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Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Cameroun (Ratification: 1960)

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La commission prend note des observations sur l’application de la convention dans la pratique soumises par la Confédération syndicale internationale (CSI) en date du 16 septembre 2020, qui contiennent des allégations de favoritisme des autorités à l’égard d’organisations non-représentatives. La commission prie le gouvernement de faire part de ses commentaires à ce sujet. La commission prend aussi note des observations de l’Union générale des travailleurs du Cameroun (UGTC) reçues le 5 novembre 2020 qui ont trait à des questions examinées dans le cadre du présent commentaire.
La commission prend note des informations générales fournies par le gouvernement en réponse aux observations de la Fédération internationale des ouvriers du transport (FIT) qui concernaient notamment la répression par les forces de l’ordre d’un mouvement de grève des dockers du port de Douala en juin 2018 et les nombreuses arrestations arbitraires qui s’en étaient suivies. La commission note que le gouvernement déclare que la police est intervenue en raison d’actes de violences à l’encontre des dockers non-grévistes et d’atteintes à l’ordre public. À cet égard, la commission souhaite rappeler que les autorités ne devraient recourir à la force publique en cas de grève que dans des circonstances exceptionnelles et des situations graves où l’ordre public est gravement menacé, et qu’un tel recours à la force doit être proportionnel à la situation (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphe 149).
La commission note avec regret que le gouvernement n’a toujours pas fourni d’informations en réponse aux observations de la CSI en date du 1er septembre 2016, concernant des violences policières répétées à l’encontre de grévistes (dans le secteur de la construction), ainsi que des cas d’ingérence des autorités dans les élections syndicales (dans les secteurs de l’agriculture, de la construction et de la santé), de vandalisme contre les locaux d’un syndicat et de harcèlement syndical (secteur bancaire). La commission prie instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’ensemble de ces questions.
Dans ses précédents commentaires portant sur le défaut d’enregistrement de huit organisations syndicales des agents publics de l’éducation faisant suite aux observations de l’Internationale de l’éducation (IE) de 2016, la commission avait noté que selon le gouvernement cette situation était liée à la vacance du poste de greffier des syndicats. Le gouvernement indique maintenant que, si un greffier des syndicats a bien été nommé par décret en février 2015, le processus de délivrance des certificats d’enregistrement a été suspendu dans le but «d’assainir le fichier syndical», cette opération ayant permis au gouvernement d’avoir une meilleure lisibilité du paysage syndical par secteur et par branche d’activités. Rappelant que le droit de constituer des organisations syndicales doit être garanti sans autorisation préalable et que toute procédure d’enregistrement doit se limiter à une simple formalité, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer l’enregistrement des organisations concernées des agents publics de l’éducation.
Article 3 de la convention. Loi portant répression des actes de terrorisme. Faisant référence à ses précédents commentaires relatifs à la loi portant répression des actes de terrorisme (no 2014/028 du 23 décembre 2014), la commission souhaite une nouvelle fois attirer l’attention du gouvernement sur la formulation de l’article 2 (1), selon lequel «est puni de la peine de mort, celui qui […] commet tout acte ou menace susceptible de causer la mort, de mettre en danger l’intégrité physique, d’occasionner des dommages corporels ou matériels, des dommages aux ressources naturelles, à l’environnement ou au patrimoine culturel dans l’intention: (a) d’intimider la population, de provoquer une situation de terreur ou de contraindre la victime, le gouvernement et/ou une organisation nationale ou internationale, à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque, à adopter ou à renoncer à une position particulière ou à agir selon certains principes; (b) de perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation de services essentiels aux populations ou de créer une situation de crise au sein des populations […]». La commission réitère sa profonde préoccupation du fait que certaines de ces situations pourraient concerner des actes liés à l’exercice légitime d’activités par les représentants d’organisations syndicales ou d’employeurs en vertu de la convention. La commission se réfère notamment aux actions de protestation ou à des grèves qui auraient des répercussions directes sur les services publics. La commission rappelle par ailleurs que, compte tenu de la peine encourue, une telle disposition peut avoir un caractère particulièrement intimidant à l’égard de représentants syndicaux ou patronaux s’exprimant ou agissant dans le cadre de leurs mandats. Tout en notant que le gouvernement réitère que toute entreprise qui n’est pas de nature à assumer les missions légales dévolues aux syndicats et qui a pour finalité de semer la peur, l’intimidation, la violence ou qui se caractérise par l’usage des armes peut ne pas être rattachée à l’activité syndicale et comme telle, peut être requalifiée par les juridictions compétentes, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 2 de la loi portant répression des actes de terrorisme pour assurer qu’il ne s’applique pas aux activités légitimes des organisations de travailleurs et d’employeurs, protégées par la convention. Entre-temps, la commission prie instamment le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises afin de garantir: i) que la mise en œuvre de cette loi n’a pas pour conséquence de porter préjudice à des dirigeants et membres s’exprimant dans le cadre de leurs mandats et exerçant des activités syndicales ou patronales en vertu de l’article 3 de la convention; et ii) que la loi est appliquée de telle sorte qu’elle n’est pas perçue comme une menace ou une intimidation destinée à des syndicalistes ou au mouvement syndical dans son ensemble.
Articles 2 et 5. Réforme législative. La commission rappelle depuis plusieurs années la nécessité: i) de modifier la loi no 68/LF/19 du 18 novembre 1968 (qui soumet l’existence juridique d’un syndicat ou d’une association professionnelle de fonctionnaires à l’agrément préalable du ministre en charge de l’administration territoriale); ii) de modifier les articles 6(2) et 166 du Code du travail (portant sur la sanction de promoteurs d’un syndicat non encore enregistré qui se comporteraient comme si le syndicat avait été enregistré); et iii) d’abroger l’article 19 du décret n° 69/DF/7 du 6 janvier 1969 (qui prévoit l’autorisation préalable pour l’affiliation des syndicats de fonctionnaires publics à une organisation internationale). Notant une nouvelle fois avec un profond regret que, d’après les informations fournies par le gouvernement, le processus de révision du Code du travail n’a toujours pas été achevé, la commission se voit, une fois encore, obligée d’exhorter le gouvernement à achever le processus de révision législative, sans délai supplémentaire, de manière à donner pleinement effet aux dispositions de la convention sur les points qu’elle rappelle ci-dessus. La commission veut croire que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2021.]
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