Dans son rapport, la Mission de haut niveau déclare n’être en possession d’aucun élément lui permettant de conclure que les autorités ont bien prévu le remplacement de la main-d’œuvre forcée et gratuite réquisitionnée pour aider l’armée ou pour réaliser les projets de travaux publics. Dans ses deux précédentes observations, la commission a abordé cette question, recherchant des éléments tangibles permettant d’établir que des crédits budgétaires adéquats ont été prévus pour recruter de la main-d’œuvre volontaire et rémunérée.
21. Dans sa réponse du 30 mai 2003, le gouvernement réitère ses déclarations antérieures, selon lesquelles il existe toujours une inscription budgétaire afférente à chaque projet; cette inscription couvrant le coût des matériaux et celui de la main-d’œuvre. Tel a été le cas pour chacun des projets réalisés sous la direction du département du développement des zones frontalières. De plus, le département relevant du comité de développement de la ville de Yangon, le ministère de la Construction et le ministère de l’Intérieur ont émis des instructions enjoignant «de se conformer strictement aux règles concernant le recrutement de main-d’œuvre et interdisant toute forme de travail forcé de sorte que les dépenses de main-d’œuvre soient provisionnées».
22. La commission prend note de cette déclaration. Cependant, comme il ressort des éléments disponibles que, dans la pratique, le travail forcé continue d’être imposé aujourd’hui dans de nombreuses régions du pays, notamment dans celles où l’armée est fortement présente, la commission ne peut que conclure que les allocations budgétaires pouvant exister ne sont pas suffisantes pour éviter le recours au travail forcé, à moins que l’affectation de ces crédits ne soit pas adéquatement contrôlée. A cet égard, la commission attire l’attention sur un commentaire figurant dans le premier rapport de la chargée de liaison présentéà la session de mars 2003 du Conseil d’administration, selon lequel la diffusion de l’ordonnance no 1/99 et de son ordonnance complémentaire n’a pas été suffisante pour que ces textes aient un impact notable sur la pratique, car cette diffusion n’a été assortie d’aucune mesure d’accompagnement telle que l’octroi aux personnes actuellement chargées d’imposer du travail forcé d’autres moyens pour faire exécuter les tâches relevant de leur responsabilité. La commission exprime à nouveau l’espoir que des ressources budgétaires adéquates seront allouées aux autorités civiles et militaires afin que celles-ci puissent s’acquitter de leurs tâches sans recourir à du travail forcé, et que le prochain rapport fera état des mesures prises dans ce sens.
23. Mécanismes de contrôle. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement et des rapports de la chargée de liaison sur les activités menées par le Comité d’application de la convention no 29 pour suivre la situation relative au travail forcé et faire connaître à la population les ordonnances interdisant le travail forcé. Entre décembre 2002 et novembre 2003, ce comité a tenu trois réunions avec la chargée de liaison, réunions dans le cadre desquelles ont été abordées un certain nombre d’allégations de travail forcé qui avaient été transmises par la chargée de liaison. A ces réunions, le représentant du ministère de la Défense nouvellement désignéétait présent, ce qui a permis d’aborder certains problèmes concernant le recours au travail forcé par l’armée. Les équipes d’observation sur le terrain qui relèvent du comité d’application ont effectué de fréquents déplacements dans le pays pour enquêter sur des plaintes de travail forcé et pour faire connaître les ordonnances. Les rapports établissant leurs constatations ont été soumis au comité d’application. De plus, la chargée de liaison a reçu du comité d’application plusieurs communications écrites relayant les constatations faites par les équipes d’observation sur le terrain, suite aux plaintes qu’elle avait transmises.
24. La commission se félicite du dialogue qui s’est instauré entre le comité d’application et la chargée de liaison. Elle constate cependant que toutes les enquêtes menées sur des plaintes pour travail forcé par les autorités, y compris par les équipes d’observation sur le terrain, ont conclu que lesdites plaintes étaient infondées. A ce propos, elle relève que, dans le cadre de ses propositions faites au gouvernement au sujet d’un plan d’action conjoint, la chargée de liaison émet des suggestions précises en vue d’un nouveau système d’enquête, suggestions qui n’ont pas été retenues par le gouvernement. La commission note également que, suite à une demande de la chargée de liaison, le gouvernement a bien voulu que celle-ci accompagne une équipe d’observation sur le terrain dans un déplacement dans l’Etat de Kachin pour observer les méthodes de travail de cette équipe. La chargée de liaison a constaté, comme relaté dans son deuxième rapport présentéà la session du Conseil d’administration de novembre 2003, que «la manière dont l’équipe accomplit sa mission convient certes pour diffuser l’information mais non pour conduire des enquêtes sur les plaintes, et il serait difficile, voire impossible, de déterminer que lesdites plaintes sont ou ne sont pas fondées en procédant de cette manière». La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour instaurer une procédure juste et plus efficace d’enquête sur les plaintes pour travail forcé, notamment sur les plaintes mettant en cause l’armée, et qu’il maintiendra le dialogue à ce sujet avec la chargée de liaison.
25. Lors de sa visite au Myanmar en octobre 2001, l’équipe de haut niveau a constaté que, «bien que les ordonnances interdisant le recours au travail forcé aient été largement (quoi que inégalement) diffusées», leur impact sur la pratique du travail forcé se révèle limité et la situation ne s’est que très modérément améliorée depuis la commission d’enquête. La situation reste particulièrement grave là où la présence militaire est forte, en particulier dans les zones frontalières.
26. Dans ses observations de 2001 et 2002, la commission avait pris note de deux communications de la CISL contenant de nombreuses allégations se référant, pour la plupart, à la persistance du recours au travail forcéà une vaste échelle par les autorités militaires birmanes. A l’appui de ses dires, la CISL joignait un grand nombre de rapports ou autres documents, de plusieurs centaines de pages au total, relatant parfois des entretiens et incluant des indications précises des moments, des lieux, des bataillons ou compagnies de l’armée mis en cause, avec les noms des chefs d’unité. La commission avait exprimé l’espoir que le gouvernement examinerait les allégations de la CISL et fournirait des informations détaillées sur les mesures prises afin que toutes les personnes responsables d’avoir réquisitionné de la main-d’œuvre forcée soient poursuivies. La commission note que, sauf sur deux allégations qui ont été mentionnées par la chargée de liaison auprès du Comité d’application de la convention no 29, le gouvernement n’a fourni aucune information en réponse aux communications de la CISL. A ces deux allégations qui concernent, l’une, la mort d’un syndicaliste, U Saw Mya Than, contraint par l’armée de servir de porteur et, l’autre, sur l’utilisation de main-d’œuvre forcée par TotalfinaElf pour la construction d’une autoroute entre Kanbauk et Maung Ma Gan, le gouvernement a répondu qu’il n’avait été recouru au travail forcé dans aucun de ces deux cas et que ces allégations ne visaient qu’à ternir son image.
27. Dans son premier rapport présenté au Conseil d’administration, en mars 2003, la chargée de liaison déclarait avoir l’impression que, «si l’on a peut-être moins recours maintenant au travail forcé dans les régions centrales du Myanmar, en revanche, dans les zones proches de la frontière avec la Thaïlande, où l’insécurité continue de régner et où l’on note une présence très forte de l’armée, de même que dans l’Etat de Rakhine, au nord du pays, la situation est particulièrement grave et semble avoir peu évolué (depuis la Mission de haut niveau)». Cette impression est confirmée dans le premier rapport de la chargée de liaison présentéà la session du Conseil d’administration de novembre 2003, où il est dit:
«La chargée de liaison continue de recevoir de sources tant internes qu’externes un certain nombre d’informations dignes de foi sur l’existence du travail forcé; de nouvelles allégations ont en outre été soulevées lors des récents voyages effectués dans plusieurs régions du pays. La chargée de liaison demeure préoccupée par le recrutement forcé de civils, dont des enfants, dans les forces armées, question sur laquelle les autorités n’ont pas répondu. La chargée de liaison a également été informée de l’existence d’un programme visiblement systématique et généralisé d’entraînement militaire de civils, qui concernerait un nombre très important de personnes depuis mai 2003. Les personnes enrôlées seraient notamment des fonctionnaires (par exemple des enseignants) ainsi que des villageois et des citadins, contraints de se soumettre à cet entraînement militaire et, dans certains cas, de supporter eux-mêmes leurs frais de matériel (bâtons en bambou par exemple).»
28. S’agissant du recrutement forcé d’enfants dans l’armée, la commission avait pris note de la réponse faite par le représentant du ministère de la Défense au comité d’application, réponse reprise dans la lettre de ce représentant à la chargée de liaison, selon laquelle les forces armées ne recrutent que, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur et dans la mesure où la loi de 1959 sur les services de défense ne permet d’enrôler, et ce volontairement, que les personnes d’un âge compris entre 18 et 25 ans, il n’y a pas de recrutement forcé dans les forces armées et aucune personne mineure n’a été recrutée dans lesdites forces armées. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute enquête qui aurait été menée pour vérifier que dans la pratique aucune personne de moins de 18 ans n’a été recrutée dans les forces armées. Vu la gravité de la question, la commission exprime l’espoir que le gouvernement, avec l’aide de l’OIT, fera tout ce qui est en son pouvoir pour procéder à une évaluation approfondie de l’ampleur de cette pratique et prendra les mesures nécessaires pour y mettre un terme.
29. S’agissant de la formation militaire obligatoire, la commission note qu’aux termes de la lettre adressée par le représentant du ministère de la Défense à la chargée de liaison «cette formation se déroule comme sous les précédentes Constitutions, à savoir que … l’Etat peut, dans un secteur particulier du pays ou bien sur l’ensemble du territoire, organiser une formation militaire»; «tout citoyen est tenu, conformément à la loi: a) de se soumettre à la formation militaire; et b) d’accomplir un service militaire pour la défense de l’Etat»; et «la formation de base est dispensée dans le but de protéger l’Etat contre toutes formes d’éléments destructeurs». La commission constate que les précédentes Constitutions ne sont plus en vigueur; qu’en tout état de cause l’obligation qu’elles font peser sur les citoyens d’accomplir une formation militaire ou un service militaire est «établie conformément à la loi» et que la loi de 1959 sur les services de défense prévoit uniquement l’engagement volontaire et non l’enrôlement obligatoire. Il apparaît donc que les programmes de formation militaire obligatoire n’ont aucune base légale et constituent une forme de travail forcé ou obligatoire au sens de la convention. La commission exprime l’espoir que le gouvernement mettra un terme à ces programmes et indiquera dans son prochain rapport les mesures prises dans ce sens.
30. Par lettre en date du 19 novembre 2003, la CISL transmet des informations sur la pratique actuelle, informations émanant de sources diverses et couvrant de nombreuses régions du pays (Etats de Chin, Kayah, Kayin, Mon, Rahkine et Shan et Divisions de Ayeyarwady, Magway, Sagaing et Taninthayi) pour la période septembre 2002 - octobre 2003. La CISL signale que ces informations concernent aussi bien «des faits d’extorsion de sommes d’argent ou de marchandises en contrepartie de l’exemption du travail forcé que des cas de mort violente au cours de missions de portage forcé ou de déminage "par des moyens humains" pour le compte de l’armée». Les documents annexés à la lettre de la CISL incluent:
- un rapport d’août 2003 émanant du groupe des droits de l’homme de l’Etat de Karen, contenant la traduction de quelque 200 ordres adressés principalement par l’armée aux villages pour réquisitionner de la main-d’œuvre en vue de diverses tâches ainsi que du matériel. On y trouve également la traduction de plus d’une centaine d’ordres par lesquels l’armée convoquait les chefs de village pour leur donner verbalement des instructions destinées à exiger du travail forcé;
- des documents de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) contenant 17 ordres analogues adressés par l’armée aux villageois pour réquisitionner de la main-d’œuvre ou du matériel;
- trois rapports de Forum Asie datés des 2 septembre 2002, 29 mai 2003 et 31 août 2003, contenant de nombreuses dénonciations de travail forcé, affectant en particulier la population musulmane de la partie nord de l’Etat de Rakhine;
- des documents de la FTUB reproduisant le détail d’entretiens avec 73 villageois ayant déclaré avoir été réquisitionnés pour du travail forcé. Ces documents contiennent aussi le détail d’entretiens avec un certain nombre de prisonniers ayant réussi à s’enfuir après avoir été réquisitionnés comme porteurs par l’armée;
- un document daté de février 2003 émanant du Syndicat des travailleurs de l’agriculture Pa’An, qui fait état de la réquisition de main-d’œuvre forcée dans 12 villages pour la construction d’une route dans l’Etat de Kayin.
La commission prie le gouvernement d’examiner les allégations de la CISL et les documents y annexés et de fournir des informations détaillées sur les enquêtes diligentées à cet égard et sur les poursuites engagées à l’encontre des personnes responsables d’avoir exigé du travail forcé.
31. Pour résumer, sur la base des informations dont elle dispose sur la pratique actuelle, la commission est conduite à conclure que si, depuis l’époque où la commission d’enquête a rendu son rapport, en 1998, il peut y avoir eu une certaine diminution du travail forcé, notamment dans le cadre de travaux de génie civil, du travail forcé continue néanmoins d’être imposé dans de nombreuses parties du pays. La situation est particulièrement grave dans les régions frontalières, habitées essentiellement par des populations de souche et connaissant, au surplus, une forte présence militaire. Cette situation démontre clairement qu’en dépit des engagements réitérés par le gouvernement d’abolir le travail forcé les mesures prises à ce jour n’ont pas suffi pour réaliser des progrès rapides et appréciables, notamment vis-à-vis de l’armée.
32. Dans son rapport, la commission d’enquête invitait instamment le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que les sanctions prévues par l’article 374 du Code pénal en cas d’imposition de travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l’article 25 de la convention. De l’avis de la commission d’enquête, il faudrait pour cela que des enquêtes soient menées de manière approfondie, que des poursuites soient engagées et que des sanctions adéquates soient prises contre les coupables.
33. La commission constate qu’il ressort des informations communiquées par le gouvernement que, bien que l’ordonnance complétant l’ordonnance no 1/99 et la directive en date du 1er novembre 2000 du Secrétaire 1 du Conseil d’Etat à la paix et au développement prévoient l’une et l’autre des poursuites en application de l’article 374 du Code pénal à l’encontre des personnes violant l’interdiction du travail forcé prévue par l’ordonnance no 1/99, en novembre 2003, aucune sanction de cette nature n’a encore été infligée. De même, aucune plainte concernant l’imposition de travail forcé n’a été enregistrée à ce jour, même si les procédures sont prévues pour l’enregistrement des plaintes de cette nature auprès, notamment, des commissariats de police, des tribunaux ou du greffe du Parquet général.
34. La commission est d’avis que l’absence de plainte et de poursuite sur la base de l’article 374 du Code pénal ne saurait se concevoir comme la marque de l’inexistence du travail forcé. Cette absence jette plutôt le doute sur la crédibilité du système actuel d’enregistrement des plaintes et d’enquête et sur la réalité de l’engagement du gouvernement à abolir totalement le travail forcé.
35. La commission rappelle que, pour résoudre le problème posé par le sentiment de défiance et de crainte qu’inspirent les institutions habilitées à connaître des plaintes, sentiment qui, à ses yeux, explique l’absence de plainte et de poursuite, l’équipe de haut niveau avait suggéré de désigner un médiateur à qui pourraient être adressées les plaintes ayant trait à du travail forcé. Ce médiateur aurait à la fois le pouvoir et les moyens nécessaires pour mener directement des enquêtes en toute neutralité et jouirait ainsi de la confiance de toutes les parties concernées.
36. La commission note avec intérêt que, selon le plan d’action conjoint conclu le 27 mai 2003 entre l’OIT et le gouvernement, celui-ci accepte la nomination d’un facilitateur indépendant, compétent pour recevoir des plaintes relatives au travail forcé et aider les victimes à obtenir réparation, conformément à la législation nationale. Aux termes de l’accord officiel concernant le facilitateur, celui-ci exercera ses fonctions dans le strict respect de la confidentialité et aura librement accès au plaignant et aux témoins, et aucune mesure de quelque ordre que ce soit ne sera prise par les autorités à l’encontre du plaignant ou des témoins. Lorsqu’il sera saisi d’éléments de prime abord recevables ayant trait à du travail forcé, le facilitateur pourra rechercher une solution pratique informelle avec l’autorité concernée ou bien saisir l’autorité compétente de la plainte afin que la procédure juridictionnelle soit initiée, et il sera informé de la décision prise au terme de cette procédure. Le facilitateur et son personnel d’assistance et d’appui disposeront des moyens, de l’assistance, de la protection et du statut nécessaires pour pouvoir exercer leurs fonctions avec efficacité et de manière pleinement indépendante et impartiale. Les services du facilitateur seront accessibles dans l’ensemble du pays; ils seront testés dans la région pilote prévue dans le plan d’action.
37. La commission estime que, s’il est appliqué de bonne foi, l’accord officiel concernant le facilitateur pourrait constituer un instrument déterminant pour aider les victimes de travail forcéà porter plainte et aller en justice, afin que des poursuites soient exercées et des sanctions prises contre les personnes responsables d’avoir imposé ce travail forcé. Comme indiqué ci-après, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que cet accord officiel puisse être mis en œuvre le plus rapidement possible.
38. Suite à la nomination d’un chargé de liaison de l’OIT à Yangon, le Directeur général avait suggéré au ministère du Travail d’élaborer un plan d’action conjoint susceptible d’obtenir des avancées concrètes et vérifiables en vue de l’éradication complète du travail forcé. La commission note avec intérêt que, suite aux entretiens qui ont eu lieu cette dernière année entre la chargée de liaison et les autorités de Yangon, et entre les représentants du Directeur général et ceux du gouvernement à Genève, un plan d’action conjoint pour l’éradication des pratiques de travail forcé au Myanmar a été conclu le 27 mai 2003. Il s’agit d’un plan d’action proposé par le gouvernement, qui comporte un certain nombre de volets couvrant, entre autres: la diffusion de l’information et des campagnes de sensibilisation sur l’interdiction du travail forcé; le développement du transport pour des animaux comme alternative à l’utilisation de porteurs; le fonctionnement des équipes d’observation sur le terrain; un accord officiel concernant le facilitateur (détaillé au paragr. 36 ci-dessus) et un accord officiel instituant une région pilote. Cette région pilote serait une région où l’interdiction du travail forcé serait rigoureusement appliquée et où un certain nombre d’activités, au nombre desquelles la construction de routes, seraient menées avec l’assistance technique et le soutien de l’OIT. La région retenue est le district de Myeik, qui comporte quatre localités de la Division de Tanintharyi, dans le sud du pays.
39. Le plan d’action conjoint a été discutéà la 91e session de la Conférence internationale du Travail, lors d’une séance spéciale de la Commission de l’application des normes consacrée au Myanmar (ci-après désignée «séance spéciale»). A cette occasion, un représentant gouvernemental a déclaré que ce plan d’action constitue une avancée, une étape qui correspond à l’aboutissement d’un long processus de négociations soutenues et intenses. Il a rappelé l’engagement et la détermination du gouvernement du Myanmar à appliquer efficacement ce plan et à résoudre le problème du travail forcé. La Commission de la Conférence a accueilli favorablement ce plan d’action, dans les termes suivants:
La commission s’est félicitée de ce que le gouvernement et le BIT se soient mis d’accord, le 27 mai 2003, sur un plan d’action conjoint pour l’élimination du travail forcé et a exprimé son soutien à ce plan. La commission a noté avec intérêt que, tenant compte de la suggestion faite par la Mission de haut niveau, le plan prévoit la nomination d’un facilitateur indépendant chargé d’aider les personnes victimes de travail forcéà obtenir réparation en vertu de la législation nationale. Elle a noté que le facilitateur exercera ses fonctions dans l’ensemble du pays. Conformément au plan d’action, le gouvernement s’est engagéà respecter strictement l’interdiction du travail forcé dans la région pilote. Tout en soulignant que la mise en œuvre du plan d’action ne dispense pas le gouvernement de l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au travail forcé dans l’ensemble du pays, la commission a estimé que ce plan d’action, s’il est appliqué de bonne foi, pourrait permettre de réaliser un progrès tangible dans l’élimination du travail forcé et ouvrir la voie à des progrès plus substantiels. La commission a prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures requises dans ce sens.
40. Simultanément, dans le cadre de sa séance spéciale, la Commission de la Conférence a fait observer que ses discussions coïncidaient avec un climat d’incertitude et d’intimidation dans le pays, suite aux événements récents mettant gravement en question la volonté et la capacité des autorités de progresser sensiblement en vue de l’éradication du travail forcé. A cet égard, la commission a exprimé l’avis que:
Un climat d’incertitude et d’intimidation ne constitue pas un environnement favorable à la mise en œuvre, de manière crédible, du plan d’action et en particulier du mécanisme du facilitateur qu’il établit. La commission a exprimé l’espoir que le gouvernement prendra les mesures immédiates qui s’imposent pour mettre fin à cette situation et que le Directeur général pourra aller de l’avant rapidement avec la mise en œuvre du plan d’action, dès qu’il jugera les conditions réunies pour le faire de manière effective.
41. La commission partage la préoccupation exprimée par la Commission de la Conférence face au climat de peur et d’intimidation qui n’est pas favorable à la mise en œuvre, de manière crédible, du plan d’action, et en particulier du mécanisme du facilitateur. Prenant note des assurances données par le ministre du Travail lors de son entretien du 14 novembre 2003 avec la chargée de liaison, de même que des assurances contenues dans la déclaration du représentant gouvernemental à la session du Conseil d’administration de novembre 2003, à l’effet que le gouvernement s’engage fermement sur le plan d’action conjoint et est prêt à aller de l’avant pour sa mise en œuvre, la commission veut croire que le gouvernement adoptera à brève échéance les mesures nécessaires pour restaurer un climat autorisant la mise en œuvre effective et crédible du plan d’action.
42. Pour résumer, ces trois dernières années, les autorités gouvernementales, au plus haut niveau, ont donné de manière réitérée des assurances de leur intention de mettre un terme aux violations généralisées de la convention constatées par la commission d’enquête dans son rapport. Comme indiqué par la commission dans son observation, un certain nombre d’initiatives ont été prises dans ce sens, notamment des ordonnances interdisant le recours au travail forcé ont été prises. Ces ordonnances ont été traduites dans six langues ethniques et des dispositions ont été prises pour les porter à la connaissance à la fois des autorités publiques et de la population en général. Un mécanisme a été mis en place pour favoriser l’application de ces ordonnances et assurer la diffusion de leur teneur. Un dialogue intense s’est noué entre l’OIT et les autorités, qui a abouti à l’installation dans le pays d’une présence de l’OIT en la personne d’une chargée de liaison.
43. La commission est conduite à constater que les trois principales recommandations de la commission d’enquête n’ont toujours pas été mises en œuvre. Malgré les assurances réitérées du gouvernement sur ses bonnes intentions, les mesures prises jusqu’à présent ne se sont pas traduites par des progrès sensibles dans la pratique. Le travail forcé continue d’être imposé dans bien des parties du pays, principalement par l’armée. Aucune personne responsable d’imposition de travail forcé n’a fait l’objet de poursuites ni de condamnation sur la base des dispositions pertinentes du Code pénal.
44. Vu la lenteur des progrès, il est à espérer que le processus de dialogue et de coopération qui s’est instauré entre l’OIT et le gouvernement finira par offrir une chance réelle de parvenir plus rapidement à des résultats tangibles. La commission estime que le plan d’action conjoint convenu en mai 2003 offre une opportunité au gouvernement de passer, avec l’assistance technique de l’OIT et le soutien financier de la communauté internationale, d’étapes purement procédurales à des progrès tangibles et de dissiper les doutes que la réalité actuelle peut jeter sur le sérieux de son engagement. La commission ne peut qu’exprimer l’espoir que le gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour assurer la poursuite de ce processus de dialogue et de coopération et prendra toutes les mesures nécessaires dans un très proche avenir pour permettre la mise en œuvre du plan d’action conjoint.
45. La commission rappelle au gouvernement qu’en tout état de cause l’obligation exprimée par la convention de mettre un terme à toutes les formes de travail forcé ou obligatoire reste de sa responsabilité.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 92e session.]
1. La commission prend note des réponses du gouvernement à propos de l’application de la convention, ainsi que des documents suivants: les rapports reçus les 9 septembre et 17 octobre 2002, les communications en date des 15 et 18 novembre 2002, un rapport sur les faits nouveaux concernant l’application de la convention en date du 18 novembre 2002, un rapport transmis le 27 novembre 2002 et un rapport complémentaire sur l’évolution de la situation en date du 27 novembre 2002. Pour examiner la suite donnée aux recommandations de la commission d’enquête instituée pour examiner le respect par le Myanmar de la convention, la commission a également pris note des informations suivantes:
- les informations soumises à la Conférence internationale du Travail, à sa 90e session (juin 2002), et les discussions qui ont eu lieu à cette occasion (Compte rendu provisoire no 28, 3e partie);
- les informations soumises au Conseil d’administration du BIT à sa 285e session en novembre 2002, en particulier le rapport «Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930» (document GB.285/4 et annexes), l’intervention du représentant du gouvernement et les conclusions du Conseil d’administration (document GB.285/PV);
- une communication en date du 14 octobre 2002 dans laquelle la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a soumis au BIT des documents récents selon lesquels les autorités militaires du Myanmar continuent de recourir massivement au travail forcé. Des copies de ces documents ont été transmises le 8 novembre 2002 au gouvernement pour tous commentaires qu’il souhaiterait formuler à propos des questions qui y sont évoquées.
2. Les informations disponibles sur l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention sont examinées en trois parties: i) modification de la législation; ii) mesures prises par le gouvernement pour mettre un terme à l’imposition du travail forcé ou obligatoire et informations disponibles sur les pratiques existantes; et iii) les sanctions qui peuvent être imposées en vertu du Code pénal en cas d’imposition de travail forcé ou obligatoire.
3. Au paragraphe 470 de son rapport du 2 juillet 1998, la commission d’enquête a noté:
… qu’aux termes de l’article 11(d), lu conjointement avec l’article 8(1)(g), (n) et (o) de la loi sur les villages, ainsi que de l’article 9(b) de la loi sur les villes, du travail ou des services peuvent être imposés à toute personne résidant dans un arrondissement rural ou urbain, c’est-à-dire un travail ou des services pour lesquels l’intéressé ne s’est pas offert de plein gré et que la non-obtempération à une réquisition faite en application de l’article 11(d) de la loi sur les villages ou de l’article 9(b) de la loi sur les villes est passible des sanctions pénales prévues à l’article 12 de la loi sur les villages ou de l’article 9(a) de la loi sur les villes. Ainsi, ces lois prévoient l’imposition d’un «travail forcé ou obligatoire» relevant de la définition de l’article 2, paragraphe 1, de la convention.
La commission d’enquête a également noté que les amples facultés de réquisition de travail et de services au titre de ces dispositions ne rentrent dans aucune des exceptions énumérées à l’article 2, paragraphe 2, de la convention, et qu’elles sont tout à fait incompatibles avec la convention. Rappelant que, depuis plus de trente ans, le gouvernement promet de modifier ces dispositions, la commission d’enquête l’a exhortéà prendre les mesures nécessaires pour assurer que la loi sur les villages et la loi sur les villes soient mises en conformité avec la convention, et que ceci devrait être effectué sans délai et achevé au plus tard le 1er mai 1999 (paragr. 539(a) du rapport de la commission d’enquête).
4. La commission constate qu’à la fin de novembre 2002 la modification de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, que la commission d’enquête et elle-même demandent et que le gouvernement promet depuis de nombreuses années, n’a pas encore été effectuée. De plus, il n’a été portéà la connaissance de la commission ni la proposition ni l’examen d’une loi allant dans ce sens. Dans son observation précédente, la commission avait noté que des pouvoirs législatifs ont été exercés par le gouvernement en juin 2000 et février 2001 lorsqu’il a adopté la loi judiciaire de 2000 et la loi de 2001 du ministère de la Justice. La commission exprime de nouveau l’espoir que la loi sur les villages et la loi sur les villes seront enfin mises en conformité avec la convention.
5. Dans son observation de 2001, la commission avait noté toutefois que, bien que la loi sur les villages et la loi sur les villes appellent toujours les amendements nécessaires, l’ordonnance no 1/99, qui exige de ne pas exercer les pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages, telle que modifiée par l’ordonnance la complétant prise le 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique -à condition d’être de bonne foi et d’être traduit dans les actes non seulement par les autorités locales habilitées à réquisitionner des personnes pour un travail au titre de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, mais aussi par les autorités civiles et militaires habilitées à demander l’assistance des autorités locales en vertu des lois susmentionnées. De l’avis de la commission, cela demandait l’adoption de mesures supplémentaires telles que celles indiquées par la commission d’enquête dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539(b) de son rapport.
A. Mesures visant à mettre un terme à l’imposition dans la pratique du travail forcé ou obligatoire
6. Dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539(b) de son rapport, la commission d’enquête avait indiqué que les mesures nécessaires pour assurer que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires, étaient:
… d’autant plus importantes que le pouvoir d’imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis, sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. En conséquence, au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 du rapport, afin d’arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un Etat de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l’ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d’un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d’œuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré.
7. Absence d’instructions spécifiques et concrètes. Dans son observation de 2001, la commission avait noté qu’en l’absence d’instructions spécifiques et concrètes adressées aux autorités civiles et militaires et décrivant les diverses formes et modalités de réquisition de travail forcé l’application des dispositions adoptées jusqu’à maintenant dépend de l’interprétation de la notion de «travail forcé». Cette notion ne va pas de soi, comme le montrent les divers termes birmans utilisés de cas en cas pour qualifier un travail exigé de la population - entre autres, «loh ah pay», travail «bénévole» ou «offert».
8. Dans son observation précédente, la commission avait noté que, dans son rapport sur l’application de la convention, le gouvernement ne se référait qu’à une directive émise le 1er novembre 2000 par le Conseil d’Etat pour la paix et le développement ordonnant à toutes les autorités concernées de se conformer strictement aux ordonnances prises par le ministre de l’Intérieur, c’est-à-dire l’ordonnance no 1/99 et celle la complétant. La commission avait noté, à la lecture du rapport de la Mission de haut niveau, que, à la date de la rédaction de son rapport en octobre 2001, la mission n’avait reçu que trois instructions en birman adressées par divers commandants militaires aux unités placées sous leurs ordres. Deux de ces instructions ne précisaient ni les types de tâches pour lesquelles la réquisition de main-d’œuvre était interdite ni la manière dont ces tâches devaient être effectuées désormais. La troisième instruction émise par la NaSaKa le 22 juillet 2001 fournissait un nouvel exemple de l’absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, et l’exemple d’une mesure qui se limite en dernier ressort à la question du paiement d’un salaire, contrairement aux indications spécifiques figurant au paragraphe 539(b) du rapport de la commission d’enquête.
9. Dans le rapport que la commission a reçu le 9 septembre 2002, le gouvernement ne fait que mentionner les «éclaircissements» qui ont été donnés à propos de l’ordonnance no 1/99 et de celle la complétant, ordonnances dont il est question au paragraphe 5 précédent, à savoir que des éclaircissements ont été donnés aux services des Conseils pour la paix et le développement, à plusieurs niveaux, et aux services du Département général de l’administration, dans tout le pays. Le gouvernement indique également que les ordonnances ont été transmises à tous les ministères, y compris au ministère de la Défense, pour que celui-ci adresse d’autres instructions à toutes les unités placées sous ses ordres. Dans son rapport transmis le 27 novembre 2002, le gouvernement indique que des éclaircissements sur les ordonnances ont été donnés aux services du Département de la justice, aux forces de police et aux tribunaux de circonscription. Le gouvernement n’a pas fourni d’autres précisions à propos des «explications» ou des «autres instructions» dont il fait mention. Il n’a pas donné non plus d’autres indications à propos de la directive émise le 1er novembre 2002 par le Conseil d’Etat pour la paix et le développement dont il était question dans son rapport de 2001.
10. La commission prend note du rapport «Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930» (document GB.285/4 et annexes) qui comprend, à l’annexe I, un résumé des activités entreprises par le chargé de liaison ad interim de l’OIT. Dans ce résumé (paragr. 25 de l’annexe I), il est indiqué que le chargé de liaison s’est réuni le 23 août 2002 avec la commission chargée de l’application de la convention no 29 «afin de passer en revue les faits nouveaux depuis la visite de la Mission de haut niveau [en septembre et octobre 2001]». A l’occasion de cette réunion, le vice-ministre du Travail a indiqué ce qui suit:
A deux autres reprises depuis la visite de la Mission de haut niveau, plusieurs équipes dirigées par des directeurs du Département du travail se sont rendues sur le terrain pour évaluer la situation et expliquer les ordonnances à la population. Toutefois, un autre membre de la commission a précisé que ces équipes n’ont généralement pas rencontré les commandants militaires locaux.
La commission d’application a indiqué ce qui suit:
… outre leur distribution sous forme de documents imprimés en anglais et en birman, les ordonnances ont été annoncées publiquement par des crieurs dans les villes et des réunions ont été organisées afin de donner à la population des explications dans la langue qu’elle comprend, y compris diverses langues ethniques. Pour ce qui est des nouvelles instructions, aucune n’a été publiée depuis la visite de la Mission de haut niveau, mais de nouvelles consignes ont été données à des fonctionnaires convoqués à Yangon.
11. Dans son rapport transmis le 27 novembre 2002, le gouvernement, se référant aux déplacements en 2002 des équipes d’observation sur le terrain, indique seulement que, pendant ces déplacements, les équipes ont donné aux autorités les orientations nécessaires. Le gouvernement n’a pas donné d’informations plus détaillées sur le contenu des «éclaircissements», «informations» ou «orientations» qu’il affirme avoir donnés en faisant connaître l’ordonnance no 1/99 et l’ordonnance qui la complète.
12. Un représentant du gouvernement a indiqué au Conseil d’administration, à sa 285e session en novembre 2002, que les directives et instructions nécessaires étaient données à l’ensemble des ministères et départements intéressés, y compris le ministère de la Défense. Le représentant du gouvernement n’a pas donné d’informations plus détaillées à ce sujet.
13. Par conséquent, tout en admettant que le gouvernement a communiqué des instructions, la commission estime que des instructions claires restent nécessaires pour indiquer à tous les fonctionnaires intéressés, y compris les officiers à tous les niveaux des forces armées, tant les types de tâches pour lesquelles il est interdit de réquisitionner des personnes que la façon dont ces tâches doivent être dorénavant accomplies. La commission espère que les instructions détaillées nécessaires seront bientôt données et que, entre autres, elles porteront sur les points suivants:
- portage pour les militaires (ou d’autres groupes paramilitaires/militaires, pour des campagnes militaires ou pour des patrouilles régulières);
- construction ou réparation d’installations/camps militaires;
- autres formes d’appui à ces camps (guides, estafettes, cuisiniers, nettoyeurs, etc.);
- génération de revenus par des particuliers ou des groupes (y compris travail dans des projets agricoles ou industriels dont l’armée est propriétaire);
- projets d’infrastructure nationaux ou locaux (routes, voies ferrées, barrages, etc.);
- nettoyage/embellissement des zones rurales ou urbaines;
14. Publicité des ordonnances. Dans son observation précédente, la commission avait pris note d’une communication, en date du 29 novembre 2001, de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), dans laquelle celle-ci affirmait ce qui suit:
En effet, de nombreux rapports ci-joints confirment que, dans certaines régions du pays du moins, l’ordonnance no 1/99 et l’ordonnance la complétant, et d’autres textes applicables en la matière, ont fait l’objet d’une large publicité. De nombreux rapports figurant dans la documentation de la CISL font état de réunions organisées à cet effet par les autorités dans les villages avant la visite de l’OIT. Fréquemment, elles avaient été dirigées par des fonctionnaires supérieurs du Conseil d’Etat pour la paix et le développement envoyés par le commandement régional ou même depuis Rangoon.
En réalité, les villageois ont dû souvent - si ce n’est toujours - payer les frais de ces «réunions d’information», et notamment l’essence ou la nourriture et la boisson pour les fonctionnaires en visite du Conseil d’Etat pour la paix et le développement. Quant aux ordonnances elles-mêmes, une publicité leur a été faite, assez cyniquement, par ce qu’on ne peut désigner que comme une «distribution forcée» du «livre vert» publié par les autorités à cet effet, qui devait être acheté au prix de 1 000 kyats ou davantage l’exemplaire; en règle générale, chaque village se voyait forcé d’acheter un à huit exemplaires, et les villageois étaient également contraints d’acheter les tableaux d’affichage où les ordonnances devaient être affichées.
15. La commission avait demandé au gouvernement de faire des commentaires à propos de cette allégation. Elle note que le gouvernement ne l’a fait dans aucun de ses rapports ou communications les plus récents. Le gouvernement se borne à indiquer dans plusieurs documents les mesures qu’il a prises ou qu’il envisage pour faire connaître les ordonnances:
- dans son rapport reçu le 9 septembre 2002, le gouvernement indique que l’ordonnance no 1/99 et l’ordonnance qui la complète ont été communiquées à l’ensemble des organismes publics et des ministères, y compris le ministère de la Défense;
- dans son rapport communiqué le 27 novembre 2002, le gouvernement indique que les ordonnances ont été affichées dans les bureaux des Conseils pour la paix et le développement, à tous les niveaux, dans les bureaux du Département de l’administration générale, du Département de la justice et des forces de police et dans les municipalités;
- dans une communication en date du 15 novembre 2002 du directeur général du Département du travail à la chargée de liaison du BIT (annexe au document GB.285/4(Add.2)), il est indiqué que, d’ici quelques jours, [le ministère du Travail diffusera] la traduction authentique en shan, en mon et en kayin, de l’ordonnance no 1/99 et de l’ordonnance la complétant. Il est aussi indiqué que la traduction de ces textes en kayah, en chin et en kachin est en cours, et qu’elle sera publiée très prochainement. Le directeur général du ministère du Travail a également indiqué qu’une brochure sur le travail forcé est en cours de préparation afin de faire connaître la convention. Dans un rapport en date du 18 novembre 2002, le gouvernement a joint copie de ce qu’il affirme être la traduction des ordonnances en mon, en shan et en kayin;
- dans un rapport transmis le 27 novembre 2002, le gouvernement indique au paragraphe 3 que les traductions des ordonnances seraient diffusées très prochainement, qu’il prévoit de traduire les ordonnances en chin, en kachin et en kayah, et qu’il a commencéà prendre les mesures nécessaires pour faire connaître les dispositions des ordonnances par des brochures, par voie de presse ou par d’autres moyens.
16. La commission prend note de ces informations et espère que le gouvernement, comme il l’a indiqué, fera connaître les ordonnances et indiquera les mesures prises à cette fin. Elle lui demande de répondre à propos de l’allégation que la CISL a formulée dans sa communication du 29 novembre 2001, ainsi que des indications récentes que la CISL a données dans sa communication du 14 octobre 2002, à savoir que:
… dans certaines zones, des villageois indiquent que la pratique du travail forcé n’a jamais cessé et que, en fait, ils n’ont jamais entendu parler d’«ordonnances» de Rangoon indiquant que le travail forcé est désormais interdit. C’est ce qui ressort clairement de plusieurs entretiens avec des victimes du travail forcé, entretiens dont la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) et EarthRights International (ERI) ont communiqué le contenu.
17. Un rapport de juin 2002 d’EarthRights International, qui est joint à la communication de la CISL, se réfère à de nombreux entretiens avec des villageois des Etats de Shan, de Karenni et de Karen, et des divisions de Pegu, de Mandalay et de Tenasserim, qui ont été réalisés de janvier à mai 2002. EarthRights International affirme ce qui suit:
Peu de villageois connaissent l’ordonnance no 1/99. Certains ont entendu dire qu’il sera mis un terme à la pratique du travail forcé mais beaucoup n’ont toujours pas pris connaissance des ordonnances, formellement ou non.
D’autres documents fournis par la CISL font état de ce qui suit:
… les déclarations selon lesquelles il est mis un terme au travail forcé ont semé la confusion et la peur dans la population. Il en a résulté un climat qui n’encourage pas les villageois à porter plainte pour des pratiques de travail forcé, lesquelles persistent. A ce jour, ERI n’a rencontré aucun villageois qui connaisse la procédure pour porter plainte, et bien moins encore des villageois qui aient l’intention de porter plainte pour travail forcé.
La commission attend les commentaires du gouvernement à propos de ces allégations.
18. La question des ressources budgétaires. Dans son observation précédente, la commission avait noté que la question de l’affectation de ressources budgétaires suffisantes au recrutement de main-d’œuvre salariée volontaire pour les activités publiques ayant fait appel au travail forcé et non rémunéré a été soulevée par la Mission de haut niveau, au cours des entretiens avec les autorités du Myanmar. En un certain nombre d’occasions, au cours de ses déplacements sur le terrain et à Yangon, la mission a demandé des précisions sur les autres moyens d’obtenir le travail ou les services demandés, maintenant que le travail forcé a été interdit. La mission a également demandé s’il y avait des changements dans les dispositions budgétaires. La commission avait noté qu’il ressortait des paragraphes 63 à 66 du rapport de la mission qu’au moment de la rédaction finale du rapport (le 29 octobre 2001) la mission n’avait pas reçu d’informations lui permettant de conclure que les autorités avaient bien prévu le remplacement de la main-d’œuvre forcée et gratuite exigée pour le soutien de l’armée ou les projets de travaux publics.
19. La commission note que le chargé de liaison ad interim (voir ci-dessous) a évoqué devant la commission d’application à l’occasion de sa réunion le 23 août 2002 la question de l’affectation de ressources budgétaires suffisantes au recrutement de main-d’œuvre salariée volontaire. Le résumé de la réunion (document GB.285/4, annexe I, paragr. 25) indique ce qui suit:
En ce qui concerne les preuves de l’existence de crédits budgétaires pour rémunérer le travail fourni dans le cadre de projets de travaux publics, les autorités ont une nouvelle fois indiqué que, selon le système budgétaire du Myanmar, les coûts de main-d’œuvre ne constituent pas un poste séparé, et qu’il est donc impossible de fournir de telles preuves.
20. La commission prend note de l’indication du gouvernement qui figure au paragraphe 5 du rapport sur l’évolution de la situation qui a été transmis le 27 novembre 2002:
En ce qui concerne l’allocation de ressources, une dotation budgétaire est toujours prévue pour chaque projet. Les ouvriers et toutes les personnes occupées au titre des projets respectifs perçoivent les taux de salaire en vigueur dans les secteurs respectifs. Par conséquent, nous sommes convaincus d’avoir pleinement appliqué les mesures ayant trait aux dotations budgétaires…
21. La commission exprime de nouveau l’espoir que les instructions détaillées nécessaires seront bientôt transmises et que, pour reprendre les termes du paragraphe 539(b) du rapport de la commission d’enquête, on prévoira «au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d’œuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées aux moyens de travail forcé et non rémunéré».
22. Mécanismes de contrôle. Dans son observation précédente, la commission avait noté que le gouvernement avait mentionné la création d’un comité au niveau ministériel et d’un comité de mise en œuvre au niveau national, qui doivent non seulement superviser l’application de la loi par les autorités locales, les membres des forces armées et d’autres personnels du service public, mais encore assurer que les autorités locales et la population soient pleinement au fait des ordonnances susmentionnées dans toute la nation. Le gouvernement avait également fait mention des équipes d’observation sur le terrain - placées sous la direction de chefs de départements relevant du ministère du Travail, elles comptent des membres exerçant des responsabilités dans le Département d’administration générale, les forces de police du Myanmar et le Département du travail - qui avaient été envoyées dans différentes régions pour enquêter sur la situation concernant la pratique du travail forcé et pour observer dans quelle mesure la population était au courant de ces ordonnances. Le gouvernement avait indiqué que ces équipes se rendraient fréquemment dans toutes les régions du pays.
23. Dans son rapport complémentaire sur l’évolution de la situation, qu’il a transmis le 27 novembre 2002, le gouvernement indique également qu’il a constitué une commission ministérielle qui a été chargée des questions ayant trait à l’OIT et placée sous la direction du ministre du Travail, ainsi qu’une commission d’application, dirigée par le vice-ministre des Affaires intérieures, pour superviser l’application de l’ordonnance no 1/99 et de l’ordonnance qui la complète. Le gouvernement indique également, au paragraphe 6 de ce rapport et dans son rapport précédent du 18 novembre 2002, que les autorités ont décidé d’inclure dans la commission d’application un officier militaire de haut rang du bureau de l’Inspection générale, laquelle relève du ministère de la Défense. La commission note que cette initiative sera utile et qu’elle aidera beaucoup la commission d’application.
24. Dans son rapport complémentaire sur l’évolution de la situation qu’il a transmis le 27 novembre 2002, le gouvernement fait état des déplacements d’équipes d’observation sur le terrain - ces équipes sont dirigées par les membres de la commission d’application - afin de faire connaître l’ordonnance no 1/99 et l’ordonnance qui la complète. Le gouvernement indique que les équipes ont demandé si les ordonnances étaient portées à la connaissance de la population et si des plaintes pour imposition de travail forcé avaient été enregistrées. Au paragraphe 4 de son rapport, le gouvernement indique qu’une liste de ces déplacements a été jointe au rapport. Il s’agit des visites mensuelles de fonctionnaires dans plusieurs municipalités et de visites de membres de la commission d’application, la plupart ayant eu lieu en août, septembre et octobre 2002. Au paragraphe 7 de son rapport, le gouvernement indique que des mesures ont été prises à cette occasion, notamment pour s’assurer directement que la population locale a pris connaissance des ordonnances et en a compris le sens, et pour évaluer l’efficacité des ordonnances et des mesures prises par les autorités régionales à l’échelle des Etats et des divisions, des municipalités et des villages.
25. Chargée de liaison du BIT. La commission note que, conformément à l’accord conclu le 19 mars 2002, le gouvernement a accepté la nomination d’un chargé de liaison de l’OIT au Myanmar, cette nomination devant déboucher sur une représentation continue de l’OIT dans le pays afin de pouvoir contribuer effectivement à l’élimination du travail forcé. Il a été décidé que le mandat du chargé de liaison couvrirait toutes les activités visant à garantir l’élimination rapide et effective du travail forcé dans le pays. En vertu de l’accord susmentionné, un chargé de liaison ad interim a été nommé le 6 mai 2002 jusqu’à octobre 2002. Pendant cette période, le chargé de liaison a:
- pris des contacts initiaux en mai 2002 avec de hauts fonctionnaires;
- tenu un certain nombre de réunions avec divers interlocuteurs de juin à octobre 2002; et
- effectué un déplacement sur le terrain dans la division de Tanintharyi (document GB.285/4, paragr. 6).
Le 7 octobre 2002, la chargée de liaison permanente de l’OIT a pris ses fonctions à Yangon et a pu établir une série de contacts et organiser des réunions avec des fonctionnaires du gouvernement et d’autres fonctionnaires en octobre et en novembre 2002 (document GB.285/4(Add), paragr. 1).
26. Le gouvernement a formulé plusieurs commentaires à propos du déplacement que le chargé de liaison ad interim a effectué en septembre 2002 dans la division de Tanintharyi. Dans son rapport reçu le 17 octobre 2002, le gouvernement fait mention d’une visite d’une équipe d’observation sur le terrain, composée de fonctionnaires du gouvernement, avec le chargé de liaison ad interim de l’OIT. Le gouvernement indique que le rapport de cette visite, que l’équipe d’observation sur le terrain a soumis au ministère du Travail, indique qu’il n’y a pas de cas de travail forcé dans la région et qu’aucune action en justice n’a été intentée contre qui que ce soit, en vertu de l’article 374 du Code pénal pour infraction à l’ordonnance no 1/99. Le gouvernement n’a pas fourni copie du rapport dont il fait mention.
27. Le Rapport sur les faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement de la convention (document GB.285/4) indique aux paragraphes 13 et 14 qu’une équipe, composée du chargé de liaison ad interim de l’OIT, de son assistant et d’un haut fonctionnaire du ministère du Travail, s’est rendue dans la division de Tanintharyi. Il est indiqué dans le rapport que «ce déplacement ne visait pas à enquêter sur des allégations précises, mais à permettre de se faire une opinion sur les causes profondes du problème (comme la situation économique) et à examiner les possibilités d’assistance de l’OIT dans la solution de ce problème».
28. Tout en faisant bon accueil à l’action conjuguée de la chargée de liaison de l’OIT, de la commission d’application et des missions d’observation sur le terrain, la commission espère qu’il n’y aura pas de confusion en ce qui concerne les différents rôles et fonctions de la chargée de liaison et ceux des organismes gouvernementaux. Il est important de veiller à ce que l’on ne confonde pas les initiatives des équipes d’observation sur le terrain et celles de la chargée de liaison, étant donné que les fonctions et initiatives de chacun devraient rester nettement séparées.
29. La commission prend note des indications que le gouvernement a données, à savoir qu’il s’efforce d’éliminer la pratique du travail forcé dans tout le pays. La commission note que des efforts sont déployés mais qu’il n’y a pas d’instructions spécifiques et concrètes et que l’on manque de dotations budgétaires pour remplacer la main-d’œuvre forcée et non rémunérée.
30. Dans son observation précédente, la commission avait pris note des conclusions «relatives à l’impact sur les réalités du travail forcé des mesures prises pour mettre en œuvre les ordonnances» formulées aux paragraphes 54 à 58 du rapport de la Mission de haut niveau d’octobre 2001. La commission avait également pris note de l’analyse de la Mission de haut niveau figurant aux paragraphes 59 à 62 de son rapport, à savoir qu’elle avait recensé les obstacles à une éradication plus efficace du travail forcé au Myanmar, et qu’elle s’était notamment référée à la politique «d’autonomie» de l’armée, à l’incertitude relative aux dispositions de substitution financières et pratiques et à des obstacles institutionnels.
31. La commission a également pris note, dans sa précédente observation, de la communication de la CISL du 29 novembre 2001, qui contenait des allégations selon lesquelles les autorités militaires de la Birmanie continueraient de recourir au travail forcé sur une très grande échelle. A l’appui de ses allégations, la CISL avait joint quelque 30 rapports et autres documents, en tout plus de 100 pages, comportant souvent des indications précises de temps et de lieux, de bataillons ou compagnies militaires impliqués et des noms des commandants. La commission avait exprimé l’espoir que le gouvernement examinerait les indications données par la CISL et qu’il fournirait des informations détaillées sur toutes mesures prises à la suite de ces indications, de même qu’à la suite du rapport de la Mission de haut niveau, afin d’engager des poursuites contre toutes personnes reconnues responsables d’avoir ordonné du travail forcé, et enfin que le gouvernement fournirait des informations complètes sur l’action entreprise. Dans ses derniers rapports, le gouvernement n’a pas fourni les informations demandées par la commission.
32. L’avis du gouvernement. Dans son rapport précédent sur l’application de la convention, transmis le 30 septembre 2001, le gouvernement déclare que l’élimination du travail forcé«sera la préoccupation prioritaire principale du gouvernement». Avant le Conseil d’administration du BIT à sa 285e session en novembre 2002, le représentant gouvernemental a déclaré qu’en comparant la situation en 2000 et 2001 à celle de novembre 2002 l’on pourrait certainement dire qu’une amélioration et des progrès ont été accomplis au Myanmar au cours des années, mais il n’a pas expliqué en termes spécifiques quelles améliorations ou progrès il considérait avoir été réalisés. Dans son récent rapport transmis le 27 novembre 2002, le gouvernement indique que la commission d’application «fera tout son possible pour éradiquer le travail forcé». Ainsi, le gouvernement ne donne toujours aucune indication quant aux progrès et résultats atteints jusqu’ici.
33. Rapports sur les rencontres entre les chargés de liaison du BIT et les fonctionnaires du gouvernement. La commission note que le rapport sur les faits nouveaux (document GB.285/4) renvoie à un certain nombre de communications entre les chargés de liaison et les fonctionnaires du gouvernement sur toute une série de questions, y compris:
- Une réunion avec le ministre des Affaires intérieures le 1er juillet 2002 au sujet des allégations selon lesquelles des adolescents étaient enlevés à Yangon et contraints de travailler comme porteurs, question qui fut par la suite discutée par le Conseil d’administration du BIT à sa 285e session en novembre 2002 (document GB.285/PV).
- Une lettre adressée le 24 juillet au ministre du Travail (reproduite dans le document GB.285/4, annexe V) et une réunion tenue par la suite, le 30 juillet 2002, au cours de laquelle le chargé de liaison ad intérim a appelé l’attention sur les allégations précises de travail forcé contenues dans un rapport récent d’Amnesty international (du 17 juillet 2002, intitulé«Myanmar: Absence de sécurité dans les zones de lutte contre l’insurrection»), et a demandé que la commission d’application envoie des équipes dans les diverses zones pour enquêter sur ces allégations ainsi que sur d’autres allégations faisant état d’une aggravation du travail forcé dans certaines parties du nord de l’Etat de Rakhine.
- Une lettre du 4 octobre 2002 du chargé de liaison provisoire à la commission d’application donnant des détails d’une plainte (sans en identifier la source) selon laquelle des propriétaires de véhicule étaient réquisitionnés avec leur véhicule pour transporter des troupes et des approvisionnements dans la zone de Kyaikto et pour travailler à la construction d’une base d’artillerie, et demandant à la commission d’enquêter en urgence sur cette question et d’informer l’OIT du résultat.
- Une réunion avec la commission d’application le 23 août 2002, au cours de laquelle le chargé de liaison ad intérim a pu être informé des progrès accomplis depuis la dernière réunion, tenue en mai. La commission d’application a indiquéêtre au courant de diverses allégations de travail forcé, y compris celles contenues dans le rapport établi par Amnesty international, mais a déclaré qu’elles n’étaient étayées par aucun élément recueilli sur le terrain et qu’elle considérait la plupart d’entre elles comme excessives ou montées de toutes pièces par des groupes d’expatriés. Elle a cependant déclaré qu’elle prendrait note des arguments contenus dans le rapport de la Mission de haut niveau du BIT et examinerait la situation dans les zones éloignées.
- Une réunion avec la commission d’application le 9 novembre 2002, où la chargée de liaison a pu assurer le suivi des allégations transmises par le chargé de liaison provisoire dans des lettres en date des 23 juillet, 7 août et 4 octobre 2002. La chargée de liaison a été informée par la commission des différents endroits du pays où ses membres ont voyagé pour diffuser une information et recueillir des éléments sur le terrain. En ce qui concerne les allégations spécifiques, la commission d’application a indiqué que la situation dans le nord de l’Etat de Rakhine avait fait l’objet d’une enquête approfondie, et que ces allégations se sont révélées infondées, tout comme les allégations concernant la réquisition de véhicules dans l’Etat de Mon. Les allégations d’Amnesty international n’ont pas fait l’objet d’une enquête, pas plus que celles concernant la construction d’une base d’artillerie dans l’Etat de Mon. La chargée de liaison a insisté sur le fait que des rapports d’enquête écrits étaient nécessaires, a indiqué que les informations fournies par la commission d’application concernant le nord de l’Etat de Rakhine ne concordaient pas avec une réponse fournie séparément par les autorités au Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) sur la même question, et a soulevé un certain nombre d’allégations nouvelles qui avaient été communiquées et au sujet desquelles elle a indiqué que la commission devait enquêter. Ces nouvelles allégations, dont certains détails avaient été communiqués à la commission d’application par la chargée de liaison avant la réunion, portaient sur le recrutement forcé d’enfants soldats, l’assassinat d’un syndicaliste alors qu’il avait été forcéà travailler comme porteur, un certain nombre d’allégations spécifiques contenues dans des informations soumises récemment à la commission d’experts par la CISL, ainsi que des informations concernant des allégations de travail forcé dans deux villes de la division de Bago. La chargée de liaison a transmis d’autres détails concernant ces allégations à la commission d’application dans une lettre de rappel en date du 14 novembre.
- Une réunion avec le ministre des Affaires étrangères le 12 novembre 2002, au cours de laquelle le ministre a indiqué que les autorités n’avaient pas une politique de recours au travail forcé, bien qu’elles réalisaient que cette pratique puisse continuer dans des zones reculées et comprenaient la nécessité de poursuivre les coupables.
- Une réunion avec le secrétaire 1 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement le 14 novembre 2002, au cours de laquelle le secrétaire a indiqué que les autorités n’avaient pas fermé les yeux sur le travail forcé et avaient donné des instructions claires pour l’interdire, bien qu’il soit possible que de telles pratiques continuent de prévaloir dans des zones reculées. La chargée de liaison a insisté sur la nécessité d’améliorer le système actuel d’examen des allégations et de trouver un moyen d’enquêter sur les allégations mettant en cause l’armée.
34. L’annexe au rapport sur les faits nouveaux se réfère à un entretien entre la chargée de liaison et Daw Aung San Suu Kyi, secrétaire générale de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), le 30 octobre. Selon le rapport:
Daw Aung San Suu Kyi s’est réjouie de la nomination d’une chargée de liaison du BIT à Yangon, et elle a émis le vœu que la NLD ait des contacts réguliers avec elle. A son avis, un véritable progrès en matière de travail forcé ne pourra être fait que si le processus de réconciliation lui-même progresse. Mais le BIT pourrait contribuer à des améliorations dans certains domaines. La NLD a noté une certaine diminution du recours au travail forcé, mais dispose aussi d’informations sur la poursuite de cette pratique, y compris certains cas que la secrétaire générale connaît personnellement.
35. La commission se félicite du dialogue que le gouvernement a engagé avec la chargée de liaison du BIT et espère que le gouvernement procédera à des enquêtes rigoureuses concernant les allégations indiquées par la chargée de liaison et qu’il fournira des rapports écrits contenant toutes poursuites engagées en application de l’ordonnance no 1/99. De cette façon, le gouvernement pourrait être en mesure de démontrer qu’il applique réellement l’engagement qu’il a exprimé d’éliminer le travail forcé dans le pays.
36. La communication de la CISL. Dans sa communication datée du 14 octobre 2002, la CISL a indiqué que les informations fournies couvrent approximativement la période octobre 2001 - septembre 2002. Elles émanent d’un certain nombre de sources et font état d’une persistance très grave du travail forcé. La CISL mentionne dans sa communication divers cas relatifs, entre autres, à l’Etat de Chin, l’Etat de Shan, l’Etat de Mon, l’Etat de Karen, l’Etat d’Arakan, et aux divisions d’Irrawaddy et Tenasserim. La CISL dit que, sur la base de ces informations:
… elle considère que du travail forcé continue àêtre imposé en Birmanie à la fois par les autorités militaires et par les autorités civiles et que ce travail forcé donne lieu régulièrement, sinon toujours, à de graves violations des droits de l’homme: travail d’enfants, homicides, prémédités ou non, tortures, viols et autres violences physiques, pillages ou confiscation de biens, privation de nourriture, de soins médicaux, de repos et d’abri, etc. Tous les éléments dont on dispose démontrent en fait clairement que, après que la Mission de haut niveau du BIT ait quitté le pays en octobre 2001, le travail forcé a totalement repris dans toutes les parties du territoire où cette pratique existait auparavant.
37. La CISL souligne que sa communication s’appuie sur de nombreux documents, notamment sur des dizaines d’entretiens avec des victimes de travail forcé. Elle déclare ainsi:
Les éléments que nous avons recueillis, en tout plus de 350 pages, font état, comme toujours, de centaines de cas de travail forcé, portant sur des milliers de victimes, et sont étayés par des centaines «de documents de réquisition de main-d’œuvre pour du travail forcé». La plupart du temps, ce travail forcé est accompli directement pour le compte de l’armée, pour qui il faut construire et entretenir des camps, des casernes, des clôtures et d’autres installations militaires, ou travailler sur des propriétés agricoles de l’armée (pour la plupart confisquées à des civils). Une partie du travail forcé concerne aussi ou a rapport avec des projets industriels d’entreprises étrangères. Il est également fait état de la culture forcée de l’opium, que l’armée imposerait à la population civile dans l’Etat de Shan.
38. Les pièces jointes à la communication de la CISL sont les suivantes:
- la documentation de la CISL concernant le meurtre, en août 2002, par des éléments de l’armée, de U Saw Mya Than, dirigeant de la FTUB (Fédération des syndicats de Birmanie) et du KEWU (Kawthoolei education workers Union), qui avait été recruté de force comme porteur dans le bataillon d’infanterie légère (LIB) no 588, placé sous les ordres d’un certain commandant Myo Hlaing. La CISL estime que le rôle joué par U Saw Mya Than comme dirigeant syndical et militant pour les droits de l’homme était directement en rapport avec son recrutement de force comme porteur et, consécutivement, son meurtre par l’armée (paragr. 3);
- un rapport de situation provenant des localités urbaines de Kya Inn-Seik Gyii et de Kawkereik et du district de Dooplaya, dans l’Etat de Karen, basé sur des entretiens avec des villageois, et exposant par le détail des accusations précises d’imposition de travail forcé par des soldats de la division SPDC 88;
- le rapport de juin 2002 émanant de EarthRights International (ERI), intitulé«Nous ne sommes pas libres de travailler pour nous-mêmes: travail forcé et autres atteintes aux droits de l’homme en Birmanie (janvier - mai 2002)», basé sur 77 entretiens portant sur le travail forcé menés avec des villageois des Etats de Shan, de Karenni et de Karen et des divisions de Pegu, de Mandalay et de Tenasserim au cours de la période janvier - mai 2002. Selon ce rapport, au cours de la période considérée, le portage et d’autres formes de travail forcé ont continué de sévir dans des conditions constitutives de graves atteintes aux droits de l’homme; peu de villageois avaient connaissance de l’ordonnance no 1/99, et les extorsions de fonds sous couvert de recouvrement de droits sont allés en s’aggravant. Toujours selon ce rapport, la promulgation de l’ordonnance no 1/99 pourrait avoir eu comme effet de rendre le recours au travail forcé plus insidieux et plus difficile àéradiquer à l’avenir. Par exemple, ERI déclare avoir constaté les faits suivants: des manœuvres des autorités militaires tendant à«établir officiellement» que le travail forcé n’a plus cours en contraignant les villageois de témoigner sous diverses formes que la pratique n’a plus cours alors qu’elle continue de sévir; des menaces de représailles de la part des officiers et des soldats, notamment des menaces de mort à l’égard des villageois qui déclareraient que le travail forcé a toujours cours; un travestissement du vocabulaire entourant le travail forcé, comme l’utilisation du terme «assistant» (a-ku-ah-nyi) en lieu et place de «travailleur forcé» (loy-ah-pay); un paiement, dans de rares cas, du travail forcé mais toujours avec la persistance pour les villageois de l’impossibilité de refuser de travailler.
- des extraits d’un rapport d’octobre 2002 émanant du centre de documentation et de recherche du front démocratique des étudiants de Birmanie, qui contient des accusations de travail forcé constaté dans l’Etat de Chin, division d’Irrawaddy, dans l’Etat de Rakhine, dans l’Etat de Shan et la division de Tenasserim;
- des extraits de l’organe Narinjara News faisant état de pratiques de travail forcé dans l’Etat de Rakhine.
39. La documentation de la CISL apporte un autre supplément à celle d’octobre 2001, à savoir un rapport d’EarthRights International, intitulé«Toujours la même chose: le travail forcé persiste en Birmanie». Le rapport d’EarthRights dénonce un recours au travail forcé pour la construction des gazoducs de Yadana et de Yetagun, plus précisément:
- des unités militaires assurant la sécurité dans le cadre de deux projets de gazoducs soumettent des villageois au travail forcé et les contraignent à des opérations de portage pour la construction et la réparation de camps et installations militaires et pour la réalisation de projets nationaux ou locaux d’infrastructures (dégagement de tracés de routes, construction de ponts, etc.) au titre de la sécurité militaire;
- des consortiums exploitant ces gazoducs, dont notamment TotalFinaElf (anciennement Total) pour la France, Unocal pour les Etats-Unis et Premier Oil pour le Royaume-Uni font appel à l’armée birmane pour assurer la sécurité autour de ces projets, tout en sachant pertinemment que les militaires ont recouru et continueront de recourir à cette fin au travail forcé;
- autour d’avril 2002, des civils d’au moins 16 villages de la division de Tenasserim (sud du pays) ont été contraints d’effectuer des travaux de construction sur une route entre Kanbauk et Maung Ma Gan.
Les documents annexés à la communication de la CISL contiennent également un exemplaire de la publication de la fondation de Monland intitulé The Mon Forum (no 7/202, du 31 juillet 2002), qui a son siège dans le sud de la Birmanie. Ces documents contiennent également des allégations de travail forcé en rapport avec des projets relatifs à des gazoducs.
Le Bureau a reçu une correspondance en date du 31 octobre 2002 émanant de TotalFinaElf qui rejette, pour l’essentiel, ces accusations.
40. La commission prie le gouvernement d’examiner les commentaires de la CISL qui sont spécifiquement détaillés dans son rapport et dans les pièces jointes, et de fournir des informations détaillées sur ces investigations et sur toutes mesures qu’il aura prises en conséquence pour que les personnes reconnues responsables d’avoir ordonné du travail forcé et des crimes qui ont été commis de manière concomitante soient poursuivies.
41. Au paragraphe 539(c) de ses recommandations, la commission d’enquête invitait instamment le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer:
… que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l’article 374 du Code pénal pour le fait d’exiger du travail forcé ou obligatoire soit strictement appliquées, conformément à l’article 25 de la convention. Ceci demande de la rigueur dans les enquêtes et poursuites et l’imposition de sanctions efficaces aux personnes reconnues coupables.
42. Dans son observation publiée en 2001, la commission avait relevé que le point 4 de la directive émise le 1er novembre 2000 par le Conseil d’Etat pour la paix et le développement (à laquelle le gouvernement se réfère dans son rapport de 2001) prévoit la poursuite des «personnes responsables», au regard de l’article 374 du Code pénal, et qu’une clause similaire est incluse au point 3 d’une instruction en date du 27 octobre 2000 adressée au directeur général de la police pour toutes les unités de cette force.
43. La commission fait à nouveau observer qu’aucune action sur le fondement de l’article 374 du Code pénal n’a encore été portée à sa connaissance et que le rapport du gouvernement faisant état d’une action administrative décidée ne s’appuie pas sur des éléments suffisants et, en tout état de cause, ne satisfait pas aux prescriptions posées par la convention.
44. Dans sa communication en date du 14 octobre 2002, la CISL, commentant les déclarations faisant état d’une reprise intégrale des pratiques de travail forcé après la visite de l’Equipe de haut niveau dans ce pays, en octobre 2001, déclare:
Ainsi, dans certains villages, des villageois dénoncent la reprise, avec la même intensité, du travail forcé, au mépris de l’ordonnance no 1/99 et de l’ordonnance supplémentaire à celle-ci, tandis que, dans d’autres, les villageois déclarent que la pratique n’a jamais cessé…
… De plus, de nombreux incidents démontrent clairement que les chefs militaires sur le terrain et les autres officiers de l’armée n’ont que mépris pour les demandes que leur adressent les villageois en s’appuyant sur l’ordonnance no 1/99 et l’ordonnance complémentaire en vue d’être épargnés du travail forcé. A Kyaik Don (district de Dooplaya, Etat de Karen), le commandant en chef Ohn Myint, en tête de la division 88, est cité dans l’un de nos rapports pour avoir tenu les propos suivants: «Si certains d’entre vous ne sont pas d’accord ou ne sont pas satisfaits des arrangements que j’ai pris pour demander aux villageois de travailler pour nous, vous pouvez le faire savoir aux médias si vous en avez l’audace. Je suis le cousin du général Khin Nyunt.»
La commission prie le gouvernement de faire part de son appréciation sur ces questions, en indiquant en particulier de quelle manière d’éventuelles investigations auraient été menées suite à ces allégations, par les militaires eux-mêmes ou par les instances judiciaires, et de faire connaître les mesures prises pour protéger contre des représailles à la fois les témoins et les victimes qui chercheraient à obtenir justice.
La commission prie également le gouvernement d’examiner la proposition relative à l’établissement du bureau de l’ombudsman ou un mécanisme similaire qui serait investi du mandat et des moyens voulus pour recevoir les plaintes de travail forcé et procéder à des investigations, comme suggéré par l’Equipe de haut niveau en 2001. Le gouvernement voudra sans doute engager un dialogue avec le fonctionnaire de liaison sur cette question.
* * *
45. En résumé, la commission prend note des points suivants:
- les mesures que le gouvernement a récemment indiquées, entre autres la traduction de l’ordonnance no 1/99 et de l’ordonnance qui la complète en shan, en mon et en kayin;
- la traduction imminente de l’ordonnance en kayah, en chin et en kachin;
- l’intention de diffuser les traductions de l’ordonnance;
- l’élargissement de la commission d’application: elle comprendra un officier militaire de haut rang du bureau de l’inspection générale, qui relève du ministère de la Défense;
- l’élaboration d’une brochure sur le travail forcé afin de faire connaître la convention;
- l’indication du gouvernement, au paragraphe 8 de son rapport du 27 novembre 2002, qu’un plan d’action prévoyant des mesures renforcées plus efficaces sera coordonné avec la participation de la chargée de liaison de l’OIT.
46. Ces mesures sont louables. La commission rappelle que le Conseil d’administration du BIT, à sa 285e session en novembre 2002 (document GB.285/PV), a fait bon accueil aux déclarations du gouvernement mais a dit qu’il attendait les mesures concrètes qui doivent y donner suite. Le Conseil d’administration a aussi déclaré que le gouvernement doit éliminer le travail forcé, veiller à ce que soient traduits en justice les responsables de pratiques de travail forcé et modifier la procédure juridique afin de donner effet aux mesures susmentionnées.
47. La commission indique que, malgré les indications et les arguments du gouvernement, aucune des trois recommandations que la commission d’enquête avait formulées, et que le gouvernement avait acceptées, n’a été suivie d’effet à ce jour. Malgré les promesses de longue date et la bonne volonté affichée par le gouvernement, la loi sur les villages et la loi sur les villes n’ont pas encore été modifiées. L’ordonnance no 1/99, telle que complétée, a été amplement diffusée, mais elle n’a pas permis de mettre un terme à l’imposition de travail forcé, en particulier de la part de l’armée. Rien n’indique que les instructions spécifiques et concrètes et les dotations budgétaires nécessaires ont été décidées ou, pour le moins, préparées, afin de remplacer dans les faits le travail forcé par des conditions de travail et des salaires décents susceptibles d’attirer, sans contrainte, les travailleurs dont on a besoin. Enfin, rien n’indique que des responsables de l’imposition de travail forcé et, souvent, d’infractions concomitantes aient été poursuivis, voire condamnés, en vertu de l’article 374 du Code pénal ou de toute autre disposition, conformément à l’article 25 de la convention.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 91e session].
1. La commission a pris note des rapports du gouvernement sur l’application de la convention. En examinant l’effet donné aux recommandations de la Commission d’enquête chargée d’examiner l’exécution par le Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, la commission a en outre pris note:
- des informations soumises à la Conférence internationale du Travail à sa 89e session (juin 2001) et des débats qui ont suivi (Compte rendu provisoire no 19, Partie III);
- des informations présentées au Conseil d’administration du BIT à sa 280e session en mars 2001 et des débats qui ont suivi (reproduites dans le Compte rendu provisoire no 19, Partie III, de la 89e session de la Conférence internationale du Travail);
- des informations présentées au Conseil d’administration du BIT à sa 282e session en novembre 2001, et notamment du rapport de la Mission de haut niveau sur des «faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930» (doc. GB.282/4 et annexes), de l’intervention du représentant du gouvernement et des conclusions du Conseil d’administration (doc. GB.282/4/2);
- de la résolution adoptée par la Commission de l’ONU des droits de l’homme à sa 57e session (mars-avril 2001) sur la situation des droits de l’homme au Myanmar (document des Nations Unies E/CN.4/RES/2001/15);
- du rapport intérimaire, en date du 20 août 2001, élaboré par Paulo Sergio Pinheiro, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme au Myanmar (document des Nations Unies A/56/312), et de son intervention orale faite le 9 novembre 2001 à la 56e session de l’Assemblée générale;
- d’une séance d’information, tenue le 19 novembre 2001 par le ministère des Affaires étrangères du Myanmar au sujet de la réunion du Conseil d’administration du BIT de novembre 2001, et reflétée le lendemain dans le «New Light of Myanmar» et par l’agence «Reuter»;
- d’une communication datée du 29 novembre 2001 de la Confédération internationale des syndicats libres, présentant à l’OIT une documentation récente se référant à la persistance, sur une large échelle, du recours au travail forcé par les autorités militaires au Myanmar, dont copie a été transmise au gouvernement pour tout commentaire qu’il souhaiterait présenter au sujet des questions qui y sont soulevées.
2. Les informations disponibles sur l’exécution de la convention par le gouvernement du Myanmar sont, cette fois encore, exposées en trois parties: i) l’amendement de la législation; ii) toutes mesures prises par le gouvernement pour mettre un terme à l’imposition, dans la pratique, du travail forcé ou obligatoire, et les informations disponibles sur la pratique actuelle; et iii) l’application de sanctions qui peuvent être imposées en vertu du Code pénal pour le fait d’exiger un travail forcé ou obligatoire.
3. Au paragraphe 470 de son rapport du 2 juillet 1998, la commission d’enquête avait noté:
… qu’aux termes de l’article 11 d), lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1 g), n) et o), de la loi sur les villages, ainsi que de l’article 9 b) de la loi sur les villes, du travail ou des services peuvent être imposés à toute personne résidant dans un arrondissement rural ou urbain, c’est-à-dire un travail ou des services pour lesquels l’intéressé ne s’est pas offert de plein gré et que la non-obtempération à une réquisition faite en application de l’article 11 d) de la loi sur les villages ou de l’article 9 b) de la loi sur les villes est passible des sanctions pénales prévues à l’article 12 de la loi sur les villages ou de l’article 9 a) de la loi sur les villes. Ainsi, ces lois prévoient l’imposition d’un «travail forcé ou obligatoire» relevant de la définition de l’article 2, paragraphe 1, de la convention.
La commission d’enquête avait noté en outre que les larges pouvoirs de réquisition de main-d’oeuvre pour du travail et des services énoncés dans ces lois ne sont pas compris dans les exceptions énumérées à l’article 2, paragraphe 2, de la convention et qu’ils sont entièrement incompatibles avec la convention. Rappelant que le gouvernement promettait depuis plus de trente ans de modifier les dispositions de ces lois, la commission avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer que la loi sur les villages et la loi sur les villes soient mises sans délai en conformité avec la convention, au plus tard le 1er mai 1999 (paragr. 539 a) du rapport de la commission).
4. La commission observe que, fin novembre 2001, la modification de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, que la commission d’enquête et elle-même ont demandée et que le gouvernement promet depuis des années, n’a pas encore été effectuée et qu’aucun projet de loi proposé ou envisagéà cet effet n’a été portéà la connaissance de la commission. La commission note au paragraphe 47 du rapport de la Mission de haut niveau que des pouvoirs législatifs ont été exercés par le gouvernement en juin 2000 et février 2001 lors de l’adoption de la «loi judiciaire, 2000» et de la «loi du ministère de la Justice, 2001». La commission exprime de nouveau l’espoir que la loi sur les villages et la loi sur les villes seront enfin rendues conformes à la convention.
5. Dans son observation précédente, la commission a noté que, bien que la loi sur les villages et la loi sur les villes appellent toujours les amendements nécessaires, un «arrêté [anglais: Order, souvent traduit par «ordonnance» dans le rapport de la Mission de haut niveau, tel que cité plus loin] (no 1/99) ordonnant de ne pas exercer les pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages», tel que modifié par un «arrêté complétant l’arrêté no 1/99» pris le 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique -à condition d’être de bonne foi traduit dans les actes non seulement par les autorités locales habilitées à réquisitionner des personnes pour un travail au titre de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, mais aussi par les autorités civiles et militaires habilitées à demander l’assistance des autorités locales en vertu des lois susmentionnées. De l’avis de la commission, cela demandait l’adoption de mesures supplémentaires telles qu’indiquées par la commission d’enquête dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539 b) de son rapport.
6. Dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539 b) de son rapport, la commission d’enquête avait indiqué que les mesures nécessaires pour assurer que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires, étaient:
… d’autant plus important[es] que le pouvoir d’imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. En conséquence, au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 [du rapport de la commission], afin d’arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un état de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l’ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d’un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d’oeuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré…
7. Absence d’instructions spécifiques et concrètes. Dans son observation précédente, la commission a noté qu’en l’absence d’instructions spécifiques et concrètes adressées aux autorités civiles et militaires et décrivant les diverses formes et modalités de réquisition de travail forcé, l’application des dispositions adoptées jusqu’à maintenant dépend de l’interprétation de la notion de «travail forcé». Cette notion ne va pas de soi, comme le montrent les divers termes birmans utilisés de cas en cas pour qualifier un travail exigé de la population - entre autres, «loh ah pay», travail «bénévole» ou «offert». Le manque de clarté sur ce point est aggravé par les tentatives périodiques du gouvernement d’expliquer le recours généraliséà l’exaction de travail et de services, notamment par les autorités militaires, par le mérite qui peut être acquis dans la religion bouddhiste à ceux qui offrent spontanément une aide. La commission d’enquête a rappelé, au paragraphe 539 c) de son rapport, que «l’absence de délimitations nettes entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement» risquait «encore de marquer le recrutement effectué par les responsables locaux ou militaires».
8. Dans son rapport sur l’application de la convention, le gouvernement ne se réfère qu’à une directive émise le 1er novembre 2000 par le Conseil d’Etat pour la paix et le développement ordonnant à toutes les autorités concernées de se conformer strictement aux arrêtés pris par le ministère de l’Intérieur, c’est-à-dire l’arrêté no 1/99 et l’arrêté le complétant, mentionnés au paragraphe 5 ci-dessus. La commission note l’indication de la Mission de haut niveau dans son rapport selon laquelle elle:
… a demandéà diverses reprises qu’on lui fournisse des traductions exactes de toutes instructions supplémentaires adressés à toutes autorités, y compris à l’armée. A la date de rédaction de son rapport en octobre 2001 la mission n’avait reçu que trois instructions en birman adressées par divers commandants militaires aux unités placées sous leurs ordres. Des traductions officielles de ces instructions ont été demandées, mais elles n’ont pas encore été reçues. Se fondant sur des traductions officieuses, la Mission de haut niveau a cru comprendre que deux de ces instructions reprenaient simplement le texte de l’ordonnance émise par le Secrétaire 1 le 1er novembre 2000. Elles ne précisaient ni les types de tâches pour lesquelles la réquisition de main-d’oeuvre était interdite, ni la manière dont ces tâches devaient être effectuées désormais. La troisième instruction émise par la NaSaKa le 22 juillet 2001 réaffirmait l’interdiction générale de la réquisition de travail forcé contenue dans les arrêtés, mais ajoutait que, si le recours au travail forcéétait nécessaire, un paiement devrait être effectué en conséquence. Il apparaîtrait ainsi, sur la base des informations reçues jusqu’ici, que les autorités n’ont pas accordéà cet aspect de la question l’attention qu’il méritait.
La troisième instruction fournit ainsi un nouvel exemple de l’absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, à laquelle il est fait référence au paragraphe 7 ci-dessus, et l’exemple d’une mesure qui se limite en dernier ressort à la question du paiement d’un salaire, contrairement aux indications spécifiques figurant au paragraphe 539 b) du rapport de la commission d’enquête, cité plus haut au paragraphe 6.
9. Par conséquent, il reste toujours le besoin d’instructions claires indiquant à tous les fonctionnaires intéressés, y compris les militaires à tous les niveaux des forces armées, les types de tâches pour lesquelles il est interdit de réquisitionner des personnes, ainsi que la manière dont ces tâches doivent être effectuées à l’avenir. La commission espère que les instructions détaillées nécessaires seront bientôt émises et qu’elles couvriront entre autres chacun des domaines suivants:
- fourniture de matériaux ou provisions, de quelque nature qu’ils soient. L’interdiction de la réquisition doit aussi s’appliquer aux demandes d’argent (sauf quand il est dûà l’Etat ou à une municipalité, aux termes d’une loi correspondante) puisque dans la pratique des militaires les demandes d’argent ou de services sont souvent interchangeables.
10. Publicité des arrêtés. Si les instructions spécifiques et concrètes jugées nécessaires par la commission d’enquête ne semblent pas encore avoir étéémises, le gouvernement indique dans son rapport que l’arrêté no 1/99 et l’ordre le complétant et la directive du 1er novembre 2000 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement (voir, plus haut, paragraphes 5 et 8) ont été distribués à tous les organes et ministères de l’Etat, y compris le ministère de la Défense, et à toutes les autorités administratives locales jusqu’aux conseils pour la paix et le développement des quartiers et des arrondissements ruraux, et que les arrêtés ont également fait l’objet d’une circulation publique dans la Gazette du Myanmar, mensuelle, afin d’informer toute la population de manière formelle, ce qui est la procédure normale au Myanmar pour toutes les lois et tous les décrets, arrêtés, etc. pris par le gouvernement.
11. Il ressort du rapport de la Mission de haut niveau que l’arrêté no 1/99 et l’arrêté le complétant, mentionnés plus haut au paragraphe 5 [et souvent désignés dans la version française du rapport de la mission comme «ordonnances»], ont fait l’objet d’une considérable publicité dans la période précédant la visite de la mission, et qu’ils étaient affichés en anglais et en birman sur le panneau d’affichage des bureaux des conseils pour la paix et le développement des arrondissements ruraux et d’autres bureaux publics et ont fait l’objet de très nombreuses réunions organisées par diverses autorités pour informer à la fois la population et les responsables administratifs de leur teneur. La mission a toutefois noté qu’il existait des différences géographiques considérables dans la diffusion des textes ainsi que dans les délais dans lesquels cette diffusion s’était produite. Dans de nombreux cas, les personnes rencontrées ont déclaré qu’elles en avaient été informées par des radios étrangères, et non par les autorités. La mission a également noté que les textes n’avaient pas du tout été diffusés dans les moyens de communication avec le grand public ni dans d’autres langues que l’anglais et le birman, et qu’en particulier ils n’avaient pas été traduits dans l’une quelconque des autres principales langues ethniques parlées dans le pays. Des habitants de différentes parties du pays ont informé la mission qu’ils n’étaient pas en mesure de comprendre les textes affichés dans leur région parce qu’ils ne connaissaient pas suffisamment le birman. En outre, la mission a noté que les textes n’avaient pas été toujours diffusés ensemble, alors qu’ils doivent être lus conjointement.
12. La commission note aussi l’allégation formulée par la CISL dans sa communication datée du 29 novembre 2001 selon laquelle:
En effet, de nombreux rapports ci-joints confirment que, dans certaines parties du pays du moins, l’arrêté no 1/99 et l’arrêté le complétant et d’autres textes applicables en la matière ont fait l’objet d’une large publicité. De nombreux rapports figurant dans la documentation de la CISL font état de réunions organisées à cet effet par les autorités dans les villages avant la visite de l’OIT. Fréquemment, elles avaient été dirigées par des fonctionnaires supérieurs du Conseil d’Etat pour la paix et le développement envoyés par le commandement régional ou même depuis Rangoon.
En réalité, les villageois ont dû souvent - si ce n’est toujours - payer les frais de ces «réunions d’information», et notamment l’essence ou la nourriture et la boisson pour les fonctionnaires en visite du Conseil d’Etat pour la paix et le développement. Quant aux arrêtés eux-mêmes, une publicité leur a été faite, assez cyniquement, par ce qu’on ne peut désigner que comme une «distribution forcée» du «livre vert» publié par les autorités à cet effet, qui devait être acheté au prix de 1 000 kyats ou davantage l’exemplaire; en règle générale, chaque village se voyait forcé d’acheter un à huit exemplaires, et les villageois étaient également contraints d’acheter les tableaux d’affichage où les arrêtés devaient être affichés.
Le gouvernement voudra peut-être faire des commentaires sur cette allégation.
13. La question des ressources budgétaires. La commission note que la question de l’affectation de ressources budgétaires suffisantes au recrutement de main-d’oeuvre salariée volontaire pour les activités publiques ayant fait appel au travail forcé et non rémunéré a été soulevée par la Mission de haut niveau dans ses entretiens avec les autorités du Myanmar. En un certain nombre d’occasions au cours de ses déplacements sur le terrain et à Yangon, la mission a demandé des précisions sur les autres moyens d’obtenir le travail ou les services demandés, maintenant que le travail forcé a été interdit. La mission a également demandé s’il y avait des changements dans les dispositions budgétaires. Au moment de la rédaction finale du rapport (le 29 octobre 2001), la mission n’avait pas reçu d’informations lui permettant de conclure que les autorités avaient bien prévu le remplacement de la main-d’oeuvre forcée et gratuite exigée pour le soutien de l’armée ou les projets de travaux publics.
14. Mécanismes de contrôle. Dans son rapport, le gouvernement mentionne la création d’un comité au niveau ministériel et d’un comité de mise en oeuvre au niveau national qui doivent non seulement suivre le respect de la légalité par les autorités locales, les membres des forces armées et d’autres personnels du service public, mais encore assurer que les autorités locales et la population sont pleinement au fait des arrêtés susmentionnés dans toute la nation. Aussi, des équipes d’observation sur le terrain, sous la direction de chefs de départements relevant du ministère du Travail et comptant des membres exerçant des responsabilités dans le département d’administration générale, la force de police du Myanmar et le département du travail, ont été envoyées dans différentes régions pour enquêter sur la situation concernant la pratique du travail forcé et pour observer dans quelle mesure le public est au courant de ces arrêtés. Ces équipes feront de fréquentes visites à toutes les parties du pays. Il s’agit là d’exemples des efforts du gouvernement pour abolir la pratique du travail forcé dans tout le pays. La commission note ces indications qui doivent, toutefois, être placées dans le contexte, déjà examiné plus haut, de l’absence d’instructions spécifiques et concrètes aussi bien que de dispositions budgétaires pour le remplacement de la main-d’oeuvre forcée et non payée. Les informations disponibles sur la pratique effective seront examinées aux paragraphes 15 à 22 ci-après, et la punition de ceux qui exigent du travail forcé, aux paragraphes 23 et suivants.
15. La perception du gouvernement. Dans son rapport sur l’application de la convention transmis le 30 septembre 2001, le gouvernement se réfère à ses «efforts pour abolir la pratique du travail forcé dans tout le pays», mais ne donne pas d’indications sur les résultats obtenus jusque-là. Lors d’une séance d’informations tenue le 19 octobre 2001 par le ministère des Affaires étrangères du Myanmar à l’intention des chefs de missions étrangères à Yangon au sujet de la session de novembre 2001 du Conseil d’administration du BIT, le vice-ministre des Affaires étrangères, Khin Maung Win, a déclaré, selon ce qu’ont rapporté le lendemain le «New Light of Myanmar» et l’agence «Reuter», qu’«à la suite de la transmission par la Mission de haut niveau de quelques plaintes concernant du travail forcé, les autorités concernées ont lancé des enquêtes approfondies; et ces enquêtes ont montré que les allégations étaient non fondées et fausses, et les autorités ont répondu à l’OIT en ce sens».
16. Conclusions de la Mission de haut niveau. Des conclusions «relatives à l’impact sur les réalités du travail forcé des mesures prises pour mettre en oeuvre les arrêtés» sont formulées par la Mission de haut niveau aux paragraphes 54 à 58 de son rapport dans les termes suivants:
54. Comme le président de la mission l’a expliqué le 5 octobre 2001 au général en chef Than Shwe, Président du SPDC, les membres de la mission ont accueilli avec scepticisme dès le départ les conclusions optimistes qui avaient été tirées officiellement de l’absence de violations constatées et de toutes poursuites pénales relatives à de telles violations. De fait, les déplacements de la mission sur le terrain et les entretiens menés par-delà la frontière justifient amplement ce scepticisme.
55. Après trois semaines d’interviews et de visites au Myanmar, la mission a abouti à la conclusion provisoire que la situation évoluait de manière très modérément positive. Les deux groupes de la mission se sont accordés à penser que, au-delà de l’effort évident mais inégal pour diffuser les ordonnances, l’imposition de travail forcé avait diminué dans une certaine mesure, mesure qu’il était difficile d’évaluer avec précision. En revanche, la mission a des doutes quant à la viabilité de ce processus et note avec préoccupation des différences géographiques dans les progrès accomplis, en raison du fait qu’un volume considérable de travail forcé persiste dans certaines zones, particulièrement lorsque l’armée est présente, et plus particulièrement encore dans les régions isolées.
56. La situation qui ressort des discussions et des interviews menées par-delà les frontières, qui portaient essentiellement sur le cas des groupes ethniques, est encore plus préoccupante. En fait, elle n’est guère différente de la situation présentée dans le rapport de la commission d’enquête. Il semble que le travail forcé persiste sous la plupart des formes relevées antérieurement, particulièrement dans les villages qui sont proches d’un camp militaire. Bien souvent, hélas, ce travail forcé s’accompagne d’actes de cruauté.
57. … Une évaluation équilibrée de l’évolution du travail forcé doit refléter les pratiques générales et établir une distinction entre les différents types de situation. Les deux pratiques générales ci-après semblent apparaître:
a) par contraste avec la situation décrite en 1998 par la commission d’enquête, la mission n’a trouvé aucun signe d’un recours actuel au travail forcé pour les projets d’infrastructure civile;
b) dans toutes les zones pour lesquelles la mission disposait d’informations, il apparaît qu’il existe une forte corrélation entre la présence de camps militaires et la pratique du travail forcé, que les troupes en question participent ou non à des activités militaires (voir paragr. 61 et 62 ci-dessous).
Cependant, il est important de faire les distinctions suivantes:
c) dans de nombreuses zones, certains signes montrent que la situation s’est améliorée, malgré le maintien du travail forcé par suite d’une présence militaire. La viabilité de cette amélioration est difficile àévaluer, car elle dépend de la volonté des commandants militaires locaux de continuer à moins recourir au travail forcé;
d) dans certaines autres zones, particulièrement dans le sud de l’Etat de Shan et les parties orientales de l’Etat de Kayin, près de la frontière thaïlandaise, la situation apparaît particulièrement grave. Cela peut s’expliquer en partie par la présence militaire plus forte dans ces zones ainsi que par le caractère isolé de celles-ci, mais il apparaît également que la répression est plus intense à l’encontre de ces populations par suite de la rébellion permanente qui s’y déroule. Contrairement aux assertions des autorités de Yangon, aucun signe n’indique que le portage a diminué d’une façon notable dans ces zones par suite d’un recours accru aux mulets ou d’une amélioration du réseau routier;
e) la situation est aussi très grave dans le nord de l’Etat de Rakhine, qui est aussi une zone isolée où l’armée est fortement présente. La population musulmane de cette zone est plus que proportionnellement touchée par le travail forcé, ce qui traduit une discrimination à son égard, discrimination qui prend également la forme, entre autres, de restrictions au droit d’aller et venir.
58. Certains signes indiquent que l’armée recourt à d’autres méthodes pour obtenir du travail ou des services, comme la réquisition de véhicules et de leurs conducteurs. La mission a également rencontré en Thaïlande trois porteurs qui avaient fui. L’un a affirmé avoir été arrêté au sujet d’une question administrative (il n’avait pas acquitté intégralement la taxe sur le riz), et les deux autres ont déclaré avoir été incarcérés arbitrairement. Tous avaient été livrés par la police à l’armée et utilisés comme porteurs, sans même avoir été inculpés officiellement ou être apparus devant un juge. L’armée leur avait enlevé leurs vêtements et les avait contraints à porter un uniforme bleu de forçat.
17. Analyse de la Mission de haut niveau. En recensant les obstacles à une éradication plus efficace du travail forcé, la mission s’est notamment référée à la politique d’«autonomie» de l’armée, à l’incertitude relative aux dispositions de substitution financières et pratiques (voir paragr. 13 ci-dessus) et à des obstacles institutionnels. Aux paragraphes 59 à 62 de son rapport, la mission décrit la politique d’«autonomie» de l’armée et son incidence sur la pratique du travail forcé dans les termes suivants:
59. Il semble évident que la non-application des ordonnances par l’armée ne peut guère être attribuée à l’ignorance. Comme on l’a noté plus haut, ces ordonnances semblent bien avoir fait l’objet d’une diffusion fort large - quoique inégale -à tous les niveaux de la hiérarchie militaire. Ce qui est troublant, c’est qu’elles ne semblent pas être respectées par l’armée au niveau local et qu’on ne semble pas demander de comptes à ceux qui commettent des infractions. ...
60. Cette attitude semble reposer moins sur l’indiscipline individuelle que sur une politique d’autonomie menée dans le cadre de la lutte contre les mouvements de rébellion ethnique qui ont, selon certains, des racines profondes dans l’histoire militaire du pays. Mais elle repose aussi sur des raisons pratiques et logistiques évidentes. L’armée ne dispose pas de matériel moderne et n’a pas même toujours des ressources suffisantes pour assurer l’alimentation de l’ensemble des soldats. … 61. Cependant, cette politique d’autonomie présente un aspect complètement différent qui concerne également la question. Au cours de la dernière décennie, l’armée s’est énormément développée, passant de 120 000 à plus de 350 000 hommes selon des officiers des renseignements militaires. Il y a dix ans, elle était déjà censée participer à la construction des chemins de fer. Cependant, sa taille n’a pas diminué proportionnellement aux progrès largement proclamés de la pacification. En raison des contraintes budgétaires persistantes, la pratique suivante s’est mise en place: les soldats qui ne combattent pas continuent à recevoir leur solde, mais doivent se livrer à des activités agricoles ou à d’autres activités productives sur les terres qui leur ont été attribuées. Tout excédent par rapport à ce dont ils ont besoin pour leur subsistance doit être vendu sur le marchéà un prix inférieur au prix normal afin de lutter contre l’inflation. …
62. On a donc tout lieu de soupçonner que cette forme de reconversion des soldats dans des activités économiques pour lesquelles ils ne sont pas toujours bien qualifiés ou préparés est non seulement contestable du point de vue de l’efficacité productive, mais aussi risque d’inciter en permanence des soldats qui ne sont guère portés aux travaux agricoles à continuer à exploiter les villageois. Toutefois, cela ne signifie pas que les ordonnances ne peuvent avoir d’effet positif sur la situation du travail forcé. Il semble au contraire ressortir clairement de divers témoignages que les villageois sont de moins en moins disposés à accepter la situation actuelle. Ainsi, dans un cas précis, ils ont envisagé concrètement d’envoyer une pétition aux autorités en se fondant sur ces ordonnances.
18. La communication de la CISL. Dans sa communication datée du 29 novembre 2001, la CISL indique que:
En dépit de leurs démentis, efforts supposés pour supprimer la pratique, professions de bonne volonté et esprit de coopération avec l’OIT, les autorités militaires de la Birmanie ont continuéà recourir au travail forcé sur une très grande échelle. Des officiers de l’armée de grade supérieur, moyen et inférieur et de simples soldats, de même que les autorités civiles n’ont cessé d’imposer du travail forcé dans tous les domaines d’activité précédemment recensés par l’OIT. A l’appui de ses allégations, la CISL joint quelque 30 rapports et autres documents, en tout plus de 100 pages. Ils fournissent des indices détaillés, provenant des mêmes sources et ayant la même qualité que les centaines de rapports examinés au cours des cinq dernières années par l’OIT et jugés crédibles et authentiques.
Les annexes à cette lettre indiquent de nombreux et récents exemples de travail forcé, y compris le portage forcé pour l’armée, souvent au combat, menant souvent à la mort de porteurs par épuisement, maladie, manque de nourriture, d’eau, de repos et de soins médicaux ou par assassinat direct. Elles décrivent également le travail forcé pour dégager les routes et la construction et le maintien d’installations militaires, la confiscation de terres et du travail agricole forcé sur ces terres au profit de l’armée, des fournitures obligatoires de matériaux de construction, de nourriture (entre autres riz, viande, poisson, légumes et fruits) et d’alcool, du travail forcé dans des briqueteries de l’armée et la fourniture forcée de bois de chauffage pour celles-ci, l’imposition fortuite et arbitraire de taxes de toutes sortes et beaucoup d’autres.
La commission note que les documents annexés à la communication de la CISL couvrent la période de janvier à novembre 2001. Tout en correspondant avec les conclusions de la Mission de haut niveau pour ce qui est de la forte corrélation entre la présence de camps militaires et la pratique du travail forcé, ils dénoncent également le recours actuel au travail forcé pour des projets d’infrastructure civils, aussi bien avant qu’après la visite de la mission, et comportent souvent des indications précises de temps et de lieux, de bataillons ou compagnies militaires impliqués et des noms des commandants.
19. Les allégations de travail forcé pour des projets d’infrastructure civils incluses dans la documentation de la CISL se réfèrent à la fourniture et au transport de ballast et de traverses en bois pour le chemin de fer de Ye à Tavoy en septembre 2001 à Natkyizin, circonscription de Yebyu, et aux deux exemples suivants, tels que résumés par la CISL:
- travail forcé sur un chemin de fer au sud de l’Etat Shan, en octobre dernier (des centaines de civils mobilisés pour travailler sur une nouvelle ligne de chemin de fer en construction de la capitale de l’Etat Taung-gyi au centre administratif de circonscription de Namzang; 240 personnes de la seule circonscription de Namzang, forcés à dégager le terrain pour le chemin de fer, sous la surveillance du capitaine Than Naing Oo, bataillon d’infanterie no 66, assisté par du personnel de la compagnie nationale du chemin de fer);
- du travail forcé pour la réparation d’une route locale dans la circonscription de Kyaikmayaw (Etat Mon), début octobre, afin d’améliorer la route avant une visite du général de brigade Myint Swe (commandant en chef, commandement militaire du sud-est) au village de Tarana; les villageois étaient contraints à réparer la route carrossable pendant neuf jours (6-14 octobre); la visite du général de brigade Myint Swe (c’est-à-dire la raison qui a provoqué le travail forcé en question) a eu lieu peu après sa rencontre avec la Mission de haut niveau de l’OIT, à Mawlamyine, les 25 et 27 septembre 2001 (voir document GB.282/4/annexe VI, p. 4); selon les villageois locaux, le travail forcé dans la région a été interrompu pendant la présence de la Mission de haut niveau de l’OIT dans le pays, et repris par la suite.
20. D’autres allégations de travail forcé imposé aux villageois concernent des projets d’infrastructure à caractère moins civil, tels que la construction d’une route reliant des villages à des bases militaires sur l’île de Kalargote, de mi-octobre jusqu’à la première semaine de novembre; le nettoyage forcé d’une route infestée de mines terrestres entre Mawchi (Etat Kayah) et Taungoo (Division de Bago) en septembre dernier; le débroussaillage le long de chemins de fer et de routes carrossables dans la circonscription de Ye en octobre 2001; et le dégagement de toutes les routes sortant de la ville de Lai-kha sur une distance d’environ 30 km, en juin 2001.
21. Le plus grand nombre d’indications de travail forcé communiquées par la CISL concernent les services fournis aux militaires, tels que la réquisition de 250 porteurs civils, y compris 108 femmes et enfants depuis l’âge de huit ans, le 13 juin 2001 aux abord de la ville de Murng-Kerng par une patrouille de troupes du bataillon d’infanterie légère 514 conduite par un capitaine (nommé) sous les ordres du commandant (nommé) du bataillon. Il est indiqué que ces villageois ont été relâchés le 28 juin 2001 après 16 jours de service non rémunéré pendant lesquels les femmes porteurs âgées de plus de 15 ans ont été violées par les soldats. Et cinq ou six jours plus tard, les mêmes troupes ont ordonné aux chefs de villages dans la région de fournir 10 à 15 porteurs civils de chaque village. Des allégations de précision similaire pour la période de juin à octobre 2001 concernent le travail forcé pour la coupe de bambous et la fabrication de clôtures et de parois en bambous pour les baraques; la réparation de baraques, le nettoyage de conduits de drainage dans les bases et des tranchées et abris autour d’elles, et le débroussaillage; le creusement de canaux lors duquel un travailleur lent a été tué et son village a dû payer 3 000 kyats pour le rapatriement de son corps; l’imposition de services pour porter des messages, couper et porter du bois de chauffage, cuisiner, porter de l’eau et faire des commissions; l’imposition de la culture de riz sur les champs confisqués aux travailleurs forcés; et l’ordre donné le 18 septembre 2001 par le nouveau commandant (nommé) du BIL no 65 à des villageois de fournir 4 000 feuilles de matériel de couverture pour le toit d’une nouvelle usine d’amphétamine en construction à 14 lieues de Mong Ton sur la route de Mong Ton à Mong Hsat (Etat Shan).
22. La commission espère que le gouvernement examinera les indications données par la CISL et qu’il fournira des informations détaillées sur toutes mesures prises à la suite de ces indications, de même qu’à la suite du rapport de la mission de haut niveau, afin d’engager des poursuites contre toutes personnes trouvées responsables d’avoir ordonné du travail forcé et, le cas échéant, de crimes concomitants. Plus fondamentalement, la commission espère que les instructions spécifiques et concrètes et les dispositions budgétaires qui sont nécessaires pour l’éradication effective du travail forcé, telles qu’indiquées par la commission d’enquête au paragraphe 539 b) de son rapport et de nouveau mentionnées plus haut, aux paragraphes 9 et 13, seront enfin adoptées, et que le gouvernement fournira des informations complètes sur l’action entreprise.
23. Au paragraphe 539 c) de ses recommandations, la commission d’enquête a exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer:
… que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l’article 374 du Code pénal pour le fait d’exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l’article 25 de la convention. Ceci demande de la rigueur dans les enquêtes et poursuites et l’application de sanctions efficaces à ceux reconnus coupables.
24. Comme la commission l’a noté dans son observation précédente, la directive datée du 1er novembre 2000 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement, adressée à tous les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions (voir paragr. 8 ci-dessus), prévoit au point 4 que les «responsables» de réquisition de travail forcé seront poursuivis en vertu de l’article 374 du Code pénal, et une disposition analogue figure au point 3 d’une instruction datée du 27 octobre 2000 adressée par le directeur général des forces de police à toutes les unités des forces de police. De plus, les points 4 à 6 de l’instruction datée du 27 octobre 2000 prévoient ce qui suit:
4. Si une personne porte plainte auprès de la police, oralement ou par écrit, parce qu’elle a été forcée de fournir un travail, la police enregistrera sa plainte sur les formulaires A et B et fera poursuivre l’accusé en vertu de l’article 374 du Code pénal.
5. Il est demandé par la présente que les commissariats et autres unités de police concernés, aux différents niveaux, reçoivent l’instruction d’assurer la stricte application de l’ordonnance précitée et de veiller à ce que personne ne soit réquisitionné pour un travail forcé. Le texte de l’arrêté complétant l’arrêté no 1/99, prise par le ministre de l’Intérieur le 27 octobre 2000, figure en annexe.
6. Les destinataires de cette directive sont priés d’en accuser réception et de rendre compte des mesures prises dans le domaine considéré.
25. Se référant au point 4 de l’instruction datée du 27 octobre 2000, la commission a exprimé l’espoir que les poursuites en vertu de l’article 374 du Code pénal seraient engagées d’office par les autorités compétentes à leur propre initiative, sans attendre le dépôt d’une plainte, les victimes pouvant trouver imprudent de dénoncer les «responsables»à la police. La commission avait espéré que le gouvernement, en commentant les indications selon lesquelles l’exaction de travail forcé a continué au-delà d’octobre 2000, ferait également état des actions concrètes engagées au titre de l’article 374 du Code pénal.
26. Aucune suite n’a encore été donnée à ces préoccupations. Dans son rapport, le gouvernement répète:
… que les mécanismes nécessaires ont également été mis en place pour entamer, à l’encontre des autorités locales qui manquent de se conformer aux arrêtés, des actions en vertu de l’article 374 du Code pénal ou de toute autre loi en vigueur. Et toute personne souhaitant déposer plainte pour avoir été soumise à l’exaction de travail forcé peut le faire à la Cour de circonscription, aux postes de police et aux conseils de paix et développement des circonscriptions urbaines ou rurales respectifs. Donc, les moyens appropriés pour donner suite à de telles plaintes sont déjà en place.
Aucune action en vertu de l’article 374 du Code pénal n’a été portée à la connaissance de la commission.
27. Aux paragraphes 52 et 53 de son rapport, la mission de haut niveau décrit «les réalités de la mise en application» dans les termes suivants:
52. La mission a également eu connaissance d’un document établi par le ministère de l’Intérieur et intitulé«Mesures prises au sujet des cas relatifs au non-respect de l’ordonnance no 1/99 et de son ordonnance supplémentaire, émis par le ministère de l’Intérieur». Il a été mentionné que 38 procédures avaient été déclenchées à ce sujet. Une réunion a été organisée spécialement le dernier jour de la visite de la mission dans le pays pour obtenir davantage de précisions sur les cas mentionnés dans ce document. Il apparaît que toutes les procédures entreprises ont un caractère administratif. Elles vont du simple avertissement au licenciement ou au renvoi de l’intéressé. Aucune ne vise l’article 374 du Code pénal, comme prévu par les ordonnances. La mission a été informée que des «commissions d’enquête» avaient autorité pour décider des mesures à prendre en cas de violations de ces ordonnances. A ce jour, les commissions d’enquête en question ont préféré traiter les violations alléguées des ordonnances d’un point de vue administratif, plutôt que de déclencher des poursuites pénales. Dix des trente-huit cas ont eu lieu avant mai 1999, et ne sont donc pas couverts par les ordonnances. Tous les cas ont mis en cause des responsables de TPDC ou de VPDC [autorités civiles au niveau des villes et villages] … La mission considère que ce document constitue une réponse totalement insuffisante à toute demande portant sur les mesures à prendre pour donner effet aux ordonnances; cependant, aucune autre réponse n’a été faite et, semble-il, ne pouvait l’être.
53. La plupart des habitants du pays avec lesquels la mission s’est entretenue au cours de sa visite ont déclaré qu’ils ne recourraient pas à la procédure de plainte prévue par les ordonnances (par le biais des tribunaux de la police). Ils sont davantage enclins à s’adresser au VPDC ou au TPDC. Nombre d’entre eux craignent les représailles. A ce sujet, on a rapportéà la mission différents cas de personnes ayant été battues, détenues ou punies d’une autre façon pour avoir porté plainte antérieurement à ce sujet ou à d’autres sujet. …
La mission note encore, au paragraphe 68 de son rapport:
… que la réticence à recourir aux procédures expressément prévues par la loi est due pour une large part au manque de confiance dans la police et le système judiciaire, en l’absence d’une garantie constitutionnelle de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la justice.
28. La CISL souligne, dans sa communication datée du 29 novembre:
… que, dans de nombreux cas, des autorités tant militaires que civiles ont de manière flagrante repoussé les objections que villageois et chefs de village ont tenté d’opposer aux réquisitions de travail forcé en faisant valoir leurs droits aux termes de l’arrêté no 1/99, tel que complété. Les exemples vont d’un chef de village puni par deux fois quand ses villageois, invoquant les «ordres» du lieutenant général Khin Nyunt, ont refusé d’accomplir du travail forcé (en septembre dernier à Kawkareik, Etat Karen), à des officiers du Tadmadaw enfreignant ouvertement ces arrêtés ou même menaçant d’abattre toute personne refusant de les servir, comme dans l’exemple qui suit.
En août 2001, des villageois de la circonscription de Kyar Inn Seikky (Etat Karen) se sont plaints à des officiers de l’armée sur place des demandes de travail forcé. Ils avaient été publiquement informés par des fonctionnaires du Conseil d’Etat pour la paix et le développement venant de Rangoon au sujet de l’«ordre» et forcés à acheter des exemplaires du «livre vert»à des prix allant de 500 à 3 000 kyats. En réponse, le lieutenant-colonel Win Myint, commandant du bataillon d’infanterie (BI) 232, au camp de Taung Tee, a dit que l’«ordre»émanait de Rangoon et déployait ses efforts à Rangoon. Dans cette partie du pays, «il»était le commandant de district envoyé par Rangoon et ils devaient obéir à ses instructions. S’ils voulaient que l’arrêté 1/99 soit appliqué dans leur district ils devaient «déménager à Rangoon et rester avec Khin Nyunt»…
La documentation transmise par la CISL:
… comprend également un récit détaillé de portage obligatoire pour un peloton de huit soldats de l’armée, conduits par un sous-lieutenant, Tin Myo Win, bataillon d’infanterie (BI) 266, baséà Hakha (Etat Chin, sur la frontière indobirmane).
La colonne de l’armée est basée au camp de l’armée de Sa-Baung-Tha. Un groupe de 54 villageois devait servir de porteurs pour l’armée pendant huit jours. Comme ils n’ont reçu aucune rémunération pour le travail, plusieurs présidents de conseils de paix et développement de villages (autorités municipales), invoquant l’«ordre» du général Khin Nyunt, ont demandé les salaires correspondants au sous-lieutenant Tin Myo Win. Selon le rapport, «le sous-lieutenant Tin Myo Win a répondu que quiconque oserait demander une rémunération la prochaine fois serait immédiatement abattu et tué. Ils étaient tellement terrifiés que personne n’osait plus demander une rémunération»…
La CISL place ce cas «dans le contexte de l’incident dramatique rapporté par la mission de haut niveau au lieutenant-général Khin Nyunt» et mentionné aux paragraphes 28 et 53 et à l’annexe XI de son rapport, de même que de la détention alléguée d’un témoin qui a parléà la mission de haut niveau lors de sa visite à l’Etat d’Arakan, et dont l’existence même a été, par la suite, niée par les autorités. La CISL note encore que «d’autres cas de harcèlement, y compris de détention, de témoins ayant parléà la mission de haut niveau» ont fait l’objet de rapports et se réfère à deux incidents relevant de cette catégorie qui auraient eu lieu dans le district de Pa-an en octobre 2001. Le gouvernement voudra peut-être formuler des commentaires sur ces affaires, en indiquant notamment la manière dont toutes investigations menées à la suite des allégations ont été conduites, par les militaires eux-mêmes ou par les autorités judiciaires, et toutes mesures prises pour protéger contre les représailles tant les témoins ayant parlé que les victimes de travail forcé demandant une réparation.
29. En bref, la commission note qu’aucune des trois recommandations formulées par la commission d’enquête et acceptées par le gouvernement n’a encore été mise en oeuvre. En dépit de promesses faites de longue date, aussi bien que des assurances de bonne volonté du gouvernement, la loi sur les villages et la loi sur les villes n’ont pas encore été amendées. Si l’arrêté no 1/99, tel que complété, a reçu une large publicité et peut momentanément avoir affecté certains projets d’infrastructure civile, l’arrêté n’a pas de lui-même mis un terme à l’exaction de travail forcé, notamment par les militaires. Il n’y a pas d’indications selon lesquelles les instructions spécifiques et concrètes et les dispositions budgétaires qui font défaut auraient été adoptées, ou du moins préparées, en vue de remplacer effectivement le recours au travail forcé par une offre de salaires et de conditions d’emploi décents, permettant d’attirer librement la main-d’oeuvre nécessaire. Enfin, rien n’indique que des personnes responsables de l’exaction de travail forcé et, souvent, de crimes concomitants aient été condamnées, ou du moins inculpées, en vertu de l’article 374 du Code pénal ou de toute autre disposition, conformément à l’article 25 de la convention.
30. Des personnes rencontrées par la mission de haut niveau «ont indiqué qu’il ne servait à rien de se plaindre auprès des autorités, puisque ce sont celles-là mêmes qui imposent le travail forcé» (paragr. 53 du rapport). Tant que le gouvernement permet que ceux qui exploitent le travail forcé soient perçus comme représentant l’autorité de l’Etat, il prolonge la validité de l’observation finale de la commission d’enquête indiquant:
… que l’impunité avec laquelle les fonctionnaires du gouvernement, et en particulier les membres des forces armées, traitent la population civile comme une réserve illimitée de travailleurs forcés non rémunérés et de serviteurs à leur disposition fait partie d’un système politique fondé sur l’utilisation de la force et de l’intimidation pour dénier au peuple du Myanmar la démocratie et le respect du droit.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 90e session.]
1. La commission note que le gouvernement n’a pas communiqué de rapport sur l’application de la convention. A la suite des recommandations de la Commission d’enquête chargée d’examiner l’exécution par le Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, la commission a toutefois pris note:
- des informations que le gouvernement a données au Directeur général du BIT dans des communications en date des 21 janvier, 20 mars, 27 mai, 29 octobre (telles que complétées par la suite), et 3, 15 et 17 novembre 2000;
- des informations soumises au Conseil d’administration à ses 277eet 279e sessions en mars et en novembre 2000 et des débats qui ont suivi;
- des informations données à la Conférence internationale du Travail à sa 88e session (mai-juin 2000) et des débats qui ont suivi;
- de la résolution que la Conférence internationale du Travail a adoptée à sa 88e session au sujet des mesures recommandées par le Conseil d’administration au titre de l’article 33 de la Constitution de l’OIT en ce qui concerne le Myanmar, mesures qui visent à assurer l’exécution des recommandations de la commission d’enquête et qui ont pris effet le 30 novembre 2000 à la suite de l’examen de cette question par le Conseil d’administration à sa 279esession (novembre 2000);
- des résolutions adoptées par l’Assemblée générale des Nations Unies à sa 54e session (17 décembre 1999) et par la Commission de l’ONU des droits de l’homme à sa 56esession (mars-avril 2000) sur la situation des droits de l’homme au Myanmar (des extraits de ces résolutions figurent dans le Compte rendu provisoire no4, annexe III, de la Conférence internationale du Travail, 88esession, Genève, 2000);
- du deuxième rapport du Directeur général du BIT soumis aux membres du Conseil d’administration sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar, daté du 25 février 2000;
- du rapport intérimaire, en date du 22 août 2000, élaboré par Rajsoomer Lallah, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme au Myanmar [Document de l’ONU A/55/359] et de la note du 20 octobre 2000 du Secrétaire général de l’ONU sur le même sujet [Document de l’ONU A/55/509]
- des rapports des missions de coopération technique du BIT qui se sont rendues au Myanmar en mai 2000 [CIT, 88esession, Genève, 2000, Compte rendu provisoire no8.] et octobre 2000 [Document GB.279/6/1 et Add.1]
- d’une communication en date du 15 novembre 2000 dans laquelle la Confédération internationale des syndicats libres a communiqué au BIT une documentation abondante faisant état de travail forcé au Myanmar pendant la période juin-novembre 2000 et dont copie a été adressée au gouvernement pour qu’il puisse, s’il le souhaite, présenter ses commentaires;
- d’un communiqué de presse en date du 17 novembre 2000 du ministère des Affaires étrangères de l’Union du Myanmar à Yangon, et d’une fiche de renseignements émanant de la Commission d’information du Myanmar à Yangon à propos d’une conférence de presse tenue par le gouvernement le 18 novembre 2000 sur la décision du Conseil d’administration du BIT de laisser des mesures au sujet du Myanmar prendre effet.
2. Les informations disponibles sur l’exécution de la convention par le gouvernement du Myanmar sont exposées en trois parties: i) l’amendement de la législation; ii) toutes mesures prises par le gouvernement pour mettre un terme à l’imposition, dans la pratique, du travail forcé ou obligatoire, et les informations disponibles sur la pratique actuelle; et iii) l’application de sanctions qui peuvent être imposées en vertu du Code pénal pour le fait d’exiger un travail forcé ou obligatoire.
La commission d’enquête avait noté en outre que les larges pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre pour du travail et des services énoncés dans ces lois ne sont pas compris dans les exceptions énumérées à l’article 2, paragraphe 2, de la convention et qu’ils sont entièrement incompatibles avec la convention. Rappelant que le gouvernement promettait depuis plus de trente ans de modifier les dispositions de ces lois, la commission avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer que la loi sur les villages et la loi sur les villes soient mises sans délai en conformité avec la convention, au plus tard le 1er mai 1999 (paragr. 539 a) du rapport de la commission).
4. Dans son observation précédente, la commission avait noté que, à la fin de novembre 1999, ni la loi sur les villages ni la loi sur les villes n’avaient été modifiées, et qu’aucun projet de loi proposé ou envisagéà cet effet n’avait été portéà la connaissance de la commission. Toutefois, le gouvernement avait pris, le 14 mai 1999, un «arrêté (no1/99) ordonnant de ne pas exercer les pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages». En fait, cette ordonnance réservait l’exercice des pouvoirs conférés par certaines dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages qui restent incompatibles avec les exigences de la convention.
5. La commission note, à la lecture du rapport de la mission de coopération technique du BIT qui s’est rendue en octobre 2000 au Myanmar (doc. GB.279/6/1, paragr. 9 et 10, annexes 13 et 19), qu’un projet de texte prévoyant l’amendement de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, par le biais d’une modification de l’ordonnance no1/99, n’a pas été retenu par le gouvernement. Toutefois, le même rapport, dans son annexe 19, reproduit le texte d’un «arrêté complétant l’arrêté no1/99» pris le 27 octobre 2000 par le ministère de l’Intérieur, sur instruction du Conseil d’Etat pour la paix et le développement, qui modifie l’arrêté no1/99 de façon à interdire aux «responsables, y compris aux membres des autorités locales, membres des forces armées» de «réquisitionner des personnes pour un travail ou un service, nonobstant toutes dispositions figurant» dans les articles pertinents de la loi sur les villes et de la loi sur les villages, sauf dans les cas de force majeure tels que définis à l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention (doc. GB.279/6/1, annexe 19). Le texte en langue birmane de cet arrêté du 27 octobre, qui devait être publié dans le Journal officiel du Myanmar, n’a pas encore été fourni au BIT.
6. La commission observe que la modification de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, que la commission d’enquête et elle-même ont demandée et que le gouvernement promet depuis des années, n’a pas encore été effectuée. Elle exprime de nouveau l’espoir que la loi sur les villages et la loi sur les villes seront enfin rendues conformes à la convention.
7. La commission note toutefois que l’arrêté no1/99, tel que complété par l’arrêté du 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique s’il était de bonne foi traduit dans les actes non seulement par les autorités locales habilitées à réquisitionner des personnes pour un travail au titre de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, mais aussi par les autorités civiles et militaires habilitées à demander l’assistance des autorités locales en vertu des lois susmentionnées. De l’avis de la commission, cela demande l’adoption de mesures supplémentaires telles qu’indiquées par la commission d’enquête dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539 b) de son rapport.
8. Dans ses recommandations qui figurent au paragraphe 539 b) de son rapport, la commission d’enquête avait indiqué que les mesures nécessaires pour assurer que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires, étaient:
… d’autant plus important[es] que le pouvoir d’imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. En conséquence, au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 [du rapport de la commission], afin d’arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un état de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l’ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d’un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d’œuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré…
9. La commission note, à la lecture du rapport de la mission de coopération technique du BIT qui s’est rendue au Myanmar en octobre 2000, que la mission a suggéré un texte complémentaire sous forme d’ordonnance, arrêté ou directive du bureau du président du Conseil d’Etat pour la paix et le développement concernant la réquisition de travail ou de services (doc. GB.279/6/1, annexe 13). Le texte suggéré visait à ordonner à toutes les autorités de l’Etat, y compris les autorités militaires, policières et civiles et leurs responsables, de ne pas réquisitionner des personnes pour des travaux ou des services, à quelque fin que ce soit, et de ne pas donner l’ordre à d’autres personnes de procéder à de telles réquisitions, que ces travaux ou services soient ou non rémunérés, sauf dans les cas de force majeure tels que définis à l’article 2, paragraphe 2 d), de la convention. Cette interdiction visait, sans s’y limiter, la réquisition de personnes pour du travail ou des services aux fins suivantes:
a) portage pour les militaires (ou d’autres groupes paramilitaires/militaires, pour des campagnes militaires ou pour des patrouilles régulières);
b) construction ou réparation d’installations/camps militaires;
c) autres formes d’appui à ces camps (guides, estafettes, cuisiniers, nettoyeurs, etc.);
d) génération de revenus par des particuliers ou des groupes (y compris travail dans des projets agricoles ou industriels dont l’armée est propriétaire);
e) projets d’infrastructure nationaux ou locaux (routes, voies ferrées, barrages, etc.);
Des interdictions analogues devaient s’appliquer à la réquisition de matériaux ou fournitures, de quelque nature qu’ils soient, et aux demandes d’argent, sauf s’il s’agissait d’argent dûà l’Etat ou à une municipalité, aux termes d’une loi pertinente. En outre, le texte suggéré prévoyait que toute autorité de l’Etat ou tout représentant de cette autorité qui a besoin d’un travail, de services, de matériaux ou de fournitures, de quelque nature que ce soit et à quelque fin que ce soit, devait d’abord prendre des dispositions budgétaires appropriées pour les obtenir par un appel d’offre public ou en offrant une rémunération conforme aux taux du marché aux personnes souhaitant fournir ces services, matériaux ou fournitures volontairement ou souhaitant offrir leur travail.
10. La commission note que le texte suggéré par la mission n’a pas été adopté mais que le texte anglais de plusieurs instructions, datées des 27 et 28 octobre et 1ernovembre 2000, a été adressé au BIT après le départ de la mission et reproduit dans des addenda au rapport de la mission (doc. GB.279/6/1 (Add.1) (Rev.1) et (Add.2)).
11. L’instruction datée du 27 octobre 2000, «Interdisant la réquisition de travail forcé», est signée par le directeur général des forces de police et adressée à toutes les unités des forces de police. L’instruction datée du 28 octobre 2000 sur le même sujet est adressée par le directeur général du Département de l’administration générale du ministère de l’Intérieur à tous les commissaires d’Etat et de division et à tous les départements de l’administration générale des Etats et des divisions. Elle demande, entre autres, que l’arrêté no1/99 et l’arrêté le complétant soient affichés séparément sur les panneaux d’affichage à tous les niveaux des conseils pour la paix et le développement et départements de l’administration générale.
12. L’instruction datée du 1ernovembre 2000, «Interdisant la réquisition de travail forcé», est signée au plus haut niveau par le Secrétaire-1 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement et adressée aux présidents de tous les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions. La portée de cette instruction dépasse donc les institutions placées sous l’autorité du ministère de l’Intérieur. Toutefois, elle a en premier lieu pour objet de faire appliquer l’arrêté no 1/99 et l’arrêté supplémentaire du 27 octobre 2000, dont le champ d’application est limitéà la réquisition de travail forcé au titre de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, c’est-à-dire non par des personnes exerçant l’autorité de l’Etat, en tant que fonctionnaires civils ou officiers militaires, mais par des autorités locales, qui peuvent réquisitionner du travail aux termes des lois susmentionnées, lorsqu’elles sont appelées à fournir une assistance aux autorités civiles de l’Etat et aux membres des forces armées. Néanmoins, l’instruction datée du 1er novembre interprète comme suit l’arrêté supplémentaire du 27 octobre 2000:
2. … Cet arrêté rend illégale la réquisition de travail forcé et précise qu’une telle réquisition est une infraction à la législation actuelle de l’Union du Myanmar. Les responsables, y compris les autorités locales et les membres des forces armées, des forces de police et d’autres branches du service public, ont l’interdiction de réquisitionner des personnes pour un travail forcé et ont l’instruction de veiller à ce qu’il n’y ait pas de travail forcé.
Il semblerait à la commission que, si cette interdiction est appliquée de bonne foi, elle devrait s’étendre aux cas typiques de membres des forces armées qui ordonnent aux autorités locales de fournir de la main-d’œuvre, même si la manière de donner suite à cet ordre - par la réquisition ou l’embauche de travailleurs ou de toute autre façon - est laissée à l’initiative des autorités locales.
13. L’instruction en date du 1ernovembre 2000 continue comme suit:
3. Il est donné ordre (…) aux conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions de donner les instructions nécessaires aux conseils pour la paix et le développement des districts et des circonscriptions pour qu’ils respectent rigoureusement les interdictions indiquées dans l’arrêté no1/99 et dans l’arrêté du ministère de l’Intérieur qui le complète et aussi pour qu’ils veillent à assurer effectivement qu’il n’y ait pas de travail forcé dans les zones de leur ressort.
4. Les responsables, y compris les membres des autorités locales, des forces armées, des forces de police et d’autres branches du service public, qui ne respecteront pas l’arrêté no1/99 et l’arrêté supplémentaire, seront poursuivis en vertu de l’article 374 du Code pénal ou de toute autre loi en vigueur.
Il semblerait à la commission que, de nouveau, comme elle l’a indiqué au paragraphe 12 précédent, une mise en œuvre de bonne foi de l’instruction devrait inclure dans le champ d’application de son point 4 les membres des forces armées qui ordonnent aux autorités locales de fournir de la main-d’œuvre.
14. Reste à savoir si les «instructions nécessaires» que doivent encore prendre les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions, conformément au point 3 de l’instruction du 1ernovembre, contiendront les dispositions détaillées nécessaires pour que leur application soit réalisable dans la pratique. Les dispositions détaillées nécessaires ont été signalées par la commission d’enquête au paragraphe 539 b) de son rapport, et la mission de coopération technique d’octobre 2000 en a tenu compte dans sa suggestion qui est mentionnée au paragraphe 9 ci-dessus.
15. Les trois instructions qui, à ce jour, ont été transmises au BIT ne contiennent encore aucune indication concrète sur la manière dont les autorités qui avaient l’habitude de compter sur les contributions de travail forcé et non rémunéré de la population devront à l’avenir prévoir de manière réaliste des ressources suffisantes pour le travail et les services dont elles pourront avoir besoin.
16. En outre, ces trois instructions n’évoquent pas les diverses formes de travail forcé relevées par la commission d’enquête et la présente commission comme étant le plus souvent imposées dans la pratique et dont la liste peut être trouvée au paragraphe 9 ci-dessus. A cet égard, la commission rappelle que la plupart des formes de travail ou de service forcé qui ont été réquisitionnées sont le fait des forces armées. La commission note que «les membres des forces armées» figurent parmi les responsables énumérés au point 4 de l’instruction en date du 1er novembre 2000 (voir paragr. 13 ci-dessus). Toutefois, au point 3 de cette instruction, l’ordre de donner les instructions supplémentaires - et, on l’espère plus détaillées - est adressé aux conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions (qui, en fait, comprennent des officiers des forces armées), mais non pas aux commandants de région des forces armées en leur qualité de militaires.
17. En l’absence d’instructions spécifiques et concrètes adressées aux autorités civiles et militaires et décrivant les diverses formes et modalités de réquisition de travail forcé, l’application des dispositions adoptées jusqu’à maintenant dépend de l’interprétation de la notion de «travail forcé». Cette notion ne va pas de soi, comme le montrent les divers termes birmans utilisés de cas en cas pour qualifier un travail exigé de la population - entre autres, «loh ah pay», travail «bénévole» ou «offert». Le manque de clarté sur ce point est aggravé par les tentatives périodiques du gouvernement d’expliquer le recours généraliséà l’exaction de travail et de services, notamment par les autorités militaires, par le mérite qui peut être acquis dans la religion bouddhiste à ceux qui offrent spontanément une aide. La commission d’enquête a rappelé, au paragraphe 539 c) de son rapport, que «l’absence de délimitations nettes entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement» risquait «encore de marquer le recrutement effectué par les responsables locaux ou militaires».
18. Par conséquent, il reste encore le besoin d’instructions claires indiquant à tous les fonctionnaires intéressés, y compris les militaires à tous les niveaux des forces armées, les types de tâches pour lesquelles il est interdit de réquisitionner des personnes, ainsi que la manière dont ces tâches doivent être effectuées à l’avenir. La commission espère que les instructions détaillées nécessaires seront bientôt émises et que, comme il est indiqué au paragraphe 539 b) du rapport de la commission d’enquête, des mesures seront également prises pour «prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d’œuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré».
19. Dans ses rapports en date des 21 mai 1999 et 25 février 2000 adressés aux membres du Conseil d’administration, le Directeur général a indiqué que toutes les informations sur la pratique actuelle qu’il a reçues en réponse à ses demandes (d’organisations d’employeurs et de travailleurs, d’organisations intergouvernementales et de gouvernements d’Etats Membres de l’OIT) relèvent la persistance du recours généralisé au travail forcé par les autorités et en particulier par l’armée.
20. Dans une communication en date du 15 novembre 2000, la CISL indique que les autorités militaires continuent d’enfreindre gravement la convention. La CISL a joint à sa communication plus de 1 000 pages de documents émanant de plus de 20 sources différentes; ces documents comprennent des rapports, des témoignages de victimes, plus de 300 ordres imposant du travail forcé, des photographies, des enregistrements vidéo et d’autres pièces. Quelques-uns des événements qui y sont décrits ont eu lieu pendant le premier semestre 2000; la plus grande partie des documents porte sur la période juin-novembre 2000.
21. Une partie essentielle de la communication de la CISL consiste en des centaines «d’ordres de travail forcé»émis principalement par les forces armées, mais aussi par des groupes armés placés sous son contrôle et par des agents de l’administration locale. Comme l’indique la CISL, ces ordres sont d’un type, d’une forme et d’un contenu semblables aux ordres que la commission d’enquête et les mécanismes réguliers de contrôle de l’OIT ont déjà examinés et considérés comme authentiques. Certaines pièces de la documentation soumise font état de la persistance, à une grande échelle, du portage forcé, y compris par des femmes, et du meurtre de porteurs forcés qui n’étaient plus capables de porter leur charge. Outre le portage forcé, il est fait état, pour la période juin-novembre 2000, de toutes les autres pratiques de travail forcé que la commission d’enquête avait précédemment identifiées. Un grand nombre de cas spécifiques rapportés comprennent du travail forcé pour la construction et l’entretien de routes, ponts, voies ferrées, canaux, digues, barrages et bassins, ainsi que pour la construction, la réparation, l’entretien et les services aux camps militaires; et la réquisition de main-d’œuvre aussi bien que de graines, d’engrais, de matériaux et d’équipements pour des cultures, des forêts et des installations occupées par l’armée.
22. Comme il a été indiqué ci-dessus, copie de la communication de la CISL du 15 novembre 2000, y compris de la documentation volumineuse qui y était jointe, a été adressée au gouvernement pour tout commentaire qu’il souhaiterait formuler à ce sujet.
24. Dans les faits, aucune action au titre de l’article 374 du Code pénal n’a jusqu’à présent été portée à la connaissance de la commission.
25. La commission note que le point 4 de l’instruction datée du 1er novembre 2000 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement, qui est adressée à tous les conseils pour la paix et le développement des Etats et des divisions (voir paragr. 13), prévoit que les «responsables» de réquisition de travail forcé seront poursuivis en vertu de l’article 374 du Code pénal. Des dispositions analogues figurent au point 3 de l’instruction datée du 27 octobre et du point 6 de l’instruction datée du 28 octobre (voir paragr. 11). De plus, les points 4 à 6 de l’instruction datée du 27 octobre 2000, adressée par le directeur général des forces de police à toutes les unités des forces de police, prévoient ce qui suit:
26. Se référant au point 4 de cette dernière instruction (datée du 27 octobre 2000), la commission espère que les poursuites en vertu de l’article 374 du Code pénal seront engagées d’office par les autorités compétentes à leur propre initiative, sans attendre le dépôt d’une plainte, les victimes pouvant trouver imprudent de dénoncer les «responsables»à la police. La commission espère que le gouvernement, en commentant les indications selon lesquelles l’exaction de travail forcé a continué au-delà d’octobre 2000, fera également état de toute action concrète engagée au titre de l’article 374 du Code pénal.
27. La commission a noté que le gouvernement, dans sa lettre au Directeur général du BIT en date du 29 octobre, a donné l’assurance de sa «volonté politique de veiller à ce qu’il n’y ait pas de travail forcé au Myanmar, tant en droit que dans la pratique». La commission a également pris bonne note de l’arrêté complétant l’arrêté no1/99 et des trois instructions émises entre le 27 octobre et le 1er novembre 2000 ainsi que de l’avis exprimé par les membres employeurs du Conseil d’administration, à sa 279esession (novembre 2000) selon lequel ces mesures étaient «trop faibles et trop tardives». Lors d’une conférence de presse tenue le 18 novembre 2000 à Yangon sur la décision du Conseil d’administration du BIT de laisser des mesures au sujet du Myanmar prendre effet, le gouvernement a indiqué qu’il n’allait plus coopérer avec le BIT en ce qui concerne la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, mais qu’il continuerait de prendre des mesures pour prévenir le travail forcé, conformément à sa politique. La commission espère qu’en conséquence le gouvernement prendra enfin les mesures nécessaires pour assurer le respect, tant en droit que dans la pratique, de la convention, instrument de droits fondamentaux que le Myanmar a ratifié librement. Elle espère également que le gouvernement, qui a manqué de prendre part aux procédures devant la commission d’enquête, saisira l’occasion de présenter ses vues et faire état de progrès en faisant rapport sur l’application de la convention, conformément à ses obligations aux termes de l’article 22 de la Constitution de l’OIT.
[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 2001.]
1. La commission note que le gouvernement n'a pas fourni de rapport sur l'application de la convention. A la suite des recommandations de la commission d'enquête chargée d'examiner l'exécution par le Myanmar de la convention sur le travail forcé, la commission prend note des informations communiquées par le gouvernement dans deux lettres, en date respectivement des 12 et 18 mai 1999, adressées au Directeur général du BIT, et du rapport du 21 mai 1999 que le Directeur général a soumis aux membres du Conseil d'administration sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar. Elle prend également note du mémorandum, en date du 7 juin 1999, sur le rapport susmentionné que le gouvernement du Myanmar a adressé au Directeur général, des informations présentées par le gouvernement en juin 1999 à la Commission de la Conférence de l'application des normes et des débats qui ont ensuite eu lieu au sein de cette commission. De plus, la commission prend note des observations formulées par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) dans une communication du 19 octobre 1999 intitulée "non-application par le gouvernement des recommandations de la commission d'enquête constituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT pour examiner la plainte relative à l'application par la Birmanie de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930". Ces observations ont été transmises au gouvernement pour qu'il formule tous commentaires qu'il jugerait utiles mais, à ce jour, ces commentaires n'ont pas été reçus.
2. Dans son observation précédente, la commission avait rappelé qu'une plainte avait été déposée en 1996, en vertu de l'article 26 de la Constitution, contre le gouvernement du Myanmar pour le non-respect des dispositions de la présente convention, et qu'une commission d'enquête avait été constituée pour examiner cette plainte. La commission avait pris note des conclusions et recommandations de la commission d'enquête qui confirmaient et élargissaient les conclusions qu'elle avait elle-même formulées concernant le non-respect par le gouvernement des obligations découlant de cette convention fondamentale, celles de la Commission de la Conférence de l'application des normes, ainsi que celles adoptées par le Conseil d'administration à l'issue de l'examen d'une réclamation portant sur le même objet. Elle avait noté, par ailleurs, que le gouvernement se déclarait disposé à mettre en oeuvre les recommandations contenues dans le rapport de la commission d'enquête. La commission avait exprimé l'espoir que le gouvernement serait très prochainement en mesure d'indiquer qu'il s'était pleinement acquitté des obligations contractées au titre de la convention.
3. Les informations disponibles sur l'application de la convention par le gouvernement du Myanmar sont exposées en trois parties: i) l'amendement de la législation; ii) toutes mesures prises par le gouvernement pour mettre un terme à l'imposition, dans la pratique, du travail forcé ou obligatoire, et les informations disponibles sur les pratiques existantes; iii) l'application de sanctions qui peuvent être imposées en vertu du Code pénal pour le fait d'exiger un travail forcé ou obligatoire.
4. Au paragraphe 470 de son rapport, la commission d'enquête avait noté ce qui suit:
... qu'aux termes de l'article 11 d), lu conjointement avec l'article 8, paragraphe 1 g), n) et o), de la loi sur les villages, ainsi que de l'article 9 b) de la loi sur les villes, du travail ou des services peuvent être imposés à toute personne résidant dans un arrondissement rural ou urbain, c'est-à-dire un travail ou des services pour lesquels l'intéressé ne s'est pas offert de plein gré et que la non-obtempération à une réquisition faite en application de l'article 11 d) de la loi sur les villages ou de l'article 9 b) de la loi sur les villes est passible des sanctions pénales prévues à l'article 12 de la loi sur les villages ou de l'article 9A de la loi sur les villes. Ainsi, ces lois prévoient l'imposition d'un "travail forcé ou obligatoire" relevant de la définition de l'article 2, paragraphe 1, de la convention.
La commission avait noté en outre que les larges pouvoirs de réquisition de main-d'oeuvre pour du travail et des services énoncés dans ces lois ne sont pas compris dans les exceptions énumérées à l'article 2, paragraphe 2, de la convention et qu'ils sont entièrement incompatibles avec la convention. Rappelant que le gouvernement promettait depuis plus de 30 ans de modifier les dispositions de ces lois, et qu'il l'annonçait de nouveau dans ses observations sur la plainte, la commission avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer que la loi sur les villages et la loi sur les villes soient mises sans délai en conformité avec la convention, au plus tard le 1er mai 1999 (paragr. 539 a) du rapport de la commission).
5. Toutes les informations disponibles indiquent que, à la fin de novembre 1999, ni la loi sur les villages ni la loi sur les villes n'avaient été modifiées. De plus, il n'a été porté à la connaissance de la commission ni la proposition ni l'examen d'un projet de loi dans ce sens.
6. Toutefois, le gouvernement a pris, le 14 mai 1999, un arrêté ordonnant aux autorités compétentes de ne pas exercer les pouvoirs qui leur sont conférés par certaines dispositions de la loi de 1907 sur les villes et de la loi de 1907 sur les villages. Cet arrêté sera examiné aux paragraphes 8 et suivants.
7. Au paragraphe 539 b) de ses recommandations de juillet 1998, la commission d'enquête avait indiqué que:
... au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 ci-dessus (du rapport de la commission), afin d'arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un Etat de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l'ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d'un salaire; elles doivent assurer que personne ne sera contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d'oeuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunérées ...
8. Alors que la commission d'enquête a indiqué que des mesures devaient être prises immédiatement, il ressort des informations émanant du gouvernement du Myanmar et d'autres sources que les mesures concrètes que demande la commission d'enquête n'avaient pas été prises à la mi-mai 1999. Toutefois, dans sa lettre du 18 mai 1999, le gouvernement a indiqué que le ministère de l'Intérieur a pris, le 14 mai 1999, un arrêté ordonnant aux autorités compétentes de ne pas exercer les pouvoirs qui leur sont conférés au titre des articles 7, paragraphe 1 l) et m), 9 et 9A de la loi sur les villes, et des articles 8, paragraphe 1 g), n) et o), 11 d) et 12 de la loi sur les villages. Cette indication ne correspond pas à la teneur de l'arrêté no 1/99 du 14 mai 1999 qui réserve de plusieurs manières la possibilité d'exercer les pouvoirs prévus dans les dispositions pertinentes de la loi sur les villages de 1908 (datée par erreur de 1907 dans l'arrêté public) et de la loi sur les villes de 1907, comme il est indiqué aux paragraphes 48 et suivants du rapport du Directeur général du 21 mai 1999.
9. En premier lieu, aux termes de l'article 5 de l'arrêté, les restrictions à l'exercice des pouvoirs permettant une réquisition pour un service personnel, conformément aux lois en question, sont effectives "tant qu'aucune autre instruction n'aura été donnée".
10. En second lieu, l'arrêté prévoit deux exceptions aux termes de l'article 5 a) et b) dont le libellé correspond en partie à celui de la convention no 29. L'exception a) reprend l'essentiel des termes de l'exception prévue à l'article 2, paragraphe 2 d), de la convention en cas de situations d'urgence. Mais l'exception b) prévoit "la réquisition, pour un service personnel, en vue de l'exécution des travaux ou services qui sont d'un intérêt direct et important pour la collectivité et la population en général et d'une nécessité actuelle ou imminente, pour lesquels il a été impossible de se procurer une main-d'oeuvre volontaire malgré l'offre d'un salaire normal et qui ne constituent pas un fardeau trop lourd pour la population actuelle". Cette disposition est incompatible, pour plusieurs raisons, avec les exigences de la convention.
11. L'exception b) reflète en partie l'article 10 de la convention, mais elle ne retient pas les conditions prévues au paragraphe 2 d) et e) de cette disposition, à savoir que "l'exécution de ce travail ou service n'obligera pas les travailleurs à s'éloigner du lieu de leur résidence habituelle" et "que l'exécution de ce travail ou service sera dirigée conformément aux exigences de la religion, de la vie sociale et de l'agriculture".
12. Sur un plan plus important, il est indiqué au paragraphe 1 de l'article 10 de la convention que les formes de travail forcé ou obligatoire décrites dans cet article "devront être progressivement supprimées". Comme l'a noté la commission d'enquête au paragraphe 472 de son rapport, l'article 10 fait partie d'une série de dispositions prévoyant des conditions et des garanties "pour restreindre et réglementer le recours au travail obligatoire en attendant son élimination", c'est-à-dire pendant la "période transitoire" prévue à l'article 1, paragraphe 2, de la convention. A cet égard, la commission réitère qu'étant donné que la convention, adoptée en 1930, demande la suppression du travail forcé dans le plus bref délai possible, invoquer aujourd'hui (69 ans après l'adoption de la convention) que certaines formes de travail forcé ou obligatoire sont conformes à l'une des exigences de cet ensemble de dispositions revient à méconnaître la fonction transitoire de ces dispositions et n'est pas conforme à l'esprit de la convention. La commission estime qu'on ne saurait justifier le recours à une forme de travail forcé ou obligatoire relevant, aux termes de l'article 2, du champ d'application de la convention en invoquant le respect des articles 1, paragraphe 2, et 4 à 24, bien que les interdictions absolues figurant dans ces dispositions lient toujours les Etats ayant ratifié la convention. Dans son rapport, la commission d'enquête a partagé cet avis, compte tenu également du statut de l'abolition du travail forcé ou obligatoire en droit international général, en tant que norme impérative à laquelle aucune dérogation n'est admise.
13. En outre, au paragraphe 472 de ses observations relatives au respect de la convention, la commission d'enquête a constaté que:
... en l'espèce, l'engagement pris en vertu de l'article 1, paragraphe 1, de la convention de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible interdit au gouvernement de recourir à une législation dont il avait déclaré pendant de nombreuses années qu'elle était obsolète et non appliquée.
14. En prévoyant la possibilité d'exercer le pouvoir d'imposer le travail obligatoire au titre d'une exception reprenant partiellement l'article 10, paragraphe 2 a) à c), de la convention, l'arrêté du 14 mai 1999 n'observe ni les conditions prévues au paragraphe 2 d) et e) de l'article 10, ni la fonction transitoire de cette disposition; à fortiori, cet arrêté n'assure pas, comme le demandait la commission d'enquête dans ses recommandations au paragraphe 539(b), "que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne sera plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires".
15. Dans son mémorandum du 7 juin 1999, le gouvernement a indiqué que l'arrêté no 1/99 "dispose spécifiquement qu'il doit être immédiatement mis un terme à tout travail non rémunéré ou obligatoire". En fait, l'arrêté ne se réfère pas à "tout travail non rémunéré ou obligatoire", mais seulement à l'exercice des pouvoirs conférés en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes. La commission d'enquête avait souligné au paragraphe 539 b) de son rapport que, dans la pratique nationale, "le pouvoir d'imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis, sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes". Cela est confirmé par les informations disponibles sur les pratiques exercées en fait par les autorités militaires depuis la publication du rapport de la commission d'enquête (voir partie B ci-dessous), y compris les textes d'ordres exigeant la contribution d'un travail, émis aussi bien avant qu'après le 14 mai 1999 sans jamais se référer à la loi sur les villages, à la loi sur les villes, ou à quelque autre base légale que ce soit.
16. En conclusion, les mesures concrètes que la commission d'enquête avait demandées pour "assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré" n'ont pas encore été prises.
B. Informations disponibles sur les pratiques existantes
a) Août 1998 à mi-mai 1999
17. Dans son rapport du 21 mai 1999 qu'il a adressé aux membres du Conseil d'administration, le Directeur général a indiqué que toutes les informations sur les pratiques existantes (informations émanant d'organisations de travailleurs et d'employeurs, d'organisations intergouvernementales et de gouvernements d'Etats Membres de l'OIT) qui ont été reçues en réponse à sa demande relevaient la persistance du recours généralisé au travail forcé par les autorités, et en particulier par l'armée.
18. Il existe de très nombreuses informations faisant état de cas concrets de recours au travail forcé entre août 1998 et avril 1999, y compris un grand nombre d'ordres officiels écrits émanant de l'armée ou des représentants de l'administration qui exigent de chefs de villages qu'ils fournissent des villageois pour exécuter un travail forcé. De même que les ordres antérieurs, ceux émis après juillet 1998 ne font jamais référence à un quelconque fondement légal pour justifier le pouvoir exercé.
19. Le travail forcé a continué d'être imposé pour du portage, pour l'exécution de travaux pour des camps militaires et d'autres travaux à l'appui des forces armées, pour des projets agricoles et d'autres projets de production entrepris par l'armée, pour la construction et l'entretien de routes, de voies ferrées et de ponts, et pour des travaux d'infrastructure allant du creusement de canaux à la construction de barrages ou de pagodes. Les informations reflétées dans le rapport du Directeur général comprennent des détails d'un certain nombre de cas dans lesquels le travail forcé a été imposé dans des circonstances d'une brutalité extrême - destruction de villages, torture, viols, mutilation et exécution de porteurs épuisés, malades ou blessés et (dans un cas) d'un chef de village non coopératif, et utilisation de civils, femmes et enfants compris, pour balayer les mines et servir de boucliers humains. D'une manière plus générale, les conditions dans lesquelles le travail forcé est imposé révèlent un mépris total de la dignité, de la santé et des nécessités premières des victimes.
b) Commentaires du gouvernement en date du 7 juin 1999
20. Dans son mémorandum du 7 juin 1999, le gouvernement indique ce qui suit à propos du rapport du Directeur général du 21 mai:
... le rapport est tissé d'accusations non fondées et partiales dirigées délibérément contre le Myanmar et son gouvernement.
Les faits allégués dans ce rapport sont à l'évidence des accusations mensongères concoctées dans l'intention maligne d'amener la destruction du Myanmar par des organismes d'expatriés du Myanmar à l'étranger et des groupes renégats qui sont opposés à toutes les mesures prises par le gouvernement du Myanmar. Ces allégations reposent également sur des accusations manifestement mensongères, formulées oralement, par écrit et sous la forme d'annonces par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) ...
Aujourd'hui, le gouvernement mène à bien des projets d'équipement en procédant à une planification systématique et à des allocations budgétaires appropriées. De plus, l'essentiel des travaux accomplis dans le cadre de ces projets le sont en ayant recours à des moyens et équipements mécanisés. Tout projet dans le cadre duquel de la main-d'oeuvre doit nécessairement être employée comporte un volet budgétaire consacré au paiement des salaires des ouvriers. Tout ouvrier ainsi employé perçoit un salaire équitable et il n'existe pas un seul cas ni le moindre commencement de preuve que du travail forcé serait pratiqué dans le cadre de ces projets.
Le travail nécessité par la construction des grands axes routiers dans diverses régions, notamment de l'axe routier dans l'Etat de Shan, ainsi que la construction des voies ferrées, est accompli par des membres des forces armées. Pas un seul civil n'est employé dans ce cadre.
Les projets d'équipement de l'Etat ne font appel qu'à des membres des forces armées. Ainsi, l'accusation selon laquelle le gouvernement aurait recours au travail forcé dans le cadre de ces projets est à la fois sans fondement et manifestement erronée. Comme seuls les membres des forces armées sont employés dans le cadre de la réalisation des axes ferroviaires et routiers, prétendre que l'on a recours au travail forcé est absolument insensé.
Les autres projets en cours, tels que ceux concernant la bonification de terres incultes ainsi que la construction de logements et d'hôtels, correspondent tous à des opérations réalisées par des entreprises privées qui y ont investi leurs capitaux. Le recours à du travail forcé dans ces cas est absolument exclu. En fait, lorsque des conflits du travail surviennent, le gouvernement prend fermement position en faveur des travailleurs en vue du règlement de ces conflits.
Pour ce qui est de l'accusation selon laquelle l'armée réquisitionne des porteurs dans le cadre de ses opérations militaires, on peut dire que telle était autrefois la pratique lorsque les mouvements de rébellion étaient chroniques. Mais le fait demeure que ces porteurs étaient toujours rémunérés et que le budget de la défense a toujours comporté une imputation de crédit pour le paiement de ces salaires. Ces porteurs jouissaient des mêmes droits que les soldats. Ils percevaient les mêmes rations ainsi que la même solde. En outre, un porteur victime d'une blessure obtenait une indemnisation égale à celle d'un soldat en service et avait droit aux mêmes indemnités de compensation pour la dureté de la mission. Mais cette question des porteurs servant l'armée n'a plus lieu d'être et ne se pose plus depuis que les opérations militaires ne constituent plus une nécessité impérieuse.
21. La commission prend dûment note que, dans sa déclaration, le gouvernement dément ce qui ressort des conclusions de juillet 1998 de la commission d'enquête et d'une profusion d'informations concordantes, sur la période août 1998-avril 1999, fournies par de très nombreuses sources, ainsi que des copies d'ordres émanant des forces armées ou de représentants de l'administration, qui sont mentionnées dans le rapport du Directeur général du 21 mai 1999. La commission note en outre que les affirmations citées plus haut et contenues dans le mémorandum du gouvernement du 7 juin 1999 sont démenties entre autres par les copies d'ordres militaires qui ont été émis à peu près en même temps et présentés par la CISL.
c) Pratique depuis la mi-mai 1999
22. Dans ses observations en date du 19 octobre 1999, la CISL indique que, plus d'un an après la publication du rapport de la commission d'enquête, et contrairement aux engagements qu'il a pris publiquement à maintes reprises, le gouvernement n'a cessé de recourir systématiquement, et à une grande échelle, au travail forcé, lequel a continué et continue d'être imposé à la population civile, comme il ressort de plusieurs ordres émis récemment par les forces armées et/ou des organismes placés sous leur contrôle direct.
23. Il ressort en effet de ces ordres que des officiers militaires ont continué, après le 14 mai 1999, à exiger de chefs de villages qu'ils fournissent des villageois pour cultiver des produits alimentaires destinés à l'armée et pour effectuer des travaux routiers et de portage, et qu'ils envoient, par roulement, à des camps militaires désignés un contingent régulier de travailleurs forcés utilisés comme serviteurs, messagers, sentinelles ou bâtisseurs pour une série d'autres tâches. La CISL souligne que ces travailleurs ne sont pas autorisés à quitter les locaux de l'armée tant que la relève n'est pas arrivée, que l'on ouvre le feu sur les personnes qui sortent sans autorisation et que les anciens du village peuvent être arrêtés, voire torturés en cas de manquements répétés à ces ordres.
24. La CISL a également communiqué un rapport indiquant que le travail forcé a été utilisé en août 1999 pour la réparation et l'entretien de la voie ferrée de Ye-Tavoy, ainsi qu'une étude du rapport de 1999 du rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, dont il ressort que, parfois, le seul objet du travail forcé pour l'armée est de lui assurer un profit financier direct. A ce sujet, la CISL rappelle, parmi les ordres militaires qui ont été soumis, le recrutement forcé, par un ordre du 12 juin 1999, de personnes avec des boeufs et des charrues pour le travail sur des terres placées sous le contrôle d'un chef de bataillon de la région de Kawkareik, en tant qu'exemple confirmant l'analyse du rapporteur spécial selon laquelle des cultivateurs seraient exploités sur des terres confisquées.
25. Le gouvernement n'a pas formulé de commentaires à propos des observations de la CISL du 19 octobre. La commission note, comme l'a déjà signalé la CISL à propos d'autres ordres militaires, que les ordres présentés sont quasiment identiques, quant au style et au contenu, aux centaines d'ordres de travail forcé que la commission d'enquête avait examinés et jugés authentiques lors de son investigation.
26. En conclusion, rien n'indique que les pratiques en vigueur n'aient changé depuis que la commission d'enquête a présenté son rapport. Au contraire, l'imposition par les autorités de travail forcé ou obligatoire s'est poursuivie et est largement attestée.
III. Sanctions
27. Au paragraphe 539(c) de ses recommandations, la commission d'enquête avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer:
... que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l'article 374 du Code pénal pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l'article 25 de la convention. Ceci demande de la rigueur dans les enquêtes et poursuites, et l'application de sanctions efficaces à ceux reconnus coupables.
28. Dans son mémorandum du 7 juin 1999, le gouvernement attire l'attention sur le paragraphe 6 de l'arrêté no 1/99 du 14 mai 1999, qui dispose ce qui suit: "toute personne qui ne se conforme pas au présent arrêté s'expose à ce que des sanctions soient prises à son égard sur la base de la législation en vigueur". Ceci, selon le gouvernement, veut dire "sans aucune équivoque que les contrevenants seront punis conformément à l'article 374 du Code pénal".
29. La commission note qu'il n'est question dans l'article 6 de l'arrêté no 1/99 ni de l'imposition d'un travail forcé ni de punition au titre de l'article 374 du Code pénal, mais spécifiquement de l'inobservation de l'arrêté et de sanctions prises sur la base de la législation en vigueur. La commission rappelle également que l'arrêté en question n'interdit pas d'une manière générale l'imposition d'un travail forcé ou obligatoire mais qu'il restreint de manière spécifique le recours aux pouvoirs conférés en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes. Elle rappelle en outre que les ordres militaires imposant du travail forcé ne font pas référence à un quelconque fondement juridique.
30. Dans les faits, aucune sanction prise conformément à l'article 374 du Code pénal n'a été portée à la connaissance de la commission.
31. Il convient de rappeler à cet égard que l'imposition persistante par les autorités d'un travail forcé ou obligatoire a été catégoriquement niée par le gouvernement dans son mémorandum du 7 juin 1999, comme l'avait fait d'une manière analogue le lieutenant général Khin Nyunt devant la réunion du 14 mai 1999 des ministres du Travail de l'ANASE. A cette occasion, celui-ci avait évoqué "la mauvaise interprétation et la mauvaise connaissance" de la situation et de la mentalité du peuple du Myanmar, lequel "a volontairement contribué au travail" qui apporte "des avantages matériels immédiats" et "constitue un mérite pour les cycles futurs de vie". Il avait ajouté que, "pour dissiper ces fausses impressions", le gouvernement avait "publié des instructions selon lesquelles seul le travail rémunéré doit être utilisé dans des projets d'infrastructures", tout en indiquant que "nous faisons maintenant essentiellement appel aux militaires".
32. Comme l'ont déjà signalé un comité du Conseil d'administration en 1994, la présente commission dans ses observations ultérieures au titre de la convention et la commission d'enquête dans ses recommandations figurant au paragraphe 539 de son rapport, l'absence de délimitations nettes entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque encore de marquer le recrutement effectué par les responsables locaux ou militaires. Le pouvoir d'imposer du travail obligatoire ne cessera d'être tenu pour acquis que lorsque ceux qui sont habitués à exercer ce pouvoir seront réellement confrontés avec leur responsabilité pénale.
33. La commission déplore l'imposition persistante et impitoyable, manifestement en toute impunité, de travail forcé à la population civile par des officiers militaires, le fait que le gouvernement n'a pas donné suite aux trois recommandations de la commission d'enquête et la non-observation persistante par le Myanmar de la convention sur le travail forcé. Dans ses observations finales, la commission d'enquête avait noté que l'expérience de ces dernières années tend à prouver que l'établissement d'un gouvernement librement choisi par le peuple et la soumission de toute autorité publique au droit sont, en pratique, des conditions indispensables à l'élimination du travail forcé au Myanmar. La commission exhorte le gouvernement à donner suite aux recommandations de la commission d'enquête afin de mettre un terme au fléau qu'est le travail forcé et à restaurer sa crédibilité aux yeux de la communauté internationale en démontrant qu'il est disposé à satisfaire à ses obligations internationales.
1. La commission rappelle qu'une plainte a été déposée en 1996, en vertu de l'article 26 de la Constitution, contre le gouvernement du Myanmar, pour non-respect des dispositions de la présente convention, et qu'une commission d'enquête a été constituée pour examiner cette plainte. La commission rappelle que le non-respect de la convention a fait l'objet d'observations depuis de nombreuses années et qu'en 1993 une réclamation avait déjà été déposée en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant l'inexécution de la convention, à la suite de laquelle il avait été conclu en 1994 que de graves violations étaient commises. La commission note, par ailleurs, que la commission d'enquête a achevé ses travaux au mois d'août 1998 et qu'elle a présenté son rapport au Conseil d'administration du Bureau international du Travail à sa 273e session, en novembre 1998.
2. La commission note qu'à la clôture de ses travaux la commission d'enquête a adopté des conclusions et recommandations détaillées, notamment les suivantes:
528. De très nombreux éléments de preuve soumis à la commission montrent que les autorités civiles et militaires pratiquent de façon très généralisée le recours au travail forcé qui est imposé à la population civile dans tout le Myanmar pour le portage, la construction, l'entretien et les services des camps militaires, d'autres travaux à l'appui des forces armées, le travail sur des projets agricoles et forestiers et d'autres projets de production réalisés par les autorités civiles ou militaires, parfois au profit de particuliers, pour la construction et l'entretien de routes, de voies ferrées et de ponts, pour d'autres travaux d'infrastructure et pour toute une série d'autres tâches, dont aucune ne relève des exceptions énumérées à l'article 2, paragraphe 2, de la convention.
3. Dans son rapport, la commission d'enquête conclut par ailleurs que "le travail forcé au Myanmar est fréquemment accompli par des femmes, des enfants et des personnes âgées ainsi que par des personnes autrement inaptes au travail" (paragr. 531). Elle ajoute:
533. Le travail forcé est une lourde charge pour l'ensemble de la population du Myanmar; il empêche les paysans de travailler sur leurs terres et les enfants d'aller à l'école. Il pèse le plus lourdement sur les ouvriers sans terre et les catégories les plus pauvres de la population, qui dépendent pour leur subsistance de pouvoir louer leurs bras et qui n'ont généralement pas les moyens de verser les diverses sommes demandées par les autorités en remplacement ou en sus du travail forcé. L'impossibilité de gagner de quoi vivre en raison de la quantité de travail forcé exigée est une raison fréquente pour fuir le pays.
534. Le fardeau du travail forcé semble aussi peser tout particulièrement sur les groupes ethniques non birmans, notamment dans les régions où la présence militaire est forte et sur la minorité musulmane, y compris les Rohingyas.
535. Toutes les informations et les preuves devant la commission montrent le total mépris que manifestent les autorités pour la sécurité et la santé ainsi que pour les besoins essentiels des personnes qui effectuent du travail forcé ou obligatoire. Les porteurs, y compris les femmes, sont souvent envoyés en tête des troupes dans des situations particulièrement dangereuses -- par exemple lorsque l'on soupçonne que le terrain peut être miné --, et beaucoup sont ainsi blessés ou y laissent la vie. Il est rare que les porteurs reçoivent un traitement médical quelconque; les blessures aux épaules, au dos et aux pieds sont fréquentes mais sont généralement peu ou pas soignées, et les porteurs malades ou blessés sont parfois abandonnés dans la jungle. De même, sur les projets de construction de routes, la plupart du temps les blessures ne sont pas soignées et, sur certains de ces projets, les morts par maladie et accidents du travail sont fréquentes. Les travailleurs forcés, y compris ceux qui sont malades ou blessés, sont fréquemment battus ou brutalisés par les soldats, leur causant de graves blessures; certains sont tués, et des femmes exécutant un travail forcé sont violées ou victimes d'autres abus sexuels de la part des soldats. Dans la plupart des cas, les travailleurs forcés ne reçoivent aucune nourriture -- parfois ils doivent même apporter nourriture, eau, bambous et bois aux militaires; les porteurs peuvent recevoir de faibles rations de riz avarié, mais être privés d'eau potable. Vêtements et chaussures adéquates ne sont pas fournis aux porteurs, même lorsqu'ils ont été saisis lors d'une rafle sans aucun préavis. La nuit, les porteurs sont enfermés dans des bunkers ou doivent dormir en plein air, sans qu'on leur fournisse ni abri ni couverture, même lorsqu'il fait froid ou qu'il pleut, et souvent enchaînés les uns aux autres. Les travailleurs forcés qui travaillent sur les projets de construction de routes ou de voies ferrées doivent s'arranger eux-mêmes pour trouver un abri et assurer tous leurs autres besoins essentiels.
536. En conclusion, l'obligation aux termes de l'article 1, paragraphe 1, de la convention de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire est violée au Myanmar dans la législation nationale, en particulier par la loi sur les villages et la loi sur les villes, ainsi que dans la pratique, de façon généralisée et systématique, avec un mépris total de la dignité humaine, de la sécurité, de la santé et des besoins essentiels du peuple du Myanmar.
537. De même, le gouvernement viole son obligation au titre de l'article 25 de la convention de s'assurer que les sanctions imposées par la loi pour le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sont réellement efficaces et strictement appliquées. Bien que l'article 374 du Code pénal prévoie des sanctions à l'égard de celui qui contraint illégalement une personne à travailler contre son gré, cette disposition ne semble jamais être appliquée dans la pratique, même lorsque les méthodes utilisées pour enrôler de force des travailleurs ne sont pas conformes aux dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, auxquelles il n'est d'ailleurs jamais fait référence dans la pratique.
538. L'Etat qui commandite, incite, accepte ou tolère le travail forcé sur son territoire commet un fait illicite et engage sa responsabilité pour la violation d'une norme impérative du droit international. Quelle que soit la position en droit national en ce qui concerne l'imposition de travail forcé ou obligatoire et la punition de ceux qui en sont responsables, toute personne qui viole l'interdiction du recours au travail forcé aux termes de la convention commet un crime international qui constitue également, s'il est commis à grande échelle ou de manière systématique, un crime contre l'humanité.
4. La commission d'enquête a formulé les recommandations suivantes:
539. Au vu du manquement flagrant et persistant du gouvernement aux dispositions de la convention, la commission exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer:
b) que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires. Ceci est d'autant plus important que le pouvoir d'imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis, sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. En conséquence, au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 ci-dessus, afin d'arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un Etat de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l'ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d'un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d'oeuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré;
c) que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l'article 374 du Code pénal pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l'article 25 de la convention. Ceci demande de la rigueur dans les enquêtes et poursuites et l'application de sanctions efficaces à ceux reconnus coupables. Comme l'a relevé en 1994 le comité du Conseil d'administration créé pour examiner la plainte présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, les poursuites pénales engagées à l'encontre de ceux qui recourent à la coercition paraissent d'autant plus importantes que l'absence de délimitations nettes entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque encore de marquer le recrutement effectué par les responsables locaux ou militaires. Le pouvoir d'imposer du travail obligatoire ne cessera d'être tenu pour acquis que lorsque ceux qui sont habitués à exercer ce pouvoir seront réellement confrontés avec leur responsabilité pénale.
540. Les recommandations formulées par la commission demandent une action immédiate de la part du gouvernement du Myanmar. La tâche de la commission d'enquête s'achève avec la signature du présent rapport, mais il est souhaitable que l'Organisation internationale du Travail reste informée des progrès réalisés pour donner effet aux recommandations de la commission. La commission recommande par conséquent que le gouvernement du Myanmar indique régulièrement dans ses rapports au titre de l'article 22 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail concernant les mesures prises pour donner effet aux dispositions de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, les mesures qu'il a prises au cours de la période de rapport pour donner effet aux recommandations contenues dans le présent rapport. En outre, le gouvernement souhaitera peut-être inclure dans ses rapports des informations sur l'état de la législation et de la pratique nationales en ce qui concerne le service militaire obligatoire.
5. La commission note également qu'après avoir reçu le rapport de la commission d'enquête le gouvernement a adressé, le 23 septembre 1998, une réponse au Directeur général dans laquelle il considère que les allégations sont dénuées de fondement et sont inspirées par des mobiles politiques. Il ajoute toutefois "... les autorités du Myanmar ont révisé à plusieurs reprises et de leur propre initiative les lois sur les villes et sur les villages afin de les mettre en conformité avec les conditions existant actuellement dans le pays et pour que le Myanmar puisse s'acquitter des obligations qui lui incombent ... En conséquence, les autorités feront tout leur possible pour mener à terme l'action requise dans les délais fixés dans le rapport. (...) la mise en oeuvre des recommandations figurant au paragraphe 539 du rapport ne présente pour nous aucune difficulté."
6. La commission prend note des conclusions et recommandations de la commission d'enquête qui confirment et élargissent les conclusions qu'elle avait elle-même formulées concernant le non-respect par le gouvernement des obligations découlant de cette convention fondamentale, celles de la Commission de la Conférence internationale du Travail sur l'application des normes ainsi que celles adoptées par le Conseil d'administration à l'issue de l'examen de la réclamation. Elle note, par ailleurs, que le gouvernement se déclare disposé à mettre en oeuvre les recommandations figurant dans le rapport de la commission d'enquête. Elle l'invite instamment à s'acquitter de cette tâche non seulement pour que la convention soit appliquée, mais surtout pour épargner à ses propres citoyens les souffrances et les obstacles entravant leur développement qui ont été mis si clairement en évidence dans le rapport de la commission d'enquête. Elle le prie par ailleurs de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour mettre en application les recommandations et la convention, et l'engage instamment, pour ce faire, à solliciter l'aide du Bureau international du Travail. Elle note à ce propos qu'après avoir étudié le rapport de la commission d'enquête le Conseil d'administration a demandé au Directeur général de lui présenter un rapport intérimaire sur l'application de la convention à sa 274e session (en mars 1999). La commission veut croire que le gouvernement sera très prochainement en mesure d'aviser le Conseil d'administration, la Conférence et la commission d'experts qu'il s'est pleinement acquitté des obligations contractées au titre de la convention.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 87e session et de communiquer un rapport détaillé en 1999.]
Se référant à ses précédents commentaires concernant le respect de la convention par le Myanmar, la commission a pris note de la discussion qui a eu lieu en juin 1996 à la Commission de la Conférence et du constat de défaut continu d'application de la convention. La commission note qu'un rapport intérimaire sur les mesures prises par le gouvernement pour abolir le recours au travail forcé a été reçu de la part de ce dernier le 18 octobre 1996. Elle note également que, par lettre du 20 juin 1996, adressée au Directeur général du BIT, 25 délégués travailleurs à la Conférence internationale du Travail ont présenté une plainte, en vertu de l'article 26 de la Constitution, contre le gouvernement du Myanmar pour inexécution de la convention, qu'une communication supplémentaire a été reçue de la part des requérants le 31 octobre 1996, et que le Conseil d'administration du BIT a décidé, à sa 267e session, tenue en novembre 1996, que le gouvernement du Myanmar devait être prié par le Directeur général de communiquer ses observations au sujet de cette plainte d'ici au 31 janvier 1997.
Dans ces conditions et pendant l'examen de la plainte présentée en vertu de l'article 26 de la Constitution, la commission sursoit à l'examen de l'observance de la convention par le Myanmar.
Portage obligatoire et réquisition de main-d'oeuvre pour des travaux publics
1. A la suite de la discussion ayant eu lieu au sein de la Commission de la Conférence, en 1995, sur le respect de la convention par le Myanmar, la commission a pris note du rapport du gouvernement.
2. Dans les commentaires qu'elle formule depuis un nombre considérable d'années, la commission a noté que l'article 8 1) g), n) et o), lu conjointement avec les articles 11 d) et 12 de la loi sur les villages (1908), et l'article 7 1) m), lu conjointement avec les articles 9 b) et 9 A de la loi sur les villes (1907), permettent d'imposer sous peine de sanctions l'exécution de travaux et de services, de portage en particulier aux habitants qui ne se sont pas proposés volontairement. En 1991, la commission a pris note des observations présentées par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), selon lesquelles la pratique du portage obligatoire est largement répandue dans le pays.
3. En 1993, la commission a pris note du rapport d'un rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, qui a été soumis à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies à sa 49e session, en février-mars 1993 (document E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993). Ce document mentionne le témoignage de personnes réquisitionnées comme main-d'oeuvre pour la construction de voies ferrées (Aungban-Loikaw) et de routes ou pour le défrichage dans la jungle pour le compte de l'armée. Le gouvernement ayant déclaré que ce travail est accompli volontairement, conformément à une tradition qui remonte à des milliers d'années, la commission a souligné dans sa dernière observation que les dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes mentionnées au point 2 ci-dessus confèrent à tout chef de larges pouvoirs de réquisitionner les habitants pour l'assister dans l'exécution de ses obligations publiques. En présence de tels pouvoirs, il est difficile de dire que les habitants effectuant un travail à la demande des autorités agissent de leur plein gré.
4. En 1993, la CISL a présenté, en application de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, une réclamation alléguant la non-observation de la convention. En février 1995, la commission a pris note des conclusions et recommandations formulées par le comité constitué par le Conseil d'administration pour examiner cette réclamation. Ces conclusions et recommandations ont été adoptées par le Conseil d'administration à sa 261e session (novembre 1994). Le comité a fait observer que le fait d'exiger un travail ou des services, en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, est contraire à la convention, ratifiée par le Myanmar en 1955, et le Conseil d'administration a prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires:
i) pour assurer que les textes législatifs en question, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient rendus conformes à la convention;
ii) pour assurer que l'abrogation formelle des pouvoirs permettant d'imposer un travail obligatoire soit respectée dans la pratique et que ceux qui font usage de la coercition dans le recrutement de la main-d'oeuvre soient punis.
5. La commission a en outre noté la déclaration faite par le gouvernement à la 261e session du Conseil d'administration, indiquant que le Myanmar connaissait actuellement une profonde transformation puisqu'il passait d'un système politique et économique à un autre et que l'une des étapes fondamentales de cette transition était la modification de lois qui ne correspondaient plus aux circonstances et aux situations actuelles. Devant la Commission de la Conférence, en juin 1995, le représentant gouvernemental a déclaré de même que, conformément à la demande du Conseil d'administration "de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les textes législatifs en question, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient rendus conformes à la convention" et "pour assurer que l'abrogation formelle du pouvoir de recourir au travail obligatoire soit respectée dans la pratique et que ceux qui recourent à la coercition pour recruter de la main-d'oeuvre soient punis", le gouvernement a engagé un processus de modification de ces lois.
6. En 1995, dans un paragraphe spécial de son rapport, la Commission de la Conférence a appelé le gouvernement à abroger de toute urgence les dispositions juridiques incriminées de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, afin de les rendre conformes à la lettre et à l'esprit de la convention no 29, de mettre fin aux pratiques de travail forcé sur le terrain, de prévoir et de prendre des sanctions exemplaires contre ceux qui imposent un travail forcé et de fournir un rapport détaillé sur les mesures prises sur les plans législatif et pratique pour que la convention no 29 soit respectée.
7. La commission constate qu'aucune précision de cette nature n'a été fournie par le gouvernement. Dans son rapport succinct, reçu le 31 octobre 1995, le gouvernement, se référant aux dispositions de l'article 2, paragraphe 2 b) et d), de la convention, à propos des "obligations civiques normales" et du "travail ou service exigé dans les cas de force majeure", déclare une fois de plus qu'au Myanmar la conception est acceptée selon laquelle la prestation volontaire de travail pour le développement de la collectivité, à des travaux tels que la construction de pagodes, de monastères, d'écoles, de ponts, de routes, de voies ferrées, etc., constitue une sorte d'offrande méritoire, qui est bonne non seulement pour la vie présente mais aussi pour la vie future. Ainsi, dans l'optique du gouvernement, la notion de "travail forcé" n'est pas applicable aux dispositions de l'article 11 d) de la loi sur les villages et de l'article 9 de la loi sur les villes. En outre, la loi sur les villages et la loi sur les villes, administrées par le Département de l'administration générale, "sont actuellement à l'examen pour être en conformité avec la situation actuelle au Myanmar".
8. La commission note ces indications avec préoccupation. Rappelant que, dans ses rapports sur l'application de la convention, le gouvernement a déclaré depuis 1967 que les autorités n'exercent plus les pouvoirs qui leur sont conférés en vertu des dispositions en question de la loi sur les villages et de la loi sur les villes adoptées sous le régime colonial, que ces pouvoirs ne correspondent pas aux normes et aux besoins du nouvel ordre social instauré dans le pays, qu'ils sont obsolètes et seront prochainement abrogés, la commission a exprimé, dans sa précédente observation, l'espoir que cela serait fait maintenant, et que le gouvernement communiquerait des informations complètes sur les mesures prises en ce qui concerne tant l'abrogation formelle du pouvoir d'imposer un travail obligatoire que l'action de suivi nécessaire pour garantir que ceux qui recourent à la coercition pour recruter des travailleurs soient punis avec rigueur. Comme l'a relevé le comité établi par le Conseil d'administration, ce suivi apparaît d'autant plus important que l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaît tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque de marquer encore davantage le recrutement effectif par les responsables locaux ou militaires. Dans son dernier rapport, le gouvernement persiste à entretenir la confusion entre travail obligatoire et travail volontaire et ne donne aucune indication, quelle qu'elle soit, quant à des mesures concrètes qui auraient été prises pour abolir, tant dans la législation que dans la pratique, le pouvoir d'imposer un travail obligatoire.
[Le gouvernement est prié de fournir des précisions complètes à la Conférence à sa 83e session.]
1. Portage obligatoire. Dans les commentaires qu'elle a formulés durant de nombreuses années, la commission a noté que l'article 8(1)(g), (n) et (o) lu conjointement avec les articles 11(d) et 12 de la loi sur les villages (1908) et l'article 7(1), (m) lu conjointement avec les articles 9(b) et 9A de la loi sur les villes (1907) imposent l'exécution de travaux et de services, de portage en particulier, sous peine de sanctions pour les résidents qui ne se sont pas proposés volontairement. En 1991, la commission prenait note des observations soumises par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) affirmant que la pratique du portage obligatoire était largement répandue dans le pays. En 1993, la CISL a présenté, en application de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, une réclamation alléguant la non-observation de la convention, et la commission a suspendu l'étude de cette question en attendant l'examen de la réclamation par le Conseil d'administration. La commission a maintenant pris note des conclusions et recommandations formulées par le comité que le Conseil d'administration a établi pour examiner cette réclamation, lesquelles ont été approuvées par le Conseil d'administration à sa 262e session (novembre 1994). Ledit comité a fait observer que l'imposition de travaux et de services, en particulier le portage, en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, est contraire à la convention ratifiée par le Myanmar en 1955, et le Conseil d'administration a prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires:
ii) pour assurer que l'abrogation formelle du pouvoir de recourir au travail obligatoire soit respectée dans la pratique et que ceux qui font usage de la coercition dans le recrutement de la main-d'oeuvre soient punis.
La commission note la déclaration faite par le gouvernement à la 261e session du Conseil d'administration indiquant que le Myanmar connaissait actuellement une profonde transformation puisqu'il passait d'un système politique et économique à un autre et que l'une des étapes fondamentales de cette transition était la modification de lois qui ne correspondaient plus aux circonstances et aux situations actuelles. Rappelant que, dans ses rapports sur l'application de la convention, le gouvernement a indiqué depuis 1967 que les autorités n'exerçaient plus les pouvoirs qui leur étaient conférés en vertu des dispositions en question de la loi sur les villages et de la loi sur les villes adoptées sous le régime colonial, que cette législation ne satisfaisait plus aux critères et aux besoins du nouvel ordre social instauré dans le pays, qu'elle était obsolète et serait prochainement abrogée, la commission espère que cela sera fait maintenant et que le gouvernement communiquera des informations complètes sur les mesures prises en ce qui concerne tant l'abrogation formelle du pouvoir d'imposer un travail obligatoire que les nécessaires interventions complémentaires pour que ceux qui recourent à la coercition lors du recrutement des travailleurs soient strictement punis. Comme l'a signalé le comité établi par le Conseil d'administration, ce suivi apparaît d'autant plus important que l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaît tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque de marquer encore davantage le recrutement effectif par les responsables locaux ou militaires.
2. Travail forcé en matière de travaux publics. Dans son observation antérieure, la commission a noté le rapport d'un Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, qui a été soumis à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies à sa 49e session, en février-mars 1994 (document E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993). Dans son rapport, le Rapporteur spécial se réfère, entre autres, au témoignage de personnes prises comme main-d'oeuvre pour construire des voies ferrées (itinéraire Aungban-Loikaw) et des routes, ou pour débroussailler la jungle au profit de l'armée, indiquant que des centaines de personnes ont été tuées par les militaires lorsque, comme pour les porteurs, elles ne pouvaient plus transporter de charges et continuer à travailler de force. D'après les informations recueillies, il s'agissait de deux grands projets de voies ferrées, d'autres projets de développement du gouvernement à la frontière, notamment entre la Thaïlande et le Myanmar, et de travaux pour l'armée, en particulier dans les zones de conflits des régions de Karen, Karenni, Shan et Mon.
Il a été signalé que les travailleurs mouraient fréquemment par suite de coups répétés, de mauvaises conditions d'hygiène, de manque de nourriture et de l'absence de soins médicaux lorsqu'ils tombaient malade ou étaient blessés et ne pouvaient continuer à travailler. Des témoins ont aussi signalé que certains de leurs amis ou de leurs parents, après avoir travaillé dans les projets de développement à la frontière, étaient morts peu après à la suite des blessures et des maladies contractées durant leur travail.
La commission a prié le gouvernement d'envoyer ses observations au sujet des témoignages détaillés dont fait état le Rapporteur spécial des Nations Unies.
La commission note qu'aucun rapport n'a été communiqué par le gouvernement conformément à l'article 22 de la Constitution sur l'application de la convention; le gouvernement a néanmoins traité ces questions dans sa déclaration écrite et dans une déclaration détaillée complémentaire présentées en mai et en octobre 1993 au comité du Conseil d'administration chargé d'examiner les questions relatives au respect de la convention no 29.
Dans sa déclaration écrite présentée en mai 1993, le gouvernement indique que les affirmations selon lesquelles les autorités du Myanmar recourent au travail forcé pour la construction de voies ferrées, de routes et de ponts sont fausses et se fondent sur des preuves fabriquées par des personnes qui veulent porter atteinte à l'image des autorités du Myanmar et ne comprennent pas les traditions et la culture de son peuple. Au Myanmar, la contribution volontaire de la main-d'oeuvre à la construction des sanctuaires, temples, routes et ponts ainsi qu'au dégagement des sentiers est une tradition qui remonte à des millénaires. Selon une croyance répandue, cette contribution volontaire est un acte noble dont le mérite est source de bien-être personnel et de force spirituelle. Dans les villages et dans les zones frontalières, les hommes de la Tatmadaw (l'armée du Myanmar) et les populations locales ont participé volontairement à la construction de routes et de ponts au cours des quatre dernières années. L'on ne fait pas appel à la coercition. Dans l'histoire du Myanmar, il n'y a jamais eu d'"esclavage". Depuis l'époque des rois du Myanmar, de nombreux barrages, travaux d'irrigations, lacs et entreprises similaires ont été construits avec l'aide de tous les gens de la région. Ceux qui accusent les autorités du Myanmar de recourir au travail forcé révèlent donc une ignorance patente des traditions et de la culture du pays.
Dans sa déclaration détaillée complémentaire, le gouvernement précise que les allégations de recours au travail forcé pour des projets de voies ferrées dans l'Etat méridional de Shan ont trait à la construction de deux sections, de Aungban à Pinlaung et de Pinlaung à Loikaw. Le but de ce projet est de favoriser et de développer un moyen de transport confortable et rapide dans la région en vue de son développement économique et social. Les travailleurs qui ont contribué à ce projet sont tous des volontaires. Le personnel des forces armées (Tatmadaw), soit 18 637 personnes provenant des unités militaires stationnées dans la zone, ainsi que les 799 447 travailleurs venant des 33 circonscriptions et villages de la commune de Aungban et des 46 circonscriptions et villages de la commune de Pinlaung ont volontairement offert leur travail. Quinze engins lourds appartenant au Département des travaux publics et de l'irrigation et aux Entreprises de bois de construction du Myanmar ont été utilisés. En outre, des techniciens et de la main-d'oeuvre des Chemins de fer du Myanmar (organisme d'Etat) ont également offert leurs services. En échange du travail volontairement fourni par la population de la région, le gouvernement a versé une somme globale de 10 millions de kyats (1,6 million de dollars) pour le secteur Aungban-Pinlaung et 10 millions également pour le secteur Pinlaung-Loikaw.
Le gouvernement ajoute que les membres du corps diplomatique à Yangon, qui ont visité le chantier en janvier et en mai 1993, ont été témoins de la contribution purement volontaire de main-d'oeuvre pour la construction de cette voie ferrée. Ils ont rencontré des personnes qui ont contribué à ces travaux et aucune réclamation ne leur a été faite.
Le gouvernement estime, en outre, qu'aux termes de l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention la construction de la voie ferrée peut être considérée comme relevant des travaux de village exécutés par et pour les membres de la collectivité dans l'intérêt direct de celle-ci. Avant la construction de ce projet, une consultation libre et spontanée a été organisée avec les membres de la communauté, et le projet a été réalisé avec un enthousiasme spontané de leur part.
La commission prend bonne note de ces indications. En ce qui concerne l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention qui exclut du champ d'application de la convention les menus travaux de village, la commission se réfère au paragraphe 37 de son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé où elle a rappelé les critères qui déterminent les limites de cette exception: il doit s'agir de menus travaux, c'est-à-dire essentiellement des travaux d'entretien; et de travaux de village effectués dans l'intérêt direct de la collectivité et non pas des travaux destinés à une communauté plus large. La construction d'une voie ferrée ne semble répondre ni à l'un ni à l'autre de ces critères, même si la troisième condition est remplie, à savoir que les membres de la communauté ou leurs représentants directs ont le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux.
La commission note en outre que les dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes mentionnées au point 1 ci-dessus confèrent à tout chef de larges pouvoirs de réquisitionner les habitants pour l'assister dans l'exécution de ses obligations publiques. En présence de tels pouvoirs, il est difficile de dire que les résidents effectuant un travail à la demande des autorités le font volontairement.
La commission espère donc, en ce qui concerne tant les projets de travaux publics que les services de portage, que les pouvoirs conférés aux autorités aux termes de la loi sur les villages et de la loi sur les villes seront maintenant abrogés et que le gouvernement communiquera des informations complètes sur les mesures prises à cet effet ainsi que sur le suivi mentionné au point 1 ci-dessus.
[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé pour le 1er septembre 1995 au plus tard.]
1. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté les observations soumises le 17 janvier 1991 par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) affirmant que la pratique du portage obligatoire est largement répandue dans le pays.
A cet égard, la commission a pris note du rapport d'un Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, qui a été soumis à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies à sa 49e session, en février-mars 1993 (document E/CN.4/1993/37). La commission note également que, par une communication du 25 janvier 1993, la Confédération internationale des syndicats libres, se référant à l'article 24 de la Constitution de l'OIT, a présenté une réclamation alléguant la non-observation de la convention par le Myanmar. La commission note qu'à sa 255e session (mars 1993) le Conseil d'administration a décidé que la réclamation était recevable et a constitué un comité pour l'examiner. En conséquence, la commission suspend l'examen de cette question en attendant les conclusions du comité ci-dessus.
2. Pour ce qui est du travail forcé autre que le portage, la commission note que, dans son rapport, le rapporteur spécial se réfère au témoignage de personnes prises comme main-d'oeuvre pour construire des voies ferrées (itinéraire Aung Ban-Loikaw), et des routes ou pour débroussailler la jungle au profit de l'armée et que des centaines de personnes ont été tuées par les militaires lorsque, comme pour les porteurs, elles ne pouvaient plus transporter de charges et continuer à travailler de force. D'après les informations recueillies, il s'agissait de deux grands projets de voies ferrées, d'autres projets de développement du gouvernement à la frontière, notamment entre la Thaïlande et le Myanmar, et de travaux pour l'armée, en particulier dans les zones conflictuelles des régions de Karen, Karenni, Shan et Mon.
Il a été signalé que les travailleurs meurent fréquemment par suite de coups répétés, de mauvaises conditions d'hygiène, de manque de nourriture et de l'absence de soins médicaux, lorsqu'ils tombent malades ou sont blessés et ne peuvent continuer à travailler. Des témoins ont aussi signalé que certains de leurs amis ou de leurs parents, après avoir travaillé dans les projets de développement à la frontière, étaient morts peu après à la suite des blessures et des maladies contractées durant leur travail.
La commission prie le gouvernement d'envoyer ses observations au sujet des témoignages détaillés dont fait état le Rapporteur spécial des Nations Unies.
La commission note que le rapport du gouvernement n'a pas été reçu. Elle espère qu'un rapport sera fourni pour examen par la commission à sa prochaine session et qu'il contiendra des informations complètes sur les points suivants soulevés dans sa précédente demande directe:
1. Se référant à son observation au sujet de la convention, la commission rappelle qu'elle a noté que, selon les indications du gouvernement, l'article 9 de la loi sur les villes et l'article 11 d) de la loi sur les villages, qui autorisaient les chefs ou les policiers ruraux à imposer le portage obligatoire aux membres de la classe laborieuse, et le paragraphe 1044 du règlement d'application de la loi sur les prisons, qui autorisait l'emploi de prisonniers par des employeurs privés, étaient tombés en désuétude, n'étaient plus appliqués et devaient être revus par une commission législative nouvellement instituée, de manière à mettre la législation en conformité avec la convention. Dans ses derniers commentaires, la commission avait noté les indications du gouvernement selon lesquelles il n'y avait pas de nouvelles mesures législatives ou autres touchant l'application de la convention et elle avait exprimé l'espoir que les mesures nécessaires seraient prises.
La commission avait noté que, selon les informations données par le gouvernement dans son rapport pour la période prenant fin le 30 juin 1989, la commission chargée de revoir la législation du travail avait été réactivée en juillet 1989 et que tout point d'importance relevé par la commission d'experts serait pris sérieusement en considération au cours de la procédure d'examen des lois du travail en vigueur. La commission veut croire que le gouvernement sera prochainement en mesure d'annoncer que les mesures nécessaires ont été prises.
2. Se référant à ses commentaires précédents dans lesquels elle notait des extraits de la loi sur le Conseil du peuple (loi no 8 de 1974 Pyithu Hluttaw), la commission demande une nouvelle fois au gouvernement de bien vouloir communiquer copie du texte complet de ladite loi soit en traduction, soit dans la langue originale.
3. Dans son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, la commission observait que, dans un certain nombre de pays, le statut de certaines personnes au service de l'Etat, y compris les militaires de carrière, était régi par des dispositions qui subordonnent le droit de quitter le service à une autorisation. Dans certains cas, un lien est établi entre la durée de la formation reçue et celle des services normalement exigés avant qu'une demande de démission ne soit acceptée. Etant donné que de telles restrictions affectant la liberté des travailleurs de mettre fin à leur emploi peuvent avoir une incidence sur l'application de la convention, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur la législation et la pratique nationales concernant la situation des différentes catégories de militaires de carrière et d'autres personnes au service de l'Etat, notamment pour ce qui est de la liberté de quitter le service de leur propre initiative dans des délais raisonnables soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis. Etant donné que des informations à cet égard ont déjà été demandées depuis un certain nombre d'années, la commission veut croire que le gouvernement ne manquera pas de fournir les renseignements voulus dans son prochain rapport.
La commission note que le gouvernement n'a pas communiqué de rapport. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente sur les points suivants:
La commission a note les commentaires du 17 janvier 1991 de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) sur l'application de la convention, ainsi que les informations contenues dans les documents annexés. Dans ses commentaires, la CISL indique que la pratique du portage obligatoire est largement répandue dans le pays et intéresse plusieurs milliers de travailleurs: la majorité des porteurs utilisés par l'armée sont recrutés par la force et durement exploités, rarement payés s'ils le sont jamais, insuffisamment nourris et soignés; ils doivent porter des charges excessives et sont exposés à des privations et des dangers sérieux. Selon les documents, il n'existe aucun règlement ou contrôle officiel des conditions de travail des porteurs qui sont en pratique déterminées à la discrétion des commandants militaires locaux. En conséquence, nombreux sont les porteurs qui meurent ou sont tués pendant le travail forcé; certains sont utilisés comme boucliers humains pendant les actions militaires, d'autres sont abattus quand ils cherchent à s'enfuir, ou encore sont tués ou abandonnés lorsque, à la suite de malnutrition et d'épuisement, ils ne sont plus capables de porter leur charge. La volumineuse documentation soumise par la CISL contient des indications détaillées et précises à l'appui de ces allégations.
La commission exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement fournira des commentaires détaillés sur ces allégations, ainsi que des données complètes sur toutes mesures adoptées ou envisagées pour assurer le respect de la convention.
La commission note les commentaires du 17 janvier 1991 de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) sur l'application de la convention, ainsi que les informations contenues dans les documents annexés.
Dans ses commentaires, la CISL indique que la pratique du portage obligatoire est largement répandue dans le pays et intéresse plusieurs milliers de travailleurs: la majorité des porteurs utilisés par l'armée sont recrutés par la force et durement exploités, rarement payés s'ils le sont jamais, insuffisamment nourris et soignés; ils doivent porter des charges excessives et sont exposés à des privations et des dangers sérieux. Selon les documents, il n'existe aucun règlement ou contrôle officiel des conditions de travail des porteurs qui sont en pratique déterminées à la discrétion des commandants militaires locaux. En conséquence, nombreux sont les porteurs qui meurent ou sont tués pendant le travail forcé; certains sont utilisés comme boucliers humains pendant les actions militaires, d'autres sont abattus quand ils cherchent à s'enfuir, ou encore sont tués ou abandonnés lorsque, à la suite de malnutrition et d'épuisement, ils ne sont plus capables de porter leur charge.
La volumineuse documentation soumise par la CISL contient des indications détaillées et précises à l'appui de ces allégations.
La commission espère que le gouvernement fournira des commentaires détaillés sur ces allégations, ainsi que des données complètes sur toutes mesures adoptées ou envisagées pour assurer le respect de la convention.
1. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait noté les indications du gouvernement selon lesquelles l'article 9 de la loi sur les villes et l'article 11 d) de la loi sur les villages, qui autorisent les chefs ou la police rurale à obliger les membres de la classe des travailleurs à être utilisés comme porteurs, aussi bien que l'article 1044 du règlement d'application de la loi sur les prisons, qui permet l'emploi de prisonniers par des employeurs privés, étaient tombés en désuétude et n'étaient plus appliqués, et qu'une commission législative avait été instituée pour réviser ces dispositions afin de mettre la législation en conformité avec la convention. La commission avait noté la déclaration du gouvernement selon laquelle il n'existe aucune mesure nouvelle, législative ou autre, touchant l'application de la convention et elle avait exprimé l'espoir que les mesures nécessaires seraient prises.
La commission note avec intérêt, d'après les informations fournies par le gouvernement dans son rapport selon lesquelles le Comité de révision de la législation du travail a été reconstitué en juillet 1989 et chaque point saillant soulevé par la commission sera pris sérieusement en considération au cours de la révision des lois existantes. La commission veut croire que le gouvernement sera à même, dans un proche avenir, d'indiquer que les mesures nécessaires auront été prises.
2. La commission, se référant à ses commentaires précédents où elle avait pris note des extraits de la loi no 8 de 1974 du Pyithu Hluttaw sur le Conseil du peuple, prie de nouveau le gouvernement de lui adresser copie de l'ensemble de ce texte, dans la langue originale ou en traduction.
3. Dans son Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, la commission a observé que, dans un certain nombre de pays, le statut de certaines personnes au service de l'Etat, et notamment des militaires de carrière, est régi par des dispositions qui subordonnent le droit de quitter le service à une autorisation. Dans certains cas, un lien est établi entre la durée d'une formation reçue et celle des services normalement exigés avant qu'une demande de démission soit acceptée. Etant donné que de telles restrictions affectant la liberté des travailleurs de mettre fin à leur emploi peuvent avoir une incidence sur l'application de la convention, la commission avait prié le gouvernement de communiquer des informations sur la législation et la pratique nationales concernant la situation des différentes catégories de militaires de carrière et d'autres personnes au service de l'Etat, notamment pour ce qui est de la liberté de quitter le service de leur propre initiative dans des délais raisonnables soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis. Etant donné que des informations à cet égard ont déjà été demandées depuis un certain nombre d'années, la commission veut croire que le gouvernement ne manquera pas de fournir les renseignements voulus dans son prochain rapport.