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Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Koweït (Ratification: 1966)

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Article 1 de la convention. Définition et interdiction de la discrimination dans l’emploi et la profession. Législation et pratique. Depuis un certain nombre d’années, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour interdire de manière explicite toute discrimination, directe ou indirecte, fondée sur la race, le sexe, la couleur, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, dans tous les aspects de l’emploi et la profession, à savoir l’accès à la formation professionnelle, à l’emploi ou aux différentes professions et les conditions d’emploi, et à l’égard de tous les travailleurs nationaux ou étrangers, de toutes les branches d’activité, des secteurs public ou privé, dans l’économie formelle et l’économie informelle. Le gouvernement indique dans son rapport que l’article 2 de la loi no 6 de 2010 sur le travail, qui prévoit que «les dispositions de la présente loi s’appliqueront à tous les travailleurs du secteur privé», et l’article 6 de cette même loi, qui prévoit que «sans préjudice de tous avantages ou droits plus favorables qui seraient accordés ou conférés aux travailleurs par des contrats individuels ou collectifs ou des règlements spéciaux appliqués par l’employeur, qui résulteraient de coutumes propres à une profession ou encore, qui auraient un caractère général, les dispositions de la présente loi établissent le niveau minimum des droits des travailleurs», établissent le principe de l’égalité de traitement entre tous les travailleurs. Le gouvernement indique également que l’article 46 prévoit qu’«il ne peut être mis fin au service d’un travailleur sans une justification ou en raison de son activité dans un syndicat ou parce qu’il revendique des droits reconnus par la loi conformément aux dispositions de la présente loi. Il ne peut être mis fin au service d’un travailleur pour des raisons de genre, de race ou de religion». La commission note dûment que l’article 46 interdit la discrimination en matière de licenciement sur la base de trois motifs, à savoir le genre, la race et la religion. À cet égard, la commission rappelle que l’interdiction de la discrimination dans l’emploi et la profession doit s’appliquer à tous les aspects de l’emploi et la profession et doit couvrir les sept motifs de discrimination interdits mentionnés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour: i) interdire expressément dans la loi sur le travail toute discrimination directe ou indirecte fondée sur la race, le sexe, la couleur, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, dans tous les aspects de l’emploi et de la profession, y compris le recrutement, et à l’égard de tous les travailleurs; ii) assurer que, dans la pratique, tous les travailleurs sont protégés contre toutes les formes de discrimination dans l’emploi et la profession. Elle le prie de fournir des informations complètes à cet égard.
Article 1, paragraphe 1 a). Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission rappelle que le gouvernement avait fait référence, dans un précédent rapport, aux articles 191 et 192 du Code pénal qui érigent en infraction passible de sanctions le fait de «déshonorer une autre personne sous la menace, par la force ou par la tromperie». Depuis un certain nombre d’années, la commission souligne qu’en général les poursuites pénales ne suffisent pas pour éliminer le harcèlement sexuel en raison du caractère sensible de cette question, de la charge de la preuve qui est difficile à apporter et du fait que le droit pénal met généralement l’accent sur l’agression sexuelle ou les «actes immoraux», et non sur l’ensemble des comportements constituant le harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamental paragr. 792). Dans son précédent commentaire, elle avait prié par conséquent le gouvernement d’adopter des dispositions: 1) définissant et interdisant le harcèlement sexuel qui s’apparente à un chantage («quid pro quo») ainsi que le harcèlement dû à un environnement de travail hostile; et 2) prévoyant des réparations et des sanctions. En l’absence d’information nouvelle sur ces points, la commission rappelle une nouvelle fois, d’une part, que les dispositions en question du Code pénal ne permettent pas de couvrir tout l’éventail des comportements qui constituent un harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession et, d’autre part, que les poursuites pénales ne suffisent pas en général pour éliminer le harcèlement sexuel dans ces domaines spécifiques. La commission rappelle également que le harcèlement sexuel est une forme grave de discrimination fondée sur le sexe, en même temps qu’une violation des droits de l’être humain, et qu’il impose de prendre des mesures efficaces à des fins de prévention et d’élimination, ces mesures devant viser aussi bien le harcèlement qui s’apparente au chantage sexuel (quid pro quo) que le harcèlement qui résulte d’un environnement de travail hostile (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 789). La commission note en outre que, dans ses observations finales de 2017, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) se déclarait préoccupé par l’absence de dispositions légales incriminant le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et recommandait de modifier la loi sur le travail dans le secteur privé, la loi sur la fonction publique et la loi sur les forces de police afin que le harcèlement sexuel sur le lieu de travail puisse être poursuivi pénalement et que des voies de recours soient ouvertes aux victimes de harcèlement (CEDAW/C/KWT/CO/5, paragr. 36 et 37). Compte tenu de ce qui précède, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que la loi sur le travail comporte une définition complète et exprime une interdiction expresse du harcèlement sexuel sous ses deux formes (celle qui s’apparente à un chantage sexuel comme celle qui résulte d’un environnement de travail hostile). Elle le prie également: i) de prendre des mesures de prévention, notamment à travers des campagnes de sensibilisation à la question du harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession et à la stigmatisation sociale qui découle de tels agissements, auprès des travailleurs, des employeurs et de leurs organisations respectives, et des autorités chargées de contrôler l’application de la loi, sans omettre de prévoir des procédures, des réparations et des sanctions; et ii) de fournir des informations sur le nombre, la nature et l’issue de tous cas de harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession traités par l’inspection du travail, les tribunaux ou toute autre autorité compétente.
Travailleurs migrants. Système de parrainage. La commission a noté précédemment que le système de parrainage (kafala) ayant cours dans le pays, système selon lequel les travailleurs migrants se trouvent dans une situation qui les lie à leur employeur sur le plan légal du fait qu’il est leur garant pour l’obtention d’un visa, n’a toujours pas été aboli. Elle avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures concrètement prises ou envisagées afin que ce système de parrainage soit revu. Elle note que le rapport du gouvernement ne contient pas d’information sur ce point. À cet égard, elle note que, dans ses observations finales de 2017, la CEDAW a recommandé que le gouvernement «poursuive les efforts visant à abolir complètement le système kafala (de parrainage)» (CEDAW/C/K WT/CO/5, paragr. 37). La commission tient à souligner qu’elle considère qu’un système d’emploi de travailleurs migrants, qui place ces travailleurs dans une situation particulièrement vulnérable et offre aux employeurs la possibilité d’exercer un pouvoir disproportionné à leur encontre, peut donner lieu à une discrimination fondée sur les motifs prévus par la convention, y compris la race, la couleur, l’ascendance nationale ou le sexe (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 779). La commission prie le gouvernement de prendre des mesures proactives pour assurer à tous les travailleurs migrants, y compris les travailleuses migrantes, une protection effective contre la discrimination fondée sur tous les motifs énumérés par la convention, à savoir la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’origine sociale et l’ascendance nationale. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations statistiques sur le nombre des travailleurs et des travailleuses qui ont déposé des plaintes contre leur employeur ou leur parrain pour des motifs de discrimination et d’abus, et sur les suites de ces plaintes, en indiquant les cas dans lesquels les intéressé(e)s ont demandé et ont obtenu un changement d’emploi.
Personnes apatrides ou résidents sans nationalité (Bidouns). Dans ses précédents commentaires, la commission avait demandé au gouvernement de fournir: 1) des informations sur les résultats de la mise en œuvre de la feuille de route adoptée par le Conseil des ministres (résolution no 1612/2010); 2) des informations sur les mesures prises pour que toutes les personnes apatrides ou résidents sans nationalité (Bidouns) soient protégées, en matière d’emploi et de profession (y compris en matière d’accès à l’emploi ou à différentes professions), contre toute discrimination fondée sur l’un quelconque des motifs énumérés dans la convention; et 3) des statistiques sur le nombre des Bidouns qui vivent dans le pays et sur leur situation en matière d’emploi. Le gouvernement indique que le système central chargé des personnes apatrides ou résidents sans nationalité au sens de la loi no 68 de 2015 – personnes auxquelles le gouvernement se réfère par les termes «résidents illégaux» – s’emploie activement à la mise en œuvre de la feuille de route, en plus des services qu’il assure aux les personnes apatrides sur les plans civil, culturel et social. Le gouvernement ajoute qu’en vertu de la décision no 309 de 2011 du Conseil des ministres, le système central assure de nombreux services au bénéfice des «résidents illégaux», notamment l’éducation gratuite, des soins médicaux gratuits et la délivrance de tous documents officiels (certificats de naissance et certificats de décès, contrats de mariage et contrats de divorce et certificats d’authenticité). Le système central collabore avec l’administration (Diwan), l’Autorité publique, la Fédération des sociétés coopératives et les Autorités portuaires du Koweït. Cette collaboration permet de trouver des emplois pour les personnes apatrides répondant aux besoins du marché du travail. Selon le gouvernement, en 2018, 324 personnes apatrides ont été engagées dans des organismes gouvernementaux et 600 autres ont été engagées par la Société des pétroles du Koweït et ses entreprises. En outre, grâce à la collaboration du ministère de la Défense, certaines de ces personnes ont été engagées dans des organismes militaires. La commission prend note des mesures prises par le gouvernement pour procurer des emplois aux personnes apatrides et résidents sans nationalité mais elle souligne que le gouvernement n’indique pas comment ces personnes sont protégées contre la discrimination dans l’emploi et la profession. La commission prie le gouvernement: i) de prendre les mesures nécessaires pour assurer que, dans la pratique, toutes les personnes apatrides ou résidents sans nationalité (Bidouns) sont protégées contre toute discrimination dans l’emploi et la profession fondée sur l’un quelconque des motifs prévus par la convention, en ce qui concerne l’accès à l’éducation, à la formation professionnelle et à l’emploi; ii) de donner des informations plus détaillées sur les résultats de la mise en œuvre de la feuille de route adoptée par le Conseil des ministres (résolution no 1612/2010).
Observation générale de 2018. En ce qui concerne les points susmentionnés, et de manière plus générale, La commission souhaiterait appeler l’attention du gouvernement sur son observation générale sur la discrimination fondée sur la race, la couleur et l’ascendance nationale, adoptée en 2018. Dans cette observation générale, la commission note avec préoccupation que les attitudes discriminatoires et les stéréotypes fondés sur la race, la couleur ou l’ascendance nationale des travailleurs et travailleuses continuent d’entraver leur accès à l’enseignement, aux programmes de formation professionnelle et leur accès à un plus large éventail d’opportunités d’emplois, ce qui entraîne une ségrégation professionnelle persistante et des rémunérations inférieures pour un travail de valeur égale. La commission estime donc qu’il est nécessaire d’adopter une approche globale et coordonnée pour s’attaquer aux barrières et obstacles auxquels se heurtent les personnes dans l’emploi et la profession en raison de leur race, de leur couleur ou de leur ascendance nationale, et pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement pour tous. Une telle approche devrait comprendre l’adoption de mesures convergentes visant à combler les lacunes en matière d’éducation, de formation et de compétences, à assurer une orientation professionnelle impartiale, à reconnaître et à valider les qualifications obtenues à l’étranger, et à valoriser et reconnaître les connaissances et compétences traditionnelles qui peuvent être utiles pour accéder à un emploi et progresser dans la vie active et pour exercer une profession. La commission rappelle également que, pour être efficaces, ces mesures doivent comprendre des actions concrètes, telles que l’adoption de législations, de politiques, de programmes, de mécanismes, de processus participatifs, de procédures de recours et de réparation, visant à combattre les préjugés et les stéréotypes et à promouvoir la compréhension mutuelle et la tolérance entre toutes les composantes de la population.
La commission attire l’attention du gouvernement sur son observation générale de 2018 et le prie de fournir des informations en réponse aux questions posées dans ladite observation.
Article 2. Politique nationale d’égalité. En l’absence d’information sur les progrès accomplis dans l’adoption d’une politique nationale d’égalité, la commission rappelle que: 1) l’obligation première à laquelle souscrivent les États qui ratifient la convention est de formuler et appliquer une politique nationale visant à promouvoir, par des méthodes adaptées aux circonstances et aux usages nationaux, l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession, afin d’éliminer toute discrimination en cette matière; et 2) la mise en œuvre d’une politique nationale d’égalité suppose l’adoption d’un éventail de mesures spécifiques qui combine généralement mesures législatives et administratives, conventions collectives, politiques publiques, mesures positives, mécanismes de règlement des différends, mécanismes de contrôle, organismes spécialisés, programmes pratiques et activités de sensibilisation (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 841 et 848). La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour élaborer, en collaboration avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, et adopter une politique nationale d’égalité couvrant tous les travailleurs et visant à éliminer toute discrimination dans l’emploi et la profession fondée sur l’un quelconque des motifs prévus par la convention. La commission prie le gouvernement de donner des informations sur les progrès enregistrés à cet égard.
Article 5. Mesures spéciales de protection. Travail interdit aux femmes. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, selon les indications données par le gouvernement, les articles 22 et 23 de la loi sur le travail, qui interdisent - sous réserve de certaines exceptions - l’emploi des femmes de nuit ou à tout travail dangereux, pénible, préjudiciable à la santé ou contraire à la moralité publique, ont pour but de protéger les travailleuses d’une manière générale et, en particulier, les travailleuses enceintes. La commission avait prié le gouvernement de faire en sorte que les mesures spéciales de protection des femmes soient limitées à ce qui est strictement nécessaire pour protéger la maternité ou que ces mesures soient fondées sur des évaluations des risques pour la sécurité et la santé des personnes intéressées et qu’elles ne constituent pas un obstacle à l’accès à l’emploi. Le rapport du gouvernement ne contient pas d’informations sur ce point, si ce n’est une référence aux dispositions du chapitre 4 relatives à la protection de la maternité et à la santé et la sécurité au travail. À nouveau, la commission tient à rappeler que les mesures de protection adoptées en faveur des femmes peuvent être globalement classées en deux catégories: d’une part, celles qui visent à protéger la maternité au sens strict et qui relèvent à ce titre de l’article 5 et, d’autre part, celles qui ont pour finalité d’assurer de manière générale la protection des femmes en tant que telles et reposent quant à elles sur des représentations stéréotypées de leurs capacités et de leur rôle social. Ce type de mesures est contraire à la convention et constitue autant d’obstacles au recrutement et à l’emploi des femmes. La commission rappelle également qu’elle considère qu’il importe par ailleurs que les dispositions relatives à la protection des personnes travaillant dans des conditions dangereuses ou difficiles visent à protéger la santé et la sécurité des hommes comme des femmes tout en tenant compte des différences qui font que chacun d’eux est exposé, en matière de santé, à des risques spécifiques (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 839-840). Par conséquent, ces restrictions, le cas échéant, doivent être justifiées et fondées sur des preuves scientifiques et, lorsqu’elles existent, elles doivent être réexaminées périodiquement à la lumière de l’évolution technologique et du progrès scientifique, afin de déterminer si elles sont encore nécessaires à des fins de protection. La commission prie instamment le gouvernement: i) de revoir son approche concernant les restrictions à l’emploi des femmes à la lumière des principes susmentionnés et de veiller à ce que les mesures de protection adoptées soient limitées à la protection de la maternité au sens strict ou qu’elles soient fondées sur une évaluation des risques pour la sécurité et la santé des personnes intéressées et ne constituent pas un obstacle à l’accès des femmes à l’emploi; ii) de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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