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Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Pakistan (Ratification: 1961)

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Article 1 de la convention. Protection des travailleurs contre la discrimination. Évolution de la législation. La commission rappelle qu’à la suite du 18e amendement constitutionnel de 2010, qui a transféré la compétence de l’adoption des lois relatives au travail du Parlement fédéral aux gouvernements des provinces, les gouvernements des provinces ont adopté une série de lois telles que la loi de 2021 du Baloutchistan sur le paiement des salaires, la loi de 2021 du Baloutchistan sur le salaire minimum, loi de 2019 du Pendjab sur le salaire minimum, loi de 2015 du Sindh sur le salaire minimum, et la loi de 2015 du Sindh sur le paiement des salaires, qui interdisent la discrimination en matière de rémunération pour divers motifs, notamment, mais pas exclusivement, la religion, la caste, l’origine ethnique, la couleur, la croyance et la secte. La commission accueille favorablement l’adoption de ces lois, qui constituent un progrès dans l’application de la convention. Elle note toutefois que les lois des provinces n’incluent pas tous les motifs de discrimination interdits énoncés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention, puisqu’elles omettent notamment les motifs d’ascendance nationale et d’origine sociale. La commission note également que les lois nouvellement adoptées ne semblent pas s’appliquer à tous les aspects de l’emploi, à savoir l’accès à l’enseignement et à la formation professionnels, l’accès à l’emploi et aux différentes professions, ainsi que les conditions d’emploi, comme le prévoit l’article 1, paragraphe 3, de la convention. La commission réaffirme qu’une définition claire et complète de ce qui constitue une discrimination dans l’emploi et la profession permet d’identifier et de traiter les nombreuses situations dans lesquelles des discriminations peuvent se produire et d’y remédier (voir l’Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 743). Rappelant qu’elle avait noté dans sa précédente observation que l’opinion politique n’avait pas été incluse, en 2013, comme motif de discrimination interdit par le gouvernement de la province de Khyber Pakhtunkhwa, la commission note que, en réponse, le gouvernement souligne que l’«affiliation à un parti politique» figure dans les lois adoptées dans les provinces de Khyber Pakhtunkhwa et du Sindh. La commission note que la protection contre la discrimination fondée sur l’opinion politique est plus large que la protection contre la discrimination fondée sur l’«affiliation à un parti politique» (voir l’Étude d’ensemble de 2012, paragr. 805). La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer, notamment par le biais de la Commission tripartite de consultation établie au niveau fédéral, que toutes les lois sur le travail adoptées par les provinces comprennent des dispositions définissant et interdisant expressément la discrimination directe et indirecte, dans tous les aspects de l’emploi et de la profession, y compris au stade du recrutement, et couvrant tous les travailleurs et fondées, au minimum, sur tous les motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention, y compris sur l’opinion politique. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur toute évolution législative à cet égard.
Article 1, paragraphe 1 a). Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission note, d’après le rapport du gouvernement, que les cinq provinces pakistanaises disposent de lois contre le harcèlement des femmes sur le lieu de travail. Elle note en outre que la loi de 2010 sur la protection contre le harcèlement des femmes sur le lieu de travail, qui couvre le territoire métropolitain d’Islamabad et les provinces de Khyber Pakhtunkhwa et du Sindh, exige de toutes les organisations publiques et privées qu’elles adoptent un code de conduite interne et qu’elles constituent un comité chargé d’examiner les plaintes pour harcèlement. La commission note avec intérêt la promulgation de la loi de 2016 du Baloutchistan sur la protection des femmes contre le harcèlement sur le lieu de travail, qui couvre toutes les formes de harcèlement sexuel (quid pro quo et environnement de travail hostile) commises non seulement par une personne détentrice d’autorité, mais aussi par un collègue et une personne ou un groupe de personnes avec lesquels les travailleuses ont des contacts par leur travail. La commission note également que, dans son rapport, le gouvernement indique que le Secrétariat du médiateur fédéral pour la protection contre le harcèlement des femmes sur le lieu de travail a reçu 441 plaintes, et que les médiateurs des provinces du Pendjab et du Sindh pour la protection contre le harcèlement des femmes sur le lieu de travail ont reçu respectivement 98 et 350 plaintes. Elle note toutefois que la période au cours de laquelle ces plaintes ont été déposées reste floue. La commission accueille favorablement les informations fournies par le gouvernement concernant les activités organisées par le médiateur fédéral et les médiateurs des provinces (Pendjab et Sindh) pour prévenir et lutter contre le harcèlement sexuel, notamment les activités de sensibilisation auprès des employeurs, des travailleurs ainsi que des représentants de la société civile. La commission prie le gouvernement d’envisager d’étendre aux hommes l’application de la loi de 2010 sur la protection des femmes contre le harcèlement sur le lieu de travail, de la loi de 2012 du Pendjab sur la protection des femmes contre le harcèlement sur le lieu de travail, de la loi de 2016 du Baloutchistan sur la protection des femmes contre la harcèlement sur le lieu de travail, et de toute autre législation pertinente adoptée par les autres provinces afin de protéger les hommes contre le harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession sur un pied d’égalité avec les femmes. Elle prie en outre le gouvernement de prendre des mesures pour former les inspecteurs du travail et les juges à la question du harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession et de sensibiliser les travailleurs et les employeurs et leurs organisations respectives ainsi que le public aux lois sur le harcèlement sexuel. Enfin, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur: i) a mise en œuvre de ces lois dans la pratique, en particulier sur l’établissement par les organisations publiques et privées de codes de conduite internes et de comités chargés d’examiner les plaintes pour harcèlement; et ii) le nombre et l’issue (sanctions imposées et réparations accordées) des plaintes déposées pour harcèlement sexuel.
Personnes transgenres et intersexes. La commission note avec intérêt l’adoption de la loi sur les personnes transgenres (protection des droits) (loi no XIII de 2018), qui reconnaît le droit des personnes de choisir leur identité de genre et interdit notamment la discrimination et le harcèlement à l’égard des personnes transgenres et intersexes fondés sur le sexe, l’identité de genre et l’expression de genre, en ce qui concerne l’éducation, l’emploi, le commerce et la profession, y compris le licenciement. La commission prie le gouvernement de prendre des mesures visant à faire connaître la loi sur la protection des droits des personnes transgenres (loi no XIII de 2018) aux travailleurs, aux employeurs et à leurs organisations respectives ainsi qu’aux autorités chargées de contrôle de l’application de la loi, et de fournir des informations sur sa mise en œuvre dans la pratique, notamment sur tous les cas de discrimination fondée sur l’identité de genre examinés par les inspecteurs du travail ou les tribunaux.
Discrimination fondée sur l’origine sociale. La commission rappelle son observation dans laquelle elle exprimait sa préoccupation face à la persistance de la ségrégation et de la discrimination qui s’exercent de facto à l’égard des Dalits. La commission note que le gouvernement indique qu’il ne constate aucune discrimination entre les individus fondée sur leur appartenance à une caste particulière. Le gouvernement indique en outre que les lois que les provinces ont récemment adoptées, notamment la loi de 2015 du Sindh sur le paiement des salaires, la loi de 2019 du Pendjab sur le salaire minimum, la loi de 2021 du Baloutchistan sur le paiement des salaires, interdisent la discrimination fondée sur la caste. La commission rappelle au gouvernement qu’il est nécessaire d’adopter des mesures volontaristes visant à analyser et à réglementer la situation des divers groupes sur le marché du travail, en collaboration avec les organisations de travailleurs et d’employeurs, et à améliorer les connaissances des minorités ethniques et nationales sur la législation sur la non-discrimination et l’égalité, et sur les mécanismes et procédures d’application (voir l’Étude d’ensemble de 2012, paragr. 775). À cet égard, la commission note que, dans ses observations finales, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) a recommandé que les mesures voulues pour mettre un terme à la discrimination contre les dalits, en particulier en matière d’accès à l’emploi, soient prises (CERD/C/PAK/CO/21-23, 3 octobre 2016, paragr. 32). La commission prie instamment le gouvernement d’adopter les mesures nécessaires, aux niveaux fédéral et provincial, pour faire respecter l’interdiction de la discrimination fondée sur la caste à l’égard des dalits, et l’éliminer, et pour promouvoir leur inclusion sur le marché du travail et leur accès à un plus large éventail d’emplois. Elle prie également le gouvernement de fournir des statistiques ventilées par sexe sur l’emploi des dalits.
Discrimination fondée sur la religion. La commission réitère sa précédente observation où elle exprimait sa préoccupation concernant l’égalité de chances et de traitement des minorités religieuses dans l’emploi et la profession, en particulier les membres de la minorité Ahmadie. Elle rappelle l’article 260(3)(b) de la Constitution qui définit un «non-musulman» comme «une personne appartenant à la communauté chrétienne, hindoue, sikh, bouddhiste ou parsie, toute personne membre des groupes Quadiani et Lahori qui se réclame du mouvement «Ahmadi» ou autre, toute personne appartenant à la communauté bahaïe et à toute caste répertoriée». La commission rappelle également l’article 298C du Code pénal («lois sur le blasphème») qui vise les membres de la minorité Ahmadie, ainsi que la pratique qui a pour effet d’empêcher la minorité ahmadie d’obtenir un passeport les identifiant en tant que musulmans. La commission note que ces dispositions ont une incidence sur les possibilités d’emploi des minorités religieuses et qu’elles sont en contradiction avec les lois sur le travail adoptées par les provinces pakistanaises au cours de la dernière décennie, telles que la loi de 2021 du Baloutchistan sur le paiement des salaires, la loi de 2013 de Khyber Pakhtunkhwa sur le paiement des salaires, et la loi de 2015 du Sindh sur le paiement des salaires, qui incluent la «religion» comme motif de nondiscrimination. La commission note avec regretque le rapport du gouvernement ne contient aucune information concernant les mesures prises ou envisagées pour revoir les dispositions législatives et les mesures administratives discriminatoires. Elle note que, dans une déclaration conjointe, des experts des droits de l’homme des Nations Unies ont exprimé leur profonde inquiétude face au manque d’attention portée aux graves violations des droits de l’homme perpétrées contre la communauté musulmane Ahmadiyya dans le monde, y compris au Pakistan. Ils ont exhorté tous les États, entre autres, à: 1) abroger toutes les lois discriminatoires à l’égard des musulmans ahmadis; 2) assurer une participation égale et effective des ahmadis à la vie publique et aux processus décisionnels qui les concernent, notamment en garantissant leur accès à l’emploi; 3) s’attaquer aux formes multiples et croisées de violence et de discrimination dont sont victimes les femmes ahmadies; et 4) éliminer la discrimination et l’exclusion des enfants ahmadis en matière d’éducation et de formation professionnelle (voir procédures spéciales, communiqué de presse du 13 juillet 2021). La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour modifier les dispositions juridiques et mesures administratives discriminatoires, et de promouvoir activement le respect et la tolérance à l’égard des minorités religieuses, y compris les Ahmadis, et de fournir des informations sur tout progrès accompli à cet égard. La commission prie une nouvelle fois le gouvernement de fournir des informations sur l’accès à l’emploi des minorités religieuses, y compris celles définies à l’article 260(3)(b) de la Constitution. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur toute autre mesure prise ou envisagée pour promouvoir la tolérance et l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession pour les minorités religieuses.
Article 2. Égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission note que, selon les principales conclusions de l’enquête sur la maind’œuvre 2020-21, la participation des femmes au marché du travail pakistanais reste faible, soit 21,4 pour cent de la main-d’œuvre totale, dont 28 pour cent travaillent dans les zones rurales. La commission accueille favorablement l’adoption de la loi de 2018 du Sindh sur les travailleurs à domicile, de la loi de 2021 du Khyber Pakhtunkhwa sur les travailleurs à domicile (bien-être et protection) et les avancées législatives du projet de loi de 2021 du Baloutchistan sur les travailleurs à domicile et du projet de loi de 2021 du territoire métropolitain d’Islamabad sur les travailleurs domestiques, qui donnent aux travailleurs domestiques l’accès aux droits au travail. La commission note en outre que, dans ses observations finales, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) s’est dit préoccupé par: 1) «la persistance de stéréotypes discriminatoires quant aux rôles et responsabilités respectifs des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, exacerbés par les divisions religieuses dans l’État partie, qui entretiennent la subordination des femmes aux hommes»; et 2) «la persistance de stéréotypes discriminatoires à l’égard des femmes et des filles membres de minorités ethniques, en particulier les femmes et filles ahmadies, chrétiennes, dalits, hindoues, roms, sheedis et sikhs, et celles qui sont membres d’une caste répertoriée, qui sont parfois victimes d’enlèvement et de conversion forcée». Le CEDAW s’est également déclaré préoccupé par: 1) le très faible taux d’activité des femmes; 2) la forte concentration de femmes dans les secteurs non structurés de l’économie, en particulier l’agriculture, où elles ne sont pas protégées par le droit du travail, comme les normes relatives au salaire minimum, au paiement des heures supplémentaires et au congé de maternité, et ne bénéficient pas des programmes de sécurité sociale; 3) l’absence de données fiables sur le nombre de femmes ayant un emploi, y compris les travailleuses à domicile, les employées de maison, les travailleuses qui s’occupent de proches sans être rémunérées, les femmes handicapées et les réfugiées; 4) le très faible niveau de représentation des femmes parmi les cadres moyens et supérieurs en 2018 (4,2 pour cent); et 5) le très faible pourcentage de femmes parmi les entrepreneurs (estimé à 1 pour cent) (CEDAW/C/PAK/CO/5, 10 mars 2020, paragr. 29, 41 et 47(a)). Compte tenu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement de prendre des mesures volontaristes pour: i) promouvoir l’accès des femmes à l’emploi et à un large éventail d’emplois, et remédier à leur faible participation au marché du travail; et ii) lutter contre la discrimination à l’égard des femmes, y compris celles appartenant à des groupes ethniques minoritaires, et contre les stéréotypes de genre concernant leur rôle dans l’emploi et dans la société.
Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur: i) toutes les mesures à cet égard, y compris celles prises par le personnel d’inspection relevant des départements provinciaux du travail; ii) l’adoption du projet de loi de 2021 du Baloutchistan sur les travailleurs à domicile et du projet de loi de 2021 du territoire métropolitain d’Islamabad sur les travailleurs domestiques, et sur l’impact des nouvelles lois concernant les travailleurs à domicile et les travailleurs domestiques sur leur situation en matière d’emploi, en particulier l’accès à leurs droits sociaux; et iii) la participation des hommes et des femmes au marché du travail et à l’économie informelle, si possible ventilée par secteur et catégorie professionnelle.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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