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Demande directe (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Convention (n° 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 - Canada (Ratification: 2017)

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Demande directe
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La commission prend note des informations supplémentaires fournies par le gouvernement au vu de la décision adoptée par le Conseil d’administration à sa 338e session (juin 2020). Elle prend également note des observations du Congrès du travail du Canada (CLC), reçues les 31 août 2019 et 30 septembre 2020, sur des questions examinées dans la présente demande. La commission a procédé à l’examen de l’application de la convention sur la base des informations supplémentaires reçues du gouvernement et du CLC (voir mesures sociales et économiques prises pour faire face à la pandémie de COVID 19, champ couvert par la convention et articles 4 à 6 de la convention), ainsi que sur la base des informations dont elle disposait en 2019.
Mesures sociales et économiques prises pour faire face à la pandémie de COVID 19. La commission note que le CLC a indiqué que la pandémie de COVID 19 touche de manière disproportionnée les travailleurs à faible revenu et les groupes marginalisés, et a rappelé l’importance des droits en matière de liberté syndicale et de négociation collective. Le CLC dénonce le fait que, face à la pandémie, certains gouvernements provinciaux ont adopté des textes législatifs qui suspendent les droits de négociation collective. En Ontario, l’adoption de Bill-195: The Reopening Ontario (A Flexible Response to COVID-19) Act, 2020 a conduit à la suspension des dispositions des conventions collectives relatives au temps de travail, aux vacances, aux congés et au licenciement, portant atteinte aux droits acquis de certaines catégories de travailleurs essentiels, en particulier ceux du secteur de la santé. En outre, le CLC dénonce le fait que ladite loi permet au gouvernement provincial de maintenir et de modifier les décrets d’urgence pris en vertu de la loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence pendant au moins une année après la fin de la situation d’urgence déclarée et qu’il supprime le mécanisme de responsabilité démocratique. Sur ce dernier point, la commission note que le gouvernement déclare que: i) la loi susmentionnée a été adoptée dans le cadre du plan provincial de réponse aux effets de la pandémie de COVID 19 qui donne à l’Ontario la flexibilité nécessaire pour assurer la fourniture des services et protéger la santé et la sécurité de sa population; ii) cette loi impose au Premier ministre de l’Ontario de faire rapport sur toute modification ou prorogation des décrets dans les 120 jours suivant l’entrée en vigueur de ladite loi; iii) le gouvernement de l’Ontario ne maintient que les pouvoirs et mesures nécessaires pour continuer à protéger la sécurité et la santé de sa population et les décrets, dès qu’ils ne sont plus nécessaires, ne seront pas renouvelés ou seront modifiés en conséquence, à partir des conseils d’experts en santé publique.
La commission a bien conscience des circonstances exceptionnelles que le pays connaît du fait de la pandémie de COVID 19 et de la nécessité absolue que constitue l’adoption de mesures d’urgence pour protéger la santé de la population. Elle rappelle que les mesures de fixation unilatérale des conditions de travail qui ne tiennent pas compte des conventions collectives en vigueur devraient avoir un caractère exceptionnel, être limitées dans le temps et comporter des garanties pour les travailleurs les plus touchés. Elle souligne également que la recommandation (no 205) sur l’emploi et le travail décent pour la paix et la résilience, 2017, met l’accent sur l’importance du dialogue social de manière générale et concernant la négociation collective en particulier face aux situations de crise, en encourageant la participation active des organisations d’employeurs et de travailleurs à la planification, à la mise en œuvre et au suivi des mesures en faveur du redressement et de la résilience. La commission encourage donc le gouvernement à entamer le dialogue avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives des secteurs concernés en vue de limiter les effets et la durée des mesures susmentionnées et de garantir la pleine utilisation de la négociation collective en tant que moyen de parvenir à des solutions équilibrées et durables en temps de crise. La commission prie le gouvernement de donner des informations à ce sujet.
Champ couvert par la convention. Catégories de travailleurs non couvertes par les législations du travail des provinces. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle plusieurs catégories de travailleurs n’entrent pas dans le champ d’application des législations du travail des provinces. La commission note également la déclaration du gouvernement selon laquelle, bien qu’étant ainsi exclues du régime général des relations de travail, ces catégories peuvent exercer, à des degrés divers, certains droits collectifs.
  • -Professions libérales. Architectes, dentistes, géomètres, juristes, ingénieurs, médecins. La commission note que les législations du travail des provinces suivantes: Alberta, Ontario, Nouvelle-Ecosse, Île-du-Prince-Édouard et Saskatchewan excluent les catégories susmentionnées de travailleurs de leur champ d’application. Elle note aussi l’indication du gouvernement selon laquelle, bien que ces catégories de travailleurs soient exclues du champ d’application des législations du travail, rien ne les empêche de présenter collectivement des revendications à leurs employeurs ou de négocier collectivement hors du cadre statutaire. Le gouvernement ajoute que, selon le droit canadien, les employeurs ont une obligation de bonne foi dans les consultations concernant les conditions de travail ou d’emploi et que les commissions des relations du travail peuvent exiger l’inclusion de leurs membres (ou leurs membres en cours de formation) dans une unité de négociation si une majorité le souhaite. Par exemple, l’Ontario Medical Association et Doctors Nova Scotia négocient au nom des médecins et médecins internes des provinces correspondantes, et les avocats de la Saskatchewan Legal Aid Commission sont syndiqués et peuvent négocier collectivement. La commission note que, dans ses informations supplémentaires, le gouvernement signale qu’en Alberta: i) la Public Service Employee Relation Act (PSERA) n’exclut pas totalement les professions libérales (comme les médecins, dentistes, architectes et ingénieurs) des dispositions de la législation et qu’en vertu de l’article 13(2) de cette loi, la Commission des relations de travail peut enjoindre ces professionnels à devenir membres d’une unité de négociation si une majorité le souhaite; ii) un examen de la loi sur l’enseignement post-secondaire a conduit à l’inclusion de cinq professions (médecin, dentiste, architecte, ingénieur et juriste) dans les unités de négociation du corps enseignant, conformément à l’article 58.1(4) du Code des relations de travail (CRT); iii) certaines catégories de professionnels, tels les architectes, peuvent également être couverts par les dispositions de la loi sur l’enregistrement des professions, qui établit les moyens dont disposent les associations professionnelles de la province pour conduire leurs affaires et régit la conduite de leurs membres. La commission note également que le gouvernement indique que les législations du travail actuelles, qui tirent leurs origines de contextes industriels, ne sont pas toujours adaptées à des contextes non industriels, tels que les résidences privées et les bureaux professionnels.
  • -Travailleurs domestiques. La commission note que les travailleurs domestiques employés au domicile de particuliers sont exclus du champ d’application de la législation du travail dans les provinces suivantes: Alberta, Ontario, Nouveau-Brunswick et Saskatchewan. La commission note que: i) au Nouveau-Brunswick, le gouvernement, conscient des effets négatifs de l’exclusion de ces travailleurs du champ couvert par la loi sur les relations du travail, a tenu des consultations en septembre 2016 en vue éventuellement de modifier la législation du travail, et il procède actuellement à un examen technique de la convention (no 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011; ii) au Saskatchewan, les travailleurs domestiques se heurtent à des limitations pratiques quant à l’exercice effectif de leurs droits, en raison de la définition d’«employeur» contenue dans la loi du Saskatchewan sur l’emploi selon laquelle l’employeur est celui qui emploie «trois salariés ou plus»; iii) selon les conseillers spéciaux en charge du rapport final «Changing Workplaces Review» (CWR) commandé par le ministère du Travail et publié en 2017, il a été suggéré au gouvernement d’étudier la possibilité de modifier la législation pour tenir compte de la situation particulière des travailleurs domestiques et notamment de leur vulnérabilité spécifique, compte tenu également de leur impossibilité, sur un plan pratique, d’accéder à la négociation collective.
  • -Travailleurs agricoles. La commission observe que, en Alberta et en Ontario, les travailleurs agricoles, qui sont exclus du champ d’application des législations du travail, sont couverts par des régimes spéciaux. En Alberta, la commission note que la loi de protection renforcée des travailleurs de l’agriculture et de l’élevage est entrée en vigueur en janvier 2018 et qu’elle confère aux travailleurs salariés de l’agriculture et de l’élevage n’ayant pas de liens familiaux avec leur employeur les mêmes droits statutaires qu’à la plupart des autres salariés de la province, s’agissant de la faculté d’être représentés par un agent à la négociation ou de négocier collectivement avec leur employeur s’ils le souhaitent. La commission prend cependant note avec regret du fait que, dans ses informations supplémentaires, le gouvernement indique qu’après des consultions à l’échelle de la province avec les acteurs du secteur agricole, la loi de 2019 sur la liberté et la sécurité dans l’agriculture rétablit, en Alberta, la dérogation au CRT pour l’agriculture et l’élevage, à compter du 1er janvier 2020. En Ontario, la loi sur la protection des salariés de l’agriculture (AEPA) prévoit le droit de ces travailleurs de constituer une association de salariés ou de s’affilier à une telle association et de faire connaître leurs revendications à leurs employeurs par cette voie. La commission observe cependant que le Comité des droits économiques et sociaux s’est déclaré préoccupé par le fait que certaines catégories de travailleurs étrangers, notamment les travailleurs migrants employés de manière temporaire ou saisonnière, sont exposées à certaines formes d’exploitation de la part des employeurs (E/C.12/CAN/CO/6). Elle observe que, selon le rapport final du CWR, l’AEPA: i) n’énonce pas le droit de négociation collective; ii) ne prévoit aucune obligation pour les parties de se rencontrer, d’engager un dialogue significatif et de fournir des efforts raisonnables pour parvenir à un accord collectif, ne prévoit pas non plus de mécanisme obligatoire de règlement en cas de conflit sur l’application des conventions collectives; et iii) la protection prévue contre les actes de discrimination antisyndicale ou les actes d’ingérence est insuffisante.
  • -Travailleurs indépendants. La commission note que la législation du travail des provinces suivantes: Alberta, Ontario, Colombie-Britannique, Terre Neuve-et-Labrador exclut implicitement ou explicitement les travailleurs indépendants de son champ d’application. Elle note que, selon le CLC, la législation du travail n’est pas adaptée aux établissements ne comptant qu’un très petit nombre de salariés ni aux formes atypiques d’emploi. Elle souligne également que dans tout le Canada des voix se sont fait entendre pour que les travailleurs de l’économie des plateformes numériques soient reconnus comme des salariés et non comme des travailleurs indépendants.
En ce qui concerne les différentes catégories mentionnées ci-dessus, la commission prend dûment note que le gouvernement déclare que, bien qu’étant exclus du champ d’application des législations du travail des provinces, les travailleurs en question peuvent exercer, à des degrés divers, certains droits collectifs. À cet égard, la commission convient que l’application de la convention ne requiert pas nécessairement que les catégories de travailleurs mentionnées ci-dessus soient incluses dans le régime général des relations du travail dès lors que les intéressés peuvent, dans la pratique, exercer des droits qui sont reconnus par la convention à travers, par exemple, des régimes spécifiques. Dans le même temps, la commission note que certains partenaires sociaux ont signalé à son attention des obstacles spécifiques auxquels ces catégories se heurtent dans l’exercice de leurs droits collectifs, en particulier le défaut d’accès à des procédures significatives de négociation collective. Soulignant que, selon la convention, tous les travailleurs, à la seule exception, éventuellement, des membres des forces armées et de la police ainsi que des fonctionnaires commis à l’administration de l’État, doivent jouir d’une protection adéquate contre tous actes de discrimination antisyndicale ou d’ingérence et doivent avoir accès à des moyens efficaces de négociation collective, la commission prie le gouvernement de préciser de quelle manière les différentes catégories de travailleurs dont il est question ci-dessus peuvent exercer effectivement les droits consacrés par la convention. À cet égard, elle le prie de communiquer, pour chaque catégorie, des informations sur le nombre des conventions collectives conclues et le nombre des travailleurs ainsi couverts. Eu égard aux conditions particulières de travail et d’emploi de ces catégories, la commission encourage le gouvernement à étudier, en pleine consultation avec les partenaires sociaux concernés, des mesures adaptées, au besoin, de caractère législatif, qui soient propres à assurer que les catégories en question ont effectivement accès aux droits consacrés par la convention. Elle prie le gouvernement de donner des informations sur les mesures prises à cet égard.
Articles 1 et 2 de la convention. Protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale et les actes d’ingérence. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle: i) toutes les législations du travail du Canada prévoient que les employeurs (et leurs représentants) ne peuvent refuser d’employer ni ne peuvent licencier, menacer ou sanctionner une personne dans le cadre de son emploi en raison de son activité syndicale; ii) il est interdit aux employeurs d’imposer des clauses ou des conditions d’emploi qui restreindraient de fait le droit des travailleurs de s’affilier à un syndicat ou de conserver cette affiliation; iii) toutes les législations du travail du Canada prévoient que les employeurs (ou ceux qui agissent en leur nom) ne peuvent participer ou interférer dans la formation ou l’administration d’un syndicat ou soutenir financièrement celui-ci; iv) nonobstant, les employeurs sont libres d’exprimer leur opinion personnelle sur un syndicat dès lors qu’ils n’usent pas de coercition, d’intimidation ou d’une influence indue; v) de même, dans la plupart des juridictions, il est expressément interdit aux syndicats et à leurs représentants de participer ou d’intervenir dans la formation ou l’administration d’organisations d’employeurs; vi) les pratiques déloyales tombent sous le coup d’une interdiction aussi bien durant le processus d’accréditation d’un syndicat que durant la négociation d’une convention collective; et vii) les pratiques déloyales et les actes d’ingérence peuvent donner lieu à des actions devant les juridictions compétentes en matière de travail. La commission prend dûment note du fait que l’administration des relations du travail et leurs voies d’exécution sont du ressort d’organes quasi judiciaires indépendants et impartiaux. La commission prie le gouvernement de donner de plus amples informations quant au régime applicable aux fonctionnaires non commis à l’administration de l’État aux niveaux fédéral et provincial, notamment sur les dispositions instaurant une protection contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence et elle le prie de préciser la commission de travail ou le tribunal administratif compétent pour l’administration et l’application des règles en matière de relations du travail à l’égard de ces travailleurs. Elle le prie également de donner des informations sur les plaintes pour discrimination antisyndicale ou ingérence, dans le secteur public comme dans le secteur privé (aux niveaux fédéral et provincial), dont les diverses instances compétentes ont pu être saisies, la durée moyenne des procédures correspondantes et leur issue, de même que sur les réparations et les sanctions ordonnées par suite.
La commission prend note des préoccupations exprimées par le CLC à propos de récents changements adoptés en matière d’accréditation des syndicats en Alberta, en Ontario et au Manitoba (Bill C 2: An act to make Alberta open for business et Bill C 47: Making Ontario open for business Act et Bill C 7: Labour relations Amendment), question abordée par la commission dans le contexte de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Elle note que le CLC allègue que les changements en question pourraient avoir comme effet négatif de rendre largement possible les actes d’ingérence de l’employeur et d’introduire un déséquilibre dans les rapports entre les organisations de travailleurs et les employeurs. Compte tenu des préoccupations exprimées par le CLC, la commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les risques d’ingérence qui résulteraient des récents changements apportés dans l’accréditation des syndicats en Alberta, en Ontario et au Manitoba.
Article 4. Promotion de la négociation collective. Questions d’ordre législatif. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, bien qu’il n’existe pas de loi régissant de manière uniforme dans tout le Canada le droit de négociation collective, il existe un certain nombre d’aspects et de principes clés qui apparaissent systématiquement dans tous les régimes légaux de relations du travail de ce pays: i) la Cour suprême du Canada reconnaît le droit de négocier collectivement en tant que droit protégé par l’article 2(d) de la Charte canadienne des droits et libertés; ii) des droits de négociation collective exclusifs peuvent être conférés à un syndicat qui a obtenu un soutien majoritaire des salariés d’une unité de négociation (accréditation); iii) un soutien majoritaire est attesté soit par les cartes de membres signées, soit par un scrutin secret sur la représentation; iv) dès lors qu’un syndicat est accrédité, le syndicat et l’employeur ont une obligation de négocier de bonne foi et de faire tout ce qui est raisonnablement en leur pouvoir pour parvenir à un accord collectif sur les termes et conditions d’emploi; v) les arrêts de travail sont interdits tant qu’une convention collective est en vigueur; vi) tous les accords portant sur l’interprétation ou l’administration d’une convention collective doivent être soumis à un arbitrage qui sera contraignant; vii) si l’employeur et le syndicat se trouvent dans une impasse au cours du processus de négociation collective, divers mécanismes ont été prévus pour les aider à résoudre leurs différends et conclure une convention collective, comme la médiation, la conciliation et/ou l’arbitrage volontaire des intérêts; et viii) dans plusieurs juridictions, il est possible de demander l’arbitrage de la première convention collective et les parties peuvent solliciter l’assistance du conseil du travail compétent.
La commission note que, selon le CLC, si le modèle de négociation actuel (le modèle loi Wagner) reste pertinent pour les travailleurs exerçant leur activité sur des lieux de travail importants, à site unique, pratiquant des horaires traditionnels et devrait donc rester d’application dans ces branches et secteurs, il n’est pas adapté aux lieux de travail comptant un petit nombre de salariés et recourant aux formes atypiques d’emploi (avec des taux élevés de travail à temps partiel, de travail temporaire, de travail saisonnier, de travail autonome ou d’emploi contractuel). La commission note également que, dans ses observations de 2020, le CLC souligne que, ces dernières années, les travailleurs de l’économie des plateformes numériques en Ontario ont saisi la justice afin d’être reconnus comme des salariés et non comme des indépendants contractuels, afin de pouvoir exercer leurs droits en matière de liberté syndicale et de négociation collective: i) en février 2020, la Commission des relations de travail de l’Ontario a statué que les livreurs de repas à domicile étaient des entrepreneurs dépendants et déclaré en conséquence qu’ils bénéficiaient du droit d’organisation et de négociation collective; ii) le 26 juin 2020, la Cour suprême du Canada a statué contre une plateforme de transport de personnes et de livraison de repas, ce qui pourrait ouvrir la voie à la reconnaissance des droits de ces travailleurs en matière de liberté syndicale et de négociation collective. La commission note que, dans ses observations, le CLC incite le gouvernement à explorer toute une série de formules qui pourraient procurer à ces travailleurs précaires, dont beaucoup peuvent être de récents immigrés, des femmes ou des membres de minorités ethniques, la possibilité de se syndiquer et d’accéder aux avantages et aux protections liés à la syndicalisation. La commission note en outre que dans le rapport final du CWR les Conseillers spéciaux signalent que le modèle actuel découlant de la loi Wagner d’accréditation auprès d’un seul employeur et d’une seule entreprise n’assure pas un accès effectif à la négociation collective pour un grand nombre de salariés et donc qu’il serait nécessaire de procurer aux salariés vulnérables de certains secteurs de l’économie un tel accès à la négociation collective. Observant que dans toutes les juridictions, un syndicat ne peut être accrédité en tant qu’agent de négociation (sauf s’il y a la reconnaissance volontaire de l’employeur ou sauf instruction directe venant du conseil du travail) que s’il recueille le soutien d’une majorité dans l’unité de négociation (50 pour cent plus un), la commission attire l’attention du gouvernement sur le fait qu’un tel système peut poser des problèmes de compatibilité avec la convention puisqu’il signifie qu’un syndicat représentatif qui ne recueillerait pas une majorité absolue pourrait ainsi ne pas avoir la possibilité de négocier (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphe 234). Compte tenu de la volonté, manifestée par diverses parties prenantes, d’explorer diverses solutions afin d’adapter le modèle actuel de négociation collective aux formes atypiques d’emploi, ainsi que de l’évolution récente de la jurisprudence à ce propos, la commission invite le gouvernement à rechercher, en concertation avec toutes les parties prenantes intéressées, des formules appropriées et consensuelles de nature à garantir, en droit et dans la pratique, le droit à la négociation collective à tous les travailleurs couverts par la convention, en accordant une attention particulière aux catégories de travailleurs les plus vulnérables mentionnées dans le présent commentaire.
Articles 4 à 6 de la convention. Limitations du contenu des conventions collectives applicables à des fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’État. Le CLC dénonce que, depuis la ratification de la convention, les gouvernements des provinces de l’Alberta, du Manitoba et de Nouvelle-Ecosse ont adopté des instruments législatifs qui visent à restreindre unilatéralement ou à modifier le contenu relatif aux salaires et aux traitements dans les conventions collectives (Bill C 9: Public sector arbitration deferral Act; Bill C 28: The public services sustainability Act; Bill C 75: Teachers professional agreement and classroom improvement Act et Bill C 148: Public service sustainability Act). Le CLC signale également qu’en juin 2018, la Cour supérieure de Québec a considéré que l’article 113(b) de la loi fédérale sur les relations dans le secteur public, qui restreint la négociation collective en ce qui concerne les pensions et les dotations en personnel et attribue un pouvoir discrétionnaire unilatéral au gouvernement, viole la liberté syndicale garantie par la Charte canadienne des droits et libertés; le ministère public a fait appel contre cet arrêt et la décision est attendue. S’agissant du projet de loi Bill C-28 au Manitoba, la commission note que, dans ses observations de 2020, le CLC indique que la Cour du banc de la Reine a statué que ce texte de loi contrevenait aux droits en matière de liberté syndicale et de négociation collective des employés du secteur public au Manitoba et que la province avait interjeté appel. La commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires sur cette question et de faire part de l’issue de la procédure judiciaire.
Législation sur le retour au travail. La commission prend également note des observations du CLC relatives à l’application de la législation sur le retour au travail, question que la présente commission aborde essentiellement dans le cadre de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. La commission note cependant que certaines allégations visant cette législation sur le retour au travail visent aussi des limitations à la négociation collective et l’imposition d’un arbitrage obligatoire. À cet égard, la commission tient à rappeler que l’arbitrage obligatoire n’est en général pas compatible avec la promotion de négociations collectives libres et volontaires telles qu’envisagées à l’article 4 de la convention et que, par conséquent, l’arbitrage obligatoire dans le contexte de la négociation collective n’est acceptable que dans le cas de fonctionnaires qui sont commis à l’administration de l’État (article 6 de la convention), de services essentiels au sens strict du terme (ceux dont l’interruption mettrait en péril la vie, la sécurité des personnes ou la santé pour toute ou partie de la population) et en cas de crise nationale aiguë. La commission exprime l’espoir que le gouvernement s’abstiendra à l’avenir d’adopter des lois spéciales de retour au travail et d’imposer une procédure d’arbitrage obligatoire dans des situations autres que celles mentionnées ci-dessus.
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